Version PDF

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 32

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 12 avril 2006
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

pages

- Audition du général Gérard Deanaz, commandant de la force de gendarmerie européenne (EUROGENDFOR)

- Information relative à la commission

2

8

Audition du général Gérard Deanaz, commandant de la force de gendarmerie européenne (EUROGENDFOR ou FGE).

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Gérard Deanaz, commandant de la force de gendarmerie européenne (FGE).

Le président Guy Teissier a accueilli le général Gérard Deanaz en rappelant que la force de gendarmerie européenne (FGE) avait été créée à l'initiative de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, pour répondre aux besoins suscités par l'évolution des crises internationales en matière de maintien de l'ordre. L'expérience des Balkans notamment a mis en évidence la nécessité de disposer d'une force spécifiquement dédiée au maintien de l'ordre qui, intervenant après l'action militaire proprement dite, correspond mieux aux missions à accomplir et pour lesquelles des forces de gendarmerie sont plus particulièrement compétentes. La FGE est aujourd'hui constituée ; elle comprend des forces hollandaises, portugaises, italiennes, espagnoles et françaises. Le président a souhaité des précisions sur le fonctionnement de la force de gendarmerie européenne, ses échelons de commandement, la langue de travail employée par ses personnels et les modalités d'implantation de l'état-major à Vicenza. Il s'est interrogé sur la nature des missions préparées, voire réalisées par la force de gendarmerie européenne dans le cadre des institutions internationales comme l'OTAN, l'ONU, l'OSCE ou tout autre coalition ad hoc.

Le général Gérard Deanaz a confirmé en préambule que la mise en place de la force de gendarmerie européenne était une initiative personnelle de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, formulée à l'automne 2003 à Rome dans le cadre d'une réunion des ministres de la défense de l'Union européenne. Son texte fondateur est la déclaration d'intention signée le 17 septembre 2004 à Nordwijk aux Pays-Bas par les ministres de la défense des cinq pays fondateurs : Espagne, France, Italie, Pays-Bas et Portugal. Même si les références aux différents sommets européens, comme ceux de Cologne, Helsinki, Santa Maria de Feira ou Nice sont nombreuses, cette initiative multinationale ne constitue pas un outil de l'Union européenne . La force de gendarmerie européenne est, toutefois, prioritairement mise à disposition de l'Union européenne puis d'organisations internationales comme l'ONU, l'OSCE, l'OTAN, voire l'Unité africaine ou tout autre coalition internationale ad hoc. C'est ainsi qu'elle a été présentée au comité de gestion civile des crises de l'Union, à son comité militaire ainsi qu'à son comité politique et de sécurité au sein duquel les 25 pays membres sont représentés.

Le sommet de Nice de décembre 2000 avait pris en compte officiellement les notions de forces de police à statut civil et de forces de police à statut militaire. Les cinq forces de police à statut militaire composant la FGE sont la garde civile espagnole (75 000 personnels), la gendarmerie nationale française (100 000 personnels), les carabiniers italiens (112 000 personnels), la maréchaussée royale hollandaise (6 500 personnels) et la garde nationale républicaine portugaise (27 000 personnels). Elles sont organisées selon des structures nationales variables d'un pays à l'autre et leurs personnels ne sont pas tous soumis aux mêmes règles. C'est ainsi que les militaires de la gendarmerie nationale française sont les seuls à ne pas être contraints par une limite horaire de travail, à la différence de ceux des autres forces, ce qui constitue un avantage de cette arme par rapport à ses homologues étrangères au sein de la FGE.

Toutes les forces composant la FGE ont un caractère militaire marqué. Elles ont vocation à agir sur tout le spectre d'une mission d'imposition ou de maintien de la paix soit sous commandement militaire dans un premier temps, au plus fort de la crise, soit, par la suite, sous la direction d'une autorité civile lorsque la situation permet de transférer certaines missions de l'autorité militaire vers l'autorité civile.

La création de la FGE vise à combler le manque opérationnel constaté entre le moment où des forces armées entrent sur un théâtre d'opérations et le moment où des forces de police peuvent y remplir normalement leur mission. La FGE est capable, dans un environnement non sécurisé, d'intervenir et de remplir la plupart des missions de police en substitution d'une force de police locale inexistante ou défaillante.

La chaîne de commandement de la FGE est organisée en trois niveaux :

- le comité interministériel de haut niveau (CIMIN), composé par les représentants des différents ministères compétents des cinq Etats, est chargé de la direction politico-stratégique de la FGE ; quelle que soit l'importance de leur représentation respective, tous les pays membres sont placés sur un pied d'égalité.

- le commandant de la FGE et son état-major permanent, multinational, modulable et projetable, qui compte 30 officiers et sous-officiers supérieurs, cet effectif pouvant être porté à 50 gendarmes sur décision du CIMIN ;

- la force déployée sur le terrain est composée d'unités ordinairement en activité dans chacun des Etats membre. Ces forces sont appelées, dans le cadre de la FGE, en tant que de besoin.

La capacité initiale de réaction rapide est de 800 gendarmes mobilisables en moins de 30 jours, l'effectif maximum de la force pouvant être porté jusqu'à 2 300 gendarmes. Dans les faits, ces capacités de mobilisation sont inférieures aux moyens réellement disponibles puisque aujourd'hui plus de 3 000 gendarmes sont présents sur différents théâtres d'opérations.

Les forces sont organisées en unités de police intégrées comprenant chacune 100 à 120 gendarmes, capables de remplir les missions que la gendarmerie et la police assurent sur le territoire français, mais dans un environnement non sécurisé. La FGE n'est pas une police militaire (prévôté) chargée d'accompagner les autres armées afin d'effectuer des opérations de police judiciaire aux armées. Elle est chargée de la protection des personnes et des biens, de l'ordre public quotidien, des enquêtes de police judiciaire, de la lutte contre le crime organisé et du contrôle des frontières. Un tel éventail de missions peut sembler ambitieux, mais, à titre d'exemple, tant la garde civile espagnole que les carabiniers italiens assurent la lutte contre le crime organisé ; de même, la garde civile espagnole et la garde nationale républicaine portugaise sont chargées de contrôler la frontière sud de l'Union, particulièrement au niveau du détroit de Gibraltar. Par ailleurs, ces deux forces, espagnole et portugaise, détiennent, depuis le début des années 1990, des compétences en matière de contrôle fiscal et douanier. Ainsi, la FGE peut, dès le début d'une crise, couvrir un vaste spectre de missions qu'elle est la seule à pouvoir assumer.

La FGE est une force robuste, capable d'intervenir dans un environnement non stabilisé, qui peut apporter des renseignements aux armées et participer à la lutte contre des activités illégales et à l'arrestation de criminels en vue de leur traduction en justice. Cette tâche est essentielle sur certains théâtres d'opération, comme les Balkans. A titre d'exemple, la MSU (Multinational Specialized Unit), unité spéciale des carabiniers italiens sous commandement militaire, effectue un travail de renseignement, mais au sens militaire, et de ce fait, elle n'est pas nécessairement en mesure d'utiliser ces renseignements comme preuves dans le cadre de poursuites judicaires internationales ou nationales, ces renseignements n'étant pas inscrits dans le cadre de procédures judiciaires ou pouvant être couverts par des règles de confidentialité. Sur certains théâtres d'opération, des criminels ont été interceptés avec des armes, ou encore de la drogue ou des explosifs, mais ont dû être relâchés. Il convient donc de progresser dans ce domaine.

La lutte contre la criminalité organisée sur des théâtres d'opérations extérieures tels que les Balkans permet de contrôler en amont certaines filières réalisant des trafics d'êtres humains, d'armes, d'argent, de drogue et, partant, de mieux protéger les territoires et les populations. Il importe de s'adapter face à l'évolution de la criminalité. Le Parlement français a d'ailleurs pris en compte cet impératif en modifiant le code de procédure pénale, ce qui permet aux forces de gendarmerie d'exercer leurs compétences sur l'ensemble d'un département voire, selon les cas, sur l'ensemble d'une zone relevant d'une cour d'appel ou à un niveau interrégional.

Les principales étapes de la mise en place de la FGE au cours de l'année 2005 ont été la nomination de son commandant par le CIMIN, le 21 janvier, puis l'arrivée fin mars de trente officiers et sous-officiers. Le budget de la FGE pour 2006 a été arrêté à la fin du mois d'avril, tandis qu'ont été rédigés parallèlement plusieurs documents de fond, notamment le concept d'opération de la FGE et l'ordre d'opérations, permettant ensuite de mener un premier exercice de terrain à Saint-Astier du 14 au 17 juin 2005, en présence de nombreux observateurs ; le ministre de la défense française a présidé la phase finale de l'exercice. La préparation d'un deuxième exercice est actuellement en cours ; il sera réalisé au sud de Madrid, du 17 au 27 avril prochains ; de nombreux invités venus de l'Union européenne, de l'OTAN et des Nations Unies y assisteront. Un premier audit financier du budget de 2005 vient d'être effectué, tandis que se prépare le budget pour 2007. La FGE devrait être déclarée pleinement opérationnelle lors de la prochaine réunion du CIMIN, en juin prochain.

Le président Guy Teissier a indiqué avoir constaté lors de ses déplacements en Europe, et notamment en Pologne - qui dispose d'une police militaire évoluant vers une force de type gendarmerie - que la gendarmerie française était souvent citée en exemple pour son savoir-faire et son professionnalisme. La FGE a-t-elle vocation à accueillir de nouvelles forces de police à statut militaire ? Est-ce possible ? Est-ce souhaitable ?

Le général Gérard Deanaz a précisé que la FGE n'était pas un club fermé et statique. Les forces de police à statut militaire des pays membres de l'Union européenne qui assurent la plénitude des missions de police sur leur territoire national peuvent en faire partie. La gendarmerie polonaise est aujourd'hui une police militaire qui évolue, des projets de loi étant à l'étude afin de lui conférer davantage de missions, notamment dans le domaine judiciaire. La gendarmerie nationale française coopère d'ailleurs avec elle pour l'accompagner dans cette évolution. Par ailleurs, la Roumanie dispose d'une véritable gendarmerie ; dissoute en 1949, cette dernière a été remise sur pied en 1989 et a acquis depuis toutes les caractéristiques d'une force de gendarmerie en exécutant des missions d'ordre public et de police judiciaire. Ce pays n'étant pas encore membre de l'Union européenne, la FGE peut proposer une étape transitoire avec un statut d'observateur. La Pologne et la Roumanie ont actuellement demandé informellement au CIMIN ce statut. D'autres forces pourraient rejoindre la FGE, par exemple celles d'Ukraine qui constituent une force militaire du ministère de l'intérieur et s'avèrent proche de la gendarmerie mobile française. Ces forces ont vocation à se diversifier et se reconvertir afin de devenir des forces de sécurité publique et la FGE devrait sous peu leur proposer des orientations leur permettant d'évoluer en ce sens.

D'autres pays manifestent leur intérêt pour l'organisation et le fonctionnement de la gendarmerie. Des missions de différents pays, qui envisagent la mise en place de forces de même type sur leur territoire, rendent visite aux cinq forces de gendarmerie faisant partie de la FGE pour recueillir des informations.

Lorsqu'une force de police est capable d'intervenir sous le commandement de la FGE, voire temporairement sous commandement militaire, dans un environnement non sécurisé, elle peut participer à une opération de la FGE. Lors d'une conférence à Bruxelles portant sur les capacités de déploiement rapide, en mars dernier, cinq forces de police à statut civil se sont déclarées prêtes à agir momentanément sous un commandement militaire. Néanmoins, les personnels de ces forces civiles sont soumis à un statut différent, et se pose la question de la constitution d'unités solides, en mesure d'intervenir dans un environnement non sécurisé.

M. Jean-Yves Hugon a relevé que deux grands pays européens, l'Allemagne et la Royaume-Uni, ne participent pas à la FGE. Des contacts ont-ils été pris avec ces deux pays ? Il a ensuite estimé que le temps de déploiement de la FGE, fixé à trente jours, était relativement long.

Le général Gérard Deanaz a indiqué que ce délai de trente jours a été défini par la déclaration d'intention initiale, et correspond à un délai fixé à l'échelon politique au Conseil de l'Europe ; le commandement de la FGE a toutefois conscience que ce délai est relativement important. Il s'agit, de fait, d'une limite maximale, et dans certains cas le déploiement devrait être plus rapide afin que la FGE soit en mesure d'intervenir de manière coordonnée avec les autres forces projetées.

Le général a signalé avoir rencontré des responsables du comité pour la gestion civile des crises de l'Union européenne venant d'Autriche, d'Allemagne et de Finlande. Ces pays ne disposent pas de forces de police à statut militaire. L'Autriche a réalisé la fusion de ses forces de police et de gendarmerie. En Allemagne, les forces fédérales ne sont pas sous statut militaire, mais elles agissent selon les mêmes modalités que la gendarmerie française et disposent même de meilleurs moyens matériels, notamment dans le domaine des hélicoptères.

Il a par ailleurs indiqué que les Britanniques considèrent, à tort, la FGE plutôt comme une force de police militaire et souhaitent continuer à s'appuyer sur leur propre expérience du maintien de l'ordre en Irlande du Nord. L'approche américaine semble plus pragmatique, même si les quatre visites de la FGE par des délégations américaines ne sont peut être pas exemptes d'arrière-pensées en vue d'un emploi éventuel sur un certain théâtre d'opération. De ce point de vue, les interlocuteurs américains sont conscients, d'une part des conséquences terribles des erreurs commises avec la destruction des forces de police et des forces de gendarmerie irakiennes et, d'autre part, de l'incapacité des forces armées américaines de passer d'une mission de guerre à une mission de sécurisation.

M. Jean-Claude Viollet a indiqué qu'au-delà du problème d'emploi de personnels bénéficiant de statuts différents, la FGE devait sans doute aussi faire face à la diversité des cadres juridiques d'emploi des forces, ce qui peut constituer un handicap certain pour l'accomplissement de ses missions. La FGE peut-elle favoriser une dynamique d'harmonisation des conceptions dans ce domaine ? De même, elle devra mettre en œuvre des matériels divers, ce qui pose la question de leur interopérabilité. Certes, la France n'a guère de leçon à donner en la matière si l'on considère, par exemple, la diversité des matériels de transmissions dont sont dotées ses forces de sécurité. Peut-on cependant espérer que la FGE permette l'amorce d'une rationalisation des procédures d'acquisition, afin de réaliser des économies et de disposer de matériels interopérables ?

Le général Gérard Deanaz a précisé que la FGE n'a vocation à intervenir qu'à la demande d'une organisation internationale et sous mandat de l'ONU. Elle appliquera alors les dispositions législatives internationales ou nationales appropriées permettant de développer ses missions. Il reste que cette question est délicate, notamment en ce qui concerne les procédures judiciaires ou de police. Au demeurant, la situation de l'Union européenne n'est pas moins complexe que celle que connaissent les Etats-Unis, où vingt agences se partagent la mission d'assurer la sécurité. Dès cette année, les Etats participant à la FGE devront régler les problèmes urgents que constituent le système d'information et de communication et, surtout, l'appui logistique. Sur ce dernier point, le système français, qui fait bénéficier la gendarmerie du soutien des armées, tant pour certains matériels que par la mise à disposition de personnels spécialisés, parait efficace. En tout état de cause, il est urgent d'apporter des réponses, puisqu'une première opération de la FGE pourrait intervenir dès l'automne prochain. Seules la France et l'Italie ont aujourd'hui la capacité à fournir les matériels de communication et la logistique nécessaires. Pour les transmissions, il est envisageable d'utiliser des matériels dont disposent déjà la police et la gendarmerie, voire des matériels militaires, comme le PR4G. En matière de transport aérien, plusieurs solutions sont possibles, allant de l'utilisation d'appareils militaires à diverses formes de recours à des transporteurs privés. Enfin, en ce qui concerne les engins blindés, la France doit remplacer ses véhicules blindés à roues de la gendarmerie, hors d'âge, tandis que la gendarmerie des Pays-Bas étudie un successeur pour ses M113. L'Italie, l'Espagne et le Portugal, qui ne disposent pas de ce type de matériel, pourraient constituer des clients potentiels. Il y a donc un intérêt réel à jouer la carte d'un programme en commun et l'Union européenne devrait faire preuve de davantage d'ouverture d'esprit dans ce domaine, tant en raison du surcroît d'efficacité et de l'interopérabilité recherchée que des économies potentielles et des enjeux industriels existants.

M. Philippe Folliot a déclaré partager le constat sur les leçons de la crise irakienne et sur la nécessité de disposer de forces de maintien de l'ordre à statut militaire pouvant intervenir en complément de l'action des armées. Cette capacité de projection sur des théâtres extérieurs constitue l'un des arguments décisifs en faveur du maintien du caractère militaire de la gendarmerie, lequel fait l'objet d'un large consensus au sein de la commission de la défense. Il a fait part de ses doutes quant à la volonté réelle de la Roumanie de participer à la FGE, certains indices laissant penser que cet Etat s'engage peut-être dans la voie d'une fusion de ses forces de police et de gendarmerie. En revanche, la gendarmerie estonienne est susceptible de se porter candidate. En ce qui concerne les moyens consacrés à la FGE, la France a fait le choix d'y affecter l'intégralité de ses escadrons de gendarmerie mobile, appelés à tour de rôle en fonction des besoins. Le choix d'une plus grande spécialisation, reposant sur un nombre limité d'escadrons dédiés, aurait-il été davantage pertinent ? Par ailleurs, quelles sont les formations spécifiques, notamment en matière linguistique, qui sont données en vue du bon accomplissement de la mission ? Après avoir fait état de l'importance du travail de collecte de renseignements sur les réseaux islamistes dans les Balkans, il a souhaité savoir si l'information circulait aussi bien qu'il y paraissait entre les différents acteurs du renseignement.

Le général Gérard Deanaz a indiqué que la Roumanie avait entamé des démarches afin de bénéficier du statut d'observateur au sein de la FGE et que des contacts avaient été noués très récemment avec l'Estonie.

Le président Guy Teissier a souligné que la gendarmerie estonienne, de petite taille, subissait encore l'héritage de son statut de force de répression datant de l'ère soviétique. Si des réformes sont en cours, les forces de ce pays ne semblent pas encore en mesure d'intégrer la FGE.

Le général Gérard Deanaz a considéré que le principe de rotation de l'ensemble des escadrons choisi par la France constituait une bonne solution. A la différence des Italiens, qui ont choisi de spécialiser les forces affectées à la FGE, ce système permet de maintenir une grande diversité de missions des escadrons de gendarmerie mobile. Cela bénéficie à leur niveau de formation et offre une bien plus grande souplesse et rapidité d'emploi, liées en partie à l'expérience acquise par la présence outre-mer. Les autres forces de gendarmerie restent marquées par des procédures otaniennes souvent lourdes.

Malgré des efforts réels en matière de formation linguistique, notamment avec la mise en place de l'école de Rochefort, les Français restent encore trop largement des amateurs dans ce domaine, tout particulièrement en ce qui concerne l'anglais, alors même que cette langue prévaut sur les théâtres d'opérations extérieures et que, si elle n'appartient pas aux cinq langues officielles de la FGE, elle constitue la langue de travail. Les ressortissants des pays de l'Europe du Nord, qui la maîtrisent mieux, arrivent de ce fait à occuper davantage de postes de responsabilités que les Français.

Il existe une bonne complémentarité entre les différents acteurs de la collecte du renseignement, la guerre entre services ou polices n'étant plus de mise. Dans les Balkans, le problème principal réside dans la transformation des renseignements en preuves pouvant être utilisées dans le cadre de procédures judiciaires. Il reste qu'en cas d'emploi réel de la FGE, il conviendra certainement d'opérer des choix entre des intérêts nationaux et des intérêts collectifs.

Après qu'une mission d'évaluation a rendu son rapport sur la situation au Kosovo en février dernier, l'Union européenne a décidé d'envoyer une équipe de planification chargée de préparer le passage sous administration civile, en 2007, de la police et de la justice ; la gestion des moyens militaires devant rester de la compétence de l'OTAN. Cette perspective conduit à s'interroger sur l'emploi des carabiniers italiens membres de la MSU qui accomplissent actuellement un excellent travail de gendarmerie dans le cadre militaire de cette unité. Cependant, l'action des carabiniers semble difficilement transposable dans une organisation civile. Il est donc souhaitable de ne pas conserver, à la différence de la pratique suivie en Bosnie, deux structures concurrentes. Cette orientation est susceptible de dégager de surcroît des économies puisque les missions militaires sont financées par l'Etat intervenant alors que les missions civiles bénéficient de moyens mis à disposition par les instances internationales, notamment l'Union européenne. Alors que le budget de la FGE est limité (423 000 € en 2006), il paraît souhaitable de rechercher des financements provenant de l'Union européenne ; les procédures de l'Union, si elles sont complexes, ne constituent toutefois pas un obstacle insurmontable.

*

* *

Information relative à la commission

La commission a nommé les membres de la mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense pour l'exercice 2006 : MM. Guy Teissier, président, Jean-Louis Bernard, Jean-Michel Boucheron, Antoine Carré, Charles Cova, Philippe Folliot, Yves Fromion, René Galy-Dejean, Joël Hart, Marc Joulaud, Jean Michel, Jérôme Rivière et Philippe Vitel.

--____--


© Assemblée nationale