COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 54

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 26 mai 2004
(Séance de 11 heures)

Présidence de M. Michel Bouvard, Vice-Président

SOMMAIRE

 

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- Examen d'un rapport d'information sur les biocarburants (M. Alain Marleix, Rapporteur spécial)

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- Communication de M. Jean-Louis Dumont, Rapporteur spécial des Affaires européennes, sur les fonds structurels européens

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Après que M. Michel Bouvard, Président, ait annoncé que les lettres de cadrage ont été transmises par le Gouvernement, la Commission des finances a examiné un rapport d'information sur les biocarburants, présenté par M. Alain Marleix, Rapporteur spécial des crédits de l'agriculture.

Le Rapporteur spécial a d'abord rappelé que, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2003, l'Assemblée nationale avait adopté, sur proposition de la commission des finances, la défiscalisation du bioéthanol incorporé directement dans le supercarburant. La France, qui a longtemps été un bon élève européen en matière de biocarburants, risque de se faire distancer par ses voisins, et en particulier par l'Espagne où M. Alain Marleix a effectué une mission. Il existe deux types de biocarburants : le bioéthanol, produit à partir de céréales ou de betteraves, qui peut être incorporé dans le supercarburant directement ou après transformation en éthyl-tertio-butyl-éther (ETBE), et les esters méthyliques d'huile végétale (EMHV), issus de la transformation d'oléagineux, et utilisés dans le gazole.

Pour aller à l'essentiel, les biocarburants présentent des qualités environnementales indéniables, contribuent à la réduction de notre dépendance énergétique, ont des effets positifs sur notre balance commerciale, créent des emplois et de la valeur ajoutée, et sont d'une utilisation relativement facile.

Le Rapporteur spécial a ensuite cité quelques éléments chiffrés :

- remplacer un litre d'essence par un litre de bioéthanol permet d'éviter 75 % d'émissions de gaz à effet de serre ; cette économie n'est que de 31 % pour l'ETBE car ce dernier est constitué de plus de 50 % d'isobutène, un produit d'origine fossile, mais elle approche les 80 % avec la substitution d'un litre d'EMHV à un litre de gazole : l'impact très positif des biocarburants sur l'effet de serre est démontré et justifie largement l'intérêt que l'Union européenne leur porte ;

- à partir d'une unité d'énergie fossile, peut être produite seulement 0,9 unité d'énergie sous forme d'essence ou de gazole, contre plus de 2 unités d'énergie sous forme de bioéthanol et 3 d'EMHV : comme les matières premières agricoles peuvent être produites en France et en Europe, notre dépendance énergétique en est réduite ;

- la production de biocarburants permet de réduire les importations de pétrole, mais aussi l'achat à l'étranger de plusieurs de leurs coproduits, comme les tourteaux de soja et la glycérine ;

- la production de biocarburants sur le territoire national permet de valoriser des terres en jachère obligatoire, grâce au mécanisme de « gel industriel » ;

- enfin, plusieurs études ont montré que le développement de la production de biocarburants est un moyen de créer ou de maintenir des emplois en milieu rural, environ 4.000 emplois à l'heure actuelle.

Les biocarburants présentent de plus l'avantage d'être liquides et, au moins en ce qui concerne l'ETBE et l'EMHV, faciles à utiliser dans les transports, et même excellents pour le fonctionnement des moteurs. Les pétroliers soulignent les problèmes que poserait l'utilisation d'éthanol en incorporation directe, tant pour ce qui est de leur distribution que de leur effet sur la qualité des carburants, du fait de leur plus grande volatilité. Il faut néanmoins relativiser ces arguments, surtout mis en avant par des raffineurs, qui n'ont aucun intérêt économique à favoriser cette forme de biocarburants.

Outre ces difficultés techniques, limitées au bioéthanol, c'est surtout le coût des biocarburants, deux à trois fois supérieur à celui des carburants auxquels ils se substituent, qui est présenté, notamment au ministère des finances, comme un obstacle à leur développement. Il est aussi reproché à l'ETBE et à l'éthanol de se substituer au supercarburant, dont la production nationale est excédentaire : dans cette logique, seul le biodiesel devrait être soutenu car il remplace du gazole, dont la France est importatrice. Cet argument n'est guère pertinent car les volumes d'éthanol susceptibles d'être mis à la consommation resteront très faibles en comparaison du déséquilibre qui existe d'ores et déjà.

En tout état de cause, le développement des biocarburants est une nécessité, en particulier au regard des engagements internationaux de la France. Dans le cadre du protocole de Kyoto, la France a souscrit un objectif de réduction de 8 % de ses émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2008-2012 par rapport à leur niveau de 1990. De plus, l'Union européenne a adopté le 8 mai 2003 une directive qui fixe des objectifs de référence pour le développement des biocarburants : le 31 décembre 2005 au plus tard, la part des carburants renouvelables doit atteindre 2 % de la quantité totale, exprimée en contenu énergétique, d'essence et de gazole mis en vente à des fins de transport, part qui doit être portée à 5,75 % au plus tard le 31 décembre 2010. Dans cette perspective, l'Union autorise les États membres à accorder des exonérations ou des taux réduits d'accises aux biocarburants, sous réserve que ces mesures ne conduisent pas à une surcompensation des coûts additionnels liés à leur production.

Les biocarburants ne représentant en France que 0,7 % du volume des carburants utilisés dans le transport et 0,4 % de leur contenu énergétique, notre pays doit franchir une nouvelle étape dans leur développement. Ce développement est rendu possible par ses capacités agricoles. La France consacre aujourd'hui environ 20.000 hectares à la production d'éthanol et 400.000 hectares à l'EMHV. En 2010, les objectifs communautaires de référence appliqués à la France devraient conduire à utiliser pour la production d'éthanol 14 % des surfaces actuellement consacrées à la betterave et 6 % de celles occupées par le blé, ce qui est réalisable, et des surfaces de cultures oléagineuses destinées à l'EMHV cinq fois plus importantes qu'aujourd'hui, ce qui, en revanche, ne semble pas possible : il ne faut pas compter aller très au-delà d'un doublement des surfaces actuelles, mais ce serait déjà un net progrès. La France a donc la capacité d'accroître très fortement sa production de biocarburants, comme l'Union européenne l'y invite. Pour cela, elle doit se doter d'un dispositif d'incitation adapté.

La réduction de taxe intérieure de consommation s'applique à des volumes déterminés de biocarburants produits par des unités agréées. Son coût est estimé à 175 millions d'euros par an. Selon les calculs effectués par l'ADEME et un cabinet d'audit indépendant, ce coût serait très largement compensé par les externalités positives induites par la production et la consommation des biocarburants. Par ailleurs, le coût réel de la défiscalisation pour les finances publiques doit tenir compte des autres recettes liées à leur production et surtout de « l'effet volume » induit par la moindre capacité énergétique d'un volume de biocarburant par rapport au même volume de carburant classique. Les recettes supplémentaires de taxe intérieure et de TVA pourraient couvrir environ le tiers du coût de la défiscalisation qui devrait être accordée pour atteindre l'objectif de 2 % en 2005 et la moitié du coût de la défiscalisation permettant de remplir celui de 5,75 % en 2010.

La direction de la prévision du ministère des finances refuse cette analyse. Globalement, elle considère comme trop élevé le coût des biocarburants, qui priverait la consommation nationale, en 2010, de plus d'un milliard d'euros. Le fait que les objectifs communautaires soient oubliés et les engagements internationaux pas respectés ne semble pas la gêner.

M. Alain Marleix a souligné que la France devait accepter le fait que la réduction des gaz à effet de serre a un coût. Reste à trouver un moyen susceptible de permettre réellement le développement de la production et de la consommation des biocarburants.

La défiscalisation a surtout le mérite de protéger la production nationale grâce au système de l'agrément, accordé à l'issue d'un appel à candidatures. Cette protection est très précieuse, car le marché risque d'être fortement investi par de l'éthanol étranger, en particulier en provenance du Brésil, où son coût de revient est inférieur de moitié au coût en France. L'Union européenne pourrait accorder prochainement aux États du Mercosur des quotas d'importation d'éthanol à droits réduits, ce qui menacerait directement la croissance de cette filière en Europe. Si le choix du maintien du système de la défiscalisation est fait, il faudra fixer un calendrier d'évolution des volumes agréés et forcer le ministère des finances à le respecter. En effet, les filières ont besoin de certitudes pour se développer. Abstraction faite de « l'effet volume », le coût brut serait de 460 millions d'euros en 2005 et, en pratique, ne dépasserait pas 900 millions d'euros en 2010. Une augmentation du taux de la taxe intérieure, à due concurrence, pourrait neutraliser son impact sur les finances publiques.

Une autre solution, qui semble préférable, consisterait à instituer un taux d'incorporation obligatoire qui croîtrait avec la production. Le surcoût serait alors intégré directement dans le prix des carburants, sans avoir à être pris en charge par une défiscalisation. Plus simple et plus efficace, ce mécanisme présente la faiblesse de ne pas protéger le marché national, ce qui posera problème si les barrières douanières sont encore abaissées. Aussi, dans cette hypothèse, il serait indispensable de maintenir une défiscalisation de faible niveau (10 à 15 euros par hectolitre), accordée au seul éthanol.

Pour conclure, M. Alain Marleix a signalé l'adoption, le 24 mai, sur proposition du Rapporteur de la commission des Affaires économiques, d'un amendement au projet de loi d'orientation sur l'énergie qui affirme que « l'État crée, notamment par l'agrément de capacités de production nouvelles, les conditions permettant de porter, conformément à nos engagements européens, à 2 % au 31 décembre 2005 et à 5,75 % au 31 décembre 2010 la part des biocarburants et autres carburants renouvelables dans la teneur énergétique de la quantité totale d'essence et de gazole mise en vente sur le marché national à des fins de transport ». La reprise, dans la loi, des objectifs communautaires de référence constitue un point très positif ; en revanche, le Rapporteur spécial doute que la simple poursuite de la défiscalisation soit une solution efficace pour assurer l'avenir des biocarburants. L'adoption de cette disposition ne doit pas empêcher de poursuivre la réflexion en faveur de l'incorporation obligatoire.

M. Marc Le Fur a estimé que le rapport répondait à une préoccupation d'actualité immédiate, car les récentes initiatives annoncées par M. Pascal Lamy, Commissaire européen chargé du Commerce, visant à ouvrir largement les contingents d'importation de nombreux produits agricoles, parmi lesquels les dérivés du type de l'éthanol, risquent de porter un grand tort au monde agricole. De telles mesures pourraient avoir des conséquences encore plus inquiétantes pour des filières nouvelles telle que celle des biocarburants ; le contingent d'importation remettra en effet en cause la rentabilité des investissements actuels. Ces mesures menacent de casser les initiatives en cours, qui sont d'autant plus rares que l'investissement est encore risqué dans ce domaine.

M. Philippe Auberger a félicité le Rapporteur pour son analyse complète de la question des biocarburants. Il a relevé un point positif : après dix années de controverses, il a enfin été prouvé, et notamment auprès des autorités européennes, que les biocarburants peuvent contribuer à la diminution de l'effet de serre. Cependant, les réponses à deux questions déterminent leur développement. D'abord, leur coût de production : ce coût est-il excessif en France ? Celui-ci entraînera t-il un recours aux importations, qui risquent de ravager cette filière, en démarrage ? Ensuite, les agréments donnés par le Gouvernement, de même que les décisions prises au niveau communautaire sont précaires, alors que l'investissement dans cette filière nécessite une prévisibilité réglementaire et fiscale de dix ou quinze ans. C'est pourquoi il a souhaité que les ambiguïtés actuelles soient levées.

M. Richard Mallié a jugé que le potentiel des biocarburants était vraisemblablement plus prometteur que ne l'établissent les évaluations citées par le Rapporteur, au vu des prix atteints par le baril de pétrole brut, et davantage encore si la valeur du dollar s'appréciait à nouveau par rapport à l'euro, ce qui est prévisible. La réduction possible des émissions de gaz à effet de serre est un aspect intéressant, mais il conviendrait que les Européens ne soient pas seuls à s'en préoccuper, sans quoi ils s'imposeraient des charges économiques supplémentaires que les grands pays émergents ne s'imposent pas.

M. Daniel Garrigue a relevé que les biocarburants constituent un domaine nouveau dans lequel il est facile de progresser vers des objectifs encore mesurés. Des comparaisons de coûts ont-elles été effectuées avec d'autres énergies renouvelables, telle la biomasse ? Les matières premières agricoles utilisées pour produire les biocarburants peuvent-elles être étendues aux productions viticoles actuellement en crise ?

M. Jean-Louis Dumont a souligné que la progression vers les objectifs fixés s'avère au contraire difficile, si l'on considère les faibles progrès obtenus en vingt-cinq ans, depuis l'apparition de cette technologie. On en est à « l'esquisse de tentative » d'industrialisation. Instruit par sa propre expérience du montage d'une filière de production dans l'Est de la France, pour lequel ont dû intervenir des partenaires italien et allemand, il a regretté que la France n'ait encore ni la culture, ni les moyens de la politique de développement des biocarburants. Les industries pétrolières et automobiles n'en veulent d'ailleurs pas. Ce développement appellerait une volonté et des actions au plus haut niveau, ainsi qu'une révolution dans le monde agricole, pour qu'il soit accepté de produire non plus pour l'alimentation humaine mais pour l'industrie. Il a demandé au Rapporteur s'il a constaté l'existence de cette volonté politique, indispensable au développement de la filière.

M. Christian Cabal s'est interrogé sur le perfectionnement de la technologie en ce qui concerne les moteurs automobiles alimentés par le bioéthanol. Les problèmes induits par la présence d'eau, qui provoque des pannes fréquentes, ont-ils trouvé une solution ?

M. Edouard Landrain a demandé combien notre pays comptait de centres de production de biocarburants, leur situation sur le territoire et quels étaient les responsables de cette production.

M. Michel Bouvard, Président, a suggéré de promouvoir une politique plus offensive en direction des flottes captives de transports, telles celles des transports publics urbains, par exemple.

Le Rapporteur spécial a apporté les réponses suivantes :

- les décisions que prendra l'Union européenne en ce qui concerne les contingents d'importation d'éthanol, en provenance du Brésil surtout, seront déterminantes. Les ouvertures proposées par le Commissaire Pascal Lamy auraient un effet dévastateur sur la filière éthanol : la Commission a proposé un contingent d'importation de 12,5 millions d'hectolitres en deux tranches, à comparer avec une production de 4 millions d'hectolitres mis sur le marché dans notre pays en 2003. C'est pourquoi la France, et le Conseil des ministres de l'Union, doivent rejeter une telle mesure ;

- les coûts actuellement assez élevés baisseront avec l'évolution technologique. Des comparaisons ont été faites par l'Institut français du pétrole, reposant sur un prix du baril de brut alors à 25 dollars. Le prix de revient d'un hectolitre de carburant produit à partir de l'éthanol s'établit à 0,38 euro, celui d'un hectolitre d'EMHV à 0,35, et celui des carburants pétroliers à 0,21 dollar. Le surcoût des biocarburants, d'environ 1 à 3, est indiscutable. Cependant, ce surcoût doit être réexaminé dans le contexte actuel où le coût du baril de pétrole s'est élevé à 40 dollars, et peut s'élever davantage à l'avenir. La perspective que représentent les biocarburants apparaît alors beaucoup plus prometteuse ;

- force est de constater que le secteur de la biomasse est très prometteur pour l'avenir. Seuls les biocarburants sont aujourd'hui adaptables à la technique des transports. Les potentialités devraient se développer d'ici à dix ans. En ce qui concerne l'alcool vinique, des actions sont entreprises en Espagne de manière encore limitée. On pourrait également développer l'usage de la canne à sucre, laquelle peut être à la base du bioéthanol ;

- quant à la constitution d'une filière française, la France et l'Allemagne sont, à l'évidence, des pays qui disposent déjà d'une industrie du biodiesel très développée. À l'inverse, peu de progrès ont été enregistrés en matière de bioéthanol. À l'occasion du débat sur l'énergie du 15 avril dernier, à l'Assemblée nationale, le ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie a levé l'objection, alors formulée par M. Jacques Myard, relative aux pertes de recettes de TIPP induites par les mesures destinées à réduire la consommation d'énergie, en soulignant que « tout ne peut pas se réduire aux recettes fiscales » et que « la catastrophe environnementale qui pourrait s'ensuivre coûterait beaucoup plus cher qu'un déficit de recettes de TIPP ». Cette position est, de toute évidence, une attitude de bon sens et doit être transposée aux biocarburants ;

- pour répondre aux préoccupations sur le problème récurrent de l'éthanol, on a pu déplorer un certain nombre de hiatus dans le domaine des transports en commun, notamment au Brésil et au Mexique, lorsque le taux d'éthanol était de 10 % ou plus. Les expérimentations espagnoles dans le réseau d'autobus de Valence apparaissent très positives et ne révèlent pas d'obstacle technique insurmontable ;

- les trois unités françaises de transformation des produits agricoles en éthanol puis en ETBE sont localisées dans les raffineries du Groupe Total : la plus ancienne est celle de Feyzin et, en 1996, ont été construites deux autres unités, près de Dunkerque et près du Havre, dans lesquelles le Groupe Total, les producteurs d'éthanol et les professions betteravières et céréalières ont conjointement investi. Il convient de souligner que ces investissements se sont faits sans recourir à l'aide publique à l'investissement. S'agissant de la production française d'EMHV, elle est répartie en quatre sites : COGNIS à Boussens, NOVAOL à Verdun, ROBBE à Venette, et DICO à Grand-Couronne ;

- l'enjeu des risques liés à la pollution atmosphérique est absolument capital et implique de poursuivre l'effort en matière de développement des biocarburants dans les flottes captives.

M. Michel Bouvard, Président, a souligné que l'État pourrait commencer par contraindre la RATP à certains efforts en ce domaine, notamment sur son réseau d'autobus.

M. Alain Marleix, Rapporteur spécial, a confirmé que la France prenait un retard certain en matière de transports en commun par rapport à l'Espagne, alors même qu'il s'agit d'un pays qui ne dispose ni des mêmes capacités agricoles que la France ni des mêmes zones de jachère. L'Espagne développe une politique beaucoup plus dynamique, à l'image du réseau de transports en commun de Madrid et de Valence. Les États du Middle Ouest américain sont aussi plus avancés dans ce domaine.

M. Philippe Auberger a souligné les difficultés posées par la durée trop brève des agréments.

M. Alain Marleix, Rapporteur spécial, a indiqué que la durée des agréments était limitée par les règles communautaires, lesquelles autorisaient une exonération ou une réduction d'accises accordée pour six ans maximum.

La Commission des finances a alors autorisé, en application de l'article 146 du Règlement, la publication du rapport.

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* *

Puis la Commission des finances a entendu une communication de M. Jean-Louis Dumont, Rapporteur spécial pour les Affaires européennes, sur la programmation et la consommation des fonds structurels, dans le cadre de la politique régionale de l'Union européenne.

Il convient de partir du constat - partagé sur tous les bancs des assemblées lors des deux derniers débats budgétaires sur le prélèvement au profit des Communautés européennes - que les fonds structurels sont insuffisamment consommés. En octobre dernier était craint, unanimement, un « dégagement d'office » effectué par la Commission européenne, en application des règlements communautaires, à savoir que les crédits affectés à la France pourraient être annulés s'ils n'étaient pas consommés dans les deux années suivant la date à laquelle ils auraient dû l'être.

Le Rapporteur spécial a alors entrepris quatre déplacements en régions Lorraine, Auvergne, Nord-Pas-de-Calais et Aquitaine, et a obtenu des informations sur la situation en Alsace. Il n'a malheureusement pas reçu du préfet ni du Conseil régional de Lorraine les informations qu'il avait demandées et qui auraient pu l'éclairer sur les dérives dont il avait par ailleurs eu écho. Cette mission d'information, dans la perspective du prochain débat budgétaire, devrait donc être prolongée. Les réalités régionales sont très différentes les unes des autres. En outre, si les fonds structurels ont connu un démarrage très lent en début de période de programmation (2000-2002), ils ont ensuite été l'objet d'un vigoureux rattrapage - voire d'un emballement - qui a permis d'éviter, dans une très large mesure, le dégagement d'office. Les conditions de ce rattrapage montrent néanmoins qu'il convient de rester vigilant, jusqu'à la fin de la période de programmation.

Sur le FEDER on constate que toutes les régions ont échappé au dégagement d'office au 31 décembre 2003 ; cela s'est fait souvent d'extrême justesse, au prix d'une « marche forcée » dans les derniers mois de l'année 2003. Si la situation du FSE s'est améliorée en 2003, 9 régions « objectif 2 » (34 millions d'euros) et 3 régions « objectif 1 » (57 millions d'euros) n'ont pas échappé au dégagement d'office au 31 décembre 2003. Les raisons communément invoquées sont la lourdeur des procédures, la concurrence entre les projets relatifs à l'emploi relevant des objectifs 2 et 3, l'absence de culture de projet du ministère du Travail et ses désaccords initiaux avec la Commission européenne. On a pu évoquer également le fait que la part du FSE a été attribuée par l'État et lui seul, en début de programmation, et qu'elle a été surévaluée par rapport aux besoins.

La France s'était caractérisée, en début de programmation, par une inutile lourdeur des procédures nationales, qui s'ajoutait à la complexité des procédures communautaires. Le faible taux d'avancement des projets a poussé le Gouvernement à prendre, durant l'été 2002, des mesures de simplification des procédures, de renforcement de l'appui aux projets et de plus grande association des régions, afin d'éviter l'application de la règle du dégagement d'office. Ainsi sont devenus éligibles des projets déjà engagés - voire terminés !

Dans les quatre régions visitées, la grande mobilisation des services déconcentrés de l'État et des collectivités locales est indéniable. Les SGAR (Secrétaires généraux pour les affaires régionales) ont mis en place des cellules « Europe » qui ont animé des équipes bien formées qui ont apporté leur concours technique et juridique aux porteurs de projets. On a pu parler d'une véritable « révolution culturelle » du réseau du Trésor public, comme par exemple pour les services du TPG de la Meuse, dont l'implication personnelle mérite d'être saluée ; des personnels traditionnellement amenés à faire du contrôle tatillon de la dépense publique ont été conduits à faire de la promotion qualitative de la dépense des fonds européens. Chaque dossier est examiné simultanément du point de vue financier, économique et juridique, ce qui évite le double visa et leur éventuelle contradiction. Le réseau des contrôleurs du Trésor a même apporté un soutien capital aux collectivités locales, en les aidant à monter des projets qui demandent une ingénierie administrative dont tous ne disposaient pas. Le résultat, remarquable, a été un raccourcissement des délais d'instruction et de paiement.

Les responsables sur le terrain critiquent souvent la mauvaise connaissance, par la DATAR, des réalités régionales et économiques et ses interventions technocratiques sont souvent vécues comme un allongement inutile des délais. Pour se défendre, la DATAR fait valoir que son intervention est nécessaire à une bonne cohérence des projets.

L'élan donné a été tel que de nombreuses régions doivent maintenant changer de méthode de programmation. Alors que jusqu'au 31 décembre de l'an dernier on acceptait quasiment tous les projets présentés dans les formes pour permettre une programmation suffisante, la situation s'est complètement retournée au début de cette année. Les dotations budgétaires s'approchent de leur saturation en termes de programmation et les régions en sont maintenant à refuser certains projets, en fonction de leur intérêt. Le taux de financement éligible baisse, pour un même projet déposé maintenant, le taux de prise en charge passe par exemple de 50 % à 30 % ou 20 %, ce qui comporte des conséquences dramatiques pour les porteurs de projets. Les paiements restent encore très en retard et dépendent encore beaucoup de la vitesse de remontée des factures, qui se fait souvent en fin de chantier. L'accélération de la programmation en 2003 s'est souvent faite au détriment de la qualité des projets, sans attendre le bouclage définitif des dossiers de financement. Ainsi les services de la préfecture d'Aquitaine entreprennent actuellement une actualisation de tous les projets en cours, en prenant en compte leur montants réels, et non les montants prévus à l'origine. Des marges de manoeuvre financières, qui ne devraient cependant pas dépasser 10 % du montant des crédits, pourraient ainsi être dégagées. La vigilance reste donc indispensable jusqu'à la fin de la période, tant vis-à-vis de la programmation que vis-à-vis des paiements.

Le présent cycle de programmation est riche d'enseignements et de questions pour l'après-2006. La recherche d'une meilleure programmation des fonds structurels passe par une programmation moins chaotique, plus sélective et de qualité. De nombreux gestionnaires en région ont critiqué les effets néfastes de financements croisés trop nombreux. Ils ont tous insisté sur la nécessité, pour les collectivités locales et les porteurs de projets, d'une ingénierie financière et administrative importante. Des personnels doivent être spécialisés et formés de façon adéquate, à tous les niveaux. Les carences en ingénierie sont surtout patentes dans les zones rurales, ainsi que dans les petites collectivités locales, qui sont ainsi défavorisées alors qu'elles sont peut-être les plus nécessiteuses.

Le débat n'a pas été tranché entre les partisans d'une diversification de l'usage des fonds structurels et les promoteurs de grands projets structurants pour le territoire. Tout le monde s'accorde néanmoins à rejeter le saupoudrage consistant à accorder des fonds à chaque collectivité locale pour des microprojets, hors LEADER+.

Les indicateurs de la DATAR, issus de la base PRESAGE, sont en grande partie inadaptés pour rendre compte des réalités du terrain, notamment par l'absence de prise en compte des grands projets structurants qui prennent du temps à se mettre en place. L'affectation faite de la réserve de performance (4 % des montants), sur la base de ces indicateurs, a été vécue comme particulièrement injuste par les régions où la dynamique et la qualité de consommation n'ont pas été prises en compte.

Les fonds européens doivent être décentralisés de façon pérenne, et c'est le sens d'un amendement à l'article 35 du projet de loi sur les responsabilités locales. La logique d'une meilleure programmation des fonds structurels européens passe par cette décentralisation, qui doit être mise en place de façon flexible pour s'adapter aux particularités locales. Ainsi la région Nord-Pas-de-Calais n'a pas demandé de délégation de compétence, ses responsables au plus haut niveau ayant estimé qu'ils ne pouvaient pas se passer du réseau des fonctionnaires de l'État pour la mise en place des projets. Faut-il y voir le reflet d'une « culture nordiste » reposant sur un grand respect de l'État, garant de l'intérêt et de la solidarité nationaux ? A l'opposé, en Aquitaine, les responsables du Conseil régional ont exprimé une forte revendication de prise en main totale de la gestion des fonds structurels ; le refus de l'État de déléguer ses compétences dans le cadre de l'actuelle programmation a été vécu comme une grande frustration, et cette région était sans doute prête à jouer un rôle direct, actif et efficace. L'expérimentation de décentralisation totale en Alsace est vécue unanimement comme un succès, malgré le « divorce » avec le réseau du Trésor public et grâce à l'action de la Caisse des dépôts, comme organisme délégué de paiement.

La région Auvergne présente une particularité : le Conseil régional s'est vu accorder une « délégation de compétence » pour 70 % des crédits du FEDER et 100 % de ceux du FSE. L'État, avec son réseau du Trésor public, garde la charge du paiement et du contrôle des fonds. La réussite de cette nouvelle coopération État-Région est sans doute due à la qualité du dialogue qui a prévalu à tous les niveaux, notamment au sommet avec un accord entre le Premier ministre et l'ancien président du Conseil régional.

Les quatre régions visitées ont toutes montré la nécessité d'un partenariat fort entre l'État et la région dans la définition et la gestion des fonds structurels, quel que soit le niveau de centralisation. Les expérimentations de décentralisation ont également montré la nécessité de déconcentration forte des services de l'État. Cette culture de coopération doit être amplifiée dans le cadre de la décentralisation en cours.

Les visites effectuées dans les régions ont montré la nécessité de décentralisation au niveau des régions, mais aussi, dans certains cas, de réserver la possibilité de décentraliser à d'autres niveaux pour certains projets. A contrario, on a pu regretter le comportement de l'État-région qui, en début de programmation, lors de l'élaboration des DOCUP, a réparti sans concertation les fonds européens entre les départements, au détriment de la qualité des projets.

La période de contrainte budgétaire actuelle induit une tentation forte pour l'État de compenser par des financements communautaires ses propres carences. On constate un retrait progressif de l'État d'une grande partie des projets, ainsi qu'une réduction de son taux de financement. Ce constat a été établi dans les cinq régions examinées, et il est sans doute général sur l'ensemble du territoire national.

Cette période de difficultés budgétaires n'est pas la première, mais le conflit potentiel sur l'utilisation des fonds européens est nouveau. En effet, lors des précédentes programmations budgétaires, l'État était maître de l'utilisation des fonds européens sans que les collectivités locales aient à y intervenir. La régulation budgétaire passait naturellement par ce canal. Cette situation n'est plus admissible avec le processus de décentralisation en cours. Dans un système où les aides individuelles aux entreprises sont décentralisées, les régions acceptent de plus en plus difficilement que l'État considère que les fonds européens sont les siens. Si les régions peuvent comprendre les nécessités de la régulation budgétaire, comme en période actuelle, elles ne peuvent plus accepter l'opacité totale avec laquelle l'État effectue parfois des substitutions de financement. La transparence est maintenant devenue une nécessité.

Il est nécessaire que les fonds structurels continuent, après 2006, à bénéficier aux régions de l'Union européenne à quinze, comme d'ailleurs l'a proposé la Commission européenne en février dernier, à l'initiative du Commissaire chargé de la politique régionale, M. Michel Barnier.

Cependant, cette proposition est clairement incompatible avec la position défendue par la France et cinq autres États membres, gros contributeurs, de limiter le budget communautaire à 1 % du PIB communautaire. Les régions françaises qui ont besoin de l'objectif de compétitivité régionale ne doivent pas être sacrifiées comme variable d'ajustement budgétaire. Il ne peut y avoir de fonds structurels européens pour la France qu'à la condition d'avoir un budget européen fort et dynamique, en envisageant des ressources propres adaptées. Le montant global de ce budget doit approcher le plus possible le plafond actuel fixé à 1,24 % du revenu national brut européen.

La Commission devrait présenter ses propositions législatives en juin prochain, avec pour objectif d'achever la discussion interinstitutionnelle fin 2005, un an avant le début de la prochaine programmation. Le respect de ce calendrier permettrait de travailler à la préparation des DOCUP en 2006, pour que les programmes puissent démarrer en 2007.

Des projections effectuées par la délégation pour l'Union européenne du Sénat montrent que dans la proposition initiale de la Commission, la France pourrait se voir attribuer environ 14 milliards d'euros pour la période 2007-2013, contre 17 milliards pour la période 2000-2006 (euros 2004) ; 10 milliards seraient affectés à l'objectif 2, soit une baisse de 18 % par rapport à la période actuelle. Ils devront être réaffectés aux nouveaux objectifs de compétitivité et d'emploi définis par la Commission européenne. L'avenir des fonds européens passe aussi par des projets transfrontaliers entre régions de différents États membres.

M. Augustin Bonrepaux a rappelé avoir alerté la Commission depuis cinq mois déjà sur la sous-consommation des crédits européens. Il s'agit de savoir pourquoi, alors que l'État a pris des engagements sur cinq ans dans des contrats de pays ou de pôle touristique, il n'y a plus de crédits disponibles aujourd'hui. Ceci aboutit à une substitution de crédits européens aux crédits d'État, sans consultation des élus, avec parfois des refus de la Commission européenne, comme pour la construction d'une route en Lorraine avec des crédits du FEDER substitués à ceux qui auraient dû venir de l'État. Où sont passés les crédits destinés par l'État à la Région Midi-Pyrénées, alors que 300 millions d'euros ont été accordés à l'agglomération toulousaine ? Ainsi, en Ariège, sur trois programmes relatifs à une route, un seul a débuté.

Dans ces conditions, on se demande bien comment il sera possible de réaliser des opérations d'aménagement et de développement du territoire d'ici 2007, car il n'y a plus ni crédits européens, ni crédits d'État. Le ralentissement de la mise à disposition des crédits induit un ralentissement des travaux déjà commencés.

M. Louis Giscard d'Estaing a tenu à préciser que le rattrapage en matière de sous- consommation des crédits européens date de l'été 2002. On manque toutefois d'outils de suivi des fonds structurels au niveau national, entre la DATAR, le réseau du Trésor Public ou le logiciel PRÉSAGE, pourtant considéré comme un outil très performant.

On a pu constater une diminution du taux de prise en charge par la Région Nord-Pas-de-Calais en raison d'une augmentation du taux de subvention sur crédits européens.

On peut également se demander s'il n'y a pas une corrélation inversement proportionnelle entre le nombre d'agents de l'État chargés du suivi des fonds structurels, et le caractère effectif des programmations sur ces crédits. Enfin, on ne peut pas parler de manière trop générale de désengagement de l'État quand on ne sait pas réellement quels engagements ont été pris : on ne dispose ainsi d'aucun engagement officiel du ministre de l'Équipement de l'époque, M. Jean-Claude Gayssot, sur le financement du tramway de Clermont-Ferrand.

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé nécessaire une clarification de tous les dispositifs mis en œuvre. Il y a aujourd'hui un enchevêtrement incompréhensible de fonds versés sans que personne ne sache selon quelle logique ils sont mis en œuvre. On pourrait revenir à une globalisation des crédits, comme cela se faisait dans les années 1970.

S'il y a un affaiblissement de la capacité d'investissement public, c'est en raison de l'incroyable augmentation des dépenses de fonctionnement et des prestations sociales au cours de ces dernières années : les crédits sociaux de l'État, des collectivités locales et de la sécurité sociale ont ainsi augmenté de 12 % en deux ans. Enfin, il est nécessaire de mieux hiérarchiser les priorités, car tous les investissements ne sont pas nécessairement utiles ou ne justifient pas de subventions à hauteur de 80 % du montant de l'opération. On peut, à cet égard, citer le cas de salles polyvalentes.

Mme Béatrice Pavy a souligné le décalage entre la sous-consommation des crédits du FSE et les besoins insatisfaits. Cela peut s'expliquer par des retards de programmation, compte tenu d'un délai de deux ans pour le versement des crédits européens. Des demandes ont été faites, mais les crédits ne sont pas arrivés à temps, ce qui a obligé à annuler les projets. Il est donc indispensable aujourd'hui de prévoir une nouvelle programmation.

M. Pascal Terrasse a convenu du manque de lisibilité et de continuité des actions menées à partir de financements croisés. Le saupoudrage n'a aucun sens, c'est pourquoi il faut répondre aux besoins dans le cadre de zones géographiques adéquates.

De la même manière, la gestion centralisée des crédits européens n'est pas optimale, car la région, notamment depuis le renouvellement des exécutifs régionaux, est l'échelon pertinent pour gérer en direct ces crédits et éviter ainsi leur sous-consommation. En 2002, ont été lancés des appels à projets pour les collectivités locales, mais aujourd'hui l'État ne peut plus les cofinancer ; il faut donc remettre à plat l'ensemble du dispositif.

M. Augustin Bonrepaux s'est interrogé sur l'utilisation effective des crédits : alors que les premiers crédits sont arrivés à la fin de l'année 2002, comment se fait-il qu'il n'y ait déjà plus de crédits fin 2003 ? En ce qui concerne les taux de prise en charge, ceux-ci sont fixés dans le DOCUP : si certains sont trop élevés, c'est en raison de la mauvaise utilisation des crédits, due au saupoudrage. Enfin, il est nécessaire de faire le point sur les contrats de plan État-régions, car l'étalement des investissements est provoqué par la politique fiscale du gouvernement laquelle, avec la baisse de l'impôt sur le revenu, de l'impôt de solidarité sur la fortune, ou de la taxe professionnelle dans des conditions très coûteuses, prive l'État de recettes.

M. Michel Bouvard, Président, s'est demandé dans quelles conditions et à quel moment l'État a pris ces engagements de dépense. On a ainsi découvert que la station d'épuration de St Etienne devait bénéficier d'aides du FEDER, sans que l'on sache qui a pris cet engagement, ni quand.

Il s'agit d'alerter le gouvernement sur la poursuite de la programmation des projets car, avec le gel de crédits budgétaires sur le FNADT, les projets seront arrêtés, les crédits communautaires non mobilisés et donc se profile le risque de dégagements d'office importants lors des facturations en fin de période. Il serait souhaitable d'associer les comités de massif à la mise en œuvre du plan INTERREG III en matière de coopération transfrontalière III en zone de montagne. La fin du zonage pour l'objectif 2 en 2007 peut justifier une programmation sur les régions à handicap plutôt que par thématique. Il faut savoir pourquoi les préfets ont décidé de concentrer les demandes de crédits communautaires sur le FSE, plutôt que sur le FEDER ou le FEOGA. Il en résulte un frein pour les projets compte tenu du délai de versement des aides, sans qu'il soit certain que la Commission européenne accepte aujourd'hui un redéploiement sur les autres fonds structurels. La campagne précédente ayant pris fin, il serait souhaitable de connaître le montant définitif des dégagements d'office opérés sur les anciens objectifs 2 et 5b de la programmation 1993-1999.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Louis Dumont, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- La gestion des crédits européens a été vivement critiquée à raison de la complexité des circuits de décision. Des mesures correctives ont été prises en 2002, juste après la signature des DOCUP. Aujourd'hui, les instances européennes envoient directement les fonds aux régions par l'intermédiaire de fonds de concours locaux. Les trésoriers payeurs généraux peuvent donc débloquer les crédits très rapidement. Auparavant, cette gestion était centralisée et reposait sur plusieurs circuits de financement consécutifs. Si ces mesures de simplification ont été appliquées à partir de l'été 2002, il faut souligner que cette mutation est la conséquence d'une réflexion engagée avant 2002. La voix des élus qui réclamaient une simplification de ces procédures a donc été entendue. Aux contraintes imposées par l'Union européenne et par l'État s'ajoutaient souvent celles des régions et des départements.

- Le coût de gestion d'un dossier est en moyenne, par exemple de 85.000 euros en Aquitaine. Dès lors, le saupoudrage des fonds européens a un effet extrêmement contre - productif sur la gestion de ces crédits. Aujourd'hui, les crédits européens semblent quasiment épuisés. Nos concitoyens doivent prendre conscience que l'Europe agit concrètement sur notre territoire. M. Michel Delebarre, Président de la Communauté urbaine de Dunkerque, a fait installer un panneau indiquant le rôle du financement européen dans le financement d'un chantier. Entre 2004 et 2006, le risque de pénurie de crédits européens est réel. Il pourrait être dramatique pour la programmation à venir, qui ira de 2007 à 2013. Il faudra que la France, par la voie de ses ministres et de son Commissaire européen, exprime une volonté forte. Il faudrait abandonner la politique de zonage et maintenir des crédits. Il serait donc souhaitable que le budget européen se rapproche du seuil de 1,24 % du RNB de l'Union.

En ce qui concerne la réserve de performance, il faut rappeler que c'est la DATAR qui a formulé des propositions à la Commission européenne, à partir des données de PRESAGE. Cette réserve a donc été, malheureusement, attribuée de manière mécanique.

- La gestion des crédits du FSE, particulièrement lente et lourde, laisse à désirer. Il conviendrait peut-être de poursuivre cette mission, car les informations obtenues lors des déplacements dans les régions sont d'une grande richesse. On peut regretter, dans les faits, une départementalisation des enveloppes de crédits. En conséquence, au sein d'une même région, il arrive que les responsables d'un département ne soient pas informés que les crédits du département voisin ne sont pas utilisés. Dans ce cas, les crédits sont perdus.

Pour la période 2004-2006, les comités de suivi vont pouvoir superviser finement l'utilisation de tous les crédits. Il arrive parfois qu'un certain montant de crédits soit annoncé dans une région mais que, par la suite, ce montant soit revu à la baisse.

M. Michel Bouvard, Président, a indiqué qu'en accord avec le Président Méhaignerie, il proposait à la Commission que cette communication, si le Rapporteur spécial en est d'accord , fasse l'objet d'un rapport d'information pour contribuer ainsi à la suite du débat.

La Commission des finances a alors autorisé, en application de l'article 146 du Règlement, cette publication.

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