COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 24

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 9 novembre 2004
(Séance de 16 h 15)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président,
de M. Édouard Landrain, Président d'âge,

de M. Pierre Méhaignerie, Président,
puis de M. Michel Bouvard, Vice-Président

SOMMAIRE

 

pages

- Examen d'un rapport d'information de M. Pierre Méhaignerie sur le marché de l'emploi au Danemark

2

- Suite de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800)

Vote sur les crédits :

 

· des Affaires étrangères et de la francophonie (M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial)

4

· de la Fonction publique et de la réforme de l'État (M. Georges Tron, Rapporteur spécial)

7

· des Services financiers et du budget annexe des monnaies et médailles (lignes figurant aux articles 50 et 51, I et II (M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial) et examen des Comptes spéciaux du Trésor n° 902-06 et 902-14

17

· du Logement (M. François Scellier, Rapporteur spécial)

21

· des Anciens combattants (M. Jean-Claude Mathis, Rapporteur spécial)

25

· des Charges communes et de l'article 73, rattaché (M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial) et examen des Comptes spéciaux du Trésor n° 902-33 et 904-22

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La Commission des finances a tout d'abord procédé à l'examen d'un rapport d'information de M. Pierre Méhaignerie, Président, sur le marché de l'emploi au Danemark.

Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé que quatre membres de la Commission avaient jugé indispensable de se rendre au Danemark pour apprécier de manière concrète le système de « flexisécurité » de l'emploi dans ce pays.

Les leçons que l'on peut en tirer pourront être intégrées dans le prochain débat sur le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale. On peut également partir du constat que le système français de lutte contre les délocalisations, par la mise en place de pôles de compétitivité, n'apparaît pas satisfaisant.

Il ressort de cette mission quatre types de conclusions.

Premièrement, il n'y a pas de miracle danois. Le Danemark a aussi ses problèmes, liés au vieillissement de la population, à la faible intégration de la population immigrée, au poids des dépenses publiques et à un système fiscal, avec un TVA à 25 % et un taux marginal de l'impôt sur le revenu à 60 %, qui n'est manifestement pas transposable à nos mentalités.

Deuxièmement, la construction de ce système à partir d'un « triangle », avec un pôle de liberté d'embauche et de licenciement, un pôle d'activation de reprise d'emploi et un pôle d'assurance chômage assurent au Danemark un taux de chômage très faible. La mondialisation n'y est pas ressentie comme une menace, un filet de sécurité de 4 ans d'indemnisation est offert aux chômeurs, les licenciements se font très rapidement. Incontestablement, ce système offre aux salariés des PME une sécurité que nous ne connaissons pas.

Troisièmement, il ne faut pas perdre de vue la notion de droit et de devoir. La reprise d'un emploi est considérée comme une nécessité. A défaut, les allocations chômage sont fortement réduites, ce qui conduit les salariés à accepter des systèmes d'activation ou de reprise d'emploi.

Enfin, les mécanismes d'insertion sont extrêmement motivants. Si l'on compare avec le cas français, on ne peut qu'être frappé du fait que les titulaires du RMI sont dans des situations extrêmement disparates au regard de l'insertion : selon les départements, le taux de reprise de l'activité va de 15 à 90 %. C'est à la lumière de cette donnée fondamentale, qu'il faut apprécier certaines des critiques portant sur la progression de la pauvreté en France.

En toute hypothèse, si l'on veut faire progresser les choses, un effort de pédagogie vis-à-vis du pays est indispensable.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a insisté sur le fait que le Danemark est un pays dans lequel il est aisé de démontrer à quel point les questions de réduction des dépenses publiques et de fiscalité sont liées. Le Danemark prouve que l'on peut aboutir à un haut niveau de prestations sociales et de protection du chômage, tout en assurant une réduction des dépenses publiques. La fiscalité sur l'offre est très allégée, le taux d'impôt sur les sociétés est assez faible, tandis que celui portant sur les plus values et le patrimoine sont extrêmement faibles, de manière à ne pas entraver la transmission des biens et des entreprises. En revanche, la fiscalité applicable à la demande y est très forte. Le taux marginal de l'impôt sur le revenu à 60 % touche un ménage sur deux, ce qui traduit un fort niveau redistributif. Le taux de TVA au Danemark est de 25 %. Ce taux est plus élevé pour certains types de produits comme les automobiles. Ce choix de fiscalité conduit à taxer la consommation et le revenu pour alléger la fiscalité pesant sur les facteurs de production. Cette démarche est assez proche de la réflexion menée sur la TVA sociale. Pour autant, ces grands équilibres reposent sur une donne sociale de long terme. Ce modèle n'est pas exempt de difficultés. Ainsi, les dépenses publiques sont-elles très élevées et rigides. En cas de ralentissement de la croissance, il est donc très difficile d'en moduler le montant. En outre, la fiscalité des revenus est décourageante. Il a même fallu créer un système de fiscalité spécifique pour attirer les chercheurs, mais l'une des difficultés reste le caractère faiblement attractif du Danemark pour ceux-ci.

M. Alain Joyandet a rappelé que l'état d'esprit régnant au Danemark est particulièrement étonnant et très différent de la France. Les représentants des salariés et du patronat arrivent facilement à s'entendre. 80 % des salariés sont syndiqués. Globalement, ce modèle social repose sur beaucoup de civisme et de sérénité. De plus, le taux de chômage des jeunes est quasiment nul. En France, les réductions d'effectifs doivent être assumées par les entreprises alors qu'au Danemark, le salarié licencié est automatiquement pris en charge par l'État et les collectivités locales s'ils acceptent de suivre des formations. Les salariés ont donc un sentiment très fort de sécurité. Les représentants des employeurs et des salariés se rencontrent tous les trois ans pour une convention nationale, mais, entre deux conventions, le climat social est particulièrement apaisé. Il convient donc de souligner que le débat sur la flexibilité du marché du travail ne doit pas être dissocié des mesures compensatoires pour diminuer le chômage.

Après avoir souligné que la France était championne de l'analyse mais pas de l'évolution, M. Jean-Louis Dumont a déploré que les différents acteurs de l'aide à l'emploi soient prisonniers de leur culture. Le projet de loi de M. Jean-Louis Borloo est une étape qui ne sera peut être pas totalement inutile. Encore faudrait-il que ces « mesures incitatives à l'emploi » se concrétisent sur le terrain. Les jeunes sortant de l'enseignement technique ont toujours des difficultés à trouver un emploi. Les acteurs de l'aide à l'emploi font un excellent travail qui manque cependant de cohérence puisqu'il n'existe pas de chef de file : chacun reste dans son domaine.

M. Alain Rodet a rappelé que M. Adrien Zeller, lorsqu'il était membre de la commission des Finances avait réfléchi sur le marché de l'emploi et les relations sociales aux Pays-Bas. Mais on peut rester dubitatif sur la possibilité de transposer de telles règles. Il faut tout de même remarquer que ces pays sont plus petits que la France et pétris de traditions différentes. Toute comparaison est donc, par nature, biaisée.

Le Président Pierre Méhaignerie a répondu que les expérimentations régionales permettraient peut être de surmonter la difficulté liée à la taille de notre pays.

La Commission a autorisé, en application de l'article 145 du Règlement, la publication du rapport d'information.

*

* *

La Commission a ensuite poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances (n° 1800) et a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial, les crédits des Affaires étrangères et de la francophonie.

M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial, a d'abord rappelé qu'il était prévu de présenter les crédits des affaires étrangères dans deux missions : « Action extérieure de l'État », composée de trois programmes de ce ministère, et « Aide publique au développement » qui compte un programme de ce ministère et un programme du ministère des finances. Cette seconde mission est loin de retracer l'ensemble de la contribution de la France à l'aide publique au développement puisque elle regroupe 2,87 milliards d'euros alors que l'aide publique au développement prévue pour 2005 dépasse 7,5 milliards d'euros, dont 3,45 milliards d'euros de dotations budgétaires.

Le périmètre de la mission « Action extérieure de l'État » n'est pas non plus parfaitement satisfaisant dans la mesure où les crédits du réseau économique, partagés entre trois programmes, ne lui sont pas rattachés. L'action de ce réseau n'est d'ailleurs pas réellement évaluée. Il conviendrait de regrouper ces crédits dans un seul programme et de les rattacher à la mission « Action extérieure de l'État ». Le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » apparaît comme un fourre-tout inspiré par l'existence d'une direction du même nom.

Les indicateurs doivent être améliorés. Mesurer les résultats du programme « Rayonnement scientifique et culturel » par le décompte des articles portant sur les évènements culturels français, sans même tenir compte de leur tonalité, est parfaitement absurde. L'indicateur qui porte sur la part d'autofinancement des centres culturels est intéressant, à condition que les modalités de calcul de cette part soient fixées de manière précise.

Le réseau diplomatique et consulaire français passe pour particulièrement développé : il compte en fait 275 implantations, ce qui est comparable au réseau américain (250 implantations) et au réseau britannique (233). Il est particulièrement dense en Afrique, où la France a presque deux fois plus d'implantations que le Royaume-Uni. Mais notre réseau vieillit. En particulier, il est peu présent en Asie : en Extrême-Orient et dans le Pacifique, la France n'a que 26 implantations, quand les États-Unis en comptent 40 et les Britanniques 35. Des redéploiements sont donc nécessaires et possibles. Avons-nous réellement besoin de six consulats généraux et huit agences consulaires en Allemagne, alors que l'on ne parvient pas à en créer un quatrième en Chine ?

Le Président Pierre Méhaignerie a interrogé le Rapporteur spécial sur les raisons de ces difficultés d'adaptation.

M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial, a expliqué que le ministère des Affaires étrangères était très attaché à des considérations d'équilibre politique qui semblent contestables. Par exemple, le ministère juge impossible de supprimer un consulat général en Belgique au nom de la représentation de la France en Flandre et en Wallonie, alors que le consulat général de Bruxelles pourrait remplir toutes les missions consulaires. Un allègement du dispositif serait certainement possible en ne maintenant à Liège qu'un directeur de centre culturel ayant rang de consul. Lorsque l'on sait que le trafic aérien assuré par Air France entre Paris et la Chine a augmenté de plus de 38 % en un an, on ne peut accepter la faiblesse de notre réseau en Extrême-Orient.

L'immobilier peut constituer un levier pour pousser à l'évolution des réseaux. Le programme des cessions pour la période 2004-2006 représentait plus de 50 millions d'euros de produit et comportait encore la vente d'un terrain, lancée en 1995. Ce dernier vient tout juste d'être cédé. La gestion de ce patrimoine immobilier ne pourra être améliorée sans la création d'une agence des propriétés immobilières de l'État à l'étranger qui pourra obtenir une meilleure valorisation des surfaces appartenant à l'État. Deux propriétés situées en Allemagne, évaluées à plus de 10 millions d'euros demeurent invendues depuis 1999.

Il est très regrettable que toute cession immobilière soit ressentie comme une perte d'influence. C'est notamment le cas à Florence où l'ambassadeur s'oppose à la cession complète du palais Lenzi et ne propose que la vente de sa partie arrière, laquelle est évaluée à 2,5 millions d'euros. Sa cession ferait perdre une partie importante de sa valeur à l'ensemble, estimé à 12 millions d'euros. Le ministère a tendance à utiliser une stratégie d'attente, alors qu'il faut une accélération des cessions immobilières. Ainsi, bien que le représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne ne voie aucun inconvénient à ce que sa résidence soit mise en vente, aucune décision en ce sens n'est prise. L'avis favorable donné par l'ambassadeur de France près la République italienne à l'installation de l'attaché de sécurité intérieure dans les locaux partiellement vacants de l'attaché de défense est très positif. Cet effort de rationalisation devrait être systématisé.

Le projet de rassemblement des services du ministère des Affaires étrangères sur un seul site est un exemple d'adaptation de l'immobilier aux besoins d'une diplomatie moderne. Si plusieurs lieux ont été envisagés, c'est la pointe de l'île Seguin à Boulogne qui semble la plus adaptée. Étant donné le prix du mètre carré, l'ensemble du projet devrait coûter de l'ordre de 200 millions d'euros, couverts par la vente des huit sites actuels. Ce projet constitue un geste fort : si l'hôtel du ministre du Quai d'Orsay sera préservé pour les réceptions, tous les services seront regroupés dans des bâtiments modernes, ce qui réduira les frais de fonctionnement et évitera de nombreux déplacements. La diplomatie française pourra enfin changer de siècle.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que la mise en place d'un indicateur concernant l'immobilier devait faire l'objet d'une étude attentive.

M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial, a rappelé que l'État était propriétaire des deux tiers des implantations situées à l'étranger. L'essentiel des crédits inscrits est donc destiné à assurer l'entretien de ces locaux. Il faudrait donc identifier le coût d'un consulat et réduire les crédits de ce montant. Il faudra, en outre, faire en sorte que les produits des cessions attendus, soit 51 millions d'euros, soient rattachés, en recettes, au budget des affaires étrangères.

M. Louis Giscard d'Estaing a approuvé la préconisation du Rapporteur sur le rapprochement entre le réseau de l'Alliance française et celui des centres culturels. Ne serait-il pas possible de déposer un amendement pour appuyer cette proposition ? Une telle démarche pourrait également être effectuée pour l'amélioration de la gestion immobilière.

M. Jean-Louis Dumont a approuvé le regroupement sur un site unique des services du ministère. Pour autant, compte tenu du fait que ce ministère fonctionne comme une échelle de perroquet, il faut que cette opération réussisse pour que d'autres soient lancées. Il faudrait, notamment dans l'espace Schengen, rapprocher les différents services et consulats des pays membres, au premier rang desquels figurent la France et l'Allemagne. Même dans les pays francophones, la qualité de l'accueil des services français n'est pas à la hauteur du rang que notre pays joue sur la scène internationale. Enfin, le service rendu par l'OFPRA s'est-il amélioré ?

Après avoir souligné que l'immobilier était un bon levier de modernisation du ministère, M. Michel Bouvard a rappelé que les subventions de fonctionnement de l'OFPRA augmentaient de 21,34 % cette année. La gestion des locaux est particulièrement délicate. Si les crédits de l'OFPRA progressent de 7,31 millions d'euros, ceux de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger baissent de 7,58 millions d'euros. Cet état de fait traduit sans doute le choix du ministère de privilégier les dépenses inéluctables par rapport aux autres dépenses, pourtant utiles pour le rayonnement de notre pays. Ces dépenses baissent pour la deuxième année consécutive. Il est vain de s'interroger sur l'attractivité de notre pays si nous ne pouvons pas promouvoir notre langue, qui est pourtant un vecteur économique. Les Allemands ont compris cet enjeu puisqu'ils ont financé la reconversion des professeurs de russe des pays d'Europe de l'Est pour leur permettre d'enseigner l'allemand. La France ne peut pas compter que sur le Québec et le Canada pour promouvoir l'usage du français dans le monde. En outre, le coût d'accès aux lycées français est généralement très élevé.

M. Édouard Landrain a déploré que les jeunes qui étudient en français partout dans le monde aient les plus grandes difficultés pour obtenir des bourses afin d'étudier dans notre pays. Les États-Unis ont mis en place une politique volontariste en la matière. Il nous faut réagir au plus vite, avant qu'il ne soit trop tard. Une politique de « gagne petit », en la matière, n'est pas adaptée.

En réponse aux différents intervenants, M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- le secrétaire général de la délégation mongole à l'ONU s'est récemment exprimé en français. La première langue parlée demeurera celle de son pays, la deuxième langue sera une sorte d'esperanto mondial s'appuyant sur l'anglais et la troisième sera la langue de la distinction. C'est cette place que le français doit occuper partout dans le monde ;

- notre réseau de l'Alliance française et des centres culturels est performant. Ces deux institutions ne sont pas nécessairement concurrentes, puisque la première se focalise sur l'apprentissage du français tandis que la deuxième se concentre sur le rayonnement culturel ;

- un centre culturel franco-allemand a été récemment ouvert à Ramallah. En réalité, cette création n'a été rendue possible que grâce à la personnalité des agents concernés. Pour ce qui est des consulats, il n'est actuellement juridiquement pas possible qu'un officier d'état-civil français soit soumis à une autorité étrangère ;

- les économies observées sur le budget de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger s'expliquent par l'embauche de personnel local en remplacement d'expatriés. Des associations scolaires prennent parfois en charge une partie du coût de l'enseignement. Pour les établissements conventionnés, les crédits d'investissement s'élèveront à 5 millions d'euros en 2005 ;

- la France a créé des bourses pour les étudiants post-doctorant mais leur bénéfice est limité aux personnes âgées de moins de 36 ans, ce qui pose des problèmes concrets ;

- la Commission de recours des réfugiés, qui aura traité 2.240 dossiers en 2004 devrait en traiter plus de 5.000 en 2005. Le coût de fonctionnement de cette structure s'impute à la fois sur la subvention versée à l'OFPRA et sur celle versée au Haut commissariat pour les réfugiés, dont certains membres font partie de la commission.

M. Michel Bouvard s'est étonné que la commission traite encore le cas de personnes turques prétendant à l'asile politique, alors même que la Turquie semble remplir les conditions préalable à l'ouverture d'une négociation en vue de son adhésion à l'Union européenne.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué que la France recevait beaucoup de demandes d'asile du fait de son haut niveau de prestations sociales et de la longueur des délais de recours, qui permettent de s'installer assez longtemps dans notre pays.

M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial, a suggéré que la commission des Finances s'intéresse au fonctionnement de la commission de recours des réfugiés.

Le Président Pierre Méhaignerie a répondu que le financement de l'asile, qui englobe également l'augmentation des crédits de l'aide médicale d'État, serait le deuxième thème abordé par la mission d'évaluation et de contrôle (MEC) en 2005.

La Commission a alors adopté, sur la proposition du Rapporteur spécial, les crédits des Affaires étrangères.

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La commission des Finances a ensuite examiné, sur le rapport de M. Georges Tron, Rapporteur spécial, les crédits de la Fonction publique.

M. Georges Tron, Rapporteur spécial, a expliqué que les crédits du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'État passent de 223 millions d'euros en 2004 à 155 millions d'euros en 2005 et sont donc réduits de 68 millions d'euros. Ce budget, mesuré mais important par le poids de la fonction publique et par la politique menée, présente un effort de rationalisation.

La réforme importante du transfert aux caisses d'allocation familiales (CAF) de la gestion des prestations familiales dues aux agents de l'État permettra d'économiser 55 millions d'euros et près de 600 emplois. À l'heure actuelle certaines prestations familiales sont gérées par les services de paie de l'État, et d'autres par les CAF. Il y là une redondance absurde qui aboutit à d'importants surcoûts.

Le Gouvernement propose également une réforme de la politique interministérielle de réservation de logements pour les agents de l'État (- 1,6 million d'euros), qui sera reprise par les différents ministères et surtout par les préfectures dans le cadre de la déconcentration. Les priorités ont été clairement données à l'insertion des handicapés (1 million d'euros maintenus en 2005) et à la rénovation des restaurants inter-administratifs (2,4 millions d'euros en 2005). Ce budget tire les conséquences de la récente réforme du code de la construction et de l'habitation, où trois voies sont possibles pour réserver des logements pour les fonctionnaires : la voie ministérielle, la voie interministérielle et le 5 % préfectoral. Dans le cadre de la déconcentration, cette dernière voie, dont la vocation interministérielle devra être renforcée, permettra sans doute d'assurer un volume important de réservation de logements.

Les comptes de la Mutualité fonction publique, organisme qui gère les crédits d'action sociale, sont réduits de 9,5 millions d'euros, correspondant à un fonds de roulement inutilisé, sans répercussion sur les prestations, dans un effort de sincérité budgétaire.

Les autres crédits d'action sociale interministérielle financent des actions comme l'aide à l'installation des jeunes fonctionnaires, l'aide à domicile ou le chèque-vacances.

S'agissant des actions de formation, de perfectionnement, d'insertion et de modernisation dans l'administration publique, la subvention de l'ENA sera réduite de 755.000 euros en raison de la réduction du nombre de postes offerts au concours d'entrée. Les surcoûts liés au transfert de l'école à Strasbourg seront couverts dans la prochaine loi de finances rectificative. Il serait alors logique que les locaux parisiens de l'ENA, une fois le transfert achevé, soient mis en vente afin de financer sa réimplantation ; il y va de la bonne gestion du patrimoine de l'Etat. Le Centre d'études européennes de Strasbourg développe ses activités, avec notamment, pour la première fois, une préparation aux concours de recrutement des institutions européennes ; il se rapproche de l'ENA dans un processus « d'adossement » affirmant ainsi la priorité donnée à la formation aux questions communautaires. Pour la première fois également cette année le concours de l'ENA a été ouvert aux ressortissants des autres Etats membres de l'Union européenne. La réforme de l'ENA, largement inspirée par les recommandations du rapport de la commission présidée par M. Yves-Thibault de Silguy, est maintenant engagée et elle comporte plusieurs volets parmi lesquels la limite d'âge à 35 ans et l'augmentation du nombre de postes au concours externe.

Pour les opérations de réimplantation d'administrations, depuis 1991, ce sont désormais 43.243 emplois dont le transfert a été approuvé en CIADT, dont 14.237 depuis le 18 mai 2000. Au 1er juillet 2004, 31.938 emplois sont d'ores et déjà transférés et 3 008 sont en cours de transfert.

La réforme du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'État passe, comme pour les autres ministères, par la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances et une actualisation de sa stratégie ministérielle de réforme (SMR).

Pour la LOLF, une mission unique intitulée « Direction de l'action du Gouvernement » a été instituée au ministère. Elle comporte deux programmes « coordination du travail gouvernemental » et « fonction publique, réforme de l'État et prospective ».

La nomenclature proposée pose un problème de cohérence dans le sens où les deux programmes retenus par le Gouvernement correspondent en fait à une séparation entre, respectivement, moyens en personnel et moyens d'intervention. Comme M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial des Services généraux du Premier ministre l'a également noté, cette présentation devra être revue, car elle est contraire aux objectifs de la LOLF qui consistent à suivre une politique publique à coût complet.

Quelques neuf objectifs sont proposés pour le programme relatif à la fonction publique et à la réforme de l'État ; il vaudrait mieux en resserrer le dispositif, notamment sur la formation des fonctionnaires, pour le recentrer sur les priorités.

L'objectif visant à soutenir la mise en œuvre des SMR figure certainement parmi ces priorités ; son indicateur pourrait utilement inclure une pondération prenant en compte le respect du calendrier de réalisation. L'objectif de connaître l'emploi public et promouvoir une gestion prévisionnelle des effectifs est également prioritaire. L'objectif visant à accroître le recours à l'administration électronique dans les relations avec les usagers est très utile ; il faudrait aller plus loin et tenter de mesurer les économies que l'utilisation des technologies de l'information permet de générer dans l'administration française à qualité de service égale ou supérieure.

Le ministère de la fonction publique et de la réforme de l'État pourrait également réfléchir à la définition d'objectifs et d'indicateurs relatifs à la mobilité des fonctionnaires, la rémunération au mérite, le processus de déconcentration et la simplification des démarches administratives.

Dans la mise à jour de sa SMR, le ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat s'est engagé dans la voie d'une réorientation de son activité par un recentrage sur les actions suivantes : pilotage de la cohérence statutaire, approfondissement du dialogue social et définition et pilotage des ressources humaines, pilotage des systèmes d'information, développement des cohérences et passerelles entre les trois fonctions publiques, la gestion stratégique de l'encadrement supérieur et la rénovation de la politique de formation. Ces actions sont constitutives de la réforme de l'État, en ce sens qu'elles rationalisent certaines activités, ainsi le transfert aux CAF du paiement des prestations familiales et application du droit commun ou le versement des pensions de retraite.

Comme dans d'autres pays qui nous ont précédé, la réforme de l'Etat est, en France, une impérieuse nécessité. Le groupe de travail « Ariane » du Plan dans son rapport sur « l'Etat stratège » s'est intéressé à la méthode idoine pour mettre en oeuvre la réforme de l'Etat. Il faut sortir de la logique quantitative consistant à toujours demander des crédits et des fonctionnaires. Nous sommes quasiment en l' « An I » de la réforme de l'État. La situation démographique actuelle de la fonction publique, avec les prochains départs massifs à la retraite, constitue une opportunité unique de redéploiement pour repenser une administration qui n'a cessé de croître. Environ la moitié des économies ainsi réalisées doit concourir à la réduction du déficit de l'Etat ; l'autre moitié doit cependant pouvoir être affectée à l'augmentation des rémunérations des fonctionnaires, par exemple avec un système de primes au mérite.

Si l'on prend le champ de l'emploi public retenu par l'Observatoire de l'emploi public, les trois fonctions publiques ont vu une inflation stupéfiante de leurs effectifs de 23 % entre 1980 et 2001. Comparativement, la population active n'a augmenté sur cette période que de 14 %. Quelques 45 % du budget de l'État vont aux fonctionnaires. On compte entre 5 millions et 5,7 millions d'agents publics en France, selon que l'on prend l'approche économique de comptabilité nationale ou l'approche juridique de l'Observatoire. Le projet de budget pour 2005 prévoit la suppression de 10 211 emplois, soit 14 % des départs en retraite totaux et 20 % des départs en retraite des ministères non prioritaires. 3 023 emplois sont créés dans les ministères prioritaires. Le solde total de 7 188 suppressions représente un non-renouvellement de 10 % des départs en retraite.

Nous vivons actuellement une véritable situation d'« urgence démographique » où près de la moitié des fonctionnaires présents en 2003 seront partis à la retraite en 2016, soit 76.000 départs par an en moyenne sur l'ensemble de la fonction publique d'État. Cette situation impose une gestion prévisionnelle et pose un problème général d'attractivité de la fonction publique. Le ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat se donne pour objectif ambitieux de limiter les flux de recrutement à 40.000 jusqu'à cette date, ce qui correspond à un objectif de gain de productivité de + 2,25 % par an. Or, on sait que 20 000 fonctionnaires en moins c'est 1 % des effectifs, donc c'est la possibilité de donner un point de pouvoir d'achat en plus.

Cela doit nous inciter encore plus à fournir l'effort pour se doter d'outils plus performants. Or le ministère de la fonction publique n'est pas en mesure de fournir une estimation du nombre de fonctionnaires qui ne sont touchés ni par des mesures de GVT ni par des mesures catégorielles, et c'est un problème réel de transparence. Sans cela, on ne peut comprendre la signification de l'augmentation de la « rémunération moyenne des personnes en place » qui sera de 2,6 % en 2005, soit un gain de pouvoir d'achat de 0,8 %.

La LOLF permet l'introduction d'une culture de la performance et de la gestion par objectif et résultat. La mise en oeuvre progressive de ses dispositions en matière de plafond d'emploi est le pendant d'une nouvelle politique de ressources humaines.

L'article 7 de la LOLF instaure une limite aux effectifs d'emploi par ministère et prévoit que les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel de chaque programme constituent le plafond des dépenses de cette nature. Les gestionnaires de programme ne pourront donc pas utiliser les nouvelles marges de manoeuvre dont ils disposent pour rémunérer des agents sur des crédits de fonctionnement et ainsi détourner l'autorisation parlementaire. Les articles 51 et 54 de la loi organique prévoient que les rapports annuels de performance rendent compte de la répartition effective des emplois par programme et par « catégorie » et des coûts correspondant. La budgétisation des dépenses de personnel sera donc très proche du coût réel, par l'intégration d'un taux de cotisation implicite représentant les dépenses sociales et de pensions de retraite. Avec la mise en place des budgets opérationnels de programme, et la nomination de leurs responsables, les ministères sont invités à déconcentrer les responsabilités de gestion, y compris celles des ressources humaines.

A la demande du Premier ministre, les stratégies ministérielles de réforme doivent procéder à un réexamen critique et systématique de toutes les missions des ministères. Le Gouvernement a transmis aux commissions des Finances des assemblées ces SMR. Mais les ministères jouent le jeu de façon plus ou moins appliquée ; ainsi les ministères sociaux, l'outre-mer, l'éducation nationale, l'agriculture, l'écologie ont-il un effort à fournir pour rattraper le niveau des autres ministères, comme les Finances ou la Défense.

Les résultats ont été soumis à l'appréciation d'un comité d'examen indépendant qui s'est réuni le 14 septembre 2004, sous la présidence de M. Francis Mer. Une sélection de 225 actions prioritaires a été effectuée, dont la plupart ont fait l'objet d'un engagement chiffré et daté de la part du ministère concerné. Ces mesures permettront d'améliorer la productivité des administrations et de générer, à l'horizon 2007, une économie de l'ordre de 1,5 milliard d'euros par an et de 10.000 emplois. Le ministère de la fonction publique et de la réforme de l'État entend poursuivre et approfondir la revue des SMR à un rythme soutenu. De nouveaux bilans seront établis en décembre 2004 puis en juin 2005.

Les deux exercices de la LOLF et des SMR devraient être mieux coordonnés. Les SMR doivent servir de grille de lecture des demandes de crédits budgétaires lors de la discussion budgétaire. Les ministères devraient plus systématiquement tirer les conséquences budgétaires des SMR. Chaque action de la LOLF doit faire l'objet d'un réexamen critique. Si une SMR conclut à l'abandon d'une mission du ministère, il faudra veiller à ce que les crédits et les personnels correspondants ne soient pas reconduits. La commission des Finances se doit d'exercer son contrôle vigilant : elle pourrait s'interroger sur la possibilité d'auditionner les ministres sur leurs SMR au moment du débat d'orientation budgétaire, puis contrôler leur application une année plus tard et, en cas de non respect, les sanctionner par un vote de réduction de crédits au moment de l'examen du projet de loi de finances.

La génération 2005 des SMR pourrait être établie selon la structure de la LOLF. Les SMR 2005 pourraient être élaborées par mission, programme et action, et non plus par ministère comme c'est le cas actuellement. Il faudra toutefois veiller à ce que les ministres restent directement impliqués. Les indicateurs de la LOLF pourraient être articulés avec les objectifs des SMR. Il pourrait alors être utile de choisir, par programme, les deux ou trois indicateurs de performance de la LOLF les plus essentiels et d'exprimer leurs valeurs cibles en 2007. Ainsi la Représentation nationale pourra connaître les ministères qui jouent réellement le jeu.

Dans la continuité de l'action des gouvernements précédents, la réforme de l'administration doit s'accélérer. Les trois fonctions publiques se doivent d'obtenir la meilleure adéquation possible entre les besoins en compétences et les personnels en fonction, dans le cadre d'une véritable gestion des ressources humaines. Le Comité interministériel pour la réforme de l'Etat du 12 octobre 2000 a conclu que tous les ministères devaient se doter d'un plan de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences.

La rémunération au mérite des fonctionnaires est le pendant de l'exercice de recherche de performance dans le cadre de la LOLF et des SMR au niveau de chaque fonctionnaire. Une expérimentation a débuté en juin 2004 pour certains directeurs d'administration centrale. Elle sera généralisée en 2005 à l'ensemble des ministères, et pourrait ensuite l'être aux chefs de bureau et à tous les agents. Le système retenu comporte une part variable n'excédant pas 20 % de la rémunération totale, elle-même déterminée pour les 4/5èmes par des objectifs quantitatifs et qualitatifs et pour 1/5ème par un « jugement managérial ».

Une mobilité des fonctionnaires bien conçue et organisée peut être bénéfique au fonctionnaire, à son administration et au corps social. Plusieurs mesures ont été adoptées récemment pour favoriser la mobilité comme la simplification du détachement, la mise en position hors cadre et l'amélioration des conditions de réintégration.

Le Gouvernement devrait déposer prochainement un projet de loi d'orientation de la fonction publique. Cette réforme doit toucher des sujets aussi différents que la formation initiale et continue, la haute fonction publique ou la nécessité d'un renouvellement du dialogue social. Dans le prolongement du rapport public du Conseil d'État de 2003, une question centrale est la transformation des quelques 1.000 corps différents pour en faire de véritables métiers ou filières professionnelles, autour desquelles articuler les administration publiques. Or la gestion de ces corps est coûteuse et peu efficace.

Près de 80 corps ont déjà été supprimés ces cinq dernières années. Comme l'a évoqué le ministre de la fonction publique, on pourrait passer à l'étape supérieure et regrouper les corps de la fonction publique autour de huit grandes filières comme la sécurité, le technique, la santé, le social, l'administration financière, la culture, la formation et l'administration générale.

La réforme de l'État passe aussi par une meilleure gestion du patrimoine de l'État, comme le montre le rapport de l'inspection générale des finances sur les logements de fonction des agents de l'État. Selon ce rapport, les quelques 137.000 logements de fonction gérés par les ministères ont une valeur locative de 1,4 milliard d'euros, alors que le montant total des loyers perçus ne dépasse par les 30 millions d'euros... Environ 20 % des logements sont inoccupés aux ministères de la culture, de la justice et des finances. Malheureusement la gestion de ce patrimoine dépend de chaque ministère et ne fait l'objet d'aucune politique systématique de valorisation ni même de bonne gestion.

Le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans l'administration a été favorisé par la création de l'Agence pour le développement de l'administration électronique en février 2003. Les nouvelles technologies dans l'administration permettent une meilleure productivité et un meilleur service aux usagers. Les entreprises et les administrations partagent désormais les mêmes outils technologiques et il existe d'évidentes similarités dans leurs approches.

L'« Acte II » de la décentralisation constitué par loi du 13 août dernier sera l'occasion d'une réorganisation des processus au sein de l'administration centrale comme des administrations territoriales. Sur la période 1980-2001, la fonction publique d'Etat avait augmenté de 15 % et la fonction publique territoriale de 38 %, et il faudra éviter de renouveler cette dérive.

On peut estimer à environ 130 000 le nombre d'agents de l'État susceptibles de relever des dispositions de la nouvelle loi, dont 92 000 personnels techniciens, ouvriers et de service affectés dans les collèges et les lycées et 30 000 agents chargés de l'entretien des routes nationales. Les transferts s'effectueront en deux étapes, avec d'abord des mises à disposition, puis la création des emplois aux budgets des collectivités et leur suppression concomitante au budget de l'État. Pour les agents, elle consiste en l'exercice d'un droit d'option dans un délai de deux ans.

La nouvelle étape de la décentralisation offre l'opportunité d'une relance simultanée de la déconcentration : recentrage des compétences de l'État, réforme de l'organisation territoriale, renforcement de la responsabilité des autorités déconcentrées, meilleur pilotage et mesure de la performance des politiques menées au niveau local.

Les travaux interministériels menés à un rythme soutenu depuis avril 2003 ont abouti à une réforme. La région devient l'échelon majeur de l'organisation territoriale de l'État ; elle fixe pour trois ans la stratégie et la mise en cohérence des politiques. Les structures territoriales de l'État seront rationalisées. Certains services comme les directions régionales du commerce extérieur, les délégations régionales au commerce et à l'artisanat, les délégations régionales au tourisme, sont supprimés ou intégrés dans d'autres services. Les autres services régionaux et interrégionaux sont regroupés en huit pôles concernant l'éducation et la formation, la gestion publique et le développement économique, les transports, le logement et l'aménagement, la santé publique et la cohésion sociale, l'économie agricole et le monde rural, l'environnement et le développement durable, le développement de l'emploi et l'insertion professionnelle, la culture. Il serait souhaitable que la réforme aille jusqu'au bout et permette de descendre à cinq grands pôles de compétence. Selon le Gouvernement, une réduction de l'ordre de 10 % des effectifs déconcentrés de l'Etat (hors éducation nationale) est possible.

Le Rapporteur spécial a exprimé sa conviction que tous les outils de la réforme de l'Etat sont maintenant disponibles. La Représentation nationale exercera son contrôle pour une meilleure gestion de la fonction publique et un meilleur service aux usagers, grâce à des fonctionnaires plus motivés.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que face « aux résistances de plomb » que peut susciter la réforme de l'Etat, il est nécessaire d'avoir un Rapporteur aussi énergique que peut l'être Georges Tron.

M. Michel Bouvard a indiqué qu'il faudrait 32 ans pour revenir au niveau d'effectifs de la fonction publique de 1983, si on continue sur le rythme actuel. S'agissant de la mise en œuvre de la loi organique, on peut regretter la pratique très contestable de certains ministères qui transfèrent les emplois dans des établissements publics afin de faire apparaître une baisse de leurs effectifs, baisse qui n'est en réalité qu'artificielle. Ceci est évidemment en complète contradiction avec la loi organique, alors même qu'elle n'est pas encore entièrement en vigueur. Il a donc indiqué qu'il déposerait un amendement pour que soit fixé un plafond d'autorisations d'emplois pour les établissements publics.

M. Pascal Terrasse a souligné qu'il était convaincu qu'aucune réforme des institutions n'était possible sans que soit posée la question des missions régaliennes de l'Etat. Cette question a été posée durant le débat sur la décentralisation. Aucune réponse n'a été apportée. A l'heure de la décentralisation et du renforcement de l'Union européenne, ce débat doit être ouvert pour éviter que chaque niveau de pouvoir neutralise les autres. S'agissant de la mise en œuvre de la loi organique et des stratégies ministérielles de réforme, le rapporteur spécial a indiqué que certains ministères ne jouaient pas le jeu de la réforme. Cette situation n'est pas acceptable. Il faut que la commission des Finances et chacun des rapporteurs spéciaux vérifient la façon dont se passe ces réformes dans les ministères.

Le Président de la République a fait de la politique en faveur des handicapés une priorité. Or rien n'apparaît dans le projet de budget en faveur des handicapés au sein de la fonction publique. Des réformes sont-elles prévues cette année ? Quel est le coût, pour le budget de la fonction publique, de la suppression du jour férié destiné au financement de la caisse nationale de la solidarité pour l'autonomie ? Une augmentation de 400 millions d'euros est prévue pour financer les traitements des fonctionnaires, mais, compte tenu de ces mesures annexes, cette augmentation bénéficiera-t-elle vraiment à leur pouvoir d'achat ?

Usant de la faculté que l'article 38 du Règlement de l'Assemblée nationale confère aux députés d'assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, M. Michel Piron a indiqué que les stratégies ministérielles de réforme se font généralement à organisation constante. Le lien avec la loi organique pourrait donc aller jusqu'à une proposition de réorganisation. La réforme de la fonction publique avec un regroupement en sept ou huit corps de métiers va dans ce sens. Par ailleurs, la réforme de l'État ne sera possible que si l'État accepte de ne pas garder une compétence sur la totalité du champ réglementaire et normatif. L'absence d'évolution dans ce domaine empêchera certainement toute évolution des effectifs de la fonction publique.

M. Denis Merville a cité la note de présentation du Rapporteur spécial : « Cette réforme doit permettre d'avoir un État plus réactif et en phase avec les attentes des Français en allégeant et en clarifiant ses structures et ses méthodes de travail, et un État plus efficace, mieux géré, modernisant ses services administratifs et réduisant ses coûts de fonctionnement » et a souligné qu'il partageait parfaitement ce constat. Les réimplantations d'administration en province représentent, aujourd'hui, 31.000 emplois, soit un emploi sur mille dans la fonction publique et un emploi sur cent des 300.000 emplois créés depuis 1983. Il est nécessaire de donner une nouvelle impulsion à cette pratique. S'agissant de la gestion du patrimoine immobilier de l'État, on ne peut que critiquer le fait que 20 % des logements de certains ministères soient aujourd'hui vacants. Des améliorations dans ce domaine sont indispensables.

Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé que la gestion du patrimoine immobilier de l'État était un des futurs sujets de la mission d'évaluation et de contrôle. Il n'y aura pas de réforme de l'État si le périmètre des ministères change sans cesse. Il faut qu'en France, comme c'est le cas partout en Europe, soient déterminés une quinzaine de grands ministères et que leur périmètre ne soit pas modifié. Concernant la mise en œuvre de la loi organique, les contournements de cette loi sont déjà nombreux. Or il est nécessaire que le Parlement ait enfin une connaissance exacte du nombre de fonctionnaires pour chaque action de l'État. C'est pourquoi il est envisagé de déposer un amendement sur le projet de loi organique pour fixer un plafond d'emplois par programme et non plus par ministère. Il faut, certes, protéger le pouvoir d'achat des fonctionnaires. Cependant, compte tenu du poids que représentent les retraites, il ne sera pas possible dans l'avenir de garder les mêmes effectifs dans la fonction publique et de préserver en même temps leur pouvoir d'achat. Il est irresponsable de parler « d'assassinat de l'Éducation nationale » ou de « casse » du service public, lorsqu'on ne supprime que quelques postes. Sur tous les bancs de l'Assemblée, il faut qu'un travail pédagogique soit entamé pour bien faire comprendre à l'opinion publique que c'est pour préserver le service public qu'il faut absolument en baisser les effectifs.

En réponse aux différents intervenants, M. Georges Tron, Rapporteur spécial, a fourni les éléments suivants :

- les transferts d'emploi vers des établissements publics constituent, effectivement, un contournement de la loi organique ;

- il faut approuver le discours de M. Pascal Terrasse sur le lien entre réforme de l'État et réforme des institutions. Une proposition de loi a été déposée par le Rapporteur spécial, il y a quelque temps, visant à ce que le Premier ministre présente chaque année, devant chacune des trois fonctions publiques, les objectifs de l'action de l'État ;

- il convient d'étudier, dans les fascicules budgétaires, ce que chaque ministère met en œuvre en faveur des handicapés ;

- 438 millions d'euros sont prévus cette année pour l'évolution des salaires. Il faut arrêter ce débat surréaliste consistant à dire qu'on peut augmenter les rémunérations en gardant le même nombre de fonctionnaires. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication et la gestion des ressources humaines devraient permettre au moins des redéploiements, voire des suppressions de postes ;

- la politique de réimplantation des emplois publics a démarré lentement. Mais elle connaît aujourd'hui une phase d'accélération : 3.000 emplois sont en cours de transfert et 31.000 transferts ont été effectués ;

- la gestion du patrimoine immobilier de l'État présente de grandes lacunes. Le parc locatif de l'État, qui comprend 137.000 logements, représente une valeur de 1,3 milliard d'euros et ne rapporte, à l'État chaque année, que 32 millions d'euros. Est-il toujours nécessaire que ce soit l'État qui assure la gestion de ce parc immobilier ?

M. Michel Bouvard a indiqué que la mise en place d'un plafond d'autorisation d'emplois par programme faisait aujourd'hui débat. La préparation de la mise en œuvre de la loi organique a révélé que fixer un plafond d'emplois au niveau de la mission n'était pas assez précis. La mission d'information relative à la mise en œuvre de la loi organique réfléchit à cette idée et pourrait faire des propositions lors de la prochaine révision de la loi organique.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Louis Giscard d'Estaing, tendant à réduire de 1.242.879 euros les crédits du chapitre 36-10 du budget des Services généraux du Premier ministre.

M. Louis Giscard d'Estaing a expliqué que la situation de l'École nationale d'administration (ENA) constituait une sorte de « cas d'école » des remarques formulées par M. Georges Tron au cours de son exposé. Quelques phrases ou expressions clefs du rapport qui vient d'être présenté sont particulièrement marquantes : réduire les structures administratives, moderniser l'État, mieux gérer les crédits publics, éliminer les gaspillages, développer la démarche d'objectifs et de résultats, y compris pour la fonction publique, généraliser les actions « gagnant / gagnant », renforcer la qualité du service, etc. Que donnent-elles, appliquées à l'ENA ? Un simple rappel permet de voir que l'ENA reste à l'écart de ces problématiques neuves : les crédits ouverts en 2002 s'élevaient à 26,3 millions d'euros ; ils ont été majorés de 4,5 millions d'euros en 2003 et portés à 30,9 millions d'euros ; il sont été à nouveau majorés, de 1,2 million d'euros en 2004 et portés à 32 millions d'euros. En 2005, une réduction symbolique de 755.000 euros est demandée. Sur l'ensemble des trois années, la dotation de l'ENA s'affiche en hausse très sensible par rapport à celle ouverte en 2002. Est-ce là un exemple de la réforme administrative et de la nouvelle logique de l'action publique ? Cet amendement vise à revenir à un niveau des crédits équivalent à celui de 2003.

Une initiative similaire, l'an dernier, avait permis d'entendre des arguments selon lesquels la fin du service militaire justifiait un gonflement des promotions, le déplacement de l'école à Strasbourg générait des besoins supplémentaires ou encore la sécurité financière de l'établissement obligeait à une augmentation du fonds de roulement. Ces arguments ont été entendus par l'Assemblée nationale et le Gouvernement a pris des engagements sur l'ENA. Aujourd'hui, il est temps de concrétiser ces engagements : cet amendement vise à ce que soit respectée la parole donnée et à ce que soit confirmé le rôle du Parlement dans la réduction des dépenses publiques. Il tire également sa portée de la dimension symbolique qui s'attache à l'ENA. C'est pourquoi il est proposé de revenir à la situation prévalant avant les augmentations de crédits postérieures à 2002.

Dans cette affaire, la Commission des finances doit jouer son rôle et rappeler que l'on ne peut pas impunément demander des crédits supplémentaires tous les ans.

M. Georges Tron, Rapporteur spécial, a remarqué la continuité de pensée de M. Louis Giscard d'Estaing, qui consacre chaque année à l'ENA une partie de son attention. La Commission des finances l'avait suivie au cours de la discussion du projet de loi de finances 2003. Cet amendement considère que l'année 2005 est l'occasion de réduire la demande de crédits de 755.000 euros, en raison de la diminution du nombre des élèves. Ce mouvement s'effectue dans le cadre de la réforme de l'école adoptée par la commission présidée par M. Yves Thibault de Silguy, qui affecte divers paramètres essentiels de fonctionnement de l'école, comme les limites d'âge. Or, chacun sait que toute réforme génère des surcoûts avant de procurer, éventuellement, des économies. Par ailleurs, la direction de l'ENA a exprimé sa préoccupation face aux charges exceptionnelles supplémentaires qui pourraient résulter du déménagement à Strasbourg. Ce déménagement est, en soi, une réponse positive aux positions adoptées par la Commission des finances, qui a toujours affirmé qu'il fallait rationaliser l'implantation géographique de l'ENA. Le déménagement sera effectif en 2005 : les surcoûts pourraient nécessiter une ouverture de crédits dans le prochain collectif. Le devenir de l'immeuble actuellement occupé par l'ENA est également un sujet intéressant, en termes de gestion publique. Il est clair qu'un rachat par un autre organisme d'enseignement - fût-il un prestigieux établissement d'enseignement supérieur ayant quelque affinité avec l'ENA - ne serait pas un bon exemple de dynamisation de la gestion immobilière des administrations.

En définitive, cet amendement est tout à fait fondé, dans son principe, mais son adoption pourrait causer des perturbations alors que l'ENA vit actuellement une période charnière de son existence. On peut souhaiter des économies, mais il faut accepter l'idée d'un surcoût initial, pendant la transition.

M. Jean-Michel Fourgous a indiqué que l'université a désormais pris le relais des écoles dans la formation des élites administratives. Il faut donc réduire les moyens de l'ENA.

M. Louis Giscard d'Estaing a affirmé que la commission pour la réforme de l'ENA avait achevé son travail et qu'il convenait que la réforme soit désormais effective. Lors du débat provoqué par la Commission des finances en 2003, le ministre avait indiqué qu'un objectif de maîtrise de la dépense serait assigné à l'ENA. On en est loin aujourd'hui. Par ailleurs, le Gouvernement a indiqué que l'ouverture de crédits dans le prochain collectif ne concernerait que les surcoûts liés au déménagement à Strasbourg. Cela n'ôte donc en rien sa pertinence au principe selon lequel il convient de revenir, en niveau, au montant des crédits ouverts en 2003, année de référence.

M. Pascal Terrasse a indiqué que le groupe socialiste s'oppose à l'amendement. En effet, cette proposition vise à réduire le budget de l'ENA, alors même que cet établissement est confronté, comme de nombreux établissements d'enseignement supérieur, à de nouvelles charges. Il paraît plus utile de définir ce que l'on attend de cette école avant d'en définir les moyens. Notre pays ne peut pas stigmatiser régulièrement l'ENA et ses anciens élèves, sans poser la question du rôle de la puissance publique, de la République, et de l'évolution de ses institutions.

La Commission a adopté cet amendement.

Elle a ensuite adopté les crédits de la Fonction publique et de la réforme de l'État ainsi modifiés.

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La Commission a ensuite examiné le budget des Services financiers et le budget annexe des Monnaies et médailles.

M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial, a indiqué que le budget des Services financiers, apparemment austère, était en fait un budget « riche » en politiques publiques, qui concerne des administrations diverses comme la direction générale des impôts (DGI), l'INSEE, la direction générale de la comptabilité publique ou la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Il a également une forte dimension territoriale, en raison de la multiplicité des implantations physiques des services sur le terrain. Le montant des crédits représente la majeure partie de ceux inscrits sur le fascicule « Économie, finances et industrie » et s'élève à 10,9 milliard d'euros. Il progresse de 0,8%.

Bercy sait faire sa communication. De nombreuses informations se trouvent dans les brochures diffusées par le ministère. Cela est bien, mais peut devenir gênant lorsque les réponses au questionnaire budgétaire sont parfois de simples reproductions des textes présentés dans les brochures d'information générale. Le 9 octobre, 56% seulement des réponses avaient été reçues, malheureusement les moins « stratégiques ». La discussion du projet de loi organique modifiant la LOLF pourrait donner l'occasion de resserrer quelque peu les conditions de réponse aux questionnaires budgétaires, en vue d'une accélération.

Le périmètre du budget des Services financiers comprend huit agrégats : Cour des comptes et juridictions financières, Trésor public, Direction générale des impôts, Direction générale des douanes et des droits indirects, INSEE, Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, Administration générale et dotations communes, Dépenses administratives. Les dotations de la DGI et de la DGCP diminuent, ce qui doit être mis en perspective avec la démarche de contractualisation mise en œuvre depuis plusieurs années par ces deux directions.

Les charges de personnel représentent 8,5 milliards d'euros, soit 57% de l'ensemble de la section Économie, finances et industrie. L'effectif global s'élève à 174.222 emplois, l'année 2005 étant marquée par une réduction de 2.280 emplois, soit - 1,3%. Le ministère de des Finances a appliqué la ligne directrice consistant à ne pas remplacer un départ en retraite sur deux. Les réductions d'emplois portent surtout sur la DGI et la DGCP. Elles concernent, pour l'essentiel, la catégorie C, dont les effectifs reculent de 3.600 unités. En revanche, les catégories A et B verraient leurs effectifs augmenter de 1.437 unités au total. L'incidence financière des mesures affectant les dépenses de personnel est somme toute modeste : 31,8 millions d'euros.

On pourra noter, parmi ces mesures, l'instauration d'une prime collective de performance, à hauteur de 11,7 millions d'euros, montant qui doit être comparé aux 31,8 millions d'euros des mesures afférentes aux emplois. La prime devra être versée à 15% des agents du ministère, pour tous les agents d'un même service. Elle représente 400 euros par an. Ramenée à sa valeur moyenne mensuelle sur l'ensemble des agents du ministère, cela représente un « geste » de 5 euros par mois environ, ont remarqué les organisations syndicales. On peut se demander si le jeu en vaut vraiment la chandelle : les sommes en jeu sont modestes et le déploiement de la prime pourrait susciter des difficultés entre les services.

Le dénombrement des emplois - essentiel dans la perspective du calcul et du respect des « plafonds d'autorisation d'emploi » prévus par la LOLF - montre que tous les ministères sont confrontés à un énorme problème de gestion des ressources humaines. La direction du personnel, de la modernisation et de l'administration a conduit une réflexion sur la définition du périmètre du plafond des autorisations d'emploi. En réponse au questionnaire budgétaire, elle indique cependant qu'il lui est aujourd'hui impossible de chiffrer précisément le plafond nécessaire pour les autorisations d'emploi au sens de la LOLF. Au vu des informations fournies, on est encore à des années lumière de ce qu'il faudrait réaliser pour disposer d'un plafond, évalué de façon pertinente et opérationnelle.

L'emploi des personnels handicapés augmente de 5,4%, ce qui représente un véritable effort.

En matière de crédits de fonctionnement, le ministère a indiqué travailler dans deux directions :

- la rationalisation des achats, pour une économie envisagée, à terme, de 150 millions d'euros et 33,5 millions d'euros dès 2005. La rationalisation passe par la globalisation des commandes et par l'externalisation de certaines tâches ;

- la poursuite du déploiement de nouvelles solutions informatiques, susceptibles de générer des gains de productivité et d'autoriser une réduction des emplois. Le ministère conduit actuellement trois grands programmes : Accord, Copernic et Hélios. Ils connaissent des augmentations de crédits significatives : par exemple + 21,5% pour Copernic. Le ministère devrait préciser quels sont ses objectifs ultimes en matière d'informatique.

Les crédits du titre IV sont portés de 73 millions d'euros à 78,7 millions d'euros, soit une augmentation de 7,8 millions d'euros qui reflète partiellement la majoration de la subvention versée à l'Agence française des investissements internationaux pour mener la campagne d'information relative à l'image de la France. Les crédits du titre V concernent, très classiquement, les investissements d'équipement des directions, notamment pour la construction ou l'extension des immeubles. Ils représentent 283,7 millions d'euros en 2005.

Quelques faits marquants doivent être notés au sein des agrégats. Pour la DGI, la création de l'« interlocuteur fiscal unique » a conduit à rapprocher les centres des impôts avec les centres des impôts fonciers, ce qui pourrait avoir un impact important sur la présence territoriale des services. La direction des grandes entreprises, forte de 289 personnes, verra son champ d'intervention s'élargir à 35.000 entreprises. Cette direction a un rôle important en matière d'efficacité du contrôle de l'impôt : ainsi, 30 millions d'euros ont pu être rappelés sur d'impôt sur les sociétés et 200 millions d'euros de remboursements de TVA ont pu être évités. Les redressements, au sens propre, ont généré 3 millions d'euros de recettes pour les opérations terminées au 31 décembre 2003. Un montant de 1,8 million d'euros a été enregistré du même chef sur le premier semestre 2004.

Les Douanes mettent en œuvre le projet « Douane 2005 », qui vise à rénover les modalités d'exercice des quatre missions fondamentales exercées par les services des Douanes : le dédouanement, le renseignement, l'intervention aéronavale et la politique des contrôles. La DGCCRF va tenter d'améliorer l'efficacité et la qualité du service rendu au consommateur en ouvrant, depuis le printemps 2004, un numéro d'appel unique « Info Service Consommation ». Elle prévoit également d'intensifier le contrôle exercé sur les produits mis à la vente, pour renforcer la sécurité des consommateurs. L'INSEE a mis en œuvre sans difficultés majeures le recensement rénové.

La LOLF devrait conduire à organiser le budget des Services financiers autour de 3 missions : « Gestion et contrôle des finances publiques », « Stratégie économique et pilotage des finances publiques », « Développement et régulation économique ». Ces missions ne sont pas du tout équilibrées : la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » représente 90% des crédits et 95% des emplois de l'ensemble. Les deux autres missions servent en quelque sorte de faire-valoir.

La mission « Gestion et contrôle des finances publiques » serait organisée en trois programmes. Le plus important d'entre eux, piloté par le secrétaire général du ministère des Finances s'intitulerait Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local et représenterait 90% des crédits et 95% des emplois de la mission. Il demeure encore fortement structuré autour de la traditionnelle répartition entre établissement de l'assiette (DGI) et recouvrement (DGCP). Il aurait été opportun de séparer ce qui relève du recouvrement effectué au profit des collectivités locales, qui aurait pu être regroupé au sein d'une mission interministérielle avec les autres crédits consacrés aux collectivités locales. Pour préserver l'unité de gestion des personnels concernés, le ministère s'est opposé à cette démarche. Les actions du programme sont organisées autour d'une logique d'usager plutôt que de celle reflétant les procédures internes de l'administration. Peut-il faudrait-il aller plus loin et scinder en deux ce programme mastodonte, en distinguant d'une part un programme destiné à la gestion de la fiscalité et, d'autre part, un programme destiné à la gestion comptable. Par ailleurs, la création d'une action spécifiquement destinée à retracer les crédits de lutte contre la fraude serait une bonne chose. Mais le ministère affirme aujourd'hui que l'heure est à la confiance envers les contribuables. Pourtant, pourquoi pourrait-on faire confiance au contribuable - et alléger les contrôles - et la refuser à l'automobiliste - et multiplier les radars automatiques ? Le succès de la direction des grandes entreprises montre, justement, que l'absence de contrôle provoque très vite des « dérapages ».

Les crédits des juridictions financières seraient regroupés dans un programme ad hoc dépendant du ministère des finances, ce qui peut surprendre, s'agissant d'institutions qui ont pour vocation de contrôler la régularité de la gestion des comptabilités publiques. Lors de sa récente prise de fonction, le Premier président a estimé que la Cour des comptes devrait prendre plus d'indépendance vis-à-vis du ministère des Finances. La maquette reste en deçà de ces espérances.

« Bercy ensemble », « Bercy en mouvement » : les slogans changent avec les ministres, mais rien ne se passe.

La communication occupe 522 agents dans un service récemment restructuré et coûte 46 millions d'euros par an. Les effectifs en poste dans les services extérieurs ont été réduits, mais ceux de l'administration centrale sont constants. En 2003, les dépenses destinées à l'informatique ont atteint 768 millions d'euros. En 2004, hors direction générale des impôts, ils sont de 429 millions d'euros et sont prévus à hauteur de 424 millions d'euros en 2005. À ces enveloppes très importantes s'ajoute le coût du projet ACCORD 2, estimé initialement à 1 milliard d'euros sur 10 ans. Si le ministère reste discret sur les péripéties rencontrées par le nouveau programme, la presse en rend régulièrement compte pour souligner le gâchis financier qu'elles ont entraîné. 6,7 millions d'euros ont en effet été dépensés pour lancer le marché, puis pour l'annuler. Finalement, nous en sommes à un programme ACCORD 1 bis, qui coûte 184 millions d'euros et devrait fonctionner le 1er janvier 2006. Ce dossier mérite d'être suivi attentivement. L'époque où l'Etat était au cœur de grands programmes technologiques semble bien révolue : aujourd'hui, il embauche des personnels contractuels ou recourt à des entreprises privées alors que l'importance des programmes mériterait un véritable investissement de l'État en faveur de l'innovation.

En ce qui concerne sa gestion immobilière, Bercy souhaite vendre les grands immeubles qu'il possède à des adresses prestigieuses de Paris. Il sera intéressant de suivre la mise en œuvre de ce programme de cessions.

La transformation de la redevance pose la question des 1.400 agents qui étaient en charge de ce prélèvement. 400 d'entre eux continueront à assurer leur mission de contrôle dans le nouveau régime, 100 départs à la retraite ne seront pas remplacés et les 900 autres agents seront affectés à de nouvelles missions. Ceux qui étaient en charge du recouvrement de la redevance seront ainsi chargés notamment de celui de procès-verbaux liés à l'installation de radars par le ministère de l'intérieur. Finalement, la transformation de la redevance ne se traduira pas par des économies importantes.

La fusion des quatre corps d'inspection du ministère devrait permettre une meilleure coordination de leurs actions.

En ce qui concerne la gestion des personnels, la réduction des effectifs de catégorie C est en trompe l'œil, et les critères de réaffectation territoriale, préconisés par la Cour des comptes, n'ont pas été mis en œuvre. De nombreux bureaux chargés des recettes vont être fermés, la direction de la comptabilité publique ayant choisi de se regrouper au niveau de chaque département.

M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial, a enfin abordé le budget annexe des monnaies et médailles. Il a déploré que des stocks de pièces de 1 et 2 euros aient été constitués alors que les plus petites pièces manquent cruellement. Cette situation est due à une mauvaise allocation de la matière première dont l'approvisionnement a été externalisé. Les commandes passées par le Trésor ne correspondent pas aux matières premières disponibles. Le projet de budget propose l'inscription d'une subvention de 2,7 millions d'euros pour assurer l'équilibre du budget annexe, qui se trouve actuellement dans une situation ubuesque. Des économies sont réalisées sur les personnels, dont une partie a été transférée de Paris à Pessac, si bien qu'un problème de graveurs se posera prochainement. Toutes les décisions restent prises à Paris. La France fabrique pourtant des monnaies pour l'Afghanistan et le Yémen et les vend à des prix différents de ceux facturés au Trésor.

M. Édouard Landrain, Président, a demandé au Rapporteur spécial s'il proposait des thèmes d'études pour la mission d'évaluation et de contrôle et pour la Cour des comptes, et l'a interrogé sur les indicateurs de performance.

M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial, a critiqué la taille de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », et en particulier de son programme « Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local » qui représente 91 % des crédits et 95 % des emplois de la mission. Par ailleurs, le contrôle fiscal aurait mérité de faire l'objet d'une action.

M. Alain Rodet s'est déclaré en faveur du rattachement du contrôle de régularité et de gestion des comptabilités publiques à la mission « Justice » afin d'éviter que les contrôleurs dépendent de la même mission que les contrôlés.

Après que le Rapporteur spécial a donné un avis défavorable, la Commission a adopté les crédits des services financiers et ceux du budget annexe des monnaies et médailles, figurant aux articles 50 et 51 du projet de loi de finances.

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La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. François Scellier, Rapporteur spécial, les crédits du Logement.

M. François Scellier, Rapporteur spécial, a souligné que régnait en ce moment un climat favorable au logement. Le constat des professionnels de la construction et du logement est unanime. Le seul point noir reste le prix de l'immobilier. Par des réformes telles que le dispositif « Robien », le Gouvernement a mis en place une chaîne vertueuse favorable à la construction de logements en France. A présent, il faut garantir une certaine stabilité des dispositifs mis en place.

En 2005, le budget du logement devrait s'élever à 6,526 milliards d'euros, soit une augmentation de 0,35 %. Cependant, à périmètre constant, le budget du logement augmente de 8,35 %, ce qui est très satisfaisant.

S'agissant, en premier lieu des aides à la personne, la dotation budgétaire comprend la contribution versée par l'État au fonds national d'aide au logement pour le financement de l'allocation de logement sociale (ALS) et la subvention d'équilibre versé au fonds national de l'habitation (FNH) pour le financement de l'aide personnalisée au logement (APL). En 2005, les crédits budgétaires en faveur des aides à la personne devraient représenter 5,18 milliards d'euros, soit une hausse de 6,87 %, à périmètre constant. En 2003, ces aides ont bénéficié à 6,1 millions de personnes. Elles remplissent leur rôle de solvabilisation des ménages les plus modestes puisque les locataires représentent 86,9 % des bénéficiaires. Parmi les locataires 98 % ont un revenu inférieur à deux fois le SMIC.

S'agissant du logement des plus démunis, les fonds de solidarité pour le logement (FSL) sont des aides destinées à faciliter l'accès au logement des personnes qui en sont exclues. La dotation de l'État en 2005 devait être de 81 millions d'euros ; l'aide à la médiation locative permet à des associations de pratiquer la sous-location et la gestion immobilière de logements à des personnes défavorisées. En vertu de la loi du 13 août 2004, ces deux aides sont transférées aux Conseils Généraux. Ces crédits sont donc supprimés du budget du logement et donneront lieu à compensation financière au profit des collectivités locales, désormais compétentes ; les aides destinées aux associations logeant à titre temporaire des personnes défavorisées seront transférées en 2005 sur le budget de la direction générale des affaires sociales et bénéficieront de 45 millions d'euros.

S'agissant du financement du logement social, après avoir poursuivi l'objectif de 80.000 nouveaux logements en 2004, le Gouvernement prévoit de financer la construction de 105.000 logements locatifs sociaux en 2005. Cet objectif représente une hausse de 31,25 % par rapport à la loi de finances pour 2004. Est prévu en 2005 le financement de 53.000 prêts locatifs à usage social (PLUS), 5.000 prêts locatifs aidés à l'intégration (PLAI) et de 32.000 prêts locatifs sociaux (PLS). Cela représente une offre nouvelle de 90.000 logements sociaux, auquel il convient d'ajouter ceux qui sont financés par l'ANRU, soit 15.000 logements. Le financement du logement social devrait être doté de 442 millions d'euros d'autorisations de programme et de 465 millions d'euros de crédits de paiement, soit des augmentations respectives de 22 % et de 61 %.

Le Gouvernement entend aussi porter son attention sur les opérations de réhabilitation. Les crédits au profit de la PALULOS (prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale) seront de 48 millions euros en 2005 comme en 2004. Par ailleurs, le Gouvernement et la Caisse des dépôts et consignations ont décidé de consacrer 400 millions d'euros par an, pendant cinq ans, à des prêts à taux privilégiés permettant d'augmenter significativement le nombre des logements réhabilités chaque année.

Le plan de cohésion sociale prévoit ainsi de porter la production de logements locatifs sociaux à une moyenne annuelle de 100.000 par an sur la période 2005-2009, hors programme national de rénovation urbaine. La dotation cumulée sur la durée du plan, prévue pour la réalisation d'opérations locatives sociales hors programme de rénovation urbaine, s'élève à 2.370 millions d'euros en autorisations de programme et 2.761 millions d'euros en crédits de paiement. Une convention entre l'État et l'Union économique et sociale du logement, signée le 27 octobre, accompagne cette relance. Elle prévoit une augmentation substantielle de la participation des employeurs à l'effort de construction affecté au logement locatif social. Une enveloppe annuelle de 210 millions d'euros de subventions, issue des fonds collectés au titre du 1% logement, sera ainsi distribuée, pendant la durée du plan de cohésion sociale, pour la construction de logements sociaux, dans le cadre de concertations décentralisées au niveau régional.

Ce projet de budget permet aussi de relancer l'accession à la propriété. Il propose une amélioration du dispositif de prêt à taux zéro, afin de porter de 100.000 à plus de 240.000 le nombre de primo-accédants aidés.

Le prêt à taux zéro plus (PTZ PLUS) sera ouvert à l'ancien. Aucune condition de travaux ne sera imposée, mais une décote du montant maximum de prêt par rapport au neuf sera appliquée, afin de tenir compte de la différence de prix entre le neuf et l'ancien. L'aide qu'apportera le PTZ PLUS sera supérieure à celle conférée par le dispositif actuel, notamment pour les personnes disposant des revenus les plus modestes ainsi que pour les familles avec un ou plusieurs enfants. Le montant maximum du prêt sera ainsi significativement revalorisé pour la première fois depuis la création du dispositif en 1995. L'avantage lié au différé d'amortissement sera amélioré. Enfin, les plafonds de ressources déterminant l'éligibilité à l'aide seront augmentés de 3 % pour les familles. Le financement du prêt à taux zéro sera assuré grâce à un crédit d'impôt versé aux établissements de crédit afin de compenser l'absence d'intérêts financiers à la charge des emprunteurs.

Le coût du prêt à taux zéro s'élevait à 550 millions d'euros en autorisation de programme et 525 millions d'euros en crédits de paiement en 2004, le nouveau dispositif devrait engendrer une dépense fiscale totale de plus du double. Ce dispositif apparaît tout à fait satisfaisant. Une question subsiste néanmoins : le plafond de ressources est déterminé en fonction des trois zones du dispositif « Robien », contre deux zones auparavant. Certaines communes d'Île-de-France sont écartées de la zone A et sont désormais dans la zone B. Cela peut être lourd de conséquences pour ces communes qui connaissent une pression immobilière importante.

Le décret du 26 mars 2004 et la loi du 9 août 2004 relative au soutien à la consommation et à l'investissement ont réformé le dispositif de location-accession. Bénéficiant d'un taux de TVA réduit et d'une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant 15 ans, le dispositif est désormais plus attractif. Ce nouveau prêt doit permettre de financer 5.000 logements pour les ménages les plus modestes et de favoriser l'accession à la propriété.

Le projet de budget renforce aussi les moyens financiers en faveur de l'amélioration du parc privé. Les moyens accordés par l'État à l'ANAH devraient connaître une hausse significative en 2005 : ils devraient s'élever à 462 millions d'euros en autorisations de programme, soit une augmentation de 17 % par rapport à 2004 et à 395 millions d'euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 5%. On déplore chaque année le manque de moyens de l'ANAH pour la réhabilitation du parc privé, notamment concernant les co-propriétés dégradées, cette augmentation de crédits est donc la bienvenue. Cependant, ces efforts devront perdurer sur le long terme.

S'agissant de la préparation de la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, les crédits du budget « logement » seront regroupés dans la mission ministérielle « Ville et Logement » au sein de deux programmes « aide à l'accès au logement » et « développement et amélioration de l'offre de logement ». Le programme « aide à l'accès au logement » regroupe les aides accordées directement ou indirectement aux ménages qui, pour de multiples raisons, rencontrent des difficultés pour accéder à un logement décent ou s'y maintenir durablement. Deux actions concourent à la réalisation de ce programme : l'action « aides personnelles au logement » et l'action « accompagnement des publics en difficulté ». Une interrogation subsiste néanmoins : dans la mesure où les aides au logement des publics défavorisés sont transférés, soit aux conseils généraux, soit au budget de l'action sociale : l'action « accompagnement des publics en difficulté »  n'aura-t-elle pas une portée limitée ?

Le programme « développement et amélioration de l'offre de logement » regroupe, pour l'essentiel, l'ensemble des crédits que l'Etat consacre à la production de nouveaux logements et à l'amélioration du parc existant. Il comprend les cinq actions suivantes : construction locative et amélioration du parc, soutien à l'accession à la propriété, lutte contre l'habitat indigne, réglementation de l'habitat, qualité et politique technique de la construction et soutien. Le choix a été fait d'inscrire les dépenses de personnel et de fonctionnement dans l'action « soutien » du programme « développement et amélioration de l'offre de logement ». Cela conduit à réunir dans un programme les dépenses de personnel des deux programmes, ce qui est contraire à l'objectif de la loi organique.

En conclusion, ce projet de budget devrait permettre de donner une véritable impulsion au secteur du logement. Cependant, il faut veiller à ce que le secteur de la construction ne faiblisse pas. Il ne faudrait pas notamment que soit remise en cause la TVA à taux réduit. Par ailleurs, plusieurs dispositifs pourraient être mis en place pour favoriser la mise sur le marché de nouveaux logements. Il faudrait notamment harmoniser le régime fiscal applicable aux plus-values mobilières et immobilières, afin de fluidifier et d'encourager l'investissement immobilier. Il faudrait également permettre l'utilisation, en franchise d'impôt, de placements d'assurance-vie pour financer l'achat d'un bien immobilier.

M. Jean-Louis Dumont a partagé l'optimisme mesuré du Rapporteur sur la situation de la politique du logement, exprimant cependant les mêmes craintes que celui-ci.

Ainsi les crédits affectés à la PALULOS, sont en deçà de ce qui avait été demandé. Ce n'est pas satisfaisant car cette prime permet une démarche pragmatique en matière d'entretien de logements anciens et de remise aux normes. Le PTZ PLUS permettra aux jeunes primo-accédants d'acquérir un logement ancien et de réinvestir les centres villes. Les éventuels effets d'aubaine n'excèdent pas ceux qui ont pu résulter, par exemple, des dispositifs mis en place par M. Gilles de Robien. Reste à trouver le foncier ; plutôt que d'attendre la lente mise en place d'établissements publics fonciers, des fonds de minoration foncière, avec les contributions des conseils généraux et des communes, pourraient devenir opérationnels dès 2005.

L'Union d'Economie Sociale pour le Logement (UESL) ne doit pas abandonner l'aide à la pierre. Le financement du logement social est une priorité, eu égard aux besoins qui sont impérieux. La révision du zonage entreprise par M. Marc Philippe Daubresse est une bonne chose. Une plus grande souplesse dans l'augmentation des plafonds permet une plus grande mixité sociale. Les situations d'impayés se multiplient. S'agissant des crédits destinés à la lutte contre l'insalubrité, il faudrait qu'un organisme responsable soit clairement identifié. S'agissant de la relance de la construction de logements sociaux, l'ambition des deux ministres est excellente, à condition que l'on construise là où sont les besoins, et non en instaurant des quotas.

M. François Scellier, Rapporteur spécial, s'est déclaré favorable à l'extension du prêt à taux zéro aux logements anciens. Le risque d'augmentation des prix par les vendeurs ne semble pas avéré.

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé qu'il s'agissait d'un bon budget présentant des réels efforts pour les primo accédants. Cependant, une étude de l'ANIL ayant montré le risque inflationniste d'une extension du PTZ à l'ancien sans quotas de travaux, il s'est inquiété du risque d'augmentation des prix, par un déséquilibre du marché de l'offre et de la demande, à l'instar de ce qui pourrait se produire avec le dispositif « Robien ».

M. Jean-Louis Dumont a confirmé qu'il s'agissait d'une vraie interrogation et qu'il fallait fixer des critères pour l'extension à l'ancien du prêt à taux zéro.

Puis, la commission des Finances, sur la proposition du Rapporteur spécial a adopté les crédits du logement.

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La Commission a poursuivi par l'examen, sur le rapport de M. Jean-Claude Mathis, Rapporteur spécial, des crédits des Anciens combattants.

M. Jean-Claude Mathis, Rapporteur spécial, a tout d'abord précisé que le taux de réponse du ministère au questionnaire budgétaire était très satisfaisant, puisque 95,1 % des réponses étaient parvenues dans les délais et que les deux réponses manquantes ont été reçues deux jours plus tard.

Pour la première fois depuis 10 ans, le budget des Anciens combattants est en progression (+ 0,14 %). Les crédits du ministère chargé des Anciens combattants s'élèveront en 2005 à 3.394,9 millions d'euros, pour 1,4 million de ressortissants au titre de la carte du combattant et 420.000 ressortissants au titre des pensions d'invalidité, dont 130.000 veuves. L'effort moyen par ressortissant augmente même de 4 %, contre une progression, pourtant notable, de 1,58 % en 2004.

La dette viagère est marquée par une double évolution. La diminution du nombre des parties prenantes entraînera une baisse de 88,3 millions d'euros des crédits du chapitre 46-20, qui finance les pensions d'invalidité ainsi que des indemnités et allocations diverses. Cette diminution des crédits est partiellement atténuée par l'application du rapport constant, qui permet de revaloriser les pensions au même rythme que le traitement des fonctionnaires. Une provision de 2,2 millions d'euros est inscrite à ce même chapitre afin de financer une revalorisation du point qui interviendrait en 2005. En outre, le relèvement des pensions des veuves de grands invalides, prévu par l'article 121 de la loi de finances pour 2004, justifie l'inscription d'une mesure nouvelle de 11,84 millions d'euros. De plus, la décristallisation des pensions implique l'inscription d'une provision de 30 millions d'euros. Au total, la baisse des crédits du chapitre 46-20 se limite à 1,8 %, soit 41,2 millions d'euros, contre une baisse de 127,96 millions d'euros en 2004.

En revanche, les crédits affectés à la retraite du combattant (chapitre 46-21) connaissent à nouveau une augmentation. En raison de l'entrée massive dans le dispositif des Anciens combattants d'Afrique du nord, les crédits augmentent de 22,4 millions d'euros, auxquels s'ajoute une mesure d'ajustement positive de 6,98 millions d'euros. Il faut aussi ajouter une provision de 0,6 million d'euros afin de financer une revalorisation du point qui interviendrait en 2005. En outre, une provision de 3 millions d'euros est inscrite afin de financer l'augmentation du nombre des retraites du combattant qui sont servies, depuis le premier juillet 2004, aux personnes ayant servi 4 mois en Afrique du nord. Enfin, la décristallisation des pensions implique l'inscription d'une provision de 2 millions d'euros. Au total, la majoration des crédits de la retraite du combattant atteint 35 millions d'euros (+ 6,2 %), contre seulement 24,1 millions d'euros en 2004.

Malgré la nécessité de maîtriser les dépenses publiques, il convient d'étudier les possibilités permettant de relever le montant annuel de la retraite du combattant, actuellement fixé à 425,37 euros. De même, le plafond de la rente mutualiste du combattant pourrait, de manière échelonnée, être porté de 122,5 à 130 points d'indice. Il convient d'insister sur ces points.

Dans l'ensemble, ces deux évolutions opposées conduisent à une légère baisse des crédits de la dette viagère (- 0,2 %). Cet écart permet d'orienter l'effort du ministère délégué autour d'objectifs clairs : reconnaissance, solidarité, action sociale et mémoire.

Les crédits relatifs aux réductions de tarifs de transport, aux pécules, au fonds de solidarité avec les anciens combattants d'Afrique du nord et d'Indochine, à l'assurance maladie, aux soins, à l'appareillage et la majoration des rentes, qui faisaient l'objet de sept chapitres différents, ne feront l'objet, en 2005, que d'un seul chapitre (46-30).

Les moyens de fonctionnement de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) et de l'Institution nationale des invalides (INI) progresseront et leurs effectifs seront consolidés. A périmètre constant, les moyens de fonctionnement de l'INI augmentent de 50.000 euros, les moyens de fonctionnement de l'ONAC progressent de 564.166 euros, hors action sociale, sans compter une mesure de 294.217 euros destinée à revaloriser les indemnités des agents. Au total, les moyens de l'ONAC auront progressé de 2 millions d'euros depuis 2003.

Compte tenu de nombreuses mesures de transformations d'emplois, les effectifs de l'ONAC se réduiront de 24 postes tandis que ceux de l'INI augmenteront de 4 emplois.

Un certain nombre de mesures en faveur du monde combattant seront consolidées en 2005. La majoration des pensions de toutes les veuves étant effective depuis le premier juillet 2004, son coût en année pleine atteint 11,84 millions d'euros en 2005, inscrits au chapitre 46-20. L'article 123 de la loi de finances pour 2004 a étendu l'attribution de la carte du combattant aux militaires appelés, engagés ou de carrière, présents durant au moins quatre mois en Afrique du Nord. L'obtention de la carte du combattant permettant de percevoir la retraite du combattant, cette mesure se traduit par une augmentation des dotations du chapitre 46-21 de 3 millions d'euros en 2005. La dotation du Fonds de solidarité pour les anciens d'Indochine et d'Afrique du nord passe de 40 millions d'euros en 2004 à 30 millions d'euros en 2005, soit une baisse de 25 %. Cette évolution s'explique par le fait que la classe d'âge la plus importante des allocataires du Fonds de solidarité a atteint 60 ans. Les dotations en faveur de l'action sociale de l'ONAC progressent, pour la seconde année consécutive, puisqu'une mesure nouvelle de 465.000 euros est inscrite au chapitre 46-51, portant sa dotation à 12,6 millions d'euros (+ 3,8 %).

Enfin, le projet de loi de finances consolide l'effort de mémoire, en favorisant notamment la restauration et la préservation du patrimoine. Les crédits consacrés à la mémoire et à l'information historique s'établissent à 8,3 millions d'euros, contre 8,9 millions d'euros en 2004.

Après avoir observé que la progression du budget résultait de la mise en œuvre de mesures déjà décidées en 2003 et en 2004, M. Denis Merville a insisté sur la nécessité de revaloriser le montant de la retraite du combattant ainsi que le plafond de la rente mutualiste du combattant. Est-il envisagé d'accorder une allocation différentielle aux veuves d'anciens combattants dont les ressources sont inférieures au SMIC ? Le contrat d'objectifs et de moyens entre l'Etat et l'ONAC a permis de lever les inquiétudes sur la pérennité de l'établissement public. Enfin, les provisions inscrites au budget des Anciens combattants au titre de la décristallisation des pensions seront-elles suffisantes ?

M. Jean-Louis Dumont a tout d'abord indiqué que la pérennisation de l'ONAC, dont l'utilité pour le monde combattant est reconnue de tous, devait être assurée. Les crédits affectés à la mémoire connaissent une baisse significative. Pourtant, la mise en valeur des lieux de mémoire, au moment où se célèbre le soixantième anniversaire de la libération des camps, est une nécessité pour permettre aux jeunes générations de prendre conscience des sacrifices consentis par leurs aînés. Par ailleurs, la carte du combattant ne doit pas voir son image dénaturée. Compte tenu de la haute dimension symbolique de ce titre, il importe que son attribution réponde à des critères stricts. La France a une dette d'honneur à l'égard des anciens combattants des États antérieurement placés sous la souveraineté française, et particulièrement à l'égard des ressortissants de quelques pays africains, notamment le Sénégal, qui a décidé de mettre en place une journée du tirailleur. Si les critères de pouvoir d'achat utilisés pour revaloriser les pensions d'invalidité de ces anciens combattants n'appellent pas de remarque particulière, la retraite du combattant devrait, en revanche, être versée à tous ceux qui ont combattu pour la France dans les mêmes conditions. Une proposition d'observation a été déposée à cet effet.

M. Pascal Terrasse s'est également inquiété de la diminution des crédits de la mémoire et plus particulièrement des subventions en faveur des actions de mémoire. L'entretien des cimetières militaires doit faire l'objet d'une attention constante pour honorer la mémoire de ceux qui sont tombés pour la France. La spécificité des réfractaires au Service du travail obligatoire (STO) n'a toujours pas été prise en compte. Les services déconcentrés de l'ONAC, qui apportent un soutien de proximité aux anciens combattants et à leurs familles doivent être maintenus. Enfin, les maisons de retraite de l'ONAC ne semblent plus faire l'objet d'une attention particulière, sans doute dans l'attente de leur externalisation.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Claude Mathis, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- le Gouvernement a récemment remis un rapport qui traite de la situation des veuves d'anciens combattants dont les revenus sont inférieurs au SMIC, qui montre que leur identification est très difficile. Il est sans doute plus pertinent de renforcer, comme le fait actuellement le Gouvernement, l'effort d'action sociale en faveur de ce public spécifique ;

- la situation de l'ONAC ne suscite aucune inquiétude et son implantation territoriale doit être maintenue ;

- les crédits inscrits au titre de la décristallisation des pensions dans le projet de loi de finances pour 2005 ne concernent que les anciens combattants ayant opté pour une sortie en capital. La revalorisation des rentes a déjà fait l'objet d'une provision suffisante ;

- la baisse des crédits de subventions en faveur des actions de mémoire doit être nuancée car elles ont été majorées l'an dernier d'une dotation non reconductible de 89.700 euros ;

- les maisons de retraite de l'ONAC voient leurs moyens renforcés, notamment par de nombreuses transformations d'emplois. Le programme d'investissement en leur faveur est également soutenu ;

- les réfractaires au STO qui ont été membres de la Résistance ont obtenu une reconnaissance à ce titre. Il est vrai que les autres réfractaires n'ont pas obtenu de reconnaissance spécifique. Ce dossier doit faire l'objet d'une étude prudente et minutieuse.

M. Michel Bouvard, Président, a interrogé le Rapporteur spécial sur les éventuels thèmes d'enquête à suggérer à la Cour des comptes.

M. Jean-Claude Mathis, Rapporteur spécial, a répondu que la Cour des comptes avait procédé à un examen approfondi de la gestion du ministère délégué aux Anciens combattants en 2000 et qu'il ne semblait pas opportun de lui suggérer un nouveau thème d'enquête.

Puis la Commission a examiné deux propositions d'observation, l'une, présentée par M. Jean-Louis Dumont, tendant à demander au Gouvernement de verser à tous les anciens combattants, quelle que soit leur nationalité, le même montant au titre de la retraite du combattant, et l'autre présentée par le Rapporteur spécial souhaitant que le Gouvernement accélère le processus d'information sur la décristallisation auprès des anciens combattants.

M. Jean-Louis Dumont a rappelé que la France avait une dette d'honneur à l'égard des anciens combattants des pays de l'ancienne Union française, qui se sont vaillamment battus pour sa liberté. Des chefs d'État de pays africains, réunis à Dakar le 23 août, ont souhaité que tous les anciens combattants perçoivent le même montant au titre de la retraite du combattant. Il ne s'agit pas de satisfaire une revendication, mais d'adresser un message de fraternité et de reconnaissance à ceux qui ont risqué leur vie pour la France. Cette dette d'honneur doit être honorée et la blessure de la cristallisation refermée. Bien évidemment, une telle démarche doit prendre en compte la contrainte budgétaire, mais le nombre d'anciens combattants concernés et le montant même de la rente sont limités.

M. Edouard Landrain s'est déclaré sensible à cette argumentation. Il est honteux de voir des hommes qui ont combattu pour la France venir misérablement réclamer leur dû auprès des autorités françaises. Il l'a constaté lui-même lors d'une manifestation de Marocains. La France doit leur accorder la juste reconnaissance qu'ils méritent.

M. Jean-Claude Mathis, Rapporteur spécial, a précisé que son observation visait seulement à demander au Gouvernement de mieux informer les ayants droit pour accélérer le processus de décristallisation. En outre, cette observation concerne l'ensemble des prestations cristallisées alors que l'observation présentée par M. Jean-Louis Dumont propose, elle, la décristallisation totale de la seule retraite du combattant.

M. Michel Bouvard, Président, a observé que les deux propositions pouvaient être combinées et a mis aux voix une observation synthétique que la Commission a adoptée.

Puis la Commission a adopté, conformément à la position du Rapporteur spécial, les crédits des Anciens combattants.

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La Commission a enfin examiné les crédits des Charges communes.

M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, a indiqué que le budget des Charges communes représente la masse la plus importante de tout le budget général. Avec 126 milliards d'euros de crédits demandés pour 2005, en augmentation de 4,9% par rapport à 2004, le budget des Charges communes représente 35,1% des crédits bruts du budget général. Il s'agit d'un assemblage composite de crédits à la destination très diverse. Depuis quelques années, cependant, de nombreux transferts vers ou en provenance d'autres ministères l'ont amené à refléter mieux qu'auparavant sa vocation première, la couverture des « charges communes » de l'État. Il s'agit essentiellement :

- des charges qui ne sauraient figurer dans aucun budget : les dépenses relatives à la dette publique, les remboursements et dégrèvements d'impôts, les dépenses en atténuation de recettes, les dépenses relatives au fonctionnement des pouvoirs publics, font ainsi partie du domaine naturel des « charges communes » ;

- des charges qui possèdent un caractère interministériel : le budget des Charges communes porte par exemple des crédits globaux destinés à être répartis en cours d'exercice, notamment pour des dépenses accidentelles (secours aux victimes de calamités) ou éventuelles (abondement des chapitres du budget général dotés de crédits provisionnels), ainsi que, certaines années, une provision générale au titre de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique.

En revanche, restent inscrites sur le budget des Charges communes des dotations qui relèvent des compétences propres du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, comme, par exemple, les versements à certains régimes spéciaux de sécurité sociale, les aides à la pierre, diverses aides en faveur de rapatriés ou certaines majorations de rentes.

La loi organique relative aux lois de finances définit la façon dont, à partir de la loi de finances pour 2006, devront être inscrites au budget certaines dotations actuelles du budget des Charges communes :

- la charge de la dette sera rattachée à un compte spécial qui supportera les charges d'intérêt et les charges et produits liés à la gestion active de la dette, notamment les swaps de taux ;

- les garanties devront faire l'objet d'un programme spécifique, doté de crédits évaluatifs, de même que les remboursements et dégrèvements ;

- les dotations des Pouvoirs publics constitueront les différents programmes d'une mission unique ;

- une mission spécifique rassemblera la dotation pour mesures générales en matière de rémunérations des agents de l'État et la dotation pour dépenses accidentelles ;

- le compte spécial relatif aux pensions de retraite et charges accessoires regroupera toutes les dépenses de pension.

L'essentiel des crédits des Charges communes constituerait la matière de deux missions gérées par les services du ministre des Finances :

- la mission « Engagements financiers de l'État » (46,4 milliards d'euros en 2005) regrouperait cinq programmes consacrés, respectivement, à la charge de la dette et de la trésorerie de l'État (42,4 milliards d'euros), aux appels en garantie (125,4 millions d'euros), à l'épargne-logement et divers dispositifs de financement du logement en voie d'extinction (1,3 milliard d'euros) et aux majorations de rentes (243 millions d'euros). Le programme destiné à l'apurement des cotisations dues par l'État à la Caisse nationale d'allocations familiales (2,4 milliards d'euros), inclus dans le document de préfiguration des projets annuels de performance, devrait en fait disparaître d'ici à la présentation du budget 2006 ;

- la mission « Remboursements et dégrèvements » (68,3 milliards d'euros) serait organisée en deux programmes : Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (57,2 milliards d'euros) et Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (11,1 milliards d'euros). Cette mission - la plus importante, en masse, dans le budget général - pose problème au regard de l'objectif premier de la LOLF, qui consiste à organiser les crédits selon la finalité de la dépense. En effet, elle regroupe les crédits concernés en fonction de la nature de la dépense alors qu'une structuration selon leur finalité - soutien aux entreprises, allégement à caractère social de la charge fiscale pesant sur les ménages, gestion technique de l'impôt, etc. - aurait dû conduire à les répartir entre différentes missions du budget général, comme Développement des entreprises ou Solidarité et intégration, dans des programmes spécifiques puisqu'il s'agit de crédits évaluatifs. Il est vrai que la gestion technique, comptable et extra-comptable, des remboursements et dégrèvements est parfois complexe et que les systèmes d'information actuels ne semblent pas permettre d'envisager cette solution dès aujourd'hui. Il n'empêche que la question doit rester ouverte pour le futur.

Les crédits des Charges communes relatifs aux pensions n'apparaîtront plus en tant que tels : les charges de pension seront imputées sur le compte d'affectation spéciale ad hoc, y compris les charges dues au titre des mécanismes de compensation généralisée et spécifique entre régimes spéciaux d'assurance vieillesse. Le compte spécial sera alimenté, en recettes, par des versements imputés sur des crédits inscrits sur les différents programmes comportant des dépenses de personnel, en fonction du taux de contribution employeur déterminé pour les personnels rémunérés par ces programmes. Les autres crédits seront répartis dans différentes missions.

Le premier sujet qu'il convient d'évoquer est le programme « Charge de la dette et de la trésorerie de l'État », qui n'est pas un nouveau venu dans le paysage des Charges communes. En effet, depuis le projet de loi de finances pour 2002, le Gouvernement propose au Parlement d'examiner les crédits relatifs à la charge de la dette dans le cadre d'un « pré-programme », au sens de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, dont le pilotage est assuré par l'Agence France Trésor.

Celle-ci a traduit les orientations arrêtées par le Gouvernement et approuvées par le Parlement, tendant à définir une stratégie d'endettement, qui s'appuie toujours sur les principes généraux désormais classiques : simplicité de l'offre de titres, organisée autour des trois grandes catégories bien connues que sont les BTF, les BTAN et les OAT ; liquidité du marché, afin d'attirer les investisseurs et de leur donner la possibilité d'effectuer des arbitrages ; transparence, avec la mise en œuvre d'une procédure de vente des titres qui assure l'égalité de tous les investisseurs et leur mise en concurrence.

Placé sous la responsabilité du directeur du Trésor, le programme a pour objet de « permettre à l'État d'honorer ses engagements financiers en toute circonstance », c'est-à-dire, en pratique, de faire en sorte que le compte de l'État à la Banque de France soit toujours créditeur en fin de journée. Il sera organisé en trois actions : Dette négociable ; Trésorerie de l'État ; Dette non négociable. Les objectifs, désormais au nombre de huit, ont été répartis entre ces trois actions. Les indicateurs associés aux objectifs se sont à nouveau enrichis et affinés par rapport à l'an passé. Deux indicateurs relatifs aux conditions de réalisation des adjudications, deux indicateurs relatifs à la pertinence des choix d'émission effectués par l'AFT, un indicateur relatif au taux d'annonce de leurs opérations par les correspondants du Trésor, un indicateur sur le taux de rejet des opérations de remboursement de la dette non négociable et un système hiérarchisé d'indicateurs et de sous-indicateurs relatifs à la maîtrise des risques ont ainsi été ajoutés.

L'AFT a engagé en 2003 des études exploratoires sur la possibilité d'émission de titres en devises, couvertes contre le risque de change, à la suite de l'autorisation de principe qui a été accordée dans la loi de finances initiale pour 2003. Ces études concluent que de telles émissions n'apparaissent pas opportunes dans le contexte actuel ;

- un programme de swaps de taux d'intérêt a été engagé à la fin de l'année 2001 mais suspendu le 3 septembre 2002, à titre provisoire, en raison de conditions de marché jugées trop peu favorables. Il n'apparaît pas possible de le reprendre, pour l'heure, mais les contrats arrivant à échéance sont renouvelés ;

- la stratégie de financement proposée à l'examen du Parlement consiste à réduire à 5 ans et 6 mois à la fin de l'année 2005 (au lieu de 6 ans et 2 mois au 30 septembre 2004) la durée de vie moyenne de la dette négociable, afin de bénéficier de taux d'intérêt moins élevés. Ce résultat s'entend comme devant être atteint dans le cas de conditions de marché favorables permettant une reprise du programme de swaps.

Trois grands blocs structurent le budget des Charges communes. La charge nette de la dette, qui représente plus d'un tiers du total, augmenterait de 1,2 milliard d'euros entre 2004 et 2005, soit + 3,1%, et s'établirait à 39,5 milliards d'euros. On prévoit donc une légère accélération par rapport à 2004, où le taux de progression ne devrait être que de 2,6%. Depuis plusieurs années, les charges d'intérêt ont enregistré les effets bénéfiques de la baisse du déficit et de la baisse des taux. Cet « effet taux » dure tant que subsiste un décalage entre le taux moyen de la dette et le taux moyen du marché. Lorsque l'effet taux s'affaiblit, la charge de la dette est gouvernée par l'« effet volume », reflet de l'accroissement de l'encours, qui découle principalement du déficit budgétaire. Un déficit de 45 milliards d'euros par an financé au taux moyen de 5% génère une charge d'intérêt supplémentaire de 2,25 milliard d'euros chaque année. Cette évaluation sommaire rappelle combien est nécessaire une réduction continue du déficit budgétaire, réduction qui reste l'unique moyen de maîtriser vraiment, sur le long terme, la charge de la dette. Lorsqu'on parle du Pacte de stabilité et qu'on entend avancer des idées et des propositions variées pour assouplir sa discipline, il faut se souvenir que le Pacte ne traite que du déficit et de la dette, mais pas de la charge de la dette. Or, pour l'État, la charge de la dette représente un des premiers postes de dépenses et préempte 15% des recettes fiscales. Les règles du Pacte de stabilité ne sont pas des contraintes inutiles et néfastes, mais un garde-fou indispensable. Avoir oublié cet arrière-plan, depuis de trop nombreuses années, pèse lourdement sur nos finances publiques.

Le besoin de financement de l'État est constitué, à titre principal, du déficit budgétaire et du montant des amortissements de titres arrivés à échéance. En 2005, le déficit budgétaire s'établirait à 44,9 milliards d'euros et le montant des amortissements serait égal à 73,1milliards d'euros. Le besoin de financement de l'État devrait donc s'élever à 118 milliards d'euros. Il serait intégralement financé par des émissions de titres à moyen et long terme.

Les remboursements et dégrèvements atteindraient 66,6 milliards d'euros en 2004 et 68,3 milliards d'euros en 2005, augmentant ainsi de 2,6% d'une année sur l'autre. Cela marque une légère accélération par rapport à l'an dernier, le taux de progression en 2004 étant prévu à + 0,6%. Les remboursements et dégrèvements représenteraient, en 2005, 20,1% des ressources fiscales brutes, ce qui montre l'importance de ce mécanisme budgétaire.

Les remboursements de TVA progressent de 3,4% par rapport à 2004. Ils atteindraient ainsi 36,7 milliards d'euros. Leur prévision est difficile et l'observation des dépenses des années précédentes montre, d'ailleurs, des à-coups sensibles. On peut à bon droit s'interroger sur la qualité médiocre des prévisions, mais le ministère des Finances estime qu'un lien a pu être établi entre l'évolution des remboursements de crédits de TVA et l'évolution des investissements et des exportations.

Les dégrèvements au titre des impôts locaux atteindraient 11,1 milliards d'euros soit une augmentation de 7,3%. Les dégrèvements de taxe professionnelle en représentent environ 68%. Les réformes du dispositif de plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, en 1995 et 1996, ont mis deux à trois ans avant de produire leur plein effet. Par ailleurs, la réforme de la taxe professionnelle par suppression progressive de la part « salaires » dans les bases d'imposition a stabilisé le coût du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée. Il conviendrait cependant d'engager une démarche d'évaluation pour cerner les répercussions véritables des nombreuses modifications législatives qui ont affecté les dégrèvements de taxe professionnelle ces dernières années. En 2005, les dépenses budgétaires progresseraient de 8,5%, de par :

- l'effet de l'évolution spontanée (154 millions d'euros) ;

- l'instauration, prévue par l'article 14 du présent projet, d'un crédit d'impôt de taxe professionnelle pour le maintien de l'activité dans les zones d'emploi en grande difficulté (330 millions d'euros) ;

- le renforcement, prévu par l'article 15 du présent projet, du dégrèvement de taxe professionnelle en faveur des entreprises disposant de véhicules routiers ou d'autocars (60 millions d'euros) ;

- l'effet supplémentaire en 2005 du dégrèvement de taxe professionnelle au titre des immobilisations nouvelles affectées à la recherche, prévu par l'article 82 de la loi de finances initiale pour 2003 (15 millions d'euros).

Les dégrèvements de taxe d'habitation semblent installés sur un sentier de croissance régulier de 2,6% par an, malgré le dispositif de « gel » des taux instauré par la réforme de la taxe d'habitation de juillet 2000.

Les restitutions d'impôt sur les sociétés s'élèveraient à 7,7 milliards d'euros, en légère progression par rapport à 2004 (+ 0,7%). Les restitutions d'excédents de versements (impôt trop perçu) évoluent, en général, à rebours de la situation économique, ce qui suggère que les entreprises ont du mal à anticiper correctement les répercussions de la conjoncture sur leur résultat. Les remboursements de crédits d'impôts ne font pas l'objet d'une prévision en loi de finances. Ils représentent, en moyenne, une dépense de 350 à 400 millions d'euros.

Une dotation de 200 millions d'euros était inscrite sur le chapitre 31-94 « Mesures générales intéressant les agents du secteur public » en 2004, afin de financer les mesures de revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenues en janvier 2004. Aucune dotation de ce type n'est demandée dans le présent projet, ce qui signifie qu'aucune augmentation salariale n'est officiellement envisagée d'ici à la fin de 2004.

La stabilité du point de la fonction publique constitue un soutien indispensable à la politique de maîtrise de dépenses. Il faudra bien se poser un jour la question du maintien de cette stabilité dans la durée, car on ne peut laisser se creuser un écart trop important entre les rémunérations publiques et les rémunérations privées pour des qualifications équivalentes. Le Président Pierre Méhaignerie a fait part, récemment, de ses préoccupations sur ce sujet. Il serait souhaitable que la Commission des finances adopte une observation afin d'inviter le Gouvernement à réfléchir à une démarche où une augmentation de la valeur du point d'indice pourrait être financée par une plus grande maîtrise du nombre des emplois.

Les charges de pension inscrites sur le budget des Charges communes passent de 6,76 milliards d'euros à 6,87 milliards d'euros (+1,5%). Cependant, la charge nette du régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires pour le budget général peut être évaluée à 28,1 milliards d'euros en 2005, ce qui correspond à un taux de cotisation implicite de 60,2%. Paradoxalement, la réforme des retraites adoptée pendant l'été 2003 se traduit par un surcoût à court terme, puisque les pensions sont désormais indexées sur les prix et non sur le point d'indice de la fonction publique.

Les crédits destinés à la compensation démographique des ressources et des charges des régimes de sécurité sociale diminuent de 240 millions d'euros et s'établissent à 2,1 milliards d'euros. La prise en charge par l'État de la dérive des charges de pensions des fonctionnaires de la Poste a été provisionnée pour 371 millions d'euros en 2005 au lieu de 221 millions d'euros en 2004. Les crédits pour cotisations et prestations sociales atteindraient 2.415 millions d'euros en 2005, en augmentation de 726,7 millions d'euros. La majeure partie correspond à l'apurement des cotisations familiales dues par l'État à la Caisse nationale des allocations familiales (2.362 millions d'euros), qui enregistre par ailleurs les conséquences du transfert à la CNAF du service des prestations familiales. Les crédits de l'article correspondant ont été majorés de 643,4 millions d'euros par transfert à partir des autres sections budgétaires.

Une autre rectification mineure de périmètre affecte le budget des Charges communes en 2005 : les crédits destinés à la réparation des préjudices résultant de la contamination par le virus d'immunodéficience humaine de transfusés et aux contentieux transfusionnels sont transférés sur le budget de la Santé. Le transfert porte sur 12,2 millions d'euros.

Les crédits pour charges de garantie atteignent 125,4 millions d'euros. Les crédits des pouvoirs publics sont portés à 844,4 millions d'euros (+ 1,6%). Le doublement, en 2003, de la dotation demandée au profit de la Présidence de la République marque l'arrivée à maturité du processus de clarification engagé depuis plusieurs années et la dotation demandée évolue maintenant comme l'ensemble des charges de l'État. Les crédits pour dépenses accidentelles sont majorés de 149 millions d'euros et atteignent 195 millions d'euros. On sait, cependant, que cette dotation est parfois mise à profit pour « gager », au cours de la discussion parlementaire, des majorations décidées par le Gouvernement sur d'autres chapitres budgétaires. Pour leur part, les crédits pour dépenses éventuelles sont stables à 45 millions d'euros. Les crédits pour primes d'épargne-logement versées par l'État s'établissent à 1.250 millions d'euros, en diminution de 100 millions d'euros. Leur niveau s'ajuste, avec retard, sur l'évolution constatée des dépenses depuis 2001. Les versements de l'État à divers régimes obligatoires de sécurité sociale occasionneraient, en 2005, une dépense de 693,2 millions d'euros au lieu de 755,2 millions d'euros en 2004.

S'agissant des comptes spéciaux du Trésor, dont deux sont examinés en même temps que le budget des Charges communes, il apparaît que le compte n° 902-33 « Fonds de provisionnement des charges de retraite » n'enregistrerait aucune recette et aucune dépense en 2005 : aucune nouvelle licence UMTS ne sera attribuée en 2004 ou 2005 et les recettes susceptibles d'être tirées des services commerciaux lancés à la fin de l'année 2004 par les titulaires actuels de licences ne paraissent pas pouvoir être évaluées sur des bases solides.

Le compte de commerce n° 904-22 « Gestion active de la dette et de la trésorerie de l'État » retrace l'incidence budgétaire des opérations sur instruments financiers à terme conduites par l'Agence France Trésor (AFT) pour réduire la charge de la dette de l'État. Jusqu'ici, l'AFT n'a conclu que des contrats d'échange (swaps) de taux d'intérêt. Le programme de swaps a été interrompu en septembre 2002 du fait de conditions de marché défavorables (forte volatilité des taux d'intérêt et niveau très bas des taux à 10 ans). Le solde du compte de commerce serait positif de 290 millions d'euros à la fin de l'année 2004. En 2005, un solde positif de 347 millions d'euros est attendu, en raison de l'arrivée à maturité des derniers swaps conclus par l'Agence en 2002. Une autorisation de découvert de 1,7 milliard d'euros est demandée, identique à celle accordée en 2004.

M. Pascal Terrasse a souhaité connaître les raisons de la forte augmentation de la dotation demandée sur le chapitre 37-95 portant sur les crédits pour dépenses accidentelles. Est-ce le signe que le Premier ministre veut s'accorder une certaine latitude dans la détermination future de choix budgétaires ? La stabilité du point d'indice renvoie à la question de la préservation du pouvoir d'achat des fonctionnaires et, surtout, à celle de l'attractivité de la fonction publique qui commence à être confrontée à des besoins plus importants en recrutement. Les mesures d'âge pour un départ anticipé en retraite pour cause de « carrière longue » sont très différentes d'avec le secteur privé. Les classes d'âge 1948 à 1951 sont exclues du dispositif prévoyant un départ à 56 ans, ce qui pose problème. Enfin, il serait opportun que la Commission des finances organise une mission d'information pour faire le point sur les dégrèvements de taxe professionnelle. Il faudrait effectuer, peut-être à partir de janvier 2005, une évaluation approfondie des nombreuses mesures législatives qui ont modifié le système de ces dégrèvements depuis 1999. Il y a actuellement un manque de lisibilité évident.

M. Michel Bouvard, Président, a souhaité savoir quels pouvaient être les sujets de contrôle susceptibles d'être confiés à la Cour des comptes.

M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, a indiqué que le budget des Charges communes se prêtait mal, par nature, à des contrôles, mais que les différents dispositifs financés par ses crédits pouvaient utilement faire l'objet d'évaluations, lesquelles sont dans le champ naturel d'intervention d'un Rapporteur spécial.

M. Michel Bouvard, Président, a exprimé son plein accord avec les remarques formulées par le Rapporteur spécial sur la constitution de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Une telle mission n'est pas du tout satisfaisante dans la maquette actuelle. Il faudra qu'elle évolue dans un sens plus conforme à la lettre et à l'esprit de la LOLF, dans les années futures. Les interventions de l'État en direction de différentes caisses de régimes spéciaux peuvent susciter des questions. Ainsi, la prise en charge par l'État de la dérive des charges de pension de La Poste progresse très rapidement. De même, la caisse de retraite du régime des mines, qui reçoit une subvention importante, semble être propriétaire d'un patrimoine immobilier que l'on dit être de qualité et supporte des frais de gestion élevés. N'y aurait-il pas quelque raison d'interpeller la caisse sur ces éléments ?

M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, a apporté les réponses suivantes :

- la majoration de la dotation du chapitre 37-95 (+ 150 millions d'euros) est en trompe-l'œil, car elle a vocation à servir de gage à des redéploiements de crédits décidés à l'issue de la discussion de la seconde partie de la loi de finances, à l'initiative de la Commission des finances. Une fois que cette répartition aura été faite, la dotation effectivement votée devrait être identique ou très voisine de la dotation votée en 2004 ;

- la stabilité du point d'indice de la fonction publique, maintenue trop longtemps, est susceptible d'avoir plus d'inconvénients que d'avantages ;

- l'évolution du montant et la cohérence du dispositif des dégrèvements de taxe professionnelle sont, effectivement, des sujets intéressants. Cependant, la commission dirigée par M. Olivier Fouquet a entrepris un travail de fond sur l'ensemble de la taxe professionnelle. Une initiative de la Commission des finances risquerait d'être prématurée : il vaut mieux attendre que cette commission ait achevé ses travaux pour voir dans quelle mesure ceux-ci peuvent être poursuivis ou complétés par une mission d'information de la commission des Finances ;

- l'État ne prend en charge que la dérive tendancielle des charges de pension de la Poste, c'est-à-dire un solde par rapport à une situation de référence figée en 1997. L'accélération des départs en retraite provoque une évolution dynamique des charges de pension, mais, pour des raisons purement « mécaniques », une évolution encore plus dynamique du seul solde pris en charge par l'État ;

- le régime des mines a été réformé par le décret du 2 novembre 2004. Cette réforme prévoit notamment une clarification et une simplification de certains flux financiers entre les branches assurant les différents risques, une réduction des structures administratives de gestion et un contrat de gestion et de performances avec l'État. Certaines interrogations devraient donc trouver une réponse favorable dans un futur proche.

M. Michel Bouvard, Président, s'est étonné d'un « mystère français », qui a vu les effectifs de la fonction publique d'État progresser de 320.000 unités entre 1980 et 2001, alors même qu'une partie des compétences de l'État a été transférée aux collectivités territoriales. A supposer que l'on parvienne à réduire les effectifs de 10.000 chaque année, il faudrait 32 ans pour revenir au niveau de 1980 ! Ne nous laissons pas prendre au piège du catastrophisme en matière de réduction d'effectifs : avant 1980, il y avait assurément des postiers, des agents de l'équipement, des personnels hospitaliers, etc. La France n'était pas sous-administrée... Certes, la réduction de la durée du travail a apporté son écot à l'augmentation de l'emploi public. Mais il y a certainement un champ d'économies à explorer.

M. Pascal Terrasse a fait observer que sur la même période, la population avait augmenté de près de 5 millions d'habitants et qu'une partie du phénomène pouvait aussi s'expliquer comme la réponse du système public aux besoins de la population. La vraie question est : vers la satisfaction de quels besoins les emplois publics nouveaux sont-ils allés ? On ne doit pas refuser par principe une diminution des effectifs. Encore faut-il ne pas refuser par principe une augmentation là où de vrais besoins sont recensés. Il faut avoir une démarche très ouverte. S'agissant des hôpitaux, par exemple, l'augmentation de la durée de vie et l'amélioration des modalités de prise en charge justifient le renforcement des effectifs. Le principe d'une réduction des effectifs de l'État ne doit pas être repoussé, mais l'État doit dire vers quel modèle il veut aller. Le débat est ouvert.

M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, a estimé que l'observation qui serait soumise au vote de la Commission des finances devra éviter de présenter la question salariale comme une simple mise en balance entre valeur du point d'indice et niveau des effectifs. Il faut aborder la question de façon plus intelligente, par exemple en soulignant le danger d'une aggravation prolongée de l'écart entre rémunérations publiques et rémunérations privées et en suggérant qu'une augmentation générale des rémunérations pourrait avoir pour contrepartie une meilleure maîtrise des effectifs.

M. Michel Bouvard, Président, a estimé qu'il faudrait également rechercher à dégager des économies sur les services qui ne sont pas au contact avec le public.

M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, a jugé que l'idée était bien de promouvoir les gains de productivité, notion qui ne doit pas rester étrangère à l'univers de la fonction publique, et dont une partie devrait bénéficier directement aux agents eux-mêmes.

Sur la proposition de M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, et de M. Michel Bouvard, Président, la Commission des finances a adopté une observation par laquelle elle constate l'absence de traduction budgétaire d'une mesure de revalorisation du point d'indice dans le projet de loi de finances pour 2005, le danger qu'il y aurait à voir s'accroître l'écart entre rémunérations publiques et privées. Une progression de ces rémunérations aura pour contrepartie un meilleur maintien de l'emploi public, notamment par un moindre renouvellement des départs en retraite.

Sur la proposition de M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, la Commission a adopté les crédits des Charges communes figurant aux titres I, II, III, IV et VI, sans modification.

Article 73 : Mise en oeuvre du droit au départ anticipé en retraite, pour les fonctionnaires ayant commencé à travailler très jeunes et ayant effectué une longue carrière :

M. Daniel Garrigue, Rapporteur spécial, a indiqué que cet article tendait à instaurer un droit au départ anticipé en retraite pour les fonctionnaires ayant commencé à travailler jeunes et ayant eu une longue carrière. Le dispositif retenu consiste à offrir un système identique à celui offert aux salariés du secteur privé, à l'exception d'une montée en charge progressive : le droit au départ à 56 ans n'est ouvert qu'à compter du 1er janvier 2008 et le droit au départ à 58 ans n'est ouvert qu'à compter du 1er juillet 2006.

Du fait de l'allongement tendanciel de la durée des études et du recul corrélatif de l'entrée dans la vie active, les générations ayant travaillé le plus longtemps sont les générations les plus anciennes, touchées par le caractère progressif de la montée en charge du dispositif. Un tel décalage se justifie par trois éléments. En premier lieu, la réforme des retraites appliquée aux régimes de la fonction publique repose sur un principe général de convergence progressive et non immédiate. D'où les calendriers afférents, par exemple, à l'alignement de la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une pension à taux plein ou à l'instauration du mécanisme de décote / surcote. Il ne serait pas cohérent que, d'une part, les dispositions de la réforme qui représentent une « contrainte » pour les agents publics soient mises en œuvre de façon échelonnée et que, d'autre part, le départ anticipé pour cause de longue carrière soit, lui, mis en œuvre immédiatement.

En second lieu, les régimes de la fonction publique, notamment le code des pensions civiles et militaires de retraite, prévoient des possibilités de départ anticipé, soit pour cause de pénibilité (départ à 55 ans pour les catégories dites « actives », soit pour raison familiale (départ sans condition d'âge pour les mères de trois enfants, sous réserve d'avoir accompli 15 ans de services). Enfin, les considérations de coût ont fait prévaloir un étalement dans le temps, dans un contexte budgétaire contraint.

Des simulations effectuées par l'INSEE montrent que, toutes fonctions publiques confondues, près de 30.000 personnes pourraient partir la première année, si le dispositif était intégralement ouvert à toutes les classes d'âge. Le besoin de financement serait accru de 750 millions d'euros la première année et 410 millions d'euros en 2010, puis 330 millions d'euros en 2015 et 140 millions d'euros en 2020. Pour la seule fonction publique de l'État, le présent projet estime l'impact du dispositif « carrière longue » à 70 millions d'euros en 2005 et 140 millions d'euros en année pleine.

Sur la proposition du Rapporteur spécial, la Commission a adopté cet article sans modification.

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