COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 31

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 30 novembre 2004
(Séance de 11 heures)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Rencontre avec des députés membres de la commission des Finances du Bundestag : « Fiscalité, croissance économique et délocalisations d'entreprises ».

2

- Communication de M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial des crédits des Affaires étrangères et francophonie, sur les implantations et les cessions de locaux diplomatiques en Allemagne

7

La commission des Finances a procédé à une rencontre avec des députés allemands, membres de la commission des Finances du Bundestag : MM. Jörg-Otto Spiller (SPD), Joachim Poss (SPD), Stefan Müller (CDU-CSU), Klaus-Peter Flosbach (CDU-CSU) et Volker Wissing (FDP).

Le Président Pierre Méhaignerie a souhaité la bienvenue à ses collègues du Bundestag et leur a demandé quel jugement ils portent sur l'économie française.

M. Jörg-Otto Spiller a observé que la France et l'Allemagne doivent affronter une situation également difficile, s'agissant en particulier de l'avenir de leurs systèmes respectifs de sécurité sociale. C'est pourquoi l'Allemagne a engagé des réformes courageuses : celle du système des retraites d'abord, puis celle du dispositif d'indemnisation du chômage. Rien de tout cela n'a été facile mais, étant donné l'ampleur des déficits publics - supérieurs au seuil de 3 % du PIB prévu dans le Pacte de stabilité - l'accord s'est fait au Parlement sur la nécessité de mener ces réformes à bien. L'objectif est bien de parvenir, à l'avenir, à respecter ce seuil et aussi l'article de la Loi fondamentale selon lequel l'endettement nouveau ne peut excéder le montant des dépenses d'investissement.

M. Charles de Courson a fait valoir qu'il s'agissait d'une idée défendue de longue date, en France, par l'UDF.

M. Jörg-Otto Spiller a exposé que, sur le plan macro-économique, la reprise est un peu plus forte en France qu'en Allemagne, où la croissance s'établit à 1,5 %. La différence la plus marquante entre les deux pays tient à ce que la croissance allemande est tirée par les exportations, cependant que la demande intérieure reste stable : la consommation des ménages est invariable, les investissements des entreprises n'augmentent que faiblement, et depuis peu de temps.

M. Klaus-Peter Flosbach a indiqué que, comme l'on peut s'y attendre en démocratie, les opinions sur le Pacte de stabilité divergent selon que l'on appartient à la majorité ou à l'opposition. De fait, la CDU-CSU considère que les critères du Pacte doivent être strictement respectés, mais qu'étant donnée la politique menée par le Gouvernement, il est fort probable qu'ils ne le seront pas l'année prochaine, pour le quatrième exercice consécutif. Pour le reste, les difficultés que connaît l'Allemagne sont similaires à celles de la France. Ainsi, 41 % des ménages, faute de revenus propres, dépendent des transferts sociaux. Par ailleurs, l'Allemagne compte 19 millions de retraités - et ce nombre ne cesse de croître - et 27 millions de travailleurs vivent des revenus de leur activité, sur une population totale de 82 millions de personnes. La différence majeure entre les deux pays tient à ce que l'économie allemande est fortement tributaire du commerce extérieur : les exportations constituent 37 % de l'activité économique, et la part des importations dans la valeur ajoutée est à peu près équivalente.

La CDU/CSU considère enfin qu'un débat de fond doit avoir lieu sur le fédéralisme et le partage des compétences. Actuellement, 60 % des projets de loi doivent être adoptés par le Bundesrat, où l'opposition est majoritaire, avant d'entrer en vigueur, de sorte que la population ne sait pas exactement qui endosse la responsabilité des politiques menées. Il ne faudrait pas croire que tous les sujets soient cause d'affrontements parlementaires. Ainsi, la récente loi sur le contrôle des assurances a fait l'objet d'un consensus.

M. Philippe Auberger a souhaité savoir quelle appréciation porte l'Allemagne sur les cours respectifs de l'euro et du dollar, dont le cours est un frein à l'activité exportatrice. La définition d'une stratégie commune franco-allemande, qui tendrait à inverser une tendance très préjudiciable à la croissance européenne, est-elle envisagée ? Quels devraient être les rôles respectifs de M. Jean-Claude Juncker et du gouverneur de la BCE, M. Jean-Claude Trichet ?

Enfin, les membres de la commission des finances du Bundestag considèrent-ils que le Traité constitutionnel devrait préciser le rôle de la BCE et spécifier qu'elle a aussi mission de favoriser la croissance et l'emploi ?

M. Michel Bouvard a demandé si l'Allemagne connaît, comme la France, des délocalisations. Si oui, se font-elles des Länder de l'ouest vers ceux de l'est, ou bien vers la Pologne et la République tchèque, et dans quelles proportions ? A-t-on pu, d'une façon générale, quantifier le phénomène ?

M. Joachim Poss a rappelé que, selon l'OCDE, tant le prix du pétrole que la baisse du dollar pèseront sur la croissance mondiale en 2005. L'Allemagne, jusqu'à présent épargnée par ces remous, pourrait avoir quelque difficulté à maintenir ses performances à l'exportation. Les responsables de l'Union européenne, et au premier chef ceux de la France et de l'Allemagne, doivent prendre les mesures nécessaires pour contrer cette évolution. Le chancelier Schröder a d'ailleurs fait valoir aux Américains, avec plus de vigueur que de diplomatie, que la parité actuelle crée des distorsions de concurrence.

M. Juncker, qui connaît parfaitement ce dossier, sera à la hauteur de sa tâche. Mais, sans nier l'importance du Pacte de stabilité pour l'Europe, il convient de rappeler qu'au moment où celui-ci a été élaboré, absolument personne ne prévoyait qu'il y aurait trois années consécutives de stagnation, encore moins un krach boursier et le 11 septembre 2001... La situation de la France est un peu meilleure que celle de l'Allemagne en matière de croissance, mais l'un et l'autre pays sont également menacés par le niveau élevé de l'euro. La stabilité passe par la croissance, et l'on ne peut accepter que la consommation et l'investissement soient entravés par des critères devenus inadéquats.

M. Stefan Müller a expliqué que les délocalisations ne sont pas uniquement le fait des grandes entreprises, mais aussi celui des PME. Lorsque l'on évoque ce phénomène - qui préexistait à l'élargissement de l'Union européenne - avec les dirigeants de ces entreprises, ils expliquent être contraints de délocaliser pour préserver leur compétitivité et, partant, l'emploi en Allemagne même.

M. Jörg-Otto Spiller a souligné qu'avant la chute du Mur de Berlin, les entreprises qui envisageaient de délocaliser leur production devaient prendre le risque de transférer celle-ci dans des pays lointains, aux mentalités et aux systèmes juridiques très différents, et aux traditions industrielles souvent peu affirmées, ce qui n'est pas du tout le cas de la République Tchèque ou d'autres pays d'Europe centrale et orientale. Pour autant, le jeu en vaut la chandelle, puisque la production globale augmente, comme le montre l'exemple de l'automobile. Et selon le dernier rapport du Conseil allemand des experts en économie, les avantages des délocalisations dans les nouveaux Etats membres l'emportent sur les inconvénients : si ces pays n'arrivaient pas à se développer en dépit de leur tradition industrielle, il y aurait matière à s'inquiéter de l'avenir de l'Union européenne dans son ensemble. Reste que les régions les moins dynamiques de l'Europe des Quinze souffrent des conséquences des délocalisations.

Le Président Pierre Méhaignerie a conclu :

- que les deux pays font face à des problèmes similaires, même si les aspects démographiques diffèrent fortement ;

- que les représentants du SPD disent vouloir surmonter ces problèmes par des réformes « courageuses », dont il serait d'ailleurs intéressant de comparer l'ampleur à celle des réformes conduites en France, tandis que les représentants de la CDU-CSU insistent avant tout sur le nécessaire respect du Pacte de stabilité ;

- que l'on semble, en Allemagne, moins soucieux qu'en France d'adresser des injonctions à la BCE, que l'on compte davantage sur le verbe, en revanche, pour amener les Etats-Unis à pratiquer une politique monétaire unilatérale, et que l'on fait confiance à M. Juncker pour animer l'Eurogroupe ;

- que les délocalisations paraissent perçues, outre-Rhin, comme nécessaires, dans certains cas, pour sauvegarder l'emploi.

M. Joachim Poss a tenu à souligner qu'il a aussi la plus grande confiance en M. Jean-Claude Trichet.

M. Volker Wissing a indiqué que majorité et opposition ont, en Allemagne, des appréciations radicalement divergentes sur l'application du Pacte de stabilité. L'opposition considère en effet que les critères du Pacte doivent être impérativement respectés et que l'on doit résoudre les problèmes économiques et sociaux autrement qu'en reniant les engagements souscrits. Son parti, le FDP, juge insuffisantes les réformes engagées, celle des retraites en particulier, et considère qu'il faudrait remplacer l'assurance-maladie obligatoire par des caisses privées et réviser de fond en comble la fiscalité. Enfin, une difficulté propre à l'Allemagne est qu'elle n'a toujours pas entièrement digéré sa réunification : de fortes disparités, y compris démographiques, subsistent entre les Länder de l'ouest et ceux de l'est, disparités qui influent sur les comportements électoraux, et dont on ne peut pas ne pas tenir compte.

M. Jean-Pierre Brard a dit souvent entendre ses collègues de l'UMP citer en exemple, en séance, la politique du chancelier Schröder, et cela lui rappelle la phrase historique d'August Bebel : « Quand l'adversaire me félicite, je me demande quelle bêtise j'ai pu commettre »... Force lui est de constater que des politiques comparables sont actuellement menées en Allemagne et en France, et qu'elles mènent toutes deux à l'échec : croissance faible, chômage persistant, montée préoccupante de l'extrême-droite. En son temps, le gouvernement de Lionel Jospin avait conduit une tout autre politique qui, parce qu'elle n'était pas fondée sur des critères monétaristes, a permis de créer 2 millions d'emplois et de réduire d'un million le nombre de chômeurs.

M. Hervé Novelli a exprimé le sentiment que, même si certains en Allemagne jugent les réformes insuffisantes, toutes les forces politiques allemandes font peu ou prou la même analyse de la situation économique, et a demandé si ce consensus relatif, qui se traduit aussi par une meilleure acceptation des réformes, ne devait pas être attribué à la puissance et à la modération des syndicats allemands.

M. Yves Bur s'est interrogé : s'agit-il bien d'acceptation des réformes, ou simplement de résignation ? Quant à la difficulté qu'éprouve l'Allemagne à retrouver la croissance, ne s'explique-t-elle pas, pour partie, par le vieillissement de sa population ? Enfin, la réforme de l'assurance-maladie, adoptée par consensus, suffira-t-elle à garantir la maîtrise durable des dépenses de santé, alors que les prix des médicaments semblent s'emballer ?

M. Charles de Courson a souhaité savoir si les partis politiques allemands considèrent que les récentes réformes des retraites, de la santé et de l'indemnisation du chômage à la hauteur des enjeux, notamment au regard du vieillissement de la population, et comment l'on peut expliquer que la droite française semble se situer à la gauche du SPD.

Le Président Pierre Méhaignerie a demandé si l'expérience des 32 heures chez Volkswagen et celle des 35 heures en France ont donné envie aux Allemands de les généraliser.

M. Joachim Poss a répondu que les positionnements politiques sont chose très relative. La coalition de gauche au pouvoir en Allemagne a mené les réformes qui lui semblaient nécessaires pour résoudre des problèmes structurels, et notamment le problème démographique, mais elle a tenu à le faire dans un esprit de responsabilité, c'est-à-dire en modernisant le système de sécurité sociale et non en le supprimant, contrairement à ce que souhaite l'opposition, du moins telle qu'elle s'est exprimée par la voix de M. Stefan Müller. Que ce soit en France ou en Allemagne, les partis au pouvoir éprouvent les mêmes difficultés à conduire des réformes - et pourtant, ces réformes sont nécessaires ! Les objectifs fixés demeurent valables, et la coalition s'y tiendra, car elle souhaite à la fois réformer ce qui doit l'être et maintenir la cohésion sociale. Pour ce qui est de l'impact de la réforme de l'assurance maladie, il est encore trop tôt pour l'évaluer, mais l'on sait déjà qu'elle a aussi permis de stabiliser les coûts accessoires du travail. S'agissant de la réduction du temps de travail, le pragmatisme doit prévaloir - ce qui est le cas en Allemagne, où l'on travaille plus de 40 heures dans certains secteurs - sur le dogmatisme ou le manichéisme.

M. Stefan Müller a précisé que, contrairement à ce que vient d'affirmer son collègue, il n'est pas favorable au démantèlement de la sécurité sociale, mais qu'il estime irréalistes les objectifs affichés. On ne doit pas promettre ce qu'on ne peut tenir ! Depuis que l'actuelle coalition est au pouvoir, le nombre de personnes qui ne bénéficient plus de l'assurance-maladie a déjà doublé. Le moral des ménages comme celui des chefs d'entreprises est morose, ainsi que le montrent les chiffres de la consommation et de l'investissement. Il y a de toute évidence un manque de confiance dans les réformes, et le chancelier Schröder a beau tenter de dissimuler cet échec par des appels au « patriotisme », il n'y parvient pas. Les libéraux considèrent qu'il faut, en matière de retraite, réduire la part de la répartition au profit de la capitalisation, et faire appel, d'une manière générale, à la responsabilité de chacun plutôt qu'à l'État.

Le Président Pierre Méhaignerie a observé que les réformes engagées en France étant encore loin de celles que l'Allemagne avait menées à leur terme et que le FDP estime pourtant insuffisantes. Bien du chemin reste encore à parcourir de ce côté-ci du Rhin...

M. Klaus-Peter Flosbach a tenu à rappeler qu'après la Deuxième Guerre mondiale, c'est un gouvernement CDU-CSU qui a instauré en Allemagne l'« économie sociale de marché », fondée sur la propriété et sur l'idée que celui qui gagne bien sa vie contribue à l'enrichissement général de la société. Ainsi que l'avait formulé Ludwig Erhard, un gros gâteau est plus facile à partager qu'un petit... Ce modèle a connu le succès, puis est venue la réunification, et l'intégration à grand-peine d'une économie, celle de la RDA, pourtant présentée, en son temps, comme la neuvième du monde ! Quant à l'ouverture des pays d'Europe centrale et orientale, elle a complètement changé la donne : ce ne sont pas les Allemands qui sont devenus moins bons, ce sont les autres qui sont devenus meilleurs ! Il faut donc travailler davantage si l'on veut sauvegarder les systèmes sociaux. En l'état, la réforme du système de santé ne va pas assez loin, et il est grand temps d'engager une réforme fiscale d'envergure. Si la population est honnêtement informée des enjeux, elle s'y ralliera, et l'extrême droite verra son influence se réduire à mesure que l'économie de marché fonctionnera mieux.

M. Gérard Bapt, revenant sur le statut de la BCE, a demandé à ses collègues allemands s'ils ne considèrent pas que ses missions devraient être étendues au soutien à la croissance et à l'emploi. Par ailleurs, au moment où les Etats-Unis s'emploient à faire fléchir le dollar pour reconquérir leur compétitivité, un partenariat dans le cadre de l'Eurogroupe ne serait-il pas plus adapté ? S'agissant d'autre part des délocalisations et de la réduction du temps de travail, l'honnêteté commande de dire que le coût du travail ne représente que 12 % du prix de revient total d'une automobile ; autant dire que travailler trois heures de plus revient à gagner de 2 à 3 %... Mais si Renault fabrique la Logan en Roumanie, c'est que le rapport des coûts salariaux entre Roumanie et France est de 1 à 10 ! Si l'on ne parvient pas à l'harmonisation fiscale et si l'on poursuit sur cette pente, toute la production finira délocalisée à l'Est de l'Union, les pays occidentaux ne conservant plus que la recherche et le développement. Où travailleront alors les ouvriers ? Déjà, la société Latécoère fait produire en République Tchèque les deux tiers des portes des Airbus !

M. Edouard Landrain a insisté sur le pragmatisme allemand, grâce auquel, dès lors qu'une réforme apparaît nécessaire, les forces politiques s'en emparent et la mènent à son terme, comme cela a été le cas pour l'assurance maladie. Il s'est demandé quelle est l'influence des organisations syndicales dans l'élaboration de ces réformes.

M. Philippe Rouault a souligné l'impact de la hausse du prix du pétrole sur la croissance et demandé si, dans ce contexte, l'Allemagne ne va pas devoir reconsidérer l'abandon du nucléaire.

M. Jörg-Otto Spiller a répondu que les grandes organisations syndicales ont, traditionnellement, un rôle politique en Allemagne, où elles participent au processus de décision en matière économique et sociale. Pour autant, ce ne sont pas les troupes auxiliaires d'un parti, comme en témoignent les conflits qui ont opposé la coalition au pouvoir et le syndicat IG Metall. Mais dans l'ensemble, les partenaires sociaux s'attachent à favoriser des solutions pragmatiques qui permettent à la fois que les salariés soient traités correctement, y compris lorsqu'une entreprise est en difficulté, et que celle-ci puisse survivre.

Il a conclu en souhaitant que ce très intéressant échange de vues se renouvelle et invité la commission à se « délocaliser » à Berlin au cours du premier semestre 2005.

Le Président Pierre Méhaignerie a demandé de quelle indépendance les partis de la coalition majoritaire jouissent, en Allemagne, à l'égard du Gouvernement.

M. Joachim Poss a répondu qu'en Allemagne comme en France, le soutien de la majorité au Gouvernement s'exerce au travers d'un dialogue permanent. Mais les avis peuvent diverger : il est ainsi arrivé que les partis de la coalition imposent leur point de vue au Gouvernement, comme ce fut le cas récemment pour le financement des collectivités locales.

Le Président Pierre Méhaignerie a remercié tous les participants.

*

* *

Puis, M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial des crédits des Affaires étrangères, a présenté une communication sur les implantations et les cessions de locaux diplomatiques en Allemagne. Notre patrimoine immobilier en Allemagne est le quatrième par ordre d'importance après le Maroc, l'Algérie, et le Liban. Il couvre environ 180.000 m2 sur 14 implantations. Il est assez caractéristique des problèmes généraux que peuvent rencontrer les implantations immobilières de la France à l'étranger. Les implantations sont très éclatées, et il y avait jusqu'à présent six consulats en Allemagne. Mais les opérations de cessions peuvent également se compliquer du fait de circonstances historiques. Tel est le cas du terrain de Manneheim, attribué à la France par le traité de Versailles, et pour lequel l'acte de propriété de 1924 a subi plusieurs altérations, puisque il y a eu sur ce terrain une occupation sans titre. Les difficultés actuelles sont liées à la présence d'une grue de manutention mobile qui devrait également faire partie de la vente. Des difficultés comparables se retrouvent s'agissant des logements de fonctionnaires diplomatiques à Berlin. L'autorisation de vente date de novembre 2003, l'appel d'offres a été déclaré infructueux, mais ces logements s'avèrent trop petits pour des personnels avec leur famille, et le prix de cession de ce patrimoine a sérieusement diminué au fil du temps.

Il en va de même s'agissant de l'ancienne ambassade de Bonn, appréciée au moment de la décision, en juillet 1999, à hauteur de 12 millions de Deutschemark et dont le prix négocié se situe aujourd'hui aux environs de 9 millions de Deutschemark (4,5 millions d'euros).

Enfin, la valeur symbolique des lieux peut expliquer des conditions particulières de vente. Tel est le cas du château d'Ernich, ancienne résidence de l'ambassadeur, située à proximité de Bonn. La nature même de ce château, la symbolique qu'il représente dans les relations franco-allemandes, son implantation très privilégiée expliquent qu'il n'est possible de s'adresser, en l'espèce, qu'à un marché mondial.

On peut tirer de l'exemple allemand trois types d'enseignements. D'abord, le fait de vendre des implantations à l'étranger est un métier en soi, notamment parce qu'il s'adresse souvent au marché mondial et parce que les procédures sont très complexes. À cet égard, on peut remarquer, s'agissant de l'Allemagne, que la procédure d'appel d'offres préalable, qui n'aboutit jamais, fait perdre, très souvent, une année entière aux réalisations. Ensuite, il s'agit d'un métier double, auquel les ambassadeurs ne sont pas nécessairement préparés. Il faut en effet à la fois administrer des biens et prévoir des implantations en fonction de critères distincts des marchés immobiliers locaux. Le déplacement de la capitale de Berlin à Bonn explique, à lui seul, une bonne partie de nos réimplantations immobilières en Allemagne. Enfin, il conviendrait que les investissements français répondent à deux critères, d'une part des acquisitions sur des endroits hautement spéculatifs, comme les centres villes, mais d'autre part la nécessité d'avoir des logements suffisamment fonctionnels pour accueillir des familles de personnels diplomatiques.

En conclusion, il convient également d'insister sur le fait que les réimplantations de consulats ne manifestent aucune volonté de diminuer la présence diplomatique de la France en Allemagne. Si certaines implantations immobilières peuvent être cédées, pour autant, la présence, notamment consulaire, de la France n'est pas pour autant supprimée. Tel sera le cas à Düsseldorf, où une représentation consulaire sera maintenue.

Le Président Pierre Méhaignerie a insisté sur la nécessité de diminuer le train de vie de l'État et d'améliorer la productivité du secteur public. Ceci, peut justifier des ventes de locaux immobiliers qui ne correspondent plus à des nécessités diplomatiques.

--____--


© Assemblée nationale