COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 64

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 29 juin 2005
(Séance de 16 h 15)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

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- Examen d'un rapport d'information sur l'exécution des contrats de plan État-régions et l'utilisation des crédits européens (MM. Augustin Bonrepaux et Louis Giscard d'Estaing, Rapporteurs).

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La Commission des finances, de l'économie générale et du Plan a examiné, sur le rapport de MM. Augustin Bonrepaux et Louis Giscard d'Estaing, Rapporteurs, un rapport d'information sur l'exécution des contrats de plan État-régions et sur la programmation des fonds structurels européens.

Le Président Pierre Méhaignerie a tout d'abord indiqué que, s'il est vrai que la réalisation des contrats de plan accuse un retard, il faut être conscient du fait que chacun des interlocuteurs parle un langage différent. L'évolution des dépenses des collectivités locales depuis quinze ans montre que nous allons dans le mur. L'évolution des prélèvements pris en charge par l'État au titre des exonérations et des dégrèvements et l'augmentation des dépenses de fonctionnement ont des conséquences inévitables sur les contrats de plan. Les dépenses de fonctionnement absorbent les moyens destinés à l'investissement. C'est pourquoi un débat est nécessaire pour clarifier la situation.

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur, a répondu que le ministre de l'Économie avait indiqué que, s'agissant de la réforme de la taxe professionnelle, il souhaitait rétablir le plafonnement par rapport à la valeur ajoutée, ce qui apparaît positif, et empêcher les collectivités locales d'augmenter les taux, ce qui est plus contestable. La question est aujourd'hui de savoir pourquoi il y a des difficultés et un déficit pour les collectivités locales. Lorsque la commission d'enquête sur la fiscalité locale aura rendu ses conclusions, il pourra y avoir un débat sur ce sujet à la commission des Finances.

Le Président Pierre Méhaignerie a précisé qu'il était totalement opposé au retour à un plafonnement de la valeur ajoutée, car cela revient à encourager l'irresponsabilité des collectivités territoriales. Cela signifie en effet que les collectivités qui ont augmenté leurs taux de taxe professionnelle depuis 1995 vont encore bénéficier de dégrèvements supplémentaires pris en charge par l'État. S'il existe bien un problème de plafonnement, il y a également un problème de transparence. Il faut reconnaître que la croissance des dépenses publiques françaises a aujourd'hui atteint des limites à ne pas dépasser et que les collectivités territoriales françaises sont celles qui bénéficient des plus grandes marges de manœuvre au sein de l'Union européenne. Il ne faut pas que la réforme aboutisse à ce que l'État aide ceux qui dépensent plus et pénalise ceux qui font des efforts de maîtrise des impôts. Il n'est pas acceptable de « remettre les compteurs à zéro » tous les cinq ans et de prendre en charge des dégrèvements supplémentaires.

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur, a ajouté que si le groupe socialiste ne demandait pas à l'État de prendre en charge la différence, il y avait des actes dont le gouvernement devait assumer les conséquences. Il est possible d'augmenter la cotisation à la valeur ajoutée. Chaque gouvernement a choisi la facilité jusqu'à présent.

Le Président Pierre Méhaignerie a conclu que la décentralisation n'avait pas été, jusqu'à présent, une réussite totale, car on n'était pas allé jusqu'au bout de la logique.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur, a rappelé que les contrats de plan État-régions et les fonds structurels constituent des leviers essentiels pour l'investissement public dans les régions.

Les contrats de plan représentent un engagement financier global de l'État, des collectivités territoriales et de l'Union européenne de 51 milliards d'euros sur la période 2000-2006, soit une hausse de 52,6 % par rapport à la précédente génération de contrats de plan, ce qui constitue une forte augmentation. Leur financement est de plus en plus paritaire, puisque la participation des régions est de 50 %. L'État prend en charge 17,7 milliards d'euros, les conseils régionaux apportent leur contribution à hauteur de 17,75 milliards d'euros et les autres collectivités locales, à hauteur de 5,75 milliards d'euros. Les fonds structurels interviennent en complément pour un montant total de 10,21 milliards d'euros. Cette nouvelle programmation manifeste un effort de péréquation entre les régions. Par exemple, l'État finance 63,5 % du contrat de plan Limousin, et 40 % du contrat de plan Île-de-France. Ces contrats représentent 10 à 13 % du budget d'investissement civil de l'État et le tiers des budgets d'investissements des régions. Les fonds structurels européens représentent, quant à eux, un budget global de 16 milliards d'euros sur la période 2000-2006. Afin de mieux appréhender la réalité de l'investissement local dans les régions, deux déplacements ont été effectués dans les régions Centre et Midi-Pyrénées, et l'exécution du contrat de plan Île-de-France a été approfondie.

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur, a noté qu'au 30 décembre 2004, l'État a délégué 6,68 milliards d'euros, soit un taux d'exécution de 54,7 %, à comparer au taux théorique d'exécution de 71,4 %. Si le rythme de délégation de crédits reste le même en 2005 et 2006, qu'entre 2000 et 2004, alors le retard en 2006 sera de deux ans. En revanche, si le rythme de délégation de crédits reste le même en 2005 et 2006, qu'en 2004, alors le retard en 2006 sera de trois ans. En 2005, l'exécution devrait connaître une certaine amélioration, comme en témoigne le plan de rattrapage du volet routier de 240 millions d'euros, voté par la loi de finances rectificative pour 2004. L'État présente donc un retard marqué par rapport aux régions qui ont un niveau d'avancement plus satisfaisant, en moyenne de 11 points supérieur. Cependant, les avances à l'État évoquées par les collectivités locales sont des avances de trésorerie et non des avances remboursables.

L'exécution des contrats de plan a connu de fortes régulations budgétaires entre 2002 et 2004. Les gels de crédits ont, en effet, représenté 13 % de la programmation en 2002, 19 % en 2003 et 29,3 % en 2004. Certains ministères connaissent une exécution satisfaisante. C'est le cas du volet « enseignement supérieur » avec un taux d'exécution de 64,3 % mais aussi des volets « ville » et « agriculture ». En revanche, d'autres ministères présentent un retard important. Ainsi, le volet « santé et social », qui concerne notamment les investissements dans les établissements de personnes âgées, connaît un retard important depuis 2000. Le taux d'exécution fin 2004 est de 36 %. Cependant, selon les informations qui ont été transmises par les DRASS de la région Centre et de la région Midi-Pyrénées, des dotations ont été récemment versées par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Elles devraient permettre une amélioration de l'exécution.

L'exécution du volet « transport » connaît aussi un retard très marqué. Fin 2004, 50,4 % des crédits ont été délégués sur le volet routier. Si aucune régulation budgétaire n'intervient en 2005, ce taux sera de 64,7 % fin 2005. En 2006, le retard serait compris entre 2 ans et 5 ans, selon le rythme de délégation des crédits. Si plusieurs opérations ont été fortement ralenties, ou retardées, aucune n'a été interrompue faute de financement de l'État. Les projets sont exécutés par tranche ou retardés quand il n'y a pas les financements nécessaires. Le montant du volet ferroviaire a été multiplié par huit par rapport à la précédente génération des contrats de plan, ce qui constitue une ambition forte en faveur du développement durable. Ce volet présente un taux de délégation de 33,3 % fin 2004. Ce taux devrait être de 46 % fin 2005. En 2006, selon le rythme de financement par l'État, le retard sera compris entre 3 et 6 ans. Ce volet a démarré tardivement en raison du manque de préparation des projets qui a nécessité des études durant les premières années. Les opérations n'ont pu être engagées avant 2002, et ont connu une montée en puissance alors que les contraintes budgétaires étaient plus fortes. Le secteur des transports, et plus particulièrement le volet ferroviaire, doit faire l'objet aujourd'hui d'un effort particulier de l'État. L'enjeu est essentiel : il est aujourd'hui primordial d'assurer un réseau d'infrastructures performant en France pour garantir l'attractivité de tous les territoires. Le ministre des Finances a annoncé un effort financier de l'État en faveur des grands travaux. Il serait souhaitable que cela concerne le rattrapage des contrats de plan.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur, a expliqué que si les contrats de plan présentent aujourd'hui un retard regrettable, tous les interlocuteurs rencontrés ont souligné que ce retard résulte de contraintes budgétaires fortes qui n'ont pas permis d'exécuter la programmation ambitieuse prévue initialement, mais aussi de limites structurelles qui font pleinement sentir leurs effets. Deux facteurs de retard peuvent être invoqués : un décalage entre une programmation importante et des contraintes budgétaires fortes et une mise en œuvre des contrats de plan lente et complexe. Premièrement, les négociations des contrats de plan ont été marquées par une ambition très forte dont l'exécution n'a pu être respectée. En effet, il y a eu une sur-programmation et un certain nombre de projets n'étaient pas assez murs et étudiés. Dès la signature du contrat de plan, il était reconnu que certains projets ne verraient peut-être pas le jour sur la période 2000-2006. C'était par exemple le cas du volet ferroviaire dans la région Île-de-France et dans la région Rhône-Alpes.

Le coût des projets a connu une hausse d'autant plus forte que celui de la construction a beaucoup augmenté, en raison notamment du prix de l'acier. Il y a donc eu un effet de ciseau entre le montant de délégations nécessaires qui augmentait fortement en 2003 et 2004 et le montant des délégations auxquelles l'État pouvait procéder, qui diminuait compte tenu de la régulation budgétaire. L'augmentation des coûts provoque une diminution du nombre d'opérations sélectionnées et un délai plus long pour les réaliser, mais elle ne remet pas en cause l'engagement financier de l'État, qui reste le même. L'engagement contractuel de l'État ne concerne que le montant financier et non le périmètre précis des opérations à réaliser. Il est cependant regrettable que cet engagement soit réalisé avec 2 ans de retard. Les régions ont pu évoquer le « désengagement » de l'État. Cette affirmation doit être nuancée. Le montant moyen d'investissement de l'État dans les contrats de plan sur la période 2000-2004 est de 1,9 milliard d'euros. On retrouve la même moyenne entre 1994 et 1998. Certes, l'annuité déléguée par l'État a été de 1,8 milliard d'euros en 2003 et de 1,6 milliard d'euros en 2004, soit un montant inférieur à la moyenne, cependant, ces chiffres révèlent davantage un retard de l'État qu'un véritable « désengagement ».

Deuxième facteur de retard, la mise en œuvre des opérations contractuelles est longue et complexe. Ainsi, le contrat de plan entre l'État et la région Auvergne a été signé en juillet 2000, soit avec 6 mois de retard. Par ailleurs, plus de soixante conventions sectorielles, signées avec les différents partenaires locaux, ont été nécessaires pour décliner les programmations du contrat de plan, ce qui retarde d'autant le lancement des actions. De même, la complexité des procédures ralentit la réalisation des opérations elles-mêmes. La réalisation d'une grande opération ferroviaire ou routière peut prendre plus d'une dizaine d'années. Enfin, l'exécution plus particulière du volet territorial a pris du retard en raison de la lente montée en puissance des contrats de pays, qui n'est intervenue qu'en 2003 et 2004, alors que la régulation budgétaire était plus forte.

Deux éléments doivent compléter ce tableau. Tout d'abord, le procédé du contrat de plan est ambigu : son contenu n'est pas normatif et n'emporte aucune conséquence sur la réalisation effective des opérations. Le contrat de plan est davantage un protocole d'accords réciproques qu'un engagement juridique de l'État. Ensuite, il est particulièrement difficile d'évaluer l'exécution effective des contrats de plan par l'État, tant les chiffres qui ont été fournis divergent entre les interlocuteurs. Par exemple, s'agissant de la région Île-de-France, la Datar, le Secrétaire général pour les affaires régionales et le Président du conseil régional ont présenté des chiffres d'exécution très différents.

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur, a dressé un bilan de la programmation des fonds structurels européens, en rappelant le travail approfondi qu'avait fait Jean-Louis Dumont sur le sujet. Au 1er mai 2005, sur un budget total des 17,3 milliards d'euros, 12,1 milliards d'euros ont fait l'objet d'une programmation, soit un taux d'exécution de 69,8 %. Ce taux proche du taux théorique d'exécution montre l'impact de la réforme de la gestion des fonds structurels intervenue en 2002. Ainsi, seuls 15 millions d'euros au titre du fonds social européen, ont fait l'objet d'un dégagement d'office en 2003, soit 0,08 % des fonds octroyés par l'Union Européenne. En revanche, la France n'a connu aucun dégagement d'office en 2004. Les évaluations faites par le logiciel « Présage » évaluent au jour J le montant prévisionnel des dégagements d'office, si plus aucune programmation n'était effectuée jusqu'à la fin de l'année. Ces prévisions indiquent les crédits qu'il reste à programmer, d'ici la fin de l'année. Ainsi, le montant prévisionnel des dégagements d'office, au 1er mai 2005, s'élève à 376,32 millions d'euros au titre de l'objectif 1, 373,938 millions d'euros au titre de l'objectif 2, 36,65 millions d'euros au titre du programme LEADER +, 15,59 millions d'euros au titre de programme URBAN. Ces estimations montrent que si le risque de dégagement d'office est plus limité, il n'est pas écarté. L'attention doit donc rester soutenue dans certaines régions et pour certains programmes comme le FSE. Cependant, l'accélération de la programmation a été telle que de nombreux projets sont aujourd'hui prêts à être programmés. Selon les estimations de la Datar, la liste des projets déposés et en attente représente 92 % de la programmation. Ainsi, la France dispose d'une « réserve » de projets pour éviter le dégagement d'office, et peut être même de plus de projets que de crédits.

La programmation des fonds structurels européens a vu la succession de quatre phases. Dans un premier temps, entre 2000 et 2002, le nombre de projets programmés était insuffisant. En 2002, le taux de programmation des crédits dans les régions, qui devrait être de 30 %, n'était en moyenne que de 15,2 %. Les critères d'attribution de crédits étaient tels que très peu de projets pouvaient être programmés. Suite à la réforme de la gestion des fonds structurels européens, la programmation des projets a été accélérée considérablement, au détriment parfois de leur qualité. On a pu assister à un certain saupoudrage des crédits et à une programmation à des taux excessifs de subventionnement, jusqu'à 80 %. Dans un troisième temps, le nombre important de projets déposés a permis de faire le tri entre les projets et de mieux les sélectionner.

Enfin, aujourd'hui, les crédits européens sont en grande partie consommés et le financement des contrats de pays est insuffisant. En effet, dans la région Midi-Pyrénées, les crédits de la mesure 7, consacrés aux pays et aux agglomérations, sont aujourd'hui épuisés, malgré la délégation de crédits supplémentaires en 2004 au titre de la réserve de performance. L'effort de rattrapage a pu inciter les acteurs locaux à présenter le plus rapidement possible des projets, afin d'obtenir des financements. Or en raison de l'épuisement des crédits communautaires constaté aujourd'hui, ce sont les projets de moindre envergure et nécessitant une moindre préparation qui ont été financés le plus tôt et qui ont obtenu les taux de subvention les plus importants, jusqu'à 80 %, alors que les projets nécessitant une préparation plus longue rencontrent des difficultés pour être subventionnés. C'est le cas notamment des projets élaborés dans le cadre de contrats de pays, contrats signés pour la plupart en 2003 ou 2004. Il est regrettable que lorsque les contrats de pays arrivent à maturité, ils ne trouvent plus de financement.

Par ailleurs, l'État a pu être amené, pour compenser le manque de crédits sur les contrats de plan État-régions, à utiliser les crédits européens sur des opérations contractuelles. Par exemple, dans la région Midi-Pyrénées, 5 millions d'euros ont été utilisés pour la constitution du canceropôle. L'utilisation des fonds européens sur les contrats de site a eu les mêmes résultats. Cette situation est d'autant plus regrettable que les crédits du FNADT (Fonds national d'aménagement et de développement du territoire), destinés au volet territorial, ont eux-mêmes été utilisés pour des contrats de site, comme cela a été le cas dans la région Midi-Pyrénées.

L'État devra cependant veiller à ce que le retard dans la délégation des crédits des contrats de plan ne conduise pas à des dégagements d'office fin 2008, faute d'avoir pu apporter à temps la contrepartie nationale nécessaire. Par ailleurs, il serait regrettable que compte tenu de l'épuisement des crédits FEDER, lié à l'accélération de la programmation, la politique des pays soit remise en cause. C'est pourquoi, il apparaît essentiel aujourd'hui que l'État apporte son soutien financier à cette politique et compense en partie l'épuisement des crédits européens.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur, a rappelé que malgré les limites que présentent aujourd'hui les contrats de plan, ils constituent un indispensable outil d'aménagement du territoire, et que le retard actuel, résultant à la fois de causes conjoncturelles et structurelles, milite en faveur d'une réforme de cet instrument, mais ne remet pas en cause sa pertinence. C'est aussi le constat unanime dressé par l'ensemble des personnes auditionnées. L'approfondissement de la décentralisation par la loi du 13 août 2004 ne remet pas en cause le caractère essentiel de l'outil contractuel, y compris dans des domaines qui ont fait l'objet de transferts de compétences. Au contraire, en raison du renforcement des compétences des collectivités territoriales, le dialogue entre l'État et les régions devient d'autant plus indispensable.

Dans le cadre de la réflexion actuelle sur l'avenir des contrats de plan, quelques pistes de réformes peuvent être proposées. En premier lieu, l'hypothèse d'une contractualisation « à la carte », selon les régions et les politiques, ne semble pas satisfaisante. En obligeant à négocier à date fixe, les contrats de plan permettent à l'État et aux collectivités territoriales de mener une réflexion prospective et de fixer des priorités en matière d'équipements structurants. De plus, afin de donner un cadre cohérent à la contractualisation, la négociation des contrats de plan pourrait être utilement précédée d'une réflexion prospective qui permettrait de hiérarchiser les priorités de l'État et des régions. Cette réflexion pourrait s'appuyer sur les schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire (SRADT). L'élaboration d'un document stratégique et prospectif au niveau national pourrait être utile. Une durée des contrats assez longue, comprise entre 5 et 7 ans semble nécessaire, voire 9 ans pour les opérations de grande envergure. Cependant, la réflexion prospective doit aller au-delà de cette durée pour permettre de préparer la génération suivante de contrats de plan. Ainsi, au sein de chaque contrat, devrait être distinguées les opérations immédiatement prêtes, de celles qui nécessitent des études et des avant-projets et qui auraient vocation à être réalisées dans le contrat de plan suivant. Le champ de la contractualisation doit être resserré et se concentrer sur l'ensemble des politiques publiques qui concourent à l'attractivité et à la compétitivité des territoires. Il semblerait ainsi pertinent de maintenir dans le champ de la contractualisation la politique des transports, l'enseignement supérieur et la recherche, les technologies de l'information et de la communication, la politique de l'emploi et de la formation et le volet territorial financé par le FNADT. Il apparaît nécessaire de maintenir le volet territorial des contrats de plan, afin de financer notamment les contrats de pays et d'agglomération. Ce financement devrait avoir une forte dimension de péréquation et concerner plus particulièrement le développement des territoires ruraux, afin d'éviter une concentration excessive de moyens sur les métropoles.

Au regard de la sur-programmation constatée dans l'actuelle génération des contrats de plan, une plus grande sélectivité des projets est indispensable et devrait permettre une exécution plus facile. Ne devraient être inscrits dans un contrat de plan, comme opération à réaliser, que les projets ayant fait l'objet d'une étude précise, d'une estimation de leur coût et d'une évaluation de leur utilité socio-économique. Les préfets ou les administrations centrales pourraient ainsi exiger ces informations pour les principaux projets inclus dans le champ de la négociation. Pour les autres opérations, le contrat devrait prévoir, avant tout, le financement des études. De plus, afin d'éviter le saupoudrage des crédits, les contrats de plan devraient se concentrer sur des projets structurants et non sur les projets d'intérêt purement local. Il apparaît primordial d'améliorer l'efficacité de l'évaluation des contrats de plan État-régions. La transposition du logiciel « Présage », utilisé pour le suivi de la programmation des fonds structurels européens, semble tout à fait pertinente. La Datar travaille actuellement à un tel dispositif. Plus généralement, il serait utile que le Parlement dispose chaque année d'un bilan de l'investissement de l'État par région, y compris hors contrat de plan. En effet, de nombreuses opérations d'investissement sont aujourd'hui inscrites hors contrat de plan alors qu'elles concernent des opérations de même nature. C'est le cas par exemple du désamiantage de Jussieu, qui représente 750 millions d'euros. Cependant, au-delà de ce suivi qualitatif, il est nécessaire d'inscrire les contrats de plan dans une démarche de performance. Ainsi, pourrait être prévu, dans chaque contrat, le financement d'une évaluation qui serait menée à son échéance.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué qu'il ne sert à rien de regarder le passé et qu'il convient de se tourner vers l'avenir. Les contrats de plan État-régions constituent un bon outil. Il convient désormais d'opérer une plus grande sélectivité dans les dossiers, notamment en retenant prioritairement les investissements permettant d'améliorer la compétitivité de la France. Il serait également souhaitable qu'une plus grande transparence soit introduite dans la procédure. Ainsi, par exemple, entre 1975 et 1980, les préfets informaient les élus locaux de tous les investissements engagés. Quelle proposition les rapporteurs font-ils pour développer la péréquation ? Ne convient-il pas de limiter, de manière exceptionnelle, les taux de subvention ? Faut-il vraiment contracter au niveau infra-régional, avec les pays ou les départements, au point de ne plus s'y retrouver ? S'agissant, enfin, du volet territorial des contrats, la plupart des élus se montrent méfiants. L'État devrait aider les pays à constituer des réservoirs de matière grise.

M. Alain Rodet a souligné que, à propos du faible niveau d'exécution des contrats de plan, il faut s'interroger sur la qualité des maîtres d'ouvrage. En outre, il convient d'éviter les taux de subventionnement excessifs. Par ailleurs, il apparaît que l'État se désengage plus facilement lorsqu'il s'agit d'opérations réalisées hors du cadre des contrats de plan. Il existe des directions régionales, comme les DRIRE, qui concurrencent les DRASS et les DIREN, au risque de retarder les procédures. Enfin, s'agissant du volet des contrats de plan relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche, des progrès pourraient encore être réalisés.

M. François Scellier a demandé s'il n'était pas pertinent d'associer davantage les départements à l'exécution des contrats de plan, comme cela a été réalisé avec succès dans la région Ile-de-France. Cette démarche est intéressante car elle permet aux départements de faire apparaître des priorités.

M. Pierre Hériaud a souligné que les pays, s'ils bénéficient d'une réelle antériorité par rapport aux structures d'intercommunalité, ne constituent pas un niveau d'administration territoriale. Les pays constituent des cellules de réflexion, alors que les structures intercommunales apparaissent désormais comme des opérateurs essentiels. Pour une plus grande efficacité, il convient donc de ne pas disperser les moyens.

M. Jean-Louis Dumont a précisé que tous les retards n'étaient pas imputables aux contraintes liées au budget de l'État S'agissant des fonds européens, il convient de souligner que le retard dans l'élaboration des DOCUP a eu pour conséquence une utilisation parfois précipitée des crédits, par peur de dégagements d'office. Aujourd'hui, on s'aperçoit que, pour sélectionner les dossiers, on va à l'encontre des principes fixés par le Premier ministre dans sa circulaire de 2002, selon lesquels il ne fallait pas raisonner en termes de quotas départementaux. Il faudra éviter de telles dérives dans les contrats de plan à venir et notamment instaurer une plus grande transparence dans la procédure de sélection ainsi qu'une plus grande exigence dans la capacité à élaborer des dossiers dans les délais. Si les taux d'éligibilité ont parfois été excessifs, il convient toutefois de privilégier le côté structurant des dossiers proposés. La transparence devrait également être accrue pour les dossiers dérogatoires au droit commun, comme c'est le cas actuellement de deux dossiers en Lorraine. Au sujet des pays, il faut être conscient du fait que le choix des dossiers peut avoir pour conséquence la mise en place de nouveaux pouvoirs. Il revient aux préfets de jouer un rôle républicain en la matière.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général a demandé quel était l'ordre de grandeur du montant annuel qui pourrait être réservé dans le budget de l'État pour les volets structurants des contrats de plan État-régions ? Comment vont s'articuler les contrats de plan avec le développement de démarches proches dans leur logique comme celles des partenariats mis en place par l'ANRU ou encore les pôles de compétitivité ? Dans la mesure où il apparaît que ce n'est pas parce que l'on choisit la région comme chef de file qu'elle est nécessairement maître d'ouvrage, comment peut-on faire pour avoir des maîtres d'ouvrage suffisamment structurés ?

Le Président Pierre Méhaignerie a convenu que le fait que certains ministères lancent de nouveaux appels d'offre, notamment pour l'ANRU et les pôles de compétitivité, introduit une certaine confusion dans le dispositif des contrats de plan État-régions.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur, a répondu, au sujet de la péréquation, qu'elle existe déjà puisque la clé de répartition des financements des contrats de plan varie selon les régions et leur potentiel fiscal. Cela pose également la question de la contractualisation infrarégionale, et de la péréquation entre les départements.

Il a souligné, par ailleurs, que les taux de subventions atteignent parfois des niveaux tels qu'ils créent des effets d'aubaine.

En ce qui concerne les contrats de pays, les opinions sont divergentes. Le département du Puy-de-Dôme essaie de faire correspondre les contrats de pays aux structures intercommunales.

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur, a fait observer que les taux de subventions, pour être équitables, devraient être les mêmes sur tout le territoire. Or, ils peuvent varier, du simple au double, d'un département à l'autre.

D'autre part, les pays ne doivent pas constituer de nouvelles entités, mais rester des cellules de réflexion sur les priorités d'un territoire. Enfin, les contrats de plan devraient être mieux préparés. Il devrait y avoir un schéma de développement dans chaque région pour les équipements, afin d'éviter les investissements qui n'intéressent qu'un seul département au sein d'une région.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur, en réponse à la question du Rapporteur général relative aux crédits du budget de l'État réservés aux contrats de plan, a souligné que le 1/7ème théorique n'a jamais été respecté, en raison des retards dans les études et les projets, ou des gels de crédits. Les contrats de plan risquent de n'avoir qu'une valeur d'affichage.

Quant aux appels d'offre qui s'entremêlent avec les contrats de plan État-régions, comme ceux de l'ANRU ou des pôles de compétitivité, ils devraient être intégrés dans les contrats de plan. Toutefois, cela pourrait entrer en contradiction avec l'objectif de resserrer les champs ministériels de ces contrats.

Enfin, certaines opérations ne peuvent pas être anticipées, ce qui rend difficile leur contractualisation entre l'État et les régions. À cet égard, il a été proposé à la DATAR de moduler la durée des contrats entre trois, six et neuf ans.

M. Yves Deniaud a souligné que les durées des contrats de plan ont été portées de cinq à six ans, puis à sept ans. Pour les durées plus longues, les taux d'exécution n'ont pas été améliorés. La mauvaise préparation des contrats est en partie responsable de cet état de fait. Par ailleurs, l'État ne lance souvent les premières études qu'une fois que le contrat est définitivement signé, ce qui interdit le financement par septième, puisque la phase d'études ne nécessite pas beaucoup de crédits.

M. Jean-Louis Dumont a remarqué que pour éviter les effets d'aubaine, il faut préalablement définir des critères de sélection des projets.

Le Président Pierre Méhaignerie, rappelant que le Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire se réunit courant juillet, a proposé aux deux Rapporteurs, ainsi qu'au Rapporteur général, de cosigner une lettre à l'attention du ministre délégué à l'Aménagement du territoire et du ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie, exprimant la position de la Commission des finances, soulignant les points suivants :

- les contrats de plan sont un bon outil mais les procédures doivent être plus transparentes et simplifiées ;

- ils doivent être recentrés sur des investissements contribuant à améliorer la compétitivité de l'économie ;

- ils doivent opérer une péréquation entre les régions ;

- les taux de subventions doivent être plafonnés à 50 % de la valeur des investissements ;

- une évaluation qualitative des contrats de plan est nécessaire ;

- les contrats de pays doivent être des éléments de coordination, et non de financement ou de gestion, et être gérés par des équipes permanentes.

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur, a émis des réserves sur ce point : les contrats de pays n'ont pas vocation à élaborer des projets. Il est préférable d'employer des personnes des structures intercommunales pour étudier leur développement.

M. Jean-Jacques Descamps a rappelé qu'il préside un pays qui pratique la contractualisation. Cependant, le pays ne peut pas être maître d'ouvrage, il ne peut qu'assurer une fonction de coordination, sans pour autant en avoir nécessairement les moyens financiers. Pour les actions entreprises dans le cadre de LEADER, le coordonnateur bénéficie d'un financement. Il faut donc s'assurer que, quel que soit l'outil de financement, le coordonnateur dispose de moyens financiers, pris en charge tant par les bénéficiaires que par le financeur.

Après avoir rappelé que le pays n'était pas un niveau d'administration territoriale, M. Pierre Hériaud a souligné que les intercommunalités avaient seules les compétences et les moyens pour assurer la maîtrise d'ouvrage. Le pays peut être le lieu d'une réflexion, mais il convient de ne pas lui donner de nouvelles compétences.

M. Louis Giscard d'Estaing, Rapporteur, s'est interrogé sur le calendrier des prochains contrats de plan. En effet, l'exécution des contrats actuels accusera au moins un an de retard. Si l'on reporte la validité des actuels contrats au 31 décembre 2007, il faudra se demander quand la négociation portant sur les prochains contrats pourra avoir lieu.

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé que le Gouvernement devrait rendre un arbitrage sur ce point avant la fin de l'année. Si l'échéance des contrats est reportée à la fin de l'année 2007, il conviendra de travailler à la prochaine génération de contrats dès les années 2006 et 2007.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a souhaité que la question du calendrier figure dans la lettre dont la rédaction est proposée.

M. François Scellier a souligné que les premières années d'exécution des contrats de plan étaient généralement consacrées à l'achèvement de la réalisation du contrat précédent. Bien souvent, l'accent est mis sur la réalisation du précédent contrat et seules les études relatives aux projets du contrat en cours sont lancées, afin de s'assurer de leur réalisation dans le contrat suivant.

Le Président Pierre Méhaignerie a insisté sur le fait qu'en juin 2007 les négociations sur la prochaine génération de contrats devraient être engagées. En ce qui concerne la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), deux observations doivent être formulées. Premièrement, il a été exclu que les questionnaires budgétaires demandent une reconstitution en nomenclature LOLF de l'exécution 2003 et 2004, car cette tâche aurait demandé un travail énorme aux ministères. Un questionnaire porte sur les Pouvoirs publics et, comme dans les autres domaines, il convient d'obtenir des informations précises, dans le respect de la transparence. En outre, des questions communes sont prévues pour l'immobilier, les stratégies ministérielles de réforme et les plafonds d'emplois.

La liste des débats de la deuxième partie de la loi de finances a été fixée, avec quelques regroupements - Économie et finances, Sécurité et Sécurité civile, etc. - et quelques discussions spécifiques pour quelques programmes particulièrement sensibles comme la Fonction publique.

Il faudra en outre trouver un moyen de limiter le temps de parole des discussions pour tenir compte de l'augmentation probable du nombre d'amendements portant sur les crédits. Le Président Jean-Louis Debré avait envisagé de réformer le Règlement, mais il vaut mieux, pour cette année au moins, faire preuve de pragmatisme. C'est pourquoi il est nécessaire de prévoir des délais de dépôt pour les amendements de crédits, afin de mieux en organiser la discussion. Il faut aussi limiter les discussions générales, autant que possible. Évidemment, des exceptions sont envisageables, par exemple sur la question de la politique agricole commune.

La commission des Finances a autorisé, en application de l'article 145 du Règlement, la publication du rapport.

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