COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 68

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 13 juillet 2005
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Examen d'un rapport d'information sur les données économiques, industrielles et monétaires des échanges commerciaux avec la Chine (MM. Hervé Novelli et Tony Dreyfus, Rapporteurs)

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- Information relative à la Commission

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La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan, a procédé à l'examen d'un rapport d'information de MM. Hervé Novelli et Tony Dreyfus, Rapporteurs, sur les relations commerciales entre la France et la Chine.

M. Hervé Novelli, Rapporteur, a souligné que l'objectif poursuivi par le rapport présenté était de faire le tri entre les idées fausses et les idées vraies qui circulent à propos de la Chine. En particulier, plutôt que de parler de « péril jaune », il faut considérer l'évolution économique de la Chine comme une opportunité.

L'ouverture au monde est l'origine et la cause du miracle chinois. C'est à partir de la décision prise par la Chine à la fin des années 1970 de s'ouvrir au monde que le développement économique chinois a été spectaculaire. Les investissements directs étrangers ont joué un rôle majeur dans l'essor économique de la Chine, puisque le pays est aujourd'hui le deuxième réceptacle des investissements directs étrangers dans le monde. Les autorités chinoises ont tout misé sur les échanges internationaux, permettant ainsi un développement économique spectaculaire et une élévation sans précédent du niveau de vie. Ainsi, il apparaît que ce n'est pas dans la protection que réside la survie, mais plutôt dans l'ouverture que l'on peut trouver le succès. Enfin, il convient de souligner que l'idée de délocalisations massives des industries occidentales vers la Chine est fausse.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué que si cette affirmation était vraie hier, elle l'était moins aujourd'hui.

M. Hervé Novelli, Rapporteur, a rappelé que la Chine ne représente pas un danger mais une opportunité pour l'économie française. La montée en puissance de la Chine dans l'économie mondiale est l'un des événements majeurs du début du XXIème siècle. Depuis un quart de siècle, la Chine connaît une croissance annuelle moyenne de 9,4 % de son PIB. L'idée d'une émergence chinoise récente est donc fausse. L'importance croissante du commerce extérieur chinois bouleverse certains marchés mondiaux, ce qui inquiète les pays industrialisés, qui perçoivent la Chine comme une menace. Ainsi, l'afflux des produits chinois sur le marché de l'habillement, depuis la levée des quotas le 1er janvier 2005, a provoqué un véritable affolement en France. Mais l'inquiétude créée par la percée chinoise sur le marché de l'habillement vient surtout de ce qu'elle paraît annoncer l'arrivée de produits chinois dans d'autres secteurs.

Le rapport propose un changement de perspective : plutôt que d'appréhender la Chine comme un danger, il faut la percevoir comme une opportunité pour notre économie. Dans ce marché en pleine croissance, il y a un immense potentiel à exploiter.

Depuis déjà un quart de siècle, la Chine connaît une expansion économique ininterrompue. Son PIB a été multiplié par 9, le revenu réel des ménages a quintuplé, et le commerce extérieur a été multiplié par dix. Le revenu par habitant a également connu une croissance spectaculaire. De moins de 600 dollars en 1995, il a franchi la barre des 1 000 dollars en 2003 et devrait approcher les 1 400 dollars par habitant en 2005.

C'est à la suite de réformes progressives mais radicales, entamées à la fin des années 70 par Deng Xiaoping, que s'est opérée l'intégration de la Chine dans l'économie mondiale ; c'est cette ouverture, entièrement maîtrisée par le gouvernement chinois, qui a permis une telle croissance économique.

Comme d'autres pays asiatiques avant Elle, la Chine appuie sa formidable expansion sur son intégration dans les échanges internationaux. L'ouverture de la Chine a débuté en 1979 avec la création de zones économiques spéciales ouvertes aux investissements étrangers ; l'adhésion de la Chine à l'OMC en 2001 marque l'aboutissement de ce processus d'ouverture programmée et maîtrisée par le gouvernement chinois. En adhérant à l'OMC, la Chine s'est engagée en contrepartie à ouvrir son marché, et elle a plutôt bien respecté ses engagements. Le « miracle économique chinois » repose sur des facteurs de réussite internes, propres au marché chinois, mais également sur les investissements étrangers massifs en Chine. On ne peut véritablement comprendre le développement spectaculaire du commerce extérieur chinois sans s'intéresser au rôle central des entreprises étrangères. Les investissements étrangers sont déterminants pour le développement des échanges commerciaux. Les autorités chinoises ont su les attirer et les canaliser dans les industries exportatrices et dans les secteurs de haute technologie. Cela a permis l'injection de savoir-faire et de capitaux dans une économie en transition, sans laisser les étrangers s'emparer de secteurs stratégiques. En 2004, la Chine a reçu 60,6 milliards de dollars d'investissements directs étrangers (IDE), ce qui la place au deuxième rang mondial des destinations d'investissement. Ces capitaux sont très concentrés dans l'industrie manufacturière exportatrice. Il obéissent à deux grands mobiles : gagner en compétitivité sur les marchés internationaux en réduisant les coûts de production, et pénétrer le marché local.

La participation des filiales étrangères aux échanges extérieurs chinois repose avant tout sur leurs opérations d'assemblage et de transformation de produits intermédiaires et composants importés. Les entreprises à capitaux étrangers, et avant tout celles des pays asiatiques, Japon, Taiwan, Hong Kong et Corée du sud, ont ainsi largement contribué à faire de la Chine l'atelier du monde. L'idée de délocalisation massive des industries occidentales en Chine est fausse. Les délocalisations touchent en réalité aujourd'hui surtout les entreprises asiatiques.

Ce serait se leurrer que de croire que la réussite économique chinoise ne repose que sur de faibles coûts de production, et notamment une main-d'œuvre bon marché. Certes, ses facteurs de production, capital et travail, abondants et peu coûteux sont un avantage indéniable. La Chine bénéficie également d'un grand marché et d'une monnaie stable et sous-évaluée. Mais on aurait tort de sous-estimer ses traits culturels, favorables à la réussite économique, et son fort potentiel technologique. La force de l'industrie chinoise réside en effet également dans la grande détermination de ses dirigeants politiques et industriels et dans leur faculté à élaborer et mettre en œuvre des stratégies économiques efficaces. Ce qui frappe particulièrement en Chine est la réflexion sur l'orientation des investissements étrangers et, plus globalement, la stratégie de développement économique qui est très élaborée.

Par ailleurs, la Chine, qui est déjà l'« usine du monde », pourrait en devenir le laboratoire. Elle exporte de façon croissante des biens de haute technologie, essentiellement des équipements électriques et de l'électronique. Et si l'on s'intéresse aux déterminants de long terme de la capacité technologique que sont le capital humain et les dépenses de recherche, le potentiel de la Chine est immense.

La montée en puissance de la Chine dans l'économie mondiale va donc se poursuivre. La Chine occupe une place croissante dans les importations de l'Union européenne et de la France. L'Union européenne est le troisième client de la Chine, après les Etats-Unis et Hong Kong. L'évolution des exportations chinoises vers l'Union européenne est comparable à celle des exportations chinoises totales : elles augmentent fortement et montent en gamme. Entre 1990 et 2001, la croissance des exportations chinoises vers l'Union européenne a été portée en premier lieu par les produits de la filière électronique, qui constitue désormais la première source d'exportation, avec un quart du total, et en deuxième lieu par les produits électriques, qui comptent pour un dixième du total en 2001.

Enfin, tout en devenant une des premières destinations d'IDE dans le monde, la Chine devient peu à peu elle-même un investisseur à l'étranger, et de plus en plus dans les pays occidentaux. Le gouvernement chinois a affiché sa volonté de développer les IDE chinois à l'étranger. Il s'est fixé comme objectif la création de 50 groupes chinois parmi les 500 premiers groupes mondiaux en 2010. C'est ainsi que le groupe chinois Lenovo a racheté l'activité micro-ordinateurs d'IBM et que le groupe d'électronique chinois TCL a racheté les téléphones mobiles d'Alcatel ainsi que les téléviseurs de Thomson.

Si la France doit donc désormais compter avec la puissance économique de la Chine, la Chine ne représente pas un danger, mais une opportunité pour l'économie française.

Le Président Pierre Méhaignerie a relevé que figurait dans le rapport l'idée selon laquelle les rachats d'entreprises occidentales par les Chinois visent à acquérir leur savoir-faire et à utiliser leurs canaux de distribution pour l'exportation des produits chinois en Europe, la production elle-même étant presque toujours délocalisée en Chine. Contrastant avec cette affirmation, le bilan dressé par le Rapporteur témoigne d'un immense optimisme.

M. Tony Dreyfus, Rapporteur, a souligné qu'élu du dixième arrondissement de Paris où la communauté chinoise est très présente, le sujet des relations commerciales entre la France et la Chine lui tient tout particulièrement à cœur.

La France apparaît en perte de vitesse par rapport à un certain nombre de traditions commerciales. Alors que le marché chinois représente un potentiel de développement considérable, la France s'inscrit en retrait dans les échanges avec la Chine, qu'il s'agisse des exportations ou des investissements sur place. En effet, la part de marché de la France ne cesse de se dégrader depuis 1997 et atteint 1,35 % en 2004. La France est ainsi seulement le quinzième fournisseur du pays, loin derrière l'Allemagne, dont la part de marché s'élève à 5,4 %. En matière d'investissements, même si plus de 600 entreprises françaises ont investi en Chine, employant plus de 150.000 personnes dans plus de 1.000 implantations, la France se situe seulement au dixième rang des investisseurs étrangers.

La réussite de la Chine est parfois perçue en France comme un danger. En fait, elle nous renvoie à nos propres faiblesses. La comparaison avec les bons résultats allemands en matière d'exportations à destination de la Chine met en évidence les défauts de notre propre cuirasse. Tout d'abord, les résultats en demi-teinte de la France s'expliquent en partie par l'insuffisante spécialisation sur les biens d'équipement demandés par la Chine. En effet, par comparaison, les bons résultats de l'Allemagne témoignent qu'il est possible d'exporter fortement vers la Chine, même si l'on ne dispose pas de matières énergétiques.

Outre une spécialisation sectorielle ne correspondant pas parfaitement à la demande chinoise, la France souffre d'un tissu industriel moins performant à l'export que celui de l'Allemagne. En effet, le tissu économique allemand est riche en moyennes entreprises disposant du savoir-faire pour exporter. Au contraire, la France se caractérise par un nombre insuffisant de moyennes entreprises capables de conquérir des marchés réputés difficiles. Certes, parmi les 4.800 exportateurs vers la Chine, 78 % sont des PME, mais, en valeur, ce sont les grands groupes, comme EDF ou la Lyonnaise des eaux, qui réalisent la plus grande part des exportations.

Les performances décevantes de la France par rapport à l'Allemagne s'expliquent également par une pratique commerciale différente. En effet, l'Allemagne a une forte tradition de sociétés de commerce, notamment les sociétés de la Hanse, qui sont bien implantées en Asie. Au contraire, les sociétés de commerce, sur lesquelles pouvaient s'appuyer de grands groupes mais également des PME françaises, ont complètement disparu. Ce ne sont pas les conseillers du commerce extérieur de la France, qui n'ont aucune expérience en matière de négoce, qui peuvent les remplacer. Si les grands groupes disposent de moyens suffisants pour s'implanter en Chine, il n'en va pas de même pour les PME, pour lesquels l'on n'a toujours pas trouvé de relais satisfaisants.

Certes, de mauvais souvenirs, comme l'échec de Citroën dans sa tentative d'implantation dans les années 1980, ont marqué les esprits. Il n'en demeure pas moins que la principale explication à la faiblesse de la présence française dans les échanges de la Chine avec le reste du monde est ailleurs. L'effort des gouvernements français s'est pendant trop longtemps concentré sur le soutien aux grands groupes intervenant dans les secteurs de l'énergie ou des transports, qui ont bien moins besoin de leur soutien que les PME.

La Chine constitue l'un des débouchés d'exportation les plus dynamiques pour la France. En termes de contribution à la croissance, la Chine est à l'origine d'un supplément d'exportation de 685 millions d'euros entre 2003 et 2004. Il faut mieux en tirer parti, notamment en soutenant davantage les PME. Le rôle des ministres du commerce extérieur successifs, qui n'ont souvent pas la vocation de VRP, n'est pas de soutenir les grands groupes, qui n'en ont souvent pas besoin, et d'inaugurer de grandes usines françaises à l'étranger, il est plutôt d'accompagner les PME dans leur démarche exportatrice.

Il ressort, par exemple, d'un téléfilm récent consacré au développement des relations entre la Chine et la France dans le secteur de la viticulture, que les dirigeants de PME filmés n'avaient pas de conseil et se comportaient en agressés. Un autre exemple frappant est celui de la société DMC, qui a tenté de se développer en Chine en s'associant avec des Chinois. Ceux-ci ont alors tenté de prendre le contrôle de DMC. Les pouvoirs publics ne peuvent pas rester indifférents à ces exemples. Il leur revient d'encourager le regroupement des efforts des PME. Si une association entre entreprises européennes est difficilement envisageable, en revanche, il serait intéressant de favoriser la mutualisation des moyens et des expériences entre les PME : les PME aiment se « tenir chaud », pouvoir échanger leur expérience et partager le même correspondant sur place.

Par ailleurs, il faut que les élus, qui ont de nombreux contacts avec les PME, relaient auprès d'elles les manifestations susceptibles de les intéresser. C'est le cas du forum PME Chine du Sud qui doit se tenir en septembre prochain à Canton et dont l'objectif est de permettre à des PME chinoises et françaises de nouer des contacts. Alors que 300 PME françaises sont attendues pour rencontrer près de 5.000 PME chinoises, seuls 24 bulletins d'inscription avaient été reçus au 28 juin. Si les craintes des PME ne sont pas toutes fondées, celle relatives à la contrefaçon sont justifiées et méritent un traitement particulier.

Le développement de relations, notamment commerciales, entre deux pays suppose un renforcement des échanges entre les étudiants. A cet égard, il serait intéressant d'accueillir davantage d'étudiants chinois dans les universités et grandes écoles françaises. C'est ce que font les Anglo-saxons.

M. Philippe Rouault a émis des réserves quant à l'optimisme des Rapporteurs. Il faut appréhender les relations économiques entre la France et la Chine avec moins d'angélisme, et exiger davantage de réciprocité dans nos échanges. En effet, alors que les entreprises chinoises peuvent acheter librement nos entreprises, nous sommes contraints de mettre en place des joint-ventures pour investir sur leur marché. Il existe aussi une asymétrie en matière de droits de douane pour certains produits, par exemple les chaussures. Par ailleurs, l'approche politique de la conclusion, qui évoque l'avènement d'un État de droit en Chine, laisse sceptique. La culture chinoise est, en effet, durablement marquée par la primauté du groupe sur l'individu. Enfin, il faut être prudent en matière de transferts de technologies et ne pas lever l'embargo sur les technologies de la défense.

M. Jean-Pierre Gorges a déploré que certains veuillent faire peur aux Français. Ce rapport a le mérite de rassurer. Aux États-Unis, le développement des échanges commerciaux avec la Chine a, certes, provoqué la perte de 2,5 millions d'emplois, mais il a, par ailleurs, contribué à la création de 4,2 millions d'emplois. Il est regrettable que les chiffres équivalents pour la France ne figurent pas dans ce rapport. Les 350 millions de Chinois qui ont un niveau de vie comparable aux Européens doivent être considérés comme nos clients potentiels. Ce qui se passe aujourd'hui en Chine est une chance pour la France.

M. Michel Bouvard, rappelant que la France a été le premier pays occidental à reconnaître la République populaire de Chine, en 1964, a déploré l'incapacité française à transformer les réussites politiques en réussites économiques et commerciales. Il a demandé quel est le sentiment des rapporteurs sur la recherche. Quelles possibilités de partenariat s'offrent à nous et quels sont les risques pour notre capacité à conserver notre avance technologique ?

Les statistiques de l'Agence française des investissements internationaux (AFII) doivent être appréhendées avec la plus grande réserve. Elles recensent le nombre d'emplois créés ou maintenus grâce aux investissements étrangers en France sur une année donnée. Toutefois, ce qui importe, c'est de savoir si ces emplois sont toujours présents trois ou quatre ans après, ou s'ils ont été transférés dans le pays d'origine des capitaux.

M. Richard Mallié a partagé la critique de M. Philippe Rouault relative au laxisme de la réglementation française et européenne par rapport à la réglementation chinoise. Toutefois, la réglementation chinoise sur les investissements étrangers évolue : une loi adoptée récemment va permettre à des filiales étrangères à 100 % de s'installer en Chine.

M. Jean-Jacques Descamps a souligné que l'intérêt de ce rapport réside dans sa pédagogie sur les délocalisations. On y comprend que l'expansion économique et commerciale de la Chine se fait au détriment non pas de la France ou des pays occidentaux, mais d'autres pays exportateurs à bas coût de main-d'œuvre, comme le Maroc ou le Cameroun. Il faut différencier les investissements étrangers qui cherchent à profiter de moindres coûts de production de ceux qui visent une installation sur le marché chinois. Sur ce sujet, il y a également un travail de pédagogie à réaliser. Le ministre du commerce extérieur devrait être conjointement ministre des investissements extérieurs.

Quels que soient les secteurs qu'elles touchent, les délocalisations posent des problèmes locaux. Les allégements de charges sociales ne sont qu'une solution de retardement. Mieux vaudrait avoir une approche locale des problèmes. Il faudrait également favoriser davantage l'accueil des étudiants étrangers, car une grande partie d'entre eux entretiendront, par la suite, des relations d'affaires avec la France.

Le Président Pierre Méhaignerie a déclaré qu'il souscrit à beaucoup d'observations des Rapporteurs, mais qu'il est moins confiant qu'eux. En effet, ils ne prennent pas en compte la dynamique exponentielle des délocalisations. De plus en plus d'entreprises françaises sous-traitent leur production. Si les États-Unis, qui ont souvent quelques années d'avance sur nous, enregistrent un déficit commercial très important avec la Chine, ils disposent, contrairement à nous, de deux atouts : d'une part, une grande capacité à créer des emplois de services, et, d'autre part, un haut niveau technologique qui permet également à leur industrie de créer des emplois.

M. Hervé Novelli, Rapporteur, a souligné que le plus grand danger ne provient pas de la Chine, mais bien nos propres faiblesses. Il faut analyser pourquoi les relations commerciales avec la Chine peuvent représenter un danger exponentiel, notamment par rapport à d'autres pays européens comme l'Allemagne. L'Allemagne a beaucoup plus de petites et moyennes entreprises et, historiquement, elle a davantage orienté ses relations commerciales vers l'Asie, alors que les entreprises françaises sont davantage tournées vers l'Afrique et le Moyen-Orient. Néanmoins, les opportunités demeurent et il est primordial de mettre en adéquation les structures de l'économie française avec la mondialisation pour les saisir. Le constat dressé est optimiste car la Chine évolue, ainsi que ses besoins, qui s'orientent davantage vers les biens à haute valeur ajoutée.

La France présente des atouts dans certains domaines comme les transports, cela constitue des exportations potentielles dans ce pays en pleine mutation. Aux États-Unis, les délocalisations sont moins douloureuses, car elles sont compensées par des créations d'emplois dans le domaine des services et des secteurs à haute valeur ajoutée. Le constat dressé ne doit pas être taxé d'angélisme. Par exemple, les services bancaires chinois se développent considérablement, mais manquent beaucoup de services financiers. La France peut donc répondre à cette demande, d'autant plus que les banques ouvrent leur capital. Ce secteur est d'autant plus prometteur qu'il y a eu un réel effort, en Chine, d'assainissement du secteur bancaire. Il est souvent avancé que les prises de participations sont limitées à 50 % du capital dans ce pays. Cette affirmation est erronée et ce pourcentage est bien supérieur dans certaines entreprises aujourd'hui. Dans le domaine des brevets, l'adhésion à l'Organisation mondiale du commerce permet à la Chine de faire des pas de géant.

Le problème à terme sera une adéquation entre une démocratie économique, vers laquelle tend inexorablement la Chine, et un État de droit qu'elle doit encore devenir. En matière de recherche, la visite d'un laboratoire de France Telecom implanté à Pékin a montré tous les bénéfices qu'en retirait l'entreprise en France. Le directeur de France Télécom, M. Didier Lombard, a pu rappeler la différence de coût entre un ingénieur chinois et un ingénieur français. S'agissant des délocalisations, il faut bien voir de quoi il s'agit. Par exemple, Citroën s'est implanté en 1993 en Chine, et emploie aujourd'hui 4.500 personnes. Cela n'est pas du tout néfaste à l'économie française, car cette usine permet à l'entreprise de couvrir le marché chinois. Cela ne constitue donc pas une délocalisation à proprement parler, mais un moyen de couvrir le marché local et in fine de préserver des emplois en France. Les délocalisations proprement dites sont marginales sur le marché chinois. Le plus urgent est aujourd'hui de réformer l'économie française pour améliorer nos performances dans le commerce international.

Le Président Pierre Méhaignerie a approuvé le constat sur la nécessité de mener des réformes en France, mais a rappelé que la situation était malgré tout préoccupante et qu'il convenait de rester lucide.

La commission des Finances a, en application de l'article 145 du Règlement, autorisé la publication de ce rapport.

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Information relative à la Commission

La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a nommé :

M. Marc Le Fur, Rapporteur pour avis sur les articles 4, 6, 9, 12, 18, 20, 24 et 29 du projet de loi d'orientation agricole (n° 2341).

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