COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 9

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 18 octobre 2005
(Séance de 18 heures 30)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président,

SOMMAIRE

 

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- Examen, en application de l'article 91 du Règlement, sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) (M. Gilles Carrez, Rapporteur général)


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Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué qu'à la demande du groupe Socialiste, formulée en séance, il a réuni la commission en application de l'article 91 du Règlement.

M. Didier Migaud a souhaité une clarification sur le point qui lui paraît le plus injuste du projet de loi de finances, qui inquiète une partie de l'opinion publique et qu'il condamne fermement. Le bouclier fiscal, qui permet des réductions de l'impôt sur le revenu et de l'impôt de solidarité sur la fortune au bénéfice des revenus les plus élevés, s'appliquera-t-il sur les revenus 2005 ? Cela serait d'autant plus étonnant que les autres mesures fiscales, notamment celles relatives au barème de l'IR, ne s'appliqueront qu'à partir de 2006. Ceci pose la question de la place de ce dispositif dans le projet de loi de finances.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a rappelé que le dispositif a été expliqué à de multiples reprises, notamment dans le projet de loi de finances. Ce dispositif, simple, s'appliquera sur les impôts payés en 2006 mais n'aura d'effet concret qu'en 2007. Or l'IR présente un décalage d'un an par rapport à l'ISF et aux impôts locaux, du fait de l'absence de retenue à la source. En outre l'article 34, II, 7° a) de la LOLF dispose que « dans la seconde partie, la loi de finances de l'année, (...) peut : comporter des dispositions relatives à l'assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des impositions de toute nature qui n'affectent pas l'équilibre budgétaire ». Ce dispositif relève donc de la seconde partie de la loi de finances.

M. Jean-François Copé, ministre du Budget et de la réforme de l'État, Porte-parole du Gouvernement, a indiqué qu'il s'agissait, certes, d'un débat majeur mais qu'aucune ambiguïté n'est possible depuis le dépôt du projet de loi de finances, où la disposition figure bien en deuxième partie. Ainsi, toutes les mesures du bouclier fiscal s'appliqueront sur le paiement des impôts 2006 (ISF, IR et impôts locaux), alors que les remboursements interviendront, si nécessaire, en 2007. D'autres exemples similaires existent, avec notamment la refacturation aux collectivités locales, qui fera l'objet d'une information en 2008 et d'une refacturation en 2009.

M. Philippe Auberger a souhaité que le ministre donne des explications sur le mode opératoire, en particulier l'obligation de demande de remboursement et la date limite.

M. Jean-François Copé a indiqué que les modalités de la réforme pouvaient être amodiées, notamment celles relatives aux collectivités locales, mais qu'il n'y avait pas de problème de validité juridique.

M. Didier Migaud a indiqué qu'il s'agissait effectivement d'un problème d'opportunité politique : une mesure injuste portera sur les revenus de 2005.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué que le fait que les revenus 2005, donc l'impôt 2006, étaient dans le champ du bouclier, a été annoncé dans le dossier de presse. Il a ensuite rappelé les trois principes nécessaires de la fiscalité : justice, attractivité et dynamisme économique.

Y a-t-il une grande différence entre le plafonnement Rocard et le texte actuel ? Partout en Europe, il existe un plafonnement de la fiscalité par rapport à l'ensemble des revenus. Il est erroné de dire que les effets redistributifs diminuent. Les dépenses sociales ont augmenté de 12 % en deux ans, pendant que l'on parlait, dans l'opposition, de « casse sociale ». Aucun pays en Europe n'a atteint ou dépassé ce montant.

M. Henri Emmanuelli a répondu que si les dépenses au titre du RMI augmentent, c'est une conséquence de la situation de l'emploi. Cela n'a rien à voir avec la redistribution. La droite a toujours été contre la progressivité de l'impôt.

M. Augustin Bonrepaux a rappelé que le Président de l'Assemblée a demandé que la Commission règle toutes les questions afin d'éviter des rappels au Règlement répétés. Or, M. Jean-François Copé refuse de transmettre des informations réclamées depuis des mois s'agissant de la taxe professionnelle. Les simulations doivent être effectuées pour chaque collectivité locale, afin de mesurer les conséquences du plafonnement dans les différentes zones. Les départements sont dans des situations très inégalitaires.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué qu'une partie du malentendu vient du fait que les collectivités locales n'ont pas conscience des exonérations et dégrèvements dont elles bénéficient, car les chiffres sont globalisés. Dans les zones qui subissent un fort taux de pression fiscale, il peut y avoir déjà un grand nombre d'entreprises plafonnées. Il faut savoir où sont les zones où la taxe professionnelle est élevée. Ces renseignements seront connus en amont du débat.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a rappelé que l'article 24, qui est donc situé en première partie du projet de loi de finances, procède à une réforme de la dotation globale d'équipement des départements. Les effets de cette réforme seront examinés département par département.

Usant de la faculté que l'article 38 du Règlement de l'Assemblée nationale confère aux députés d'assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, M. Jean-Marc Ayrault a remercié le Président de la commission des Finances pour la bonne tenue de cette réunion organisée à la demande du groupe Socialiste. Loin de « faire du cinéma », pour reprendre une expression du ministre du Budget, le débat soulevé par le groupe Socialiste pose une question très grave. On doit regretter qu'une réforme fiscale d'une telle ampleur soit renvoyée en deuxième partie du projet de loi de finances. En France, 70 % des investissements sont effectués par les collectivités locales. Aujourd'hui, personne ne sait où le Gouvernement va conduire le pays avec une réforme dont l'impact sur les collectivités et les intercommunalités n'est pas connu. Le fait que le Gouvernement soit incapable de répondre constitue une grave atteinte à la décentralisation. Les inquiétudes et les angoisses sont nombreuses parmi les élus.

M. Augustin Bonrepaux a estimé essentiel de connaître, pour chaque région, chaque département et chaque groupement intercommunal, la proportion d'entreprises plafonnées et celle sur laquelle il sera possible d'agir. La réforme proposée aura évidemment des incidences sur les impôts locaux. Ce sont les EPCI qui seront les plus frappés.

M. Jean-François Copé a regretté que cette suspension de séance, demandée sur la question du plafonnement et pour laquelle un éclairage a été apporté, soit utilisée par l'opposition comme un moyen de soulever un deuxième sujet, celui de la réforme de la taxe professionnelle.

M. Augustin Bonrepaux a fait remarquer qu'il avait été invité par le Président Jean-Louis Debré lui-même à épuiser la liste des sujets susceptibles de donner lieu à des incidents de séance ...

M. Jean-François Copé s'est étonné de la mise en cause inutilement agressive du Président Jean-Marc Ayrault. Des éléments de simulation seront fournis au moment de l'ouverture du débat de fond sur le plafonnement, en deuxième partie du projet de loi de finances. Ces simulations ne seront pas données à la dernière minute. La réforme de la taxe professionnelle est un sujet difficile auquel personne n'a eu, jusqu'à présent, le courage politique de s'attaquer et si l'on peut comprendre des désaccords de fond, il n'est en revanche pas possible de mettre en cause l'information donnée par le Gouvernement, dont tous les éléments seront, en amont du débat, disponibles.

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