COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 14

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 26 octobre 2005
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Michel Bouvard, Vice- président, puis

de M. Jean-Jacques Descamps, Vice-président, puis

de M. François Scellier, doyen d'âge

SOMMAIRE

 

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- Examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540)

 

Vote sur les crédits de la mission « Transports » :

 

- Transports aériens et météorologie, vote de l'article 90 rattaché et du budget annexe Contrôle et exploitation aériens (M. Charles de Courson, Rapporteur spécial)

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- Transports terrestres, fluviaux et maritimes et vote du compte spécial Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route (M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial)

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La Commission des finances a poursuivi l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2006, en examinant les crédits de la mission Transports, l'article 90 rattaché, le budget annexe Contrôle et exploitations aériens et le compte spécial Contrôle et sanction automatisées des infractions au code de la route.

M. Charles de Courson, Rapporteur spécial des transports aériens et météorologie, a expliqué que la loi organique du 1er août 2001 a une incidence particulière sur les crédits des transports aériens, dans la mesure où elle redéfinit le périmètre des budgets annexes, qui doivent désormais retracer les seules opérations donnant lieu au paiement de redevances. D'importants transferts de crédits ont donc eu lieu entre le budget annexe de l'aviation civile - désormais mission « Contrôle et exploitation aériens » - et le budget général. Les crédits de soutien à la recherche dans l'aéronautique civile figurent désormais dans la mission « Recherche », et ne sont donc plus dans le champ du rapport spécial, qui comprend la mission « Contrôle et exploitation aériens », ainsi que les programmes « Transports aériens » et « Météorologie » de la mission « Transports », soit au total 1,793 milliard d'euros en crédits de paiement et 12.139 emplois à temps plein.

La mission Contrôle et exploitation aériens est divisée en quatre programmes, dont trois correspondent aux activités - navigation aérienne, surveillance et certification, formation aéronautique - et un à la fonction support de la mission.

La maquette du programme « Transports aériens » a changé depuis la présentation initiale en 2004. Il comporte cinq actions. L'action « Affaires techniques, prospective et soutien au programme » retrace principalement les missions dévolues à la Direction des affaires stratégiques et techniques, ainsi que les moyens de soutien de la DGAC non rattachables au budget annexe de l'aviation civile. Le Rapporteur spécial s'est interrogé sur la possibilité de rattacher les dépenses de personnel de la gendarmerie du transport aérien (GTA) à la mission « Transports ». Actuellement, ces crédits sont compris dans ceux de la gendarmerie au sein de la mission Sécurité civile. En revanche, les dépenses de fonctionnement et d'investissement de la GTA figurent bien dans le programme « Transports aériens ». Dans l'action « Régulation du transport aérien », animée par la Direction de la régulation économique (DRE), on trouve notamment les crédits de péréquation des lignes d'aménagement du territoire de l'ex-FIATA. Ces crédits n'ont pas leur place dans ce programme. Conformément au principe de la LOLF d'organisation des crédits par objectifs, ils devraient plutôt figurer dans le programme « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires ». Le Rapporteur spécial a déclaré qu'il proposera à la Commission deux amendements visant à demander au Gouvernement de déplacer ces crédits.

L'action « Régulation des aéroports » regroupe les crédits de subventions de sécurité et sûreté aéroportuaires de l'ex-FIATA ainsi que les emplois et crédits aéroportuaires inscrits jusqu'en 2005 sur le budget annexe de l'aviation civile. L'action « Enquêtes de sécurité aérienne » correspond au bureau d'enquêtes et d'analyse pour la sécurité de l'aviation civile (BEA). La dernière action, sans changement, retrace les crédits de l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aériennes (ACNUSA).

Les crédits du budget annexe sont en augmentation de 14,7 % par rapport à 2005, notamment du fait du remboursement à ADP des investissements de navigation aérienne qu'il a effectués pour le compte de l'État.

Conformément à la LOLF, la part du financement du budget annexe par redevances augmente. Cette augmentation s'explique par la création de nouvelles redevances en 2006. Les nouvelles redevances correspondent aux activités de surveillance et de certifications de la DGAC. Le coût des prestations soumises à redevances à compter de 2006 s'élève à 69,1 millions d'euros. Toutefois, il est prévu de ne percevoir des usagers que 35 millions d'euros à ce titre en 2006 ; une montée en charge progressive est prévue, car le coût intégral des redevances serait très difficile à supporter pour certains acteurs, notamment pour les pratiquants de l'aviation légère. Parallèlement, il est proposé une baisse de 35 millions d'euros du produit global de la taxe de l'aviation civile, correspondant à une baisse uniforme de 56 centimes d'euros par passager, conformément à l'article 46 du projet de loi de finances pour 2006.

Le remboursement à ADP des investissements de navigation aérienne nécessite un emprunt exceptionnel. Ce remboursement est lié au changement de statut d'ADP, à qui est transférée la propriété du domaine aéroportuaire, à l'exception des biens nécessaires à la navigation aérienne. L'article 2 de la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports prévoit que l'Etat rembourse à ADP les investissements qu'il a effectués sur ces biens. Le montant devrait être arrêté à 152 millions d'euros.

Le transfert au budget général des missions « régaliennes » du budget annexe, conformément à la LOLF, s'accompagne de transferts de crédits très importants. Ainsi, 83 millions d'euros de crédits de paiement correspondent en 2006 dans le programme transports aériens à des missions transférées du budget annexe, sur un total de 166 millions d'euros de crédits de paiement pour ce programme.

Le projet de budget 2006 de Météo France s'inscrit dans le cadre du contrat d'objectifs 2005-2008 signé entre l'État et l'établissement : les crédits augmentent de 0,3 % par an en deçà de l'inflation. La subvention versée par l'État s'élève donc à 155,4 millions d'euros. Le projet de budget de l'établissement pour 2006, en baisse de 6,8 %, prévoit 297,2 millions d'euros pour la section du fonctionnement et 20,3 millions d'euros pour l'investissement. L'augmentation des dépenses de personnel sera limitée par le non-remplacement d'environ un tiers des départs (18 postes sont supprimés). L'État se porterait mieux s'il était géré de cette façon.

L'établissement s'efforce d'accroître ses recettes propres, composées pour l'essentiel de recettes de nature commerciale.

Enfin, le Rapporteur spécial a souligné que Météo France a largement tenu comptes des observations que la Cour des comptes lui a adressées.

L'année 2005 a confirmé la reprise de l'activité dans le secteur du transport aérien, amorcée en 2004. Les perspectives d'évolution du trafic pour les années à venir sont bonnes, mais restent fortement dépendantes de facteurs conjoncturels. Toutefois, les difficultés persistent pour un grand nombre de compagnies aériennes. Les compagnies européennes ont mieux résisté que leurs homologues américaines, et le groupe Air France-KLM, un an après sa constitution, se porte bien. Le secteur est encore marqué par des mouvements importants, notamment le développement des compagnies à bas coûts, dites « low cost », ainsi que la réforme de la gestion des aéroports en France.

Le secteur aéroportuaire est en pleine réorganisation, avec l'application de la loi du 20 avril 2005 qui a transformé ADP en société anonyme en vue de l'ouverture de son capital, qui devrait intervenir rapidement.

En vertu des pouvoirs de contrôle qui lui sont conférés par l'article 57 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, le Rapporteur spécial a souhaité effectuer un contrôle sur pièces et sur place au siège d'ADP, dans le but de contrôler le respect du principe d'égalité dans la fixation et la perception des redevances aéroportuaires. Ce contrôle s'est bien passé. Le seul problème réside dans le maintien d'un abattement discriminatoire sur le fret, qui a été réduit à 20 %, mais devrait être totalement supprimé. Fedex bénéficie de 40 % de cet abattement.

Le Rapporteur spécial a réitéré ses critiques à l'encontre des dépenses de sûreté ainsi que de leur mode de financement. Par ailleurs, la création d'une taxe sur les billets d'avion pour financer le développement, annoncée par le Président de la République, procède d'une idée généreuse mais qui risque d'avoir des conséquences économiques graves. Le projet consiste en l'introduction d'un complément à la taxe de l'aviation civile, qui ne s'appliquerait qu'au transport aérien, et qui majorerait, pour tous les passagers au départ de la France, les taxes de 5 euros en classe économique et de 15 euros en classe affaire.

Le Rapporteur spécial s'est prononcé contre cette taxe anti-économique, qui risque de n'être mise en œuvre que par la France, qui aura ainsi, seule, pénalisé son secteur aérien, tout en n'apportant qu'une contribution bien maigre au financement du développement : 200 millions d'euros par an. D'après les simulations entreprises, cette taxe entraînera la perte de 900.000 passagers par an, dont 600.000 pour le trafic domestique. La perte de chiffre d'affaires serait de 72 millions d'euros pour l'ensemble des compagnies, et 16 millions pour les aéroports. La chute du trafic conduirait à la destruction de plus de 3.600 emplois.

M. Jean-Jacques Descamps s'est interrogé sur les moyens de mettre en place une liste noire des compagnies aériennes dangereuses. Les tours opérateurs vont en effet nécessairement se retourner vers la DGAC pour avoir des garanties.

M. Louis Giscard d'Estaing a souhaité savoir si le basculement des crédits de l'ex-FIATA vers la mission Politique des territoires était envisageable, par souci de cohérence.

En réponse, M. Charles de Courson, Rapporteur spécial, a indiqué qu'il n'est pas logique de maintenir des crédits concernant l'aménagement du territoire au sein du programme « Transports aériens ». Il sera donc proposé un amendement qui supprime les crédits correspondants, afin de demander symétriquement au Gouvernement de les transférer au sein de la mission Politique des territoires.

Il est impossible d'établir la liste noire des compagnies aériennes dangereuses au niveau national car il faut un accord de tous les États concernés sur les critères à retenir. C'est pourquoi un accord communautaire en la matière est en voie de préparation, presque tous les États membres étant d'accord, sauf quelques uns ayant encore des compagnies suspectes. On peut toutefois se demander s'il ne faudrait pas interdire seulement certains avions d'une compagnie, car tous les appareils d'une même compagnie ne sont pas nécessairement dans le même état d'entretien. Se pose également un problème de transparence, car des compagnies peuvent affréter des avions auprès d'autres compagnies et le public ne peut donc pas avoir de certitude sur la sécurité de l'avion utilisé.

M. Jean-Louis Dumont a estimé souhaitable d'interdire nominativement les avions litigieux.

Puis, la Commission a examiné l'article 90, rattaché.

Article 90 : Aménagement du régime de la taxe d'aéroport

M. Charles de Courson, Rapporteur spécial, a précisé que cet article augmente le montant plafond de la taxe d'aéroport de 9,5 à 10 euros pour les aérodromes de classe 3, ce qui est susceptible de générer 2,5 millions d'euros de recettes supplémentaires, permettant de couvrir les dépenses de sûreté de ces aérodromes.

Suivant l'avis favorable du Rapporteur spécial, la Commission a adopté cet article sans modification.

Budget annexe Contrôle et exploitations aériens

Suivant l'avis du Rapporteur spécial, la Commission a adopté les crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens.

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M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial des transports terrestres, fluviaux et maritimes, a présenté les crédits correspondants, lesquels se répartissent en six programmes. Le programme « Réseau routier national », doté de 915 millions d'euros de crédits de paiement, permet de financer le développement et l'entretien du réseau routier actuel. Les moyens du programme « Transports terrestres et maritimes » s'élèveront à 2,67 milliards d'euros et seront affectés aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes de voyageurs et de marchandises, afin de favoriser le rééquilibrage des modes de transport. Pour ces deux programmes, les financements de l'État au titre des grands projets d'infrastructures et, à partir de 2006, des contrats de plan État-régions, sont pris en charge par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). Le programme « Passifs financiers ferroviaires » s'élève à 1,43 milliard d'euros et a pour finalité de contribuer au désendettement de la SNCF, pour le seul service annexe d'amortissement de la dette (SAAD) et de Réseau Ferré de France (RFF). Doté de 122 millions d'euros, le programme « Sécurité routière » met en œuvre la politique préventive et répressive de l'État, dans le cadre de la grande cause nationale lancée par le Président de la République. Quant au programme « Sécurité et affaires maritimes », il sera doté de 143 millions d'euros en 2006, afin de financer l'action régulatrice de l'État au niveau du navire, du marin et de la mer. Enfin, les fonctions soutien de ces différents programmes, sont regroupées dans un programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement », doté de 3,84 milliards d'euros et finançant pour l'essentiel l'ensemble des personnels des services déconcentrés.

S'agissant de l'AFITF, les décisions récentes du Gouvernement ont conduit à une modification substantielle du champ et de l'importance de l'agence, laquelle participe désormais au financement de la part de l'État dans le volet « transports » des contrats de plan État-régions et à des dépenses de travaux liés à la sécurité routière. On ne peut que regretter que ce changement de nature de l'AFITF aboutisse à réduire le contrôle budgétaire du Parlement sur la politique publique de financement des infrastructures. L'agence a disposé de 688 millions d'euros de crédits en 2005 : ses ressources devraient s'élever à 2 milliards d'euros en 2006. En ce qui concerne ses dépenses, les crédits de paiement disponibles en 2006 devraient également s'élever à 2 milliards d'euros, selon une clé de répartition qui sera déterminée par le conseil d'administration de l'AFITF début novembre, mais qui paraît privilégier largement le financement des contrats de plan sur celui des projets nouveaux, ce qui contribue à transformer encore davantage la nature de l'agence.

Le projet de budget routier pour 2006 apparaît autant tourné vers la relance des grands chantiers que vers la poursuite de la préservation et de la réhabilitation du patrimoine routier. Les crédits proviendront à la fois du budget général et de l'AFITF et s'élèveront au total à plus de 1,7 milliard d'euros, en progression de 56 %. On regrettera néanmoins que l'appréciation des chiffres soit rendue difficile par les importantes modifications de périmètre budgétaire et par l'absence budget prévisionnel de l'AFITF à ce jour.

Le volume global des crédits du programme « Transports terrestres et maritimes » s'élève à plus de 2,6 milliards d'euros en 2006. La très grande majorité de cette somme servira à financer des actions de transports collectifs et ferroviaires. Là encore, l'incertitude sur le montant de la part AFITF dans le financement des grands projets ferroviaires est fâcheuse, d'autant que le calendrier du conseil d'administration de l'agence et de l'examen des crédits au Parlement sont particulièrement mal articulés. On touche là aux limites de la débudgétisation des crédits d'État... Si la baisse de la contribution aux charges d'infrastructures est justifiée par la poursuite de la hausse des péages, la subvention de régénération demeure insuffisante, face au besoins évalués dans l'audit du réseau ferré existant, rendu public il y a peu.

En ce qui concerne le transport collectif, l'année 2005 est marquée tout à la fois par la fin de la singularité francilienne, avec la décentralisation du Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF), et par la pérennisation du nouveau modèle de financement des transports urbains de province, marqué par la disparition des crédits budgétaires de l'État, le projet de loi de finances pour 2006 prévoyant néanmoins d'ouvrir une dotation de 76,5 millions d'euros en crédits de paiement, afin de régler les engagements antérieurs sur les opérations de transport en site propre. Le 6 octobre, la commission consultative d'évaluation des charges a proposé que l'État s'engage à hauteur de 400 millions d'euros, ou sur 20 % d'un programme de commandes de nouvelles automotrices sur une durée d'au plus 10 ans, afin de participer à la modernisation des trains d'Île-de-France. Les volets « transport fluvial et maritime » ne présentent pas de nouveautés particulières, si ce n'est le lancement d'un projet de partenariat public-privé sur le canal Seine-Nord-Europe.

Il convient de dénoncer l'absence d'objectifs de résultats et d'indicateurs de performance sur le programme « Passifs financiers ferroviaires », ce qui n'est pas conforme à la LOLF. Après avoir proposé des indicateurs se contentant de mesurer le niveau de la dette chaque année, le Gouvernement a, face aux critiques du Rapporteur spécial, supprimé purement et simplement toute trace de mesure de la performance du programme ! On peut comprendre la difficulté qui existe à élaborer des indicateurs sur des masses financières aussi contraintes que celles des dettes ferroviaires. Mais rien ne saurait justifier l'absence d'objectifs assignés à la politique de maîtrise de l'endettement public. Du reste, le programme ne rend pas compte des 7 milliards d'euros d'endettement net de l'entreprise SNCF. La dette ferroviaire globale s'élève à 40 milliards d'euros environ. Si le programme « Sécurité et affaires maritimes » disposera de près de 143 millions d'euros de crédits de paiement en 2006, c'est la situation financière et sociale de la Société nationale Corse-Méditerranée (SNCM) qui a retenu l'attention. Les crédits de la sécurité routière iront bien au-delà du seul programme du budget général, qui s'élève à 122 millions d'euros en 2006, le nouveau document de politique transversale évaluant la somme des programmes et des missions contribuant à l'effort public en faveur de la sécurité routière à 2,235 milliards d'euros. Enfin, le périmètre considérable couvert par le programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement » provient d'un recul, décidé au début d'année, visant à y inclure la totalité des effectifs déconcentrés. Il est indispensable que cette imputation contestable soit supprimée le plus rapidement possible, une fois la décentralisation mise en œuvre.

M. Augustin Bonrepaux s'est interrogé sur le degré d'avancement des volets routier et ferroviaire des contrats de plan État-régions, et notamment sur leur date de réalisation définitive. Il a également souhaité connaître le montant des crédits nécessaires au renouvellement du matériel ferroviaire roulant.

M. Louis Giscard d'Estaing a souhaité obtenir des précisions sur les financements de l'AFITF affectés aux contrats de plan.

M. Charles de Courson a dénoncé la tuyauterie du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », qui permet de recycler au total 4 milliards d'euros, sur 14 milliards d'euros de privatisations, au profit de l'AFITF. La somme de 3,1 milliards d'euros en 2007 est-elle crédible, 900 millions étant prévus en 2006 ? Le système est peu compréhensible et on ne connaît pas le montant qui sera réellement consacré par l'AFITF au financement des contrats de plan : 1,5 milliard d'euros comme annoncé dans le dossier de presse, ou 2 milliards d'euros, selon M. Dominique Perben ?

Le montage budgétaire permettant de réaffecter, en sollicitant la procédure des fonds de concours les crédits de l'AFITF, au profit des travaux réalisés par l'État au titre des contrats de plan ne permet pas d'avoir une vision claire des financements. Qui sera maître d'ouvrage sur le réseau routier national ? Si ce n'est pas l'AFITF, quelle est l'utilité de cette structure ?

M. Yves Deniaud a souhaité connaître le montant des crédits nécessaires pour que la totalité des engagements de l'État au titre des contrats de plan soit respectée. La loi du 13 août 2004 a rappelé le respect de ces engagements, même en cas de transfert de routes aux départements. Par ailleurs, l'AFITF n'est dotée que de 830 millions d'euros de dotations en capital sur les 4 milliards d'euros annoncés.

M. Didier Migaud a souhaité obtenir des précisions sur les conditions de la privatisation des autoroutes et les méthodes de calcul retenues. L'appel d'offres qui a été lancé tient compte d'engagements de l'État qui ne sont pourtant pas connus du Parlement. Les calculs du Rapporteur général et du Rapporteur spécial divergent et les ministres ne répondent pas aux questions posées. Cette décision de privatisation est totalement inopportune et dangereuse à terme pour l'État car elle hypothèque fortement l'avenir. Qu'est-ce qui a motivé un changement de décision ?

M. Jean-Jacques Descamps a rappelé qu'un vaste débat a déjà eu lieu sur ces questions en Commission et dans l'hémicycle.

M. Didier Migaud a précisé que débat ne signifie pas succession d'interventions sans réponse.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, s'est interrogé sur le calendrier retenu entre la discussion budgétaire et le conseil d'administration de l'AFITF, prévu pour le 7 novembre prochain. Les propositions qui seront faites par le Parlement devront être prises en compte par l'AFITF. Il faut par ailleurs rappeler que la vente de 49 % du capital d'ASF en mars 2002 s'était faite à un prix de 24 euros pour les particuliers, les actions valant aujourd'hui autour de 40 euros.

M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, a apporté les éléments de réponse suivants :

- il est raisonnablement possible d'envisager une réalisation pleine et entière du volet routier des contrats de plan, compte tenu des moyens accordés à l'AFITF, avec un retard qui ne sera pas supérieur à deux ans, les contrats devant expirer au plus tard en décembre 2008 ;

- en ce qui concerne le volet ferroviaire des contrats de plan, se pose un problème de répartition des moyens entre les investissements nouveaux et la régénération du réseau existant. L'enveloppe de 900 millions d'euros semble insuffisante globalement. La MEC, comme le récent audit de RFF estiment le montant nécessaire à 1,1 milliard d'euros. Aussi, la part consacrée à la régénération devrait-elle être augmentée ;

- le financement de l'AFITF sera assuré par 4 milliards d'euros du produit des privatisations des autoroutes, 836 millions d'euros étant versés dès 2006. L'AFITF n'est qu'une tuyauterie en la matière, car elle n'a pas vocation à être maître d'ouvrage. Elle reçoit des fonds de l'Etat, qu'elle reverse, sous forme de fonds de concours, au budget général. Les prévisions de rattachement de fonds de concours mentionnées dans le bleu, qui sont d'ailleurs probablement sous-évaluées, incluent également les fonds de concours versés par les collectivités locales. Il faut se méfier des double comptes au sein de la mission « Transports », les programmes « Réseau routier national » et « Transports terrestres et maritimes » versant une dotation à l'AFITF - et l'AFITF reversant à ces programmes des fonds de concours ;

- deux arguments ont été avancés pour justifier la création de l'AFITF. Tout d'abord, il s'agirait d'un établissement public dont la capacité d'endettement se serait située hors « périmètre maastrichtien », cet argument s'étant révélé erroné par la suite. Ensuite, l'existence d'une structure dédiée permettrait de garantir la visibilité, la cohérence et la pérennité des financements publics en faveur des investissements routiers. On peut désormais ajouter à ces arguments la possibilité offerte à l'Agence de lancer des partenariats publics privés (PPP) ;

- les frais de structure de l'AFITF sont faibles, de l'ordre de 1,75 million d'euros, dont 250.000 euros de dépenses de personnel, 1,2 million d'euros de charges financières et 300.000 euros de dépenses de fonctionnement. Mais on aurait peut-être pu se passer de l'AFITF.

M. Charles de Courson a réaffirmé son incompréhension : l'État subventionne l'AFITF, qui verse, à son tour, des fonds de concours à l'État.

M.  Didier Migaud a souhaité que la Commission soit cohérente avec ses positions et a demandé la suppression de cette structure, inutile et coûteuse.

M.  Gilles Carrez, Rapporteur général, a présenté la ventilation des 14 milliards d'euros inscrits en recettes du compte « Participations financières de l'État » : 12 milliards proviendraient de la cession des parts de l'État dans les sociétés d'autoroutes et 2 milliards de l'ouverture du capital d'Aéroports de Paris (ADP). Par ailleurs, 950 millions d'euros figurent en recettes non fiscales du budget général, au titre des plus-values de cessions réalisées par Autoroutes de France. 4 milliards d'euros seront affectés à l'AFITF, dont 836 millions dès 2006. Le reste des financements dédiés à l'AFITF est placé en trésorerie, ce qui permet une baisse des frais financiers du budget général. 6,5 milliards d'euros des produits du compte spécial sont affectés à la Caisse d'amortissement de la dette publique dès 2006. Quelques hypothèses ont été avancées pour l'emploi du solde, tels le financement de l'Agence nationale de la recherche ou le développement économique et industriel. Il faut rappeler que la création de l'AFITF a été souhaitée par de nombreux parlementaires, afin d'assurer la protection des crédits d'investissement par rapport à l'augmentation inéluctable des charges de fonctionnement de l'Etat. L'AFITF dispose d'une faculté d'endettement.

M. Didier Migaud a réaffirmé que cette agence était inutile.

M.  Hervé Mariton, Rapporteur spécial, a précisé que l'AFITF, outil d'organisation et de protection du financement public des infrastructures, bénéficie également en recettes de 160 millions d'euros au titres des redevances domaniales, 510 millions d'euros au titres de la taxe d'aménagement du territoire, et 100 millions d'euros de produit des amendes radar. La complexité des circuits financiers ne doit pas amener à jeter le discrédit sur l'utilité d'un organisme permettant de flécher des crédits pour le réseau routier et les infrastructures.

M.  Augustin Bonrepaux a considéré que cette structure a un coût, alors que la Commission affirme vouloir lutter contre tous les gaspillages, et qu'elle ne garantit rien du tout, comme le prouve l'article 48 du projet de loi de finances dépossédant RFF de ses biens.

M.  Charles de Courson s'est inquiété de l'obscurité pesant sur l'affectation des 14 milliards d'euros provenant du produit des privatisations. Au-delà des 12 milliards d'euros des sociétés d'autoroutes, il n'est pas certain que l'ouverture du capital d'ADP se fasse par la vente de titres de l'État, mais peut-être seulement par une augmentation de capital. De même, dans le cadre de la privatisation d'EDF, le personnel pourrait racheter, à des conditions préférentielles, des actions de l'Etat, au-delà de l'augmentation du capital. Plus globalement, on peut douter de la sincérité du plan de financement de l'Etat, tel qu'il figure dans l'article d'équilibre du projet de loi de finances, car les chiffres inscrits en regard des recettes de privatisation ne correspondent pas à l'évolution du déficit public.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a rappelé que le plafond de variation de la dette à moyen et long terme de l'Etat n'est fixé qu'à 41,5 milliards d'euros, compte tenu de l'affectation de 6,5 milliards d'euros à la Caisse d'amortissement de la dette publique.

M.  Hervé Mariton, Rapporteur spécial, a exprimé son souhait de contrôler le processus de privatisation des autoroutes, notamment en demandant l'audition par la Commission, des deux ministres concernés après la réunion du conseil d'administration de l'AFITF. Cette agence présente l'intérêt de concentrer l'intégralité des crédits en faveur des infrastructures, ce qui facilite les possibilités de partenariat, même si les montages financiers peuvent paraître compliqués.

M.  Augustin Bonrepaux a rappelé tout l'intérêt qu'il y aurait à supprimer l'AFITF, structure inefficace.

M. Charles de Courson s'est enquis de la capacité juridique de l'AFITF, de ses statuts, et de la pertinence du mécanisme aboutissant à rétrocéder à l'État, via l'AFITF des sommes qui y transitent, en provenance de l'État.

En réponse à M. Charles de Courson, M.  Hervé Mariton, Rapporteur spécial, a précisé que le président du conseil d'administration de l'Agence perçoit une indemnité de 42.000 euros.

La Commission a ensuite procédé à l'examen des amendements.

Elle a examiné un amendement de M. Hervé Mariton, visant à supprimer 1,3 milliard d'euros de dépenses d'intervention de l'État au titre de la contribution au désendettement de RFF et de la SNCF. M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, a expliqué qu'en l'absence d'objectif et d'indicateur de performance, le programme « Passifs financiers ferroviaires » n'est pas conforme aux prescriptions de la loi organique relative aux lois de finances.

M. Yves Deniaud a approuvé cet amendement, qui s'inscrit tout à fait dans l'esprit des travaux de la mission d'évaluation et de contrôle (MEC). RFF dispose d'un patrimoine immobilier cessible qu'il est aujourd'hui dans l'incapacité de valoriser. Les travaux de la MEC ont aussi mis en évidence le problème de la répartition des actifs entre RFF et la SNCF. Le Gouvernement s'était engagé à ce que cette répartition soit effective au plus tard le 31 octobre 2004. Un an plus tard, elle n'est toujours pas réalisée. Ce n'est pas acceptable.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a rappelé que les possibilités pour RFF de mobiliser son patrimoine sont aujourd'hui réduites.

M. Charles de Courson s'est interrogé sur l'existence d'un programme spécifique sur le passif ferroviaire au sein de la mission « Transports », alors qu'il existe une mission sur le passif et les engagements de l'État. Il pourrait être opportun de supprimer ce programme et de suggérer l'inscription de ces crédits dans la mission « Engagements financiers de l'État ».

M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, a indiqué que la place de ce programme tenait notamment à l'existence du service annexe d'amortissement de la dette (SAAD), qui n'a pas été fondu aux autres passifs de l'État.

M. Charles de Courson a souligné que le prélèvement de 350 millions d'euros sur la cession des biens de RFF par une société foncière pouvait justifier le qualificatif « d'État vampire ». RFF n'a pas la capacité de rembourser une dette qui s'élève à 25 milliards d'euros, alors qu'il présente chaque année un déficit de 1,6 à 1,7 milliard d'euros. Les dotations en capital que l'État verse occasionnellement ne sont pas suffisantes. Dans le passé, la Commission des finances avait adopté un amendement visant à laisser à RFF la responsabilité de la valorisation ; cet amendement avait été rejeté.

M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, a rappelé que dans le cadre de l'article 48 du projet de loi de finances, RFF récupère immédiatement 500 millions d'euros au titre de la valeur comptable de ses biens. L'objectif de l'amendement est de récupérer 50 millions d'euros pour l'inciter à valoriser son patrimoine.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a indiqué que cet amendement vise à obtenir de l'État une accélération du processus de répartition des actifs entre RFF et la SNCF, ainsi que la mise en place d'objectifs et d'indicateurs.

M. Augustin Bonrepaux a indiqué que cet amendement n'a aucune cohérence avec les mesures prévues par le projet de loi de finances. C'est un amendement d'appel qui ne fait en rien avancer le dossier ferroviaire : on amuse la galerie.

M. Didier Migaud s'est étonné de ce que la commission des Finances soit obligée de faire des amendements de crédits pour interpeller le Gouvernement. Le procédé peut laisser d'autant plus dubitatif que la mise en place même de l'AFITF semble susciter de toute part des interrogations. Il n'est pas acceptable, dès la première année de la mise en place de la LOLF que l'on accepte de tels amendements d'appel, qui constituent un détournement de procédure.

M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, après avoir rappelé qu'il n'était pas possible d'amender les projets annuels de performance, a retiré son amendement pour le redéposer, à titre personnel, en séance publique.

Après que M. Hervé Mariton a retiré un autre amendement diminuant les crédits de 50 millions d'euros, la Commission a examiné un amendement du même auteur visant, d'une part, à réduire de 30 millions d'euros la subvention allouée à l'AFITF afin de mettre en cohérence le financement de l'État avec l'accélération des financements en partenariat avec le secteur privé et, d'autre part, à réduire de 10 millions d'euros les dépenses de fonctionnement du programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement » et de 2 millions d'euros les dépenses de fonctionnement du programme « Météorologie nationale », dans un objectif de maîtrise des dépenses publiques.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a approuvé cet amendement, qui favorise notamment l'appel au partenariat public privé.

M. Jean-Louis Dumont a constaté que cet amendement propose des économies très limitées, eu égard au milliard d'euros que l'État va prélever dans les trois années à venir.

M. Augustin Bonrepaux a souligné que ces différents amendements constituent des manipulations qui ont pour objectif de donner l'impression que des économies sont faites alors que la situation n'est fondamentalement pas satisfaisante.

M. Charles de Courson a rappelé que l'article 48 du projet de loi de finances a pour objectif de transférer la totalité des actifs pour une valeur nette comptable de 500 millions d'euros. Si ces biens sont valorisés à hauteur de 1,5 milliard d'euros, seuls 500 millions d'euros resteront dans la trésorerie de RFF. Ils seront donc inscrits en trésorerie mais ne représenteront en rien une plus-value pour l'établissement public. Il fallait refuser l'article 48.

La Commission a adopté cet amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, Rapporteur spécial, tendant à annuler 19,6 millions d'euros de crédits d'intervention de l'action « Régulation du transport aérien » du programme « Transport aérien », destinés à financer les lignes d'aménagement du territoire. En effet, conformément aux principes de la LOLF d'affectation des dépenses par objectif, ces crédits doivent figurer dans le programme « Aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires ».

La Commission a adopté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, visant à majorer de 70 millions d'euros la subvention de renouvellement et de mise aux normes du réseau ferré français, par un transfert de ce montant du programme « Passifs financiers ferroviaires » vers le programme « Transports terrestres et maritimes ». Son auteur a souligné que la MEC, confortée par le rapport d'audit qui vient d'être rendu public, avait clairement montré le besoin fort d'investissement de régénération à mettre en œuvre sur le réseau ferré existant. La diminution de crédits opérée sur le programme « Passifs financiers ferroviaires » tend à contraindre RFF à accélérer son programme de cession d'actifs immobiliers pour financer sa dette et est en cohérence avec la proposition du Gouvernement de créer une société foncière chargée d'accélérer la vente des actifs de RFF.

Après avoir adopté cet amendement, la Commission a, sur proposition des rapporteurs spéciaux, adopté les crédits de la mission « Transports » ainsi modifiés.

Compte spécial : « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » 

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, tendant à transformer en programmes les trois actions du compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », en vue d'identifier avec plus de précision les dépenses financées grâce au produit des amendes des radars, afin que le Gouvernement puisse en rendre compte dans de meilleures conditions devant la Représentation nationale. Il permet également de supprimer une mission « monoprogramme », en conformité avec l'esprit et la lettre de la LOLF.

Après avoir adopté cet amendement, la Commission a adopté les crédits du compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », ainsi modifiés.

Articles additionnels après l'article 90

La Commission a enfin examiné deux amendements.

Le premier, présenté par M. Charles de Courson, Rapporteur spécial, prévoit que le Gouvernement déposera, avant le 30 juin 2006, un rapport étudiant la possibilité de créer un programme regroupant les crédits de la gendarmerie du transport aérien au sein de la mission « Transports ». Les crédits de personnel de la gendarmerie du transport aérien (GTA) se trouvent actuellement dans la mission « Sécurité », alors que les dépenses de fonctionnement et d'investissement de la GTA figurent dans le programme « Transport aérien » : cette séparation est contraire à la LOLF, qui prévoit que les crédits sont présentés en fonction des politiques auxquelles ils concourent.

La Commission a adopté cet amendement.

Le second amendement, présenté par M. Hervé Mariton, Rapporteur spécial, dispose que le Gouvernement remettra aux commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances un rapport avant le 30 juin 2006 sur l'évolution, les conditions de gestion et les perspectives d'évolution du service annexe d'amortissement de la dette (SAAD), en particulier dans la perspective de la mise en œuvre des normes comptables IFRS à la SNCF, afin de clarifier la situation comptable et les perspectives d'avenir du SAAD.

La Commission a adopté cet amendement.

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