COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 19

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 3 novembre 2005
(Séance de 16 h 15)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président,
puis de M. Pierre Hériaud, Doyen d'âge

SOMMAIRE

 

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- - Examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) :

 

Vote des comptes spéciaux : Participations financières de l'État et Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics (M. Michel Diefenbacher, Rapporteur spécial)

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Vote sur les crédits de la mission « Ville et Logement » :

 

- Aide à l'accès au logement, Développement et amélioration de l'offre de logement (M. François Scellier, Rapporteur spécial)

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- Rénovation urbaine, Équité sociale et territoriale et soutien et article 93, rattaché (M. François Grosdidier, Rapporteur spécial)

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La commission des Finances a poursuivi l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2006. Elle a tout d'abord procédé, sur le rapport de M. Michel Diefenbacher, Rapporteur spécial, à l'examen du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » et du compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

M. Michel Diefenbacher, Rapporteur spécial, a rappelé que le projet de budget pour 2006 ouvre dans les écritures du Trésor un compte d'affectation spéciale consacré aux « participations financières de l'Etat », qui prend la suite du compte dit « de privatisation » et retrace les mesures prises par l'Etat actionnaire à l'égard des entreprises publiques. Il a souligné que les règles fixées pour la gestion de ce compte mettent en lumière trois priorités.

La première priorité est la recherche de la performance. Il est vrai qu'en 2004, les entreprises publiques ont connu des résultats encourageants. Leur chiffre d'affaires a progressé de 4,8%, donc plus vite que la richesse nationale (+ 4 % en valeur) et leur résultat net a doublé pour atteindre 7,6 milliards d'euros. Parallèlement, la structure financière des entreprises publiques s'est substantiellement renforcée, leurs capitaux propres, dont l'insuffisance a souvent été notée, ayant progressé de 12 milliards d'euros pour atteindre 46,5 milliards d'euros. Il faut cependant aller plus loin, et c'est dans cet esprit que le gouvernement fixe à la gestion des entreprises publiques trois objectifs majeurs :

- renforcer la performance dans la gestion des entreprises ; à cet effet, les indicateurs de performance retenus pour la mission « Participations financières de l'État » qui regroupe l'ensemble des dépenses du compte (qui portent sur la rentabilité opérationnelle des capitaux, la rentabilité financière de l'engagement de l'Etat, la marge opérationnelle des entreprises et la soutenabilité de leur endettement) reflètent l'émergence d'une conception clairement « patrimoniale » qui est sans doute à mettre au crédit de la nouvelle Agence des participations de l'État ;

- garantir la performance dans la vente des actifs, en veillant à ce qu'elles ne se fassent pas au détriment du patrimoine public, c'est-à-dire qu'elles soient réalisées à des prix qui préservent les intérêts de l'État ;

- promouvoir, enfin, une réelle performance dans l'utilisation des ressources de privatisation.

A cet égard, force est de regretter qu'entre 1986 et 2004, alors que l'endettement de l'Etat ne cessait de croître, sur les 77 milliards d'euros de ressources de privatisation, seuls 9 milliards d'euros ont servi à réduire la dette publique et 1,6 milliard d'euros à préparer le choc des retraites par des dotations au Fonds de réserve pour les retraites.

Le contraste n'en est que plus éloquent avec ce qui est proposé pour 2006 : sur 14 milliards d'euros de ressources attendues des privatisations, 10 milliards d'euros seront affectés à la Caisse de la dette publique, permettant de réduire de 366 millions d'euros par an la charge des intérêts supportés par l'Etat. Cette priorité, enfin reconnue, mérite d'être saluée.

La seconde priorité que se fixe l'État actionnaire en 2006 est d'accélérer le rythme des cessions d'actifs. Ces opérations, qu'il s'agisse de privatisations (lorsque la participation publique tombe au-dessous du seuil de 50 %) ou d'ouverture du capital (lorsque cette participation reste au-dessus de 50 %), n'ont cessé d'augmenter, passant de 2,5 milliards d'euros en 2003 (Renault et Dassault Systèmes) à 5,6 milliards d'euros en 2004 (France Télécom, Snecma, Thomson, Air France...) puis atteignant 6 milliards d'euros sur les neuf premiers mois de 2005 (GDF, France Télécom, Snecma-Sagem, etc....).

Pour la fin 2005 et l'exercice 2006, le volume prévu pour les cessions est encore plus important. Il se monte à 14 milliards d'euros (12 à 13 milliards d'euros au titre des sociétés autoroutières, 1 milliard d'euros au titre de la cession aux salariés d'EDF des titres détenus par l'Etat, et moins de 1 milliard d'euros au titre d'Aéroports de Paris).

La troisième priorité constitue une rupture, s'agissant de l'affectation du produit des cessions de titres, puisque 10 des 14 milliards d'euros de recettes seront consacrés à réduire la dette de l'État.

Il faut rappeler à nouveau que l'essentiel des ressources de privatisation a jusqu'ici été consacré à des opérations autres que le désendettement. De 1986 à 2004, plus de 80 % de ces ressources ont servi à recapitaliser des entreprises publiques ou à financer des dépenses budgétaires nouvelles. 2005 est plus atypique, dans la mesure où, cette année, la quasi-totalité des ressources de privatisation a été ou sera affectée au financement de politiques publiques jugées prioritaires, qu'il s'agisse de la politique de la recherche (2 milliards d'euros versés à l'agence pour l'innovation industrielle et 900 millions d'euros à l'agence nationale de la recherche) ou de celle des transports (dotation de 4 milliards d'euros à l'agence pour le financement des infrastructures de transports de France, AFITF).

L'effort de redressement conduit par le Gouvernement ne portera cependant tous ses fruits que lorsqu'une solution pérenne aura été trouvée au lancinant problème du financement des régimes spéciaux de retraite des personnels des entreprises publiques. Le financement de ces régimes soulève en effet quatre questions essentielles.

Il faut tout d'abord relever le montant considérable des engagements. En application des nouvelles normes comptables internationales (IFRS), la couverture de l'ensemble des engagements pris par les principales entreprises publiques en matière de retraites s'élève à plus de 200 milliards d'euros (16 % du PIB ou près d'une année entière de recettes fiscales nettes de l'État), avec 100 milliards d'euros pour le régime spécial de la SNCF, 90 milliards d'euros pour celui des industries électriques et gazières (avant la réforme de 2004), 70 milliards d'euros pour la Poste et 21 milliards d'euros pour la RATP.

Ensuite, les déséquilibres financiers de ces régimes font peser un risque considérable sur la pérennité des entreprises. L'ampleur de ces engagements doit en effet être rapproché des fonds propres des entreprises concernées qui ne dépassent pas 34,2 milliards d'euros au total.

En outre, sans réforme, les retraites grèveraient, en 2020, 90 % de la masse salariale des IEG (avant réforme), plus de 55 % pour La Poste, 35 % pour la SNCF et 15 % pour la RATP, tandis que les charges de retraite représentent en moyenne 20 % de la masse salariale des entreprises du secteur privé.

Le troisième enjeu est le coût considérable que représentent ces régimes pour l'État. Ce dernier consacre aujourd'hui 3,4 milliards d'euros au financement des régimes (0,4 pour la RATP, 0,5 pour La Poste et 2,5 pour la SNCF). Dès 2020, sans réforme, ce montant passerait à 4,5 milliards d'euros.

Enfin, les régimes spéciaux introduisent une iniquité majeure entre les différentes catégories de salariés. Les agents des régimes spéciaux bénéficient en effet de taux de cotisation plus bas, d'une durée de cotisation plus courte, d'un âge de départ à la retraite plus précoce et d'un taux de remplacement plus favorable à ceux des fonctionnaires et des salariés du privé.

Cette question est certes extrêmement sensible. Il n'y a pourtant d'autres choix que de la traiter. La mise en œuvre des nouvelles normes comptables IFRS à compter de 2006 pour les sociétés cotées et 2008 pour celles qui font appel public à l'épargne aurait dû être l'occasion d'examiner la compatibilité de la charge générée par les régimes spéciaux avec les possibilités financières des entreprises publiques et de l'État actionnaire. Ça n'a pas été le cas, au moins pour le moment, les partenaires économiques ayant préféré chercher les moyens non pas de maîtriser la dépense mais d'en répartir la charge.

Il faut cependant rappeler la diversité des situations, qui se prêtent mal à des jugements simplificateurs. Les régimes sociaux, les mécanismes de financement, les pyramides des âges sont en effet extrêmement disparates selon les régimes.

S'agissant de France Télécom, la réforme, intervenue en 1996, a permis de ramener les charges sociales à un niveau comparable à celui des autres opérateurs, sans modifier les caractéristiques des retraites des fonctionnaires. A cette fin, la charge des retraites des fonctionnaires a été transférée à l'État, en contrepartie du versement par l'entreprise, d'une part, d'une « soulte » de 5,72 milliards d'euros destinée à compenser le surcoût démographique et, d'autre part, du paiement d'une contribution libératoire mensuelle calculée de façon à égaliser l'ensemble des charges sociales supportées par l'entreprise avec celles payées par ses concurrents.

Le cas de La Poste, comme celui de France Télécom, est d'une nature différente de celui des autres entreprises publiques : il ne s'agit pas d'un régime spécial puisque les agents relèvent, pour les salariés du régime général, et pour les fonctionnaires du régime des pensions civiles et militaires de l'État. La particularité de la Poste réside dans l'interruption du recrutement de fonctionnaires et leur remplacement par des salariés sous contrat privé, et dans l'obligation imposée à l'entreprise d'assurer elle-même le financement des pensions de ses fonctionnaires.

Pour autant, la solution pratiquée en 1996 à France Télécom n'est pas transposable aujourd'hui à la Poste pour deux raisons. D'abord, les corps de fonctionnaires postaux sont en voie d'extinction : depuis la loi de 1990 la Poste recrute de moins en moins de fonctionnaires, et depuis 2003 elle n'en recrute plus du tout. Ensuite, si la pyramide des âges est très défavorable pour les fonctionnaires, elle est au contraire très favorable pour les salariés privés : ceux-ci représentent un tiers de l'effectif de l'entreprise, ils sont jeunes, c'est-à-dire qu'ils génèrent des cotisations sans, pour le moment, qu'aucune pension ne leur soit versée.

Cette situation particulière doit donc conduire à adosser le régime applicable à la Poste non pas au régime général des fonctionnaires mais à celui des salariés. Le calcul de la soulte devra tenir compte non seulement de la charge que représente l'âge des fonctionnaires mais aussi de l'avantage, qui, à l'inverse, s'attache à la jeunesse des salariés.

En tout état de cause, la réforme des retraites de la Poste est nécessaire et urgente. Le taux de cotisation patronale (pour les fonctionnaires et les salariés), dès à présent proche de 52 % de la masse salariale totale, dépassera 55 % en 2015. A titre de comparaison, les charges sociales et de pensions supportées par les concurrents sont de 23,1 % à la Deutsche Post World Net (DPWN), 21,4 % pour TNT Poste Group et 15,7 % pour Royal Mail. Cette situation risque fort d'être incompatible avec la nécessité où se trouve désormais la Poste d'être compétitive avec ses concurrents européens.

Les grands principes de la réforme du financement du régime de retraites des industries électriques et gazières (IEG) réalisées par la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières sont les suivants :

- adossement au régime général de la part des droits de retraite des salariés des IEG équivalente aux prestations servies par le régime général et les régimes complémentaires obligatoires (« droits de base ») en contrepartie du versement de soultes ;

- financement de la plupart des avantages propres au régime spécial (« droits spécifiques ») accordés jusqu'à la réforme par la collectivité (via la contribution sur les tarifs de l'énergie), puisqu'ils résultent le plus souvent de décisions prises par la puissance publique ;

- et maintien à la charge des entreprises des droits spécifiques qu'elles continuent d'accorder dans le futur.

Il a cependant regretté que cette réforme se soit faite sans que ne soient remis en cause les droits spécifiques, ce qui présente l'inconvénient d'entretenir l'idée, non seulement dans les IEG, mais aussi dans les autres entreprises publiques, que ces avantages sont appelés à perdurer.

La situation est différente à la RATP et à la SNCF, puisque, pour ces deux régimes spéciaux, l'État assume d'ores et déjà l'essentiel du coût du régime en y consacrant plus de 0,4 milliard d'euros pour la première (où il équilibre le régime) et près de 2,5 milliards d'euros pour la seconde (où il prend en charge les conséquences de la démographie très défavorable des cheminots, la SNCF finançant pour sa part les prestations qui résultent du régime spécial à structure démographique semblable à celle de l'ensemble du secteur privé).

L'adossement aux régimes de retraite de droit commun - qui laisse entier le problème du financement des avantages spécifiques accordés aux bénéficiaires des régimes spéciaux - implique le versement de « soultes » neutralisant l'impact d'une démographie défavorable sur les comptes sociaux. Or, leur montant probable (700 millions d'euros pour la RATP, beaucoup plus pour la SNCF) dépasse manifestement les capacités financières de l'entreprise et implique par conséquent que l'État en assume tout ou partie.

Quelles que soient les solutions retenues pour résoudre l'équation financière, l'essentiel est maintenant, pour ménager les maigres moyens financiers de l'État, préserver l'équité et lever une lourde hypothèque sur la compétitivité des entreprises, de stabiliser le coût des retraites de la RATP et de la SNCF. Ceci n'est envisageable que dans le cadre d'un réexamen des « droits spécifiques ».

Au moment où les entreprises publiques redressent leur situation, il serait particulièrement regrettable que leurs perspectives de développement soient compromises par le maintien d'un système de retraite hérité de l'histoire, dont la justification est chaque jour moins évidente et qui perpétue une inégalité choquante entre les différentes catégories de travailleurs de notre pays.

Le Président Pierre Méhaignerie a salué l'extrême clarté et la remarquable pertinence de l'exposé du Rapporteur spécial, tant dans la mise en évidence des progrès réalisés dans l'affectation des recettes de privatisation au désendettement que dans la description des enjeux considérables et décisifs qui entourent la question du financement des régimes spéciaux de retraite. Un effort de pédagogie doit en effet être réalisé en France, à la lumière en particulier de comparaisons internationales, afin de mettre en évidence le retard que constitue l'absence d'évolutions des régimes spéciaux des principales entreprises publiques.

M. Pierre Hériaud, en soulignant à son tour la qualité de l'exposé, a cependant relevé le fort contraste entre la luminosité de la présentation et les « ténèbres » d'une situation qu'elle décrit avec lucidité. S'il faut saluer l'affectation au désendettement public de 10 milliards d'euros des 14 milliards d'euros de recettes de privatisation attendues pour 2006, c'est pour mieux rappeler par ailleurs que seulement 13 % de l'ensemble des cessions de participations de l'État depuis 1986 ont été consacrés à réduire la dette publique. Cela signifie a contrario que plus de 66 milliards d'euros de ces ressources ont servi à doter les entreprises publiques en capital. Rapproché du niveau des fonds propres de l'ensemble des entreprises publiques en 2004, qui ne dépasse pas 46,5 milliards d'euros, ce chiffre conduit à un constat d'échec éloquent.

De même, l'ampleur des engagements que représentent les régimes spéciaux de retraite est extraordinaire. Ils constituent ainsi plus de 200 milliards d'euros de dette « implicite », qu'il convient d'ajouter aux près de 1.100 milliards d'euros de dette publique pour apprécier à son juste niveau l'endettement réel de la puissance publique en France. Dans ce contexte dramatique, l'affectation de 10 milliards d'euros au désendettement, pour constituer un réel progrès, n'en représente pas moins une « goutte d'eau » dans l'océan.

En réponse au Président Pierre Méhaignerie qui souhaitait disposer d'informations complémentaires sur l'ampleur des compensations démographiques versées au régime spécial de la SNCF par les autres régimes, en particulier le régime des fonctionnaires locaux et hospitaliers, afin de corriger les inégalités démographiques entre les régimes, M. Michel Diefenbacher, Rapporteur spécial a indiqué que la SNCF a bénéficié, au total, de 397 millions d'euros de compensations inter-régimes (à côté d'une contribution de l'État qui a atteint 2.437 millions d'euros), tandis que le régime des fonctionnaires locaux et hospitaliers a versé pour près de 3 milliards d'euros de compensations totales au profit de l'ensemble des régimes bénéficiaires de ces compensations. Il faut pourtant relever que ces dispositifs de compensation financière entre les régimes de retraite ne financent en aucune manière les avantages spécifiques des régimes spéciaux, dans la mesure où leur vocation se borne à assurer une compensation minimale des déséquilibres d'origine exclusivement démographique.

Après que le Président Pierre Méhaignerie se soit interrogé sur la meilleure manière d'assurer à ce rapport l'attention qu'il mérite au regard de l'importance fondamentale des enjeux qu'il pose, la Commission a adopté, sur proposition du Rapporteur spécial, le compte d'affectation spéciale « Participation financière de l'État ».

Elle a ensuite adopté, sur proposition du Rapporteur spécial, le compte de concours financier « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

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Puis la Commission a procédé à l'examen des crédits de la mission « Ville et logement ».

M. François Scellier, Rapporteur spécial des programmes « Aide à l'accès au logement » et « Développement et amélioration de l'offre de logement », a indiqué que le budget du logement pour 2006 représente 6,331 milliards d'euros d'autorisations d'engagement, et 6,346 milliards d'euros de crédits de paiement.

Le programme « aide à l'accès au logement », devrait être doté de 5,114 milliards d'euros. Le programme « développement et amélioration de l'offre de logement » devrait représenter 1,216 milliard d'euros d'autorisations d'engagement, et 1,231 milliard d'euros de crédits de paiement. Plusieurs mesures ont modifié le périmètre du budget du logement entre 2005 et 2006. La gestion des frais de personnels des 3.013 agents participants à la mise en œuvre de la mission « Ville et Logement », ainsi que les crédits « supports » de la politique du logement  figurent désormais dans l'action « soutien » du programme « développement et amélioration de l'offre de logement ». Les dépenses de recherche, notamment les frais de fonctionnement du centre scientifique et technique du bâtiment, sont désormais inscrits dans la mission interministérielle « recherche et enseignement supérieur », ce qui produit un transfert de 26 millions d'euros. Depuis la dernière loi de finances, le prêt à taux zéro n'est plus financé par des moyens budgétaires, mais par un crédit d'impôt sur les sociétés, estimé à 515 millions d'euros en 2006, compensant l'absence d'intérêts perçus, pour les établissements de crédits distributeurs.

En conséquence, à périmètre constant c'est-à-dire en dehors de la dotation de l'État pour les prêts à taux zéro, émis jusqu'au 1er février 2005, les moyens budgétaires de la politique du logement devraient afficher une très légère baisse apparente, néanmoins compensée par une forte hausse des dépenses fiscales en faveur du logement, qui devraient s'élever à 9,018 milliards d'euros en 2006, soit une hausse de 9,6 %.

Les aides personnelles au logement sont versées sous condition de ressources aux ménages locataires, accédant à la propriété ou résidant en foyers, en fonction de leur situation familiale et de leurs dépenses de logement, le soutien financier de l'État, sous la forme d'une contribution versée au fonds national d'aide au logement (FNAL), devrait représenter, en 2006, 5,107 milliards d'euros, soit une baisse de 1,4 %. Cette baisse prend en compte le solde du FNAL, qui devrait connaître une amélioration en 2006, grâce notamment à l'amélioration de l'activité économique, à la baisse du chômage et à une diversification de ses ressources, à hauteur de 300 millions d'euros.

En ce qui concerne l'ANIL et les ADIL, qui ont pour mission de donner aux usagers tous les éléments leur permettant un choix véritable et indépendant dans la recherche des meilleures conditions de logement, la dotation qui leur est consacrée, soit 5,910 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement, devrait se répartir de la façon suivante : 5,750 millions d'euros pour le fonctionnement de l'ANIL et des 68 ADIL, soit une subvention unitaire moyenne de 83.333 euros et 160.000 euros pour le fonctionnement des deux ADIL qui seront créées en 2006.

Par ailleurs, le ministère chargé du logement attribue chaque année des subventions de fonctionnement à certaines fédérations d'associations qui concourent à la mise en œuvre des politiques du logement. Il s'agit des associations d'aide à l'insertion par le logement des personnes défavorisées, des associations d'aide au logement des personnes handicapées et des associations de défense des droits des locataires. En 2006, le projet de budget prévoit une dotation de 1,740 million d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement.

La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 a donné une impulsion nouvelle à la construction de logements sociaux en prévoyant la construction de 100.000 logements en moyenne par an, soit un total de 500.000 logements sur la période 2005-2009, hors programme de rénovation urbaine. Sur ces 500.000 logements, 310.000 seront financés par des prêts locatifs à usage social et prêts locatifs aidés d'intégration. 140.000 logements le seront au moyen de prêts locatifs sociaux et 50.000 seront construits par l'association foncière logement.

Le projet de budget prévoit d'attribuer 480,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement. Cependant, 1,5 million d'euros a été transféré sur le programme « interventions territoriales de l'État » de la mission « politique des territoires » en vue de contribuer au financement de l'action « accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes ». Ainsi, pour 2006, le total des autorisations d'engagement destinées au logement locatif social s'établit à 482 millions d'euros, soit une augmentation de 9,05 %.

Les crédits de paiement devraient s'établir à 533,5 millions d'euros. Cependant, il convient encore de prendre en compte le transfert de 1,5 million d'euros sur le programme « interventions territoriales de l'État ». Ainsi, le total des crédits de paiement consacrés au logement locatif devrait s'élever à 535 millions d'euros en 2006, soit une augmentation de 15,05 %.

Ce sont donc des moyens sans précédent qui sont mobilisés en faveur du logement locatif social, donnant ainsi les moyens financiers nécessaires à la construction de 100.000 logements sociaux. L'impulsion donnée par le Gouvernement a permis un véritable rattrapage en matière de constructions de logement social, puisque le nombre de logements locatifs sociaux est passé de 56.288 en 2002 à 80.000 en 2005. Il devrait être de 100.000 en 2006.

Ces moyens budgétaires seront complétés par un ensemble de mesures visant à améliorer les conditions de financement du logement social et à faciliter la mise à disposition de terrains à bâtir aux organismes HLM. Il s'agit de la baisse du taux des prêts au logement social de 0,05 % et du taux du livret A, passé de 2,25 à 2,00  % ; de la réduction de 0,15 % supplémentaire du taux des prêts au logement social, par une diminution de la baisse de rémunération des réseaux bancaires collecteurs du livret A ; de l'allongement de la durée maximale des prêts au logement social ; de la création de prêts adossés à la ressource du livret A, dédiés à l'acquisition de foncier et de l'accélération des procédures de mobilisation des terrains publics, une décote, représentant jusqu'à 25 % de l'estimation de la valeur du terrain par le service des domaines pouvant être appliquée.

La loi de programmation pour la cohésion sociale a également prévu un renforcement important des moyens de l'ANAH de sorte qu'elle puisse financer, en plus de son programme actuel, 200.000 logements à loyers maîtrisés entre 2005 et 2009 et contribuer à la remise sur le marché de 100.000 logements vacants sur la même période.

La dotation de fonctionnement devrait être, comme en 2005, de 5,7 millions d'euros. La subvention d'investissement, quant à elle, devrait représenter 480 millions d'euros d'autorisations d'engagement, soit une hausse de 3,9 % et 385 millions d'euros de crédits de paiement, soit une légère baisse de 2,53 %.

La taxe sur les logements vacants devrait s'élever en 2006 à 25 millions d'euros. Par conséquent, l'ANAH devrait disposer de 505 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 410 millions d'euros de crédits de paiement. Grâce aux aides de l'ANAH, plus de 35.000 logements privés à loyers maîtrisés seront produits en 2006, et environ 16.000 logements vacants seront remis sur le marché locatif. L'Agence subventionnera aussi le traitement de plus de 39.000 logements indignes.

S'agissant de la dépense fiscale, l'application du taux réduit de TVA pour les travaux d'amélioration et d'entretien des logements de plus de deux ans devrait représenter 4,35 milliards d'euros. L'article 66 du projet de loi de finances prévoit de majorer le crédit d'impôt pour les dépenses d'équipement de l'habitation principale favorisant les économies d'énergie.

En 2006, la dotation consacrée à l'accueil des gens du voyage devrait s'élever à 30 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 20 millions d'euros de crédits de paiement. Cette dotation devrait permettre, à l'initiative des collectivités territoriales, la création d'environ 2.400 places nouvelles et 15 aires de grand passage. En outre, elle devrait permettre la mise aux normes d'hygiène et de sécurité d'environ 440 places existantes. Enfin, 35 terrains dits familiaux, destinés à faciliter la sédentarisation des gens du voyage, devraient également pouvoir être financés.

La loi de finances pour 2005 a transformé le prêt à taux zéro en crédit d'impôt, l'a étendu et amélioré ses barèmes. Ce nouveau dispositif permet de porter le nombre de ménages aidés de moins de 100.000 à plus de 200.000.

Le projet de budget prévoit des dotations budgétaires pour financer les derniers prêts émis jusqu'en février 2005. Ainsi, 10 millions d'euros d'autorisations d'engagement sont prévus et 80 millions d'euros de crédits de paiement, correspondant à près de 1.600 prêts à taux zéro d'un montant moyen de subvention de prêt de 6.250 euros.

Par la suite, l'alimentation du nouveau prêt à taux zéro par le mécanisme de crédit d'impôt aura pour conséquence la suppression de la dotation budgétaire. Le financement du prêt se fera sous forme de dépenses fiscales. Sur la base des estimations de volume de prêts, le crédit d'impôt au titre du nouveau prêt à taux zéro montera progressivement en puissance à compter de 2006 et atteindra son régime de croisière de 1,4 milliard d'euros en 2010, pour 240.000 prêts émis chaque année.

En 2006, la dépense fiscale en faveur du prêt à taux zéro devrait représenter 515 millions d'euros.

Dans le cadre de l'engagement national pour le logement, le Gouvernement a, en outre, prévu des mesures complémentaires pour favoriser l'accession sociale à la propriété. Dans les agglomérations où le marché est très tendu, le bénéfice du nouveau prêt à taux zéro sera étendu aux ménages gagnant jusqu'à 7.200 euros par mois pour les familles avec trois enfants, contre 4.500 euros auparavant. Un taux de TVA réduit sera appliqué aux opérations d'accession sociale réalisées dans le cadre d'un projet de rénovation urbaine. Les plafonds de ressources du dispositif de location-accession ont été relevés au niveau de ceux actuellement en vigueur pour le prêt à taux zéro. Ces différentes mesures faciliteront la réalisation du programme « maisons à 100.000 euros ».

En ce qui concerne le fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (FGAS), qui a pour mission de gérer pour le compte de l'État la garantie que celui-ci accorde aux prêts à l'accession sociale (PAS) et, depuis octobre 1995, à certains prêts à taux zéro, par l'indemnisation pour les établissements de crédit, des pertes en cas de défaillance d'un bénéficiaire d'un de ces prêts, le nombre de nouveaux prêts garantis par l'État en 2006 devrait s'élever à 65.000 prêts à l'action sociale pour un montant unitaire moyen de 77.000 euros, et 70.000 prêts à taux zéro, d'un montant moyen de 20.000 euros.

En vertu de l'article 21 du projet de loi de finances, adopté en première partie, le dispositif de garantie devrait évoluer en 2006, l'État reprenant les engagements autrefois souscrits par le FGAS. Un nouveau dispositif sera mis en place avant le 1er janvier 2006 afin de maintenir pour les emprunteurs les mêmes conditions de garantie que par le passé.

Par conséquent le projet de budget prévoit, à titre conservatoire, une dotation de 25 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement correspondant à la cotisation que l'État aurait versée au fonds de garantie selon les règles en vigueur en 2005, permettant de faire face aux sinistres prévisionnels sur ces produits, ainsi que 2 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement pour financer les frais de gestion des prêts.

Les interventions au titre de la lutte contre l'habitat indigne devraient bénéficier en 2006, comme en 2005, de 20 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 18 millions d'euros de crédits de paiement, soit une baisse apparente de 15,1 %, due à des raisons techniques. Jusqu'à présent, ces opérations étaient financées en dépenses ordinaires. Or, ces opérations sont réalisées en plus d'un an. Avec l'entrée en vigueur de la loi organique, la dotation permettant d'engager ces opérations est distincte de celle permettant de les payer. Les crédits de paiement prévus pour 2006 tiennent ainsi compte de la périodicité réelle des paiements des opérations de lutte contre le saturnisme. Le dispositif de lutte contre le saturnisme infantile dû à la présence d'anciennes peintures dans l'habitat devrait être doté de 13 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 8 millions d'euros de crédits de paiement. Les actions financées resteront identiques, mais couvriront cependant, pour certaines d'entre elles, un champ plus large. Ce sera notamment le cas des travaux de suppression du risque d'exposition au plomb, étendus aux causes immédiates de la dégradation, afin d'assurer la pérennité de la protection. Le coût de ces travaux devrait donc être sensiblement plus élevé. La résorption de l'habitat insalubre est une opération sous maîtrise d'ouvrage public locale destinée, dans une optique de protection des occupants et de leur relogement, à traiter les immeubles insalubres définitivement interdits à l'habitation, par leur acquisition sous déclaration d'utilité publique. L'État peut accorder des subventions aux collectivités locales qui engagent de telles opérations. En 2006, une dotation de 7 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 10 millions d'euros de crédits de paiement est prévue.

Enfin, l'action « soutien » comprend, d'une part, les emplois qui, tant en administration centrale qu'au niveau local, contribuent à la mise en œuvre des politiques regroupées au sein de la mission « Ville et logement » ainsi que les masses salariales correspondantes et, d'autre part, les crédits d'études, de communication et autres crédits supports propres à la seule politique du logement. En 2006, cette action devrait bénéficier de 156,9 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 156,49 millions d'euros de crédits de paiement.

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé nécessaire de rappeler, dans la présentation du budget, l'ensemble des aides fiscales en faveur du logement, notamment avec la transformation sous forme de crédit d'impôts du prêt à taux zéro. Il sera ainsi possible de connaître l'effort global consacré par la puissance publique au logement social.

Usant de la faculté que l'article 38 du Règlement de l'Assemblée nationale confère aux députés d'assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, M. Michel Piron a rappelé que le budget du logement a connu une augmentation considérable en 2005 (+ 8 %) et qu'en conséquence la baisse relative des crédits de paiement cette année constitue en fait la consolidation d'une vitesse de croisière élevée. Par ailleurs, la suppression du FGAS peut se justifier par l'importance des fonds disponibles, surdimensionnés par rapport aux risques actuels du marché immobilier. Pour autant, l'État accorde sa garantie, ce qui pourrait s'avérer utile en cas de retournement du marché avec une augmentation des taux d'intérêt et une diminution de la valeur des biens.

M. Pierre Hériaud a également considéré, s'agissant du FGAS, que les risques sont faibles en raison des nombreuses garanties prises par les banques. Il faut en revanche s'inquiéter des conditions de financement du logement social via le livret A. La diminution du taux des commissions versées aux organismes bancaires de 5 points de base au début de l'année 2005 ne s'est pas intégralement reportée sur le niveau des prêts consentis. Les établissements bancaires ont ainsi été amenés à subir des marges négatives de plus de 25 points de base. La nouvelle diminution de 10 points de base du taux de commissionnement permettra de récupérer, au début de l'année 2006, la baisse de 15 points du taux des prêts.

Pour autant, la nouvelle formule de calcul mécanique du taux de rémunération du livret A risque de remettre en cause, dès le début de l'année prochaine, les ressources du logement social. En effet, les évolutions de l'EONIA à trois mois et de l'inflation risquent de faire passer à nouveau le taux de rémunération à 2,25 %, compte tenu des règles d'arrondis. On peut d'ailleurs se demander, s'agissant de la rémunération de La Poste en tant que collecteur du livret A, s'il est logique économiquement d'avoir un taux de rémunération de l'apporteur d'affaires à hauteur de 70 %, alors que la moyenne du marché est de 25 %.

M. François Scellier, Rapporteur spécial, a jugé que seule une présentation globale de l'évolution du budget du logement, intégrant les dépenses fiscales, était de nature à rendre compte de la réalité. Il a regretté l'opération budgétaire sur le FGAS, qui ne constitue pas un excellent signe psychologique, même si la garantie de l'État est maintenue, et a acquiescé aux difficultés du nouveau mode de calcul automatique du taux de rémunération du livret A.

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Enfin, la commission des Finances a examiné les crédits des programmes « Rénovation urbaine » et « Équité sociale et territoriale et soutien ».

M. François Grosdidier, Rapporteur spécial, a indiqué que l'actualité de ces derniers jours conforte l'idée selon laquelle, à côté de l'indispensable répression de la délinquance, il est plus que jamais nécessaire d'intensifier l'effort en matière de politique de la ville et de rénovation urbaine. Mais vingt-cinq années de politique de la ville en France ont abouti à un empilement de dispositifs, une dispersion des moyens et une bureaucratie paralysante, engendrée par l'extrême complexité des procédures. L'évaluation de cette politique a longtemps été déficiente, laissant apparaître une efficacité perfectible.

Sous l'impulsion de M. Jean-Louis Borloo, puis de Mme Catherine Vautrin, la politique de la ville a entamé une relance importante associée à une profonde modernisation. L'aspect « urbain » a connu un changement de dimension avec la loi du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Le Programme national de rénovation urbaine (PNRU), géré par l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), concentre les moyens de l'État, de la CDC, du 1 %, sur la rénovation des cités les plus sensibles.

L'aspect « humain » n'a pas été oublié, avec le plan de cohésion sociale et la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Là aussi, on s'efforce de s'attaquer aux maux en profondeur. La revitalisation économique doit se substituer au modèle du « non travail ». La relance et l'extension des zones franches urbaines (ZFU) répond à cet objectif. Le programme de « réussite éducative » repose à la fois sur des moyens financiers importants et une nouvelle approche, individualisée et personnalisée pour chaque enfant en difficulté, et transverse, pour agir éventuellement sur son environnement familial. Enfin la dotation de solidarité urbaine (DSU) constitue un moyen supplémentaire de développement de la politique sociale dans nos quartiers.

La LOLF renforce le caractère interministériel de la politique de la ville avec, en plus du « jaune » retraçant l'effort financier de tous les ministères, un « document de politique transversale » sur la politique de la ville. Ce document reconnaît à la Délégation interministérielle à la ville (DIV) et aux deux programmes qu'elle gère le rôle de « chef de file » par rapport aux autres ministères. On ne peut qu'encourager ces efforts de mise en commun des moyens autour d'une stratégie et d'objectifs définis par avance. Ce document de politique transversale permettra une meilleure prise en compte des problèmes propres à la ville dans les dispositifs de droit commun.

En 2004 et 2005, l'exécution budgétaire sur le Fonds interministériel pour la ville (FIV) et sur le dispositif « villes, vie, vacances » est très satisfaisante, proche de la saturation. Le calendrier du Programme national de rénovation urbaine est tenu, même si les besoins sont supérieurs aux possibilités. Par contre, le dispositif « équipes de réussite éducative » (du fait du caractère nouveau de la démarche), et dans une moindre mesure les dispositifs « partenariat national » et « adultes relais » (à cause de procédures complexes), ont plus de mal à être mis en œuvre.

Il faut souligner les difficultés engendrées par les mesures de gel de crédit en cours d'année, avec les dégels ultérieurs. Ils rendent extrêmement difficile, voire impossible, la gestion des structures d'accompagnement de la politique de la ville, en particulier les associations. Certes, le contexte de nos finances publiques est extrêmement tendu, mais tous les acteurs de terrain ont besoin de moyens assurés et de délégations de crédits stables.

Pour 2006, le projet de budget de la ville intègre les exonérations de charges sociales dont bénéficient les entreprises exerçant leur activité dans l'une des 85 ZFU (339 millions d'euros), qui relevaient, jusqu'à présent, du budget « Emploi ». 88.400 salariés bénéficieront de cette mesure. En plus de ces exonérations de charges sociales, les entreprises implantées en ZFU bénéficient d'une mesure d'exonération d'impôt sur les sociétés, représentant une moindre recette fiscale de 205 millions d'euros en 2006.

Le PNRU permet de modifier le visage des quartiers. D'ici à 2011, 250.000 logements sociaux situés dans des zones urbaines sensibles (ZUS) seront ainsi démolis puis reconstruits, et 400.000 autres seront réhabilités. Pour mener à bien le PNRU, des moyens financiers déterminés par la loi sont mobilisés de 2004 à 2011 pour un montant global cumulé de 8 milliards d'euros engagés permettant de mobiliser 30 milliards d'euros par effet de levier. Le montant de la participation de l'État ouverte chaque année depuis 2004 s'élève à 465 millions d'euros. La consommation des engagements a été de 344 millions d'euros en 2004, 786 millions d'euros en 2005 et sera de 1.763 millions d'euros pour 2006. L'ANRU a examiné, au 26 septembre 2005, 131 projets couvrant 240 quartiers (dont 99 sur les 188 quartiers prioritaires), pour un montant de 15 milliards d'euros, dont 4,8 milliards d'euros de subventions de l'ANRU. Ces projets représentent 61.700 démolitions, 58.700 constructions et 112.000 opérations de réhabilitation.

Les crédits d'intervention affectés à la politique de la ville augmentent constamment depuis 2004. Certes, les crédits du FIV baissent, de 146 millions d'euros en 2003 à 107 millions d'euros en 2006. Mais ils ont été compensés, et au-delà, par la DSU, qui augmente de 120 millions d'euros en 2005 comme en 2006, et jusqu'en 2009, en application de la loi de cohésion sociale. Les contrats de ville représenteront, en 2006, 130,5 millions d'euros en AE et 155,7 millions d'euros en CP. Les crédits du « partenariat national » se maintiennent à 3 millions d'euros et ceux de « ville-vie-vacances » passent de 10 à 9 millions d'euros. La création du dispositif « réussite scolaire » en 2005 a mobilisé un montant de crédits égal à 62 millions d'euros en 2005. Il en sera de même 2006. À ce jour, 171 projets de réussite éducative ont été engagés et financés, pour un montant de 31 millions d'euros. Le dispositif « adultes relais » voit ses crédits baisser de 57 millions d'euros à 43 millions d'euros. À compter de 2006, le financement des renouvellements de postes « adultes relais » se fera sur les « contrats d'accompagnement vers l'emploi » du plan de cohésion sociale. En 2006, 140 « ateliers santé-ville » (ASV) devraient être en activité. Les crédits d'intervention dédiés aux ASV s'élèveront à 7 millions d'euros. Le montant des dépenses liées au financement des « équipes emploi-insertion », qui ont vocation à être intégrées dans les « maisons de l'emploi », est de 400.000 euros en AE et en CP pour 2006.

Selon le fascicule « jaune » annexé au projet de loi de finances, la politique de la ville bénéficiera au total en 2006 d'un effort financier de 7,2 milliards d'euros, soit une augmentation de 13,1 %. Au-delà de la mission « Ville et logement » (un peu plus d'1 milliard d'euros en CP), les missions des autres ministères contribuent à la politique de la ville pour près de 3 milliards d'euros, les exonérations fiscales et sociales pour près de 500 millions d'euros, les fonds européens pour 222 millions d'euros, la Caisse des dépôts pour 135 millions d'euros et les collectivités locales pour plus d'1 milliard d'euros.

La nature verticale de la LOLF pose cependant un problème pratique s'agissant d'une politique horizontale, interministérielle et partenariale. En particulier le transfert de crédits au profit de la politique de la ville qui était, jusqu'à présent, opéré, en cours de gestion, à partir du budget du ministère de la Culture sera, à compter de 2006, inscrit en base dans la mission « Ville et logement ». Mais ces transferts s'élevant à 9 millions d'euros en 2005, il manquera 3 millions d'euros l'année prochaine, et ce seront autant d'actions en moins pour les associations de quartier et les MJC. En outre, le ministère de la Jeunesse et des sports, qui contribuait les années précédentes à hauteur d'environ 600.000 euros au financement du dispositif « ville-vie-vacances », toujours avec des transferts en gestion en début d'année, ne souhaite plus maintenir sa participation. Si les choses restent en l'état, les actions correspondantes seront, elles aussi, supprimées, ce qui se comprend d'autant moins que le retour attendu de ces actions était nettement supérieur aux dépenses occasionnées par le ministère de la Jeunesse et des sports.

Nombre de remarques du rapport de la MILOLF aient été prises en compte. Il s'agit de préciser encore la stratégie et les objectifs, de mieux définir les indicateurs, et de mettre en avant les leviers d'action du ministère. Cependant, la plupart des indicateurs ne sont pas encore renseignés. En outre, la définition et la mesure des indicateurs pourraient être améliorées avec les données compilées dans le dernier rapport de l'Observatoire national des ZUS.

Évaluer est plus que jamais nécessaire mais particulièrement difficile dans cette matière. Mais ce n'est pas une science exacte et il est très difficile d'établir des indicateurs sur les activités humaines. La démarche de performance de la LOLF arrive opportunément et est particulièrement utile dans cette perspective. Face aux critiques souvent fondées sur l'efficacité de la dépense, la recherche d'une meilleure performance est une condition essentielle pour justifier la continuation de la politique de la ville. L'énorme travail effectué par l'Observatoire national des ZUS permet pour la première fois, cette année, de disposer d'une véritable évaluation de la politique de la ville.

Celle-ci doit se recentrer sur ses missions essentielles qui se décomposent en rénovation urbaine et accompagnement social, avec quatre priorités : insertion économique et sociale, prévention de la délinquance et des conduites à risque (santé, drogue), soutien à la parentalité et accompagnement scolaire. La lutte contre la discrimination est très certainement un objectif tout aussi essentiel, qui est suivi par la mission « solidarité et intégration ».

La politique de la ville avait fait l'objet de critiques de la Cour des comptes dans son rapport public particulier de février 2002. Depuis ce rapport, beaucoup de choses ont été faites, mais les défis demeurent. La politique de la ville est en train de sortir de la complexité qui a été la sienne. Des effets de captation se sont produits, avec l'utilisation des dispositifs d'aide de façon détournée, dans une logique de guichets. Ainsi les dispositifs de « réussite éducative » servaient encore récemment de variable d'ajustement à l'exécution des contrats de ville...

Depuis 2003, les objectifs de la politique de la ville sont reformulés pour en rendre la mise en œuvre plus efficace. Le maire doit en devenir le pilote. Sa gouvernance politique doit être affichée clairement. La montée en puissance de la DSU, qui peut être utilisée librement par les communes, participe de cette démarche de responsabilisation des maires.

Le rôle des associations doit être redéfini, notamment celles qui sont devenues de véritables délégations de service public, à qui ont été conférées des responsabilités. Face à ces défis, on constate trop souvent une absence de remise en cause de la part des acteurs. La politique de la ville change et n'est plus la même que quand elle a été créée, il y a 25 ans. Il faut partir du terrain, des besoins, et pas de l'offre des intervenants. Les professionnels doivent être formés, reconnus en qualité de managers de projets et organisés en réseau, car ils doivent quotidiennement confronter leurs pratiques à travers un référentiel et une culture commune. La politique de la ville ne doit plus se concevoir principalement comme la mise en œuvre de dispositifs spécifiques, verticaux et coûteux. Elle doit maintenant tendre vers une horizontalité avec, pour ses intervenants, la mobilisation dans les zones sensibles des structures et des dispositifs de droit commun. Faute de quoi, on tomberait dans le schéma classique de l'assistance généralisée.

Les contrats de ville devront bien sûr continuer après 2006. Il faudra veiller à les renégocier en les recentrant sur les priorités précédemment définies. Les contrats de ville ne devront plus être ce qu'ils ont été pendant les périodes fastes, avec une logique de guichet et un grand nombre d'acteurs éloignés des véritables problèmes des quartiers. Ils devront être réorientés au bénéfice des populations, en accompagnement de la rénovation urbaine. Le FIV doit rester contractualisé et les autres dispositifs seront financés par l'augmentation de la DSU, qui est libre d'affectation par les communes.

M. François Scellier a souhaité avoir des précisions sur les effets de captation du dispositif de « réussite éducative » vers les contrats de ville. M. François Grosdidier, Rapporteur spécial, a répondu que les « équipes de réussite éducative » correspondent à des mécanismes de soutien personnalisé et adapté aux cas de chaque élève, mais qu'ils ont parfois été utilisés dans des dispositifs plus classiques pour boucler le financement des contrats de ville.

Suivant l'avis favorable des Rapporteurs spéciaux, la Commission a adopté les crédits de la mission « Ville et logement ».

Article 93 : Réduction du plafond de salaire exonéré de charges sociales concernant les entreprises implantées en zone franche urbaine (ZFU)

Suivant l'avis favorable du Rapporteur spécial, la Commission a adopté cet article sans modification.

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