COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 26

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 10 novembre 2005
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

pages

Examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) :

 

- Vote sur les crédits de la mission Direction de l'action du Gouvernement :

 

- Coordination du travail gouvernemental et vote de l'article 79, rattaché ; vote du budget annexe des Journaux officiels et de l'article 94, rattaché (M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial)

2

- Fonction publique et vote sur les comptes spéciaux : Gestion du patrimoine immobilier de l'État et Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés (M. Georges Tron, Rapporteur spécial)

7

- Vote sur les crédits de la mission Régimes sociaux et de retraite et du compte spécial Pensions (M. Tony Dreyfus, Rapporteur spécial)

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- Vote sur les crédits des missions :

 

- Pouvoirs publics et Conseil et contrôle de l'État (M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial)

14

- Gestion et contrôle des finances publiques et vote du budget annexe Monnaies et médailles (M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial)

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- Information relative à la Commission

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La commission des Finances a poursuivi l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2006. Elle a tout d'abord procédé, sur le rapport de M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial, à l'examen des crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental ».

M. Jean-Pierre Brard a présenté les crédits correspondant au programme Coordination du travail gouvernemental de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », et le budget annexe des Journaux officiels, qui fait l'objet d'une mission spécifique.

397,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 396,5 millions d'euros en crédits de paiement seront consacrés en 2006 au vaste ensemble que constitue le programme « Coordination du travail gouvernemental ». Ces moyens budgétaires sont globalement stables. Compte tenu du caractère essentiellement institutionnel de ce programme, ainsi que des nombreux changements de périmètre qui affectent les services du Premier ministre, notamment avec la mise en œuvre de la nouvelle nomenclature LOLF, il n'a pas semblé pertinent au Rapporteur spécial de se livrer à une exégèse des crédits d'une année sur l'autre, action par action.

Il faut constater le caractère assez hétéroclite du programme « Coordination du travail gouvernemental ». La spécificité du « ministère » que sont les services du Premier ministre et la mutualisation des moyens que permet la fongibilité des crédits pour optimiser la gestion des services ne sauraient justifier une absence de cohérence dans le budget soumis au vote du Parlement. La mise en œuvre de la LOLF a permis une rationalisation et une unification du traitement budgétaire des services du Premier ministre, autrefois dispersés en plusieurs fascicules. Pour autant, le constat de ce progrès ne vaut pas blanc-seing pour la nomenclature proposée. Mais, même si ce n'est pas chose aisée, les services du Premier ministre réfléchissent, sous la houlette du secrétariat général du Gouvernement, à la façon d'identifier les missions spécifiques. Toutefois, il n'est pas proposé, cette année, de modification de la nomenclature, car il lui faut encore un peu de temps pour approfondir ces sujets. Mais une rationalisation de toutes les structures et organismes rattachés au Premier ministre est encore possible et une plus grande autonomie budgétaire des autorités administratives indépendantes est souhaitable.

M. Jean-Paul Delevoye, médiateur de la République, fait preuve de dynamisme dans ses nouvelles fonctions. Il est vrai qu'on voit ces derniers jours à quel point il est important de disposer de lieux de recours. De ce point de vue, il faut que le médiateur parvienne à ce que ses recommandations soient suivies d'effet. Le Rapporteur spécial s'est aussi entretenu avec le président de la Commission nationale de la déontologie de la sécurité, M. Pierre Truche. Il s'agit de personnes tout à fait responsables, prêtes à une transparence totale envers le Parlement, mais qui souhaitent avoir une certaine stabilité pour mener leurs actions et une plus grande liberté d'organisation. Cela paraît parfaitement conforme à l'esprit de la LOLF et le Rapporteur spécial partage totalement leur souhait. Les services d'état-major du Premier ministre font un travail tout à fait remarquable dans la stabilité des titulaires du poste du SGG, ce qui est rassurant pour la continuité de l'État.

On peut regretter seulement qu'un seul de ces services, nouvellement baptisé secrétariat général des affaires européennes, n'ait daigné apporter aucune réponse au questionnaire de la commission des Finances, en dépit des relances de la Commission et de Matignon. Un amendement symbolique de réduction des crédits sera présenté, afin que la Représentation nationale soit mieux respectée.

Une toute autre fonction de l'État est en cause lorsqu'on aborde la Documentation française et les Journaux officiels. Il est essentiel de valoriser le potentiel éditorial qui existe au sein de l'État. Un plan de consolidation de la Documentation française et un rapprochement avec les Journaux officiels sont engagés. Il faut en effet se donner les moyens de maintenir au service du public un pôle d'excellence en matière de publications publiques, notamment lorsqu'il s'agit de publier la loi ou des rapports officiels, mais aussi des ouvrages de vulgarisation documentés et sérieux. Il s'agit de s'adapter - et les personnels y sont prêts - et de moderniser l'appareil de production, compte tenu de la diffusion toujours croissante des nouvelles technologies. Il est hors de question de revivre le gâchis de l'Imprimerie nationale.

En termes de nomenclature, on ne peut que déplorer le caractère de mission monoprogramme du budget annexe des Journaux officiels. Il ne sera pas présenté d'amendement sur ce point cette année, en raison du rapprochement envisagé au sein d'un budget annexe. Il convient de poursuivre la réflexion, en y associant les personnels concernés, ce qui permettra de gagner beaucoup de temps et d'éviter les conflits, chacun semblant persuadé de la nécessité d'évolutions. Les crédits du Commissariat général du Plan et de divers organismes de conseil comme le Conseil d'orientation des retraites ou le Conseil d'analyse économique figurent dans le programme « Coordination du travail gouvernemental », pour un peu plus de 20 millions d'euros. On doit déplorer la sous-utilisation de productions de très grande qualité, fournies par beaucoup d'institutions qui travaillent assez peu en commun. Il faudrait donc réfléchir au moyen de mieux diffuser les sommes d'informations et d'analyses, dont le Parlement a grand besoin. Des choses simples pourraient être envisagées, comme la diffusion d'une bibliographie des études produites.

M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial, s'est déclaré surpris d'apprendre par voie de presse la disparition du Commissariat général du Plan. Sans porter de jugement sur la pertinence de cette décision, la méthode est pour le moins indélicate. Le secrétaire général du Gouvernement n'avait pas cru bon d'informer le Rapporteur spécial. Sans doute fallait-il que le Plan évolue, mais il reste une référence par la qualité des études produites. On peut regretter qu'il n'y ait pas eu une réflexion collective publique sur ce point. Le président de la commission des Finances a souvent souligné la nécessité de disposer d'une capacité d'expertise indépendante. Peut-être la disparition du Plan est-elle l'occasion pour l'Assemblée nationale de faire entendre son point de vue.

Qu'un centre d'analyse stratégique soit mis à la disposition du Premier ministre pour analyser ce qui se passe dans la société française est sans doute utile, les événements de ces derniers jours le montrent. Mais on peut aussi observer que, alors que depuis un an et demi les préfets ont produit des rapports montrant que les Français ne croient plus à rien, aucune conclusion n'en a été tirée. Le Gouvernement a beau disposer d'une capacité d'analyse, encore faut-il qu'il soit capable d'en tirer la substantifique moelle. Un conseil scientifique étant prévu au sein du nouvel organisme, la question de la représentation du Parlement mérite d'être posée, par exemple au sein d'un conseil d'orientation. Le Conseil d'analyse stratégique pourrait ainsi produire des études à destination du Parlement, selon des modalités de saisine qui restent à déterminer. On peut imaginer que le Président de l'Assemblée nationale lui adresse les demandes des présidents des Commissions et des groupes, afin de nourrir la réflexion collective. Un bilan annuel devrait permettre une évaluation à la fois par l'exécutif et le législatif.

Qui dit qualité de l'analyse dit indépendance de l'organisme. Jusqu'à aujourd'hui, le Plan, l'IRES, le CEPII bénéficient d'une reconnaissance unanime pour la qualité de leur production.

Les matières dont il est question dans ce programme requièrent peu d'argent, tout en étant essentielles au bon fonctionnement de l'État et de la démocratie. Il souhaite poursuivre l'an prochain un travail d'investigation. La Commission pourrait auditionner au printemps la nouvelle responsable du Plan, afin de se faire sa propre religion, mais aussi de montrer que le Parlement n'est pas indifférent à ce qu'Elle fait. Ce serait aussi, pour ce dernier, une façon d'exercer son droit et son devoir de contrôle.

M. Pierre Hériaud a interrogé le Rapporteur spécial, en ce qui concerne le SGDN et plus précisément l'IHEDN, sur les trinômes académiques qui, placés sous l'autorité du recteur, du préfet et du président des anciens élèves de l'IHEDN, sont destinés à renforcer les liens entre l'armée et la Nation. Alors que les textes leur permettraient de travailler régulièrement et bien que leur existence soit rappelée de temps à autre, ils retombent rapidement dans l'oubli. Ainsi, un amendement avait permis de dégager quelques crédits pour faire fonctionner la moitié des centres régionaux, mais on ne trouve aujourd'hui plus trace de cette somme.

M. Hervé Novelli s'est réjoui de l'évolution du Commissariat général du Plan : il avait déposé un amendement de suppression des crédits du Plan, afin d'attirer l'attention sur ce véritable anachronisme. Il paraît tout à fait pertinent de le transformer en un centre d'analyse stratégique. Bien sûr, on peut regretter la manière dont les choses se sont passées, d'autant que l'annonce de la disparition du Commissariat général a pratiquement coïncidé avec la nomination d'un nouveau commissaire.

Le Président Pierre Méhaignerie a déclaré partager l'avis du Rapporteur spécial sur les conditions dans lesquelles a été annoncée la suppression du Commissariat général au plan. Il n'est pas sûr que la réforme de l'État ait été en l'espèce le principal objectif poursuivi. Surtout, il faut espérer que ce qui s'est passé n'est pas dû au fait que le Plan a transmis au Parlement les études sur la privatisation des autoroutes et sur les allégements de charges sociales.

Sur un sujet connexe aux crédits du CSA, l'amendement par lequel l'Assemblée avait décidé, en juillet 2004, d'autoriser les collectivités locales à créer des télévisions sur les canaux hertziens, a entraîné une dangereuse fuite en avant financière, sans même parler du fait qu'entre la radio du président du conseil général et celle du maire de la grande ville, les citoyens ne s'y retrouvent guère. Tout cela ne va pas dans le sens de la visibilité de l'action publique, et il est souhaitable que l'Assemblée revienne sur sa décision, au moins pour les chaînes hertziennes.

M. Jérôme Chartier a demandé quelle était la part respective de l'IFRI et de l'IRIS dans les crédits de 1,73 million qui leur sont alloués. Ces crédits ne devraient-ils pas revenir en fait à l'action extérieure de l'État, dans le cadre d'une mise en cohérence des travaux conduits par le Centre d'analyse et de prévision du Quai d'Orsay et par ces deux instituts ? Par ailleurs, l'absence de crédits en faveur du Centre d'analyse de la société et du Conseil d'orientation pour l'emploi amène à se demander s'il est bien utile de créer de tels organismes, contre l'avis de la commission des Finances, laquelle tente sans répit d'alléger les structures de l'État.

M. Georges Tron a rappelé que la MEC avait établi il y a deux ans un rapport qui préconisait une réforme du Plan, pour répondre aux besoins constatés d'améliorer les filières d'études, notamment dans le monde universitaire, et de disposer d'un outil d'évaluation. La réforme actuellement engagée semble aller dans ce sens sur le second point seulement.

Le Président Pierre Méhaignerie a regretté qu'on ne semble pas aller dans le sens d'une meilleure transmission des informations au Parlement.

M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial, a répondu aux intervenants :

- en ce concerne les trinômes académiques, il faut souligner que la fongibilité rend les crédits beaucoup moins identifiables. La Commission doit rappeler la pertinence de ces trinômes si elle ne veut pas les voir disparaître,

- s'agissant du Plan, il a rappelé que la Commission s'intitule toujours « des finances, de l'économie générale et du plan ». Peut-être faudrait-il « dépoussiérer » quelque peu ce titre,

- c'est avec étonnement qu'il a découvert que l'étude relative à la privatisation des autoroutes n'avait fait l'objet que d'une demande orale. Manifestement, les modalités de saisine étaient un peu confuses. À l'inverse, certaines demandes écrites d'études adressées par le cabinet du premier ministre au Commissariat général n'ont jamais été suivies d'effet, si ce n'est, comme en écho, par des articles de presse,

- Mme Sophie Boissard, la nouvelle directrice générale du Plan a des idées précises sur ses responsabilités futures. Mais les conditions de la disparition du Commissariat général ouvrent sans doute à l'Assemblée un créneau pour faire valoir son point de vue. Le Rapporteur spécial est prêt à s'en charger, si la Commission l'investit d'une mission en ce sens, afin qu'on ne se contente par de « relooker » l'ancien Commissariat général,

- s'agissant de l'IFRI et de l'IRIS, on peut en effet se poser la question d'un rapprochement, qui pourrait aussi concerner le Conseil d'analyse et de prospective. Sans doute convient-il de se laisser le temps de la réflexion, même s'il existe beaucoup d'organismes dont on ne discerne pas toujours très bien à quoi ils servent. Il y a donc place pour une rationalisation et pour une clarification des objectifs. Le Rapporteur spécial à l'intention d'y travailler d'ici la prochaine loi de finances. Mais, dès aujourd'hui, il entend adresser un signal fort à ceux qui n'ont pas répondu au questionnaire, même s'il saura, en séance publique, se montrer responsable et ne pas empêcher les services de travailler.

En conclusion sur les crédits du programme, le Rapporteur spécial s'en est remis à la sagesse de la Commission.

La Commission a ensuite examiné un amendement du Rapporteur spécial supprimant les crédits du SGCI.

M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial a rappelé que le SGCI, devenu secrétariat général pour les Affaires européennes, est le seul organisme rattaché aux services du Premier ministre qui n'a pas répondu au questionnaire budgétaire de la commission des Finances, malgré les relances de Matignon. En l'absence de justification suffisante des crédits, cet amendement propose donc de supprimer les moyens de l'action Coordination de la politique européenne. Il a bien entendu vocation à être retiré en séance publique, mais il faut qu'une explication soit apportée à un tel dysfonctionnement.

Après que le Président Pierre Méhaignerie a estimé que les ministères faisaient souvent montre d'insouciance ou de mauvaise volonté à l'égard du Parlement, la Commission a adopté l'amendement.

Article 79 : Aménagement de nomenclature relatif aux fonds spéciaux

La Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial, de coordination avec la mise en œuvre de la LOLF.

M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial des crédits de la Coordination du travail gouvernemental, a précisé qu'il convient de traduire la mise en application de la nomenclature budgétaire des services du Premier ministre pour tous les organismes à eux budgétairement rattachés par voie législative. Sont ainsi concernés la Commission de vérification des fonds spéciaux, le Comité consultatif national d'éthique, le Médiateur de la République, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la Commission consultative du secret de la défense nationale, le Défenseur des enfants et la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Le Gouvernement devra procéder aux mêmes coordinations pour l'ensemble des structures créées par voie réglementaire.

La Commission a adopté l'amendement, puis l'article 79 ainsi modifié.

Elle a ensuite adopté les crédits du budget annexe des Journaux officiels.

Article 94 : Ratification du décret relatif à la rémunération des services rendus par la direction des Journaux officiels

La Commission a adopté cet article, sans modification.

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La Commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Georges Tron, Rapporteur spécial, à l'examen des crédits du programme « Fonction publique » de la mission « Direction de l'action du gouvernement » et des comptes spéciaux « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » et « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».

M. Georges Tron, Rapporteur spécial, a souligné que, dans le projet de budget pour 2006, le programme « Fonction publique » regroupe les crédits d'intervention mis à la disposition de la DGAFP. Le PAP fait figurer les crédits de personnel de la DGAFP dans le programme « coordination de l'action gouvernementale » et on peut regretter cette dislocation. Alors que la réforme de l'ENA est mise en œuvre, l'école se voit dotée de 30,9 millions d'euros. On peut envisager une diminution de ses crédits, car l'ENA met quelque temps à achever son déménagement à Strasbourg et à dégager ainsi les économies escomptées. La cession de l'immeuble du 13, rue de l'Université à Sciences-Po pour 46 millions d'euros s'est faite dans des conditions stupéfiantes, qui laissent à penser que les conclusions de la MEC sur l'immobilier de l'État ne sont pas totalement suivies d'effet. En effet, l'IEP a été contraint d'attendre que la date de libération des locaux convienne à l'ENA ; aucune indemnité n'était prévue en cas de résiliation du bail. Les IRA disposeront de 32,5 millions d'euros afin d'assurer la formation initiale de 730 agents de catégorie A ainsi que 3.000 journées de formation continue.

En matière d'action sociale interministérielle, les agents sont de plus en plus demandeurs d'une aide individuelle : ils préfèrent les chèques restaurant à la construction de cantines. Ce budget permet de revaloriser les prestations en Île-de-France et d'en améliorer certaines, comme l'aide à l'installation des personnels ou la revalorisation.

8,5 millions d'euros sont destinés à financer des emplois de service grâce au chèque emploi service universel (CESU). Une enveloppe de 500.000 euros est consacrée à l'expérimentation dans le secteur public de la garantie de paiement du loyer et des charges LOCA-PASS jusqu'ici réservée au secteur privé. Les crédits d'action sociale interministérielle ont été déconcentrés au bénéfice des préfets. Au total, l'aide aux familles mobilisera près de 40 millions d'euros.

La mise en œuvre de la LOLF permet d'améliorer l'information du Parlement et sa connaissance de l'emploi public. Les dépenses de personnel sont maintenant présentées en trois catégories : rémunérations d'activité, cotisations et contributions sociales, prestations sociales et allocations diverses. La lisibilité est ainsi meilleure, d'autant que les pensions sont versées par un compte d'affectation spéciale créé à cet effet, qui sera alimenté par les cotisations sociales assises sur les salaires. C'est d'autant plus utile qu'on sait que l'augmentation des pensions pèse fortement sur ce budget. La LOLF a également institué des plafonds d'emploi par ministère, calculés en équivalents temps plein travaillé (ETPT). Est considéré comme emploi public tout « emploi rémunéré par l'État ». Cela permet de remédier au fait que les vacances d'emploi, les emplois en surnombre et la plupart des agents contractuels n'étaient pas comptabilisés dans les emplois budgétaires. Ainsi, l'article 51 du projet de loi de finances fixe à 2 351 146 le niveau des ETPT.

Les informations fournies par l'Observatoire de l'emploi public montrent que les effectifs des établissements publics administratifs (EPA) progressent de 3 % tandis que ceux des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) diminuent de 1 %. C'est un sujet sur lequel la Commission pourrait travailler. Lorsqu'elle a établi le rapport de la MEC sur l'immobilier de l'État, elle a constaté que les établissements publics se voyaient confier un certain nombre de missions, ce qui faisait en sorte que les immeubles, mais aussi les effectifs consacrés à ces missions, échappaient en fait au contrôle parlementaire. En 2003, l'État ne représente plus que 51 % du total des emplois, contre 54 % en 1992. Dans le même temps, les effectifs des EPA ont progressé de 57 %, passant de 6 à 9 % du total, quand ceux des ministères n'augmentaient que de 6 %. Ce mouvement s'observe en particulier pour la culture.

La croissance de l'emploi public s'explique en majeure partie par celle de la fonction publique territoriale, qui comptait 1,52 million d'agents en 2003 et qui progresse de 4 %, hors emplois aidés. En un an, elle a absorbé 60 % des 100.000 emplois publics créés, contre 13 % pour l'État et 27 % pour la fonction publique hospitalière.

En 2006, le plafond d'emploi diminuera de 5.318 ETPT au titre de l'effort de réduction des effectifs. Si l'on additionne cette diminution avec celles des années précédentes, on obtient 25.000 emplois supprimés sur 2,5 millions d'emplois d'État. Certains ministères font des efforts plus importants, en particulier l'Agriculture, l'Équipement ou l'Économie. A l'opposé, les plafonds de l'Enseignement supérieur et recherche, de la Défense, de l'Intérieur et de la Justice augmentent, ce que l'on peut parfois comprendre.

Le poids de la dépense en personnel obérant toutes les marges de manœuvre budgétaires, il faut aller vers une réduction des effectifs en ne remplaçant qu'un sur deux des 75.000 à 80.000 départs à la retraite prévus dans les dix années qui viennent. Bien évidemment, cette norme ne doit pas s'appliquer de façon aveugle, ni empêcher de répondre aux besoins dans les domaines de la santé, de la justice, de l'intérieur. Les économies liées à la diminution des effectifs ne doivent pas servir uniquement à réduire le déficit mais être consacrées, au moins pour un tiers de leur montant, à l'augmentation des traitements. Il convient par exemple de distinguer les agents qui travaillent en contact direct avec le public de ceux qui sont dans des fonctions de soutien administratif ou logistique. Cette réforme ne peut passer que si elle conduit à améliorer le service au public. Qui pourrait croire que les nouveaux moyens mis à la disposition de l'administration ne peuvent aboutir à des gains de productivité ? Ainsi, au ministère de l'économie, la nouvelle direction chargée de l'impôt des grandes entreprises collecte, avec moins de 500 agents, l'équivalent de ce que collectent, pour les autres entreprises, la DGI et la comptabilité publique réunies.

Les dépenses de personnel de l'État pour 2006 s'établissent à 118,2 milliards d'euros, au lieu de 114,7 milliards d'euros en 2005. Cette augmentation de 3 % représente plus des deux tiers de la marge de progression de dépenses autorisées par la norme de stabilisation en volume - 4,9 milliards d'euros. Pour les seuls crédits de pensions, la progression est de 2,1 milliards d'euros en un an, pour atteindre 38 milliards d'euros. Au total, les crédits de personnel représenteront 42,8% des dépenses nettes du budget général en 2006, contre 42,3 % en 2005, une fois les exonérations de cotisations sociales corrigées après la clôture du FOREC. La comparaison entre ces deux chiffres est donc quelque peu hasardeuse.

Une première expérimentation sur la rémunération à la performance de 44 directeurs d'administration centrale a été lancée en juin 2004, dans six ministères volontaires. L'évaluation montre que cela aboutit à faire varier entre 6 % et 16 % les parts variables. Cette expérimentation a été étendue le 1er juillet 2005 à l'ensemble des directeurs des ministères déjà impliqués. Elle concernera, à partir du 1er janvier 2006, tous les ministères.

Plusieurs mesures ont été adoptées récemment pour favoriser la mobilité, comme la simplification du détachement, en particulier la mise en position hors cadre et l'amélioration des conditions de réintégration. Le Gouvernement a demandé aux secrétaires généraux de proposer un nombre de postes significatif aux fonctionnaires d'autres administrations. Au bout de quinze ans, les fonctionnaires auront un droit à un bilan approfondi qui pourra déboucher sur une deuxième carrière. En 2006, 1.000 enseignants se sont ainsi vus offrir une deuxième carrière dans une autre administration ou une collectivité locale, sur la base du volontariat.

Le Gouvernement propose d'étendre le champ de la négociation salariale, au-delà du salaire stricto sensu, à d'autres éléments statutaires et sociaux, tels que les aides au déménagement en cas de mobilité, les cautions de location, les indemnités de déplacement ou les aides sociales. Pour les mesures catégorielles, le montant total de l'enveloppe est fixé à 516 millions d'euros, après une progression déjà forte en 2004 et en 2005. Actuellement les heures supplémentaires sont plafonnées à 25 heures par mois dans la fonction publique. Le système de rachat de jours de RTT n'existe que pour la police, les CRS, le personnel pénitentiaire et hospitalier. Il y a donc une possibilité d'extension, sur la base du volontariat.

Le Rapporteur spécial a ensuite présenté le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » créé par l'article 32 du projet de loi de finances. Le Gouvernement a proposé que 400 millions d'euros de cessions soient réalisés en 2006, à partir d'une liste de 100 immeubles domaniaux à déterminer. Il est étonnant, alors que la MEC a souligné l'importance de réformer la gestion de l'immobilier de l'État, que l'objectif initial de 800 millions d'euros soit ainsi divisé par deux. On peut aussi observer un écart important entre l'objectif et la réalisation effective : ainsi, en 2005, le montant des cessions réalisées ne sera pas supérieur à 600 millions d'euros. Les chiffres - approximatifs - fournis pour 2004 établissent leur montant à 200 millions d'euros, alors que plus du double avait été programmé. Compte tenu de ce qui a été dit sur le ministère de la culture à propos des EPA et du regroupement des services dans l'immeuble de la rue des Bons-Enfants, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement qui ajoute à cette liste les deux principaux immeubles domaniaux du ministère, pour un montant de 79 millions d'euros.

Le compte d'affectation spéciale ne comporte qu'un seul objectif : « identifier et remédier aux cas de sous-occupation du patrimoine immobilier de l'Etat », mesuré par un indicateur unique : le nombre d'immeubles dont la cession sera proposée. Cet indicateur pourrait être complété par le taux de vacance ou de sous-occupation des immeubles de l'État ou par le coût de l'immobilier de l'État, avec indication d'un programme d'économies sur plusieurs années. Le nombre de mètres carrés par agent, mis en exergue par les travaux de M. Olivier Debains il y a trois ans, pourrait aussi utilement compléter le dispositif d'évaluation.

Les loyers budgétaires vont être expérimentés dans trois ministères : Affaires étrangères, Économie et Justice. Une généralisation à l'ensemble du patrimoine de l'État pourra être envisagée en 2007. Conformément au souhait de la MEC que les références soient claires et lisibles, le Rapporteur spécial suggère que ces loyers soient établis sur la valeur locative du marché, et non sur la base d'un forfait pondéré par le taux moyen de remboursement de la dette de l'État.

Le Gouvernement a l'intention de rénover le service des Domaines. La MEC avait préconisé qu'il soit érigé en « service à compétence nationale » et rattaché au Ministre de l'économie. Le ministre semble préférer détacher ce service de la Direction générale des impôts pour le rattacher à celle de la comptabilité publique. Mais il semble que cette opération ne fasse pas l'unanimité. La création d'un service à compétence nationale, opérationnel dès le 1er janvier 2006, semble préférable. Dans ce cadre, il pourrait être envisagé d'affecter 400 agents des services centraux à un tel service, les 800 agents des services déconcentrés étant alors rattachés à la comptabilité publique. Mais cette idée ne séduit guère les trésoriers payeurs généraux. Il convient également que trois décisions soient prises immédiatement :

- suspendre en 2006 pour l'État et ses établissements publics toute dépense d'investissement ou de restructuration en matière immobilière qui aurait pour effet d'accroître les surfaces ou de restructurer sans audit préalable ;

- ne pas remplacer les départs en retraite des agents publics affectés aux services généraux des ministères (maintenance, entretien, gardiennage) ;

- modifier avant le 31 décembre 2005 le régime de l'affectation des immeubles de l'État et des établissements publics inscrit dans le code du domaine de l'État, afin que la nouvelle agence « France Domaine » soit affectataire de ces biens, en lieu et place des différents ministères.

Le Rapporteur spécial a enfin présenté le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », qui regroupe des actions recourant à un outil commun, des prêts ou des avances remboursables.

L'action 1 « Avances aux fonctionnaires de l'État pour l'acquisition de moyens de transport » permet de faciliter l'achat, par les fonctionnaires de l'État et les personnels militaires astreints à des fréquents déplacements professionnels, de véhicules nécessaires à l'exécution de leur service.

L'action 2 « Avances aux agents de l'État pour l'amélioration de l'habitat » permet d'aider l'exécution des travaux d'aménagement comportant une amélioration des conditions de logement.

L'action 3 « Avances à des associations participant à des tâches d'intérêt général » n'est plus utilisée.

L'action 4 « Avances aux agents de l'État à l'étranger pour la prise en location d'un logement » est destinée aux agents mutés à l'étranger.

L'action 5 « Prêts pour le développement économique et social », dotée de 10 millions d'euros, remplace le compte de prêt du Fonds de développement économique et social. Ces prêts sont accordés par le comité interministériel de restructuration industrielle ou par les comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises.

En conclusion, le Rapporteur spécial a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme.

Puis, la Commission a examiné un amendement de MM. Louis Giscard d'Estaing et Jean-Michel Fourgous, réduisant les crédits alloués à l'École nationale d'administration (ENA).

Après avoir remercié M. Georges Tron pour la clarté de son intervention mettant en évidence l'enchevêtrement des financements, la multiplicité des organismes et des établissements adossés à l'État et les difficultés chroniques de gestion du patrimoine public, M. Louis Giscard d'Estaing a précisé que son amendement s'inscrivait dans la continuité de l'action de la commission des Finances ces dernières années. L'an dernier déjà, le problème des effectifs de l'École avait été soulevé, comme celui de l'éclatement des crédits de fonctionnement entre le site parisien et le site strasbourgeois. Si la décision du Gouvernement de transférer définitivement l'ENA à Strasbourg et de vendre l'immeuble de la rue de l'Université est une bonne chose, il convient à présent d'en tirer les conséquences sur la diminution des crédits affectés à l'École. Alors qu'il est prévu une diminution de 3,5 % des équivalents temps plein en 2006, aucune conséquence n'est visible au niveau de la subvention allouée à l'ENA au sein du programme Fonction publique. Ne pas voter l'amendement reviendrait à accepter d'augmenter le coût moyen par élève ! Il est frappant de constater que le projet annuel de performance ne mentionne que peu d'informations sur les objectifs de performance d'une école pourtant censée être emblématique des impératifs de bonne gestion publique au sens de la LOLF.

M. Jean-Michel Fourgous a rappelé que les dernières statistiques européennes concernant le coût de la fonction publique en 2004 placent la France au troisième rang des nations les plus dispendieuses et ce alors même que les deux premières au classement (la Suède et le Danemark) sont entrées dans une logique de réduction des dépenses publiques. L'ENA est la seule école de fonctionnaires à ne pas être en mesure d'évaluer ses coûts ni de donner une évaluation prévisionnelle satisfaisante de ses effectifs. La gestion de l'École apparaît, au contraire, comme un condensé des dysfonctionnements de l'administration, alors qu'elle devrait être un modèle.

M. Georges Tron, Rapporteur spécial, a donné un avis favorable à cet amendement, propre à faire passer un message fort à un établissement qui se veut emblématique de la fonction publique.

Le Président Pierre Méhaignerie a souhaité que l'exposé des motifs de cet amendement soit modifié dans un sens plus factuel, afin de ne pas donner l'impression que la commission des Finances est insultante ou agressive.

M. Louis Giscard d'Estaing a partagé le souci du Président, faisant néanmoins remarquer que, par le passé, des diminutions de crédits adoptées en loi de finances initiale avaient été inversées en loi de finances rectificative. Il convient de clairement marquer les intentions.

Après que M. Pierre Bourguignon a indiqué qu'il s'abstiendrait, la Commission a adopté cet amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. Patrice Martin-Lalande, visant à susciter le rattachement du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) à la mission Médias, et augmentant les crédits du CSA de 3 millions d'euros en réduisant ceux de l'action sociale interministérielle du programme Fonction publique.

M. Georges Tron a exprimé son désaccord avec cet amendement, qui a notamment pour effet de réduire le montant de l'aide à l'installation des personnels de l'État, alors que cette dernière est de plus en plus utile. D'autres réductions de crédits doivent pouvoir être trouvées, par exemple sur le Commissariat général du Plan.

Tout en exprimant son désaccord avec une quelconque modification des crédits du Plan, alors que les organismes en charge de la prospective sont en voie de restructuration, M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial des crédits de la Coordination du travail gouvernemental, a partagé l'opinion de M. Georges Tron sur l'importance des aides à la mobilité des fonctionnaires, qu'il convient de préserver. Même si le CSA est une autorité administrative indépendante déjà relativement bien dotée budgétairement, on peut légitimement souhaiter son rattachement à la mission Médias.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a fait part de ses interrogations quant au devenir du commissariat général du Plan, qui avait entrepris deux études aussi utiles qu'importantes pour le compte de la commission des Finances : la première portant sur les allègements de charges sociales patronales, la seconde relative à la cession des parts détenues par l'État dans les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Cette dernière, demandée à la fin du mois de juillet 2005, avait pourtant reçu l'accord de Matignon et permettait de nourrir les débats actuels. Il semble que le fait d'avoir travaillé pour la commission des Finances ait été reproché au précédent commissaire général du Plan.

Les travaux de la mission d'évaluation et de contrôle (MEC) sur les organismes publics d'évaluation et de prospective, réalisés en 2003, devraient inspirer le Gouvernement sur les mesures de rationalisation de ces organismes à mettre en œuvre. La nouvelle commissaire au Plan, Mme Sophie Boissard, devra effectivement être entendue par la commission des Finances, afin de veiller à une meilleure articulation des travaux entre le Parlement et le Plan.

Tout en partageant le souci de l'auteur de l'amendement de veiller à une bonne imputation des crédits du CSA au sein de la maquette budgétaire, M. Georges Tron, Rapporteur spécial des crédits de la Fonction publique, a renouvelé son avis défavorable sur l'amendement, lequel ne devrait pas affecter les crédits d'aide à la mobilité des personnels. La logique actuelle de restructuration du Plan implique de revoir son financement.

Après que le Président Pierre Méhaignerie a invité l'auteur de l'amendement à rechercher une autre base pour la réduction des crédits qu'il propose, cet amendement a été retiré par son auteur.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. Georges Tron, Rapporteur spécial des crédits de la Fonction publique, procédant à une réaffectation des dépenses de rémunération de la direction générale de l'Administration et de la fonction publique du programme Coordination du travail gouvernemental vers le programme Fonction publique, afin de mettre la structure de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » en conformité avec la LOLF.

M. Jean-Pierre Brard, Rapporteur spécial des crédits de la Coordination du travail gouvernemental, a fait remarquer qu'il était incohérent que cet amendement propose une réaffectation des seules dépenses de personnel, sans toucher aux moyens de fonctionnement correspondants qui sont mutualisés au sein de l'action Soutien. Il serait préférable que l'amendement soit retiré pour être retravaillé.

Après que M. Georges Tron, Rapporteur spécial des crédits de la Fonction publique, a rappelé qu'il s'agissait d'une des préconisations de la mission d'information sur la mise en œuvre de la LOLF, la Commission a adopté cet amendement.

M. Hervé Novelli a constaté une hausse apparente de 3 % des dépenses de personnel du budget général de l'État entre 2002 et 2006. Cette aggravation des dépenses publiques est un paradoxe pour une majorité soucieuse de réformer l'État.

La Commission a adopté les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », ainsi modifiés.

Elle a ensuite procédé à l'examen des crédits du compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » et examiné un amendement de M. Georges Tron, Rapporteur spécial, visant à tirer les conséquences de deux amendements adoptés en première partie du projet de loi de finances et à créer un programme Contribution au désendettement de l'État au sein de la mission, aujourd'hui monoprogramme.

La Commission a adopté cet amendement, puis les crédits du compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », ainsi modifiés.

Elle a ensuite adopté les crédits du compte « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».

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Puis la commission des Finances a examiné les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte spécial « Pensions ».

M. Tony Dreyfus, Rapporteur spécial, a rappelé que les régimes concernés par la mission « Régimes sociaux et de retraite » ont pour point commun d'être des régimes de cessation anticipée d'activité ou des régimes spéciaux en rapide déclin démographique, voire presque éteints pour certains d'entre eux. Les dépenses consistent essentiellement en des interventions publiques destinées à assurer l'équilibre financier des régimes spéciaux.

Le programme « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres » comporte principalement la subvention d'équilibre à la SNCF, ainsi que le financement du dispositif de cessation anticipée d'activité des chauffeurs routiers. Le programme « Régime de retraite et de sécurité sociales des marins » correspond à la subvention d'équilibre versée par l'État à l'établissement national des invalides de la marine (ENIM), qui gère le régime de sécurité sociale des marins. Le programme « Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers » est issu de la fusion de deux programmes prévus dans la maquette présentée en 2005 : « Régime social des mines » et « Régime de retraite de la SEITA, de l'imprimerie nationale et divers ». Ils ont été regroupés pour ne pas isoler complètement les régimes de retraite « fermés » de la démarche de performance.

L'État manifeste la solidarité de la Nation envers ces régimes par des subventions d'équilibre et demande en contrepartie des efforts d'efficacité de gestion aux organismes tiers gestionnaires. Les indicateurs retenus mesureront principalement : le service rendu aux usagers, les coûts de gestion et les taux de recouvrement.

La subvention d'équilibre à la SNCF s'élève à 2,5 milliards d'euros. Le régime de la SNCF présente un déséquilibre démographique important, essentiellement dû aux fortes embauches de cheminots lors de la reconstruction du réseau ferré après la deuxième guerre mondiale - il y avait 450.000 cotisants en 1949. Dans les années à venir, la subvention d'équilibre devrait encore s'accroître, pour atteindre 2,9 milliards d'euros en 2009. Toutefois, quelle que soit l'évolution des effectifs cotisants, le rapport démographique du régime devrait s'améliorer au cours des trente années à venir, compte tenu de la diminution inéluctable du nombre des pensionnés - d'environ 25 % d'ici à 2030. En outre, dans le cadre de la décentralisation du syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF), l'État a accepté de contribuer au financement des charges de retraite de la RATP, à hauteur de 374 millions d'euros.

Les dépenses du programme « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins » s'élèvent à 684 millions d'euros et sont entièrement versées à l'ENIM comme subvention d'équilibre. Les crédits diminuent de 17 % par rapport à 2005 en raison de la suppression des dépenses de prévoyance des marins : l'ENIM sera adossé financièrement en 2006 à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, ce qui aura pour effet de substituer cette dernière à l'État pour la prise en charge de la part de la subvention nécessaire à l'équilibre de la branche maladie de l'ENIM.

Les versements au fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines s'élèvent à 680 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement en 2006, contre 576 millions d'euros en 2005, soit une augmentation de 18 %. Le régime minier, en raison de la quasi-disparition des actifs, est dépendant de ressources externes, dans une proportion proche de 90 %.

La subvention d'équilibre versée au régime de la Société nationale d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (SEITA) s'élève à 120 millions d'euros en 2006, contre 117 millions en 2005.

L'objet du compte d'affectation spéciale (CAS) des pensions est de permettre la centralisation et la présentation synthétique de l'ensemble des crédits que l'État consacre au service de pensions et d'allocations viagères.

La LOLF a conduit à reconsidérer l'ensemble de l'organisation antérieure. Elle prévoit l'ouverture d'un compte d'affectation spéciale qui aura vocation à retracer toutes les « opérations relatives aux pensions et avantages accessoires ».

L'équilibre du régime doit être assuré par l'intermédiaire du seul taux de cotisation. Dans une logique de révélation de son « coût complet », chaque programme doit supporter un coût représentatif des pensions futures des fonctionnaires. Les décisions de gestion relatives au nombre et à la qualification des personnes employées devraient ainsi prendre en compte à la fois le coût actuel de ces personnes - rémunérations d'activité et charges sociales -, mais aussi le coût futur de leurs pensions, sur la base d'un « taux de cotisation » aussi réel que possible.

Le programme « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » retrace les pensions à la charge de l'État et versées aux personnels civils et militaires relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi que les allocations temporaires. Il concentre l'essentiel des enjeux du compte d'affectation spéciale «Pensions». En 2006, 40,6 milliards d'euros sont prévus à ce titre. Le nombre de pensionnés s'élève à 1.484.106, contre 1.432.435 en 2005.

Les dépenses du programme « Ouvriers des établissements industriels de l'État » s'élèvent à 1,7 milliard d'euros. Les principaux employeurs des ouvriers de l'État sont les ministères de la Défense et de l'Équipement. Le nombre total de pensionnés, hors pensions payées sous avances, devrait s'établir à 105.746 en 2006 contre 107.062 en 2005, soit une diminution de 1,2 %.

En conclusion, le Rapporteur spécial, tout en se félicitant de la mise en place du système préconisé par la LOLF, qui améliore la transparence des régimes de retraite à la charge de l'État, a invité la Commission à s'abstenir.

Celle-ci ne l'a pas suivi et a adopté les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte spécial « Pensions ».

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La commission des Finances a ensuite examiné les crédits des missions « Pouvoirs publics » et « Conseil et contrôle de l'État ».

M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial, a rappelé que les crédits des missions « Pouvoirs publics » et « Conseil et contrôle de l'État » étaient jusqu'à présent dispersés au sein du budget de l'État, et s'est félicité que la LOLF mette davantage d'ordre dans leur présentation. Il a toutefois protesté contre le fait que la Présidence de la République n'ait pas jugé bon de répondre, ni directement ni via le Gouvernement, aux questions, au demeurant simples, qui lui avaient été adressées.

La mission « Pouvoirs publics » n'est pas appelée à faire l'objet de longs débats. Elle bénéficie en effet d'une dérogation au droit commun, en ce qu'elle est affranchie des contraintes de performance et exclue des modalités de régulation budgétaire infra-annuelle. Les sept dotations existantes concernent la Présidence de la République, l'Assemblée nationale, le Sénat, la Chaîne parlementaire, le Conseil constitutionnel, la Haute Cour de justice - pour mémoire - et la Cour de justice de la République.

Les crédits de la Présidence de la République sont stabilisés depuis 2003 et ne croissent plus qu'au rythme annuel de l'inflation, après avoir décuplé depuis 1995. Ils atteindront 32,47 millions d'euros en 2006 - pour leur partie connue, car leur budgétisation à coût complet nécessiterait la prise en compte des quelque 700 mises à disposition gratuites dont bénéficie la Présidence, ainsi que la refacturation d'un volume important de frais de fonctionnement ou de déplacement. Le corollaire du bénéfice d'une dotation élevée devrait être une plus grande rigueur dans la gestion de celle-ci, et non le développement d'un sentiment d'irresponsabilité chez le gestionnaire.

En revanche, l'Assemblée nationale et le Sénat, que le principe d'autonomie financière n'exonère pas du devoir de rendre des comptes, explicitent chaque année dans une annexe « jaune » l'évolution de la dotation dont ils demandent l'inscription au budget et font état, dans un rapport annuel, de l'exécution de celle-ci. De même dispose-t-on d'informations synthétiques mais substantielles concernant le Conseil constitutionnel et la Cour de justice de la République.

L'une comme l'autre des assemblées fera un effort pour ne pas dépasser en 2006 une norme de progression de 1,8 % en volume des dépenses à la charge du contribuable, au prix d'un prélèvement sur ses disponibilités, à hauteur de 47,6 millions d'euros pour l'Assemblée nationale et de 5,5 millions d'euros pour le Sénat. La dotation de l'Assemblée s'élèvera à 502 millions d'euros - soit 870 000 euros par député - et celle du Sénat à 309 millions d'euros - soit 930.000 euros par sénateur -, dont 11,5 millions d'euros pour le jardin du Luxembourg et 1,5 million d'euros pour le musée du Luxembourg - lequel pourrait faire l'objet d'une réflexion sur l'idée de confier sa gestion au ministère de la Culture.

Une dotation spécifique regroupe, dans un louable effort de clarification, les crédits de la Chaîne parlementaire, qui augmentent de 10,7 % après avoir augmenté de 33,4 % en 2005, du fait du déploiement de la télévision numérique terrestre.

La dotation du Conseil constitutionnel reste stable à 5,31 millions d'euros hors abondements exceptionnels, soit une diminution en volume. Si l'on inclut les abondements exceptionnels de 2005 et de 2006, la dotation est même en baisse. En effet, sont intervenus en 2005 un versement supplémentaire de 1,28 million d'euros pour le ravalement des façades de la rue de Montpensier et une dotation de 630.000 euros pour les opérations liées au référendum du 29 mai, alors qu'en 2006 un unique abondement exceptionnel de 424.000 euros est prévu, afin de préparer l'élection présidentielle.

Enfin, la dotation de la Cour de justice de la République suit une légère baisse continue depuis 2001, et chaque année le solde positif constaté en fin d'exercice est reversé au Trésor. La stabilité, de mise en 2006, s'explique par la révision à la hausse du loyer des locaux de la Cour, poste qui représente 45 % des crédits demandés - ce qui atteste a contrario de la modicité des autres dépenses.

Le Rapporteur spécial a indiqué, de même que M. Thierry Carcenac au nom du groupe socialiste, qu'il s'abstiendrait sur les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

Le Rapporteur spécial a proposé à la Commission d'adopter une observation regrettant l'absence de réponse au questionnaire relatif à la dotation « Présidence de la République ». Le Président Pierre Méhaignerie ayant considéré que l'observation serait susceptible d'être adoptée à l'unanimité si elle était limitée à sa première phrase, du fait du caractère polémique de la seconde, visant un « manque délibéré à la transparence », le Rapporteur spécial a accepté d'en modifier le texte en conséquence.

La Commission a donc adopté à l'unanimité, sur proposition du Rapporteur spécial, l'observation dans la rédaction suivante : « La commission des Finances, de l'économie générale et du plan regrette que le Rapporteur spécial de la mission « Pouvoirs publics » n'ait pu obtenir quelque réponse que ce soit à la partie de son questionnaire relative à la dotation « Présidence de la République ».

Puis elle a adopté les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial, a estimé que la mission « Conseil et contrôle de l'État », composée des trois programmes « Conseil d'État et autres juridictions administratives », « Cour des comptes et autres juridictions financières » et « Conseil économique et social », constitue une sorte d'« hybride budgétaire ». Le projet de maquette budgétaire initial incluait logiquement le Conseil d'État et les autres juridictions administratives dans la mission « Justice », la Cour des comptes et les autres juridictions financières dans la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », et plaçait les crédits du Conseil économique et social dans une mission « mono-programme », contraire à l'article 7 de la LOLF. Rattachés désormais au Premier ministre, ces trois programmes devraient être exemptés de mise en réserve de crédits et bénéficier de modalités allégées de contrôle financier - ce qu'au demeurant son statut garantissait déjà au Conseil économique et social -, mais ils demeurent, pour le reste, soumis au même régime que les autres programmes du budget général, notamment en termes de performance.

Les programmes pilotés par le Conseil d'État et la Cour des comptes font problème à certains égards : le caractère ministériel des programmes est virtuel, les plafonds d'autorisations d'emplois sont de facto établis par programme et non par ministère comme dans l'article 55, l'outil des budgets opérationnels de programme (BOP) n'est pas pleinement utilisé, la gestion des détachements et des mises à disposition requiert des compétences que seuls possédaient les anciens ministères de rattachement. Il convient cependant de laisser cette architecture en l'état, afin d'évaluer les résultats qui en découleront et d'en tirer les conséquences au cours de la discussion du projet de loi de finances pour 2007.

Le Conseil d'État, les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs bénéficieront en 2006 d'un budget de 246,28 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 238,41 millions d'euros en crédits de paiement, l'augmentation des moyens restant toutefois en deçà de ce que prévoyait la loi d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) du 9 septembre 2002. Avec 24,5 équivalents temps plein (ETP) de magistrats et agents de greffe supplémentaires et 1,5 ETP dans la catégorie des assistants de justice, l'exécution de la LOPJ ralentit dangereusement, et il est patent que la programmation ne sera pas respectée à l'horizon 2007, même si l'effort accompli depuis 2003 n'est pas négligeable.

Le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » bénéficiera, avec 171,24 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, de moyens en hausse de plus de 25 %, mais il faut souligner que la Cour aura plusieurs défis à relever, en particulier la préparation de la certification des comptes de l'État et de la sécurité sociale, et le développement de réelles compétences en matière de gestion de ressources humaines.

Enfin, le Conseil économique et social devrait recevoir une dotation de 35,5 millions d'euros, qui n'augmente que sous l'effet de mesures automatiques relatives aux rémunérations et cotisations sociales. Quant à l'attitude plutôt réservée adoptée par le CES à l'égard de la LOLF et en particulier du dispositif de mesure de la performance, sans doute les choses pourront-elles évoluer favorablement une fois que le Conseil aura pris pleinement conscience des avantages qu'il pourra en retirer pour lui-même.

La Commission a alors examiné un amendement de M. Pierre Albertini visant à supprimer le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives ». Son auteur a rappelé que dans la maquette proposée au Parlement lors de l'examen de la loi de finances initiale pour 2005, les juridictions administratives constituaient l'un des programmes de la mission « Justice », dont il est le Rapporteur spécial. Les raisons en étaient simples : du point de vue du justiciable, il n'y a pas de différence entre le fait d'avoir affaire à une juridiction administrative ou bien à une juridiction judiciaire. Dans les deux cas, le jugement est prononcé au nom du peuple français. D'ailleurs, la loi d'orientation et de programmation pour la justice traite à la fois des juridictions judiciaires et des juridictions administratives et leur assigne des objectifs similaires en termes de délais de jugement et d'optimisation de la gestion.

Le rattachement à la mission « Conseil et contrôle de l'État » est dû à la conjonction de deux facteurs : d'une part, la volonté du Gouvernement de ne pas isoler la Cour des comptes et le Conseil économique et social ; d'autre part, l'avantage vu par le Conseil d'État à être rattaché au Premier ministre plutôt qu'au ministère de la Justice. Cette décision est regrettable à plusieurs titres :

- la fonction consultative ne concerne que le Conseil d'État, l'activité des tribunaux administratifs en ce domaine étant marginale. Or, les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel représentent l'essentiel des crédits du programme ;

- la maquette proposée nuit à l'image de la justice et au sens de l'autorisation parlementaire relative aux crédits de la justice ;

- une telle vision est anachronique et en complet décalage avec les critiques récurrentes de la Cour européenne des droits de l'homme sur le double rôle du Conseil d'État, à la fois conseil du Gouvernement et juridiction suprême de l'ordre administratif.

Il est souhaitable que cette anomalie soit réparée dès la loi de finances pour 2006, première année de mise en œuvre de la LOLF, faute de quoi serait créé un fâcheux précédent. La force d'inertie de l'administration aura ensuite tôt fait de perpétuer cette situation critiquable.

M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial, s'est déclaré sceptique quant à l'argument tiré de l'intérêt du justiciable. En effet, des juridictions spécialisées, comme les conseils de prud'hommes ou les tribunaux des affaires de sécurité sociale, ne figurent pas au sein de la mission « Justice », sans que cela nuise à l'intérêt des justiciables. Il est par ailleurs nécessaire de laisser vivre la maquette existante, quitte à réexaminer la situation l'an prochain. Enfin, le Gouvernement a-t-il prévu l'amendement symétrique consistant à réintégrer le programme « Conseil et contrôle de l'État » au sein de la mission Justice ?

M. Pierre Albertini a répondu que, si l'inclination personnelle du Garde des Sceaux allait en ce sens, telle n'était pas la position collégiale du Gouvernement.

La Commission a alors rejeté l'amendement.

Le Rapporteur spécial s'en remettant à la sagesse, la Commission a adopté les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».

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La Commission a enfin procédé, sur le rapport de M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial, à l'examen des crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », ainsi que du budget annexe « Monnaies et médailles ».

M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial, a rappelé que la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » est issue des anciens services financiers. Elle représente 78 % des équivalents temps plein travaillés (ETPT) du ministère de l'Économie et mobilise 8,8 milliards d'euros de crédits. Elle regroupe la direction générale des impôts (DGI), le réseau de la direction générale de la comptabilité publique et une partie de la direction générale des douanes et des droits indirects.

Le programme « Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local » représente plus de 90 % de l'enveloppe et près de 97 % des personnels. Bien plus modeste, le programme « Conduite et pilotage des politiques économique, financière et industrielle » recouvre les missions traditionnelles du ministère.

Il est un peu difficile de se retrouver dans la ventilation des 136.754 ETPT. On constate toutefois qu'entre 2003 et 2005, le ministère a perdu 5.676 emplois et qu'une nouvelle diminution est prévue en 2006, qui porte essentiellement, comme à l'accoutumée, sur les emplois de catégorie C.

Ce programme comporte neuf actions réparties en trois pôles. Le premier pôle a trait aux usagers ou « clients », terme qui prend le pas sur celui, pourtant plus civique, de « contribuables ». Il regroupe la fiscalité des grandes entreprises, des PME, des particuliers, des marchandises des moyens de transport. Le deuxième pôle concerne la gestion financière de l'État hors fiscalité, la gestion des pensions, la gestion financière du secteur public, la gestion des fonds déposés. Le troisième comporte tout ce qui est relatif au soutien de l'activité du ministère. On trouve dans ce dernier pôle le système d'information « Copernic », qui mobilisera 911 millions d'euros d'investissements sur neuf ans. Le programme « Hélios », doté de 130 millions d'euros, et dont la Cour des Comptes a fait un thème de contrôle, est davantage tourné vers la comptabilité publique. Il semble qu'il y ait un ralentissement de la mise en œuvre d'Helios, qui concerne néanmoins 110.000 collectivités locales et établissements publics locaux.

S'agissant de « Copernic », les interlocuteurs du Rapporteur spécial ont affirmé que tout se passait pour le mieux, mais on a pu constater au printemps 2005 que le portail n'avait pu absorber 3,6 millions de télédéclarations de revenus. L'objectif du Gouvernement étant de parvenir à 6 millions, voire à 10 millions de télédéclarations, il y a lieu de nourrir quelque inquiétude. Sachant qu'un agent met en moyenne six minutes à saisir une déclaration, on peut aussi s'interroger, dans ce cadre, sur le bien-fondé de la réfaction d'impôt de 20 euros, pour laquelle l'augmentation du nombre de télédéclarants devrait amener à porter l'enveloppe globale de 65 à 105 millions d'euros. L'économie ne semble en effet guère assurée, ainsi que l'ont d'ailleurs reconnu le directeur général des impôts et le secrétaire général du ministère.

Le programme « Conduite et pilotage des politiques économique, financière et industrielle », piloté par la Direction du personnel, de la modernisation et des achats, la Direction des Affaires juridiques et la Direction de la communication, est relativement modeste, avec 720 millions d'euros et 5.213 ETPT. L'enveloppe de 10,53 millions d'euros à disposition du secrétaire général du ministère pour financer des « actions innovantes contribuant à la modernisation du ministère » permet des investissements d'ordre immobilier, le financement des différents schémas directeurs techniques, la poursuite d'un programme lié à la gestion du patrimoine immobilier ancien et des dépenses liées à la modularité du site de Bercy.

La Direction générale de la comptabilité publique s'est vue affecter les emplois en fonction des différentes missions. Avec le rattachement de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation, 942 des 964 agents ont été reclassés. On peut s'interroger sur la façon dont seront traités les contentieux. Le Rapporteur spécial n'a réussi ni à en connaître le nombre ni à savoir si l'objectif de recettes serait atteint. Dans le seul 15e arrondissement de Paris, il y a chaque semaine 400 réclamations au titre de la redevance. La refonte de l'implantation des trésoreries se poursuit. Les choses se passent plus ou moins bien selon les départements, et cela n'a pas été sans influence sur le mouvement de protestation en faveur du maintien des services publics en milieu rural. Aucune précision n'est apportée quant au nombre de fermetures envisagé en 2006. S'agissant de la Direction générale des impôts, le bilan de la Direction des grandes entreprises semble positif puisqu'elle recouvre de fortes sommes avec un faible nombre d'agents. Les choses doivent toutefois être améliorées en matière de contrôle fiscal, en particulier pour la TVA intracommunautaire, et de lutte contre l'économie souterraine.

Il convient de déplorer le retard des réponses au questionnaire budgétaire, avec moins de 30 % de retours le 10 octobre. On constate en outre des contradictions sur les réductions d'emplois entre le projet annuel de performance de la mission et les documents de présentation du projet de loi de finances. Ainsi, on annonce une réduction de 2.077 ETPT pour le programme « Gestion financière et fiscale de l'État et du secteur public local », alors que le projet annuel de performance correspondant chiffre la suppression à 1.950 ETPT.

La présentation du projet annuel de performance est décevante. On peut aussi s'interroger sur le lien entre celui-ci et les contrats de performance qui vont être signés pour 2006-2008. L'examen des indicateurs est frustrant, mais il ne sera pas possible d'aller plus loin, puisque les contrats ne sont pas encore conclus. Le secrétaire général du ministère a indiqué que le contrat de performance 2006 serait égal au projet de performance présenté.

Enfin, la comparaison des enquêtes annuelles auprès des personnels montre une dégradation du climat social. Ils semblent adhérer de moins en moins au processus de réformes engagées par le ministère. Depuis 2004, le rythme des changements dans les directions est considéré comme trop rapide par 47 % des agents concernés, et 62 % des agents jugent que leur situation personnelle au sein du ministère s'est plutôt dégradée.

M. Jean-Pierre Gorges a considéré qu'on n'allait pas aussi loin dans la réduction des effectifs que le permettraient les apports de l'informatique, qui conduit logiquement à supprimer principalement des emplois de catégorie C. Pour l'instant les gains de productivité ne sont pas à la hauteur. En particulier, le passage à 3,8 millions de télédéclarations n'a pas entraîné une économie équivalente. Il convient que l'objectif de 10 millions de télédéclarants ait des effets beaucoup plus importants sur les effectifs, surtout si l'on y associe un développement du télépaiement. On comprend que l'indice de satisfaction du personnel ne soit pas bon, car il s'agit d'un changement complet de processus. Ce phénomène devrait d'ailleurs conduire à ne plus construire les budgets sur la base des années précédentes mais à repartir sur une base zéro, ce qui permettrait des économies plus importantes. L'apport de l'outil informatique, de la dématérialisation et de la suppression des doubles emplois en matière de contrôle peut être plus important pour la comptabilité publique. Tant qu'on ne commencera pas par afficher les économies, on n'incitera pas à mettre en place les solutions adaptées.

Le Rapporteur spécial a répondu que, dans la mesure où une déclaration est traitée en six minutes, le développement de la télédéclaration ne représente guère qu'une économie potentielle de 200 agents. Il a ensuite constaté qu'on demandait des efforts surtout aux agents de catégorie C, qui étaient les premiers touchés par les réductions d'effectifs, mais jamais aux agents de catégorie A. Ainsi, la réforme de la direction de la communication il y a deux ans a consisté en une suppression de tous les points de services dans les régions, tandis qu'on maintenait la direction au niveau du ministère.

Après que le Rapporteur spécial a préconisé leur rejet en raison du manque de lisibilité et des difficultés qu'il a soulignées, la Commission a adopté les crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques ».

M. Thierry Carcenac, Rapporteur spécial, a ensuite présenté le budget annexe des « Monnaies et médailles ».

Il s'agit d'un budget relativement modeste, dont le montant, de 92 millions d'euros, est en diminution. Le choix a été fait de maintenir la présentation antérieure dans le cadre d'un budget annexe. La subvention d'équilibre est de 1,3 million d'euros, contre 2,3 millions d'euros l'an dernier. La frappe des monnaies passe de 565 millions à 818 millions de pièces. S'il reste encore des stocks importants de la frappe initiale des pièces de 50 centimes, ainsi que de 1 et 2 euros, le nombre des petites pièces commence à diminuer. Les effectifs globaux sont de 659 ETPT, mais il faut distinguer les fonctionnaires des ouvriers d'État. Là aussi, le climat social est très tendu, faute d'informations précises sur le devenir de l'établissement. La partie activités régaliennes de frappe représente 49 millions d'euros en crédits de paiement et la partie activités commerciales 63 millions d'euros.

Le Rapporteur spécial s'est étonné d'avoir découvert au cours d'une discussion qu'un changement de statut juridique des monnaies et médailles avait été annoncé en comité d'entreprise le 13 octobre dernier, avec une éventuelle transformation en EPIC. Il est pour le moins surprenant de ne pas en avoir informé la Représentation nationale et de continuer à ne pas dire ce qui est en train de se passer. Un débat pourrait être ouvert sur ce statut, mais on comprendrait mal, s'agissant d'une fonction régalienne de l'État, qu'une décision puisse être prise dès maintenant et par voie d'un amendement de dernière minute du Gouvernement. Alors que le site de Pessac dispose de toutes les compétences nécessaires, certaines commandes sont passées au privé simplement parce qu'on n'arrive pas à se mettre d'accord avec des syndicats qui acceptent pourtant de passer aux « trois huit », sauf le dimanche.

Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé qu'une entreprise peut fabriquer des passeports personnalisés à un coût deux fois moins élevé et avec des délais d'exécution bien plus courts que l'Imprimerie nationale. Mais les personnels de cette dernière ont fait grève, séquestré le directeur et exigé le marché simplement parce qu'il s'agit d'un monopole public. S'ils obtiennent satisfaction, l'entreprise en cause va licencier. Quand il y a monopole, public comme privé, ce sont les salariés les plus modestes qui en font les frais.

Après que le Rapporteur spécial a émis un avis défavorable, la Commission a adopté le budget annexe des Monnaies et médailles.

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Information relative à la Commission

La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a demandé à la Cour des comptes de procéder, en application de l'article 58-2 de la LOLF, aux enquêtes suivantes :

- les relations entre le ministère de la Jeunesse et des sports, l'INJEP et les associations intervenant en direction des jeunes,

- la gestion de la prime pour l'emploi,

- le programme d'armement VBCI (véhicule blindé de combat de l'infanterie),

- les actions de formation continue des universités,

- le bilan des allègements de charges sociales supportés pour les entreprises,

- et, si la Cour peut l'intégrer à son programme de travail, les tutelles et curatelles.

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