COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 25

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 5 février 2003
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Pascal Clément, président

SOMMAIRE

Projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques (n° 574) (M. Jérôme Bignon, rapporteur)

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jérôme Bignon, le projet de loi relatif à l'élection de conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques (n° 574).

M. Jacques Brunhes a critiqué les conditions dans lesquelles le contenu du projet de loi avait été porté à la connaissance des parlementaires et regretté que le ministre de l'intérieur ne soit pas venu lui-même le présenter devant la Commission. Rappelant que le Premier ministre, avant même que le ministre de l'intérieur ne le fasse, avait reçu l'ensemble des formations politiques, il a également estimé souhaitable que le chef de l'exécutif vienne en personne défendre son texte.

M. Rudy Salles s'est associé aux propos de M. Jacques Brunhes regrettant l'absence du ministre compétent. Il a observé que, si l'ensemble des partis politiques avaient été auditionnés, ils n'avaient pas été entendus, puisque le projet de loi suscite l'unanimité contre lui, à l'exception du groupe majoritaire.

Ayant rappelé que la Commission avait procédé à des auditions de ministre sur des textes de moindre portée, M. René Dosière a déploré les dérives actuelles de la procédure législative, caractérisées par des délais d'examen de plus en plus courts, une fréquence accrue des déclarations d'urgence et une propension inquiétante de la première assemblée saisie à adopter le moins d'amendements possible afin que la seconde puisse l'adopter conforme.

M. Bruno Le Roux a également estimé souhaitable que le ministre vienne expliquer devant la Commission le cheminement qui l'a conduit, à partir des auditions des partis politiques, à élaborer un texte rejeté par la majorité de ceux-ci.

Après avoir souligné que l'article 4 de la Constitution confiait aux partis politiques la mission de concourir à l'expression du suffrage, le président Pascal Clément a estimé normal le dialogue entretenu par le Gouvernement avec les différentes formations politiques et avec sa majorité. Il a rappelé que, lors de l'examen de la réforme du mode de scrutin régional en 1998, le ministre n'avait pas été auditionné par la Commission. Il a considéré qu'il était difficile de préjuger du vote des sénateurs, avant de rappeler que les projets de loi étaient déposés au nom de l'ensemble du Gouvernement.

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M. Jérôme Bignon, rapporteur, a rappelé que les objectifs poursuivis par les auteurs du projet de loi étaient de favoriser les majorités stables tout en respectant le droit des minorités et de rapprocher les élus des citoyens sans remettre en cause la parité. Il a observé que le texte avait un objet strictement limité et ne concernait pas les élections sénatoriales, qui donneront lieu à un projet de loi spécifique, ni les élections municipales ou cantonales.

Évoquant les dispositions modifiant le mode de scrutin régional, il a fait valoir que le rôle moteur confié à la région dans le cadre de la réforme de la décentralisation nécessitait un renforcement de la stabilité des exécutifs régionaux. Rappelant les critiques suscitées par le mode de scrutin en vigueur lors des élections de 1998, il a regretté que la réforme proposée en 1999 par le gouvernement de Lionel Jospin ait été dénaturée au cours des débats, qui ont conduit à la mise en place d'un scrutin proportionnel quasi intégral sans représentation des territoires.

Présentant le dispositif du projet de loi, il a souligné qu'il respectait la parité en imposant une alternance stricte des candidats de chaque sexe sur les listes, au premier comme au second tour, qu'il préservait la pluralité - en fixant à 5 % des suffrages exprimés le seuil permettant aux listes de fusionner en vue du second tour, le même seuil étant exigé pour l'admission à la répartition des sièges - et qu'il rapprochait les élus des électeurs en mettant en place des sections départementales dans le cadre des listes régionales. Il a ajouté que le projet de loi fixait à six ans le mandat des conseillers régionaux, soit une durée analogue à celle des conseillers municipaux et des conseillers généraux.

Abordant les dispositions destinées à renforcer la légitimité des députés européens, le rapporteur a rappelé que le Parlement européen disposait de pouvoirs accrus alors même que le mode d'élection de ses représentants produisait un taux d'abstention de plus en plus important, notamment lors des dernière élections. Il a fait valoir que la représentation proportionnelle intégrale sur l'ensemble du territoire national favorisait l'état-major, souvent parisien, des partis politiques, au détriment des hommes de terrain. Observant que l'ensemble de la classe politique estimait nécessaire une réforme du mode de scrutin actuel, il a rappelé que celle proposée en 1998 n'avait pu aller à son terme, alors qu'elle constituait un premier pas dans la bonne direction. Après avoir précisé que le principe d'un scrutin proportionnel était imposé par une décision du Conseil des ministres de l'Union européenne, il a indiqué que le Gouvernement avait retenu huit grandes circonscriptions d'élection, le choix des circonscriptions régionales étant impossible, sous peine d'aboutir dans certains cas, en raison du faible nombre de députés européens, à un scrutin majoritaire de fait. Il a expliqué que le nombre de représentants français au Parlement européen ne figurait pas dans le projet de loi, puisque ce nombre dépendait du nombre des pays candidats qui adhéreront à l'Union européenne en 2004. Il a souligné que le dispositif proposé permettrait aux électeurs d'identifier clairement leurs représentants au Parlement européen, cette proximité étant également renforcée par la faculté que leur donne à nouveau le projet de cumuler désormais mandat européen et fonction exécutive locale, comme c'est déjà le cas pour les parlementaires nationaux.

Évoquant les modalités d'attribution de l'aide publique aux partis politiques, il a fait valoir que le seuil de 1 % des suffrages exprimés qui devait être obtenu dans cinquante circonscriptions aux élections législatives pour bénéficier de la première fraction de cette aide, permettrait - tout en respectant la diversité des courants d'idée ou d'opinion conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel - de limiter le nombre de candidatures au premier tour des élections législatives, qui a été multiplié par trois depuis 1988. Il a précisé que ces nouvelles dispositions n'entreraient en application que lors du prochain renouvellement de l'Assemblée.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, a tout d'abord constaté que le principe d'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, reconnu par l'article 3 de la Constitution et mis en œuvre par la loi du 6 juin 2000, avait permis des avancées significatives de la parité aux élections municipales et sénatoriales au scrutin de liste de 2001. Elle ainsi observé, d'une part, que les élections municipales dans les communes de 3 500 habitants et plus où s'appliquait la parité par tranche de six candidats avaient donné lieu à un progrès notable de parité - le taux de représentation des femmes atteignant 47,5 % du total des conseillers municipaux - et, d'autre part, que les élections sénatoriales au scrutin proportionnel de septembre 2001 avaient permis une progression notable du nombre de femmes élues. Elle a souligné que l'application de la loi du 6 juin 2000 aurait été elle-même de nature à entraîner des progrès de la parité aux élections de l'an prochain, à savoir un taux de 45 % de femmes conseillers régionaux et de 50 % de femmes élues au Parlement européen.

Elle a souligné que la Délégation aux droits de femmes avait estimé que, dans le cadre de toute réforme des modes de scrutin, il convenait d'une part de se montrer particulièrement vigilant sur le respect des acquis de la parité pour les élections au scrutin de liste, et d'autre part de chercher à améliorer la représentation des femmes pour les élections au scrutin uninominal, celui-ci étant en effet, comme l'ont montré les élections législatives de juin 2002, particulièrement défavorables aux femmes.

Abordant la réforme proposée, Mme Marie-Jo Zimmermann a approuvé le principe de l'alternance entre les femmes et les hommes sur les listes électorales pour les élections régionales et européennes et s'est félicitée de la disposition prévue par la dernière version du texte gouvernemental imposant la parité des candidats figurant en tête de liste des sections régionales pour les élections européennes. Elle a estimé que les dispositions techniques prévues par le présent projet de loi devraient permettre de garantir, dans le cadre du système retenu, un maintien de la parité aux prochaines élections régionales et européennes.

Enfin, elle a rappelé que la Délégation estimait souhaitable, en vertu de l'article 4 de la Constitution, que les partis jouent le jeu de la parité à l'occasion de l'investiture des candidats figurant en tête des sections régionales pour les élections européennes, avant de souhaiter qu'une réelle vigilance en matière de parité permette d'en préserver les acquis. Elle a conclu son propos en évoquant la position favorable de la Délégation à l'égard de dispositions contraignantes pour améliorer la représentation des femmes au sein des exécutifs locaux.

M. René Dosière a souligné que le groupe socialiste émettait des doutes sur la constitutionnalité de certaines dispositions du projet, en particulier celles relatives aux élections européennes. Il l'a considéré comme un texte de « régression démocratique » qui, à l'inverse de ce qu'avait annoncé le rapporteur, éloignerait le citoyen de la vie politique et favoriserait l'abstention.

En premier lieu, il a estimé qu'il conduirait à éliminer de nombreux partis politiques des conseils régionaux, alors même que la loi du 19 janvier 1999 avait permis de trouver un équilibre entre la représentation d'une opposition suffisamment diversifiée et la constitution d'une majorité stable. Il s'est étonné que cette dernière idée soit défendue aujourd'hui par ceux qui avaient soutenu hier des alliances avec le Front national pour obtenir la présidence de certains conseils régionaux. En deuxième lieu, il a regretté que le mandat régional soit porté de cinq à six ans, peu de temps après que la logique démocratique de réduction de la durée des mandats ait prévalu lors du passage du mandat présidentiel du septennat au quinquennat. En troisième lieu, il s'est opposé au retour du cumul des mandats pour les députés européens, mesure qu'il a jugée non exempte d'arrières-pensées. En quatrième lieu, il a déploré la complexité du dispositif électoral mis en place pour les élections européennes, qui conduirait, d'une part, à réduire le nombre des femmes et, d'autre part, à décourager ceux qui dirigeront les campagnes dans chaque circonscription régionale et qui n'auront aucune assurance d'être élus, ni même d'être identifiés par les électeurs. En cinquième lieu, il a critiqué le changement de logique résultant du texte, celle d'un projet régional étant abandonné au profit d'une addition de projets départementaux, en contradiction complète avec la volonté affichée par le Premier ministre de faire de la région un « échelon de pleine cohérence ».

Il a jugé enfin que le projet de loi, dans ses dispositions relatives au financement des partis politiques, ne répondrait pas à la grave anomalie dont témoigne la création d'un parti qui, tout en ne recueillant que deux voix aux élections législatives, avait obtenu 45 000 euros grâce à l'adhésion d'un sénateur

M. Jacques Brunhes a estimé que le projet de loi portait atteinte au principe traditionnel de pluralité politique et conduirait à une bipolarisation de la vie politique française, voire au bipartisme, ce qui traduisait la volonté hégémonique de l'UMP qui, non contente de disposer de la quasi-totalité des pouvoirs, souhaitait de surcroît conquérir l'ensemble des régions et la majorité des sièges de députés européens. Il a regretté que le Premier ministre ou le ministre de l'intérieur ne viennent pas défendre ce projet devant la Commission et a considéré que cette absence masquait à peine ce qu'il a qualifié de « coup d'État électoral ». Il a rappelé que son groupe s'était opposé, en première lecture, au projet de réforme du mode de scrutin régional en 1998, qui contenait alors une disposition fixant à 10 % des suffrages exprimés le seuil exigé pour l'accès au second tour, mais qu'il avait voté le projet en nouvelle lecture compte tenu de l'aménagement de ce seuil.

Il a critiqué le caractère particulièrement complexe dans ses mécanismes et incertain dans ses résultats du dispositif proposé pour les élections régionales, qui associait à la fois des listes régionales, des sections départementales et des règles de parité, et qui ne pourrait qu'éloigner le citoyen de l'élection, à l'opposé des intentions de la majorité.

Il a douté de la constitutionnalité des propositions relatives aux élections européennes, compte tenu du caractère constant du mode de scrutin utilisé pour ces élections depuis 1979 et de sa validation par le Conseil constitutionnel. Il a estimé que l'argument de simplicité qui était utilisé pour justifier la création de huit circonscriptions électorales était peu crédible et masquait la mise en place de huit grandes régions susceptible d'être assimilées aux « Républiques fédératives », tant redoutées par Robespierre.

M. Guy Geoffroy a relevé un décalage entre les objectifs du texte présenté par le Gouvernement et la vigueur des critiques formulées par ses opposants. Alors que les choix exprimés par les électeurs lors des scrutins régionaux étaient confisqués par des combinaisons et des manœuvres post-électorales, de surcroît souvent arbitrées par le Front national, la réforme favorisera l'émergence de majorités stables, définies par le peuple et devant celui-ci. Il a rappelé que le seuil de 10 % des électeurs inscrits pour accéder au second tour avait toujours prévalu pour les élections cantonales, sans que personne ne s'en émeuve, et a considéré que son extension aux élections régionales était un choix cohérent. S'agissant de la réforme du mode de scrutin applicable aux élections européennes, il a jugé qu'il permettrait aux électeurs de mieux identifier leurs représentants et obligerait les partis politiques à assumer pleinement leurs responsabilités. De ce point de vue, il s'est félicité que les mesures proposées permettent d'en finir avec les errements actuels, les « têtes de listes » annonçant à chaque élection qu'elles siègeront effectivement au Parlement européen, sans pour autant honorer leur engagement. En conclusion, il a estimé que, loin d'engager une régression démocratique, ce projet de loi favoriserait la cohérence et la transparence que les élus doivent à leurs électeurs.

M. Émile Zuccarelli a souligné que l'essentiel des mesures proposées ne s'appliquerait pas à la Corse et a regretté que cette spécificité en accroisse la singularité. Il a observé que la réforme constitutionnelle en cours allait favoriser l'émergence de nouvelles collectivités territoriales à statut particulier, au détriment de la cohérence et de l'homogénéité des règles électorales sur l'ensemble du territoire. Sans récuser l'institution de sections départementales au sein des listes pour les élections régionales - des solutions très diverses ayant été successivement mises en œuvre en Corse - il s'est étonné, toutefois, que certains envisagent de supprimer les deux départements corses tout en conservant cet échelon territorial comme circonscription électorale. S'agissant du critère retenu pour accéder au second tour des élections régionales, il a jugé que le seuil de 10 % des électeurs inscrits était excessif et a récusé toute comparaison avec les élections cantonales. Les seuils spécifiques qui restent applicables en Corse lui paraissent toutefois trop faibles pour éviter un émiettement excessif des listes de candidatures au second tour.

M. Bruno Le Roux a jugé contradictoires les arguments avancés par les partisans du projet de loi, qui prétendent, à la fois, renforcer le lien entre les élus et leurs électeurs et favoriser la bipolarisation. Il a considéré celle-ci comme dangereuse pour l'expression des opinions, étrangère aux tradition politiques du pays et, de surcroît, contraire aux dispositions de l'article 4 de la Constitution, selon lequel les partis et groupements politiques, qui concourent à l'expression du suffrage, doivent pouvoir se former et exercer leur activité librement.

Il a rappelé que le Premier ministre lui-même, alors sénateur, s'était élevé, en 1999, contre les dangers d'un système qui aboutirait à l'émergence de deux grands blocs quasi hégémoniques. Reconnaissant que le mode de scrutin appliqué aux élections régionales de 1998 avait favorisé toutes sortes de combinaisons, il a jugé que la réforme issue de la loi du 19 janvier 1999 devait permettre de dégager des majorités stables. Il a observé, d'ailleurs, que s'il subsistait un risque, aussi minime soit-il, d'instabilité dans certaines régions, ce qui restait à démontrer, il suffisait, pour s'en prémunir, de relever de quelques points la prime majoritaire attribuée à la liste ayant obtenu la majorité absolue des suffrages au premier tour ou qui est arrivée en tête au second. Il a récusé l'argument selon lequel le mode de scrutin en vigueur serait complexe, le jugeant plus équitable et plus lisible que celui proposé par le Gouvernement.

S'agissant du seuil exigé des listes pour participer au second tour des élections régionales, il a estimé qu'il aurait pour effet de restreindre de manière excessive l'accès de la plupart des formations politiques au second tour et obligerait celles-ci à négocier avec l'UMP entre les deux tours. Il a enfin récusé le caractère arbitraire d'un système qui aboutirait à attribuer des sièges au titre d'une section grâce aux suffrages obtenus en dehors de celle-ci, pareil mécanisme ne pouvant que dissuader les électeurs au lieu de les rapprocher de leurs élus.

M. Jean-Pierre Soisson a jugé qu'on ne pouvait prétendre que l'adoption de ce projet de loi entraînerait une régression démocratique, dès lors qu'il est de nature à limiter la présence des candidats du Front national au deuxième tour des élections régionales. Dénonçant les efforts tactiques déployés depuis vingt ans par le parti socialiste pour favoriser l'extrême droite, il a souhaité que tout soit mis en œuvre pour que les désordres issus des élections régionales de 1998 ne puissent se reproduire.

Favorable à l'avènement de majorités cohérentes et au bipartisme, M. Gilles Bourdouleix a exprimé une préférence pour l'élection des conseillers régionaux au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, qui aurait permis, de surcroît, de garantir des majorités cohérentes et de rapprocher l'élu de ses électeurs. Il a contesté les dispositions relatives à la fusion des listes, ainsi que le seuil de 10 % des électeurs inscrits pour accéder au second tour. Sur ce point, il a estimé que, s'il pouvait être concevable de retenir une disposition de cet ordre dans un scrutin majoritaire pour déterminer les deux candidats qui seront présents au second tour, elle n'était pas adaptée à un scrutin proportionnel dès lors que, dans l'hypothèse d'une participation de 60 %, les partis devront recueillir 15 % des suffrages exprimés pour se maintenir au second tour et que, en pratique, deux partis seulement seront en mesure de le faire. Il a donc souhaité que soit fixé à 10 % des suffrages exprimés le seuil requis pour se présenter au second tour, jugeant que cette solution, éventuellement assortie d'une prime majoritaire, permettrait de dégager des majorités cohérentes tout en respectant l'esprit d'un scrutin proportionnel.

M. Jean-Christophe Lagarde a jugé choquant qu'une disposition ait pu être insérée dans le texte - à savoir le seuil exigé pour le maintien des listes au second tour des élections régionales - alors qu'elle suscite l'opposition de toutes les formations politiques, à l'exception d'une seule d'entre elles. Ayant déploré les incertitudes liées à l'application de ce nouveau mode de scrutin - les électeurs risquant d'avoir de plus en plus de difficultés à identifier les candidats susceptibles d'être élus - il a jugé hypocrite de prétendre que cette réforme aurait pour seul objectif de restreindre la place du Front national, car les autres partis tels que les Verts, les communistes ou l'UDF en seront également les victimes. Il s'est donc déclaré opposé à une réforme qui, promue par un seul parti, obligera les formations plus restreintes à engager avec la formation principale de leur bord des négociations dans lesquelles ils ne pourront être qu'en position de faiblesse.

Évoquant ensuite les élections municipales, il a relevé qu'elles bénéficiaient du seul mode de scrutin parfaitement compris des électeurs et recueillaient, avec l'élection présidentielle, la plus forte participation ; il a estimé que ce scrutin avait l'avantage d'être lisible et de dégager des majorités stables, tout en présentant l'inconvénient de laminer l'opposition. Il a donc indiqué qu'il présenterait un amendement pour réduire le nombre de sièges attribués à la liste qui a obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour de scrutin, une prime de 30 ou 35 % lui paraissant suffisante pour garantir la stabilité d'une majorité municipale et une représentativité satisfaisante des partis.

Revenant aux dispositions du projet de loi, s'il a jugé utile de prévoir une prime majoritaire et une répartition proportionnelle des sièges restant à attribuer, il a, en revanche, estimé préférable de fixer à 10 % des suffrages exprimés le seuil requis pour se maintenir au second tour des élections régionales, ce seuil permettant de dégager des majorités stables et de rapprocher les élus des électeurs, dans le respect de la diversité des opinions. Il a enfin mis en garde contre les conséquences de la réforme sur la vie démocratique, jugeant que, contrairement aux souhaits des Français, elle conduira à réduire l'offre politique et rendra les alternances plus brutales, la majorité actuelle risquant d'en faire les frais d'ici quelques années.

Réagissant à ces propos, M. Alain Gest les a estimés infondés compte tenu de l'évolution de la vie politique, dont témoigne, par exemple, la forte baisse d'audience du parti communiste depuis vingt ans. Il s'est déclaré surpris que l'udf semble tenir pour acquis le fait que ses candidats ne pourront se maintenir au second tour dans aucune région, et de surcroît incompatible avec son appartenance à la majorité. Il a jugé qu'en tenant pareil discours, elle risquait d'être assimilée à des partis qui s'opposent au projet de loi parce qu'ils souhaitent que le Front national continue d'arbitrer les élections régionales.

Rappelant que la mise en place de l'union de la gauche en 1971 par François Mitterrand avait été considéré à l'époque comme un effort de modernisation et permis la conquête du pouvoir dix ans plus tard, le président Pascal Clément a fait observer que la réforme proposée aujourd'hui procédait moins d'un souci hégémonique que d'une volonté de modernisation, les petites formations politiques devant aujourd'hui s'organiser au sein d'une coalition. M. Bruno Le Roux ayant fait observer que la construction de la gauche ne s'était pas alors appuyée sur un « charcutage » des modes de scrutin, contrairement à ce que fait aujourd'hui l'ump, le président Pascal Clément a indiqué que, dans les pays occidentaux, les modes de scrutin étaient un élément déterminant de l'organisation du paysage politique. Évoquant le choix de la représentation proportionnelle par un gouvernement de gauche pour limiter leur échec lors des élections législatives de 1986, il a récusé toute critique de l'opposition en matière de modification des modes de scrutin. Au demeurant, il a jugé que la réforme proposée aujourd'hui était loin d'être défavorable au parti socialiste et qu'elle permettrait sans doute d'éviter que ne se reproduise l'affrontement au second tour de candidats d'extrême droite et de candidats républicains, de gauche ou de droite. Il a enfin rappelé que le seuil de 10 % des inscrits prévu pour l'accès au second tour des élections régionales était identique à celui qui est d'ores et déjà applicable aux élections cantonales.

Après avoir rejeté l'exception d'irrecevabilité n° 1 et la question préalable n° 1 présentées par M. Jean-Marc Ayrault, la Commission est passée à l'examen des articles du projet de loi.

TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉLECTION DES CONSEILLEURS RÉGIONAUX
ET À SES CONSÉQUENCES SUR LA COMPOSITION DU COLLÈGE ÉLECTORAL
ÉLISANT LES SÉNATEURS

Article 1er (art. L. 336 du code électoral) : Durée du mandat des conseillers régionaux :

La Commission a été saisie d'un amendement de suppression de l'article de M. René Dosière. Après avoir précisé que l'article avait pour objet de porter à six ans, au lieu de cinq, la durée du mandat de conseiller régional, le rapporteur a indiqué qu'un mandat de six ans lui paraissait mieux correspondre aux missions imparties à l'échelon régional ; il a ajouté qu'une telle durée de mandat permettrait en outre la concomitance des autres élections locales avec les élections régionales. À une interrogation de M. René Dosière portant sur l'exposé des motifs du projet de loi, qui fait référence aux élections sénatoriales, le rapporteur a indiqué que des mandats de trois, six ou neuf ans rendaient possible la concomitance avec les élections sénatoriales, ce qui n'est pas le cas d'un mandat de cinq ans. M. Louis Giscard d'Estaing a souligné que la concomitance des élections locales avait été délicate à obtenir et que le découplage des élections aurait des conséquences dommageables sur le taux de participation. La Commission a rejeté cet amendement, puis adopté l'article 1er sans modification.

Article 2 (art. L. 338 du code électoral) : Seuil d'admission à la répartition des sièges. Sections départementales :

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière ayant pour objet de supprimer l'article. Elle a ensuite été saisie de deux amendements présentés par le rapporteur tendant à rétablir l'attribution des sièges, en cas d'égalité des suffrages, à la liste ayant la moyenne d'âge la plus élevée et, par coordination, au candidat le plus âgé ; le rapporteur a précisé que la règle inverse, introduite en 1999, était spécifique aux élections régionales et aux élections à l'Assemblée de Corse, et qu'elle ne correspondait pas aux règles traditionnelles applicables en droit électoral. Tout en convenant qu'il s'agissait d'un point mineur, M. Philippe Vuilque s'est élevé contre une mesure qui va à l'encontre de l'objectif de modernisation de la vie politique et qui constitue, avec les amendements relatifs au cumul des mandats, un recul par rapport à la situation actuelle. La Commission a adopté ces amendements, puis adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 3 (art. L. 336-1 du code électoral) : Répartition des sièges entre les sections départementales :

La Commission a rejeté un amendement de suppression présenté par M. René Dosière, puis adopté un amendement du rapporteur, en conséquence de l'amendement précédemment adopté sur la règle du bénéfice de l'âge. Elle a ensuite adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4 (art. L. 346 du code électoral) : Composition et conditions de présentation des listes

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière tendant à supprimer l'article, puis adopté trois amendements du rapporteur apportant des modifications d'ordre rédactionnel ; elle a rejeté un amendement présenté par M. Bernard Roman imposant la parité au niveau des têtes de liste des sections départementales, avant d'adopter l'article 4 ainsi modifié.

Article 5 (tableau n° 7 annexé au code électoral) : Nombre de candidats par section départementale :

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière ayant pour objet de supprimer l'article, puis adopté l'article 5 sans modification.

Article 6 (art. L. 347 du code électoral) : Candidat tête de liste :

La Commission a rejeté un amendement de suppression de M. René Dosière, puis adopté l'article 6 sans modification.

Article 7 (art.  L. 351 du code électoral) : Candidat tête de liste :

La Commission a rejeté un amendement de suppression de M. René Dosière, puis adopté l'article 7 sans modification.

Article 8 (art.L. 360 du code électoral) : Remplacement des conseillers régionaux :

La Commission a rejeté un amendement de suppression de M. René Dosière, puis adopté l'article 8 sans modification.

Article 9 (art. L. 366 du code électoral) : Élection des conseillers à l'Assemblée de Corse :

Ayant rejeté un amendement de suppression présenté par M. René Dosière, puis adopté à l'initiative du rapporteur deux amendements de coordination, la Commission a adopté l'article 9 ainsi modifié.

Article 10 (art. L. 280 du code électoral) : Détermination du collège électoral des sénateurs :

La Commission a rejeté un amendement de suppression de M. René Dosière, puis adopté l'article 10 sans modification.

Article 11 (art. L. 293-1 à L. 293-3 du code électoral) : Désignation des délégués de l'Assemblée de Corse :

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière ayant pour objet de supprimer l'article, puis adopté un amendement du rapporteur apportant une modification rédactionnelle. Elle a ensuite adopté l'article 11 ainsi modifié.

TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉLECTION DES REPRÉSENTANTS
AU PARLEMENT EUROPÉEN

Section 1
Dispositions relatives au mode de scrutin

Article 12 (art. 3 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1997) : Le mode de scrutin :

La Commission a examiné un amendement de M. René Dosière ayant pour objet de maintenir le principe de l'élection des représentants au Parlement européen par scrutin de liste à la représentation proportionnelle avec répartition des restes à la plus forte moyenne dans le cadre de grandes circonscriptions, mais supprimant l'instauration de sections régionales à l'intérieur de chaque circonscription. Son auteur a fait observer que la création de telles sections rendait le dispositif incohérent, injuste et illisible. Il a ajouté que l'ensemble des amendements qu'il présentait pour les élections européennes reprenait les dispositions du projet de loi déposé par le Gouvernement de M. Lionel Jospin le 10 juin 1998, tel qu'amendé à l'époque par la Commission des lois.

La Commission a rejeté cet amendement après que le rapporteur eut fait observer que l'instauration de sections régionales permettrait de mieux rapprocher les représentants du Parlement européen de leurs électeurs et d'assurer une représentation de toutes les régions de France. Elle a en revanche adopté un amendement du rapporteur ayant pour objet de rassembler dans un seul article de la loi du 7 juillet 1977 les grands principes du nouveau mode de scrutin et précisant, en outre, que ce sont les circonscriptions interrégionales qui sont composées de sections et non pas les listes.

Puis la Commission a adopté l'article 12 ainsi modifié.

Article 13 (art. 3-1 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Répartition des sièges dans le cadre des circonscriptions :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant cet article devenu inutile, ce qui a privé d'objet un amendement de M. René Dosière tendant à prévoir qu'en cas d'égalité de moyenne pour l'attribution entre les listes du dernier siège d'une circonscription, celui-ci reviendrait à la liste dont la moyenne d'âge est la moins élevée.

Article 14 (art. 3-2 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Répartition des sièges entre les sections :

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière tendant à supprimer cet article, par coordination avec son amendement supprimant les sections régionales.

Elle a examiné un amendement du rapporteur proposant une nouvelle méthode de répartition des sièges des listes entre les sections. Son auteur a rappelé que le dispositif prévu par le projet de loi conduisait à attribuer d'abord des sièges à la liste arrivée en tête, au prorata des voix obtenues par cette liste dans chaque section, selon la règle de la plus forte moyenne, et prévoyait une méthode analogue de répartition pour les listes suivantes, dans la limite du nombre de siège par section. Il a précisé que, lorsque les sièges d'une liste étaient intégralement pourvus, la répartition des sièges restants s'effectuait dans les sections disposant encore de sièges à pourvoir, soulignant que cette méthode présentait un inconvénient, puisque les dernières listes n'obtiendraient pas nécessairement un siège là où elles avaient obtenu leur meilleur score.

Reconnaissant que son amendement pouvait paraître complexe, il a indiqué qu'il permettrait aux petites listes d'obtenir un siège dans une section où elles auraient obtenu un grand nombre de voix tout en évitant qu'elle ne « captent » la totalité de la représentation des plus petites régions. Il a ajouté que la représentation des régions les plus peuplées serait ainsi éclatée entre tous les partis et que celle des plus petites régions serait assurée par les listes ayant obtenu les meilleurs scores au niveau de la circonscription. Il a précisé que le premier siège de chaque liste serait réparti entre les sections dans lesquelles les listes ont obtenu le plus grand nombre de voix et que le siège suivant des listes ayant obtenu au moins deux sièges serait attribué à la section dans laquelle le rapport entre le nombre des suffrages exprimés que la liste a obtenus dans la section et le nombre d'élus dont elle dispose déjà dans cette même section, augmenté de 1, serait le plus élevé.

M. Jean-Jacques Queyranne a estimé que la méthode proposée était incompréhensible et que la création de sections régionales au sein des grandes circonscriptions compliquait excessivement les modalités du scrutin pour les élections européennes, ce qui était contraire à l'objectif affiché de rapprocher les représentants du Parlement européen de leurs électeurs. Prenant l'exemple de la circonscription sud-est, il a craint que certaines sections peu peuplées, comme la Corse, n'aient pas de représentants, et que le principe de la répartition des sièges entre les circonscriptions selon la règle de la plus forte moyenne ne soit remis en cause. M. Francis Delattre a souhaité savoir si des projections avaient pu être faites pour vérifier la pertinence de l'amendement.

Le rapporteur a précisé que le nombre de sièges par section serait fixe et que chacune d'elles aurait au moins un siège. Il a indiqué que sa méthode permettrait également d'éviter que les petites régions soient représentées par des formations minoritaires, donnant l'exemple de la Corse ou de la Polynésie. Il a indiqué que la méthode proposée avait été testée à l'aide des résultats des dernières élections européennes.

Satisfait par les explications du rapporteur, M. Guy Geoffroy a proposé un sous-amendement afin de remplacer la référence « aux partis » par celles « des listes », soulignant que toutes les listes n'étaient pas nécessairement soutenues par des partis.

La Commission a adopté l'amendement du rapporteur sous-amendé à l'initiative de M. Guy Geoffroy, rendant ainsi sans objet un amendement de M. René Dosière faisant prévaloir la liste ayant la moyenne d'âge la moins élevé pour la répartition des sièges entre les sections en cas d'égalité des suffrages.

La Commission a adopté l'article 14 ainsi modifié.

Article 15 (art. 4 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Circonscriptions et sections :

La Commission a rejeté deux amendements de M. René Dosière relatifs à la composition des circonscriptions et à leur nombre de sièges.

Elle a ensuite examiné deux amendements de M. Alain Marsaud tendant à créer un siège de représentant au Parlement européen pour assurer la représentation des Français de l'étranger dans une section spécifique de la circonscription « Île-de-France ». Son auteur a souligné que, parmi les deux millions de Français résidant hors de France, la moitié d'entre eux étaient inscrits sur des listes électorales, alors que ne votaient, selon les élections, que deux cent mille à quatre cent mille d'entre eux. Il a indiqué que, si les Français établis hors de France pouvaient participer aux élections européennes grâce aux centres de vote créés dans les ambassades et les consulats de France à l'étranger, la territorialisation du scrutin risquait de les priver de leur droit de vote, seuls pouvant continuer à voter deux catégories de Français établis à l'étranger : ceux qui seront inscrits sur la liste électorale d'une commune française en vertu des articles L. 11-3, L. 12 et L. 14 du code électoral, et ceux qui auront été admis à exercer leur droit de vote pour l'élection des représentants au Parlement européen de l'État de l'Union européenne où ils résident. Il a ajouté que sa proposition rejoignait un engagement du Président de la République formulé devant les sénateurs le 28 mars dernier. Il a justifié son choix de rattacher la section des Français résidant hors de France à la circonscription Île-de-France par le fait que cette circonscription disposait d'un grand nombre de sièges et que de nombreuses institutions concernant les Français de l'étranger avaient leur siège à Paris.

M. René Dosière, tout en convenant de la réalité de ce problème et estimant à trois cent mille le nombre de Français résidant hors de France qui ne pourraient voter aux élections européennes, s'est toutefois interrogé sur la pertinence de l'amendement de M. Alain Marsaud, en soulignant qu'il eût été préférable de créer une circonscription supplémentaire. M. Jean Tiberi a estimé pour sa part qu'il serait souhaitable d'interroger le Gouvernement sur ce problème.

Après avoir fait observer qu'il serait contraire à la Constitution de priver de droit de vote les Français résidant à l'étranger serait inconstitutionnel, M. Guy Geoffroy a cependant estimé insuffisamment précise la rédaction de l'amendement.

M. Francis Delattre a jugé contestable le rattachement des Français hors de France à la circonscription Île-de-France.

Le rapporteur a souligné que les Français résidant hors de France disposaient déjà d'une représentation spécifique au Sénat en vertu de l'article 24 de la Constitution. Il a fait observer que les circonscriptions et les sections prévues par le projet de loi étaient définies sur la base de critères démographiques et non en fonction de catégories de citoyens. Plutôt que de créer une représentation spécifique pour les Français à l'étranger au Parlement européen, il a jugé préférable de s'assurer qu'ils puissent effectivement participer aux élections européennes. Il a évoqué le projet de loi de simplification administrative annoncé par le Gouvernement, qui devrait permettre de faciliter le vote par procuration et rappelé que les critères que devaient remplir les Français de l'étranger pour s'inscrire sur une liste électorale d'une commune étaient extrêmement souples.

La Commission a rejeté ces deux amendements. Elle a adopté trois amendements rédactionnels du rapporteur, ainsi que l'article 15 ainsi modifié.

Section 2
Dispositions relatives au régime des incompatibilités
et aux déclarations de candidature

Article 16 (art. 6-2 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977, art. L. 2511-25, L. 3122-3, L. 4133-3 du code général des collectivités territoriales, L. 122-4 et L. 122-4-1 du code des communes) : Régime des incompatibilités :

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière tendant à supprimer l'article, après que son auteur eut regretté que cette disposition aligne le régime des incompatibilités applicables aux parlementaires européens sur celui, plus souple, qui est prévu pour les parlementaires nationaux, et qu'elle autorise désormais les députés européens à cumuler leur mandat avec les fonctions de maire, président de conseil général ou régional.

La Commission a au contraire adopté un amendement du rapporteur tendant à modifier l'article 6-3 de la loi du 7 juillet 1977 pour parachever l'alignement des incompatibilités applicables aux parlementaires européens et nationaux. Le rapporteur a précisé que le mandat de représentant au Parlement européen était incompatible avec l'exercice de plus d'un des mandats de conseiller régional, conseiller à l'assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller municipal, et fait observé que cette disposition était plus restrictive que celle qui s'applique aux parlementaires nationaux, pour lesquels les mandats de conseillers municipaux des communes de moins de 3 500 habitants ne sont pas pris en compte, restriction qu'il a jugée peu favorable au rapprochement des députés européens de leurs électeurs.

Puis la Commission a adopté trois amendements de coordination du rapporteur et un amendement du même auteur tendant à corrigeant une erreur matérielle, ainsi que l'article 16 ainsi modifié.

Article 17 (art. 9 de la loi n° 77-279 du 7 juillet 1977) : Déclaration de candidature :

La Commission a rejeté, en conséquence de ses décisions précédentes, un amendement de M. René Dosière sur les modalités de déclaration de candidature, avant d'adopter un amendement de précision du rapporteur, ainsi que l'article 17 ainsi modifié.

Articles 18 et 19 (art. 11 et 13 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Suppression du cautionnement :

La Commission a adopté ces articles sans modification.

Section 3
Dispositions relatives à la propagande

Article 20 (art. 15 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Ouverture de la campagne électorale ; article 21 (art. 17 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Commission chargée de l'envoi de la propagande électorale ; article 22 (art. de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Remboursement forfaitaire :

La Commission a adopté ces articles sans modification.

Article 23 (art. 19 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Régime de la campagne officielle audiovisuelle :

La Commission a rejeté deux amendements de M. René Dosière : le premier précise qu'un même groupe parlementaire doit, pour pouvoir utiliser les émissions du service public de la communication audiovisuelle pendant la campagne électorale, avoir agréé au moins quatre listes se présentant dans quatre circonscriptions différentes ; le second exige aux mêmes fins que les formations politiques non représentées au Parlement répondent à deux critères, à savoir être bénéficiaires de la première fraction de l'aide publique prévue à l'article 8 de la loi du 11 mars 1988 et présenter au moins quatre listes dans quatre circonscriptions différentes.

La Commission a en revanche adopté un amendement de précision rédactionnelle du rapporteur, ainsi qu'un amendement du même auteur exigeant que les partis non représentés au Parlement soutiennent des listes de candidats dans au moins cinq circonscriptions, au lieu de quatre, pour avoir droit à une durée d'émission.

Elle a rejeté un amendement de M. René Dosière, tendant à supprimer une disposition de l'article 19 de la loi du 7 juillet 1977 prévoyant que les émissions télévisées et radiophoniques sont diffusées dans le même texte puis adopté un amendement du rapporteur supprimant également cette disposition, mais précisant en outre que les temps de parole accordées aux groupes s'entendaient, non pas pour l'ensemble des chaînes nationales de télévision ou de radio, mais bien pour chacune d'elles.

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière prévoyant que les temps d'antenne attribués à plusieurs formations politiques souhaitant s'exprimer dans le cadre d'une même émission de télévision ou de radio puissent être fusionnés. Elle a adopté un amendement du rapporteur permettant l'addition des temps de parole des formations politiques souhaitant réaliser des émissions communes, puis l'article 23 ainsi modifié.

Article 24 (art. 19-1 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Plafonnement des dépenses électorales :

La Commission a examiné un amendement de M. René Dosière tendant à réduire le plafond des dépenses électorales, pour une liste de candidats, de 1 150 000 euros à 1 000 000 euros. Son auteur a précisé qu'il s'agissait de réduire le montant des remboursements forfaitaires versés par l'État et d'encourager ainsi les listes à dépenser mieux.

Le rapporteur a observé que, si le projet de loi divisait par huit le montant du plafond de dépenses électorales compte tenu de la création de huit circonscriptions interrégionales, le coût de la campagne serait en fait augmenté, puisque les listes ne pourront plus réaliser d'économie d'échelle. Il a estimé, en conséquence, qu'il ne convenait pas de diminuer le plafond des dépenses, observant, par ailleurs, que l'argument selon lequel ils n'étaient jamais atteints ne justifiait pas leur réduction.

Le président Pascal Clément a fait observer que le dépassement du plafond des dépenses électorales entraînait ipso facto l'inéligibilité des candidats et estimé qu'il ne fallait pas baisser les plafonds de dépenses tant que cette règle ne serait pas modifiée.

La Commission a donc rejeté cet amendement. Puis elle a adopté un amendement de précision de M. René Dosière et l'article 24 ainsi modifié.

Section 4
Dispositions relatives aux opérations électorales

Article 25 (article 20 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Convocation des électeurs ; article 26 (art. 21 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Recensement des votes :

La Commission a adopté ces articles sans modification.

Article 27 (art. 23 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Modalités de vote des Français établis hors de France :

La Commission a rejeté, en conséquence de ses décisions précédentes, un amendement de M. Alain Marsaud sur le vote Français résidant hors de France, afin que les Français établis hors de France.

Elle a adopté l'article 27 sans modification.

Article 28 (art. 25 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Contestation de l'élection des représentants au Parlement européen :

La Commission a adopté l'article 28 sans modification.

Article additionnel après l'article 28 (art. 26 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Vote le samedi pour les collectivités d'outre-mer se situant dans l'océan Atlantique :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur instaurant le vote le samedi pour la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et Saint-Pierre-et-Miquelon, afin d'éviter que, dans le cadre de la circonscription outre-mer, les électeurs se prononcent en connaissant le résultat du vote d'une partie de cette circonscription ou de la métropole.

Section 5
Dispositions diverses

Article 29 (art. 2 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Participation des électeurs français résidant dans un autre État de l'Union européenne

La Commission a rejeté un amendement de M. Alain Marsaud supprimant cet article, par coordination avec le rejet des amendements tendant à instaurer une représentation spécifique des Français résidant à l'étranger. Puis elle a adopté l'article 29 sans modification.

Article 30 (art. 24 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Modalités de remplacement des représentants au Parlement européen :

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière supprimant cet article, par coordination avec le rejet des amendements supprimant les sections régionales. Elle a adopté un amendement de précision du rapporteur, ainsi que l'article 30 ainsi modifié.

Article 31 (art. 24-1 [nouveau] de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977) : Élections partielles :

La Commission a adopté l'article 31 sans modification.

Après l'article 31 :

La Commission a examiné un amendement de M. Manuel Aeschlimann tendant à exiger, lors des élections municipales dans les communes de plus de 3 500 habitants, que les listes obtiennent un seuil de 10 % des électeurs inscrits, et non plus des suffrages exprimés, pour pouvoir se maintenir au second tour. Son auteur a souligné qu'il s'agissait d'éliminer les listes peu représentatives - et non celles qui avaient une forte implication locale - tout en favorisant, comme le fait le projet de loi, la bipolarisation.

Soulignant que la réforme des élections municipales n'était pas prévue par le projet de loi, qui se limitait aux élections régionales et européennes, le rapporteur a souligné que, si l'on souhaitait modifier le seuil d'admission au second tour pour les élections municipales, il conviendrait de réduire la prime majoritaire, qui est plus forte que pour les élections régionales.

M. René Dosière a rappelé que le mode de scrutin aux élections municipales, lorsqu'il avait été mis en place en 1982, avait réalisé un progrès par rapport au précédent mode de scrutin, qui ne permettait pas de représenter les oppositions. Il a estimé qu'aujourd'hui la prime majoritaire paraissait trop forte et pourrait être ramenée à 25 ou 30 % des sièges. Le président Pascal Clément a considéré que la définition du seuil pour être admis au second tour était liée à la définition de la prime majoritaire et que, si l'on augmentait le premier, il faudrait baisser la seconde. Compte tenu de ces observations, M. Manuel Aeschlimann a retiré son amendement.

TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES À L'AIDE PUBLIQUE AUX PARTIS POLITIQUES

Article 32 (art. 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988) : Instauration d'un seuil pour le versement de la première fraction de l'aide publique aux partis politiques

La Commission a adopté un amendement de coordination du rapporteur, ainsi que l'article 32 ainsi modifié.

Après l'article 32 :

La Commission a examiné un amendement de M. Manuel Aeschlimann autorisant la programmation et la diffusion d'émissions publicitaires de caractère politique. Son auteur a jugé peu attractives les émissions de la propagande officielle et estimé souhaitable de prendre des dispositions pour mobiliser les électeurs. Il a précisé que son amendement ne remettait pas en cause l'esprit de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et que le coût des émissions serait comptabilisé dans les dépenses électorales, dans le respect des plafonds en vigueur.

Le président Pascal Clément a marqué sa réticence à l'égard de cet amendement, qui entraînerait une forte augmentation des dépenses électorales, laquelle ne pourrait que déboucher, à terme, sur un relèvement du plafond. Il a souligné que la publicité politique se pratiquait dans certains pays comme les États-Unis, mais qu'elle pouvait conduire à des campagnes très virulentes auxquelles la France n'était pas préparée. Il a ajouté que les partis dépourvus de moyens seraient défavorisés.

Le rapporteur, favorable à l'amendement, a souligné le caractère désuet des émissions de la campagne officielle, et jugé souhaitable de faire évoluer la communication politique et tenir compte de la place de la publicité dans la vie quotidienne des Français. Il a ajouté que la diffusion d'émissions publicitaires de caractère politique devait être placée sous le contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel et respecter le plafonnement des dépenses électorales.

M. René Dosière a estimé que, si l'amendement était adopté, il conduirait inévitablement à un relèvement des plafonds des dépenses électorales, alors que ce plafonnement a eu le mérite d'inciter les candidats à renouer un contact direct avec l'électeur, et souligné que les émissions publicitaires à caractère politique conduiraient à une régression de la démocratie.

M. Christian Decocq a jugé cette proposition intéressante pour mettre fin à l'inégalité entre les candidats sortants et les autres, car elle permettrait aux nouveaux d'acquérir plus rapidement une certaine notoriété.

M. Francis Delattre a estimé qu'il convenait d'améliorer la qualité des émissions de la campagne officielle, mais aussi de se méfier des conséquences que pourrait entraîner la publicité politique, en particulier les contributions déguisées ainsi que les fausses factures. M. Manuel Aeschlimann a rappelé que l'Allemagne et le Royaume-Uni pratiquaient la publicité politique et connaissaient des taux d'abstention moindres qu'en France.

La Commission a néanmoins rejeté cet amendement.

Article additionnel après l'article 32 (art. 9-1 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988) : Coordination :

La Commission a adopté un amendement de coordination du rapporteur.

DISPOSITIONS RELATIVES À L'OUTRE-MER

Article 33 : Application outre-mer :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant la référence à Mayotte dans les dispositions d'extension du projet de loi outre-mer, son auteur ayant précisé que le droit électoral était applicable de plein droit dans cette collectivité.

Article 34 : Décret en Conseil d'État :

La Commission a adopté l'article 34 sans modification.

Elle a ensuite adopté l'ensemble du projet loi ainsi modifié.


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