COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 19

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 26 janvier 2005
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Alain Marsaud, secrétaire

SOMMAIRE

Examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à la coopération internationale des collectivités territoriales et des agences de l'eau dans les domaines de l'alimentation en eau et de l'assainissement (n° 1684) (M. André Santini, rapporteur).

La Commission a examiné, sur le rapport de M. André Santini, la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à la coopération internationale des collectivités territoriales et des agences de l'eau dans les domaines de l'alimentation en eau et de l'assainissement (n° 1684).

M. Alain Marsaud, président, a d'abord rappelé que la proposition de loi examinée par la Commission était issue du Sénat et avait été inscrite par le groupe udf dans sa « niche » parlementaire. Il a ajouté qu'elle était particulièrement bienvenue en raison des évènements tragiques d'Extrême-Orient.

M. André Santini, rapporteur, a exposé que la proposition de loi, votée à l'unanimité par le Sénat le 22 juin 2004, a pour objet de permettre aux communes, aux établissements publics de coopération intercommunale, aux syndicats mixtes et aux agences de l'eau d'aider des collectivités étrangères dans les domaines de l'eau et de l'assainissement en ayant recours à une fraction, limitée à 1 %, des ressources provenant des services d'eau et d'assainissement.

Puis il a signalé que la proposition de loi s'est inspirée d'un système original et à sa connaissance unique en Europe, mis en œuvre dès 1986 par le Syndicat des eaux d'Île-de-France, consistant à prélever à l'époque un centime additionnel par mètre cube d'eau vendu et à affecter la somme à des actions d'aide internationale dans les domaines de l'eau et de l'assainissement.

Présentant le dispositif prévu, il a indiqué que la proposition de loi permettra non seulement de conclure des conventions de coopération décentralisée, respectant les règles définies par l'article L. 1115-1 du code général des collectivités territoriales, mais aussi de mener des actions d'aide d'urgence et des actions de solidarité internationale.

Abordant ensuite les questions soulevées par la proposition de loi, il a d'abord évoqué l'hésitation de la commission des Lois du Sénat entre le seuil de 1 % et celui de 0,5 % pour la fraction de l'ensemble des recettes pouvant être consacrée à la coopération internationale. Il a exprimé son souhait de voir maintenu le seuil de 1 % en expliquant que ce seuil est un affichage positif en faveur d'un tel type de coopération, mais ne signifie pas qu'il faille l'atteindre, dans la mesure où il représentera un maximum et non une obligation. Il a ajouté qu'un pourcentage maximum élevé présente l'avantage de laisser aux communes, établissements publics de coopération intercommunale, syndicats mixtes et agences de l'eau une plus grande marge de manœuvre pour intervenir dans des situations d'urgence. Il a précisé que, d'ores et déjà, le Syndicat des eaux d'Île-de-France consacre près de 850 000 euros par an à la coopération en matière d'eau et a débloqué 150 000 euros supplémentaires pour l'aide d'urgence à l'Asie du sud-est.

Concernant la question de la dénaturation éventuelle des redevances d'eau et d'assainissement dès lors qu'une fraction de celles-ci financerait des actions sans lien avec le service rendu, il a expliqué qu'une telle dénaturation n'est pas à craindre, car la coopération internationale peut être une source d'apprentissage réciproque et contribuer à l'amélioration du service pour la collectivité française concernée. Il a cependant souhaité que la présentation des factures fasse ressortir clairement la destination finale des contributions de l'usager, par exemple en faisant apparaître sous la forme de centimes additionnels sur les mètres cubes facturés à l'usager le financement de la coopération internationale.

M. Christian Decocq a tout d'abord observé que la coopération internationale des collectivités territoriales dans le domaine de l'alimentation en eau constituait une modalité de la mondialisation qui devait être encouragée. Il a indiqué qu'il existait une véritable « école de l'eau » française, faisant montre d'un grand savoir-faire en matière d'exploitation de cette ressource naturelle, qui était malheureusement insuffisamment valorisée et exportée en dehors de nos frontières. Après avoir rappelé que les agences de l'eau avaient, notamment, pour mission de contribuer au développement international des activités françaises dans le domaine de l'exploitation de l'eau en finançant à cette fin des associations, il a fait savoir qu'il soutiendrait sans réserve toute disposition favorisant la diffusion internationale du savoir-faire français par les collectivités locales et, qu'en conséquence, les dispositions de l'article premier de la proposition de loi avaient sa faveur.

Abordant ensuite la possibilité pour les agences de l'eau de mener directement des actions de coopération internationale dans le domaine de l'eau avec le concours de leurs propres agents, prévue par l'article 2 de la proposition, il a fait observer que les agences de l'eau étant des établissements publics de l'État soumis à sa tutelle, ces dispositions pouvaient les placer dans une situation délicate en raison des contradictions susceptibles d'apparaître entre les éventuelles directives émanant de ladite tutelle et leur propre volonté d'agir. C'est pourquoi, il a jugé que s'il est envisageable que les agences de l'eau apportent une contribution financière, elles ne sauraient exercer des responsabilités opérationnelles aux termes d'un conventionnement de coopération décentralisée, et il a fait part de son intention de voter contre l'adoption de cet article.

Après avoir fait état de son expérience en matière de coopération décentralisée dans le domaine de l'eau avec une commune mauritanienne, M. Guy Geoffroy a considéré que les dispositions de la proposition de loi lui semblaient équilibrées puisqu'elles garantissaient l'information de l'usager quant aux moyens financiers consacrés à ces actions, tout en permettant à l'ensemble des acteurs de l'exploitation et de l'alimentation en eau, qu'il s'agisse des collectivités territoriales ou des agences de l'eau, de mettre en œuvre de façon efficace et contrôlée leur volonté d'agir en faveur de la solidarité internationale.

Observant que l'accès aux ressources d'eau potable représentait un enjeu humanitaire fondamental pour les populations concernées, M. Jérôme Lambert a, à son tour, souligné la grande maîtrise technique des entreprises et des collectivités territoriales françaises en matière d'assainissement et d'exploitation de l'eau et émis le souhait que ce savoir-faire soit davantage valorisé afin de renforcer sa contribution à la croissance économique.

M. Robert Pandraud a observé que les initiatives menées par les collectivités territoriales en matière de coopération internationale dans le domaine de l'eau semblaient d'autant plus couronnées de succès que l'administration des affaires étrangères se gardait d'intervenir. Abordant le dispositif proposé par la proposition de loi, il l'a jugé satisfaisant puisque le contrôle des décisions des agences de l'eau était assuré par les comités de bassin et que l'information de l'usager sur les montants financiers consacrés à la coopération internationale était garantie.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

-  pour assurer la meilleure utilisation des ressources affectées à la coopération internationale, les collectivités territoriales préfèrent établir un contact direct avec les collectivités étrangères ou avec des organisations non gouvernementales, plutôt que de négocier avec les gouvernements étrangers ;

-  il est nécessaire de donner aux actions menées actuellement par les collectivités une base légale, que la première lecture du projet de loi sur l'eau lors de la précédente législature avait fait espérer et dont le raz de marée en Asie du sud-est a fait apparaître l'urgence ;

-  si les missions initiales des agences de l'eau ne comprennent pas l'action internationale, il est cependant possible d'étendre leur domaine de compétence sans craindre de dérive ou l'absence de coordination avec les collectivités territoriales, dans la mesure où l'action internationale des agences de l'eau sera contrôlée par leur comité de bassin, qui comprend des représentants des usagers et des collectivités territoriales.

La Commission est ensuite passée à l'examen des articles.

Article premier (art. L. 1115-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Financement des actions de coopération décentralisée dans les domaines de l'eau et de l'assainissement :

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 2 (art. L. 213-6 du code de l'environnement) : Actions de coopération internationale des agences de l'eau dans les domaines de l'eau et de l'assainissement :

La Commission a adopté cet article sans modification, M. Christian Decocq ayant rappelé son opposition à cette disposition.

La Commission a ensuite adopté l'ensemble de la proposition de loi sans modification.

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