DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES
ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

COMPTE RENDU N° 17

Mardi 2 avril 2003
(Séance de 17 heures)

Présidence de Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente

SOMMAIRE

 

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- Audition de Mme Martine Clément, PDG de la société SGI, M. Dominique Tellier, directeur des relations sociales du MEDEF et Mme Catherine Martin, directrice adjointe des relations sociales du MEDEF

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La Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a entendu Mme Martine Clément, PDG de la société SGI, M. Dominique Tellier, directeur des relations sociales du MEDEF et Mme Catherine Martin, directrice adjointe des relations sociales du MEDEF.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : La Délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale a entamé des auditions sur le thème de l'application de la "loi Génisson" qui traite de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans les entreprises. A mi-parcours de l'élaboration des rapports de situation comparée, nous souhaitions rencontrer les syndicats, le MEDEF et tous ceux qui travaillent à l'égalité professionnelle pour voir le suivi de cette loi et déterminer s'il conviendra de l'améliorer ou d'en corriger certains aspects. Un travail a déjà été accompli dans les entreprises en matière d'égalité professionnelle. La "loi Génisson" devrait le faciliter.

Nous accueillons aujourd'hui Mme Martine Clément, PDG de la société SGI, M. Dominique Tellier, directeur des relations sociales du MEDEF et Mme Catherine Martin, directrice adjointe des relations sociales du MEDEF.

Nous souhaiterions que, dans un premier temps, vous nous disiez quelle appréciation les employeurs portent sur l'obligation de présenter un rapport de situation comparée et sur leur nouvelle responsabilité dans la négociation. J'aurais notamment souhaité savoir quel intérêt elle suscite auprès des employeurs et dans les entreprises.

Par ailleurs, peut-on mesurer l'ampleur du mouvement et connaître le nombre de négociations déjà entamées dans les entreprises et au niveau des branches. Quels problèmes se posent dans l'approche et l'organisation de cette négociation ? C'est au moment où nous faisons ce suivi de la loi que nous pouvons aider les entreprises et l'ensemble des partenaires qui participent à ces négociations.

Dernier point : la notion d'égalité professionnelle va au-delà de la seule égalité salariale. Elle recouvre tous les champs de la vie professionnelle : les conditions générales de l'emploi, la durée, l'organisation du travail, la formation, les promotions, les carrières et les conditions de travail.

Voilà le sens de cette audition. Nous serons extrêmement attentifs à ce que vous allez nous dire, car cela ne peut que nous aider à faire un bon suivi de la loi et à améliorer ce qui doit éventuellement l'être.

Mme Martine Clément : Parmi les sujets évoqués lors de la refondation sociale du MEDEF, il y avait, dès l'origine, un sujet sur l'égalité professionnelle hommes-femmes. Pour résumer rapidement, les conversations ont été suspendues un certain temps. Elles ont repris récemment avec, notamment, les négociations relatives à la formation et aux retraites.

Le président du MEDEF a souhaité relancer véritablement la question de l'égalité professionnelle hommes-femmes. Nous avions pris une position générale sur ce sujet au conseil exécutif du MEDEF mi-2002.

Nous initions actuellement des contacts avec les syndicats, notamment ceux qui avaient lancé le sujet. C'est intéressant, car c'est un des rares sujets et même le seul qui avait été demandé par les syndicats représentant le personnel, et non par le côté patronal. Nous avons le souci de les entendre et de savoir ce qu'ils souhaitent. Nous pensons nous organiser pour lancer le sujet en faisant une première réunion, un peu générale, au cours du mois de juin et en commençant véritablement à travailler à partir de la rentrée.

Nous sommes plutôt sur la lancée d'une conversation, et peut-être d'une négociation, entre partenaires sociaux sur le sujet de l'égalité professionnelle. Nous n'ignorons pas que des lois diverses sont intervenues. Je n'ai qu'une connaissance relative de la "loi Génisson". Sans trahir des secrets extraordinaires, les syndicalistes que nous avons pu voir jusqu'ici n'étaient pas particulièrement "transportés" par celle-ci, qui n'était pas l'axe principal de leurs préoccupations.

Notre démarche actuelle consiste donc plutôt à penser à un aspect éventuellement réglementaire, mais encore et surtout connaître les solutions intéressantes qui existent. Elles sont d'un côté pragmatiques et d'un autre côté consistent véritablement en l'élaboration entre partenaires sociaux de solutions inspirées de l'étranger ou de bons exemples français. Je crois que, des deux côtés, il est possible d'agir.

Voilà l'axe du travail que nous sommes en train d'initier.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Une loi a été votée en mai 2001. Celle-ci a été suivie de décrets d'application publiés en septembre et novembre 2001. Ce qui m'intrigue dans votre présentation, c'est qu'à partir du moment où une loi a été votée et que les décrets d'application sont parus, normalement, la discussion ne porte plus sur des aspects réglementaires ou sur des comparaisons avec les autres pays européens, mais sur une application de la loi.

J'aurais souhaité savoir comment le MEDEF ressentait la "loi Génisson". Nous avons dépassé le stade de la discussion, de la conversation et du dialogue.

Parmi les contacts que j'ai dans mon département, y compris avec le MEDEF, l'heure n'est plus à une démarche réglementaire, mais à réfléchir à l'application de la loi.

Mme Chantal Brunel : Aujourd'hui les syndicats, sauf exception, ne nous parlent pas de la "loi Génisson". Ce n'est pas une de leurs préoccupations. Nous parlons de nombreux sujets, notamment des 35 heures, mais pas de la "loi Génisson".

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : J'ai, dans ma circonscription, la chance d'avoir une entreprise qui ne peut pas être qualifiée de petite entreprise : il s'agit de PSA qui regroupe sur le site de Tremery près de 4 000 emplois et sur le site de Metz près de 2 500 emplois. Je peux vous assurer que c'est la question à l'ordre du jour.

Mme Martine Clément :  J'ai dans mon entreprise, dans la société principale, un peu plus de 300 personnes sur deux sites. Je viens d'en créer une autre à la fin de l'année dernière qui représente une vingtaine de personnes sur deux autres sites. Nous n'y parlons jamais de la "loi Génisson", ni d'aucun sujet du même genre.

Mme Muguette Jacquaint : Les différentes organisations syndicales que nous avons auditionnées nous ont exposé qu'un effort avait été fait pour poser de nouveau dans les négociations, la question de l'égalité professionnelle.

Il y a une loi et nul n'est censé ignorer la loi. Peut-être que l'on ne la fait pas assez connaître, mais la question des inégalités demeure. Je ne prendrai qu'un exemple : les négociations engagées pour la retraite et pour l'amélioration du taux d'activité. Je pense que les femmes peuvent être un élément important pour l'amélioration de ce taux d'activité si l'on arrive à combler le fossé, qui se creuse actuellement, en matière d'inégalités.

Mme Martine Clément : Notre sentiment est que ce n'est pas par un travail législatif que nous arriverons à mieux résoudre les problèmes portant sur les différences de salaires, les promotions, etc. La voie, que nous avons lancée dans la refondation sociale, est bien d'avoir une négociation entre partenaires sociaux plus qu'une voie législative.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : En ce qui concerne la parité dans la vie politique, si nous n'avions pas fait preuve, à un moment donné, d'une certaine volonté nous n'aurions pas, aujourd'hui, la parité dans les conseils municipaux.

En ce qui concerne l'égalité professionnelle, une loi a été votée pour essayer d'avancer sur ce sujet. Je crois que ce n'est pas aider les femmes des entreprises que de dire qu'il y a une loi, mais qu'elle n'est pas nécessaire pour progresser. Très souvent, malheureusement, nous avons été obligés de passer par la loi.

Mme Catherine Martin : Je vais vous donner quelques éléments. La "loi Génisson" vient après les "lois Roudy". Quand nous avons été auditionnés, au moment des travaux préparatoires de la "loi Génisson", nous avons marqué notre opposition à ce texte en expliquant que ce n'était pas en créant des normes nouvelles et des contraintes supplémentaires pour les entreprises que cela ferait avancer la situation.

Sur le constat, nous sommes d'accord pour dire que l'emploi des femmes est un enjeu stratégique et ce d'autant plus qu'à partir de 2006 nous aurons un retournement démographique. Le taux d'emploi des femmes, qui est déjà élevé, devra l'être encore plus. Par définition, si nous voulons attirer des femmes dans les entreprises, il faut qu'elles soient traitées dans de bonnes conditions. Sur le principe, nous sommes d'accord. Cependant, la mise en oeuvre de la "loi Génisson" crée des contraintes supplémentaires, un rapport de situation comparée et une obligation de négociation. Son mode d'emploi publié par le service du droit des femmes vient d'être diffusé officiellement.

Pour le moment, il est bien que des grandes entreprises se préoccupent de son application. Mais qu'il n'y ait pas encore eu de négociations sur le sujet n'est pas tellement étonnant. Comme Mme Chantal Brunel vient de le dire, il y avait d'autres sujets de négociation, notamment les 35 heures. Quant aux négociations de branche, dans le cadre de la refondation, ce dossier est mis à l'ordre du jour depuis le 3 février 2000. Il est vrai que nous avons tardé à le faire, mais entre-temps nous avons ouvert le dossier de l'assurance chômage, de la formation professionnelle, de la santé au travail et des retraites. Certains sujets ont été traités avant celui-ci, d'autant plus -et il faut le signaler- que ce n'est pas une demande récurrente des organisations syndicales, puisque nous avons signé un premier accord de méthode sur le sujet au niveau interprofessionnel en 1989. Celui-ci renvoyait à des négociations de branche. Cependant il n'y en a pratiquement pas eu, car il n'y avait pas de demande des organisations syndicales.

Je pense qu'il est important que les hommes et les femmes politiques s'emparent de ce thème de l'égalité professionnelle, car il est clair qu'il s'agit d'un sujet majeur pour l'avenir de notre société et des entreprises.

Il est clair aussi que l'on crée toujours de nouvelles contraintes pour les entreprises et je ne crois pas que l'Etat employeur soit tellement admirable dans ce domaine. Quant à l'Education nationale qui, me semble-t-il, est à l'origine des nombreuses difficultés que rencontrent les femmes, elle ne fait rien concernant l'orientation professionnelle des jeunes filles, puisque nous voyons que, dans un certain nombre de métiers porteurs, des filières scientifiques notamment, il n'y a pas de filles.

Il est vrai qu'il existe dans les entreprises un problème d'inégalité de rémunération. Selon une réponse toute récente de Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, à la question de Mme Martine Aurillac : "L'écart salarial demeure de 11 % pour l'ensemble des salariés du secteur privé et des agents publics à temps complet et à temps partiel. Cet écart s'établit à 7 % si l'on considère uniquement celles et ceux qui travaillent à temps complet".

C'est vrai qu'il serait intéressant de faire un bilan de la "loi Génisson", mais c'est un peu tôt.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Dans mon introduction, j'ai dit que nous étions au milieu d'un processus. La raison d'être de ces auditions est de voir les difficultés que les uns et les autres rencontrent au regard de la "loi Génisson" et qui peuvent être palliées par certaines améliorations de la loi. Je n'ai jamais parlé de bilan. Il n'est pas possible d'en faire un actuellement, car, pour le moment, les rapports de situation comparée sont en train d'être élaborés. Mais, l'année prochaine, il y aura un bilan, puisque, dans la loi, il y avait l'obligation d'un suivi de la loi.

Mme Catherine Martin : Notre optique est que la solution législative n'est pas la bonne. Il existe une autre voie que nous explorons avec les organisations syndicales.

M. Dominique Tellier : Pour vous, parler d'égalité professionnelle, c'est parler de la "loi Génisson". Or, cette loi existe. Mais, c'est une source d'ennui pour les entreprises. Prenez le décret sur le rapport de situation comparée : il y a dix fois trop d'indicateurs.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Il y a quatre principaux indicateurs.

M. Dominique Tellier : Il y a de nombreuses subdivisions.

Dans une entreprise quand on veut inciter les personnes à aborder ce problème qui, pour nous, est capital, et même, égoïstement, si l'on veut le poser indépendamment de toute question morale -car nous aurons un problème de main-d'œuvre d'ici 2006-, il n'est pas possible d'inciter les personnes à avoir un comportement positif sur un sujet quand celui-ci n'est vu par eux que sous son angle d'embêtement. Or, on a accumulé par strates une série "d'enquiquinements".

Regardez le temps qu'il faut pour établir le bilan. Quelques grandes entreprises -j'en conviens, car elles sont venues me le dire- ont réussi à découvrir des dysfonctionnements grâce à ce bilan mais -pardonnez-moi- elles auraient dû les découvrir d'elles-mêmes autrement. On n'a pas besoin de la loi quand on est gestionnaire pour voir les dysfonctionnements dans les entreprises.

Quand vous passez un temps fou dans les contraintes administratives pour établir ce bilan, vous vous dites que si c'est ainsi que l'on traite de l'égalité professionnelle, vous préférez ne pas en parler. De plus, les syndicats ont d'autres préoccupations.

Egalité professionnelle et "loi Génisson", ce n'est pas ainsi qu'il faut poser le problème.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Si j'ai bien compris, la loi votée est inapplicable.

Mme Chantal Brunel : Je ne sais pas ce qu'est un travail égal dans une entreprise sauf pour un travail posté. En principe, dans une entreprise, il est rare que deux personnes fassent le même travail, sauf dans les travaux postés. A travail égal salaire égal, nous sommes d'accord : dans un travail posté.

Nous voulons tous que les femmes travaillent dans les entreprises. Mais, il ne faut pas protéger trop le statut de la femme. J'ai dit un jour à M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, que j'étais contre tout allongement du congé de maternité. Sinon, ne nous étonnons pas que l'on ferme la porte aux femmes. L'allongement du congé de maternité pose d'énormes problèmes dans les petites entreprises. Il faut avoir le courage de le dire. C'est possible chez Renault et dans les grands groupes. Dans les petites entreprises, si une jeune femme part en congé de maternité, il faut la remplacer par un CDD. Voilà la réalité.

Un progrès qui pourrait être réalisé serait d'obliger les grosses entreprises cotées à indiquer le nombre de femmes cadres, le nombre de femmes cadres supérieurs et les crédits de formation utilisés pour les femmes et les hommes.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Les autres catégories de personnel existent aussi.

Mme Martine Clément : Le problème existe surtout pour les cadres.

Mme Chantal Brunel : Le problème de l'égalité des femmes est surtout le problème des cadres.

Mme Muguette Jacquaint : Il y a des problèmes dans les entreprises concernant l'application de l'égalité professionnelle. Au moment même où l'on va ouvrir les négociations, quand j'entends ces interventions, je me demande comment les organisations syndicales vont réussir à les mener.

Mme Chantal Brunel : Plus vous protégerez le statut des femmes...

Mme Muguette Jacquaint : Jusqu'à maintenant elles n'ont pas été très protégées.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Ce n'est pas une question de protection. Il n'est pas question de donner une place privilégiée aux femmes, mais il faut qu'il y ait une égalité de fonctionnement dans l'entreprise. Je crois que, véritablement, dans le rapport de situation comparée, il n'est pas besoin de faire des calculs inimaginables pour mettre en place les quatre indicateurs principaux.

Par ailleurs, toutes les femmes travaillant dans l'entreprise, et pas seulement les cadres, ont droit à une formation pour améliorer leur situation.

Mme Martine Clément : Ne faisons pas de misérabilisme. Là où la question se pose le plus c'est au sujet des promotions des femmes à un certain moment : celui où elles peuvent prendre des responsabilités plus importantes.

Aujourd'hui, nous nous trouvons devant un problème démographique réel de femmes qui entrent assez tard dans la vie familiale en raison de leur vie professionnelle. Elles essaient d'abord de développer une carrière professionnelle. En moyenne, les femmes ont des enfants vers 29-30 ans en France et dans le reste de l'Europe, particulièrement en Europe du sud. Cela pose des problèmes démographiques importants.

En général, les jeunes filles ou les jeunes hommes sont au même niveau dans leurs études, notamment jusqu'à la 3e. Nous sommes tous d'accord pour dire que les filles sont au moins aussi capables que les garçons, sinon meilleures.

Mais, l'orientation des jeunes filles est très vite tournée vers des métiers plus fonctionnels que hiérarchiques et très peu vers des métiers scientifiques, notamment en France. C'est avéré : on décourage ou plutôt on n'encourage pas les jeunes filles à aller vers des métiers plus techniques ou plus scientifiques. Un domaine est particulièrement étonnant : celui de l'informatique. Il est invraisemblable de voir le développement fantastique de l'informatique aujourd'hui, et notamment celui de conseils, pour lesquels les femmes ont d'excellentes qualités dont celles de négociatrice, et de les voir absentes de ces métiers.

Les femmes vont se saisir progressivement des métiers dans lesquels elles vont exercer de plus en plus d'autorité, que ce soit à un niveau ouvrier pour devenir chef d'équipe ou responsable de contrôle, à un niveau plus élevé de maîtrise intermédiaire ou à celui de cadre. Si Mme Chantal Brunel en a parlé, c'est parce que c'est là que la résistance est la plus grande. Plus les femmes progressent, plus elles viennent en concurrence avec les hommes pour les postes les plus intéressants dans l'entreprise.

Nous avons auditionné des sociétés comme Schlumberger, qui sont implantées dans le monde entier, et qui, après des efforts d'une quinzaine d'année, arrivent à avoir un très petit nombre de femmes qu'elles ont réussi à promouvoir au niveau de responsables ou éventuellement de cadres. Elles ont une politique extrêmement ouverte qui consiste, quand les cadres sont à l'étranger, puisque Schlumberger est une entreprise internationale, à s'allier avec d'autres sociétés comme Danone pour, lorsqu'il y a un couple et que la société souhaite que l'un des éléments du couple évolue dans sa carrière en allant dans un autre pays, trouver une solution pour l'autre élément du couple.

C'est une grande évolution, une question de comportement, d'entente, un côté positif du travail entre entreprises. Mais, c'est très compliqué. Au total, ces entreprises emploient environ 14 % de femmes. La Poste, France Télécom et d'autres ont des exemples du même genre. On peut y voir de bonnes pratiques, mais aussi tout le long chemin à parcourir.

La situation est différente pour des fédérations comme celles de la grande distribution, mais surtout de la petite distribution. Je prends l'exemple du boucher et du boulanger. Nous sommes aujourd'hui dans une situation telle en France que nous nous demandons comment la succession se fera dans les fonds de commerce et si les femmes ne vont pas devenir Mme la boulangère et Mme la bouchère, c'est-à-dire pas celle qui tient la caisse mais celle qui fait le pain et celle qui coupe la viande. Ce ne pas si simple à résoudre, car il faut faire accepter que ce soit la femme qui le fasse, qu'elle ait le désir de le faire et que le client ait le désir de venir dans un fonds de commerce tenu par une femme artisan.

Mme Claude Greff : Cela me fait très plaisir de vous entendre et me permet de constater que nous ne vivons pas tous, les uns et les autres, dans le même monde. J'ai une perception de la place de la femme totalement différente de la vôtre, même si je pense que sur certains points vous pouvez avoir raison.

Je crois qu'il y a une autre façon d'envisager les choses et que cela se situe plus dans l'adaptation des entreprises et des organismes que dans les mentalités. Je suis ravie de voir une boulangère qui fait le pain et je serais ravie de voir une bouchère qui coupe la viande.

En revanche, donne-t-on les moyens à une boulangère d'assumer sa vie de femme, c'est-à-dire de mère de famille ? Quand vous faites référence à ces entreprises et aux femmes cadres, vous parlez des études supérieures. Je suis convaincue que les femmes sont tout à fait capables d'en faire, mais parfois elles s'arrêtent parce que les entreprises ne leur donnent pas les moyens de vivre leur vie de femme. Au travers des propos de certains, on se demande si une femme doit enfanter ou pas. Il faut garder à l'esprit qu'une femme est une femme et qu'elle doit d'abord rester une femme tout en étant à égalité dans une entreprise. C'est vers ce travail que nous devons aller et non pas faire un état des lieux négatif. Il faut trouver une solution et ne pas dire qu'il ne faut plus que les femmes enfantent.

Mme Martine Clément : Je ne vous ai pas dit cela. Je vous ai dit qu'elles n'enfantaient pas. Je constate ce qui existe depuis 20 ou 30 ans.

Mme Claude Greff : J'aimerais mieux entendre au travers de vos exposés des propos plus positifs d'adaptation des entreprises.

Mme Chantal Brunel : J'aimerais faire une remarque : quel est le problème de la femme cadre dans une entreprise ? Celui de sa promotion.

Aujourd'hui, dans les grandes entreprises, qui sont toutes internationales, ce qui freine les femmes, c'est que souvent on leur demande d'aller à l'étranger. C'est la formation et l'expérience étrangère qui permettent d'accéder à des fonctions dirigeantes. Soyons très clairs : la stricte réalité est que la femme a beaucoup de difficultés à avoir une expérience étrangère. Il est vrai qu'aujourd'hui la parité n'existe pas dans les entreprises. Un effort important est à faire. Le frein vient souvent du fait que la femme refuse de partir à l'étranger. Il y a un effort d'accompagnement à faire pour les femmes, car de nombreuses entreprises demandent aux personnes, pour accéder à des fonctions plus élevées, d'avoir une expérience internationale.

Dans les fonctions d'exécution ou pour un travail posté, objectivement, je pense qu'il n'y a pas, dans la réalité, énormément de problèmes pour les femmes, de parité ou de salaire égal pour un travail égal. Le problème de la femme se pose dès qu'elle veut accéder à des responsabilités.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Je souhaitais aujourd'hui avec l'audition de représentants du MEDEF déterminer quelles étaient les difficultés rencontrées par les chefs d'entreprise pour l'application de la "loi Génisson".

Quelles qu'aient été nos positions au moment du vote des lois de 1972, 1983 et 2001, nous avons aujourd'hui l'obligation de les appliquer. Je souhaiterais donc connaître à tous les niveaux les difficultés qui se posent pour leur application.

Mme Martine Clément : La "loi Génisson" n'est pas entrée dans les faits. Un chef d'entreprise aujourd'hui n'a pas connaissance de cette loi et ne l'applique pas.

Il existe un outil qui n'est pas mauvais et que nous possédons déjà : le bilan social. Dans ce bilan social figurent de nombreux éléments de comparaison entre la situation des hommes et des femmes dans une entreprise : des comparaisons de salaires par catégories, par niveaux, par groupements de niveaux. Ils sont sans intérêt. Pour le présenter moi-même depuis des années à mon personnel, je peux vous dire que personne ne le regarde, peut-être parce que chez nous les différences sont peu importantes et pratiquement inexistantes. Il en est ainsi ailleurs également. Ce n'est pas un sujet qui mobilise.

Cependant, nous savons qu'il existe des disparités très importantes et qu'il faut les reprendre. Ce n'est pas en faisant des tableaux que nous les modifierons, mais en essayant de trouver des formules pour qu'au moment de la promotion les employeurs aient le désir de promouvoir des femmes ou pensent à le faire, ce qui -c'est notre conviction- n'est pas le cas actuellement. Ce n'est pas par un décret que cela se réglera. C'est une culture qu'il faut faire venir.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Pourquoi depuis 1983 n'y a-t-il pas eu de progrès ?

M. Dominique Tellier : Vous voulez demander aux entreprises de régler des problèmes que la société ne sait pas régler elle-même.

Mme Martine Clément : Je parlais de promotion à l'instant. Il existe des formules dans certaines sociétés étrangères, où si une femme est placée à un certain niveau de l'organigramme, elle peut évoquer la situation d'une autre femme qui estime qu'elle aurait dû bénéficier d'une promotion et ne l'a pas eue. C'est assez difficile à manipuler. Cela se fait et fonctionne.

Certaines sociétés arrivent à bien manipuler le système pour que finalement cette femme ait sa promotion, si l'on estime qu'elle la méritait, et que son chef n'en soit pas fâché. C'est ce qui est difficile. Ce n'est pas une question de lois, ni de règlements, mais de comportements, et de la subtilité dont on aura fait preuve pour cette promotion.

Mme Claude Greff : Pouvez-vous me dire pourquoi le chef d'entreprise qui a besoin de faire fonctionner son entreprise au mieux, qui voit que les compétences de Mme X sont aussi grandes que celles de M. Y, créerait un obstacle pour que Mme X n'obtienne pas ce poste ? Qu'est-ce que qui va l'ennuyer ? A mon avis, en tant que chef d'entreprise, il n'aura pas envie que Mme X soit absente pendant neuf mois, plus trois mois de congés de maternité -et j'espère un peu plus d'ailleurs-, donc il favorisera M. Y car il n'est pas sûr de Mme X, au regard de son existence dans l'entreprise et non de ses capacités. Actuellement, si l'entreprise donne les moyens à Mme X d'assumer son rôle de femme, donc de mère inévitablement, et si elle est aussi capable que M. Y, il aura à cœur de faire travailler Mme X. Il n'y aura plus de problèmes.

Mme Martine Clément : Au MEDEF, l'essentiel des cadres sont des femmes et nombre d'entre elles ont des enfants.

L'une des difficultés du sujet que nous abordons est que l'on a toujours tendance à aller de l'égalité professionnelle vers la conciliation entre la vie personnelle et la vie en entreprise.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Ce n'est pas à ce niveau que je veux me placer, mais à celui de l'entreprise et de l'égalité.

Je souhaiterais que nous ne nous placions pas au niveau du chef d'entreprise quand nous sommes des parlementaires, mais que nous restions des parlementaires. Les personnes que je rencontre dans mon travail de parlementaire sont, certes, des chefs d'entreprise, mais sont aussi et surtout des personnes confrontées dans leurs entreprises à ce problème.

Dans ma circonscription, on ne parle pas de la "loi Génisson", ou de la loi de mai 2001 ou des indicateurs, mais les chefs d'entreprise, notamment, disent qu'au moment des négociations les personnes parlent d'égalité professionnelle.

M. Dominique Tellier : Nous avons l'impression en vous écoutant que vous considérez comme possible de régler à peu près tout par la loi et, nous, nous considérons que ce n'est pas forcément le meilleur instrument.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Dominique Tellier : C'est ainsi que je l'ai perçu. Nous considérons que le meilleur instrument est certainement la négociation collective, car les acteurs s'approprient les instruments et en font le meilleur usage.

Nous parlons d'un texte qui a presque deux ans d'existence. Les personnes ne se sont pas appropriées ce texte. La loi, tout le monde l'applique, les chefs d'entreprise comme les autres. Elle génère des contraintes que l'on applique formellement et, comme on l'applique formellement, elle n'a pas, sans doute, les effets qu'escomptaient ses auteurs. Je n'ai pas de remontées et mes collaborateurs non plus. Les gens rédigent leur rapport, qui n'intéresse personne dans l'entreprise, puisque ce n'est pas ainsi que le problème est perçu. La "loi Génisson" fera comme la "loi Roudy" : elle tombera au fond d'une oubliette.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Je ne le pense pas.

M. Dominique Tellier : Personnellement j'en suis à peu près convaincu.

De plus, elle utilise de mauvaises méthodes, car celles-ci ne jouent que sur la contrainte. On crée un rapport ou des indicateurs qui ne sont pas strictement les mêmes que ceux du bilan social. Vous avez fait votre bilan social et vous devez demander à votre comptable et à un agent administratif de refaire des calculs différents. On est heureux : dans l'entreprise on n'a que cela à faire.

On nous dit que nous devons négocier sur l'égalité professionnelle. C'est bien. Nous en avons déjà parlé au comité d'entreprise, puisque c'est une obligation. J'aurais trouvé beaucoup plus intelligent qu'à chaque fois que l'on négocie dans l'entreprise et dans la branche -c'est une orientation que nous prendrons-, on dise que le problème de l'égalité professionnelle doit être présent dans la négociation quel que soit son thème.

La loi oblige à négocier. Mais, l'obligation de négocier est antinomique avec la négociation. Quand j'ai envie de négocier avec les organisations syndicales, nous nous mettons d'accord sur le thème sur lequel nous voulons négocier, parce qu'elles ont des revendications et nous des demandes à satisfaire. Nous convenons d'un sujet.

Le législateur ne se prive pas, au-delà d'imposer la contrainte de négocier, d'indiquer, pratiquement, le résultat auquel doit aboutir la négociation. Négocier sous la contrainte n'est plus de la négociation. Ce n'est pas pour nous, patronat, notre conception de la négociation collective.

Nous discuterons des propositions sous la présidence de Mme Martine Clément avec les organisations syndicales et, quand nous aurons terminé, je viendrai vous en rendre compte.

Mme Danielle Bousquet : La "loi Génisson" est un texte qui, comme toutes les lois, a force de loi. Comment pouvez-vous dire que cette loi n'est pas recevable ?

M. Dominique Tellier : Elle n'est pas efficace.

Mme Danielle Bousquet : Qu'elle soit relativement récente et qu'elle ne soit pas entrée dans les mœurs, je peux l'admettre. C'est logique. Vous défendez avec une certaine véhémence votre opposition au fait qu'elle puisse avoir force de loi...

Mme Martine Clément : Cela ne nous intéresse pas.

Mme Danielle Bousquet : Nous avons vu des organisations syndicales qui ont recruté des chargés de mission pour l'égalité professionnelle, car elles ont pensé que cette négociation était un enjeu. Comment cela va-t-il se passer ? J'aimerais avoir votre appréciation, au-delà du fait que nous puissions ne pas être d'accord.

Mme Catherine Martin : Nous avons été hostiles à la "loi Roudy" pour des raisons que nous avons expliquées et à la "loi Génisson", parce que nous considérons que ce n'est pas au législateur de régler tous les problèmes des entreprises.

J'aimerais préciser un point. M. Dominique Tellier disait que nous n'avions pas de remontées et de demandes des entreprises. En effet, le MEDEF ne regroupant pas les entreprises en direct, si les entreprises ont un problème particulier, ce n'est pas à nous qu'elles s'adressent. Cependant, nous avons, par l'intermédiaire de notre site Extranet, dédié à nos adhérents, c'est-à-dire aux branches professionnelles et aux MEDEF territoriaux, donné toute l'information juridique nécessaire à la mise en oeuvre de ce texte, parce que, par définition, au MEDEF quand une loi est votée et qu'elle doit s'appliquer, nous donnons aux entreprises via leurs fédérations les moyens de mettre ces textes en oeuvre.

Nous n'avons pas dit de ne pas l'appliquer. Nous avons fait connaître notre position pendant les travaux parlementaires, comme nous en avons l'habitude, puisque nos adhérents, qui représentent ces entreprises, nous demandent d'intervenir auprès des parlementaires pour donner la position des entreprises. Vous devez faire partie des parlementaires qui ont des contacts avec les entreprises. Une fois que la loi est votée, la souveraineté nationale l'ayant décidé, nous n'avons jamais dit que nous ne voulions pas l'appliquer. Nous avons donné aux personnes chargées de communiquer auprès des entreprises les moyens juridiques d'appliquer la loi. C'est une chose. Pour le reste, nous ne savons pas exactement ce qui se passe sur le terrain. Il se trouve qu'il y a peu de temps le Conseil économique et social de Lorraine a organisé un colloque sur l'égalité professionnelle.

On m'a demandé d'y participer parce que le MEDEF local ne savait pas quoi dire. En effet, quand vous rencontrez les chefs d'entreprise dans votre circonscription, ils sont toujours d'accord avec ce que leur proposent leurs parlementaires, mais après, quand ils viennent à Paris, ils ne tiennent pas le même langage.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Les chefs d'entreprise de ma circonscription sont comme les autres chefs d'entreprise de France. Ils ont des difficultés et nous les évoquons ensemble.

L'attitude de PSA en matière d'égalité professionnelle, que ce soit à Tremery ou à Metz, n'est pas seulement due au fait que ce soit un grand groupe, puisque d'autres entreprises, plus petites, ont intégré un système, que l'on a appelé le "système Défi", où l'on travaille sur l'égalité hommes-femmes. Les unes et les autres évoquent la loi de mai 2001.

M. Dominique Tellier : Nous aussi. Mais, pour nous, la loi de mai 2001 n'est pas une fin en soi.

Nous avons une vraie préoccupation : les évolutions démographiques. Il est clair qu'il faut rendre les entreprises attractives pour les femmes. Pour cela la parité est, pour nous, un élément fondamental, comme également les évolutions de carrière, la formation, etc. Nous n'avons pas besoin de la "loi Génisson" pour le faire. Nous nous y prendrons différemment.

Nous n'avons rien contre ou pour la "loi Génisson". C'est une charge qui ennuie les entreprises. Nous ne pensons pas que ce soit un facteur de progrès pour la parité. De plus, comme les personnes ne se la sont pas appropriées, nous n'avons pas de remontées pour vous dire si cela bloque sur tel élément du rapport ou sur tel aspect de la négociation. C'est trop tôt.

Mme Chantal Brunel : Il faut voir qu'une petite entreprise fonctionne si le salarié est heureux d'être dans l'entreprise ou si le chef d'entreprise est heureux d'avoir le salarié. Il est important que le salarié soit content d'être dans l'entreprise. Autrement, cela ne fonctionne pas. Il n'est pas vrai qu'y a tellement de situations injustes. A une époque où l'on veut alléger les formulaires administratifs et où l'on veut simplifier, il ne faut pas ajouter des lois à appliquer aux entreprises. Quand le salarié a une difficulté, le chef d'entreprise fera tout pour que son statut soit compatible. Dans les petites entreprises il y a beaucoup d'humanité.

Mme Claude Greff : Pour qu'une entreprise marche bien et qu'un chef d'entreprise soit content, il voudra un salarié heureux. Il mettra donc la loi en application sans dire qu'il le fait.

M. Dominique Tellier : Il fera mieux, s'il trouve une autre méthode, plus intelligente, dans son entreprise. La loi est générale et l'entreprise c'est autant de cas particuliers que d'entreprises.

Mme Martine Clément : Pour reprendre votre exemple de la femme que l'on ne va peut-être pas promouvoir, car c'est une femme et qu'elle est susceptible d'enfanter, nous glissons de nouveau vers le sujet de l'entreprise et de la vie familiale. Tout est dans la façon dont on organise les possibilités d'absence de la femme et sa possibilité de travail existante.

Il est possible d'agir dans ces domaines pour arriver à lui garder sa situation. Plus la femme est absente longtemps, plus il est difficile pour elle de reprendre un poste, car les situations évoluent. Le groupe de travail que j'ai présidé traitait moins de l'égalité que de la vie familiale. Nous avons beaucoup cherché -et ce n'était qu'une amorce- ce que nous pouvions faire pour aider à ce que la femme garde le contact. Il peut s'agir d'un homme de temps en temps, mais il faut dire que, dans 98 % des cas, il s'agit de la femme. Il faudrait donc que cette dernière garde le contact avec l'entreprise d'une manière ou d'une autre, puisse reprendre son activité avec des possibilités de garde ou de formation avant de se retrouver opérationnelle. Cela s'organise sur le terrain.

Lorsque l'on fait de la sur-protection, on a exactement l'inverse du but poursuivi. C'est le cas du temps partiel qui s'est retourné contre les femmes, car il a été très difficile pour celles qui avaient un travail à temps partiel d'avoir des responsabilités et d'évoluer dans ces responsabilités.

Mme Muguette Jacquaint : Nous n'allons pas engager le débat sur le temps partiel, mais cette forme de travail a été organisée pour attirer les femmes dans la vie active. Ce n'était pas pour les sur-protéger. Que l'on ne dise pas aujourd'hui que les femmes qui travaillent à temps partiel, car elles ne trouvent rien d'autre, ou que les femmes qui travaillent quatre heures à temps partiel et qui ont deux heures de transport, sont sur-protégées.

En ce qui concerne les lois, je pense effectivement que tout ne peut pas être législatif. Mais il faut des lois. Même vous, vous êtes demandeurs de lois.

Mme Claude Greff : Il y aura, par exemple, une loi pour abaisser les charges des entreprises.

Mme Muguette Jacquaint : Vous ne serez pas mécontents qu'elle s'applique.

Mme Claude Greff : Je souhaite dire que j'ai pour habitude de rencontrer énormément de représentants du MEDEF et que je suis ravie à chaque fois de les rencontrer, car nous faisons un travail tout à fait constructif. Je ne retrouve pas au travers de vos propos ceux du MEDEF.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Moi non plus. Je suis extrêmement surprise. Si nous avons fait ces auditions ce n'est pas pour vous ennuyer, mais pour, en quelque sorte, travailler ensemble.

Mme Martine Clément : Nous avons la même préoccupation de la nécessité d'arriver à une égalité professionnelle hommes-femmes. Nous ne sommes pas persuadés que la "loi Génisson" soit une voie essentielle pour nous y amener. Ce n'est pas ainsi que sur le terrain nous allons y arriver. J'ai essayé de vous parler de la formation, du choix des formations des femmes, de leur évolution, de leur promotion. Ce sont des éléments qui vont nous aider à évoluer. Nous sommes désireux d'avancer sur ces sujets.

Je viens de rendre à M. Christian Jacob un rapport sur la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle, qui propose des mesures pragmatiques qui ne sont pas destinées à toutes les entreprises.

Nous avons fait un travail très positif et concret avec les organisations syndicales et les organisations familiales. Il n'y a pas eu la moindre difficulté. Nous nous sommes occupés absolument de tout, sauf de la loi. Ce n'était pas notre principe fondamental. Nous avons essayé de réfléchir à la vie des salariés, aux exemples qui avaient pu être intéressants dans certains domaines, etc.

Sur un plan pragmatique, ce n'est pas en faisant des tableaux que l'on résout des problèmes. Il y a bien longtemps, un très célèbre sociologue a dit que l'on ne menait pas la société par décret. Dans ce domaine, il est évident que ce sont des adaptations. Il faut arriver à créer des réflexes. Il faut arriver à ce que lors de toute négociation, par exemple sur la formation professionnelle ou sur les retraites, on se pose la question de la femme et de la carrière.

Nous le demandons nous-mêmes. Je suis persuadée que sur le fond nous sommes d'accord, mais que nous avons fondamentalement deux angles d'attaque différents.

Mme Claude Greff : J'apprécie beaucoup plus les propos constructifs que vous venez de tenir parce qu'ils ressemblent plus à ceux que nous avons coutume d'entendre.

Il faut que vous, les acteurs de l'entreprise, qui êtes ceux qui feront et qui font vivre aujourd'hui la France, vous n'oubliez pas que vous avez des élus qui souhaitent par leur action vous aider dans votre domaine. La loi n'est pas faite contre vous, mais normalement créée pour vous et avec vous.

Mme Martine Clément : Je vous propose que nous relisions la "loi Génisson". Vous pensez, Madame la Présidente, qu'il y a quatre indicateurs principaux qui vous paraissent importants. Nous pensons qu'il y a peut-être trop de choses dans cette loi. Peut-être que notre suggestion, en la relisant bien, sera de dire : attachons-nous à deux ou trois points qui donneront un mode de calcul proche du bilan social pour arriver à quelque chose de beaucoup plus digeste. Il faut aller aujourd'hui dans un sens de simplification avec les entreprises.

Mme Chantal Brunel : La préoccupation de nombreux chefs d'entreprises est d'assurer les échéances, les salaires, de vendre et de produire et, quand ils ont des collaborateurs compétents, que ce soit des femmes ou des hommes, ils font tout pour qu'ils soient heureux dans l'entreprise.

Mme Claude Greff : Nous en sommes convaincus.

Mme Catherine Martin : Nous n'avions pas pensé être interrogés spécifiquement sur la "loi Génisson", sinon nous aurions pris quelques contacts avec nos fédérations professionnelles pour savoir s'il n'y avait pas de problèmes d'application sur le terrain qui ne nous seraient pas remontés.

La seule information que j'ai eue sur ce texte venait de la région lyonnaise où la CFDT souhaite mettre en place quelque chose et où nous avons fait parvenir à notre MEDEF le guide de la négociation qui vient de sortir sur CD-rom.

Nous travaillons beaucoup sur la future négociation concernant l'égalité professionnelle, qui devrait avoir lieu aux alentours du 15 juin. C'est au cœur de nos préoccupations et nous pensions que vous souhaitiez nous entendre sur ce sujet.

Mme Martine Clément : Il existe deux approches fondamentales : une approche législative qui nous paraît relative dans ce domaine et une approche de négociation qui nous paraît plus pragmatique et porteuse de réalité. Nous pouvons nous épauler et nous comprendre.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente : Il y a eu un malentendu. Je crois qu'il faut le corriger.

Aujourd'hui, je me suis fixé comme but de travail de faire un suivi de la loi, parce que je ne souhaite pas une multiplication des lois et que je voulais voir si elle posait des problèmes d'application pour des entreprises, que ce soit au niveau des salariés ou de celui des chefs d'entreprise. C'était la raison d'être de cette audition.

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