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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 1er jour de séance, 2ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 1er OCTOBRE 2002

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

Sommaire

      MANDATS SOCIAUX (suite) 2

      QUESTION PRÉALABLE 2

      AVANT L'ARTICLE PREMIER 11

      ARTICLE PREMIER 16

      APRÈS L'ARTICLE PREMIER 17

      ART. 2 18

      APRÈS L'ART. 2 18

      ART. 3 19

      APRÈS L'ART. 3 19

      ORDRE DU JOUR DU MERCREDI 2 OCTOBRE 2002 20

La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.

MANDATS SOCIAUX (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, de la proposition de loi de M. Philippe Houillon modifiant certaines dispositions du code de commerce relatives aux mandats sociaux.

QUESTION PRÉALABLE

M. le Président - J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, en application de l'article 91, alinéa 4, de notre Règlement, une question préalable.

M. Christian Paul - Dans quel univers préservé du monde réel vivent donc le Gouvernement et sa majorité ? Pas un jour ne se passe sans que soit révélé un scandale touchant des entreprises - y compris des entreprises françaises -, et la crise de confiance que connaît la Bourse trouve là une explication. Et c'est au plus fort de cette débâcle boursière que vous avez choisi de proposer à l'Assemblée le cumul illimité des mandats sociaux ! Quel symbole extraordinaire que celui-là : décider de consacrer la première séance de la première session ordinaire de la législature à ce sujet, choisi entre tous ! Et comme vous ne l'assumez pas, vous confiez la tâche à l'initiative parlementaire, et le Garde des Sceaux lui-même se dérobe. Je vois bien que M. Bédier est là, et je ne doute pas qu'il s'acquittera de la mission qui lui est confiée, mais la refonte du droit social ne figurait pas, ce me semble, dans son décret d'attributions...

Qui, en ce moment, peut prétendre avoir oublié Enron ou Worldcom, ou encore les accablants délires de Vivendi et, hélas, la stratégie ruineuse de France Télécom ? Il n'y a aucun doute, le capitalisme est malade, et le capitalisme français souffre particulièrement de maux qui s'appellent manque de transparence de la gestion, opacité des rémunérations, endogamie des conseils d'administration et mépris des actionnaires les plus modestes. Tout cela concourt à cette insécurité financière que M. Houillon a d'ailleurs décrite en détail... sans en tirer aucune conclusion !

Je ne rappellerai pas les avatars de la crise boursière, sinon pour dire que le capitalisme « à la française », autoprotégé et autocontrôlé, a du plomb dans l'aide. Cela n'empêche pas qu'il soit prêt à toutes les parades pour garder son pouvoir, au détriment des salariés et des petits actionnaires. D'ailleurs, si les alliances qui se sont constituées au cours des années 1990 selon un système de participations croisées ont fini par s'ouvrir aux investisseurs étrangers, le pouvoir, lui, n'a pas été partagé. Mais de nouvelles règles de gestion ont vu le jour, dont l'objectif unique est le rendement à court terme, sans vision stratégique, et au détriment de l'intérêt des salariés. Les stock-options ont été conçues pour faciliter la mise en place de ce modèle, et la dérive n'a pas tardé : certains mandataires ont artificiellement majoré la valeur boursière de leur entreprise, au besoin en dissimulant pertes et investissement hasardeux. Joseph Stiglitz, Prix Nobel d'économie, ne souligne-t-il pas, à juste titre, que le système ne peut fonctionner si les contrôleurs ont intérêt à survaloriser ce qu'ils contrôlent ?

M. Pascal Clément, président de la commission des lois - Ça, c'est vrai !

M. Christian Paul - Déjà, des centaines de milliers de Français ont été abusés, et vous aurez à rendre compte devant ceux qui le seront demain si le texte que vous nous présentez est adopté, car le vote que vous demandez porte en germe l'instauration d'un capitalisme sans contrôle. Le sujet méritait mieux qu'une inscription quasi clandestine à notre ordre du jour et qu'un débat devant un hémicycle à peu près vide. Mais c'est que vous prétendez imposer une dérégulation complète au plus fort de la crise - on comprend donc votre besoin de discrétion ! Dois-je rappeler que la commission n'a pu disposer que de quelques heures pour prendre connaissance de ce texte et l'examiner ?

Au prétexte de difficultés pratiques, que des ajustements auraient permis de résorber, vous créez les conditions d'une profonde régression. Si la proposition est adoptée en l'état, la France sera l'un des rares pays au monde à accepter le cumul illimité du pouvoir au sein des instances qui devraient justement faire face à ces patrons de droit divin dont Jean-Marie Messier fut l'un des plus éminents représentants, et l'un des seuls pays, aussi, à accepter le cumul des rémunérations qui en découle !

Tout cela nous éclaire sur cette pathologie que constitue le honteux double langage tenu aussi bien par le Gouvernement que par sa majorité et par les organisations patronales, MEDEF et AFEP en tête.

Le Premier ministre, d'abord, qui le lendemain de l'inscription de cette proposition à notre ordre du jour déclarait que l'exercice du pouvoir financier dans les entreprises manquait de rigueur, et qu'il fallait protéger les intérêts des petits actionnaires ! le Premier ministre, encore, demandant à sa majorité de ne pas faire de lobbying mais de s'engager en faveur de l'intérêt général !

M. le Président de la commission - Pourquoi ne pas le croire ?

M. Christian Paul - La majorité parlementaire n'est pas en reste. Le 25 septembre, pendant que M. Ollier, président UMP de la commission de la production, recevait dans les sous-sols des représentants d'associations de petits porteurs, dans les étages, M. Clément, président UMP de la commission des lois, enterrait sans états d'âme les principes du bon gouvernement d'entreprise, fondé sur la transparence et l'équilibre des pouvoirs. Quant aux lobbies - MEDEF et AFEP -, ils ne sont pas gênés pour faire le grand écart entre leurs déclarations d'intention et leurs pratiques. En sept ans, le thème du bon gouvernement d'entreprise a suscité pas moins de trois rapports, et nul n'a oublié la contribution de M. Marc Vienot sur le rôle des conseils d'administration. Or, ne retrouve-t-on pas le même Marc Vienot dans les conseils d'administration des plus grands groupes - Vivendi, Alcatel, Aventis... -, cependant que son successeur à la présidence de la Société générale, Daniel Bouton, accumule lui aussi les jetons de présence ?

M. Alain Néri - C'est assurément la France d'en haut !

M. Christian Paul - Aux termes d'un audit relatif au gouvernement des entreprises du CAC 40, leurs trente principaux dirigeants cumulent plus de 160 mandats d'administrateur. Ce sont les mêmes qui, tout en nous demandant de leur faire confiance quant à leurs capacités d'autodiscipline, vous ont commandé en sous-main une proposition de loi pour enterrer la loi NRE, laquelle ne tendait pourtant qu'à modérer cette « nomenklatura » des administrateurs se tenant par le mécanisme des jetons de présence. Ses autres dispositions n'étaient pas davantage critiquables, qu'il s'agisse de rééquilibrer les pouvoirs au sein des organes de direction, de rendre plus transparent le fonctionnement des entreprises ou de renforcer les prérogatives des actionnaires minoritaires. Sous couvert d'une clarification - au demeurant inutile - de ce texte, vous mettez à mal l'ensemble du dispositif. Du reste, votre objectif ne fait aucun doute : vous souhaitez maintenir et accroître les possibilités de cumul des mandats sociaux et des rémunérations afférentes. Et c'est bien le couperet du 16 novembre 2002, suspendu au-dessus de la tête des cumulards, qui vous pousse à agir, aller au-delà même de la loi de 1966, qui limitait tout de même à treize le nombre de mandats pouvant être détenus par un même administrateur.

Vous prenez donc le risque de nous présenter, en guise de premier texte de la première session ordinaire de la législature, une proposition de loi tendant à rendre possible le cumul immodéré des mandats sociaux et des jetons de présence ! Nul doute que les mandataires sociaux ont disposé de relais puissants pour se faire entendre, mais est-ce ainsi que vous allez redonner confiance aux actionnaires individuels, et en particulier aux plus modestes d'entre eux ? Rien ne vous interdisait de mettre rapidement en chantier une grande loi sur le gouvernement des entreprises, afin de mettre un terme définitif à toutes les dérives que nous avons connues dans les dernières années. M. Clément évoque aujourd'hui la possibilité d'une mission d'information parlementaire sur ce sujet, mais la démarche sera-t-elle à la hauteur des enjeux ? Il est encore temps de vous ressaisir et, pour faire écho aux propos du Premier ministre, de vous mettre réellement au service de l'intérêt général, en écartant un texte qui apporte, à sa manière, une bien triste contribution au centenaire de la mort d'Emile Zola (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Votre projet m'évoque en effet un passage célèbre de La Curée : « Nous tiendrons table ouverte, et les plus gros appétits seront satisfaits ». C'est pourquoi j'accuse ce texte d'être attentatoire à l'intérêt général, et je vous invite par conséquent à voter la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.).

M. le Président de la commission - Je partage l'inquiétude de M. Paul au moins sur un point : dans l'époque que nous vivons, nombre de petits actionnaires ont le sentiment d'avoir perdu toutes leurs économies.

M. Jacques Desallangre - Plus qu'un sentiment, c'est une réalité !

M. le Président de la commission - Il est vrai, mais quoiqu'il en soit, nous ne pouvions laisser les choses en l'état, et il y a pour le moins quelque malhonnêteté intellectuelle à nous accuser d'avoir produit un texte pour le grand capital alors que c'est votre loi NRE qui a créé l'urgence en fixant l'échéance du 16 novembre : à cette date, en effet, tous les mandats détenus au-delà des cinq premiers eussent été caducs !

Dans ces conditions, nous ne pouvions nous en remettre à un projet de loi, enfermé comme chacun sait dans des délais de procédure manifestement inadaptés en la circonstance. Nous assumons donc la démarche, au risque de l'ambiguïté.

Sur le fond, je crois que ce qui nous sépare, Monsieur Paul, c'est votre refus obstiné d'admettre que nous évoluons désormais dans un monde ouvert, et que les entreprises peuvent toujours faire le choix de s'installer ailleurs que chez nous si les règles que nous leur imposons leur semblent insupportables : servir l'intérêt général, vous l'admettrez, c'est aussi éviter les délocalisations. Croyez bien que nous ne nous soucions pas de rendre service à tel ou tel : c'est l'intérêt général qui motive notre action. L'intérêt bien compris des grandes entreprises doit aussi nous conduire à ne pas porter atteinte, comme le fait la loi NRE, à la cohérence de leur politique de groupe. Votre texte reposait sur des intuitions pertinentes, mais vous avez fait fausse route en voulant avancer à marche forcée. D'accord pour revoir les règles du gouvernement d'entreprise, mais en plaçant notre démarche sous le signe du bon sens.

M. Marini, rapporteur général du Sénat, rappelait à juste raison, qu'une contrainte physique s'exerce sur le cumul des mandats, ne serait-ce que parce qu'on ne peut être présent partout à la fois !

Croyez-moi, ce dont nous nous contentons aujourd'hui, c'est d'éviter de mettre le feu à la maison !

M. Christian Bataille - C'est pour faire plaisir à M. Seillière !

M. le Président de la commission - Et vous ne pouvez nous traiter de revanchards, puisque nous nous en tenons à l'aspect purement technique - et ô combien technique je le confesse - de la question. Il ne s'agit nullement d'envoyer aux oubliettes toutes les préoccupations qui avaient motivé votre action, mais d'opter pour une méthode tout à la fois plus réaliste et plus efficace. C'est pourquoi je souhaite qu'une mission d'information travaille à la refonte de notre droit des sociétés, lequel, en ne distinguant même pas sociétés cotées et non cotées, ne correspond plus aux impératifs économiques de l'heure.

Faites-nous l'honneur de penser que nous ne sommes pas les laquais du grand capital ! Au Etats-Unis, si l'on n'a pas limité le nombre des mandats sociaux, l'on a rendu extrêmement sévères les normes de gouvernement d'entreprise. En France, M. Bouton lui-même a exigé que plus de la moitié des membres de son conseil d'administration soient extérieurs à l'entreprise. Nous allons vers un contrôle plus rigoureux, plus exigeant, des entreprises françaises, de nature à restaurer la confiance.

Le droit des sociétés doit être harmonisé au plan européen. La Commission européenne a constitué une mission d'étude à cet effet, dont le rapport d'étape compte plus de mille pages. Nous disposerons dans quelques mois d'un riche matériau qui nous permettra de mettre au point un droit des sociétés compatible avec celui de nos partenaires. Quand on légifère aujourd'hui, il faut en effet veiller à ne pas mettre nos entreprises dans une situation défavorable par rapport à leurs concurrentes européennes. Or, c'est cette dimension européenne qui manque à la loi NRE.

Ce soir, nous ne faisons que mettre fin à une situation de péril. Demain, nous travaillerons à édicter, texte par texte, un droit ouvert sur le monde, qui garantisse la sécurité des actionnaires comme la liberté des chefs d'entreprise. Voilà ce que j'appelle l'intérêt général. Et si, pour l'heure, nous devons nous faire pompiers, c'est vous qui en portez la responsabilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. Alain Vidalies - Au lendemain des élections législatives et de la formation du Gouvernement, j'ai entendu le président du MEDEF exiger un « droit d'ingérence » dans l'élaboration de la politique nationale. La présente proposition, que nous examinons en urgence, dès le premier jour de la session, est manifestement destinée à satisfaire cette exigence extravagante, et je veux dire au rapporteur et au président de la commission que, quel que soit le talent qu'ils mettent au service de cette mauvaise cause, ce texte restera comme un des plus beaux coups fourrés de la législature qui s'ouvre.

M. Philippe Houillon, rapporteur de la commission des lois - C'est trop d'honneur !

M. Alain Vidalies - On nous dit qu'il y aurait une difficulté d'interprétation de la loi NRE, qui vous obligerait à jouer les pompiers. Mais pour éteindre un petit feu, vous mobilisez dix casernes alors qu'un seau d'eau eût suffi ! Et au moment où chacun s'interroge sur les moyens de réorganiser le mode de gestion de nos entreprises, au moment même où toute une série de scandales provoque une grave crise de confiance, vous déclarez l'urgence pour cette proposition !

À lire son intitulé, nous pensions que vous souhaitiez réagir, par des réformes appropriées, à la crise financière actuelle. Or, quand nous avons pris connaissance du contenu, soit quelques heures seulement avant la réunion de la commission, nous avons été stupéfaits de constater qu'il s'agissait en vérité d'une médiocre opération au service d'intérêts particuliers. Tout en invoquant la modernité, vous nous ramenez aux années soixante quand la confusion du pouvoir politique et du pouvoir économique était la règle.

Vous n'êtes d'ailleurs pas trop fiers de cette mauvaise action : le Gouvernement, en particulier, ne semble guère courageux, qui laisse un parlementaire déposer une proposition, puis accepte de l'inscrire à l'ordre du jour prioritaire. C'est d'une duplicité totale !

L'exposé des motifs indique donc qu'une difficulté d'interprétation de la loi NRE, relative au décompte des mandats dans le cas où le directeur général est choisi parmi les administrateurs, nous oblige à légiférer avant le 16 novembre. J'observe que cette question a déjà fait l'objet de deux réponses à des questions écrites. S'agissant au demeurant d'une simple difficulté d'interprétation, le ministre aurait pu se contenter d'une circulaire interprétative.

Quant à l'auteur et rapporteur de la proposition, il aurait pu facilement nous convaincre en limitant la portée de son texte à la difficulté évoquée : tout le monde serait tombé d'accord pour régler cette question théorique, qui ne pose de problèmes qu'à quelques esprits torturés.

Mais le véritable objet de cette proposition est d'autoriser jusqu'à cinq mandats cumulés dans les filiales, même cotées en bourse, et d'autoriser le cumul de deux directions générales - et ce sera pire, d'ailleurs, si certains amendements sont adoptés. À part le MEDEF, pourtant, personne n'avait décelé jusqu'ici de difficultés nées de la stricte limitation des mandats sociaux.

Vous allez vers des rivages dangereux. On lit en effet dan le rapport qu'il faut craindre que « se créent deux directions au sein d'un certain nombre de sociétés anonymes, l'une en droit, sur le papier, l'autre de fait », en d'autres termes un système de prête-nom.

M. le Président de la commission - C'est précisément le risque que fait courir la loi NRE !

M. Alain Vidalies - Vous osez écrire que, les dirigeants d'entreprise s'apprêtant à transgresser la loi, c'est-à-dire à commettre un délit, il convient que l'Assemblée modifie la loi pour leur éviter de tels errements...

J'observe qu'en matière de lutte contre la délinquance, vous avez des exigences sélectives selon qu'il s'agit de jeunes en difficulté ou de dirigeants d'entreprises...

M. le Président de la commission - Nous ne sommes pas en matière pénale !

M. Alain Vidalies - Il faut en outre un certain dogmatisme pour voir un « carcan » dans la loi NRE. Cette loi était d'autant plus nécessaire que la concentration du pouvoir économique dans les mains de quelques personnes demeure une spécificité bien française. Dans les entreprises cotées au CAC 40, 16 % des administrateurs détiennent 40 % des mandats sociaux, et les croisements de sièges sont une pratique plus que courante : « tu m'invites à ton conseil, je t'invite au mien »...

Dans un article du 18 juillet 2002, Martine Orange écrivait « Ils sont une trentaine, issus des mêmes hautes écoles de la République, fréquentant les mêmes réseaux de pouvoir, les mêmes cercles. À eux seuls, par le jeu des cumuls de mandats dans les conseils d'administration, ils dirigent toutes les banques et les plus grandes entreprises du CAC 40, le c_ur de l'économie française ».

Lors d'un colloque à Aix-en-Provence, le même mois, Alfred Stiglitz, prix Nobel d'économie a évoqué le « capitalisme des copains ». Il est vrai qu'il décrivait la situation des Etats-Unis... et qu'il n'avait pas connaissance de l'incroyable proposition de loi que vous nous soumettez aujourd'hui !

Sans doute croyez-vous que ce n'est qu'un mauvais moment à passer, mais sachez que, même si les commentaires sont encore discrets, ce coup fourré majeur restera inscrit à votre passif pour longtemps (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe C. et R.).

M. Philippe Folliot - Le système de limitation du cumul des mandats sociaux instauré par la loi sur les nouvelles régulations économiques est à la fois complexe et contraignant. Il conduit les sociétés à réaménager leur organisation interne sans en retirer forcément un quelconque avantage, au contraire. Il déséquilibre nos entreprises et les affaiblit face à la concurrence de pays qui ignorent de telles lourdeurs.

Ces dispositions de la loi NRE semblent avoir été le fruit d'un amalgame fort maladroit entre cumul des mandats politiques et cumul des mandats sociaux, entre groupes cotés ou multinationales et PME familiales, entre l'éventuel danger que représente le cumul des mandats par lesquels on confie un pouvoir qui appartient à d'autres et l'inoffensivité d'un cumul résultant du simple droit de propriété et du droit de gérer librement son patrimoine.

La limitation imposée pénalise les petits groupes familiaux, qui souhaitent faire de la croissance externe et se retrouvent parfois à la tête de plusieurs SA. Il faut comprendre la difficulté, pour le gérant d'une entreprise familiale, de confier la direction générale de droit, mais pas toujours de fait, de sa société à un tiers. Une parade utilisée par certains consiste à transformer une SA en SAS, non concernée par l'interdiction de cumul. Mais les SAS sont une forme moins encadrée par la loi, moins transparente, et donc moins protectrice des actionnaires, lesquels sont donc plus réticents à y investir. Ne risque-t-on pas de freiner les investissements et la croissance de nos entreprises ?

Il paraît également illogique que le président du directoire ne puisse pas présider l'ensemble des sociétés du groupe.

Je tiens à mentionner aussi le cas des sociétés filiales d'associations, ou à statut spécial, qui ne rémunèrent pas leurs dirigeants et ne distribuent pas de dividendes. Elles peuvent être dirigées par des personnes qui assurent bénévolement leurs fonctions et qui sont pénalisées à titre professionnel à cause d'un engagement à caractère social.

Il est absolument inutile de démultiplier les dirigeants si cela conduit à alourdir un peu plus encore leur gestion.

La loi NRE - dont nous ne contestons pas le fondement - a été mise en _uvre de façon plus ou moins heureuse pour les grands groupes, mais n'est absolument pas adaptée aux PME. Laissons se libérer les énergies ! Il y va de l'avenir de la France.

C'est pourquoi il est opportun d'assouplir les règles applicables au cumul des mandats sociaux, en élargissant la portée des dérogations prévues.

Je ne peux donc que saluer l'initiative de notre collègue Philippe Houillon.

Pour parfaire ce texte, le groupe UDF proposera trois amendements qui s'inscrivent de façon positive dans la philosophie de cette proposition de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. Jacques Desallangre - Le capitalisme français - Vivendi Universal, France Télécom - est à son tour gagné par les scandales financiers qui ont déjà atteint les plus grosses firmes américaines - dont Enron.

Le patronat, conscient de l'imminence du danger, a préféré prendre les devants plutôt que de se voir contraint trop sévèrement par les juridictions ou la loi.

Le MEDEF a donc reconnu - en approuvant le rapport Bouton - qu'une réforme de la répartition des pouvoirs au sein des conseils d'administration était souhaitable et que la consanguinité du capitalisme français devait être réduite.

Le rapport Bouton n'est pas pour autant révolutionnaire et ne contraint pas les grands patrons au-delà de ce qu'ils sont prêts à accepter : il s'agit d'aménagements qui améliorent l'image sans changer radicalement ses pratiques.

Or, nous est aujourd'hui soumise une proposition de loi en totale contradiction avec les recommandations de ce rapport. Je m'interroge donc sur la distorsion entre le discours policé de certains et leurs actes.

Il s'agit en effet d'assouplir la loi NRE qui ne faisait déjà pas preuve d'un grand dirigisme. En mai 2000, j'avais d'ailleurs voté contre, car elle ne donnait pas à l'Etat les moyens d'imposer une réelle régulation pour faire face à la spéculation et à la bulle financière qui éclate aujourd'hui en provoquant de nouveaux licenciements. Quand la gouvernance d'entreprise dérape, l'emploi en souffre, et le partage des rôles est tout ce qu'il y a de plus traditionnel : aux uns l'impunité, aux autres le chômage.

La loi NRE, cela dit, avait au moins le mérite de limiter à cinq le nombre de mandats d'administrateur que peut détenir une personne. L'enjeu n'est rien moins que la concentration et la confiscation du pouvoir entre quelques mains, dans l'opacité propre au cénacle restreint qu'est le conseil d'administration, où se prennent pourtant des décisions importantes qui conditionnent la vie de centaines de milliers de salariés, le devenir de territoires entiers, voire l'économie de notre pays.

Je vais faire quelque peine à M. Clément, qui prétend qu'il est physiquement impossible aux patrons de dépasser un certain nombre de mandats. Il faut croire, en effet, que nos patrons ont une santé de fer ! En 1998, ils étaient 196 à se partager 958 postes de direction, 1 653 postes d'administrateurs, 943 postes de représentants permanents et 280 autres fonctions, soit, au total, entre 19 et 20 postes par personne.

En 2000, le rapporteur de notre commission des finances notait dans son rapport : « Le cumul est frappant, s'agissant des présidents de conseils d'administration, de conseils de surveillance, du directoire et gérants. Les 53 présidents des sociétés du CAC 40... détenaient au total 135 mandats... Autrement dit, outre leurs 53 mandats de président, ils détenaient 82 mandats dans une autre société du CAC 40. Parmi ces 82 mandats, 23 sont des mandats réciproques. Un président de conseil d'administration, celui d'une très grande banque, est même président du directoire d'une autre grande banque et du conseil d'administration d'une troisième. Il exerce par ailleurs six mandats d'administrateur et un mandat de membre de conseil de surveillance d'importantes sociétés industrielles, commerciales et financières ».

Il était donc nécessaire de légiférer pour commencer à assainir cette situation scandaleuse. La droite qui, dans l'opposition, a combattu dans son principe même la limitation du cumul des mandats, affirme aujourd'hui vouloir aménager les dispositions adoptées dans la loi NRE en avançant des arguments qui ne sont guère convaincants. Ainsi de la nécessité qu'il y aurait à opérer une distinction entre sociétés cotées et non cotées, alors que de grandes sociétés, notamment les holdings, ne sont pas cotées.

Pour les rédacteurs de la proposition de loi, l'interdiction faite à un directeur général d'exercer dans une deuxième société des fonctions similaires entraverait le développement même des entreprises. Nous ne partageons évidemment pas ce point de vue et continuons à penser que ce cumul des responsabilités comporte bien plus d'inconvénients que d'avantages.

Il en est de même de la proposition visant à étendre les dérogations aux règles de cumul des mandats à l'ensemble des sociétés contrôlées, cotées ou non.

L'exposé des motifs évoque justement la nécessité d'une réforme du droit des sociétés, en notant la réalité d'intérêts souvent contradictoires entre les dirigeants sociaux, les salariés et les petits actionnaires. Mais la droite, une fois de plus, défend une position de classe qui assimile la défense de l'entreprise et celle des possesseurs du capital.

Selon nous, l'entreprise est une entité économique qui produit des biens et des services utiles à la collectivité ; elle doit être défendue comme telle alors qu'elle subit aujourd'hui de plein fouet la course à la rentabilité financière contre l'emploi.

Pour permettre la démocratisation de la gestion de l'entreprise, en y associant l'ensemble des acteurs, nous proposons un statut juridique propre, distinct de celui de la société de capital. L'entreprise a aussi besoin de nouvelles relations avec son environnement, donc de nouveaux modes de financement de l'économie, en dehors des marchés financiers.

L'entreprise aujourd'hui a besoin de plus de démocratie en son sein, de choix politiques et économiques qui donnent la priorité à la production de richesse, à la création d'emplois efficaces et non aux placements et à la spéculation financière.

Ce n'est pas dans cette logique que s'inscrit ce texte de restauration, défendu par une majorité qui ignore les scandales du capitalisme et renforce le pouvoir de ceux qui y sont compromis.

Vous comprendrez dès lors l'opposition la plus résolue du groupe des députés communistes et républicains (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Xavier de Roux - Nos collègues de l'opposition tentent de dramatiser un débat purement technique (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), au simple motif que les marchés financiers connaissent des difficultés. Mais il n'y a aucun lien entre ces difficultés et la présente proposition de loi. La situation financière internationale se dégrade en raison de la crise de confiance liée à l'éclatement de la bulle technologique, ...

M. Jacques Desallangre - Et aux spéculations hasardeuses !

M. Xavier de Roux - Si vous voulez, mais cela n'a rien à voir avec le texte.

Cette crise tient aussi à la faillite des instruments de contrôle que devaient être les grands auditeurs et à l'usage qui est fait des normes comptables.

Mais la confusion entre pouvoir économique et pouvoir politique, dont vous avez abondamment parlé, c'est quand même vous qui l'avez organisée, érigeant en modèle universel votre économie mixte et le fameux « ni-ni » qui résonne encore à nos oreilles.

Vous n'avez eu de cesse de légiférer en faveur de ce modèle, oubliant l'absence totale de contrôle de l'Etat actionnaire sur ses participations, que rappelle aujourd'hui France Télécom après le Crédit Lyonnais hier. Pensez donc un peu à ces petits actionnaires associés à ces entreprises publiques et aujourd'hui ruinés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Et lorsque vous parlez de concentration des pouvoirs, de réseaux d'influence, interrogez-vous donc sur ceux que vous avez créés. Car telle est la réalité de l'économie française, qu'il faudra bien un jour rebâtir à partir d'une législation moderne et adaptée.

M. Hervé Novelli - Très bien !

M. Xavier de Roux - Mais nous sommes aujourd'hui bien loin de ces grandes préoccupations. Il s'agit simplement d'apporter des modifications techniques à un texte obscur et discuté par la doctrine dès sa publication. C'est donc pour sortir de l'ambiguïté que nous devons modifier les règles de cumul des mandats sociaux. Et il faut faire vite car, la loi NRE s'appliquant dès le 16 novembre, de nombreux mandats vont s'en trouver annulés et bien des actes pourraient l'être ensuite.

M. Alain Vidalies - C'est faux ! la loi dit explicitement le contraire !

M. Xavier de Roux - Voilà les effets d'un texte auquel il aurait fallu réfléchir un peu plus, ne serait-ce que parce que les PME ne peuvent se priver des compétences d'hommes et de femmes qui veulent diriger des sociétés alliées mais juridiquement distinctes.

Cette proposition ne remet pas en cause la limitation du cumul qu'impose la bonne gouvernance d'entreprise, elle prévoit simplement les dérogations nécessaires. Où est le drame ? Il s'agit là d'un texte équilibré, que précisent encore quelques amendements adoptés en commission, et à partir duquel il nous faudra bâtir, demain, un véritable droit des sociétés (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Christian Bataille - Par un curieux télescopage du calendrier, les présidents des commissions des finances et de la production, dont je m'étonne qu'ils ne soient pas à vos côtés, Monsieur le président de la commission des lois, organisaient la semaine dernière une audition des représentants des petits porteurs d'actions de sociétés cotées, en particulier France Télécom, d'Eurotunnel, de Vivendi, d'Air France, d'Arcelor et de bien d'autres. Ils étaient venus dire aux parlementaires leur espoir de voir la loi limiter le pouvoir souvent sans partage des oligarchies financières - j'utilise l'expression à dessein pour rompre avec la langue de bois de la droite.

M. Alain Vidalies - Très bien !

M. Christian Bataille - Les petits porteurs représentatifs des Français spoliés par l'effondrement des cours, étaient venus demander des réformes telles que les séparations des fonctions d'audit et de conseil, la responsabilisation des conseils d'administration grâce à des garde-fous, des pouvoirs obtenus pour les associations dans le cadre des assemblées générales. De ces débats, je ne retiendrai qu'une citation : « Le but est de participer aux conseils d'administration, de ne pas fuir nos responsabilités. Nous ne voulons plus être des actionnaires dormants ; nous voulons participer autant que les chefs d'entreprise à la croissance de notre pays », voilà ce qu'a dit M. Cornadeau, président de l'Association des petits porteurs d'actifs, avec un enthousiasme pour son rôle d'actionnaire que je ne partage pas toujours... En écho, les autres associations ont réclamé un statut, une charte. Il y avait là M. Gouranton, président de l'Association de défense des actionnaires d'Eurotunnel, Mme Desheraud, présidente de l'Association France Télécom de l'actionnariat salarié, M. Delarue, président de SOS petits porteurs, M. Brechon, président de l'Association des victimes des agents de change, Mme Lamandé, présidente de l'Association des actionnaires retraités d'Air France, les représentants de France petits porteurs, du Groupement national de défense des porteurs de titres russes, et bien d'autres.

Avant de lever la séance, les deux présidents de commission ont pris acte de ces déclarations et dit leur intention d'élaborer des propositions de loi qui apportent plus de transparence et plus de démocratie dans les conseils d'administration.

Quelle n'a donc pas été notre surprise de devoir examiner au pas de charge, dès le lendemain, un texte qui aboutit à l'effet contraire !

En étendant la possibilité de cumuler des mandats sociaux, on ne répond pas du tout à la demande des petits porteurs, mais pleinement à celle du MEDEF.

On nous dit qu'il s'agit de sauver les mandataires sociaux qui, après le 16 novembre, avaient été portés démissionnaires. Certes...

M. le Président - Votre temps de parole est terminé.

M. Christian Bataille - Mais, Monsieur de Roux, la validité des délibérations auxquelles ils ont pris part ne sera pas remise en cause.

Bref, entre les petits porteurs et les oligarchies patronales, le Gouvernement et sa majorité ont bel et bien choisi !  (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Hervé Novelli - Je félicite notre excellent collègue Philippe Houillon de son initiative. Il y a en effet urgence à agir, les dispositions qui doivent s'appliquer le 16 novembre prochain étant source de confusion et pénalisantes pour nos entreprises. Cette proposition de loi amendée par la commission introduit de la souplesse dans les règles de cumul et lève des incertitudes juridiques.

Comme la loi de modernisation sociale, la loi NRE est une mauvaise loi, préparée dans l'urgence sous la pression des circonstances. L'une et l'autre sont faites d'un empilement de dispositions bureaucratiques sorties des fonds de tiroirs. Quatre commandements devraient pourtant présider à l'élaboration d'une loi.

Le premier : ne point légiférer en fonction des circonstances.

Le deuxième : s'opposer à toute réglementation excessive.

Le troisième : à chaque fois que c'est possible, préférer le contrat à la loi.

Le quatrième : à l'arbitraire du tout-Etat, préférer la transparence des règles de droit.

Le 1er janvier 1800, le Journal officiel, qui s'appelait alors la Gazette nationale, ne comportait que quatre pages, dans lesquelles figuraient en prime les horaires des spectacles de Paris. Le 1er janvier 1900, le nombre de pages était passé à seize. Le 1er janvier 2000, le Journal officiel comptait 96 pages. En quinze ans, le volume annuel du Journal officiel est passé de 7 070 pages à 17 000 pages. Le Parlement vote en moyenne plus de cent lois par an, contre quatre-vingt dans les années soixante ; à l'époque, une loi comportait en moyenne 93 lignes, aujourd'hui nous en sommes à 220. La loi NRE, avec ses 144 articles, participe pleinement à ce mouvement d'hyper-inflation législative... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

Pour le contrecarrer, il conviendrait tout d'abord de revenir à une lecture plus stricte des articles 34 et 37 de la Constitution : la loi doit seulement fixer les grandes règles, elle ne doit pas envahir le domaine réglementaire. D'autre part, elle ne doit pas empiéter sur le domaine du contrat, de la négociation entre partenaires sociaux : une réglementation excessive du marché est vouée à l'échec.

Cette proposition de loi va dans le bon sens, mais il faudrait être un peu plus audacieux. Compte tenu des conséquences de la loi NRE, nous devrions suspendre son application, du moins celle de sa troisième partie (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Je propose aussi un audit sur l'application de cette loi, afin que le Parlement puisse la réviser en pleine connaissance de cause.

Enfin, nous devrions prendre des mesures symboliques et peu coûteuses : affichons clairement que la création de richesses, et donc d'emplois, se réalise prioritairement dans les entreprises, au lieu de compliquer à loisir leur vie en multipliant lois et règlements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Dominique Tian - La loi NRE a une histoire, qui débuta le 13 septembre 1999 lorsque Lionel Jospin, interpellé sur France 2 à propos des licenciements chez Michelin, indiqua dans un lapsus - ou dans un moment de lucidité : « Il ne faut pas attendre tout de l'Etat et du Gouvernement ; ce n'est pas par la loi, par les textes qu'on va réguler l'économie ».

Ces propos déclenchèrent évidemment une tempête médiatique et de nombreuses protestations à gauche, où l'on fustigea ce tournant libéral. Lionel Jospin réagit donc deux semaines plus tard à Strasbourg par un discours de réarmement moral pour troupes socialistes dépitées : il indiqua que face à la mondialisation débridée, la mission de la gauche était d'inventer de nouvelles régulations. Le mot était lâché !

Ainsi fut adoptée, selon la procédure d'urgence, cette loi NRE, loi fourre-tout, approximative, et surtout dangereuse pour les entreprises, qui se virent toutes imposer les mêmes règles contraignantes.

Certes, il faut offrir une protection efficace aux actionnaires minoritaires et aux créanciers ; mais le droit des sociétés doit être simple, dépourvu d'ambiguïté et adapté à la situation des entreprises. Ces derniers mois, plusieurs dizaines de milliers de sociétés anonymes - on avance le chiffre de 80 000 - ont choisi de changer de forme sociale. Les PME françaises n'avaient pas besoin qu'on leur impose des contraintes inconnues dans les autres pays européens.

Dès le 16 novembre, la loi NRE, si elle demeurait inchangée, serait un facteur de grande incertitude pour de nombreuses entreprises. Le texte de M. Houillon clarifie heureusement, in extremis, la situation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice - Je remercie les orateurs de la majorité, qui ont appuyé le texte en insistant sur la volonté du rapporteur - qui est aussi celle du Gouvernement - de ne pas permettre que les PME soient pénalisées par les dispositions de la loi en vigueur. À cet égard, je remercie M. de Roux d'avoir ramené le sujet à sa véritable perspective, qui est d'ordre technique. Il a eu raison de souligner, en dépit d'interruptions répétées, qu'au terme de la loi, les personnes détentrices de mandats de gestion et de direction au sein des sociétés anonymes ayant leur siège sur le territoire national seront réputées démissionnaires d'office le 17 novembre prochain si elles ne sont pas mises en conformité avec les nouvelles dispositions du code de commerce en matière de cumul des mandats introduites par la loi NRE.

M. Novelli l'a dit : il y a urgence à légiférer, car la complexité menace, M. Tian l'a justement rappelé.

A ceux qui ont très violemment critiqué cette initiative, je dirai simplement que leurs interventions avaient bien davantage leur place dans un congrès de parti politique que dans un débat parlementaire, que les propos excessifs ne sont pas démonstrations et que ceux qui tirent trop fort risquent de finir par recevoir eux-mêmes l'obus qu'ils ont tiré (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste).

La discussion générale est close.

M. le Président - J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

AVANT L'ARTICLE PREMIER

M. Hervé Novelli - Pourquoi l'amendement 13 et les suivants ? Parce que la loi en vigueur est mauvaise, et qu'il faut donc en suspendre l'application pour réguler différemment l'économie, en faisant confiance aux acteurs sociaux. C'est à quoi tend l'amendement, en supprimant l'article 110 de la loi relatif au cumul des mandats, qui fait peser des contraintes supplémentaires sur les entreprises.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé l'amendement. L'alternative était soit de revenir au texte antérieur à la loi NRE, ce que souhaitent les auteurs de l'amendement, soit d'adapter et de clarifier le texte. La commission a retenu cette dernière option.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable. Nous légiférons pour éviter qu'un problème précis ne se pose le 16 novembre. Il ne s'agit pas, pour autant, de supprimer la loi NRE d'un trait de plume. Et comme votre commission a eu la sagesse de créer une mission d'information, laissons-la travailler, et nous éclairer. En attendant, je vous invite à retirer l'amendement.

M. Hervé Novelli - Je le maintiens.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement 13, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le Président de la commission - Je conçois que certains d'entre nous soient tentés de reprendre l'ensemble de la loi. Je leur rappelle cependant que notre mission se limite, ce soir, à résoudre un problème qui se posera le 16 novembre si nous n'intervenons pas au plus vite, et je les invite à ne pas, en en faisant trop, aboutir au contraire de ce qu'ils souhaitent. Notre calendrier est très serré, et il nous faut un vote conforme avec le Sénat dans les meilleurs délais, sinon certains mandataires sociaux seront réputés démissionnaires d'office le 17 novembre, vous le savez. Le mieux ne doit pas être l'ennemi du bien.

M. Christian Bataille - Vous voilà victime de vos extrémistes !

M. Hervé Novelli - Je ne partage pas l'alarmisme de certains : ce n'est pas parce que l'on supprimera l'un des articles de la loi NRE que l'économie française s'effondrera. C'est bien pourquoi l'amendement 14 tend à supprimer l'article 114 de la loi, qui impose la publicité des rémunérations des mandataires sociaux.

M. Christian Bataille - Et où est la transparence chère à M. Raffarin ?

M. Hervé Novelli - Cette disposition est une incitation à la haine sociale. Je suis moi-même dirigeant de société dans une ville moyenne et je n'ai rien à cacher, mais je ne vois aucun avantage à cette publicité. Que l'on supprime donc cet appel à la haine.

M. Christian Bataille - C'est un morceau d'anthologie.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé l'amendement, à la fois parce qu'il est hors sujet et parce que, tel qu'il est rédigé, il supprime la publicité de l'ensemble des rémunérations, y compris celles des dirigeants des sociétés cotées, ce que personne ne souhaite. La mission d'information étudiera cette question. Il serait donc préférable que l'amendement soit retiré.

M. Hervé Novelli - Je suis disposé à accepter un sous-amendement excluant la rémunération des dirigeants de sociétés cotées du bénéfice de cette disposition.

M. Christian Bataille - Vous êtes prêt à accepter la haine sociale ?

M. Hervé Novelli - Je maintiens que cette disposition de la loi NRE ne facilitera pas la concorde au sein des PME.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable, mais nous ne pouvons vous donner tort. Votre commission ayant constitué une mission d'information, il paraît plus sage d'attendre ses conclusions pour modifier la loi. Comme l'a souligné le président de votre commission, ce qui importe ce soir est de mettre au point un texte qui pourra être voté conforme par le Sénat dans les meilleurs délais. Ne prenons pas le risque, en élargissant le champ de la proposition, de ne pas être prêts le 16 novembre. N'interprétez pas notre position comme un refus d'entendre vos arguments qui, à bien des égards, nous semblent tout à fait sensés.

M. Jean-Jacques Descamps - Il est cependant essentiel d'adresser un signe très fort aux chefs d'entreprise et en particulier aux chefs des PME que la majorité et le Gouvernement précédents traitaient avec la plus grande défiance. La loi NRE en offre l'un des meilleurs exemples : les chefs d'entreprise y sont systématiquement présentés comme des fraudeurs, incapables de surcroît de créer des emplois dans de bonnes conditions. Dès lors, une modification à la marge d'un texte aussi néfaste, telle que celle que vous nous soumettez ce soir, ne nous semble pas suffisante. Elle tend en outre à ajouter de la complexité à l'usine à gaz léguée par la majorité précédente ! Je suis cependant conscient de l'urgence qui s'attache à ce texte. C'est pourquoi j'invite M. Novelli à se replier sur l'amendement 16 qui vise à suspendre l'application de la loi NRE jusqu'au 30 juin 2003.

M. le Président de la commission - La publication de la rémunération des cinq principaux dirigeants répond à une exigence internationale de transparence très largement partagée. Elle est susceptible de s'appliquer aux PME dans la mesure où il est très difficile de définir en droit ce qu'est une petite entreprise. Ni le chiffre d'affaires ni le nombre de salariés ne constituent à cet égard des caractères suffisants.

Il est donc tout à fait indispensable que M. Novelli retire son amendement. Ce n'est pas un sursis à exécution de quelques mois des dispositions de la loi NRE qui nous permettra de mettre notre droit des sociétés en conformité avec la réalité économique du moment. C'est pourquoi j'ai proposé qu'une mission d'informations s'attache à la refonte de l'ensemble du droit des sociétés. S'agissant de la possibilité de s'exonérer de l'exigence de transparence financière des principaux dirigeants de l'entreprise, je partage votre perplexité et je considère que seul le droit comparé nous apportera une réponse suffisamment argumentée. Considérons cependant sans plus attendre que la France ne pourra pas continuer éternellement à se dispenser de dispositions que ses principaux partenaires et concurrents admettent sans difficulté.

Pour l'heure, notre souci premier doit être de ne pas pénaliser nos entreprises en les soumettant au couperet du 16 novembre qui est susceptible de leur causer bien des embarras. Or je n'ai pas besoin de rappeler que si les deux Assemblées du Parlement n'adoptent pas ce texte en termes identiques, nous devrons nous en remettre au jeu des navettes et nous ne tiendrons pas les délais.

Je remercie les auteurs de ces amendements d'avoir permis à chacun d'entre nous de prendre la juste mesure de ces questions mais je leur rappelle qu'à vouloir trop gagner, on risque de tout perdre !

M. Alain Vidalies - Le débat interne à la majorité est assez singulier mais il est vrai qu'à force d'en rajouter dans le simplisme...

M. Georges Tron - Et vous savez de quoi vous parlez !

M. Alain Vidalies - ...on aboutit à quelques extravagances ! (Murmures sur les bancs du groupe UMP) N'a-t-on pas entendu l'un des auteurs de l'amendement s'interroger sur la constitutionnalité de la disposition qu'il propose de supprimer alors même que le Conseil constitutionnel - saisi en son temps - l'a clairement affirmée ? L'idée selon laquelle l'exigence de transparence financière - qui existe, rappelons-le, à peu près partout -...

Plusieurs députés UMP - Pas pour les PME !

M. Alain Vidalies - ... serait de nature à attiser la « haine sociale » n'est pas moins extravagante ! Je vous renvoie aux débats qui ont conduit à l'adoption de la loi NRE. L'exigence de transparence était alors largement partagée et ce point n'a pas soulevé de difficulté particulière. Il y avait alors sur ce sujet un certain consensus...

M. Michel Bouvard - Uniquement pour les grands groupes !

M. Alain Vidalies - Aussi suis-je surpris d'entendre ce soir des propos qui fleurent bon le XIXème siècle !

M. Georges Tron - C'est votre texte qui est archaïque !

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis sensible au souci des auteurs de ces amendements de lever tous les obstacles à la compétitivité de la maison France et le Premier ministre s'est engagé à vous présenter un texte allant dans ce sens avant la fin de cette année. Tel n'est pas l'objet de la proposition de loi extrêmement technique dont nous débattons ce soir et qui procède avant tout d'une contrainte de calendrier. Je remercie donc les auteurs des amendements d'avoir nourri notre réflexion collective et je puis leur assurer qu'ils ont été politiquement entendus. L'urgence commande cependant qu'ils les retirent.

M. Eric Besson - Votre propos, Monsieur le ministre, est sidérant : M. Novelli avance que la transparence introduite par la loi NRE constitue une provocation à la haine sociale et vous lui répondez que vous comprenez parfaitement ses arguments et que seul un problème de calendrier vous empêche d'y donner suite sans plus attendre !

M. Georges Tron - C'est une mauvaise plaisanterie ! Vous n'avez fait voter la loi NRE que pour donner des gages au parti communiste !

M. Eric Besson - Relisez l'ensemble du texte. Allez-vous remettre en cause le volet relatif aux OPA ou celui qui traite des concentrations ?

Un député UMP - Ils n'ont rien réglé !

M. Eric Besson - Allez-vous revenir sur le dispositif de lutte contre le blanchiment de l'argent sale !

M. Georges Tron - Vos leçons nous amusent !

M. Eric Besson - Je rappelle en outre que nous avons amendé au cours des différentes lectures nos propositions. Dans le texte initial, il était proposé de rendre publiques les dix premières rémunérations, y compris dans les PME. Sensibles aux arguments faisant valoir d'éventuelles difficultés d'application dans les PME, nous avons limité l'exigence de transparence aux seuls mandataires sociaux. Tous les grands pays industriels ont pris la même orientation !

M. Hervé Novelli - J'ai été très sensible aux propos de M. le ministre et du Président de notre commission des lois et je les remercie d'avoir reconnu que les exigences posées par la loi NRE s'apparentaient, en particulier pour les PME, à une véritable inquisition.

Je retire mon amendement 14, mais je défendrai mon amendement 16. Le président de la commission vous demande de légiférer avant le 16 novembre, tout en nous expliquant qu'on ne peut pas réécrire sur un coin de table des dispositions importantes.

Mon amendement 16 a le mérite de la clarté : il vise à suspendre jusqu'au 30 juin 2003 l'application de la troisième partie de la loi NRE, qui était une mauvaise loi. La proposition de M. Houillon est bonne, mais elle ne fait que remédier aux dispositions les plus néfastes, tout en maintenant l'économie générale du texte.

Au lieu de légiférer dans l'urgence, votons de nouvelles dispositions dans quelques mois, après avoir consacré le temps nécessaire à la réflexion.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement qui pose un problème technique. Comme l'a dit M. Novelli, on ne peut légiférer sur un coin de table.

La troisième partie de la loi NRE ne porte pas seulement sur les mandats sociaux, mais sur l'ensemble du droit des sociétés. L'amendement propose de reporter l'application de l'ensemble de ces dispositions. Or, le 16 novembre, seuls les articles relatifs aux mandats sociaux entreront en application. Les autres sont déjà applicables.

Cet amendement ne peut donc être accepté : il est juridiquement incohérent.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

M. Jean-Michel Fourgous - Les entreprises françaises ne sont pas prêtes à subir les nouvelles contraintes de la loi NRE. Il serait sage de différer l'application de cette loi, ce qui ne signifie pas l'abroger. Nous pourrons de la sorte procéder à une étude d'impact.

Nous avons besoin de la confiance des entrepreneurs. Quand M. Jospin avait une bonne cote de popularité, ce n'était pas grâce à ses conseillers en communication, mais parce qu'il était porté par la croissance.

Nous ne recherchons pas la popularité, mais la croissance. Il faut donc oser, sauver l'économie française de l'asphyxie. Vivait-on plus mal avant le vote des 144 articles de la loi NRE ?

La proposition de M. Houillon vaut mieux que rien, mais pouvons-nous, devant nos 2,5 millions d'entrepreneurs qui travaillent et qui souffrent, conforter 140 articles de la loi NRE,

Pourquoi n'aurions-nous pas l'audace de faire un geste en faveur de ceux qui produisent la richesse ?

M. Dutreil a constitué une commission de simplification. Il faut simplifier nos lois, qui deviennent inapplicables tant elles sont complexes.

On peut suspendre l'application de la loi NRE : si elle contient de bonnes dispositions, celles-ci pourront être reprises dans le projet sur le droit des affaires.

Un spécialiste de la concurrence a jugé cette loi monstrueuse.

Y-a-t-il quelqu'un à droite qui veuille cautionner ce texte d'une majorité de gauche, votée sous le coup de l'émotion ? Quel mépris d'ailleurs pour vos entreprises, que de légiférer sans aucune étude d'impact !

Au nom du réalisme, je vous demande de suspendre la loi NRE, comme les socialistes avaient abrogé la loi Thomas (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Hervé Novelli - Très bien.

M. le Secrétaire d'Etat - Je comprends M. Fourgous et je rends hommage à son lyrisme, mais je dois m'en tenir à des considérations plus techniques. Suspendre l'application de la troisième partie de la loi NRE créerait une insécurité juridique plus grave encore que ce qu'il dénonce. Pour autant, nous n'approuvons pas la loi NRE. La commission va constituer une mission d'évaluation et le Premier ministre a pris l'engagement d'un débat général. Il ne s'agit donc pas de donner quitus, mais de répondre aux attentes de nos entrepreneurs. Ne causons pas d'insécurité juridique. À vouloir l'idéal, on risque le pire.

M. Eric Besson - Je suggère à M. Novelli de se reporter au Journal officiel : il verra que de nombreuses dispositions de la loi NRE ont été adoptées à l'unanimité. J'ai été surpris par l'émouvant plaidoyer de M. Fourgous en faveur des entrepreneurs, comme je suis surpris par le zèle de la majorité. En effet, vous souhaitez un délai que les entrepreneurs ne vous demandent pas.

M. Jean-Michel Fourgous - Et la loi NRE, ils vous l'avaient demandée ?

M. Eric Besson - Un report les obligerait à annuler ce qu'ils préparent pour les prochaines assemblées générales. Vous devriez donc vous renseigner auprès de ceux que vous prétendez défendre (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). La loi NRE reprenait les recommandations du rapport Viénot, c'est-à-dire ce que les patrons des grandes entreprises demandaient (Mêmes mouvements).

M. le Rapporteur - Ces débats montrent l'utilité de la mission d'information constituée pour réformer le droit des sociétés.

L'amendement qui vous occupe vise à reporter l'application de dispositions qui sont déjà applicables. Il est impossible de l'adopter, pour une simple raison de bon sens.

M. Mansour Kamardine - Je n'ai pas eu l'occasion de m'entretenir avec les chefs d'entreprise des grands groupes. Je ne parlerai pas à leur place. Nous serons tous d'accord pour dire que cette loi pose un certain nombre de problèmes. Soyons pragmatiques. Le législateur a retardé l'application d'un certain nombre de dispositions : ne peut-on retarder la mise en _uvre de l'ensemble des dispositions qui ne sont pas encore entrées en vigueur jusqu'en juin 2003 ?

Voilà le sous-amendement que je propose à l'amendement de M. Novelli.

M. le Président - Notre Assemblée est suffisamment éclairée sur l'amendement 16.

L'amendement 16, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Hervé Novelli - L'amendement 12 demande que le Gouvernement présente sur le bureau des deux Assemblées, avant le 31 décembre 2002, un rapport sur les conséquences économiques, pour les entreprises françaises, de l'application de la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques.

J'ai été sensible aux arguments de la commission des lois et du Gouvernement. Je crois que des initiatives vont être prises ; elles pourraient être utilement préparées par ce rapport.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Il me semble que la décision de votre commission de créer une mission d'information sur la réforme du droit des sociétés va bien au-delà de l'objet de votre amendement. Nous ne sommes pas opposés à la rédaction de ce rapport, mais il serait plus judicieux que les services de la Chancellerie soient à votre disposition pour vous fournir tous les éléments nécessaires à votre étude.

L'amendement ne se justifie donc pas.

L'amendement 12, repoussé par la commission, mis aux voix, n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. Alain Vidalies - L'amendement 4 est de suppression.

L'objectif de cette proposition de loi est de lever, avant le 16 novembre, une difficulté d'interprétation de la loi NRE qui doit entrer en vigueur à cette date. Sur tous les bancs, on nous rappelle que cette date justifie la proposition de loi. Or, le I de l'article premier que je vous propose n'est pas de cette nature : il va bien au-delà. Il s'agit, parmi les dérogations aux limitations du cumul des mandats prévues dans la loi NRE, de rajouter aux sociétés filiales non cotées les sociétés filiales cotées en bourse.

Notre vision est-elle partisane ? Sur cette question, vous aviez été vous-même très explicite à l'occasion du vote de la loi NRE, et M. Philippe Auberger, en particulier, le 27 avril 2000. Notre position était donc juste en opérant cette distinction. Vous avez décidé de revenir dessus - pour quelles raisons ?

L'amendement 4, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 26, rédactionnel, a été accepté par la commission.

L'amendement 26, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Xavier de Roux - Dans le texte que vous proposez, il n'est prévu de dérogations aux cumuls des mandats que pour ceux exercés par le titulaire d'un mandat dans une société-mère, au sein des sociétés qu'elle contrôle. Or, ce régime dérogatoire n'est pas adapté à la typologie des groupes qui ont une organisation dite en rateau.

La dérogation joue pour l'ensemble des mandats exercés au sein des sociétés non cotées comprises dans le même périmètre de consolidation.

On clarifie ainsi le problème du cumul des mandats dans les groupes. C'est le sens de l'amendement 18.

M. le Président de la commission- Je tiens à sous-amender l'amendement de M. de Roux, s'agissant des sociétés-s_urs. Il existe deux sortes de groupes cotés : les verticaux, avec filiales, et des sociétés horizontales. Je souhaite que les sociétés-s_urs soient limitées à cinq. Il faut des limites, certes, mais il est aussi nécessaire de répondre aux exigences de fonctionnement des sociétés. Tel est le sens du sous-amendement 33. Je souhaite évidemment que l'Assemblée l'adopte.

M. le Rapporteur - La commission a accepté l'amendement 18 sous réserve de l'adoption du sous-amendement 33.

M. le Secrétaire d'Etat - Autant l'amendement 18 de M. de Roux correspond à un problème non négligeable, autant, en ramenant les mandats d'administrateurs à cinq, nous nous situons dans la logique du texte.

Sous la réserve de l'adoption du sous-amendement 33, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. Alain Vidalies - Cette initiative tend à modifier l'objectif de la proposition de loi. Vous avez donc décidé d'étendre la dérogation aux sociétés cotées - mais qui restaient dans le cadre vertical et ne concernaient, dans la rédaction de la loi NRE, que la situation où le mandataire était administrateur de la maison mère. Or, cet amendement semble y apporter des limites quand, en fait, il ouvre le champ des dérogations aux mandats sociaux dits horizontaux. Nous y sommes donc hostiles. Monsieur le Président de la commission des lois a fort bien vu quelle pourrait être la portée de cette disposition. Il propose une limitation à cinq ; cela n'est pas conforme à l'objectif annoncé de la proposition de loi.

M. Jean-Jacques Descamps - L'excellent amendement de M. de Roux vise à adapter le droit au fait, mais pourquoi prévoir une limite de cinq mandats ? Cela dit au moins aura-t-on donné un peu de souplesse au dispositif.

Le sous-amendement 33 mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 18, ainsi sous-amendé.

M. Alain Vidalies - Par l'amendement 5, nous manifestons une nouvelle fois notre volonté que l'on s'en tienne à un texte qui précise l'interprétation de la loi NRE.

L'amendement 5, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Dans le même esprit que l'amendement que j'ai précédemment défendu, l'amendement 27 vise à clarifier le texte.

L'amendement 27, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Vidalies - L'amendement 6 est défendu.

L'amendement 6, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 28 relève de la même inspiration que le précédent.

L'amendement 28, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Vidalies - L'amendement 7 est défendu.

L'amendement 7, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 29 répond toujours au même souci de clarification.

L'amendement 29, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Xavier de Roux - L'amendement 19 a exactement le même objectif que l'amendement 18.

M. le Rapporteur - La commission y est favorable, sous réserve de l'adoption du sous-amendement 34.

M. le Secrétaire d'Etat - Sagesse.

Le sous-amendement 34, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 19, ainsi sous-amendé.

M. le Rapporteur - Je retire l'amendement 30.

M. Alain Vidalies - L'amendement 8 corrigé est défendu.

L'amendement 8 corrigé, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 31 est de conséquence.

M. Alain Vidalies - L'amendement 9 est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable à l'amendement 31 et défavorable au 9.

L'amendement 31, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'amendement 9 tombe.

M. Xavier de Roux - Je retire l'amendement 20.

L'article premier, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. Michel Bouvard - L'amendement 17 rectifié est défendu.

L'amendement 17 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - Un certain nombre de collectivités ont des sociétés mixtes dans leur sphère d'influence et il est donc logique que des membres des exécutifs locaux siègent au sein des conseils d'administration de ces sociétés. Or certains de ces élus peuvent aussi, au titre de leur activité professionnelle, siéger au conseil d'administration de sociétés privées.

L'amendement 21 rectifié vise donc à éviter que l'application de la limitation des mandats prévue par la loi NRE ne les prive d'une partie des prérogatives liées à leur mandat.

J'ajoute que le renforcement du contrôle voulu par la loi NRE est un objectif déjà largement atteint par l'obligation faite aux administrateurs des SEM de présenter un rapport annuel, par l'obligation de double commissaires aux comptes et par l'intervention de la chambre régionale des comptes.

C'est pourquoi il convient de répondre à la revendication de nombreux élus comme de la Fédération nationale des SEM et de permettre aux conseils municipaux de désigner librement leurs représentants aux conseils d'administration.

L'amendement 21 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 2

M. Alain Vidalies - L'amendement 10 est défendu.

L'amendement 10, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Xavier de Roux - Je retire l'amendement 22 au profit de l'amendement 35 du Gouvernement.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement de M. de Roux aurait supprimé toute limite au nombre de mandats sociaux pour les sociétés d'assurance. Il n'y avait aucune raison de leur accorder un avantage dont ne jouit aucun autre secteur et rompre ainsi l'égalité entre les administrateurs.

La loi NRE comporte toutefois une lacune : elle ne prévoit pas de dérogation pour les sociétés d'assurance mutuelle qui ont des sociétés anonymes comme filiales et qui ne peuvent, par conséquent, y déléguer d'administrateurs. C'est donc pour permettre une meilleure gestion que l'amendement 35 comble cette lacune.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné. À titre personnel, j'y suis tout à fait favorable.

L'amendement 35, mis aux voix, est adopté.

L'article 2, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 2

M. Xavier de Roux - Si la proposition traite du cas classique où la société mère contrôle des filiales, elle n'a pas envisagé celui des établissements de crédit mutualistes et coopératifs à organe central où ce dernier est en fait contrôlé par les filiales. L'amendement 25 vise à remédier à cet oubli.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné. À titre personnel, j'y suis favorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis également favorable à cet excellent amendement, sous réserve d'une modification rédactionnelle : écrire « Il est inséré avant le dernier alinéa un alinéa ainsi rédigé » au lieu de « L'article L. 511-31 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé », nous éviterait de devoir tout numéroter à nouveau.

M. Xavier de Roux - J'accepte cette rectification.

L'amendement 25, ainsi rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

M. Alain Vidalies - Notre amendement 11 tend à supprimer cet article par simple cohérence : pourquoi instituer un délai de deux mois quand on prétend qu'il y a urgence ?

L'amendement 11, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 32 corrige une erreur de rédaction qui, du reste, existait déjà dans la loi NRE.

L'amendement 32, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Hervé Novelli - Je retire l'amendement 15 rectifié.

M. Philippe Folliot - Je retire l'amendement 3.

L'article 3 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 3

M. Philippe Folliot - Notre amendement tend à limiter l'application de ce texte aux entreprises indépendantes de moins de 500 salariés, c'est-à-dire aux PME.

M. le Rapporteur - L'entreprise n'est pas une notion juridique ; le code de commerce parle de sociétés. Par ailleurs, je ne sais pas ce qu'est une « entreprise indépendante ». Enfin, on ne peut pas définir les PME uniquement par le nombre de salariés.

La commission a donc repoussé cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable : les problèmes que cette proposition de loi vise à régler concernent aussi des entreprises de plus de 500 salariés.

M. Alain Vidalies - Voilà donc, venant des rangs de la majorité, un amendement qui limiterait sensiblement les effets du texte et prouverait qu'il s'agit bien de répondre aux problèmes des PME, et non de satisfaire les plus grandes entreprises... Il me paraît fort intéressant.

L'amendement 23, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Philippe Folliot - Notre amendement 24, qui prolonge l'amendement 21, vise à ne pas prendre en compte en matière de cumul, les mandats de direction de sociétés à statut spécial qui ne distribuent ni dividendes à leurs actionnaires ni rémunération à leurs dirigeants - notamment organismes HLM, coopératives, sociétés filiales des associations chargées de collecter les participations des employeurs à l'effet de construction ou sociétés filiales d'associations qui _uvrent dans le secteur social.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Cette question sera traitée par la mission d'information.

M. le Secrétaire d'Etat - Pour la limitation du nombre de mandats, le critère n'est pas la rémunération, mais la disponibilité. Peut-être M. Folliot pourrait-il retirer son amendement, dans l'attente des travaux de la mission d'information.

M. Xavier de Roux - Pourquoi ne pas accepter ici ce que nous avons adopté tout à l'heure pour les SEM ? Il s'agit, de la même façon, de permettre à un chef d'entreprise d'exercer un mandat bénévole.

M. le Secrétaire d'Etat - Concernant les SEM, notre but était de permettre aux élus d'exercer les missions qui leur sont confiées ; mais il serait déraisonnable de laisser un chef d'entreprise déjà très occupé par cinq mandats en exercer un sixième.

M. Philippe Folliot - Je maintiens mon amendement.

L'amendement 24, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'ensemble de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - Je remercie tous ceux qui ont participé au débat.

Prochaine séance cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée ce mercredi 2 octobre, à 0 heure 15.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MERCREDI 2 OCTOBRE 2002

A QUINZE HEURES :1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Nomination d'un secrétaire de l'Assemblée nationale.

2. Questions au Gouvernement.

3. Discussion du projet de loi (n° 190) relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi.

M. Pierre MORANGE, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

(Rapport n° 231)

A VINGT-ET-UNE HEURES TRENTE : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


© Assemblée nationale