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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 16ème jour de séance, 40ème séance

1ère SÉANCE DU MARDI 29 OCTOBRE 2002

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

Sommaire

      FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003
      (suite) 2

      ARTICLE PREMIER ET RAPPORT ANNEXÉ (suite) 2

      APRÈS L'ARTICLE PREMIER 11

      ARTICLE 2 18

      APRÈS L'ART. 2 20

      AVANT L'ARTICLE 3 21

      NOMINATION D'UNE DÉPUTÉE
      EN MISSION TEMPORAIRE 24

La séance est ouverte à neuf heures.

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

ARTICLE PREMIER ET RAPPORT ANNEXÉ (suite)

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 170 a été en partie satisfait, mais en partie seulement.

Un ordre des masseurs-kinésithérapeutes et un ordre des pédicures-podologues avaient été créés en 1995, mais le gouvernement d'alors n'a pas jugé bon de publier l'arrêté convoquant le corps électoral qui aurait permis la création effective de ces ordres. Depuis, la loi du 4 mars 2002, créant un conseil des professions paramédicales, a supprimé les ordres créés sept ans avant. Il nous paraît plus judicieux de créer d'une part un ordre spécifique à chaque profession, et d'autre part des unions régionales regroupant l'ensemble des professionnels libéraux.

M. Jean Bardet, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour l'assurance-maladie et les accidents du travail - Un amendement semblable, mais plus limité, a été voté hier. Je propose donc à l'Assemblée de rejeter celui-ci.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Avis défavorable.

L'amendement 170, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - On a longtemps pratiqué une maîtrise des dépenses reposant sur les professionnels ; aujourd'hui, chacun s'accorde à dire qu'il faut responsabiliser aussi les assurés. La tâche est difficile dans la mesure où la CMU, la carte Sésame vitale, l'extension du tiers-payant ne permettent pas aux patients d'évaluer le coût de leurs soins. C'est pourquoi nous proposons trois moyens de responsabiliser les patients. Le premier, qui fait l'objet de l'amendement 172, est un contrat moral passé entre le malade et son médecin, et comportant des mesures de prévention, d'hygiène de vie et de respect des traitements.

M. Jean Bardet, rapporteur - Cet amendement ne donne pas de définition claire du « contrat » envisagé. Avis défavorable.

M. le Ministre - Avis défavorable.

M. Jean-Marie Le Guen - Cet amendement pose le problème des relations entre le médecin et son malade et, plus généralement, entre les pouvoirs publics et les assurés, mais nous ne nous retrouvons pas dans cette vision des choses, dans laquelle nous voyons, au mieux, une certaine forme de paternalisme, voire de caporalisme.

M. Jean-Luc Préel - Je regrette la réponse lapidaire du rapporteur, qui ne dit nullement comment il entend, lui, responsabiliser les patients. Quant à M. Le Guen, son propos est caricatural : la relation médecin-malade doit reposer sur la confiance et lorsqu'un médecin se trouve face à un patient qui boit trop, qui mange trop, qui fume trop, etc., il est normal qu'il lui indique quelles mesures prendre pour ne pas risquer d'être plus gravement malade à l'avenir ! Au demeurant, ce que je propose a déjà été préconisé par plusieurs syndicats de médecins et par la CNAM.

M. le Ministre - Je ne voudrais pas que M. Préel pense que l'on manque de considération pour ses amendements. L'idée est bonne, mais il serait prématuré de l'introduire maintenant, surtout en l'état, sans préciser de quel type de contrat il s'agit, ni de quel médecin - car je crois que le médecin-référent n'a plus cours...

M. Jean-Marie Le Guen - Comment cela ?

M. le Ministre - J'ajoute qu'il est déjà prévu une rémunération au forfait pour les médecins qui font des actes de santé publique et de prévention. N'allons donc pas trop vite.

M. Claude Evin - Cette notion de contrat, introduite dans un texte législatif, fait problème. Imaginons, pour reprendre l'exemple donné par M. Préel, qu'un patient, passant outre les recommandations de son médecin, n'abandonne pas ses comportements à risques. Que se passera-t-il ? Cessera-t-on de le soigner ? Il est certes nécessaire de responsabiliser les patients, mais dans une limite raisonnable.

Je m'étonne au passage, Monsieur le ministre, de vous entendre dire que le médecin-référent « n'a plus cours ». Son instauration est le fruit d'un accord passé entre les organisations syndicales de médecins et les caisses de sécurité sociale, et je ne sache pas qu'il ait été annulé. Est-il dans vos intentions de le faire par voie réglementaire, comme vous en avez le droit ?

M. le Ministre - Le médecin-référent existe bien dans les textes, mais cette formule n'est que très peu utilisée. Il convient de trouver un dispositif plus équilibré.

L'amendement 172, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Bardet, rapporteur - L'amendement 266 est rédactionnel.

L'amendement 266, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 173 vise également à responsabiliser le patient sans le pénaliser. Dès lors que le tiers-payant est généralisé, se pose le problème des complémentaires. Nous proposons de le résoudre au moyen d'un système de caution. Il pourrait ainsi y avoir, pour une cotisation de 100 €, 60 € de caution et 40 € de cotisation proprement dite. A la fin de l'année la caution serait remboursée dès lors qu'elle n'aurait pas été utilisée. L'expérimentation menée par une mutuelle depuis cinq ans aboutit à une économie globale, avec un remboursement total de la caution dans un tiers des cas, partiel dans un tiers et nul dans un tiers.

Dans ce système, il n'y aurait pas de malus, mais seulement un bonus, puisque l'on ne paierait pas plus lorsque l'on est malade.

M. Jean Bardet, rapporteur - C'est un amendement intéressant, mais prématuré. Il n'est pas certain qu'il soit applicable de manière généralisée, ni qu'il ait sa place dans le rapport annexé. Avis défavorable.

M. le Ministre - Je partage l'avis du rapporteur. Il n'appartient pas à l'Etat d'intervenir dans la tarification de produits d'assurance, encore moins dans la gestion de prestations complémentaires et facultatives qui font l'objet d'un contrat de droit privé. Nous aborderons ce sujet lorsque nous débattrons des champs de compétence respectifs des couvertures obligatoire et complémentaire.

M. Jean-Marie Le Guen - Je remercie notre collègue Préel, même si je ne suis pas d'accord avec lui, de pousser aussi loin la discussion sur l'avenir de notre système de protection sociale... Je m'étonne cependant des réponses du rapporteur et du ministre : le système de bonus-malus qui est proposé, bien qu'il ne concerne que la couverture complémentaire, est de nature à restreindre l'accès aux soins, d'une part, et à entraver la prévention, d'autre part, en dissuadant l'assuré de recourir aux soins de première intention. Il pose donc un problème grave.

Or, le ministre en fait une question de droit privé, ne concernant pas les pouvoirs publics, et ce au moment même où le Premier ministre annonce une extension du champ de la couverture complémentaire ! C'est un formidable recul de l'Etat de droit : le législateur est bel et bien intervenu à plusieurs reprises pour déterminer la nature des contrats. Pour des raisons de santé publique, le système de bonus-malus devrait être purement et simplement interdit en matière de consommation de soins. Le ministre ne nous apporte aucune réponse sur le fond, mais une réponse de circonstance, il est pour le moins préoccupant qu'il estime qu'une telle disposition relève du seul contrat.

M. Claude Evin - Quel dommage de débattre un mardi matin à 9 heures 15, dans un hémicycle aussi clairsemé, d'une question qui touche à l'avenir même de notre sécurité sociale !

Nous avons bien compris hier que devant la hausse prévisible du déficit en 2003, le Gouvernement entendait via une loi de financement rectificative, annoncer aux Français que la sécurité sociale ne pourrait plus tout payer et qu'il leur appartiendrait de s'assurer de leur côté. C'est la même logique qui est à l'_uvre ce matin : les mutuelles et autres organismes complémentaires, nous dit-on, pourront s'organiser comme ils l'entendent. Une loi de 1991 a pourtant fixé des règles précises pour mettre fin aux dérives observées en matière de couverture complémentaire.

Nous ne pouvons accepter de voir affaiblir la couverture de base au profit d'une couverture complémentaire qui serait affranchie de toute règle. Voilà qui augure bien mal des intentions du Gouvernement !

L'amendement 173, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - La DRASS et l'ARH d'Alsace viennent d'actualiser l'étude sur la dépendance des personnes âgées qu'elles avaient menée il y a cinq ans. Il ressort de leurs travaux que 25 % des personnes âgées en situation de dépendance moyenne et 10 % des personnes âgées en situation de dépendance lourde ont retrouvé leur autonomie. Pourquoi ? Parce que l'Alsace a développé depuis longtemps un remarquable système de prévention de la dépendance et de soins aux personnes âgées, alors que, dans d'autres régions, la gériatrie reste trop souvent dévalorisée au sein de nos hôpitaux.

L'amendement 146 a pour double but de faire comprendre que la dépendance n'est pas inéluctable et d'encourager la pleine reconnaissance de la gériatrie, ainsi que nous avons commencé - trop modestement - à le faire. Le rapport annexé doit reconnaître à part entière la dignité et la spécificité des soins apportés aux personnes âgées, à l'instar de ce qui se fait depuis dix ans dans le domaine des soins palliatifs et de la lutte contre la douleur. Il s'agit de changer notre regard sur la vieillesse et sur la dépendance des personnes âgées.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour l'assurance vieillesse - La commission a rejeté cet amendement, qui rejoint cependant notre souci de « donner de la vie aux années après avoir donné des années à la vie », selon une formule désormais célèbre... Le ministre a en effet annoncé pour le début de l'année prochaine une grande loi sur la santé publique, qui comportera un volet de prévention, et c'est dans ce texte que l'amendement pourra trouver sa place.

M. le Ministre - Sagesse.

M. Pascal Terrasse - L'avis du ministre semble indiquer qu'il est sensible à l'exposé de Paulette Guinchard-Kunstler. Les personnes âgées sont pourtant, avec les familles, les grandes absentes de ce texte. On nous renvoie aux futurs projets de loi sur la retraite ou la santé publique, mais il me semble important que le Gouvernement précise dès maintenant ses orientations en matière de gériatrie et de gérontologie.

M. Maxime Gremetz - J'apprécie que le ministre s'en remette à la sagesse de l'Assemblée, et je soutiens pleinement cet amendement, qui adresse un message fort aux personnes âgées et à leurs familles et devrait recueillir l'assentiment général.

L'amendement 146, mis aux voix, est adopté.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Merci !

M. Jean Bardet, rapporteur - L'amendement 23 corrigé reprend celui que M. Préel avait déposé en commission et qui ne portait que sur la maladie d'Alzheimer. Nous l'avons étendu à l'ensemble des maladies neuro-dégénératives compte tenu du caractère tardif du diagnostic de la maladie d'Alzheimer.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 177 est identique. La maladie d'Alzheimer et les autres maladies neuro-dégénératives posent de graves problèmes, notamment aux familles des malades. Il est important que le rapport annexé mette l'accent sur la nécessité de développer les accueils de jour.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. Pascal Terrasse - Le groupe socialiste s'associe à ces deux amendements. Les maladies neuro-dégénératives sont en effet une priorité de santé publique. A la suite du rapport Girard, Bernard Kouchner et Paulette Guinchard-Kunstler avaient présenté l'an passé un « plan Alzheimer ». Quelque trois cent mille personnes sont atteintes de cette maladie, et elles pourraient être six cent mille à l'horizon 2020. D'où l'importance d'un diagnostic précoce, ce que permettent les centres de mémoire, lesquels font encore trop cruellement défaut dans nos hôpitaux. La loi de modernisation sociale et médico-sociale avait insisté sur la nécessité de les développer, ainsi que les accueils de jour, qui donnent un répit aux familles et que la recherche sur ces maladies, dans laquelle se sont engagés des CHU comme ceux de Bordeaux, Grenoble, Marseille et Montpellier.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Si vous nous aviez indiqué, Monsieur le Ministre, comme il est de tradition, les grands volets de l'ONDAM, nous aurions pu vérifier si les moyens dégagés permettront de continuer le travail remarquable, notamment d'accompagnement des familles, engagé par certaines équipes hospitalières comme celle de gériatrie de l'hôpital Purpan à Toulouse. En d'autres termes, les actions prévues dans le plan lancé par Bernard Kouchner et moi-même, si nécessaires aux familles et aux malades, mais aussi aux professionnels, seront-elles poursuivies ?

M. le Ministre - Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire ici hier matin, pour un ONDAM en progression globale de 5,3 %, la dotation de l'hôpital augmente de 5 %, celle de la médecine de ville de 5,6 % et celle de l'action médico-sociale de 6 %. Par ailleurs, notre politique du médicament vise à favoriser l'innovation, dont l'un des grands champs est précisément - avec le cancer et les maladies émergentes, en particulier virales - les maladies neuro-dégénératives. Les conséquences du vieillissement de la population sont bien une préoccupation majeure des pouvoirs publics tant au niveau de la recherche que des soins et de l'accompagnement.

M. Simon Renucci - Ces excellents amendements ne font toutefois pas assez de place à la prévention et au dépistage de ces maladies insidieuses. Le CHU de Toulouse a mis au point un dispositif standard d'évaluation, qui pourrait être utilement généralisé.

M. Denis Jacquat, rapporteur - La commission a émis un avis favorable. C'est sur ma proposition qu'elle a décidé à l'unanimité de viser de manière générale « les maladies neuro-dégénératives, dont la maladie d'Alzheimer ».

Les amendements 23 corrigé et 177, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Luc Préel - « Une société se juge en partie à la place qu'elle réserve à ses anciens. Ceux-ci sont concernés par les retraites. La retraite par répartition doit être confortée. Dès 2005, nous serons confrontés aux effets du « papy-boom ». La réforme des retraites sera engagée en 2003, après une large concertation des partenaires, pour évoluer vers l'équité public-privé. »

Tel est le texte de notre amendement 174.

M. Denis Jacquat, rapporteur - La commission a repoussé cet amendement. M. Fillon s'est engagé hier publiquement, ici même, à ce que les discussions sur la réforme des retraites se déroulent au premier semestre 2003.

M. le Ministre - Même avis.

M. Maxime Gremetz - Il est amusant de constater que toutes sortes d'amendements peuvent être déposés sur le rapport annexé dans la mesure où celui-ci ne comporte aucuns moyens - quand tant des nôtres, sur d'autres parties du texte, ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40 ! Mais cet amendement-ci est quand même un peu fort, M. Préel réduisant le contenu de la future réforme des retraites à une « équité public-privé » ! Il y a pourtant bien d'autres problèmes à prendre en compte. Méfiez-vous, nous avons déjà vécu cela et vu ce que donnait cette recherche d'équité !

M. Pascal Terrasse - Nous n'avons sans doute pas la même conception de l'équité que M. Préel. Pour lui, l'équité public-privé signifie que les salariés du public doivent cotiser davantage ou partir plus tard en retraite. Mais pourquoi ne rechercherait-on pas, à l'inverse, à améliorer les conditions de départ en retraite et le régime des salariés du privé ? (Interruptions sur les bancs de la commission) Alors qu'une vaste réforme va être engagée au début de l'année prochaine, il importe de ne pas mettre d'huile sur le feu. Cette réforme ne pourra être menée à bien qu'avec l'ensemble des organisations syndicales et des associations représentatives des personnes âgées, au terme d'un large débat public, comme cela a été le cas en Allemagne et en Italie. Lionel Jospin avait choisi sa méthode : diagnostic, dialogue puis décision. Le diagnostic a été posé dans plusieurs rapports, dont le rapport Charpin. Le dialogue est en cours, notamment au sein du Conseil d'orientation des retraites, présidé par Mme Yannick Moreau, et dans lequel plusieurs d'entre nous travaillent activement. Reste à espérer que le Premier ministre s'appuiera sur tous ces travaux préalables.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - M. Préel parle de « papy-boom ». En réalité, c'est plutôt à un « mamy-boom » que nous serons confrontés... (Sourires)

L'amendement 174, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - Ma collègue a fait une remarque judicieuse. Cependant, les femmes fumant de plus en plus, il risque d'y avoir un rééquilibrage...

Mon amendement 175 ne vise qu'à fixer une orientation : il est important, en matière de retraites, de relancer le dialogue social.

Pour répondre à Pascal Terrasse, je veux rappeler que l'UDF veut une société de responsabilité. Or la meilleure façon de responsabiliser les partenaires sociaux, ce serait une gestion paritaire des caisses de retraite.

M. Pascal Terrasse - C'est le cas !

M. Jean-Luc Préel - Non, car aujourd'hui les partenaires sociaux ne décident rien, et nous voudrions qu'ils décident des prestations en fonction des cotisations, et vice-versa.

Il faudrait, de même, créer une caisse de retraite des fonctionnaires, gérée paritairement. Il est trop facile de se tourner vers l'Etat pour demander à cotiser moins longtemps ou à toucher davantage. Si l'on veut réduire la durée de cotisation, il faut soit augmenter les cotisations, soit réduire les prestations (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Il n'y a pas d'autre solution !

M. Maxime Gremetz - Et voilà ! C'est la pensée unique qui reparaît !

M. Denis Jacquat, rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, pour les mêmes raisons que le précédent. Comme l'a dit M. Préel, il faut être responsable : nous le sommes tous ici, et nous voulons tous qu'avance la réforme des retraites.

Hier, j'ai donné des pistes au Gouvernement pour préparer les discussions à venir. N'anticipons pas. Les personnalités que nous avons auditionnées sont ouvertes à la réflexion, mais il faut discuter et négocier avant de légiférer.

M. le Ministre - Avis défavorable.

M. Maxime Gremetz - Ce débat est décourageant ! On nous parle de dialogue social. Or depuis des années, mon groupe propose le rétablissement des élections à la sécurité sociale, et aucun gouvernement ne l'a accepté. Nous avons déposé un amendement en ce sens : on lui a opposé l'article 40. Il paraît qu'organiser des élections, cela coûte trop cher ! Comment imaginer un vrai paritarisme sans élections ? Cela ne tient pas debout !

M. Pascal Terrasse - L'amendement proposé, une fois de plus, vise à opposer les salariés du public à ceux du privé (Protestations sur les bancs du groupe UDF).

Je veux rappeler que les régimes des fonctionnaires sont très hétérogènes : il y a les fonctionnaires de l'Etat, ceux des collectivités territoriales, ceux des hôpitaux, sans parler des régimes spéciaux. Les mineurs, les agents d'EDF-GDF, de la SNCF, doivent-ils encore être considérés comme des fonctionnaires ? Il existe une multitude de régimes, qu'on ne pourra pas faire entrer dans une même boîte.

Nous pourrions aussi parler du régime des commerçants et artisans, ou de celui des retraités agricoles, qui sont très déficitaires. Heureusement qu'il existe des mécanismes de compensation et de surcompensation ! Je n'ai pas voulu parler, hier, de la ponction opérée sur la CNAV, car il est normal qu'il existe une certaine solidarité entre les régimes.

Il s'agit d'un dossier complexe d'autant qu'il faudrait aussi tenir compte du caractère pénible de certains emplois.

M. Gremetz a raison : il faut renforcer la démocratie sociale. Nous votons un budget supérieur à celui de l'Etat et nous ne sommes qu'une vingtaine dans l'hémicycle. Certes, il appartient au Parlement de définir les grandes lignes budgétaires, mais la population n'est en rien associée au débat. Nous devrions réfléchir à la création d'un « Parlement social », qui serait le pendant du Conseil économique et social, avec des pouvoirs délibératifs (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). C'est ainsi qu'on pourra associer les citoyens à la gestion de leur protection sociale.

L'amendement 175, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - On peut toujours faire semblant de ne pas comprendre, mais je ne demandais que la responsabilisation des partenaires sociaux. Le Gouvernement veut-il les mettre devant leurs responsabilités ? Souhaitent-ils les exercer ? Ou bien veulent-ils rester purement revendicatifs ? (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

Mon amendement 176 vise à associer à la concertation les associations représentatives des personnes âgées.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Elles sont déjà consultées par l'intermédiaire du comité national des personnes âgées, ainsi que de personnalités éminentes comme Maurice Bonnet. Il est certain que le CNDPA sera associé aux négociations.

M. le Ministre - Même avis.

M. Pascal Terrasse - La Confédération française des retraités souhaite être représentée au sein des instances chargées des retraites, même si, comme les autres associations représentatives, elle siège au CNDPA. Par ailleurs, cela fait quelque temps déjà que M. Bonnet n'est plus à la tête de ce comité, et il faudrait songer à nommer son successeur...

On comprend bien le souci de notre collègue Préel de faire en sorte que les retraités puissent participer au débat ; encore conviendrait-il de choisir les associations les plus représentatives. Mais il faudrait en réalité associer l'ensemble de nos concitoyens, des plus jeunes aux plus âgés, car tous sont concernés par l'avenir des retraites : s'en tenir aux associations de retraités serait trop restrictif.

M. Maxime Gremetz - Je n'ai rien contre cet amendement puisque je suis pour que les associations, les organisations syndicales, les partenaires sociaux dans leur ensemble, et plus généralement nos concitoyens, soient associés à la réforme. Mais c'est un amendement partiel : pourquoi ceux-là et pas les autres ? C'est la raison pour laquelle je ne peux le voter.

L'amendement 176, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - Mon amendement 178 tend à introduire, dans le rapport annexé, des considérations relatives aux conjoints survivants. En effet il serait indispensable d'améliorer l'assurance-veuvage, aujourd'hui d'un montant très limité, et soumise, qui plus est, à des conditions de ressources extrêmement strictes ; de revoir les règles de cumul imposées aux polypensionnés ; de revenir sur la prise en compte de la majoration pour enfants dans le calcul des droits, malencontreusement décidée par le gouvernement socialiste ; de revoir enfin les conditions de cumul des pensions de réversion avec les droits propres des veufs ou veuves.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Nous sommes bien sûr très conscients de la nécessité d'examiner tous les problèmes évoqués par M. Préel, mais nous le ferons dans le cadre de la réforme des retraites. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.

M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille - Vous avez tout à fait raison sur le fond, Monsieur Préel : il y a, en ce domaine, beaucoup à réparer... Mais comme l'a dit le rapporteur, nous examinerons cela dans le débat sur les retraites. Je vous propose, dans cette attente, de retirer votre amendement.

M. Pascal Terrasse - Espérons que M. le ministre délégué sera entendu lors des arbitrages sur la réforme des retraites...

M. Denis Jacquat, rapporteur - Nous serons vigilants !

M. Pascal Terrasse - Le Gouvernement avait déjà pris des mesures en faveur des conjoints survivants, mais il reste encore beaucoup à faire car un grand nombre d'entre eux ont moins de 4 000 ou 5 000 F par mois pour vivre. Le groupe socialiste s'associe donc à cet amendement.

M. Jean-Luc Préel - Pour répondre à la demande du Gouvernement, je retire mon amendement.

M. Pascal Terrasse - Le groupe socialiste le reprend !

L'amendement 178, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Evin - Le paragraphe 2.2, qui concerne les risques professionnels, a pour titre « Etudier les conséquences d'un passage éventuel à la réparation intégrale ». Notre amendement 147 tend à supprimer le mot « éventuel ». En effet, la réparation intégrale, qui a fait l'objet, à la suite du rapport de M. Masse, d'un rapport réalisé par M. Yahiel à la demande de Mme Guigou, doit être l'objectif du Gouvernement. C'est une revendication assez ancienne, qui s'inscrit dans le prolongement de l'indemnisation intégrale désormais prévue pour les victimes de l'amiante.

M. Jean Bardet, rapporteur - M. Mattei a demandé à M. Yahiel de compléter son rapport, en particulier pour étudier la faisabilité financière de la réparation intégrale. L'adoption de cet amendement lui ôterait la possibilité de se déterminer au vu des résultats de cette analyse. C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

M. le Ministre de la santé- Même avis.

M. Pascal Terrasse - La loi de 1975 concernant le champ médico-social a fait l'objet d'une profonde réforme en 2001. Les associations de handicapés attendent maintenant avec beaucoup d'impatience la modification de l'autre loi de 1975, concernant l'orientation. Il serait bon de donner suite à la réflexion engagée sur ce sujet ; les quatre groupes de travail installés par Ségolène Royal ont fait un travail très intéressant.

Quant à la réparation intégrale, le Président de la République lui-même, dans une lettre à la Fédération nationale des accidentés du travail, a souhaité sa mise en place rapide. Il faut donc en effet supprimer le mot « éventuel », car nous savons bien que, si cet amendement n'est pas adopté, il n'y aura rien à ce propos dans les textes qui nous sont annoncés.

Mme Elisabeth Guigou - Je veux insister à mon tour sur cet important sujet. Le Gouvernement dispose maintenant de deux rapports commandés par son prédécesseur. La réparation intégrale s'impose, car la loi de 1898, qui fut une des premières grandes lois sociales, a laissé de côté les préjudices moraux et esthétiques, si bien qu'une victime d'un accident du travail est aujourd'hui moins bien indemnisée que celle d'un accident de la route.

Il faut que les partenaires sociaux trouvent un équilibre entre les intérêts des salariés et ceux des entreprises. Il vous faut, Monsieur le ministre, poursuivre les discussions que j'avais entamées avec eux. Bien évidemment, le MEDEF y participera en traînant les pieds, mais il ne faudrait pas que son retour au sein de la branche accidents du travail se traduise par un ralentissement de l'avancement de ce dossier.

Il appartient au Gouvernement de nous donner un calendrier. Je regrette que M. Fillon, qui en a la charge, n'ait pas répondu aux questions que nous lui avons posées hier et qu'il ne soit pas présent aujourd'hui. J'espère que M. Mattei nous donnera satisfaction. En attendant, l'Assemblée doit adopter cet amendement car cette réforme qui s'impose ne saurait être présentée comme éventuelle.

M. Maxime Gremetz - Je ne comprends pas bien l'exposé sommaire de cet amendement : il ne s'agit pas des risques professionnels, qui relèvent de la prévention, mais des accidents du travail et des maladies professionnelles.

M. Claude Evin - Juridiquement, cela s'appelle les « risques ».

M. Maxime Gremetz - Tout le monde en convient, ces accidents et ces maladies sont moins bien remboursés que d'autres. Monsieur le ministre, vous vous êtes demandé hier pourquoi tant d'actes étaient remboursés par la CNAM. Eh bien, nous avons un début de réponse avec un rapport qui vient d'être publié et qui montre que les salariés sont incités à ne pas déclarer les accidents du travail, ce qui fait que les dépenses qui y sont liées sont supportées par l'assurance maladie.

Enfin, je constate qu'alors que nous pouvons débattre de ce sujet dans le rapport annexé, notre amendement qui visait à inscrire le principe de la réparation intégrale dans le corps même du PLFSS est tombé, une fois de plus, sous le coup de l'article 40. Cela devient vraiment lassant !

L'amendement 147, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bruno Gilles - L'amendement 252 de M. Kamardine vise à mettre fin à l'inégalité qui frappe les familles mahoraises avec le plafond de trois enfants fixé pour le versement des prestations familiales à Mayotte. Cette disposition est discriminatoire, et frappe une population qui est déjà dans une situation bien difficile. Il convient donc de chercher les moyens d'y mettre un terme, afin de ne pas pénaliser plus longtemps les familles qui ont fait le choix d'élever plus de trois enfants.

M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour les recettes et l'équilibre général - La commission avait rejeté un amendement de M. Kamardine qui alignait immédiatement les règles relatives au versement des prestations familiales aux familles de plus de trois enfants sur celles de la métropole. Elle a en revanche adopté celui-ci, qui propose que soit engagée une réflexion en vue de l'harmonisation prévue en 2010. Je précise toutefois que cette harmonisation ferait perdre le bénéfice des allocations familiales dès le premier enfant.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées - Le Gouvernement s'est engagé sur la voie d'un rapprochement progressif des prestations familiales servies à Mayotte et en métropole.

Un certain nombre d'avancées sont intervenues dès cette année ; les allocations familiales, jusqu'ici limitées aux salariés, ont été étendues à l'ensemble de la population ; une allocation de rentrée scolaire est également versée désormais pour les enfants de 6 à 20 ans, ainsi qu'une prestation spécifique pour l'accueil en restauration scolaire. Dès janvier 2003, une allocation logement sera également servie aux familles qui supportent une dépense à ce titre.

Vous pouvez également être assurés de la volonté du Gouvernement de poursuivre l'harmonisation progressive avec la métropole. Il est également prêt à engager la réflexion à laquelle l'invite cet amendement et à faire évoluer les règles d'attribution des allocations si elles n'apparaissaient pas pertinentes.

Au bénéfice de ces explications, je souhaite le retrait de cet amendement.

M. Pascal Terrasse - Mayotte n'est pas le seul département ou territoire d'outre-mer où subsistent des inégalités flagrantes avec la métropole. Le groupe socialiste soutient toutefois cet amendement, qui invite le Gouvernement à une réflexion qui pourrait profiter à l'ensemble de l'outre-mer.

M. Bruno Gilles - M. Kamardine m'avait demandé de défendre son amendement, je ne puis le retirer à sa place.

M. Pascal Terrasse - Quel courage ! (Sourires)

L'amendement 252, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Bur, rapporteur - L'amendement 265 rectifie une erreur d'écriture.

L'amendement 265, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Patrick Delnatte - L'amendement 264 de M. Barrot vise à appeler l'attention du Gouvernement sur la situation des veuves. Il convient en premier lieu de sortir la majoration de 10 % pour les mères de famille du calcul du plafond de cumul, afin de ne pas reprendre d'une main ce qui a été donné de l'autre. Nous souhaitons également que l'on envisage une augmentation du plafond de ressources et que l'on se préoccupe du montant de l'assurance-veuvage.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Cet amendement de synthèse a plu à la commission, qui l'a adopté à l'unanimité.

M. le Ministre - Sagesse.

M. Pascal Terrasse - Cet amendement insiste à juste titre sur la situation des conjoints survivants, confrontés à un plafond de ressources beaucoup trop bas. Il convient également d'augmenter le montant de l'assurance-veuvage, pour tenir compte de l'évolution des salaires et du coût de la vie.

Le groupe socialiste soutient donc cet amendement.

M. Maxime Gremetz - En cette période de v_ux,...

M. le Président - C'est un peu tôt... (Sourires)

M. Maxime Gremetz - Non, dans ce PLFSS, le rapport annexé est un catalogue de v_ux.

Nous avons aussi déposé des amendements, mais qui ne pourront être discutés, en raison de l'article 40. Nous voterons donc celui de M. Barrot.

L'amendement 264, mis aux voix, est adopté.

M. Maxime Gremetz - A l'unanimité !

M. Patrick Delnatte - L'amendement 263 de M. Myard est défendu.

M. Yves Bur, rapporteur - L'intention est louable, mais l'amendement est trop vague. Avis défavorable.

M. le Ministre - Avis défavorable.

Mme Hélène Mignon - On peut certes tous s'entendre sur le principe d'un guichet unique de distribution des prestations sociales, mais les CCAS, les CAF et les conseils généraux se retrouvent déjà dans les commissions d'action sociale d'urgence. En outre, l'esprit de l'amendement est détestable, car il vise uniquement à lutter contre les « fraudes potentielles », et non à améliorer l'efficacité de l'aide aux personnes en difficulté.

L'amendement 263, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pascal Terrasse - Le budget de la sécurité sociale accusera en fin d'année un déficit important, qui se creusera encore en 2003, et nous ne savons toujours pas comment il sera financé. L'amendement 148 vise à organiser, dès le premier semestre 2003, c'est-à-dire dès avant la discussion de la loi rectificative, un débat au Parlement, au cours duquel le Gouvernement présentera les moyens qu'il envisage pour ce faire.

M. Yves Bur, rapporteur - Avis défavorable : il y aura déjà un collectif sanitaire et social. J'observe par ailleurs que, durant les années de forte croissance, vous aviez accumulé un excédent de l'ordre de 2,4 milliards, mais celui-ci a fondu - et même au-delà - au cours de la seule année 2002, ce dont vous êtes largement responsables. C'est l'hôpital qui se moque de la charité !

M. le Ministre - Même avis.

M. Maxime Gremetz - Cet amendement reprend une recommandation de la Cour des comptes : publier, en annexe de la loi de financement de la sécurité sociale, un état des dispositifs affectant l'assiette des cotisations sociales et de leur coût. J'espère que cela sera fait, sans quoi nous serons obligés d'aller chercher les informations ailleurs, ce qui n'est pas facile.

L'amendement 148, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Evin - L'amendement 149 corrigé a pour but de demander au Gouvernement de préciser le calendrier prévu pour la révision des lois de bioéthique. Je rappelle qu'un projet, dont Monsieur le ministre était rapporteur, a été voté en première lecture par l'Assemblée sous la précédente législature. Quand son examen reprendra-t-il au Sénat ?

M. Jean Bardet, rapporteur - Cet amendement n'a pas sa place dans un PLFSS. La première loi de bioéthique a été votée en 1994 ; elle aurait du être révisée en 1999, mais n'a commencé de l'être qu'en 2002. Je m'étonne donc de votre empressement soudain... Il n'empêche que ce sujet intéresse tous les parlementaires, et Monsieur le ministre répondra certainement à votre question.

M. le Ministre - Je souhaite que le projet vienne en discussion au Sénat dès janvier, et que tout soit terminé avant l'été. Si on peut aller plus vite, on le fera, mais ce calendrier m'apparaît d'ores et déjà raisonnable.

M. Claude Evin - Monsieur Bardet, en tant que rapporteur de la commission, vous devriez faire preuve de plus de respect envers l'initiative parlementaire. Je vous ferai observer, puisque vous cherchez la polémique, que la première loi de bioéthique a été votée en 1992, non en 1994...

M. Jean Bardet, rapporteur - Raison de plus !

M. Claude Evin - ...et que votre majorité n'est arrivée aux affaires qu'en 1993.

En tout état de cause, je suis satisfait par le calendrier proposé, qui, s'il est respecté, montrera à Monsieur Bardet qu'il y a sur ce sujet une vraie continuité de réflexion, hors de tout sujet polémique

L'amendement 149 corrigé est retiré.

L'article premier et le rapport annexé, modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. le Président - L'amendement 24 corrigé est réservé jusqu'après la discussion des autres amendements portant articles additionnels après l'article premier.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - L'utilité de ce débat est désormais reconnue sur tous les bancs de l'Assemblée. Fruit des ordonnances de 1996, il donne au Parlement le pouvoir d'analyser un budget largement supérieur à celui de l'Etat, et la représentation nationale voit s'améliorer son image lorsqu'elle se préoccupe de sujets qui touchent tous les Français : santé, famille, vieillesse. Personne ne niera la nécessité de développer la santé publique : dépistage du cancer, des maladies métaboliques, des maladies infectieuses.

Mais avons-nous vraiment les moyens de préparer les seize heures de travail en commission, les trois ou quatre jours de discussion dans l'hémicycle ? Nous nous appuyons certes sur le rapport de la Cour des comptes, ainsi que sur les recherches des rapporteurs et des administrateurs - que je félicite et remercie pour la qualité de leurs travaux, mais qui sont en nombre notoirement insuffisants.

L'amendement 25 vise à améliorer la qualité de nos débats, grâce à la création d'un Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, qui assurerait en outre le suivi de ces politiques et formulerait des propositions. Ainsi, le Parlement pourrait jouer pleinement le rôle que lui assigne la Constitution.

Cet office, je le souligne, ne viendra nullement concurrencer l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Au contraire, la complémentarité des deux instances est évidente, et l'organisation proposée est d'ailleurs largement inspirée de celle dudit office : il sera composé de douze députés et de douze sénateurs, désignés à la proportionnelle des groupes politiques, chaque groupe ayant au moins un représentant ; il sera assisté d'un conseil scientifique, où siégeront six personnalités qualifiées.

M. Jean Bardet, rapporteur - Si l'information du Parlement est la condition essentielle à l'exercice de ses prérogatives de contrôle du Gouvernement et d'élaboration des lois, cette exigence est d'autant plus aiguë dans le domaine de la santé que celle-ci est une des préoccupations majeures de nos concitoyens.

Or, le Parlement manque d'outils d'évaluation. En matière de santé, les décisions sont fondées sur des considérations scientifiques dont l'examen s'avère délicat pour le profane. En outre, le contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale exige des compétences particulières.

Pour remédier à cette carence, le président la commission propose de créer un office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, composé de députés et de sénateurs et assisté d'un conseil scientifique. Le Parlement disposerait ainsi d'une source d'information indépendante de l'exécutif et lui permettant de faire des propositions sur les politiques de santé.

Cet amendement rejoint le souci du ministre de voir le Parlement s'investir davantage dans ce domaine. Le rôle de cet office complétera celui des rapporteurs du projet de loi de financement de la sécurité sociale et celui du Haut conseil de la santé. La commission est donc favorable à l'amendement.

M. le Ministre - Nous abordons un sujet essentiel. Si le Parlement est saisi chaque année du projet de loi de financement de la sécurité sociale, du projet de budget de la santé et d'autres textes relatifs à la santé, il ne dispose pas de moyens satisfaisants, je le sais d'expérience, pour assurer l'évaluation, le suivi et le contrôle des décisions prises.

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, créé au début des années 1980 et qui a fait ses preuves, conservera évidemment toutes ses prérogatives, le nouvel office ne suivant que les politiques de santé. Aucune concurrence donc, mais bien une complémentarité entre les deux structures. C'est pourquoi le Gouvernement est très favorable à cet amendement.

M. Claude Evin - Le ministre nous rappelle que le Parlement n'a pas les moyens d'assurer pleinement son rôle. Qu'il soit remercié de sa sollicitude, mais il me semble plus conforme à la séparation des pouvoirs que le Parlement débatte lui-même de ses moyens d'organisation...

Le diagnostic posé n'en reste pas moins juste, alors même que les politiques sociales mobilisent un budget supérieur à celui de l'Etat et touchant à des questions extrêmement complexes. En revanche, la thérapie proposée n'est pas la bonne. Je m'étonne, en tant qu'ancien président de la commission des affaires sociales, d'entendre mon lointain successeur demander la création d'un organisme extérieur à celle-ci, plutôt que l'augmentation de ses moyens, qui demeurent insuffisants.

M. Pascal Terrasse - Très bien !

M. Claude Evin - L'examen de la loi de financement de la sécurité sociale donne à ses rapporteurs les mêmes prérogatives qu'à ceux de la commission des finances pour enquêter sur pièces et sur place, mais encore faut-il qu'ils en aient les moyens !

Si je me félicite que cet amendement mette ainsi en lumière un problème réel, ce n'est pas la création d'une nouvelle structure qui le résoudra. Ou alors, allons jusqu'au bout de la démarche et dotons le nouvel office de moyens de contrôle financier.

En vérité, l'affaire n'est pas mûre. Renforcer les moyens de contrôle du Parlement, oui, mais pas sous cette forme. Votre refus d'aller au bout de votre démarche induit d'ailleurs un risque de censure par le Conseil constitutionnel, qui pourrait considérer qu'il s'agit d'un cavalier social. Reprenons ultérieurement ce débat, auquel l'opposition est prête à apporter sa contribution. Mais nous sommes défavorables à cet amendement dans sa rédaction actuelle.

M. Jean Le Garrec - J'appuie l'analyse de M. Evin. Rien ne serait pire que de régler le problème en dehors de la commission concernée. Il faut impérativement d'autre part distinguer entre évaluation et contrôle, celui-ci doit englober les aspects financiers.

La loi de financement de la sécurité sociale est une création récente, et le rapporteur de la commission des finances a souhaité une réforme de la loi organique, dont on peut maintenant, au vu de plusieurs années de fonctionnement, identifier les lacunes.

Rien ne serait pire, disais-je, que d'ôter à une commission l'une des ses compétences fondamentales. La commission des affaires culturelles a pris de nombreuses initiatives ces dernières années, en entretenant des relations suivies avec la Cour des comptes, en lui confiant des missions ou en diligentant des missions d'information sur des sujets précis - je pense notamment au travail de Claude Evin sur la déconcentration. Ses moyens demeurent insuffisants : là est le problème. Mais il serait de mauvaise méthode d'espérer le résoudre en créant une entité supplémentaire. Traitons-le plutôt dans le cadre normal du fonctionnement des commissions permanentes.

M. Claude Birraux - Je ne souhaitais pas intervenir, mais je m'y vois contraint par le texte de l'exposé des motifs.

Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement. Président depuis juillet de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, dont je suis membre depuis l'origine...

M. Maxime Gremetz - On va vous donner une médaille ! (Sourires)

M. Claude Birraux - ...je ne peux rester sans réagir lorsque j'entends dire que le Parlement ne possède pas d'outil d'évaluation des choix en matière de santé. Je me bornerai, pour l'information de mes collègues, à mentionner quelques-uns des très nombreux rapports élaborés par l'Office depuis sa création. Février 2002 : « L'impact éventuel de la consommation de drogues sur la santé mentale de leurs consommateurs », rapporteur : M. Cabal, député ; janvier 2002, « Les incidences sanitaires et environnementales des essais nucléaires effectués par la France entre 1960 et 1996 et éléments de comparaison avec les essais des autres puissances nucléaires», rapporteurs : M. Bataille, député et M. Revol, sénateur ; décembre 2001, « La brevetabilité du vivant », rapporteur : M. Claeys, député ; avril 2001, « Les effets des métaux lourds sur la santé et l'environnement », rapporteur M. Miquel, sénateur ; mars 2000 : « Les conséquences des installations de stockage des déchets nucléaires sur la santé et l'environnement », rapporteur : Mme Rivasi, députée ; février 2000 : « Clonage, thérapie cellulaire et utilisation thérapeutique des cellules embryonnaires, rapporteurs : M. Claeys, député et M Huriet, sénateur ; octobre 1999 : « Génomique et informatique : l'impact sur les thérapies et sur l'industrie pharmaceutique », rapporteur : M. Serusclat, sénateur ; février 1999 : « L'application de la loi relative au don et à l'utilisation de produits et éléments du corps humain, à la procréation médicalement assistée et au diagnostic prénatal », rapporteurs : M. Claeys, député, et M. Huriet, sénateur ; juin 1998 : « L'utilisation des OGM dans l'agriculture et l'alimentation », rapporteur, M. Le Déaut, député ; octobre 1997 : « L'amiante dans l'environnement de l'homme : conséquences et avenir », rapporteurs : M. Le Déaut, député et M. Revol, sénateur ; février 1996 : « Les liens entre santé et environnement, en particulier chez l'enfant », rapporteur : M. Mattei, alors député. Et la liste serait encore longue. Vous aurez compris que je ne peux pas rester sans réaction quand j'entends dire que le Parlement n'est pas doté d'outil d'évaluation des choix scientifiques et techniques ! Que l'on crée un nouvel office, chargé de contrôler l'application des lois de financement de la sécurité sociale, je n'y vois aucun inconvénient, mais il faut éviter toute confusion.

M. Jean Le Garrec - Très bien.

M. Maxime Gremetz - Depuis des années, sur tous les bancs, nous déplorons l'absence d'un grand débat au Parlement sur les priorités de notre politique de santé.

M. le Ministre - En effet.

M. Maxime Gremetz - Si ce débat est enfin organisé, et j'espère qu'il le sera puisque c'était l'une des principales revendications de l'opposition d'hier, la commission des affaires sociales doit le préparer en amont en procédant à toutes les auditions et en commandant tous les rapports nécessaires. Malheureusement la proposition qui nous est faite ne va pas en ce sens. Une fois de plus, les parlementaires seront dépossédés du débat puisque cet office d'évaluation des politiques de santé ne comportera que douze députés... quand la commission en compte plus de cent quarante ! On risque d'obtenir l'effet inverse de celui recherché. Sans rien dire de ce que l'on va créer un nouvel outil quand le Premier ministre ne cesse de nous dire qu'il faut simplifier les structures !

M. le Président de la commission - Monsieur le président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques, vous avez cité une liste de rapports, remarquables, rédigés par cet Office mais il s'agit là de travaux de recherche, non d'évaluation des politiques de santé. En réalité, l'Office que nous proposons de créer sera complémentaire de celui que vous présidez, dont l'excellence est reconnue de tous. Il pourra d'ailleurs en utiliser les travaux.

L'amendement a été adopté à l'unanimité en commission, Monsieur Le Garrec.

M. Claude Evin - Non !

M. le Président de la commission - Si. D'ailleurs, M. Terrasse, qui était présent, le confirme. Vous avez certes changé d'avis depuis et dénoncez, Monsieur Evin, un cavalier parlementaire. Ce n'est absolument pas le cas. Au contraire, les textes prévoient bien que dans le cadre du projet de loi qui nous occupe peuvent être discutées toutes dispositions « améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale. » Pour le reste, il ne nous appartient pas de débattre ici du nombre de commissions permanentes de l'Assemblée, lequel est fixé par la Constitution. Comme le sait mon prédécesseur à la présidence de la commission des affaires sociales, celle-ci, épaulée par d'excellents fonctionnaires, travaille déjà énormément. Il n'est pas sûr qu'elle pourrait se charger encore d'une autre tâche. L'un des gros avantages de l'office que nous proposons de créer est aussi d'associer députés et sénateurs.

M. Jean Bardet, rapporteur - Je donne acte à M. Evin qu'il a émis des réserves en commission sur la création de cet office, de même que M. Renucci. Il n'empêche que la commission a voté cet amendement à l'unanimité des présents.

Par ailleurs, il importe de souligner que cet office ne concurrencera nullement la commission, dont je tiens à remercier les fonctionnaires pour leur compétence, leur efficacité et leur grande disponibilité.

Je suis membre de l'Office d'évaluation des choix scientifiques et techniques, dont je salue le président, M. Birraux. Il ne m'est jamais venu à l'esprit qu'il pourrait y avoir une opposition entre cet office et celui que le président Dubernard propose de créer, puisque ce nouvel office se bornerait à contrôler l'application des lois de financement.

M. Jean Le Garrec - Ne confondons pas contrôle et évaluation !

M. Simon Renucci - En commission, nous avions trouvé l'idée excellente, même si elle était difficile à mettre en _uvre. Mais on mélange contrôle et évaluation - à moins de créer deux sections au sein de l'office.

Le contrôle, c'est notre fonction. Quant à l'évaluation, elle nécessite des mesures et des comparaisons, ce qui signifie la mise en place de référentiels. L'évaluation, en somme, permet d'améliorer le contrôle, mais ce sont deux fonctions séparées.

M. le Ministre - Je confirme l'avis favorable du Gouvernement.

L'amendement 25, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Bur, rapporteur - L'amendement 26 de la commission vise à renforcer les pouvoirs d'investigation de la Cour des comptes, dans le cadre de sa mission de contrôle de l'application des lois de financement, afin d'assurer un meilleur suivi de l'enveloppe hospitalière. La Cour des comptes pourra ainsi enquêter sur la gestion des CHR, des CHU et de l'APHP - qui relèvent toujours de la compétence juridictionnelle et budgétaire des chambres régionales des comptes. L'audition des magistrats de la Cour des comptes a montré en effet les limites de leur pouvoir de contrôle.

M. le Ministre - Sagesse.

M. Claude Evin - Il est intéressant de constater qu'au moment où le Gouvernement s'engage dans la régionalisation, en déclarant qu'il faut organiser l'offre de soins au plus près de la population et des professionnels de santé, on souhaite confier le contrôle à l'échelon national.

Je ne veux pas entrer dans le débat sur les compétences et les moyens des chambres régionales des comptes. J'observe simplement une contradiction entre le discours qui nous est tenu et les propositions de la majorité.

Mieux vaut attendre le résultat des travaux engagés sur ce qu'on appelle la « gouvernance ». Cet amendement n'a pas sa place ici, puisqu'il ne porte pas sur le contrôle parlementaire.

M. Maxime Gremetz - Comme M. Evin, je suis favorable à un véritable contrôle des centres hospitaliers, mais je trouve cet amendement en contradiction avec l'objectif de décentralisation que s'est donné le Gouvernement.

Par ailleurs, Monsieur Mattei, je reste sur ma faim : comment allons-nous préparer le prochain projet de financement ? Quand vous étiez député, vous souhaitiez qu'on améliore ses conditions d'examen. Il faut en effet partir des besoins pour définir la politique de santé.

M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances - L'argument de M. Evin, selon lequel l'amendement serait un cavalier car il ne concerne pas le contrôle parlementaire, me semble spécieux. En effet, la Constitution prévoit que la Cour des comptes nous aide dans le contrôle des finances publiques.

Dans beaucoup de régions, les CHR et les CHU sont en nombre limité, ce qui ne permet pas au contrôleur de faire beaucoup de comparaisons. Il est donc souhaitable de donner aux magistrats une vision plus large. J'ajoute que cet amendement ne restreint pas le rôle des chambres régionales des comptes, qui conserveront leurs compétences. Il ne s'agit que de donner une vision d'ensemble à nos juridictions financières qui travaillent souvent de concert.

M. le Ministre - Monsieur Gremetz, non seulement j'ai réclamé pendant des années qu'on améliore la préparation du projet de loi de financement, mais une disposition dans la loi du 9 mars prévoit la tenue d'un débat d'orientation en juin. Avec la loi de financement rectificative et le projet sur la santé publique, je pense que la représentation nationale sera parfaitement éclairée.

M. Maxime Gremetz - Je vous remercie de votre réponse.

L'amendement 26, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Bardet, rapporteur - Il n'est de bonne maîtrise que la maîtrise médicalisée. Comme de nombreux collègues de la majorité, j'ai longtemps plaidé pour un ONDAM médicalisé et j'ai le plaisir de constater que nous nous engageons dans cette voie. De quoi s'agit-il ? Un ONDAM médicalisé doit être calculé à partir d'une évaluation des besoins et des coûts par pathologie. Une étude récente a ainsi montré qu'en 1998, notre premier poste de dépenses était les maladies cardio-vasculaires, suivi par le traitement des troubles mentaux.

L'amendement 27 de la commission vise à donner une existence légale à la commission des comptes de la santé, en la mentionnant dans le code de la sécurité sociale et en lui demandant de fournir des comptes par pathologie.

M. le Ministre - Tout en partageant votre philosophie, le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement. Il n'est pas nécessaire de confirmer par la loi l'existence d'une commission créée par un arrêté. En outre, j'appelle votre attention sur le caractère expérimental de la ventilation par pathologie. Il ne serait pas raisonnable de prétendre la généraliser dans l'année. Le Gouvernement fera en sorte d'améliorer la logistique statistique.

En troisième lieu, la commission des comptes de la santé ayant des compétences purement techniques, et n'étant donc pas amenée à se prononcer sur les orientations de la politique de santé, je ne vois pas pourquoi il faudrait modifier sa composition.

Enfin, le rapport de la commission des comptes est public dès son achèvement ; le Gouvernement veillera à en assurer la transmission immédiate au Parlement.

Votre amendement, Monsieur Bardet, aura donné au Gouvernement l'occasion de vous confirmer qu'il est engagé dans une démarche visant à mieux connaître la répartition des dépenses et à aller vers la médicalisation de l'ONDAM.

M. Claude Evin - J'avais émis en commission les mêmes réserves que celles que vient d'exprimer le ministre. Les travaux qui ont déjà été réalisés sont intéressants, mais le chemin à parcourir reste encore long. Tout en encourageant le Gouvernement à poursuivre, je crois préférable de ne pas adopter cet amendement. Si l'Assemblée jugeait bon de le faire, il faudrait préalablement le sous-amender pour préciser que siègent également à la commission des représentants des associations d'usagers du système de santé.

M. Maxime Gremetz - Je partage pour l'essentiel les observations faites par M. le ministre. La multiplication des rapports et commissions risque d'entraîner une bureaucratisation, au détriment du Parlement. N'en rajoutons pas ! Si cet amendement n'est pas retiré, je voterai contre.

M. Jean Bardet, rapporteur - Compte tenu des explications du ministre, je le retire.

L'amendement 27 est retiré.

M. Jean Bardet, rapporteur - L'amendement 28, comme d'autres amendements qui vont suivre, a pour but de mieux informer l'Assemblée nationale. Il tend à assurer la transmission au Parlement des rapports d'activité annuels de la commission de transparence, chargée de donner un avis sur le service médical rendu, et de la commission chargée d'établir la liste des dispositifs médicaux remboursables.

M. le Ministre - Le Gouvernement est favorable à cet amendement, ce qui ne préjuge pas de sa position sur d'autres demandes de rapport !

L'amendement 28, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Bardet, rapporteur - Par l'amendement 29, la commission prévoit de demander au Gouvernement de transmettre au Parlement, avant le 15 octobre 2003, un rapport « présentant la mise en place du codage des actes de médecine de ville et proposant des réformes en la matière ». J'espère que le ministre fera preuve de la même mansuétude que sur l'amendement précédent...

M. le Ministre - Le Gouvernement souhaite le retrait.

M. Claude Evin - Peut-être conviendrait-il de demander un rapport sur les rapports... Leur nombre rend l'information qu'ils contiennent relativement inaccessible. Je suis donc contre cet amendement, tout en souhaitant comme M. Bardet que le Gouvernement fasse le point sur l'état d'avancement des travaux relatifs au codage des actes.

M. Yves Bur, rapporteur - Il serait bon en effet d'éclairer la représentation nationale. Une expérimentation devait être engagée en 1998. A-t-elle eu lieu ? Si oui, quels en ont été les résultats ? Le codage des actes me paraît un outil essentiel pour éviter le remboursement à l'aveugle.

M. le Ministre - Le codage des actes de médecine de ville est intimement lié à la mise en _uvre de la classification commune des actes médicaux, sujet qui est actuellement abordé dans les négociations conventionnelles. Il ne serait pas opportun de légiférer avant de connaître leur issue. Je me réserve la possibilité, en fonction de leurs résultats, de pousser plus loin la réflexion du Gouvernement en janvier car, naturellement, je rejoins la préoccupation exprimée par le rapporteur.

L'amendement 29 est retiré, de même que l'amendement 30.

M. François Goulard, rapporteur pour avis - L'amendement 3 adopté par la commission des finances demande, même si je partage au moins en partie les observations qui ont été faites, un rapport de plus... Il paraît en effet indispensable d'y voir plus clair quant à l'impact financier des mécanismes d'indemnisation mis en place pour les victimes de l'amiante.

M. Jean Bardet, rapporteur - La commission des affaires sociales est favorable à cet amendement.

M. le Ministre - Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée, même si cet amendement paraît satisfait par le rapport d'activité du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante.

M. Maxime Gremetz - Il ne faudrait pas que l'adoption d'un tel amendement - qui me paraît inutile - donne l'impression aux victimes qu'on remet en cause la réparation à laquelle elles ont droit.

Je sais que telle n'est pas la volonté de Monsieur Goulard mais nous avons dû nous battre pour que ce fonds soit créé, nous devrons encore le faire pour que ces maladies professionnelles et leurs conséquences soient pleinement reconnues, comme certains arrêts de la Cour de cassation l'ont montré. En tant que salarié amianté moi-même, je ne veux pas que l'on donne la moindre impression de suspicion à ce propos.

M. François Goulard, rapporteur pour avis - Monsieur le ministre, le rapport d'activité du FIVA ne nous donne pas les perspectives à long terme que nous voulons.

Il ne s'agit absolument pas, Monsieur Gremetz, de contester l'existence de cette maladie mais d'être pleinement éclairés des conséquences financières de la montée en puissance de ce fonds, d'autant qu'il n'est pas exclu que nous ayons à adopter, demain, des dispositifs similaires au profit de salariés victimes d'autres produits. J'ajoute qu'il conviendrait que nous prêtions davantage d'attention, dans ce débat, au sujet essentiel des maladies professionnelles.

M. le Ministre - Je confirme que le Gouvernement s'en remet à la sagesse de Monsieur Goulard (Sourires).

L'amendement 3, mis aux voix, est adopté.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 123 ne propose pas un rapport de plus, il vise simplement à tenir compte d'une recommandation de la Cour des comptes en annexant au PLFSS l'état des dispositifs affectant l'assiette des cotisations sociales et leur coût.

Comme l'a montré Madame Jacquaint hier, de 1990 à ce jour, la part des cotisations patronales dans les ressources de la protection sociale est tombée de 79,7 à 66,5 %, tandis que celle des impôts et taxes passait de 3,1 à 19,6 %. Nous défendons donc un amendement visant à réformer le système de financement.

La Cour des comptes voit pour sa part dans les dispositifs ayant pour effet de soustraire des revenus à l'assiette des cotisations sociales une « menace pour les régimes de base ».

C'est donc pour que la représentation nationale dispose de tous les éléments nécessaires à ce propos que nous proposons que les documents fournis par la Cour des comptes soient annexés à ce texte.

M. Yves Bur, rapporteur - La commission a rejeté cet amendement. La Cour des comptes a longuement traité cette question et elle a chiffré à 10 milliards les pertes de recettes pour les systèmes sociaux. Il faudra donc un jour revoir les dispositifs d'exonération pour aller vers plus de justice.

M. le Ministre - Même avis.

M. Maxime Gremetz - On nous propose sans arrêt de nouveaux rapports mais on refuse cette recommandation de la Cour des comptes. Voilà qui montre le peu de cas que la majorité fait de son travail ! Avez-vous seulement lu son rapport ?

L'amendement 123, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Compte tenu de la gravité de ce vote, je demande une suspension de séance.

M. le Président - Vous n'avez pas la délégation de votre groupe.

M. Maxime Gremetz - Je vais aller la chercher et je demanderai trois suspensions coup sur coup !

M. le Président - Je ne fais qu'appliquer le Règlement.

M. Yves Bur, rapporteur - L'amendement 24 corrigé vise à mieux structurer le texte.

L'amendement 24 corrigé, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE 2

M. Jean-Luc Préel - Depuis le début des PLFSS, on leur a reproché que l'ONDAM soit fixé de manière pifométrique, par les fonctionnaires de Bercy, en fonction des prévisions de dépenses de l'année en cours. Je me réjouis donc que lui soit donné cette année un caractère beaucoup plus réaliste.

Nous souhaitons tous qu'il soit davantage médicalisé et le rapport annexé donne des signes excellents en ce sens, en prévoyant un rapport sur l'évolution des besoins de santé.

Ces besoins doivent être évalués d'abord au niveau régional, à partir des travaux des observatoires régionaux de santé, par les comités régionaux de santé dont la conférence nationale n'est hélas pas l'émanation. Cela aidera le Gouvernement à préparer le projet fixant les priorités de santé, que nous examinerons au printemps et qui sera financé ensuite par le PLFSS.

Le groupe UDF votera cet article qui va dans le bon sens.

M. Bernard Perrut - Ce bref article est important car il permettra aux parlementaires de disposer d'un rapport du Gouvernement sur la médicalisation de l'ONDAM et de mieux apprécier ainsi l'utilité de l'augmentation des dépenses de santé, qui reposera désormais sur une véritable analyse des besoins.

Les rapporteurs l'ont montré hier, le Gouvernement a hérité d'une situation bien difficile puisque, avec un déficit de 3 milliards, on était loin des excédents dont se targuait la précédente majorité. Ces dérives ont conduit à un dépassement de 12,8 milliards.

Il convenait donc de faire disparaître un taux d'évolution fixé uniquement sur des considérations budgétaires et l'opération vérité menée aujourd'hui est particulièrement bienvenue. Encore faudra-t-il que cette évolution repose effectivement désormais sur celle des besoins de santé, donc que les services du ministère disposent des informations nécessaires sur les pathologies.

Le chiffre de 123,5 milliards qui a été retenu paraît réaliste et un projet de loi de financement rectificatif tiendra désormais compte des données observées.

Nous ne pouvons que vous féliciter, Monsieur le ministre, de donner plus de place au Parlement dans le contrôle des finances sociales.

M. Claude Evin - Sur la forme, cet article pose un problème d'ordre constitutionnel puisqu'il prévoit de modifier une loi organique par une loi simple.

Quant au fond, il peut être intéressant pour l'Assemblée d'être éclairée dans ce domaine, mais méfions-nous des slogans. La médicalisation des dépenses de santé est évoquée depuis longtemps, mais personne n'a jamais réussi à le faire. D'ailleurs, vous avez vous-même mis en place un groupe de travail. Pourquoi ne pas attendre alors la fin de ses travaux ?

Mme Muguette Jacquaint - Pour débattre de la protection sociale, le Parlement a besoin de rapports. Or, le groupe communiste et républicain a déposé un amendement concernant un rapport de la Cour des comptes, que vous avez pris à la légère. S'il y a bien un endroit où l'on doit discuter des recommandations de la Cour des comptes, c'est ici. Je ne conteste pas votre refus de nous accorder une suspension de séance, puisque la délégation était à mon nom. Mais, pleinement en accord avec M. Gremetz, je reprends sa demande, compte tenu de l'importance de la question. Nous demandons donc une suspension d'un quart d'heure.

M. le Président - Vous avez évoqué un amendement qui, après avoir été défendu par M. Gremetz, a été rejeté.

Quant à la suspension de séance, M. Gremetz l'a demandée sans disposer de la délégation. Conformément au règlement de l'Assemblée nationale, je l'ai donc refusée, mais je vous accorde maintenant une suspension de cinq minutes.

M. Maxime Gremetz - Nous en demanderons deux autres pour avoir un quart d'heure !

La séance, suspendue à 12 heures 5 est reprise à 12 heures 15.

M. Yves Bur, rapporteur - Pour éviter que le nouveau rapport sur la médicalisation de l'ONDAM prévu par l'article 2 soit déclaré contraire à la Constitution parce qu'adopté au terme d'une procédure irrégulière, il convient de le transformer non en une nouvelle annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais en un simple rapport du Gouvernement au Parlement. Tel est l'objet de l'amendement 31 adopté par la commission.

L'amendement 31, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 2 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 2

M. Yves Bur, rapporteur - Par l'amendement 33, la commission, s'inspirant du comité des finances locales, propose d'instituer un comité des finances sociales chargé d'établir le montant des exonérations de charges à compenser aux régimes sociaux. Ce comité aurait dans un premier temps vocation à accompagner le démantèlement du FOREC, qui doit venir clarifier nos finances sociales avant tout effort de responsabilisation exigé des Français. La commission a émis un avis favorable.

M. le Ministre - Le Gouvernement souhaite le retrait. Si l'idée est séduisante, les missions du comité pourraient être élargies à l'ensemble des relations entre l'Etat et la sécurité sociale, et ses modalités de fonctionnement revues. J'envisage d'en confier le soin à un groupe de travail associant les membres du Parlement, afin de proposer une réforme à l'occasion soit du prochain collectif sanitaire et social, soit du prochain PLFSS. En attendant, le Gouvernement s'engage à transmettre au Parlement, à la suite de la commission des comptes de la sécurité sociale du printemps prochain, un rapport sur l'état des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale portant notamment sur l'application de l'article L 131-7 du code de la sécurité sociale, qui prévoit la compensation intégrale des exonérations de cotisations aux régimes de sécurité sociale.

M. Claude Evin - Je me félicite de l'intervention du ministre. Il est d'autant moins opportun de créer un « machin » supplémentaire que le Gouvernement engage une réflexion sur la gouvernance pour, précisément, redéfinir les relations entre l'Etat et les caisses de sécurité sociale. Ce débat est nécessaire et nous l'attendons depuis longtemps. Laissons-le se dérouler.

M. Maxime Gremetz - Faisant fi des remarques de la Cour des comptes, vous nous proposez de maintenir le FOREC que vous avez qualifié d'usine à gaz...

M. Yves Bur, rapporteur - Vous l'avez voté !

M. Maxime Gremetz - Non, nous avons voté contre.

M. Yves Bur, rapporteur - Mais vous souteniez le Gouvernement qui l'a créé !

Mme Muguette Jacquaint - Je vous déconseille de jouer à ce petit jeu-là !

M. Maxime Gremetz - Vous ne paraissez pas accorder plus d'attention aux comptes rendus de nos débats qu'aux recommandations de la Cour des comptes.

Vous étiez contre le FOREC parce que vous étiez contre les 35 heures ! Nous, nous voulions financer autrement les exonérations de charges patronales, en pénalisant les revenus du capital et les revenus financiers. Je regrette l'absence de M. Accoyer, qui nous a bien démontré que le FOREC était une épouvantable tuyauterie. Et voilà que vous nous proposez de la maintenir !

Nous estimons quant à nous qu'il n'y en a nul besoin, à condition d'accepter des innovations dans le financement de la protection sociale, d'ailleurs indispensables si on veut la sauvegarder.

Vous êtes tout de même formidables ! M. Goulard a opposé l'article 40 à l'amendement de suppression du FOREC que nous avions déposé. En tout cas, je ne le vois pas dans la liasse ! Aujourd'hui, vous nous proposez un nouveau « machin » et de nouveaux rapports où personne ne comprendra goutte. Si cet amendement est maintenu, nous voterons contre.

M. Pierre Hellier - Nous allons le retirer !

M. Maxime Gremetz - Et si je le reprenais ? (Sourires) Mais vous avez bien compris que nous proposons un autre mode de financement.

M. le Président - Monsieur Gremetz, je vous précise que les amendements irrecevables sont renvoyés au secrétariat de votre groupe.

M. Maxime Gremetz - Pour celui-là, j'en doute.

En tout cas, les amendements arrivent très tard. Nous travaillons vraiment dans de mauvaises conditions.

M. Yves Bur, rapporteur - Monsieur Gremetz, n'est pas « machin » tout ce qui permet à l'Assemblée nationale d'exercer son contrôle !

J'accepte, Monsieur le ministre, de retirer l'amendement avec l'assurance que la démarche annoncée sera bien engagée et qu'elle associera le Parlement.

L'amendement 33 est retiré.

M. Yves Bur, rapporteur - Par l'amendement 32, la commission propose une nouvelle version de l'amendement « fermier général »...

La sécurité sociale supporte les frais d'assiette et de recouvrement perçus par les services fiscaux en matière de fiscalité affectée à la sécurité sociale, alors que l'Etat ne compense pas le coût pour la sécurité sociale, notamment pour les caisses d'allocations familiales de la gestion du RMI et de l'AAH, dont elle supporte aussi la charge de trésorerie. Quid des engagements qui ont été pris ?

M. le Ministre - Attaché à la clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, je suis donc très favorable à cet amendement. Les frais de gestion facturés entre l'Etat et les organismes de sécurité sociale doivent être remis à plat. C'est dans cette perspective que dès notre prise de fonctions, nous avons, avec le ministre des finances, confié à l'Inspection générale des affaires sociales et à l'Inspection générale des finances la mission de recenser les opérations justifiant des frais de gestion, à la charge de l'un ou l'autre des partenaires, d'évaluer les méthodes de calcul des frais actuellement perçus et de proposer une méthode homogène de facturation. Cette mission, qui a d'ores et déjà commencé ses travaux, remettra son rapport d'ici le 1er septembre 2003.

M. Claude Evin - Il est en effet indispensable d'y voir clair sur ces coûts de gestion. A défaut de reprendre intégralement les termes de l'amendement dit « fermier général » que déposait traditionnellement notre collègue Recours, prédécesseur de M. Bur à la fonction de rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, et qui était toujours adopté à l'unanimité par la commission puis par l'assemblée, M. Bur en a respecté l'esprit. Nous ne pouvons que nous en féliciter.

L'amendement 32, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ARTICLE 3

M. Maxime Gremetz - Nous avons déposé avant l'article 3 une série d'amendements visant tous à corriger l'insuffisance de recettes de la sécurité sociale car c'est bien de cela qu'elle souffre.

Nous avions déposé un amendement tendant à supprimer le FOREC, non parce que celui-ci finance la réduction du temps de travail mais parce qu'il incarne le mal qui détruit notre protection sociale, à savoir la substitution progressive de l'impôt aux cotisations sociales. Nous avions dès l'origine voté contre la création de ce Fonds, destiné à abriter les circuits de financement de toutes les exonérations de charges accordées aux entreprises, sans aucune contrepartie en matière d'emploi. Notre amendement a malheureusement été déclaré irrecevable au titre de l'article 40. Ces exonérations de charges destinées à abaisser le coût du travail ont eu pour principal effet de créer des trappes à bas salaires et de creuser le déficit de la sécurité sociale... à dessein de justifier un jour la nécessité de sa remise en cause.

Nous avions aussi déposé un amendement tendant à restituer aux taxes sur le tabac leur affectation initiale, à savoir la prévention du tabagisme, également déclaré irrecevable au titre de l'article 40. Le rapporteur pour avis de la commission des finances n'est malheureusement toujours pas là pour nous expliquer pourquoi !

Nous avons proposé un autre mécanisme de financement, à la fois plus favorable à l'emploi et mieux à même de garantir des ressources pérennes à la sécurité sociale. Je vais vous le détailler puisqu'à lui aussi a été injustement opposé l'article 40. Son objectif serait double : d'une part, l'extinction progressive de la ristourne Juppé et autres exonérations de charges patronales prévues par la deuxième loi sur les 35 heures, d'autre part l'institution d'un nouveau dispositif d'allégement en contrepartie de créations effectives d'emplois et d'actions de formation...

M. le Président - Veuillez conclure, je vous prie. Votre temps de parole est épuisé.

M. Maxime Gremetz - Tant de nos amendements ne sont pas venus en discussion. Le dispositif que nous préconisons permettrait en outre de relancer la croissance et d'économiser des fonds publics, contrairement au vôtre, néfaste aussi bien à l'emploi, qu'aux salaires et à la protection sociale.

M. le Président - Le Règlement est le même pour tous, Monsieur Gremetz. .

M. Maxime Gremetz - L'article 3 du projet de loi de financement de la sécurité sociale ...

M. le Président - Je vous remercie, Monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz - Vous pensez avoir gagné, Monsieur le Président ? Je n'ai pas eu le temps de présenter l'amendement 114.

M. le Président - Il n'y a pas de rapport de force entre nous. J'applique le Règlement, d'égale façon pour tous.

M. Yves Bur, rapporteur - Avis défavorable à l'amendement 114, lequel alourdirait la fiscalité sur les entreprises, décourageant l'investissement et les implantations d'entreprises étrangères sur notre territoire.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 114, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Je vais prendre mon temps pour exposer maintenant l'amendement 118.

M. le Président - Vous avez droit à cinq minutes, pas davantage.

M. Maxime Gremetz - J'indique à l'Assemblée qu'en repoussant l'amendement 114, elle a voté contre l'augmentation de 3,3 % à 5 % de la contribution sociale sur les bénéfices. Le Gouvernement poursuit donc dans la voie du précédent, qui n'a jamais voulu accéder à notre demande sur ce point. Visiblement, il ne faut pas mécontenter le MEDEF !

Les exonérations de charges patronales ciblées exclusivement sur les bas salaires ont tiré les rémunérations vers le bas et aggravé la précarité de l'emploi. Le désengagement des entreprises du financement de la protection sociale est de plus en plus net, le MEDEF n'hésitant d'ailleurs pas à dire qu'il souhaiterait ne plus financer du tout la solidarité. La participation des ménages a, elle, été multipliée par deux et demi en vingt ans. L'impôt s'est ainsi progressivement substitué aux cotisations.

Notre amendement 118 tend à élargir l'assiette des cotisations sociales aux revenus financiers des entreprises, lesquels sont jusqu'à présent restés tabous, contrairement d'ailleurs à ceux des particuliers qui ont, eux, été mis à contribution. Cette mesure, tout en ne pénalisant que les entreprises qui préfèrent faire des placements financiers qu'investir, rapporterait quatre milliards d'euros à la sécurité sociale.

M. le Président - Merci, Monsieur Gremetz, d'avoir respecté le temps qui vous était imparti.

M. Yves Bur, rapporteur - Dans le contexte boursier actuel, taxer les revenus financiers des entreprises serait très insuffisant pour combler les besoins de financement de la sécurité sociale. Cela serait en outre préjudiciable à l'emploi. Comme l'était le gouvernement précédent, mais sans doute pas pour les mêmes raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 118, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Peut-être pourriez-vous, Monsieur Gremetz, faire une présentation commune des trois amendements qui suivent...

M. Maxime Gremetz - Non. Notre amendement 116 tend à refondre le financement de notre protection sociale. Les exonérations de cotisation ont tiré vers le bas l'ensemble des salaires et l'emploi continue de se dégrader. Il faut revoir l'articulation entre le financement de la sécurité sociale et l'entreprise, lieu de création des richesses. Cela implique une refonte des cotisations patronales, même si cela ne fait pas plaisir au MEDEF. Actuellement, plus une entreprise embauche ou augmente les salaires, plus elle paie de cotisations, tandis que celles qui licencient en paient moins. Les entreprises de main-d'_uvre paient deux fois plus que les institutions financières. Il s'agit de corriger les effets pervers de l'assiette actuelle, comme la Cour des comptes nous invite d'ailleurs à le faire. Nous pourrions ainsi faire face aux besoins en matière de santé. On pourrait moduler le montant des cotisations en fonction du rapport entre masse salariale et valeur ajoutée.

L'amendement 116, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Monsieur Gremetz, j'observe que vos amendements comportent le même exposé des motifs. Peut-être pourriez-vous les présenter ensemble ?

M. Maxime Gremetz - Puisque j'ai cinq minutes par amendement, je ne vais pas me priver. C'est le Règlement, Monsieur le président !

Le rapport de la Cour des comptes, que mes collègues de la majorité n'ont sans doute pas lu, indique qu'il faut revoir l'assiette des cotisations patronales. Je comprends que le MEDEF ne souhaite pas une telle réforme. Il n'y aura bientôt plus de cotisations patronales ! Mais le triomphe de la pensée unique sera provisoire.

Si la baisse des cotisations faisait reculer le chômage, cela se saurait ! Compte tenu de la masse des exonérations consenties ces dix dernières années, il ne devrait plus y avoir de chômeurs en France !

Notre amendement 115 va donc dans le bon sens. Il faut moduler l'assiette. Alors que les ristournes Juppé et Aubry s'appliquent à toutes les entreprises, de la multinationale à la PME, nous proposons de distinguer celles qui créent de l'emploi et forment leurs salariés de celles qui délocalisent et multiplient les plans de licenciement boursiers. Une étude récente a montré que 48 000 licenciements dits « économiques » sont dus en réalité à des préoccupations boursières.

L'amendement 115, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - On m'a reproché hier de ne pas avoir parlé de Mme Bettencourt... (Rires)

M. le Président - Monsieur Gremetz, revenez à votre amendement. Mme Bettencourt, nous y avons droit à chaque séance...

M. Maxime Gremetz - Monsieur le président, vous n'avez pas à porter de jugement sur ce que je dis. Mme Bettencourt est la première fortune professionnelle de France. Elle ne travaille pas beaucoup mais l'argent rentre ! Je pourrais aussi parler de M. Dassault, qui devrait être là, et qui n'est pas d'accord avec moi sur la réforme des cotisations patronales. Quant à M. Messier, il gagnait 5 millions par mois, ce qui représente 800 SMIC. Voilà la réalité. C'est pour ces gens-là que vous multipliez les exonérations. Il ne faut donc pas s'étonner qu'ils s'enrichissent et qu'ils jouent en bourse, provoquant les catastrophes qu'on sait.

On peut faire mieux avec les richesses produites en France : elles pourraient servir à améliorer le pouvoir d'achat et les conditions de travail des salariés, ou encore à financer une protection sociale de qualité. C'est tout le sens de notre amendement 117. Il semblera novateur aux adeptes de la pensée unique, mais il ne fait que revenir aux fondements de la sécurité sociale.

Ce n'est pas un hasard si c'est un ministre communiste qui, en accord avec le général de Gaulle, a créé la sécurité sociale. Ce n'est pas non plus un hasard si le groupe communiste et républicain se bat aujourd'hui pour préserver cette grande réalisation.

M. Yves Bur, rapporteur - Grâce à la mansuétude du Gouvernement précédent, Mme Bettencourt pourra le cas échéant bénéficier de l'APA (Sourires).

Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 117, mis aux voix, n'est pas adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

NOMINATION D'UNE DÉPUTÉE EN MISSION TEMPORAIRE

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant de sa décision de charger Mme Françoise de Panafieu, députée de Paris, d'une mission temporaire, dans le cadre des dispositions de l'article L.O. 144 du code électoral auprès de M. le ministre délégué à la famille.

Cette décision a fait l'objet d'un décret publié au Journal officiel du mardi 29 octobre 2002.

Prochaine séance cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 13 heures.

              Le Directeur du service
              des comptes rendus analytiques,

              François GEORGE


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