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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 21ème jour de séance, 56ème séance

3ème SÉANCE DU VENDREDI 8 NOVEMBRE 2002

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2003 -deuxième partie- (suite) 2

      OUTRE-MER (suite) 2

      QUESTIONS 9

      ORDRE DU JOUR DU MARDI 12 NOVEMBRE 2002 13

La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.

LOI DE FINANCES POUR 2003 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003.

OUTRE-MER (suite)

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer - L'examen du budget de l'outre-mer me donne l'occasion de vous présenter les grandes orientations de l'action du Gouvernement pour nos dix collectivités d'outre-mer.

C'est la première fois que j'ai l'honneur de défendre devant vous ce budget et je le fais avec d'autant plus d'émotion que l'outre-mer a retrouvé cette année toute sa place au c_ur de l'organisation gouvernementale avec un ministère à part entière, dont la vocation horizontale est enfin réaffirmée. Cette évolution très attendue témoigne de notre respect des Français d'outre-mer, part irremplaçable de la communauté nationale à laquelle ils apportent une immense et généreuse contribution. C'est pour eux que le Gouvernement mènera une action ambitieuse visant l'égalité économique, étape ultime de l'accès à la pleine citoyenneté de chacun.

Vous le savez, les moyens de mon ministère ne représentent qu'environ un dixième des crédits affectés à l'outre-mer. Il est donc de ma responsabilité d'intervenir auprès de mes collègues pour qu'ils mettent en place les financements propres à satisfaire les besoins des territoires dans leurs domaines de compétence. Il m'appartient aussi de veiller à la cohérence de l'action de l'Etat dans nos dix collectivités.

Le ministère de l'outre-mer est directement impliqué dans la réforme de la décentralisation. Et vous avez eu raison de le souligner, Monsieur Victoria, le socle institutionnel de nos collectivités d'outre-mer doit être solide et leur ancrage dans la République fort pour rétablir un parfait climat de confiance auprès des décideurs économiques. Oui, la Réunion gardera son statut départemental, conformément aux v_ux maintes fois exprimés par les Réunionnais, dont le choix, grâce à la révision constitutionnelle à venir, sera désormais toujours respecté. Je le redis avec force à tous les Réunionnais : grâce à la révision constitutionnelle, la Réunion obtiendra enfin toutes les sécurités juridiques qu'elle souhaite ; elle se met ainsi à l'abri de changements statutaires décidés autoritairement depuis Paris. Je sais que vous en êtes convaincus, Messieurs Victoria et Thien Ah Koon, contrairement à ceux qui osent encore demander la suppression de l'article 72-3, et qui, ce faisant, ne veulent pas prémunir la Réunion contre le « largage » dont, avec la plus parfaite mauvaise foi, ils accusent le Gouvernement. Il n'est pas acceptable lorsqu'on se dit gaulliste, de faire un tel procès d'intention à un Gouvernement dont le projet de révision constitutionnelle traduit fidèlement les engagements pris par le Président de la République. Nul, du reste, ne peut sérieusement douter de son attachement à l'outre-mer !

L'autre grande priorité est la lutte contre l'insécurité, aggravée outre-mer - en particulier en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin - par le poids de l'immigration clandestine. Ma participation, en tant que membre permanent, au Conseil de sécurité intérieure me permet de faire valoir les spécificités de l'outre-mer. Celles-ci ont d'ailleurs été prises en compte dans la loi d'orientation sur la sécurité intérieure, laquelle prévoit un renforcement significatif des moyens de police et de gendarmerie, notamment en Guyane. Vous avez eu raison, Madame Rimane, de souligner que l'insécurité frappe au c_ur une Guyane fortement déstabilisée par l'immigration clandestine.

Nous avons engagé une action déterminée pour lutter contre l'orpaillage clandestin ; les premiers résultats en sont encourageants. Des moyens humains supplémentaires ont ainsi été affectés. L'escadron dédié à la lutte contre l'orpaillage est maintenu et la création d'un peloton spécialisé « forêt » de soixante hommes a été accélérée. Je rappelle que le gouvernement précédent avait programmé pour le mois de juin de cette année le départ définitif de cet escadron, dont l'efficacité n'est pourtant plus à démontrer. En outre, nous avons modifié le code minier pour permettre aux procureurs d'ordonner sur place la destruction des moteurs des orpailleurs clandestins. Mme Taubira l'avait recommandé ; le gouvernement précédent ne l'a pas suivie. Nous avons, nous, agi immédiatement. A l'initiative du préfet de la Guyane, les opérations ciblées se succèdent depuis le 30 septembre. Plusieurs tonnes de matériels, des milliers de litres de carburant, des groupes électrogènes et du ravitaillement ont été saisis, une centaine de personnes en situation irrégulière ont été interpellées. Les orpailleurs clandestins et leurs commanditaires doivent comprendre que ces activités ne seront désormais plus rentables en Guyane.

De telles mesures sont de nature à décourager l'immigration clandestine, d'autant qu'elles ont été complétées par un renforcement du personnel de la police de l'air et des frontières. J'ai également demandé à nos ambassadeurs au Surinam et au Guyana de relancer la négociation d'accords de réadmission, à l'instar de ceux qui existent déjà avec le Brésil. Une action similaire est menée, Monsieur Almont, dans la Caraïbe, vis-à-vis de Sainte-Lucie et de la Dominique.

Madame Rimane, vous m'avez proposé de donner à l'hôpital de Saint-Laurent-du-Maroni un statut d'extra-territorialité pour décourager les Surinamiennes de venir accoucher en Guyane dans la perspective d'obtenir des papiers français. Cette proposition soulève d'importants problèmes juridiques. En outre, la difficulté tient à l'allongement du délai de reconnaissance d'un enfant, que le gouvernement précédent a porté à un mois. Cette réforme a favorisé la constitution d'une filière organisée de reconnaissance en paternité. Pour mettre fin à ce trafic, je limiterai le dispositif aux seules communes où il peut se justifier et j'en exclurai donc Saint-Laurent-du-Maroni, ce qui réduira considérablement l'intérêt d'un accouchement à l'hôpital de cette commune pour les étrangères en situation irrégulière - lesquelles espéraient ainsi faire reconnaître leur enfant par un père de nationalité française qu'elles avaient un mois pour trouver...

En matière de sécurité, vous attendez tous, bien légitimement, des résultats. Nous sommes en train d'inverser la tendance, puisque la progression de la délinquance a sensiblement fléchi, grâce notamment à la création des groupes d'intervention régionaux. Pour ce qui concerne les zones de compétence police et gendarmerie, nombre d'entre vous ont souligné les difficultés qui résultent d'un découpage ancien et inadapté. Après concertation avec les maires, les préfets m'adresseront des propositions concrètes pour remédier à ce problème.

Elles devront obéir à deux principes : une seule force - police ou gendarmerie - couvrira la totalité d'une commune ; les communes chefs-lieux de département seront couvertes par la police nationale. Les réaménagements qui en découleront seront effectués dans le cadre de la LOPSI du 29 août dernier.

La place privilégiée que le Gouvernement entend donner à l'outre-mer se traduit dans l'augmentation de son budget pour 2003. A périmètre constant, il progresse en effet de 1,5 %, soit une augmentation supérieure à celle du budget de l'Etat.

La baisse des crédits destinés aux services déconcentrés par rapport à ceux de l'administration centrale s'explique, Monsieur Manscour, par la globalisation des crédits de la préfecture de Martinique. Je tenais à vous le préciser.

Ne vous en déplaise, Monsieur Lurel, ces dernières années les budgets de l'outre-mer ont enregistré un taux de consommation scandaleusement insuffisant. Comment ne pas être troublé par des pratiques de pur affichage politique consistant à souligner l'augmentation exceptionnelle des crédits - ce qui suscite naturellement une grande satisfaction pendant l'examen par le Parlement du budget de l'outre-mer - et à oublier dès le lendemain et pendant les 364 jours suivants qu'il faut quotidiennement agir pour consommer ces crédits utilement et efficacement ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Avec plus de 727 millions reportés ces dernières années, nous avons perdu, au cours de la précédente législature, l'équivalent d'un budget de l'outre-mer ! (« Incroyable ! » sur les bancs du groupe UMP) Ce n'est pas l'existence même des reports de crédits que je critique, Madame Taubira, car je sais bien qu'il s'agit d'une pratique budgétaire courante, mais leur ampleur, inacceptable au regard des besoins de l'outre-mer. Les crédits reportés représentent en effet, comme l'a fort justement relevé Didier Quentin, l'équivalent de trois années de dotations de la LBU pour le logement ou près de deux années de crédits pour l'emploi du FEDOM. Quel gâchis ! Quelles occasions manquées au profit de l'outre-mer !

Et ceci pour en arriver à la situation étonnante où plus le budget augmentait, plus les reports de crédits progressaient. Ainsi, 60 % des crédits reportés ont concerné les années 2000 et 2001.

Dans le même temps, situation hautement paradoxale, l'Etat était défaillant dans la tenue de ses engagements à l'égard de plusieurs collectivités d'outre-mer. Je vous en donne trois exemples. Dans les quatre DOM, comme vous l'avez justement relevé, Monsieur Beaugendre, les budgets des assemblées départementales ont subi des prélèvements indus au titre de la CMU pour un montant de 70 millions. Nous mettons un terme à ces errements inadmissibles dès 2003. En outre, comme l'a relevé M. Audifax, cette CMU a entraîné pour les personnes âgées ou handicapées une contrainte insupportable : alors qu'elles étaient jusqu'ici prises en charge à 100 %, elles doivent maintenant souscrire à une mutuelle complémentaire. Lorsque je suis venue à la Réunion, j'ai annoncé que je m'emploierais à régler le problème. Il y faut malheureusement une loi. Si je ne puis parvenir à mes fins avant l'adoption de la loi-programme, c'est dans celle-ci que j'introduirai le correctif nécessaire.

Deuxième exemple de défaillance : ainsi que l'a noté Mme Vernaudon, en Polynésie française l'Etat s'est dispensé depuis 2001 de verser les dotations pour le fonds intercommunal de péréquation, pour un montant de 15,8 millions d'euros ! Cette question est en cours de règlement.

S'agissant de la Nouvelle-Calédonie enfin, M. Frogier a raison de se montrer exaspéré lorsque, faute de respecter le critère des effectifs scolarisés pourtant inscrit dans la loi et alors que les besoins sont criants, l'Etat inscrit une dotation insuffisante pour la construction et l'équipement des collèges. Ce sont près de deux millions d'euros qui manquent ! A cela aussi, nous sommes en train de remédier.

A ce propos, Monsieur Frogier, je trouve que vous avez excellemment réagi aux interventions de MM. Lambert et Brunhes. Que ceux qui invoquent sans cesse les accords de Nouméa commencent par les lire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jacques Brunhes - Nous les avons lus depuis longtemps !

Mme la Ministre - Le présent projet de budget rompt avec toutes ces pratiques, obéissant à une dynamique pragmatique, au plus près des réalités et des attentes. Faire ce que l'on annonce, ce n'est rien de plus que respecter ceux pour qui l'on travaille...

Par ce budget, nous commençons en outre à concrétiser les engagements pris par le Président de la République. En premier lieu, les crédits du FEDOM sont réorientés vers la création de vrais emplois durables dans le secteur marchand, conformément à l'esprit de la loi Perben. Les contrats d'accès à l'emploi bénéficient ainsi d'une augmentation de plus de 11 %. Contrairement à ce qu'on allègue, ce dispositif a très bien fonctionné jusqu'en 1997, c'est-à-dire jusqu'au moment où le gouvernement précédent a, pour des raisons politiques évidentes, divisé par trois les crédits.

Deuxième engagement tenu : ce budget commence à donner consistance au principe de continuité territoriale, avec la création du passeport-mobilité au profit de 11 000 étudiants et de 5 000 jeunes en formation. La mesure, très attendue, facilitera la mobilité des jeunes vers la métropole ou vers une autre collectivité d'outre-mer, à des fins d'études, de formation ou d'accès à un premier emploi.

Troisième engagement respecté : nous consacrons des crédits supplémentaires au développement économique et social des collectivités nécessitant un effort de rattrapage. Les deux conventions de développement pour Mayotte et pour Wallis-et-Futuna sont ainsi dotées, respectivement, de 20 et 2,5 millions d'euros par an sur cinq ans. Je tiens à remercier MM. Brial et Kamardine avec lesquels nous avons travaillé de façon à ce que ces conventions puissent être signées avant la fin de l'année.

Monsieur Brial, je suis bien consciente des difficultés que rencontrent nos compatriotes de Wallis-et-Futuna pour accéder aux services bancaires. Avec le ministre des finances, je m'emploie à maintenir et à améliorer le service indispensable ; de façon complémentaire, nous étudions des incitations à l'initiative privée ou semi-privée en vue d'améliorer l'offre de crédit. Quant à l'agence de santé, le nouveau directeur aura notamment pour mission de construire un premier budget prenant en compte l'apurement de la dette. Je veillerai avec mes collègues de la santé et du budget à ce que la dotation de l'Etat permette de tenir cet engagement. Enfin, mon cabinet travaille à pourvoir au plus vite le poste vacant de chef du service de l'équipement, mais nous recherchons un fonctionnaire de qualité, compte tenu de l'ampleur des travaux à mener.

Pour le reste, et en attendant la loi programme que vous examinerez au début de l'année prochaine, ce budget est un budget de transition qui ne néglige pas pour autant les préoccupations majeures que sont, pour l'outre-mer, l'emploi, la formation, l'insertion et le logement. S'il comporte des crédits importants en faveur des emplois aidés, par nature précaires, c'est dans l'attente de la loi programme qui favorisera, elle, la création d'emplois durables.

Beaucoup d'entre vous ont exprimé leur préoccupation à propos de l'avenir des emplois-jeunes, notamment à la Réunion. Dans l'ensemble de l'outre-mer, ce sont près de 10 000 jeunes qui occupent ce type d'emploi précaire. Le précédent gouvernement n'a rien fait pour leur assurer une bonne sortie de ce dispositif et il n'a notamment pas élaboré, comme promis, une instruction spécifique pour l'outre-mer. Pour ma part, j'ai annoncé que tous les contrats en cours iront, c'est la moindre des choses, à leur terme et que, par ailleurs, chaque jeune en fin de contrat bénéficiera d'un accompagnement individualisé. Ce dispositif est maintenant opérationnel. Aucun jeune ne sera laissé au bord du chemin, ce qui signifie que ceux pour lesquels nous n'aurons pas trouvé de solution à la fin de leur contrat verront celui-ci prolongé, au cas par cas, dans l'attente de cette solution. En outre, pour répondre aux besoins du monde associatif, nous étudions actuellement avec M. Fillon un nouveau dispositif d'insertion des jeunes comportant un volet spécifique pour l'outre-mer.

Monsieur Victoria, votre proposition d'étendre le congé solidarité aux collectivités locales est intéressante. Toutefois, la mise en _uvre de ce dispositif prévu par la loi d'orientation pour l'outre-mer s'est heurtée à de grandes difficultés : à la fin de septembre, la mesure n'avait permis de recruter que 24 personnes sur les 3 000 prévues dans le budget initial pour 2002. C'est pourquoi, préparant la loi-programme, je m'attache d'abord à rendre ce dispositif moins rigide, plus attractif et donc plus opérationnel.

Ce n'est pas sur ce seul point, Monsieur Lurel, que la loi d'orientation du gouvernement précédent n'a pas eu tous les résultats escomptés. Mon prédécesseur avait annoncé pour 2002 quelque 23 000 mesures pour l'emploi, dont 10 000 au titre du Projet Initiatives Jeunes, 3 000 au titre du congé solidarité et 10 000 au titre de l'allocation du retour à l'activité. Un tiers seulement ont abouti, soit 7 550 ! Au contraire, les prévisions pour 2003 ont été arrêtées avec pragmatisme, le nombre de mesures étant ramené à 9 300, pour un montant de plus de 46 millions d'euros, soit une augmentation de 23 % par rapport à ce qui a été effectivement réalisé en 2002. Dans le cadre du FEDOM, plus de 80 000 mesures d'insertion seront financées, contre moins de 75 000 en 2002.

On ne peut raisonnablement soutenir, comme le font Mme Bello, MM. Lambert, Brunhes et Lurel, que le Gouvernement réduit l'effort en faveur de l'emploi. Il faut regarder, non les chiffres virtuels, mais les chiffres réels ! Quant à la suppression de la créance de proratisation, consécutive à l'alignement du RMI, elle n'entraîne pas une baisse des moyens d'interventions pour l'outre-mer et n'affecte en rien, Monsieur Payet, les agences départementales d'insertion. L'alignement du RMI augmente en effet mécaniquement les contributions financières des départements à ces agences, dont les fonds de roulement pour les quatre années de créance de proratisation sont particulièrement confortables : de l'ordre de 120 millions d'euros au total ! Sauf à vouloir organiser un effet d'aubaine, la suppression de la part insertion de la créance de proratisation est justifiée car elle prend acte d'une économie de structure.

Monsieur Brunhes, nous avons aligné les allocations logement sur le niveau intermédiaire de métropole. L'outre-mer bénéficiera ainsi, Madame Bello, d'un rattrapage de 25 %, ce qui correspondra, pour une famille de trois enfants, à une progression de 65 euros. L'égalité avec la métropole est enfin assurée ! Le texte paraîtra dans quelques semaines, avec effet rétroactif au 1er juillet dernier.

Monsieur Grignon, les décrets d'application spécifiques à Saint-Pierre-et-Miquelon sont en cours d'élaboration avec les services du ministère des affaires sociales. Ils portent sur la mise en place de l'allocation spéciale vieillesse et de l'assurance invalidité, sur la coordination des différents régimes de sécurité sociale et sur la mise en _uvre de la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées. S'agissant de l'allocation logement, de l'allocation jeune enfant et de l'allocation de rentrée scolaire, un projet de texte est en cours d'examen. Pour ce qui est de l'assurance vieillesse, les articles 13 et 35 de la loi du 17 juillet 1987 portant réforme du régime applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon prévoient déjà que la revalorisation est fonction de l'évolution des salaires et de l'inflation à Saint-Pierre-et-Miquelon.

La jeunesse d'outre-mer doit pouvoir bénéficier sur place d'une formation de qualité. Plusieurs d'entre vous ont souligné la croissance du budget du SMA, qui permet la création de 500 postes supplémentaires. Mais, dans de nombreuses collectivités, les moyens ne suivent pas, notamment en matière de constructions scolaires. A la Réunion, Monsieur Victoria, les besoins en ce domaine sont effectivement très importants. Je pense donc, comme vous, qu'un plan de rattrapage serait nécessaire, et j'envisage, avec mon collègue, Luc Ferry, d'envoyer prochainement sur place une mission d'évaluation pour dresser un état des lieux et établir des priorités. A Mayotte, une mission est également programmée pour faire l'état des besoins, qui sont sans doute encore plus criants.

Vous avez également évoqué, Monsieur Kamardine, le statut des instituteurs de Mayotte et la question de la fonctionnarisation de l'ensemble des agents exerçant une mission de service public. Maintenant que l'ancrage de Mayotte dans la République ne fait plus débat, et que cette collectivité sera même mentionnée dans notre Constitution, cette question doit être réglée. Ces agents aspirent légitimement à être intégrés dans le statut général de la fonction publique ; leur message a été entendu par le Gouvernement. Dès cette fin d'année 2002, avec l'ensemble des ministères concernés, nous allons lancer un vaste chantier de titularisation qui s'étalera sur plusieurs années. Il devra se réaliser en parallèle avec la partition entre les services de la préfecture et du conseil général, qui doit intervenir le 1er janvier 2004.

Vous avez également souligné avec raison que certains textes nécessaires au financement de la décentralisation ont trop tardé. Je vous informe que celui qui permettra aux collectivités mahoraises de bénéficier du FCTVA sera publié avant le 31 décembre.

M. Almont a évoqué la situation des établissements hospitaliers. Trois centres ont fait l'objet récemment d'un suivi tout particulier : celui de Cayenne, dont la trésorerie était particulièrement dégradée, et qui a donc bénéficié d'un concours de 20 millions d'euros ; celui de Mayotte, également dans une situation budgétaire difficile, au bénéfice duquel 2,5 millions d'euros de crédits nouveaux ont été délégués ; enfin celui de Fort-de-France, dont les difficultés sont liées notamment à la mise en _uvre des 35 heures, et au sujet duquel mon cabinet et celui de Jean-François Mattei poursuivent actuellement des discussions avec les représentants des professionnels de santé.

S'agissant des effectifs, je constate par exemple qu'au centre hospitalier de Pointe-à-Pitre, près d'un quart des emplois de médecins sont aujourd'hui vacants. Il convient de rendre ces emplois plus attractifs dans l'ensemble de l'outre-mer. En ce qui concerne le personnel infirmier, compte tenu du nombre important des départs à la retraite programmés et de la durée de la formation, il est nécessaire dès maintenant d'augmenter les quotas des écoles d'infirmières. Je m'y emploie avec mon collègue de la santé.

Vous avez été nombreux à évoquer les problèmes de transports. Après le passeport-mobilité et la réforme de l'ANT que je compte mener à bien le plus rapidement possible afin que les jeunes reçoivent en métropole l'accueil dont ils ont besoin, nous engagerons une deuxième étape, dans le cadre de la loi programme, pour améliorer les transports et faire baisser leur coût.

Nous souhaitons favoriser la concurrence dans le transport aérien et éviter les situations de monopole. Nous étudions actuellement plusieurs mesures dont pourraient bénéficier les compagnies existantes, ainsi qu'une nouvelle compagnie qui serait dédiée à l'outre-mer. Sur ce dernier point, nous favoriserons, dans le cadre de la réglementation communautaire les projets qui présenteront les meilleures garanties pour l'outre-mer.

M. Jacques Brunhes - Et Air Lib ?

Mme la Ministre - Vous avez rappelé, Monsieur Grignon, le problème spécifique de la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon, objet d'une concurrence exacerbée, et préjudiciable pour l'archipel, entre deux opérateurs. J'attends sous huitaine un rapport du ministère de l'équipement sur les perspectives d'évolution du dispositif d'aide de l'Etat ; je soumettrai aux élus et aux professionnels les propositions qui y figureront avant de décider des mesures à prendre.

S'agissant des transports publics intérieurs aux Antilles et en Guyane, vous savez, Monsieur Almont, qu'à mon arrivée à ce ministère, la situation était bloquée, puisque la majorité des collectivités et les professionnels rejetaient la proposition de création d'une agence des transports. Le Gouvernement a décidé de ne pas donner suite à cette organisation centralisée et n'a donc pas demandé la ratification de l'ordonnance du 7 mars 2002. Nous souhaitons que les réformes se poursuivent, sous la responsabilité des autorités organisatrices compétentes, afin d'améliorer l'efficacité des transports publics. A la suite de la révision constitutionnelle, et notamment de l'article 73, le Gouvernement sera attentif aux propositions qui pourraient être faites par les élus pour adapter leurs modalités d'organisation aux réalités locales.

MM. Quentin et Lagarde ont souligné l'importance du tourisme en termes de développement et d'emplois. Un contexte concurrentiel exacerbé et les difficultés du transport aérien ont contribué à une forte baisse de la fréquentation touristique depuis trois ans, conduisant à la fermeture inquiétante de plusieurs complexes hôteliers. Cette situation alarmante impose de bâtir rapidement un plan d'action pour la sauvegarde et la relance du tourisme outre-mer.

Cependant, les choix en matière de développement touristique sont aussi une affaire locale : il appartient en premier lieu au corps social, aux élus, aux entrepreneurs et aux collectivités d'outre-mer de définir la place que cette activité doit occuper dans leurs économies et les axes selon lesquels elle doit se développer. En accompagnement de la mobilisation que nous constatons sur le terrain, Léon Bertrand et moi-même avons engagé une réflexion sur ce que pourrait être la contribution de l'Etat ; nous serons très prochainement en mesure de faire des propositions au Gouvernement. Il me semble que le levier fiscal doit être plus largement utilisé pour remettre à niveau nos infrastructures touristiques. Je compte proposer des mesures spécifiques pour ce secteur dans le cadre de la future loi programme et du nouveau système de défiscalisation.

M. Didier Quentin, rapporteur pour avis de la commission des lois pour l'outre-mer - Très bien !

Mme la Ministre - MM. Beaugendre et Almont ont évoqué la situation difficile des producteurs de bananes antillais. C'est un dossier qui nécessite de tout ministre de l'outre-mer un combat quotidien, d'autant que nous sommes un peu seuls à Bruxelles. Nous avons pris récemment une mesure concernant le préfinancement des aides compensatoires, que la BDPME a accepté d'assurer à 100 %. Les producteurs demandent la transformation d'une partie des prêts de l'ODEADOM en subventions. Le Gouvernement y est favorable sur le principe ; mais nous allons étudier préalablement la situation financière de chaque groupement de producteurs.

S'agissant de l'avance sur l'aide compensatoire, la France a demandé, en octobre dernier, à la Commission européenne une revalorisation de cinq centimes d'euro par kilo au titre de 2002. Je dois dire que nous avons eu les pires difficultés à faire examiner notre demande ; Hervé Gaymard et moi-même avons néanmoins obtenu que le comité de gestion se réunisse le 6 novembre. Il a donné son accord pour une augmentation de 2,84 centimes. Même si ce résultat n'est pas totalement satisfaisant, il devrait permettre aux groupements de producteurs et aux planteurs de retrouver un peu d'oxygène.

La filière canne-sucre-rhum en Guadeloupe, Monsieur Jalton, reste confrontée à de sérieuses difficultés. La campagne sucrière 2002 a été bonne sur le plan de la quantité, mais elle n'a permis qu'une production totale de 52 600 tonnes de sucre. La pluviométrie abondante du début de campagne explique ces résultats décevants.

L'Etat continuera à soutenir financièrement les sucreries guadeloupéennes par les moyens prévus dans les conventions concernant tant Gardel que la Sucrerie et Rhumerie de Marie-Galante. Des discussions avec les administrations sont actuellement en cours sur les conditions dans lesquelles la convention liant l'Etat à Gardel pourrait être adaptée. Par ailleurs, les planteurs semblent souhaiter avoir accès au capital de la sucrerie, comme c'est déjà le cas à Marie-Galante où ils ont été appuyés dans leur démarche par la région. Cette implication plus grande des acteurs de la filière me paraît être une voie intéressante.

S'agissant de l'ananas de Martinique, Monsieur Almont, nous avons décidé avec Hervé Gaymard d'envoyer sur place un expert du ministère de l'agriculture afin de faire le point sur la situation de la SOCOMOR, pour expertiser les possibilités d'une reconversion partielle vers la commercialisation locale et à l'exportation d'ananas frais. Cette mission sera sur place le 12 novembre prochain et ses conclusions sont attendues pour la mi-décembre.

Par ailleurs, le système d'aide communautaire existant depuis 1976 ayant été transféré au nouveau règlement Poséidom, les autorités françaises ont présenté, cet été, un programme quinquennal de soutien à la filière qui vient d'être agréé, pour 2002, par la Commission, pour un montant de 7 millions. La France doit présenter au plus tard au début de l'année prochaine un nouveau programme pour la période 2003-2006. Le commissaire Fischler, dans un récent courrier qu'il m'a adressé ainsi qu'au ministre de l'agriculture, a réaffirmé son soutien politique au projet.

Enfin, comme vous l'avez rappelé avec pertinence, Monsieur Quentin, l'ancrage de nos collectivités d'outre-mer dans l'Europe est essentiel. Nous considérons que nos quatre régions ultrapériphériques doivent continuer à bénéficier de l'objectif 1 malgré l'élargissement. Il conviendra également de faire bénéficier Mayotte du statut de région ultra-périphérique.

Nous sommes en outre engagés dans une action conjointe avec la Commission pour alléger les procédures des fonds structurels européens, pour lesquels nous avons, là aussi, un vrai problème de consommation des crédits. La souplesse dont nos DOM pourront bénéficier avant même la révision à mi-parcours des DOCUP est à cet égard une mesure importante que le commissaire Barnier, dont le soutien nous est extrêmement précieux, nous a annoncée récemment.

Monsieur Marie-Jeanne, je partage votre analyse sur les nombreuses tracasseries administratives qui font obstacle à une utilisation optimale des crédits. Il faut absolument y remédier ; c'est pourquoi j'ai souhaité que l'outre-mer participe au vaste mouvement de réforme de l'Etat et de modernisation de la gestion publique. Un effort important de déconcentration de crédits, en particulier du FEDOM, sera fait dès 2003.

Je souhaite également instaurer un véritable contrôle de gestion de mon budget afin de pouvoir faire chaque mois le point de son exécution. Ainsi ne sera-t-on plus contraint de justifier le besoin en constatant la dépense...

Je remercie M. Lagarde d'avoir évoqué, fait rare dans cet hémicycle, le million de Français d'outre-mer qui vivent en métropole. On l'oublie trop souvent, c'est le cas d'un Antillais sur quatre ! J'approuve totalement les propositions qu'il a faites, en particulier de passer des contrats avec certaines communes de métropole (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Ces Français sont notre lien le plus précieux entre la métropole et l'outre-mer.

Ce budget n'est qu'une première étape de la politique ambitieuse que mènera le Gouvernement pour l'outre-mer dans le strict respect des engagements pris par le Président de la République. Dès le début de l'année prochaine, nous en engagerons une autre, décisive, qui tracera pour quinze ans l'avenir économique et social de nos collectivités d'outre-mer. Je le ferai, pour ma part, avec conviction, détermination et passion (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

QUESTIONS

M. Christophe Payet - Je vous pose à nouveau une question à laquelle M. Gaymard n'a pas répondu.

A la Réunion, les chefs d'exploitations agricoles sont en majorité de petits planteurs et leurs épouses ou leurs veuves se retrouvent, une fois à la retraite, dans des situations très difficiles.

Les agriculteurs eux-mêmes sont souvent dans le plus grand dénuement après une vie de dur labeur. Tout cela n'incite guère les jeunes à reprendre les exploitations.

Pour remédier à cela, une loi adoptée sous la précédente législature a créé un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles. Ce texte très attendu devait entrer en vigueur le 1er janvier 2003 mais le Gouvernement semble vouloir repousser le versement des prestations au 1er avril, alors que les cotisations seront appelées dès le 1er janvier.

Les agriculteurs n'ont que trop attendu ! Pouvez-vous nous indiquer le calendrier d'application de la loi et nous dire si les retraites agricoles sont bien une priorité pour le Gouvernement ?

Mme la Ministre - Ce dossier important fait bien partie de mes priorités. Le retard qui a été pris tient pour une large part à l'absence de caisse de MSA outre-mer. Je me suis rapprochée de M. Gaymard pour que nous traitions ce dossier au plus vite, et nous mettrons tout en _uvre pour aboutir dans les meilleurs délais.

M. Louis-Joseph Manscour - Vous nous avez déjà fourni quelques informations sur les transports aériens, mais je souhaite revenir sur la situation d'Air Lib, dont la disparition annoncée aurait de graves conséquences pour l'outre-mer, en particulier à l'approche de la haute saison touristique. Nous craignons en particulier qu'une fois en situation de quasi-monopole, les autres compagnies imposent des tarifs excessivement élevés. Cette disparition serait également très préjudiciable à l'économie de nos régions où près de 10 000 emplois sont menacés. Déjà, l'hôtellerie est en difficulté. Le Gouvernement doit garantir à tous les citoyens le droit à la libre circulation dans l'espace européen. A défaut, la continuité territoriale et votre passeport-mobilité demeureraient des v_ux pieux. Le Gouvernement doit aussi s'engager à maintenir une concurrence loyale tout en préservant les obligations de service public. Quelles initiatives va-t-il prendre pour rassurer les professionnels du tourisme et la population ?

Mme la Ministre - La situation d'Air Lib est préoccupante, même si, contrairement à ce qui a été dit, le Gouvernement n'a pas laissé tomber la compagnie, puisqu'il a prolongé de quatre mois le prêt de 30 millions du FIDES et aidé au montage juridique du GIE fiscal - lequel n'a finalement pas vu le jour, faute de repreneur.

Comme elle s'y était engagée, Air Lib a repris en août le paiement de ses charges sociales et aéroportuaires, mais elle l'a à nouveau interrompu, de façon unilatérale, en septembre. Sa dette atteint désormais 80 millions. M. Corbet a confirmé hier qu'il travaillait avec de nouveaux investisseurs, dont l'identité n'a toutefois pas été révélée.

Dans ces conditions, le Conseil supérieur de l'aviation marchande n'a pu émettre un avis favorable au maintien de la licence d'exploitation mais il est prêt à la prolonger si un nouveau plan de redressement était proposé avant l'expiration de la licence actuelle.

Le Gouvernement attend donc d'en savoir plus pour prendre des décisions.

M. Victorin Lurel - Merci, Monsieur le président, de nous faire l'honneur de présider en personne cette séance de nuit...

M. le Président - Merci de l'avoir remarqué !

M. Victorin Lurel - Je regrette seulement que mes collègues métropolitains ne soient pas venus en plus grand nombre. Ma question porte sur la santé. Vous avez bien voulu, Madame la ministre, nous fournir des informations sur la Guadeloupe mais ce sont tous les DOM qui sont malades de leurs hôpitaux, publics comme privés. A Pointe-à-Pitre, Cayenne, Fort-de-France, comme à la Réunion, c'est la même pénurie, la même misère qui frappent.

Pour offrir à nos visiteurs et à nos compatriotes un accueil et des soins dignes d'un département français, un véritable « plan Marshall » est nécessaire.

Le 21 mars dernier, à Kourou, la conférence des commissions médicales d'établissements a appelé votre attention et celle du ministre de la santé sur la grave crise de la démographie médicale. En Guadeloupe, le déficit est lourd en psychiatres, anesthésistes, pédiatres et radiologues. Le CHU de Pointe-à-Pitre est à ce jour virtuel, avec seulement quatre professeurs et quatre praticiens hospitaliers, ce qui empêche d'en faire un pôle médical de référence, d'y développer les études et d'y recruter des internes et des chefs de clinique compétents.

La Guadeloupe et la Martinique ont besoin d'un plan pluriannuel de créations d'emplois de praticiens hospitaliers universitaires - une quarantaine, dès 2003 - et d'infirmiers diplômés d'Etat - jusqu'à une centaine, car ils seront 70 chaque année à compter de 2004, à partir à la retraite. En outre, les filières de formation de puéricultrices, de kinésithérapeutes, d'infirmiers spécialisés en anesthésie doivent être créées et réparties entre la Guadeloupe et la Martinique. Mais si l'on veut favoriser le recrutement de praticiens hospitaliers dans les DOM, des mesures exceptionnelles sont nécessaires pour renforcer l'attractivité de ces emplois.

Quant aux travaux à entreprendre dans le domaine du patrimoine hospitalier public et privé, leur ampleur est considérable. Malgré les efforts consentis par le gouvernement précédent, il faudra encore consacrer 245 millions d'euros à l'hôpital public en Guadeloupe, et 57 millions aux cliniques privées - qui devraient bénéficier d'un dispositif de cautionnement auprès des organismes bancaires et d'un allégement de leurs charges sociales et fiscales.

La télémédecine, technique d'avenir, doit être encouragée entre les CHU de Pointe-à-Pitre et de Fort-de-France et les établissements de l'archipel guadeloupéen - Marie-Galante, Saint-Martin, Saint-Barthélémy - dans les domaines de l'imagerie médicale et du dossier médical partagé.

Il faut, enfin, que les enfants de Saint-Barthélémy puissent naître sur leur terre.

Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

Mme la Ministre - Le diagnostic est juste, et je partage votre analyse. Nous devons mettre en _uvre un plan d'urgence pour les différents centres hospitaliers. Je suis en liaison étroite, sur ce dossier avec M. Mattei, et nous comptons prendre à bras-le-corps les problèmes des DOM - mais ceux de Mayotte ou Saint-Pierre-et-Miquelon sont hélas au moins aussi graves...

La télémédecine offre, c'est vrai, de réelles perspectives, et j'entends bien favoriser son développement outre-mer.

Quant à Saint-Barthélémy, peut-être la révision constitutionnelle à venir et le désir d'autonomie des habitants permettront-ils de faire avancer le dossier ? Pour ma part, j'y suis prête.

M. Christophe Payet - La loi de programmation pour la sécurité intérieure prévoit la création 7 000 postes de gendarmes et de 6 500 postes dans la police, auxquels il faut ajouter la consolidation d'un peu plus de 2 000 postes existants.

Si la délinquance et la criminalité revêtent, à la Réunion, des formes parfois différentes de celles de la métropole, le sentiment d'insécurité y croît de la même manière. La lutte contre la criminalité et la délinquance s'appuiera-t-elle sur des moyens supplémentaires ? Pouvons-nous compter sur votre soutien pour obtenir du Ministre de l'intérieur une juste part des postes créés au niveau national ? Nombreux sont les policiers et les gendarmes originaires de la Réunion, et actuellement en poste en métropole, qui espèrent être mutés dans leur département d'origine. Le Gouvernement envisage-t-il une évolution de la réglementation qui favoriserait leur affectation prioritaire dans leur île natale ?

Mme la Ministre - 67 postes supplémentaires de policiers et de gendarmes ont été affectés à la Réunion, cette année, hors forces mobiles. Une nouvelle répartition des zones de compétence respectives de la police et de la gendarmerie est à l'étude ; a priori, plus de 138 000 habitants devraient passer en zone de police, où les effectifs seront renforcés. Je veillerai à ce que les nouveaux recrutements puissent se faire au moyen de concours déconcentrés, comme ce fut déjà le cas en Polynésie française, où 35 policiers rejoindront leur affectation l'an prochain au terme de leur formation en école de police.

M. Christophe Payet - Je vous remercie.

M. Victorin Lurel - Ma seconde question sera, je vous en préviens, un peu plus vinaigrée...

Pendant cinq ans, l'emploi a été la première priorité du Ministère de l'outre-mer. Ce n'est plus le cas aujourd'hui ; nous le regrettons (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Votre budget joue contre l'emploi ; il constitue une véritable régression, surtout vis-à-vis des jeunes. Les crédits des projets initiatives-jeunes diminuent de 50 %, de même que ceux de l'allocation de retour à l'activité, destinée aux bénéficiaires des minima sociaux. Alors que le nombre d'érémistes progresse encore de 3 % dans les DOM, vous ne trouvez rien de mieux que de supprimer la dotation de 31 millions d'euros correspondant à la part « insertion » de la créance de proratisation. Quant aux crédits du FEDOM, qui avaient augmenté de 25 % en 2002, ils diminuent de 25 millions.

La prorogation des emplois-jeunes, pour les contrats parvenus à échéance, reste hypothétique, et vous n'avez réussi à rassurer personne, encore moins les jeunes qui, à la Réunion, ont bloqué les routes. Les contrats-jeunes Fillon, réservés aux seize-vingt deux ans, sont des contrats déqualifiés et par là-même disqualifiés (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

La posture qui consiste à diaboliser l'action de vos prédécesseurs relève de l'idéologie (Mêmes mouvements). Je n'ai insulté personne, me semble-t-il, en parlant d' « évangélistes du marché » ! Je considère, pour ma part, qu'emploi privé et emploi public doivent aller de pair. Espérons que les gnomes de Bercy sauront faire preuve du même enthousiasme que vous, et que l'outre-mer ne souffrira pas trop ! Je voudrais que, pour les convaincre, vous nous redisiez vos ambitions pour la jeunesse.

Mme la Ministre - Il faudrait songer à quitter le monde virtuel pour le monde réel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). J'ai donné suffisamment de chiffres objectifs pour faire justice de vos accusations...

M. Victorin Lurel - De mes inquiétudes !

Mme la Ministre - ...de vos accusations selon lesquelles nous sacrifions l'emploi et réduisons les crédits. Le FEDOM représente 44 % de mon budget, les emplois-jeunes 15 %, et les emplois aidés augmentent de 6 %. Au total, j'augmente les crédits de 23 % par rapport aux mesures effectivement réalisées de la loi d'orientation. J'ai beau chercher, je ne vois pas un seul chiffre qui baisse !

Qu'entendez-vous, au juste, lorsque vous dites vouloir consolider les emplois-jeunes ? Les transformer en « emplois-vieux », comme le préconisait récemment M. Vergès ? Il faut plutôt que ces jeunes, au bout de cinq ans, obtiennent de vrais emplois, car je veux offrir à la jeunesse de vraies perspectives. Si, au bout de cinq ans, les emplois-jeunes débouchent sur des emplois durables, j'applaudirai : cela voudra dire, au moins, que le dispositif aura fonctionné ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

En revanche, s'il s'agit de les maintenir dans la précarité, je dis : non !

Je ne suis pas naïve : je ne pense pas que les entreprises pourront absorber la totalité des 7 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché de l'emploi à la Réunion. Je sais, donc, qu'il faudra maintenir un certain volume d'emplois aidés, mais notre objectif est d'en réduire le nombre.

Il faut faire en sorte que les jeunes trouvent un emploi durable dans le secteur marchand et, dans les cas où cela ne sera pas possible, envisager un dispositif leur permettant d'être embauchés par des associations - à condition, évidemment, qu'il s'agisse d'emplois sérieux. Car on ne peut s'empêcher d'éprouver quelques doutes lorsque l'on voit telle association réunionnaise se découvrir le besoin subit de 180 emplois-jeunes... (Mouvements divers)

M. Victorin Lurel - Je vous transmettrai les chiffres en ma possession, Madame la ministre.

Les crédits des titre III et IV de l'état B, successivement mis aux voix, sont adoptés.

Les crédits des titre V et VI de l'état C, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les crédits de l'outre-mer.

La suite de la discussion de la deuxième partie de la loi de finances est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu mardi 12 novembre, à 9 heures.

La séance est levée à 22 heures 35.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 12 NOVEMBRE 2002

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003
(n° 230).

M. Gilles CARREZ, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 256)

Anciens combattants ; article 62

M. Xavier BERTRAND, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 10 du rapport n° 256)

M. Georges COLOMBIER, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome V de l'avis n° 257)

2. Fixation de l'ordre du jour.

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003
(n° 230).

Santé, famille et personnes handicapées

Santé et personnes handicapées :

M. Gérard BAPT, rapporteur spécial au nom de la commission de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 38 du rapport n° 256)

Santé :

M. Jean-Luc PRÉEL, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome XI de l'avis n° 257)

Personnes handicapées :

M. Jean-François CHOSSY, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome XII de l'avis n° 257)

A VINGT-ET-UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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