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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 33ème jour de séance, 88ème séance

3ème SÉANCE DU MARDI 3 DÉCEMBRE 2002

PRÉSIDENCE de Mme Paulette GUINCHARD-KUNSTLER

vice-présidente

Sommaire

      NÉGOCIATION COLLECTIVE SUR LES
      RESTRUCTURATIONS AYANT DES INCIDENCES
      SUR L'EMPLOI 2

      EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ 9

      ORDRE DU JOUR DU MERCREDI 4 DECEMBRE 2002 21

La séance est ouverte à vingt-deux heures.

NÉGOCIATION COLLECTIVE SUR LES RESTRUCTURATIONS
AYANT DES INCIDENCES SUR L'EMPLOI

L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Avec le licenciement économique et ses conséquences sur l'emploi, j'ai conscience d'aborder un sujet qui est au c_ur de notre pacte social. Il touche, individuellement et collectivement, le quotidien de nos concitoyens. Peut-être plus qu'en tout autre domaine, les Français attendent que nous prenions nos responsabilités pour trouver les réponses conformes au seul intérêt général et que nous sachions surmonter les clivages partisans. Il s'agit en tout cas d'un dossier sur lequel on n'a plus le droit de mentir aux Français. C'est pourquoi vous me permettrez de revenir sur quelques vérités élémentaires, même si elles dérangent certains. En matière de licenciement, les débats de la précédente législature ont montré combien il en coûtait d'éluder les difficultés... (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) Les licenciements liés aux restructurations font malheureusement partie de la vie économique d'une entreprise, d'un territoire ou d'un pays.

Nul, en France, ne licencie par facilité ! Les entreprises licencient lorsqu'elles y sont contraintes...

M. Hervé Novelli - Absolument !

M. le Ministre - ... soit parce qu'elles sont en crise, soit parce qu'elles cherchent à préserver leur compétitivité en anticipant sur des difficultés à venir. Telle est la réalité de l'économie mondiale. Elle impose une adaptation continue de l'offre à la demande, commande un progrès permanent en termes de productivité et sanctionne toujours l'inadaptation des savoir-faire. Cette réalité, nul n'y échappe, quels que soient ses choix ou ses préférences partisanes. Assumer la réalité de l'économie de marché est un impératif pour lutter efficacement contre ses conséquences les plus inacceptables (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe UMP). Fort de cette lucidité, on peut anticiper les conséquences sociales des restructurations en s'efforçant de prévenir les risques d'exclusion des catégories de salariés les plus vulnérables et en luttant contre leur impact dans les bassins d'emploi les plus touchés. C'est dans cet esprit que j'ai mis en place une mission interministérielle sur les mutations économiques afin de mieux coordonner l'action publique en faveur des entreprises en difficulté.

Le présent texte vise à écarter les fausses promesses et les fausses solutions de la loi dite de modernisation sociale. L'opposition aurait dû saisir la chance qu'elle avait d'être aux commandes alors que la situation économique permettait d'examiner sereinement les lacunes de notre droit et de nos pratiques et les évolutions à y apporter. Je ne rappellerai pas les péripéties, les psychodrames qui ont marqué l'adoption de cette loi au sein de la majorité de l'époque, plus que plurielle sur la question...

M. Gaëtan Gorce - Prenez de la hauteur !

M. le Ministre - Les surenchères politiques sont inadmissibles (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) quand on touche à la vie des entreprises et aux emplois des salariés... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), inadmissibles et suicidaires car elles poussent notre économie dans la spirale du déclin en créant l'espoir d'une protection parfaitement illusoire. Ces calculs à courte vue se sont impitoyablement retournés contre leurs auteurs !

M. Hervé Novelli - Partout !

M. le Ministre - Ils nous ont donné le parfait exemple du n_ud de contradictions qui devait conduire la majorité précédente au grand écart, avec les conséquences que l'on sait ! Si le Gouvernement laissait les choses en l'état, combien d'entreprises en difficulté continueraient d'être contraintes à cesser toute activité plutôt que de s'aventurer dans le labyrinthe de la loi du 17 janvier 2002 ? (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) Combien d'investisseurs internationaux continueraient à s'implanter hors de France, lassés par notre tendance à rendre nos règles toujours plus lourdes et plus imprévisibles ? (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP) Combien pouvons-nous perdre encore de temps à laisser se dégrader le pouvoir d'attraction économique de notre territoire ? Mais, surtout, combien de salariés pouvons-nous laisser risquer de perdre leur emploi du fait des effets pervers de cette loi, et parce qu'on leur a fait croire qu'en faisant mine de durcir la législation sur les licenciements, on allait les éviter ! Nous touchons là au c_ur de ce qui nous sépare des derniers partisans de l'économie dirigée (Rires sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Et je ne parle pas de ceux qui cèdent à l'expédient politique tout en étant parfaitement conscients de la réalité.

Il y va de l'intérêt de tous d'écarter d'emblée les hypothèses fausses et dangereuses qui dénaturent le débat sur les règles de licenciement en France. Ainsi, il est vain de penser que l'on protégera l'emploi en multipliant les procédures ou en faisant peser l'obligation de consulter les représentants du personnel plutôt que d'inciter salariés et employeurs à négocier...

M. François Liberti - Négocier quoi ? Les licenciements ?

M. le Ministre - Il n'est pas plus raisonnable d'agiter l'épouvantail des licenciements boursiers pour stigmatiser l'ensemble des entreprises et leurs responsables, lesquels se battent pour en assurer la pérennité et la compétitivité. De l'aveu même de ses auteurs, ces idées-là ont inspiré la loi de janvier 2002. Son échec patent n'a pas d'autre origine (M. Maxime Gremetz s'exclame). Je ne crois pas, Monsieur le député, que vous vous grandissiez en participant au débat de cette manière. Vous aurez l'occasion de vous exprimer et je vous écouterai avec le plus grand respect. Pour l'heure, laissez-moi défendre mes opinions.

M. Maxime Gremetz - Monsieur le ministre, ne polémiquez pas !

M. le Ministre - Pour l'instant, c'est vous qui polémiquez ! L'effet sur l'emploi de la loi dite de modernisation sociale a été nul. Son caractère parfaitement illusoire est attesté par l'évolution des chiffres du chômage, des licenciements économiques et des plans sociaux. L'alourdissement des procédures a été sans le moindre effet sur les suppressions d'emplois dans les grandes entreprises, dont les dépôts de bilan ont augmenté de 40 % en un an.

M. Hervé Novelli - Il en a même été la cause !

M. le Ministre - On constate parallèlement une augmentation anormale des licenciements pour faute ou pour motif personnel. La réalité, c'est qu'entreprises et salariés s'entendent ainsi pour contourner la législation sur le licenciement économique.

Le texte a en outre ignoré les licenciements pour motif économique dans les PME où les salariés ne bénéficient pas des mêmes garanties de reclassement ou de reconversion que dans les grands groupes. Or 85 % des licenciements économiques interviennent dans ce cadre ! Dans les grandes entreprises touchées par une restructuration, le plan social est le plus souvent de qualité. Pourtant, ce sont elles qui attirent l'attention des médias et que les bons esprits se font un plaisir de mettre en cause, n'hésitant pas - irresponsabilité ultime - à en appeler au boycott de leurs produits !

Il est temps de sortir des facilités idéologiques qui conduisent à des présentations simplistes pour reconnaître que chaque situation est spécifique.

La loi dite de modernisation sociale est si contestée, de toutes parts, ses effets pervers sont si manifestes que nombreuses sont les voix qui se sont élevées pour réclamer son abrogation et le retour au droit antérieur.

M. François Liberti - Au Medef !

M. le Ministre - Mais cela aurait l'inconvénient de laisser subsister une pratique dogmatique imposée sans concertation par une loi de circonstance. Sur un sujet aussi essentiel que les règles de licenciement, ce serait perdre le fil conducteur de notre politique sociale, qui consiste à faire d'abord confiance aux partenaires sociaux avant de recourir à l'Etat - ainsi avons-nous procédé pour assouplir la loi sur les 35 heures ou pour bâtir les contrats « jeunes en entreprise ». Offrir toujours plus d'espace à la concertation, impulser un processus créatif plutôt que tout imposer d'en haut, renforcer la légitimité et la responsabilité des partenaires sociaux : mesure après mesure, nous déplaçons ainsi le curseur entre la loi et le contrat.

M. Hervé Novelli - Bravo !

M. le Ministre - L'enjeu n'est rien de moins que de donner naissance à une société participative et de confiance. C'est pourquoi je vous propose, non d'abroger les dispositions les plus contre-productives de la loi dite de modernisation sociale, mais de les suspendre pour dix-huit mois et de les renvoyer à la négociation interprofessionnelle.

Cette méthode repose d'abord sur un constat : notre droit du licenciement économique est unanimement contesté pour ses carences, ses insuffisances et ses dangers. Complexe et inutilement procédurier, il alimente les méfiances réciproques et les angoisses des salariés (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Il n'empêche en rien les licenciements mais il favorise les conflits et les contentieux sans garantir les reclassements. Il faut briser ce cycle infernal. Notre démarche se fonde avant tout sur le primat du dialogue social et de la responsabilisation des partenaires sociaux, ce qui revient à prendre le contre-pied de celle qui a présidé à l'élaboration de la loi du 17 janvier 2002.

Les règles du dialogue social doivent être établies par les partenaires sociaux représentatifs concernés, car je suis convaincu que ceux-ci sont à même de se mettre d'accord sur une méthode à cet effet. Or, aujourd'hui, la loi ne le permet pas - lorsqu'elle ne l'empêche pas ! Elle s'écarte en effet délibérément des pratiques de la plupart de nos voisins européens et de la directive sur les licenciements qui demande qu'un employeur envisageant des licenciements collectifs procède « en temps utile à des consultations avec les représentants des salariés, en vue d'aboutir à un accord ».

Il faut permettre et susciter des accords de méthode, conclus sur la base d'une reconnaissance mutuelle de légitimité et du respect des différences.

J'entends ainsi renouer avec la tradition française du paritarisme, qui, avant d'être brutalement rompue par les lois sur les 35 heures et par la loi dite de modernisation sociale, avait permis de grandes réformes dans le domaine de l'emploi et de la formation professionnelle. Ainsi l'accord du 10 février 1969 a-t-il précisé la procédure de consultation du comité d'entreprise avant toute compression d'effectif ; à celui du 10 octobre 1974, conclu lors du premier choc pétrolier, nous devons l'indemnité spécifique versée aux salariés licenciés pour motif économique. Tous deux, de même que l'accord interprofessionnel du 20 octobre 1986 conclu après l'abandon de l'autorisation administrative de licenciement, ont utilement préparé l'intervention ultérieure du législateur et contribué aux négociations de branche.

Le présent projet s'appuie également sur une évidence : pour un salarié, la meilleure garantie contre le licenciement réside avant tout dans la capacité de s'adapter au changement. Pour cela, il faut se concentrer sur la formation et sur les reclassements plutôt que d'alourdir les procédures.

Dans ce domaine aussi, c'est à la négociation entre partenaires sociaux de forger les compromis susceptibles d'élargir l'accès à la formation continue, de définir les mécanismes de l'assurance emploi et de garantir aux salariés, y compris ceux des PME, de véritables chances de reclassement et de reconversion.

L'article premier du projet renvoie donc à la négociation interprofessionnelle différentes dispositions de la loi du 17 janvier 2002, dont il suspend l'application pour dix-huit mois. Si, durant cette période, les partenaires sociaux parviennent à un accord, comme je le souhaite, une nouvelle loi devra en déduire le régime définitif de l'information et de la consultation à mettre en place en cas de restructuration et de plan social. S'il n'y a pas accord, je prendrai toutes mes responsabilités pour vous proposer de nouvelles règles. Celles-ci sont en effet indispensables, quoi qu'il advienne, et c'est la raison essentielle qui m'a conduit à écarter l'abrogation au profit de la suspension.

Cette adaptation des règles d'avant 2002 passe en toute hypothèse par la concertation et, sur un tel sujet, d'abord par la négociation interprofessionnelle. Les dispositions suspendues portent donc sur les modifications apportées aux règles organisant la concertation et le dialogue entre l'employeur et les représentants élus du personnel, modifications qui n'avaient fait l'objet ni d'un accord, ni même d'une concertation et qui furent critiquées par toutes les organisations syndicales. La loi du 17 janvier 2002 a prévu un médiateur, elle a organisé la séparation et la succession dans le temps des procédures de consultation définies par le code du travail, elle a introduit de nouvelles étapes dans l'exercice par l'administration de son pouvoir de contrôle : toutes dispositions qui allongent les délais et accroissent les risques de blocage et d'insécurité juridique pour les entreprises. Elles seront par conséquent immédiatement suspendues afin de favoriser leur renégociation au niveau interprofessionnel.

Par ailleurs, l'article 109 de la loi du 17 janvier 2002, qui écartait les qualités professionnelles des critères permettant de déterminer l'ordre des licenciements, tout en laissant aux employeurs la possibilité d'y avoir recours, est source d'une grande confusion. Il sera donc également suspendu.

En procédant de la sorte, nous n'entendons en aucun cas limiter l'objet et le champ de la négociation, mais au contraire les étendre. Le dialogue social engagé à l'occasion d'une restructuration et d'un projet de licenciement ne saurait, en effet, se limiter à l'information et à la consultation des représentants du personnel. Il faut aussi développer la formation, aider les salariés à s'adapter à l'évolution de leur emploi et faciliter les reclassements. J'ai par conséquent encouragé les partenaires sociaux à reprendre leurs négociations sur la formation professionnelle. Quant à l'assurance emploi, elle constituera la seule garantie véritable pour les salariés, face aux évolutions du marché du travail. L'Etat sera naturellement très attentif aux solutions issues des négociations.

L'article 2 s'inspire exactement de la même conception des relations sociales. Autorisant, à titre expérimental, la conclusion d'accords d'entreprise relatifs à l'information et à la consultation du comité d'entreprise en cas de licenciement économique, il vise à conforter les accords de méthode déjà signés dans certaines entreprises, et à encourager ailleurs leur négociation.

Ces accords de méthode devront préciser les modalités concrètes de mise en _uvre des obligations générales en matière de consultation des représentants du personnel. De tels accords, déjà expérimentés par certains, relèvent à l'évidence d'une bonne pratique. Donnons donc à celle-ci toutes ses chances en lui assurant une base légale. Ces accords pourront le cas échéant s'écarter des prescriptions actuelles du code du travail, mais ils ne pourront en aucun cas déroger aux dispositions portant sur le contenu de l'information délivrée au comité d'entreprise, ni priver celui-ci de son droit de formuler des propositions alternatives et de recourir à une expertise. Ils ne pourront non plus avoir pour effet de priver l'administration de ses prérogatives de contrôle.

Dans la mesure même où ces accords pourront s'écarter quelque peu de la loi, j'ai veillé à les entourer de garanties. En premier lieu, ils seront conclus à titre expérimental et leur durée sera limitée à deux ans. Ils pourront ainsi nourrir la négociation mais non préjuger de son issue.

En second lieu, les accords devront être signés par des syndicats majoritaires, ce qui est à la fois un gage de l'adhésion des salariés, une incitation à rechercher le compromis et une garantie de sécurité pour l'entreprise. La logique de l'accord majoritaire est en effet à l'opposé d'une logique de confrontation, souvent préjudiciable à l'entreprise comme aux salariés.

L'accord de méthode innove dans la mesure où il illustre une certaine idée de la démocratie sociale dans l'entreprise, y compris dans les phases les plus difficiles de la vie de celle-ci, et où il est de nature à donner un nouvel élan à la négociation sur l'emploi.

L'enjeu est important : développer une gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences et anticiper les mutations. C'est pourquoi l'application de cet article 2 fera l'objet d'un rapport du Gouvernement, accompagné de l'avis motivé de la commission nationale de la négociation collective.

Ce projet vise à rendre aux partenaires sociaux toute leur place dans l'évolution de nos règles sociales. Ecartant les fausses solutions de la loi du 17 janvier 2002, il introduit une nouvelle façon de gouverner les rapports sociaux, il donne une nouvelle respiration au corps social. En ce cens, ce n'est rien d'autre qu'un acte de confiance envers les acteurs sociaux (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Maxime Gremetz - Rappel au Règlement ! Monsieur le ministre, vous ne pouvez polémiquer et refuser qu'on vous réponde ! S'il faut que je me taise, autant que je sorte ! Certes, vous êtes un ministre de la République et je ne suis que député. Mais quand on présente un texte au nom du Gouvernement, on ne commence pas par polémiquer ! Si personne ne peut dire un mot pour répondre à l'intervenant, nous allons dormir pendant les trois nuits que nous allons passer ensemble...

M. Dominique Dord, rapporteur de la commission des affaires culturelles - On ne peut imaginer circonstances plus dramatiques pour les relations sociales dans une entreprise qu'un licenciement économique.

Sa dureté frappe d'abord les salariés, qui ont donné à leur entreprise une partie de leur vie, et souvent le meilleur d'eux-mêmes, et qui se retrouvent tout d'un coup dans une situation de vide professionnel, identitaire même, sans parler des conséquences familiales.

Mais c'est aussi la décision la plus difficile qui soit pour le chef d'entreprise (M. Gremetz s'exclame). Aucun chef d'entreprise, Monsieur Gremetz, ne licencie par plaisir. Si, confronté à un trou dans son exploitation, le chef d'entreprise ne réagit pas immédiatement en adaptant sa masse salariale, il prend le risque soit de se retrouver en dépôt de bilan, soit de voir ses actionnaires se dégager du capital. Vous pouvez hocher la tête, chers collègues de gauche, mais l'économie de marché et la libre circulation des capitaux sont des réalités que vous-mêmes n'avez pas changées.

Si donc nous ne voulons pas trahir notre mandat de représentants de la nation, nous devons tenir compte de ces deux aspects du problème. C'est ce que fait le Gouvernement dans ce projet, en refusant à la fois le statu quo et l'abrogation pure et simple : il suspend les mesures de procédure mais ne touche aucune de celles qui concernent directement le salarié. S'abstenant d'opposer un dogmatisme à un autre, il renvoie au dialogue social.

Les auditions nombreuses auxquelles la commission a procédé ne nous ont pas fait sentir, il faut le reconnaître, un appétit vorace de négocier ; mais nous n'avons pas eu davantage le sentiment que la majorité des personnes rencontrées s'y refusait totalement. Je pense donc que le dialogue social aura lieu, et je crois même qu'il aboutira.

Même parmi les représentants des salariés, beaucoup en effet considèrent que les dispositions de la loi de modernisation sociale sont mauvaises. Il s'agit souvent de mesures mirages : ajouter de la procédure à la procédure, ajouter une expertise à une autre n'a jamais fait réintégrer un salarié dans une entreprise ; et introduire un médiateur, c'est se défier des relations sociales dans l'entreprise.

Ni statu quo, ni abrogation, on ne touche qu'aux mesures de procédure : tel est l'esprit dans lequel nous allons lancer le débat pour que, dans dix-huit mois, nous débattions d'un nouveau projet de loi, tenant compte des arguments des partenaires sociaux et permettant tout à la fois de mieux protéger les salariés, notamment en termes de formation, et de laisser aux entreprises la capacité de se développer, donc de créer des emplois (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles - Ce projet suspend les mesures les plus controversées du volet « licenciements économiques » de la loi de modernisation sociale qui, en organisant un véritable labyrinthe de procédures, pénalisent gravement les entreprises et les salariés sans prévenir les licenciements.

La séparation désormais obligatoire entre les réunions du livre III et celles du livre IV conduit par exemple à interdire à l'employeur d'évoquer dans un premier temps les mesures sociales qui sont les plus importantes aux yeux des salariés. Le recours au médiateur est encadré dans le moindre détail alors que toute l'utilité d'une médiation tient dans sa souplesse. De nouvelles étapes sont introduites dans l'exercice du pouvoir de contrôle de l'administration. Toutes ces nouvelles obligations ouvrent une longue période d'incertitude, avec pour corollaire un climat épouvantable pour les salariés, sans parler de la méfiance des fournisseurs, créanciers et clients potentiels. A chaque étape de la procédure, les entreprises sont confrontées au risque d'un contentieux et d'une remise en cause des décisions ou accords conclus.

M. Maxime Gremetz - Vous allez finir par croire à ce que vous dites !

M. le Président de la commission - Les nouveaux moyens mis à la disposition des représentants du personnel relèvent davantage d'une logique de confrontation que d'une logique de dialogue. Les entreprises auront toutes les difficultés à conduire des restructurations, souvent inéluctables ; on voudrait les pousser à des licenciements pour motif personnel ou les contraindre au dépôt de bilan qu'on ne s'y prendrait pas autrement.

Cette loi décourage l'emploi, nie la convergence des intérêts de l'entreprise et des salariés, provoque des délocalisations d'investissements. Elle ne satisfait guère que les juristes et avocats spécialisés, pour lesquels elle constitue une source inépuisable de travail.

Alors que les restructurations sont un sujet éminemment douloureux et complexe, le précédent gouvernement a louvoyé avec désinvolture entre idéologie, réalités économiques et principes constitutionnels. Il faut dire qu'au lendemain d'élections municipales décevantes, Lionel Jospin était prêt à céder sur tout pour envisager les prochaines échéances électorales avec plus d'optimisme (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Le mot d'ordre était clair : bénéficier des voix de toute la gauche au second tour, et surtout garder une primauté formelle à l'allié communiste pour tenir en lisière des Verts jugés incontrôlables... En matière de licenciement, le Premier ministre accepte tout ce dont il ne voulait pas lui-même. Peu importe les dégâts : c'est le prix à payer pour sauver la majorité plurielle. Au lieu de sauvegarder l'emploi ce projet le sabote, et va se retourner contre ceux-là même que l'on avait prétendu protéger. C'est une telle évidence qu'elle apparaît à la plupart des patrons de gauche. Ainsi M. Peyrelevade, M. Mestrallet, et M. Weinberg s'associent à l'appel des 56 présidents des plus grandes entreprises françaises pour demander au gouvernement de M. Jospin de renoncer aux nouvelles dispositions qui « freinent l'adaptation des entreprises » et qui « constituent un piège pour les salariés » (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Quant à Laurent Fabius, il évoque ouvertement un « certain texte qui n'aurait pas dû voir le jour ».

Mais le gouvernement socialiste, qui reste sourd à ces critiques, n'écoute pas davantage les partenaires sociaux alors que ces derniers avaient été en 1969, en 1974 et encore en 1986 à l'origine d'accords fondamentaux sur le licenciement. La loi de modernisation sociale entraîne un appauvrissement du dialogue social à rebours des évolutions constatées dans les grands pays développés : syndicats et patronat sont mis devant le fait accompli, alors qu'ils avaient jusque-là inspiré le législateur.

Pour Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit social, la loi du 17 janvier 2002 « mérite de figurer au titre de contre-exemple dans les polycopiés de première année, en droit constitutionnel », car le parcours du combattant qu'elle instaure pour les licenciements confère au système français « la palme d'or mondiale de la complexité et donc de l'insécurité juridique et judiciaire » ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Rarement une loi aura fait l'objet de tant de critiques ! Malgré l'application limitée de ses dispositions, la menace qu'elle fait peser sur les procédures à venir a un effet dissuasif pour beaucoup d'entreprises, notamment étrangères, qui choisissent de ne pas s'implanter sur le territoire français (M. Yves Bur approuve).

Aujourd'hui, la croissance est plus indécise qu'on ne l'escomptait, et la crainte d'une dégradation de l'emploi, accompagnée d'une recrudescence des plans sociaux, est un sujet d'inquiétude.

M. Jean-Jack Queyranne - Ah ! Quand même !

M. le Président de la commission - C'est votre héritage, cher collègue ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Le Président de la République, dans son intervention du 14 juillet, a rappelé la nécessité pour l'Etat « d'intervenir massivement pour apporter des solutions lorsqu'il y a des plans sociaux ». Le Gouvernement a donc nommé un délégué interministériel aux restructurations qui aura pour mission d'aider les entreprises dans leurs plans d'anticipation et de reconversion.

M. Maxime Gremetz - Une commission ! C'est ce que l'on faisait en Union Soviétique ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président de la commission - Cette mission, conduite par M. Claude Viet, est déjà à pied d'_uvre et à la disposition des élus.

Nous devons conforter la protection des salariés mais nous ne pouvons plus nous permettre le formalisme, les blocages ni les illusions suscitées par la loi du 17 janvier 2002.

Le projet ne touche pas aux nouveaux droits accordés à titre individuel aux salariés. Il suspend les procédures qui ont un caractère dilatoire tout en invitant les partenaires sociaux à proposer de nouvelles règles qui tiennent compte de la réalité et ne freinent pas l'embauche... En clair, ce projet ne revient que sur ce qui relève de l'idéologie.

Il ouvre une période de dix-huit mois pour la négociation interprofessionnelle à laquelle s'ajoutera un délai d'un an pour le dépôt d'un projet de loi, ce qui laissera le temps nécessaire à un travail parlementaire serein ; la réforme définitive du droit du licenciement devrait donc intervenir en milieu de législature. Par ailleurs, l'article 2 institue une période d'expérimentation pendant laquelle les partenaires sociaux pourront négocier au sein des entreprises des accords majoritaires fixant les règles de procédure en cas de licenciements économiques. Ces accords dérogatoires, cela va sans dire, ne pourront en aucun cas remettre en cause l'ordre public social.

La commission a précisé le titre du projet mais elle n'a pas souhaité modifier l'économie générale du texte, se limitant à introduire quelques modifications, notamment pour ce qui est des dispositions relatives au harcèlement moral. Nous proposons d'aménager les conditions relatives à la charge de la preuve, qui avaient fait l'objet de très fortes réserves de la part du Conseil constitutionnel, ou encore de recentrer le rôle du médiateur. Nous avons aussi souhaité élargir la mesure de suspension de l'article 96, qui imposait aux employeurs de négocier la réduction du temps de travail avant de mettre en _uvre un plan social. En ce qui concerne le droit d'information du comité d'entreprise, nous avons étendu la suspension à l'article 100, qui ne nous semble pas compatible avec les textes régissant l'ordre public économique et financier.

Ce qu'il faut retenir de ce projet, c'est qu'il ouvre toutes les portes pour renforcer le dialogue social. La négociation collective est, depuis deux décennies, le lieu des grandes innovations en droit du travail. Elle constitue l'un des instruments les plus appropriés à l'adaptation permanente aux mutations. C'est le meilleur outil d'élaboration de nouvelles formes institutionnelles de protection du travailleur, car elle permet de concilier conditions de production des richesses et protection de ceux qui les produisent. C'est donc la seule voie possible pour éviter ces conflits sociaux violents qui heurtent l'opinion et qui découragent toute velléité de relancer l'activité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ

Mme la Présidente - J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, une exception d'irrecevabilité déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Jean Le Garrec - Mon débat avec vous, Monsieur le ministre, et avec votre majorité, sera politique et politique seulement car j'ai horreur de la polémique. C'est pourquoi je regrette les termes que vous avez cru bon d'employer : « situation de crise », « fausses promesses », « spirale du déclin », « implantations hors de France »... (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Vous m'écouterez comme j'ai écouté le ministre, sans m'interrompre.

M. Jean-Michel Fourgous - Et le recul de la France ?

M. Jean Le Garrec - La polémique n'est plus à la hauteur du débat, le plus difficile qui soit, comme notre rapporteur l'a rappelé à juste titre.

En ma qualité d'élu du conseil régional Nord-Pas-de-Calais, je n'ignore rien de l'angoisse, de la rupture totale avec l'entourage et de la perte d'identité qu'entraînent les licenciements, même si les conditions de travail étaient très dures. C'est vrai, notamment dans l'industrie textile, tous les élus savent ces choses. Mais, depuis le second choc pétrolier, en 1978, on enchaîne, dans ma région, les plans sociaux et les licenciements. J'ai donc la prétention de savoir de quoi je parle. Que ceux qui s'intéressent à ces questions aillent donc assister aux représentations théâtrales montées par des salariés licenciés, qu'ils lisent donc Je vais craquer, mais quand ? écrit par Franck Ribault !

M. Gérard Léonard - C'est le résultat de quinze années de socialisme !

M. Jean Le Garrec - Absurde !

M. Gérard Léonard - Vous êtes bien chatouilleux ! C'est un fait !

M. Jean Le Garrec - La réalité, c'est que les entreprises se créent, se développent, rencontrent des difficultés,...

M. Jean-Michel Fourgous - Sans blague !

M. Jean Le Garrec - ... les maîtrisent ou ne les maîtrisent pas...

M. Jean Ueberschlag - Quelle clairvoyance !

M. Jean Le Garrec - Je ne poursuivrai pas dans ces conditions.

Mme la Présidente - Laissez M. Le Garrec s'exprimer.

M. Jean Le Garrec - Toutes les entreprises ne sont pas vertueuses et compétentes ! C'est une erreur de prétendre que tout se passe dans le meilleur des mondes et que les chefs d'entreprise n'ont aucune responsabilité dans la suite des événements ! Certes, la situation n'est pas la même dans les petites entreprises, où un contact existe entre patron et salariés, que dans les grands groupes, où l'anonymat est la règle. Sait-on assez qu'à eux seuls, les neufs présidents les mieux payés - et leurs salaires sont pharaoniques - sont à l'origine de 900 000 licenciements dans le monde ?

Telle est la réalité ! Il ne s'agit donc pas de dogmatisme mais de concilier protection des salariés et intérêt de l'entreprise en tenant compte de l'évolution depuis 1978 du capitalisme français, qui a dû s'adapter à l'évolution technologique et à la mondialisation. Cela a été un choc terrible, et ce sont le plus souvent les salariés qui ont payé le coût du redressement de la France.

Vous avez fait référence à la nationalisation de la sidérurgie, Monsieur le ministre, c'est moi qui m'en suis chargé, et j'en suis fier (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Demandez donc à M. Mer dans quel état elle était ! Nous avons dû, alors, prendre des décisions très difficiles, mais jamais je n'ai fait de promesses inconsidérées ou entretenu des illusions ! Jamais ! Nous allions devant les salariés, et nous leur expliquions où étaient les nécessités. Donc vous n'avez pas le droit de dire « fausses promesses, semeurs d'illusions » : ce n'est pas vrai. Nous avons su démontrer que nous étions capables de faire face à des décisions difficiles, mais nécessaires pour maintenir une activité.

Mais cette étape est derrière nous. Deux faits nouveaux sont apparus ces dernières années, qui pèsent terriblement sur le comportement des grandes entreprises. Le premier est la recherche de valeur à tout prix. On ne parle plus de « bénéfices » - lesquels sont évidemment indispensables. On est dans une recherche de valeur à tout prix : 10, 12, 15, 20 % ! Le financier et spéculateur Soros déclarait il y a peu : « C'est la glorification des gains financiers, quelle que soit la manière dont ils sont obtenus ». Prenons en compte cette phrase cynique, mais juste. Tout est bon ! Et nous venons de le voir ces derniers mois : trafics de compte, dettes dissimulées, auditeurs complices... Bien sûr cela s'est passé aux Etats-Unis. Mais croyez-vous que cela soit sans conséquences sur l'espace européen et national ? Quelles en seront demain les conséquences sur notre propre développement ? On sait très bien, d'ailleurs, que, quand une entreprise annonce un plan de licenciements, la bourse monte - parce que c'est un indicateur de bonne gestion... Je pourrais en donner dix exemples.

Le second fait nouveau, c'est l'effet de taille. On constate une volonté à tout prix, à tout-va, de prendre tout ce qui passe à portée, de construire des « mégalopoles » d'entreprises sans parfois en mesurer les conséquences. Nous en avons au moins deux cas chez nous : France Télécom et Vivendi (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Effet de taille qui fait dire au démocrate Arthur Levitt, ancien président de la SEC, que « la culture des patrons s'est résumée à prendre au passage tout ce qu'ils pouvaient plutôt qu'à se préoccuper de l'intérêt des actionnaires et des salariés. » Et il faut dominer ; le même spéculateur que j'ai cité plus haut déclare : « Seuls les plus avides survivront ». Et il dénonce le laisser-faire qui veut que le marché tende naturellement vers l'équilibre, et assure une allocation optimale des ressources. Tout est dit. Et c'est sur quoi porte notre débat. Qui paie les pots cassés ? Les épargnants et les travailleurs - le capitalisme d'en bas, pourrait dire M. Raffarin. Cela inquiète les Français. D'après un sondage récent, 24 % sont « très inquiets » et 56 % « inquiets ». Et ils ont raison.

Tous les gouvernements ont dû faire face à cette dialectique entre la défense des salariés et l'intérêt des entreprises. La première réglementation fut le fait de M. Jacques Chirac : le 2 janvier 1975, ce fut la loi sur l'autorisation administrative de licenciement. Pour la première fois un texte législatif organisait la consultation des représentants du personnel sur un projet de licenciements. À partir des lois Auroux, ce mouvement va s'amplifier. On le retrouve chez le ministre Séguin, qui va renforcer la consultation, et mettre en place les conventions de conversion, y compris pour les PME. Si l'on regarde cette évolution avec une certaine distance, en étant attentif à « l'esprit des lois » au sens de Montesquieu, on voit cheminer - parfois avec des mouvements contradictoires - la prévention, la volonté d'agir le plus en amont possible, de renforcer les conditions d'information et de dialogue avec les représentants des salariés, de rechercher toutes les solutions alternatives - bref tout ce qui relève du livre IV du code du travail - et de responsabiliser les entreprises dans le reclassement des salariés. Le deuxième alinéa de l'article 321-4 du code du travail est d'ailleurs très clair : il précise que la procédure de licenciement est nulle et de nul effet tant qu'un plan tendant au reclassement des salariés n'est pas présenté par l'employeur.

Bref, sous-tendant cette démarche, très explicite à gauche, s'atténuant progressivement à droite à mesure que s'éloigne le gaullisme social (Interruptions sur les bancs du groupe UMP),...

M. Jean-Michel Fourgous - Quand on a voté les 35 heures, on n'a plus le droit de parler de l'entreprise !

M. Jean Le Garrec - ...cette question est posée : le marché, acteur fondamental du développement économique, peut-il seul assurer l'équilibre entre l'offre et la demande d'emploi - transférant d'ailleurs si nécessaire vers la collectivité le coût social énorme qui peut en résulter ?

La question n'est pas nouvelle. Mais elle est chaque jour plus présente, au rythme du développement accéléré de trois facteurs : le raccourcissement des cycles technologiques, aujourd'hui de trois ans, qui nécessite de plus en plus une gestion prévisionnelle des effectifs ; la financiarisation croissante de l'économie ; la mondialisation, avec la recherche pour la délocalisation de marchés et d'espaces d'exploitation. Bref, et c'est une vieille histoire, le virtuel l'emporte de plus en plus sur le réel, et c'est le rapport du fort au faible qui est un élément fondamental de développement du capitalisme.

Cette situation justifie largement le rôle de l'Etat et du législateur. Car la loi seule garantit l'égalité des parties, nécessaire au contrat. Les règles du droit du travail sont indispensables puisque le rapport de forces est inégal par définition dans ce genre de situation. Cela n'est nullement contradictoire avec le développement de la démocratie sociale : j'y reviendrai. L'évolution du rapport de forces social est le corollaire indispensable du développement économique. Cela est d'ailleurs inscrit dans des textes aussi fondamentaux que la Constitution et son préambule.

J'ai voulu dans cette première partie poser le problème dans toute son ampleur et toute sa complexité. Qu'avons-nous voulu faire ? Dans la loi de modernisation sociale, qui n'était en somme qu'un DMOS assez large, il y avait un volet sur les licenciements. Nous sommes dans la continuité de la réflexion de ces dernières années. Nous avons voulu renforcer le vote du comité d'entreprise, ou plutôt lui rendre le rôle qu'avait consacré le programme du conseil national de la Résistance...

M. Jean-Louis Léonard - Voilà qui est moderne !

M. Jean Le Garrec - ...et qui s'était perdu au fil des années. Dans l'esprit du législateur, le CE n'a pas seulement un rôle social, mais un rôle économique : renforcer la prévention, assurer une plus grande sécurité juridique pour les entreprises. Prenons un exemple : la séparation claire entre le livre IV, celui de la prévention, et le livre III, celui du plan social.

M. Jean-Louis Léonard - Depuis combien de temps n'êtes-vous pas allé dans une entreprise ?

M. Jean Le Garrec - La loi mettait ainsi fin à la jurisprudence très confuse de la Cour de cassation, en faisant se succéder dans le temps les deux consultations et en enserrant la procédure du livre IV dans des délais précis. L'article 101 prévoyait un délai de 15 jours, ou de 21 jours en cas de recours à un expert, alors que le texte auquel vous proposez de revenir ne fixait aucun délai, ce qui constituait une source de contentieux. Au moment où le débat s'engage sur la meilleure gouvernance des entreprises, il est paradoxal que le Gouvernement suspende l'application d'un dispositif qui avait pour objet de favoriser le dialogue social.

Nous avions introduit la nécessité d'une étude d'impact social et territorial, afin d'avoir, au moment de décider, la vision la plus claire possible des conséquences de cette décision. Tous les maires, tous les élus connaissent les effets souvent dévastateurs des plans sociaux sur l'équilibre économique et humain d'un espace géographique. Cette étude d'impact répondait à une nécessité évidente.

M. Jean-Michel Fourgous - Qui la paie ?

M. Jean Le Garrec - Le travail préalable permettait de chercher des alternatives, d'engager un dialogue, et, s'il le fallait, de disposer d'éléments précis pour élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi. En définitive, sur le terrain de la négociation étaient posés tous les éléments nécessaires pour la nourrir et la faciliter.

M. Jean-Michel Fourgous - La négociation, vous l'avez cassée !

M. Jean Le Garrec - Ne nous opposez pas l'argument de la complexité, que je récuse totalement. Notre loi concernait pour l'essentiel les grandes entreprises. Je les connais suffisamment pour savoir qu'elles sont tout à fait en mesure de gérer cette complexité. Elles ne découvrent pas de difficultés au dernier moment. Je sais comment se bâtissent les plans à plusieurs années de terme. Et si elles ne savent pas anticiper suffisamment tôt, c'est affaire d'irresponsabilité ou d'incompétence. Ou alors, c'est qu'elles veulent garder le secret le plus longtemps possible, sachant bien que le gain financier provenant du licenciement l'emportera sur le coût de la décision. Dans bien des cas, il s'agit d'un calcul très précis et parfaitement cynique.

J'ai lu ici et là que la discussion préalable, la recherche d'alternatives, augmentaient l'angoisse des salariés. Quel paradoxe ! Comme si ce n'était pas le licenciement qui était cause d'angoisse, mais plutôt la période, certes difficile, consacrée à rechercher des solutions, à imaginer des compromis pour faire face à une situation dramatique !

M. Jean-Louis Léonard - Vous avez sauvé beaucoup d'emplois comme çà ?

M. Jean Le Garrec - Je sais bien que rien n'est facile, que la loi ne peut que fixer des principes et des garanties, et qu'il ne faut pas distiller de vaines promesses. Mais rien n'est pire que de n'avoir pas le courage d'affronter les difficultés, de rechercher des solutions, et de dire, avec l'appui du délégué et de l'ensemble du personnel, ce qui est possible. Voilà ce que nous avons voulu faire, et qui ne justifie en rien ce dont le ministre lui-même nous accuse : fausses promesses, spirale de crise... Ce discours, je ne l'accepte pas !

Alors, que faites-vous ? Vous suspendez le dispositif pendant dix-huit mois, appliquant ainsi une procédure exceptionnelle, utilisée une fois par M. Séguin, mais pour six mois seulement. Pourquoi dix-huit mois ? D'autant que vous avez prévu douze mois supplémentaires après le dépôt éventuel d'une loi de remplacement. Vous renvoyez à une négociation collective dont vous savez qu'elle a très peu de chance d'aboutir, car elle n'est demandée ni par le patronat, ni par les syndicats. Le baron Seillière...

M. Hervé Novelli - On dirait Maxime !

M. Jean Le Garrec - Ce rapprochement avec M. Gremetz ne m'est pas désagréable ! M. le président du Medef a donc déclaré récemment : « Nous demandons l'abrogation de la loi de modernisation sociale. Nous ne comprenons pas sa suspension. C'est une subtilité non désirée par les partenaires sociaux. Sur ce point, le Gouvernement fait fausse route. Il n'y a pas de sujet plus difficile à négocier que celui des modalités de licenciement collectif. Je doute très fort de la capacité qu'auraient les syndicats à accepter les propositions des employeurs dans ce domaine, et réciproquement ». Voilà qui est parfaitement clair. M. Seillière a écrit aux syndicats pour ouvrir ce qu'il appelle un deuxième souffle de refondation sociale. Il a distingué cinq sujets de négociation et deux sujets de discussion, dont le problème des licenciements. M. Seillière fait bien la distinction entre la négociation que l'on va ouvrir et la discussion, qui n'engage à rien. En son article 88, la commission a adopté des amendements étonnants, à commencer par la suppression de l'amendement « Michelin »...

M. Alain Néri - Quelle honte !

M. Jean Le Garrec - ...alors que pour les grandes entreprises la négociation relative aux 35 heures est largement derrière elles.

Vous avez adopté un amendement plus intéressant, qui suspend l'obligation pour l'employeur de réintégrer le salarié en cas d'annulation du plan social, ce qu'on a appelé la disposition « Samaritaine ».

M. Alain Vidalies - C'est la jurisprudence de la Cour de cassation.

M. Jean Le Garrec - Tout à fait ! Vous avez encore annulé la disposition imposant au chef d'entreprise d'informer les élus du personnel de tout projet de nature à affecter les conditions de travail et le volume de l'emploi avant que l'annonce publique en soit faite.

M. Alain Vidalies - Ils préfèrent que les salariés l'apprennent par la presse !

M. Jean Le Garrec - Vous remettez en cause l'article L. 432-1 qui définit le rôle du comité d'entreprise dans l'ordre économique, notamment son droit à être consulté sur les mesures de nature à affecter le volume et la structure des effectifs. Pour les entreprises qui n'ont pas de comité d'entreprise, l'article L. 422-3 donne aux délégués du personnel la capacité d'exercer collectivement les attributions économiques du comité d'entreprise. En reprenant la jurisprudence de la Cour de cassation, nous étions ainsi dans le droit fil de la définition du rôle économique du comité d'entreprise et des délégués du personnel.

Voilà ce que vous remettez en cause. Pour faire bonne mesure, vous revenez aussi sur la charge de la preuve pour les victimes de harcèlement moral.

Si, en écoutant les déclarations du Medef et des organisations syndicales, j'avais déjà plus que des doutes sur la possibilité d'aboutir à une négociation, l'adoption par la commission de tels amendements relève de la provocation envers les syndicats !

M. Alain Néri - Absolument !

M. Jean Le Garrec - Si vous vouliez prouver que la négociation n'a à vos yeux aucune importance, il fallait faire ce que vous avez fait cet après-midi en article 88 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

La suspension que vous proposez, Monsieur le ministre, va créer une incertitude juridique. En organisant un éclatement du régime juridique du licenciement, en mettant en cause les conditions et la portée du contrôle exercé par l'administration du travail sur les restructurations, en suscitant de nombreux contentieux devant les juges sur les accords d'entreprises.

Quelles sont vos raisons ? Je rappelle que cette procédure concerne les grandes entreprises.

Ce projet, en définitive, réduit considérablement les garanties des salariés. Tous les décrets ont été soumis au Conseil d'Etat ; deux sont en examen : l'un concerne les articles 97 et 98, suspendus, et prévoit une étude d'impact sociale et territoriale en cas de cessation totale ou partielle d'activité concernant au moins cent salariés. Pensez-vous que cela soit risqué et inutile ?

La première liste des médiateurs devait être établie par arrêté. Il est pour le moins paradoxal que le Gouvernement suspende l'application d'un dispositif dont chacun connaît l'intérêt et l'efficacité en ce qu'il favorise le dialogue au sein de l'entreprise. Un médiateur permet souvent de débloquer la situation...

M. Jean Ueberschlag - En matière de dialogue social, vous n'avez rien fait ! Il n'y a rien pour le favoriser dans la loi de modernisation sociale !

M. Jean Le Garrec - L'expérience montre que son intervention est souvent indispensable.

On nous parle ensuite de la complexité de la loi du 17 janvier 2002. Mais ce n'est pas sérieux ! Je l'ai déjà démontré, il y a dans toutes les grandes entreprises des spécialistes qui sont parfaitement à même de manier les textes...

Plusieurs députés UMP - Et dans les PME de trente salariés ?

M. Jean Ueberschlag - Pour vous, le dialogue social, c'est le monologue socialiste !

M. Jean Le Garrec - Et quels peuvent être les effets pernicieux d'un texte qui n'est pas appliqué ? Comment peut-on préjuger des conséquences d'un texte qui n'a été appliqué que par deux entreprises de ma connaissance, lesquelles ont estimé qu'il était de leur responsabilité - malgré l'absence de décret d'application - d'en tenir compte ? Je puis vous assurer qu'elles n'en ont pas souffert et vous communiquer en toute discrétion leur raison sociale.

Dès que l'on débat sur le droit du licenciement pour motif économique, le patronat crie au scandale ! J'ai encore en mémoire la visite que m'avait rendue M. Gattaz pour m'expliquer que l'autorisation administrative de licenciement - créée en d'autres temps par M. Chirac - faisait disparaître des entreprises ! Je lui avais alors demandé de me citer un seul cas concret : il n'est jamais revenu pour poursuivre la discussion ! C'est un cas de lobbying patronal des plus classiques !

Vous imputez aussi à ce texte l'enchaînement des dépôts de bilan. Ce n'est pas plus sérieux ! Je rejoins sur ce point votre rapporteur. Une PME n'use pas du dépôt de bilan comme d'une facilité de gestion. Les statistiques à ce sujet portent du reste sur une période où la loi de modernisation sociale n'était pas appliquée ! Qui peut faire le tri entre les différents motifs qui peuvent contraindre une entreprise à déposer son bilan ?

S'agissant de votre projet de loi, vous vous plaisez, Monsieur le ministre, à évoquer la concertation qui aurait présidé à son élaboration. J'observe pour ma part qu'elle n'a été menée qu'avec la sous-commission de la commission nationale de la négociation. C'est un peu court pour un texte de cette importance !

La politique que vous menez est, en définitive, une politique à haut risque social.

M. Jean Ueberschlag - Parlez-nous de l'irrecevabilité !

M. Jean Le Garrec - J'y viendrai (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Je me félicite que depuis deux mois, le chômage soit stabilisé ou en légère diminution...

M. Jean-Paul Anciaux - Ce n'est pas grâce à vous !

M. Jean Le Garrec - ...mais nous entrons dans une période de difficulté économique. Il n'y a qu'à voir le nombre de dossiers de restructurations qui sont dans les tiroirs ! Dans ce contexte, votre action adresse aux acteurs économiques un signal dangereux.

Si l'on met bout à bout le présent texte, celui sur 35 heures, le contrat jeune en entreprise et l'évolution du budget de l'emploi (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),...

M. le Ministre - Tout cela est en effet cohérent !

M. Jean Le Garrec - ...force est d'admettre que nous entrons dans une phase de destruction massive des outils que nous avions créés... (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP) ...sans que vous en proposiez de nouveaux. Il est facile de détruire. Il est plus délicat de construire des dispositifs efficaces, susceptibles, notamment, de lutter contre le chômage des jeunes - lequel frappe 14,3 % des jeunes gens ! La fin du programme des emplois-jeunes est très durement ressentie. Le contrat jeune en entreprise a du mal à prendre son envol (« C'est faux ! Des chiffres ! » sur les bancs du groupe UMP). Les crédits TRACE vont diminuer de 38 % alors que 183 500 jeunes ont été accueillis dans le programme ! 60 % des bourses pour l'emploi sont diminuées. Cette décision est catastrophique car il a fallu beaucoup de coopération entre les PAIO, les missions locales, l'ANPE, l'AFPA et les élus pour faire converger les attentes de tous les acteurs de l'insertion.

M. Hervé Novelli - Avec quel résultat !

M. Jean Le Garrec - Quant au CIVIS, il reste un simple projet dont nous ignorons tout !

La dotation pour les CES est diminuée de 70 % ; celle qui concerne les CEC recule de 4 %. L'insertion par l'économique voit ses moyens régresser de plus de 18 % ! Vous vous défendez, Monsieur le ministre, en invoquant la possibilité d'ajuster les dotations en fonction des besoins dans le cadre du collectif du premier trimestre 2003. Votre sincérité n'est pas en cause mais il y a fort à parier que vous ne pourrez pas tenir cet engagement.

Tout cela crée une situation extrêmement dangereuse. La situation économique se dégrade (« La faute à qui ? » sur les bancs du groupe UMP), les plans sont prêts... La première des choses à faire, ce n'était pas de remettre en cause des instruments que la négociation collective a fait aboutir ! (Rires sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Ueberschlag - Avec le gouvernement précédent, il n'y a jamais eu de négociation !

M. Jean Le Garrec - Quant le vent est mauvais, il faut éviter de prendre la mer sur la hanche, et a fortiori de front ! Ce n'est pas vous qui paierez mais des tas de jeunes et de salariés en difficulté ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Il y a aujourd'hui presque 2,5 millions de personnes en « zone grise », c'est-à-dire plus ou moins éloignés de l'emploi. La contrainte est terrible. C'est le résultat de vingt-cinq années de cassures, de crises s'enchaînant aux cassures...

Plusieurs députés UMP - De socialisme !

M. Jean Le Garrec - Il fallait, Monsieur le ministre, en tenir compte (« Quel aveu ! » sur les bancs du groupe UMP) M. Stéphane Rozès déclarait récemment dans un journal économique : « Le risque est que la dimension sociale du Gouvernement n'apparaisse que comme une succession d'amputations ».

Mme Marie-Hélène des Esgaulx - Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ?

M. Jean Le Garrec - S'il est un argument pernicieux, c'est bien celui qui consiste à prétendre que la France aurait perdu dix places au classement de la productivité du forum de Davos (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe UMP) Ah ! Le bel argument ! Ah ! Les belles âmes ! Ah ! Les bons élus ! Ah ! Les bons français ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Et vous avez dit vous-même, Monsieur le ministre, qu'il fallait arrêter la spirale du déclin (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe UMP). Je récuse totalement cet argument parce qu'il est faux (Rires sur les bancs du groupe UMP). M. Gremetz - avec qui je me suis souvent accroché, ce qui ne l'empêche pas d'être bien informé - a cité M. Fitoussi, qui a déclaré que le classement de compétitivité du forum de Davos était un travail de lobbying peu sérieux, orienté par des intérêts économiques : les entreprises essaient d'obtenir des impôts aussi bas que possible et une plus grande flexibilité du travail. M. Boissonnat, qui n'a rien d'un gauchiste, se demande de son côté si notre pays méritait un tel « bonnet d'âne ». Peter Cornelius, l'économiste coordonnateur de l'étude, a invité lui-même à la plus grande prudence, estimant que chacun était fondé à interpréter ce résultat comme il l'entendait. Voilà quelqu'un qui sait de quoi il parle !

D'autre part, si l'attractivité d'un pays se mesure à l'importance des investissements directs étrangers, je rappellerai qu'en France, entre 2000 et 2001, ils sont passés de 42,9 à 52,6 milliards de dollars alors qu'en Angleterre, ils tombaient de 116 à 53 milliards de dollars ! De plus, nous occupons la deuxième place pour le nombre de dossiers d'investissement, derrière l'Angleterre mais devant l'Allemagne ! Enfin, pour la fuite des cerveaux, notre taux est le plus faible d'Europe.

Un rapport de l'OCDE souligne l'importance du capital humain et social, s'agissant d'assurer la croissance et le développement durable. De fait, le comportement des investisseurs étrangers est déterminé par des facteurs tels que la valeur ajoutée des services publics, l'emplacement des sites et la qualité - compétitivité et adaptabilité - de la main-d'_uvre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Marie-Hélène des Esgaulx - Cela ne veut rien dire !

M. Jean Le Garrec - Quant au coût du travail, on sait qu'il s'évalue en fonction de deux éléments : le coût horaire mais aussi la productivité. Or, à cet égard, la France devance la Belgique, la Finlande, l'Espagne et l'Allemagne, comme le démontre une étude de l'office statistique allemand ! Par ailleurs, la chambre de commerce américaine de France cite au nombre de nos atouts la qualité de nos infrastructures et la qualification de notre main-d'_uvre, cependant que le vice-président de Toyota donne en exemple l'usine de Valenciennes, qui a doublé sa capacité de production, se classant ainsi parmi les meilleures du groupe ! Hommage est ainsi rendu à nos salariés et à notre système économique et social, en dépit des 35 heures et de toutes les autres lois si contraignantes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Autant je trouve dangereux et contraire aux intérêts de la France d'utiliser à des fins de médiocre polémique le classement de Davos, autant, cependant, il me paraît nécessaire de dénoncer nos faiblesses.

Je mentionnerai d'abord l'iniquité d'un système de formation dont bénéficient seulement 26 % des salariés, contre 33 % en moyenne dans la Communauté européenne.

M. Jean Ueberschlag - Qu'avez-vous fait pour y remédier ? Rien !

M. Jean Le Garrec - Quant à notre formation professionnelle, malgré la réforme de la taxe professionnelle et la validation des acquis de l'expérience, nous avons trop attendu la décision des partenaires sociaux, de sorte que nous restons bien en deçà des besoins (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Ueberschlag - Belle excuse !

M. Jean Le Garrec - Deuxième faiblesse : le taux d'emploi, trop bas, des travailleurs de plus de 55 ans. Nous en sommes à 29,7 % alors que la moyenne communautaire est de 37,7 % et je continuerai donc de dénoncer la schizophrénie d'un patronat qui demande un allongement de la durée de cotisation pour les retraites tout en ne pensant qu'à chasser ces salariés des entreprises, quitte à mettre la dépense à la charge de la collectivité !

M. Hervé Novelli - Qu'avez-vous fait d'autre dans la sidérurgie ?

M. Jean Le Garrec - Monsieur le ministre, mesurez-vous bien les risques sociaux que vous prenez ? Pensez-vous que le marché rétablira automatiquement l'équilibre entre offre et demande ?

M. Jean Ueberschlag - On comprend que vous ayez été battus !

M. Jean Le Garrec - Je ne sous-estime certes pas le rôle du marché, mais je connais aussi sa brutalité, à l'origine des mouvements socialiste et communiste. Lorsque l'emploi est considéré comme une variable d'ajustement, les conséquences de cette politique ne peuvent être qu'à la charge de la collectivité. Pour moi, si le compromis entre capital et travail est indispensable, il ne relève pas de la seule négociation : il relève aussi du législateur, qui a le devoir de préserver l'ordre public social. D'où les textes que vous êtes en train de défaire...

Voilà ce que je tenais à expliquer dans cette première partie (Exclamations sur les bancs du groupe UMP, applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) malgré les cris et les vociférations. Je demanderai bien entendu qu'on vote cette exception d'irrecevabilité, en vertu des arguments politiques, économiques et sociaux que j'ai exposés (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. Mais je puis également invoquer des arguments juridiques. Vous méconnaissez le principe d'égalité et vous recourez à une expérimentation qui ne se justifie pas dans la mesure où les entreprises peuvent déjà conclure des accords de méthode, au titre des livres III et IV. En réalité, votre objectif n'est pas la conclusion d'accords collectifs plus favorables, telle que l'autorise l'article L. 132-4 du code du travail, mais de favoriser au contraire des accords moins favorables !

Je rappellerai aussi que la loi du 12 novembre 1996 avait précisément énuméré les dispositions du code du travail auxquelles les négociations collectives de branche pouvaient déroger. Or le projet dispose qu'il ne peut être dérogé aux dispositions des onze premiers alinéas de l'article L. 321-4 et à celles de l'article L. 321-9, ce qui signifie qu'on pourra déroger à toutes les autres dispositions des livres III et IV, relatives à la consultation des institutions représentatives du personnel.

Enfin, alors qu'il revient au législateur de fixer les principes fondamentaux du droit du travail et, notamment, de poser les règles propres à assurer le respect du cinquième alinéa du préambule de la Constitution, vous allez contre le droit reconnu à chacun d'obtenir un emploi : vous dispensez les chefs d'entreprise de tout examen en amont des décisions de restructuration ; vous suspendez l'obligation faite aux organes dirigeants de se réunir avant d'adopter un projet de restructuration et de délibérer au vu des propositions alternatives présentées par les représentants du personnel ; vous privez même ces derniers du droit de formuler de telles propositions et vous enlevez à l'administration la possibilité de suggérer des améliorations au plan de sauvegarde de l'emploi. Enfin, vous méconnaissez les exigences constitutionnelles découlant du huitième alinéa du préambule de 1946, qui exige que les travailleurs participent à la détermination des conditions de travail et à la gestion des entreprises.

Cette argumentation juridique n'aurait cependant que peu de valeur si elle ne s'appuyait sur une argumentation économique. J'ai donc eu le souci de démontrer que, depuis longtemps, l'évolution dans ce domaine tendait à prévenir le plus en amont possible les restructurations et, lorsqu'on ne le pouvait, à négocier des plans sociaux de qualité. J'ai également démontré que vous envoyez un signal dangereux dans une situation économique, hélas, dégradée en détruisant les instruments de la politique de l'emploi. Pour toutes ces raisons, il convient de voter l'exception d'irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Ministre - « Les faits n'entrent pas là où règnent les croyances », a dit Pascal. Tout votre propos, parfois nuancé, parfois partisan et polémique, est marqué par ce biais qui consiste à ne retenir que les faits qui renforcent ses convictions.

Me réservant de répondre sur le fond à l'issue de la discussion générale, je ne répondrai ici qu'à vos arguments juridiques. En premier lieu, selon vous, l'expérimentation serait inconstitutionnelle : mais le Conseil constitutionnel n'a-t-il pas admis, dans sa décision du 6 novembre 1996, que la loi pouvait contenir des dispositions expérimentales ? La loi ne peut renvoyer à un accord collectif le soin de préciser les modalités d'application des principes fondamentaux, avez-vous ajouté. Mais, là encore, le Conseil a dit le contraire dans sa décision du 25 juillet 1989. Je ne vois donc aucune raison de voter cette exception d'irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Rapporteur - Cher collègue Le Garrec, vous aviez commencé votre intervention sur le ton de la confidence. Permettez-moi de vous en faire une à mon tour : je vous avoue avoir été un peu déçu par votre exposé, que j'ai trouvé peu convaincant et assez décousu. Sur la forme, vous avez gardé votre talent ; cependant votre jeu est toujours un peu le même.

Sur le premier point de votre intervention, je suis d'accord : nous sommes bien confrontés à un problème de dialectique entre protection des salariés et développement économique.

Vous avez passé près de vingt minutes à analyser le contexte économique et financier, sans consacrer une seule seconde à reconnaître quelque vertu aux chefs d'entreprise. Vous avez accusé les huit plus grands PDG du monde de 800 000 licenciements, sans vous arrêter un instant sur les emplois qu'ils ont pu créer.

Vous avez ensuite essayé de faire le point sur le contexte juridique. Là, j'ai trouvé que vos propos étaient un peu datés.

Vous avez glissé à toute vitesse sur la loi de modernisation sociale, en faisant quand même devant son autel une génuflexion rapide, comme les conventions de fraîche date, mais en passant sous silence le fait que vous-même et vos amis vous êtes opposés pendant de longs mois aux dispositions que vous défendez maintenant avec ardeur.

Sur une heure dix d'intervention, vous n'avez passé que sept minutes sur le projet qui nous occupe. Vous avez reconnu que l'amendement Michelin ne servait plus à rien puisque toutes les grandes entreprises sont passées aux 35 heures, et le raisonnement est spécieux : le texte n'a plus d'objet, mais il ne faut surtout pas le suspendre ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Vous avez évoqué la disposition relative au médiateur. Si elle était aussi nécessaire, pourquoi avez-vous attendu les trois derniers mois de votre législature ?

Enfin, vous avez cherché à contrebalancer les statistiques de Davos - qui moi aussi m'attristent. Mais en matière de comparaisons maritimes, vous vous êtes un peu trompé : quand la mer est forte, on a intérêt à mettre le bateau face aux vagues, sinon il chavire !

Vous avez fondé votre exception d'irrecevabilité sur un papier manifestement écrit par quelqu'un d'autre (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Mais tout cela n'a pas beaucoup d'importance. Nous avons nous-mêmes, lorsque nous étions dans l'opposition, utilisé les motions de procédure pour faire un discours politique... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gaëtan Gorce - Rappel au Règlement, fondé sur l'article 58.

Le groupe socialiste et l'ensemble de l'opposition sont choqués de la manière dont s'engage ce débat. Notre collègue Jean Le Garrec a été constamment interrompu par des remarques particulièrement scandaleuses. L'opposition a le droit de s'exprimer, c'est même son devoir. J'aimerais donc que cessent les manifestations d'intolérance.

Pour permettre à mon groupe d'y réfléchir et au groupe UMP de revenir à plus de sagesse, je demande une suspension de séance d'une demi-heure (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Mme la Présidente - La séance est suspendue pour cinq minutes (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

La séance, suspendue le mercredi 4 décembre à 0 heure 5, est reprise à 0 heure 20.

M. Gaëtan Gorce - Rappel au Règlement, fondé sur l'article 58. Je souhaite que nos débats reprennent dans une plus grande sérénité. Le groupe socialiste a été choqué par la manière dont Jean Le Garrec, ancien ministre et ancien président de la commission des affaires sociales, a été constamment empêché de s'exprimer par des interruptions répétées sur les bancs de la majorité, d'où sont parties des allusions indignes à ses compétences professionnelles. Faut-il vraiment rappeler que nous sommes tous dans cette enceinte par la volonté du suffrage universel et que c'est à nos électeurs et à eux seuls que nous devons rendre des comptes ? Pour notre part, nous n'avons pas eu la tentation de demander au rapporteur des explications sur les amendements, qu'il ne nous a pas données !

Je demande donc au ministre et au président de la commission la garantie que les droits de l'opposition seront désormais respectés tout au long du débat (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Mme la Présidente - Je suis saisie de plusieurs demandes d'explication de vote.

M. Hervé Novelli - Je ne reviendrai pas sur la procédure, dont le ministre a démontré, avec des arguments pertinents qu'elle est infondée, sinon pour m'étonner que l'on puisse tenir pour inconstitutionnel un projet qui se limite à suspendre quelques articles d'un texte adopté au début de l'année.

J'en viens au fond. Puisque M. Le Garrec a tenté de justifier l'injustifiable, c'est-à-dire la loi de modernisation sociale, parlons-en ! Et rendons à César, ou plutôt à Maxime - Gremetz - ce qui lui revient. Qui ne sait que cette loi ne fut que le fruit d'une concession du parti socialiste au parti communiste, pour conforter la majorité plurielle ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Il est d'ailleurs assez piquant de voir ceux qui, à l'époque, ont résisté avec talent à l'adoption de ce texte tenter maintenant de se l'approprier !

Comment ne pas dire, aussi, que cette loi ne fut que d'affichage ? Alors que trente décrets d'application étaient nécessaires, quatre ont été publiés ! C'est donc une loi virtuelle... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Catherine Génisson - Mais alors pourquoi en suspendre les articles ?

M. Hervé Novelli - ...mais aussi une loi nocive parce qu'elle fit peur aux entreprises et aux investisseurs. Enfin, avec ses 223 articles, c'est un monstre bureaucratique.

Face à ce texte virtuel, il y a le réel, c'est-à-dire les entreprises... (« Et les salariés ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) qui créent les richesses et l'emploi. Il convient d'améliorer leur environnement puisque, quand les conditions sont bonnes, les entreprises n'ont pas besoin de lois pour embaucher. Alors que le projet tend à améliorer l'environnement des entreprises...

M. François Sauvadet - Il faut aller encore plus loin !

M. Hervé Novelli - ...M. Le Garrec nous explique que tout va très bien. Mais si la situation était aussi rose que vous le dites, les Français vous en auraient félicité il y a quelques mois ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Malheureusement, les choses ne sont pas comme vous les avez décrites, et il va falloir remettre sur les rails le dialogue social...

M. Patrick Bloche - Que le Medef a cassé !

M. Hervé Novelli - ...faire reculer la bureaucratie et procéder enfin aux changements que vous n'avez pas mené à bien, vous attirant les sanctions des Français, que je demande à mes collègues, de confirmer en repoussant cette exception d'irrecevabilité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Alain Vidalies - C'est un moment rare que celui qui nous attend puisque, si l'on en croit l'explication de vote qui vient d'être donnée, vous vous apprêtez à suspendre un texte virtuel !

Ce débat, qui reflète les divergences politiques fondamentales, montre crûment quel est votre état d'esprit. Pour commencer, à vous en croire, il y avait ceux qui connaissent tout de l'économie - vous - et ceux qui n'en savent rien - nous. Il me semble que ceux qui un jour ont voulu vendre Thomson pour un franc devaient être plus modestes... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

En second lieu, j'observe que le discours que tiennent sur les licenciements économiques la droite et tous ceux qui s'opposent à l'intervention du législateur n'a pas changé. Souvenez-vous de l'époque où M. Gattaz, responsable du Medef, qui s'appelait autrement, demandait la suppression de l'autorisation administrative de licenciement : à l'entendre, si on l'abolissait, le patronat allait créer 350 000 emplois. L'autorisation administrative a été abolie, et l'on attend toujours les 350 000 emplois ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Pour ce qui est du présent texte, la démonstration que présente le Gouvernement pose un problème de cohérence. Il nous dit que personne - ni le patronat ni les syndicats - ne veut de la loi en vigueur, et qu'il va donc lancer une grande négociation. Mais alors pourquoi ne pas avoir répondu à cette aspiration pressante à négocier ? Pourquoi avoir recouru à cette procédure exceptionnelle d'une suspension de la loi pour dix-huit mois ? Après quoi le nouveau texte ne s'appliquera qu'au bout de douze mois, ce qui fait un total de trente mois... J'ai beau vous souhaiter un grand avenir, Monsieur le ministre, il n'est pas certain que ce soit vous qui deviez en tirer les conclusions (Rires sur les bancs du groupe socialiste). Mais franchement, s'il y avait aujourd'hui cette aspiration à négocier, vous auriez saisi l'occasion. En réalité personne ne veut de cette négociation. M. Le Garrec a rappelé les déclarations du président du Medef comme celles des organisations syndicales. La réalité est que vous engagez ce débat avec l'intention d'abroger la loi.

Mais vous devriez être attentif, Monsieur le ministre : cette sorte de passage en douceur que vous tentez va changer de nature sous la pression de votre majorité. En quelques heures déjà, si j'en crois les réactions constatées à l'issue des travaux de la commission, votre texte est en train de prendre une autre dimension, qui sera dramatique pour les salariés de ce pays. Si votre texte reste virtuel, il y a des amendements qui ne le sont pas, et qui vont toucher profondément la vie des salariés. Il s'agit, si incroyable que cela paraisse, de remettre en cause le droit à l'information des représentants des salariés. Verra-t-on de nouveau des salariés apprendre leur licenciement en lisant le journal ? Refuser cela est-il caractéristique d'un engagement à gauche ? Ne devrait-ce pas être une exigence partagée, car c'est une question de dignité pour les salariés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) Les réactions que nous avons entendues pendant l'intervention de Jean Le Garrec, et ce qui s'est exprimé dans ces amendements, tout cela traduit une expression poujadiste de votre majorité. Ces amendements remettent en cause le droit à l'information, les dispositions sur le harcèlement, et des décisions de la Cour de cassation qui n'ont rien à voir. Vous ne pouvez pas résister, Monsieur le ministre, à ce qui n'est peut-être pas le moteur de votre propre action, mais celui de votre majorité : la revanche sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Maxime Gremetz - On nous dit que la loi de modernisation sociale, dont nous avons accouché dans la douleur (Sourires) et que nous tenons pour une de nos plus belles _uvres, doit être abolie, parce qu'elle serait responsable de tous les maux, de tous les plans sociaux depuis des années. J'ai donc consulté les chiffres de la DARES, le service statistique de votre propre ministère. Elle indique que depuis dix ans 3,4 millions de licenciements économiques ont eu lieu en France. Que je sache, la loi de modernisation n'existait pas. En 2000, la loi n'était pas votée : il y eu 900 plans sociaux. En 2001, la loi était promulguée, mais non appliquée, faute de décrets d'application - comme l'a opportunément rappelé M. Novelli, réfutant ainsi M. le ministre. Or il y a eu 1 053 plans sociaux et 245 000 licenciements économiques... Jusqu'en septembre 2002, la loi étant toujours dans l'attente de ses décrets d'application, on a compté 200 000 licenciements, en hausse de 17 % ; et fin août on enregistrait 676 plans sociaux, en hausse de 6,4 % sur la même période de l'année précédente. Une loi non appliquée peut-elle en être responsable ? Qui veut tuer son chien l'accuse de la rage... Pour revenir à 2001, on a compté cette année-là plus de 1,9 million d'inscriptions à l'ANPE pour fin de CDD et de mission d'intérim, sans oublier les licenciements autres qu'économiques, qui furent 440 000... Tout cela, ce n'est pas la loi de modernisation sociale !

M. Yves Bur - Et la réduction du temps de travail !

M. Maxime Gremetz - Si la cause n'en est pas notre loi, quelle est-elle ? C'est votre ami Sarkozy qui nous donne la réponse. C'est clair, c'est net, ce que dit ce Sarkozy, en Picard qu'il est. Car il est patron du Medef chez moi... (Exclamations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. Jean Ueberschlag - Ce n'est pas le même !

M. Maxime Gremetz - Si ce n'est pas lui, c'est donc son frère ! (Rires sur divers bancs). Ce Guillaume Sarkozy a déclaré hier dans le journal du soir : « Je suis fier d'être un patron industriel, qui délocalise. Assez de faux-semblants ! La perte d'emplois, la déstabilisation industrielle, c'est normal, c'est l'évolution ». De fait, c'est l'évolution des capitalistes, qui n'en ont jamais assez, qui mettent les gens à la porte pour aller faire encore plus de profits ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

Mme la Présidente - Veuillez conclure.

M. Maxime Gremetz - Vous dites, Monsieur le ministre (Interruptions sur les bancs du groupe UMP), que vous allez suspendre trente mois. Mais si la loi est si mauvaise, il faut la supprimer. Si elle n'est pas trop mauvaise, on peut l'aménager (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Mme la Présidente - Concluez !

M. Maxime Gremetz - Le ministre parle du dialogue social (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président de la commission - Il faut qu'il arrête !

M. Maxime Gremetz - Soyez un peu patient ! Chacun a intérêt à écouter l'autre. Le ministre parle du dialogue social. Or aucune organisation syndicale ne peut accepter de négocier le nombre de licenciements (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Mme la Présidente - Vous parlez depuis plus de dix minutes !

M. Maxime Gremetz - Nous n'allons pas laisser partir cet enfant que nous avons créé (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Si ce texte était entré en vigueur, il aurait une efficacité remarquable. En effet, quand le Medef déclare qu'il faut abroger le dispositif, les salariés se disent qu'il est très bon pour eux (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

Mme la Présidente - Sur l'exception d'irrecevabilité, je suis saisie par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

A la majorité de 74 voix contre 37 sur 111 votants et 111 suffrages exprimés, l'exception d'irrecevabilité n'est pas adoptée.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 0 heure 55.

              Le Directeur du service
              des comptes rendus analytiques,

              François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MERCREDI 4 DECEMBRE 2002

A QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle, adopté par le Sénat, relatif à l'organisation décentralisée de la République.

3. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008.

4. Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 375) relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi.

    M. Dominique DORD, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

    (Rapport n° 386)

A VINGT ET UNE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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