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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 34ème jour de séance, 90ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 4 DÉCEMBRE 2002

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

Sommaire

      SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION 2

      NÉGOCIATION COLLECTIVE
      SUR LES RESTRUCTURATIONS
      AYANT DES INCIDENCES SUR L'EMPLOI (suite) 2

      ORDRE DU JOUR DU JEUDI 5 DÉCEMBRE 2002 22

La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.

SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION

M. le Président - J'informe l'Assemblée que la commission des affaires étrangères a décidé de se saisir pour avis du projet de loi constitutionnelle relatif au mandat d'arrêt européen.

NÉGOCIATION COLLECTIVE SUR LES RESTRUCTURATIONS
AYANT DES INCIDENCES SUR L'EMPLOI (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi.

M. François Liberti - Avec ce texte, vous poursuivez la démolition d'avancées sociales engagées par la gauche.

Après avoir brisé le processus de réduction du temps de travail, vous vous attaquez au droit de résistance face aux licenciements. Seul le MEDEF y trouve avantage.

Vous proposez un texte de revanche, unanimement condamné par les organisations syndicales de salariés. Il est dommage que, tout à l'heure, vous n'ayez pas cru devoir ajouter à vos citations celles, récentes, de leurs organisations.

Chacun se souvient ici du rôle des parlementaires communistes pour faire avancer le droit et la protection des salariés en matière de licenciement économique après les drames de Danone, Lu ou Michelin. Oubliées, les causes fondamentales des plans sociaux, des licenciements boursiers, la recherche des profits à deux chiffres. Manifestement, le désarroi des salariés suscite peu d'émotion. Vous n'en tirez aucun enseignement. Vous vous résignez à une fatalité économique qui n'en est pas une et cédez ainsi à l'appétit du MEDEF, impatient de remettre en cause le droit du travail et l'ordre public social. Du même coup, vous ouvrez la porte à l'arbitraire, à l'accroissement des inégalités, au détournement de la négociation collective. Avec ce projet, la régression sociale et l'exploitation guettent le monde du travail dans notre pays. Vous vous enfermez dans une logique dogmatique animée par la volonté d'accorder toute liberté au patronat pour faire du salarié un outil taillable et corvéable à merci. Vous allez ainsi au devant des exigences des grands groupes qui veulent démanteler la législation sociale. Vous encouragez la remise en cause des avantages acquis par les salariés.

Nous nous opposons à tout recul. Il faut plutôt renforcer les pouvoirs des salariés, leur ouvrir des droits nouveaux et donner un coup de frein à l'impunité des grands groupes qui licencient, délocalisent, restructurent dans un but financier.

Dans un contexte économique incertain, l'heure n'est pas à ouvrir les vannes des licenciements. Quelle singulière conception du dialogue social vous faites-vous, où le seul enjeu, pour le salarié, est de débattre de son propre licenciement ?

Vous voulez nous faire croire à une simple suspension des articles. Or, c'est leur suppression pure et simple qui est programmée. Vous gommez sans scrupules les mesures permettant la prévention des licenciements - étude d'impact social préalable à toute procédure et droit d'information des représentants du personnel. Vous supprimez les pouvoirs de l'inspection du travail pour contrôler le bien-fondé et la régularité des licenciements.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - C'est faux !

M. François Liberti - Vous allez même plus loin en détournant le sens de la négociation collective, qui a pour objet de conférer aux salariés des droits et des garanties et non d'en supprimer. Or, ici, elle devient l'instrument de la régression sociale en remettant en cause le principe de faveur.

Alors que l'on connaît la pression supportée par les négociateurs dans le cadre des plans de restructurations et de licenciements, le texte donne à la négociation le rôle de déroger aux garanties légales dans un sens défavorable aux salariés. Pour la première fois, patrons et syndicats seraient autorisés à revoir à la baisse les droits des comités d'entreprise et décideraient des procédures de licenciement. Cette nouvelle atteinte à l'ordre public social et à la hiérarchie des normes porte en elle le démantèlement annoncé du code du travail. Que reste-t-il comme garantie si le droit de licenciement est renvoyé à la négociation d'entreprise sans être encadré par la négociation interprofessionnelle ou de branche ?

D'ores et déjà les salariés sont doublement lésés. D'abord, quant à leurs droits individuels. Par le passé, quels que soient les accords, les garanties légales leur laissaient la possibilité de contester - y compris la licéité du licenciement économique. Désormais, l'accord se substitue à la loi, privant les salariés du socle minimum de garanties prévu par la législation. Ensuite, quant aux droits de leurs représentants. Les droits des comités d'entreprise pourront être limités par les accords qui fixeront les conditions d'information, de saisine et la procédure de consultation. Du même coup, la prise en charge par l'entreprise du paiement des experts disparaît.

Pour donner un semblant de légitimité à une négociation dont la seule vocation est de déréglementer, ce texte introduit la notion d'accord majoritaire - proposition que nous avions faite et qui avait été repoussée lors de l'examen de l'assouplissement des 35 heures. Mais le projet se garde bien de mettre en place l'accord majoritaire pour les négociations interprofessionnelles qui doivent servir à l'élaboration de la nouvelle législation. C'est donc, pour la minorité, la possibilité de faire la loi.

Enfin, ce texte créera la confusion et l'arbitraire. Comment faire respecter l'égalité du citoyen devant le droit à l'emploi si chaque entreprise peut fixer ses propres règles ? Ici, la procédure durera quinze jours, là trois mois ; on se réunira trois fois, deux fois ou moins. Alors qu'en matière de licenciements, la rigueur de la procédure est une garantie minimale mais essentielle contre la volonté patronale d'en finir très vite, le renvoi de ces dispositions à la négociation ouvre la porte à n'importe quel abus. De plus, les accords d'entreprise sont dits « expérimentaux », sans que l'on sache ce qui se passera ensuite. Un tel manque de lisibilité ouvre la porte à l'arbitraire.

Monsieur le ministre, vous êtes à contre-courant de ce qu'il conviendrait de faire. Vous êtes aveuglé par le chant des sirènes du MEDEF qui en voudra toujours plus. A l'inverse les parlementaires communistes veulent résister à cette volonté de déréglementation sociale.

M. François Goulard - Quel courage !

M. François Liberti - Nous proposerons une série d'amendements tendant à mieux encadrer les procédures de licenciement en donnant une nouvelle définition du licenciement économique, en organisant un droit de suspension en cas de contestation, en accordant de nouveaux droits aux salariés: droit d'opposition, d'information, à la formation. Nous ferons barrage à votre volonté de mettre en place un monde du travail sans foi ni loi.

Les licenciements « boursiers », dont l'abus est manifeste chez les grands groupes, suscitent chez les salariés et leur famille, un sentiment d'inquiétude auquel vous n'apportez pas de réponse, bien au contraire. La liste noire des plans sociaux s'allonge tous les jours. Selon les derniers points de conjoncture de l'INSEE, la courbe des licenciements économiques ne cesse d'augmenter, au rythme de 20 000 salariés par mois depuis l'été.

La seule réponse que vous apportez consiste à supprimer les recours que la loi de modernisation sociale offre aux salariés pour se défendre ; mais vous n'améliorez pas les dispositifs de reclassement. Que des comités d'entreprise puissent proposer d'autres solutions, débattre des intérêts versés aux banques, des dividendes attribués aux actionnaires ou des placements financiers, cela vous est insupportable.

Ne pas toucher aux fondements mêmes des mécanismes du capitalisme, voilà le fond de votre démarche.

Vous créez ainsi les conditions d'un développement de la précarité et du chômage, faisant le lit de la misère et de la pauvreté. Pour toutes ces raisons, nous rejetons votre texte en bloc et tenterons de l'amender dans le sens du progrès social.

Mme Chantal Bourragué - Monsieur le ministre, ce projet de loi porte sur un sujet difficile. Chacun d'entre nous sait que parler de licenciements, de restructurations, c'est parler de personnes et de familles qui vivent des moments très douloureux.

Nous sommes tous d'accord sur un point : il revient au législateur, au Gouvernement, aux entreprises d'accompagner les conséquences sociales et économiques des licenciements, de renforcer la protection des salariés sans paralyser l'économie et le développement.

Le projet de loi s'inscrit dans un ensemble cohérent de textes examinés depuis le mois de juillet. Le premier concernait l'accès des jeunes en entreprises : 22 000 contrats signés à ce jour pour 20 000 prévus en 2002. Nous nous réjouissons de ce succès.

Le deuxième texte concernait l'assouplissement des 35 heures et l'augmentation du SMIC sur trois ans. Le présent projet tend à suspendre les dispositions les plus nuisibles de la loi de « modernisation sociale » du 17 janvier 2002. Le chapitre de cette loi consacré aux licenciements économiques suscite en effet de grandes difficultés d'application.

Il se caractérise par sa complexité et par une insistance appuyée sur le formalisme des procédures, si bien que la procédure de licenciement collectif a été transformée en un véritable parcours du combattant.

Que nous propose le Gouvernement ? De suspendre certaines dispositions de ce texte et, en même temps, des pesanteurs bureaucratiques en tous points inutiles. Pourquoi se complaire dans des négociations interminables avec d'innombrables interlocuteurs ? Ce à quoi nous tendons, c'est à un libéralisme humaniste qui ne peut se satisfaire de telles lourdeurs. Sait-on que la circulaire d'application signée par le précédent gouvernement, aux tous derniers jours de la législature, ne comprenait pas moins de quarante pages ? C'est dire comme la loi est claire ! Du reste, ce texte n'a pas empêché la progression des licenciements économiques.

M. François Liberti - Il n'a pas été appliqué !

Mme Chantal Bourragué - Si ses ambitions étaient généreuses, il a eu des résultats pour le moins contrastés. Ce n'est pas faute, pour l'opposition de l'époque, d'avoir mis en garde le gouvernement de M. Jospin. En vain, hélas ! Mme Guigou a péché par excès de confiance (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) si bien que les partenaires sociaux se trouvent pris au piège, victimes à la fois de la longueur des procédures et de l'insécurité juridique (Approbation sur les bancs du groupe UMP) due à un texte qui dissuade la négociation et qui fait que les représentants du personnel ont pour seule arme de retarder puis de bloquer les consultations. Le risque de contentieux et de remise en cause des accords conclus s'en trouve singulièrement aggravé. Pourquoi la durée moyenne d'une procédure de licenciement économique est-elle de 200 jours en France et de 45 à 75 jours seulement en Allemagne ?

Il n'empêche ! Pressée de questions par l'opposition, Mme Guigou affirmait : « Rien ne me conduit à penser que nos entreprises se trouveront, après le vote de ce texte, dans une situation réellement défavorable par rapport à nos partenaires de l'Union européenne » (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Or, l'insécurité juridique dissuade les entreprises d'investir, si bien que la loi se retourne contre les salariés, tout en créant une injustice manifeste à l'égard des salariés des PME. Contrairement aux grands groupes, les petites sociétés n'ont pas les reins assez solides pour supporter le coût de procédures interminables, si bien que les plans sociaux et les garanties qu'ils offrent, deviennent l'apanage des salariés des grandes entreprises. Quant aux autres, elles préfèrent déposer leur bilan plutôt que de se soumettre aux exigences de la loi.

Mais si les salariés pâtissent de la loi « de modernisation sociale », les entreprises ne sont pas épargnées, alors même que ce sont elles qui créent la richesse et les emplois en France.

M. Jacques Desallangre - Avec les salariés !

Mme Chantal Bourragué - Imposer à une entreprise de conserver tous ses salariés alors que son activité décroît, c'est la contraindre, à terme, de procéder à des licenciements plus nombreux, ou à déposer son bilan.

De plus, la loi a fait perdre une bonne part de son attractivité au territoire français...

Mme Catherine Génisson - Mais c'est faux ! Vous chantez toujours la même antienne !

Mme Chantal Bourragué - ...car un nombre croissant de chefs d'entreprises étrangers ont une perception négative de notre pays.

Mme Catherine Génisson - Vous faites tout ce qu'il faut pour ça !

Mme Chantal Bourragué - Quant aux entreprises françaises, elles délocalisent davantage maintenant qu'avant le vote de cette loi.

Mme Élisabeth Guigou - Mais enfin ! C'est faux ! Prouvez vos assertions !

Mme Chantal Bourragué - Cette perte d'attractivité a été abondamment commentée après la parution du rapport du Forum de Davos (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

L'excès de formalisme de la loi a suscité les critiques convergentes du Conseil constitutionnel et des syndicats mais aussi de hauts responsables du parti socialiste. Le Conseil constitutionnel, pour commencer, a jugé le texte contraire au principe de la liberté d'entreprendre...

Mme Élisabeth Guigou - C'est faux ! Soyez plus précise !

Mme Chantal Bourragué - ...ajoutant que son article 107 desservait l'exigence constitutionnelle qui s'attache à la sauvegarde de l'emploi. Des syndicats, les critiques sont venues en rafales : de la CGT, qui dénonçait certains effets pervers liés au recours à un médiateur ; de la CFDT, qui regrettait la déresponsabilisation des acteurs sociaux et craignait le contournement du dispositif ; de la CGC qui jugeait que la loi n'apportait pas les bonnes réponses ; de FO, enfin, qui rappelait que mieux vaut négocier avec les organisations syndicales pour mettre au point les dispositions sociales...

Mme Catherine Génisson - Et que pensent-ils du texte que vous nous soumettez ?

Mme Chantal Bourragué - Enfin, au sein même du parti socialiste, M. Fabius déclarait : « Le nouveau dispositif suscite des questions sérieuses, notamment celle de son adaptation aux nécessités d'une économie moderne qui, dans l'intérêt des salariés, doit être rapide, réactive et compétitive ».

Mme Catherine Génisson - C'est un dictionnaire de citations !

M. François Goulard - M. Fabius avait parfaitement raison !

Mme Chantal Bourragué - La loi « de modernisation sociale » va bien à contre-courant de la modernité, de la réactivité et de l'attractivité. Aujourd'hui, Monsieur le ministre, vous nous proposez d'en corriger les principaux défauts, et de revenir au dialogue et à l'esprit de responsabilité. Vous innovez en proposant une suspension des articles les plus fâcheux pour dix-huit mois, tout en maintenant le doublement des indemnités. Ce faisant, vous favorisez la réouverture du dialogue social, dans l'esprit des réformes promises : simplification administrative, proximité, responsabilité.

M. Yves Bur - Enfin !

Mme Chantal Bourragué - J'ajoute que les dispositions suspendues n'avaient fait l'objet ni d'accord ni de concertation entre les partenaires sociaux, qui les avaient vivement critiquées. Ils sont désormais invités à conclure des accords de méthode, et à trouver un accord majoritaire. Le fruit de leur réflexion sera traduit dans les textes par un projet que nous soumettra le Gouvernement. Bien entendu, si les partenaires sociaux ne pouvaient s'entendre, le législateur prendrait ses responsabilités. Mais, ce texte marque une vraie rupture, faisant du succès de la négociation collective le garant de l'équilibre entre la justice sociale et l'efficacité économique.

Certains, parmi nous, voulaient aller plus loin dans la libéralisation des procédures, mais nous n'ignorons rien des difficultés de l'exercice. Aussi, dans l'intervalle, nous appelons votre attention sur les oubliés : les salariés des PME.

M. le Président - Il serait temps de conclure.

Mme Chantal Bourragué - Il faudra mieux prendre en compte la nécessité de la reconversion et du reclassement des salariés, et c'est en facilitant le dialogue que nous mettrons au point des réformes acceptées par tous. Nous sortons donc de la période d'économie dirigée voulue par le précédent gouvernement... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme Élisabeth Guigou - Arrêtez l'intox !

Mme Chantal Bourragué - En rendant salariés et entrepreneurs plus responsables, le Gouvernement s'attache bel et bien à humaniser le libéralisme (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). C'est pourquoi, le groupe UMP votera ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme Élisabeth Guigou - La loi de modernisation sociale comporte de nombreuses avancées pour nos concitoyens : création d'un statut des accueillants familiaux pour les personnes âgées et handicapées, amélioration de la couverture maladie des Français à l`étranger ; interdiction du harcèlement moral, limitation des emplois précaires, validation des acquis de l'expérience professionnelle. Voilà quelques-unes des dispositions de cette loi.

M. François Goulard - Celles-là, on les garde !

Mme Élisabeth Guigou - Pas toutes ! Pour le harcèlement moral, nous verrons.

Par ailleurs, cette loi posait le principe fondamental que le licenciement ne peut être que l'ultime recours avant lequel il faut chercher toutes les solutions alternatives au licenciement, tout en admettant la nécessité pour les entreprises de s'adapter. Elle n'est donc pas l'épouvantail que vous en faites en reprenant - comme l'a fait Mme Bourragué - les arguments du MEDEF (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Votre projet réduit la protection des salariés contre les licenciements économiques. Il suspend les dispositions instaurant un dialogue social sur la stratégie de l'entreprise, ainsi que la séparation entre les consultations au titre du livre III et celles au titre du livre IV, qui permettait un vrai débat sur le projet de restructuration sans entériner a priori celui de l'employeur. Cette procédure allonge les délais, dites-vous. Certainement. Mais dans l'immense majorité des cas, il s'agit de trois semaines, et seulement s'il y a désaccord entre les partenaires sociaux. De toute façon, mieux vaut un délai pour s'entendre qu'un conflit qui hypothèque le succès même d'une restructuration. Selon une étude de Bernard Brunhes pour la DERES en août 2002, la France est en situation médiane en Europe en ce qui concerne les délais, mais c'est le pays où les licenciements économiques sont le moins coûteux.

Vous portez un autre coup au dialogue en supprimant la possibilité pour les salariés de s'exprimer devant les organes de direction de l'entreprise pour proposer d'autres solutions, de même qu'en suspendant le recours au médiateur. Enfin vous rétablissez la qualité professionnelle comme critère de l'ordre de licenciement : c'est clairement satisfaire le MEDEF.

Vous-même et le Premier ministre n'avez que le dialogue social à la bouche. Cette suspension montre l'écart entre vos discours et vos actes. Dans le cas où un plan de sauvegarde de l'emploi est décidé, vous suspendez l'article 116 qui aménageait la consultation du CE et vous privez l'inspection du travail de la possibilité d'intervenir sur le contenu de ce plan. C'est très préoccupant, car il s'agissait d'un vrai progrès. De toute façon on voit mal comment les partenaires sociaux pourraient négocier sur les dispositions d'ordre public qui encadrent l'intervention de l'inspection du travail.

Vous dites faire confiance à la négociation pour améliorer la loi de modernisation sociale. Celle-ci est loin d'être parfaite. Mais pourquoi ne pas attendre les résultats de la négociation sociale pour la modifier ? La négociation sociale peut faire mieux que la loi, mais pourquoi suspendre celle-ci dès maintenant ?

M. Dominique Dord, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Pour obliger à la négociation sociale.

Mme Élisabeth Guigou - Nous sommes inquiets sur l'issue de cette négociation. Le long délai de suspension n'incite pas le MEDEF à négocier. Il a d'ailleurs annoncé un simple groupe de travail pour une « discussion » et non une véritable négociation.

Cette suspension renforcera la précarité des salariés. Par exemple, à Romainville dans ma circonscription, Aventis envisage de fermer un établissement. Les discussions commencées sur la base de la loi de modernisation sociale seront probablement interrompues.

Par ailleurs, les amendements de la commission des affaires sociales sont inacceptables, notamment la suppression de l'amendement Michelin qui oblige l'entreprise à négocier le passage aux 35 heures avant tout plan social. Supprimer l'obligation pour le chef d'entreprise d'informer les élus du personnel sur les projets de nature à affecter les conditions de travail et le volume de l'emploi affaiblirait encore le dialogue social. Enfin, accepter les amendements relatifs aux dispositions sur le harcèlement moral, qui seraient source de recours abusif, serait peu cohérent avec votre volonté de créer une instance de lutte contre toutes les discriminations. Il n'y a pas eu de dérive. La loi a aménagé simplement la charge de la preuve, ce qui, selon le Conseil constitutionnel, ne dispense pas le demandeur d'établir la matérialité des faits et ne s'applique qu'au civil, non au pénal. En outre, il s'agit d'une mise en conformité avec nos engagements européens.

Nous avons un désaccord politique profond, sinon sur ce dernier sujet - nous verrons comment vous accueillerez les amendements de votre majorité - mais sur les licenciements économiques. Mieux aurait valu étendre ces dispositions aux entreprises qui s'en trouvent exclues, et prévoir notamment la participation des salariés aux organes de direction de toutes les entreprises, y compris les PME.

Enfin, je reviens sur le prétendu déclin de l'attractivité de la France que Mme Bourragué a complaisamment évoqué. Selon l'OCDE, à laquelle je fais plus confiance qu'au forum de Davos, la France a accueilli en 2001 52,6 milliards de dollars d'investissements directs étrangers, soit 23 % de plus qu'en 2000...

Plusieurs députés UMP - Dans l'immobilier !

Mme Élisabeth Guigou - ...alors que dans l'ensemble de l'OCDE, ils baissaient de moitié. La Banque de France vient d'indiquer que ces investissements ont augmenté de 16 % dans les neuf premiers mois de 2002. La loi n'a pas eu l'effet que vous prétendez, au contraire peut-être.

M. François Goulard - Les investisseurs savaient par les sondages que nous allions gagner !

Mme Élisabeth Guigou - Pour les investissements étrangers, nous sommes à la deuxième place, derrière la Grande-Bretagne, mais devant l'Allemagne. Parler de déclin, c'est agiter un épouvantail pour justifier l'affaiblissement de la protection des salariés contre les licenciements économiques (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Francis Vercamer - La loi de modernisation sociale illustre un travers qui fait partie de l'exception française : quand devant les difficultés économiques la plupart des pays facilitent la vie de leurs entreprises, nous alourdissons la réglementation. Comme si des règles tatillonnes préservaient de la concurrence et du ralentissement de l'activité !

Chacun s'en souvient, le précédent gouvernement avait cédé à la pression des délocalisations et des éléments les plus radicaux de sa majorité, en période préélectorale...

M. Maxime Gremetz - Radical, moi ? (Rires)

M. Francis Vercamer - D'où l'adoption de ce texte qui ne protége pas l'emploi mais le fragilise puisqu'il menace l'entreprise.

L'heure est au pragmatisme. Dans un univers très concurrentiel, comment aider une entreprise moyenne à se développer, donc à créer des emplois ? En diminuant le coût du travail par l'allégement des charges sociales...

M. Maxime Gremetz - Et voilà !

M. Francis Vercamer - ...et en leur permettant de réagir mieux et plus vite aux difficultés.

C'est ce second aspect qui est l'objet du projet.

M. Maxime Gremetz - Vous ne connaissez même pas le montant du SMIC !

M. Francis Vercamer - Vous releviez cet été que la loi de modernisation sociale n'a aucun effet sur les plans sociaux. A l'inverse, elle aurait plutôt tendance à précipiter les dépôts de bilan. Le groupe UDF partage votre analyse. La nécessité de réviser les dispositions les plus anachroniques de la LMS est confortée par un rapport du Conseil économique et social qui montre à quel point cette loi combinée avec les 35 heures, a eu un effet négatif sur l'attractivité du territoire (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Cette révision n'a rien d'idéologique. Elle relève de la réalité des faits, qui sont terribles. Ainsi, dans l'agglomération roubaisienne, les licenciements se multiplient, surtout dans le textile...

M. Maxime Gremetz - C'est que la LMS n'est pas appliquée !

M. Francis Vercamer - On estime que leur nombre pourrait s'élever à 1 000 ou 1 500 dans les prochains mois.

La LMS renvoie à une particularité bien française, l'extrême complexité du code du travail. Croyez-en mon expérience encore récente de conseiller prud'homal...

M. Maxime Gremetz - Pas du collège salarié ?

M. Francis Vercamer - ...le caractère pléthorique des textes et leur enchevêtrement nuisent à la compréhension du droit par ceux qu'il est censé protéger. Il est temps d'engager avec les partenaires sociaux la refonte de notre code du travail (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste), qui doit avoir pour objectif la sauvegarde de l'emploi et la protection des salariés. La LMS nous conduit à réfléchir sur notre conception du licenciement économique, une formule qui recouvre en fait des cas de figure bien différents. Or, c'est en fonction de la réalité que doivent être construites les règles du licenciement. D'un côté on voit des entreprises en difficulté, qui doivent faire des efforts pour survivre, de l'autre des entreprises dépendant souvent de grands groupes, qui cherchent à améliorer leurs résultats financiers sans se préoccuper des conséquences sur le bassin d'emploi. C'est bien contre ces dernières que nous devons protéger le salarié.

Enfin, la question du licenciement offre une occasion de relancer le dialogue social, comme vous vous y êtes engagé.

Le 16 juillet 2001 a été signée, par les partenaires sociaux, la position commune sur les voies et moyens de l'approfondissement de la négociation collective. Les signataires ont souhaité « donner un nouvel élan à la négociation collective au sein d'un système performant de relations sociales ». Il nous paraît souhaitable de laisser les partenaires sociaux discuter de l'ensemble des conditions de licenciement.

Votre texte nous satisfait parce qu'il favorise le recours au dialogue social qui, même s'il nous paraît timide, est une occasion nouvelle pour les partenaires sociaux d'exercer leurs responsabilités avec lucidité. En cela, ce projet s'inspire de la même conception des relations sociales que celle portée par les textes européens. Or vous connaissez la volonté de l'UDF de veiller à la promotion des idéaux européens.

Pour autant, il nous est difficile de nous satisfaire de la simple suspension que vous proposez. Nous souhaitons l'abrogation des dispositions en cause.

En effet, soit nous convenons que ces dispositions sont mauvaises, et alors, elles doivent être abrogées. Soit elles peuvent être aménagées, et la suspension ne se justifie pas. Puisque le Gouvernement a demandé l'urgence, alors il y a urgence à abroger !

De plus, dans quel contexte vont évoluer les entreprises et ceux qui appliquent le droit du travail, pendant les dix-huit mois de suspension ? Le risque d'imbroglio juridique est grand pour une entreprise qui entame une procédure dans les mois qui viennent. Si elle le fait avant la suspension, quel sera le droit applicable lorsque celle-ci interviendra ? Et quel sera le droit applicable, si une procédure commencée pendant la suspension, perdure à l'issue des 18 mois ? La suspension ouvrira une période d'incertitude qui planera aussi sur le salarié.

Enfin, la simple suspension va perturber le dialogue social. Les uns négocieront dans la perspective d'obtenir des avantages supplémentaires par rapport au texte existant, mais suspendu. Les autres, déjà en désaccord avec ce texte, essaieront d'en réduire la portée. La négociation risque d'aboutir à un échec. Seule l'abrogation nous semble donc de nature à créer une situation juridique claire et laisser le champ libre au dialogue social.

L'abrogation serait un signe fort de confiance dans la capacité des partenaires sociaux à élaborer de nouvelles règles, plus simples, plus efficaces. Elle donnerait toutes ses chances de réussir au double appel à la négociation que vous lancez. Vous déclariez, hier soir, être disposé à prendre toutes vos responsabilités pour proposer de nouvelles règles, si les négociations n'aboutissaient pas à l'issue des dix-huit mois.

Alors, pourquoi ne pas abroger les dispositions qui vous paraissent les plus contestables ? En effet, en attendant les propositions des partenaires sociaux, nous reviendrions à l'état antérieur du droit du licenciement, dont toutes les règles étaient issues du dialogue social.

Sans doute aurions-nous préféré plus d'audace, mais le groupe UDF votera ce texte, premier pas dans le sens d'une vraie modernisation de notre droit du travail, celle qui sait faire confiance au dialogue social (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. Maxime Gremetz - C'est le grand écart !

M. Jacques Desallangre - Après avoir précipitamment réintroduit le cumul des mandats sociaux pour les dirigeants d'entreprises, puis supprimé les 35 heures, vous allez supprimer les seules dispositions favorables aux salariés figurant dans la LMS.

Vos trois démarches sont fortement inspirées par le MEDEF. La première répond au souci de la classe très restreinte des 200 grands patrons détenant en moyenne 20 postes chacun. La suppression des 35 heures satisfait le MEDEF qui n'a cessé de critiquer cette réforme tout en en acceptant tous les avantages. Enfin, sur le droit de licenciement votre projet est la copie quasi conforme des documents de travail du MEDEF. On comprend les satisfecit que vous a décernés M. Seillière sur France 2. « Enfin la France est gouvernée », a-t-il dit ; oui, mais au bénéfice des puissants. Vous parviendriez presque à faire passer le précédent gouvernement pour un rassemblement d'ultra gauchistes révolutionnaires, alors que la LMS s'est bornée à reprendre la définition jurisprudentielle du licenciement économique.

J'avais d'ailleurs jugé cette loi « cosmétique » et voté contre car elle n'empêchait nullement les licenciements boursiers et ne protégeait pas suffisamment les salariés. Si la définition du licenciement économique avait été bouleversée par la loi LMS, vous vous seriez empressé de la réécrire ; or il n'en est rien.

Vous vous en prenez aux dispositions qui furent adoptées par amendements du groupe communiste et de quelques parlementaires de gauche dont je fais partie. Elles tendaient à améliorer l'information et le contrôle par les salariés des procédures de licenciement économique.

Aujourd'hui encore, nous proposons, sans illusion, une définition du licenciement économique qui empêche les licenciements boursiers considérant qu'une entreprise prospère ne pouvait prétendre procéder à des licenciements pour motif économique.

Mais puisque le chef d'entreprise n'est parfois que le bras armé des actionnaires et gestionnaires de fonds, il nous paraît légitime de faire supporter le poids des licenciements à ces derniers, plutôt qu'à l'entreprise et à la nation. A la liberté d'agir doit correspondre l'obligation de réparer le préjudice causé, alors que l'entreprise est prospère.

Il est vrai que mes préoccupations sont bien éloignées de l'idéologie libérale exprimée dans votre projet. Vous prétendez « relancer le dialogue social », et plus vous le relancez, plus il se tend. Le Gouvernement se dérobe à ses responsabilités sociales en refusant de déterminer l'intérêt général dans une matière aussi sensible que l'emploi.

Vous substituez le contrat à la loi alors que là où la loi protège, le contrat opprime. Le Gouvernement accélère le mouvement de destruction de « l'ordre public social ». Le caractère normatif du droit du travail se réduit comme peau de chagrin.

En souhaitant que « le champ de la négociation soit le plus large possible », vous contrevenez à la hiérarchie des normes et à l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme. Vous marquez la volonté du Gouvernement de laisser le champ social entre les mains du MEDEF.

Enfin, vous ouvrez de plus belle la voie aux licenciements en prenant le risque de contribuer à la dégradation de l'emploi et de la demande intérieure qui tire la croissance. Vous êtes obnubilés par votre credo : « Pour faciliter les embauches, il faut faciliter les licenciements. Pour attirer les entreprises étrangères, il faut être compétitif » - c'est à dire baisser toujours plus les charges salariales et réduire à néant la contrainte en matière de licenciement.

Pourtant, une étude du groupe Ernst et Young nous apprend que l'investissement étranger a progressé en France. Mais votre majorité insatiable exige toujours plus de déréglementation, toujours plus de pouvoirs pour la patronat, et vous jugez nocives des mesures que nous estimons à peine suffisantes.

Votre doctrine économique froide et égoïste vous amènera toujours plus loin sur le chemin que vous trace le MEDEF. Notre approche se veut au contraire humaniste. Nous voterons donc contre votre projet, même si je vous remercie de réveiller un clivage gauche-droite devenu flou, tant l'idéologie libérable irrigue insidieusement les politiques publiques depuis une vingtaine d'années.

Si vous êtes du côté du MEDEF, nous serons avec les salariés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. François Goulard - Monsieur le Président, Monsieur le ministre, mes chers collègues...

M. Alain Vidalies - Jusque-là, ça va ! (Rires)

M. François Goulard - Les orateurs précédents ont relevé à juste titre les différences entre la droite et la gauche. La première porte sur l'affichage et l'art de la gauche pour user de l'antiphrase : « loi de modernisation sociale », « réduction négociée du temps de travail »...

On nous parlait de « nouvelles régulations économiques » quand on durcissait l'ancienne réglementation. Et pour « modernisation » de la vie sociale, on sait ce qu'il en est ! Monsieur le ministre, sur ce plan vous êtes battu avec ce titre sobre de « projet de loi relatif à la négociation collective sur des restructurations ayant des incidences sur l'emploi » (Rires).

Différence encore dans la conception et l'usage de la loi. Cette loi de modernisation sociale, loin d'être le fruit de réflexions approfondies - elle ne figurait pas au programme de la gauche en 1997-, a été une loi de pure circonstance, destinée à tirer le Gouvernement de l'embarras dans lequel les nombreux plans de licenciement l'avaient mis ! Souvenez-vous de Michelin et de Danone ! De surcroît, cette méthode permettait au Gouvernement de résoudre des conflits internes à sa majorité - un orateur a parlé hier, de manière inexacte, de « loi Gremetz », mais il est bien vrai que cette loi a été durcie sous la pression du groupe communiste de l'époque.

M. Maxime Gremetz - Il est jaloux !

M. François Goulard - En réalité, si le précédent gouvernement a complexifié les procédures de licenciement et allongé les délais au détriment des entreprises - donc des salariés - il a fini par reconnaître que la décision finale appartenait aux chefs d'entreprise - là réside toute la contradiction de la gauche qui, depuis 1983, s'est ralliée contre son gré à l'économie de marché, sans parvenir à le reconnaître ni l'assumer...

M. le Rapporteur - C'est le ralliement honteux !

M. François Goulard - ...d'où un certain désarroi de la classe politique socialiste. Je me souviens de M. Jospin, en pleine campagne électorale, restant muet face aux inquiétudes des salariés de Danone.

La gauche n'a pas su concilier son adhésion - forcée - à l'économie de marché, et son discours sur la protection des salariés contre les licenciements.

Différence encore dans le rôle que nous accordons à la loi et au contrat. Mme Guigou, qui nous a quittés, mais surtout Mme Aubry, que l'on ne voit plus beaucoup (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), se sont fait les chantres d'une conception de la gauche, selon laquelle la négociation n'aboutit à rien sans le secours de la loi. Conception d'inspiration marxiste, mais aussi technocratique, les hauts fonctionnaires ne faisant confiance qu'aux textes qu'ils ont eux-mêmes rédigés.

M. le Rapporteur - Ce n'est pas faux !

M. François Goulard - L'on avance également le manque de poids des syndicats. Mais faute de grain à moudre, comment pourrait-il en être autrement ? En leur accordant plus de place, nous inciterons les salariés à se syndiquer. Il se pourrait qu'à l'avenir, le champ de l'ordre public en arrive à se restreindre. Expliquons-nous.

M. Maxime Gremetz - Allez Monsieur le professeur ! Faites-nous la leçon !

M. François Goulard - Il y a des règles générales posées par la loi, auxquelles on ne peut déroger par la voie du contrat.

M. François Liberti - Sauf si c'est plus favorable au salarié !

M. François Goulard - Plus favorable ou pas ! S'il est évidemment nécessaire de disposer d'un socle de dispositions protectrices pour les salariés, le champ ou la négociation doit être élargi. Quelles sont alors les évolutions souhaitables ? Notre droit du travail est sans doute plus contraignant que les autres législations européennes, quoique tous les pays européens soient assez protecteurs en la matière. Mais le sentiment d'un excès de contraintes est surtout provoqué par la pratique et la jurisprudence. La sagesse serait de revenir au droit antérieur à la loi de modernisation sociale. Vous savez bien que ce n'est pas en compliquant les règles sur le licenciement que l'on protège les emplois. Bien au contraire ! De nombreuses stratégies permettent de détourner la loi, le dépôt de bilan en est une.

Ce sont les pays où le chômage est quasi-inexistant qui protègent le mieux l'emploi (« Lesquels ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Certains nous ont reproché de ne pas aller plus loin et de ne pas remettre en cause des dispositions que nous étions seuls en Europe à avoir adoptées. Ce serait une erreur, d'abord parce qu'il faut respecter notre tradition juridique française, et surtout car il ne faut pas engager de négociations avec les organisations syndicales sur un texte provocateur.

M. le Rapporteur - Très juste !

M. François Goulard - Le Gouvernement a su trouver le juste équilibre.

M. François Liberti - Pour faire passer la pilule !

M. François Goulard - Avec la réforme intelligente des 35 heures que vous avez assouplies, la suppression des emplois-jeunes « parkings », et les mesures prises en faveur des jeunes, vous tracez une nouvelle voie pour la réforme sociale. Les Français ont pu y voir la méthode Raffarin, mais dans ce domaine si fondamental du droit du travail et des relations sociales, il y a une méthode Fillon dont je salue la pertinence.

M. Alain Vidalies - C'était un discours de successeur ! (Sourires)

Mme Catherine Génisson - Permettez-moi d'exprimer mes inquiétudes face à ce projet de loi. Sa dénomination est si ambiguë que le Président de la commission et le rapporteur se proposent de la modifier. Pudibonderies verbales. En réalité, votre seule ambition est de revenir sur les dispositions de la loi de modernisation sociale visant à prévenir les licenciements économiques. Votre projet aurait pu s'intituler « point d'orgue social orchestré par le MEDEF » (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Pire : la suspension de ces dispositions illustre votre impuissance politique à gérer les conséquences des régulations économiques et financières, dans l'obédience des grands chefs d'entreprise qui veulent toujours moins de règles alors que se multiplient les plans sociaux.

La nouvelle dynamique que vous prétendez apporter au dialogue social ne convainc pas. Les organisations syndicales sont dubitatives. Le MEDEF consent à entrer dans la discussion, mais il n'est pas question de négociation. Quant à la suspension de l'obligation d'informer les élus du personnel sur les projets de nature à affecter les conditions de travail, ou de celle de réintégrer les salariés en cas d'annulation du plan social, quelle provocation indigne ! Comment ne pas reconnaître un droit aussi élémentaire ?

On peut s'interroger sur vos justifications. Vous critiquez, à juste titre, le droit du licenciement pour ses carences. Mais ce même droit servira de support aux négociations pendant les dix-huit prochains mois ! Vous suspendez dans le même temps certains articles de la loi de modernisation sociale. Cela fait dire à bon nombre de syndicalistes que vous les mettez en apesanteur ! Les dix-huit mois que vous prévoyez pour la négociation expérimentale seront en fait le temps de la fragilisation sociale. Quant au délai de douze mois qui doit nous séparer d'une prochaine loi, il paraît totalement arbitraire. Sans compter le silence que vous gardez sur vos orientations...

Mais je m'insurge lorsque vous arguez des effets pervers d'une loi qui n'est pas appliquée ou quand vous vous complaisez dans la description d'une France peu attractive... Je suis l'élue d'un département, le Pas-de-Calais, cruellement touché par le chômage. En décembre 2001, Sollac Biache, implantée depuis 150 ans dans une commune de 4 000 habitants, licenciait 422 personnes. Un accord de reclassement a été négocié, difficilement, ainsi qu'une convention de réindustrialisation du site. Mais l'action du groupe monte !

Sentiment d'impuissance, drames humains, difficultés économiques dans le territoire, nous faisons tous le même constat et avons tous la même volonté de concilier protection des salariés et intérêt de l'entreprise. Mais nos solutions divergent. Si le dialogue social doit être revitalisé, sa qualité dépend beaucoup du cadre législatif. Les entreprises sont très diverses et des liens forts unissent certains patrons à leurs salariés. Mais en présence de licenciements boursiers, lorsque par exemple un directeur des ressources humaines de Valéo déclare aux médecins généralistes de son département qu'il trouve le nombre d'arrêts maladie de ses salariés trop élevé, l'Etat doit assumer ses responsabilités sociales. C'est une des principales divergences qui apparaîtra sans doute entre nous dans la discussion des articles (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Hervé Novelli - Je voudrais d'abord remercier le ministre de nous soumettre ce projet qui, derrière un titre compliqué, a l'avantage de remettre en cause l'une des lois les plus perverses de la précédente législature socialo-communiste. La loi dite de modernisation sociale souffrait de toutes les tares. C'est d'abord une loi de circonstance, adoptée sous la pression des événements et surtout celle du parti communiste, dans un contexte de déliquescence de la gauche plurielle.

C'est ensuite une loi purement symbolique, dont seuls les effets d'affichage comptaient. Aucune évaluation ni étude d'impact n'a jamais voulu assurer sa qualité. Enfin, déposée en urgence en mai 2000, elle a mis plus d'un an et demi à être adoptée. Après une préparation bâclée, le gouvernement Jospin a voulu améliorer le texte. Il en a retiré 23 articles. Mais au fil des lectures, le projet s'est transformé en monstre bureaucratique. Il est passé de 70 à 223 articles, devenant une loi balai rassemblant toutes les dispositions qui traînaient dans les cabinets ministériels.

Au final, il s'agit d'un immense texte portant diverses dispositions d'ordre social et sanitaire. Tout y passe, de l'organisation du système de santé au code des pensions militaires d'invalidité en passant par le laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies, l'abrogation de la loi Thomas et la formation professionnelle. Pour comble, deux de ses chapitres s'intitulent « dispositions diverses » !

M. François Goulard - Il n'y a rien sur les rats musqués !

M. Hervé Novelli - Merci donc, Monsieur le ministre, de nous proposer de suspendre pour dix-huit mois certains de ses articles. Mais vous n'avez pas choisi la facilité en décidant de mettre dans le jeu de la négociation le droit du licenciement collectif. La rupture du contrat de travail est par nature l'acte le plus difficile à négocier entre les partenaires sociaux. L'équilibre entre protection des salariés et intérêt de l'entreprise est le pire objet que peuvent avoir des négociations. N'eût-il pas été préférable d'ouvrir les négociations sur d'autres enjeux collectifs, tels que la formation professionnelle, plutôt que de courir le risque d'un échec sur ce terrain délicat ?

Ne faudrait-il pas ensuite une véritable abrogation plutôt que cette mesure temporaire ? L'abrogation ne créerait pas l'incertitude juridique que craignent certains. En effet, si la loi a été promulguée en janvier, seuls quatre décrets d'application sur trente-deux ont été pris.

M. François Goulard - Mais qu'a fait Mme Guigou ?

M. Hervé Novelli - Abrogeons les articles qui ne sont pas entrés en vigueur faute de textes d'application !

Par ailleurs, la suspension peut être facteur de contentieux. Les juges sont déjà de plus en plus souvent amenés à se prononcer sur la date du début d'une procédure de licenciement économique. Ils le seront encore plus. Par ailleurs, ils seront confrontés à plusieurs règles : le droit antérieur à la loi de modernisation sociale, le droit suspendu, c'est-à-dire celui de la loi, le droit suspendu restauré, en cas d'échec des négociations, et le droit éventuellement issu des négociations ! Nous donnons du travail aux avocats, mais salariés et employeurs vont s'y perdre. Or le travail du législateur est de simplifier les règles applicables aux entreprises.

La méthode progressive que vous employez ne manque pas de pragmatisme, mais soulève également quelques difficultés. D'abord, où arrêter le curseur entre les articles à suspendre et ceux qui doivent être conservés ?

Plusieurs députés socialistes - Voilà !

M. Hervé Novelli - Entre le trop et le trop peu, la marge est étroite.

Ensuite, il ne faudrait pas considérer que tous les articles de la loi de modernisation sociale qui ne figurent pas dans le présent texte sont automatiquement validés. Si l'article 48 n'est pas suspendu, doit-on comprendre que le Gouvernement est contre l'épargne retraite et la loi Thomas de 1997 ? L'article 96, lui, serait en contradiction avec le projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi. D'un côté, nous aménageons la loi sur la réduction du temps de travail pour la rendre compatible avec la croissance des entreprises et de l'emploi, mais de l'autre nous confirmons les 35 heures...

D'autres articles devraient être suspendus. C'est le cas de l'article 100 sur la consultation du comité d'entreprise, qui n'apporte aucun avantage pour les salariés et n'est qu'une source de complication. L'obligation d'information auprès des entreprises sous-traitantes incluse dans l'article 105 alourdit les formalités administratives sans améliorer la protection du personnel. L'article 108, en subordonnant le licenciement à la mise en _uvre de tous les efforts de formation et d'adaptation, transforme une obligation de moyens en obligation de résultat. L'obligation d'embauche dans une autre entreprise du groupe porte atteinte à la liberté d'initiative des employeurs. Enfin, l'article 116 instaure une forme de délation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Il est facteur d'une dégradation du climat social dans l'entreprise.

M. Maxime Gremetz - Quel discours ! Il a trois longueurs d'avance sur le Gouvernement !

M. Hervé Novelli - Toujours dans un esprit de clarification, je propose de redéfinir la notion de « harcèlement » afin d'éviter la multiplication de contentieux injustifiés. Nous souhaitons par ailleurs renverser la charge de la preuve dans ce domaine.

M. Maxime Gremetz - Ce sont les pauvres, qui n'ont pas les moyens, qui devraient payer !

M. Hervé Novelli - L'ex-majorité avait envoyé un signal clair à l'attention des chefs d'entreprise : il s'agissait de compliquer leur vie économique (« Oh ! » sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) plus que de simplifier celle des salariés. Aujourd'hui, nous devons envoyer un message inverse : redonner confiance aux dirigeants pour restaurer le dialogue social.

Vous avez commencé de vous y atteler, Monsieur le ministre, nous vous accompagnerons dans cette démarche (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Maxime Gremetz - Cet orateur est fabuleux !

M. Alain Vidalies - Après cette intervention, un seul commentaire me vient à l'esprit : le pire n'est jamais certain. Finalement, Monsieur le ministre, vos propos sont bien nuancés !

Comme à l'occasion de la discussion de la loi sur les 35 heures, face à des amendements d'inspiration ultra-libérale, il vous faudra peut-être le recours de quelques élus de gauche !

Nous évoquons un sujet d'une extrême gravité. Depuis le 30 août 2002, de nouveaux plans sociaux menacent 148 000 emplois. Au nombre des entreprises en cause, il y a Mitsubishi, Matra, Hewlett Packard, Daewoo, qui sont toutes, comme chacun sait, dans une extrême difficulté.

M. Maxime Gremetz - Ce sont des PME !

M. Alain Vidalies - Monsieur le ministre, vous prétendez que les choses sont assez simples : il y aurait d'un côté la gauche, les socialistes, qui ne connaissent que la loi et le carcan administratif, et vous, qui voulez donner un souffle nouveau à la négociation sociale. Or, pour négocier, il faut être deux. Je vous le concède, le MEDEF ne vous opposera pas de résistance majeure.

Mais quid des organisations syndicales ? Je prends le compte rendu officiel de la commission nationale de la négociation collective. La CGT : « Force est de constater qu'aucun élément d'appréciation, aucun bilan sérieux de l'application du texte précédent n'est produit à l'appui de cette révision. Il s'agit d'un texte purement idéologique, d'une nouvelle concession au MEDEF. Le projet ne comporte pas la moindre évaluation de l'impact social qu'il va produire ; or, c'est un projet redoutable pour le droit des salariés ».

La CGC demeure très réservée sur ce projet à deux égards : le recours à la suspension, d'abord, et sur le fond ensuite : « Nous préférons humblement reconnaître notre difficulté à vous suivre intellectuellement, plutôt que de nous laisser aller à des analyses de comptoir indignes de l'ambition de votre projet. Cette suspension ne traduirait-elle pas l'hypocrisie, à peine voilée, de tout faire pour que la loi de modernisation sociale ne s'applique pas, sans le dire, et si possible sous l'alibi du dialogue social ? ».

Un diagnostic plus accablant est-il possible ?

Force ouvrière et la FEN font du reste le même constat.

Je veux bien que vous lanciez une grande négociation, mais les organisations syndicales vous ont déjà répondu ! Si vous aviez invité à la négociation sans pour autant mettre certains négociateurs - les représentants des salariés - en situation de faiblesse, vous n'auriez peut-être pas eu à porter la responsabilité de son échec éventuel.

Le rapporteur écrit, à propos de la loi de modernisation sociale, qu'il s'agit d'un monstre juridique et que les nouveaux moyens mis à la disposition des représentants du personnel participaient d'une vision des relations sociales dans laquelle l'employeur est un délinquant en puissance. Vous appelez à la modération, mais ces propos relèvent de la provocation. Comment, face à de telles horreurs, ne proposez-vous pas une abrogation immédiate de la loi ?

Les entreprises seraient aujourd'hui précipitées vers le dépôt de bilan - nous aurions aimé des explications, des statistiques. Or, c'est une invention, une pétition de principe.

Cette dramatisation confine à l'incohérence. Je vous rappelle que c'est dans le cadre juridique que vous vous apprêtez à remettre en _uvre que vous avez géré la France de 1993 à 1997, avec des résultats peu enthousiasmants - la loi de modernisation sociale de 2002 n'y était pour rien.

Le débat n'est pas nouveau. J'ai cité hier M. Gattaz qui imputait en son temps les difficultés de l'emploi à l'autorisation administrative de licenciement - il nous promettait que sa suppression permettrait d'en créer 350 000 que nous n'avons jamais vus.

Il y aurait donc, en France, un extraordinaire carcan administratif. Mais le coût financier des licenciements, élément important pour un chef d'entreprise, est moins élevé en France - sept mois de salaires versés pour vingt ans d'ancienneté - qu'en Allemagne - dix-huit mois - ou en Espagne - quatorze mois.

Pourquoi suspendre en urgence des dispositions dont l'objectif était simplement d'imposer la circulation de l'information dans les instances de direction et de surveillance de l'entreprise ? Pourquoi écarter d'éventuelles suggestions de la part des CE ? Pourquoi nier la capacité des salariés à faire des propositions ? Comment imaginer que la procédure de médiation prévue par cette loi soit vécue comme une atteinte insupportable au pouvoir de direction des actionnaires ?

Demain, élus de droite et de gauche seront confrontés aux interrogations de salariés qui ne comprendront pas qu'une entreprise licencie quand elle n'est pas en difficulté.

Dans la vie, il y a des moments de grande lucidité, et M. Jean-Louis Debré en a connu un pendant la campagne électorale. Le 5 juin 2002, candidat de l'UMP confronté à un licenciement économique « boursier », il déclarait : « Je suis favorable au durcissement de la législation sur les licenciements ». Au journaliste qui lui faisait observer que la droite avait beaucoup critiqué la loi de modernisation sociale, il répondait : « Cette loi n'apporte pas de réponse ; encore faut-il pouvoir la faire appliquer. Je suis pour durcir la législation en faisant en sorte que les entreprises remplissent leurs obligations ».

Aujourd'hui, vous proposez exactement l'inverse. Vous poursuivez la politique que vous avez engagée avec la remise en cause des 35 heures - sans autre raison que la revanche sociale (Exclamations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jean-Charles Taugourdeau - Ce projet s'inscrit dans le droit fil de la nouvelle politique économique et sociale qu'entend mener le Gouvernement, après que le gouvernement précédent a imposé de nombreuses contraintes aux entreprises, dont je témoignerai en ma qualité de chef d'entreprise, n'en déplaise à M. Gorce... mais il n'est plus dans l'hémicycle. C'est pourtant à mes collègues de la gauche plurielle que je souhaite m'adresser. Dès 1997, en effet, le gouvernement Jospin a voulu réduire le temps de travail pour partager l'emploi, introduisant, avec les lois Aubry, des effets pervers et lourds de conséquences pour le devenir de nombreuses entreprises, et surtout des plus petites, celles qui emploient le plus de salariés ; effets pervers aussi pour ces salariés qui veulent travailler, et qui veulent gagner davantage mais qui, à cause des 35 heures, gagnent moins ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP) Par votre politique dogmatique, vous avez sclérosé le marché du travail et, parce que votre agenda est resté bloqué à 1936, vous avez bloqué le compteur (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Ce que l'on ne dit pas assez, c'est qu'avec la réduction du temps de travail, la France est passée de 5 à 10 semaines de congés payés ! C'est ça les 35 heures ! Par votre empressement à partager ce que gagnent les autres, votre entêtement à vouloir empêcher les licenciements qui parfois s'imposent aux employeurs, vous avez entraîné l'asphyxie des entreprises. Vous avez poussé les chefs d'entreprises à ne pas créer d'emplois par peur de se voir confrontés à la spirale infernale de la loi du 17 janvier 2002 (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). On parle des emplois que l'on supprime, mais pas de ceux que l'on ne crée pas ! Le développement de l'intérim montre que vous avez précarisé le travail (Mêmes mouvements).

Il fallait à tout prix modifier la conduite de la politique sociale. Ce projet constitue un premier pas positif, car on ne peut continuer à berner les Français en ne leur disant pas que les restructurations et les licenciements font partie intégrante de la vie économique (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Mais pensez-vous vraiment qu'un chef d'entreprise licencie par plaisir ?

Aujourd'hui, dans chaque entreprise, il y a un ou des salariés qui ne sont guère performants mais aiment leur entreprise et lui rendent malgré tout des services. Ils ne sont pas licenciés, car les patrons ne sont pas que des « ajusteurs de variables », ils ont du c_ur, eux aussi !

Des mesures devront être prises rapidement pour supprimer toutes les dispositions préjudiciables à notre économie. Rappelons-nous comment les amendements Guigou ont été adoptés : à la dernière minute, dans un climat passionnel, pour réagir aux annonces de plans sociaux chez Lu, Marks et Spencer ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Cela ne réglait en rien les drames humains - sur ce point, vous avez raison, Monsieur Gremetz - mais Mme Guigou, qui nous a parlé de la France comme le pays champion du licenciement économique le moins coûteux, aurait-elle oublié que des femmes et des hommes souffrent de ce triste championnat ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Encore faut-il ajouter que, alors même que l'on disait, par certains de ces amendements, « renforcer la concertation », la plupart des partenaires sociaux n'avaient pas été informés !

Ces coups de force législatifs ne pouvaient en aucun cas répondre aux aspirations des entreprises et notamment des petites entreprises en difficulté. Or, comme notre collègue Jean Le Garrec l'a souligné, on ne peut comparer une petite entreprise avec un groupe.

M. Maxime Gremetz - C'est juste !

M. Jean-Charles Taugourdeau - Vous semblez ignorer tous ces licenciements par dépôt de bilan qui ont eu lieu parce que le coût de la suppression d'emploi est insupportable pour une petite entreprise, laquelle tend donc à éviter les contraintes attachées aux licenciements économiques. En proposant d'interdire les licenciements dans des entreprises bénéficiaires, la gauche semble avoir préféré la faillite, pourtant plus douloureuse encore pour les salariés. Certains élus de gauche, dont M. Fabius, avaient d'ailleurs émis des réserves sur la loi.

Votre projet, Monsieur le ministre, apportera de nouvelles garanties aux salariés, ce que n'a pas fait le gouvernement Jospin (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Pourquoi, s'il se souciait réellement de leur sort, n'avait-il pas poussé à la constitution des groupements locaux d'employeurs, dont Mme Aubry avait pourtant dit tout le bien qu'elle pensait ? Mais faute qu'elle ait transmis la consigne, il m'a fallu deux ans pour en constituer un, malgré l'appui du préfet !

De grâce, évoluez, car si vous vous obstinez dans ce dogmatisme, toutes les entreprises de production disparaîtront progressivement de notre territoire ! Qui, alors créera les richesses ?

M. Maxime Gremetz - Les salariés !

M. Jean-Charles Taugourdeau - Ce projet, en incitant à la négociation, dit que le progrès social ne trouve pas sa seule source dans la loi. La modernisation sociale, c'est d'abord de libérer le travail, seule manière de construire la France de demain et, incidemment, de garantir le paiement des futures retraites. Admettez-le, s'il a le moral, le chef d'entreprise continuera d'investir, même s'il lui faut pour cela s'endetter.

M. Jacques Desallangre - Pauvres gens !

M. Jean-Charles Taugourdeau - Monsieur le ministre, votre démarche répond à l'aspiration des Français, elle tend à restaurer le dialogue, à tenir compte enfin, des réalités économiques.

Votre projet, en faisant des partenaires sociaux le véritable moteur de la modernisation sociale de notre pays et en associant au mieux négociation collective et procédure législative, permettra de restaurer les relations employeurs-employés qui donnent actuellement une si mauvaise image de la France aux investisseurs. C'est cette image qu'il faut modifier, en redonnant au travail toute sa valeur, car la France du travail, c'est la France du bonheur (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Béatrice Pavy - La loi dite de modernisation sociale n'a pas eu que des effets positifs, tant s'en faut, et son application complète aurait entraîné des difficultés de tous ordres. Le texte que vous nous proposez, Monsieur le ministre, raccourcira donc une période douloureuse pour tous.

A l'heure où chacun s'attache à simplifier la vie administrative de notre pays, il ne serait pas tolérable que la France conserve le triste record des délais de procédure : 200 jours en moyenne, soit plus du double de nos partenaires, et néanmoins concurrents, européens ! (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Deux cents jours de contentieux éventuel et d'antagonismes, deux cents jours que certaines entreprises préfèrent ne pas affronter en déposant d'emblée le bilan... Une fois encore, les décisions imposées « d'en haut », fût-ce avec les meilleures intentions, ne répondent pas aux besoins de nos entrepreneurs, ni même à ceux des salariés, qui vivent cette longue période de procédure dans l'angoisse.

A cette rigidité, le Gouvernement a choisi de répondre par la concertation et le dialogue. Les partenaires sociaux, à qui ces règles sont destinées, sont les mieux placés pour les élaborer dans la limite du respect des droits de chacun, et des plus faibles en particulier.

A l'image des délégations de compétence données aux collectivités territoriales concernées, les partenaires sociaux sont invités à ouvrir la négociation et à définir de nouvelles règles applicables en matière de licenciement économique. En les laissant prendre leurs responsabilités, on contribue du mieux possible à la libération des forces vives et des énergies. C'est la seule manière de faire émerger des réponses inédites aux problèmes rencontrés par les entreprises, dans la gestion des ressources humaines. C'est pourquoi le ministre a choisi de laisser les partenaires sociaux libres d'élargir le champ de la négociation, en particulier à la formation professionnelle et à l'effectivité du reclassement.

Le choix du « tout juridique » opéré par la loi de modernisation sociale ne s'est pas fait seulement au détriment de la négociation interprofessionnelle. En insistant sur les procédures, la loi détournait du dialogue et dissuadait de rechercher un accord collectif, offrant comme seule arme aux représentants du personnel le retardement et le blocage de la procédure.

Le projet répond à cette exigence de négociation et laisse la possibilité aux partenaires sociaux, durant une période d'expérimentation, d'établir des règles fixant la procédure à suivre en cas de licenciement économique. Dans une société qui déplore la judiciarisation de ses rapports sociaux, le choix de la confiance est indispensable, dans la limite où cette liberté est convenablement encadrée. Faute de quoi, en effet, on se condamne à édicter les règles provisoires d'un jeu que plus personne n'acceptera bientôt de jouer (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Dominique Tian - Ce que j'ai entendu me laisse perplexe. En effet, si je comprends la logique du groupe communiste, qui avait imposé la loi de modernisation sociale à son allié socialiste, je comprends beaucoup moins bien la position du groupe socialiste, qui a subi ce texte, contre lequel beaucoup de ses membres se sont élevés, et qui pourrait aujourd'hui choisir la même orientation que celle du parti travailliste britannique, du SPD allemand ou du parti socialiste espagnol. Au lieu de cela, il se replie dans un dogmatisme archaïque et rétrograde en s'alignant sur le groupe communiste !

Nos collègues socialistes le savent bien, pourtant : cette loi était un impératif politique et non économique, et cette nécessité explique à la fois le mépris dans lequel ont été tenus les partenaires sociaux lors de son élaboration, sa confusion et son caractère juridiquement contestable. L'ensemble a eu la conséquence éminemment dommageable de renforcer un certain particularisme français et, par là-même, de réduire l'attractivité de notre territoire.

M. Jacques Desallangre - Mais c'est faux !

M. Dominique Tian - Ce qui était en jeu, nul ne l'ignore, c'était moins le sort des salariés licenciés que la survie du parti communiste confronté à la percée de l'extrême gauche, et la répartition des forces au sein de la gauche plurielle (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Claude Estier a d'ailleurs reconnu avec franchise que le primat avait été donné à la politique, et l'opinion de Laurent Fabius au sujet de la loi a été abondamment citée tout au long des débats ; on sait donc à quoi s'en tenir.

La même semaine, M. Pierret déclarait à la radio que ce projet donnait au juge tout pouvoir sur la vie économique des entreprises. Du côté syndical, Bernard Thibault aurait préféré que le Gouvernement cesse de prendre des décisions sans concertation avec les organisations syndicales ; Marc Blondel accusait également le Gouvernement d'avoir négligé la concertation ; pour la CFDT, Michel Jalmain estimait qu'une définition restrictive du licenciement économique peut favoriser le contournement de la loi, et Nicole Notat que, dans certains cas, les dirigeants d'entreprise ont des décisions à prendre face à la concurrence.

Le Conseil constitutionnel a censuré ce texte, estimant que le législateur portait à la liberté d'entreprise une atteinte manifestement excessive au regard de l'objectif de maintenir l'emploi. Saluant cette décision, Laurent Fabius affirmait encore qu'il n'appartient pas à un juge ou à un préfet de prendre des décisions à la place d'un chef d'entreprise.

Quant à l'attractivité du territoire, Mme Guigou n'a pas la même lecture que nous de l'étude de la DARES d'août 2002, selon laquelle la France se singularise par la faible place laissée à la négociation et par une relative complexité des procédures.

Un licenciement, s'il est un drame pour le salarié comme pour le chef d'entreprise, peut aussi éviter le dépôt de bilan et assurer la survie de l'entreprise. Ainsi, la Société marseillaise de crédit, longtemps gérée par l'Etat, a dû procéder il y a quelques années à un plan social concernant 420 salariés. Aujourd'hui, 24ème banque française, elle annonce la création de 200 emplois. Je n'aurai pas la cruauté de mentionner le plan social de l'Humanité, dont 42 licenciements doivent assurer la survie.

M. Maxime Gremetz - Cela n'a rien à voir !

M. Dominique Tian - Il fallait aller vite. Rompant avec le passé, vous relancez vigoureusement le dialogue social, Monsieur le ministre. Aux syndicats maintenant de prendre leurs responsabilités (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Je remercie d'abord le rapporteur pour son travail et pour la pertinence de ses réponses dans la première partie du débat. Je remercie également les orateurs de la majorité et notamment Mme Bourragué. Elle a eu raison de rappeler que le premier texte voté par cette majorité a permis à des jeunes en difficulté de trouver non un stage ou un CDD mais un vrai emploi avec un vrai salaire. Contrairement aux allégations de M. Gorce, ce programme fonctionne bien. Moins de deux mois après son entrée en vigueur, plus de 22 000 contrats ont été signés, et les PME sont les premières à en profiter (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Nous pouvons en être fiers. Mme Bourragué a aussi montré que la loi de modernisation sociale était trop centrée sur les grandes entreprises. Souvent, leurs plans sociaux retiennent l'attention des médias, mais ce sont ceux qui se passent le mieux. Ainsi, tous les salariés de Marks et Spencer ont-ils retrouvé du travail grâce au plan social. Les salariés de PME ne bénéficient pas du même accompagnement.

M. Goulard a bien dit que nous avons consacré toute notre énergie à innover dans la méthode ; pour ce qui est du titre, je compte sur le Parlement... L'objectif principal du Gouvernement est de rendre corps à la négociation sociale. Ce n'est pas facile, et l'opposition a beau jeu d'ironiser. Mais les partenaires sociaux ont été engourdis pendant cinq ans, installés dans une situation confortable qui ne les conduit pas à prendre des responsabilités - et cela vaut pour les organisations patronales comme pour celles des salariés. Il est difficile de passer de la dénonciation au dialogue, au compromis positif. Mais ce fut le fil rouge de notre politique, sur les contrats jeunes, sur l'assouplissement des 35 heures. Cette fois, allant plus loin, nous demandons aux partenaires sociaux d'élaborer les grandes lignes de l'accord que nous proposerons ensuite de traduire dans la loi. Pour autant, on ne pouvait aller trop vite au mépris de nos traditions ; j'ai donc proposé une démarche progressive.

M. Novelli a reconnu l'importance de ce texte et posé un certain nombre de questions. Pourquoi proposer aux partenaires sociaux de négocier sur ce qu'il y a de plus difficile plutôt que sur la formation professionnelle ? A ma demande, les partenaires sociaux ont accepté de négocier sur la formation professionnelle et un calendrier de rencontres est fixé, afin de mettre en place une assurance-emploi, c'est-à-dire un compte individuel de formation professionnelle pour chaque salarié. C'est bien la négociation prioritaire. Cela n'empêche pas d'engager aussi la discussion sur les conditions de licenciement. Pourquoi n'avons-nous pas choisi de suspendre un plus grand nombre d'articles ? Parce que tout le monde ou presque dénonce les dispositions qui empêchent les entreprises de s'adapter. Ce sont celles-là qu'il était urgent de suspendre. Quant à la loi Thomas, il n'aurait pas été très judicieux de la rétablir à la veille de la grande consultation sur les retraites, même si le Gouvernement n'exclut pas un complément de retraite par capitalisation.

Je remercie de leur soutien M. Tian et Mme Pavy qui, ayant tenu les comptes de beaucoup de petites entreprises, connaît bien les angoisses des fins de mois difficiles et des carnets de commandes vides. M. Vercamer a évoqué la position commune sur les voies et moyens de la négociation collective signée par toutes les organisations sauf la CGT. Je le répète, dès le début de l'année, nous allons examiner avec les organisations syndicales quelles sont les adaptations législatives ou réglementaires nécessaires pour la traduire dans les faits. Le renvoi à la négociation est timide, dit M. Vercamer. Mais que de difficultés pour obtenir des partenaires sociaux qu'ils acceptent de négocier sur tous ces sujets !

Si j'ai choisi la suspension et non pas l'abrogation, ce n'est pas par artifice. Tout le monde sait que le Gouvernement et la majorité ne reviendront pas dans 18 mois pour rétablir en l'état les articles en cause.

Mais abroger supprimerait toute incitation à négocier, il n'existerait aucun moyen de pression sur le patronat pour le pousser à négocier sur les licenciements. Tout le monde parle de dialogue social, mais je ne le vois pas beaucoup se concrétiser.

La suspension n'entraîne aucune incertitude juridique. C'est la loi en vigueur au moment de l'enclenchement du plan social qui s'appliquera, quelle que soit la durée de la suspension.

Pour quelles raisons avons-nous décidé de suspendre certaines dispositions ? A Mme Guigou, je réponds que la LMS non seulement allonge les procédures, mais organise le conflit. Contrairement aux orientations tracées par les directives européennes, la LMS fait peu de place à la négociation. Au contraire elle conduit les partenaires à se préoccuper de la forme au détriment du fond, c'est-à-dire de la situation des salariés. Ainsi la non-concomitance des procédures des livres III et IV amène à discuter d'une restructuration en empêchant les salariés de savoir s'ils seront effectivement concernés et ce qui peut être fait pour eux. Auquel d'entre vous des organisations syndicales n'ont-elles pas dit à quel point l'empilement des délais se retournait contre l'intérêt des salariés ? Curieuse idée aussi que cette procédure de médiation imposée de l'extérieur, selon un formalisme pesant, alors même qu'une des deux parties n'en voudrait pas ! Ce serait ajouter une tension inutile au sein d'une situation déjà difficile.

Enfin, ce droit complexe, ajouté à l'insécurité juridique, nourrit le contentieux. Voilà pourquoi nous vous présentons notre projet. Pourquoi ce délai de 18 mois, auxquels s'ajoutent 12 mois supplémentaires pour le dépôt d'un projet ? 18 mois ne sont pas de trop pour que les partenaires sociaux se mettent à négocier sur une question difficile. 12 mois sont ensuite nécessaires pour concevoir un projet de loi, le soumettre à la concertation et le faire voter. Reste que si les partenaires sociaux nous proposent une solution avant 18 mois, nous n'aurons pas besoin d'un an pour présenter un nouveau texte.

S'agissant de l'expérimentation dans les entreprises, nous espérons, à l'issue du délai de deux ans, pouvoir transposer dans la loi les pratiques expérimentées avec succès. Déjà ces accords de méthode ont des effets positifs et pour les salariés, l'implication paritaire étant un facteur favorable au reclassement, et pour les entreprises, qui peuvent mieux maîtriser le déroulement de la procédure. Les craintes exprimées sur l'expérimentation me paraissent donc vaines.

On m'a objecté, à gauche, qu'il n'y aurait pas de négociation, parce que les partenaires sociaux ne sont pas disposés à débattre ensemble d'un sujet si difficile. Nous touchons au c_ur du problème posé à notre pays. Si les partenaires sociaux ne peuvent pas se saisir des questions difficiles, il n'y aura jamais de vrai dialogue social, ni d'organisations syndicales mieux implantées dans les entreprises ! Nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un taux de syndicalisation de 5 %. Nous avons besoin de renforcer notre syndicalisme, pour aller vers un syndicalisme de responsabilité.

Beaucoup de Français attendent que les organisations syndicales et patronales aient le courage de conclure de vrais compromis, y compris sur des sujets difficiles. Il est d'ailleurs historiquement faux de dire que les partenaires sociaux ne peuvent pas discuter de ces sujets. Ils l'ont fait en 1969, en 1974, et surtout en 1986, avec la suppression de l'autorisation administrative de licenciement, qui avait suscité de vifs débats. A l'époque, les partenaires sociaux ont trouvé un accord, repris par le Gouvernement et le Parlement.

Nous ne nous faisons pas à l'idée que les partenaires sociaux ne seraient aptes à discuter que des sujets faciles. Il est faux, Monsieur Vidalies, que les partenaires sociaux aient fait savoir qu'ils ne négocieraient pas sur les licenciements. M. Vidalies n'a cité que trois syndicats sur les cinq. C'est que les deux autres ont fait savoir qu'ils étaient prêts à discuter.

L'opposition a insisté sur le risque d'un retour à la législation antérieure, qu'elle a décrite comme socialement terrible. Or, c'est cette législation qui s'est appliquée de 1988 à 2002, et vous vous en êtes alors satisfait. Ce ne serait donc pas le retour au néant. L'attractivité de notre territoire fait l'objet d'une polémique entre la gauche et la droite. Je ne prends pas parti entre le rapport du Forum de Davos et celui de l'OCDE sur les investissements étrangers en France. Je constate aujourd'hui une forte augmentation des délocalisations industrielles, au point de conduire à un véritable risque de désindustrialisation. Un éminent parlementaire socialiste, M. Charzat, a montré dans son rapport à quel point existe un danger lié à la perception qu'ont les étrangers de notre territoire (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). M. Mer en a parlé ici. A la limite, peu importe la réalité. Nous devons corriger cette perception. La LMF est connue dans le monde entier. On en parle dans les journaux américains, canadiens, britanniques. Vous n'avez jamais vu dans la presse française un article sur telle ou telle loi américaine, canadienne ou britannique qui rendrait difficile l'implantation des entreprises françaises ! Les cent premières entreprises françaises, en 2000, n'ont consacré que 15 % de leurs investissements au territoire français, et 85 % à l'extérieur.

M. Maxime Gremetz - Le fric, toujours le fric !

M. le Ministre - Affirmer qu'aucun risque ne pèse sur l'activité ni sur l'emploi en France du fait de la perte d'attractivité de notre territoire est une responsabilité que je ne prendrai pas. En refusant de regarder la réalité en face, vous contribuez à anesthésier l'opinion publique française sur un problème qui peut avoir de redoutables conséquences.

Enfin, je suis choqué par la manière dont on traite ici une partie de ceux qui font fonctionner notre économie. Pour moi, il n'y a pas d'un côté des chefs d'entreprise, de l'autre des salariés. Tous les partenaires sociaux sont dignes du même respect (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Quand on entend certains prononcer le mot de MEDEF ou de chef d'entreprise comme s'il s'agissait d'une grossièreté... (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste) Tant que vous aurez ce comportement, vous ne pourrez pas entraîner notre pays sur la voie du développement et du progrès social (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. le Président - Je vais lever la séance...

M. Maxime Gremetz - Rappel au Règlement ! Peut-être voulez-vous conclure tôt (Exclamations), mais à cette allure, compte tenu de l'importance du débat et du nombre d'amendements, nous n'aurons pas fini avant vendredi après-midi. Si vous êtes fatigué, on pourrait sans doute trouver un autre vice-président pour vous remplacer !

M. le Président - L'article 50 de notre Règlement fixe une heure limite aux séances de nuit, et il est bon, pour préserver la qualité des débats, de ne pas dépasser 1 heure du matin. Or, vous avez droit à une heure et demie pour défendre votre motion de renvoi et je ne doute pas, vous connaissant, que vous utilisiez pleinement cette possibilité. Cela porterait alors la levée de séance bien au-delà d'une heure. Il est donc plus sage de poursuivre demain matin.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu jeudi 5 décembre, à 9 heures.

La séance est levée à 0 heure 15.

                Le Directeur du service
                des comptes rendus analytiques,

                François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 5 DÉCEMBRE 2002

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 375) relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi.

M. Dominique DORD, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Rapport n° 386)

2. Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2002 (n° 382).

M. Gilles CARREZ, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 444)

M. Axel PONIATOWSKI, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense et des forces armées. (Avis n° 448)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A VINGT-ET-UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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