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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 79ème jour de séance, 192ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 10 AVRIL 2003

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

Sommaire

      DÉBAT SUR LA PARTICIPATION À L'AIDE
      AU DÉVELOPPEMENT EN AFRIQUE 2

La séance est ouverte à neuf heures.

DÉBAT SUR LA PARTICIPATION À L'AIDE
AU DÉVELOPPEMENT EN AFRIQUE

L'ordre du jour appelle le débat sur la participation à l'aide au développement en Afrique.

M. le Président - L'organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe UMP, la Conférence des présidents a décidé de donner en premier la parole à un orateur de ce groupe.

M. Jacques Godfrain - Que retiendra-t-on de l'année 2003 dans les livres d'histoire de la prochaine génération ? Que le gouvernement américain a choisi les armes pour désarmer, ou que d'autres pays, à la tête desquels la France, ont choisi de considérer les rapports Nord-Sud comme fondamentaux par rapport à une éthique, à une conception de l'homme et de la justice ?

Ce débat est une réponse solennelle à ceux qui préféraient, voilà trente ans, le repliement sur soi et à ceux qui n'imaginent l'avenir des rapports Nord-Sud qu'en termes d'échanges commerciaux ou financiers.

Ce débat doit permettre l'ouverture d'un autre monde, où les plus riches ne le deviendraient pas obligatoirement davantage et où les plus pauvres cesseraient de toujours s'enfoncer.

Ce débat, Monsieur le ministre, Monsieur le président du groupe UMP, je vous remercie de l'avoir mis à l'ordre du jour de notre assemblée ; je remercie le Gouvernement, et en particulier M. Wiltzer, de l'avoir accepté.

Il est sous-tendu par l'action que mène la France, à quelques semaines du G8, pour que des voix fortes et autorisées rappellent à l'Europe et au reste du monde qu'il n'y a pas de plus belle finalité à l'exercice du pouvoir que l'établissement d'un minimum de justice à l'échelle planétaire.

Nous devons concevoir une grande négociation internationale qui permette de répondre aux aspirations des pays les plus pauvres en leur accordant de généreuses concessions commerciales.

La question de l'alimentation, de la lutte contre la faim et donc la pauvreté, doit être au c_ur de notre débat. Les grands pays exportateurs doivent tout mettre sur la table : les différentes formes de subventions utilisées, le détournement de l'aide alimentaire, les crédits à l'exportation.

L'Europe doit faire preuve d'imagination sur la question du développement, que l'OMC ne prend pas en compte de façon satisfaisante.

L'objectif est le développement durable, auquel l'Europe contribue en offrant des débouchés aux exportations agricoles.

Il faut aider ces pays à mettre en place des marchés communs régionaux ; nous devons appliquer des préférences tarifaires, établir des différenciations selon le niveau de développement, soutenir les nécessaires réformes institutionnelles - notamment liées au domaine foncier -, développer l'application des progrès techniques, notamment dans le domaine de la génétique végétale ou animale.

Souhaitons que ce débat permette de régler son compte à une propagande anti-européenne venue de l'extérieur et à une propagande anti-PAC venue de l'intérieur selon laquelle les maux des pays en voie de développement proviendraient d'un prétendu égoïsme de l'Union européenne.

La lutte contre la pauvreté se fera non en multipliant les colloques, mais grâce à des hommes et à des femmes entreprenants et novateurs. Entreprenants, ils le sont, ceux qui apportent leur force et leur talent à la création de richesses dans notre propre pays. Notre coopération pourrait leur proposer un pacte de développement local au c_ur de leur village ou de leur famille. Encourageons-les à investir une partie de leurs revenus où ils le souhaitent. Que notre coopération, leur propre pays, des appuis décentralisés abondent l'épargne issue de leur travail. On peut imaginer que des associations de jeunes volontaires, prêts à donner beaucoup pour le développement, puissent également s'investir. Un partenariat d'entreprises pourrait voir le jour de part et d'autre de la Méditerranée.

Monsieur le ministre, avec la rigueur et le sérieux que vous apportez à votre tâche, je pense que ce projet doit donner lieu, sous l'égide de votre ministère, à la création d'une cellule de réflexion. Différents types d'expérimentations pourraient être choisis qui se développeraient ensuite dans des régions d'Afrique particulièrement touchées par l'émigration.

Il nous appartient à tous de faire de ce débat le message de la France dans le monde (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie - Je remercie l'Assemblée nationale et le groupe UMP en particulier de m'avoir donné l'occasion de vous exposer les grands axes de notre politique de coopération et de développement.

A partir des grandes orientations fixées par le Président de la République, le Gouvernement s'est engagé à faire progresser notre aide jusqu'à 0,5 % du PIB en cinq ans, à renforcer son caractère bilatéral, à accorder une priorité particulière à nos partenaires africains.

En Afrique sub-saharienne, plus de la moitié des enfants ne vont pas à l'école et l'enseignement supérieur connaît de graves difficultés. L'éducation est pourtant un élément crucial pour le développement économique et démocratique. L'éducation des filles, encore plus en retard que celle des garçons, est fondamentale pour la participation des femmes au développement, sous toutes ses formes.

Un des quatre grands secteurs auxquels la France a décidé de consacrer prioritairement son aide au développement est l'éducation.

La France mobilise en sa faveur 24 % du total de son aide publique au développement, soit le ratio le plus élevé des pays du G8.

Sur le plan bilatéral, l'éducation a été choisie comme l'une des quatre priorités des « contrats de désendettement-développement », les C2D.

Sur le plan multilatéral, la France soutient activement la démarche entreprise par la Banque mondiale, le G8 et l'UNESCO dans le cadre de l'initiative « Éducation pour tous-procédure accélérée » ou « voie rapide » - pour employer, comme mes fonctions l'exigent, les termes français.

Le but de ce programme est d'éviter qu'un pays qui se dote des politiques nationales adéquates soit empêché par la contrainte financière, d'atteindre l'objectif fixé par le Sommet du millénaire, c'est-à-dire la scolarisation de l'ensemble des enfants en 2015. Ce programme, ambitieux, est à la portée des bailleurs de fonds puisqu'une aide supplémentaire de 3 à 3,5 milliards de dollars par an y suffirait. Sept pays qui se sont dotés de politiques éducatives crédibles ont été sélectionnés à ce titre, dont quatre de nos partenaires traditionnels, le Burkina Faso, la Mauritanie, la Guinée et le Niger.

Deuxième grande priorité de notre aide : la sécurité alimentaire, qui passe par le développement rural.

L'agriculture représente en Afrique subsaharienne 30 à 40 % du PIB, 40 à 50 % des exportations et 70 % des emplois.

Elle joue donc un rôle économique de premier plan, qu'il s'agisse de gagner des devises à l'exportation ou de nourrir une population en forte croissance. Les famines en Afrique australe et dans la Corne de l'Afrique montrent les conséquences dramatiques des difficultés de ce secteur. La France fournit une aide alimentaire de 35 millions d'euros. Pour les cas d'urgence, le Fonds d'urgence humanitaire est mis à contribution : il dispose de 10 millions d'euros. A ces sommes s'ajoutent nos contributions aux actions multilatérales : celles de l'Union européenne pour l'aide alimentaire ou pour les actions d'urgence humanitaire - environ 75 millions d'euros dans chaque cas.

Mais au-delà de ces contributions à court terme, il convient de traiter durablement les problèmes de fond de l'agriculture africaine, d'autant que le développement rural se trouve au c_ur des problématiques du développement en Afrique.

L'approche de cette question est d'abord mondiale : les agricultures africaines sont, comme celles de tous les pays, dépendantes des marchés internationaux et des cours des produits alimentaires. Il faut donc veiller à ce que les politiques agricoles des pays développés ne déstabilisent pas les agricultures fragiles des pays du Sud. C'est le sens de l'initiative présentée par le Président de la République lors du récent sommet Afrique-France de Paris qu'a évoquée Jacques Godfrain. Il s'agit de proposer un moratoire sur les aides à nos exportations agricoles déstabilisantes pour l'Afrique, pendant la durée des négociations en cours à l'Organisation mondiale du commerce ; de défendre à l'OMC un traitement commercial privilégié pour l'Afrique ; enfin, de nous attaquer au vieux problème des prix des matières premières et des produits de base.

Le coton, par exemple qui fait vivre 15 millions de personnes en Afrique de l'ouest et en Afrique centrale, est déstabilisé par les 4 milliards de dollars de subventions accordées tous les ans par le gouvernement américain à ses propres producteurs.

La France cherche à mobiliser ses partenaires européens, dans le cadre du G8 en faveur de cette initiative, à laquelle le gouvernement allemand a déjà apporté son soutien.

Sur le plan bilatéral, la politique française de coopération a pour objectif d'assurer la sécurité alimentaire, d'améliorer la compétitivité et la productivité des productions agricoles et d'augmenter le revenu des agriculteurs.

Un premier aspect de cette politique, transversal, consiste à prendre en considération le monde rural africain dans toutes les politiques mises en _uvre - utilisation des ressources en eau, formation professionnelle, santé publique...

Il faut aussi améliorer l'organisation du monde agricole : redéfinir le rôle des structures publiques et les politiques agricoles, investir dans la formation et la recherche, assurer le financement des filières par des circuits bancaires adaptés. Cette action est complexe, car elle doit assurer la cohérence des opérations de très nombreux acteurs, depuis les petits producteurs jusqu'à l'Etat, en passant par les bailleurs de fonds internationaux.

La période actuelle est propice à des initiatives. En effet, la prise de conscience de l'urgence est réelle et si ce domaine a fait l'objet dans le passé de divergences profondes entre les principaux bailleurs de fonds, notamment entre la France et les institutions financières internationales, qui ont longtemps privilégié de façon assez dogmatique une libéralisation complète et rapide des filières, elles commencent à entrevoir les limites d'une telle approche. Si la trop grande part laissée aux organismes publics et aux sociétés d'Etat présentait de sérieux inconvénients, on peut désormais concevoir une organisation des filières agricoles plus adaptée aux réalités socio-économiques des pays producteurs et plus efficace.

Un autre axe à ne pas négliger est celui des infrastructures. J'y reviendrai. On ne peut en effet assurer le développement des zones rurales sans pistes pour évacuer les productions ou sans petits barrages pour l'irrigation.

Troisième axe majeur de notre politique de développement : la santé.

La santé est évidemment un bien essentiel pour tout individu. Mais certaines maladies atteignent en Afrique une telle ampleur qu'elles représentent un risque pour les sociétés dans leur ensemble. Le paludisme demeure un facteur de mortalité important, un obstacle au développement de nombreux pays. Plus encore, le sida est en train de déstabiliser les structures sociales, économiques et humaines de pays entiers. Tenter de les développer sans s'attaquer à ces maladies n'aurait aucun sens. Or, beaucoup de retard a été pris dans ce domaine. Les financements nécessaires, extrêmement importants, ne peuvent être réunis que par une forte mobilisation internationale. A cet égard, le G8 a joué un rôle essentiel en lançant récemment le fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose, qui a déjà reçu 3,2 milliards de dollars de promesses de contributions et engagé 1,5 milliard de dollars sur deux ans, en faveur de 150 projets dans 85 pays. Ce fonds doit être stabilisé et pérennisé. C'est pourquoi la France va réunir à Paris une conférence sur ce sujet le 16 juillet, en même temps que la conférence mondiale de la recherche sur le sida.

La France mobilise également ses partenaires du G8 et les institutions internationales contre une autre forme d'injustice : les maladies auxquelles personne ne s'intéresse, parce que leurs victimes ne constituent pas un marché suffisamment rentable pour que des investissements dans la recherche leur soient consacrés. La dengue, la cécité des rivières, la maladie du sommeil, et même la malaria et la tuberculose, qui font l'objet de financements pour améliorer l'accès aux médicaments existants, donnent lieu à une très faible recherche. Il faut donc inscrire dans les objectifs du G8 une relance de la recherche sur les maladies négligées, qui touchent principalement les pays en développement, et notamment l'Afrique.

Quatrième secteur prioritaire : l'eau et l'assainissement.

L'accès à l'eau constitue un droit universel au même titre que les autres droits fondamentaux. Il s'agit d'un enjeu majeur pour le développement. Les maladies dues à la consommation d'eau impure, les dangers de la désertification des zones rurales que provoque l'absence de système d'adduction d'eau, le temps perdu pour l'approvisionnement en eau, sont autant d'obstacles au développement. C'est pourquoi l'un des objectifs du Millénaire est de réduire de moitié en quinze ans le nombre de personnes n'ayant pas accès à l'eau et à l'assainissement. C'est aussi la raison pour laquelle la France, qui préside le G8 cette année, a décidé de faire de l'eau l'une des priorités du Sommet d'Evian.

Le forum mondial sur l'eau, qui s'est tenu récemment à Kyoto et où j'ai représenté notre pays, a permis une nouvelle mobilisation des gouvernements, mais aussi des ONG, des experts, du secteur privé. M. Camdessus a présenté, pour la France, un rapport d'experts sur le financement des mesures nécessaires pour atteindre l'objectif. Nous veillerons à ce que des suites concrètes lui soient données, notamment en ce qui concerne l'établissement de véritables politiques nationales de l'eau, avec de nouveaux modes de financement.

Sur le plan national, la France soutient la création de cadres institutionnels pour la gestion des ressources, en particulier celle des bassins transfrontaliers des grands fleuves africains comme le Sénégal, le Niger et le Nil. Elle encourage la création de mécanismes financiers pour les investissements : seize projets du Fonds de solidarité prioritaire y sont consacrés, pour un montant de 12,7 millions d'euros.

Mais je voudrais évoquer maintenant les nouvelles modalités de l'aide française.

L'une des plus prometteuses, c'est le contrat de désendettement-développement. La ponction que représente le remboursement de la dette est une sérieuse entrave au développement de nombreux pays. La France, au G8 comme au Club de Paris, a toujours été en pointe sur ce sujet. Elle a décidé de compléter, au niveau bilatéral, le nouveau mode de traitement de la dette des pays pauvres mis en place par les institutions financières internationales : des annulations de dettes supplémentaires ont été décidées dans le cadre du mécanisme novateur qu'est le contrat de désendettement-développement.

Le principe en est simple : les sommes remboursées sont reversées par la France dans un compte géré par les deux parties, selon un contrat qui fixe modalités et secteurs d'emploi. Les sommes concernées sont importantes : elles devraient atteindre 300 à 350 millions d'euros par an dès 2004. C'est donc une manière productive et partenariale de gérer la dette accumulée par nos partenaires.

Ces contrats présentent plusieurs aspects intéressants. Les ressources concernées seront disponibles chaque année, pendant toute la durée du remboursement, ce qui permet de planifier l'action. Ils s'inscrivent dans des politiques établies par les bénéficiaires eux-mêmes : la mise au point des « documents stratégiques pour la réduction de la pauvreté » approuvés par les institutions financières internationales est en effet une des conditions de la conclusion de ces contrats, qui sont négociés avec les bénéficiaires.

Ils associent les populations concernées, les ONG présentes dans le pays et d'autres partenaires comme les collectivités territoriales et les investisseurs privés.

Ces contrats rompent avec la tradition d'une aide à des projets précis, privilégiant une approche globale et à long terme de tel ou tel secteur. Nous pouvons aider les pays bénéficiaires à établir cette politique sectorielle et à en mesurer les résultats par des indicateurs.

Autre novation, les partenariats avec les autres acteurs français. La coopération décentralisée se développe et les nouvelles lois de décentralisation vont renforcer le mouvement. Les collectivités territoriales y consacrent environ 115 millions d'euros par an et l'Etat accompagne cette démarche à raison de 10 millions d'euros.

Les collectivités locales africaines souhaitent un appui de leurs homologues français, tant pour la gestion administrative que pour la maîtrise d'ouvrage, dans des domaines comme l'état civil, l'adduction d'eau, les équipements scolaires. Dans cet esprit, j'ai lancé une consultation des associations nationales d'élus locaux, présidée par le Premier ministre. Les conclusions en ont été très positives et nous allons les mettre en application.

Autre partenaire, la société civile : il faut renforcer la coopération avec les organisations de solidarité internationale. Pour favoriser l'engagement de nos concitoyens, nous préparons un projet de loi sur le volontariat. C'est un sujet important car la fin de la conscription a tari une source importante de recrutement de jeunes coopérants. Le volontariat répond à une demande de notre jeunesse comme à celle des pays bénéficiaires.

C'est dans cet esprit de mobilisation de tous les acteurs et de cohérence de notre coopération que les ministères des affaires étrangères et de la santé ont créé une plate-forme regroupant tous les acteurs impliqués dans la lutte contre le sida dans les pays en développement - entreprises privées, experts des grandes agences et des instituts de recherche, associations, industrie pharmaceutique, etc. La première réunion a eu lieu le 26 mars dernier.

L'intervention du secteur privé, français et local, est également nécessaire. Les aides publiques ne peuvent, à elles seules, assurer le décollage économique : on évalue à 250 milliards de dollars par an les besoins de financement des pays en développement pour le seul secteur des infrastructures ! De nombreux investissements ne pourront donc être réalisés qu'en partenariat avec le secteur privé. Je citerai comme exemples le programme d'aménagement et de préservation des forêts du bassin du fleuve Congo, où l'Etat et les sociétés privées se sont associés pour financer la recherche, la formation professionnelle, l'aménagement des concessions, ou encore l'électrification de certaines zones rurales réalisée avec notre assistance technique.

Ces investissements privés ont besoin d'un cadre juridique sûr et adapté. Nous y contribuons par des actions de formation des administrations locales et par notre soutien à des organisations régionales telles que l'OHADA, l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires.

Autre moyen nouveau, le co-développement. Selon la Banque mondiale, le transfert de revenus des travailleurs migrants vers leurs pays d'origine est devenu une des principales sources de financement du développement. En Afrique, cependant, la proportion de sommes réinvesties dans le secteur productif reste faible. Partant de ce constat, la France a défini, depuis 1996, une politique novatrice visant à aider les migrants établis en France à contribuer au développement de leur pays. C'est le concept du co-développement, qui vise à agir à long terme sur les flux migratoires en faisant progressivement disparaître certaines causes économiques de l'immigration. Ce mécanisme ne doit pas être confondu avec les incitations directes au retour sous forme de pécule.

Une première expérience de ce type est en cours au Mali. En concertation avec l'Office des migrations internationales, l'Agence française de développement, des organisations non gouvernementales réunies au sein du FORIM, des collectivités territoriales et des banques, nous avons décidé de mettre au point des instruments financiers nouveaux pour aider les migrants à créer chez eux des activités économiques. L'idée d'un livret d'épargne développement proposée par M. Godfrain mérite d'être approfondie et expérimentée ; il est souhaitable, comme il l'a suggéré, de créer un groupe de travail sur ce sujet. Nous allons également encourager des migrants hautement qualifiés, actuellement en fonction dans nos universités, nos hôpitaux, nos entreprises, à effectuer des séjours dans leur pays pour y dispenser des enseignements.

En fonction des résultats, l'expérience faite au Mali sera étendue à d'autres pays intéressés comme le Sénégal, le Maroc ou les Comores. Compte tenu des financements qui seront en jeu à terme, nous allons associer à ce programme d'autres partenaires, notamment la Commission européenne et des collectivités territoriales.

J'en arrive enfin au financement des infrastructures, qui a souvent été critiqué dans le passé, les « éléphants blancs » ayant été à l'origine de gaspillages ou de détournements de fonds importants. Un recentrage vers les dépenses à caractère socio-économique s'en est suivi, mais la lutte contre la pauvreté passe aussi par la croissance économique, laquelle suppose un développement des infrastructures : comment la République Centrafricaine peut-elle assurer son développement quand l'envoi d'un conteneur coûte deux fois plus cher de Douala à Bangui que de Douala au Havre ? Le financement des infrastructures a été le sujet d'une conférence réunissant les agences de développement des pays du G8, conférence organisée il y a quelques jours à Paris par l'Agence française du développement dans la perspective du NEPAD.

Ce nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique est l'initiative la plus importante prise pour le développement de ce continent depuis longtemps. A travers elle, l'Afrique prend en mains son développement de façon globale, en ne négligeant aucun aspect, de la prévention des crises jusqu'à l'évaluation par les pairs des politiques menées. De nombreux débats ont déjà eu lieu entre les partenaires africains pour mieux définir les mécanismes, mais les nombreuses questions qui se posent ne pourront bien sûr être résolues que progressivement. L'expérience acquise par l'OCDE peut être utile ; nous encourageons donc vivement les concertations entre cette organisation et les promoteurs du NEPAD.

La France a décidé de faire du soutien au NEPAD l'un des points forts du sommet du G8 à Evian. Notre aide s'adaptera à cette nouvelle perspective.

Tels sont les principes qui guident notre politique d'aide au développement et ses principaux instruments. Je suis prêt à vous apporter des informations complémentaires en réponse à vos interventions (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Maxime Gremetz - Ce débat est opportun car l'Afrique est le révélateur de toutes les questions posées par la mondialisation capitaliste. Les conséquences des mesures prises par la Banque mondiale, le FMI et les multinationales sont terribles pour les peuples africains.

Mais on ne saurait se contenter de beaux discours teintés de moralisme et marqués de relents néocolonialistes, qui seraient fort malvenus au moment où le procès ELF met en lumière le système de corruption qui lie certains partis politiques français à l'Afrique. Pour notre part, nous voulons exprimer notre conception de l'aide au développement de l'Afrique et nous souhaitons que nos paroles soient suivies d'effets.

L'Afrique fait, hélas, la tragique expérience de ce que coûtent aux hommes et aux peuples la recherche effrénée du profit et le pillage des ressources. Nos amis africains que nous rencontrons à Bamako, à Dakar, à Durban, à Paris, à Porto Allegre, dénoncent le fait que 300 millions d'Africains vivent avec moins d'un dollar par jour, que 235 millions souffrent de carence alimentaire et 170 millions de malnutrition, que le sida touche dans certaines régions entre un tiers et un quart de la population.

L'aide au développement telle que nous la concevons se fonde sur des valeurs humaines de solidarité, en totale rupture avec les visées néo-coloniales et la globalisation libérale. Elle passe par l'établissement de rapports de force favorables à la réduction des inégalités, aux coopérations, au désarmement et à la paix. Nous croyons que la France peut jouer un rôle propre, en préservant ses capacités d'initiative et en s'appuyant sur ses valeurs.

Je salue les mouvements de contestation de la mondialisation libérale qui se sont manifestés à Seattle, à Porto Allegre, dans les manifestations syndicales. En Afrique comme en Europe, la loi des multinationales mène à la loi de la jungle. C'est le règne du profit, devant lequel les gens ne comptent plus. Faut-il rappeler l'ambiguïté de l'action des multinationales françaises installées en Afrique, évoquer à nouveau les pratiques d'ELF Gabon, qui n'ont fait que vicier un peu plus les rapports entre la France et l'Afrique ?

Il y a aussi le défi de la sécurité internationale et de la paix, celui de l'éducation, celui de la santé, celui de l'accès à l'énergie.

L'absence d'électricité dans la brousse conduit à l'exode rural et à la désertification. Sans elle, puiser de l'eau est difficile, stocker des médicaments impossible, les dispensaires fonctionnent mal et l'artisanat ne peut se développer. Mais à cela, le FMI ne connaît toujours qu'une réponse : les plans d'ajustement structurel ! Il faut les faire cesser, et avec eux les privations imposées par les institutions internationales (M. Jean Dionis du Séjour proteste). La priorité est l'annulation de la dette et une augmentation substantielle de l'aide publique. Cela ne suffira pas, mais c'est un préalable. Mais les blocages actuels ne sont pas une question d'argent : tout le monde sait que la dette ne sera jamais payée. La maintenir permet simplement de conserver une hégémonie politique : puisque vous nous devez quelque chose, vous n'êtes pas libres de vos décisions... Et le prix de la liberté est élevé...

Certaines choses dépendent des grandes puissances et des institutions qui les dominent. D'autres dépendent des gouvernements et des partis politiques africains eux-mêmes. Mais on peut attendre de la France et de l'Europe qu'elles fassent ce qui est en leur pouvoir, notamment en matière de financement et de réforme des institutions monétaires internationales. Le dollar, lui, aussi est un instrument de domination, ô combien hégémonique... Or les résistances face à l'hégémonie sont nombreuses. On peut donc regretter que l'Europe s'inscrive dans le mouvement dominant plus qu'elle n'y résiste, comme on l'a encore vu lors de la réunion de l'OMC à Doha.

L'Afrique n'est pas morte pour autant. Elle reste source de vitalité. Elle est riche en énergie primaire et en matières premières, mais leur répartition est très inégale. La mise en commun de ces richesses suppose des coopérations, tant au sein même de l'Afrique qu'avec le reste du monde. Elles doivent être valorisées sur place, pour contribuer à des usages industriels ou domestiques, l'excédent pouvant être exporté.

On ne peut que se féliciter de la recherche de voies originales pour sortir l'Afrique du sous-développement dans lequel on l'a enfermée. Un signe, porteur de grandes perspectives, est l'influence de la culture africaine, sa modernité. Le développement des échanges, dans les deux sens, est facteur de dignité et de fierté. L'Afrique s'affirme comme acteur de la civilisation mondiale. Cela ne rend que plus intolérables les blocages provoqués, bien plus que par l'histoire, par des politiques ultra-libérales, le pillage des ressources et les ingérences de toute sorte dans le gouvernement des Etats. On comprend enfin aujourd'hui que l'aggravation des inégalités, la malnutrition et la maladie ne sont pas une fatalité, mais le résultat de décisions prises parfois bien loin de l'Afrique. Le problème n'est donc pas d'être contre la mondialisation, mais de contester les logiques du capitalisme mondialisé. Cette prise de conscience est en train de franchir les frontières, au point de mettre sur la défensive les tenants de l'orthodoxie libérale. Il leur faudra bien répondre aux questions ! Quel est le bilan de l'ajustement structurel, des coupes dans les dépenses d'éducation et de santé, des privatisations et de la libre circulation absolue des capitaux ? Quelles leçons tirer des difficultés des pays africains ? L'effondrement de l'Argentine n'est-il pas un exemple suffisamment éloquent des résultats des thérapies de choc du FMI ?

La France a une responsabilité historique envers l'Afrique. Cette constatation n'a aucun but moralisateur : elle appelle au contraire la France à l'action. Il faut en premier lieu se battre pour l'annulation totale et immédiate de la dette. Il faut cesser de tergiverser et de multiplier les déclarations sans lendemain. Il n'y aura aucun rattrapage possible si l'on ne sort du cercle vicieux de l'endettement. Quant à l'aide publique, la logique libérale lui préfère les investissements privés. Ce n'est pas sans une certaine gravité, Monsieur le ministre, que je dois regretter ici la réduction constante de l'aide publique française au développement.

Mme Henriette Martinez et M. Richard Cazenave - C'est vous qui l'avez réduite et nous l'avons rétablie !

M. Maxime Gremetz - Arrêtons la politique politicienne ! Mon discours est le même que sous la précédente législature !

M. Jean Dionis du Séjour - Le bilan de la politique africaine socialiste est une catastrophe !

M. Maxime Gremetz - Parallèlement à son augmentation, il faut réformer le système de financement de l'aide. Quel terme mal choisi, d'ailleurs ! Il est lourd d'ambiguïtés et chargé de connotations, qui vont de l'assistance à la pression néo-coloniale. Comment pouvons-nous continuer à parler d'aide alors que nous avons pillé les richesses de ces pays, et continuons à le faire ! Ce qu'il faut, c'est concevoir une véritable dynamique de coopération, dans la parfaite transparence de l'utilisation des fonds publics. Il y a beaucoup à faire en la matière. Songez qu'au nom de la France, des multinationales commettent des actes parfaitement répréhensibles en Afrique ! Songez que des fonds publics français servent à des opérations qui ne servent ni les intérêts de la France, ni ceux de l'Afrique ! Des milliards s'envolent - je ne citerai aucun nom...

Certes, la conférence de Durban sur le racisme a rappelé qu'une réparation des dégâts causés par l'esclavage et la colonisation, mais aussi par le néo-colonialisme, était nécessaire. Mais plus que cela, nous avons une responsabilité dans le décollage des pays africains. Il ne s'agit de rien moins que de mettre fin aux déséquilibres du monde, en permettant à tous les peuples de conquérir leurs propres capacités de développement. Ceux qui pensent que les pays riches peuvent continuer à se développer en fermant les yeux sur cet océan de misère et de pauvreté se trompent. La notion de co-développement n'est pas entièrement généreuse, elle est nécessaire à la communauté internationale.

Monsieur le Président, vous comprendrez que la passion qui m'anime me fasse dépasser mon temps de parole...

M. le Président - Elle est louable, mais les règles doivent être respectées. Toutefois, le débat est suffisamment important pour que je vous laisse conclure...

M. Maxime Gremetz - Je ne déroge aux Règlement que pour répondre au souhait de l'UMP, qui a voulu ce débat...(Sourires).

Certains proposent la création d'un fonds de réparation, sous l'égide de l'ONU, financé par la taxe Tobin sur les mouvements de capitaux. L'idée mérite d'être approfondie. On pourrait y ajouter un grand plan d'investissement en euros, une sorte de plan Marshall européen pour le développement du Sud, avec des crédits à taux d'autant plus bas qu'ils seraient utilisés pour l'emploi, la formation ou les infrastructures. Je propose également la mise en place d'un vaste plan de lutte contre le sida et les maladies tropicales. Les institutions financières et commerciales internationales doivent être réformées en profondeur pour devenir des instruments du développement - pas ceux qui imposent le talon de fer des dogmes libéraux. Il faut réintégrer le FMI et l'OMC dans les Nations unies et en démocratiser le fonctionnement. L'OMC, par ailleurs, devrait instaurer des mesures de discrimination positive en faveur des pays en développement. Comment justifier qu'on leur impose, au nom de l'égalité de la justice, les mêmes règles et les mêmes devoirs que les pays riches ? Avec un tel système, on ne rattrapera jamais les déséquilibres !

M. le Président - Monsieur Gremetz, je vous prie de conclure.

M. Maxime Gremetz - La décision du Gouvernement de demander la levée de droits de tirage spéciaux exceptionnels à la prochaine conférence de Monterrey va dans le bon sens. Mais il faudra aller plus loin. La France devrait s'attacher à la mise en place d'un système de stabilisation des prix des matières premières sous l'égide de l'ONU. Comment mettre en _uvre une stratégie de développement alors qu'on est à la merci de cours décidés très loin, en fonction de la seule loi de l'offre et de la demande ? Une réforme en profondeur de la politique de coopération de la France est enfin indispensable, avec une politique audacieuse élaborée dans la plus grande transparence. Je vous remercie de m'avoir laissé conclure.

M. Jean Dionis du Séjour - Le groupe de l'UDF se félicite de ce débat, car nous sommes convaincus que le destin de l'Afrique est en bonne partie lié à l'action de la France. C'est le seul continent, hors l'Europe, où nous avons une telle responsabilité.

Nos liens avec l'Afrique occidentale sont anciens et, que cela nous plaise ou non, nous avons avec elle un destin commun. L'avenir du français comme langue internationale se joue en Afrique, celui de nos équilibres migratoires également. Si l'Afrique s'enfonce, la France est la première en Europe à souffrir avec elle.

Or l'Afrique va mal, et même elle régresse. Depuis 1980, le PIB par habitant y décline de 1 % chaque année et 32 pays africains sont aujourd'hui plus pauvres qu'il ne l'étaient à l'époque. L'Afrique n'assure que 1,7 % du commerce mondial et reçoit moins de 1 % des investissements privés.

L'aide au développement constitue une priorité nationale. Or malgré une grande générosité collective et individuelle, nous sommes en situation d'échec. La réussite de cette aide est un enjeu à la fois moral et politique. Renforcer notre solidarité avec ces pays amis minés par le sous-développement, cela aussi fait partie des valeurs républicaines.

Il nous faut oser une pratique nouvelle de la coopération, et à ce titre la loi sur le volontariat ou le livret d'épargne de coopération sont des idées intéressantes. Modestement, l'UDF souhaite apporter aux débat quelques idées, sur la politique africaine d'ailleurs plus que sur l'aide au développement. D'abord, il faut remettre en cause le modèle d'administration que nous promouvons : notre concept d'Etat-nation a conduit à une impasse majeure en Afrique. Ensuite, il faut concentrer notre action en Afrique occidentale et passer le relais à l'Union européenne pour le pourtour méditerranéen. Enfin, l'évaluation des dispositifs en place est une ardente obligation.

La reprise du développement en Afrique dépendra moins du montant de l'aide occidentale que d'une nécessaire révolution des esprits.

D'abord, nous devons prendre conscience du poids des réalités ethniques qui rendent impossible en Afrique la vie d'Etats-nations sur le modèle occidental. Entre individu et nation, la société africaine fait une grande place à la famille élargie et à l'ethnie. Or nous ne voyons de cette réalité que les aspects négatifs, rivalités ethniques, frein à la responsabilité personnelle. Nous en méprisons les côtés positifs comme la solidarité de proximité et l'enracinement culturel.

De ce fait, nous avons imposé aux Africains nos concepts, les frontières à angle droit et nos constitutions parlementaires. En Afrique, l'Etat-nation est le gros lot dans la compétition interethnique. L'ethnie qui gagne s'empare de tout, postes de fonctionnaires, sociétés nationalisées, avantages en tous genres, la frustration des perdants alimentant le cycle sans fin de la revanche. En Côte d'Ivoire par exemple, pays que je connais bien, les accords de Marcoussis restent dans cette logique d'Etat-nation. Osons promouvoir un système fédéral qui permette à chaque grande ethnie de gérer dans sa région les problèmes de proximité et d'aménagement, laissant à l'Etat-nation les compétences régaliennes et quelques domaines clés comme l'éducation nationale. La crise ivoirienne ne serait pas aussi violente si les dioulas du nord étaient sûrs de rester les décideurs sur les problèmes quotidiens à Ferkéssédougou et les baoulés à Yamoussoukro. A l'heure où nous même décentralisons, il est temps de réviser nos vieux schémas jacobins.

L'important est que les pays africains aient un système stable et ouvert à l'autre, d'abord à l'étranger africain - malien et burkinabé en Côte d'Ivoire -, ou aux Libanais et Syriens, si présents dans les réseaux commerciaux.

En second lieu, vouloir mener une politique de développement pour tout ce continent serait irréaliste et serait méconnaître les situations locales et les traditions historiques. La France n'a pas la même responsabilité envers l'est ou le sud de l'Afrique qu'envers le Maghreb et l'ancienne AOF.

Avec le Maghreb, nous avons vécu depuis 1830 une histoire commune faite de joies et de drames. Pensons aux anciens combattants, aux pieds noirs, aux harkis. Il y aura longtemps encore une politique française au Maghreb. Mais l'UDF considère qu'à moyen terme l'Union européenne est mieux qualifiée...

M. Maxime Gremetz - Oh !

M. Jean Dionis du Séjour - ...pour mener l'essentiel de la politique économique, d'aide au développement et de contrôle aux frontières. Face aux demandes d'adhésion officieuse du Maroc et officielle de la Turquie, l'UDF refuse la dilution du projet européen, refuse catégoriquement l'entrée d'un de ces pays dans l'Union, mais demande qu'on leur propose un véritable statut de nation amie et privilégiée.

M. Maxime Gremetz - Très bien.

M. Jean Dionis du Séjour - En Afrique francophone, la France, seule à même de présenter une politique de développement complète, a une responsabilité écrasante. Elle doit s'engager durablement, et y consacrer l'essentiel de ses forces. Comme l'a observé avec raison Dominique de Villepin, si la France n'était pas intervenue en Côte d'Ivoire, une catastrophe majeure se serait produite. Mais le courage politique impose aussi de reconnaître que nos moyens limités ne nous permettent pas d'intervenir partout, et que nous ne saurions le faire dans la Corne de l'Afrique, sauf à Djibouti, ni en Afrique centrale, ni en Afrique australe sauf à Madagascar.

Enfin, il est essentiel de revoir complètement nos mécanismes d'évaluation de l'aide au développement. Depuis quarante ans, la France déploie une aide généreuse, parfois brouillonne, contradictoire même, dans un souci louable de « sauver l'Afrique ». Mais je l'ai dit, une trentaine de pays africains sont aujourd'hui plus pauvres qu'en 1980. Un bilan s'impose donc. Qu'a apporté la présence des Français - jusqu'à 40 000 - en Côte d'Ivoire ? Vaut-il mieux une coopération d'Etat ou par les ONG ? Quel est l'effet réel des actions de l'ONU ? Seuls des rapports pragmatiques permettront ensuite de mener une action réaliste. L'Afrique est une terre de passion et de générosité, mais aussi de gaspillages que nous devons traquer sans cesse. Cela passe par une véritable ascèse de l'évaluation.

L'enjeu, aujourd'hui, c'est de mettre l'Afrique sur la voie de la croissance durable et de mettre en place un plan de développement complet et équilibré. Il s'agit aussi d'accélérer l'intégration du continent dans l'économie mondiale et d'appeler le reste du monde à établir un partenariat avec l'Afrique.

Mais rien ne se fera si nous ne repensons pas notre manière d'être et d'agir en Afrique. Nous avons donc osé quelques pistes nouvelles : tirer les leçons de l'échec de l'Etat-nation, incompatible avec la réalité ethnique ; élaborer une politique différenciée pour chaque grande région en distinguant les pays du Maghreb, où il revient à l'Union européenne d'élaborer un statut de nation privilégiée, et l'Afrique francophone, où notre pays a un devoir d'action ; évaluer lucidement les politiques africaines menées jusqu'ici.

L'Afrique n'est pas seulement une exigence morale pour la France. Elle est source d'avenir français. Nous pouvons beaucoup recevoir de sa formidable vitalité. C'est déjà vrai dans les domaines sportif et culturel, cela sera vrai plus tôt que nous ne le pensons en matière d'économie et de politique. Forts de cet espoir, nous ne devons pas hésiter à bousculer notre actuelle politique africaine (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. Henri Sicre - Ce débat était attendu depuis de longs mois par la représentation nationale. Mon collègue Serge Janquin en avait souligné la nécessité au mois de novembre dernier à l'occasion de l'examen des crédits affectés à la coopération. Il était attendu aussi par les nombreuses associations de solidarité internationale avec lesquelles nous entretenons des relations suivies.

Vient-il pour autant à son heure ? L'urgence est ailleurs, en Irak. Et les questions de développement méritent mieux qu'une inscription de dernière minute. J'aurais préféré que nous ayons cet échange à l'issue des rencontres sociales de Porto Alegre. J'aurais éventuellement compris une inscription à l'ordre du jour à la veille du prochain sommet du G8, qui doit se tenir à Evian en juin prochain.

Je laisserai donc la majorité assumer un ordre du jour fixé en concertation avec son Gouvernement, qui reflète la perte d'influence du Parlement pour ce qui relève de la politique extérieure.

De 1981 à 2002, une publication de l'Assemblée nationale intitulée « La diplomatie parlementaire » en témoigne : nous avons acquis, de législature en législature, le droit d'être informés dans un délai raisonnable et même un droit de regard. Alors que Bagdad est détruite, que les Nations unies s'interrogent et que la France a engagé des concertations à Saint-Pétersbourg avec la Russie, l'Allemagne et le secrétaire général de l'ONU, l'Assemblée nationale tient salon académique sur les aléas du mal développement.

L'endettement, l'inexistence de l'Etat, les déficits démocratiques, les guerres, les impondérables climatiques et les catastrophes naturelles sont à l'origine d'un mal développement durable. La coopération française a sa part de responsabilité. Il y a plus de quarante ans, René Dumont annonçait dans un ouvrage prophétique, L'Afrique noire est mal partie, les graves dysfonctionnements constatés aujourd'hui sur le continent noir. Quant au fameux « consensus de Washington » prôné par les tenants du libéralisme à tout crin, on sait où il a conduit l'Amérique latine. Au terme d'une ouverture brutale des frontières douanières, de la privatisation de la quasi totalité des biens nationaux, d'une réforme de l'Etat s'apparentant à son démantèlement, il est à l'origine d'une succession de sinistres économiques, sociaux et politiques. Regardez où en est l'Argentine avec ses quinze ou dix-sept monnaies, son endettement extérieur galopant, l'effondrement de son système de retraite par capitalisation, l'explosion de son chômage et de sa pauvreté.

Le président Bush en a tiré des conclusions que nous devons condamner : les pauvres du monde, a-t-il dit en substance, sont dangereux. Il convient d'aller chez eux, avec nos soldats, mettre un ordre qu'ils sont incapables de faire respecter. Je vous renvoie ici à la déclaration du chef de l'Etat américain du mois de septembre 2002, concernant la stratégie de défense de son pays.

M. Gérard Bapt - Très inquiétant !

M. Henri Sicre - « Les Etats faibles (...) peuvent représenter pour nos intérêts nationaux un danger tout aussi important que les Etats forts. La pauvreté, la faiblesse des institutions et la corruption peuvent exposer les Etats faibles à abriter à l'intérieur de leurs frontières des réseaux terroristes et des cartels de la drogue ». La guerre préventive ainsi justifiée ne saurait être la réponse des pays riches, de la France en tous les cas, au mal développement.

Le Gouvernement doit mettre toutes les cartes de la France sur la table. L'incertitude quant aux plus pauvres sur le volume de l'aide, sur les moyens mis à la disposition de la politique de coopération permet peut-être de gagner du temps, mais un écart prolongé entre les discours et les réalités est dommageable à la crédibilité de notre pays. Annoncer monts et merveilles aux responsables d'Afrique et ajuster le budget de 2003 en réduisant les crédits du Fonds de solidarité prioritaire et en accroissant les crédits d'ajustement structurel reflètent un choix politique que nous refusons.

Pour sortir de ce que certains ont appelé la Françafrique, il conviendrait de prolonger le cadre défini lors de la précédente législature.

La réforme de la politique de coopération mise en chantier en 1998 privilégiait l'aide-projets plutôt que l'aide budgétaire. Elle définissait une zone de solidarité prioritaire dotée d'un fonds qui a servi de variable d'ajustement dans le dernier collectif. La société civile avait été associée au renouveau de la coopération française avec la création du Haut conseil de la coopération internationale dont les moyens ont été revus à la baisse. Le rôle de nos armées avait été redéfini. Sur ce plan là aussi, les choses ont bien changé. Nos soldats ont retrouvé le cadre interventionniste d'avant 1998.

Le développement des pays à revenus intermédiaires est affecté par le poids d'une dette qui grève leur croissance. Il l'est aussi par l'échec des méthodes excessivement libérales qu'ils appliquent sur les conseils du Fonds monétaire international. Leur endettement extérieur doit être réexaminé, un meilleur accès de leurs produits sur les marchés solvables de l'espace OCDE favorisé. La France est-elle disposée à aller de l'avant ? Est-elle prête à prendre une initiative audacieuse concernant la dette des pays intermédiaires ? Une allocation de droits de tirage spéciaux est sans doute nécessaire, qui supposerait l'organisation d'une conférence internationale entre pays créditeurs et pays endettés. La France est-elle disposée à dialoguer avec les pays du Mercosur en matière agricole ? Les propos tenus par M. le Président de la République, tantôt dans une direction, tantôt dans une autre, ne m'ont pas permis de me faire une religion. Un grand hebdomadaire consacré aux questions africaines fait état de sa perplexité à l'issue du dernier sommet franco-africain : « Jacques Chirac a trouvé sur le terrain économique des accents tiers-mondistes et anti-mondialisation (...) la contradiction entre ce Chirac là et celui qui, au sein de l'Europe, se fait le défenseur acharné des subventions octroyées aux agriculteurs français est un peu gênante » (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jacques Godfrain - Indignation sélective !

M. Henri Sicre - Nous avons exprimé notre conviction au sein de l'Internationale socialiste où François Hollande anime un groupe de travail sur la dette, comme au forum de Porto-Alegre en 2002 et en 2003.

Nous soutiendrons tout ce qui renforce les moyens affectés aux plus pauvres. Nous critiquerons tout ce qui le réduit. Nous soutiendrons tout ce qui va dans le sens d'une aide aux projets. Nous critiquerons tout ce qui réduit notre aide à un saupoudrage. Nous ne nous lasserons pas de réclamer une réflexion sur la taxation de capitaux associant les élus au Gouvernement. Le groupe socialiste avait fait adopter en 1998 le dépôt d'un rapport sur les institutions financières internationales. Plusieurs mois de pression ont été nécessaires pour que le Gouvernement remette à notre assemblée le rapport annuel sur le FMI et la Banque mondiale et les activités de la France au sein de ces organismes.

En ce qui concerne la guerre et l'utilisation de mercenaires, le groupe socialiste a été contraint de déposer une proposition de loi pour qu'enfin le Gouvernement consente à nous soumettre le projet de loi du précédent gouvernement sur cette question.

Que dire, enfin, de notre capacité collective d'écoute et de proposition, stoppée par la victoire électorale du RPR/UDF/UMP ?

Le Parlement avait apporté une contribution majeure à la réforme de la politique française de coopération : mission d'information conjointe sur le Rwanda, rapports d'information sur les activités des sociétés pétrolières, sur les droits de l'homme et la francophonie, sur les conférences de l'OMC, sur le Congo-Brazaville, forum organisé avec les ONG, réunion des commissions des parlements de l'Union européenne sur le développement. Je constate que nous allons effectuer une première mission en Côte d'Ivoire, victime d'un coup d'Etat prolongé depuis le mois de septembre 2002... le 15 avril 2003. Les interrogations ne manquent pourtant pas. Pourquoi ce coup d'Etat ? Qui a si bien armé les rebelles ? Où en est la réconciliation ? Où en sont les contrats de service public en cours de renouvellement - qui concernent au premier chef notre économie ? Où en sont les enquêtes sur les violations des droits de l'homme ?

Dans les circonstances présentes, le groupe socialiste, on le comprendra, s'interroge. Pourquoi est-il peu ou mal répondu, et toujours à contretemps, à ses attentes touchant aux éléments constitutifs de notre politique étrangère ?

Aussi vous dirais-je solennellement en conclusion, Monsieur le ministre, que nous souhaiterions connaître, avant le G8 d'Evian de juin, les propositions de la France sur l'aide au développement, et le traitement de la dette et ce qu'elle compte proposer aux pays concernés dans le cadre des négociations OMC. C'est là une initiative que nous vous demandons de prendre.

Mais nous avons un autre débat en tête. Aujourd'hui, Bagdad est tombée. La France, malgré sa position déterminée, n'a pu éviter la guerre. Pourra-t-elle éviter le pire et participer à la reconstruction ? Sont-ce les Etats-Unis, avec des hommes préfabriqués, ou bien la communauté internationale, qui installeront la démocratie en Irak ? Les ressources pétrolières seront-elles exploitées sous la tutelle des Etats-Unis ou provisoirement gérées par les Nations unies ? Ces questions, importantes pour l'avenir de l'Irak et du Moyen-Orient, présagent aussi de celui de l'Afrique. En effet, les Etats-Unis anticipent dès maintenant, avant nous, la découverte de gisements d'hydrocarbures en Afrique occidentale. Le risque pour les Nations unies est réel. Comment la voix de la France sera-t-elle écoutée pour la reconstruction de l'Irak ?

Pourquoi ne pas organiser un débat sur cette question dès la semaine prochaine ? Lors du premier conflit du Golfe, en 1990, le Parlement avait bien été convoqué en pleines vacances parlementaires !

M. Gérard Bapt - Bon rappel !

M. Henri Sicre - Les dangers qui se profilent en Irak se retrouveront en Afrique dans les mois à venir si nous n'y prenons garde (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Michel Roumegoux - Depuis la fin de l'époque coloniale, dont elle n'a pas à rougir, la France ne s'est jamais désintéressée du sort des pays d'Afrique.

Il faut se réjouir que ces préoccupations soient devenues l'une des cinq priorités retenues par le Premier ministre dans sa lettre de cadrage budgétaire pour 2003, conformément au souhait formulé par le Président de la République en septembre 2002 à Johannesburg. L'aide publique au développement durable devrait augmenter de plus de 50 % en cinq ans pour atteindre 0,5 % du PIB.

C'est beaucoup, et même beaucoup mieux, compte tenu de la situation budgétaire dont nous avons hérité, mais c'est encore trop peu au regard des besoins.

C'est dire l'obligation que nous avons d'optimiser ces moyens, de faire les choix les plus judicieux pour les populations et non plus pour leurs dirigeants, les gaspillages pouvant priver une population de moyens vitaux.

Une intervention forte et raisonnée des pays du Nord vers ceux du Sud est vitale au plan humanitaire, constitue un complément utile, sinon indispensable à une maîtrise de l'immigration, et un investissement pour l'avenir de la présence de la France dans ces régions si l'on refuse ce qui a été trop souvent perçu comme un déclin inéluctable. C'est vrai, « l'Afrique était mal partie », mais quelques espoirs sont permis avec l'arrivée d'une nouvelle génération de dirigeants. C'est évidemment sur les pays francophones auxquels nous lient des solidarités historiques, que doit porter notre effort.

M. Dionis du Séjour l'a dit, il y a des choses qui ne marchent pas en Afrique. Pour ne pas se perdre comme une goutte d'eau dans le sable, cette aide, durable, doit se concentrer sur un pays, une filière, un secteur, jusqu'à ce que le relais puisse être pris par les acteurs locaux. Il s'agit d'accompagner le territoire bénéficiaire jusqu'au seuil d'une action réussie. Un investissement de départ est souvent nécessaire : les autorités et les populations doivent ensuite entretenir, voire développer les structures qu'elles ont su s'approprier.

L'aide peut être apportée à différents niveaux et dans de nombreux domaines. Elle peut favoriser la formation et l'éducation sur place, mais aussi consister à accueillir des étudiants en France par un système de bourses afin de former les élites de demain à la culture française.

On peut aussi réduire la dette des pays pauvres très endettés, dans une logique de désendettement-développement. Trop souvent, c'est nécessaire, mais est-ce vraiment pédagogique ?

On peut encore participer à l'aide multilatérale à travers des fonds européens ou onusiens. C'est bien pour lutter contre les grands fléaux - sida, paludisme, tuberculose - pour traiter de l'endettement, de la sécurité, des prix... Mais ce n'est pas nécessairement le meilleur niveau pour l'aide au développement.

Il faut préférer la coopération bilatérale, pour restaurer l'influence française sur le terrain, mais aussi parce que nous sommes les mieux placés pour comprendre les attentes et la culture des pays francophones, et optimiser notre aide dans le respect des pays bénéficiaires. On veillera à remplacer l'assistance par le partenariat, on favorisera les investissements privés sécurisés par un fonds de garantie, susceptibles, par effet de levier de mobiliser des fonds plus importants. On exigera en contrepartie une bonne gouvernance, un minimum de démocratie, une lutte efficace contre la corruption et l'évaluation des résultats. La reconduite des aides devrait dépendre des résultats obtenus.

Une intervention réussie requiert une bonne connaissance du pays, un diagnostic local, une action concertée, compatible avec la politique des autorités et les actions des autres pays, des ONG et des acteurs locaux.

Mais bien souvent que de pertes d'énergie ! Combien de missions animées des meilleures intentions du monde échouent, quand elles ne détruisent pas des équilibres fragiles ? Il faut beaucoup d'humilité, de diplomatie et de respect, savoir que l'on ne peut pas tout faire seul ni imposer sa vision des choses, mais préserver les initiatives généreuses fondées sur une bonne connaissance du pays, qui débouchent parfois sur de belles réussites.

Le ministère de la coopération pourrait, sinon contrôler ces initiatives, les connaître pour apporter l'information qui fait parfois défaut aux entrepreneurs enthousiastes et susciter des synergies : l'expérience démontre que l'on peut faire beaucoup avec des moyens limités.

J'en donnerai deux exemples. Dans le domaine agricole, la belle réussite, moins modeste qu'il n'y paraît, qu'a été l'introduction de la culture de l'oignon en pays dogon, au Mali, par le célèbre ethnologue Griaule. Poursuivie depuis plusieurs décennies, cette culture est aujourd'hui quasiment la seule production à financer les importations de piles électriques, moteurs ou véhicules.

Dans le domaine de la santé, le centre de santé communautaire de Sangha en pays dogon est une expérience reproductible. Lancé par une ONG, via Sahel, dans le respect du programme de développement du Mali, il a été construit en concertation avec les autorités autour d'un plateau technique performant, avec un bloc opératoire modeste où _uvrent un médecin, des infirmiers d'Etat, des aides-soignants, des hygiénistes et des matrones. Outre un lieu de soins, ce centre est un lieu de vie, de dialogue entre médecines moderne et traditionnelle, de formation médicale et de gestion. Il vient d'être mis à la disposition d'une association constituée de représentants démocratiquement élus par une cinquantaine de conseils de village.

C'est une expérience généralisable pour un rapport qualité-prix imbattable, même si le manque de connaissance de la gestion, de rigueur et de transparence ont posé quelques problèmes dont il faut tirer les enseignements. Elle peut conforter une civilisation où la transmission de la technique par tradition orale est complexe.

M. le Président - Veuillez conclure.

M. Michel Roumegoux - Pour pérenniser la structure, l'association doit parvenir à terme à une autonomie financière, grâce aux recettes produites par l'activité chirurgicale et médicale, même si la population est très démunie.

On peut résoudre 80 % des problèmes avec peu d'argent, sachant que si l'on veut résoudre les 20 % de problèmes restants, il faudra rajouter plus de 80 % de moyens. C'est un constat douloureux pour nous, mais mieux compris localement.

Reste une question : peut-on faire une grande politique de coopération en s'appuyant sur des expériences modestes ? La réponse est oui pour l'agriculture, l'aide au développement, une partie de la politique de santé, pour peu que l'on y associe un peu d'habileté politique, beaucoup de respect et une bonne connaissance des pays bénéficiaires.

« On ne commande à la nature qu'en lui obéissant » disait Claude Bernard, maître de l'expérimentation scientifique, celle-là même qui évalue ses résultats. C'est ce qu'il nous faut en Afrique.

Il y a sans doute beaucoup de grandes politiques souhaitables ; il y a aussi des politiques possibles, modestes et durables, fondées sur des hommes qui se respectent et qui travaillent en partenaires au plus près du terrain (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. André Schneider - Ce débat est très important, pour les pays concernés, comme pour la France elle-même.

La France entretient avec l'Afrique des relations multiformes, qu'elle a toujours su adapter aux réalités du moment. Hier elle a participé au processus de décolonisation, aujourd'hui elle apporte une contribution importante au développement de ces pays.

Mais nos relations dépassent largement ce cadre, elles sont d'ordre affectif. Oui, la France et l'Afrique, c'est une longue et belle histoire d'amour.

Le Président de la République s'est engagé, lors du sommet de Johannesburg, en 2002, à porter le niveau de l'aide publique au développement de 0,34 % à 0,5 % du PIB d'ici cinq ans. C'est pour la France un chantier prioritaire, a-t-il affirmé lors de la dernière conférence des chefs d'Etats de France et d'Afrique, en février. Il a insisté sur le principe du partenariat, qui doit se substituer à l'assistanat. Le partenariat est un enrichissement réciproque, c'est une relation d'égal à égal et c'est ainsi qu'il faudra désormais envisager notre coopération avec l'Afrique. Nous devons accorder une importance croissante à certains secteurs comme l'enseignement, car la production du savoir est le moteur du développement et de l'autonomie, et mieux adapter nos politiques de coopération aux besoins de ces pays, en soutenant les systèmes éducatifs existants.

En ma qualité d'ex-chef d'établissement du second degré, je me permettrai, Monsieur le ministre, une suggestion que j'ai déjà évoquée lors de l'audience que m'a accordée, à Yaoundé, début février, le Premier ministre du Cameroun : les échanges d'enseignants « poste à poste ». Des enseignants africains occuperaient, pendant un an au moins, les postes d'enseignants français, qui, durant la même période, occuperaient les leurs. Ce partenariat existe déjà entre certaines universités où il donne de bons résultats.

La demande de partenariat est très forte en Afrique et requiert de notre part de gros efforts d'adaptation. Nous devons à la fois accueillir dans nos universités et nos grandes écoles la jeunesse africaine, et aider ces pays à former un maximum des leurs sur place. Il s'agit, à moyen terme, d'éviter que trop de jeunes Africains, une fois diplômés, n'envisagent plus de rentrer au pays. Cela implique d'accompagner les programmes de formation de projets et moyens financiers permettant ce retour au pays dans de bonnes conditions.

Par exemple les étudiants boursiers devraient bénéficier d'une aide au retour pour favoriser leur insertion professionnelle dans leur pays. Actuellement il y a plus de médecins camerounais en France qu'au Cameroun !

Il faudra aussi mettre en place des filières de formation professionnelle en partenariat avec d'autres bailleurs, bilatéraux, multilatéraux, privés. Ces filières pourront ainsi répondre aux besoins des entreprises locales, nationales ou internationales, et assurer des débouchés aux diplômés.

Il est impératif de redéfinir nos objectifs, de mieux piloter nos activités en fonction des priorités géographiques et sectorielles. Cela implique de conforter des filières de formation en direction des jeunes filles et des femmes.

J'évoquerai, en conclusion, l'exemple du soutien aux micro-entreprises et à la structure bancaire inspirée du système des tontines. Cette expérience se développe avec succès à Yaoundé et sans doute ailleurs. Il s'agit d'un réseau de banques spécialisées dans les petits prêts à la création d'entreprises.

Tous, nous devons _uvrer pour qu'un nouveau partenariat s'instaure pour le développement de l'Afrique. Nos relations d'amitié, notre histoire d'amour avec l'Afrique sont exceptionnelles. L'Afrique est au c_ur de la France et des Français. Le c_ur de la France bat en Afrique. L'Afrique doit donc rester au c_ur des priorités de la France (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Henriette Martinez - A l'occasion de la Journée de la femme, le secrétaire général des Nations unies a reconnu que l'égalité des sexes était indispensable pour atteindre les autres objectifs. Aucune stratégie de développement ne peut être efficace si elle n'accorde pas aux femmes un rôle de premier plan.

On ne parviendra pas à faire reculer l'extrême misère qui affecte trois milliards de personnes en continuant à enfermer les femmes des pays en développement dans la sphère domestique, pas plus qu'on ne peut continuer à les enfermer dans des traditions imposées par les hommes, dont les plus épouvantables sont les mutilations génitales féminines.

Les Africains disent que les femmes portent l'Afrique sur leur dos. De fait, tout en élevant cinq ou six enfants en moyenne, elles assurent l'alimentation familiale par les cultures vivrières et la quête épuisante de l'eau et du bois. Malgré cette activité, l'Afrique subsaharienne est la seule région du monde où la pauvreté a progressé depuis 1990. La moitié des habitants disposent de moins d'un euro par jour.

Il est donc important d'aider les Africaines à accéder à l'autonomie financière, sans bousculer la société traditionnelle, en les épaulant dans la réalisation de projets où les bénéfices sont réinvestis. Les bailleurs de micro-crédits le savent bien, eux qui accordent 95 % de leurs fonds à des femmes : lorsqu'une Africaine gagne de l'argent grâce à un micro-crédit, sa priorité va au remboursement de sa dette, puis à l'éducation et à la santé de ses enfants, puis à son mari, et ensuite seulement à elle-même, alors que chez les hommes l'ordre des priorités est inverse (Sourires).

Nourrir et éduquer ses enfants dans de bonnes conditions est l'objectif de toute femme au monde. Or les Africaines sont écrasées par les maternités à répétition, les fameux « quatre trop » : trop tôt - dès 13-14 ans - trop rapprochées, trop fréquentes, trop tard - la dernière maternité a lieu vers 35-40 ans.

Les Africaines connaissent l'existence de la contraception. Mais elles sont moins de 20 % - 10 % seulement en Afrique de l'Ouest - à pouvoir se protéger des grossesses non voulues et aussi du sida, faute de moyens financiers - et aussi par manque de bonne volonté de leurs conjoints.

Le sida est une tragédie qui tue les mères et laisse des orphelins sans identité dans la rue ; ils sont parfois recueillis par les ONG, telle la petite Nata , que nous avons rencontrée à l'hôpital Charles de Gaulle, à Ouagadougou.

Les grossesses non désirées se traduisent par des avortements à répétition, pratiqués dans des conditions telles que, dans les CHU d'Abidjan, les avortements sont responsables des trois quarts de la mortalité maternelle. Chaque année 500 000 à 600 000 femmes décèdent pour des raisons liées à une grossesse, principalement dans les pays en voie de développement - sans parler des femmes estropiées ou stériles à vie, en nombre bien plus important encore.

L'Afrique subsaharienne se distingue par la précocité des maternités : la moitié surviennent chez les moins de 20 ans. Dans ces conditions, comment les femmes pourraient-elles être actrices de leur développement ?

Pour que cela change, il faut doubler les budgets annuels de l'APD : 100 milliards d'euros au lieu de 50, afin de couvrir tous les besoins de base. Je me réjouis que la France semble vouloir tenir ses engagements en la matière.

L'amélioration de la condition des femmes est aujourd'hui reconnue comme une priorité pour le développement. Ainsi, alors que 50 % des enfants sont scolarisés en Afrique subsaharienne, le taux n'est que de 20 % chez les filles. Et les filles scolarisées modifient leurs priorités : l'âge du mariage et celui de la première naissance reculent. Or c'est par les femmes que se transmet l'éducation qui permet de gravir l'échelle sociale.

Le ministère des affaires étrangères a récemment relancé sa stratégie de promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes. Nous devrions renforcer notre soutien au FNUAP, le fonds des Nations unies pour la population. Vous engagez-vous, Monsieur le ministre, à le faire dans la prochaine loi de finances ?

Et soutiendrez-vous les droits des femmes, les 23 et 24 avril, au Comité économique et social pour l'Asie et l'Afrique, contre les Etats-Unis qui ont déjà menacé de supprimer leur contribution au FNUAP, soit 12 % du budget de ce fonds ?

Alertée à nouveau par les ONG - dont l'association Équilibre et population, qui effectue un travail remarquable -, je vous demande, Monsieur le ministre, de veiller, comme lors de la réunion précédente à Bangkok, à sauvegarder les droits des femmes. Ce sera un acte déterminant pour la politique française de développement.

« Quand les femmes prospèrent, toute la société en profite », a déclaré Mme Louise Fréchette, vice-secrétaire générale des Nations unies.

Monsieur le ministre, au nom des femmes africaines, je vous remercie de l'aide qu'apporte la France (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Antoine Herth - Un adolescent malien rencontré lors d'une récente mission en Afrique, à qui je posais la question habituelle de ce qu'il ferait quand il serait grand, m'a répondu : « chauffeur de taxi à Paris ».

Bon résumé des enjeux et des ambiguïtés du sujet qui nous rassemble ! La France continue de susciter une attraction, le continent africain offre peu de perspectives à sa jeunesse, et cette situation contribue à alimenter les fantasmes protectionnistes de ceux qui craignent une « invasion ».

Ce débat arrive à point pour préciser les objectifs et les moyens de la politique française d'aide au développement et je voudrais, après avoir salué l'initiative de M. Godfrain, évoquer quelques points qui me tiennent particulièrement à c_ur.

L'économie africaine est fondée sur l'activité agricole, laquelle se partage entre les cultures d'exportation - café, cacao, coton... -, qui ont bénéficié dans le passé de toutes les attentions et suscitent énormément de convoitises, et l'agriculture de subsistance, qui est hélas bien souvent délaissée. Certaines initiatives portent leurs fruits : je pense à l'action de certaines ONG pour aider à la structuration des organisations paysannes. Mme Martinez a très justement souligné le rôle incontournable des femmes et des organisations féminines dans la préservation d'une agriculture vivrière. Il faut aussi souligner l'avancée que constitue la coordination des interventions du Nord, notamment dans le cadre de l'Union européenne.

Les questions environnementales sont, en revanche, particulièrement préoccupantes. Comment ne pas être choqué par ces périphéries des villes africaines, envahies de matières plastiques ? Comment ne pas s'inquiéter de la diffusion de pesticides, souvent interdits chez nous ? Comment ne pas voir que la pérennité de la faune et de la flore est en jeu ?

Je voudrais insister plus particulièrement sur la nécessaire préservation des sols, qui sont menacés non seulement par la rudesse du climat mais aussi par certaines pratiques ; et aussi sur les risques qui menacent le patrimoine « génétique » de l'Afrique, que certaines firmes voudraient accaparer : la France et l'Europe doivent, en ce domaine, poser des balises.

Autre sujet important : la coopération décentralisée, élément relativement nouveau dans le paysage de la coopération Nord-Sud. C'est une coopération à l'échelle humaine, entre collectivités, qui permet de traiter en même temps des problèmes de santé, d'éducation, d'urbanisme, de transports, des problèmes culturels et économiques. En mettant l'accent sur cette forme de coopération, on pourrait arriver à fédérer les opérateurs publics et les ONG autour de projets définis localement. Néanmoins il faut veiller à ce que ce type d'actions, parfois engagées avec une absence totale d'expérience, ne s'égarent pas dans des démarches strictement caritatives ou n'aboutissent pas à un clientélisme contre-productif. Je suggère, Monsieur le ministre, que le réseau décentralisé du ministère des affaires étrangères accompagne ces initiatives.

Mais au fait, pourquoi la coopération ? Question qui peut paraître saugrenue, mais que notre collègue Dionis du Séjour a posée avec raison.

La coopération française tire sa légitimité de notre passé colonial ; nos partenaires africains ne manquent d'ailleurs pas une occasion de nous rappeler la dette morale que nous avons vis-à-vis d'eux. S'il est important de se souvenir de l'histoire, cette seule considération ne suffit pas à justifier notre engagement en faveur de l'Afrique, surtout aux yeux des jeunes générations.

Il est donc important de donner une nouvelle base à notre démarche, en la fondant sur une approche partenariale et sur le concept de communauté de destin. Ce débat y contribue, et je souhaite ardemment qu'il puisse se renouveler régulièrement.

Pour conclure, je formulerai un v_u : que lorsque, dans quelques années, je rencontrerai un jeune dans un pays africain, il me réponde qu'il veut être facteur, instituteur ou agriculteur dans son pays... Ce serait la preuve que nos efforts ont porté leurs fruits (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Frédéric de Saint-Sernin - Le développement du continent africain a été au c_ur des grandes réunions internationales de l'année 2002. A la conférence de Monterrey, au sommet du G8 à Kananaskis ou à la conférence sur le développement durable de Johannesburg, le renforcement de la solidarité vis-à-vis de l'ensemble des pays du Sud, en particulier de l'Afrique, a été retenu comme une priorité. La France s'y est engagée de manière forte, en particulier par la voix du Président de la République.

Cependant, notre aide au développement reste encore bien faible, puisqu'elle n'atteint pas 0,4 % du PIB. Je salue la volonté affichée de parvenir à 0,7 % d'ici la fin de la législature.

L'année 2003 est elle aussi rythmée par plusieurs rendez-vous importants, tels le sommet Afrique-France de février et la réunion du G8 sous présidence française en juin, qui donnent à notre pays l'occasion de faire des propositions. Le Président de la République a ainsi lancé une initiative en faveur du développement agricole.

L'impératif majeur reste l'accroissement de notre aide au développement, et en particulier de l'aide publique, dont l'aide bilatérale représente désormais les deux tiers. Cette aide au développement doit être tournée en priorité vers le continent africain, dans le cadre du NEPAD. Après Kananaskis, Evian doit faire avancer l'ambition d'un véritable partenariat, rompant avec le principe de l'assistance qui a trop longtemps guidé notre action.

L'aide bilatérale doit être maintenue, et même s'accroître ; mais il faut aussi que la France et l'Union européenne développent une aide multilatérale.

Nous devrons concentrer une bonne partie de nos efforts sur les PMA, dont les deux tiers sont situés en Afrique. Le NEPAD doit pour sa part nous aider à concentrer notre politique sur des objectifs de développement durable.

Si l'on doit augmenter le montant de notre aide, il faut songer aussi à moderniser nos modes d'intervention.

Je puis témoigner par exemple, pour l'avoir constaté sur le terrain, que l'Agence française de développement a besoin d'élargir son activité, en particulier à de nouvelles zones géographiques.

De la même façon, certains pays d'Afrique, qui ne sont pas éligibles à l'initiative PPTE - pays pauvres très endettés -, ont des difficultés à réduire le poids de leur dette. Il faut également s'intéresser à la mise en place de systèmes de garantie pour inciter les investisseurs étrangers à s'installer durablement en Afrique. Enfin, de nombreux conflits politiques ou militaires rendent le soutien extérieur particulièrement difficile. Il faudra mettre en place de nouvelles modalités, avec les autres bailleurs de fonds, pour subvenir aux besoins des pays nécessiteux.

J'insiste en outre sur le rôle que peuvent jouer les collectivités locales. Si leur coopération est de plus en plus dynamique, elle peut encore être améliorée par de nombreux moyens. Les élus locaux ont envie de faire plus. Nous devons les encourager et renforcer la concertation avec l'ensemble des acteurs, bailleurs de fonds, Agence française de développement et Etat. En remerciant Jacques Godfrain pour son initiative, je veux redire combien notre aide a besoin d'être plus simple et plus lisible, afin d'être plus efficace (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Jacques Myard - A deux heures d'avion de Paris, se trouvent accumulées des armes de destruction massive qui sont une menace sans pareille pour notre avenir. Ces armes ne s'appellent pas gaz moutarde ni bacille du charbon, mais pauvreté, maladie, intégrisme, explosion démographique, délabrement des services publics, ruine de l'Etat.

L'explosion démographique constitue la cause principale de cette situation. L'Afrique comptait, il y a cinquante ans, 250 millions d'habitants. On déplorait alors le manque d'hommes, frein au développement. En l'an 2000, elle a dépassé les 800 millions et atteindra les 1 250 millions en 2025 - c'est-à-dire demain matin. Il suffit que le taux de croissance démographique annuel soit de 2,4 %, pour qu'une population double tous les trente ans. En Afrique centrale par exemple, ce taux dépasse 3 %...

Devant la catastrophe annoncée, comment comprendre que la France ait, ces dernières années, délibérément tourné le dos à ce continent à la dérive ? Quelle ingratitude envers cette « force noire » qui a versé son sang pour notre liberté au cours des deux conflits mondiaux ! Qui peut ignorer ces Africains qui, avec leur verve, leur faconde, défendent brillamment notre langue alors que certains diplomates français excellent à la faire déchoir ? Qui peut les ignorer quand, à l'ONU, ils se tournent vers la France ? Pire qu'une ingratitude, c'est une faute. Honte à ceux qui, ces dernières années, ont délibérément voulu larguer l'Afrique, au mépris de l'histoire, de la géographie et de nos intérêts bien compris. En 1988, l'aide publique au développement était de 0,64 % du PIB. Elle est tombée, avec le gouvernement socialiste, à 0,32 % ! (M. Maxime Gremetz proteste) Vous vous reconnaissez là, Monsieur Gremetz, je vous en félicite !

M. Maxime Gremetz - Vous avez sauté une étape intermédiaire !

M. Jacques Myard - Le Gouvernement a décidé de la porter à 0,7 % dans les dix années à venir. Mais au-delà, c'est une amélioration qualitative qui est nécessaire. Il faut être plus efficaces en matière de démographie, à travers l'alphabétisation, notamment celle des femmes, et le contrôle des naissances. Lorsqu'un enfant ne va pas à l'école, c'est tout le pays qui ne grandit pas, dit le sage africain. Il faut développer les PME et l'agriculture, pour fixer sur place des populations attirées par ce qu'elles voient à la télévision des fastes trompeurs de l'Occident. Il faut renforcer notre aide bilatérale et l'aide de substitution, car tout est à reconstruire. Les belles théories sur l'aide par projet et l'aide multilatérale plaisent aux technocrates, mais elles ne sont plus à la hauteur des enjeux et ont trop longtemps constitué l'alibi de notre renoncement. C'est par une action visible, en son nom, que la France fera comprendre qu'elle n'abandonne pas ceux avec lesquels elle a tant à partager.

Il faut mobiliser les Africains présents en France. Les cadres que nous formons ne doivent pas rester en France après leurs études. Des aides et des procédures particulières leur permettraient de contribuer plus directement au développement de leur pays, tout en gardant des liens étroits avec la France. Nous pourrions aussi co-financer des plans épargne retour-entreprise, qui aideraient des cadres installés en France à créer leur entreprise au pays. L'immigration zéro n'existera jamais, mais l'aide au développement est un des moyens de combattre l'immigration sauvage - qui ne fera que prospérer si nous restons passifs. Il faut enfin rendre plus cohérente notre aide, écartelée entre le ministère et les comptables de Bercy. Ce sera une petit révolution, mais il faut que vous l'emportiez sur le corporatisme, Monsieur le ministre, pour être le seul maître à bord.

Le monde connaît plusieurs fractures géostratégiques. La dérive du continent africain est la plus difficile à maîtriser, car elle ne se prête pas à une action militaire, mais demande une réflexion à long terme. Les Africains en sont conscients : quatre de leurs plus prestigieux chefs de l'Etat viennent de lancer le nouveau partenariat économique et de développement. Celui-ci restera cependant une déclaration sans lendemain si nous ne renouons pas avec une politique active de coopération. Notre avenir de se joue pas dans l'élaboration de nouveaux règlements à Bruxelles, plus abscons les uns que les autres, mais sur notre flanc sud. Mettons-y le cap ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Maxime Gremetz - Très bien ! Tu as joué à saute-mouton, mais tu t'es bien repris ! (Rires)

M. Pierre Micaux - L'initiative de Jacques Godfrain est particulièrement heureuse : un tel débat était nécessaire, et je tiens à remercier le ministre de l'avoir accepté. Nous pouvons nous réjouir que les interventions aient été départies de tout esprit partisan, car l'Afrique ne l'aurait pas mérité. J'ai tout particulièrement apprécié les propos de Mme Martinez, qui a parlé avec son c_ur et sa raison. J'éprouve en effet pour l'Afrique une affection sincère, presque filiale. J'aime les pays que j'en connais, ainsi que leurs habitants, sans la moindre trace de condescendance. Aussi regretté-je que le temps qui m'est imparti ne me permette d'évoquer que quelques points.

On estime que, dans le monde, 120 millions d'enfants de six à douze ans ne sont pas scolarisés, dont un tiers en Afrique. La France assume sa part du programme « Education pour tous », mais son effort global d'aide au développement ne représente que 0,33 % de son PIB. Le Président de la République souhaite le porter à 0,5 % ce qui ne représenterait jamais que 50 milliards de francs, pour un PIB de quelque 9 500 milliards : cela n'est pas considérable. Actuellement, les étudiants africains privilégient l'anglophonie. La Grande-Bretagne en accueille 220 000, et nous 196 000. Il nous appartient de les inciter à venir davantage dans nos universités, notamment en augmentant le nombre et le niveau des bourses.

Mme Henriette Martinez - Très bien !

M. Pierre Micaux - Notre politique de recrutement doit se tourner en particulier vers la recherche et mettre l'accent sur les troisièmes cycles.

Par ailleurs, en tant que président d'un syndicat départemental des eaux, je souffre littéralement de savoir qu'1,2 milliard de personnes, de par le monde, ne disposent pas d'eau potable - ni, bien sûr, d'assainissement. Je m'incline devant les 10 000 à 15 000 morts que compte l'Irak, mais chaque année, dans le monde, des centaines de milliers de personnes, dont de nombreux enfants, meurent de soif ! Il faut prendre conscience de cette situation dramatique.

Enfin, étant à l'origine un forestier, je ne puis m'empêcher de vous alerter contre la déforestation. Changeons au plus vite la gestion malheureuse des forêts africaines ! Il faut deux ou trois siècles pour fabriquer un acajou ou un okoumé, et quelques minutes pour l'abattre. Que soit créé un office africain de la forêt, auquel notre ONF pourrait faire bénéficier de son expérience (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Christian Vanneste - Depuis vingt ans, les collectivités territoriales, l'Etat et l'Union européenne se sont engagées avec pragmatisme dans la coopération internationale décentralisée. Les associations ont joué un rôle moteur dans cette dynamique qui a permis de consolider les politiques nationale et communautaire de co-développement.

Alors que l'engagement humanitaire marque le pas, cette forme de solidarité, encore peu connue, est pratiquée par un nombre de plus en plus grand de villes françaises, en partenariat avec les communes défavorisées de pays du sud. Il y a là une véritable école de l'engagement, contribuant à une mondialisation des mouvements de solidarité.

Les lois de décentralisation ont créé un cadre propice à la coopération internationale des collectivités territoriales. Les projets qu'elles coordonnent avec cohérence et efficacité entraînent l'octroi de crédits nationaux et européens supplémentaires. Dans son titre IV « De la coopération décentralisée », la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République leur donne le droit de conclure des conventions avec des collectivités étrangères, dans les limites de leurs compétences et le respect de nos engagements internationaux. Ces possibilités ont été mises en _uvre par Jacques Godfrain, et vous-même, Monsieur le ministre, avez affirmé votre attachement à la coopération décentralisée.

Toutes les régions, la moitié des départements et la grande majorité des grandes villes et des villes moyennes s'y sont engagé, soutenant près de 6 000 programmes dans 114 pays, dont beaucoup en Afrique. Leur intervention déclenche des aides de l'Union européenne et de l'Etat, lequel a versé cette année près de 11 millions d'euros pour 319 projets de ce type, soit une progression de 62 % depuis 1994. Tous crédits confondus, les collectivités territoriales consacrent près de 230 millions d'euros à cette action internationale.

Ainsi, sur les six communes de ma circonscription, cinq pratiquent la coopération décentralisée, dont trois - Bousbecque, Linselles et Roncq - depuis fort longtemps. J'observe d'ailleurs que les communes les plus modestes sont les plus actives : Linselles, jumelée avec la ville allemande de Willich, a construit depuis une quinzaine d'années à Zogore, au Burkina, de nombreux points d'alimentation en eau potable, des banques de céréales et neuf écoles ; de même, Roncq promeut depuis vingt ans des projets de développement économique, sanitaire et culturel à Selinkégny au Mali, et y a réalisé des puits et une coopérative de stockage. Ce partenariat est mutuellement profitable et constitue pour ceux qui s'y impliquent une école de la citoyenneté et de la solidarité, où agir pour les autres apprend à agir pour soi-même.

Cependant la coopération décentralisée semble aujourd'hui stagner, les collectivités devant recentrer leur action sur les difficultés nées de la crise et du chômage. Le Gouvernement devrait lui donner une impulsion nouvelle, et l'aider à se rationaliser. Par exemple, des communes d'un même département ou d'une même région française coopèrent avec des communes d'une même zone d'Afrique, ce qui conduit conseil général et conseil régional à intervenir en complément. C'est ce que font déjà le Nord-Pas-de-Calais avec le cercle de Kayes, zone de forte émigration, et l'Ille-et-Vilaine avec le cercle de Mopti au Mali. Facteur de développement économique et de solidarité, la coopération décentralisée doit être un axe majeur de notre action en faveur de l'Afrique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Michel Voisin - Les images de la guerre en Irak et du dénuement des populations nous forcent à nous interroger sur les moyens à mettre en _uvre pour que l'aide au développement ne bénéficie pas à quelques-uns, mais à tous ceux auxquels elle est destinée. Trop souvent par le passé une poignée de dirigeants l'ont détournée pour satisfaire leurs désirs ou leur mégalomanie. Aussi l'aide au développement doit-elle aller en priorité vers les pays en difficulté qui répondent aussi à certains critères démocratiques garantissant qu'elle sera plus justement répartie.

Telle doit demeurer la conception française de l'aide au développement, l'ancienne « politique de coopération » au temps des relations bilatérales. Aujourd'hui, les pays développés doivent _uvrer en synergie pour éviter les doublons, voire la surenchère. Mais nous devons veiller, dans ce nouveau cadre, à éviter une dilution des aides ou un affaiblissement de nos principes.

Le fossé se creuse chaque année davantage entre les continents, et l'Afrique, sous l'effet d'une tectonique économique, culturelle, sociale et politique, s'éloigne à la dérive. La France, patrie des droits de l'homme, ne peut se résigner à l'afro-pessimisme qui semble prendre corps dans les institutions internationales. Le déclin de ce continent n'est pas inéluctable. Nous devons pratiquer une solidarité internationale active avec l'Afrique dans les instances internationales pour maintenir et, si possible, accroître l'aide au développement qui lui est consentie. Il y va de notre responsabilité morale.

La crise de l'Afrique est profonde et structurelle. Les bailleurs de fonds internationaux se sont portés à son chevet, mais les froids remèdes technocratiques du FMI, de la Banque mondiale et de l'Europe ne sont guère adaptés aux réalités du continent. Comment respecter des impératifs de production, d'investissement, d'exportation, quand trop souvent l'horizon est limité par le nombre de jours de marche, voire de taxi-brousse, pour rejoindre le marché de la capitale ou le port ? Comment passer du troc, encore dominant, à l'import-export ? Il y a là un terrain privilégié pour l'aide au développement.

De même faudrait-il évoquer les infrastructures de transport, les équipements sanitaires et sociaux. Et puis, de quelle utilité seraient ces actions sans un minimum de développement culturel ? Le taux d'analphabétisme de l'Afrique est l'un des plus élevés du monde. Il ne s'agit pas seulement de former des élites capables de faire bonne figure dans les dîners en ville et de discuter d'égal à égal avec les technocrates de Bruxelles, de Washington et de Paris, mais aussi, tout simplement, d'apprendre à lire et à écrire, sans oublier la formation professionnelle.

Enfin l'action en faveur du développement ne peut être que globale. Le développement démocratique ne saurait donc en être absent, et l'on mesure, au gré des perturbations de la vie politique en Afrique, toute son importance. Récemment, j'ai représenté notre assemblée à la réunion de la communauté économique des pays d'Afrique centrale. J'y ai parlé de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, avec l'humilité qu'impose l'expérience de nos vieilles démocraties en la matière. Il serait nécessaire de nouer des liens plus étroits avec ces pays qui nous demandent de les aider pour mettre en place la démocratie.

Pour terminer, je soulignerai l'importance du rôle des organisations non gouvernementales.

Elles connaissent la réalité du travail quotidien. Il est indispensable de savoir les écouter car elles sont le lien essentiel entre ces pays que nous devons aider et nos sociétés de bien-être.

Je remercie Jacques Godfrain d'avoir demandé ce débat, et je vous remercie, Monsieur le ministre, de l'avoir accepté (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Le débat est clos.

M. le Ministre délégué - Je remercie celles et ceux qui se sont exprimés au cours de ce débat, à commencer par Jacques Godfrain, qui en a pris l'initiative.

De nombreuses convergences ont été exprimées : sur le bien-fondé même de la politique de développement et de coopération, sur le fait que nous devons faire mieux et plus, sur le rôle des femmes que Mme Martinez a fort bien souligné, sur la nécessité de favoriser l'éducation à la base, le développement agricole, la protection de l'environnement et des ressources naturelles - les interventions de MM. Herth, Schneider et Micaux notamment comptaient de nombreux éléments auxquels le Gouvernement adhère.

J'ai noté également plusieurs observations convergentes sur le développement souhaitable de la coopération décentralisée - laquelle, tout en préservant la liberté d'initiative des collectivités territoriales, doit bénéficier des expériences de nos postes diplomatiques ; MM. Herth, Vanneste, d'autres encore se sont exprimés de manière très précise à ce sujet. M. de Saint-Sernin a fait, quant à lui, d'utiles remarques sur la nécessité de rendre plus transparente, plus efficace et plus simple notre coopération.

En réponse à MM. Gremetz et Sicre, qui s'inquiètent du volume de notre aide publique au développement, je dois rappeler que celle-ci est passée de quelque 0,6 % du PIB au début des années 1990 à 0,32 % il y a un an et demi. Je veux bien, donc, entendre toutes les critiques et tous les conseils, mais je demande aussi à leurs auteurs de considérer le passé avec lucidité...

M. Maxime Gremetz - Ces chiffres tiennent-ils compte de l'outre-mer ?

M. le Ministre délégué - Ce sont les chiffres de l'OCDE.

M. Maxime Gremetz - Ils incluent donc l'outre-mer !

M. le Ministre délégué - Plus maintenant. En tout état de cause, il en ressort que l'aide a fortement diminué, que l'on comptabilise l'outre-mer ou non.

Le poids de la dette est pour les pays pauvres, nous le savons tous, un handicap considérable. La France est en avance sur ce sujet puisqu'elle a annulé en totalité celle des PMA - les « pays les moins avancés », comme l'on dit pudiquement.

M. Sicre s'est interrogé sur l'opportunité même de ce débat. A six semaines de la réunion du G8 à Evian, elle ne m'apparaît pas contestable, et les événements tragiques du Proche-Orient ne font que la confirmer ; car la nécessaire mobilisation de la communauté internationale pour la reconstruction de l'Irak risque d'entrer en « compétition » avec la tout aussi nécessaire mobilisation en faveur de l'Afrique - que nous défendrons à Evian.

M. Sicre s'est également inquiété du retour possible à un ancien mode de coopération : l'aide budgétaire à travers laquelle la France assurait sans grande garantie d'efficacité, les « fins de mois » de certains pays. Je tiens à le rassurer : l'ensemble des crédits inscrits au Fonds de solidarité prioritaire - qui ne finance que des projets et des programmes concrets, identifiés - et de ceux agréés par l'Agence française de développement s'élevent, pour cette année, à 250 millions d'euros, et l'aide budgétaire ne représente que 33 millions d'euros.

M. Dionis du Séjour a évoqué une question fondamentale, qui mériterait à elle seule un long débat : le cadre même de notre coopération avec le continent africain. La colonisation a en effet délimité des frontières que les Etats africains eux-mêmes, après les indépendances, ont choisi de ne pas remettre en cause, de peur d'ouvrir la boîte de Pandore.

Il y a deux façons de surmonter cette contradiction entre frontières politiques et frontières culturelles ou ethniques. La première est le traitement des problèmes au niveau régional : c'est l'un des principes de fonctionnement du NEPAD. La seconde est la décentralisation, qui donne aux communautés les moyens de se gérer elles-mêmes.

M. Dionis du Séjour M. Schneider et d'autres orateurs ont insisté sur la nécessité de développer l'évaluation permanente de nos actions, ainsi que le partenariat avec les différents acteurs du développement : autres pays, organismes internationaux tels la Banque mondiale, le FMI, le PNUD ou les agences spécialisées de l'ONU, collectivités locales, secteur privé. Ces méthodes se généralisent et c'est une excellente chose.

Je voudrais également répondre sur les priorités du G8 et les positions que la France, qui en assure la présidence, soutiendra à Evian. Elle a, vous le savez, inscrit l'Afrique comme priorité à l'ordre du jour de cette réunion, et le Président de la République a convié à une journée particulière, consacrée à ce sujet, plusieurs chefs d'Etat africains, notamment ceux qui sont à l'origine du NEPAD, afin que le dialogue puisse déboucher concrètement.

La France a également proposé de concentrer les discussions sur quelques thèmes majeurs : la santé - en particulier le sida - l'eau - avec le rapport de Michel Camdessus -, les infrastructures, l'accès des productions agricoles africaines aux marchés internationaux. Je n'y reviens pas.

Mme Martinez s'est interrogée sur notre mobilisation en faveur des femmes via la contribution française au FNVAP. Le renforcement de l'aide au développement, que nous avons programmée sur l'ensemble de la législature, passe notamment par l'accroissement de nos contributions volontaires aux organisations ou fonds internationaux, domaine dans lequel nous accusons un retard.

Le FNVAP, auquel nous contribuons cette année pour 1,2 million d'euros, mérite naturellement davantage. Au total, nos contributions volontaires aux divers fonds représentent, en 2003, 48,8 millions d'euros. Nous devrions les accroître dans plusieurs domaines, afin de nous situer à un rang plus conforme à notre vocation, et j'espère que nous pourrons le faire au cours des prochains exercices.

M. Myard a eu raison d'attirer notre attention sur la nécessité d'aider les pays africains à maîtriser leur démographie, cela notamment par l'alphabétisation des filles, qui se heurte encore, dans certains pays, à la tradition. Nous soutenons des expériences intéressantes dans des pays de culture islamique, grâce par exemple à la coopération triangulaire que nous avons lancée avec nos amis et partenaires tunisiens : à nous le financement et les programmes, à eux les enseignantes ou éducatrices qui, pour des raisons culturelles et religieuses, seront écoutées. Il faut également _uvrer à l'information des femmes, à la santé, etc.

Par ailleurs, un certain nombre de pays vont être gravement affectés par le sida. Les démographes prévoient même une baisse de la population là où il atteint des taux de prévalence de 50, 60 voire 70 %. Une génération entière sera ainsi décimée par la maladie.

M. Micaux a parlé de l'accueil des étudiants, sujet qui mériterait un vrai et plus long débat. Nous sommes en train de remonter la pente, après une baisse regrettable du nombre des étudiants accueillis, qu'ils soient ou non boursiers. Nous avons désormais redépassé nos voisins et amis allemands, talonnons les Anglais, qui restent en tête en Europe, et nous entendons bien poursuivre dans cette voie malgré les difficultés : comment équilibrer les différentes provenances des étudiants ? Comment leur assurer un logement convenable ?

M. Micaux a également, dans un tout autre domaine, attiré notre attention sur la nécessité de protéger les forêts africaines. L'un des grands projets évoqués à Johannesburg, et qui sera sans doute l'un des premiers à être en _uvre dans le cadre du NEPAD, est précisément un projet d'aménagement et de préservation des massifs forestiers du Congo, deuxième « poumon vert » de la planète après l'Amazonie. Sans être encore en danger, il est déjà touché, mais il y a une prise de conscience de la nécessité de stopper ce processus. Avec les Etats-Unis et la Banque mondiale, la France joue un rôle actif dans ce programme international qui associe les pays riverains du Congo.

Je n'ai sans doute pas répondu à toutes les questions que vous avez posées, et vous prie de m'en excuser. Pour « boucler la boucle », je reviendrai au sujet qu'a traité, en guise d'introduction au débat, Jacques Godfrain : le co-développement et les techniques susceptibles de favoriser le développement d'un tissu de petites entreprises locales. Je retiens notamment l'idée d'un livret ou d'un plan d'épargne-développement, qui pourrait être mis en _uvre en prenant appui sur des instruments existants - comme le livret A ou le CODEVI. Cela suppose évidemment des négociations avec le réseau bancaire et la mise au point d'un système de garanties, mais c'est une piste intéressante, tant économiquement que socialement et humainement.

La tâche qui attend la France et ses partenaires est urgente et immense, mais elle n'est pas hors de portée, si la mobilisation internationale se poursuit. C'est pourquoi notre débat d'aujourd'hui revêt une valeur pédagogique en direction des médias et de l'opinion publique. Il s'agit de faire comprendre à chacun que nous sommes directement concernés par ce qui se passe sur le continent africain.

Comme le veut, semble-t-il, la logique médiatique, ce sont surtout les difficultés qui sont mises en avant, mais il y a aussi des éléments positifs. Ne sombrons pas dans l'afro-pessimisme, car le découragement est le plus redoutable des ennemis !

Je peux témoigner qu'il y a beaucoup de pays africains où les choses vont mieux, où le taux de croissance atteint 4 à 6 %, où les opposants ne sont pas arrêtés, où la liberté de la presse est réelle, où la lutte contre la corruption est engagée. Ne nous laissons donc pas décourager par les images de ce qui ne va pas.

Je vous remercie à nouveau d'avoir consacré une matinée à ce débat, qui nous permettra d'augmenter nos efforts pour le développement de l'Afrique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Prochaine séance cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 30.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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