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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2002-2003 - 90ème jour de séance, 217ème séance

SÉANCE DU VENDREDI 23 MAI 2003

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

Sommaire

ADAPTATION DE LA JUSTICE
AUX ÉVOLUTIONS DE LA CRIMINALITÉ (suite) 2

APRÈS L'ART. 61 2

ART. 62 2

APRÈS L'ART. 62 2

ART. 63 2

ART. 64 2

APRÈS L'ART. 64 3

APRÈS L'ART. 65 3

ART. 66 3

APRÈS L'ART. 66 4

ART. 67 4

ART. 68 4

APRÈS L'ART. 68 5

APRÈS L'ART. 69 10

ART. 70 11

ART. 71 12

APRÈS L'ART. 71 12

ART. 73 12

AVANT L'ART. 74 12

APRÈS L'ART. 75 15

ART. 77 15

APRÈS L'ART. 77 15

APRÈS L'ART. 81 15

APRÈS L'ART. 87 16

EXPLICATIONS DE VOTE 16

ORDRE DU JOUR DU MARDI 27 MAI 2003 20

La séance est ouverte à neuf heures trente.

ADAPTATION DE LA JUSTICE AUX ÉVOLUTIONS DE LA CRIMINALITÉ (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

APRÈS L'ART. 61

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois - En réponse à une critique de la Cour de cassation, l'amendement 545 tend à préciser les modalités du désistement de l'appel.

M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice - Avis favorable.

L'amendement 545, mis aux voix, est adopté.

ART. 62

M. le Rapporteur - L'amendement 227 est rédactionnel.

L'amendement 227, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 228 est de coordination.

L'amendement 228, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 62 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 62

M. le Rapporteur - L'amendement 229 est de coordination.

L'amendement 229, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Afin d'alléger la charge de travail des cours d'appel, l'amendement 230 tend à faire examiner l'appel des contraventions de cinquième classe par le seul président de la chambre des appels correctionnels.

L'amendement 230, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 63

M. le Rapporteur - L'amendement 231 est très important : il étend l'utilisation de la vidéoconférence pour la prolongation de la détention provisoire et l'autorise pour le jugement d'un prévenu par le tribunal de police.

L'amendement 231, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 63 est ainsi rédigé.

ART. 64

M. le Rapporteur - A l'instigation des praticiens de cours d'assises, l'amendement 232 rectifié tend à simplifier les modalités de convocation des jurés.

L'amendement 232 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 233 vise à moderniser la procédure de sanction des jurés défaillants. Il maintient toutefois l'incapacité pour une personne condamnée pour n'avoir pas déféré à la convocation d'exercer à nouveau les fonctions de juré.

L'amendement 233, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 64 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 64

M. le Rapporteur - Il nous a été signalé lors des auditions que dans l'ignorance de la liste des témoins cités à comparaître, le président de la cour d'assises ne prévoyait pas toujours une durée suffisante pour la session. Nous ne pouvons évidemment pas limiter la possibilité de citer des témoins. Nous demandons par conséquent, par l'amendement 234, que leur liste soit communiquée dès que possible à l'accusé et au ministère public.

L'amendement 234, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 65, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 65

M. le Rapporteur - L'amendement 235 autorise les officiers de police judiciaire et les magistrats qui ont participé à l'enquête ou à l'instruction d'une affaire à s'aider de notes lors de leur audition par la cour d'assises. Il est assez désagréable pour eux d'être mis en porte-à-faux sur des détails matériels dont ils peuvent légitimement ne plus se souvenir plusieurs mois après.

L'amendement 235, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 236 consacre une jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation relative à l'interrogatoire de l'accusé.

L'amendement 236, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 66

M. André Vallini - L'amendement 335 vise à supprimer le II de cet article. Il n'est pas opportun d'encourager les jugements en cour d'assises en l'absence de l'accusé, surtout quand les motifs de cette absence ne lui sont pas imputables.

M. le Rapporteur - Défavorable. L'article 66 remplace la procédure archaïque de la contumace.

L'amendement 335, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 237 est rédactionnel.

L'amendement 237, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 238 rectifié est de précision.

L'amendement 238 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 239 est de coordination.

L'amendement 239, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 240 et 241 sont de précision.

Les amendements 240 et 241, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 242 est rédactionnel.

L'amendement 242, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 243 est de coordination avec la suppression de la contumace.

L'amendement 243, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 66 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 66

M. Georges Fenech - L'amendement 244 vise à alléger la procédure d'appel devant la cour d'assises. Lorsque l'appel ne vise qu'un délit connexe et qu'il n'y a pas d'appel principal, le passage devant une cour d'assises d'appel est trop lourd. Je propose donc que ce soit la chambre correctionnelle de la cour d'appel qui statue.

L'amendement 244, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 67

M. le Rapporteur - L'amendement 245 précise que le maintien d'une personne en détention n'est prévu dans le cadre de la procédure de réexamen d'une condamnation pénale que si la commission n'a pas prononcé la suspension de l'exécution de la condamnation.

L'amendement 245, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 246 apporte des précisions quant aux formalités à observer pour le dépôt des demandes de mise en liberté dans le cadre de la procédure de réexamen des condamnations pénales.

L'amendement 246, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 67 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 68

M. le Rapporteur - L'amendement 546 est de coordination.

L'amendement 546, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Rudy Salles - L'amendement 511 tend à renforcer la protection de la victime.

L'amendement 511, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 247 tend à renforcer le droit des victimes : la juridiction nationale de la libération conditionnelle doit prendre en considération leurs intérêts et elles doivent pouvoir faire des observations écrites sur la mesure envisagée, sauf si leur personnalité justifie qu'elles ne soient pas informées - notamment dans certaines situations particulièrement douloureuses.

M. le Secrétaire d'Etat - Nous sommes d'accord avec la première partie de l'amendement, mais nous interrogeons sur l'utilité d'aviser la victime des audiences, même sous la réserve envisagée. Cette règle n'est prévue ni devant le juge d'application des peines, ni devant la juridiction régionale de la libération conditionnelle. Imaginez un condamné pour viol et meurtre d'un mineur qui, ayant vu sa libération refusée par la juridiction régionale, fait appel devant la juridiction nationale sans aucune chance d'obtenir un jugement plus favorable. Faut-il, des années après, en aviser les parents de la victime ? Nous ne le pensons pas. Cette question pourrait être approfondie au cours de la navette. Pour l'heure, dans l'immédiat, nous nous en remettons à la sagesse de l'Assemblée.

M. le Rapporteur - Je comprends la position du Gouvernement. Cet amendement a un double objet : poser comme principe que la juridiction nationale prend en considération l'intérêt des victimes et garantir l'information de celles-ci. Autant il est important d'aménager les peines, autant il est juste d'informer la victime et de lui donner la possibilité de donner par écrit ses observations. C'est une avancée.

Mais le président de la juridiction peut décider de ne pas informer la victime dans certains cas : il y a donc un garde-fou.

J'admets que ce dispositif pourrait être plus détaillé. Je préfère que nous adoptions cet amendement, de façon que le Sénat l'examine. Nous pouvons remettre l'ouvrage sur le métier en deuxième lecture.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois - Très bien !

L'amendement 247, mis aux voix, est adopté.

L'article 68 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 68

M. le Rapporteur - La commission a adopté une série d'amendements visant à améliorer l'exécution et l'aménagement des peines.

L'amendement 547 est le premier d'entre eux. Il s'agit d'ajouter au code de procédure pénale un article 707 A dans lequel seraient posés trois principes.

Premièrement, les décisions de justice doivent être mises en exécution de manière effective et rapide, le traitement de la délinquance ne s'arrêtant pas au prononcé de la peine.

Deuxièmement, les peines privatives de liberté ont pour objectifs de prévenir la récidive, de faire respecter l'intérêt de la société et de préparer l'insertion ou la réinsertion du condamné, par son retour à l'emploi. Il faut rappeler que telle est la volonté du législateur.

Troisièmement, en application du principe de conséquence, les modalités de la peine peuvent évoluer au cours de l'exécution. Il faut éviter les « sorties sèches » sans aucun suivi judiciaire : c'est le système le plus détestable si nous voulons empêcher la récidive.

Il est important que le Parlement indique la direction à suivre.

M. Guy Geoffroy - C'est fondamental !

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable à l'amendement 547, mais je veux m'exprimer aussi sur ceux qui vont venir en discussion.

Comme l'a dit fort justement M. Warsmann, ce n'est pas au prononcé de la peine qu'on règle le problème de la délinquance. Ses amendements vont donc dans le bon sens.

L'exécution des peines pose aujourd'hui un problème. Le recours à des peines alternatives doit être encouragé et les peines privatives de liberté doivent pouvoir être aménagées en cours d'exécution. Nous partageons donc les objectifs de la commission. Cependant, il paraît nécessaire au Gouvernement d'améliorer certains amendements. Il m'arrivera donc de m'en remettre à votre sagesse, car je souhaite sur certains points un travail complémentaire, voire supplémentaire.

M. Jean-Paul Garraud - Je soutiens l'ensemble des amendements de la commission. Il s'agit de mesures concrètes et pragmatiques. La justice, mais aussi nos concitoyens ont beaucoup souffert de manque d'effectivité des décisions de justice. Les mesures proposées vont dans le bon sens : l'individualisation des peines, qui est un des buts de notre législation.

M. Guy Geoffroy - Très bien !

M. André Vallini - Ce que propose le rapporteur va dans le bon sens, il serait idiot de ne pas le reconnaître. Mais M. Warsmann joue les pompiers de service devant les effets de la politique répressive et sécuritaire du Gouvernement. Il y a aujourd'hui 60 000 détenus dans les prisons françaises, qui sont au bord de l'explosion. Nos prisons, déjà vétustes, insalubres et inhumaines, accueillent mille détenus supplémentaires par mois. M. Bédier fait ce qu'il peut pour accélérer la construction des nouvelles prisons, mais cela prendra tout de même du temps.

J'avais dit en juillet à MM. Sarkozy et Perben, quand nous examinions leurs projets de loi, qu'ils allaient remplir les prisons avant d'avoir eu le temps d'en construire de nouvelles. C'est ce qui se passe. M. Warsmann souhaite donc encourager la libération conditionnelle et les peines alternatives. C'est en effet ce qu'il faut faire : nous proposions de telles mesures dans le projet de loi pénitentiaire déposé en février 2002, que vous n'avez pas voulu reprendre.

Vous votez des lois particulièrement répressives et M. Warsmann s'efforce de rendre moins dramatique la situation des prisons.

L'embarras de M. Bédier est donc significatif. M. Warsmann ne suit pas la ligne sécuritaire imposée au Gouvernement par M. Sarkozy. Je suis déçu que le Gouvernement ne soutienne pas les propositions du rapporteur, inspirées de ce que nous avons observé au Canada.

Je regrette que nous devions légiférer dans l'urgence sur ces problèmes, mais le groupe socialiste votera ces amendements qui vont dans le bon sens.

M. le Rapporteur - Il s'agit d'un débat important, quelle que soit notre sensibilité politique. Il est nouveau que le Parlement s'attaque au problème de l'exécution des peines. Je remercie M. Vallini de soutenir les amendements de la commission : plus nous serons unis, plus nous serons forts.

Je conçois qu'une partie du dispositif proposé nécessite un travail supplémentaire. Nous aurons le temps de le faire avant la deuxième lecture.

M. Jean-Pierre Blazy - Le rapporteur a fait un travail intéressant.

Il propose de redonner crédit aux peines alternatives et nous partageons son avis. Mais aurez-vous les moyens d'une telle politique ? Des réformes, la justice en a connu beaucoup et c'est une critique qui a été faite à plusieurs gouvernements. Même si nous avons augmenté les crédits de la justice, aurez-vous vraiment les moyens de mettre en _uvre ces mesures, compte tenu de l'indigence des services pénitentiaires et de la protection judiciaire de la jeunesse ?

M. le Rapporteur - Le problème est d'abord législatif et ensuite administratif. J'aurai moi-même l'occasion d'interroger le Gouvernement sur ses intentions.

L'amendement 547, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 553 de la commission vise à revoir le dispositif des « jours-amendes », par lequel le tribunal peut suspendre une épée de Damoclès au-dessus du condamné : si celui-ci n'acquitte pas ses amendes, il passera en prison un nombre de jours proportionnel à la somme réclamée. Actuellement, le nombre de jours passés en prison représente la moitié des « jours-amendes » non réglés.

Cet amendement vise à simplifier le dispositif en fixant une durée de détention égale au nombre de « jours-amendes » impayés. On mettra fin de la sorte aux dérapages constatés dans certaines juridictions, où les magistrats ont tendance à accroître exagérément le nombre de « jours-amendes ». L'objectif de cette peine n'est pas de priver le condamné de liberté, mais de lui imposer une sanction financière proportionnelle à ses revenus.

L'amendement, en second lieu, pose le principe que le paiement de l'amende doit toujours être recherché, de préférence à l'incarcération.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 553, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 249, 2e rectification, tend à permettre au fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions de prélever des sommes sur l'argent gagné en prison par le condamné pour se rembourser de l'indemnisation qu'il a accordée à la victime.

L'amendement 249, 2e rectification, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Actuellement, pour pouvoir évaluer la situation financière des personnes condamnées, le fonds de garantie des victimes doit engager des démarches administratives longues et complexes. L'amendement 248 rectifié vise à lui donner un accès direct aux informations détenues par l'administration fiscale, ce qui lui simplifiera considérablement la tâche.

L'amendement 248 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 548 est de coordination.

L'amendement 548, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 549 porte le montant maximum du point-amende de 300 à 1000 €, afin que la ponction sur les très hauts revenus puisse être significative - je pense notamment au cas des infractions au code de la route.

L'amendement 549, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 550 vise à simplifier la procédure relative au travail d'intérêt général. Actuellement la loi prévoit un délai de dix-huit mois pour faire exécuter ce travail, d'une durée maximale de sept semaines ! Et, en pratique, il s'avère difficile de respecter ce délai, pourtant très long, du fait de l'engorgement des juridictions...

L'amendement vise à ramener à douze mois le délai d'exécution de la peine, étant précisé que cette disposition n'entrera pas en vigueur dès la promulgation de la loi, mais ultérieurement, pour laisser aux juridictions le temps de s'adapter.

Par ailleurs, l'amendement donne au tribunal la possibilité de fixer immédiatement la peine encourue en cas de non-exécution du travail d'intérêt général, toujours dans le but de rendre sa crédibilité à cette sanction.

Enfin, nous proposons de réduire de 240 à 210 heures la durée maximale du travail d'intérêt général, ce qui devrait en faciliter l'application pratique.

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement est important. Le Gouvernement est tout à fait favorable à une relance des travaux d'intérêt général. Cela nécessitera une mobilisation des juridictions et aussi des collectivités territoriales susceptibles de proposer ces travaux.

Je voudrais revenir sur les critiques concernant la surpopulation carcérale. Il est insupportable d'entendre ceux qui se sont abstenus de construire des prisons nous reprocher aujourd'hui cette situation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Nous recherchons des solutions respectant la dignité humaine et l'exemple du Canada est intéressant, je me suis d'ailleurs moi-même rendu dans ce pays. Mais ceux qui, aujourd'hui, nous font la morale feraient mieux de tourner leur langue sept fois dans leur bouche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

L'amendement 550, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 556 concerne le sursis avec mise à l'épreuve - celle-ci pourrait prendre la forme d'une indemnisation de la victime, d'un traitement contre l'alcoolisme, etc. Cette alternative est une solution intelligente visant à éviter la récidive. Mais, là encore, nous nous heurtons à des problèmes de délais d'application : les procédures d'exécution des jugements sont si longues que la mise à l'épreuve ne débute que six, huit ou douze mois après la condamnation, ce qui est un encouragement à la récidive !

Pour remédier à cette situation, l'amendement propose deux mesures de simplification.

D'une part, il prévoit que le tribunal peut notifier dès l'audience les obligations à respecter pendant la mise à l'épreuve, sans passage obligatoire devant le juge d'application des peines. Bien entendu, si celui-ci souhaite rencontrer le condamné, il le pourra, mais ce ne sera plus systématique.

D'autre part, l'amendement réduit de dix-huit à douze mois la durée minimale du suivi : dans certains cas, en effet, ce délai n'est pas nécessaire, par exemple quand la condamné indemnise rapidement sa victime.

L'amendement 556, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 551 est de coordination.

L'amendement 551, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 552 rectifié tend à transférer au juge d'application des peines la possibilité de convertir une peine d'emprisonnement de moins de six mois en travail d'intérêt général ou en jours-amende. Mieux vaut une sanction immédiatement applicable qu'une peine théorique.

L'amendement 552 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 558 permet au juge de l'application des peines, lorsque le reclassement du condamné paraît acquis, de prononcer lui-même, avec l'accord du parquet, la dispense de peine à la suite d'un ajournement avec mise à l'épreuve, et ce au moins trente jours avant l'audience de renvoi. Tous les magistrats s'accordent sur l'intérêt de l'ajournement avec mise à l'épreuve qui, pour le condamné, représente une épée de Damoclès, puisqu'il sait seulement qu'il a des chances d'être dispensé de peine s'il respecte ses obligations, sans savoir quelle serait cette peine. Le dispositif est malheureusement peu développé en raison de sa lourdeur, avec deux audiences. Cet amendement permettrait de lever cette difficulté.

M. André Vallini - Un mot tout d'abord à l'intention de M. Bédier, dont le ton de la réponse tout à l'heure m'a surpris. Il n'a visiblement pas compris que j'exprimais de la compassion pour lui. Son programme de construction de prisons, pour important qu'il soit, ne sera jamais assez rapide, vu le nombre sans cesse croissant d'incarcérations, fruit de la politique de son collègue de l'intérieur. C'est une loi quasi naturelle que toute nouvelle prison est aussitôt saturée ! Pour ce qui est des attaques qu'il a portées contre le gouvernement précédent, je me permets de lui rappeler que celui-ci a, dès octobre 2000, lancé un programme de rénovation des prisons pour un montant de 1,5 million d'euros.

J'en viens à notre sous-amendement 697. Il ne paraît pas opportun de dessaisir la juridiction de jugement du prononcé des modifications de la condamnation, notamment des dispenses de peine. Le juge d'application des peines doit avoir pouvoir de proposition, non de décision, en ce domaine.

M. le Rapporteur - Si ce sous-amendement était adopté, le dispositif actuel ne serait nullement allégé et ce serait même le contraire. Ce que nous cherchons à éviter, ce sont de secondes comparutions inutiles quand les condamnés ont rempli leurs obligations, et si le procureur en est d'accord.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable au sous-amendement et favorable à l'amendement.

Monsieur Vallini, je vous remercie de votre compassion, vertu chrétienne qui me va droit au c_ur et vous honore. Mais permettez-moi de vous faire une confession : je cherche encore, désespérément, le milliard et demi d'euros promis par M. Jospin, qui m'eût assurément facilité la tâche...

Permettez-moi enfin de dire combien j'ai été choqué qu'une Garde des Sceaux ait autant abusé la représentation nationale en faisant voter une loi qui prévoyait l'encellulement individuel des détenus, tout en signant par ailleurs, dans le même temps, des programmes de construction comportant des cellules doubles et triples. Une telle duplicité est indigne dans une démocratie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. André Vallini - Je comprends que M. Bédier, se trouvant dans une situation ingérable, puisse perdre son calme. Mais ses attaques à l'encontre de Mme Guigou ne sont pas acceptables. L'encellulement individuel avait en effet été programmé à un certain horizon, ce qui n'excluait nullement qu'entre-temps puissent être construites des prisons comportant encore des cellules doubles ou triples. Qu'il n'oublie pas non plus que c'est Mme Guigou qui a fait voter le cloisonnement des toilettes dans chaque cellule, ce qui constitue un progrès considérable dans la vie quotidienne des détenus.

Le sous-amendement 697, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 558, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Toujours dans la même logique pragmatique visant à une exécution effective et rapide des peines prononcées, l'amendement 554 permet au juge d'application des peines de substituer à un travail d'intérêt général une peine d'amende ou de jours-amende.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 554, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 557 confie au juge de l'application des peines le contentieux et la révocation éventuelle du délai d'épreuve, à l'issue d'un débat contradictoire, avec une possibilité d'appel devant la chambre des appels correctionnels. Il autorise par ailleurs l'organisation de ce débat au-delà de l'expiration du délai d'épreuve, si des manquements ont été constatés durant ce délai -ce qui aujourd'hui n'est pas possible.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 557, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 555 donne la possibilité au juge d'application des peines de convertir un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général en une peine de jours-amende. C'est toujours l'idée de faire peser sur le condamné une épée de Damoclès et de respecter la gradation dans l'échelle des peines.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 555, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 559 confie au juge de l'application des peines le contentieux du non-respect des règles de semi-liberté ou de placement sous surveillance électronique prononcé ab initio. Même si beaucoup de questions matérielles restent encore à régler s'agissant du bracelet électronique, il importe de prévoir dès maintenant les modalités de cette condamnation et de son contentieux. A cet égard, l'amendement crée dans le code pénal une sous-section afin de permettre à la juridiction de jugement de prononcer cette condamnation ab initio, en s'inspirant des dispositions existantes pour la semi-liberté.

L'amendement 559, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 560, qui procède à une réécriture de différentes dispositions qui figuraient pour certaines dans la partie réglementaire du code de procédure pénale, a pour but de bien préciser les attributions du juge d'application des peines ainsi que de régler certaines questions pratiques, notamment en matière de compétence géographique, par exemple lorsque la personne réside hors de France.

L'amendement 560, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 561 rectifié transpose dans la partie législative du code l'article D. 49-1, relatif à la procédure d'aménagement des peines prononcées à l'égard de condamnés libres.

Actuellement en effet, il peut se passer deux ans avant l'exécution d'une peine de six ou huit mois fermes, et celle-ci se traduit quasi automatiquement par une incarcération en maison d'arrêt. C'est absurde au regard de la sécurité de nos concitoyens : on laisse la personne en liberté pendant deux ans, puis on la met entre quatre murs ! De plus, le fait que la peine reste inexécutée pendant un temps très long donne un sentiment d'impunité. C'est également absurde en termes d'érosion de peine puisque, chaque 14 juillet, une peine de prison ferme non exécutée est réduite de deux mois. Enfin, il est absurde de venir déstabiliser par une incarcération, deux ans après le prononcé de la peine, une personne qui a pu pendant ce délai reprendre une vie normale et trouver un emploi.

Notre premier objectif est de lutter contre les inexécutions de peine. Dans ce but, nous proposons que, dans les trente jours suivant le prononcé par un tribunal d'une peine de moins d'un an, le condamné soit convoqué devant le juge d'application des peines. Précisons que la date d'entrée en vigueur de cette disposition devra être postérieure à celle de la loi.

Ce passage devant le juge d'application des peines sera destiné à définir les modalités d'exécution. Les deux premiers alinéas de l'article 712-6 que nous proposons d'insérer sont ainsi rédigés : « Toute peine inférieure ou égale à un an d'emprisonnement ou pour laquelle la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à un an, concernant une personne laissée libre à l'issue de son jugement, doit s'exécuter suivant des modalités permettant d'assurer la réinsertion du condamné et la prévention de la récidive.

« Sauf en cas de trouble manifeste à l'ordre public, d'un risque établi de danger pour les personnes ou les biens, ou si le condamné ne satisfait pas aux exigences imposées par le juge de l'application des peines conformément à la loi, l'exécution des peines visées au premier alinéa doit être accomplie de manière individualisée, notamment par l'octroi du bénéfice de la semi-liberté, du placement à l'extérieur ou du placement sous surveillance électronique. »

L'amendement laisse au procureur de la République, en cas d'urgence motivée et notamment pour des raisons d'ordre public, la possibilité de mettre la peine à exécution en établissement pénitentiaire.

Nous voulons donc tout à la fois assurer une exécution rapide de la sanction et permettre une réinsertion du condamné. Lorsque celui-ci, lors du premier rendez-vous avec le juge d'application des peines, ne remplira pas les conditions de la semi-liberté ou de la surveillance électronique, un deuxième rendez-vous lui sera accordé deux mois après.

M. André Vallini - Il convient de ne pas donner au procureur de la République des pouvoirs qui relèvent du juge du siège. C'est pourquoi notre sous-amendement 698 corrigé tend à substituer aux mots « mettre la peine à exécution en établissement pénitentiaire » les mots « faire procéder à l'incarcération du condamné jusqu'à ce que la juridiction saisie en la forme des référés statue, avis pris du juge de l'application des peines ».

M. le Rapporteur - Dans le système actuel, l'exécution des peines relève déjà du parquet. Par ailleurs, l'article 712-13 que nous proposons d'insérer dispose que, lorsque, pour des motifs d'urgence, le ministère public met la peine à exécution en établissement pénitentiaire, d'une part, il en informe immédiatement le juge d'application des peines, d'autre part, le condamné, lors de son incarcération, est informé qu'il peut demander une mesure d'individualisation au JAP. Autrement dit, nous n'avons pas utilisé le mot « référés » parce qu'il peut y avoir besoin de faire une enquête, mais nous poursuivons le même objectif que M. Vallini. Avis défavorable donc à ce sous-amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable au sous-amendement et favorable à l'amendement.

Le sous-amendement 698 corrigé est retiré.

L'amendement 561 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 69, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 69

M. Thierry Mariani - Les amendements 283 et 406 sont défendus.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

Les amendements 283 et 406 sont retirés.

M. Gérard Léonard - Mon amendement 362 répond à une attente des magistrats et enquêteurs en matière d'exécution des peines.

Actuellement, lorsqu'une personne est arrêtée en vertu d'un extrait de jugement ou d'arrêt, la pratique, se fondant sur l'article 307 du décret du 20 mai 1903 portant règlement sur l'organisation et le service de la gendarmerie, admet qu'il est possible de la retenir pendant un délai de 24 heures. Or, cette disposition de nature réglementaire ne concerne que la gendarmerie. Par ailleurs, cette rétention ne s'accompagne actuellement d'aucun droit pour la personne condamnée.

Cet amendement vise à inscrire dans le code de procédure pénale la possibilité de retenir une personne faisant l'objet d'un extrait de jugement ou d'arrêt pendant un délai de 24 heures au plus et accorde à celle-ci les mêmes droits que ceux d'une personne gardée à vue.

Il évite ainsi aux services de la police nationale d'être obligés de présenter sans délai devant le procureur de la République la personne dont on a découvert, à l'occasion d'un contrôle d'identité, qu'elle devait exécuter une peine privative de liberté en raison d'une condamnation prononcée contre elle, ce qui constitue actuellement une gêne importante pour les services d'enquête.

M. le Rapporteur - Cet amendement est cohérent avec d'autres dispositions adoptées. Avis favorable.

L'amendement 362, accepté par le Gouvernement mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Notre amendement 562 tend à confier à la juridiction régionale de la libération conditionnelle, saisie par le juge de l'application des peines, la possibilité de mettre fin ou de diminuer la période de sûreté d'un condamné - sans toucher en rien aux critères.

L'amendement 562, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Actuellement, les personnes détenues peuvent bénéficier de deux types de réduction de peine : les réductions ordinaires et les réductions supplémentaires.

Notre amendement 686 rectifié tend en premier lieu à simplifier le calcul des réductions ordinaires, en instaurant un crédit de peine attribué au prévenu au moment de son incarcération, qui sera diminué par le juge d'application des peines en cas de mauvais comportement du condamné. L'avantage est également d'ordre pédagogique.

De plus, il vous est proposé de fixer la durée à trois mois pour la première année - comme actuellement - mais à deux mois - au lieu de trois - par année supplémentaire ; et inversement, d'augmenter d'un mois la réduction de peine accordée à titre de réduction supplémentaire, celle-ci étant liée aux efforts faits par le détenu pour se réinsérer.

Contrairement à aujourd'hui, la réduction de peine supplémentaire sera possible dès la première année, la durée maximale en étant portée d'un à deux mois par an pour les récidivistes, de deux à trois mois pour les autres.

Le dispositif sera ainsi simplifié et les efforts de réinsertion seront récompensés, ce qui devrait réduire les cas de récidive. D'autre part, pour les détenus qui se comportent bien, ce dispositif ne sera pas moins favorable que le dispositif actuel. Je ne prétends pas pour autant que demain tout ira parfaitement dans cette matière complexe, mais nous aurons au moins fait un pas dans le bon sens.

M. le Secrétaire d'Etat - Sur le principe, cet amendement est excellent, mais il s'agit en effet d'une matière complexe et je m'interroge sur une éventuelle érosion des peines qui amènerait les tribunaux à se montrer plus sévères. Je souhaiterais donc que nous mettions à profit la navette pour répondre à cette interrogation, m'en remettant aujourd'hui, pour le vote, à la sagesse de l'Assemblée.

M. le Rapporteur - Je suis d'autant plus favorable à cette réflexion que nous devrons aussi étudier des dispositions transitoires. Approuvons donc le principe, mais en sachant qu'il conviendra de poursuivre le travail d'ici à la deuxième lecture.

L'amendement 686 rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 70

M. le Rapporteur - L'amendement 563 est de coordination.

L'amendement 563, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article est ainsi supprimé.

ART. 71

L'amendement 446 est retiré.

L'article 71, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 71

M. Rudy Salles - L'amendement 252 vise à permettre de placer dans des centres éducatifs fermés les mineurs faisant l'objet d'une mesure de libération conditionnelle.

M. le Rapporteur - La commission a adopté l'amendement.

L'amendement 252, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 72, mis aux voix, est adopté.

ART. 73

M. André Vallini - L'amendement 336 tend à supprimer la contrainte par corps.

M. le Rapporteur - Le projet, sur ce point, améliore déjà notablement le droit en vigueur. Rejet.

M. le Secrétaire d'Etat - Même position.

L'amendement 336, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 703 est de coordination.

L'amendement 703, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Quant à l'amendement 565, il est rédactionnel.

L'amendement 565, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

L'article 73 modifié, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ART. 74

M. le Rapporteur - Si vous l'autorisez, Monsieur le Président, je souhaiterais pour la clarté du débat que M. Mariani présente ses amendements 253 à 255 avant que je ne fasse de même du 683 rectifié de la commission.

M. le Président - Soit !

M. Thierry Mariani - Ces trois amendements, adoptés par la commission, visent à supprimer les 1°, 2° et 3° de l'article 769-2 du code de procédure pénale, aux termes duquel presque toutes les fiches relatives aux procédures judiciaires contre un mineur sont retirées du casier judiciaire lorsque l'intéressé atteint l'âge de la majorité.

En effet, le 1° retire les fiches relatives aux mesures prononcées en vertu des articles de l'ordonnance du 2 février 1945 relatifs à l'assistance éducative, et ce « en tout cas lorsque le mineur atteint l'âge de la majorité ». Le 2° retire à la même date les fiches relatives à des condamnations à des peines d'amende ainsi qu'à des peines d'emprisonnement n'excédant pas deux mois et le 3° les fiches relatives aux autres condamnations pénales prononcées par les tribunaux pour enfants, assorties du bénéfice du sursis avec ou sans mise à l'épreuve ou avec obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, ce à l'expiration du délai d'épreuve.

A 18 ans et un jour donc, ne sont plus mentionnées dans le casier judiciaire d'un ancien mineur délinquant que les condamnations ayant donné lieu à des peines d'emprisonnement de plus de deux mois.

Cette aberration juridique, introduite par la loi d'amnistie du 4 août 1981, a pris un caractère permanent après celle du 20 juillet 1988. Dès l'été 2002, j'ai déposé un amendement visant à abroger purement et simplement l'article 769-2 du code de procédure pénale. Il n'a pas été retenu par la commission mixte paritaire et j'ai donc interpellé à nouveau le Garde des Sceaux sur le sujet le 6 novembre dernier.

En effet, cette aberration n'est pas sans conséquence : puisqu'il s'agit d'une amnistie, l'article 133-11 du code pénal s'applique et les magistrats et les policiers qui connaissent le mineur depuis plusieurs années ne peuvent pas faire état de ses antécédents. Le mineur multirécidiviste est donc considéré à 18 ans et un jour comme un primo-délinquant. Le préjudice est grave pour les services appelés à lutter contre la délinquance. Effacer un casier revient en quelque sorte à nier leur travail et leur efficacité. Est-ce là leur apporter le soutien du Parlement qui, dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice, a fait de la lutte contre la délinquance des mineurs une priorité ?

De plus, cet effacement a engendré chez les jeunes délinquants un sentiment d'impunité. Pourquoi s'inquiéter ? A 18 ans, un délinquant professionnel ne sera condamné qu'à des peines alternatives à la prison, la justice n'ayant pas le droit de savoir qu'elles ont été sans effet dans le passé.

Enfin, et c'est peut-être le plus grave, comment expliquer aux victimes cette amnistie automatique ?

En éliminant cette aberration juridique, nous ne laisserons pas les mineurs qui ont commis une fois une infraction « marqués » pour la vie. En effet, nous retournerons au droit antérieur, c'est-à-dire à l'article 770 du code de procédure pénale qui, en son alinéa premier, autorise le tribunal pour enfants, lorsque la rééducation apparaît acquise à l'expiration d'un délai de trois ans, à supprimer du casier judiciaire la fiche concernant une décision.

Je précise que je soutiens l'amendement 683 modifié du rapporteur, qui vise à retirer systématiquement du casier les fiches relatives aux mesures dites d'assistance éducative, cinq ans après le prononcé de cette mesure et à condition que la personne n'ait pas commis d'autres infractions ayant entraîné une sanction judiciaire.

M. le Rapporteur - J'ai souhaité que M. Mariani expose d'abord ses trois amendements, car le 683 rectifié a été rédigé en en tenant compte.

La loi d'amnistie puis la loi ont posé le principe d'un effacement automatique des condamnations à l'âge de 18 ans. Les magistrats se trouvent ainsi privés de toute information sur les condamnations antérieures d'un prévenu : c'est ainsi que j'ai vu un jour en comparution immédiate une personne prise en flagrant délit de vol. Interrogée, elle a admis avoir déjà été condamnée à un mois de prison ferme. Le substitut m'a montré l'extrait de casier judiciaire : il portait la mention « Néant » ! En l'occurrence, cela s'expliquait par le retard pris par la juridiction première, la transmission des pièces prenant toujours au moins sept mois. La justice est ainsi rendue aveugle et, ne sachant s'il a affaire à un primo-délinquant ou à un récidiviste, le juge ne peut rendre un jugement équilibré. Le problème est exactement le même s'agissant des mineurs.

Certes, on ne comprendrait pas qu'à trente ou quarante ans, quelqu'un qui aurait rompu avec la délinquance continue de traîner le poids d'une sanction éducative, mais c'est bien pourquoi je vous propose un dispositif équilibré : il s'agirait d'approuver d'abord les amendements de M. Mariani, supprimant l'effacement automatique à la majorité, puis l'amendement de la commission, qui prévoit un effacement au bout de cinq années, en l'absence de récidive. La justice ne sera plus aveugle, mais nous donnerons sa chance à ceux qui sont revenus dans le bon chemin.

M. Thierry Mariani - Je suis prêt à retirer mon amendement 253.

M. le Rapporteur - Au contraire, il faut le maintenir !

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

M. André Vallini - Nous sommes totalement opposés à ces amendements. L'effacement automatique du casier judiciaire des mineurs qui atteignent la majorité n'est pas, Monsieur Mariani, une aberration, mais une belle disposition républicaine inspirée par l'humanisme et par le souci d'offrir une nouvelle chance au jeune qui devient citoyen. L'été dernier, vous nous aviez déjà proposé de la supprimer et je vous avais répondu qu'il serait tout aussi simple de rétablir le marquage au fer rouge (Protestations sur les bancs du groupe UMP). MM. Perben et Warsmann s'étaient d'ailleurs opposés à votre proposition, inspirés par un humanisme républicain que M. Bédier ne semble pas partager. Profondément républicains, donc humanistes, nous restons pour notre part hostiles aux amendements de M. Mariani (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

M. le Rapporteur - Sans me faire l'interprète de M. Perben, je puis vous confirmer que le lendemain du vote de l'été dernier, nous nous étions dit que le système actuel n'était pas satisfaisant. A titre personnel, j'ai beaucoup évolué depuis que j'ai travaillé sur l'exécution des peines. Je vous ai raconté la scène - que j'ai vécue - de l'arrestation de ce délinquant dans une gare parisienne. J'ai été très choqué. Si l'on ne donne pas au magistrat les informations qui lui permettent de proportionner sa sanction, on n'en sortira pas. Le dispositif proposé reste mesuré, comme le souhaite le Gouvernement.

M. le Secrétaire d'Etat - Je remercie M. Vallini d'avoir salué l'humanisme de Dominique Perben. Il a indéniablement raison.

C'est très bien, Monsieur Vallini de parler de l'humanisme républicain. Encore faut-il savoir ce que l'on met derrière le terme « républicain ». Pour nous, comme le dit excellemment Jean-Pierre Raffarin, c'est de l'humanité et de la fermeté. Sans la seconde, la première devient de l'angélisme. Nous devons à nos concitoyens la République, c'est-à-dire le Gouvernement pour le peuple. Notre fermeté ne traduit que le souci de répondre à leurs inquiétudes.

M. Guy Geoffroy - Sans verser dans la polémique, je voudrais dire que l'humanisme républicain n'est pas un slogan que l'on s'accapare, mais un idéal partagé par nous tous sur ces bancs. Ne le confisquez pas pour prendre en otages les jeunes de notre pays ! Ceux-ci n'ignorent pas que c'est le comportement de certains d'entre eux qui a conduit à ce que l'on stigmatise la jeunesse. L'anti stigmatisation systématique peut avoir des résultats pires que la stigmatisation. L'humanisme républicain nous impose qu'une seule obligation morale et politique : dire la vérité à la jeunesse. Et dire la vérité aux jeunes, ce n'est pas leur dire que tout est possible à leur âge, mais simplement que l'âge autorise une prise en compte différente des comportements déviants. Ce n'est pas lui dire qu'ils peuvent faire ce qu'ils veulent quand ils veulent, faire un pied de nez à la société et devenir durablement délinquants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Michel Vaxès - Qu'un texte censé combattre la grande criminalité serve de prétexte à une révision de la politique pénale des mineurs est tout un symbole et éclaire de manière saisissante les orientations outrancières de ces amendements.

Les amendements de M. Mariani adoptés par la commission, suppriment les dispositions de l'article 769-2 du code de procédure pénale qui prévoient l'effacement automatique du casier judiciaire d'un mineur dès que celui-ci atteint la majorité.

Loin d'être anodins, ils remettent en cause toute notre politique pénale des mineurs. L'effacement de toutes les mesures et peines inférieures à deux mois d'emprisonnement pour des faits commis par des mineurs vise en effet à permettre la réinsertion des jeunes majeurs.

Les peines inférieures à deux mois ne visent pas des actes de grande délinquance, et il est juste qu'elles soient effacées du casier judiciaire du mineur quand il atteint sa majorité. Cela évite de stigmatiser les mineurs qui ne sont pas inscrits gravement dans la délinquance, d'autant que, de toute façon, la loi rend obligatoire le recueil d'éléments de personnalité à l'occasion de la comparution devant le tribunal correctionnel de jeunes de moins de 21 ans. Ainsi, la réforme proposée est de pur affichage, mais elle porte atteinte à la mission éducative de la justice des mineurs et à sa spécificité.

Le groupe des députés communistes et républicains votera donc contre ces amendements et appelle ses collègues à faire de même.

M. Thierry Mariani - Vous avez raison, ces amendements ne visent pas la grande délinquance, mais la petite délinquance répétitive. Si je les ai déposés, c'est parce qu'un jeune de ma commune qui avait à son casier dix-huit procédures - pour vols à la roulotte, dégradation de biens privés ou publics, insultes à agent - et avait volé une voiture quelques jours après ses dix-huit ans, s'est vu relâcher dans la nature : son casier judiciaire ayant été effacé, c'était sa première condamnation ! Je vous le demande, quid des victimes ? Vous n'avez vraiment pas compris la leçon du 21 avril 2002 ! C'est cette petite délinquance qui leur pourrit la vie au quotidien que les Français veulent voir cesser. Ce que je propose n'a rien de révolutionnaire : on revient à la situation d'avant 1981. Que je sache, nous étions déjà dans un Etat de droit ! Il ne s'agit que de permettre à la société de garder une trace des délits commis par les mineurs.

M. André Vallini - L'humanisme n'est pas l'angélisme, et je ne suis pas plus angélique que vous tous ! J'ai été maire pendant quinze ans, je suis président du conseil général : je prends les mesures de prévention et de dissuasion qui s'imposent, je soutiens les forces de police et de gendarmerie. Mais être humaniste, c'est effacer les tout petits délits dont vous avez parlé, Monsieur Mariani...

M. Thierry Mariani - Près de vingt !

M. André Vallini - Il n'est pas acceptable qu'ils suivent un jeune toute sa vie.

L'amendement 683 rectifié, mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 253, 254 et 255.

Les articles 74 et 75, successivement mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ART. 75

M. le Rapporteur - Afin d'éviter le recrutement de personnes aux antécédents douteux, nous proposons, par l'amendement 256, de communiquer le bulletin n° 2 du casier judiciaire aux personnes morales publiques ou privées exerçant une activité culturelle ou sportive auprès des mineurs.

M. Jean-Paul Garraud - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement s'en remet à votre sagesse dans la mesure où il serait délicat de confier ce bulletin à des personnes privées. Je comprends votre objectif mais cette disposition doit être techniquement approfondie.

M. le Rapporteur - On pourrait imaginer que le bulletin soit adressé à la direction de la jeunesse et des sports, mais le dispositif risque de devenir trop lourd. Je maintiens l'amendement afin que l'Assemblée pose le principe. Nous pourrons revoir le texte dans la suite de la discussion.

L'amendement 256, mis aux voix, est adopté.

L'article 76, mis aux voix, est adopté.

ART. 77

M. le Rapporteur - L'amendement 257 vise à supprimer cet article devenu inutile.

L'amendement 257, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 77 est supprimé.

APRÈS L'ART. 77

M. le Rapporteur - L'amendement 258 de la commission vise à prévoir des dispositions transitoires pour les ordonnances de prises de corps décernées avant l'entrée en vigueur de la loi.

L'amendement 258, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Les articles 78, 79, 80 et 81, successivement mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ART. 81

M. le Rapporteur - L'amendement 259 de la commission prévoit l'application de la convention européenne du 29 mai 2000 sur les demandes d'entraide dès sa ratification, sans attendre son application au niveau européen.

L'amendement 259, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Les articles 82, 83, 84, 85, 86 et 87, successivement mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ART. 87

M. Jean-Pierre Blazy - Mon amendement 386 vise à prévoir la transmission au Parlement d'un rapport d'évaluation avant le 31 décembre 2005, et d'un second rapport avant le 31 décembre 2007. Ce texte va bouleverser les pratiques judiciaires. Il est normal que le Parlement en connaisse les effets.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Le Gouvernement nous transmettra toutes les informations souhaitables à l'occasion du débat annuel sur les crédits du ministère de la justice. En outre, le droit parlementaire nous permet de détailler la montée en charge du texte. Il n'est pas nécessaire d'ajouter deux rapports aux très nombreux documents que nous recevons déjà.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable. Je ne suis pas sûr que ce que vous demandez soit du domaine de la loi (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

L'amendement 386, mis aux voix, n'est pas adopté.

EXPLICATIONS DE VOTE

M. Jean-Paul Garraud - Qu'il soit permis au magistrat que je suis de saluer avec une vive satisfaction ce projet. Respectant les engagements pris auprès de nos concitoyens, vous nous avez proposé une réforme particulièrement importante de notre système pénal.

Revenant sur des lois qui avaient paralysé l'action des forces de l'ordre et de la justice, au moment où nous connaissions une augmentation sans précédent de la délinquance, nous allons restituer à notre institution judiciaire les outils juridiques qui vont lui permettre de lutter efficacement contre la délinquance et en particulier la grande criminalité.

Après avoir voté les moyens nécessaires au fonctionnement de l'appareil judiciaire, nous avons mis en place des structures nouvelles. Nous nous sommes attaqués à cette grande délinquance, celle des réseaux mafieux, qui se joue des frontières, qui utilise toutes les techniques modernes, qui dispose de revenus considérables grâce au trafic de drogue. Celle qui, enfin, profite de notre législation archaïque, fondée sur des présupposés idéologiques. En effet, les lois votées par l'ancienne majorité se sont construites sur des postulats, sans aucune vision constructive, sans logique d'ensemble. Au contraire, cette loi reprend toutes nos préoccupations. Elle restaure l'autorité de l'Etat. Elle contient des innovations procédurales destinées à bien cibler les objectifs et à s'adapter à l'évolution de la criminalité. Elle renforce les droits des victimes, souvent cités dans les textes antérieurs mais peu respectés. Enfin, elle simplifie la procédure tout en renforçant les droits de la défense et les règles du procès équitable.

Il était urgent d'agir. La pérennisation de notre système de procédure aurait laissé notre pays complètement démuni contre les nouvelles formes de délinquance organisée. Notre système de poursuites était obsolète.

La criminalité organisée, la délinquance financière, la corruption, le terrorisme, reposent sur des logiques de fonctionnement nouvelles. Elle s'organise en réseaux, en filières qui mêlent inextricablement les activités légales et illégales.

Le Gouvernement a choisi la voie pragmatique plutôt que de relancer l'éternel débat sur les mérites et les inconvénients des systèmes procéduraux. Cette méthode doit être approuvée et cette audace réformatrice ne doit pas s'arrêter en chemin.

C'est une véritable révolution culturelle qui est nécessaire, car ni la police ni la justice n'ont encore, en France, une véritable culture de lutte contre la criminalité organisée.

On ne demandera pas aux procureurs des résultats statistiques, comme en matière de justice de proximité, mais de s'attaquer aux grands réseaux, puissants et organisés, dont la traque est longue et minutieuse. C'est un autre métier, qui doit s'apprendre.

Les initiatives prises ces derniers mois en faveur de la lutte contre l'insécurité prennent forme. Il s'agit d'un commencement et non d'un achèvement. Le Parlement et le Gouvernement doivent maintenir leurs efforts.

Les travaux de la commission et de notre assemblée ont amélioré le texte, qu'il s'agisse de l'harmonisation des régimes de garde à vue, des procédés de surveillance, du statut du repenti, de la procédure sur reconnaissance préalable de culpabilité, de l'organisation des juridictions interrégionales ou de l'effectivité des décisions de justice.

Cette loi rompt avec le passé, car notre justice criminelle doit affronter ce troisième millénaire sans idéologie préconçue (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Elle va réconcilier notre justice avec les citoyens, puisque nous répondrons enfin à leurs attentes. Enfin, elle rendra la justice plus efficace par la simplification et l'harmonisation de nos procédures.

Vous pouvez compter, Monsieur le secrétaire d'Etat, sur toute notre détermination pour construire avec vous ce nouveau système. Le groupe UMP votera sans hésitation, et même avec une certaine fierté, ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

M. Michel Vaxès - Dès qu'il a été rendu public, ce projet a été mal accueilli par les professionnels de la justice, magistrats et avocats confondus. Il a été beaucoup critiqué dans la presse. Le Garde des Sceaux a considéré que ces critiques procédaient de la méconnaissance du projet, comme si les magistrats étaient habitués à faire des jugements hâtifs.

Les professionnels, la presse ont suivi nos débats. Ils auront observé que le Gouvernement a repoussé tous les amendements de la gauche, mais aussi les amendements de la droite, à part ceux qui étaient de précision et entraient dans l'esprit général du projet.

Le résultat, c'est que notre système judiciaire est mis à mal. Nous nous dirigeons vers un système accusatoire, une justice négociée, préférant la tractation à un jugement équitable. Vous réduisez le rôle du juge du siège, vous marginalisez le juge d'instruction. Au prétexte de pragmatisme, vous ne faites que traduire votre refus de donner à la justice les moyens financiers et humains dont elle a besoin. La préoccupation de rigueur budgétaire prend le pas sur le souci de l'action publique (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

Vous avez rompu l'équilibre entre l'accusation et la défense.

La réaction, avant-hier, du conseil de l'ordre des avocats de Paris est significative. Les premières réactions des professionnels et de la presse étaient donc fondés. Leurs critiques seront encore plus sévères dans les jours à venir.

Le groupe communiste et républicain ne votera pas ce projet et regrette que vous n'ayez pas accepté d'en faire l'évaluation en 2005 et en 2007 (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

M. Rudy Salles - A entendre M. Vaxès, on croirait que la situation de la justice est aujourd'hui idéale (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Or nous savons qu'il y a des problèmes et qu'ils n'ont fait que s'aggraver ces dernières années, malgré l'augmentation des crédits.

M. Jean-Pierre Blazy - C'est bien de le reconnaître !

M. Rudy Salles - Les crédits ont certes augmenté, mais vous avez compliqué la procédure, ce qui a annulé l'augmentation des moyens.

Ce projet est bien un texte de rupture avec le passé, et nous nous en réjouissons.

M. Vaxès a affirmé qu'il avait été mal accueilli par la presse et les professions de justice. J'ai, moi aussi, rencontré leurs représentants et je peux dire qu'ils ont accueilli le texte avec un a priori favorable, même s'ils avaient quelques interrogations, auxquelles nous avons pu répondre pendant ce débat. Je rends hommage, à cet égard, à notre rapporteur qui a su écouter, transmettre les messages et apporter des solutions.

Ce projet répond à l'engagement fort pour la sécurité que nous avons pris l'an dernier. Nos objectifs sont la lutte contre les fléaux de la société, la défense des victimes et le renforcement de l'efficacité de la justice. Le projet remplit ces trois critères. Le groupe UDF le votera.

M. André Vallini - Ce texte comporte deux volets. Sur la grande criminalité, nous partageons votre objectif : il faut se doter de nouveaux moyens contre une criminalité organisée qui a beaucoup évolué. Le problème, c'est que votre définition de cette criminalité organisée est tellement vague que le risque est grand de voir le nouvel arsenal utilisé dans des domaines tout à fait autres, avec atteinte aux droits de la défense et aux libertés individuelles.

La seule vraie solution à la grande criminalité, c'est la coopération judiciaire internationale et sur ce point précis, nous adhérons aux dispositions du projet.

Son second volet concerne la procédure pénale et là nous sommes en désaccord total, tant sur les objectifs que sur les moyens. Il s'agit d'un texte voulu, concocté et décidé par le ministre de l'intérieur. Le ministre de la justice s'est souvenu in extremis que la procédure pénale était peut-être aussi de son domaine et il a donc endossé ce texte, mais tout le monde sait qu'il a été rédigé place Beauvau (Protestations sur les bancs du groupe UMP) et ce n'est pas étonnant puisque c'est M. Sarkozy qui donne le « la » à tout le Gouvernement !

Les commissaires de police ont voulu ce texte et l'ont quasiment écrit. C'est une loi policière, qui va pratiquement défaire la loi sur la présomption d'innocence, que vous aviez pourtant soutenue à l'époque, ce que vous semblez oublier !

M. Thierry Mariani - Pas moi !

M. André Vallini - A part M. Mariani et M. Estrosi, l'opposition de l'époque a soutenu la loi sur la présomption d'innocence. M. Devedjian et M. Clément regrettaient même qu'elle n'aille pas assez loin !

Vous avez fait une campagne électorale démagogique sur le problème, réel, de l'insécurité et maintenant c'est la fuite en avant vers le tout-répressif ; vous rompez l'équilibre nécessaire entre prévention, dissuasion, répression et réinsertion. Cette loi s'ajoute à beaucoup d'autres allant dans le même sens, nous sommes en pleine dérive à l'américaine, qu'il s'agisse de la procédure d'instruction ou du nombre de personnes envoyées en prison - 1 000 détenus de plus par mois ! M. Warsmann fait ce qu'il peut pour promouvoir les peines alternatives, mais la réalité, c'est que les prisons vont se remplir encore plus et les constructions de M. Bédier ne suffiront pas.

J'ai reçu des représentants du conseil national des barreaux, de l'Ordre des avocats de Paris, de l'USM et ils sont très inquiets. Vous vous êtes bien gardés de mentionner le communiqué publié par le bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris après le passage du projet en commission : il voit dans ce texte un danger pour la liberté individuelle, portant « en germe l'injustice et l'erreur judiciaire ».

Le groupe socialiste votera contre ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président de la commission des lois - Ce texte, qui est présenté par tout le Gouvernement et pas seulement par un ministre, est très novateur car il créée des moyens inédits pour lutter contre la grande délinquance.

On a cité la loi sur la présomption d'innocence : mais un an après l'avoir votée, la majorité de l'époque a dû la modifier ! C'est bien qu'elle ne donnait pas satisfaction. En ce qui concerne le projet présenté aujourd'hui, je prends le pari qu'au contraire aucun gouvernement n'y touchera !

Le législateur a tendance à ne pas trop se préoccuper des moyens d'appliquer les textes qu'il vote : sur le terrain, le personnel et les crédits vont-ils pouvoir suivre ? On ne se pose pas la question. Cette fois, au contraire, beaucoup des modifications apportées par notre rapporteur visent à économiser les moyens humains et matériels et à gagner du temps. M. Warsmann avait effectué une mission quelques mois auparavant. D'ordinaire, les rapports de mission finissent pieusement classés sur une étagère. Or le rapporteur a réussi à tirer de son travail des propositions concrètes qui sont reprises dans ce texte dans deux domaines : les alternatives à la prison et le suivi de l'exécution des peines. Ce dernier point est une grande première, il permettra de vérifier l'efficacité des textes que nous votons et, à nouveau, j'affirme que personne ne reviendra sur cette loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance mardi 27 mai, à 9 heures 30.

La séance est levée à 11 heures 45.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 27 MAI 2003

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions orales sans débat.

2. Fixation de l'ordre du jour.

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi urbanisme et habitat.

M. Jean PRORIOL, rapporteur (Rapport n°879)

3. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence (n° 861), organisant une consultation des électeurs de Corse sur la modification de l'organisation institutionnelle de la Corse.

M. Guy GEOFFROY, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 870)

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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