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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session extraordinaire de 2003-2004 - 6ème jour de séance, 17ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 8 JUILLET 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC

vice-président

Sommaire

      ASSURANCE MALADIE (suite) 2

      ART. 7 (suite) 2

      ART. 8 12

      APRÈS L'ART. 8 17

      REQUÊTE EN CONTESTATION
      D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES 25

La séance est ouverte à quinze heures.

ASSURANCE MALADIE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie.

ART. 7 (suite)

M. le Président - Les amendements 2464 à 2475 sont identiques.

Mme Janine Jambu - Cet amendement vise à supprimer le I de l'article, notamment parce qu'il n'est pas légitime de confier aux mutuelles - et moins encore aux assurances privées - un rôle dans la définition des actes de bonne pratique et de bon usage des soins.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale - Rejet, pour les raisons que nous avons longuement exposées ce matin.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale - Même avis.

Les amendements 2464 à 2475, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 904 à 915 sont identiques.

Mme Jacqueline Fraysse - Cet amendement vise également à supprimer l'introduction des mutuelles et des assurances dans la définition des bonnes pratiques. A quelle légitimité peuvent prétendre des assureurs privés pour évaluer la pratique des professionnels de santé, qui ont tous reçu une formation longue et dûment sanctionnée ?

M. Gérard Bapt - Notre amendement 7854 est identique à ceux de nos collègues communistes car nous faisons le même constat. Ce texte est une véritable machine à dérembourser et à privatiser. M. Mallié ironisait ce matin sur l'incohérence qui nous pousserait à dénoncer tout à la fois, dans ce projet, une volonté d'étatisation et de privatisation. Pourtant les faits sont là : l'étatisation, c'est la nouvelle gouvernance, qui ne peut plus être assimilée à un paritarisme rénové ; quant à la privatisation, elle est inscrite dans l'article dont nous proposons la suppression. Chacun sait en effet que la mutualité sert aujourd'hui de cheval de Troie aux assurances privées. M. Bertrand nous a répété ce matin que ce texte ne modifiait en rien le périmètre de l'assurance maladie...

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie - Absolument !

M. Gérard Bapt - Et M. de la Martinière, président de la FFSA, le confirme - sans doute pour le regretter ! Au reste, il ajoute dans un article récent que « tout le monde considère que le point clé de la réforme devrait concerner l'orientation », et qu'il est « plus opportun de renvoyer ces discussions - sans doute parle-t-il du champ d'intervention, du périmètre de soins ou du panier de soins - aux futures instances qui seront créées ». A l'évidence, ce texte est lourd de menaces, puisqu'il introduit les assurances privées dans le conseil d'orientation et dans les conventions tripartites négociées avec les syndicats de médecins.

Les amendements 904 à 915, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement 7854.

M. le Ministre - La possible participation des organismes complémentaires à la contractualisation est de nature à favoriser l'émergence de solutions innovantes dans les domaines de l'évaluation, de l'amélioration des pratiques professionnelles ou de la prévention. L'expérimentation Soubie, liant la MSA et Groupama, a donné des résultats tout a fait concluants. L'efficacité des prescriptions des médecins participants a sensiblement progressé. Le Gouvernement tient cependant à ce que la participation des organismes complémentaires soit subordonnée à un accord préalable des autres parties aux contrats : l'amendement 8423 rectifié vise à préciser ce point.

M. le Rapporteur - L'amendement a été accepté par la commission spéciale, sous réserve de son sous-amendement 8453, lequel tend à associer l'instance de gestion du régime local d'assurance maladie complémentaire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale - Ce régime local est en effet envié et il est judicieux de l'associer aux contrats. Mon sous-amendement 8454 vise d'autre part à associer l'ensemble des entreprises d'assurance opérant sur le marché français, afin de tenir compte du droit européen.

M. Jean-Luc Préel - Mon sous-amendement 8456 rectifié tend à ce que les contrats soient communiqués pour avis aux conseils de l'ordre des professions médicales pour ce qui les concerne.

M. le Ministre - Avis favorable à ces trois sous-amendements.

M. Jean-Marie Le Guen - Ce débat montre bien que si le texte avait été mieux préparé il y aurait sans doute moins d'interventions en séance... (Murmures sur les bancs du groupe UMP) Cet amendement et ces sous-amendements sont très importants. Si je n'ai pas grand chose à ajouter à ce qu'a dit M. Bur à propos de l'Alsace Moselle, ses propos quant à la compétence européenne montrent bien que ce texte n'a rien d'anodin.

Il a aussi rappelé que des expériences utiles avaient déjà eu lieu, notamment celle dite « MSA Groupama », même si la première a fait beaucoup et si le second a surtout communiqué...

M. le Ministre - C'est scandaleux !

M. Jean-Marie Le Guen - D'ailleurs, cela préjuge bien de ce qui va se passer : la prise en main de la médecine ambulatoire par les groupes d'assurances.

Pour notre part, nous considérons que la mise en œuvre des réseaux ne doit pas être le fait des seules assurances mais venir aussi de l'assurance maladie et de l'Etat. Bien sûr, vous nous direz que les crédits du FNDR ont beaucoup augmenté. Mais pourquoi s'en étonner puisqu'il n'a été créé que très récemment, par la loi du 4 mars 2002. Nous avions d'ailleurs pour cet organisme une ambition beaucoup plus forte, considérant que les réseaux ne devaient pas être des expériences marginales mais des éléments structurants de la politique de santé et que la prise en charge des patients atteints d'affections de longue durée ne pouvait qu'y gagner.

Deuxième remarque, s'il existe aujourd'hui un code commun des assurances et des mutuelles, dans la pratique, derrière les assureurs se cache rarement l'esprit mutualiste tandis que derrière les mutuelles se cache de plus en plus souvent l'esprit assurantiel. Les Français savent bien que les mutuelles, poussées par le marché, leur proposent de moins en moins de contrats solidaires et de plus en plus de produits d'assurance. Nous verrons aussi que les compagnies à capitaux et à activités hors de France pourront bientôt intervenir en toute légitimité puisque l'article 31 du projet ne s'appliquera pas à elles. Dans ces conditions, le marché des complémentaires va commencer par exploser avant d'être totalement déréglementé. C'est pourquoi 85 % des Français s'attendent à une très forte augmentation des cotisations des complémentaires, et ce débat ne pourra hélas que les conforter dans ce sentiment.

M. Gérard Bapt - Une dépêche de l'AFP nous apprend en effet que huit Français sur dix pensent que les complémentaires santé vont augmenter au cours des prochaines années et que 56 % d'entre eux ont déjà observé une augmentation en 2004. Mais ils ne se rendent pas compte qu'elles vont en fait exploser.

Je rappelle que le président de la FFSA considère que cette réforme va ouvrir de nouveaux champs aux assurances, qui se servent des mutuelles comme d'un cheval de Troie. A la différence du Gouvernement, M. de la Martinière, tel Saint-Jean-Bouche d'Or, dit les choses telles qu'elles sont.

M. Jacques Desallangre - Les exposés des motifs des amendements 83 et 7485 sont clairs : il s'agit bien de prévoir la participation de mutuelles, d'assureurs ou d'institutions de prévoyance à des contrats passés entre les URCAM et les réseaux de professionnels de santé dans une aire géographique définie. C'est ce qui fonde l'opposition du groupe communiste et républicain à ces dispositions.

Le sous-amendement 8453 mis aux voix, est adopté, de même que les sous-amendements 8454 et 8456 rectifié.

L'amendement 8423 rectifié, ainsi sous-amendé, est adopté.

M. le Président - Les amendements 2476 à 2487 sont identiques.

Mme Janine Jambu - Ils visent à supprimer la participation du directeur général de l'UNCAM à la définition des Acbus. Le rôle de cette personnalité nommée par le Gouvernement paraît en effet bien excessif puisqu'il pourrait contribuer à une gestion conjointe de l'assurance maladie par le régime obligatoire et par les assurances complémentaires, auxquelles on permettrait de peser sur le périmètre et sur le taux de la couverture garantie par la sécurité sociale. Nous rejetons cette vision non démocratique de la gouvernance.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Même avis.

Les amendements 2476 à 2487, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Yves Censi - Compte tenu du renforcement de l'inter régime, l'approbation des accords de bon usage des soins ne doit pas relever du seul directeur général de l'UNCAM mais du collège des directeurs de l'UNCAM. Tel est le sens de mon amendement 7834.

M. Gérard Bapt - On ne peut pas travailler, on passe son temps à chercher les amendements !

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, parce qu'il préjuge de la discussion sur l'article 31 et parce qu'il est contraire à l'esprit du texte qui est de renforcer l'exécutif (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. le Secrétaire d'Etat - L'article 31 permettra d'aller au fond du débat sur les compétences respectives du directeur de l'UNCAM et du collège des directeurs, mais je peux déjà dire que le Gouvernement n'est pas opposé à l'esprit de cet amendement. Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous soutenons l'amendement de M. Censi, car nous pensons que le proconsul qu'est le directeur général de l'UNCAM a déjà suffisamment de pouvoirs. Il aura tout loisir d'étouffer toutes les caisses qui existent depuis la Libération, mais si grâce à cet amendement, les autres directeurs peuvent avoir encore leur mot à dire pendant quelques mois, ce sera déjà cela.

L'amendement 7834, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - Rappel au Règlement. M. Bapt soulignait tout à l'heure, à juste titre, que nous avons un peu de mal à nous retrouver dans toutes ces liasses d'amendements. Je ne comprends pas pourquoi nous n'avons pas adopté la méthode habituelle consistant, lorsqu'il y a plusieurs amendements identiques, à n'imprimer qu'une fois le texte de l'amendement et à mettre en annexe la liste de tous ceux qui présentent le même. Cela faciliterait le travail et économiserait le papier.

Mon rappel au Règlement porte aussi sur l'organisation générale de nos travaux. Il n'est pas très satisfaisant que nous examinions ce projet en l'absence du ministre de la santé, appelé, nous dit-on, à défendre devant le Sénat le projet de loi sur la santé publique. C'est tout à fait regrettable, car nous avons pu constater que, lorsque nous l'interpellons, il apporte parfois - trop rarement - des précisions. Il lui arrive même de reculer, certes pas assez souvent, mais chaque fois opportunément. C'est par exemple sur notre insistance qu'il a fini par inclure les psychiatres dans la liste des spécialistes qu'il serait possible de consulter en accès direct.

Mme Jacqueline Fraysse - La discussion sert à cela !

M. Jean-Marie Le Guen - Oui, la présence du ministre sert à cela. Sinon, nous pourrions nous contenter de nous envoyer des mails !

M. Richard Mallié - Nous sommes scandalisés par ce qui vient d'être dit. Le Gouvernement est ici représenté par le secrétaire d'Etat à l'assurance maladie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Or, ce projet de loi est une réforme de l'assurance maladie. Arrêtez de nous faire perdre notre temps, Monsieur Le Guen !

M. Alain Vidalies - Rappel au Règlement. Nous exerçons ici notre responsabilité de parlementaires et il est normal que nous demandions des explications quand des amendements du Gouvernement, qui n'ont pas été vus en commission, sont votés sans le moindre éclaircissement. L'amendement 8423 du Gouvernement visait le 2° de l'article L. 310-1 du code des assurances, puis il a été sous-amendé par M. Bur, qui a supprimé cette référence précise au bénéfice d'une autre plus générale au code des assurances tout entier. J'avoue n'avoir pas compris, et je me demande si cela n'a pas une portée plus considérable qu'il n'y paraît. En tout cas, une explication ne serait pas superflue.

M. Edouard Landrain - Je siège ici depuis de nombreuses années et j'ai souvenir d'une séance au cours de laquelle M. Poperen, qui était alors ministre des relations avec le Parlement, se trouvait tout seul au banc du gouvernement. Il avait répondu : « Je représente le Gouvernement, écoutez-moi ! » Nous avons aujourd'hui face à nous le secrétaire d'Etat chargé de l'assurance maladie. Son titre montre assez qu'il est capable de répondre à toutes les questions sur le projet. Je déplore le manque de respect que lui témoigne l'opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Je remercie M. Landrain de cette évocation d'un homme que nous avons beaucoup aimé.

Mme Muguette Jacquaint - Je m'étonne que la majorité s'offense de ce que nous réclamions la présence de son ministre. Nous ne contestons en rien la qualité de M. le secrétaire d'Etat, mais sur un texte aussi important, il est normal que la représentation nationale demande que le ministre de la santé soit également présent (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Je m'étonne aussi, comme l'a fait hier M. Gremetz, que circule dans les hôpitaux et chez les médecins une petite brochure qui explique déjà la loi avant même qu'elle ait été adoptée. Dites-nous, Monsieur le Président, si le Parlement est encore utile ou non ! S'il ne l'est pas, il n'y a plus qu'à nous faire parvenir les textes par mail ou par fax et les choses iront aussi vite que le Gouvernement et sa majorité semblent le souhaiter !

M. Richard Mallié - Je constate que l'opposition persiste dans l'injure vis-à-vis de M. Xavier Bertrand. Quant au reproche sur les amendements qui n'auraient pas été vus en commission, je le renvoie à l'opposition : lorsque des milliers d'amendements sont déposés - et des centaines identiques -, comment voulez-vous qu'on les examine tous en commission ? Si vous n'aviez pas fait d'obstruction, nous aurions mieux travaillé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est à la disposition du Parlement dans ce débat. Depuis le début, il me semble qu'il a toujours eu à cœur, par la voix de M. Douste-Blazy ou par la mienne, de répondre à toutes les questions posées. Le débat parlementaire est utile : nous entendons des voix différentes, parfois nous parvenons à des positions consensuelles, mais toujours nous avons eu à cœur de répondre.

Par ailleurs, Monsieur Le Guen, vous saviez très bien que la deuxième lecture du projet sur la santé publique allait s'engager au Sénat, puisque la semaine dernière vous m'interrogiez sur la position du Gouvernement face aux amendements qui seraient alors débattus. Si le Gouvernement est à la disposition du Parlement, celui-ci se compose de deux assemblées. Ce n'est pas le Gouvernement mais la Conférence des présidents qui a inscrit ce texte à la séance de ce soir. Nous sommes à la disposition du Parlement pour poursuivre ce débat aussi longtemps que nécessaire, Monsieur Le Guen, car nous tenons à faire vivre ce débat parlementaire auquel nous croyons profondément. Il y a eu le temps du dialogue social : maintenant c'est celui du dialogue parlementaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Alain Vidalies - Vous n'avez pas répondu à ma question précise.

M. le Secrétaire d'Etat - Je ne pratique pas l'esquive. Le Gouvernement a approuvé le sous-amendement du président de la commission spéciale qui souhaitait prendre pour référence le droit européen, car cela nous évitera dans la suite tout problème d'incompatibilité avec ce droit.

M. Jean-Marie Le Guen - Rappel au Règlement (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). C'est le Gouvernement, non l'Assemblée, qui est maître de l'ordre du jour. Il organise aujourd'hui dans la confusion deux débats, un au Sénat, l'autre à l'Assemblée, parce qu'il a décidé une session extraordinaire dont le contenu n'est pas raisonnable ; et voilà pourquoi nous travaillons dans des conditions qui ne sont pas raisonnables non plus. Voilà qu'il nous faut à la fois suivre le débat au Sénat et participer à celui-ci ! Ce n'est pas une façon de traiter le Parlement. Nous collègues ont beau être pressés d'aboutir, le Gouvernement nous place dans une situation contraire à un bon suivi des travaux, à l'exercice du contrôle parlementaire et aux conditions de travail minimales auxquelles nous avons droit.

M. le Président - Je suis saisi des amendements identiques 2488 à 2499.

Mme Jacqueline Fraysse - Ces amendements tendent à supprimer le 3° du I de l'article 7. Si votre but était vraiment d'introduire à l'hôpital un dispositif contractuel sur les bonnes pratiques, nous y serions favorables. On ne voit pas, en effet, pourquoi ce qui est exigé de la médecine de ville ne le serait pas à l'hôpital. Mais ce n'est pas le cas : il s'agit en fait d'un dispositif de rationnement - comme d'ailleurs celui qui est déjà en place pour la médecine de ville et qu'on est en train de perfectionner -, avec des objectifs quantifiés qui en disent long sur le but poursuivi. Il est de nature à accentuer les difficultés des hôpitaux, déjà asphyxiés financièrement. Plutôt que d'améliorer les pratiques, je crains qu'on aggrave les tensions, que les patients en pâtissent et qu'on aboutisse à l'opposé du but affiché.

M. le Rapporteur - Il est logique de placer les médecins hospitaliers sur le même plan que les médecins de ville. Quant aux objectifs quantifiés que vous évoquez, je rappelle que les économies réalisées seront reversées aux établissements : cela va dans le sens de la participation au sens gaulliste, impliquant concertation et intéressement. La commission a donc repoussé ces amendements.

M. le Secrétaire d'Etat - Je partage les arguments du rapporteur. J'ajoute qu'en supprimant l'alinéa visé, on supprimerait du même coup une disposition qui garantit que les contrats passés entre l'UNCAM et les réseaux de professionnels libéraux conventionnés ne pourront contenir de dispositions contraires à celles des conventions nationales : sa suppression ouvrirait donc la porte à nombre de disparités et d'incompatibilités. Avis défavorable.

M. Gérard Bapt - Nous avons beaucoup de considération pour M. le Secrétaire d'Etat. Si nous souhaitons la présence du ministre, c'est que nous apprécions beaucoup ses réponses longues, systématiques et circonstanciées, qui répondent toujours à notre attente... ( Rires sur les bancs du groupe socialiste)

Nous n'approuvons pas l'amendement de Mme Fraysse car nous pensons que les accords de bon usage des soins en matière de prescription pharmaceutique doivent exister. Ils doivent encadrer certaines ordonnances interminables, qui doivent s'inscrire dans des protocoles. Je n'entends pas que les prescriptions soient obligatoirement limitées, mais qu'une prescription plus ample doit être motivée. Cela doit en outre s'accompagner - point que le Gouvernement oublie toujours - d'une formation médicale continue indépendante de l'industrie pharmaceutique. Toutes ces considérations concernent également les médecins hospitaliers, qui sont eux aussi des prescripteurs.

Cela dit, nous comprenons l'état d'esprit de Mme Fraysse. En effet, article après article, c'est toujours la même ambiance de déremboursement et de culpabilisation des assurés, et dans ce contexte, quelle que soit la disposition considérée, on peut s'inquiéter de l'usage qui en sera fait : recherche de la qualité, ou simple recherche d'économies ? Nous nous abstiendrons donc sur cet amendement.

Les amendements 2488 à 2499, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jacques Desallangre - Les amendements 2500 à 2511 ont pour objet de supprimer le II de l'article 7, c'est-à-dire de refuser l'introduction à l'hôpital des accords de bon usage des soins. En effet le projet rend possible, à l'échelon de l'Agence régionale de l'hospitalisation et d'un établissement, de poser des objectifs quantifiés en termes médicaux mais aussi financiers. La tarification à l'activité, pilier du plan Hôpital 2007, qui conditionne désormais les ressources des établissements, devrait être l'instrument privilégié pour bâtir ces contrats. Ceux-ci définiraient aussi « l'intéressement » auquel auraient droit les équipes les plus « performantes » : ce vocabulaire purement économique est révélateur... Et il n'y manque pas même les sanctions pour les équipes qui ne respecteraient pas les buts fixés.

Nous avons bien des raisons de nous opposer à ce dispositif. Mme Fraysse a fait une critique circonstanciée des Acbus. J'ajouterai que l'introduction de l'ARH comme acteur responsable nous inquiète, à la lumière de l'expérience. On connaît la façon directive et autoritaire dont les directeurs des agences régionales agissent, modifiant de façon imprévue les mises en réseaux, comme s'ils étaient seuls à connaître une règle du jeu qui échappe aux administrateurs des établissements et aux élus locaux. A travers ces décisions successives, on est souvent conduit à se demander s'ils savent où ils veulent aller et où ils nous conduisent.

Quand on voit que, dans le cadre du plan Hôpital 2007, il a pu être répondu à un établissement totalement exsangue et dans l'impossibilité d'emprunter qu'il pouvait très bien mener seul son projet, on ne souhaite pas vraiment que ce soient ces mêmes personnes qui s'occupent de l'intéressement, de la performance et de la sanction !

Voilà pourquoi il faut supprimer ce paragraphe, qui met en place un instrument de maîtrise uniquement comptable. Va-t-on demander à nos médecins de faire du chiffre ?

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre - Même avis. La disposition que vous voulez supprimer vise à étendre aux établissements de santé, publics comme privés, les mécanismes d'incitation à l'amélioration des pratiques et aux bons usages, car actuellement, les contrats d'objectifs et de moyens signés entre les établissements de santé et les agences régionales de l'hospitalisation n'intègrent aucun volet relatif à l'amélioration des pratiques hospitalières, notamment des prescriptions exécutées en ville.

M. Gérard Bapt - C'est vrai, les praticiens hospitaliers privés et publics doivent être associés à l'amélioration de la qualité des soins. Cependant, les députés communistes ont raison, la réforme de l'hôpital, en ne distinguant pas le privé du public dans la mise en œuvre de la T2A, va pousser les gestionnaires à demander toujours plus de rendement - sans parler de la présence accrue de l'administration sur la gestion, à la suite de cette même réforme.

Les amendements 2500 à 2511, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Nous en venons aux amendements identiques 2512 à 2533.

Mme Jacqueline Fraysse - Je salue la présence du ministre dont nous avons regretté l'absence, due à un programme de travail incohérent qui le fait courir du Sénat à l'Assemblée et de l'Assemblée au Sénat. Il mène une vie d'enfer qui nuit à la qualité de nos débats.

Mme Muguette Jacquaint - Et à sa santé !

M. le Ministre - Merci.

Mme Martine Billard - C'est de la prévention.

Mme Jacqueline Fraysse - S'agissant des agences régionales de l'hospitalisation, j'en garde malheureusement le souvenir d'une structure autoritaire et opaque, et je pourrais vous rappeler l'exemple, déjà cité au cours des travaux sur le budget de la sécurité sociale, d'une agence régionale qui avait refusé un IRM aux hôpitaux de Nanterre et Colombes....

M. Jean-Louis Bernard - Anecdotique !

M. Jacques Desallangre - Illustratif !

Mme Jacqueline Fraysse - ...pour l'accorder à Neuilly. Interrogé, M. Mattei m'avait assuré en séance qu'il allait s'en occuper, pour ensuite reconnaître que cette décision n'était pas recevable et accorder un IRM à ces deux hôpitaux ! Il semble donc qu'à la direction des ARH, certains décident seuls, « en leur âme et conscience », et que rien ne vaille une décision collective, transparente et débattue avec les élus et l'ensemble des acteurs.

Pour ces raisons, nous ne pouvons vous suivre dans cette voie.

M. le Rapporteur - Cet exemple illustre au contraire la nécessité de rapprocher les établissements hospitaliers, les ARH et l'Etat des caisses d'assurance maladie.

Les ARH représentent un progrès considérable. Je connais mal l'Ile-de-France, mais je puis vous assurer qu'en région Rhône-Alpes, ce dispositif est particulièrement apprécié. La commission a rejeté cet amendement.

M. le Ministre - Je le rejette également, et je vais en profiter pour répondre à M. Le Guen qui a parlé de moi pendant ma courte absence, et remercier M. Bapt pour ses louanges.

M. Gérard Bapt - Un seul être vous manque !

M. le Ministre - Depuis le début de ce débat, j'ai été présent jour et nuit, j'ai répondu chaque fois qu'il le fallait et je continuerai ainsi jusqu'à la fin. C'est vrai, le hasard du calendrier (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) fait que, ce soir, je devrai défendre au Sénat une politique de prévention essentielle, pour mettre fin, en particulier, aux prix promotionnels du tabac, et, en matière de bioéthique, autoriser une recherche encadrée sur les embryons surnuméraires, et lancer la création d'une agence de biomédecine. La qualité exceptionnelle du secrétaire d'Etat Xavier Bertrand me permet de vous laisser quelques temps en sa compagnie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - Reportez-vous à l'Analytique, et vous constaterez que ce n'est pas tant votre absence que nous regrettions que le fait qu'elle soit due à la décision du Gouvernement de placer le débat de santé publique au Sénat en même temps que celui sur l'assurance maladie à l'Assemblée nationale, ce qui pose deux problèmes.

Tout d'abord, il est apparu que certains de nos arguments pouvaient vous ébranler, vous qui avez la responsabilité de ce dossier. Si le secrétaire d'Etat est parfaitement capable de nous livrer la position du Gouvernement, il ne saurait la faire évoluer sans votre autorisation. Voyez le débat que nous avons eu hier, où vous avez finalement accepté le principe du libre accès au psychiatre.

Par ailleurs, vous allez aborder ce soir un sujet qui vous tient à cœur et pour lequel je me suis aussi investi, la lutte contre l'obésité.

M. Jean-Luc Préel - C'est vrai, vous avez maigri ! (Rires)

M. Jean-Marie Le Guen - Figurez-vous que je préfèrerais être disponible ce soir pour m'informer de ce dossier et vous soutenir, plutôt que de rester là à débattre de questions auxquelles il ne sera pas répondu !

M. le Ministre - Je suis heureux que M. Le Guen reconnaisse mon assiduité à ce débat, mais, s'agissant de ce soir, je rappelle que l'organisation des débats est aussi décidée en conférence des présidents ! Par ailleurs, on n'ébranle pas un ministre, on le convainc, et je ne demande pas mieux que d'être convaincu par vos amendements.

Les amendements 2512 à 2523, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Luc Préel - Mon amendement 7486 vise à supprimer la dernière phrase du premier alinéa, qui laisse au Gouvernement la possibilité de fixer par décret les conditions dans lesquelles les accords comportant des objectifs quantifiés peuvent prévoir un reversement aux établissements de santé d'une partie des dépenses évitées. Dans l'intérêt des patients, il ne faut rechercher par les bonnes pratiques qu'à atteindre des objectifs de santé. Les bonnes pratiques peuvent certes conduire à des économies, mais il ne faut pas que ce soit leur but. D'ailleurs, comment évaluer les économies réalisées ? Et dans quelle proportion devraient-elles être reversées aux établissements ? Je souhaite obtenir une réponse à ces questions, que j'ai déjà posées ce matin.

Mme Martine Billard - Mon amendement 7565 est identique. Ce projet poursuit deux objectifs : améliorer la qualité des soins et maîtriser les dépenses. Mais on a l'impression que la seconde préoccupation l'emporte sur la première. Vous prévoyez des incitations financières en direction des professionnels de santé, alors que vous ne connaissez que la répression financière pour les patients. S'il est très bien d'encourager les bonnes pratiques, on ne peut prévoir dans le décret la fixation d'objectifs quantifiés. L'alinéa suivant évoque des accords analogues, à l'échelon local, avec les professionnels de santé exerçant en ville. Cela n'a plus rien à voir avec les bonnes pratiques hospitalières.

Pour renforcer les budgets des établissements de santé, vous avez imaginé un système très pervers. Sa combinaison avec la tarification à l'activité ne peut que nous inquiéter.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces deux amendements, mais nous avons eu un débat intéressant qui a débouché sur l'adoption de l'amendement 84, que je laisserai M. Préel vous présenter.

M. le Ministre - Même avis. L'intéressement des hôpitaux signifie qu'une partie des économies réalisées ira aux établissements. Les bonnes pratiques nous feront faire des économies en matière de prescriptions pharmaceutiques ou de prescriptions hospitalières de transport. Monsieur Préel, l'objet même du décret est de déterminer les conditions dans lesquelles les accords pourront prévoir des objectifs quantifiés. Le dispositif contractuel procédera d'un débat contradictoire et argumenté.

M. Jean-Luc Préel - Ce projet contient des mesures intéressantes, comme le dossier médical personnel, le médecin traitant ou l'amélioration des bonnes pratiques. Mais elles sont toutes liées à des mesures financières. Le ministre ne nous a pas répondu au fond. S'agit-il, par les bonnes pratiques, de guérir le patient ou de faire des économies ?

Mme Martine Billard - En effet, le ministre n'a pas répondu. S'il y a des prescriptions abusives, il faut évidemment que cela cesse, mais personne ne peut comprendre que, par un reversement proportionnel aux économies réalisées, on récompense les établissements les moins vertueux, au détriment de ceux qui suivent déjà de bonnes pratiques.

Mme Muguette Jacquaint - Nous sommes tous d'accord pour développer les bonnes pratiques. Mais, comme Mme Billard et M. Préel, nous sommes inquiets d'entendre parler d'objectifs quantifiés. J'aimerais bien savoir ce qu'on va quantifier ! En réalité, on va quantifier pour moins bien soigner, dans une stricte logique d'économies. Or, les bonnes pratiques ne devraient avoir pour but que d'améliorer la qualité des soins et de mieux répondre aux besoins de santé. Compte tenu des orientations qui caractérisent le plan Hôpital 2007 et des difficultés que connaissent déjà nombre de centres hospitaliers, permettez-nous d'être inquiets pour l'avenir.

M. le Rapporteur - Nous nous battons depuis des années pour faire entrer la participation dans l'hospitalisation publique. La participation, au sens gaulliste, c'est à la fois la concertation et l'intéressement, sachant qu'à l'hôpital il ne peut s'agir que d'un intéressement collectif, en termes d'équipement. La généralisation des conseils de service par M. Evin, en 1991, a constitué un progrès. Actuellement, lorsqu'un service applique de bonnes pratiques, il n'en retire aucun avantage. C'est pourquoi nous voulons instituer une forme d'intéressement collectif.

M. Gérard Bapt - Le groupe socialiste n'a pas déposé d'amendements sur ce point, mais nous soutenons ceux qui sont en discussion. Si les bonnes pratiques, en réduisant le nombre d'actes, doivent permettre de réaliser des économies, elles auront aussi pour effet de réduire les recettes des établissements, avec la tarification à l'activité.

Par ailleurs, comment les sommes économisées seront-elles redistribuées ? Nous aimerions en savoir plus sur la machinerie financière que vous compter mettre en place.

M. Jean-Marie Le Guen - Je l'avoue : j'ai péché par naïveté (Mouvements divers sur les bancs du groupe UMP). J'avais compris que les accords de bon usage correspondaient à des transferts entre médecine hospitalière et médecine ambulatoire. Par exemple, un service d'oncologie qui souhaite développer l'hospitalisation à domicile ne dispose pas obligatoirement des financements nécessaires et, en renonçant à des journées d'hospitalisation, il perdrait des ressources. Or, l'hospitalisation à domicile ne présenterait que des avantages, tant pour les malades que pour l'assurance maladie. Dans une telle perspective - le transfert de soins -, il ne me semblait pas choquant que l'établissement hospitalier concerné perçoive une compensation. Mais je n'avais pas compris ce sur quoi Mme Billard et M. Préel ont mis l'accent. Votre dispositif signifie-t-il que chaque médecin libéral qui aura signé un accord de bon usage sera habilité à revendiquer une rémunération complémentaire ? Est-ce cela que vous voulez ? D'autre part, comme l'ont justement souligné les orateurs qui m'ont précédé, on ne comprend pas comment s'effectuera la rétrocession ; en particulier, on ne sait pas si elle sera allouée à l'établissement ou aux services « vertueux ». Tout cela devrait être négocié dans l'enveloppe MIGAC.

Les amendements 7486 et 7565 identiques, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Luc Préel - Par l'amendement 84, que la commission a bien voulu accepter, nous précisons que le succès de ces mesures est conditionné par la participation des professionnels de santé à la négociation des accords.

L'amendement 84, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'adoption de cet amendement fait tomber les amendements 3856 à 3867, 72 et 7481, 916 à 939 et 8448.

Mme Jacqueline Fraysse - Je demande une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 16 heures 35, est reprise à 16 heures 50.

M. le Président - Les amendements 2524 à 2535 sont identiques.

Mme Muguette Jacquaint - Ils sont défendus.

Les amendements 2524 à 2535, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 2536 à 2547 sont identiques.

Mme Muguette Jacquaint - Cet amendement vise à supprimer l'application des Acbus - tels que le Gouvernement les conçoit en impliquant les ARH dont la vocation essentielle est d'exercer une contrainte budgétaire - aux établissements de santé. Les hôpitaux sont actuellement confrontés à de très grandes difficultés. Nous craignons que les présentes dispositions du projet tendent à réduire encore leurs moyens humains et financiers, déjà notoirement insuffisants.

Les amendements 2536 à 2547, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Luc Préel - Notre amendement 7487 tend à ce que des accords puissent être conclus à l'échelon régional par le directeur de l'ARH et par le représentant légal de l `établissement. Nous anticipons quelque peu sur la discussion relative à la régionalisation de la santé, à laquelle nous sommes - chacun le sait - très attachés. Nous regrettons du reste que le Gouvernement ne profite pas de ce texte pour aller plus loin dans la voie de la régionalisation sanitaire.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis. S'agissant de la régionalisation, je puis vous garantir que la discussion aura bien lieu lorsque nous examinerons l'article 37 du projet. Il semble prématuré de l'aborder à ce stade de la discussion.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous aimerions tout de même que le Gouvernement nous en dise un peu plus, notamment pour ce qui concerne les agences régionales de santé. M. Douste-Blazy - s'il n'a pas décidé de ne jamais revenir du Sénat (Sourires) - pourra-t-il nous dire de quoi il retourne afin que nous peaufinions nos arguments ? Je rappelle que la régionalisation peut être mise en œuvre de différentes façons. L'option défendue par M. Evin n'a pas franchi le cap de l'article 40 et nous le regrettons vivement, le Gouvernement n'ayant pas cédé à nos instances de la reprendre à son compte. Par contre, la petite musique du rapporteur a bénéficié d'une tolérance assez incompréhensible, le président de la commission des finances ayant considéré comme recevable la proposition de lancer une expérimentation sur un mode d'organisation régionalisée. Le Gouvernement doit indiquer sa propre philosophie. Cela nous donnera une respiration fort bienvenue !

M. le Secrétaire d'Etat - Nous sommes encore loin de l'article 37. Ne soyez pas trop impatients ! Lorsque la régionalisation a été abordée pour la première fois par la mission d'information présidée par Jean-Louis Debré, tout le monde y semblait a priori favorable. Mais chacun n'en a pas la même vision. Certains la considèrent comme un moyen d'aboutir à un système plus efficace, d'autres plaident pour une véritable décentralisation sanitaire, d'autres encore prônent une organisation étatisée au niveau régional... Le point de vue initial du Gouvernement consistait, dans une perspective essentiellement pragmatique, à mieux coordonner les ARH et les URCAM. Il semble que les parlementaires veuillent aller plus loin. D'accord pour y réfléchir, d'autant que des amendements importants ont été déposés en ce sens, concernant d'une part les missions régionales et l'expérimentation d'une structure de type ARS. Vous pouvez compter sur nous pour que le débat sur ces questions aille à son terme !

M. Marc Le Fur - Je profite de cet échange pour interroger le Gouvernement sur les relations entre les ARH et les directeurs d'hôpitaux. Nous sommes dans une situation un peu flottante où l'on ne sait plus vraiment de qui relèvent les directeurs d'établissement : qui les note ? Qui les promeut ? Qui les sanctionne ?

M. le Rapporteur - Ne prenons pas l'habitude de discuter prématurément de sujets qui seront de toute façon abordés ! Et je fais assez confiance au sens de l'organisation et à la finesse rhétoricienne de M. Le Guen pour savoir qu'il a déjà fourbi tous ses arguments sur la régionalisation ! Au reste, nous en avons déjà longuement débattu en commission spéciale. Je l'ai déjà dit, les amendements de M. Evin étaient de qualité...

M. Gérard Bapt - C'est pour ça que vous les avez refusés !

M. Jean-Marie Le Guen - Ils ont été écartés dans une volonté de censure !

M. le Rapporteur - Nullement. L'article 40 de la Constitution a été appliqué...

M. Jean-Marie Le Guen - Pour vos propres propositions, il semble ne pas exister !

M. le Rapporteur - Pas du tout ! Considérez plutôt que nos propositions tendent, sans aucune conséquence financière, à mieux coordonner les URCAM et les ARH (Murmures sur les bancs du groupe socialiste).

M. Gérard Bapt - Monsieur le ministre, des questions précises vous ont été posées sur le fonctionnement de l'hôpital, aussi bien par nos collègues de la majorité que par nous. La balle est donc dans votre camp ! Le moins que l'on puisse dire, c'est que la commission des finances a appliqué l'article 40 de façon discriminatoire. Au regard de leur éventuelle incidence sur les charges publiques, quelle différence de nature y a-t-il entre nos propositions, celle de nos collègues communistes de créer un conseil régional de la santé et celle du rapporteur ?

M. le Président - Je rappelle que l'application de l'article 40 relève du président de la commission des finances, qui s'en est expliqué devant l'Assemblée.

L'amendement 7487, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Les amendements 2548 à 2559 sont identiques.

Mme Muguette Jacquaint - Ils sont défendus.

Les amendements 2548 à 2559, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - La commission spéciale est très attachée à l'amendement 85 rectifié, aussi je souhaite que chacun de ses signataires tente de lever les réticences du Gouvernement...

M. le Président - C'est à moi qu'il appartient de leur donner la parole !

M. Philippe Vitel - Les médecins doivent participer directement à la définition des objectifs d'amélioration médicalisés. Par ailleurs, l'indépendance des médecins et la qualité des soins sont de fortes exigences déontologiques. C'est pourquoi nous proposons que le Conseil de l'ordre soit consulté sur l'ensemble des accords prévus à cet article.

M. Jean-Luc Préel - J'ai déjà exposé les arguments en faveur de mon amendement 7488, que je retire au profit du 85 rectifié.

M. le Secrétaire d'Etat - Auquel le Gouvernement donne un avis favorable.

M. Jean-Marie Le Guen - Le débat que le rapporteur nous annonçait pour convaincre le Gouvernement n'a donc pas eu lieu...

L'amendement 85 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 2560 à 2571 sont identiques.

Mme Muguette Jacquaint - Ils sont défendus.

Les amendements 2560 à 2571, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 8280 est de coordination.

L'amendement 8280, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 7, modifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - Je voulais demander un scrutin public et n'en ai pas eu le temps ! Je le ferai donc sur chacun des articles à venir... Hier, sur l'article 5, le Président Debré m'a au moins laissé le temps de poser la question !

M. le Président - Je n'accepte pas ce genre de remarques ! Il existe une procédure pour les votes par scrutin public, l'eussiez-vous respectée que le scrutin eut été organisé... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Bapt - Le débat s'accélère parfois parce que des amendements tombent...

M. le Président - C'est précisément pour permettre au groupe communiste de s'organiser après que des amendements étaient tombés que j'ai suspendu tout à l'heure la séance. Votre reproche est donc bien malvenu !

ART. 8

M. Jean-Luc Préel - L'évaluation des pratiques professionnelles est essentielle pour améliorer la qualité des soins, objectif auquel nous souscrivons tous. Mais, en dépit des textes adoptés depuis 1993 et de la création des unions régionales des médecins libéraux, nous n'en sommes encore qu'aux balbutiements en la matière.

L'amélioration des pratiques passe notamment par la formation médicale continue, qui doit être obligatoire, financée et évaluée. Il convient aussi de définir les bonnes pratiques et le bon usage du médicament, en s'appuyant sur les propositions que fera la Haute autorité de santé à partir des conférences de consensus et des sociétés professionnelles scientifiques. Il conviendra ensuite d'évaluer les pratiques aussi bien en ambulatoire qu'en établissement.

Nous ne pouvons que souhaiter que cette évaluation devienne enfin réalité car il en va de la qualité des soins.

M. Jean-Marie Le Guen - L'évaluation est une dimension essentielle de la qualité des soins et nous nous réjouissons que ce gouvernement le découvre enfin, après avoir mis à bas tous les dispositifs de contrôle et d'évaluation de la formation des professionnels de santé, au prétexte qu'ils ne devaient pas être rendus publics et qu'ils demeuraient d'ordre contractuel. Deux années ont donc été perdues.

M. Richard Mallié - Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?

M. Jean-Marie Le Guen - Nous l'avions fait et vous l'avez défait, PLFSS après PLFSS, au nom du libéralisme et du laxisme qui vous caractérise !

Nous, nous considérons que, si les professionnels de santé doivent y être associés, c'est bien l'Etat qui est responsable de la qualité des soins, donc de l'évaluation. Il ne saurait s'en remettre à la négociation conventionnelle, d'autant que celle-ci ne peut qu'être tendue entre des gestionnaires qui ne voient pas d'un bon œil les augmentations d'honoraires et des professionnels défendant leur pouvoir d'achat.

Autrefois, le doctorat d'Etat était une garantie de qualité, aujourd'hui, on ne peut s'appuyer pendant toute sa carrière sur un diplôme universitaire et une évaluation régulière est indispensable. Mais pas plus qu'on imagine que le diplôme soit négocié dans le cadre conventionnel, on ne peut s'en remettre à ce dernier pour l'évaluation. Les organisations professionnelles sont elles-mêmes hostiles à ce que l'Etat se défausse de cette responsabilité, comme des autres, sur un proconsul et sur les syndicats.

Mme Jacqueline Fraysse - L'article 8 a, nous dit-on, pour objet de promouvoir l'évaluation et l'amélioration des pratiques professionnelles médicales. C'est un décret du 28 décembre 1999 qui a posé le cadre réglementaire de celles-ci. Volontaire de la part du médecin, l'évaluation des pratiques professionnelles est soit individuelle, soit collective. Lorsqu'elle est individuelle, elle s'appuie sur un diagnostic effectué par des pairs habilités. Lorsqu'elle est collective, elle s'appuie sur des référentiels de pratiques prédéfinies. Dans un cas comme dans l'autre, elle a pour objet d'améliorer la qualité des soins et aussi de permettre des économies. Bien que l'application de ce décret soit très complexe, qui pourrait s'opposer à une telle démarche ? Personne, et surtout pas nous, car face au développement des techniques et des savoirs médicaux, il est nécessaire de faire progresser les pratiques. On ne soigne plus aujourd'hui comme on soignait il y a vingt ans. Mais le contenu de l'article est-il pertinent ? C'est moins sûr.

Un médecin libéral français sur dix devrait être évalué à l'horizon 2006. Les URML et l'ANAES se sont engagées à évaluer les pratiques professionnelles de 10 000 médecins libéraux d'ici à moins de deux ans. Objectif ambitieux quand on sait que moins de 600 médecins ont bouclé une évaluation depuis le 28 décembre 1999.

Une des raisons de l'échec relatif de l'évaluation jusqu'ici tient sans doute au fait qu'elle est déconnectée de la formation professionnelle continue et l'article 8 ne remédie pas à cet inconvénient.

On peut aussi regretter que les dispositions nouvelles ne concernent que les médecins conventionnés et hospitaliers. Il n'y a en réalité aucune raison pour que les médecins non conventionnés ne soient pas associés à la démarche. Je rappelle que l'article 11 du code de déontologie pose que tout médecin doit entretenir et perfectionner ses connaissances.

Tout cela nous amène à nous interroger sur les réelles motivations de cet article : s'agit-il vraiment d'améliorer la qualité des soins ou bien s'agit-il de faire accepter aux professionnels de santé des normes de pratiques conformes à la logique comptable qui sous-tend l'ensemble du projet ?

Mme Muguette Jacquaint - Puisqu'il est ici question de la qualité des soins, je souhaiterais revenir sur la question de la gynécologie médicale. Cette spécialité universitaire est née dans les années 1960, avec le début de la diffusion de la contraception, des dépistages des cancers du col de l'utérus et du sein, en même temps aussi que l'on prenait conscience de la nécessité de sortir l'IVG de la clandestinité.

On découvrait alors que la femme avait des besoins particuliers de surveillance et de soins, en dehors des seules périodes de grossesse et d'accouchement.

Dans les années 1960, ont donc été créées deux spécialités : la gynécologie médicale et la gynécologie obstétrique. Les étudiants de ces deux spécialités suivaient un cursus commun d'un an puis approfondissaient leurs connaissances pendant deux ou trois ans supplémentaires. La gynécologie médicale a immédiatement intéressé les femmes, qui représentent aujourd'hui 87 % de la profession. Ces gynécologues ont mis toute leur compétence à promouvoir la contraception, lutter contre les MST, éviter, grâce au dépistage précoce, les actes chirurgicaux mutilants. Ces dernières années, elles ont plus particulièrement travaillé à la prise en charge des troubles de l'après cinquantaine.

Malheureusement, en 1986, cette spécialité a été supprimée du cursus universitaire, pour des raisons prétendument européennes. Il a fallu des années d'action de la part des professionnels, mais aussi des associations - le Planning familial, notamment - et de toutes les femmes pour que Bernard Kouchner, après une intervention insistante du groupe communiste, réintroduise la gynécologie médicale dans le cursus.

Nous manquons aujourd'hui de gynécologues et cette situation inquiète des millions de femmes. Une pétition avait d'ailleurs été signée sur ce thème qui a rassemblé 3 millions de signatures. Ma question est donc simple, Monsieur le ministre : qu'allez-vous faire pour la gynécologie médicale, pour le droit des femmes à la santé ?

M. le Ministre - Les gynécologues obstétriciens ont autant d'importance que les gynécologues médicaux...

Mme Muguette Jacquaint - Oui.

M. le Ministre - ...mais il est vrai que ces derniers font un travail précieux de prévention et constituent une spécificité française qu'il faut garder.

J'en reviens à l'évaluation. Les médecins libéraux ne sont actuellement soumis à aucune obligation d'évaluation de leurs pratiques professionnelles. Celle-ci ne peut être pour le moment que volontaire. La procédure fait intervenir à la fois les URML et des médecins évaluateurs habilités par l'ANAES. Le Haut comité pour l'assurance maladie souligne toutefois qu'elle est loin de s'être généralisée puisque, à ce jour, seuls 500 médecins ont été évalués ou sont en cours d'évaluation.

Les médecins sont seulement tenus de se former dans le cadre de la formation professionnelle continue prévue à l'article L. 41-33-1 du code de la santé publique, actuellement en cours de modification par l'article 51 du projet de loi relatif à la santé publique. L'évaluation des pratiques professionnelles étant une des conditions de l'amélioration de la qualité des soins, le présent article tend à la rendre obligatoire.

A défaut d'engagement du médecin en ce sens, il sera tenu de participer à l'une des actions d'évaluation mises en place par son URCAM. Le dispositif ne prévoit pas de sanction directe si l'obligation n'est pas respectée, mais le dispositif de sanctions de l'article 13 peut théoriquement être utilisé, et les caisses pourront informer les assurés sur le respect par les médecins des obligations d'évaluation. Ces mesures font partie des dispositions du projet qui tendent à une maîtrise médicalisée, et dont le rendement financier est estimé à 3,5 milliards d'euros d'ici à 2007. Je reste convaincu que la formation continue est essentielle, et c'est prévu dans le projet.

M. Claude Evin - Il est intéressant de constater, Monsieur le ministre, quoi que vous disiez par ailleurs, que vous ressentez le besoin d'introduire une obligation dans le code de la sécurité sociale pour faire appliquer une obligation qui relève de l'objectif de qualité de l'offre de soins. Je le dis sans polémique, mais sur le mode du constat : cela montre que, pour atteindre des objectifs de santé publique, il est nécessaire de fixer des obligations aux professionnels de santé. Il est bon que vous le reconnaissiez : quand d'autres le disaient, vous les critiquiez fortement.

Le problème est que vous ne faites que la moitié du chemin, et vous l'avez reconnu vous-même : il y a une obligation, mais pas de sanction. Vous affirmez que, théoriquement, l'article 13 va résoudre le problème. Mais en réalité, si les professionnels ne satisfont pas à cette obligation, nous nous retrouverons à nouveau dans cinq ou dix ans pour le déplorer... Je pense qu'il aurait fallu aller jusqu'au bout, et peut-être le débat le permettra-t-il. C'est vous qui êtes au Gouvernement : il n'incombe pas à l'opposition de consolider par ses amendements les dispositions que vous proposez, et nous n'en avons pas déposé sur ce point. Mais je tenais à le dire : vous affichez un objectif, que nous pourrions partager, sur la nécessité de l'évaluation pour les professionnels libéraux ; mais, concrètement, je vous donne rendez-vous dans deux ans pour vérifier si l'évaluation des pratiques s'est réellement mise en place dans le cadre conventionnel établi par le code de la sécurité sociale.

M. Jean-Pierre Door - L'article 8 est très important, car la démarche de qualité en matière de santé passe par l'évaluation des pratiques. Il s'agit pour nous d'instituer des procédures garantissant au patient que tous les actes médicaux accomplis étaient nécessaires, et que le choix a été fait dans son intérêt d'abord, et aussi dans celui d'une recherche du meilleur coût. L'évaluation des pratiques selon les référentiels déterminés par la Haute autorité requiert la constitution d'un conseil ou d'un observatoire, plutôt que la démarche trop étatique envisagée par M. Le Guen. Il faut que ce conseil soit efficace ; à cet égard le décret à venir sera très important, et il doit être concerté avec l'ANAES, les URML et le Conseil national de la formation continue médicale. Je veux ici rendre hommage au Dr Matillon, ancien directeur de l'ANAES, qui vient d'achever son rapport sur l'évaluation des compétences des métiers de santé, qui montre qu'on a fait un grand pas en avant. Nous souhaitons, Monsieur le ministre, qu'il soit publié rapidement, car c'est à partir de là que nous pourrons engager réellement des procédures d'évaluation des pratiques professionnelles, et rendre l'évaluation obligatoire ; je crois d'ailleurs qu'elle est aujourd'hui acceptée par la plupart des professionnels, hospitaliers ou libéraux.

M. Alain Vidalies - Les deux observations qu'appelle cet article sont déjà faites dans le rapport. Notre rapporteur y écrit en effet avec lucidité, d'abord que l'obligation posée ne s'assortit d'aucune sanction, ensuite que le projet n'en précise pas la périodicité... De l'avis même du rapporteur, nous restons donc sur le terrain de la déclaration de principe. J'ajouterai cette remarque : nous sommes tous d'accord sur la nécessité d'une formation et d'une évaluation. Mais pourquoi, dans ce projet, M. le ministre limite-t-il au système conventionnel - ou arbitral, par défaut - le champ de cette disposition ? Cela crée deux difficultés juridiques. Tout d'abord, on ne voit pas pourquoi le secteur 3 échapperait ainsi à l'évaluation, si l'on poursuit bien un objectif de santé publique et non de simple maîtrise des dépenses. Ensuite, la rédaction actuelle ne permet-elle pas à un médecin ou à une organisation syndicale non signataire d'une convention, et qui engagerait une procédure devant le Conseil d'Etat , de s'exonérer de cette obligation ? Il y a là une vraie difficulté.

Enfin M. le ministre nous a dit - ce qui était satisfaisant, quoique inattendu - qu'il y aurait tout de même une sanction, et qu'il fallait comprendre le projet comme permettant l'application des sanctions de l'article 13 pour non-respect des obligations de l'article 8. J'en prends acte, mais ce n'est absolument pas écrit dans le texte. Comment le Gouvernement entend-il faire en sorte qu'il n'y ait sur ce point aucune difficulté d'interprétation de la loi ?

M. le Rapporteur - Je précise à M. Vidalies que la commission a adopté un certain nombre d'amendements qui vont dans le sens qu'il souhaite, notamment un amendement de M. Evin prévoyant que l'évaluation doit être régulière, et un autre de Mme Poletti qui en généralise l'obligation à l'ensemble des professions de santé.

M. le Secrétaire d'Etat - Plusieurs orateurs, notamment Mme Fraysse et M. Vidalies, ont soutenu que les dispositions de l'article 8 devaient s'appliquer à tous les praticiens. J'indique déjà que le Gouvernement sera favorable à un amendement en ce sens, qui devrait rencontrer l'accord de tous.

M. Jean-Marie Le Guen - L'idée qu'il n'est pas d'obligation réelle sans sanction vous a beaucoup servi, aux articles 2, 4, 5, à justifier les baisses de remboursements pour les assurés. Il serait cohérent de se rappeler cette idée à l'article 8. M. le ministre renvoie pour les sanctions à l'article 13. Mais ce dernier ne vise que le cas où des prescriptions contestables auraient été émises : c'est la prescription qui est en cause, non la situation du médecin. Nous n'allons tout de même pas attendre de constater que des prescriptions non conformes ont été émises par un médecin non évalué ! Je ne vois donc pas du tout en quoi l'article 13 répond à notre problème, avec lequel il n'a aucun rapport. C'est pourquoi notre amendement 8116 prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat déterminera les règles tendant au respect de l'obligation de formation médicale continue. C'est en effet un élément déterminant pour l'évaluation.

Personne ici ne pense sérieusement à faire passer un examen aux professionnels de santé. Il s'agirait plutôt de procédures d'auto-évaluation ou de validation d'étapes.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement. La Haute autorité, scientifique, est là pour fixer les référentiels et recommandations de bonne pratique, tandis que l'ANAES reste la structure d'évaluation. Je pense qu'il est important de conserver la distinction.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable. Conscient de l'intérêt pour les patients de généraliser l'évaluation des pratiques professionnelles, le Gouvernement pose, dans cet article, le principe de son obligation, qui pèsera sur les médecins libéraux, les médecins hospitaliers, et les médecins salariés d'un centre de santé.

La Haute autorité en santé devra évaluer le service rendu et promouvoir le bon usage des soins, mais il serait excessif de lui confier la détermination des conditions dans lesquelles les médecins doivent s'engager dans les démarches d'évaluation. Si une agence doit intervenir dans ce domaine, que ce soit plutôt l'ANAES.

Conformément à un amendement accepté par le Gouvernement, la périodicité de cette obligation sera déterminée par un arrêté, moins lourd qu' un décret.

D'autre part, Monsieur Le Guen, M. le ministre a dit que l'article 13 pourrait répondre à la question que vous avez soulevée. S'il s'avérait toutefois nécessaire de préciser les choses, nous sommes ouverts au débat.

M. Richard Mallié - L'amendement 8116 me gêne en ce qu'il concerne tous les médecins, alors que certains bénéficient déjà d'une formation continue, comme c'est le cas pour les médecins du travail. Je préfère par conséquent l'amendement 8210, que je défends, et qui vise simplement les médecins exerçant à titre libéral ou dans un établissement de santé.

M. Claude Evin - Il ne s'agit pas de formation continue, mais d'évaluation des pratiques, qui s'applique à tous les médecins, y compris ceux qui bénéficient d'une formation continue grâce à leur employeur.

Vous nous renvoyez à l'article 13, mais celui-ci tend à sanctionner les auteurs de fraudes ou de manquements à la réglementation applicable en matière de sécurité sociale, et n'a rien à voir avec l'obligation d'évaluation !

M. Jean-Marie Le Guen - Il serait plus logique, en effet, de traiter de cette question à l'article 8 ! Nous sommes tous d'accord pour sanctionner cette obligation, mais pourquoi en parler à l'article 13 qui ne concerne pas ce sujet ? Ne pourrait-on suspendre la séance pour que le ministre nous explique comment on pourrait introduire la notion de sanction à l'article 8 ?

M. le Président - Le Gouvernement n'a pas demandé de suspension de séance, et vous vous êtes exprimés clairement, aussi vais-je mettre aux voix l'amendement 8116.

L'amendement 8116, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - L'amendement 8210 a déjà été défendu par M. Mallié.

M. le Rapporteur - Favorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous y sommes également favorables. Cela dit, je persiste à croire que si le ministre avait été là, il aurait accédé à notre demande. Le secrétaire d'Etat a reconnu le problème, mais je pense qu'il n'a pas la possibilité de trancher. L'absence du ministre n'a pas fini de nous poser problème ! Je demande donc une suspension de séance.

L'amendement 8210, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 7855 et 8281 tombent.

La séance, suspendue à 17 heures 55, est reprise à 18 heures 5.

M. le Rapporteur - L'amendement 8282 de la commission vise à associer les centres de santé au dispositif.

L'amendement 8282, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Je laisse M. Evin présenter l'amendement 86 de la commission, qui est presque identique à son amendement 7017.

M. Claude Evin - Participer à une action d'évaluation, c'est bien, mais participer à plusieurs de ces actions, c'est mieux... L'amendement vise à prévoir une participation régulière des médecins aux actions d'évaluation, même si le rythme devra être défini plus tard.

L'amendement 86, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Sur le vote de l'article 8, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 7806 de M. Brard vise à lier l'évaluation à la formation médicale continue, ces deux enjeux étant indissociables. L'évolution des pratiques médicales et la place prise par les nouvelles technologies rendent nécessaire l'accompagnement du médecin tout au long de sa carrière. L'ordonnance Juppé du 25 avril 1996 précise d'ailleurs qu'entretenir et perfectionner ses connaissances constitue, pour le médecin, un devoir professionnel. Mais elle ne concerne que les professionnels libéraux exerçant dans les établissements de santé publics ou privés du service public hospitalier. M. Brard propose d'étendre cette disposition à l'ensemble des professions de santé.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, parce que la formation médicale continue ne figure que dans le projet relatif à la santé publique.

L'amendement 7806, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Evin - Le groupe socialiste s'abstiendra sur le vote de l'article 8. Nous sommes favorables à l'évaluation, mais il ne suffit pas de rendre obligatoires des procédures pour qu'elles se mettent en place. Or, dans ce texte, aucune mesure ne sanctionne le non-respect des obligations faites en matière d'évaluation. Le Gouvernement nous fera peut-être une proposition par la suite, mais en l'état du projet, nous nous abstiendrons.

A la majorité de 33 voix contre 0, sur 41 votants et 33 suffrages exprimés, l'article 8, modifié, est adopté.

APRÈS L'ART. 8

M. Jean-Pierre Door - La responsabilité civile professionnelle des médecins est en crise, en particulier dans des spécialités comme l'anesthésie ou la chirurgie. En 2002, la loi About a garanti la couverture de tous les établissements et professionnels concernés et permis la stabilisation des primes d'assurance. Mais, comme le souligne le rapport de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociales, le principal obstacle demeure la carence d'informations en matière de sinistralité médicale. L'amendement 8241 vise donc à créer un observatoire de la sinistralité chargé de rassembler des informations sur les accidents médicaux et sur les indemnisations versées en réparation des dommages. Il devra être rattaché à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, mais il sera placé sous le contrôle d'une commission composée de toutes les parties prenantes.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable à cet amendement, conforme à nos ambitions en matière de qualité.

M. Claude Evin - Comme l'a dit M. Préel à voix basse, cet amendement aurait pu être sanctionné par le président de la commission des finances au titre de l'article 40, comme l'ont été plusieurs des nôtres. Il s'agit en effet de créer un organisme nouveau. Je remarque que l'appréciation du président de la commission des finances diffère selon l'origine des amendements. Je sais que ses décisions ne souffrent aucune contestation, mais la parole est libre dans l'hémicycle.

Y a-t-il vraiment, comme l'a dit M. Door, « une crise de la responsabilité civile des médecins » ? Certes, dans des spécialités comme la chirurgie, la gynécologie obstétrique et l'anesthésie, certains professionnels de santé subissent une forte pression des assureurs depuis plusieurs mois.

Est-ce que, pour autant, le nombre de sinistres est plus grand ? Certes, on constate une augmentation du nombre de plaintes et du nombre de procédures engagées, mais cela découle pour partie de la loi du 4 mars 2002, qui avait précisément pour objectif de simplifier l'accès au droit à réparation. Cela dit, ce n'est pas tant le nombre de procédures qui a augmenté (M. Door manifeste son désaccord) que le montant des indemnisations...

M. Pierre-Louis Fagniez - Très fortement, en effet.

M. Claude Evin - Le risque étant donc plus élevé, les assureurs ont été conduits à réévaluer le montant des primes. Toutefois, la responsabilité civile médicale n'explique pas à elle seule cette augmentation, les assureurs ayant aussi pris en compte les conséquences des attentats du 11 septembre et celles des catastrophes naturelles. Mais il est vrai que certaines spécialités ont été plus affectées que d'autres par la hausse des primes ; c'est pourquoi la loi du 31 décembre 2002 a cherché une solution à ce problème. Après quoi, le rapport de l'inspection des finances et de l'inspection des affaires sociales a souligné que toute précipitation serait malvenue, puisque la loi du 4 mars 2002 aurait pour effet de stabiliser la situation à terme. Il convient donc de se montrer prudents dans l'application du dispositif qui nous est proposé ici. Je sais que M. Domergue et M. Door ont déposé une proposition de loi à ce sujet ; je me félicite qu'elle ne soit pas soumise à notre appréciation, car mes observations auraient été plus acerbes. Pour ce qui nous est proposé ici, je maintiens que d'autres solutions sont possibles. De surcroît, nous ne pouvons porter une appréciation exacte sur le dispositif présenté par M. Door sans examiner en même temps l'amendement 8460 du Gouvernement.

Par cet amendement, le Gouvernement propose en effet de confier à l'ANAES la labellisation de la pratique professionnelle des médecins, labellisation en contrepartie de laquelle les professionnels concernés bénéficieraient d'une aide à la souscription du contrat d'assurance. Ainsi, on rémunérerait 5 000 € les médecins qui participeraient à ce dispositif. Autrement dit, il s'agit d'un faux nez derrière lequel on dissimule le fait que l'on paie ainsi les primes d'assurance des spécialistes les plus exposés aux risques professionnels. Je déplore que cet amendement n'ait pas été soumis à la commission.

M. Jean-Pierre Door - Je remercie M. Evin d'avoir abordé cette question importante sans esprit polémique. Je rappelle que l'inspection des finances et l'inspection des affaires sociales ont pointé l'absence d'études fiables de la sinistralité en matière de risque médical. D'autre part, les comités régionaux ont été installés il y a quatre à six mois seulement, si bien que les statistiques sont encore notoirement insuffisantes et les chiffres disparates. Cela ne peut durer. Les anesthésistes ont apporté la preuve qu'en consentant de gros efforts, ils parviennent à modifier leur pratique professionnelle d'une manière telle que le risque diminue, si bien que leurs primes retrouvent un montant correct. Mais ce n'est encore le cas ni pour les chirurgiens, ni pour les gynécologues, ni pour les obstétriciens. Voilà qui explique l'amendement 8241, qui tend à étudier avec sérieux et en toute transparence l'évolution du risque en matière de responsabilité civile médicale, l'observatoire proposé étant bien entendu rattaché à l'ONIAM. Quant à l'amendement 8460 du Gouvernement, il aborde un autre problème.

M. le Président - Les deux amendements étant liés, je suggère à M. le secrétaire d'Etat de présenter l'amendement 8460 du Gouvernement.

M. le Secrétaire d'Etat - Personne ne peut nier le problème de l'assurance de la responsabilité médicale. Il fallait donc agir et c'est pourquoi le Gouvernement vous propose un amendement d'une grande importance. Depuis plus d'un an, le marché de l'assurance médicale connaît des soubresauts dus à la judiciarisation croissante des relations entre médecins et malades. Parfois, le phénomène, qui n'est pas uniquement français, s'apparente à une déflagration, tant les primes des spécialistes concernés ont augmenté. Il faut trouver une solution pour mettre un terme à cette crise qui porte en germe une crise de la médecine, les professions concernées souffrant, plus que les autres, d'une crise démographique.

Comme l'a rappelé M. Door, les anesthésistes ont démontré qu'une pratique professionnelle de qualité réduit le taux de sinistres : il a baissé, pour eux, de 4 % entre 2000 et 2002. Il convient donc de compléter la proposition présentée par M. Door en précisant le rôle que l'ANAES sera appelée à jouer dans la politique de labellisation que nous souhaitons instaurer. Aujourd'hui, les primes d'assurance des spécialistes les plus exposés sont prises en charge sans contrepartie ; nous proposons que, désormais, cette prise en charge récompense l'engagement en faveur d'une démarche de qualité. Tel est l'esprit de l'amendement 8460, qui complète l'amendement 8241 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Rapporteur - L'amendement du Gouvernement me paraît susceptible d'avoir une forte incidence sur la qualité, et je considère qu'il ne se limite pas aux questions d'assurance. Cependant, l'emploi du terme « labellisation », plutôt destiné à s'appliquer à des produits qu'à des hommes, me choque un peu. Je suggère qu'on le remplace par le terme « accréditation », beaucoup plus pertinent dans ce contexte. Donner crédit à une équipe, c'est, dans les pratiques anglo-saxonnes, reconnaître sa compétence, son niveau de formation et sa haute technicité. Le terme d'accréditation est du reste déjà employé par l'ANAES pour apprécier la qualité des services connexes aux soins des établissements - circuit des médicaments, tenue des archives, qualité de l'hébergement, etc. - et nombre d'établissements aspireraient aussi à être accrédités pour leur activité médicale.

M. Jean-Marie Le Guen - Tout à fait !

M. le Rapporteur - Je propose par conséquent d'adopter une nouvelle terminologie, en réservant la « certification » aux établissement et l' « accréditation » aux équipes médicales et aux médecins, dans le public comme dans le privé.

M. le Président - Monsieur le ministre, êtes vous d'accord pour substituer dans tous les paragraphes de votre amendement 8460 « accréditation » à « labellisation » ?

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est tout à fait ouvert à cette proposition de rectification. Il est en effet essentiel de bien distinguer les démarches qualité qui concernent les établissements de celles qui valident la démarche de professionnels de santé.

M. le Président - Dans l'amendement 8460 rectifié du Gouvernement, le mot « labellisation » est donc systématiquement remplacé par le mot « accréditation ».

M. Jean-Marie Le Guen - Je soutiens la position de notre rapporteur mais elle est lourde de conséquences. Elle tend en effet à sortir de la logique de l'amendement Domergue, visant à labelliser les plus performants, pour fixer l'objectif autrement ambitieux d'une accréditation pour tous. En pratique, cela veut dire que les meilleurs seraient mieux accompagnés, cependant que ceux qui présentent le moins d'éléments de qualité seraient laissés sur le bord du chemin ! Est-ce vraiment le modèle que nous devons promouvoir ? Doit-on accepter, en ces matières, la survivance d'un « bas de gamme » peu aidé ? L'égalité dans l'accès aux soins y trouve-t-elle son compte, sachant que la démarche de qualité a vocation à s'étendre à l'ensemble des professionnels de santé ? Le coût de la mesure est estimé à 100 millions...

M. le Président - Veuillez conclure.

M. Jean-Marie Le Guen - ...Est-il prévu que l'assurance maladie la finance en totalité ? Allons nous étendre la logique du donnant-donnant...

M. le Président - Monsieur Le Guen, vous n'avez plus la parole. Je vous prie de tenir compte de mes observations lorsque je vous indique que votre temps de parole est écoulé.

M. Richard Mallié - Je reviens sur la proposition du rapporteur de substituer accréditation à labellisation...

M. le Président - Le Gouvernement l'ayant acceptée, l'amendement 8460 est ainsi rectifié.

M. Jean-Marie Le Guen - C'est aller un peu vite en besogne !

M. le Président - C'est moi qui préside !

M. Jean-Marie Le Guen - Oui, mais c'est nous qui votons ! (Murmures)

M. Richard Mallié - Pour ma part, je suis assez réservé quant à cette rectification. Accréditer, en français courant, cela signifie surtout « donner une autorisation, donner le droit de faire ». Notre objectif était de susciter une démarche qualité et le terme d'accréditation ne le traduit que très imparfaitement.

M. Claude Evin - Je me demande si le Gouvernement n'a pas accepté de rectifier son amendement un peu prématurément dans la mesure où le Sénat est appelé à se prononcer dans les prochains jours.

Pour notre part, nous sommes tout à fait favorables à la labellisation ou à l'accréditation, mais nous voyons mal comment l'évaluation des compétences, sur laquelle travaille actuellement l'ancien directeur général de l'ANAES, pourra être intégrée dans cette procédure. Nous nous demandons également comment la labellisation s'appliquera dans les établissements publics de santé, compte tenu de leur organisation hiérarchisée. Que se passera-t-il en outre quand un praticien hospitalier n'obtiendra pas le label ? Il est difficile de répondre car votre amendement parle d'équipes et pas de médecins.

M. le Rapporteur et M. le Secrétaire d'Etat - Avez-vous lu la deuxième page ?

M. Claude Evin - Comment tout comprendre dans les conditions de travail qui sont les nôtres ?

La crise de la responsabilité civile a conduit ces deux dernières années à une augmentation de 30 à 40 % des primes d'assurance pour les professionnels libéraux comme pour les établissements de santé. On pourrait y répondre par la tarification à l'activité ou par l'ONDAM hospitalier, mais cela relève du PLFSS. En tout cas je ne crois pas que la procédure prévue par cet amendement soit la bonne. Mieux vaudrait, comme pour les avocats, prévoir une mutualisation du risque gérée par l'Ordre. Par ailleurs, dans la réflexion qu'elle a engagée, l'ANAES envisage une prime de 5 000 € par an et par médecin, l'avez-vous budgétée ?

Vraiment, je crois qu'en apportant une réponse précipitée à un vrai problème, on risque d'aggraver la situation.

M. Jean-Pierre Door - Ne noyons pas le poisson : nous sommes tous d'accord pour constater qu'il y a un problème grave, en particulier pour la chirurgie de secteur 1. Dans le secteur  2, il est possible d'augmenter les tarifs, mais le secteur 1 est prisonnier des KCC. On peut toujours envisager une modification ultérieure de la nomenclature, mais pour résoudre le problème au plus vite l'amendement du Gouvernement me paraît assez satisfaisant car il engage la responsabilité des acteurs qui prennent des risques dans trois ou quatre spécialités. Ce sont eux qui ont des problèmes d'assurance, pas les 100 000 généralistes. Si nous avons pu exercer pendant trente ans sans jamais être confrontés au risque, nous voyons bien que tel n'est plus le cas de nos confrères qui s'installent aujourd'hui.

Une meilleure gestion des risques passe par la labellisation qui fera prendre conscience aux professionnels de la nécessité d'être extrêmement prudent, y compris dans les établissements privés. Le besoin d'une aide financière sera beaucoup moins fort lorsque la sinistralité aura été réduite et que cette gestion des risques aura été mise en œuvre. D'ailleurs, les assureurs annoncent eux-mêmes qu'ils réduiront les primes au vu des premiers résultats.

M. le Président - Sur les amendements 8241 et 8460 rectifié, le groupe UMP demande un scrutin public.

M. le Président de la commission spéciale - M. Evin s'est étonné que l'amendement 8241 ne se soit pas vu opposer l'article 40, mais c'est parce que l'observatoire des risques médicaux est une charge que l'ONDAM peut assumer.

M. le Secrétaire d'Etat - Notre démarche est générale, progressive, fondée sur le volontariat, et ses résultats seront publics. Les 45 millions nécessaires seront trouvés par l'assurance maladie. La démarche de qualité constituera une incitation forte. J'ajoute que cette mesure a fait l'objet d'une vraie concertation avec les chirurgiens publics et privés.

Je constate qu'une fois de plus le groupe socialiste est d'accord sur le principe, avant de se prononcer contre. Pour notre part, nous cherchons à régler un vrai problème et chacun prendra ses responsabilités (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - Lorsqu'on voit arriver des textes au dernier moment, il est tout de même permis de poser quelques questions...

M. Richard Mallié - Vous n'aviez qu'à déposer moins d'amendements, cela aurait laissé plus de temps pour une vraie discussion !

M. Jean-Marie Le Guen - Nous avons découvert en séance l'amendement du Gouvernement !

Je constate que si le Gouvernement parle de volontariat, de pédagogie et d'incitation pour les professionnels, il ne s'embarrasse pas de tout cela pour les assurés sociaux, pour lesquels il est plutôt question d'obligation et de sanction. Pourtant, s'agissant de la qualité, si obligation il doit y avoir, elle devrait être plutôt pour les professionnels. En tout cas, il y a deux poids, deux mesures (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Je constate également que partant du problème particulier des chirurgiens, vous avez généralisé le processus de qualité à l'ensemble des professionnels de santé. Mais comme ceux-ci sont tous confrontés à une explosion de leurs primes d'assurance, vous serez obligé demain d'accepter pour tous ce que vous acceptez aujourd'hui pour les chirurgiens. Vous venez donc, Monsieur le ministre, Monsieur le secrétaire d'Etat, de mettre dans le débat conventionnel un sujet qui aura des conséquences économiques et financières autrement plus importantes que ce que vous prévoyez.

Mme Jacqueline Fraysse - Nous découvrons en séance un amendement important, long et complexe. Il n'est pas possible de travailler ainsi. Je ne nie pas qu'il y ait un problème, mais il me semble que la réponse n'est pas mûre. On nous dit que les primes d'assurance explosent, mais la question devrait alors être celle-ci : allons-nous, au nom de la sacro-sainte loi du marché, laisser les assurances privées faire ce qu'elles veulent ? Allons-nous les laisser augmenter sans cesse leurs tarifs alors même qu'elles vont en somme être subventionnées par l'assurance maladie ?

Nous voterons contre cet amendement.

M. Claude Evin - Je me félicite de pouvoir intervenir à un moment où M. Douste-Blazy est avec nous, car j'aimerais bien savoir ce qui se passera lorsqu'un professionnel ou une équipe n'auront pas eu le label.

Je voudrais dire à M. Bertrand, qui a fait une intervention un peu provocatrice, que nous sommes évidemment favorables à tout ce qui peut renforcer la qualité. L'ANAES trouve d'ailleurs son origine dans une instance qui avait été créée en avril 1990. Mais nous nous abstiendrons sur l'amendement, car il laisse trop d'incertitudes sur les procédures et parce qu'il avait d'autres solutions que celle proposée par le Gouvernement pour répondre au problème de l'assurance responsabilité civile. Nous sommes pour la qualité, la labellisation et l'évaluation mais ce n'est pas une raison pour voter un texte très imparfait. Permettez à l'opposition de garder son esprit critique !

A la majorité de 41 voix contre 4, sur 55 votants et 45 suffrages exprimés, l'amendement 8241 est adopté.

A la majorité de 41 voix contre 4, sur 55 votants et 45 suffrages exprimés, l'amendement 8460 rectifié est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - Rappel au Règlement. Je ne vais pas demander de suspension de séance, mais je tiens à exprimer notre mécontentement concernant nos conditions de travail. Nous venons de débattre de sujets importants aux conséquences financières lourdes et nous l'avons fait avec des amendements non étudiés en commission, en particulier un amendement du Gouvernement que nous avons découvert au dernier moment. Et nous nous apprêtons à examiner des amendements sur la toxicomanie qui n'ont pas été débattus en commission. Bref, nous sommes bousculés. Pendant ce temps, le ministre de la santé faisait une conférence de presse sur les propositions qu'il va présenter ce soir ou demain au Sénat, dans le cadre du projet de loi sur la santé publique. Nous apprenons ainsi que des reculs vont avoir lieu par rapport au texte que nous avions adopté ici en deuxième lecture... Le Gouvernement a notamment cédé aux exigences des industries alimentaires, au détriment de la prévention concernant les enfants.

Pour en revenir à mon rappel au Règlement, je maintiens que nous ne pouvons pas continuer à travailler ainsi.

M. le Président - Merci, Monsieur Le Guen. La courtoisie est indispensable, je la dois à chacun et je l'attends de chacun, ayant par ailleurs suffisamment de pratique pour résister aux rapports de force, d'où qu'ils viennent d'ailleurs.

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 7856 est défendu.

L'amendement 7856, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président de la commission spéciale- Beaucoup de médecins et de pharmaciens appellent de longue date notre attention sur les dérives liées aux traitements de substitution aux opiacées. Bien que des études aient été conduites, notamment celle du service médical de la caisse d'assurance maladie d'Ile-de-France en 2002, aucune réponse n'a encore été apportée à ce problème. Je crois nécessaire d'en donner une, car les outils réglementaires actuels ne permettent pas de mettre fin aux prescriptions et consommations abusives. Je rappelle que des médicaments comme le Subutex pèsent lourd dans les prescriptions : avec environ 110 millions d'euros par an, c'est le onzième médicament prescrit en France. Or les prescriptions abusives sont estimées à quelque 20 millions d'euros, ce qui n'est pas rien. Certains pharmaciens estiment qu'environ 28 % de leurs clients pour ces produits sont des clients nomades. On sait aussi que de nombreux consommateurs des produits de substitution ont recours à plusieurs prescripteurs, d'un à quatre pour la majorité, et plus de cinq pour 7 % d'entre eux.

Je propose donc par l'amendement 7744 rectifié d'instituer de véritables protocoles : chaque malade devra s'inscrire auprès d'un médecin, et un accord sera conclu entre celui-ci, le patient et l'assurance maladie pour mettre en place un parcours thérapeutique, où chacun sera conduit à choisir un seul médecin prescripteur et un seul pharmacien. Il ne s'agit nullement d'entraver l'accès aux soins de ces patients, mais de recadrer la prescription et la consommation sur ce qui est légitime.

M. le Ministre - La politique de substitution aux opiacées est dans notre pays un succès incontesté. Elle s'est accompagnée d'une quasi-disparition de la transmission du virus VIH chez les usagers de drogues par voie intraveineuse, et d'une chute des décès par surdose et de la consommation d'héroïne. Ce succès est en grande partie lié au choix d'un accès large en médecine de ville à la buprénorphine haut dosage, qui représente 80 % des traitements de substitution.

Ce choix a pour revers le développement d'un trafic qui pose un problème de santé publique, puisque le traitement de substitution devient pour certains jeunes le point d'entrée dans des pratiques addictives. On estime que ce trafic coûterait chaque année 30  millions d'euros à l'assurance maladie. Il est donc essentiel de lutter contre la fraude.

Toutefois il ne faut pas faire obstacle à l'accès aux traitements d'une population fragile et par nature difficile à prendre en charge. En revanche il existe un consensus sur un plan d'action qui a déjà montré son efficacité dans certaines régions. Il s'agit de l'inscription obligatoire du nom du pharmacien sur l'ordonnance, comme c'est le cas pour la méthadone ; et de la généralisation du protocole PIRES, article L. 324-1 du code de la sécurité sociale. Ce plan a été expérimenté en Gironde pour les patients ayant initialement trois prescripteurs ou plus, et il a permis de normaliser les comportements dans les deux tiers des cas.

Je suis donc favorable à l'amendement de M. Bur, sous réserve de deux sous-amendements. Le sous-amendement 8457 a pour but de ne pas stigmatiser les toxicomanes par une procédure spécifique alors que le sujet est potentiellement plus vaste : il faut viser toutes les situations où des médicaments peuvent faire l'objet d'un trafic. Quant au sous-amendement 8458, il tend à supprimer le II de l'amendement par cohérence avec l'ensemble du projet de loi : le médecin en question doit être le médecin traitant institué par les articles 4 et 5.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné l'amendement, non plus que les sous-amendements. Avis personnel favorable.

M. Gérard Bapt - Je veux élever une double protestation. Nous avons eu précédemment l'occasion de déplorer que des amendements n'aient pas été examinés en commission : voilà que nous nous retrouvons dans la même situation. D'autre part, puisqu'on parle de toxicomanie, je saisis cette occasion pour demander, Monsieur le ministre, quand la Mission interministérielle de lutte contre la toxicomanie recevra enfin l'agrément pour son plan quinquennal. Celui-ci aurait dû couvrir la période du 1er janvier 2004 à la fin 2009. La MILT, qui a déjà vu son budget s'effondrer de 30 % au point de devoir renoncer à toute action avec les associations nationales, attend en outre sa feuille de route depuis six mois !

Quant à l'amendement, il répond à un vrai problème, nous le savons par les responsables d'associations et par les pharmaciens. Ces derniers subissent souvent une forte pression psychologique, qui ne peut pas toujours être traitée par les forces de police. Mais cet amendement arrive alors que vient de se tenir, à la demande de l'Etat, une conférence de consensus où l'ANAES et la Fédération française d'addictologie ont travaillé ensemble, et dont le Gouvernement n'a pas encore reçu les conclusions. Ne faudrait-il pas attendre la première lecture au Sénat pour légiférer ? Quand on convoque une conférence de consensus, il est normal d'attendre ses conclusions pour traiter le sujet.

D'autre part le ministre a dit qu'il ne voulait pas stigmatiser les toxicomanes par un protocole de soins particulier. J'observe toutefois que c'est le seul qui aura été défini par voie législative, alors qu'en général vous renvoyez les protocoles de soins à la convention ou au décret.

Enfin je m'interroge sur les deux sous-amendements du Gouvernement, dont chacun vise un des alinéas de l'amendement. Le premier évoque « la prise en charge par l'assurance maladie de soins ou traitements susceptible de faire l'objet d'un usage détourné ». Il faudrait préciser quels soins et traitements sont concernés, en dehors des traitements de substitution à la drogue. Et il faudrait définir ce qu'est un « usage détourné ». Quant au deuxième sous-amendement, il supprime le II de l'amendement. Celui-ci prévoyait le versement par le pharmacien à l'organisme de prise en charge d'une somme correspondant au coût du traitement, dans le cas où il aurait délivré une prescription ne mentionnant pas son nom. Ainsi, Monsieur le ministre, alors que pour une fois M. Bur propose une sanction pour un professionnel qui ne respecte pas un protocole de soins, vous la supprimez : pourquoi ?

Les sous-amendements 8457 rectifié et 8458, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'amendement 7744 rectifié, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - Abstention du groupe socialiste.

Mme Muguette Jacquaint - Et du groupe communiste et républicain.

M. le Ministre - Je précise à M. Bapt que le plan quinquennal de la MILT sera approuvé très prochainement.

M. le Président - Je suis saisi des amendements identiques 7204 rectifié à 7218 rectifié.

M. Jean-Marie Le Guen - Contrairement aux idées reçues, nous, qui recherchons la meilleure gestion de l'assurance maladie, n'avons pas pour souci premier d'éloigner les assurés et les malades du système de soins, mais d'aller à leur rencontre pour améliorer leur prise en charge sanitaire. A cette fin, il est nécessaire d'entretenir des liens avec les malades pour leur rappeler régulièrement leurs droits, leur expliquer le fonctionnement de l'assurance maladie et de notre système de soins, et, au-delà, leur délivrer une information d'ordre plus médical. La complexité du dispositif mis en place exige que l'on avertisse les patients de ce que l'on attend d'eux.

Pour ces raisons, il convient de mettre en place, au niveau régional, des plates-formes téléphoniques à la disposition de nos concitoyens. Ce type de structure est déjà mis en place par des industriels de la santé, comme les industries pharmaceutiques, autour d'un produit particulier.

M. le Rapporteur - La commission a accepté l'amendement 7204 rectifié avant de repousser le 7219... c'est que l'idée est bonne, Mme Guinchard-Kunstler a raison. Cependant, sur un peu plus d'une centaine de CPAM, 92 disposent déjà aujourd'hui de telles plates-formes. L'initiative est lancée, et il faut l'encourager, mais plutôt par voie réglementaire. Je suis donc défavorable, à titre personnel, à ces deux séries d'amendements.

M. le Ministre - Tout ce qui vient d'être proposé va dans le bon sens. M. Le Guen propose de le mettre en œuvre au niveau des URCAM, ce qui est une bonne idée, mais la convention d'objectifs et de missions passée par la CNAM comporte des dispositions relatives à la mise en place de telles plates-formes au sein des caisses. 92 CPAM se sont d'ores et déjà engagées dans ce processus d'information, et il n'apparaît donc pas nécessaire de le mettre en œuvre au niveau des URCAM. M. Le Guen pourrait retirer son amendement.

M. Jean-Marie Le Guen - Les services proposés par les CPAM sont très peu médicalisés, et traitent de questions liées à l'assurance sociale, d'où l'intérêt de mettre aussi en œuvre ces plates-formes au niveau des URCAM. Plus tard, nous pourrons sans doute utiliser internet...

M. Jean Dionis du Séjour - Parfaitement !

M. Jean-Marie Le Guen - Pour l'instant, il est nécessaire que des centres d'appels téléphoniques puissent répondre à des questions sur l'hygiène, la nutrition, l'éducation pour la santé, le parcours du soin.

Les amendements 7204 rectifié à 7218 rectifié, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Nous en venons aux amendements identiques 7219 à 7233.

M. Jean-Marie Le Guen - Ils sont défendus.

Les amendements 7219 à 7233, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

REQUÊTE EN CONTESTATION
D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES

M. le Président - En application de l'article L.O. 181 du code électoral, j'ai reçu du Conseil constitutionnel communication d'une requête en contestation d'opérations électorales.

Conformément à l'article 3 du Règlement cette communication est affichée et sera publiée à la suite du compte rendu intégral de la présente séance.

Prochaine séance ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 40.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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