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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session extraordinaire de 2003-2004 - 11ème jour de séance, 30ème séance

SÉANCE DU MARDI 13 JUILLET 2004

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

Sommaire

      ASSURANCE MALADIE (suite) 2

      ART. 27 2

      APRÈS L'ART. 27 9

      ORDRE DU JOUR DU JEUDI 15 JUILLET 2004 15

La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.

ASSURANCE MALADIE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie.

ART. 27

M. Jean-Luc Préel - La réforme de la tarification à l'activité était très attendue car le budget global avait atteint, depuis longtemps, ses limites. La tarification à l'activité ne sera pas mise en œuvre de la même manière dans les établissements privés et publics. Totale dés cette année dans les établissements privés, elle sera progressive, avec une demande de plafonnement, dans les établissements publics.

Beaucoup doutent du passage réel à la tarification à l'activité dans les établissements publics, où le personnel représente 65 % du budget.

Cet article prévoit par ailleurs de revoir les sanctions appliquées aux établissements qui font de fausses déclarations. Jusqu'à présent, ces sanctions relevaient de la compétence du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation, nommé en conseil des ministres. Vous prévoyez de les transférer à la commission exécutive de l'ARH, sans doute pour faire croire à un pouvoir de l'assurance maladie, qui serait le payeur. Elle n'est en réalité qu'un payeur fictif, car d'où proviennent les recettes si ce n'est de la CSG, des taxes, impôts et cotisations sociales dont l'assurance maladie ne saurait être propriétaire ! De surcroît, l'ONDAM est réparti par le Gouvernement en enveloppes hospitalières. En quoi les partenaires sociaux en seraient-ils responsables ?

Quant au transfert à la commission exécutive, il s'agit d'un effet d'annonce, car elle est présidée par le directeur de l'ARH, représentant de l'Etat, et en cas de conflit, les représentants de l'Etat votent comme le directeur pour lui assurer la majorité. Les rares fois où ils ont voulu faire preuve d'indépendance, ils ont été rappelés à l'ordre. Cet article n'opère aucun changement, puisque la décision finale appartient toujours aux représentants de l'Etat.

M. Jacques Desallangre - Cet article tend à transférer à l'assurance maladie la responsabilité des sanctions applicables aux établissements de santé ne respectant pas les nouvelles procédures de tarification à l'activité, afin de les mettre au pas de cette réforme injuste. Vous organisez ainsi le rationnement et la pénurie de l'offre de soins pour limiter le niveau des dépenses de santé, en particulier dans les hôpitaux publics, et culpabiliser encore davantage les assurés sociaux. Vous relayez ainsi le Medef qui estime que l'augmentation des dépenses de santé implique de distinguer entre les charges assumées par la collectivité et celles qui relèvent de la responsabilité individuelle. Vous pourrez alors concrétiser l'idée d'un panier de soins intégralement remboursable par l'assurance maladie et renvoyer le reste vers les complémentaires de santé. Les compagnies d'assurance sont prêtes et M. Bébéar attentif !

Votre gouvernement ne déclarait-il pas qu'il faudrait tenir compte de la croissance des dépenses de santé dans le budget des ménages en distinguant les dépenses légitimes de santé de celles qui ne le sont pas ? Comment ne pas voir les conséquences désastreuses pour les patients d'une T2A appliquée dans un tel état d'esprit ? Les usagers seront contraints de se retourner vers le privé pour se faire rembourser. Vous opérez une sélection entre ceux qui auront les moyens de se payer les meilleurs soins et les autres. « Selon que vous serez puissant ou misérable.... »

Quant aux établissements qui refuseraient de s'y prêter, vous les sanctionnez !

Vous prétendez simplifier la vie des Français alors que, touche par touche, vous défigurez notre système de protection sociale et portez atteinte au pacte républicain. Nous ne pouvons l'accepter et continuerons à défendre l'hôpital public, qu'il faut doter de moyens et moderniser.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - A la suite de la canicule, le Premier ministre a demandé à MM. Briet et Jamet de lui faire des propositions dans le cadre du plan vieillissement et du plan handicap et je voudrais connaître votre position, Monsieur le ministre.

Tout d'abord, il est proposé de confier l'ensemble du financement de l'ONDAM médico-social pour les personnes âgées et les personnes handicapées - près de 20 milliards d'euros - aux conseils généraux. Vous avez répondu à M. Evin et Mme Hoffman-Rispal que le financement des dépenses de soins des personnes âgées et des personnes handicapées devait continuer à relever du droit commun. Qu'en sera-t-il exactement ?

L'ONDAM médico-social sera-t-il encore voté ici ou une somme fixe sera-t-elle bientôt transférée aux départements ? La question mériterait d'être débattue.

Par ailleurs, il est proposé que ce soient désormais les départements qui fixent la tarification des soins dans les maisons d'accueil des personnes handicapées.

La quatrième proposition est aussi dangereuse : il s'agit de faire financer les soins en institution par la TIPP !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale - Ce ne sont que des propositions !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Mais qui doivent être discutées ici, et non par petits bouts dans les lois sur la décentralisation, la CNSA ou le handicap ! Et les conseils généraux ont-ils été consultés sur ces propositions ?

Enfin, le financement du plan vieillissement et des maisons de retraite était fondé sur la mise en place rapide de la CNSA. M. Falco a estimé que la suppression d'un jour férié devait permettre, dès cette année, de signer 2 000 à 2 500 conventions tripartites. Nous n'en sommes qu'à 170 ! Je crains que nos établissements pour personnes âgées n'aient pas suffisamment d'argent cette année.

Qu'on ose parler de recourir à la TIPP pour financer des soins est ce qui me choque le plus. Nous proposons de distinguer clairement le financement du personnel de santé, d'une part, et celui du personnel d'hébergement et d'autonomie de l'autre. Il est nécessaire d'entamer un travail de fond, car le rapport Briet-Jamet remet profondément en cause le principe d'universalité de la sécurité sociale.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous sommes dans la plus grande confusion en ce qui concerne le financement de l'assurance maladie. Le Parisien de ce matin indique que des contribuables refusent désormais de payer la CSG et la CRDS au prétexte qu'ils ont contracté une assurance privée. Vos services, Monsieur le ministre, ont répondu que le système de sécurité sociale s'imposait à tous les résidents français, mais Bercy considère au contraire, dans une note officielle, que souscrire une assurance privée dispense d'acquitter ces deux taxes. L'assurance maladie est menacée de perdre son caractère obligatoire et solidaire. J'aimerais donc, Monsieur le ministre, que vous confirmiez votre position et que vous nous donniez toute garantie quant à celle du Gouvernement dans son ensemble.

M. Jean-Pierre Brard - Je trouve très intéressant, alors que l'UDF essaye de se donner une image d'opposition à Sa majesté, d'entendre M. Préel - je l'ai attentivement écouté hier et ce matin - demander au ministre s'il pourra réellement prendre des décisions de déremboursement et si le proconsul, cet homme politique déguisé en fonctionnaire, résistera lui aussi aux pressions qui s'exercent contre ces déremboursements. L'UDF est encore plus extrémiste que le Gouvernement ! La rupture dans l'accès à la santé ne la gêne par le moins du monde. M. Préel intervient au contraire, comme un disque rayé, pour expliquer au Gouvernement qu'il ne va pas assez loin.

L'égalitarisme que vous prônez n'est qu'apparent. La politique de sanctions que vous voulez mettre en place, s'appuyant sur la tarification à l'activité, ne tient aucun compte des situations particulières. Pourtant, Monsieur le ministre, en venant visiter l'hôpital dont je préside le conseil d'administration, vous avez pu constater combien les établissements sont différents selon le type de population dont ils ont à s'occuper ! Vous savez très bien que les hôpitaux vont être poussés à choisir leurs activités en fonction de la tarification et que vont disparaître des services fort utiles à la population, mais insuffisamment rentables. Que vont devenir les patients ? Les habitants de Montreuil sont loin d'être des privilégiés !

M. Hervé Mariton - Ce sont les bo-bos qui habitent Montreuil !

M. Jean-Pierre Brard - Je vous propose une visite guidée, Monsieur Mariton. Vous pourrez toucher du doigt les conséquences de la politique du Gouvernement : chômeurs, personnes exclues de la CMU... En ce sens, la réforme de l'assurance maladie est parfaitement cohérente avec le reste de votre action. Vous êtes en train de désintégrer l'Etat républicain, avec une régionalisation qui n'a qu'un objectif : faire payer au contribuable régional ce que l'Etat ne veut plus assumer. Vous mettez en place, avec les proconsuls national et régionaux, un double verrouillage qui vous exonère de votre responsabilité politique en même temps qu'il va ouvrir les portes aux assurances privées. Les aristocrates fortunés, tel M. Seillière, devront nous dire comment s'exerce la « responsabilité individuelle » des érémistes et des smicards. Mais il est vrai que les châtelains sont trop occupés de leur coffre-fort pour se laisser aller à des interrogations aussi triviales...

M. Jean Le Garrec - Les recettes de la sécurité sociale sont largement liées à l'évolution de la masse salariale. Les salariés de Bosch, à Vénissieux, vont devoir travailler six jours supplémentaires sans être payés. Je ne porte aucun jugement de valeur : les salariés se battent, la rage au cœur, pour conserver leur emploi. Mais je suis heureux que M. Sarkozy ait dénoncé ce chantage à l'emploi et affirmé qu'en France, le chantage à la délocalisation était inacceptable. Pourtant, le Gouvernement a donné le mauvais exemple en introduisant le principe d'une journée de travail non rémunérée dans le code du travail. Il doit prendre une position unanime. Le Premier ministre va-t-il intervenir, ou le Président de la République ? Il me semble qu'ils doivent s'expliquer sur une telle mise en cause des acquis des salariés.

M. Gérard Bapt - Cet article, qui associe l'assurance maladie aux sanctions prises contre les établissements justifie notre proposition, tombée sous le coup de l'article 40, de créer des agences régionales de santé.

Je reviens sur une question que j'ai posée hier. Les engagements pris par le Président de la République au G 8 d'Evian de participer au fonds international de lutte contre le Sida sont-ils respectés ? A l'occasion de la conférence qui se tient actuellement, la coalition mondiale des associations de lutte cotre le Sida, qui a fraîchement reçu M. Darcos, s'inquiète et elle propose que les pays riches payent une cotisation annuelle fondée sur la base de la PNB. Ce serait une solution pour que les engagements pris soient effectivement respectés.

M. Maxime Gremetz - J'espère d'abord que vous allez répondre à M. Le Guen. Confirmez-vous officiellement que le fait de prendre une assurance complémentaire privée dispense de payer la CSG et la CRDS ? C'est important, dans la mesure où vous attendez des recettes de la hausse de la CSG.

Mais il est vrai que vous êtes fâchés avec les chiffres. S'agissant de l'hôpital public par exemple - 50 % des dépenses de santé, mais ce projet n'en dit mot ! - vous attendez 1,6 milliard du passage à la tarification à l'activité ; selon Bercy, c'est 400 millions. Avec ce passage à l'activité, vous remettez en cause une réforme fondamentale faite par le CNR, le général de Gaulle et les communistes. Auparavant, on fixait un budget global en fonction des besoins transmis par les conférences régionales à la conférence nationale de santé. Désormais, on dit aux hôpitaux que plus ils feront d'actes rentables, plus ils recevront d'argent de l'Etat. Voilà votre philosophie. Jusqu'à présent, les cliniques privées prenaient les cas les plus rentables, l'hôpital public accueillait tout le monde. Vous lui imposez la loi du marché, qui fait qu'aux Etats-Unis, où les dépenses de santé atteignent pourtant un record de 14 % du PIB, 40 millions de gens n'ont pas accès aux soins. C'est inacceptable.

Ce n'est donc pas un hasard si les hospitaliers dénoncent cette réforme faite sans concertation et dont on ne parle même pas ici puisqu'elle sera l'objet d'ordonnances.

M. le Président de la commission spéciale - Il y a eu des négociations avec les syndicats.

M. Maxime Gremetz - Je vous demande de répondre aux questions que nous posons depuis hier et à la grave question soulevée par M. le Guen. En attendant, je vous fais remettre les données que je vous ai promises.

M. Philippe Vitel - On ne peut pas laisser dire n'importe quoi. Aujourd'hui, les établissements privés, qui se sont soumis aux contraintes techniques et sanitaires rigoureuses et aux mesures de restructuration imposées par les ARH, sont de grande qualité, ont un personnel très qualifié et sont gérés de façon stricte. C'est peut-être là qu'est la différence.

M. Maxime Gremetz - Ils ramassent la crème et laissent les difficultés au public !

M. Philippe Vitel - Ils donnent une bonne image du système de santé français et ils accueillent tous les patients (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). Il n'y a aucune discrimination financière à l'entrée des établissements privés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. le Président de la commission spéciale - Cessons d'opposer hôpital public et hôpital privé. Les deux concourent à la santé de nos concitoyens

M. Jean-Marie Le Guen - Tout le monde ne peut pas aller à l'hôpital américain.

M. le Président de la commission spéciale - Il n'y a pas d'hôpital américain partout.

M. Jean-Marie Le Guen - Non, à Neuilly, chez Sarkozy !

M. le Président de la commission spéciale - L'hôpital privé est tout aussi nécessaire que le public.

Madame Guinchard-Kunstler, le rapport Briet-Jamet ne fait que des propositions, mais la principale est bien une meilleure prise en charge de la compensation individuelle. Pour cela, il faut un acteur de proximité, qui peut être le département en accord avec les collectivités locales. Le fait de transmettre des financements à une collectivité locale pour mieux coordonner les interventions ne signifie nullement que l'assurance maladie ne continuera pas à rembourser les frais dans les conditions actuelles. Sans doute le ministre répondra-t-il. J'ai déposé un amendement après l'article 27 pour clarifier ce point.

Le rapport Briet-Jamet est essentiel car il permettra de simplifier les démarches des usagers pour obtenir le droit à compensation.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale - M. Le Guen a posé un problème important. L'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale précise que l'affiliation au régime général est obligatoire pour les salariés, les travailleurs indépendants et les retraités quels que soient l'âge, le sexe, la nationalité, la rémunération. L'ensemble des personnes physiques qui résident en France affiliées à ce régime sont assujetties à la CSG, qui s'impose donc à tous.

M. Jean-Marie Le Guen - Qu'en est-il pour Bercy ?

M. le Ministre - Le médecin affirme dans l'article cité qu'il a souscrit une assurance individuelle maladie et complémentaire auprès d'une compagnie anglaise. La note de Bercy précise qu'il convient de fournir, à l'appui de la demande d'exonération, une attestation à un régime de sécurité sociale étranger. Or, le médecin n'est pas dans ce cas de figure puisqu'il est Français. Cessez de répandre la suspicion sur une note que vous aviez parfaitement comprise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Il existe quelques exceptions concernant les travailleurs frontaliers assujettis aux régimes de sécurité sociale étrangers dans le cadre de la coordination des régimes de sécurité sociale européens, mais c'est une autre question.

J'ai l'impression, écoutant M. Gremetz, qu'il regrette le budget global des hôpitaux. Il doit être le seul en France ! Je connais des hôpitaux qui faisaient passer en janvier-février des interventions programmées en novembre-décembre. Ce n'était pas idéal, reconnaissez-le.

M. Maxime Gremetz - Rien n'est idéal quand les moyens font défaut.

M. le Ministre - Les services hospitaliers non rémunérateurs, Monsieur Brard, ne disparaîtront pas. La T2A ne peut évidemment pas être appliquée aux urgences, à la médecine interne ou, par exemple, au traitement des maladies infectieuses. 50 % des budgets relèveront de la T2A et 50 % des missions d'intérêt général des services publics hospitaliers.

Monsieur Le Garrec, je suis également hostile au chantage. Je rappelle que la stagnation salariale due aux 35 heures amène plus en plus de salariés à vouloir travailler plus pour gagner plus.

M. Jean Le Garrec - Là, ce n'est pas le cas !

M. le Ministre - M. Bapt, je m'engage à vous répondre très exactement sur la participation financière de la France au Fonds mondial de lutte contre le sida et je n'aurai pas la cruauté de vous rappeler les contributions des gouvernements que vous avez soutenus.

Monsieur Préel, notre premier objectif, avec cet article, est de renforcer la place de l'assurance maladie dans l'application des sanctions en cas de non respect des règles de tarification. Les caisses d'assurance maladie sont en effet des organismes payeurs et sont chargées de la récupération des indus. Il importe donc de les associer à la programmation des contrôles et à la décision des sanctions, qui ne relèveront pas des directeurs des ARH.

Son second objectif est de donner un fondement législatif à la programmation coordonnée des contrôles au niveau régional sous l'égide de la commission exécutive de l'ARH.

Enfin, l'article L. 162-22-18 ne permettant pas de cibler les contrôles sur certains séjours présentant des caractéristiques communes, le projet vise à en préciser la rédaction.

M. Jean-Marie Le Guen - Je ne suis pas certain de partager votre optimisme quant à la note de Bercy, Monsieur le ministre. Il est en effet possible qu'une affiliation à une assurance privée étrangère puisse valoir demain une garantie générale de couverture des risques maladie.

De plus, les travailleurs intérimaires connaissent, eux aussi, des difficultés. La Mutualité sociale agricole s'est d'ailleurs sentie un peu seule quand il s'est agi d'intenter des actions en justice. La situation est comparable dans les chantiers navals où un jugement a précisé qu'une société française ayant une filiale à l'étranger, en l'occurrence en Pologne, peut employer en France des travailleurs intérimaires polonais.

Il faudrait donc, me semble-t-il, nous interroger sur les risques de dumping social dans notre pays.

M. le Ministre - Je ne reviens pas sur l'article du Parisien, nous l'avons tous lu et j'ai répondu.

Concernant les travailleurs intérimaires, je vous renvoie à l'article 40 du projet qui permet à la sécurité sociale d'agir pour limiter les infractions et même, dans certains cas, de se substituer au parquet.

Monsieur Bapt, je reviens sur la contribution française au Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose : il sera en 2004 de 140 millions d'euros et de 150 millions les années suivantes, dont 100 millions spécifiquement dédiés à la lutte contre le sida. La France est le deuxième bailleur du Fonds après les Etats-Unis.

M. Maxime Gremetz - Un de nos collègues a usé d'un argument simpliste en arguant que parce que nous défendons l'hôpital public, nous serions contre les cliniques privées. Je souhaite seulement que ces établissements ne reçoivent pas d'aides publiques au détriment de l'hôpital public.

Non seulement les cliniques privées n'acceptent pas n'importe quels patients, vous le savez tous, mais à la différence de l'hôpital public, elles n'ont aucune responsabilité dans le suivi des malades. Je me garderai bien d'opposer les deux systèmes, mais je refuse qu'au nom de la T2A les critères de rentabilité du privé soient imposés au secteur public. Bientôt, les hôpitaux publics seront menacés, s'ils ne font pas du résultat, de voir leurs dotations baisser. Qui, alors, soignera les indigents ?

On va construire des hôpitaux mastodontes au détriment de l'ensemble de nos hôpitaux publics, en Picardie par exemple. Est-ce cela que vous voulez ? Parce qu'un superhomme veut laisser son nom dans l'histoire, une structure gigantesque va priver 40 000 habitants du nord d'Amiens de leur hôpital de proximité.

M. le Président - Veuillez conclure !

M. Maxime Gremetz - Il est dommage que nous n'ayons pas un vrai débat sur l'hôpital.

M. Jacques Desallangre- Nos amendements 1648 et suivants tendent à supprimer l'article 27, car le Gouvernement exerce un chantage à l'égard de l'hôpital, ce pelé, ce galeux... A « Hôpital-Expo », Monsieur le ministre, vous avez fait des annonces budgétaires que vous avez conditionnées au respect de la tarification à l'activité, alors que certains hôpitaux souffrent d'un endettement massif. Les réponses de l'ARH donnent à penser qu'elle a déjà tiré un trait sur beaucoup de petits hôpitaux. Devant ces situations préoccupantes, vous avez proposé tout simplement d'annuler les dettes dès cet été pour un montant de 300 millions. Mais l'aide sera conditionnée à « un contrat de retour à l'équilibre » à l'aune de la T2A et à la nouvelle organisation interne de l'hôpital, ce que les hospitaliers refusent, cette tarification risquant de porter gravement atteinte aux missions d'intérêt général de l'hôpital. C'est bien ce que nous ne cessons de dénoncer.

Comme si cela ne suffisait pas, vous reprenez, en la transférant à l'assurance maladie, la procédure de sanction en cas de non respect des règles de la T2A. C'est pourquoi nous voulons supprimer l'article.

M. Bur remplace M. Baroin au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Yves BUR

vice-président

M. Jean-Pierre Brard - L'opposition entre hôpital public et hôpital privé, telle que l'a soutenue notre collègue de droite, est insupportable. Nous n'avons jamais prétendu que les bons médecins étaient dans le public, les mauvais dans le privé. Ce qui manque, c'est la mise en cohérence des deux réseaux. Nous jugeons encore plus insupportable l'intervention ici des lobbies, exprimée par des collègues qui ignorent l'intérêt général pour défendre l'intérêt de leurs corporations d'origine (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Je suggère que des étudiants travaillent à repérer les députés qui travaillent pour des lobbies (Protestations sur les bancs du groupe UMP). La lecture du Journal officiel leur permettra de débusquer les parlementaires qui défendent des intérêts particuliers (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous qui êtes méticuleux et attaché à la transparence, pour faire taire l'opposition entre le public et le privé, je vous incite, avant de décider des sanctions de façon aveugle, à vous intéresser à la durée moyenne de séjour. Dans nos hôpitaux publics, l'administration fait pression pour réduire cette durée, au point qu'elle ne dépasse pas trois jours pour un accouchement, ce qui, pour une première naissance, est bien trop court. Comment, en sens inverse, sont exercés les contrôles dans telle ou telle clinique qui obligeamment autorise les patients à rentrer chez eux le samedi et le dimanche en oubliant de faire enregistrer ces absences par l'administration ? Intéressez-vous par exemple à la clinique des jockeys de Chantilly... Si tout était mis sur la table, la discussion pourrait progresser. Tout à l'heure, Yves Bur, à présent réduit au silence, évoquait le transfert de gestion à une collectivité territoriale. De fait la politique gouvernementale est très cohérente : il s'agit de démembrer notre système républicain qui repose sur l'égalité, et non pas sur l'égalitarisme. Des régions, selon leurs choix politiques et leurs moyens financiers, pourront se substituer à l'Etat dans l'exercice de ses compétences en matière de santé, au détriment de ce principe d'égalité, auquel, Monsieur Bur, vous êtes très attaché en tant que républicain et alsacien. Mais je soupçonne votre naïveté alsacienne de ne pas voir les turpitudes à l'œuvre du côté gouvernemental !

M. le Président - Ne jugez pas de l'esprit alsacien !

M. Maxime Gremetz - Monsieur le Président, si vous êtes obligé de tenir deux emplois en même temps, c'est sans doute que le groupe UMP commence à fléchir !

L'article 27 institue en quelque sorte une nouvelle brigade de contrôle et de répression, ce qui créera quelques emplois, mais pas très productifs. Actuellement le pouvoir de sanction est exercé par le directeur de l'ARH. Vous le déplacez vers sa commission exécutive, au motif d'impliquer plus fortement l'assurance maladie, qui est membre de la commission exécutive. Vous détournez ainsi l'assurance maladie de son rôle, qui est de s'occuper des malades. Ce glissement de prérogatives répond à la volonté de faire de l'assurance maladie un gendarme des dépenses d'hospitalisation, comme si ce gouvernement n'était pas suffisamment répressif. C'est pourquoi nous souhaitons supprimer l'article, qui concourt lui aussi à faire payer les pauvres et à exonérer les riches. Ces derniers, eux, ont le libre choix. Ils ne vont pas à l'hôpital public, les Lindsay Owen-Jones, Edouard Michelin, Daniel Bernard, Daniel Bouton, Igor Landau, Patrick Le Lay, Thierry Desmarest, Martin Bouygues, Franck Riboud, les têtes de liste du CAC 40 ! Mme Bettencourt y va encore moins !

M. le Président - Monsieur Gremetz...

M. Maxime Gremetz - M. Bur n'y va pas non plus, j'en suis sûr ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Claude Evin - N'importe quoi !

M. le Président - Monsieur Gremetz, je ne vous permets pas de porter ce genre de jugement. Vous avez épuisé votre temps de parole.

M. Jean-Luc Préel - M. Brard a essayé de faire l'exégèse de la pensée de l'UDF, mais je ne m'y suis reconnu en rien. Il a par ailleurs souhaité que les journalistes et les étudiants se penchent sur les déclarations qui ont été faites ici : je pense qu'ils seront très étonnés de constater que sur tout amendement, on peut dire n'importe quoi, faire des digressions qui n'ont aucun rapport avec le sujet - ce qui explique la durée des débats.

Nous souhaitons la suppression de l'article 27 car transférer du directeur de l'ARH à la commission exécutive le pouvoir de sanctionner les établissements fraudeurs ne change rien. En effet, la commission exécutive, dans laquelle l'assurance maladie siège aux côtés des représentants de l'Etat, lesquels votent de façon unanime, est présidée par le directeur de l'ARH ; celui-ci ayant voix prépondérante, l'Etat obtient toujours satisfaction. Cet article n'est donc qu'un effet d'annonce.

En outre, il peut donner l'impression qu'on réduit le rôle des ARH, alors qu'il faudrait au contraire s'orienter vers une transformation des ARH en agences régionales de santé, responsables à la fois de l'ambulatoire, des établissements, de la formation et du médico-social.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale - J'aurais beaucoup à dire sur ce que j'ai entendu, mais je me bornerai à rappeler que supprimer cet article serait supprimer la coordination entre l'assurance maladie, qui finance, et l'Etat, qui assure la tutelle du système hospitalier. Rejet.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public sur les amendements de suppression.

M. Richard Mallié - Rappel au Règlement.

Monsieur Gremetz, vous avez droit à un temps de parole, mais cela ne veut pas dire que vous avez le droit de dire n'importe quoi et de formuler des attaques personnelles à l'encontre du Président de la commission spéciale, qui préside notre séance. Nous ne pouvons pas empêcher vos manœuvres de retardement, mais nous ne saurions accepter ce genre de propos scandaleux (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - Monsieur le Président, notre groupe se réunissant à 11 heures, nous vous demandons une suspension de séance.

M. le Président - Je vous l'accorde après le vote de ces amendements.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie - Si la qualité des soins est pour nous une priorité, la qualité du codage et de la facturation l'est également, afin que chaque euro dépensé dans un établissement de santé le soit au mieux.

Oui, Monsieur Brard, nous sommes pour la transparence ; la tarification à l'activité y contribue. Elle est désormais la règle majoritaire en Europe : l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Irlande, l'Italie, le Portugal l'ont adoptée.

M. Maxime Gremetz - Quels modèles !

M. Jean-Pierre Brard - Le mimétisme n'a jamais été une politique !

M. le Secrétaire d'Etat - La transparence sur ce que l'on fait, c'est la T2A. La transparence sur le financement, c'est le rôle du comité d'hospitalisation, voté hier. La transparence sur les moyens de réalisation, c'est le rôle de l'ANAES ; aujourd'hui, une trentaine d'établissements sont concernés à titre expérimental ; à partir de 2005, il y en aura une centaine.

A la majorité de 42 voix contre 5 sur 49 votants et 47 suffrages exprimés, les amendements 1648 à 1659 et 7503 ne sont pas adoptés.

La séance, suspendue à 11 heures 10, est reprise à 11 heures 30.

M. Jacques Desallangre - Par nos amendements 4618 à 4629, nous voulons supprimer le I de l'article, qui confie à la commission exécutive de l'ARH le pouvoir de sanction à l'égard des autorités sanitaires à l'égard des établissements de santé qui ne respectent pas les règles de tarification.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 a modifié les principes de tarification des prestations hospitalières en prévoyant une application graduelle de la TAA que nous avons été les seuls, à l'époque, à rejeter et l'article 25 de ladite loi de financement institue une procédure pour sanctionner les établissements contrevenants. Nos inquiétudes sont partagées par le président de la Fédération hospitalière de France qui, dans son discours d'inauguration du salon Hôpital Expo, dénonçait les conditions « suicidaires » de l'application de la TAA, réclamait la réévaluation de l'enveloppe destinée à couvrir les missions de service public des hôpitaux, et ajoutait que la France devrait s'inspirer des pays où ce mode de financement s'applique déjà et n'a jamais pu couvrir la moitié du budget hospitalier.

Les amendements 4618 à 4629 , repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 8379 de M. Le Guen a été accepté par la commission.

L'amendement 8379, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 8306 de la commission est rédactionnel.

L'amendement 8306, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Desallangre - Nos amendements 4630 à 4641 tendent à supprimer le II de cet article, car l'assurance maladie n'a pas à jouer le gendarme des dépenses de santé.

Les amendements 4630 à 4641, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 27 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 27

M. le Rapporteur - L'amendement 8307 concerne la démographie des professions de santé. Un décret de juin 2003 a créé un Observatoire national de la démographie des professions de santé, lequel intègre des comités régionaux. Cet amendement tend à lui associer des représentants des régimes de l'assurance maladie ainsi que les doyens des universités, et à lui donner le pouvoir de rendre des avis en matière de numerus clausus.

La question de la démographie médicale est essentielle. Faute d'anticipation, il a fallu faire venir des médecins non européens dont la qualification était parfois discutable, et qui, même lorsqu'ils étaient de grande qualité, ne pouvaient être intégrés dans notre système hospitalier. Le même problème s'est posé pour les infirmières, dont nous avons un besoin accru, du fait de la mise en œuvre des 35 heures à l'hôpital qui nous oblige à faire appel à des infirmières étrangères, notamment espagnoles.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. Claude Evin - C'est vrai, cette question est essentielle, et l'Observatoire nous permet de prévoir les besoins, mais nous ne pourrons pas faire l'économie de mesures de régulation des installations. M. Mattei a déjà évoqué cette question, comme l'avaient déjà fait le précédent gouvernement, encourant les foudres de l'opposition d'alors, mais aussi des organisations de médecins et du conseil de l'ordre. Nous y reviendront à propos des agences régionales de santé.

Je m'étonne au passage que la composition d'un comité soit prescrite dans le code de l'éducation nationale, alors qu'elle aurait davantage sa place dans le code de la santé publique.

M. le Rapporteur - Il est logique de traiter du numerus clausus dans le cadre de l'assurance maladie, qui est directement concernée par cette question.

M. Richard Mallié - L'Education nationale ayant aujourd'hui la maîtrise de la formation des futurs médecins, il est normal d'intégrer cette disposition dans le code de l'éducation.

Je suis favorable à l'amendement, mais je voudrais rappeler que les doyens ont trop souvent tendance - et c'est humain - à vouloir que leurs facultés accueillent le plus grand nombre d'étudiants. Or, je suis persuadé, pour en avoir fait moi-même l'expérience, qu'un jeune médecin, après des études longues dans une région, a tendance à s'y établir. Et ce n'est pas un hasard si les villes qui comptent les plus grosses facultés de médecine sont aussi celles qui ont le plus de médecins. Aussi le relèvement du numerus clausus devrait-il bénéficier en priorité aux villes et régions les moins bien dotées.

M. Jean-Luc Préel - La création d'un comité est intéressante, même si je ne suis pas certain qu'il soit nécessaire d'y associer l'assurance maladie.

En revanche, l'UDF plaide depuis longtemps pour l'instauration d'un numerus clausus régional par spécialité. C'est en effet au niveau régional que l'on peut le mieux évaluer les besoins. Se fier à un numerus clausus national est une erreur, la pénurie d'infirmières en témoigne. Dans le pays de la Loire, lorsque nous avons, naguère, alerté le ministre sur le manque criant d'infirmières qui s'annonçait, on nous a répondu qu'il s'agissait d'un problème national, et qu'il n'y avait aucune raison de ne pas diminuer leur nombre !

Enfin, c'est vrai, la plupart des étudiant nouent leurs amitiés et leurs relations sociales et professionnelles là où ils ont été formés et où, donc, ils s'installent. S'ils s'y marient, ils ont toutes les raisons de rester dans la région, sauf lorsqu'ils veulent fuir leur belle-mère ! (Sourires).

M. le Président - Ce n'est pas du ressort de la loi...

M. le Rapporteur - Nous sommes opposés à un numerus clausus régional qui imposerait des règles trop rigides aux jeunes professionnels de santé. En revanche, il est évident que les besoins régionaux doivent être plus précisément évalués, notamment par les missions régionales de santé et les conférences régionales de santé.

M. Jean-Marie Le Guen - Je ne pense pas que l'amendement aborde le sujet de la bonne façon. Le problème est en effet politique avant tout, et la moindre des choses serait que ce comité soit présidé par le ministre ! Si on ne lui donne pas cette solennité, il ne s'agira de rien d'autre que de réunions interministérielles de niveau administratif. Ensuite, le problème de la démographie médicale est bien plus vaste que celui des professionnels médicaux. Il faut absolument tenir compte de la démographie des professions connexes, mieux coordonner tous les métiers concernés, et ce à la fois par région et par spécialité.

Enfin, le temps est venu de reconsidérer la réforme Debré, qui avait pourtant constitué à son époque un progrès incontestable en associant recherche, enseignement et pratique hospitalière. Désormais, l'orientation des étudiants dépend surtout des spécialités dont l'hôpital a besoin, et qui seront exercées par les internes et les chefs de clinique. Le système de formation se trouve ainsi assujetti aux besoins hospitaliers à court terme, ce qui n'est pas sain. Il faut entièrement revoir notre conception de l'hôpital et de la recherche. Nous aurons besoin de beaucoup de chercheurs, mais la formation ne doit pas faire des chercheurs de tous les généralistes !

M. le Rapporteur - Je précise que le comité n'est pas chargé de prendre une quelconque décision, mais de donner un avis au ministre.

M. Jacques Desallangre - Je lis avec beaucoup de satisfaction l'exposé sommaire de cet amendement, dont nombre de points nous conviennent parfaitement : par exemple, le fait que la fixation du numerus clausus soit une décision éminemment politique, ayant un effet structurant sur le système de santé, et qu'elle doive continuer à relever du ministre... Lorsque nous avons proposé de supprimer le numerus clausus, on nous a répondu que l'éducation nationale ne pourrait accueillir un grand nombre d'étudiants supplémentaires. Il est urgent de se pencher sur ce problème ! Nous avons également proposé des mesures de régulation de l'installation, qui ont été jugées trop autoritaires. L'amendement, à nos yeux, est insuffisant, mais va dans le bon sens.

Je souligne, cela dit, que l'augmentation du nombre des médecins ne conduirait pas mécaniquement à celle des dépenses de santé. J'espère donc que ce comité - un de plus ! - conseillera au ministre d'augmenter de façon spectaculaire le numerus clausus.

M. le Ministre - Ce sont bien sûr les ministres de la santé et de l'enseignement supérieur qui continueront à décider du numerus clausus. Des mesures d'incitation ont été prises, mais leurs résultats n'ont pu encore être appréciés. Quant aux zones médicalement désertifiées, qui sont définies par décret, elles ne recouvrent qu'une toute petite partie du territoire, et en tout cas bien moins que ce qui serait nécessaire selon les élus locaux et les médecins.

M. Claude Evin - Sans oublier les patients !

M. le Ministre - Les maisons médicalisées devraient constituer une bonne réponse. Il conviendrait donc de commencer au plus tôt les expériences, qui s'accompagneront peut-être, dans certains endroits, d'une réforme des modes de financement. Ensuite, il faut faire un important travail de coordination des métiers. On constate par exemple que les diabétiques suivis par des infirmières sont mieux soignés que lorsqu'ils le sont par les seuls médecins. Enfin, nous manquons aujourd'hui de certains spécialistes dans certaines disciplines : chirurgie, anesthésie, pédiatrie, gynécologie... Il ne faut pas hésiter à déterminer, spécialité par spécialité, le nombre d'admis dans chaque filière à la suite des examens classants.

M. Jean-Marie Le Guen - Mais sans se fonder sur les seuls besoins hospitaliers !

M. le Ministre - Non : sur l'exemple des besoins.

Avant Robert Debré, nous avions des hospices ; c'est grâce à sa réforme que nous avons nos grands hôpitaux, et notamment grâce à l'attrait exercé par la profession hospitalo-universitaire. Quarante-cinq ans plus tard, le moment est venu de reconsidérer la question, sans toutefois toucher à ce qui fonctionne bien. Ayant été nommé professeur de médecine en 1989, je suis bien placé pour savoir qu'à partir du moment où on en a le titre, on n'est plus jamais remis en cause ! Il faut avoir le courage de parler de contractualisation, dans les hôpitaux universitaires comme dans les autres. Certains services d'hôpitaux généraux mériteraient, par exemple, d'avoir des étudiants. Des pistes sont déjà ouvertes, et l'état d'esprit général a beaucoup évolué, depuis dix ans, sur ces questions (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L'amendement 8307, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - J'ai l'honneur de défendre l'amendement 8247, déposé par le président de la commission spéciale lui-même et accepté par la commission, et qui concerne la répartition des enveloppes de l'ONDAM. Il s'agit d'établir par décret une liste des financements nécessaires aux prescriptions, matériels et rémunérations des professionnels et de ceux qui collaborent avec les auxiliaires médicaux - M. Bur songeait notamment aux aides-soignants et aides médico-psychologiques. On peut se demander si ce dispositif ne devrait pas relever du code de la sécurité sociale plutôt que du code de la santé publique, mais ce sera l'occasion pour le ministre de préciser le rôle du secteur médico-social par rapport à l'assurance maladie.

M. le Ministre - La loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, entrée en vigueur au 1er juillet, pose les fondements d'une prise en charge plus efficace de la perte d'autonomie des personnes âgées, durement frappées en août 2003 par la canicule. Par ailleurs, le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, qui réforme la loi fondatrice de 1975, sera examiné en deuxième lecture à la rentrée.

Un nouvel organisme de sécurité sociale, la CNSA, organise le financement de la perte d'autonomie. Des ressources nouvelles lui sont affectées, et notamment le produit de la journée de solidarité instaurée à compter du 1er juillet 2004.

Par ailleurs, pour mener à bien la seconde étape de la réforme, le Gouvernement a confié à MM. Briet et Jamet, en décembre 2003, un rapport sur l'organisation et les missions de la CNSA. Les deux recommandations fondamentales de ce rapport sont les suivantes : transférer un ensemble significatif de responsabilités à un gestionnaire de proximité, le département, doté de moyens nécessaires ; mettre en place au niveau national une institution forte pour satisfaire à la double exigence de traitement équitable sur l'ensemble du territoire et de cohérence des politiques conduites.

Compte tenu de l'impact possible des ces propositions sur l'assurance maladie, le Gouvernement a demandé des expertises complémentaires. En outre, une concertation débutera la semaine prochaine avec les associations et les acteurs institutionnels. En tout état de cause, il est hors de question que les soins fournis aux personnes âgées ou handicapées sortent du champ de l'assurance maladie. Chercher à améliorer le financement de la prise en charge de l'autonomie est important ; maintenir notre système de sécurité sociale est également fondamental. C'est pourquoi je souhaite le retrait de l'amendement 8247.

M. le Président - Sur le vote des amendements 8247, 8419 et 8432, je suis saisi par le groupe socialiste de trois demandes de scrutin public.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Notre amendement 8419 a le même objet que celui de M. Bur. Savoir qui prendra en charge non pas seulement les droits à compensation, mais le dispositif même de soins pour les personnes âgées et handicapées, est un problème politique et non technique. J'ai bien entendu l'engagement pris par le ministre : le droit commun restera la règle et l'assurance maladie primera. Mais nous ne pouvons qu'être inquiets, à la lecture du rapport Briet-Jamet, qui ose proposer que la santé des personnes âgées et handicapées soit prise en charge par les conseils généraux, avec financement par la TIPP ! J'aimerais que le Gouvernement donne son sentiment sur ce sujet.

Selon M. Bur, le département assurera la proximité. Mais on peut le faire au niveau national grâce aux réseaux de soins, comme cela est fait pour les diabétiques ou la gérontologie. Dans certains pays nordiques, l'Etat s'est déchargé du système sanitaire et social sur les collectivités locales, lesquelles ont fermé des établissements si bien qu'en fin de compte la solidarité nationale a dû prendre le relais.

M. Jean-Luc Préel - Je suis heureux de constater que l'UMP, le groupe socialiste et l'UDF ont déposé des amendements semblables pour obtenir des éclaircissements du Gouvernement. Le projet, en effet, ne précise pas de façon explicite ce qui relèvera de l'ONDAM et ce qui relèvera de la CNSA. Notre amendement 8432 distingue clairement leurs responsabilités respectives en ce qui concerne la rémunération des professionnels et les matériels. Il est important de garantir que le médico-social est inclus dans l'ONDAM global. Par exemple, les personnes atteints de la maladie d'Alzheimer sont de vrais malades mais relèvent du secteur médico-social. Je me rallie volontiers à l'amendement de M. Bur et je ne doute pas qu'il sera voté à l'unanimité.

M. le Rapporteur - Le ministre ayant donné les éclaircissements nécessaires sur la place du secteur médico-social dans la répartition de l'ONDAM, en accord avec son auteur, l'amendement 8247 est retiré.

M. Jean-Pierre Brard - Je le reprends !

M. Jean Le Garrec - Je ne doute pas de la bonne volonté du ministre lorsqu'il affirme que la prise en charge des personnes âgées relève du droit commun de l'assurance maladie. Mais puisque l'opinion s'interroge, le moins que le Gouvernement puisse faire pour la rassurer, c'est s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée, laquelle ne manquerait pas de voter à l'unanimité ces amendements, qui émanent de tous les groupes, le groupe communiste ayant repris à l'instant celui de M. Bur.

M. Jean-Pierre Brard - Je regrette que M. Bur ne puisse défendre lui-même un amendement de grande qualité, fruit de sa très bonne connaissance du terrain. Je ne mets en doute la bonne volonté de personne, mais chat échaudé craint l'eau froide. L'expression de la compassion et de la sollicitude ne suffit pas. Pourquoi ne pas voter cet amendement, puisqu'il fait consensus ? Ce serait la meilleure garantie.

M. le Rapporteur - Ce débat était tout à fait nécessaire. Le ministre a répondu de façon satisfaisante sur la répartition des enveloppes. Une concertation s'engage ; elle aboutit, on pourrait en inscrire les résultats dans le PLFSS pour 2005.

M. Jacques Desallangre - Pourquoi ne pas affirmer les choses dès maintenant ?

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Il s'agit d'un enjeu essentiel pour l'organisation du travail et des soins, d'autant que nous nous sommes tous prononcés en faveur de la coordination des parcours de soins et du travail en réseaux. Et de point de vue financier, l'ONDAM concernant les personnes âgées et handicapées représente 11 milliards d'euros : si l'on fait sortir ces 11 milliards du champ de l'assurance maladie, tous les tours de passe-passe financiers seront possibles, avec l'immense danger que représenterait le transfert aux départements de dépenses appelées à croître très fortement. Le vote de ces amendements contribuerait à apaiser les inquiétudes.

M. Jean-Pierre Brard - Notre discussion est surréaliste : puisque tout le monde est d'accord, pourquoi ne pas voter dès aujourd'hui ? Vous instillez, Monsieur le rapporteur, le doute sur votre bonne foi et sur celle du Gouvernement (Protestations sur les bancs du groupe UMP). N'oubliez pas que les Français jugent les hommes politiques non sur les paroles mais sur les actes. Agir, c'est en l'occurrence voter, et non pas repousser la décision à la Saint-Glinglin !

M. Jean-Marc Ayrault - M. Le Garrec a eu raison de vous suggérer de vous en remettre à la sagesse de l'Assemblée, Monsieur le ministre. Si vous êtes sincère - et il n'y a pas de raison de vous soupçonner du contraire - remettez-vous en à une Assemblée qui est aujourd'hui disposée à voter à l'unanimité ! Dans le cas contraire, un doute subsisterait quant à vos intentions réelles (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

A la majorité de 47 voix contre 21 sur 71 votants et 68 suffrages exprimés, l'amendement 8247 n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Rappel au Règlement ! Le monde politique souffre d'un manque de crédibilité. Les Français attendent que nous agissions en conformité avec nos paroles ; or vous venez de démontrer que vous n'y êtes pas prêts. Quel avenir préparez-vous aux personnes âgées ou handicapées ? Elles sont en droit d'être inquiètes.

A la majorité de 48 voix contre 19 sur 67 votants et 67 suffrages exprimés, l'amendement 8419 n'est pas adopté.

A la majorité de 42 voix contre 25 sur 67 votants et 67 suffrages exprimés, l'amendement 8432 n'est pas adopté.

M. le Président - Mes chers collègues, je vous rappelle que le Président de l'Assemblée nationale dévoilera à 12 heures 45 le timbre choisi par le Président de la République parmi les dix Mariannes retenues par les Français.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu jeudi 15 juillet, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 25.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 15 JUILLET 2004

A QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 1675) relatif à l'assurance maladie.

Rapport (n° 1703) de M. Jean-Michel DUBERNARD, au nom de la commission spéciale.

2. Fixation de l'ordre du jour.

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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