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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session extraordinaire de 2003-2004 - 14ème jour de séance, 37ème séance

2ème SÉANCE DU LUNDI 19 JUILLET 2004

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

Sommaire

      ASSURANCE MALADIE (suite) 2

      APRÈS L'ART. 39 (suite) 2

      ART. 39 15

      ART. 40 18

      APRÈS L'ART. 40 20

      AVANT L'ART. 41 20

      ART. 41 20

La séance est ouverte à quinze heures.

ASSURANCE MALADIE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie.

APRÈS L'ART. 39 (suite)

M. le Président - Les amendements 1900 à 1911 sont identiques.

M. Jean-Pierre Brard - Ce matin, quelques collègues de l'UMP ont manifesté des velléités de braver l'interdit qui leur est fait de s'exprimer. Leur sort suscite toute ma compassion. Mais M. Accoyer est présent ; il va peut-être lever cet interdit.

M. Bernard Accoyer - Nous sommes 15 fois plus nombreux que vous !

M. Jean-Pierre Brard - A quoi bon, si vous n'avez pas le droit de parler ? Le ministre, lui, a cité Voltaire, lequel disait aussi qu'à la Cour, le plus nécessaire n'est pas de bien parler, mais de savoir se taire. Les députés UMP seraient-ils des courtisans ?

Cette réforme, nous dites-vous, repose sur l'effort partagé. A l évidence, nous n'avons pas le même sens du partage. Vous prévoyez 10 milliards d'économies et 5 milliards de recettes pour rétablir l'équilibre, et ces économies reposent sur une bonne part sur la modification du comportement des assurés et des professionnels de santé et des baisses de remboursement : 2,3 milliards sur les médicaments et produits de santé, 800 millions grâce à un contrôle renforcé des arrêts de maladie, 700 millions grâce au forfait de un euro, et 3,5 milliards par la maîtrise médicalisée, dont près d'un milliard en 2007 grâce au dossier médical partagé et 500 à 700 millions grâce au respect des protocoles de soin et des référentiels de bonnes pratiques pour les patients atteints d'une affection de longue durée. Un quart à un tiers des économies pèsent donc sur les épaules des seuls assurés.

Les entreprises, elles, sont mises à contribution pour un milliard ; un milliard sur 14 au total, on voit quel est votre sens du partage. Sous l'ancienne majorité, nous avions instauré une contribution sociale sur les bénéfices. Par souci d'équité dans le financement de l'assurance maladie, nous proposons par ces amendements de la porter de 3,3 % à 5 %. Ce n'est pas la ruine, mais une modeste contribution de 750 millions qui pourrait remplacer les efforts demandés aux patients de longue durée ou le forfait de un euro. Nous voulons la justice sociale, vous cherchez à protéger les privilégiés.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale - La commission a repoussé ces amendements, qui tendent à augmenter la CSB de 50 %. On imagine quels seraient les effets d'une telle mesure sur l'emploi !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale - En fait, vous augmentez l'impôt sur les sociétés, déjà plus élevé que la moyenne européenne, avec les risques de délocalisation que cela entraîne. Nous préférons recourir à la contribution sociale de solidarité des sociétés, calculée en fonction de l'effectif employé, donc plus stable.

M. Jean-Pierre Brard - Cessez de brandir l'épouvantail de la délocalisation, et cessez de vous autoflageller sur l'état de notre économie, recommandait M. Monti dans Le Monde la semaine dernière. Notre pays est la deuxième destination au monde pour les investissements étrangers, après la Chine, à égalité avec la Grande-Bretagne. Vous êtes dans l'idéologie, ce qui, à droite, n'est pas loin de l'affabulation. Rangez ce fameux taux d'impôt sur les sociétés au magasin des farces et attrapes. Tout patron digne de ce nom se détermine en fonction de l'ensemble des charges, pas de ce seul impôt.

M. Gérard Bapt - Nous n'avons pas déposé d'amendements comparables mais je tiens à rappeler que c'est nous qui avons créé la CSB.

Nous soutenons les amendements du groupe communiste et républicain qui ont le mérite de souligner le déséquilibre des prélèvements entre les entreprises et les usagers puisque sur les 4 milliards de recettes supplémentaires attendues, les trois quarts proviendront des assurés.

Votre déclaration est paradoxale, Monsieur le ministre : en quoi la hausse de la C3S, ne pénaliserait-elle pas l'économie ? Quoi qu'il en soit, il est plus juste d'asseoir le prélèvement sur les bénéfices que sur les chiffres d'affaires.

Les amendements 1900 à 1911, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 1792 à 1803 sont identiques.

M. Jean-Pierre Brard - Nos amendements visent à faire bénéficier les établissements publics de santé de la baisse de la TVA prévue par l'article 279-0 du code des impôts portant sur les travaux d `amélioration, de transformation et d'entretien au même titre que certaines habitations.

Nous connaissons tous les difficultés de l'hôpital public car, depuis des années, l'Etat ne participe plus à l'essentiel des investissements comme l'ont montré le drame de la canicule ou les appels incessants des professionnels. Adopter ces amendements témoignerait de notre volonté commune de développer un système de santé performant et solidaire à laquelle la majorité de nos concitoyens souscrirait.

On nous a opposé, l'an dernier, que l'adoption d'amendements analogues n'était pas envisageable car les travaux dans les hôpitaux proprement dits ne sont pas cités dans l'annexe H de la directive communautaire. Le rapporteur de la loi de finances avait alors souligné que cette dernière autorise la réduction du taux de TVA pour les seuls locaux d'habitation mais il avait ajouté que les unités d'hébergement annexes des hôpitaux sont éligibles au taux réduit dont bénéficient les hôpitaux psychiatriques et les maisons de retraite dès lors que l'hébergement constitue leur activité principale - mais pas les locaux hospitaliers stricto sensu. Voilà des distinctions bien incongrues.

M. le Rapporteur - Avis défavorable car cette série d'amendements est identique à une série d' amendements déjà débattus en séance le 12 juillet dernier.

Les amendements 1792 à 1803, repoussés par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 1864 à 1875 sont identiques.

M. Jean-Pierre Brard - Votre réponse d'alors n'ayant pas été pertinente, Monsieur le rapporteur, cela ne vous dispense pas d'une réponse meilleure aujourd'hui (Sourires).

Notre protection sociale souffre davantage de l'insuffisance de ses recettes que de l'excès de ses dépenses car vous prétendez que l'exonération des charges patronales serait favorable à l'emploi alors que les entreprises se désengagent de plus en plus du financement de la protection sociale et que les salariés, les chômeurs, les travailleurs précaires sont pressurés. La participation des ménages au financement de la sécurité sociale a ainsi été multipliée par 2,5 en vingt ans.

Notre protection sociale a besoin d'un financement nouveau, sûr et cohérent. Nos amendements visent donc à élargir l'assiette des contributions aux revenus financiers des entreprises qui préfèrent les placements financiers aux investissements productifs. Cette mesure rapporterait près de 20 milliards d'euros à la sécurité sociale en soutenant l'investissement et l'emploi.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

Après trois semaines de débats, vous ne trouvez rien de mieux que d'augmenter les cotisations et les prélèvements ! Mais nous aurions pu débattre plus avant si vos amendements avaient fait état d'un taux.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean-Pierre Brard - M. le rapporteur manifestant un souci d'ouverture, je lui suggère de sous-amender nos amendements afin de préciser le taux du prélèvement envisagé (Sourires).

Les amendements 1864 à 1875, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Martine Billard - La CSG a rapporté 60 milliards en 2000, dépassant ainsi le montant de l'impôt sur le revenu des personnes physiques. Or, votre projet vise encore à accroître ces prélèvements en élargissant l'assiette sur les salaires et en augmentant le taux pour les retraités. Cette extension coûtera plus de 5 milliards aux assurés sociaux et, si l'on ajoute la contribution généralisée de un euro ainsi que la hausse du forfait hospitalier, ce sont 5 autres milliards qui seront à la charge des assurés. Au total, la charge des assurés et des malades sera au minimum de 11 milliards et celle des entreprises de 800 millions alors que leurs revenus financiers ont augmenté de 90 milliards. Quant à la hausse de la CSG sur les revenus financiers, elle rapportera 630 millions. Ces chiffres sont d'autant plus éloquents que les 5 milliards que procurera la hausse de la CSG correspondent au montant de la baisse de l'impôt sur le revenu depuis 2000.

Parallèlement, les exonérations de cotisations sociales pour les entreprises se multiplient et M. Sarkozy explique qu'elles doivent également s'appliquer au paiement des heures supplémentaires. Comme les recettes baisseront, vous expliquerez à nouveau qu'il faudra augmenter les prélèvements sur les assurés.

C'est pour ces raisons que j'ai déposé l'amendement 7690, qui vise à créer une contribution sociale sur la valeur ajoutée assise sur l'excédent brut d'exploitation et dont le taux serait modulé en fonction de la part des salaires dans la valeur ajoutée. Ainsi rééquilibrerait-on un tout petit peu la participation des entreprises au financement de l'assurance maladie car il est d'autant moins normal qu'elles s'en retirent qu'elles ont besoin de salariés performants, donc en bonne santé.

M. le Rapporteur - La commission l'a rejeté. Nous avons eu un large débat à ce propos au sein de la mission d'information. Votre proposition alourdirait les charges pesant sur les entreprises, au détriment de la compétitivité de notre économie.

M. Maxime Gremetz - Non !

M. le Rapporteur - Mais si, puisque les prélèvements augmenteraient !

Se posent en outre les questions du transfert massif de charges et du taux proposé.

M. le Ministre - Taxer plus encore le capital ne serait pas bon pour l'emploi. Qui plus est, l'assiette choisie rendrait cette affaire plutôt instable. Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Brard - M. Dubernard devrait ajouter l'ophtalmologie aux spécialités qu'il admire : il n'a pas vu que mon amendement précédent prévoyait bien un taux de 10,36 %. Celui de Mme Billard va dans le même sens et mérite d'être voté. On a beau nous répéter comme un 78 tours rayé que cela va gêner les chefs d'entreprises, cela ne nous convainc nullement. Car si le capital était trop taxé en France, comment expliquez-vous que notre pays soit la deuxième destination mondiale pour les investissements ? Cessez donc d'affabuler !

M. Maxime Gremetz - Si les exonérations de charges étaient efficaces, notre beau pays ne devrait plus compter un seul chômeur... Pourtant, huit millions de personnes, dont deux millions d'enfants, y vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Les 170 milliards de richesse produite pas les salariés ne sont pas investis dans la production mais placés en bourse sans contribuer en rien à la solidarité nationale. Pourquoi les profits des entreprises progressent-ils sans cesse tandis que le pouvoir d'achat diminue ? Parce que vous faites le choix de servir toujours les mêmes, au détriment de la masse des salariés et des couches moyennes.

Au moment de la création de la sécurité sociale, le système était fondé sur les richesses produites par l'entreprise, avec des cotisations patronales comme salariales à 14,6 %. Aujourd'hui, seules les secondes sont encore à ce niveau, tandis que la participation des entreprises est tombée à 4,5 % ! Si on n'accordait pas 20 milliards d'exonérations de cotisations patronales - sans compter les 2,5 milliards prévus dans le prochain budget ; si on n'exonérait pas des entreprises qui délocalisent comme Whirlpool ou Magnetti-Marelli ; si on revenait aux principes fondateurs, il n'y aurait plus de déficit.

Parce que cet amendement est important, nous demandons un scrutin public.

A la majorité de 50 voix contre 11, sur 61 votants et suffrages exprimés, l'amendement 7690, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard - Si les exonérations fonctionnaient, ce sont des milliers d'emplois qui auraient du être créés ces dernières années...

Aujourd'hui, le ministre d'Etat propose d'exonérer de cotisations les heures supplémentaires. De la sorte, compte tenu du contingent de 4 heures, une entreprise de 9 salariés fera non seulement l'économie de créer un poste mais se verra exonérée de cotisations sur ces 36 heures supplémentaires ! Ainsi, le chômage, loin de régresser, va augmenter !

Par notre amendement 7691, nous proposons d'étendre aux entreprises la contribution sociale sur les produits de placement, à laquelle seules les personnes physiques sont actuellement assujetties, mais en revanche d'en exonérer l'épargne populaire.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale - Rejet car on risquerait de provoquer une délocalisation massive de l'épargne. Le projet augmente déjà le taux de la CSG sur les produits d'épargne.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean-Pierre Brard - Vous parlez de risque, Monsieur Bur, mais la peur n'a jamais évité le danger, et je ne vous pensais pas craintif... Votre argumentation est dans la vieille tradition du Second Empire, elle-même dans la ligne de la fameuse formule de Guizot « Enrichissez-vous ! ». Lisez ce que Marx et Engels ont écrit sur cette période de l'histoire de France : tandis qu'en Allemagne on favorisait le capital industriel, chez nous les rentiers se contentaient de tendre les coupons... Vous retardez un peu sur votre temps !

L'amendement de Mme Billard est excellent, et je comprends que MM. Douste-Blazy et Bertrand n'aient rien à répondre : ils ne veulent pas se discréditer en disant des choses contraires à la réalité !

L'amendement 7691, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard - L'amendement 7692, dans un souci de justice sociale, tend à instituer un prélèvement sur les stock-options au bénéfice de l'assurance maladie.

L'amendement 7692, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Nous en venons aux amendements identiques 1852 à 1863.

M. Jean-Pierre Brard - Nous proposons d'apporter des ressources nouvelles à la sécurité sociale en instituant une contribution assise sur les revenus financiers des entreprises. J'espère que le rapporteur formulera une argumentation pour justifier sa position... Il est indécent de laisser les entreprises licencier pour obtenir des taux de rentabilité financière toujours plus élevés. Même certains économistes libéraux s'aventurent à proposer la taxation des licenciements. Le prélèvement que nous proposons ne frapperait que celles des entreprises qui préfèrent les placements financiers aux investissements productifs. Comme pour les retraites, nous devons faire un choix politique : soit on trouve les financements pour répondre aux besoins sociaux, soit on réduit les droits de nos concitoyens. MM. François Bayrou et Hervé Morin, qui viennent d'arriver, vont sans doute exprimer leur point de vue sur ce point : j'imagine qu'ils ne sont pas venus pour faire les figurants comme nos collègues de l'UMP, mais pour participer au débat !

M. Hervé Morin - Nous avons déjà participé !

M. Jean-Pierre Brard - Pas suffisamment. Vous n'avez pas donné tout ce dont vous êtes capable, Monsieur Morin. Nous écouterons avec attention ce que vous allez dire, soit pour vous rallier au Gouvernement comme d'habitude, soit pour défendre nos compatriotes comme nous le faisons.

M. Maxime Gremetz - Le mieux est de prendre des exemples. Je prends celui de Whirpool : cette entreprise a délocalisé une chaîne vers la Slovaquie parce que les actionnaires trouvaient que 12 % de rentabilité financière, ce n'était pas assez : il leur fallait 16 % et plus de 300 emplois ont été supprimés.

M. Jean-Michel Fourgous - Il n'y a qu'à dire à la Slovaquie de passer aux 35 heures !

M. Maxime Gremetz - Whirpool a pris l'engagement d'installer d'autres activités et a bénéficié d'exonérations de cotisations patronales.

M. Jean-Michel Fourgous - Ce n'est pas bien !

M. Maxime Gremetz - La région, le département, la commune, la communauté de communes ont donné près de 5 millions d'argent public. Eh bien, rien : la chaîne est partie, personne n'est revenu, et aujourd'hui l'entreprise annonce un nouveau plan de suppression de 120 emplois ! Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres.

Bref, les exonérations de cotisations patronales et les aides publiques accordées sans contrepartie en termes d'emplois n'ont aucun effet. Les profits de Whirpool servent à alimenter la spéculation financière et pas un centime ne va à la solidarité nationale ! Et qu'attendez-vous pour faire payer aux grands groupes les 2,5 milliards d'euros qu'ils doivent à la sécurité sociale ?

M. le Rapporteur - Rejet, pour les raisons que j'ai déjà exposées à plusieurs reprises.

M. le Ministre - Si l'on veut créer des emplois, il ne faut surtout pas charger encore la barque des entreprises en relevant l'impôt sur les sociétés ! Alors que la moyenne européenne est de 30 %, nous en sommes à 33 1/3, à quoi s'ajoute 1,1 % de contribution additionnelle. C'est évidemment trop. Avis défavorable par conséquent.

M. Jean-Pierre Brard - Vous nous répondez, Monsieur le ministre, mais votre réponse n'est pas crédible. On ne peut en effet réduire les charges pesant sur les entreprises au seul impôt sur les sociétés : dans d'autres pays s'y ajoutent la taxe foncière ou la taxe sur le capital, dont il faudrait tenir compte pour arriver à des comparaisons pertinentes ! Et c'est sans doute ce qui explique que la France se trouve au deuxième rang mondial des pays accueillant des investissements.

Vous êtes obsédés par la réduction des charges des entreprises mais cette politique n'a en rien atténué le chômage. En fait, vous passez votre temps à vous taper la tête contre un mur, persuadés que vous finirez par le briser, et vous faites comme si cela ne faisait pas mal. Il faudrait tout de même comprendre que l'objectif est hors de portée et se montrer plus ouvert à la réalité économique ! Cessez donc de vivre dans la croyance, d'autant que ce n'est que la croyance au veau d'or qui mène toujours à un déni de solidarité, quelles que soient les arguties qui l'accompagnent.

M. Michel Piron - Pataphysique et prêchi-prêcha !

M. Maxime Gremetz - Nous demandons un scrutin public.

M. le Président - Sur les amendements 1852 à 1863, je suis donc saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public.

A la majorité de 69 voix contre 5 sur 74 votants et 74 suffrages exprimés, les amendements 1852 à 1863 ne sont pas adoptés.

M. Gérard Bapt - Puisque vous déplorez que, soumise aux aléas économiques, la contribution sur les bénéfices manque de stabilité, vous accepterez certainement nos amendements identiques 6759 à 6773, Monsieur le Ministre.

Ces amendements visent à faire financer pour partie l'assurance maladie par une cotisation des entreprises qui serait fonction de l'excédent brut d'exploitation. Le choix de cette assiette permettrait de taxer le profit brut, c'est-à-dire celui qui alimente l'épargne financière au lieu de servir l'investissement productif. Plus le rapport entre masse salariale et chiffre d'affaires sera élevé, moins l'entreprise sera taxée et cette disposition sera donc favorable à celles qui auront augmenté les salaires ou créé des emplois.

Cette contribution évoluerait au même rythme que le PIB, c'est-à-dire comme la somme des valeurs ajoutées, alors que l'assiette salaire tend à diminuer à raison de la baisse de la part des salaires dans la valeur ajoutée. Elle contribuerait à réduire le coût relatif du travail puisqu'elle s'accompagnerait d'une diminution, voire d'une disparition des cotisations proportionnelles à la masse salariale. Les entreprises de main-d'œuvre seraient donc favorisées et la substitution du capital au travail découragée.

Enfin, cette réforme contribuerait à transférer le financement de l'assurance maladie des entreprises riches en main-d'œuvre vers les entreprises fortement capitalistiques.

Facteur de stabilité et incitation au développement de l'emploi : la proposition ne mérite-t-elle pas toute votre attention ?

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - En 1997, M. Chadelat avait suggéré une réforme de l'assiette des cotisations sociales que le gouvernement Jospin s'est bien gardé d'appliquer. Je ne puis que redire que ce genre de taxation freine à terme l'investissement.

M. Gérard Bapt - Si le gouvernement Jospin n'a pas taxé directement la valeur ajoutée, il a institué la contribution sur les bénéfices des sociétés ! Et s'il n'a pas suivi M. Chadelat, celui-ci a remis un deuxième rapport que, contrairement à ce que vous dites, vous suivez, vous, puisque vous revoyez le partage entre assurance de base et assurances complémentaires ! Il y aurait donc Chadelat et Chadelat...

M. Maxime Gremetz - Il y a beaucoup de rapports, mais mieux vaut s'en tenir aux données incontestables lorsqu'il s'agit d'apprécier les effets de la réduction du temps de travail ou du coût du travail. On entend dire qu'en France, à ces deux égards, la situation serait préjudiciable à la compétitivité. Or qu'en est-il exactement ? Le coût horaire du travail, charges comprises, s'établit à 27,41 euros en Suède et à 26,25 euros en Allemagne, mais à 25,1 euros seulement chez nous, comme au Royaume-Uni ! Comment expliquer alors que les Britanniques créent des emplois et que nous, nous en perdions ? Comment expliquer que le taux de chômage des jeunes soit de 21,3 % en France, contre 18,2 % dans la moyenne de l'Union, 17,3 % en Suède, 11,8 % au Royaume-Uni et 11,1 % en Allemagne, les Quinze faisant 16 ?

Pour ce qui est du temps de travail, nous arrivons certes en quatrième position, après la Pologne, l'Espagne et l'Italie, mais nous sommes à la moyenne de l'Union et nous devançons la Suède - 36,5 heures -, le Royaume-Uni - 37,4 - et l'Allemagne - 35,9.

Votre politique d'exonérations de cotisations patronales, de baisse du coût du travail et de cadeaux fiscaux aux entreprises n'a pas les résultats extraordinaires que vous supposez, qu'il s'agisse de la croissance, de l'emploi ou de la compétitivité.

C'est donc bien d'un choix politique qu'il s'agit. D'ailleurs, la méthode le démontre, puisque les exonérations de cotisations patronales sur les bas salaires sont linéaires, qu'il s'agisse d'entreprises comme Valéo, Dunlop ou Daewoo, ou de PME. Peut-on estimer normal que les salariés de Whirpool soient payés tout juste au SMIC et que l'entreprise bénéficie de l'exonération de cotisations sur les bas salaires ? Les recettes que vous proposez sont usées, et elles n'ont jamais réussi. Réfléchissez à autre chose !

Les amendements 6759 à 6773 mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 6729 à 6743 sont identiques.

M. Gérard Bapt - Par ces amendements, nous donnons corps à notre proposition de base concernant le financement de l'assurance maladie, en demandant qu'à terme la totalité des droits sur le tabac lui soit affectée.

M. Bernard Accoyer - Mais c'est vous qui les avez détournés pour financer les 35 heures !

M. Gérard Bapt - A ce détail près qu'à l'époque l'assurance maladie était à l'équilibre !

M. Bernard Accoyer - C'est faux ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Marie Le Guen - Evidemment, cela vous gêne !

M. le Rapporteur - La commission a repoussé l'amendement. Sur le fond, je souhaite rappeler que le gouvernement Jospin a, le premier, transféré les droits sur le tabac (M. Jean-Marie Le Guen proteste) par le biais du FOREC, pour financer les 35 heures (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Ministre - Avis défavorable.

M. Jean-Marie Le Guen - L'opposition a approuvé le Gouvernement lorsque celui-ci a décidé d'augmenter massivement les droits sur le tabac. Les Français ont admis cette augmentation, justifiée, puisqu'il s'agissait de trouver des recettes supplémentaires qui seraient affectées à l'assurance maladie et à la santé publique. Jamais le Gouvernement n'aurait obtenu l'appui de la nation si l'on avait su que sa politique consisterait en fait à utiliser ces ressources nouvelles pour diminuer les impôts des nantis ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Refuser cet amendement, c'est se figurer que les Français sont incapables de rien comprendre aux finances publiques ! Une chose est d'arbitrer entre les divers besoins sociaux, une autre d'arbitrer entre les besoins sociaux d'une part, les autres besoins d'autre part - par exemple, dirait le ministre de l'économie, les dépenses de défense... Le moins que l'on en puisse dire, c'est qu'il n'est pas neutre d'affecter telle recette à l'assurance maladie ou au budget de l'Etat.

Par ailleurs, le gouvernement de Lionel Jospin en créant le FOREC, a choisi de financer la réduction des charges et de créer des recettes supplémentaires pour l'assurance maladie... (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

M. Bernard Accoyer - Quel aplomb !

M. Jean-Marie Le Guen - ...puisque les emplois créés grâce à l'introduction des 35 heures ont suscité de nouvelles cotisations sociales, donc des ressources supplémentaires pour l'assurance maladie. La politique que vous menez est inexplicable et inexcusable (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Après avoir démantelé le FOREC et mis à mal la politique de l'emploi, vous avez affecté le produit des taxes sur les alcools et sur le tabac au budget de l'Etat. Ce faisant, vous faites perdre toute crédibilité au financement de l'assurance maladie. Les Français, qui ont accepté, pour promouvoir la santé publique et pour conforter la sécurité sociale, de payer leur tabac très cher, constateront avec un violent déplaisir que vous avez détourné ces ressources nouvelles pour vous en faire des recettes de poche destinées à remettre de l'ordre dans des finances publiques à la dérive (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. Hervé Morin - Décidément, vérité d'un jour n'est pas celle du lendemain ! Il est pittoresque d'entendre ces critiques contre les exonérations de charges sur les bas salaires alors que MM. Gremetz et Jean-Marie Le Guen ont été les premiers à en soutenir le principe dans le cadre des lois Aubry !

M. Maxime Gremetz - Ne mentez pas !

M. Hervé Morin - Il est tout aussi pittoresque d'entendre M. Le Guen expliquer que les droits sur le tabac doivent être affectés à l'assurance maladie alors que le gouvernement Jospin les a en grande partie détournés pour financer les 35 heures. Et encore n'avons-nous pas abordé la CADES !

M. le Rapporteur - Le tableau qui figure en page 323 du rapport de la commission montre l'évolution de la proportion des droits sur les tabacs affectée à la CNAM. Que l'on s'y reporte, et l'on verra qu'elle était de 2,61 % en 2001, 15,2 % en 2003 et 22,27 % en 2004.

M. Jean-Marie Le Guen - De combien était cette proportion en 1996 ? Zéro !

M. le Ministre - Il ressort des véhémentes déclarations de M. Jean-Marie Le Guen que l'augmentation des droits sur les tabacs n'aurait pas été affectée à l'assurance maladie. Ce n'est pas exact : l'intégralité de ce produit est allé à l'assurance maladie, comme en témoignent les chiffres cités par votre rapporteur. Quant à faire croire qu'il faudrait affecter l'ensemble des droits sur les tabacs et sur l'alcool au financement de l'assurance maladie, c'est peu crédible, car cela signifierait qu'il faudrait trouver 6 milliards pour compenser la perte ainsi infligée au budget de l'Etat.

M. Jean-Marie Le Guen - Vous allez bien faire voter une dette de 15 milliards reportée sur les générations futures !

M. le Ministre - Ne faites pas croire que l'augmentation des droits sur les tabacs est allée dans les caisses de l'Etat, alors qu'elle a été affectée à l'assurance maladie (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Gérard Bapt - Si l'on cite des chiffres, il faut les citer tous. Or, le rapporteur a certes fait référence à la clé de répartition des droits sur les tabacs affectés à la sécurité sociale, mais de manière tronquée, oubliant de signaler que, de 2001 à 2003, la part affectée à l'Etat était nulle et qu'elle est passé à 77,41 % en 2004 ! Vous avez bien récupéré les trois quarts des recettes issues des droits sur les tabacs au profit de l'Etat, c'est incontestable. Quant au FOREC, il était indirectement lié à l'assurance maladie puisqu'il contribuait à l'amélioration de l'emploi qui a permis d'obtenir un quasi équilibre du budget de l'assurance maladie.

M. Maxime Gremetz - Monsieur Morin, on ne vous voit pas souvent, mais lorsque vous venez, on vous entend ! Seulement, vous ne devriez pas venir ici raconter des histoires et vous, qui ne souhaitez pas être mis dans le même sac que l'UMP, vous ne devriez pas non plus nier le pluralisme. Je vous rappelle donc que notre collègue Hage s'est fait insulter lors de la mise en place de la CSG, parce qu'il y était défavorable. Et vous savez parfaitement, Monsieur Morin, que nous n'avons jamais voté les lois de financement de la sécurité sociale.

Personnellement, j'ai toujours voté contre. Nous nous sommes également prononcés pour la suppression du FOREC, et contre les hausses du prix du tabac. M. Bur, la majorité se montrant plus discrète s'agissant de l'alcool, a fait adopter une modeste taxe sur les petites bières - que, cédant aux pressions, il a laissé supprimer ensuite. Enfin, nous nous sommes opposés à la CRDS. Monsieur Morin, ici nous ne sommes pas en vacances, comme vous en donnez l'apparence ! Nous débattons de questions sérieuses, de l'avenir de l'assurance maladie, de la solidarité nationale. Mieux vaut rétablir la vérité que de laisser croire à une unanimité qui n'existe pas.

M. Jean Le Garrec - C'est vrai, il nous est arrivé d'être en désaccord avec nos collègues communistes, en particulier sur le FOREC et sur les abattements de charges. Le FOREC, dispositif certes compliqué, avait le mérite de participer au financement de la protection sociale.

Plusieurs députés UMP - Ou plutôt des 35 heures !

M. Jean-Marie Le Guen - Sur les 35 heures, mettez-vous d'accord avec Chirac, au lieu d'en faire une grossesse nerveuse !

M. Jean Le Garrec - 84 % du produit des droits sur le tabac étaient affectés en 2003 au FOREC, qui en revanche ne reçoit rien en 2004, alors que l'Etat et le BAPSA bénéficient de plus de 77 % de ce produit. Un transfert est donc en cours. Quant aux abattements de charges, j'attends de savoir ce que fera M. Sarkozy : l'autorisation de travailler plus pour gagner plus sera-t-elle assortie d'une réduction de ces abattements ? On verra bien qui dit la vérité. Au titre du FOREC, les abattements de charges Aubry-Jospin, à la différence des abattements Juppé-Balladur, venaient en contrepartie d'engagements précis sur l'emploi, comme l'a établi la mission parlementaire sur les 35 heures. Dans le fourre-tout de 16 milliards dont parle M. Sarkozy, 1,3 milliard seulement, en fin de compte, est imputable aux 35 heures (Protestations sur les bancs du groupe UMP). La vérité devra apparaître, et sur l'affectation des droits sur les tabacs, et sur le coût véritable des 35 heures.

Les amendements 6729 à 6743, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Martine Billard - Notre amendement 7714 tend à affecter à l'assurance maladie les sommes perçues au titre des droits sur les alcools. Nous estimons que l'ensemble des ressources de la nation doit participer au financement de l'assurance maladie, à commencer par celles tirées de produits nuisibles à la santé. Comme il y a peu d'espoir que la consommation de tabac et la surconsommation d'alcool disparaissent, il est logique que du moins les taxes pesant sur eux soient affectés à l'assurance maladie, afin d'améliorer l'état sanitaire de la population.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Il est impossible d'opérer un transfert complet. Mais, à l'article 39, figure le transfert d'un milliard supplémentaire de droits sur le tabac.

M. Jean-Marie Le Guen - Nous allons en parler !

M. le Ministre - Rejet.

Mme Martine Billard - Le rapporteur annonce un transfert d'un milliard. Le ministre, lui, a déclaré qu'un transfert total représenterait une perte de 6 milliards pour le budget de l'Etat. Mais le Gouvernement n'a pas hésité à baisser l'impôt sur le revenu et à multiplier les exonérations de cotisations patronales. Ce milliard fait donc un peu figure d'aumône. Mieux vaudrait établir une fiscalité progressive plus juste.

M. Jean-Marie Le Guen - L'histoire de ce petit milliard est édifiante. Dès le début, l'Etat, dans sa grande générosité, a annoncé qu'il verserait son écot, sachant que les Français subiraient chaque année 4 milliards de prélèvements supplémentaires et qu'ils auraient à assumer les 70 milliards de dettes que l'Etat s'apprête à reporter sur les générations futures. Face à ces sommes, l'Etat accepte de verser un milliard , une seule fois, pour contribuer au redressement de l'assurance maladie. Il s'agit d'une aumône symbolique, puisque l'Etat encaisse à son profit et au détriment de l'assurance maladie 15 milliards au titre des droits sur les alcools et le tabac et sur les contrats d'assurance, auxquels s'ajoutent les 2 milliards de non-remboursement des charges - en parfaite violation de la loi Balladur. En contrepartie de tout cela, l'assurance maladie a droit à un milliard une seule fois, pour solde de tous comptes !

L'amendement 7714 mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard - Dans le même esprit que précédemment, nous proposons, par l'amendement 7715, que le produit de la taxe sur les activités polluantes soit affecté aux ressources de l'assurance maladie. Le mieux serait de réduire la consommation de produits polluants, par exemple de pesticides, dont on sait maintenant que les OGM ne la fera pas diminuer. A défaut, il faut que les sommes provenant de leur taxation aillent à l'assurance maladie pour réparer les effets néfastes de leur usage sur la santé.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis. Monsieur Le Guen, le milliard supplémentaire dont vous parlez sera transféré chaque année, et non pas une seule fois.

M. Jean-Marie Le Guen - Cette disposition ne figure pas dans vos comptes. Si c'est vrai, c'est une bonne nouvelle !

M. le Ministre - Enfin, Monsieur Le Garrec, les abattements de charges en 2003 au titre des 35 heures s'élèvent à 8 milliards, et nous n'admettons pas votre affirmation péremptoire de créations d'emplois grâce aux 35 heures, qui se sont soldées en fait par des emplois perdus pour la France et par une moindre croissance. Arrêtez de faire croire au miracle ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

L'amendement 7715, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Sur le vote des amendements identiques 1828 à 1839, je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public.

M. Maxime Gremetz - La refonte du financement de la protection sociale doit aller de pair avec le développement de l'emploi. Nous refusons la multiplication des exonérations de cotisations patronales, qui tirent vers le bas l'ensemble des salaires. Il faut au contraire articuler mieux le financement de la protection sociale et l'entreprise, en réformant l'assiette des cotisations patronales. Actuellement, plus une entreprise embauche ou augmente les salaires, plus elle paye de cotisations ; plus elle licencie ou se réfugie dans les placements financiers, moins elle en paye. Ainsi, pour les entreprises de main-d'œuvre comme celles du BTP, la part des charges sociales dans la valeur ajoutée est-elle le double de ce qu'elle est pour les banques et compagnies d'assurances.

Il faut au contraire que les entreprises qui licencient ou qui compriment les salaires soient assujetties à des taux plus lourds et que celles qui développent l'emploi, les salaires et la formation à des taux plus bas. Tel est l'objet de nos amendements. Un ministre a reconnu récemment qu'accorder les mêmes exonérations à tous n'est pas vraiment juste. Mais bien sûr, il faudrait une vraie révolution culturelle pour que la majorité en tire les conséquences...

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Une telle mesure conduirait à une diminution de l'investissement, et il est de toute façon difficile d'appréhender l'assiette de la valeur ajoutée. Rejet également.

M. Hervé Morin - Il y a un peu de schizophrénie dans les propositions de nos collègues de gauche. Mme Billard veut affecter le produit de la TGAP à l'assurance maladie, mais ses amis socialistes l'avaient affectée au financement de la réduction des charges pour les 35 heures. Un autre de ses collègues disait même à l'époque : plus vous polluerez, plus vous fumerez et plus vous boirez, mieux vous financerez les 35 heures ! (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Maxime Gremetz - C'était moi !

M. Hervé Morin - D'autre part, le ministre nous annonce que le milliard provenant des droits sur le tabac sera un financement pérenne pour l'assurance maladie. Outre que de telles mesures ont déjà été prévues mais non appliquées, il me semble que le Parlement devra reconduire chaque année cette disposition dans le cadre du PLFSS.

M. le Ministre - Il s'agit bien d'un financement pérenne. Actuellement, les droits sur le tabac vont pour 22 % à l'assurance maladie, 27 % à l'Etat et 51 % au BAPSA. Nous modifions cette répartition pour affecter 37 % à l'assurance maladie et 12 % à l'Etat, et ce transfert représente un milliard d'euros. Les socialistes prenaient de l'argent à l'assurance maladie pour le donner à l'Etat, nous le prenons à l'Etat pour le donner à l'assurance maladie. Cela explique votre étonnement... (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marie Le Guen - Vous ne pouvez inscrire dans la loi que cette ressource de un milliard sera pérenne, mais vous pouvez en prendre l'engagement au nom du Gouvernement. Vous l'avez fait, et je vous en donne acte, je m'en félicite même. Mais après ce bon geste, faites-en un autre : si vous voulez vraiment défendre l'assurance maladie, ne vaudrait-il pas mieux que ce soit l'Etat, plutôt qu'elle du fait de la prorogation de la CRDS, qui supporte la dette existante ?

A la majorité de 55 voix contre 4 sur 59 votants et 59 suffrages exprimés, les amendements 1828 à 1839 ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - S'il est un domaine où la droite montre de la ténacité, c'est bien l'allégement des charges sociales patronales. Pendant que les cadeaux pleuvent pour le patronat, la sécurité sociale est malade par manque de recettes, et vous ponctionnez encore les retraites au passage.

Rompre le lien entre la baisse des cotisations sociales et l'application des 35 heures est une nouvelle régression. Vous allez en effet généraliser les réductions Juppé sur les bas salaires pour les entreprises n'ayant pas d'accord sur la RTT. Nous avons toujours dénoncé les allégements sans contrepartie. Au moins les aides instaurées par les loi Aubry incitaient-elles à négocier la RTT avec maintien des rémunérations.

Vous prétendez que la baisse des charges et des coûts salariaux engendre plus de profits et plus d'emplois. Force est pourtant de constater que les pays les plus compétitifs, tels l'Allemagne et le Japon, ont souvent un coût du travail élevé, et que, ces dix dernières années, le sous-emploi a davantage frappé des pays en développement à très bas salaires. L'innovation, c'est de trouver d'autres solutions que la baisse des charges patronales. Par nos amendements 1888 à 1899, nous proposons donc de supprimer les dispositifs prévus sur les exonérations de cotisations.

Mme Muguette Jacquaint - La mode est à l'assouplissement des 35 heures. Or, un tel assouplissement conduirait à amputer le pouvoir d'achat, donc à affaiblir la croissance, l'investissement et les créations d'emplois. De plus, il est inacceptable d'avoir dissocié l'octroi des aides publiques aux entreprises de l'obligation faite à l'employeur de conclure des accords sur la RTT ou de créer des emplois.

Vous allez à l'encontre de ce qu'il faudrait faire pour soutenir la croissance et vous persistez à baisser les charges des entreprises - puisque le budget de 2004 prévoyait une exonération de 21 milliards et que 2,5 milliards d'exonérations supplémentaires sont prévus en 2005. Depuis vingt ans, ces dispositifs n'ont pas servi l'emploi, c'est le moins que l'on puisse dire. Nos amendements visent donc à supprimer les exonérations de charges patronales s'il n'y a pas de contrepartie en matière de RTT ou de créations d'emplois.

M. le Rapporteur - Le groupe communiste en veut réellement aux entreprises ! (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) Vous avez déjà proposé une mesure qui institutionnaliserait l'insécurité juridique et financière des entreprises et vous voulez maintenant supprimer des exonérations, mais avec quels effets sur l'emploi ? Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean Le Garrec - Je vous rappelle, Monsieur le ministre, que la loi Fillon de janvier 2003 a radicalement changé le système d'exonération dont bénéficient les entreprises.

Quels sont les chiffres ? Le FOREC était doté de 16,5 milliards : en 2003, dont 7 milliards au titre des abattements Fillon, et 2 milliards au titre des abattements Juppé. Les abattements liés aux 35 heures étaient de 7 milliards, et ceux liés à la loi Robien de 0,4 milliard. Et l'effet des 35 heures sur l'emploi n'est pas sérieusement contesté : on l'évalue entre 300 000 et 400 000 créations (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

En 2004, en revanche, il y aura 17,1 milliards d'abattements, dont 15,8 milliards d'abattements Fillon, pour le coup sans contrepartie alors que 98 000 emplois ont disparu, en particulier dans l'industrie. Je tenais à citer ces chiffres, qui émanent du ministère du travail lui-même, du rapport Carrez sur le PLFSS et de la mission parlementaire sur les 35 heures, et que vous ne pouvez donc récuser.

Les amendements 1888 à 1899, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Muguette Jacquaint - Les mesures d'abaissement des coûts salariaux que vous avez prises, loin de servir notre pays, ont accru ses difficultés sur la scène internationale, en particulier son retard sur les Etats-Unis, dans le domaine des nouvelles technologies, car elles n'ont pas permis d'endiguer la fuite des cerveaux non plus que les délocalisations.

Face à ces évolutions, il convient de sécuriser l'emploi, la formation et notre système de protection sociale, ainsi que de réformer radicalement le système d'exonérations des charges patronales. C'est ce à quoi tendent nos amendements 1816 à 1827.

M. Maxime Gremetz - La baisse des cotisations sociales patronales est la pièce maîtresse des politiques de l'emploi menées depuis la seconde moitié des années 1980. Elle s'est accompagnée de dispositifs relevant du workfare cher à Tony Blair et a favorisé la multiplication des emplois précaires ainsi que la chasse aux chômeurs.

Avec les nouvelles technologies, nous dit-on, les entreprises auraient de plus en plus besoin de souplesse et de réactivité pour faire face à la concurrence sur le marché mondialisé. Les travailleurs les moins qualifiés coûteraient en charges salariales et sociales beaucoup plus qu'ils ne rapporteraient et il faudrait donc baisser les coûts salariaux par exonération de cotisations ou subventions publiques.

Or, entre 1991 et 2004, selon l'ACOSS, 153,3 milliards de baisses de cotisations - plus de 1 000 milliards de francs ! - ont été accordées aux patrons par les gouvernements successifs. Si, en 1992, leur montant s'élevait à 1,7 milliard, il a dépassé 19 milliards en 2003. Cette politique est un échec, car le chômage a progressé tandis que se multipliaient les emplois à bas salaire et à faible qualification. Elle a pesé lourdement sur la part des salaires dans la valeur ajoutée, qui a baissé de plus de 10 points depuis 1982, et provoqué l'envolée des profits et de la spéculation boursière.

Nous proposons une vraie alternative : la modulation de la cotisation en fonction de la valeur ajoutée.

Les amendements 1816 à 1827, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - Avec votre plan, vous prétendez sauver l'assurance maladie, mais en vérité vous organisez son asphyxie financière pour mieux imposer la réduction draconienne des dépenses publiques de santé et pour institutionnaliser la montée des dépenses privées.

Obsédés par la réduction des prélèvements obligatoires et du coût du travail, vous vous attaquez en premier lieu aux cotisations sociales patronales, rejetant des moyens de financement socialisés qui permettraient pourtant une véritable réforme de notre système de santé, et faisant porter vos quelques mesures, injustes et inefficaces, sur les seuls ménages.

Si le ministre reconnaît que les sommes non versées à l'assurance maladie font problème, il ne s'engage à rembourser chaque année qu'un milliard sur les deux milliards de dettes, et n'envisage rien de précis pour les taxes sur les tabacs, les alcools et les assurances.

En revanche, le taux de la CSG pour les retraités imposables augmentera de 0,4 % ; l'élargissement de l'assiette de la CSG et de la CRDS, prolongée au-delà de 2014, rapportera 1 milliard ; la franchise d'un euro rapportera 0,4 milliard et la hausse du forfait hospitalier 0,3 milliard ; le taux de la CSG sur les revenus du patrimoine et des placements sera accru de 0,7 %, mais les entreprises n'auront à acquitter qu'une augmentation de 0,16 % de la CSSS, soit seulement 0,7 milliard.

Nous refusons cette logique ! Les dépenses de santé vont continuer à progresser au rythme du développement, du vieillissement, du progrès technique médical. Des besoins nouveaux de santé vont se faire jour pour répondre aux nouveaux fléaux, pour sortir des inégalités sociales au travail, pour développer la prévention. Un relèvement des taux de remboursement est également indispensable, de même que le développement de l'emploi et de la formation dans le secteur médical afin de faire face à une démographie sinistrée et de sortir du rationnement comptable.

Mais ces réformes indispensables impliqueront une refonte du financement. C'est pourquoi, par nos amendements 1840 à 1851, nous entendons poser le principe de la cotisation sociale en fonction des salaires versés dans l'entreprise, lieu où se créent les richesses. Pour cela, il convient de redresser la part des salaires dans la valeur ajoutée qui a perdu 10 % depuis 1983. Nous proposons aussi de moduler les taux de cotisation en fonction de la politique de l'emploi des entreprises. Ainsi, celles qui licencient et qui compriment les salaires seraient assujetties à un taux plus élevé que celles qui développent l'emploi, les salaires et la formation.

C'est l'ensemble des propositions contenues dans notre contre-projet que nous déclinons ainsi par voie d'amendement, c'est pourquoi nous demandons un scrutin public.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Rejet.

M. Jean-Marie Le Guen - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 17 heures 20, est reprise à 17 heures 35.

A la majorité de 56 voix contre 4 sur 60 votants et 60 suffrages exprimés, les amendements 1840 à 1851 ne sont pas adoptés.

M. Armand Jung - Mes amendements 8207 et 8208, que j'ai déposés avec Jean-Marie Aubron et Michel Liebgott, députés de la Moselle, visent à apporter des ressources complémentaires au régime local d'assurance maladie d'Alsace et Moselle, qui va se trouver fragilisé par l'adoption de ce texte.

Ce régime local est un régime obligatoire, complémentaire du régime général. Il dispose d'une autonomie de gestion, associée à une responsabilité pleine et entière, puisqu'à la différence du régime général il ne peut se trouver dans une situation financière exigeant le recours à l'emprunt, et doit par ailleurs disposer de réserves légales ; il ne peut assurer son équilibre qu'en diminuant les prestations ou en augmentant les cotisations, lesquelles sont payées par les seuls salariés ou retraités. Objet d'un très large consensus au sein de la population et des élus comme sur l'ensemble de ces bancs, il a été intégré en 1946 dans le système français de sécurité sociale, confirmé en 1998 et complété en janvier 2001 dans la loi de modernisation sociale. La loi du 14 avril 1998 lui a ouvert la possibilité de mener des campagnes de prévention sanitaire : une campagne de très grande envergure a ainsi été lancée sur les maladies cardio-vasculaires ; je souhaiterais que l'ensemble des mutuelles et assurances privées de notre pays en fasse autant... Je m'étonne au passage qu'on n'ait pas plus parlé de prévention dans ce débat.

Celui-ci aurait d'ailleurs pu être plus court si vous aviez bien voulu, Monsieur le ministre, vous inspirer de notre droit local, comme ont su le faire M. Borloo en matière de surendettement, ou d'autres de vos collègues qui s'intéressent au Livre foncier d'Alsace et Moselle.

Hausse du forfait hospitalier, CSG, CRDS, déremboursements de médicaments et de soins : vous portez atteinte à ce système généreux et solidaire, unique en France et en Europe. Diminuer les prestations serait une régression sociale que personne n'envisage. Plutôt que d'augmenter les cotisations salariales, qui sont de 1,7 % - et qu'il faudrait doubler d'ici deux ans, ce qui ne serait pas acceptable - il serait nécessaire d'instituer une contribution patronale. Mes amendements visent à autoriser cette ressource supplémentaire, tout en laissant le soin d'en fixer le montant à l'instance de gestion, où les entrepreneurs feraient leur entrée. La participation de entreprises au financement du régime local est demandée par une pétition de la CGT Alsace qui a déjà recueilli plus de 10 000 signatures et que je tiens à votre disposition.

Evidemment, dès que les entrepreneurs de nos départements ont eu connaissance du projet, ils se sont bornés à préconiser une adaptation des recettes aux dépenses, c'est-à-dire, en clair, un relèvement des cotisations des salariés. Mais ils n'ont pas non plus écarté l'idée d'un alignement, qui signifierait la mort de notre droit local...

Au début de ce débat-fleuve, le Gouvernement et la commission ont parlé d'un paritarisme rénové. N'avons-nous ici l'occasion d'illustrer ce mot d'ordre, en assurant l'avenir de ce régime original, solidaire et généreux ? Si, au contraire, la réforme était adoptée en l'état, ce régime serait condamné à une mort lente, après avoir épuisé toutes ses réserves. J'en appelle donc à la responsabilité et au bon sens de tous, afin de ne pas avoir à tirer à nouveau la sonnette d'alarme !

M. le Président de la commission spéciale - Il est paradoxal que, quand vos amis s'offusquent du retour du Medef dans les organes de gestion de l'assurance maladie, vous demandiez, vous, que les entreprises entrent dans les instances de gestion du régime local ! En tout état de cause, des modifications ne peuvent être apportées à ce régime que si elles font consensus. Or ce consensus fait défaut aujourd'hui : l'instance de gestion a rejeté cette proposition qui reviendrait à faire disparaître la spécificité de ce régime géré par les seuls syndicats de salariés. Mais, à la faveur de ce débat et avec l'accord du Gouvernement, nous avons pu ménager une place à ce régime complémentaire obligatoire au sein de l'union nationale des complémentaires et nous ne doutons pas que, dans ce cadre, il prendra toute sa part de l'effort de maîtrise médicalisée. D'autre part, les entreprises se sont déjà largement engagées en faveur de la couverture complémentaire de leurs salariés, par le biais de contrats de prévoyance - ainsi dans le secteur de la restauration et de l'hôtellerie.

La commission a donc repoussé cet amendement, d'autant qu'en Alsace et Moselle, les dépenses d'assurance maladie, déjà légèrement supérieures à la moyenne nationale, croissent plus vite que celle-ci et qu'un effort de maîtrise médicalisée s'impose.

M. le Ministre - Rejet.

M. Armand Jung - Trouvez-vous normal, et conforme à l'idée de paritarisme rénové, que ce régime soit financé par les seuls salariés ? Par ailleurs, des discussions engagées entre l'instance de gestion et le Medef local ont abouti aux conclusions que je défends. Simplement, elles ne seront appliquées que dans quelques mois, quand il sera trop tard...

Les amendements 8207 et 8208, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Martine Billard - L'amendement 7693 vise à limiter aux entreprises de moins de 50 salariés les exonérations de cotisations patronales liées aux contrats « jeunes en entreprise ». Autant il est légitime d'alléger les coûts pesant sur les petites entreprises créatrices d'emplois, autant des exonérations systématiques en faveur de grandes entreprises nous paraissent déplacées.

L'amendement 7693, repoussé par la Commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Marie Le Guen - Les amendement 6744 rectifié à 6758 rectifié visent à rappeler l'importance de l'apport représenté par les droits sur le tabac.

Les amendements 6744 rectifié à 6758 rectifié, repoussés par la Commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Marie Le Guen - Dans le même esprit, les amendements 6714 rectifié à 6728 rectifié tendent à rendre à l `assurance maladie une ressource que le gouvernement lui a enlevée : le produit de la taxe sur les conventions d'assurance.

Les amendements 6714 rectifié à 6728 rectifié, repoussés par la Commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

ART. 39

M. Jean-Marie Le Guen - Je serai bref, la discussion de cet article ayant déjà été largement esquissée.

Cet article censé assurer le financement de l'assurance maladie fera tout sauf cela. En effet, les droits sur les alcools et sur les tabacs et le produit de la taxe sur les conventions d'assurance, qui devaient revenir à la sécurité sociale, ont été accaparés par l'Etat. Par ailleurs, ce financement nous semble exiger une plus grande transparence. On ne responsabilisera pas les assurés en les culpabilisant et en les pénalisant, mais en affectant clairement certaines ressources à l'assurance maladie. Abusés par les jongleries incessantes dont ce financement est l'objet, les Français sont persuadés qu'il existerait des recettes miracles mais ignorent à quoi sert, par exemple, la CSG. Nous proposerons donc d'identifier clairement la part de CSG destinée à l'assurance maladie, de manière à isoler une sorte de « cotisation santé », perceptible pour tous. Au contraire, les estimations d'économies fantaisistes que vous avancez ne peuvent que nourrir le trouble des esprits et retarder une prise de conscience nécessaire.

M. Hervé Morin - Nous savons reconnaître les éléments positifs d'un projet et nous saluons donc dans celui-ci votre engagement de compenser intégralement les exonérations de charges. En revanche, le milliard d'euros venant des droits sur le tabac et sur les alcools ne saurait selon nous constituer une ressource pérenne pour la sécurité sociale : le Parlement aura en effet à confirmer chaque année cette recette et une autre loi pourra toujours défaire ce que fait celle-ci !

Pour boucher un « trou » de 15 milliards, il fallait trouver 15 milliards d'économies ou de recettes nouvelles. Or, pour ce qui est des économies, vos estimations ont vraiment été faites « au doigt mouillé » : vous pensez obtenir 800 millions d'un contrôle plus strict des arrêts de travail alors que la direction de la prévision de Bercy n'en attend que 200 ; quant aux 3,5 milliards escomptés de la création du dossier médical partagé, ils ne pourront être dégagés avant quatre ou cinq ans - et vous négligez au surplus le coût de cette innovation ! Enfin, avec le milliard dont je parlais à l'instant, nous avons affaire à une pure et simple mesure de cavalerie : l'Etat étant déficitaire de 50 milliards, on creuse un trou pour en boucher un autre !

Mme Muguette Jacquaint - Si les dépenses nous préoccupent, la question du financement n'en est pas moins primordiale. Or, si le déficit de l'assurance maladie s'élevait l'an dernier à 13 milliards d'euros, ce montant correspond seulement à 10 % des recettes et, pour les trois quarts, il est imputable à l'affaiblissement de la croissance et de l'emploi. N'oublions pas en effet que 100 000 chômeurs de plus, c'est 1,3 milliard d'euros de recettes en moins pour la protection sociale ! Une réforme ambitieuse ne saurait faire l'impasse sur ces données et nous avons donc élaboré des propositions en vue d'un financement qui conjuguerait solidarité, justice sociale et développement économique. Nous souhaitons en particulier une modulation des cotisations patronales qui tienne compte de la politique de l'entreprise en matière de salaires et d'emploi.

La réforme des cotisations patronales est urgente car l'on ne peut accepter que les entreprises continuent de gagner de l'argent en réduisant l'emploi ou en le précarisant, ce qui a aussi pour effet d'amoindrir les ressources de la sécurité sociale. Il est donc grand temps de moduler les cotisations patronales en fonction de la taille des entreprises et surtout en fonction de la politique qu'elles suivent en matière d'emploi, de salaires et de formation, en pénalisant celles qui recherchent le profit financier à tout prix. Nous proposons par ailleurs de relever immédiatement le taux de cotisation des entreprises ; ce ne serait que justice puisque, jusqu'à présent, le déficit de l'assurance maladie a été supporté uniquement par les ménages, par le biais de l'augmentation de la CRDS. Il convient aussi de prendre des dispositions énergiques et autoritaires pour contraindre les entreprises fautives à régler les 2 milliards de dettes accumulées à l'égard de l'URSSAF. Enfin, l'augmentation des salaires aurait évidemment pour conséquence d'augmenter les ressources de l'assurance maladie.

Ni dans l'article 39, ni dans les articles suivants, vous ne proposez de telles mesures, et le dispositif que vous envisagez ne permettra pas de combler le déficit de l'assurance maladie. C'est pourquoi nous ne les voterons pas, en déplorant qu'il ne soit pas tenu compte de nos propositions alternatives.

M. le Président - Puis-je considérer que les amendements 1912 à 1923, de suppression de l'article, ont ainsi été défendus ?

Mme Muguette Jacquaint - Oui, monsieur le Président.

Les amendements 1912 à 1923, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 1924 à 1935 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Par ces amendements, nous proposons de supprimer le II de l'article, qui institue le principe d'une généralisation de la compensation par le budget de l'Etat des exonérations de cotisations patronales et de toutes les autres mesures de réduction ou d'abattement de l'assiette. Ce sont les ménages, toujours eux, qui vont faire les frais de ces cadeaux permanents du Gouvernement aux entreprises, puisque l'importance relative de l'impôt sur le revenu des personnes physiques dans l'ensemble des prélèvements obligatoires ne cesse de diminuer cependant que les nouveaux impôts proportionnels se multiplient : après la CSG en 1991, la CRDS est apparue en 1996, et le prélèvement social de 2 % institué en 1998 a maintenant un rendement supérieur à celui de l'impôt sur le revenu qui, lui, est progressif.

De plus, la réduction du poids des cotisations patronales est rendue possible par une forte augmentation du financement public ; ce sont donc bien les ménages qui sont mis à contribution par le biais de la CSG et de la CRDS, et c'est bien d'un transfert de charges vers eux qu'il s'agit. Voilà quelle est votre politique ! Le pire est que ces cadeaux aux entreprises ne bénéficient en rien aux ménages, puisqu'aucune contrepartie n'est exigée en termes de créations d'emplois.

L'article, et plus particulièrement son paragraphe II, doivent être supprimés pour que les ménages cessent de payer les cadeaux faits au Medef.

Les amendements 1924 à 1935, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 6699 à 6713 sont identiques.

M. Gérard Bapt - Il s'agit, par ces amendements, d'affecter à la caisse nationale d'assurance maladie la totalité du produit des droits sur les tabacs non encore attribué à l'assurance maladie. La perte de recettes pour l'Etat serait compensée pour partie par la création d'une imposition additionnelle à la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés et pour partie par le relèvement des taux de l'impôt de solidarité sur la fortune.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Cette proposition n'est pas acceptable, car elle aurait pour conséquence de priver le BAPSA de la moitié de ses ressources. Le mécanisme choisi par le Gouvernement traduit un effort important ; il faut en rester là.

M. Jean-Pierre Brard - Je constate qu'en matière d'impôt sur la fortune, vous considérez que le silence est d'or, Monsieur le ministre (Sourires), puisque vous vous abstenez de toute réaction sur ce volet de la proposition de notre collègue Bapt. Votre refus de l'amendement est d'autant plus surprenant que le projet « Alternance 2002 » de l'UMP contenait cette proposition ! Je n'imagine pas un instant que ses auteurs puissent la renier alors qu'ils sont en position de la faire entrer en vigueur... C'est sans doute que je suis cartésien et que vous êtes un peu gascon... (Sourires) A ce sujet, j'aimerais bien connaître l'opinion de M. Bayrou, qui est parmi nous cet après-midi...

M. François Bayrou - Je n'ai pas la parole, et je ne l'ai pas demandée...

Les amendements 6699 à 6713, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 6684 à 6698 sont identiques.

M. Jean-Marie Le Guen - Par ces amendements, nous proposons d'affecter à l'assurance maladie 2 milliards d'euros perçus au titre des droits sur les tabacs. Refuser cette proposition reviendrait à ne pas tenir une promesse donnée.

M. le Rapporteur - La commission a rejeté l'amendement, estimant que l'adopter reviendrait, par un jeu de vases communicants, à aggraver le déficit de l'Etat.

M. Jean-Pierre Brard - Et que deviennent, Monsieur le rapporteur, vos engagements passés ? Quant à M. Bayrou, je ne puis croire qu'il soit venu pour ne rien dire. Ce compatriote d'Henri IV, qui a toujours beaucoup d'idées, aurait-il oublié que la mention de ce roi appelle nécessairement celle de Ravaillac ?

M. François Bayrou - On prend garde que je ne l'oublie...

M. Jean-Pierre Brard - Bref, M. Bayrou est-il venu pour défendre le projet Alternance 2002, que vous reniez, ou pour autre chose ?

M. le Ministre - Avis défavorable aux amendements.

Les amendements 6684 à 6698, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 39, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE 40

M. Jean-Pierre Brard - L'article 40 apporte une trop timide avancée en autorisant la mise en œuvre de la responsabilité financière du donneur d'ouvrage qui ne s'est pas assuré de la régularité de la situation de son co-contractant vis-à-vis du code du travail. Le plaidoyer soudain du Gouvernement n'est guère convaincant, car il est contredit par l'ensemble de sa politique et par l'idéologie libérale qui l'anime. Le travail dissimulé jouit en France d'une tolérance de fait et prospère avec la dérégulation du marché du travail dont le Gouvernement est un artisan zélé.

Nous sommes étonnés de l'absence des activités du nettoyage, de la sécurité et surtout de la confection parmi les secteurs devant faire l'objet de contrôles renforcés. Le souci de combattre le travail illégal constitue pour la majorité une nouveauté qui nous incline au scepticisme. Nous attendrons vos actes concrets.

Nous proposons depuis longtemps d'infliger des sanctions pénales sévères à ceux qui exploitent des salariés au travers du travail dissimulé, qu'il s'agisse des sous-traitants ou du donneur d'ordre. Surtout, il faut que l'inspection du travail dispose de moyens et d'effectifs supplémentaires pour faire appliquer la législation. En effet, 20 % en moyenne des procès verbaux donnent lieu à des poursuites, qui n'aboutissent pas toujours à des condamnations, lesquelles sont généralement assorties du sursis. De plus, grâce à la sous-traitance en cascade, les véritables donneurs d'ordre ne sont presque jamais mis en cause.

La loi de 1996 sur le travail illégal n'a pas répondu à nos attentes. Les orateurs de la majorité d'alors, dont nombre sont encore ici, ont refusé de mettre en place « un système inquisitorial » à l'encontre des employeurs. Ils sont moins regardants s'agissant des salariés. « Ce n'est pas en accablant les entreprises qu'on les incitera à créer des emplois », avons-nous alors entendu, tandis que certains évoquaient le spectre d'un « alourdissement des tracasseries administratives ». Et que dire du dépôt par la majorité, le 13 juin 2003, d'une proposition tendant à réformer le statut de l'inspection du travail et à en changer la dénomination ?

M. Richard Mallié - Très bonne proposition !

M. Jean-Pierre Brard - En changeant les missions et les prérogatives de l'inspection du travail, l'Etat abandonnerait ainsi tout contrôle sur les entreprises en matière de durée du travail, de précarité, de représentation du personnel ou de négociation collective. Le Gouvernement n'a à ce jour heureusement pas donné suite à cette dangereuse proposition, qui constitue une tentative pour assujettir l'inspection du travail aux seuls impératifs économiques des entreprises.

Notre groupe aborde donc avec circonspection la discussion de l'article 40, et jugera le Gouvernement à ses actes.

M. Gérard Bapt - Le travail dissimulé conduisant à un manque à gagner dans les cotisations concourant au financement de l'assurance maladie, il nous est proposé d'étendre les pouvoirs de contrôle et d'enquête des agents agréés des caisses de sécurité sociale. Il serait également important de renforcer les moyens et les pouvoirs des inspecteurs du travail, notamment pour vérifier le respect des règles d'hygiène et de sécurité. Le nombre de préretraites a diminué en 2003 de 23 %, mais celui de mises en invalidité ou en longue maladie a augmenté de 22 %, ce qui montre que la question de la santé au travail n'est pas reconnue dans toute sa dimension.

S'agissant du détournement des recettes du FOREC vers le budget de l'Etat, on constate dans le budget du travail que la réduction Fillon, appliquée à compter du 1er juillet 2003, est cause de l'augmentation du montant des exonérations pour les bas salaires, les allègements de charges liés à la RTT disparaissant presque complètement, puisque la loi Aubry n'intervient plus que pour 0,8 milliard et, par ailleurs, la loi de Robien pour 0,4 milliard. En revanche, sans contrepartie pour l'emploi, les exonérations contenues dans la loi Fillon du 17 janvier 2003 pèsent pour 15,8 milliards. Les 35 heures n'y sont donc plus pour rien.

M. le Président - Les amendements 1948 à 1959 sont identiques.

Mme Muguette Jacquaint - Nous soutenons tout ce qui contribue à lutter contre le travail dissimulé, qui s'apparente parfois à un esclavage moderne. Les mesures figurant à l'article 40 gagneraient à être accompagnées de moyens de contrôle supplémentaires : combien de postes d'inspecteurs supplémentaires comptez-vous créer, alors même que certains membres de l'UMP ont déposé une proposition tendant à restreindre le champ d'intervention de l'inspection du travail ?

M. Richard Mallié - Vous ne l'avez pas lue !

Mme Muguette Jacquaint - Le dispositif de l'article 40 s'apparente à une culpabilisation des travailleurs au noir, alors que le travail dissimulé n'est pas une cause importante du déficit de la sécurité sociale.

L'article 41 pose le problème de l'externalisation de certains secteurs de production, considérés comme ne faisant pas partie du cœur de métier de l'entreprise, ce qui conduit à jeter des salariés dans la sous-traitance forcée. Qu'attend le Gouvernement pour obliger les entreprises à recréer ces postes en leur sein, et pour mener une véritable politique de l'emploi garantissant à la sécurité sociale des ressources pérennes ?

La réponse qui nous est proposée est insuffisante, car la lutte nécessaire contre le travail dissimulé ne peut pas être transformée en pilier du financement de l'assurance maladie. Il faut trouver d'autres ressources, que nous avons suggérées.

Nous proposons de responsabiliser ceux des donneurs d'ordre qui usent et abusent du travail au noir. L'article L.324-14-1 du code de travail leur accorde une forme de pardon s'ils reconnaissent la situation et y mettent fin. C'est un peu excessif ! Il faut impliquer plus franchement les chefs d'entreprise peu scrupuleux et renforcer à leur égard les mesures dissuasives. C'est à quoi tendent nos amendements.

M. le Rapporteur - La commission a examiné ces amendements avec beaucoup d'intérêt, car pour une fois ils ne sont pas de suppression (M. Gremetz proteste), et nous pouvons nous retrouver pour lutter contre le travail au noir. Mais elles les a rejetés car le contrôle est déjà renforcé au III. En outre, ils seraient difficiles à mettre en œuvre et exigeraient un suivi très lourd de la part des donneurs d'ordre.

M. le Ministre - Même avis

M. Jean-Pierre Brard - Ces amendements ont un succès d'estime : il faut lutter contre le travail clandestin. Mais de là à les soutenir ! Lutter, ce serait tellement difficile... Dans ma seule ville, je pourrais vous citer de nombreux cas de travail au noir.

M. Edouard Landrain - Que fait le maire ? (sourires)

M. Jean-Pierre Brard - Le maire fait ce qu'il peut dans le cadre de la loi, et elle ne lui permet pas grand chose. Dans chaque département, il y a bien un comité opérationnel de lutte contre le travail illégal, mais il n'a pas encore démontré son efficacité. Il n'y a pas que le Grand stade qui a été construit en partie avec des travailleurs au noir. Les difficultés du textile viennent aussi de l'emploi de clandestins, de Chine et d'ailleurs. C'est à l'Etat d'agir. Nous lui en donnons l'occasion, mais il ne la saisit pas.

Les amendements identiques 1948 à 1959, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Les amendements 5722 à 5733 sont identiques.

M. Maxime Gremetz - Il s'agit encore de lutter contre le travail illégal, dont nous connaissons tous des exemples et qui est souvent du fait des entreprises, non des salariés. Pour cela, il faut renforcer les moyens des directions départementales du travail et de l'inspection du travail, qui n'a pas les forces nécessaires pour suivre les dossiers.

Les amendements identiques 5722 à 5733, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 40, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 40

M. le Président - Les amendements 6624 à 6638 sont identiques.

M. Jean-Marie Le Guen - Leur défense vaut en même temps pour les amendements avant l'article 41. Nous voulons tous responsabiliser les assurés. Vous le faites en les pénalisant. Nous proposons de le faire en identifiant sur les bulletins de paye la part de la CSG consacrée à l'assurance maladie sous le nom de contribution santé universelle. Cela ne coûterait rien. Mais il est vrai que l'Etat préfère qu'on en reste à une notion commune pour utiliser le produit à sa guise.

M. le Président de la commission - Rejet.

M. le Ministre - Rejet.

Les amendements 6624 à 6638, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

AVANT L'ART. 41

M. le Président - Les amendements identiques 6774 à 6788 ont été défendus.

Les amendements identiques 6774 à 6788, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

ART. 41

M. Maxime Gremetz - D'où vient cet étrange engouement pour la CSG ? En 1991, quand le gouvernement Rocard la présenta, la droite la dénonça avec une virulence comparable à celle du parti communiste.

M. François Bayrou - Pas tout le monde.

M. Maxime Gremetz - Si vous voulez faire amende honorable...

M. Jean-Pierre Brard - Son mea culpa !

M. François Bayrou - M. Méhaignerie et M. Bayrou étaient pour.

M. Maxime Gremetz - A cette époque donc, une grande majorité de la droite était contre. Quelques années plus tard, M. Barrot avoua avoir organisé l'abstention de ses amis pour faire passer ce projet du Gouvernement.

M. Hervé Morin - C'est vrai.

M. Maxime Gremetz - Depuis lors, tous les gouvernements, de droite comme de gauche, ont utilisé cet instrument pour faire payer les assurés sociaux et les familles. Désormais, la CSG est l'impôt direct qui rapporte le plus, avec 62 milliards contre 47 milliards pour l'impôt sur le revenu. Même le Medef s'y est converti : la fiscalisation est une belle chose, quand les patrons n'ont plus rien à payer. Ils disent donc qu'une prestation universelle ne doit pas être financée par les entreprises mais par une contribution universelle. Une partie de l'opposition estime aussi que la CSG est une façon de faire payer tout le monde sur l'ensemble des revenus. Nous ne sommes pas convaincus. Il y a encore bien du chemin à faire avant qu'une gauche unie puisse présenter une véritable alternative.

Les députés communistes combattent la CSG. Il n'est pas juste que moins de 10 % de son montant provienne des revenus financiers et qu'elle frappe les retraités et les chômeurs. Il est dangereux de la substituer aux cotisations patronales.

Ce n'est pas une menace lointaine car depuis la création de la CSG, la cotisation « famille » a diminué de 50 % et, depuis 1991, la totalité de la hausse des dépenses de la sécurité sociale est assumée par les ménages quand les taux de cotisations patronales, eux, diminuent et que les exonérations augmentent.

Les députés communistes continuent de penser que lier le financement des prestations sociales à ce qui se passe dans les entreprises est la meilleure façon d'assurer l'avenir de la sécurité sociale. Il faut mettre en place une cotisation patronale modernisée - une cotisation augmentée - et non supprimer la cotisation des patrons.

M. Léonce Deprez - Les ressources de la sécurité sociale doivent d'abord provenir de la croissance économique et des créations d'emplois. Pour les favoriser, il faut mettre en valeur notre territoire, notamment grâce au développement de l'économie touristique.

Si je me suis attaché a créer une dynamique d'économie touristique dans le Pas-de-Calais, c'est qu'après la fermeture des mines, il fallait poser les bases d'une vie nouvelle.

M. Jean-Pierre Brard - Des croupiers pour remplacer des mineurs !

M. Léonce Deprez - Nous avons réussi à créer des emplois.

Le produit brut des jeux sera à nouveau ponctionné par l'augmentation de la CSG et le prélèvement passera de 7,5 % à 9,5 %. La capacité financière d'investissement des casinos diminuera donc et si les amendements concernant la CRDS étaient votés, ce serait une véritable catastrophe. Le Gouvernement a fort heureusement compris que cela entraînerait l'asphyxie d'entreprises créatrices d'emplois.

M. Jean-Marie Le Guen - Bravo au Gouvernement ! En voilà, de la négociation sociale !

M. Léonce Deprez - Les casinos emploient 17 000 salariés dans notre pays dans des régions la plupart du temps pauvres en entreprises.

Il est impératif de limiter les ponctions sur les produits des jeux car en chargeant trop la barque, la France ne sera plus compétitive. La part des prélèvements spécifiques des casinos, hors impôts et taxes ordinaires, est passée de 45,20 % en 1992 à 55,25 % en 2002 : c'est un record international. En Belgique, les prélèvements sont de 35 % et en Suisse de 30 %.

Peut-être faudrait-il envisager, afin de dégager plus de ressources pour l'assurance maladie, de donner suite à des études concluant que le volume des jeux en ligne, sur un site français, s'élèverait à 300 millions d'euros. J'ai présenté à ce sujet une étude à M. Francis Mer.

M. Jean-Pierre Brard - De profundis...

M. Léonce Deprez - En 1987, j'ai présenté une proposition de loi pour sauver les casinos qui allaient fermer : les machines à sous ont ainsi contribué à stimuler la croissance de l'économie touristique.

Je demande aujourd'hui à l'Assemblée nationale de veiller au développement de ces activités et au Gouvernement de ne pas donner suite à des amendements qui porteraient atteinte aux investissements dont la France a besoin.

M. Jean-Marie Le Guen - Je suis heureux de voir que l'UMP a retrouvé la parole sur l'assurance maladie grâce à M. Deprez. Nous devons donc renoncer à augmenter la CRDS, pour favoriser le développement d'une économie de tourisme liée aux casinos. Puis-je dire à M. Deprez que des économistes ont récemment proposé que les remboursements de l'assurance maladie se jouent à la roulette ?

Quant à cet article 41, c'est une vue de l'esprit. Il n'a jamais existé que dans notre imagination, puisque le ministre a toujours expliqué que la CSG ne serait pas augmentée. Or, il nous semble, à le lire, que cette augmentation va bel et bien avoir lieu ! Les salariés et les retraités, en effet, paieront tous les efforts contributifs que vous exigez, puisqu'avec l'extension de la CRDS, salaires et retraites seront dix fois plus taxés que les revenus du capital. Voilà de quoi nuancer vos propos sur les efforts équitables.

Votre plan est injuste et l'absence de toute vraie réforme, on ne peut qu'attendre la hausse des prélèvements à venir.

M. Gérard Bapt - M. le ministre a en effet déclaré que la CSG n'augmenterait pas : il avait oublié de préciser que son affirmation concernait le taux, mais non de l'assiette. L'article 41 institue un moyen détourné d'augmenter la CSG des salariés et des retraités : la réduction représentative de frais professionnels de 5 % qui vient en déduction du montant brut des salaires et des allocations chômage, est portée à 3 %.

L'augmentation ne pèsera d'ailleurs que sur les salariés et les chômeurs puisque les professions libérales, ne sont pas concernées. Les médecins, en particulier, imposés sur la totalité de leur salaire, ne seront pas touchés.

Cette augmentation de l'assiette rapportera un milliard et l'augmentation de 0,4 point de la CSG pour les retraités imposables 560 millions, autant de hausses qui ne favoriseront évidemment pas la consommation populaire. Déjà, la baisse de l'impôt sur le revenu ou de l'ISF et l'exonération d'un certain nombre de plus-values lors de ventes d'actifs n'avaient pas contribué à la relancer : ils ont, en effet, plutôt nourri l'épargne et les investissements à l'étranger.

Nous ne voterons pas un article injuste et inefficace.

M. Jean-Pierre Brard - M. Deprez est intervenu dans un domaine où il est particulièrement compétent, mais il n'a pas évoqué le risque de délocalisation des jeux. Il est vrai qu'une telle délocalisation pourra avoir un effet positif sur les transports puisqu'il faudra aller en Belgique pour jouer, et qu'en raison de l'ivresse du jeu, il sera recommandé de prendre des taxis...

Pour le reste, je vous renvoie à Dostoïevski : en poussant nos concitoyens à jouer, Monsieur Deprez, vous exaltez leurs plus mauvais instincts au risque de leur donner le goût du luxe et de la luxure. Je crains fort que le bon chrétien que vous êtes ne se trouve ainsi dans le péché.

M. Michel Piron - C'est un argument mystique !

M. Jean-Pierre Brard - Peut-être, mais j'en use parce que je me soucie du salut de l'âme de M. Deprez.

J'en viens à l'article 41, qui prévoit le relèvement des taux de la CSG afin, aux termes de l'exposé des motifs, de dégager la moitié des recettes nouvelles escomptées par ce projet.

Nous ne pouvons pas souscrire à l'orientation générale de cet article qui accentue des mécanismes de financement particulièrement inéquitables et élude toute les propositions alternatives qui pourraient restaurer les mécanismes de solidarité dans notre système de protection sociale.

Le problème que pose la CSG, c'est que près de 90% de ses recettes proviennent des revenus du travail alors qu'elle taxe de manière très insuffisante les revenus du capital. Retenue à la source, elle est peu visible et facile politiquement à augmenter. Tous les gouvernements en usent abondamment puisqu'elle rapporte 337 milliards de francs aujourd'hui contre 28 milliards en 1991, lors de sa création.

Bien évidemment, nous ne sommes pas opposés au relèvement des taux sur le patrimoine ou les revenus de placement. De même, nous ne pouvons qu'approuver, à l'inverse de M. Deprez, une augmentation du prélèvement sur les jeux. Dans une société qui veut conserver un sens et des valeurs, il est parfaitement légitime que les besoins financiers de la santé publique s'imposent au superflu. C'est même une question de justice.

Mais il n'est pas acceptable de voir s'accentuer, une nouvelle fois, les prélèvements sur les salariés et les retraités. La CSG repose déjà aux trois quarts sur les revenus des salariés. En ponctionnant à nouveau ces catégories, vous les pénalisez doublement puisque, comme usagers de notre système de santé, elles vont bientôt recevoir moins.

Nous sommes résolument opposés à la montée en puissance de la CSG dans le financement de l'assurance maladie d'abord parce que nous refusons catégoriquement que l'on substitue un impôt à une cotisation sociale, élément à part entière du salaire qui offre, dans une logique de mutualisation des ressources et donc hors du marché, une contrepartie au salarié en terme de droits. Elle lui revient sous une autre forme : celle du sur-salaire. Elle permet de faire vivre les Droits de l'homme et ce qui reste des principes que vous avez passablement édulcorés à l'article 1.

La contribution sociale généralisée n'est qu'un impôt supplémentaire qui intervient sans contrepartie, toujours à la mesure des déficits. Elle fiscalise toujours plus l'assurance maladie.

Tous les gouvernements successifs, depuis 1991, ont une responsabilité dans cette évolution. Mais nous ne la laisserons pas se poursuivre sans la dénoncer vigoureusement, parce qu'elle dénature l'esprit de solidarité sur lequel s'est fondé notre système de protection sociale à la Libération.

La deuxième raison de notre opposition, c'est que la CSG accroît sans cesse le poids de la fiscalité proportionnelle au détriment de la fiscalité progressive, pourtant la plus juste socialement et économiquement. Le Gouvernement montre une fois de plus que la politique de baisse des impôts est un marché de dupes puisqu'il reprend toujours d'une main ce qu'il prétend donner de l'autre.

Ne dites pas que vous avez fait baisser le niveau de prélèvement global. Si l'on y ajoute la cotisation sociale «jour férié » et les hausses de cotisation retraite complémentaire, le taux de prélèvement est déjà reparti à la hausse. Votre responsabilité historique, c'est de faire régresser la justice sociale dans ce pays. D'ailleurs, les 5 milliards de recettes nouvelles que vous voulez trouver pour l'assurance maladie correspondent au montant de la baisse des impôts sur le revenu depuis 2002.

M. Hervé Morin - J'aurais préféré qu'au lieu de réduire l'abattement forfaitaire, le Gouvernement ait le courage d'afficher une véritable hausse de la CSG. Car la réduction de l'abattement équivaudra à une hausse de 0,16 %, pourquoi s'en cacher ? Si l'on veut promouvoir une pédagogie des dépenses, il faut aussi une pédagogie des recettes. Nous devons donc dire aux Français que se soigner a un coût, qui doit être supporté. C'est pourquoi nous défendrons un amendement à ce propos.

Je regrette, par ailleurs, que cet article perpétue un système injuste et inéquitable qui frappe les revenus de l'activité salariée et non ceux des professions indépendantes et libérales. En effet, la santé a un coût pour tous, et non pas seulement pour les salariés.

Enfin, je m'interroge sur la constitutionnalité de cette mesure. En 1990, le Conseil constitutionnel avait été saisi par nombre de ceux qui sont aujourd'hui au Gouvernement, et le Président de la République était même le premier signataire. Cette saisine se fondait précisément sur l'inégalité de traitement entre salariés et non salariés. Je comprendrais donc mal que ce qui valait en 1990 ne vaille plus en 2004.

M. Hervé Mariton - Il y a quelques mois, certains abordaient le débat sur la nécessaire réforme de l'assurance maladie sous le seul angle du taux de la CSG. Sans doute notre long débat aura-t-il eu le mérite de montrer qu'une autre approche est possible, qui passe par la modification des comportements et l'organisation des systèmes de soins afin de responsabiliser davantage, de dépenser moins et de trouver des ressources nouvelles. Si nous nous étions contentés d'augmenter lourdement la CSG, il n'y aurait eu aucune raison que, quelques années plus tard, on ne recourre pas à nouveau à cette méthode.

M. Jean-Marie Le Guen - C'est bien ainsi que cela se terminera...

M. Hervé Mariton - Eh bien, nous faisons un pari différent ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Marie Le Guen - Et que pariez-vous ?

M. Hervé Mariton - Augmenter le taux de la CSG, ce n'est ni fatiguant intellectuellement, ni compliqué pour les relations que nous entretenons avec les citoyens...

M. Jean-Marie Le Guen - Bien sûr ! C'est par courage politique que vous ne le faites pas...

M. Hervé Mariton - Nous avons donc choisi...

M. Jean-Marie Le Guen - De faire payer les petits enfants ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Hervé Mariton - ...de faire le compte de ce qui pouvait être fait dans le cadre des réformes de fond et de constater ensuite que malheureusement - j'insiste sur ce mot car ce n'est pas de gaieté de cœur mais en faisant violence à nos convictions que nous augmentons les prélèvements - il était indispensable pour l'équilibre de la réforme d'augmenter - de façon aussi limitée que possible - le taux de la CSG. Tel est le sens de cet article qui n'est guère enthousiasmant.

Mme Martine Billard - Vous auriez pu ajouter « de manière aussi masquée »... Car quand le ministre a présenté son plan de réforme il s'est bien gardé d'annoncer aux téléspectateurs cette modification de l'assiette que nous n'avons apprise que le lendemain et dont j'observe qu'elle provoquera aussi une augmentation de la CRDS.

Le rapporteur justifie la réduction de 5 % de l'abattement pour frais professionnels par le faible usage qui est fait de cette possibilité. Mais ce sont surtout les salariés modestes qui y ont recours et ce sont donc eux qui vont souffrir de cette mesure. Quelle hypocrisie !

Les Verts ne sont pas hostiles à la CSG, mais à l'inégalité liée à sa non progressivité, inégalité que cet article va encore aggraver.

Par ailleurs, si ce Gouvernement faisait montre de courage, il accepterait de graver dans le marbre de la loi le fameux 1 euro. S'il ne le fait pas, c'est tout simplement parce qu'il se réserve la possibilité d'augmenter ce forfait, comme d'ailleurs le forfait hospitalier.

Alors qu'il a été question à un moment de la prise en charge de la CMU pour un certain nombre de familles, nous n'en avons plus entendu parler par la suite.

M. le Ministre - Vous n'étiez pas là !

Mme Martine Billard - J'ai en effet manqué quelques moments de ce très long débat... Mais même si quelques améliorations ont été obtenues, elles sont de peu de poids face à l'aggravation des prélèvements sur les salaires.

Je veux dire, enfin, que j'ai été choquée par l'intervention de notre collègue qui a semblé réduire l'activité touristique aux casinos...

M. Edouard Landrain - Les tapis verts, cela devrait vous plaire...

Mme Martine Billard - J'aurais aimé qu'il fasse preuve de la même capacité d'indignation quand les victimes des accidents du travail et des maladies professionnelles n'ont pas été exclues de certains dispositifs.

M. Jean-Marie Le Guen - Très bien !

M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public sur les amendements de suppression de l'article, qu'on peut considérer comme défendus dans leurs interventions générales par M. Gremetz, M. Le Guen et Mme Billard.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Rejet. Pendant trois semaines, nous avons parlé des économies sur les dépenses. Maintenant, nous parlons des recettes. Nous limitons au maximum les prélèvements obligatoires, et nous recherchons la plus grande équité possible : nous augmentons de 0,4 point la CSG due par les retraités, nous élargissons l'assiette de la CSG payée par les actifs, nous demandons 1 milliard aux entreprises et prélevons sur les revenus financiers et les jeux.

Monsieur Bapt, l'abattement de 5 % ne concerne pas les retraités ; pour eux, l'assiette de la CSG n'est donc pas modifiée.

M. Gérard Bapt - Et les chômeurs ?

M. le Ministre - S'agissant de la constitutionnalité des dispositions proposées, le Gouvernement a été très attentif au respect du principe d'égalité devant l'impôt ; rapprocher, de manière équitable et mesurée, les modalités de taxation des différentes catégories de revenus n'est pas de nature à créer une disparité de traitement ou une rupture d'égalité, Monsieur Morin.

Monsieur Deprez, je ne méconnais pas l'importance économique des casinos, mais je ne crois pas que l'augmentation de la CSG de deux points mette ce secteur en péril.

Monsieur Mariton, je vous remercie de vos propos.

M. Maxime Gremetz - Les membres de la majorité actuelle étaient opposés à la CSG au moment de sa création. Ils avaient déposé une motion de censure, que les parlementaires communistes avaient soutenue, étant opposés au financement de la protection sociale par l'impôt, lequel conduit à son étatisation. Mais en 1996, Alain Juppé créa la CRDS, releva le taux de la CSG et élargit son assiette aux indemnités journalières, aux pensions des retraités imposables et aux allocations de chômage supérieures au SMIC. En 1996 également, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, on créa la CSG maladie au taux de 1 %. En 1997, elle fut portée à 5,1 %. Après l'échec de cette majorité aux législatives de 1997, la campagne qui conduisit à sa victoire à l'élection présidentielle de 2002 eut comme thème majeur la baisse des impôts ; mais après une baisse de l'impôt sur le revenu qui profite aux plus aisés, vous augmentez aujourd'hui le premier impôt direct qui pèse sur nos concitoyens, la CSG ! Pourtant, force est de constater que l'objectif qui lui avait été assigné lors de sa création n'a pas été atteint. Vos propositions ne font qu'accentuer les inégalités dans le paiement de cet impôt, supporté aujourd'hui à 88 % par les salariés.

A la majorité de 63 voix contre 14 sur 81 votants et 77 suffrages exprimés, les amendements 1960 à 1971, 6669 à 6683 et 7598 ne sont pas adoptés.

M. Hervé Morin - L'amendement 7825 de M. de Courson est défendu : nous préférons une hausse uniforme de tous les taux de CSG.

L'amendement 7825, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Hervé Morin - L'amendement 7826 est défendu.

L'amendement 7826, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Nos amendements 1972 à 1983 tendent à supprimer le I de cet article, par lequel le Gouvernement s'en prend aux professionnels du spectacle en réduisant la part forfaitaire de leurs frais professionnels qui est exonérée de contribution.

M. Jean-Marie Le Guen - Nos amendements 6654 à 6668 sont défendus.

Mme Martine Billard - Notre amendement 7695 est défendu.

Les amendements 1972 à 1983, 6654 à 6668 et 7695, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - Nos amendements 5734 à 5745 tendent à supprimer le paragraphe II, qui procède à des augmentations des taux de CSG.

L'augmentation de la CSG sur les retraites est particulièrement inégalitaire, venant après la réforme Fillon qui se soldera par une baisse de 20 à 30 % des pensions, désormais indexées sur l'inflation et non plus sur les salaires. Elle ne fera qu'aggraver une perte de pouvoir d'achat qui, depuis 1990, aurait atteint 10 % selon le conseil d'orientation des retraites.

Quant à la hausse de la CSG sur les placements, elle se limite à compenser le demi-milliard de recettes perdues par la sécurité sociale du fait du remplacement de l'avoir fiscal par un crédit d'impôt.

Une fois de plus, vous vous attaquez avant tout aux revenus du travail et aux ménages non soumis à l'impôt sur le revenu, tout cela dans la perspective d'une étatisation accrue de l'assurance maladie alors qu'il s'imposerait au contraire de rendre aux salariés la gestion de la sécurité sociale qu'ils financent. Partisans d'une réelle démocratisation de notre politique de santé, nous vous demandons de rétablir l'élection au suffrage universel des représentants des assurés au sein des conseils d'administration et, au nom de la même démocratie et de l'égalité, nous vous invitons en outre à voter ces amendements 5734 à 5745 tendant à supprimer le II de l'article.

Les amendements 5734 à 5745, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Claude Guibal - L'amendement 7722 est défendu.

M. Richard Mallié - Par son amendement 8236, M. Myard propose de procéder en trois étapes pour ce qui est de la hausse de la CSG sur les jeux. Le rendement resterait identique d'après ce qu'il dit (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Rapporteur - Je suggère de retirer ces amendements : en raison d'une confusion entre le taux et l'assiette, ils reviendraient à porter de 7,5 à 14 % l'augmentation de la CSG sur les paris hippiques.

M. Gérard Bapt - Sans doute devrions-nous les voter !

M. le Ministre - Même position que la commission.

M. Richard Mallié - Je pense que M. Myard n'avait pas songé à cette conséquence et je retire donc son amendement.

L'amendement 8236 est retiré, de même que le 7722.

L'amendement 98 est retiré.

M. Claude Evin - Les amendements 6639 à 6653 sont défendus.

Mme Martine Billard - De même que le 7696.

Les amendements 6639 à 6653 et 7696, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Richard Mallié - L'amendement 6999 est défendu.

L'amendement 6999, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Richard Mallié - L'amendement 7000 précise que, s'agissant des retraités, il faut prendre en considération l'année n-2.

M. le Rapporteur - Rejet. Il est difficile de remonter aussi loin pour apprécier si l'intéressé est ou non imposable. En outre, sa situation peut avoir changé.

M. le Ministre - Même avis.

M. Richard Mallié - Je fais observer qu'il en est ainsi pour tous les travailleurs indépendants.

L'amendement 7000, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 8360 et 8361 rectifiés sont de précision et le 8362 rectifié est rédactionnel.

Les amendements 8360 rectifié à 8362 rectifié, acceptés par le Gouvernement et successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'amendement 97 est retiré.

M. Maxime Gremetz - Les amendements 5746 à 5757 tend à supprimer le III dont l'objet est de relever la CSG sur les jeux et casinos. Une telle augmentation serait en effet purement anecdotique, cette contribution ne représentant que 0,5 % du produit total de la CSG. En réalité, il ne s'agit que d'un trompe l'œil destiné à justifier une mesure qui frappe essentiellement les revenus du travail. Cela fait bien dans le paysage, mais cela ne rapporte guère à la sécurité sociale !

Nous sommes opposés par principe à toute augmentation de CSG, car cela ne fait qu'accroître la part des recettes fiscales dans le financement de l'assurance maladie, et ce aux frais des assurés sociaux alors que chacun devrait payer selon ses moyens pour recevoir selon ses besoins. Cette étatisation des recettes est en outre inséparable du développement du pouvoir tutélaire de l'Etat, qui a pour corollaire la relégation des partenaires sociaux au second plan.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - M. Brard a soutenu tout à l'heure une thèse contraire de la vôtre, Monsieur Gremetz ! Rejet.

Les amendements 5746 à 5757, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - Les amendements 5758 à 5769 tendent à supprimer le IV, qui instaure des augmentations de CSG à compter du 1er janvier prochain.

Nous avons déjà protesté contre le caractère anti-démocratique de ce débat, qui vise à faire passer à marche forcée des mesures inégalitaires et injustes en mettant à profit la période des congés.

M. le Président de la commission spéciale - A marche forcée ! J'avais plutôt le sentiment d'une grande lenteur...

M. Maxime Gremetz - Opposés à ces augmentations, nous vous demandons de prendre le temps et d'avoir le courage de vous en expliquer devant nos concitoyens qui, à 81 %, refusent d'ailleurs cette mesure, selon les sondages.

Les amendements 5758 à 5769, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Sur le vote de l'article 41, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

M. le Rapporteur - L'amendement 8363 est de précision.

L'amendement 8363, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

M. Maxime Gremetz - Par les amendements 1984 à 1995, nous proposons de créer une contribution sociale additionnelle de 15 %, assise sur les dividendes versés en fin d'exercice aux actionnaires. Si l'on veut en effet développer une assurance sociale solidaire, il convient que l'ensemble des revenus participent à l'effort de redressement financier. Or, si les revenus financiers des ménages sont bien mis à contribution, il n'en est pas de même pour ceux des entreprises et des secteur bancaire et financier -ces fameux placements, si nocifs pour l'emploi ! Leur taxation au même taux que les salaires rapporterait pourtant quelque 20 milliards d'euros par an et, puisque vous n'avez cessé de marteler que cette réforme mettait tout le monde à contribution, nous vous disons : chiche !

Bien sûr, nous serions très surpris que vous acceptiez ces amendements lorsque vous n'augmentez que de 0,03 % la contribution sociale des sociétés. Celle-ci, qui serait ainsi portée à 0,16 % du chiffre d'affaires des entreprises au-delà de 760 000 euros - vous allez les étrangler !-, ne produit actuellement que 780 millions d'euros, à rapporter aux 19,6 milliards d'exonérations de cotisations ! Quant aux 0,16 %, comment les comparer aux 7,5 % du taux de CSG applicable aux revenus du travail ? La cotisation additionnelle que nous suggérons se justifierait donc amplement, d'autant qu'elle pourrait être le levier d'une véritable politique de l'emploi.

Et, compte tenu de l'enjeu, nous demandons un scrutin public.

M. le Président - Sur le vote des amendements 1984 à 1995, je suis donc saisi par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

M. Gérard Bapt - La discussion de cet article a donné lieu à un spectacle instructif. N'avons-nous pas vu la majorité s'échiner à lisser l'augmentation de la CSG sur les produits des jeux pour protéger les casinos tout en refusant d'étaler cette augmentation pour les salariés et les retraités ?

M. le Rapporteur - Démagogie !

M. Gérard Bapt - Pendant ce temps, la presse nous apprend que, selon M. Marini, rapporteur général du budget du Sénat, le nombre de contribuables redevables de l'ISF est désormais de 300 000, en raison de la hausse continue du marché immobilier, qui a conduit, dans certaines villes, au doublement de la valeur des biens - j'en sais quelque chose pour Toulouse, et je ne doute pas qu'il en soit de même au Touquet ! Mais la DARES nous apprend aussi que le nombre des allocataires du RMI a augmenté de 9,6 %... Voilà pourquoi nous voterons l'amendement de notre collègue Gremetz.

A la majorité de 59 voix contre 5 sur 66 votants et 64 suffrages exprimés, les amendements 1984 à 1995 ne sont pas adoptés.

A la majorité de 58 voix contre 12 sur 70 votants et 70 suffrages exprimés, l'article 41 modifié est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 50.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE


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