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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 21ème jour de séance, 51ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 6 NOVEMBRE 2003

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES

vice-président

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2004 -deuxième partie- (suite) 2

      ANCIENS COMBATTANTS 2

      QUESTIONS 24

      ETAT B 34

      ART. 73 34

      APRÈS L'ART. 73 34

      ART.74 35

      APRÈS L'ART. 74 35

      ERRATUM 36

La séance est ouverte à neuf heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2004 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004.

ANCIENS COMBATTANTS

M. le Président - Nous abordons l'examen des crédits du secrétariat d'Etat aux anciens combattants.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial de la commission des finances - Ce n'est pas la première fois que je prends la parole à cette tribune, mais lorsqu'il s'agit d'intervenir pour parler des anciens combattants, c'est toujours une émotion particulière qui m'étreint, moi qui suis le petit-fils d'ancien combattant et l'élu d'un département, l'Aisne, qui fut le théâtre de nombreux conflits. De plus, cette discussion intervient à quelques jours de l'anniversaire de la Grande Guerre et les témoignages des Poilus parus dans la presse ces derniers jours décrivaient de façon poignante une réalité qui ne doit pas être oubliée.

Avec ce budget, nous exprimons notre attachement aux devoirs de mémoire et de réparation. La présence de nombreux visiteurs dans les tribunes nous rappellerait, si c'était nécessaire, ces exigences.

Vous avez choisi, Monsieur le ministre, d'ouvrir tous les dossiers, de poser les problèmes, de chiffrer les solutions, de définir des priorités.

C'est ainsi que l'an dernier, le plafond majorable de la rente mutualiste a été relevé de 7,5 points, que le contentieux relatif aux cures thermales a été réglé, et surtout, que les décrets d'applicaiton du principe de cristallisation, consacré dans le collectif budgétaire, sont parus cette semaine.

MM. Alain Néri et Maxime Gremetz - Il était temps !

M. le Rapporteur spécial - Depuis 1959, il était temps en effet.

Ce budget permet de réels progrès pour le monde des anciens combattants. En 2004, les crédits s'élèveront en effet à 3,390 milliards, ainsi, non seulement nous confortons les piliers de notre action - solidarité nationale, reconnaissance et mémoire - mais nous pouvons également répondre à des demandes récurrentes. Avec une dotation par partie prenante en augmentation de 1,58 % contre 0,68 % l'an dernier, nous pouvons réaliser plusieurs mesures nouvelles.

Et tout d'abord l'amélioration de la situation des veuves d'anciens combattants. L'indice de leur pension augmente de quinze points. 130 000 personnes sont concernées, dès 2004, par une inscription de 12 millions.

L'attribution de la carte du combattant des guerres d'Afrique du Nord pour quatre mois de présence - d'un coût de 3 millions - était une mesure particulièrement attendue. L'action sociale de l'ONAC est enfin garantie dès le projet de loi de finances initial, avec une inscription de 12,135 millions. Nous n'avons plus besoin d'attendre, comme nous le faisions depuis 1998, la discussion parlementaire pour ajuster les crédits par amendement. Nous disposons enfin, et je vous en remercie, de la lisibilité requise.

Ce budget permet de revaloriser les droits des anciens combattants afin de garantir le pouvoir d'achat.

Les crédits de la retraite du combattant augmenteront de 30,74 millions, avec une provision de 562 000 € pour financer une éventuelle revalorisation du point. Nous savons que la volonté d'augmenter la retraite du combattant est désormais prioritaire, même si nous devons en mesurer les enjeux financiers : une augmentation d'un seul point équivaut à 15 à 16 millions par an.

Le PLF consolide les moyens de fonctionnement des établissements publics. Si les crédits de l'ONAC baissent de 2,3 %, c'est la conséquence de l'application du contrat d'objectifs et de moyens qui assure la pérennité de ses missions. La subvention de l'Etat, elle, sera de 759 728 € et permettra de conforter l'Office.

La dotation de l'Institution nationale des Invalides pour 2004 progresse de 9,2 %, après une hausse de 4,2 % en 2003. Ces crédits permettent de poursuivre la modernisation de l'institution, insérée dans le service public hospitalier depuis le 1er juin 2001. Nous nous réjouissons de l'accréditation délivrée par l'ANAES en novembre 2002.

Enfin, l'effort pour la sécurité et l'habitabilité des maisons de retraite s'intensifie : la subvention d'investissement aux deux établissements publics s'établira à 4,7 millions d'euros en autorisations de programme contre 1,524 million d'euros en 2002, soit une progression de 208 %.

Le projet de loi consolide également l'effort de mémoire. Si les crédits semblent diminuer, c'est que la dotation inscrite pour 2003 a permis de réaliser le Mémorial de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie, quai Branly, et le Centre européen du résistant déporté du camp du Struthof.

Je salue, Monsieur le ministre, votre volontarisme politique. Le Gouvernement vient en effet d'apporter des réponses à des questions essentielles dont l'extension annoncée du décret du 13 juillet 2000 à l'ensemble des orphelins de la barbarie nazie.

Sur la base du rapport que Philippe Dechartre lui a remis sur la question de l'indemnisation des orphelins de la barbarie nazie, le Premier ministre a en effet décidé que les orphelins des déportés, des fusillés et des massacrés allaient bénéficier d'une indemnisation identique à celle destinée aux orphelins des déportés de la Shoah. Reste à définir précisément le périmètre d'éligibilité à cette mesure...

M. Alain Néri - Avec les financements !

M. le Rapporteur spécial - ...afin que cette démarche, qui se veut réparatrice, ne soit pas porteuse de nouvelles injustices. Nous souhaitons que les décrets d'application soient publiés dans les meilleurs délais.

Je n'éluderai pas la question du choix d'une date pour rendre l'hommage de la nation aux combattants français morts pendant la guerre d'Algérie et lors des combats du Maroc et de la Tunisie.

Plusieurs dates ont été avancées, 19 mars ou 16 octobre, plusieurs associations ayant d'ailleurs fait de l'une de ces dates leur journée d'hommage.

Sans entrer dans le débat, je crois que le temps de l'apaisement est venu !

M. Alain Néri - Vous avez réussi !

M. le Rapporteur spécial - Il serait bon que nous nous retrouvions tous sur cette question.

M. Alain Néri - Vous n'allez pas nous donner des leçons alors que vous insultez la troisième génération du feu !

M. le Rapporteur spécial - La reconnaissance, la réparation et la mémoire sont des objectifs nobles et justes.

La représentation, les élus locaux et tous les acteurs associatifs et économiques doivent se sentir concernés par le devoir de mémoire. La loi sur le mécénat votée en 2003 offre de nouvelles perspectives fiscales qui peuvent stimuler les initiatives privées sans dénaturer l'esprit propre au devoir de mémoire. L'année 2004 sera exceptionnelle : 90e anniversaire de la victoire de la Marne, 60e anniversaire du débarquement, 60e anniversaire de la libération du territoire, 50e anniversaire de la bataille de Dien Bien Phu.

M. Alain Néri - Paroles, paroles, paroles...

M. le Rapporteur spécial - Ces actions permettront d'honorer ceux qui ont donné leurs vies pour notre patrie, de rendre hommage aux anciens combattants et permettront de transmettre à tous ceux qui n'ont pas connu ces combats le sens des valeurs qui étaient défendues.

J'insiste sur la nécessaire réforme de l'Etat, qui repose sur la maîtrise des dépenses publiques mais tout autant sur la réforme des structures. La mise en _uvre de la LOLF ne modifiera pas seulement nos habitudes budgétaires mais elle rendra plus claires les actions menées.

Aujourd'hui un certain nombre de crédits liés aux anciens combattants reposent sur deux sections ministérielles et d'autres crédits pour des actions consacrées à la mémoire ne sont pas suffisamment identifiables. Par ailleurs, la répartition des missions entre L'ONAC et les services déconcentrés du ministère de la défense doit être clarifiée. Je vous invite donc, Monsieur le ministre, à mettre en _uvre la LOLF de manière dynamique.

Depuis près d'un an et demi, de nombreux dossiers ont été réglés,...

M. Alain Néri - Quel culot !

M. le Rapporteur spécial - ...d'autres sont encore à régler, nous le savons bien. Ils le seront grâce à une démarche responsable et partenariale. Nous avons confiance en votre action, c'est pourquoi j'invite l'Assemblée à adopter les crédits du secrétariat d'Etat au anciens combattants (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles - La présentation de ce budget n'est pas facile. Les bénéficiaires étant, comme nous tous, mortels, le Gouvernement est toujours tiraillé entre le souci d'apporter aux anciens combattants les justes réparations des sacrifices consentis et la tentation de profiter de l'évolution démographique pour les satisfaire à un moindre coût.

Monsieur le ministre, l'année dernière, vous avez clairement annoncé que vous aborderiez les problèmes avec la volonté de les résoudre...

M. Alain Néri - Nous attendons toujours.

M. le Rapporteur pour avis - ...dans une démarche fondée sur la concertation et le souci d'une planification jusqu'en 2007.

Le présent budget en porte la marque (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Malgré une diminution des crédits, la dotation rapportée au nombre des parties prenantes augmente de 1,58 %.

Si, dans le années à venir, le budget était maintenu en euro constant, il serait possible d'adapter le droit de réparation à l'évolution de notre société.

L'article 73 du projet de loi de finances, tend à augmenter de quinze points d'indice toutes les pensions de veuves d'invalides pensionnés, mesure demandée depuis longtemps qui améliore le sort de 130 000 veuves.

L'article 74 dispose que la qualité de combattant et la carte qui la constate seront accordées aux personnels militaires et à certaines catégories de personnels civils justifiant de quatre mois de présence en AFN. 15 à 20 000 personnes supplémentaires, pour un coût de 3 millions d'euros, devraient bénéficier de cette mesure d'équité demandée par le monde combattant.

Une seule ambiguïté demeure. Il doit être entendu que la période de janvier 1952 à juillet 1962 doit être considérée comme s'appliquant aussi bien à la Tunisie, qu'au Maroc et à l'Algérie.

J'ai déposé, avec plusieurs de mes collègues, des amendements tendant à apporter cette précision, mais ils sont tombés sous le coup de l'article 40. Puissent-ils vous inciter à régler ce problème dès 2004.

Suivant les conclusions de la commission Dechartre, le Gouvernement a étendu aux orphelins de déportés résistants ou politiques victimes de la barbarie nazie les mesures de réparation du décret du 13 juillet 2000.

Le décret en préparation doit préciser le périmètre d'éligibilité sans ouvrir de nouvelles injustices. La commission souhaite qu'il soit publié à bref délai.

En ce qui concerne la décristallisation des pensions des anciens combattants de l'Union française, je me félicite que le décret d'application et l'arrêté portant exécution du versement aux ayants droit avant la fin de l'année aient enfin été publiés le 4 novembre.

M. Jacques Desallangre - Ouf !

M. le Rapporteur pour avis - Autre démarche positive : l'action sociale. Alors que l'évolution de la démographie des anciens combattants aurait pu conduire à revoir à la baisse le rôle de l'ONAC, celui-ci reste essentiel. L'ONAC et ses directions départementales restent un lieu d'accueil et de conseil permanent pour tous.

Neuf écoles spécialisées offrent 2000 places aux travailleurs adultes handicapés et aux militaires encore en fonction. Ces écoles s'adaptent aux mutations professionnelles. Un service nouveau a été créé afin de passer de 40 militaires formés par an à 450 en 2007.

L'ONAC contribue enfin à l'accueil des victimes de guerre âgées. Il gère directement 9 maisons de retraite disposant de 980 lits. Le conventionnement tripartite de ces maisons avec les départements et l'Etat est en cours. L'ONAC poursuit également une politique de labellisation des établissements extérieurs, afin d'y accueillir des anciens combattants. Votre rapporteur souhaite voir s'accélérer ces deux processus.

L'Office poursuit sa restructuration dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens signé avec l'Etat pour les cinq années à venir, en pleine concertation avec les personnels.

M. Jean-Louis Dumont - C'est vite dit !

M. le Rapporteur pour avis - L'Etat augmente de 1,5 million d'euros sa contribution aux dépenses sociales de l'Office, qui atteindront plus de 12 millions d'euros en 2004.

Cette contribution nouvelle ne fait en apparence que remplacer la contribution volontaire apportée chaque année par le Parlement sur sa réserve parlementaire. La nuance est cependant de taille : le Gouvernement affirme ainsi sa volonté de pérenniser l'ONAC. Votre rapporteur en prend acte.

M. Alain Néri - Le sort réservé à mon amendement montrera ce qu'il en est !

M. le Rapporteur pour avis - Pour le projet de rénovation de l'Institution nationale des Invalides, des objectifs ambitieux ont été fixés au service des victimes de guerre. Fort d'un avis favorable de l'Agence nationale d'accréditation des établissements de santé et d'un budget en hausse de 10 %, l'Institut présentera prochainement son contrat d'établissement.

Le secrétariat d'Etat se consacre de plus en plus au devoir de mémoire : les crédits de 24 millions d'euros prévus pour 2004 financeront la collecte, la conservation et la transmission de la mémoire ainsi que le programme de commémoration. La politique de la mémoire est confiée en partie à l'ONAC : 67 des 100 postes de délégués à la mémoire prévus dans le contrat seront opérationnels dès 2004. Ce sont des postes de catégorie A qui permettront de mener, en partenariat avec les associations, les armées, l'Education nationale, la Culture et les collectivités territoriales, une action de qualité.

La politique de la mémoire s'exercera aussi au niveau international grâce au concept de mémoire « partagée », que vous avez promu avec nos alliés ou nos adversaires d'hier : des accords seront signés avec l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Corée et le Vietnam.

Le ministère poursuit quatre actions principales : la rénovation des lieux de mémoire et de sépulture en France et à l'étranger, la réalisation des relais de mémoire, la création d'un site internet sur les Morts pour la France et le développement du tourisme de la mémoire.

Mon rapport donne le programme des cérémonies prévues en 2004 : quatre-vingt dixième anniversaire du début de la grande guerre, soixantième anniversaire des combats d'Italie et de la Libération, cinquantième anniversaire de Dien Bien Phu et de la guerre d'Indochine.

Votre rapporteur prend acte de la décision prise d'instituer, par décret du 26 septembre 2003, le 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux Morts pour la France de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie.

Prise après une large concertation, dans le cadre de la commission Favier, cette décision a reçu l'agrément de beaucoup et a été refusée par d'autres.

M. Jacques Desallangre - Ah oui !

M. Jean-Louis Dumont - Il aura droit à une belle médaille !

M. le Rapporteur pour avis - Pour résumer ma pensée, je vous lirai un extrait d'une lettre reçue du président d'une association nationale d'anciens combattants («Laquelle ? » sur les bancs du groupe socialiste).

« L'adoption du 5 décembre n'est ni une victoire, ni une défaite pour quiconque : on ne se bat, ne s'affronte, ni ne s'invective dans un lieu de recueillement, au contraire on s'y rassemble, voire on s'y réconcilie pour mieux honorer les disparus, surtout lorsqu'il s'agit de ses camarades morts pour la France ».

Très positif, ce budget ne satisfait néanmoins pas toutes les revendications des anciens combattants.

Depuis 1978, la retraite du combattant est fondée sur l'indice 33 des pensions. Cela fait donc vingt-six ans qu'elle n'a pas été augmentée. Elle représente aujourd'hui, avec 424 € par an, plus un témoignage symbolique de reconnaissance qu'une véritable retraite. Ce caractère de récompense est accentué par le fait qu'elle est unique, universelle et égalitaire. Son caractère explique la difficulté de l'augmenter. Alors qu'elle est d'un faible montant pour chacun, elle représente, au total, une dépense importante. Mais le taux de 48 points demandé par les associations pourrait être atteint en quelques années. C'est ce qui avait été proposé par des amendements rejetés au titre de l'article 40.

M. Alain Néri - Nous l'avons proposé l'année dernière, et vous n'avez rien fait !

Un député UMP - Vous n'avez rien fait pendant quinze ans ! Un peu de modestie !

M. le Président - Je vous remercie de conclure, Monsieur Beaudouin.

M. le Rapporteur pour avis - Il faut aussi adapter à notre temps un budget essentiellement fondé jusqu'à présent sur le droit à réparation.

Aujourd'hui, l'ancien combattant n'est plus seulement un mutilé. C'est aussi un homme ou une femme qui a sacrifié une partie de sa vie au plus beau des services, celui de la France et de la République.

Est-il admissible qu'il puisse être condamné à vivre la fin de sa vie avec des ressources inférieures au SMIC, et que sa veuve puisse en être réduite à la misère ?

Garantir à tout ancien combattant un revenu au moins égal au SMIC me paraît une mesure de solidarité et de justice.

M. le Président - Veuillez abréger.

M. le Rapporteur pour avis - Elle pourrait être financée sur le budget des anciens combattants, par le transfert des crédits actuellement alloués au fond de solidarité et qui, compte tenu de l'arrivée massive des anciens combattants de la guerre d'Algérie à l'âge de la retraite, sont en constante diminution. J'ai demandé un rapport sur ce sujet au Gouvernement.

Deux démarches sont nécessaires à la transmission de la mémoire.

M. le Président - Monsieur Beaudouin...

M. le Rapporteur pour avis - La première est d'organiser la conservation de la mémoire autour de l'écrit, de l'oral et du visuel. J'évoque dans mon rapport les pistes de recherche.

La seconde est la création d'une journée de la mémoire combattante.

La commémoration des grands événements contemporains s'amenuise au fur et à mesure que disparaissent ceux qui ont participé aux conflits. Je propose donc que nous réfléchissions, au-delà de toutes les commémorations particulières, au moyen de faire que la France se retrouve un jour par an, dans la commémoration de ce qui était commun à ses citoyens soldats tout au long de son histoire : l'esprit de sacrifice au service de la patrie et des valeurs républicaines. Ma démarche n'est pas de division mais d'union. J'ai pu constater lors des auditions que les associations étaient en phase de réflexion sur ce sujet.

M. le Président - Nous verrons tout cela dans votre rapport.

M. le Rapporteur pour avis - La commission des affaires sociales a adopté ce budget. Je vous demande, mes chers collègues, de la suivre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jacques Desallangre - Plus les années passent, plus votre budget régresse. Je n'ai pas chaussé les mêmes verres grossissants que Xavier Bertrand ! La baisse était déjà de 4 % l'année dernière. Mais sans doute restait-il encore trop pour les anciens combattant. Y a-t-il, Monsieur le ministre, budget aussi mal traité que le vôtre ? Je n'en suis pas certain : moins 7 % en deux ans, c'est un record dont vous pouvez, à défaut de défendre les anciens combattants, vous enorgueillir ! Que ne demandez-vous conseil à M. Fillon, qui a obtenu 18 milliards pour les patrons !

Gagner du temps, voilà la clé de voûte de votre maigre budget.

Gagner du temps sur la décristallisation. N'avons-nous pas voté l'année dernière quelques millions d'euros afin d'apporter une première réponse à ces anciens combattants qui ont risqué leur vie pour la France ?

M. le Rapporteur spécial - Vous êtes mal placé pour le dire !

M. Jacques Desallangre - Ce devait être un premier pas car une réelle décristallisation égalitaire reste à établir. Cela faisait des années que nous réclamions cette décristallisation et ce n'est que sous la pression du Conseil d'Etat que vous vous êtes exécuté. Malgré tout, vous avez encore traîné les pieds, gagné du temps, avant de signer enfin les décrets pour éviter de vous faire étriller par la représentation nationale. Quarante-huit heures avant le débat, il était temps !

Gagner du temps, c'est aussi votre technique quand il s'agit d'indemniser tous les orphelins des victimes de la barbarie nazie. Nous avons l'année dernière, avec Maxime Gremetz, fait adopter un amendement en ce sens. Mais une année ne vous a pas suffi pour définir le périmètre ! Si vous voulez nous prouver le contraire, engagez-vous donc à ce que l'indemnisation soit rétroactive !

Vous gagnez encore du temps et de l'argent, même lorsque vous semblez faire preuve de générosité à l'égard des veuves pensionnées. Vous attribuez quinze points d'indice, mais à compter du 1er juillet et non du 1er janvier. C'est 10 millions d'euros que les veuves d'anciens combattants n'auront pas dans la poche. On est gêné devant de telles mesquineries.

M. le Rapporteur spécial - De votre part !

M. Jacques Desallangre - Gagner de l'argent sur le temps, c'est aussi ce que vous faites pour la carte du combattant. Il est vrai que vous accédez à notre demande d'attribuer la carte aux anciens d'AFN dès quatre mois de présence. Mais ce geste n'est rien d'autre que le respect du principe d'égalité républicaine devant la loi. Et vous jouez encore avec le temps : vous faites des économies en appliquant des dates différenciées en fonction des conflits - Algérie, Maroc, Tunisie. Notre commission ne s'y est pas trompée et a adopté notre amendement fixant les mêmes dates pour tous pour l'obtention de la carte. J'espère que vous ne vous obstinerez pas à nous opposer l'article 40 et que vous reprendrez à votre compte cette mesure de justice. Si votre budget est vraiment « lucide et responsable », qu'il soit aussi juste et équitable. Vous gagnez également du temps et de l'argent en refusant de poursuivre la procédure instaurée depuis 1998 et de revaloriser le plafond majorable de la rente mutualiste. Vous l'aviez l'année dernière revalorisée de 7,5 points au lieu des 5 habituels, mais cette année rien, contrairement aux engagements de l'Etat.

Vous gagnez du temps, encore, sur la retraite du combattant. S'agissant du monde ancien combattant, gagner du temps, c'est gagner beaucoup d'argent en spéculant sur ceux qui disparaissent chaque jour. En refusant de revaloriser la retraite du combattant, vous commettez une injustice et une indécence. Injustice, car cette retraite symbolise la reconnaissance de la nation. Reconnaissance hautement symbolique : 423 €, soit moins de 3 000 F par an. Lorsqu'elle fut créée, cette retraite devait représenter un mois de salaire ouvrier. On mesure la perte de pouvoir d'achat !

Aucune revalorisation spécifique n'étant intervenue depuis 1978, M. Gremetz et moi-même avons proposé que son montant passe de 33 à 39 points d'indice, pour parvenir à 48 points dans les deux ans.

Les anciens combattants revendiquent la reconnaissance de la nation, pas l'aumône. Vos économies de bout de chandelle et vos spéculations sur l'extinction progressive des anciens combattants sont indignes d'un Etat en paix avec son histoire et sa mémoire (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Georges Colombier - 2004 sera riche en commémorations pour le monde combattant puisque nous serons amenés à célébrer de nombreux événements glorieux et douloureux de notre histoire.

2004 s'inscrit également dans la démarche de concertation et de pragmatisme, que vous avez su engager, Monsieur le ministre. Je vous remercie du dialogue empreint de confiance et de sincérité et pour votre souci d'apporter des réponses adaptées aux besoins du monde combattant.

2004 est aussi une année de restrictions financières compte tenu d'un contexte budgétaire difficile. Comme les précédents, ce budget accuse une diminution de 3,12 %. Certes, il permettra une augmentation de 1,58 % des droits procurés à chaque ressortissant. Je regrette cependant que les crédits ne soient pas reportés d'une année sur l'autre.

Néanmoins, les marges de man_uvre ainsi dégagées vont permettre de mettre en place des mesures nouvelles et de faire progresser l'équité entre les anciens combattants. Avant d'étudier ces mesures, je voudrais souligner le travail de qualité que vous avez effectué sur des questions importantes qui avaient mobilisé le monde combattant, mais aussi les parlementaires.

Tel est le cas de l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie. On sait les réactions bien légitimes des orphelins de déportés non juifs à la publication du décret du 13 juillet 2000, relatif aux déportés de la Shoah. Le Premier ministre a annoncé, le 2 septembre, que les orphelins des déportés, des fusillés et des massacrés, victimes de la barbarie nazie, bénéficieront d'une indemnité identique. Je compte sur vous, Monsieur le ministre, pour déterminer le champ d'application de cette mesure avec précision, afin d'éviter de susciter à nouveau un sentiment d'injustice.

M. François Rochebloine - Mais faites vite !

M. Georges Colombier - Concernant la « décristallisation » des pensions, je me réjouis du décret du 3 novembre dernier relatif à la révision des prestations versées aux ressortissants des pays placés antérieurement sous la souveraineté française résidant hors de France. C'est une juste reconnaissance. Mais j'insiste pour que les fonds soient débloqués très vite.

Parmi les mesures nouvelles figure l'augmentation de 15 points des pensions des 130 000 veuves de guerre et veuves d'invalides, mesure de justice, notamment pour celles qui se sont dévouées pour leur conjoint handicapé.

L'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant AFN était une priorité du monde combattant. Je me réjouis que le Gouvernement ait décidé de mettre fin à un régime incohérent qui suscitait beaucoup d'aigreurs, cette carte étant réservée aux policiers et aux CRS. Désormais, tous les anciens combattants ayant effectué un séjour de quatre mois et plus en Afrique du Nord pourront se la voir attribuer. J'insiste sur le respect de la date du 2 juillet 1962 comme date butoir pour la Tunisie, le Maroc et l'Algérie.

Par ailleurs, j'attire votre attention sur la situation des vétérans des missions extérieures. En effet, la notion de conflit armé a profondément évolué et il serait opportun de prendre des mesures valables pour tous les conflits.

Le projet porte à 12,135 millions d'euros la contribution de l'Etat à l'ONAC. Cela évitera le recours à la réserve parlementaire, démarche précaire et anormale. Je m'en réjouis. J'ai bien pris note des réponses que vous avez apportées au cours du conseil d'administration de l'ONAC mardi dernier et je souhaite que le contrat d'objectifs et de moyens pérennise l'ONAC.

Certains sujets importants qui mobilisent les anciens combattants ne trouvent aucune traduction budgétaire. Ils demandent avec insistance la revalorisation de la retraite du combattant, actuellement calculée sur l'indice 33. Je souscris pleinement à cette revendication que j'ai déjà soutenue lors des précédents budgets. Sachant qu'une revalorisation d'un point représente une dépense de 16 à 17 millions d'euros, il convient de procéder par étapes. Mais le projet de budget ne comporte aucune proposition pour cette mesure, qui concerne pourtant toutes les générations d'anciens combattants. C'est pourquoi j'ai déposé en commission un amendement portant la retraite du combattant de l'indice 33 à l'indice 36, et cosigné l'amendement du rapporteur pour avis. Il est malheureusement tombé sous le coup de l'article 40. Je vous serais reconnaissant, Monsieur le ministre, de bien vouloir le reprendre à votre compte (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et du groupe UDF). Lors du précédent budget, vous vous étiez engagé à ouvrir tous les dossiers au cours de la législature : celui-ci est une priorité.

L'indice du plafond majorable de la retraite mutualiste a été porté à 122,5 points par la loi de finances de 2003. Certaines associations regrettent que cet effort n'ait pas été renouvelé pour 2004.

Comme je l'ai souvent dit, le rapport constant sur lequel se fonde le calcul du point de pension doit impérativement être simplifié. Certes des réunions de travail ont été organisées à ce sujet. Je souhaite ardemment que, sous votre impulsion, cette concertation aboutisse rapidement

Le bénéfice de la « campagne double » a été attribué, sous certaines conditions, aux anciens combattants de la première et de la deuxième guerre mondiale et de la guerre d'Indochine. En application de la loi du 18 octobre 1999 reconnaissant l'état de guerre en Algérie et les combats en Tunisie et au Maroc, les associations d'anciens combattants souhaitent qu'une commission tripartite réunissant les parlementaires, les associations concernées et votre ministère en étende le bénéfice aux combattants d'AFN.

En ce qui concerne la carte du combattant volontaire de la Résistance, il serait souhaitable que les commissions départementales d'attribution puissent se réunir fréquemment. Par ailleurs, les titulaires de la médaille de la Résistance ou de la croix de guerre au titre de la Résistance devraient bénéficier de cette carte.

Concernant les réfractaires, les associations d'anciens combattants réitèrent leur demande d'attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires du service du travail obligatoire - STO -, qui ont refusé de participer à l'effort de guerre nazi. J'ai déposé une proposition de loi en ce sens.

Les souffrances endurées par les Alsaciens et les Mosellans doivent être prises en compte. Depuis de nombreuses années, on se heurte à une situation de blocage concernant l'indemnisation des RAD-KHD. J'ai bien pris note de la volonté du Gouvernement de trouver une solution équitable. Si la réunion organisée le 12 mai dernier, à Strasbourg, n'a pas permis encore de parvenir à une décision, je compte sur votre ténacité, Monsieur le ministre, pour faire progresser ce dossier.

Les associations demandent que les anciens combattants titulaires de la carte puissent bénéficier d'une demi-part supplémentaire pour l'impôt sur le revenu dès 70 ans, au lieu de 75 actuellement.

Ils souhaitent l'octroi d'une allocation de solidarité aux veuves les plus modestes et l'augmentation des crédits sociaux destinés aux anciens combattants les plus démunis. J'insiste également sur le lancement de la collecte des témoignages des anciens combattants en Afrique du Nord.

M. François Rochebloine - Très bien !

M. Georges Colombier - Monsieur le ministre, au regard du travail accompli depuis plus d'une année et demie, et confiant dans votre détermination, le groupe UMP votera pour ce budget 2004 (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Maxime Gremetz - Aux actes, camarades !

M. Georges Colombier - Les gouvernements précédents n'ont pas fait grand-chose non plus !

A titre personnel, je voudrais réitérer mon désaccord avec le choix de la date du 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France pendant la guerre d'Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

En tant qu'ancien d'Algérie, j'estime qu'aucune autre date que le 19 mars 1962 ne correspond mieux à l'esprit de recueillement, de concorde et de réconciliation dans lequel je souhaite qu'on aborde ce sujet. Non seulement la date du 5 décembre est dépourvue de sens historique, mais elle ne va pas apaiser les divisions au sein du monde combattant (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF, sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Fidèle à mes engagements passés, je continuerai à commémorer le 19 mars et à rendre hommage aux victimes militaires et civiles tombées avant et après ce jour. Cet acte ne saurait effacer les événements tragiques postérieurs, ni les souffrances endurées par les harkis et les Français rapatriés d'Algérie (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Alain Néri - Votre budget est en net recul par rapport au précédent, qui n'était déjà pas brillant. Depuis votre arrivée il aura baissé de 243 millions d'euros.

Vous ne pouvez pas justifier cette diminution par la démographie car la baisse du nombre des anciens combattants est compensée par l'inclusion des harkis dans votre secteur de compétence.

S'y ajoute le fait qu'en 2003, 134,6 millions d'euros de crédits ont été gelés, puis annulés. Ce budget, que vous dites de progrès est en réalité un trompe-l'_il. Sur douze postes principaux, sept voient leurs crédits baisser et deux restent constants.

Trois postes sont en hausse. Pour l'INI d'abord, mais vous ne faites que revenir au budget de 2001. Ensuite, la retraite du combattant, mais c'est normal, du fait de l'augmentation du nombre d'anciens combattants arrivant à l'âge de la retraite. Enfin, les crédits de la rente mutualiste qui stagnent à 122,5 points ne doivent leur hausse qu'à un amendement que j'avais déposé en 1998 pour que le plafond de la retraite mutualiste soit calculé en points d'indice.

Ce budget est mauvais. Vous n'annoncez que deux mesures nouvelles, sans doute parce que Jacques Floch et Jean-Pierre Masseret avaient déjà fait tout le travail, en mettant en place un plan pluriannuel.

Première de vos mesures : l'attribution de la carte du combattant aux militaires appelés, engagés ou de carrière présents durant au moins quatre mois en Afrique du Nord durant la guerre d'Algérie et les combats en Tunisie et au Maroc. Vous reprenez notre idée d'attribuer la carte en fonction de la durée du risque, mais vous avez raison de généraliser cette condition de quatre mois : c'est une question d'égalité républicaine. En revanche, dans un souci d'équité, je vous demande d'adopter notre amendement pour que soit retenu dans tous les cas, comme date butoir de la fin des combats, le 2 juillet 1962 (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)

Deuxième mesure : vous relevez de 15 points d'indice la pension des veuves de guerre, pour un montant de 11,84 millions d'euros, ce qui est une mesure intéressante, mais qui ne fait que prolonger l'augmentation de cette allocation de 120 points réalisée par le précédent gouvernement dans le budget 2002 !

Pour ce qui est de la décristallisation, il a fallu attendre la discussion de votre budget en commission pour que le décret sorte. De qui vous moquez-vous ? Vous avez gagné une année sur le dos des anciens combattants !

Concernant la retraite des combattants, vous en faisiez votre préoccupation essentielle l'an dernier, et nous promettiez le passage de 33 à 48 points pour cette année. Rien dans votre budget ! Aussi avons-nous déposé deux amendements, l'un pour le passage immédiat à 48 points, l'autre pour son échelonnement sur la législature, soit cinq points par an. Sachant qu'un point représente 16 millions d'euros, vous devez en trouver 80. Vous les avez ! En effet, dès le budget 1998, j'avais déposé un amendement, adopté par le Gouvernement de la République, pour créer une allocation pour les anciens combattants chômeurs âgés de moins de 60 ans et ayant cotisé quarante ans. Ils ont aujourd'hui tous dépassé les 60 ans, ainsi pouvez-vous récupérer cet argent pour financer l'augmentation de leurs retraites, ce qui serait justice pour tous ceux que frappe la réforme inique des retraites.

Enfin, les harkis. Je n'ai rien trouvé en leur faveur dans votre budget. Qu'attendez-vous pour mettre en _uvre le rapport de M. Diefenbacher sur leur indemnisation ? Quant aux orphelins des déportés, des fusillés, des massacrés, vous nous annoncez qu'ils bénéficieront du même traitement que ceux de la Shoah - une fois que vous aurez défini le périmètre... Prendrez-vous autant de temps que pour sortir le décret sur la décristallisation ?

Enfin, j'espère que la Fondation franco-allemande trouvera une solution au problème douloureux de nos camarades Alsaciens-Lorrains.

Pour ce qui est des mesures sociales, je souhaiterais que la demi-part de l'impôt sur le revenu soit accordée aux anciens combattants âgés de 70 ans et non plus de 75 ans, afin d'améliorer leur situation matérielle.

Quant à la carte du combattant volontaire, les résistants y auront-ils enfin droit ?

Enfin, l'ONAC. Les crédits de fonctionnement sont en baisse, de même que ses effectifs, et vous prétendez le conforter, alors même que son personnel devra affronter une surcharge de travail, du fait notamment de la prise en compte de nouvelles cartes d'anciens combattants. Je demande donc à mes collègues de voter mon amendement pour garantir la pérennité de l'ONAC au-delà du contrat d'objectif.

Concernant ses crédits sociaux, il est faux de prétendre qu'ils augmentent. Au contraire, ils stagnent au niveau de l'an dernier, qui représentait déjà une diminution de 12 %. Et je ne parle pas de l'augmentation du coût de la vie. Heureusement que les départements se mobilisent en faveur des anciens combattants.

Monsieur le ministre, vous vous êtes moqués du monde des anciens combattants, et en particulier de la troisième génération au feu, que vous avez insultée en choisissant comme date pour la journée du souvenir le 5 décembre, qui n'est en rien une date historique ! Nous avons pourtant voté à l'unanimité la reconnaissance que la guerre d'Algérie était bien une guerre, qui ne doit pas rester sans date !

Quand l'un de mes petits-enfants m'a demandé : « Pépé, qu'est-ce que le 5 décembre, c'est l'armistice, c'est le cessez-le-feu ? », je lui ai répondu que c'était le jour où M. Chirac avait un moment de libre dans son agenda ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

De qui se moque-t-on ? (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP). Si vous voulez respecter les choix des associations, organisez une consultation démocratique avec une voix par ancien combattant.

M. le Président - Il faut conclure !

M. Alain Néri - Faites en sorte que la proposition de loi sur le 19 mars adoptée par l'Assemblée nationale soit votée au Sénat !

Le groupe socialiste votera contre ce budget. La troisième génération du feu attend une véritable reconnaissance et une véritable journée du souvenir et du recueillement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Rochebloine - Une nouvelle fois le budget des anciens combattants est décevant, puisqu'il baisse de 3,12 %, ce qui n'est pas nouveau, mais reste regrettable, surtout lorsque de nombreux points du contentieux qui oppose le monde combattant aux pouvoirs publics ne sont toujours pas réglés.

Il suffirait pourtant de maintenir à niveau le budget des anciens combattants durant deux années pour répondre à des demandes sans cesse repoussées pour des raisons budgétaires, alors même que leur légitimité n'est pas contestée.

Vous ayant laissé le temps de prendre vos marques, Monsieur le ministre, nous étions en droit d'attendre un autre budget !

Vous proposez peu de mesures nouvelles - deux - qui sont positives.

Tout d'abord, le relèvement des pensions des veuves de guerre et des veuves d'invalides, pour un coût de 11,84 millions d'euros.

Ensuite, une harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant, par un alignement sur quatre mois de présence en Afrique du Nord, qui fait suite à la mesure accordée par votre prédécesseur à la demande du ministre de l'intérieur de l'époque. Si l'on avait retenu les critères appliqués pour les unités de gendarmerie, nous n'en serions pas là ! Nous aurions évité des situations inéquitables et, d'une certaine manière, la dévalorisation de la carte du combattant. La mesure n'a toutefois qu'une incidence financière très faible, de l'ordre de 3 millions d'euros.

J'aimerais que vous nous précisiez, Monsieur le ministre, si les périodes prises en compte pour l'Algérie, le Maroc et la Tunisie, auront bien toutes comme date butoir le 2 juillet 1962.

Il faudrait aussi examiner la situation des anciens combattants 1939-1945 qui n'ont pas encore obtenu la carte du combattant.

Par ailleurs, qu'adviendra-t-il des vétérans des opérations extérieures ?

Nous ne pouvons que nous féliciter que soient d'emblée inscrits dans le budget les crédits sociaux de l'ONAC, d'un montant de 1,5 million d'euros. Mais il serait abusif de considérer cette inscription comme une mesure nouvelle de solidarité : si elle nous évite d'avoir recours à la réserve parlementaire, elle n'apporte pas un euro de plus au monde combattant.

Quant aux orphelins victimes de la barbarie nazie, je me réjouis que M. le Premier ministre ait décidé de leur accorder une mesure d'indemnisation similaire à celle du décret du 13 juillet 2000 en faveur des orphelins de déportés juifs.

Il reste cependant à définir le périmètre d'application de cette mesure, sans perdre de temps, mais sans précipitation, toute maladresse risquant de susciter de nouveaux sentiments d'injustice ou d'incompréhension. Je vous remercie de bien vouloir nous préciser dans quel délai ce dossier pourrait aboutir.

L'an passé, sur tous les bancs de cette Assemblée, nous nous étions réjouis de la mise en _uvre d'un début de décristallisation pour les pensions des anciens combattants ressortissants des pays membres de l'ex-Union française, avec l'inscription de 75 millions d'euros. Le décret d'application vient enfin de paraître ce 3 novembre. Il était temps, vous en conviendrez. Vous nous avez apporté en commission un certain nombre d'assurances quant à l'utilisation des crédits inscrits sur le budget ; nous aimerions que vous les confirmiez aujourd'hui.

Par ailleurs, il est dommage que cette décristallisation ne se poursuive pas en 2004.

J'en viens à la retraite du combattant, dont il faut rappeler le montant : 423,06 € par an, juste de quoi s'offrir cinq cigarettes par jour !

L'an dernier, vous aviez laissé entendre qu'une mesure de revalorisation pouvait être envisagée en 2004. Nous constatons qu'il n'en est rien, ce qui est regrettable. Le monde combattant, comme les parlementaires, attend un geste significatif de votre part, Monsieur le ministre. L'article 40 ne nous permet pas de déposer un amendement en faveur d'une véritable revalorisation, qui coûterait environ 50 millions. Vous seul, Monsieur le ministre, pouvez le faire. Résistez à Bercy, le monde combattant saluera cette forme de courage.

S'agissant du droit à réparation, de nombreux points auraient mérité d'être pris en considération, même s'il n'est pas chose facile de donner entière satisfaction aux intéressés. En ignorant le problème, on entretient un contentieux très ancien.

Ainsi, à propos de la simplification du mode de calcul du rapport constant, rien de nouveau, si ce n'est des promesses renouvelées régulièrement. Depuis des années, Bercy s'arc-boute sur une formule que bien peu d'entre nous pourraient expliquer. Vous-même l'avez reconnu, Monsieur le ministre, en commission. Sur ce dossier, s'il y a une constante, c'est bien de ne rien vouloir changer !

Pour la campagne double, je ne puis que renouveler notre demande de création d'une commission tripartite pour évaluer le coût exact d'une telle mesure.

L'absence de revalorisation, cette année, du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant, alors même que vous aviez envisagé de porter le plafond à 130 points cette année, sera ressentie dans le monde combattant comme une nouvelle déception. Cette mesure, toutefois, ne constitue pas une demande prioritaire du monde combattant.

Nous aurions aimé que ce budget lance la collecte des témoignages des anciens combattants d'AFN, dans la perspective d'une politique de la mémoire en direction de la troisième génération du feu. Merci de nous faire part de votre sentiment sur ce point.

L'an dernier, avait été mis en place, au titre de la prise en compte des psycho-traumatismes de guerre, un bilan gratuit en matière de santé psychique auprès des médecins spécialisés. Or un rapport publié en novembre 2002 et rédigé par cinq médecins militaires a rejeté les propositions formulées par le monde combattant. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter des précisions sur ce dossier ?

Le temps me manque pour évoquer comme il conviendrait la reconnaissance des services accomplis dans la Résistance et la défense des droits des résistants, qui sont inséparables du travail de mémoire. Ne laissons pas ce dossier aux oubliettes.

Je me réjouis de l'attribution de la carte de ressortissants de l'ONAC aux veuves d'anciens combattants. Envisagez-vous, pour le prochain budget, de leur accorder la réversion de la retraite du combattant et le droit d'accès la rente mutualiste ?

Avant de conclure mon propos, je souhaite revenir sur le choix du 5 décembre comme journée mondiale d'hommage aux morts pour la France, pendant la guerre d'Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie.

L'annonce du décret, Monsieur le ministre, m'a véritablement surpris et a suscité chez moi une réelle incompréhension.

La représentation nationale n'a pas été associée à cette décision.

Mme Chantal Robin-Rodrigo - C'est vrai !

M. François Rochebloine - Notre assemblée, sous la précédente législature, avait fait un autre choix. Celui du Gouvernement est contestable. Il n'a pas été fait dans cet esprit de concertation que vous aviez pourtant affiché et encore moins dans un esprit consensuel.

Le Gouvernement a choisi une autre méthode, mais il est ainsi allé à l'encontre des engagements du Président de la République.

M. Jacques Desallangre - Une fois de plus !

M. François Rochebloine - Voici ce que déclarait Jacques Chirac, encore candidat, le 24 mars 2002 : « La réflexion sur une date de commémoration doit se faire en concertation étroite avec les associations d'anciens combattants pour permettre l'adoption unanime d'une proposition de commémoration ».

La décision du Gouvernement ne règle rien. Elle aggrave la confusion et vient alourdir le calendrier des cérémonies en ajoutant une commémoration à celle du 19 mars qui gardera sa légitimité populaire et à celle du 16 octobre.

La date officielle retenue n'ayant aucun lien avec la réalité historique, cette commémoration sera vide de sens, en particulier pour les jeunes générations. Que peut bien représenter le 5 décembre, dans l'esprit de nos concitoyens, sinon une date qui, à brève échéance, pourrait disparaître du calendrier officiel, sombrer dans l'oubli et l'indifférence générale ?

Est-ce ainsi qu'on renforcera la politique de la mémoire ? Est-ce ainsi qu'on parviendra à perpétuer le souvenir et à rendre l'hommage qui leur est dû à ces dizaines de milliers de morts tombés pour la France en Afrique du Nord ?

Certainement pas. Aussi, comme beaucoup de nos collègues de toutes sensibilités, je continuerai pour ma part à participer aux cérémonies du 19 mars, mais ne participerai certainement pas à celles du 5 décembre.

A quelques jours des cérémonies du 11 novembre, auxquelles nous sommes tous très attachés, je ne puis que rappeler le sens qu'avait voulu donner les poilus à la commémoration de l'armistice : « Un acte au service de la paix ». Ce doit être là le sens premier d'une commémoration.

Par ailleurs, dois-je rappeler que plus de 20 000 conseils municipaux ont adopté un v_u en faveur du 19 mars ? Plusieurs milliers de villes et de villages ont une rue ou une place du 19-Mars.

Il aurait mieux valu ne rien changer.

M. Jean-Christophe Lagarde - Exactement !

M. François Rochebloine - Le choix du 5 décembre est le fruit du hasard ou d'une volonté que je préfère ne pas connaître. Cette date n'apporte ni l'apaisement, ni la reconnaissance voulue.

Monsieur le ministre, hasard n'est pas mémoire. J'espère donc que le Gouvernement tiendra compte du peu d'enthousiasme suscité dans le pays par cette décision.

Savez-vous, mes chers collègues, que ce 5 décembre est aussi le jour anniversaire de la naissance d'un grand parti politique de la Ve République, trop tôt disparu ? (Sourires sur les bancs du groupe UDF et du groupe socialiste).

Pour l'ensemble de ces considérations, le groupe UDF ne peut que s'opposer à ce budget. C'est à regret que nous le faisons, mais c'est aussi par souci de cohérence avec nos choix antérieurs. Ce budget ne répond pas aux attentes du monde combattant (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Gérard Charasse - Je me désole, Monsieur le ministre, d'avoir à rappeler à cette tribune l'importance que devrait revêtir ce budget. Je me désole de devoir vous dire que le compte n'y est pas.

Le compte n'y est pas sur la carte du combattant.

Je pensais pourtant que, s'agissant de réconcilier l'histoire avec la mémoire, il y avait un consensus sur ces bancs. La précédente majorité avait donné aux « opérations de maintien de l'ordre en Afrique du Nord » le nom de « guerre ». Nous avons donné aux anciens de ces campagnes le droit d'obtenir le titre de reconnaissance de la nation et la carte du combattant. Il était du devoir du Gouvernement de continuer dans ce chemin. Arrêter les périodes éligibles pour le Maroc et la Tunisie aux dates correspondant respectivement à la résiliation de l'accord de protectorat de 1912 et à l'accord du 20 mars, ce n'est pas réconcilier l'histoire avec la mémoire.

Le compte n'y est pas non plus sur les retraites.

Vous annoncez 24 millions d'euros supplémentaires, mais les mesures nouvelles ne représentent que 3,5 millions d'euros, dont 3 pour l'extension, à compter du 1er juillet 2004, de la carte du combattant. Il vous reste donc 500 000 € de marge de man_uvre : cela fait 43 centimes par intéressé ou 0,03 point d'indice. A ce rythme, il faudrait 500 ans pour atteindre l'objectif de l'indice 48... Les anciens combattants apprécieront.

Le compte n'y est pas sur les mesures sociales : 11 millions d'euros de moins pour les soins, 15 millions de moins pour la sécurité sociale... Mais le pire, c'est sans doute le démantèlement de l'ONAC - je ne trouve pas d'autre mot.

Monsieur le ministre, c'est lorsque les témoins des périodes de conflits disparaissent que l'effort de mémoire doit s'accroître. Dans mon département de l'Allier, les mesures prises par vos prédécesseurs, MM. Masseret et Floch, avaient permis de constituer une équipe. De jeunes historiens ont accompagné des anciens combattants, des anciens résistants, des anciens des camps, sur le chemin de leur propre mémoire. Au-delà des récits personnels, le sens de l'histoire, celui de leur engagement vont rester. Dans l'Allier, l'équipe perdra quatre personnes sur sept.

Je suis député de Vichy, une ville où on sait l'impérieuse nécessité de remettre l'histoire à l'endroit. Dans cette ville, le 10 juillet dernier, je vous ai demandé si vous étiez prêt à nous soutenir dans un travail de mémoire qui nous sorte d'ambiguïtés insupportables. J'attends encore la réponse.

Deux remarques pour conclure.

Les décrets d'application concernant les orphelins doivent être pris rapidement, sous peine de devoir ouvrir un débat sur la rétroactivité ou l'éligibilité des enfants des orphelins.

D'autre part, il faut ouvrir le débat sur les anciens des missions extérieures, qui sont aussi des anciens combattants.

Monsieur le ministre, j'ai le regret de vous dire que les radicaux de gauche de cette assemblée ne voteront pas votre budget (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

M. Maxime Gremetz - Je ferai deux observations préalables.

Le Gouvernement a fait savoir récemment sa décision, sur la base de l'amendement que j'avais déposé et qui a été voté par l'Assemblée unanime, d'étendre à tous les orphelins des victimes de la barbarie nazie l'indemnisation accordée aux orphelins de déportés victimes des persécutions antisémites. Nous nous en félicitons et demandons, avec l'ensemble du mouvement des anciens combattants et victimes de guerre, que le décret sorte enfin et ne restreigne pas le périmètre de l'indemnisation, afin d'éviter toute nouvelle forme d'inégalité.

En second lieu, le Parlement a voté, dans la loi de finances pour 2003, des crédits s'élevant à 78,4 millions pour procéder à une première étape de décristallisation des pensions et retraites des anciens combattants et victimes de guerre des ex-pays coloniaux. Force est de constater qu'il a fallu attendre la veille de ce débat pour que le décret voie enfin le jour, mais enfin c'est fait.

J'en viens au projet de budget pour 2004. Vous faites état d'une augmentation de 14,10 % des crédits sociaux de l'ONAC, alors que la dotation budgétaire de 12 135 000 € est exactement la même que celle de la loi de finances initiale pour 2003. C'est dire qu'elle diminue en euro constants, tout comme diminuent les crédits d'appareillage, les subventions de fonctionnement de l'ONAC, les remboursements à diverses compagnies de transport, les subventions, indemnités et pécules, la dotation du fonds de solidarité des anciens d'Afrique du Nord, les pensions d'invalidité, allocations et indemnités diverses, les prestations remboursées par l'Etat au titre du régime général de la sécurité sociale des invalides de guerre, les crédits affectés aux soins médicaux gratuits et les subventions en faveur des actions de mémoire - qui sont en baisse de 186 500 €...

Il est vrai que vous concevez parfois la mémoire historique d'une façon particulièrement restrictive. Ainsi la commission Favier a été créée sur mesure pour vous permettre d'en finir avec la seule date historique concernant la guerre d'Algérie, le 19 mars 1962. Pourtant l'Assemblée nationale, dans sa majorité, avait décidé de la retenir. Il est particulièrement regrettable que le gouvernement de l'époque ait décidé d'interrompre le processus parlementaire mais l'Histoire est l'Histoire : c'est pourquoi nous avons déposé à nouveau une proposition de loi pour retenir cette date anniversaire du cessez-le-feu.

M. Jean-Pierre Grand - C'est la date des porteurs de valises du FLN !

M. Maxime Gremetz - Remettre en cause cette date, c'est faire insulte au général de Gaulle ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Ce projet de budget contient deux mesures réellement nouvelles, qui sont le résultat de l'action unie des associations d'anciens combattants, résistants et déportés. Tout d'abord, il accorde la carte du combattant pour quatre mois minimum de présence en Algérie, Tunisie et Maroc. Mais il est fort regrettable que notre amendement visant à supprimer les dates butoirs ait été rejeté. D'autre part, des crédits sont prévus pour attribuer quinze points aux pensions de veuves de guerre, veuves d'invalides et de grands invalides. Il était temps.

M. Jacques Desallangre - Mesure applicable en juillet seulement...

M. Maxime Gremetz - En effet, merci de cette précision. En revanche, nous ne trouvons rien dans ce budget pour le relèvement du plafond majorable des rentes mutualistes malgré l'engagement pris devant l'Assemblée nationale, rien pour la revalorisation de la retraite du combattant. Notre groupe a donc déposé deux amendements visant à respecter les promesses faites par le Gouvernement, mais ils ont été balayés... Il n'y a rien non plus pour les veuves d'anciens combattants, et notre amendement tendant à créer à leur profit un fonds national de solidarité a connu le même sort que les autres !

Les moyens existent pour satisfaire ces revendications. Il suffirait d'avoir la volonté politique d'utiliser les 109 millions retirés de ce budget. Par respect pour les anciens combattants et victimes de guerre, le groupe des députés communistes et républicains, à moins que ses amendements soient retenus, s'abstiendra (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains).

M. Lionnel Luca - Ce budget est bon, même s'il paraît en baisse, puisque la diminution des crédits est inférieure à l'évolution démographique. Il permettra d'améliorer la situation des veuves pensionnées, dont l'indice augmentera de quinze points, d'harmoniser les conditions d'accès à la carte du combattant AFN, de garantir l'action sociale de l'ONAC, d'indemniser les orphelins des victimes de la déportation en mettant fin à la différenciation établie par le décret du 13 juillet 2000, enfin de revaloriser les droits des anciens combattants et d'assurer la décristallisation des pensions des anciens combattants originaires de nos anciens territoires de l'Empire.

Depuis votre arrivée au ministère, Monsieur le ministre, vous n'avez eu de cesse de réduire les fractures issues de la guerre d'Algérie, avec l'institution d'une journée nationale d'hommage aux harkis, voulue par le Président de la République, et plus récemment en retenant le 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France de la guerre d'Algérie et des combattants du Maroc et de Tunisie. Cette date a été choisie par toutes les associations du monde combattant représentées dans la commission présidée par Jean Favier, à l'exception d'une seule.

Dès lors, je le souligne, il n'y a aucune raison d'accepter que les autorités civiles et militaires s'associent à des cérémonies à d'autres dates. En clair, ce serait une erreur de laisser les préfets apprécier l'opportunité de s'y rendre ou de s'y faire représenter.

M. Jean-Claude Beauchaud - Ça, c'est la guerre déclarée !

M. Lionnel Luca - Par ailleurs, il reste des oubliés qui ont pourtant chèrement payé leur engagement pour la République : les combattants d'Indochine, qu'ils aient été victimes des Japonais entre 1940 et 1945 ou martyrisés par le vietminh entre 1946 et 1954. Hommage leur sera rendu en 2004 le 7 mai, jour de la bataille de Dien Bien Phu, mais il serait souhaitable que cette commémoration soit pérennisée, faute de quoi ils seront bien les seuls à n'avoir aucune journée du souvenir.

M. Philippe Vitel - Tout à fait !

M. Lionnel Luca - Vous affichez dans votre budget une ambitieuse politique de la mémoire. Celle-ci doit encourager la réalisation du mémorial de la France d'outre-mer à Marseille pour réhabiliter l'_uvre de la colonisation, qui a été trop souvent contestée. La francophonie, qui ne serait pas ce qu'elle est s'il n'y avait pas eu la colonisation, constitue déjà un hommage vivant ; mais les parlementaires de la région PACA comptent dans cette affaire sur le soutien de l'Etat.

Toujours sur le thème de la mémoire, à trois jours de la célébration du trente-troisième anniversaire de la mort du général de Gaulle, on peut se demander si certains ne sont pas tentés de vouloir l'enterrer une seconde fois.

M. Alain Néri - Vous !

M. Lionnel Luca - La parution d'un livre racoleur qui, sous couvert de vérité historique, n'a qu'un souci, celui de salir la mémoire de l'homme qui a rendu l'honneur et la liberté à la France et aux Français, est particulièrement scandaleuse.

Il est assez plaisant que celui qui veut faire du général de Gaulle un raciste sinon un criminel, ait eu jusqu'à présent comme amis politiques bon nombre de ceux qui, en étant les porteurs de valise du FLN ont trahi nos soldats, et se fasse l'allié objectif des nostalgiques de Vichy et de Tixier-Vignancourt (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Maxime Gremetz - Arrêtez !

M. Lionnel Luca - Il n'est d'ailleurs pas innocent que ce livre fasse si aisément référence aux Etats Unis et soit publié quelques mois après que son auteur ait publiquement souhaité que la France soit aux côtés des Etats-Unis en Irak.

Je souhaite que tous les élus de ce pays et les Français se rendent encore plus nombreux devant les stèles et les monuments, le 9 novembre, pour rendre hommage au général de Gaulle qui nous a redonné la fierté d'être français.

M. Maxime Gremetz - Vous le reniez aujourd'hui !

M. Lionnel Luca - Ce n'est pas vous, qui l'avez toujours combattu, qui pouvez donner des leçons ! Lorsque le général de Gaulle est revenu au pouvoir, vous défiliez pour dénoncer le fascisme et le « général factieux ». Un peu de décence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Maxime Gremetz - Nous avons appelé à voter oui au référendum. Il ne faut pas rigoler ! Qu'est-ce que c'est que ce colonialiste ?

M. Lionnel Luca - Et fier de l'être. Se faire insulter par ceux qui ont trahi la France...

M. Jean-Christophe Lagarde - Vous avez choisi dans votre budget, Monsieur le ministre, deux orientations : reconnaître les services rendus, mettre en _uvre des actions de solidarité.

Si l'on peut se féliciter de ces deux axes, on ne peut que regretter la diminution du budget de 3,12 % - 5 % compte tenu de l'inflation. Ne serait-ce que pour ce vice originel, ce budget n'est pas acceptable et nous voterons contre. Le simple maintien des crédits aurait en effet permis de régler un certain nombre de contentieux.

Des mesures vont cependant dans le bon sens, et tout d'abord la revalorisation de 15 points d'indice pour les 130 000 pensions des veuves. Mais si le financement de la décristallisation est bien prévu, je m'indigne de ce que cette décision prise dans le précédent budget n'ait pas reçu d'application en 2003 car le décret d'application n'est sorti que trop tard. Qu'en sera-t-il des 78 millions d'euros des crédits 2003 non consommés ? Seront-ils reportés sur 2004 ?

Par ailleurs, on ne peut que se féliciter de l'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant au titre de la guerre d'Algérie. Vous rétablissez l'équité entre conscrits d'une part et gendarmes et policiers d'autre part, mais la décision prise en faveur de ces derniers par le gouvernement précédent reste à mes yeux une erreur démagogique.

Alors que vous aviez laissé entendre l'an dernier qu'une revalorisation progressive du montant de la retraite du combattant était envisagée, rien de tel ne figure dans le PLF. Vous connaissiez l'attente des anciens combattants à ce sujet. Aussi, nous vous demandons que cette revalorisation intervienne pour qu'à la fin de la législature la retraite du combattant passe de l'indice 33 à l'indice 48.

La situation de l'ONAC, ainsi que des services départementaux qui assurent le service de proximité auquel les anciens combattants sont particulièrement attachés, est critique. Les moyens humains et matériels font en effet défaut dans de nombreux départements.

Le Gouvernement a choisi le 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France des combattants de l'Afrique du Nord. Cette décision constitue une véritable provocation pour la grande majorité des anciens combattants et est en contradiction avec les promesses du candidat Jacques Chirac, lequel s'était engagé en 2000 à ne rien faire sans unanimité. Vous avez envenimé ce problème en voulant l'enterrer et contribuez à ridiculiser l'Etat.

De quel droit cette décision est-elle prise par le Gouvernement sans aucune discussion parlementaire alors même qu'une proposition de loi contraire avait été votée sous la précédente mandature ?

Au nom de quel mépris peut-on imposer un oukase contre la volonté de l'immense majorité des anciens d'AFN, en se cachant derrière une commission où des associations très honorables mais nullement concernées par la guerre d'Algérie étaient appelées à siéger ?

En démocratie, les voix se comptent par tête, par personne, non par groupe ou par association (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Vous allez faire coexister deux dates légitimes, le 19 mars reconnu dans 20 000 villes et villages de France, le 25 septembre qui nous permet enfin d'honorer les harkis comme ils le méritent et une date sans signification, sans histoire, sans valeur - celle du 5 décembre - à tel point que l'on pourrait croire à une mauvaise plaisanterie.

Je conclurai également mon propos par une mauvaise plaisanterie. Celui qui a pris cette décision connaît bien mal la météo française. Le 5 décembre, il fait froid, souvent il pleut ce qui est bien inconfortable pour les commémorations. Je vous invite donc à changer de date et à en choisir une parmi celles que Météo France reconnaît comme étant clémentes en juin, juillet, août. Cela éviterait à ceux qui participent aux commémorations de s'enrhumer.

M. le Rapporteur spécial - C'est scandaleux. Ce dossier mérite d'être traité sérieusement !

M. Jean-Christophe Lagarde - Comme de nombreux élus, je continuerai à être présent le 19 mars. Le 5 décembre, je me souviendrai plutôt de la mort de Claude Monet (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

M. Didier Quentin - Ce budget est bon, puisque l'effort par ressortissant est en hausse de 1,58 %, même si l'on peut regretter que son niveau ne reste pas identique d'une année sur l'autre en euros constants.

Vous mettez en _uvre de nouvelles mesures pour plus de justice et de solidarité, mesures demandées depuis des années par l'ensemble des associations représentatives.

Vous augmentez ainsi de 15 points d'indice les pensions de veuves d'anciens combattants qui seront 130 000 à en bénéficier.

Dans le même esprit, vous étendez l'attribution de la carte du combattant d'AFN à ceux qui ont servi pendant quatre mois et réparez ainsi une profonde injustice. Compte tenu des durées moyennes de séjour, ce sont 15 000 à 20 000 anciens d'AFN qui pourront prétendre à la carte du combattant, pour un coût de trois millions d'euros.

Enfin, vous répondez favorablement à la demande des orphelins de déportés, fusillés et résistants quelle que soit leur origine.

Sur la base du rapport Dechartre, le Premier ministre a pris la décision d'accorder à tous les orphelins des victimes de la barbarie nazie une indemnisation identique à celle dont bénéficient les orphelins juifs.

MM. Jean-Christophe Lagarde et François Rochebloine - Excellente décision.

M. Didier Quentin - Envisagez-vous de donner un effet rétroactif au décret actuellement en préparation ?

M. François Rochebloine - Ce serait une bonne chose.

M. Didier Quentin - Conformément à ses engagements, le Gouvernement a soumis au Parlement le processus de décristallisation des pensions des combattants originaires de l'ancienne Union française.

Je vous serais reconnaissant de bien vouloir nous apporter des précisions sur la mise en _uvre de cette mesure.

Depuis plusieurs années, les anciens combattants demandent une revalorisation progressive des pensions militaires d'invalidité et de la retraite de l'indice 33 à l'indice 48 pour les porter de 420 à 611 € par an. Cette mesure est certes d'un coût élevé : un peu plus de 80 millions d'euros, et nous sommes conscients des contraintes budgétaires. Mais ne pourriez-vous pas la programmer, en plusieurs étapes, sur l'ensemble de la législature ? C'est d'ailleurs l'esprit de l'amendement qui a été défendu en commission par notre collègue Georges Colombier - et que j'ai cosigné - qui vise à amorcer cette revalorisation en passant dès cette année de l'indice 33 à l'indice 36.

M. François Rochebloine - Nous sommes tous d'accord.

M. Didier Quentin - S'agissant du devoir de mémoire, beaucoup d'anciens combattants d'AFN souhaitent l'édification d'un musée qui pourrait se trouver dans le Tarn, et rassembler l'ensemble des documents de cette période douloureuse de notre histoire. Pouvez-vous faire le point sur l'évolution de ce dossier ?

S'agissant de la date de l'hommage officiel de la République aux combattants morts pour la France en Afrique du Nord, vous aviez annoncé une démarche reposant sur la concertation et vous vous y êtes tenu, ce qui contraste avec certaines palinodies passées... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

C'est ainsi que sur la base du rapport de la commission présidée par M. Jean Favier, la date du 5 décembre a été choisie. Cette date doit pouvoir rassembler l'adhésion du plus grand nombre et il serait désolant que des polémiques se poursuivent.

M. Jacques Desallangre - Qui les alimente ?

M. Didier Quentin - Les Français ont suffisamment de sujets de division pour ne pas se déchirer devant les monuments aux morts. J'espère donc que l'esprit d'apaisement prévaudra, d'autant plus que vous avez précisé que les autres dates retenues jusque là, qu'il s'agisse du 19 mars ou du 16 octobre, conserveront leur valeur associative de recueillement.

Ainsi donc, votre budget pour 2004 apporte des réponses à des dossiers prioritaires, toute en faisant un effort particulier en faveur des dépenses sociales de l'ONAC, dont la contribution augmente de 14 % par rapport à 2003.

C'est pourquoi je le voterai volontiers, en vous assurant de mon plus chaleureux soutien pour accompagner votre action auprès du monde combattant (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants - Les interventions que nous venons d'écouter me confortent dans une conviction : celle de l'attention que votre assemblée porte au monde combattant.

Pour beaucoup de nos concitoyens, le monde combattant s'éteint après la disparition des derniers Poilus de la Grande Guerre.

Il est heureux que chacun des orateurs ait rendu compte avec sa sensibilité propre de la vivacité de cette communauté si nécessaire à notre société par les valeurs qu'elle représente, ces valeurs qui ont conduit de nombreux Français jusqu'au sacrifice suprême.

Avoir la charge des actions de l'Etat envers le monde combattant est une bien noble mission, et non une responsabilité « secondaire » comme on pourrait le croire. Exprimer les devoirs de la nation à l'égard des quatre millions et demi d'anciens combattants procède d'une exigence supérieure. Transmettre aux jeunes générations le sens des valeurs qui furent défendues dans les conflits du XXe siècle, c'est un devoir exaltant.

Vos rapporteurs, MM. Bertrand et Beaudouin ont reconnu les avancées que comporte ce projet de budget. Je les en remercie. Je rappelle en revanche à MM. Néri, Gremetz et Desallangre que la réduction inéluctable des moyens ne saurait constituer la seule grille de lecture de ce budget comme des précédents.

M. Jacques Desallangre - C'est ce que disent tous les ministre !

M. le Secrétaire d'Etat - Je regrette sincèrement que cette vision tronquée perdure depuis des années. Comme elle fait peu de cas de l'évolution démographique du monde combattant ! Comme elle ignore les efforts consentis par la nation pour répondre à ses attentes, dont ce budget porte pourtant maints témoignages !

Non, le droit à réparation ne se résume pas à la reconduite, d'année en année, des mesures décidées une fois pour toutes au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Le Gouvernement a une toute autre conception de sa relation avec le monde combattant. M. Colombier a bien voulu le relever, c'est d'abord une relation basée sur l'écoute. Il s'agit de répondre, dans un contexte économique particulier, aux attentes prioritaires.

Mais nous avons aussi voulu, Monsieur Bertrand, participer au mouvement de rationalisation de l'action administrative, qui doit apporter aux citoyens un service plus lisible, plus efficace et si possible moins onéreux pour les finances publiques.

M. Alain Néri - Encore des économies sur le dos des anciens combattants !

M. le Secrétaire d'Etat - Telle est, depuis le début de l'année 2003, l'ambition du contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC, que le précédent gouvernement avait refusé d'agréer alors qu'il permet de pérenniser l'institution.

M. Alain Néri - Alors vous allez accepter notre amendement !

M. le Secrétaire d'Etat - Notre démarche vise à accompagner les évolutions du monde combattant en recentrant l'établissement sur les besoins prioritaires qui s'expriment désormais en termes de solidarité et de mémoire.

Les faits ont donné tort à ceux qui, il y a un an, annonçaient la disparition prochaine de l'ONAC. L'ONAC est bien là, il applique le contrat d'objectifs et de moyens, voté à la majorité de 83 % par son conseil d'administration, et dont la mise en _uvre se poursuivra jusqu'en 2007. C'est seulement à cette date, Monsieur Charasse, que l'on pourra en dresser un bilan définitif. Cela peut faire sourire, mais c'est ainsi.

Au terme de la première année, les résultats sont encourageants. Tout indique donc que le bilan final sera positif.

M. Alain Néri - On verra en temps utile !

M. le Secrétaire d'Etat - La nomination à la tête de l'ONAC d'un nouveau directeur général...

M. Alain Néri - Qui n'est plus issu du ministère de la défense !

M. le Rapporteur spécial et M. le Rapporteur pour avis - C'est un fonctionnaire !

M. le Secrétaire d'Etat - ...dont les compétences et l'expérience sont indiscutables, apporte à cet égard les meilleures garanties.

Nous avons aussi cherché à simplifier l'action locale de l'Etat, dans le domaine de la mémoire. La superposition des intervenants sur trois niveaux entraînant une certaine confusion, il fallait rationaliser le dispositif. Les actions en matière de mémoire locale procéderont désormais principalement des services départementaux de l'ONAC, conformément à son contrat d'objectifs et de moyens.

Cette volonté de rationaliser, de dynamiser, de moderniser l'action de l'Etat en faveur du monde combattant s'exprime sans compromis à l'égard de son identité, comme l'illustre la structure retenue dans le cadre de la LOLF. Un programme spécifique sera dédié au monde combattant. Il se déclinera en « actions » dans les domaines de la réparation, de la reconnaissance et de la mémoire.

Une action relative à la politique de mémoire figure également dans le programme consacré à la relation Défense-société.

J'en viens à la substance même de ce budget.

Comme vos rapporteurs, ainsi que MM. Colombier, Luca et Quentin, l'ont indiqué, il procure à chaque ressortissant une augmentation de 1,58 % des droits individuels. C'est sensiblement mieux qu'en 2003 où la progression était déjà de 0,68%.

M. Alain Néri - Vous ne pouvez pas dire cela !

M. le Secrétaire d'Etat - Mais il comporte surtout des mesures nouvelles.

Tout d'abord, une mesure de justice : l'augmentation de 15 points des pensions des veuves de guerre, veuves d'invalides et veuves de grands invalides.

Ensuite, une mesure d'équité : l'octroi à l'ensemble des militaires ayant servi en Afrique du Nord de la carte du combattant pour quatre mois de séjour sur ces théâtres d'opérations, revendication ancienne que le précédent gouvernement s'était bien gardé de satisfaire.

M. Alain Néri - Demandez aux anciens combattants ce que nous avons fait pour la carte du combattant !

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est prêt à examiner la question de la date butoir.

Enfin, une mesure de solidarité : l'inscription au budget de l'ensemble des crédits sociaux de l'ONAC. Mais ces trois mesures ne rendent pas compte de la totalité de l'effort de la nation envers le monde combattant (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Comme en 2003, nous poursuivrons la modernisation de ces deux piliers emblématiques que sont l'Office national des anciens combattants et l'Institution nationale des Invalides. Je ne reviens pas sur le premier. Pour ce qui concerne le second, nous proposons une augmentation de la subvention de l'Etat, pour revenir au niveau de 2001 afin d'accompagner la démarche de modernisation engagée par l'Institution.

Deux mesures importantes ont été commentées par l'ensemble des intervenants. La première figurait en tant que « mesure nouvelle » au budget 2003 : il s'agit de la décristallisation. Tous les textes, Monsieur Quentin, sont désormais publiés et applicables, et les crédits sont disponibles. Quant au retard, il n'est pas d'une année, mais de quarante ans (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. Didier Quentin - C'est vrai !

M. Alain Néri - Qui a cristallisé les pensions ?

M. le Secrétaire d'Etat - Quelques mois ont été nécessaires pour élaborer les textes d'application de la loi. Mais cette décision vient après quarante années d'espérances déçues, y compris par vous, et je ne citerai pas certaines interventions venant de vos bancs qui ne laissaient aucun espoir (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Néri - Ne dites pas n'importe quoi !

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis fier d'appartenir au Gouvernement qui a pris cette décision.

Je me dois de revenir aussi sur la question de l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie.

Vous vous êtes mobilisés pour obtenir en leur faveur un traitement équitable. Il y a tout juste un an, M. Gremetz avait fait adopter à l'unanimité un amendement demandant au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport sur ce sujet avant le 1er septembre 2003. Non seulement ce délai a été tenu, mais nous sommes allés au-delà d'une simple présentation juridique de la situation.

Par un courrier adressé au Président de votre Assemblée, le Premier ministre vous a informés de sa décision d'instituer, au bénéfice des orphelins des victimes de la barbarie nazie, un régime de réparation identique à celui instauré par le décret du 13 juillet 2000 pour les orphelins des déportés de la Shoah (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe UDF et sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

Les interrogations qui entourent le calendrier de mise en _uvre de cette mesure sont légitimes. Il faudra en effet définir le périmètre des bénéficiaires. Le Premier ministre m'a chargé de cette mission. Je ferai en sorte que le décret d'application soit publié au plus vite. Permettez-moi de vous rappeler les principaux progrès accomplis au cours des seize derniers mois : décristallisation, prise en charge des cures thermales, relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste, création de l'observatoire de la santé des vétérans, aide à la détection des névroses traumatiques de guerre, modernisation de l'ONAC et de l'INI, majoration des pensions des veuves, harmonisation de l'attribution de la carte AFN, indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie, choix d'une date d'hommage aux morts de la guerre d'Algérie - même si elle ne correspond pas aux v_ux de certains d'entre vous, elle met fin à la polémique (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Néri - Ah, non, ce n'est pas fini !

M. le Secrétaire d'Etat - ...enfin inscription au budget de tous les crédits sociaux de l'ONAC. Nous avons ainsi apporté des réponses concrètes à des revendications très anciennes du monde combattant.

Certes, vous avez regretté que l'augmentation de la retraite du combattant ne figure pas dans ce projet de budget.

D'autres choix ont prévalu (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Nous vous avons expliqué l'an dernier que notre méthode s'appuie sur deux piliers, la concertation et la planification, et nous continuerons ainsi (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

Certains intervenants ont regretté que le dispositif du rapport constant n'ait pas été simplifié. Je me suis engagé à ce qu'un modèle plus lisible vous soit présenté dans les délais les plus courts.

Je ne peux pas conclure sur le thème de la réparation sans m'exprimer sur un sujet qui mobilise les députés alsaciens et mosellans, l'indemnisation des RAD-KHD. Le dialogue qui s'est instauré, à mon initiative, entre les parlementaires et les dirigeants de la fondation de l'entente franco-allemande a conclu que la France, n'étant pas à l'origine du préjudice, ne saurait être impliquée dans une éventuelle indemnisation.

Cependant, nous ferons tout pour aider les deux parties à trouver un terrain d'entente sur cette question douloureuse.

Enfin, Monsieur Colombier, les attentes des réfractaires au STO me semblent effectivement mériter un examen nouveau. J'espère que nous pourrons aboutir à une solution positive.

M. Georges Colombier - Merci beaucoup !

M. le Secrétaire d'Etat - J'en viens maintenant à la mémoire, mission prioritaire pour l'Etat.

Nous multiplions les initiatives destinées à répondre notamment aux interrogations de la jeunesse et à lui proposer des modèles de référence dans une société où les repères font souvent défaut.

C'est par exemple le sens des « relais de la mémoire » que nous avons organisés le 18 juin dernier, sur le thème de la modernité des valeurs de la Résistance.

Tout au long de l'année 2004, cette dynamique de la mémoire s'exprimera autour de trois événements principaux : le 90e anniversaire de la bataille de la Marne, le 60e anniversaire du débarquement de Normandie et de Provence et de la libération du territoire, enfin le 50e anniversaire de la bataille de Dien Bien Phu. A ce propos, Monsieur Luca, je suis ouvert au principe d'une journée d'hommage spécifiquement consacrée aux anciens d'Indochine (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP).

Parallèlement, nous progresserons sur trois grands chantiers muséographiques : le nouveau musée d'Auschwitz, sur lequel travaille une commission de spécialistes, le mémorial de Schirmeck et le centre européen de la déportation du Struthof, dont j'ai posé les premières pierres cette année.

Dans le même esprit, différentes initiatives visent à ouvrir davantage les questions de mémoire sur la société civile.

Dans quelques jours, je signerai les deux premiers accords de « mémoire partagée » avec l'Australie et la République de Corée. Le tourisme de mémoire, s'il est convenablement valorisé, captera l'attention de nos compatriotes, mais également de nombreux étrangers. En ce qui concerne la collecte de la mémoire orale, Monsieur Quentin, nos efforts se concentrent désormais sur la guerre d'Algérie.

A ce propos, la politique de mémoire, c'est aussi la recherche de l'unité dans l'hommage dû aux morts (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et sur les bancs du groupe UDF).

M. Alain Néri - Bravo ! C'est réussi !

M. le Secrétaire d'Etat - Pour la guerre d'Algérie, plusieurs orateurs se sont exprimés sur le choix du 5 décembre. Je remercie ceux qui ont salué la démarche suivie par le Gouvernement avec les associations.

M. Jean-Pierre Kucheida - Godillots ! C'est de la trahison !

M. le Secrétaire d'Etat - Je n'ai jamais trahi. Lisez ma biographie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Je le dis en toute objectivité à MM. Rochebloine et Lagarde, j'ai la conviction que le 5 décembre, seule référence officielle, rallie déjà le plus grand nombre. Je le constate dans tous les départements (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et sur les bancs du groupe UDF)

Et, quoi de plus naturel, puisque cette date résulte d'une démarche de concertation et d'unité ? Toutes les associations représentatives ont été consultées. Vous me parlez de celle qui prône une autre date : j'ai reçu son président sept fois (« Et alors ? » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et sur les bancs du groupe UDF).

M. le Secrétaire d'Etat - La commission Favier, qui a travaillé plusieurs semaines sur ce sujet, s'est prononcée, par dix voix sur douze, pour le choix du 5 décembre (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains, ainsi que sur les bancs du groupe UDF).

Vous dénoncez ce choix, mais c'est tourner le dos à ceux qui ont sacrifié leur vie et sont inscrits sur le fronton du mémorial !

Le débat au sein de la commission Favier a réuni ceux qui étaient pour le 5 décembre comme ceux qui étaient contre.

M. Jean-Christophe Lagarde - Et l'Assemblée alors ?

M. le Secrétaire d'Etat - L'hommage aux morts pour la France ne peut être symbole de division. On ne peut avoir des différends devant un monument aux morts quand on a été ensemble dans l'adversité.

M. Didier Quentin - Il a raison !

M. le Secrétaire d'Etat - Je voudrais conclure en disant mon admiration pour le monde des anciens combattants.

En étant moi-même issu, je pensais bien le connaître. Pourtant, j'ai découvert des facettes méconnues de sa générosité. Je citerai cette école, que j'ai visitée au Vietnam, fondée par des anciens prisonniers français du viethminh, ou encore l'initiative d'une grande association qui finance une campagne contre les mines anti-personnel en Casamance.

Nous avons, nous aussi, cherché à donner une utilité internationale aux actions de l'Etat en direction du monde combattant. C'est le sens de la mission confiée par le Premier ministre à votre collègue M. Morel-A-L'Huissier, sur le thème de la reconversion du combattant dans les pays en sortie de crise.

Voilà notre politique moderne, volontariste, tournée vers l'extérieur, conforme à l'exemple des anciens combattants. Après avoir tant donné pour la France, ils témoignent encore d'un indéfectible attachement à la collectivité nationale.

Les actions que nous menons ne sont pas toujours spectaculaires, elles ne font pas les manchettes des journaux. Mais elles correspondent aux attentes du monde combattant et c'est l'essentiel (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. François Rochebloine - Et les réponses à nos questions ?

M. Maxime Gremetz - Je demande une brève suspension de séance pour m'entretenir, après le discours du Gouvernement, avec les représentants des associations d'anciens combattants ici présents, car je ne veux pas prendre seul ma décision quant au vote du budget (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Je vous l'accorde, mais il ne nous reste que peu de temps si nous voulons achever l'examen des crédits dans la matinée et épargner aux représentants des associations de revenir cet après-midi.

La séance, suspendue à 11 heures 45, est reprise à 11 heures 55.

QUESTIONS

M. Lucien Guichon - Le budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants pour 2004 présente une mesure de réparation attendue, celle de l'indemnisation des orphelins de la barbarie nazie, calquée sur celle dont bénéficient, depuis le décret du 13 juillet 2000, les orphelins des victimes des persécutions antisémites.

Je me réjouis de cette mesure de justice et d'équité à l'égard de ces orphelins de tous les déportés, fusillés et massacrés par les nazis, victimes hélas nombreuses dans l'Ain que je représente.

Pourriez-vous préciser les critères d'éligibilité de ces ressortissants à l'indemnisation ? Les orphelins d'un Mort pour la France seront-ils les seuls indemnisables ? A quelle date l'indemnisation pourra-t-elle être mise en _uvre ?

M. le Secrétaire d'Etat - Votre préoccupation est partagée par tous ceux qui sont attachés au principe d'équité, défendu par le Premier ministre.

Les travaux ont été lancés, nous ferons la plus grande diligence possible, mais nous ne pouvons préjuger du délai qui sera nécessaire. En tout état de cause, nous ferons en sorte qu'aucune nouvelle injustice ne se substitue à celle que nous voulons supprimer.

M. Thierry Mariani - Le décret du 13 juillet 2000 écarte les orphelins de parents non juifs morts en déportation ainsi que ceux de parents fusillés ou massacrés par les nazis sur le territoire national.

Il n'est pas tolérable de créer ainsi des distinctions entre les victimes des mêmes exactions. C'est pourtant ce que le précédent gouvernement a fait, par maladresse.

L'an dernier, Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez confié une mission de réflexion à M. Philippe Dechartre. Un nouveau dispositif d'indemnisation doit être prochainement examiné, et je me réjouis que le Premier ministre souhaite indemniser tous les orphelins victimes de la barbarie nazie. Confirmez-vous que tous les orphelins de déportés et de fusillés seront indemnisés ? J'associe à ma question la Fédération nationale des fils de morts pour la France.

M. le Secrétaire d'Etat - Il y avait une iniquité à corriger. Dès sa constitution, le Gouvernement à demandé à M. Philippe Dechartre de lui remettre un rapport, ce qui a été fait après l'audition des catégories concernées. Le Premier ministre, tout en reconnaissant la légitimité des mesures prises dans le décret du 13 juillet 2000, a souhaité mettre fin à l'iniquité constatée. Nous travaillons à définir le périmètre de l'indemnisation et nous nous efforçons d'aller le plus vite possible.

M. Pierre Lasbordes - Dans un souci d'équité, le Gouvernement a décidé d'harmoniser les conditions d'attribution de la carte du combattant d'AFN, en exigeant une présence minimale de quatre mois dans tous les cas. Je ne peux que me féliciter de cette décision qui mettra fin à de vieux contentieux.

Mais il demeure une revendication sur les dates butoir retenues pour le Maroc et la Tunisie, qui sont respectivement le 20 mars et le 2 mars 1956. Il est toujours difficile de déterminer la fin d'un conflit. Pour l'attribution de la médaille commémorative des opérations de maintien de l'ordre au Maroc et en Tunisie, la date retenue est celle du 5 mai 1958. Il y a eu, en effet, aux frontières algéro-marocaines et algéro-tunisiennes, des accrochages bien après 1956. J'évoquerai pour mémoire la bataille de Bizerte en 1961.

Il y a eu, en effet, aux frontières algéro-marocaines et algéro-tunisiennes, des accrochages bien après 1956. J'évoquerai pour mémoire la bataille de Bizerte en 1961.

Quelle est la position du Gouvernement ?

M. le Secrétaire d'Etat - L'essentiel était d'harmoniser les conditions d'attribution de la carte du combattant. Quatre mois seront désormais exigés pour tout le monde.

S'agissant de la date butoir, le Gouvernement a l'intention de proposer celle du 2 juillet 1962 pour l'ensemble des combattants des trois territoires (« Très bien ! » sur plusieurs bancs).

M. Jean-Pierre Kucheida - Monsieur le secrétaire d'Etat, la région Nord-Pas-de-Calais a souffert le martyre pendant le premier conflit mondial. Des exactions inimaginables y ont été commises. Le château de Concy a été dynamité, les vergers rasés, les mines ennoyées.

En 1940, le Nord-Pas-de-Calais a de nouveau souffert de manière effroyable. La moitié des soldats français tués pendant la campagne de France sont tombés dans ma région.Votre prédécesseur Louis Mexandeau avait ranimé la mémoire de ces évènements. Je rappelle que ma région fut détachée de la France et rattachée à la kommandantur de Bruxelles, ce qui a provoqué très tôt une résistance populaire active à laquelle a répondu une répression féroce. Il y eut des milliers d'exécutions. C'est là que la lutte armée contre l'occupant a commencé. Or cette résistance première, antérieure même à celle de Jean Moulin, reste totalement inconnue. C'est un scandale d'Etat ! Je demande que vous fassiez un effort pour réparer ce déni de mémoire.

M. le Secrétaire d'Etat - Je ne peux qu'être d'accord avec vous.

Tous ceux qui ont défendu le pays, allant jusqu'au sacrifice suprême, doivent être regardés avec le plus grand respect. En seize mois, je me suis rendu dans 58 départements pour leur rendre hommage, et je suis notamment allé dans le Nord-Pas-de-Calais. Je souhaite que les élus s'associent à nous pour mettre en relief tout ce que le monde combattant peut transmettre aux jeunes générations. Je ne peux que souhaiter la valorisation de ceux qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes.

M. Jean-Pierre Kucheida - Avec quels moyens ?

M. René Rouquet - La plupart de mes collègues, y compris à droite, ont regretté la faiblesse de ce budget, qui a baissé de 24 millions en deux ans.

Je veux insister sur un problème symbolique qui montre le manque de cohérence entre vos discours et vos actes : la décristallisation des pensions. Quel fossé entre les annonces qu'on peut lire sur le site du secrétariat d'Etat et la réalité ! Nous avons dû attendre l'avant-veille de ce débat pour que soit publié le décret d'application.

La ficelle est un peu grosse, et une telle pirouette ferait rire si elle ne constituait pas une insulte aux anciens combattants. Je vous demande d'expliquer à la représentation nationale et au monde combattant les raisons d'un tel contretemps. Selon quel calendrier les 75 millions votés pour 2003 seront-ils versés ? Et que comptez-vous faire en 2004 ?

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis étonné que le contenu du texte ne soit pas connu de vous. Rien n'est perdu, puisque le dispositif est rétroactif !

La difficulté était d'ordre technique, s'agissant d'une mesure applicable aux ressortissants de vingt-trois pays. Mais les intéressés n'ont à craindre aucune perte financière. Il y aura simplement une déchéance quadriennale.

Les 72 millions votés initialement, auxquels se sont ajoutés 3 millions ensuite, sont des crédits évaluatifs.

M. Alain Néri - C'est pour cela que vous ne prévoyez rien pour 2004 !

M. Jean-Claude Beauchaud - Interrogé par les associations sur les crédits destinés à la politique de mémoire, j'ai compulsé les documents à ma disposition, en commençant, Monsieur le secrétaire d'Etat, par la plaquette que vous nous avez fait parvenir. J'y ai trouvé l'annonce d'un total de 23 millions.

Je me suis donc reporté au fascicule budgétaire, à la recherche de mesures nouvelles : je n'y ai rien trouvé. J'ai ensuite cherché dans l'agrégat 22 « Mémoire et solidarité, ONAC » : j'ai constaté la baisse des interventions publiques. Reprenant alors le rapport spécial de la commission des finances de l'année dernière, j'y ai trouvé que les crédits 2003 consacrés à la mémoire s'élevaient à 14,259 millions, mais surtout, j'ai constaté avec plaisir que le rapporteur spécial déplorait que la nomenclature budgétaire fût inadaptée, et notamment que la mémoire ne fût l'objet d'aucune identification par agrégat. Je ne pourrais mieux dire ! Il soulignait aussi que les crédits relevant du ministère de la défense étaient complètement noyés dans des articles généraux.

Le modeste parlementaire que je suis ne se retrouvant pas dans cette absconse présentation, j'aurais besoin, Monsieur le secrétaire d'Etat, de votre éclairage. Quel est le montant exact des crédits qui seront affectés à la mémoire en 2004 ? Comment se décomposent-ils ? Quelles sont les mesures nouvelles qui justifient l'écart avec l'année passée et qui vous permettent de qualifier ce projet d' « exceptionnel » pour la politique de mémoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Secrétaire d'Etat - La mémoire est l'une de nos principales missions, mais une bonne partie des crédits est inscrite au budget de la défense. Ne l'ayant pas sous les yeux, je ne peux pas vous donner la répartition exacte (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), mais, en reprenant les documents vous pourrez vous-même identifier, à la virgule près, les crédits inscrits tant au titre III qu'au titre IV (Mêmes mouvements).

M. Alain Néri - On n'a jamais vu ça !

M. Gilles Artigues - Nous nous réjouissons des avancées que comporte ce budget en direction des veuves, mais il faut aller plus loin car elles aussi méritent la reconnaissance de la nation. Entendez-vous réévaluer les rentes mutualistes qui font l'objet d'une réversion ?

M. le Secrétaire d'Etat - Les rentes nées de contrats souscrits par les veuves font l'objet d'une majoration, mais celle-ci ne saurait être appliquée lorsque le contrat avait été souscrit par leurs maris. En revanche, dans le cas où ceux-ci auraient opté pour la formule du capital réservé, le remboursement du capital est exonéré des droits de succession.

M. Gilbert Gantier - La date du 5 décembre a été choisie pour rendre hommage aux morts pour la France lors de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie. Plusieurs associations ont déjà manifesté leur intention de faire du 19 mars une autre journée du souvenir. Il serait indigne de la part des responsables politiques d'alimenter une polémique ; comment dans ces conditions, Monsieur le ministre, comptez-vous gérer cette double commémoration d'une page douloureuse de notre histoire ?

Plusieurs députés socialistes - Et le Parlement ?

M. le Secrétaire d'Etat - Nous ne parlerions pas de cela si le gouvernement précédent avait été jusqu'au bout du processus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Néri - Rien ne vous empêche d'inscrire le texte à l'ordre du jour du Sénat !

M. le Secrétaire d'Etat - Notre pays va enfin rendre hommage aux anciens combattants morts pour la France en Afrique du Nord. La commémoration sera organisée par les pouvoirs publics le 5 décembre, et je ne doute pas que ce sera une grande journée de rassemblement. Mais nous sommes dans un pays de liberté ; les associations pourront donc continuer de retenir également d'autres dates.

Quarante ans après la fin de la guerre d'Algérie, le temps ne doit plus être aux divisions. Je me refuse pour ma part à poursuivre dans la polémique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe UDF).

M. Gilbert Gantier - Très bien !

Plusieurs députés socialistes - C'est vous qui l'alimentez !

M. Pierre-Christophe Baguet - Au nom de l'UDF, Charles de Courson et moi-même avions, l'année dernière, interpellé le Gouvernement à plusieurs reprises sur l'injuste discrimination opérée entre orphelins des victimes de la barbarie nazie. L'amendement que nous avions déposé au projet de loi de finances, identique à celui de notre collègue Gremetz, avait été adopté à l'unanimité, mais hélas il fut écarté lors de la discussion au Sénat.

A la suite des conclusions du rapport que vous aviez demandé à Philippe Dechartre, le Premier ministre a annoncé le 2 septembre dernier qu'il étendrait le dispositif d'indemnisation. Forts de cette décision, nous avons déposé un amendement au PLF 2004, tendant d'une part à définir le périmètre de la mesure et d'autre part à prévoir une inscription budgétaire sous une forme ou sous une autre dès cette année ; mais votre collègue du Budget nous a renvoyés à la création d'une commission. Pourtant le temps presse... Nous ne saurions attendre le PLF 2005 (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe socialiste).

M. le Secrétaire d'Etat - Le Premier ministre a pris une décision, mais il faut attendre les conclusions du travail juridique qui vient d'être engagé, afin de ne pas créer par des oublis de nouvelles injustices. Nous sommes évidemment ouverts à toutes les suggestions.

M. Pierre-Christophe Baguet - Faites inscrire des crédits en 2004, même symboliquement !

M. Yannick Favennec - Je me réjouis que ce projet réponde à des attentes légitimes sur plusieurs points importants. Toutefois, de nombreuses associations regrettent que certaines de leurs demandes n'aient pas encore pu être satisfaites.

Le décret du 11 janvier 2002, portant simplification administrative en matière de pensions militaires d'invalidité, a mis fin à l'allocation provisoire d'attente. Quelles dispositions comptez-vous prendre pour remédier aux conséquences de cette mesure ?

De plus, le remboursement de la taxe sur les contrats d'assurance automobile souscrits par les amputés de guerre étant supprimé, une solution rapide et équitable pourrait-elle être trouvée ?

M. le Secrétaire d'Etat - Le code des pensions militaires d'invalidité prévoit le versement d'une indemnité temporaire avant qu'il soit statué définitivement sur la demande.

Compte tenu de l'afflux des demandes après la seconde guerre mondiale et de la durée de leur traitement eu égard aux moyens techniques d'alors, une allocation d'attente fut mise en place. Aujourd'hui, ces raisons historiques et techniques n'existant plus, elle a été supprimée.

Quant à la suppression du remboursement de la taxe sur les contrats d'assurance automobile, elle a été décidée par le précédent gouvernement. Il faut envisager avec prudence la réouverture du dossier, car il ne faudrait pas que le retour à la situation antérieure se traduise par une augmentation importante des primes d'assurance. Néanmoins, je suis prêt à examiner la question avec mon collègue chargé du budget.

M. Pierre Lasbordes - Les associations demandent depuis longtemps que la retraite du combattant soit portée de 33 à 48 points d'indice. Certes, le coût d'une telle revalorisation est important, puisque l'augmentation d'un seul point coûte 16 millions.

Vous avez choisi de privilégier le règlement de la situation des veuves pensionnées et de l'indemnisation des orphelins non juifs dont les parents ont été victimes du nazisme, et je m'en félicite.

Cependant, la retraite du combattant constitue un acte fort de reconnaissance. Lors de la discussion du PLF de 2003 vous m'aviez d'ailleurs rappelé que le Gouvernement et vous-même vous en préoccupiez. Vous serait-il possible de donner des précisions quant à un éventuel calendrier de revalorisation ?

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement n'a aucune objection de principe à la revalorisation de la retraite du combattant, mais il se doit de satisfaire d'abord les attentes prioritaires du monde combattant.

M. Jacques Desallangre - Nous n'avons pas dû l'entendre exprimer les mêmes priorités !

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement demeure attaché à cette mesure, qui ne pourra cependant être appliquée que progressivement, à raison de deux ou trois points par étape, ce qui représente tout de même plus de 50 millions. Il faudra faire des choix.

M. Marc Le Fur - Je vous félicite pour les mesures courageuses que vous avez prises... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Alain Néri - Il n'y en a pas beaucoup.

M. Marc Le Fur - ...en ce qui concerne l'attribution de la carte du combattant. Je suis convaincu que cette mesure sera appréciée dans les Côtes d'Armor, département dont je suis l'élu.

En effet, le critère des douze mois de présence en AFN n'était plus compris, dans la mesure où les policiers et les CRS pouvaient bénéficier de la carte à partir de quatre mois. De plus, un grand nombre d'anciens combattants sans carte venaient discrètement aux cérémonies commémoratives, dont ils se sentaient jusqu'à présent exclus.

Je voudrais savoir quel sera le nombre des bénéficiaires de cette mesure, tant sur le plan national, que dans les Côtes d'Armor.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement a obéi à un souci d'harmonisation des conditions. Dans les Côtes d'Armor, un millier de personnes devraient bénéficier de cette mesure ; sur le plan national, elles seront entre 12 000 et 15 000. Les cartes seront attribuées à partir de 2004 par les services départementaux de l'ONAC.

Mme Claude Darciaux - Je regrette que vous n'ayez pas fait de la revalorisation de la retraite du combattant un choix prioritaire, alors que votre budget est en baisse de 7 % depuis deux ans et que certaines lignes budgétaires nous semblent, qui plus est, insincères.

Les crédits alloués au fonds de solidarité passent ainsi de 50 à 40 millions, alors que la majorité des combattants d'AFN a dépassé l'âge de 60 ans et que leur régime actuel basculera dans le régime de la retraite professionnelle. Une grande partie de cette ligne budgétaire ne sera donc pas utilisée et restera donc dans les caisses de l'Etat. Il en est de même de la majoration de la ligne budgétaire concernant la rente mutualiste. Les sommes non dépensées ne pourraient-elles servir à revaloriser la retraite du combattant, qui s'élève actuellement à 423 € par an ? En 2002, elle n'avait été augmentée que de 33 centimes d'euros, ce qui est indécent.

Nous demandons que la revalorisation de 15 points d'indice, réclamée par le monde combattant, soit effective au terme de la législature. La reconnaissance de la nation à ses anciens combattants ne doit pas être un v_u pieux. Quelles mesures envisagez-vous de prendre pour réparer une injustice ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement n'a pu retenir parmi ses priorités la revalorisation de la retraite du combattant.

Je précise au passage qu'il ne s'agit pas d'une retraite au sens habituel du terme.

M. Alain Néri - C'est vrai, mais cela ne change rien sur le fond !

M. le Secrétaire d'Etat - Néanmoins, la légitimité de cette revendication reste entière, et le Gouvernement, je l'ai dit, tient à lui apporter une réponse. Le passage de 33 à 48 points ne sera possible que dans le cadre d'une planification et d'une concertation.

M. Alain Néri - Vous avez déjà perdu deux ans !

M. le Secrétaire d'Etat - Une augmentation de cinq points de l'indice coûterait 80 millions. Nous poursuivons la concertation avec les différents acteurs, et je ne doute pas que cette mesure figure parmi les priorités retenues (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Je ne décide pas seul ! Soit on accepte la concertation, soit on ne l'accepte pas. Si on l'accepte, il faut la respecter ! (Mêmes mouvements)

Mme Nathalie Gautier - Alors que le devoir de mémoire doit rester une priorité, la création de 100 postes d'assistants-mémoire prévus en remplacement des actuels emplois-jeunes s'étalera jusqu'en 2007. En 2004, seuls 67 assistants-mémoire prendront leurs fonctions.

Ainsi, de nombreux services départementaux de l'ONAC connaîtront une vacance de poste dans les services des archives, ce qui paralysera le travail de classement et retardera le lancement de la collecte des témoignages des anciens combattants d'AFN.

De plus, aucun crédit n'est destiné à l'attribution de matériels supplémentaires pourtant nécessaires au regroupement de ces témoignages.

Dans ces conditions, pouvez-vous indiquer les conditions dans lesquelles se poursuivra ce travail de mémoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Secrétaire d'Etat - Je l'ai dit, la mémoire est une priorité. Aussi essaierons-nous d'harmoniser les conditions de travail des organismes qui sont chargés de la recherche, du recueil et de la stabilisation de cette mémoire. Quant à l'ONAC, son conseil d'administration s'est réuni avant-hier pour examiner le budget 2004 et l'adaptation des effectifs au contrat d'objectifs et de moyens. Cela s'est passé dans la plus grande cordialité. Les choses se mettent en place dans les départements, dans l'esprit du contrat d'objectifs et de moyens.

M. Alain Néri - Un esprit de réduction !

M. le Secrétaire d'Etat - On nous avait prédit les pires difficultés pour l'ONAC. Or l'office travaille aujourd'hui dans d'excellentes conditions et procède à une extraordinaire innovation en matière de mémoire et de solidarité.

M. Alain Néri - C'est la méthode Coué !

Mme Chantal Robin-Rodrigo - La représentation nationale a débattu en janvier 2002 de la date la plus appropriée pour honorer le souvenir de tous ceux qui sont morts pour la France en Afrique du Nord entre 1952 et 1962, qu'ils soient civils ou militaires et quelle que soit la date de leur décès. Notre assemblée a entériné à une majorité de 278 voix contre 204 la date du 19 mars.

M. Jean-Pierre Grand - C'est celle du FLN !

Mme Chantal Robin-Rodrigo - Les représentants du peuple ayant tranché, il vous appartenait de faire voter le Sénat ou d'en finir avec cette question, en réconciliant le monde combattant et en permettant à nos concitoyens de disposer d'une journée officielle pour honorer ses enfants morts pour la patrie...

M. Bernard Carayon - En vingt ans, vous auriez pu le faire !

Mme Chantal Robin-Rodrigo - ...qu'ils soient appelés du contingent, militaires de carrière, harkis ou pieds-noirs.

La date du 19 mars est une date historique : c'est celle de la signature des accords d'Evian par le général de Gaulle et de la proclamation du cessez-le-feu.

M. Jean-Pierre Grand - Et les 200 000 harkis qui sont morts après ?

M. Alain Néri - De Gaulle, réveille-toi !

M. Jean-Pierre Kucheida - Ce sont des soi-disant gaullistes !

Mme Chantal Robin-Rodrigo - J'ignore d'autant moins qu'il y a eu après cette date de terribles massacres que je suis fille de militaire de carrière et que mon père s'est battu en Algérie ! (Interruptions sur plusieurs bancs du groupe UMP)

La première guerre mondiale a-t-elle pris fin le 11 novembre, et la seconde le 8 mai ?

En confiant à la commission Favier le soin de décider de cette date, vous avez fait fi de la représentation nationale. En entérinant le choix du 5 décembre, jour de l'inauguration du mémorial national par le Président de la République, date de convenance sans la moindre valeur historique, (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP), vous avez commis une faute impardonnable. C'est une insulte aux anciens d'Afrique du Nord, qui ont droit comme les autres générations du feu à une date historique et symbolique. Cette date ne peut être que le 19 mars (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. Bernard Carayon - La honte et le déshonneur ! Vous vous moquez des harkis !

Mme Chantal Robin-Rodrigo - Plus de 20 000 communes commémorent déjà le 19 mars. Instant privilégié du devoir de mémoire, la commémoration renforce les liens entre générations. Je vous le demande donc solennellement au nom de tous ceux qui sont morts pour la France dans cette terrible guerre : allez-vous abroger ce décret et revenir à la raison en demandant non pas à une commission Théodule (Protestations sur les bancs du groupe UMP), mais aux représentants du peuple, de se déterminer ? Vous vous grandiriez en accomplissant cet acte de devoir et de courage (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Louis Dumont - M. Favier n'est médaillé que de Monaco !

M. le Secrétaire d'Etat - Je ne peux laisser dire des choses aussi graves, ni couvrir d'invectives l'historien de grande renommée qu'est Jean Favier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Je me suis déjà longuement expliqué sur ce sujet, mais permettez-moi de vous lire une citation : « Il ne s'agit pas de décider qu'une date doit être officialisée pour célébrer le souvenir des victimes de la guerre d'Algérie. Tout en laissant les partenaires de la conférence nationale en débattre, cela à mes yeux ne peut être le 19 mars, parce qu'il y aura confusion dans la mémoire de notre peuple ». Est-ce un membre de la majorité qui s'exprime ainsi ? Pas du tout : c'est François Mitterrand (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP), le 24 septembre 1981 ! Le bon sens n'a pas de couleur ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Francis Hillmeyer - Il y a un an, j'appelais votre attention sur les anciens incorporés de force dans les RAD-KHD, dont la souffrance est méconnue depuis bientôt soixante ans.

Vous avez fait preuve de bonne volonté en rencontrant à Strasbourg les parlementaires alsaciens et mosellans et le président de la fondation Entente franco-allemande. Vous avez ainsi pris la mesure du problème, plus important par le symbole et la reconnaissance que par les sommes en jeu.

Vous avez dit que la France n'étant pas à l'origine du préjudice subi ne saurait être impliquée dans la procédure d'indemnisation. Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas d'accord. La France a laissé tomber l'Alsace dans ces années. Ce coin de France où toutes les associations communient dans la même ferveur autour des monuments aux morts a toujours servi de tampon avec l'Allemagne. Ces personnes, essentiellement des femmes, ont été forcées à travailler dans des usines d'armement au péril de leur vie. Elles sont de moins en moins nombreuses : bientôt il n'y aura plus personne à indemniser. Serez-vous le ministre qui réparera cette injustice historique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. le Secrétaire d'Etat - Cette question me tient à c_ur. Aussi ai-je réuni en Alsace les parlementaires alsaciens et mosellans pour trouver un accord entre la fondation Entente franco-allemande et les RAD-HKD.

La France n'a pas à indemniser des dommages qui ne sont pas de son fait, et la majorité des parlementaires alsaciens partage cet avis. J'ai reçu la semaine dernière le président de la fondation Entente franco-allemande ; nous nous efforcerons de faire indemniser le préjudice par la fondation. Son statut mêlant droit français et droit allemand, la procédure est compliquée. Mais une solution est à l'étude, et nous ferons tout pour qu'elle aboutisse.

M. François Rochebloine - Très bien !

M. Jean Dionis du Séjour - Je salue la parole tenue par votre décision d'attribuer la carte du combattant AFN pour quatre mois de séjour.

Ma question concerne la politique de solidarité envers les veuves d'anciens combattants. Nous sommes en effet les témoins de situations de détresse financière qui ne peuvent laisser indifférent, même si elles sont le plus souvent vécues dans une grande dignité.

Vous me répondrez que votre budget opère des avancées : la revalorisation de 15 points d'indice, pour 12 millions d'euros, est une avancée sociale. Mais la mesure est par définition limitée aux veuves de guerre, aux veuves pensionnées et aux veuves d'invalides (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Vous me répondrez aussi que la sécurisation de l'action sociale de l'ONAC par l'inscription de 12,35 millions d'euros permettra de répondre aux détresses exceptionnelles. Ce n'est pas négligeable. Mais pour les nombreuses veuves dont les maris n'étaient ni grands invalides, ni pensionnés, ces mesures ne changent rien.

Elles ne peuvent, et c'est normal, obtenir la réversion de la retraite de combattant. Mais on pourrait instituer un fonds de solidarité qu'alimenteraient les fonds rendus disponibles par la disparition des anciens combattants et ceux que l'ONAC consacre à répondre à certaines détresses exceptionnelles. On pourrait ainsi envisager une allocation différentielle par rapport à un revenu minimum de solidarité garanti à chaque veuve de combattant, que son mari ait été ou non invalide ou pensionné. Le groupe UDF aimerait connaître vos intentions (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UDF).

M. le Secrétaire d'Etat - Je vous remercie pour votre question qui me permet de faire le point sur l'action sociale en faveur des veuves. Je ne reviens pas sur la mesure importante prévue dans le budget pour les veuves de pensionnés. Les veuves d'anciens combattants ne sont pas oubliées pour autant. En témoigne l'inscription en base budgétaire de l'intégralité des crédits sociaux de l'ONAC, dont la moitié sont destinés à secourir ceux qui sont en difficulté. Le Gouvernement ne ménage donc pas ses efforts pour marquer la reconnaissance de la nation envers ceux qui sont dans le besoin et font partie de la grande famille des combattants.

M. Marc Le Fur - On voit maintenant apparaître la troisième génération de veuves, celles dont les époux ont combattu en Afrique du Nord. J'ai bien noté les mesures que vous comptez prendre en leur faveur, notamment pour les veuves de grands invalides. Mais on ne peut laisser les autres dans l'oubli. Je souhaiterais des précisions sur le nombre de personnes concernées et sur l'effort que vous envisagez, au plan national et local.

M. le Secrétaire d'Etat - Les crédits sociaux de l'ONAC, dont bénéficient les veuves d'anciens combattants, sont désormais intégralement inclus dans le budget, conformément au souhait répété de notre Assemblée. Ils permettent un traitement individualisé des cas, en fonction de la situation financière de ces personnes.

Néanmoins le dossier n'est pas clos. Il faut veiller à ce que toutes les situations difficiles soient connues et prises en charge. J'ai donné à l'ONAC des instructions en ce sens.

M. le Président - Avant d'appeler la dernière question, j'indique que, sur les votes sur les crédits des titres III et IV, les articles 73 et 74 et l'amendement 124, je suis saisi par le groupe socialiste de demandes de scrutin public.

M. Maxime Gremetz - Très bien ! Sinon, je l'aurais demandé moi-même !

M. Jean-Claude Viollet - Alors que la loi du 4 septembre 1942 et un autre texte de février 1943 instituaient le STO, 600 à 700 000 hommes ont refusé de partir ou sont revenus en France pour rejoindre la clandestinité. Ces réfractaires, devenus des hors-la-loi, ont privé la machine de guerre allemande d'1,5 milliard d'heures de travail, et nombre d'entre eux ont effectué des actes de résistance individuels. Ils encouraient la déportation, leur famille l'emprisonnement ou la destruction de leurs biens. Certains ont été pris et exécutés.

Il a fallu attendre la loi du 22 août 1950 pour que leurs mérites soient reconnus et leur refus qualifié d'acte de résistance.

Dans ce même esprit, nous souhaitons leur reconnaître enfin le droit à réparation par l'attribution du TRN. J'ai déposé une proposition en ce sens avec Jean-Marc Ayrault et le groupe socialiste, rejoignant ainsi des initiatives venant d'autres bancs (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Compte tenu de ce consensus, ne serait-il pas temps que le Gouvernement reprenne cette proposition ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Richard Cazenave - Dommage que vous ne l'ayez pas fait plus tôt !

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis conscient de l'attente des réfractaires au STO. Des députés de tous les groupes m'ont demandé de rechercher une solution. Mais le TRN a été créé en 1967 pour les militaires d'AFN à une époque où ils n'avaient pas droit à la carte d'ancien combattant. La loi de 1993 l'a étendu aux participants de tous les conflits armés. La situation des réfractaires ne répond pas à cette définition. Seuls ceux qui ont rejoint la Résistance sont admis au bénéfice du titre.

Mais j'ai conscience que le cas des autres mérite un réexamen et une solution plus satisfaisante. J'espère que nous pourrons progresser sur ce dossier (Quelques applaudissements).

M. Alain Néri - Rappel au Règlement ! En commission des affaires culturelles, le président nous a fait passer directement à la discussion des amendements, sans débat sur le budget global : c'est une première !

Ensuite je constate qu'un amendement revalorisant la retraite du combattant, bien que proposé par le rapporteur et voté à l'unanimité, est tombé sous le coup de l'article 40 : c'est justifié sur le plan juridique, pas sur le fond.

Enfin j'ai déposé deux amendements sans incidence budgétaire tendant l'un à remplacer l'expression « veuve » par « conjoint survivant », l'autre à permettre de porter la mention « Algérie » sur les drapeaux des régiments concernés. Or ces deux amendements n'ont même pas été soumis à discussion.

M. le Président - Je suis désolé, mais, même adoptés à l'unanimité, des amendements tombant sous le coup de l'article 40 sont irrecevables.

M. Alain Néri - C'est le cas du premier, mais pas des deux.

M. le Président - Ils ont été déclarés irrecevable également.

M. Maxime Gremetz - C'est de plus en plus lamentable, une vraie mascarade ! A quoi servons-nous ? Nous avions déposé quatre amendements en commission, ils n'ont pas été examinés ; je les ai exposés à nouveau en séance publique, sur mon temps de parole dans la discussion générale, mais le ministre ne nous a même pas répondu ! Autant aller se coucher tout de suite ! (« Oh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP) Vous êtes plus coutumiers que moi du fait de se coucher !

Nous ne sommes pas pour la politique du pire. Mais notre vote était conditionné à la réaction à nos amendements. En l'absence de toute réponse, nous voterons contre ce budget.

M. Alain Néri - Monsieur le Président, j'insiste sur les points que j'évoquais. On ne peut pas opposer l'article 40 à des amendements n'ayant pas d'incidence budgétaire ! Je demande une suspension d'un quart d'heure pour qu'on nous dise au moins pourquoi !

M. le Président - Je vous accorde une suspension de cinq minutes pour opérer les vérifications nécessaires.

La séance, suspendue à 13 heures 15, est reprise à 13 heures 20.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Il est vrai que l'application de l'article 40 est chose complexe. En l'occurrence, l'amendement relatif à l'ajout de mentions sur les drapeaux constitue un « cavalier », car il n'a pas sa place dans une loi de finances. Au demeurant, c'est une mesure d'ordre réglementaire - qui plus est à l'étude, ainsi que nous en informe le ministre.

Quant à l'amendement tendant à remplacer le mot « veuve » par « conjoint survivant », il tend à aggraver une charge publique, et tombe donc sous le coup de l'article 40.

Lors des révisions constitutionnelles successives, on s'est beaucoup interrogé sur l'opportunité d'assouplir l'application de l'article 40, mais aucun gouvernement ne l'a finalement souhaité, ce qui explique la continuité dans la pratique des présidents de la commission des finances sous toutes les majorités.

M. Alain Néri - Je vous remercie de vous être donné la peine de venir nous livrer cette explication (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). On ne va tout de même pas me reprocher de le remercier ! Cela étant, Monsieur le président de la commission, vous ne m'avez pas convaincu.

S'agissant de l'inscription « Algérie » sur la soie de nos drapeaux, vous affirmez vous-même que c'est un cavalier. Il n'y a donc pas de dépenses budgétaires supplémentaires !

Quant au terme « conjoint survivant », il s'agit, sans engager de dépenses supplémentaires, de tenir compte de la réalité sociologique d'aujourd'hui : nos armées comptent de plus en plus de femmes, susceptibles donc d'être victimes de conflits.

M. le Président - L'article 42 de la loi organique relatif aux lois de finances dispose qu'aucun article additionnel, aucun amendement à un projet de loi de finances, ne peut être présenté, sauf s'il tend à supprimer ou à réduire une dépense, à créer ou à accroître une recette, ou à assurer le contrôle des dépenses publiques. C'est pourquoi, aux termes de l'article 121 de notre Règlement, les articles additionnels et les amendements contraires aux dispositions de l'article 42 de ladite loi organique sont déclarés irrecevables dans les conditions prévues aux articles 92 et 98.

M. Alain Néri - J'en prends acte, mais mes questions étaient suffisamment précises pour que l'on prenne le temps d'y répondre.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne « Anciens combattants ».

ETAT B

A la majorité de 71 voix contre 24 sur 97 votants et 95 suffrages exprimés, les crédits du titre III sont adoptés.

A la majorité de 71 voix contre 25 sur 96 votants et 96 suffrages exprimés, les crédits du titre IV sont adoptés.

M. le Président - J'appelle les articles 73 et 74, rattachés à ce budget.

ART. 73

M. le Rapporteur spécial - L'amendement 125 est rédactionnel.

L'amendement 125, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

A la majorité de 71 voix contre 25, sur 96 votants et 96 suffrages exprimés, l'article 73, ainsi modifié, est adopté.

APRÈS L'ART. 73

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis - L'amendement 109 tend à ce que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er septembre 2004, un rapport recensant le nombre d'anciens combattants de plus de 60 ans dont les ressources sont inférieures au SMIC.

Parce qu'ils se sont battus pour la défense de l'intégrité du territoire national et pour les valeurs de notre République, les anciens combattants et leurs ayants droit ont le droit de terminer leur vie dans des conditions décentes. Ce n'est malheureusement pas toujours le cas, aussi cet amendement tend-il à envisager la création d'un « statut social » de l'ancien combattant qui reposerait sur deux principes : les droits acquis ne seraient pas remis en cause et tout ancien combattant, âgé de plus de soixante ans, disposerait de ressources au moins égales au SMIC.

Ce dispositif a naturellement vocation à être étendu aux veuves d'anciens combattants.

M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial - La commission des finances n'a pas examiné cet amendement, auquel je suis personnellement favorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Je connais votre souci d'améliorer le dispositif d'indemnisation des anciens combattants. Ce que vous nous proposez permettra de rendre plus cohérent notre système de réparation. Avis favorable.

M. Alain Néri - Le groupe socialiste votera cet amendement. Mettre en place une commission, ce n'est pas mauvais, mais cela ne répond pas à nos attentes « Paroles, paroles ! ». On en reste aux annonces et à l'affichage ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Nous aurions préféré que le Gouvernement écoute sa propre majorité, qui lui proposait de relever de trois points la retraite des combattants. Ce ne sont pas des mots, ce sont des actes que nous attendons !

M. Jacques Desallangre - Nous sommes favorables à cette pétition généreuse, d'ailleurs formulée avec beaucoup de prudence. Nous verrons avec intérêt combien de temps s'écoulera entre le vote de l'amendement et l'entrée en vigueur du nouveau dispositif...

M. François Rochebloine - Le groupe UDF est favorable à cet amendement, mais je souhaite le sous-amender pour remplacer la date du 1er septembre par celle du 1er juillet. C'est indispensable si nous voulons que le contenu du rapport qui sera remis soit pris en considération dans la préparation du budget pour 2005 avant que tous les arbitrages aient eu lieu (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

M. le Président - Ce sous-amendement portera le numéro 136.

Le sous-amendement 136, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 109, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART.74

A la majorité de 67 voix contre 25 sur 92 votants et 92 suffrages exprimés, l'article 74 est adopté.

APRÈS L'ART. 74

M. Alain Néri - Depuis des années, nous affirmons avec force notre attachement à l'ONAC, qui joue un rôle déterminant dans la politique de réparation, de mémoire et de reconnaissance. Nous avons toujours considéré qu'il devait être pérennisé et continuer de relever de votre secrétariat d'Etat.

Or, depuis l'an dernier, les associations d'anciens combattants s'inquiètent. Les crédits de fonctionnement diminuent. Le contrat d'objectif prévoit une réduction des effectifs, alors que l'ONAC va prendre en charge les harkis et les veuves d'anciens combattants. En outre, il va devoir délivrer 15 000 à 20 000 cartes de combattant supplémentaires compte tenu de la mesure d'harmonisation que nous venons de voter.

Nous voulons des garanties quant à la pérennité de l'ONAC. Pour la première fois, le nouveau directeur de l'Office ne vient pas du ministère de la défense, mais de celui des affaires sociales. Nous craignons à terme une dissolution de l'ONAC dans ce ministère (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Mon amendement 124 vise donc à préciser que « l'existence de l'Office national des anciens combattants est garantie et pérennisée au-delà du contrat d'objectifs et de moyens ». Il devrait recueillir l'unanimité puisque vous affirmez la main sur le c_ur que vous ne porterez pas atteinte à l'ONAC.

M. le Rapporteur spécial - Nous sommes dans le registre des « paroles » et de la « pétition », comme on l'a dit à propos du précédent amendement.

Il y a les paroles et il y a les actes : l'action sociale est confortée et la dotation de l'Etat est en progression. Cet amendement est inutile.

M. le Secrétaire d'Etat - C'est l'honneur du Gouvernement d'avoir garanti l'avenir de l'ONAC. En effet, le précédent gouvernement n'avait pas voulu agréer le contrat d'objectifs et de moyens !

Je suis effaré par vos commentaires sur le nouveau directeur de l'ONAC. La nomination d'un haut fonctionnaire en conseil des ministres obéit à des règles précises. Par ailleurs, les préfets qui ont dirigé l'ONAC auparavant dépendaient du ministère de l'intérieur et non de celui de la défense (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L'ONAC a des perspectives et le conseil d'administration qui a eu lieu avant-hier l'a confirmé. Le contrat est respecté et il n'y a pas le moindre début de mouvement social (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Avis défavorable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

A la majorité de 61 voix contre 30 sur 91 votants et 91 suffrages exprimés, l'amendement 124 n'est pas adopté.

M. le Président - Nous avons terminé l'examen des crédits des anciens combattants.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi à 15 heures 15.

La séance est levée à 13 heures 40.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ERRATUM

au compte rendu analytique de la 1ère séance du mercredi 5 novembre 2003
dans l'intervention de M. Christian Paul.

Page 38, après : « Vous donnez de la main droite aux entreprises ce que vous avez pris de la gauche aux demandeurs d'emploi et de formation. »,

Lire : « De même, votre budget est un budget de l'"information professionnelle" » à l'intention des entreprises, qui seront informées des nouveaux abaissements de charges ! Vous avez enfin... (la suite sans changement).

Page 39, après « Vous demandez aux salariés de financer leur propre emploi »,

lire : « Votre budget est, à nouveau, un budget à contre emploi ».


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