Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (session ordinaire 2003-2004)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 23ème jour de séance, 59ème séance

3ème SÉANCE DU MERCREDI 12 NOVEMBRE 2003

PRÉSIDENCE de Mme Hélène MIGNON

vice-présidente

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2004 -deuxième partie- (suite) 2

      SANTÉ, FAMILLE ET PERSONNES HANDICAPÉES (suite) 2

      QUESTIONS 2

      ARTICLE 81 16

      APRÈS L'ARTICLE 81 17

      ART. 82 17

      ORDRE DU JOUR DU JEUDI 13 NOVEMBRE 2003 22

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2004 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004.

SANTÉ, FAMILLE ET PERSONNES HANDICAPÉES (suite)

Mme la Présidente - Nous poursuivons l'examen des crédits de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

QUESTIONS

Mme Catherine Génisson - Monsieur le ministre, je souhaite vous faire part de ma très grande préoccupation quant aux moyens alloués à la lutte contre le terrible fléau qu'est le sida. Les chiffres demeurent en effet très alarmants : 45 millions de malades dans le monde, 6 millions de nouveaux cas chaque année. En France, entre 100 000 et 130 000 personnes sont séropositives et 1 500 à 5 000 cas nouveaux se déclarent chaque année. Face à de tels chiffres, il est plus que jamais nécessaire de mettre l'accent sur la politique de prévention, laquelle se relâche depuis quelques temps.

Au gré de mes rencontres avec les responsables associatifs, j'ai malheureusement constaté que le découragement tendait à les gagner, du fait notamment de la faiblesse de l'engagement budgétaire de l'Etat. Je pense notamment à « Sida info services », dont le responsable s'inquiète du transfert, depuis l'année dernière, des crédits à l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé. Les dirigeants de « Sida info service » craignent qu'il n'en résulte une amputation de leur budget, l'INPES se trouvant contraint d'étendre ses missions en fonctionnant à moyens constants.

Je crains qu'en matière de lutte contre le sida, le Gouvernement soit fidèle à sa ligne de conduite : des discours empreints de bonnes intentions démentis par la cruelle réalité des faits. Las, les faits sont têtus : la lutte contre le sida est bien le parent pauvre du budget 2004. Nous y voyons un nouvel exemple du double langage que tient la droite. A trois reprises, notamment lors du G8 d'Evian, le Président de la République s'est engagé à ce que la France contribue à hauteur de 150 millions au fonds mondial contre le sida. Au vu du budget pour 2004, lequel ne prévoit qu'un tiers de la somme promise, force est de constater que cet engagement a été renié.

Grâce à de nombreuses interventions, le Gouvernement a confirmé, le 6 novembre dernier que le versement de 150 millions aurait bien lieu, grâce aux « crédits de report disponibles en fin de gestion 2003 » - ce qui, budgétaire parlant, n'a guère de sens... Nos craintes demeurent !

Monsieur le ministre, pouvez-vous fournir à la représentation nationale des assurances, allant au-delà de la déclaration de principe, quant à la réalité du versement de 150 millions au fonds mondial de lutte contre le sida ? Pouvez-vous également rassurer les acteurs du monde associatif, mobilisés dans la lutte contre ce fléau et qui s'inquiètent à juste titre de la faiblesse des moyens qui leur sont alloués ?

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Madame la députée, vous préférez les actes aux discours... et moi aussi ! Et s'il est un domaine dans lequel j'ai accompagné mes déclarations d'actes concrets, c'est bien celui de la lutte contre le sida et contre la toxicomanie.

Je veux d'emblée vous rassurer : le sida reste une priorité forte de mon ministère. Même si la mortalité a chuté depuis l'introduction des trithérapies, il reste que plusieurs milliers de personnes découvrent encore chaque année leur séropositivité et que l'épidémie reste active ! Je me bats sans relâche pour faire comprendre que ce n'est pas parce qu'on a les trithérapies qu'il faut relâcher la prévention. Il faut poursuivre l'effort et je vous confirme que 64 millions, répartis entre la DGS et l'INPES, seront alloués cette année ; les crédits consacrés à la lutte contre le sida sont reconduits en totalité. S'agissant de « sida info service », le transfert des crédits de la DGS à l'INPES courant 2004 n'affectera pas leur montant : ils resteront identiques à l'année dernière.

La politique de réduction des risques sera également renforcée et sera consacrée au plan législatif à l'occasion de la révision de la loi de 1970. C'est une demande des acteurs de terrain que je suis déterminé à satisfaire.

S'agissant du fonds mondial, je puis vous confirmer que le Président de la République s'est engagé à tripler la contribution de la France, ce qui porte l'effort à 150 millions. Cet engagement a été réitéré en ma présence, la semaine dernière, lorsque le Président Chirac a reçu le docteur Lee, directeur général de l'OMS. Ces 150 millions seront attribués. C'est l'honneur et le devoir de la France, dans la mesure où elle veut entraîner l'Union européenne vers l'objectif de contribuer au fonds mondial à hauteur d'un milliard, un autre milliard incombant aux Etats-Unis, le reste du monde versant le troisième milliard nécessaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Paul Dupré - Le cas dramatique du jeune Vincent Humbert a mis en lumière toutes les problématiques liées à l'accompagnement de la fin de la vie. Faut-il ou non légiférer, comme l'ont déjà fait plusieurs de nos voisins européens et comme le proposent certains d'entre nous ? La question est d'importance et la réflexion engagée par la mission parlementaire d'information sur l'accompagnement de la fin de vie devrait nous éclairer. Quoi qu'il en soit, nous souhaitons appeler l'attention du Gouvernement sur la nécessité de poursuivre le développement des soins palliatifs. On estime en effet que 150 000 à 200 000 personnes en ont besoin dans notre pays.

La loi du 9 juin 1999 a fait entrer les soins palliatifs dans les missions des établissements de santé, au même titre que l'action préventive et curative. Ces soins visent à soulager la douleur, à sauvegarder la dignité de la personne en fin de vie et à soutenir son entourage. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades a réaffirmé le principe selon lequel toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur, celle-ci devant être en toutes circonstances prévenue, évaluée, prise en compte et traitée. Les professionnels de santé mettent du reste tout en _uvre pour assurer à chacun une vie digne jusqu'à la mort.

Cette reconnaissance législative s'est accompagnée de plusieurs plans triennaux de développement des soins palliatifs, le premier - doté de 50 millions en vue de corriger les disparités régionales en matière d'offre de soins palliatifs - portant sur la période 1999-2001 et le deuxième - doté de 24,39 millions - couvrant la période 2002-2005. Monsieur le ministre, le Gouvernement a-t-il l'intention de poursuivre le développement des soins palliatifs ? Quel est le montant des crédits prévus à cet effet pour 2004 ? Quelles sont vos priorités en la matière ?

M. le Ministre - Merci d'aborder ce sujet douloureux, au sujet duquel nul ne peut prétendre qu'il dispose d'une solution définitive et générale. Je me réjouis qu'une mission d'information parlementaire, coordonnée par Jean Leonetti, ait été constituée sur ce sujet. Vous savez avec quel engagement je m'étais moi-même intéressé à la discussion du projet de loi présenté par Bernard Kouchner en 1999, et combien je suis attentif aux problèmes d'éthique que de tels sujets soulèvent.

Non content de poursuivre le plan triennal de développement des soins palliatifs, le Gouvernement l'amplifiera.

Quant aux crédits dégagés, ils suivront l'ambition du Gouvernement de multiplier les réseaux et les unités de soins palliatifs. Il faut au moins une unité de soins palliatifs par département, naturellement dans chaque CHU, probablement dans tout CHG dépassant 400 lits. Et il faut aussi des équipes mobiles pour accompagner la fin de vie à domicile. Il convient de créer en parallèle des réseaux de lutte contre la douleur, car, la plupart du temps, hélas, la fin de vie est douloureuse aux plans physique et moral, et parce que les professionnels de santé - en tout cas ceux de ma génération - n'ont pas été formés à traiter correctement la douleur. Il faut que les esprits et que les mentalités changent.

Dernier problème que vous n'avez pas soulevé, dans le cadre de l'introduction de la tarification à l'activité, j'ai demandé que soit prévu un GHM - groupe homogène de malades - spécifique pour la douleur et pour les soins palliatifs, de sorte que l'on puisse tarifer normalement ces soins, qu'il est sinon difficile de décompter.

Il reste beaucoup à faire pour mieux lutter contre la douleur et pour accompagner ces moments critiques (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Catherine Génisson - J'associe à ma question M. Simon Renucci, député de Corse du Sud. Elle porte sur la place des pédiatres dans le système de santé publique.

En effet, la réforme du système de soins engagée cet automne doit concerner tous les assurés sociaux, au premier rang desquels l'enfant, adulte en devenir, occupe une place particulière.

La loi de santé publique a fixé des priorités. Je veux donc insister sur la place de l'enfant. Il nous semble en effet indispensable d'édifier une véritable politique de santé publique de l'enfance, évaluant les besoins sanitaires et sociaux. Deux niveaux d'intervention nous semblent pertinents.

Au plan national, il serait utile de créer un comité interministériel placé sous l'autorité directe du Premier ministre, qui structurerait les interventions de tous les ministères concernés. Une conférence annuelle de l'enfance permettrait de fixer de façon cohérente les orientations de long terme. La mise en place de coordinations locales et régionales est également souhaitable. Forts de leur expérience professionnelle, les pédiatres peuvent jouer un rôle utile d'interface entre l'extrême spécialiste et les structures sanitaires et sociales ainsi que la famille.

Malgré les problèmes de leur reconnaissance professionnelle et la question démographique, les pédiatres sont prêts à coordonner les mises en réseaux nationaux et locaux. Ils espèrent beaucoup de vous et attendent avec intérêt vos réponses sur l'exercice de leur spécialité.

M. le Ministre - Je comprends que le docteur Renucci, lui-même pédiatre, s'associe à votre question.

Dès mon arrivée au ministère, je me suis intéressé au domaine de l'enfance. J'ai immédiatement créé une mission sur la périnatalité, qui m'a remis son rapport il y a deux mois. Je présenterai donc un plan relatif à la périnatalité au début de l'an prochain. Son financement est déjà provisionné dans l'ONDAM sur lequel l'Assemblée s'est prononcée. J'ai demandé à la société française de pédiatrie de me faire part de ses idées sur les spécificités pédiatriques à prendre en considération pour les autres objectifs fixés dans la loi de santé publique. Les pédiatres sont inquiets, parce que leur démographie est déclinante et que leur spécialité n'a pas été suffisamment considérée dans le passé.

A peine arrivés, nous avons porté le tarif de la consultation des pédiatres à 28 € pour les deux premières années de la vie et nous avons revalorisé leur participation aux actes entourant la naissance. Mais la pédiatrie demande du temps et ne repose pas sur un plateau technique spécifique.

Je souhaite que persiste une pédiatrie de ville. Dès 2003, pour faire face à la situation démographique, j'ai augmenté le nombre de pédiatres en formation dans la filière de l'internat.

M. Philippe Vitel - En 2001, l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a entrepris, par l'intermédiaire de la commission d'évaluation des produits et du comité économique des produits de santé, de réformer le tarif interministériel des prestations sanitaires. Ainsi le 4 mai 2002, le Journal officiel publiait l'arrêté du 23 avril, fixant la liste des produits et prestations remboursables relatives aux appareils électroniques correcteurs de surdité. Il s'ensuit que pour les patients déficients auditifs âgés de plus de 20 ans et non atteints de cécité, le tarif de prise en charge par la sécurité sociale est de 199,71 €, quel que soit le type d'appareil électronique. Pour les déficients auditifs de moins de 20 ans et les patients de plus de 20 ans atteints de cécité, une liste de 513 appareils électroniques fixe le tarif entre 531 et 1 425 € selon le niveau technologique de l'appareil. Or, depuis mai 2003, la liste n'a pas été mise à jour, alors que les progrès technologiques ont été considérables.

De ce fait, les professionnels de l'audiologie ne sont pas autorisés à adapter à leurs jeunes patients les appareillages numériques de dernière génération, dont bénéficient les enfants des autres états de l'union européenne. Envisagez-vous de remettre la liste à jour ?

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées - Près de 280 000 prothèses auditives sont vendues en France chaque année. Leur remboursement par la sécurité sociale s'élève à environ 40 millions.

Les 6 335 jeunes de moins de 20 ans sont appareillés avec des prothèses équipées de stéréophonie, mieux remboursées depuis 2002.

Cependant, les prothèses les plus récentes ne bénéficient pas de cette amélioration, la liste n'étant pas actualisée. Si les dernières prothèses numériques sont déjà disponibles sur le marché, leur prise en charge ne dépasse pas 230 € pour un coût de 4 000 €. La commission économique des produits de santé a demandé à un expert de lui faire des propositions. Les mesures permettant le remboursement des prothèses numériques devraient être prises au plus tard en janvier prochain.

M. Philippe Vitel - Je pose la question de M. Cosyns.

Les mesures de solidarité annoncées par le Premier ministre en faveur des personnes âgées, vont nécessiter un nombre accru de personnels médicaux et paramédicaux. Aujourd'hui nous ne disposons pas de centres de formation suffisants, en particulier pour les infirmières. Aussi nombre de jeunes vont-ils suivre des formations ailleurs en Europe, en particulier en Belgique, avant de revenir exercer en France.

L'augmentation des crédits permettra-t-elle d'attribuer des bourses à ces étudiants ?

M. le Ministre - De fait, il nous faut accroître l'effort de formation de ces personnels. Mais il y faut du temps. Le quota des autorisations pour les infirmières a été porté à 30 000, ce qui devrait permettre de combler le déficit en deux ou trois ans. Le nombre des aides-soignantes en formation est passé de 13 000 à 15 000 et cette formation est dispensée presque exclusivement dans les mille établissements répartis sur l'ensemble du territoire.

Globalement, dans le budget 2004, les crédits destinés à la formation augmentent de 13,7 %, soit 3,8 millions pour les écoles sans support hospitalier. Les écoles installées dans les établissements hospitaliers bénéficient d'un financement inclus dans la dotation globale discutée dans le cadre du PLFSS, à hauteur de 20,8 millions.

La masse financière consacrée aux bourses s'est accrue de 57 % en cinq ans. La somme inscrite dans le budget 2004 est en hausse de 11,6 % soit davantage que celle des quotas. Nous répondons de notre mieux, vous le voyez, à ces problèmes de formation.

M. Yves Coussain - Les opérations présélectionnées dans le plan pluriannuel régional d'investissement en Auvergne me préoccupent. Le secteur public reçoit 95 % du montant inscrit alors que l'hospitalisation privée est très active en Auvergne, et le Cantal ne toucherait que 3,68 % de l'enveloppe, ce qui est bien maigre face aux besoins exprimés par le centre hospitalier d'Aurillac et le centre médico-chirurgical de Tronquière, toujours à Aurillac. Je souhaiterais un rééquilibrage de ces affectations.

Le CMC d'Aurillac a demandé l'agrément d'un scanner à visée de diagnostic. Il s'agit d'un établissement de 227 lits, bénéficiant d'un important plateau technique. A sa demande, l'ARH oppose avec constance une réponse négative. Cet établissement dispose déjà d'un scanner dosimétrique utilisé à 50 %. Il demande un nouveau scanner. Pourra-t-il l'obtenir ?

M. le Ministre - La faible part des aides accordées au secteur privé en Auvergne ne provient d'aucune volonté de l'ARH de le désavantager. C'est que les établissements privés présentent un faible nombre de projets d'investissement, parce qu'ils ont déjà accompli de nombreuses restructurations. Les aides au titre du plan hôpital 2007 permettront de clore la quasi-totalité des investissements possibles dans le secteur privé de la région. Je demanderai néanmoins au nouveau directeur de l'ARH de rencontrer rapidement les représentants de la fédération régionale de l'hospitalisation privée.

Non, votre département n'a pas été défavorisé ! Parmi les six projets sélectionnés pour 5,5 millions sont particulièrement concernés les établissements publics et privés d'Aurillac, avec l'installation d'une gamma caméra au centre médicochirurgical de Tronquière, et au centre hospitalier la restructuration des urgences de la psychiatrie et du court séjour. Des aides s'ajoutant aux crédits du plan hôpital 2007 seront inscrites d'ici à la fin de l'année dans des contrats d'objectifs et de moyens pour le centre hospitalier de Saint-Flour à hauteur de 20 millions et pour celui d'Aurillac, à hauteur de 39 millions.

Les radiologues privés d'Aurillac réclament donc un scanner. La carte sanitaire a été supprimée par l'ordonnance de simplification du 4 septembre dernier. Il revient désormais à l'ARH de se prononcer sur la répartition la plus appropriée des appareils. Il existe deux scanners dans le Cantal. Un nouvel appareil est demandé à Aurillac. A l'ARH de décider. Je demande à son directeur de suivre attentivement ce dossier.

Mme Jacqueline Fraysse - Cette année 2003, déclarée Année européenne du handicap, devait selon le Président de la République être celle de la mobilisation pour une pleine reconnaissance des droits, des besoins et des apports des personnes handicapées. Nous attendions donc avec intérêt ce projet de loi de finances. Certes, vous y avez inscrit 44 millions d'euros afin de créer 1 014 postes d'auxiliaires de vie et 3 000 places supplémentaires en CAT et de financer 30 sites de vie autonome. Ce n'est pas rien, mais c'est encore bien peu eu égard aux besoins. En effet, plus de 25 000 personnes attendent un emploi en CAT et 30 000 requièrent un auxiliaire de vie. Mme Bourragué a d'ailleurs dit, à juste titre, que la tâche restait immense s'agissant d'accueillir les enfants en milieu ordinaire ou de favoriser l'accès au travail. Mais comment la France pourrait-elle rattraper son retard lorsque la faiblesse des crédits est aggravée par l'absence de cette politique globale que tous les rapports jugent indispensable pour la prise en charge et la prévention du handicap, ainsi que pour l'insertion des handicapés ? Le Gouvernement a bien évoqué un droit à la compensation du handicap, mais les personnes handicapées ont besoin de plus que cela : il faut aussi assurer leur insertion dans la société comme personnes à part entière. Cela implique nécessairement un engagement des pouvoirs publics. Or, si le Premier ministre a appelé le 7 novembre à la solidarité envers les personnes dépendantes, il a exclu que la caisse nationale créée pour financer le soutien à ces dernières soit autorisée à gérer le risque dépendance ! N'est-ce pas dégager l'Etat de sa responsabilité à l'égard des citoyens handicapés ? Où se trouvent les moyens de la politique globale annoncée par le Gouvernement ?

Mme la Secrétaire d'Etat - Vaste question, à laquelle il me sera bien difficile de répondre en quelques minutes ! Cela étant, je me réjouis que vous reconnaissiez l'effort consenti par ce gouvernement. De fait, nous avons accru le nombre de places en établissements et conforté les services d'accompagnement mais il est vrai aussi que la tâche à accomplir reste immense.

En 2003 s'achevaient à la fois un plan triennal et un plan quinquennal. Nous avons donné un sérieux coup de pouce en doublant le nombre de places nouvelles en CAT, en maisons d'accueil spécialisé et en foyers d'accueil médicalisé, en quintuplant le nombre de postes d'auxiliaires de vie et en accroissant d'au moins 10 % le nombre de services d'éducation spécialisée et de soins à domicile - SESAD. Cet effort sera reconduit en 2004 et la politique nouvelle que vous appelez de vos v_ux prendra corps grâce à la loi que je vais soumettre au conseil des ministres en janvier, juste avant de la proposer aux sénateurs pour une première lecture. Ce texte trouvera sa traduction budgétaire dès 2005. Il vise à favoriser l'accès de tous les handicapés, y compris les handicapés psychiques oubliés dans la loi de 1975, à tout : école, activité professionnelle, vie sociale, culture, arts, sports, etc. Tous les services susceptibles de les concerner seront regroupés et feront l'objet de mesures de simplification. Enfin le droit à compensation, affirmé par le Président de la République et inscrit dans la loi du 2 janvier 2002, sera appliqué. Il est en effet plus que normal, pour ne prendre que cet exemple, qu'un fauteuil roulant soit entièrement remboursé au lieu de ne l'être comme aujourd'hui qu'à 30 ou 40 %.

Enfin, cette loi est pour ainsi dire financée avant même d'être votée : elle l'est en effet par la suppression d'un jour férié et par le prélèvement sur les revenus du capital proposé par le Premier ministre la semaine dernière.

M. Jean-Luc Préel - Les personnes relevant de la CMU ont le libre choix de leur organisme complémentaire, mais beaucoup font aujourd'hui appel aux CPAM. Le financement est assuré par le fonds CMU alimenté par une contribution des organismes complémentaires et par une dotation de l'Etat. Les assurances complémentaires peuvent déduire de leur versement une somme forfaitaire fixée à 228 € par personne en 2000, à 283 en 2003 et portée pour 2004 à 300 €. Les CPAM étaient remboursées au premier euro des frais réels engagés pour le compte de l'Etat. Or, par l'article 82, vous vous apprêtez à aligner leur traitement sur celui qui est accordé aux assurances complémentaires, ce qui se soldera pour l'Etat par une économie de 117 millions d'euros. Est-il bien raisonnable d'accroître ainsi le déficit des caisses ? Quant au coût réel d'une CMU complémentaire, n'est-il pas plus proche de 333 € que de 300 ?

Investies d'une mission d'assurance complémentaire, les caisses d'assurance maladie supporteront un risque financier. Cette disposition préfigurerait-elle une nouvelle répartition des rôles entre assurance de base et assurances complémentaires ?

L'UDF a toujours dénoncé les effets détestables du seuil dont est assortie la couverture maladie universelle, et préconisé la transformation de celle-ci en une aide personnalisée à la santé, permettant à chacun de financer la couverture complémentaire de son choix. Une telle réforme est-elle à l'ordre du jour ?

M. le Ministre - En 2003, le coût réel d'une assurance complémentaire est de 314 € pour les bénéficiaires de la CMUC gérés par les caisses primaires d'assurance maladie et par les régimes obligatoires, et à 285 € pour ceux qui sont gérés par les organismes complémentaires. Le montant de 300 € apparaît donc parfaitement réaliste.

Les caisses agissent sans nul doute au nom de l'Etat. A ce titre, elles participent toutes au dispositif de la CMUC et continuent de remplir leur mission de service public en accueillant les bénéficiaires qui le souhaitent. Ce faisant, service public et bonne gestion se concilient et les caisses doivent être incitées à gérer de façon plus active les dépenses qui leur incombent dans ce cadre.

Le passage au forfait représentant pour les organismes de base un coût potentiel de l'ordre de 130 millions d'euros, l'économie pour l'Etat est égale à ces 130 millions, moins 12 correspondant au coût de la revalorisation de la déduction accordée aux organismes complémentaires. Mais ce coût n'est que potentiel et, par une meilleure gestion des bénéficiaires, les organismes de base pourront le réduire.

L'alignement du mode de remboursement des caisses sur celui des organismes complémentaires n'obère en rien l'évolution de l'assurance maladie telle que nous pourrions la définir au vu des travaux du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Nous avons même, pour la seconde année consécutive, revalorisé la déduction forfaitaire accordée aux organismes complémentaires, cependant que la CNAM continuera d'assurer la prise en charge des bénéficiaires de la CMUC pour le compte de l'Etat.

Enfin, en installant le Haut Conseil, le Premier ministre a annoncé que le Gouvernement réfléchissait à la mise en place d'une aide personnalisée à la santé. La configuration du dispositif n'est pas arrêtée, mais l'objectif sera bien de permettre aux personnes de ressources modestes ne bénéficiant pas de la CMU de souscrire une assurance complémentaire.

M. Rodolphe Thomas - En 2001, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris a jugé indispensable une remise à niveau de l'hôpital Avicenne de Bobigny, précisant qu'une enveloppe de 500 millions de francs avait été dégagée pour améliorer l'hygiène des locaux et les conditions d'accueil et pour rénover totalement le service des urgences. En ce qui concerne l'hygiène, les travaux devaient être programmés de septembre 2001 à septembre 2002. L'encadrement médical des urgences devait être renforcé, l'ARH ayant conclu en novembre 2000 à la non-conformité du service et exigé des aménagements avant le 22 janvier suivant. Cependant, le plan de restructuration a pris du retard puisque le nouvel accueil ne sera ouvert qu'en avril 2004 et le nouveau service lits en 2005 seulement. Ne peut-on au moins accélérer l'ouverture de ce dernier ?

J'ajoute que, pour le bon fonctionnement du service, il serait nécessaire de créer deux postes de médecins en service d'accueil des urgences et neuf postes d'aides-soignants. Le service des urgences de l'hôpital Avicenne de Bobigny s'est trouvé, faute de moyens, dans une situation plus que critique lors de la canicule. Les urgences sont en première ligne. Ce qui s'y passe est révélateur des besoins de la population de Seine-Saint-Denis. Je souhaite donc connaître vos intentions à ce sujet.

En outre, dans le cadre du projet global tendant à faire de l'hôpital Avicenne un pôle cancérologique, des problèmes subsistent. La modernisation engagée doit être saluée, mais les moyens manquent. Les bâtiments et le service de radiothérapie ont été modernisés, mais les équipements des services ne sont pas ceux d'un pôle d'excellence. Ainsi, il n'est pas prévu d'équiper Avicenne d'un scanner TEP. Ici encore, Monsieur le ministre, je souhaite connaître vos intentions.

M. le Ministre - La question est vaste et difficile. L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris s'est engagée dans un plan de modernisation et de recomposition à la hauteur des enjeux, qui concerne tous ses hôpitaux, ainsi que ses établissements administratifs et techniques. Pour l'y aider, une aide financière conséquente sera apportée pendant quatre ans, sous réserve de la réalisation des économies prévues.

Concernant l'hôpital d'Avicenne, l'effort demandé porte sur 1,2 million d'euros, ce qui représente 1 % du budget de l'établissement. Cet effort portera sur les activités administratives, techniques et logistiques, et non sur les activités de soins. L'hôpital d'Avicenne présentera, lors des conférences budgétaires de la fin novembre, son plan spécifique qui sera ensuite soumis à la direction générale. C'est aussi lors de ces conférences que l'AP-HP pourra décider l'attribution de postes à des services particuliers, comme les urgences.

Pour ce qui est des urgences, j'entends dire « nous attendons toujours les crédits, nous attendons toujours les postes »... Le Gouvernement s'est engagé sur un plan urgences dont l'application débutera avec l'exécution du budget 2004, donc en janvier 2004 : d'ici là, il est donc inutile de répéter qu'on « attend toujours ». Un autre problème se pose : des postes sont créés, mais ne sont pas pourvus.

Nous souffrons en effet d'une pénurie de médecins. Ainsi 18 % des postes d'urgentistes ne sont pas pourvus ! A quoi bon, dès lors, demander la création de deux postes, qui viendront s'ajouter à la liste des postes non pourvus ? J'ai donc relevé le numerus clausus, et nous faisons un effort pour la formation de médecins. Pour le reste, au service des urgences, la restructuration que vous évoquez se poursuit normalement, et se traduira par la réalisation pour le mois de mai 2004 d'un nouveau service d'accueil. Il sera complété, fin décembre 2004, par les services d'accueil administratif et de support logistique. Contrairement à ce qui s'est fait en d'autres temps, il ne s'agira pas d'un simple effet d'annonce, car cet investissement sera financé par le plan Hôpital 2007.

Enfin, concernant le Tep-Scan, la direction générale de l'AP-HP a souhaité équiper, dans un premier temps, chacun des quatre groupes hospitaliers universitaires d'un appareil par établissement, puis de procéder à une évaluation avant d'en étendre la diffusion. Cela n'enlève rien à la spécificité d'Avicenne en cancérologie.

M. Jean-Luc Préel - Je pose cette question au nom de Francis Vercamer qui n'a pu être présent.

Dans certaines régions, la fracture économique et sociale se double d'une fracture sanitaire, surtout dans les agglomérations où le taux de chômage est exceptionnel depuis des années. Les indicateurs de santé, notamment l'espérance de vie, y témoignent d'un retard sanitaire. Ces indicateurs font apparaître de graves problèmes : surmortalité par pathologies cardiovasculaires et cancéreuses, consommation excessive d'alcool et de tabac, troubles graves autour de la naissance, surconsommation de substances psycho-actives licites ou non, pathologies psychiatriques et suicides, en particulier chez les jeunes, maladies résultant de l'insalubrité, comme le saturnisme, pathologies liées à la pollution, la malnutrition, la maltraitance, l'isolement, la souffrance psychique et la dépendance...

Or, dans les mêmes régions, l'offre de soins est déficitaire. Ainsi il manque au Nord-Pas-de-Calais plus de 4 000 infirmiers et plus de 1 800 médecins spécialistes pour que le ratio de professionnels par habitant rejoigne la moyenne nationale, sans même tenir compte des risques aggravés. Les perspectives de la démographie médicale laissent craindre que cette situation ne s'aggrave encore. Ces régions sont-elles condamnées à manquer de professionnels de santé, notamment de médecins spécialistes ?

Des dispositifs existent pour combattre les inégalités territoriales : je pense à la DSU, aux zones franches, aux zones d'éducation prioritaires, etc. N'est-il pas temps, dans le même esprit, de créer, sur la base géographique de bassins d'emplois en grande difficulté, des « territoires de santé prioritaires » ? Définis par des critères médicaux, sociaux et économiques, ils bénéficieraient de moyens à la hauteur des problèmes observés, qui les rendraient plus attrayants pour les professionnels.

M. le Ministre - C'est pour moi, depuis mon arrivée, une préoccupation majeure que ces territoires où se conjuguent une mortalité élevée et un déficit de l'offre de soins. J'ai déjà commencé d'agir. Ainsi, dans le projet de loi sur la santé publique, j'ai souhaité, outre la déclinaison du programme national de santé publique, qu'il y ait une spécificité régionale en fonction de la morbidité locale. Les inégalités relatives à la santé ont été soulignées par le Haut comité de la santé publique dans son rapport de 2002, et par les cartographies de la morbidité réalisées par l'INSERM. Il y a en effet d'inacceptables disparités entre régions, et parfois au sein d'une région. Ces travaux ont contribué à la définition des cent objectifs de santé publique qui figuraient dans le rapport annexé à la loi de santé publique ; ces objectifs doivent être déclinés au niveau régional et territorial.

S'agissant du problème de la démographie médicale, je me suis déjà exprimé. Un décret est à la signature, qui définira les caractères et la localisation de ces zones sous-médicalisées. Elles pourront faire l'objet de trois types d'incitation à l'installation des professionnels. Tout d'abord, les collectivités territoriales, seront autorisées à intervenir. Ensuite, des conventions entre les caisses d'assurance maladie et les professionnels destinées à faciliter le travail de ces derniers. Enfin, une intervention de l'Etat, comme l'a prévu le dernier CIADT en septembre. L'Etat ira jusqu'à une aide de 10 000 euros par an pendant cinq ans ; les professionnels pourront d'autre part être exonérés de taxe professionnelle, après un vote de la collectivité territoriale. Tout doit être fait pour qu'en tout point du territoire français les citoyens aient accès aux soins dans des conditions égales. Vous le voyez, en travaillant conjointement sur les problèmes de sur-morbidité et de sous-médicalisation, la notion de territoires prioritaires au plan sanitaire se dégagera d'elle-même.

M. Patrick Bloche - Le centre national des Quinze-Vingt est le premier centre français de traitement des pathologies ophtalmologiques. Il se distingue par une haute technicité et une forte attractivité. Dans une conjoncture difficile, il a su montrer sa capacité d'adaptation aux besoins de la population, répondant à sa mission d'hôpital de proximité comme à sa vocation nationale. L'instauration de l'hospitalisation de semaine, le développement de la chirurgie ambulatoire, l'installation d'un nouveau système hospitalier d'information ont contribué à améliorer la prise en charge du patient. De plus, le renouvellement des quatre chefferies de service, confiées à des praticiens de renom international, et le développement de la recherche clinique confèrent aux Quinze-Vingt une véritable assise hospitalo-universitaire.

Une convention de 1997 entre l'établissement, l'AP-HP et l'université Paris VI prévoit le transfert progressif aux Quinze-Vingt de tous les services ophtalmologiques, hors consultation, des quatre grands hôpitaux de l'est parisien : Saint-Antoine, Tenon, Trousseau et Rothschild. Le personnel a de plus en plus de mal à faire face à l'affluence croissante aux urgences : 34 0000 passages en 2002, et aux consultations - plus de 500 par jour, et six mois d'attente... Or ces changement n'ont été accompagnés par aucune mesure financière. Dans une lettre du 3 juillet, le président du conseil d'administration et la directrice vous demandaient, Monsieur le ministre, une aide exceptionnelle de 1,5 millions d'euros.

Ces graves difficultés financières résultent pour beaucoup d'une mauvaise prise en compte de la monospécificité des Quinze-Vingt dans le calcul du point ISA. La procédure actuelle de financement des hôpitaux ne peut refléter fidèlement l'activité d'un tel établissement. Il nous semble donc indispensable de sortir les Quinze-Vingt de cette logique de régionalisation de l'allocation des ressources. D'autant que les activités de tutelle, notamment l'ARH d'Ile-de-France, ne semblent pas avoir les moyens d'évaluation budgétaire adaptés à l'ophtalmologie.

Représentant notre assemblée depuis 1997 au conseil d'administration des Quinze-Vingt, je souhaite savoir, Monsieur le ministre, ce que vous comptez faire pour permettre à cet établissement d'exercer sa mission ?

M. le Ministre - Vous auriez obtenu de ma part une réponse plus détaillée si vous m'aviez communiqué à l'avance votre question ; je m'engage cependant à vous la faire parvenir par écrit.

Je connais bien l'hôpital des Quinze-Vingt et j'ai reçu au moins trois fois le président du conseil d'administration. Je dois vous dire - non sans malice - que la gestion des Quinze-Vingt m'a conduit à me demander si vraiment le président du conseil d'administration d'un hôpital devait être un élu... Celui-ci ne l'est pas, et cet hôpital est remarquablement géré.

Ensuite, c'est un hôpital particulier par son mode de gestion et sa spécialité. Seuls trois hôpitaux assurent à Paris, cette garde ophtalmologique : les Quinze-Vingt, la Fondation Rothschild et l'Hôtel-Dieu. Pour des raisons d'économie, de mutualisation des compétences et de sécurité des patients, on concentre les malades ophtalmologiques sur les hôpitaux les plus performants, et je suis, à ce titre, particulièrement attentif au devenir des Quinze-Vingt.

Tout d'abord, j'ai accordé 150 000 euros supplémentaires en base mais surtout, l'avenir des Quinze-Vingt repose sur la tarification à l'activité.

Je n'ai qu'un regret : que l'hôpital des Quinze-Vingt n'ait pas été candidat à l'expérimentation pour la T2A dès l'année dernière. J'admire le travail accompli dans cet établissement et je ferai mon possible pour qu'il continue à fonctionner dans de bonnes conditions.

M. Pascal Terrasse - M. Henri Sicre tient à vous faire part de la colère et de l'indignation qui l'étreignent lorsqu'il songe à la situation catastrophique du secteur médico-social du Languedoc-Roussillon. En 2002, il manquait 1 778 places pour les enfants inadaptés, dont 1 289 places en établissement et 489 places en CESSAD. Il manquait en outre 965 places pour les adultes handicapés en MAS et en foyer occupationnel et 1 190 places en CAT.

Cette carence s'explique par les progrès de la médecine qui sauve les enfants à la naissance, mais laisse des séquelles physiques ou mentales, par l'allongement de la vie des handicapés, et par le fort taux de migration des populations.

Quelles mesures comptez-vous prendre ? Pour mesurer la réalité de mes propos, référez-vous au rapport de M. Bapt qui met en évidence l'écart entre les places financées et celles réellement installées. Ainsi, 2 501 places en MAS étaient financées, alors que seules 935 ont été installées. On vote des lois, mais par le jeu des gels de crédits, les places ne sont pas mobilisées ! Quand les 5 960 que nous avons votées l'an dernier seront-elles affectées aux régions ?

Mme la Secrétaire d'Etat - Si cette question nous avait été transmise, nous aurions pu y répondre plus précisément.

En 2003, sur le plan national, nous avons doublé le nombre de nouvelles places en CAT, et le nombre de nouvelles places en maison d'accueil spécialisé, et en foyer d'accueil médicalisé. Il est plus facile de créer des places en CAT, surtout lorsqu'il s'agit de compléter des programmes, que de créer de nouvelles structures - les MAS ou les FAM. Ces derniers sont budgétés pour 2003 - 2200 places supplémentaires - mais il faut laisser le temps de leur construction. On ne peut pas combler tout le retard en un an ou deux. Outre cet effort national, nous avons consenti un effort particulier pour certaines régions défavorisées, comme le Nord-Pas-de-Calais et le Languedoc-Roussillon. Je ne peux vous fournir de réponse plus précise pour le moment, mais je le ferai par écrit.

M. Jean-Claude Bois - Vous avez annoncé un plan pour l'hôpital et des plans régionaux d'investissement destinés à accompagner l'évolution de l'activité ou des projets d'investissement de certains établissements de santé. Malheureusement, ces plans ont négligé les réalités socio-économiques de chaque région. Quant à la décentralisation, les transferts de compétence aboutiront à une inégalité de traitement entre les régions. Ainsi, le Centre hospitalier de Lens subit une cure d'austérité, à l'inverse de ceux de Douai, Arras et Béthune.

La modernisation de cet hôpital public a été ignorée dans le plan « Hôpital 2007 », alors qu'il est au service de 400 000 habitants, dans un contexte de forte précarisation sociale.

Pourquoi les critères du plan « Hôpital 2007 » ne prennent-ils pas en compte les difficultés réelles des populations et du travail des acteurs de la santé sur le terrain ? Quels moyens allez-vous accorder au Centre hospitalier de Lens pour que sa modernisation soit poursuivie ?

M. le Ministre - Le Centre hospitalier de Lens est un établissement pivot qui a vocation à structurer l'offre de soins hospitaliers du Pas-de-Calais, en liaison avec les centres hospitaliers de Béthune et d'Arras et le centre hospitalier régional universitaire de Lille, pour les soins de recours.

Je suis étonné de votre question. Lorsque nous avons amorcé le plan « hôpital 2007 », il n'y avait aucun plan directeur à l'hôpital de Lens. C'est à la demande de l'ARH qu'une réflexion a été menée sur la reconstruction de l'hôpital. Nous ne pouvons répondre à des besoins qui ne reposent pas sur un dossier clairement établi.

Cependant, du fait des difficultés de la population, et au titre du soutien dû à cet hôpital, le centre hospitalier de Lens a bénéficié, depuis plusieurs années, d'une dotation budgétaire supérieure à la moyenne nationale - 5,45 % contre 4,96 % en 2003.

Enfin, grâce à la T2A, cet établissement bénéficiera directement de la péréquation.

Je vous engage, Monsieur Bois, à vous rapprocher de la direction de l'hôpital, de la présidence de la commission médicale d'établissement, voire du directeur de l'agence régionale d'hospitalisation pour vous assurer que la situation n'est pas de notre fait.

M. Henri Cuq - L'action en faveur des handicapés est impulsée par le Gouvernement, mais, sur le terrain, les syndicats et les associations se battent pour promouvoir leurs projets, tributaires des financements requis.

A cet égard, le syndicat intercommunal des établissements pour handicapés du Val-de-Seine projette de créer une nouvelle MAS de 48 places. Son président est dévoué à la cause des handicapés depuis une trentaine d'années. Ce projet a reçu l'aval du préfet de région en juin 2002, mais nous n'avons reçu aucune réponse précise quant au déblocage des crédits - plus de 700 000 €.

M. Pascal Terrasse - Hé oui !

M. Henri Cuq - Je sais que vos services ont suivi de près ce dossier et que vous avez reçu le président de ce syndicat. Pourriez-vous m'informer de l'état d'avancement de ce dossier ?

Mme la Secrétaire d'Etat - C'est vrai, le syndicat intercommunal a sollicité une subvention de l'Etat, au titre du contrat de plan Etat-région, de 768 343 €, pour la création de l'établissement.

L'administration centrale a accepté la proposition de la DASS des Yvelines de financer cette opération cette année, aussi ai-je le plaisir de vous annoncer que l'ordonnance comptable relative à l'autorisation de programme a été visée par le contrôleur financier vendredi dernier et parviendra au préfet de région avant la fin de ce mois (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme la Présidente - Voilà un député heureux !

M. Jean-Pierre Decool - 2003 est l'année européenne des personnes handicapées. Le Président de la République a fait de leur intégration l'un des trois chantiers de son quinquennat.

L'objectif du PLF pour 2004 est d'assurer cette intégration, de l'école à la vie professionnelle.

Cette action passe par un accueil de qualité dans les établissements spécialisés.

Le département du Nord ne dispose pas d'un nombre suffisant de places pour 2003, même si le plan pluriannuel de créations de places pour adultes et les mesures du plan triennal en faveur des personnes handicapées ont été renforcés.

Ainsi, l'enveloppe du plan triennal permettra, dans le Nord, de créer 263 places supplémentaires en 2003.

Néanmoins, de nombreux parents continuent de confier leurs enfants à des établissements situés en Belgique, ce qui entraîne des désagréments notamment en ce qui concerne les frais de transports, qui ne sont remboursés qu'à titre dérogatoire et à condition que le centre soit un établissement médical.

La France doit donc se doter d'établissements en nombre suffisant.

Quels seront les crédits affectés à la création de places supplémentaires pour 2004 à l'échelon national mais aussi pour le département du Nord ?

Mme la Secrétaire d'Etat - Le Nord-Pas-de-Calais, le Languedoc-Roussillon, l'Ile-de-France et la région PACA sont défavorisés en matière d'équipements médico-sociaux.

En 2003, une politique préférentielle a donc été menée en faveur de ces régions. Les places en maisons d'accueil spécialisées et en CAT ont ainsi doublé.

Le département du Nord a bénéficié en 2002 de 39 places de CAT et de 156 en 2003. Les places médicalisées étaient de 95 en 2002 et sont de 204 en 2003.

Mais il est vrai que des besoins insatisfaits demeurent. Si vous votez ce budget, nous pourrons créer sur le plan national 3 000 places en CAT et 2 200 places en maisons d'accueil spécialisées et en foyers d'accueil médicalisés.

Il y aura des répartitions régionales, mais qui n'ont pas encore été décidées.

En 2004, la région Nord-Pas-de-Calais continuera quoi qu'il en soit de faire l'objet d'une politique préférentielle.

M. Alain Ferry - Le handicap a trop longtemps été négligé par l'action publique. Or, l'égalité ne peut tolérer aucune forme d'exclusion. Je me félicite de ce que ce budget soit celui de l'efficacité retrouvée.

26 % des personnes handicapées sont sans emploi. Nombreuses parmi elles sont salariées à temps partiel et ne vivent pas décemment.

Je vous propose d'étendre le paiement de l'AAH aux personnes détentrices d'un contrat à temps partiel, notamment lorsque le salaire est équivalent ou inférieur au SMIC.

Il s'agirait de favoriser ainsi l'intégration sociale des personnes handicapées et de leur permettre, en maintenant des revenus suffisants, de mieux aménager leur logement ou d'améliorer leurs déplacements. Qu'en pensez-vous ?

Mme la Secrétaire d'Etat - L'AAH est en elle-même un minimum social très incitatif à l'activité en raison du mode de calcul qui prend pour base le revenu net catégoriel de la personne, moins 10 % puis moins 20 % du revenu brut.

Toutefois, cet avantage peut être annulé pour les personnes ayant de faibles revenus et qui bénéficient par ailleurs du complément d'AAH, soit 92,47 € mensuels.

A l'occasion de la réforme de la loi de 1975, nous avons donc envisagé de transformer le complément d'AAH en un élément du droit à compensation et de prévoir des modalités de cumul plus incitatives pour les personnes qui souhaitent travailler.

Le travail doit en effet être encouragé, à partir de formules très souples, de manière à ce que les personnes handicapées aient intérêt à travailler.

Nous ferons des propositions en ce sens dans la loi de 2004.

M. Gérard Bapt - En l'absence de M. Alain Claeys, je souhaite attirer l'attention sur la profession de diététicien. Le problème de l'obésité s'aggravera dans les années à venir. Or, le plan national santé-nutrition avait prévu la création de 800 places de diététiciens en milieu hospitalier, mais 40 places seulement ont été créées à ce jour.

De plus, cette profession semble exclue du tronc commun de la première année des études médicales et paramédicales.

Je souhaite donc que vous attachiez une attention particulière à cette situation.

M. le Ministre - Il s'agit là en effet d'une question importante.

J'ai moi-même été surpris de ce que les diététiciens ne figurent pas parmi les 14 professions médicales et paramédicales admises dans le tronc commun de la première année de formation.

La raison en est simple : ils ne font pas partie des professions réglementées par le code de la santé publique. Comment et dans quelles conditions les y faire entrer ? Nous allons l'examiner et d'autant plus que le doyen Berland a rédigé un rapport sur l'élargissement des champs de compétences des professions paramédicales.

M. Jean-Louis Dumont - J'aurais souhaité poser directement ma question à M. le ministre délégué à la famille, mais je pense que M. Mattei ou Mme Boisseau pourront me répondre.

Quelles actions le Gouvernement mènera-t-il suite à la Conférence sur la famille et au PLFSS de 2004 ?

Chacun connaît le rôle déterminant de la technicienne d'intervention familiale et sociale pour assurer un soutien pédagogique à domicile pour les jeunes enfants. De même, lorsqu'un couple doit choisir un mode de garde : emploi à domicile, assistante maternelle, crèche parentale ou crèche collective, municipale ou associative.

Je souhaite vous interroger sur les retombées d'une décision de la CNAF. A compter du 1er janvier prochain, un tiers du coût de journée en crèche sera supporté par la famille, un tiers par la CAF et le tiers restant par des partenaires extérieurs, publics ou privés. Que se passera-t-il lorsque la municipalité refusera de conventionner une structure, alors même que celle-ci fonctionne à la satisfaction générale depuis des décennies ?

Mme la Présidente - Veuillez conclure.

M. Jean-Louis Dumont - Accepterez-vous qu'une crèche ferme parce qu'un élu considère que conventionner, c'est déroger à l'égalité de traitement des familles ? Pensez-vous réaffirmer votre attachement aux crèches collectives ?

M. le Ministre - S'agissant d'un sujet que vous maîtrisez manifestement très bien, vous avez un peu fait la question et la réponse (Sourires). Je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de M. Christian Jacob, qui représente en ce moment le ministère de la santé au Sénat dans le cadre du débat sur les prélèvements obligatoires.

En créant la prestation pour l'accueil d'un jeune enfant, le Gouvernement manifeste sa volonté de ne privilégier aucun mode de garde a priori et d'en laisser le libre choix aux familles. Les crèches collectives bénéficient pour leur part du « plan crèches », doté de 200 millions en vue de créer 20 000 places...

M. Jean-Louis Dumont - Il faudra que le fonctionnement suive !

M. le Ministre - Parallèlement, les entreprises désireuses d'aider leurs salariés à faire accueillir leurs enfants dans des structures adaptées bénéficieront du crédit d'impôt familles, ouvrant une prise en charge fiscale de 60 %.

Si votre question, Monsieur le député, concernait un cas particulier, M. Jacob y apportera une réponse précise.

M. François Guillaume - Notre pays est confronté à un vieillissement rapide de sa population, lié à l'allongement substantiel de la durée de la vie qu'autorise la qualité de notre système de santé. D'où l'apparition d'un nouveau défi, celui de l'accompagnement de la dépendance. A l'évidence, la prévention des handicaps - et de leur aggravation - est directement liée à l'existence de soins de proximité. Or, le milieu rural est confronté à une grave désertification médicale. Pour y pallier, la création de maisons de santé vous paraît-elle constituer une solution satisfaisante ?

Au titre de l'accompagnement des personnes âgées, ne conviendrait-il pas de favoriser le maintien à domicile du plus grand nombre, pour réserver l'accès aux maisons de retraite aux personnes les plus dépendantes, compte tenu de l'insuffisance des lits répertoriés et de l'évolution des demandes que laisse présager le gonflement rapide des effectifs des personnes âgées de plus de 85 ans ! Si tel est son choix, le Gouvernement est-il prêt à en tirer toutes les conséquences, en soutenant les associations d'aide à domicile, et en développant en particulier la formation de leur personnel soignant ? Le coût des formations restant à la charge des intéressées - aides-soignantes, infirmières et auxiliaires de vie - reste actuellement très dissuasif.

Le Gouvernement entend-il assurer la médicalisation des maisons de retraite, de sorte qu'elles accueillent en priorité les personnes âgées en grande difficulté ?

Ces orientations sont-elles conformes au plan en faveur des personnes âgées dépendantes que vous venez de présenter ? Celui-ci répondra-t-il aux obligations financières, médicales et morales que nous sommes engagés à honorer au début de cette législature ?

M. le Ministre - Monsieur le député, vous avez eu raison de parler de « nouveau défi « . Si la sécurité sociale était créée aujourd'hui, à n'en pas douter, elle comporterait une branche spécifique pour le risque « dépendance ». En 1945, la longévité et la survie des personnes handicapées n'étaient pas telles que le problème de la perte d'autonomie se pose avec autant d'acuité qu'aujourd'hui. Il nous faut à présent élargir le champ de la protection sociale. Tel est l'objet du plan « vieillissement et solidarité » qui devrait s'appeler en réalité « plan de solidarité pour l'autonomie de ceux que le grand âge ou un handicap rendent dépendants ».

S'agissant des personnes âgées, le plan porté par M. Falco auprès de M. Fillon vise à améliorer le niveau d'encadrement en créant 13 200 emplois dans les établissements existants. Deuxième objectif, créer 10 000 nouvelles places médicales d'ici 2007, soit 1 800 emplois. Au total, 15 000 emplois doivent donc être créés en quatre ans. On aurait pu afficher plus - 30 000 ou 50 000 emplois ! - pour éviter la critique mais 15 000 emplois en quatre ans, cela veut dire former 4 000 personnes par an, sans savoir si elles seront volontaires ni combien de temps durera leur formation ! Bien sûr, ce n'est qu'un début mais d'autres prévisions eussent été irréalistes.

S'y ajoute du reste l'effort en faveur des établissements pour personnes âgées dépendantes - 300 millions de plus que cette année, décidés dans le cadre du PLFSS pour 2004 - et les 6 000 postes de coordonnateurs médicaux pourvus par des médecins titulaires du DES. J'indique au passage que ces fonctions de coordonnateur seront prochainement définies par un texte réglementaire, conformément à nos engagements.

Enfin, la valorisation des acquis de l'expérience devrait être mise en _uvre dès 2004. Des groupes de travail réunissant les professions concernées fonctionnent. Plusieurs professions paramédicales ont d'ores et déjà entrepris d'élaborer des référentiels métiers, à partir desquels se fera la valorisation des acquis. Les régions vont jouer un rôle croissant dans la formation initiale et continue des professionnels. C'est notamment le cas dès cette année dans les régions frontalières, où certaines infirmières étaient tentées d'aller exercer à l'étranger.

Connaissant, Monsieur le député, votre attachement au milieu rural, j'ajoute que les hôpitaux locaux jouent un rôle capital dans l'aménagement du territoire. Ils doivent rester à la disposition des personnes appartenant au bassin de vie.

M. Thierry Mariani - Les découpages administratifs préexistants sont parfois dépassés par la réalité des bassins de vie ! J'ai déjà eu l'occasion d'appeler votre attention sur la situation de l'hôpital de Valréas, lequel présente la particularité d'être situé dans « l'enclave des papes », territoire vauclusien de la région PACA, enclavé dans le département de la Drôme, et, par conséquent, dans la région Rhône-Alpes. L'hôpital de Valréas a élaboré son projet d'établissement en étroite collaboration avec l'ARH-PACA.

Un grand merci tout d'abord, puisque pour la première fois, le budget de l'établissement a été révisé. Une dotation plus conforme à l'activité a ainsi été attribuée. Toutefois, l'instruction du projet d'établissement reste suspendue à une décision relative à l'implantation d'un service de rééducation de 40 lits. Un tel service répondrait à un besoin de santé non couvert dans la Drôme, où un déficit de lits en rééducation orthopédique et neurologique a été identifié. L'implantation de ce service dans le sud de Rhône-Alpes constitue donc désormais une priorité du SROS de la région. Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous en faire part, l'implantation de cette activité à Valréas faciliterait grandement la validation du projet d'établissement. Surtout, compte tenu d'une situation géographique spécifique, cette solution présente le double avantage d'être à la fois intéressante au plan stratégique et peu coûteuse.

L'avantage stratégique de l'implantation à Valréas a du reste été reconnu par le directeur de l'ARH, eu égard aux possibilités de collaboration avec les différentes structures du bassin de santé. La décision reste cependant suspendue au vote de l'ONDAM et à l'attribution à la région Rhône-Alpes de l'enveloppe qui lui revient. Dans ces conditions, est-il déraisonnable, Monsieur le ministre, d'espérer, à l'issue de l'examen de ce budget, un dénouement favorable pour ce projet !

M. le Ministre - Vous avez eu raison d'évoquer la configuration géographique et les découpages administratifs ! L'exemple du centre hospitalier de Valréas est en effet assez significatif. La mise en _uvre, au sein du projet d'établissement, d'une unité de rééducation répond aux besoins du sud de la région Rhône-Alpes.

Sur ces zones, qui couvrent le sud de la Drôme et l'extrême nord de la région PACA, l'hôpital de Montélimar dispose de quarante lits de suites, dont dix seulement pour la rééducation. L'établissement souhaite conserver aux trente autres une orientation gériatrique, permettant de fluidifier l'aval des urgences.

Parallèlement, l'hôpital de Valréas voit ses activités redistribuées, avec notamment la fermeture de la chirurgie, laquelle pourrait permettre une reconversion en lits de soins de suites spécialisés en rééducation, correspondant aux besoins du sud de la Drôme.

Un plan de financement de cette opération sera mis en place dès le premier trimestre 2004. Le coût de fonctionnement prévisionnel de cette unité est évalué à 3 millions et sa mise en _uvre nécessitera la combinaison d'apports financiers des deux ARH et de redéploiements de crédits au sein du centre hospitalier de Valréas. Ce financement sera également facilité par le transfert des autorisations et des moyens correspondants aux 10 lits de rééducation du centre hospitalier de Montélimar.

Je gage que vous aurez satisfaction, et que l'hôpital de Valréas pourra ainsi continuer de rendre de signalés services à la population.

M. Jacques Pélissard - Le centre hospitalier général de Lons-le-Saunier affiche des performances exemplaires. Or, son exercice budgétaire pour 2004 laisse envisager des difficultés importantes pour l'ensemble des groupes de dépenses. C'est vrai d'abord pour les dépenses de personnel, l'application des 35 heures ayant entraîné une contraction du temps-agent mis à la disposition des soins et de la logistique. Cette situation est mal vécue dans les différents services. Un rebasage des dépenses de personnel s'avère donc indispensable.

Il en va de même pour les dépenses à caractère médical et pour celles du groupe III, hôtelières et générales, qui augmenteront très rapidement, avec la hausse des coûts d'assurance ou d'élimination des déchets. Ce groupe des dépenses n'a pas bénéficié d'une revalorisation budgétaire, même si la tutelle a assumé des efforts financiers en 2003 pour faire face à des charges nouvelles comme le transport sanitaire ou le nettoiement du linge.

Les dépenses du groupe IV augmenteront elles aussi, sous l'effet de l'application du plan directeur du centre hospitalier général, en conformité avec votre remarquable plan hôpital 2007. Les Jurassiens sont très attachés à l'établissement de Lons-le-Saunier. Croyez-vous possible son rebasage budgétaire, pour lui permettre de remplir au mieux ses missions ?

M. le Ministre - La situation de l'hôpital de Lons-le-Saunier est représentative de celle de nombreux établissements pivots. C'est en pensant d'abord à eux que nous avons inscrit dans le PLFSS la réforme fondamentale de la tarification à l'activité. En effet, en liant plus étroitement l'activité réelle des établissements et leur financement, le nouveau système permet de soutenir des établissements qui, comme celui de Lons-le-Saunier, ont réalisé des efforts d'organisation et de gestion. Cependant, l'ARH, consciente des difficultés rencontrées par votre hôpital, a abondé ses ressources de 255 000 € pour financer les travaux de restructuration du pôle mère-enfant, et de 502 400 € pour financer les surcoûts liés au nouveau traitement du linge.

Les difficultés découlant de l'application des 35 heures ne sont pas propres à l'hôpital de Lons-le-Saunier. Le Gouvernement a pris des mesures pour faciliter l'introduction de cette réforme à l'hôpital. Les accords conclus en janvier dernier avec les organisations syndicales feront sentir leurs premiers effets au début de 2004.

Des établissements comme celui de Lons-le-Saunier ont un rôle capital à jouer dans l'aménagement de notre territoire. Il faut veiller de très près à ce qu'ils puissent rendre les services que la population attend d'eux. J'interrogerai l'ARH sur la situation exacte dans laquelle se trouve cet hôpital.

M. Jacques Pélissard - M. Gérard Voisin s'inquiète de l'accueil des jeunes trop lourdement handicapés pour s'intégrer dans le milieu scolaire ordinaire. Cette situation intolérable pénalise des milliers de familles, privées du droit à la prise en charge de leur enfant, et révèle des inégalités territoriales. En Saône-et-Loire, une centaine d'enfants est dépourvue de toute solution d'accueil. M. Voisin juge indispensable un effort financier pour créer de nouvelles places. Il vous demande quelles mesures vous comptez prendre pour créer de nouvelles places d'accueil, en particulier au sein de l'IME d'Hurigny, près de Mâcon. Il est urgent d'agir.

Mme la Secrétaire d'Etat - C'est vrai, des milliers d'enfants lourdement handicapés ne sont pris en charge à aucun titre, ce qui est intolérable. Nous pensons que davantage d'enfants peuvent être scolarisés en milieu ordinaire, ce qui devrait libérer des places dans les établissements médico-éducatifs.

Pour les enfants très lourdement handicapés, 582 places ont été créées dans le cadre du plan triennal 2001-2002, abondé en 2003 par une enveloppe complémentaire de 1,21 million, soit 19,5 millions sur trois ans. Dans le même cadre, 885 places ont été créées pour les autistes, pour une somme de 24,65 millions en trois ans, et 728 places pour les traumatisés crâniens, pour un montant de 22,86 millions. Cet effort, poursuivi en 2004, sera amplifié grâce à la loi que vous examinerez l'an prochain, afin d'accueillir tous les enfants handicapés dans les structures qui leur conviennent le mieux.

Mme la Présidente - Nous avons terminé les questions. J'appelle les crédits inscrits à la ligne « Travail, santé, solidarité ; santé, famille, personnes handicapées et solidarité. »

Les crédits des titres III et IV de l'état B, successivement mis aux voix, sont adoptés, de même que les crédits des titres V et VI de l'état C.

ARTICLE 81

Mme la Présidente - J'appelle l'article 81 rattaché à ce budget.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial de la commission des finances - L'article 81 concerne la majoration des cinq taxes affectées à l'AFSSAPS, au moment où les missions de cette dernière s'élargissent, avec en 2004 un besoin de financement de 30,4 millions en sus de la subvention du ministère de la santé, qui a connu quelques fluctuations, passant de 17,7 millions en 2002, après régulation, à 4,7 millions pour cause de ponction du fonds de roulement et qui est rétablie à 18,7 millions pour 2004. Cette majoration de taxe semble justifiée.

Les trois amendements acceptés par la commission des finances sont rédactionnels, sauf le 112 qui tend à remplacer « redevance » par « taxe », terme plus approprié et présentant une meilleure garantie juridique.

M. le Ministre - Avis favorable

Les amendements 112, 113 et 114, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 81 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 81

Mme la Présidente - En accord avec la commission des finances, j'appelle l'amendement 179 tendant à insérer un article additionnel après l'article 81.

M. Jean-Luc Préel - Vous connaissez le rôle majeur rempli par les infirmières dans notre système de soins. La pénurie actuelle vous a conduit à augmenter le nombre d'élèves, qui est passé de 18 000 en 2000 à 30 000 en 2003. Qui doit supporter le coût de cette formation ?

Dans ce budget, vous destinez 28 millions d'euros aux IFSI non adossés à un établissement hospitalier, soit une augmentation de 16 % et de 3,8 millions d'euros. Fort bien, mais pour les autres, qui sont l'immense majorité, c'est le budget de l'hôpital, et donc l'assurance maladie, qui supportera le coût de cette formation. Or celui-ci est évalué à 1,5 % du budget hospitalier. Ne serait-il pas plus normal et logique que l'Etat assume cette charge, par l'intermédiaire du budget des ministères de la santé et de l'éducation nationale ?

Il est prévu, semble-t-il, de transférer aux régions la formation des infirmières et aides-soignantes, ainsi, sans doute que les financements correspondants. Une individualisation de ces crédits de formation dans le budget de l'Etat faciliterait cette opération. D'où l'amendement 179, visant à faire étudier le principe d'une enveloppe spécifique.

M. le Rapporteur spécial - L'amendement n'a pas été soumis à la commission. A titre personnel, je ne vois pas d'objection technique à une individualisation de cette dépense de formation au sein du budget de l'assurance maladie, mais je crois savoir que la décentralisation sera limitée aux immeubles et au fonctionnement, de sorte que la compensation devrait se borner aux dépenses de fonctionnement... Quoi qu'il en soit, j'insisterai pour qu'elle s'effectue à l'euro près.

M. le Ministre - La formation initiale des infirmières relève des missions de service public des hôpitaux, aux termes de l'article L. 612-1 du code de la santé publique, et son financement relève donc du PLFSS, comme le confirme l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale - seuls les instituts privés sont subventionnés par l'Etat, sur le chapitre 43-32 du présent budget.

L'ensemble de ces financements sera transféré aux régions en 2005, par l'article 58 du projet de loi sur les responsabilités locales, en même temps que la gestion et le financement des formations paramédicales et des écoles de sages-femmes. Les hôpitaux n'auront donc plus à financer que la formation continue des infirmiers et des autres agents de la fonction publique hospitalière, pris en charge par les établissements employeurs sur la base d'une cotisation de 2,1 % de la masse salariale, conformément à l'article 714-1 du code de la sécurité sociale.

L'amendement perdant de sa pertinence avec ce transfert, je vous suggérerai de le retirer, Monsieur Préel.

M. Jean-Luc Préel - Ce que je fais volontiers !

L'amendement 179 est retiré.

ART. 82

Mme Catherine Génisson - L'amendement 177 vise à supprimer cet article qui, sous couvert d'unifier la prise en charge des dépenses de couverture maladie universelle complémentaire - CMUC -, met fin à la participation de l'Etat. Il en résulterait pour celui-ci une économie de 117 millions d'euros, ce montant se retrouvant à la charge de l'assurance maladie, dans des conditions non explicitées.

Cette disposition pose d'abord des problèmes de forme. Elle n'a pas été soumise pour concertation préalable aux organismes compétents de l'assurance maladie, alors que l'article L. 200-3 du code de la sécurité sociale oblige à saisir pour avis le conseil d'administration de la CNAMTS de toute mesure susceptible d'avoir des incidences sur l'équilibre financier de la branche. De surcroît, le PLFSS ne comporte aucune disposition relative à cette mesure, qui se trouve ainsi doublement entachée d'illégalité.

Elle peut, en première analyse, être assimilée à un transfert de charge financière du budget de l'Etat vers les régimes sociaux, transfert pour le moins inopportun. Mais elle consiste aussi à homogénéiser le traitement accordé aux organismes de sécurité sociale et aux organismes complémentaires qui participent à la CMUC, chacun étant désormais remboursé de ses dépenses pour un montant forfaitaire identique, porté à 300 € par bénéficiaire en 2004, et le surcoût restant à leur charge. Or, jusqu'ici, les caisses, bénéficiant d'un régime dérogatoire, étaient remboursées au franc le franc par le budget de l'Etat...

Le remboursement de la part complémentaire a le caractère d'une prestation d'Etat servie sous condition de ressources et gérée par les caisses d'assurance maladie, en application de l'article L. 861-4 du code de la sécurité sociale. Intégralement remboursées, ces caisses se trouvaient assurer à l'Etat une simple avance de trésorerie. Ce ne sera plus le cas si l'on adopte l'article 82 - sans d'ailleurs avoir modifié pour autant l'article L. 861-4 issu de la loi instituant la CMU !

Il en résulte d'abord que la charge correspondante doit être imputée, soit sur le budget des prestations extralégales, soit sur les prestations légales, mais la loi de finances ne tranche pas. Dans le premier cas, cela conduit à réduire à due concurrence les prestations d'action sanitaire et sociale versées par les caisses ; dans le second, on assimile à des prestations légales des dépenses qui ne relèvent que de la protection complémentaire. Dans les deux cas, les caisses seront placées sur le même plan que les organismes complémentaires, sans tenir compte de l'obligation où elles se trouvent d'accueillir tous les bénéficiaires potentiels de la CMUC.

Les caisses se trouvent donc de fait investies d'une nouvelle mission d'assureur complémentaire, ce qui implique un risque financier et crée un précédent qui n'est pas sans conséquence au regard du droit de la concurrence.

Le glissement conceptuel n'est pas mineur non plus : si l'on considère que la charge est assimilable à une prestation légale, cela signifie de façon incidente et sans débat préalable que l'assurance maladie est désormais vouée à prendre en charge la quasi-totalité des dépenses de soins d'une partie de ses bénéficiaires sous condition de ressources. Cette introduction d'un critère de revenu justifiant une prise en charge à 100 % est sans précédent.

Tous ces arguments militent donc pour l'abandon pur et simple de la mesure.

M. le Rapporteur spécial - J'avais présenté un amendement similaire que la commission a repoussé, mais je me félicite que mon groupe ait repris l'idée. Selon vous, Monsieur le Ministre, lorsque la CMUC a été instituée, on a placé sur le même pied les organismes complémentaires et les caisses primaires. Mais ces dernières agissaient au nom de l'Etat, ce qui justifiait leur remboursement intégral. En leur appliquant le système du forfait, on les fait glisser vers le champ de l'assurance - un champ concurrentiel. La nature même de leurs missions en est changée, ce qui pose un problème juridique. Pour la première fois, elles devront supporter à 100 % des dépenses d'assurance maladie complémentaire, en fonction d'un critère de ressources !

De surcroît, par cette décision, on s'expose à tomber sous le coup de la directive européenne et à voir contester le caractère de service public de ces caisses. Aussi, même si la majorité vote cet article, il serait bon que vous exposiez précisément la position du Gouvernement.

M. le Ministre - Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement. La mesure vise à maîtriser l'augmentation des dépenses de CMU complémentaire en responsabilisant les gestionnaires des régimes obligatoires comme le sont déjà ceux des organismes complémentaires. J'entends bien qu'il faut distinguer entre le service public et ces derniers - encore qu'ils ne s'inscrivent pas tous dans le champ concurrentiel car on compte parmi eux les mutuelles et les organismes de prévoyance. Mais le forfait de 300 € - soit une progression de 17 % par rapport à 2003 - a été fixé parce qu'il correspond au coût effectif de la CMUC pour un organisme de protection complémentaire. Ce n'est donc ni un forfait au rabais ni un forfait irréaliste. Il est vrai que la moyenne dissimule des disparités, le coût étant plus élevé pour les régimes obligatoires. Mais précisément, nous pensons qu'une modération des dépenses est possible et que les caisses ont la possibilité d'agir en ce sens, en améliorant leur gestion. Il n'y a d'ailleurs aucune raison pour que la dépense soit différente ici et là.

J'espère donc que cet amendement ne sera pas voté. En outre, si le forfait ne couvrait pas les dépenses des caisses, le différentiel ne serait pas imputé sur le Fonds national d'action sanitaire et sociale, mais viendrait en déduction de la part des cotisations finançant le risque maladie. Enfin, Madame Génisson, traditionnellement les lois de finances ne sont pas soumises à l'avis du conseil d'administration de la CNAM, en raison des contraintes de délais qui pèsent sur leur présentation au Parlement. Le Conseil d'Etat a compris ces contraintes et ne s'est pas opposé à cette procédure accélérée. Il n'y a donc aucune illégalité dans la procédure appliquée à cet article. Pour ce qui est de la directive, nous verrons bien comment l'Union européenne réagit à cette disposition. Mais je crois que nous sommes là dans une étrange confusion. Quand on a voté la loi CMU, on a décidé que les régimes obligatoires pourraient assumer en même temps la complémentaire, avec des estimations du type cinquante-cinquante. J'ai soutenu alors que, l'inscription se faisant obligatoirement au niveau de la caisse obligatoire, il y aurait une distorsion de concurrence. On l'a nié. Les faits l'ont confirmé : 15 % seulement vont vers les régimes complémentaires.

Je trouve normal que le coût soit le même, pour les mêmes patients, en régime obligatoire et en régime complémentaire. Si d'aventure cette disposition n'était pas validée par l'Union européenne, nous en prendrions d'autres, mais toujours avec le souci de gommer cette disparité.

M. Pascal Terrasse - Le point sur lequel nous avons un désaccord profond, Monsieur le ministre, c'est le coût du panier de soins. Nous contestons le niveau de 300 € auquel vous l'avez fixé. Toutes les analyses montrent qu'aujourd'hui ce coût se situe aux alentours de 333 €. Vous le fixez à 300 : il y aura donc pour les assurances complémentaires un manque à gagner. D'autant qu'elles seront appelées en 2004 à augmenter sensiblement leurs cotisations, de 10 à 15 %. Si en effet le coût dépasse 300 €, qui prendra en charge cette différence ? L'augmentation du forfait hospitalier et le déremboursement de certains médicaments seront déjà la source d'une forte augmentation, dont les assurés sociaux s'apercevront dès janvier ; la hausse pourra atteindre 12, voire 20 %, selon la Fédération nationale de la mutualité française. L'amendement 132, qui retient un coût de 326 €, me semble un juste milieu entre vos 300 € et les 333 € de coût réel.

Mme Jacqueline Fraysse - Un mot sur la disparité que vous dénoncez, Monsieur le ministre. S'il y a tant de personnes qui prennent leur complémentaire à la caisse maladie, c'est qu'elles y sont mieux remboursées. La disparité m'importe moins que la qualité du remboursement. J'ai exprimé dans la discussion générale notre préoccupation devant cet article 82 qui, en supprimant la participation de l'Etat au financement de la CMU complémentaire, pour la transférer à la CNAM, va accroître la charge des régimes sociaux, déjà en grande difficulté. Je voterai donc l'amendement de suppression.

M. le Ministre - L'amendement 177 et les suivants traduisent une même approche, comme l'a indiqué le fait que M. Terrasse a déjà commencé à défendre le 132. Une chose tout d'abord m'étonne : M. Bapt argumentait contre notre article sur un plan juridique. M. Terrasse écarte le point de vue juridique : son désaccord porte sur un montant. Je lui en donne acte. Mais tout de même, Monsieur Terrasse, vous ne manquez pas d'audace, quand vous nous reprochez de limiter notre revalorisation à 300 €. Quand la CMU a été créée en 1999, ce montant a été fixé à 228 €. En 2000, rien, pas de revalorisation. En 2001, rien. En 2002, rien ! C'est nous qui en 2003 l'avons porté de 228 à 283 € et cette année à 300 ! A vous entendre, il aurait fallu passer en deux ans de 228 à 326 € ! Reconnaissez que vous nous demandez beaucoup, quand vous n'avez pas fait grand-chose... A nos yeux, ce calcul représente une valeur médiane qui correspond à la réalité.

D'autre part, en relisant les débats sur la CMU, et la séance du 24 octobre 2001, je vois Mme la ministre de la santé déclarer ce qui suit, en réponse d'ailleurs à Mme Génisson : « un avenant à la convention d'objectifs et de gestion de la CNAM déterminera le montant et les modalités de cette aide. Les opérateurs de la couverture complémentaire jouent un rôle déterminant dans la gestion de la CMU, car un nouveau bénéficiaire sur trois choisit d'adhérer à un de ces organismes. J'entends tout faire, y compris à propos du montant de leur contribution à la CMU, pour qu'il continue à en être ainsi ». Mais c'est ce que nous essayons de faire ! Comprenons-nous bien. Je pourrais ouvrir une discussion sur la participation accrue des mutuelles. J'entends dire bien des choses, mais les chiffres sont clairs. Il est vrai que certains taux de remboursement ont baissé de 65 à 35 %, ce qui est une charge accrue pour les mutuelles. Et il est vrai qu'il va y avoir une hausse du forfait journalier, que certaines mutuelles prennent en charge. Il est vrai que des augmentations affectent certaines interventions des mutuelles. Mais globalement, dans le chiffre d'affaires des mutuelles, on oublie de dire que l'augmentation de 11,2 % du nombre de personnes admises au régime de longue durée vient en défraiement de la participation des couvertures complémentaires. Et en définitive, aujourd'hui, ce sont 2 % de moins, globalement, que remboursent les mutuelles, dans la mesure où ce sont les régimes obligatoires qui paient 100 % de tous ceux qui sont admis au régime à 100 %. Je ne veux pas entrer dans une étude comptable. Et je comprends bien que les mutuelles profitent des occasions qui leur sont données d'augmenter les cotisations et probablement d'ajuster leurs coûts ; mais il ne faut pas en faire un argument, alors que les Français, autrefois remboursés à 76 %, le sont à 78 % aujourd'hui, par le simple effet de l'augmentation du régime de longue durée.

Enfin, Madame Fraysse, quel est l'objectif ? Offrir aux personnes dont les ressources ne suffisent pas pour assumer le coût des soins la possibilité d'être soignées comme il se doit, sans discrimination. D'un côté, vous avez le régime obligatoire, qui assume le remboursement du régime de base, et qui peut en outre assurer le complémentaire. De l'autre, vous avez les régimes complémentaires, qui peuvent assurer à l'occasion le complément du régime de base. Mais il y a une distorsion entre ces deux compléments. Dans le régime obligatoire, c'est au franc le franc, et l'on n'a pas les mêmes critères de gestion. Dans un régime complémentaire, on est limité par une enveloppe. Dans les deux cas, que se passe-t-il en cas de dépassement ? Dans le régime obligatoire, ce dépassement s'impute sur le budget général, et creuse le déficit, ce qui incite à augmenter les recettes éventuelles, auprès des cotisants, c'est-à-dire de l'ensemble des citoyens. Quand c'est un régime complémentaire qui est en déficit, cela va rejaillir sur la cotisation des adhérents de la mutuelle, de l'assurance ou de l'institution de prévoyance.

A mes yeux, il y a un métier de complémentaire et un métier de régime obligatoire, et ce n'est pas le même. La loi CMU a voulu que le régime obligatoire puisse faire le complémentaire : soit. Mais alors que cela se fasse dans des conditions égales des deux côtés.

L'amendement 177, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gérard Bapt - Je veux préciser la différence entre l'amendement 177 de suppression et l'amendement 132. Le premier se justifiait par des arguments de principe : le transfert du système de forfaitisation aux caisses primaires changeait la nature de leur intervention dans le champ assurantiel, et créait un risque d'instabilité juridique. Mais il y a un autre élément, qui nous conduit à l'amendement suivant : au passage, le budget de l'Etat réalise une économie de 117 millions d'euros, au détriment de l'assurance maladie.

Or, il s'agit d'une mesure qui est de la compétence de l'Etat, puisque c'est une mesure sociale, sur condition de ressources. L'assurance maladie n'a pas à faire la politique sociale de l'Etat. S'il y a une économie de 117 millions, qu'en conclure ? Il est bon que le forfait soit porté à 300 €, comme il était bon - pour les organismes complémentaires tout au moins - de le relever déjà l'an passé.

L'économie de 117 millions d'euros réalisée par l'Etat grâce au passage du forfait à 300 € représente autant de charges supplémentaires pour les caisses. Quant au coût réel, il s'élève à 333 € par bénéficiaire, aussi l'amendement 132 tend-il à se rapprocher de ce coût réel sans tomber sous le coup de l'article 40, en proposant un forfait à 326 €.

M. le Ministre - Défavorable.

Mme Catherine Génisson - Vous ne m'avez pas répondu, Monsieur le ministre. Votre dispositif conduit à la prise en compte d'un critère de revenu comme justificatif de la prise en charge à 100 pour 100, ce qui est sans précédent au niveau de l'assurance maladie.

M. le Ministre - Je ne peux répondre à cet argument que je ne comprends pas. On est admis à la CMU en fonction de ses revenus.

M. Jean-Luc Préel - Chacun choisit sa complémentaire comme il l'entend !

L'amendement 132, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gérard Bapt - L'amendement 133 est un amendement de repli pour que le plafond du forfait soit réévalué en fonction du coût de la vie.

M. le Ministre - Vous voilà converti à l'idée que la déduction forfaitaire pour la CMU complémentaire doit évoluer. Je suis d'accord, mais pas dans les conditions que vous proposez.

En effet ces dernières années, l'évolution des dépenses de complémentaire a été plus élevée que l'évolution des prix.

Chaque année, en droit, les organismes de protection complémentaire transmettent au fonds CMU les données concernant leur coût par bénéficiaire, et les organismes d'assurance maladie établissent régulièrement des états comptables et statistiques retraçant l'évolution des dépenses de CMU complémentaire. C'est sur ces bases que le Gouvernement a proposé l'actualisation du forfait au PLF 2003 - plus 24 % - comme aujourd'hui au PLF 2004 - plus 6 % - et nous continuerons ainsi, en concertation avec l'ensemble des acteurs. La réforme de l'assurance maladie sera l'occasion de débattre de l'aide systématique à l'acquisition d'une complémentaire en fonction du revenu. Nous reviendrons sur ce sujet. Avis défavorable.

M. Gérard Bapt - Je retire l'amendement.

L'article 82, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

Prochaine séance, ce matin, jeudi 13 novembre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 0 heure 10.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 13 NOVEMBRE 2003

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093.)

M. Gilles CARREZ, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 1110.)

- Justice ; article 79

M. Pierre ALBERTINI, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 33 du rapport n° 1110.)

- Administration centrale et services judiciaires :

M. Jean-Paul GARRAUD, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Tome V de l'avis n° 1115.)

- Services pénitentiaires et protection judiciaire de la jeunesse :

Mme Valérie PECRESSE, rapporteure pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Tome VI de l'avis n° 1115.)

Economie, finances et industrie : charges communes, services financiers, budget annexe des monnaies et médailles, trésor, commerce extérieur, industrie, Poste et télécommunications ; article 52

- Charges communes :

M. Daniel GARRIGUE, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 14 du rapport n° 1110.)

- Services financiers, monnaies et médailles :

M. Thierry CARCENAC, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 19 du rapport n° 1110.)

- Commerce extérieur :

M. Camille DE ROCCA SERRA, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 15 du rapport n° 1110.)

M. Jean-Paul BACQUET, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères. (Tome VI de l'avis n° 1113.)

Mme Geneviève PERRIN-GAILLARD, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Tome V de l'avis n° 1112.)

- Industrie :

M. Hervé NOVELLI, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 16 du rapport n° 1110.)

M. Jacques MASDEU-ARUS, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Tome VI de l'avis n° 1112.)

- Poste et télécommunications :

M. Alain JOYANDET, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 18 du rapport n° 1110.)

Mme Catherine VAUTRIN, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Tome VIII de l'avis n° 1112.)

- Trésor et entreprises publiques :

M. Michel DIEFENBACHER, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 43 du rapport n° 1110.)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


© Assemblée nationale