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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 38ème jour de séance, 96ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 10 DÉCEMBRE 2003

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

Sommaire

BIOÉTHIQUE - deuxième lecture - (suite) 2

AVANT L'ART. 5 (suite) 2

ART. 5 2

ART. 6 3

ART. 7 3

APRÈS L'ART. 7 5

ART. 8 5

ART. 8 BIS 7

ART. 11 7

ART. 12 BIS A 7

APRÈS L'ART. 12 BIS A 8

ART. 12 BIS 8

ART. 12 TER 15

ART. 13 15

ART. 14 15

AVANT L'ART. 15 16

ART. 15 16

ART. 15 BIS 19

AVANT L'ART. 16 19

ART. 16 19

ART. 17 19

ORDRE DU JOUR DU JEUDI 11 DÉCEMBRE 24

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

BIOÉTHIQUE - deuxième lecture - (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion en deuxième lecture du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la bioéthique.

AVANT L'ART. 5 (suite)

Mme Jacqueline Fraysse - Le manque de greffons est patent en France. Par l'amendement 99, nous souhaitons profiter des journées d'appel pour sensibiliser les jeunes gens et les jeunes filles à ce problème et leur permettre d'exprimer s'ils souhaitent être donneurs potentiels et, par la même, citoyens solidaires.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur de la commission des affaires culturelles - La commission a repoussé l'amendement 99, mais elle a adopté l'amendement 18, 2e rectification, qui est défendu.

De ce fait, l'amendement 99 est satisfait.

Mme Jacqueline Fraysse - L'amendement 99 est retiré.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Avis favorable à l'amendement 18, 2e rectification.

L'amendement 18, 2e rectification, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

M. le Rapporteur - L'amendement 54 rectifié clarifie la rédaction du deuxième alinéa de l'article visant les situations où il peut être dérogé à l'obligation d'informer les personnes sur lesquelles des éléments et produits du corps humain ont été prélevés avant tout changement de finalité concernant l'utilisation de ces éléments.

L'amendement 54 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 217 tend à permettre aux personnes se prêtant à un prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules dans l'intérêt thérapeutique d'un receveur de bénéficier du dispositif d'indemnisation des accidents médicaux.

L'amendement 217, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Claeys - L'amendement 143 rétablit le terme « hors de proportion » - adopté en première lecture - à l'article L.1211-6 du code de la santé publique. L'acte médical n'étant jamais dénué de risques, le risque prévisible couru par le receveur doit être hors de proportion avec l'avantage escompté plutôt que « supérieur ».

M. le Rapporteur - Rejet, car le terme « supérieur » est plus clair.

L'amendement 143, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Claeys - Par l'amendement 144, nous proposons d'inscrire dans la loi que la reconnaissance de la nation est acquise aux personnes faisant don, à des fins médicales ou scientifiques, d'éléments ou de produits de leur corps.

M. le Rapporteur - La commission n'est pas favorable à cet amendement car elle l'estime superfétatoire. En effet, des lieux de mémoire seront aménagés dans tout établissement pratiquant le prélèvement d'organes. Ici même, un arbre des donneurs a été planté. La reconnaissance due aux donneurs est par conséquent clairement réaffirmée.

L'amendement 144, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 6

M. le Rapporteur - Afin de ne pas pénaliser la recherche, l'amendement 241 vise à ce que les produits sanguins puissent être distribués et utilisés à des fins de recherche - à l'exclusion de toute administration à l'homme - avant l'obtention des résultats des diverses analyses biologiques et tests de dépistages.

L'amendement 241, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 242 rectifié subordonne le prélèvement de sang sur une personne mineure à l'absence de donneur majeur immunologiquement compatible.

L'amendement 242 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 243 rectifié complète la liste des produits à finalité sanitaire pouvant être préparés à partir du sang et de ses composants, en y ajoutant les excipients de médicaments ou les adjuvants de fabrication et encadre l'utilisation des produits sanguins pour effectuer les contrôles de qualité des analyses de biologie médicale et des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.

L'amendement 243 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - Les prélèvements de sang ne comportant que des risques négligeables sont actuellement régis par les dispositions de la loi Huriet et le régime applicable aux collections d'échantillons biologiques humains est distinct de celui des recherches biomédicales. En vue de simplifier les procédures, le Gouvernement propose, par l'amendement 218, de retenir une procédure unique pour les hémathèques constituées à partir de prélèvements de sang ne comportant que des risques négligeables.

L'amendement 218, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 6 modifié.

ART. 7

M. le Rapporteur - L'amendement 240 rectifié de la commission est essentiel, puisqu'il inscrit dans la loi que l'activité de prélèvement et de greffe constitue une priorité nationale. Tout doit être mis en _uvre pour développer la greffe d'organe. En effet, le nombre de décès enregistrés chaque année sur la liste d'attente de greffes entre 1996 et 2000 reste désespérément élevé - 200 à 250.

Par ailleurs, l'attribution des organes reste problématique : délais, choix du receveur, égalité des régions et des CHU. La loi doit rappeler que le principe d'équité prévaut en matière d'attribution des organes.

M. le Ministre - Le Gouvernement est très favorable à cet amendement. Il est impératif que la greffe soit élevée au rang de priorité nationale et que le principe d'équité soit respecté dans l'attribution des greffons.

L'amendement 240 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Par l'amendement 56, la commission propose que le comité d'experts soit automatiquement saisi pour les donneurs familiaux, à l'exception du père ou de la mère du receveur. Il est impératif d'encadrer l'élargissement du cercle des donneurs vivants que prévoit le texte.

M. le Ministre - Favorable.

Mme Catherine Génisson - Notre sous-amendement 145 rétablit le texte adopté en première lecture par notre Assemblée, lequel se fondait sur la notion de « lien étroit et stable » entre le donneur et le receveur. C'est la pénurie de prélèvements d'organes opérés sur des personnes décédées qui nous contraint - pour une durée que nous espérons limitée - à élargir le champ des donneurs vivants. En effet, le prélèvement sur donneur vivant n'est pas sans risque. S'agissant des prélèvements opérés sur des parties de foie, 1 % de décès sont à déplorer. Un tel niveau de risque est effrayant ! (Assentiment de M. le ministre) Un donneur vivant de rein sur 3 000 décède. Cela reste un chiffre élevé.

Dans ces conditions, nous considérons qu'il faut absolument promouvoir le prélèvement d'organes sur personnes décédées plutôt que d'admettre comme un fait définitivement acquis l'élargissement du champ des donneurs vivants. Mais, dans la mesure où le prélèvement sur donneurs vivants s'impose, il n'y a pas lieu de le limiter au cercle familial. Il importe qu'existent entre le receveur et le donneur des liens « étroits et stables », et l'on est généralement plus proche de son compagnon ou d'un ami intime que d'un cousin éloigné ! S'il y a une limite à poser, fixons-la dans le temps, en prévoyant que la question du prélèvement sur donneur vivant devra être revue à chaque révision des lois bioéthiques.

M. le Rapporteur - Nombre de commissaires se retrouvent dans ce que vient d'exprimer Mme Génisson mais il nous a semblé préférable de restreindre le cercle des donneurs vivants à la famille du receveur.

En faisant du don d'organe une priorité nationale, nous voulons inverser la tendance, de sorte que ce soit les prélèvements sur donneurs cadavériques qui augmentent continûment. La commission a donc repoussé le sous-amendement 145.

M. le Ministre - Même avis.

Le sous-amendement 145, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 56, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 57 supprime la disposition introduite par le Sénat tendant à exiger que le parent d'un enfant mineur obtienne l'accord de l'autre parent pour pouvoir donner un organe de son vivant. Avoir à charge des enfants mineurs ne doit pas interdire à un individu d'exercer seul la liberté de donner un organe.

M. le Ministre - Sagesse. Au titre de la solidarité familiale, il ne semble pas inutile que les deux parents soient d'accord pour que l'un d'entre eux prenne une telle décision.

M. Alain Claeys - Nous soutenons l'amendement de la commission.

L'amendement 57, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 58 est rédactionnel.

L'amendement 58, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 59, 2e correction, tend à éviter le contournement de la règle du consentement présumé. Dans les faits, les proches sont interrogés sur leur propre volonté et non sur la volonté du défunt, même si elle est connue. La notion de « témoignage » donne à la famille un rôle que le législateur n'avait pas prévu.

L'amendement 59, 2e correction, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'article L. 1232-5 du code de la santé publique issu de la loi de 1994 impose aux médecins ayant procédé à un prélèvement sur une personne décédée de « s'assurer de la restauration décente du corps ». L'amendement 60 rectifié de la commission vise à renforcer cette obligation éminemment éthique, non seulement à l'égard des morts, mais aussi à l'égard des familles, en indiquant qu'ils sont tenus de « s'assurer de la meilleure restauration possible du corps ».

L'amendement 60 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Christine Boutin - Je reprends l'amendement 196 de M. Villain.

M. le Rapporteur - Rejet, car il est contraire à la règle du consentement présumé.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 196, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Génisson - L'amendement 146 est défendu.

M. le Rapporteur - Rejet, pour les mêmes raisons que précédemment.

L'amendement 146, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 245 est de coordination.

L'amendement 245, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 253 est rédactionnel.

L'amendement 253, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 7 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 7

M. Alain Claeys - L'amendement 147 est défendu.

M. le Rapporteur - La commission l'a accepté.

M. le Ministre - Sagesse.

L'amendement 147, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 61 rectifié vise à intégrer le prélèvement d'organes et de tissus dans les missions de service public exercées par tous les établissements de santé.

M. le Ministre - Favorable.

Mme Catherine Génisson - On ne peut être que pour cet amendement, mais c'est une sorte de v_u pieux. On pourrait en restreindre le champ aux établissements de santé qui disposent d'un service d'accueil d'urgence ; et même parmi ceux-ci, tous ne sont pas capables aujourd'hui d'exercer cette mission, faute notamment de personnel formé et de locaux adaptés.

L'amendement 61 rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 8

M. le Rapporteur - L'amendement 247 a pour but de préciser que le prélèvement de tissus ou de cellules ou la collecte de produits du corps humain, qui peuvent être opérés dans un but thérapeutique ou scientifique, peuvent aussi avoir pour finalité la réalisation ou le contrôle de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro ou encore le contrôle de qualité des analyses de biologie médicale. Son objet est également de spécifier que les prélèvements utilisés à des fins de contrôle doivent être réalisés dans le respect des règles d'information et de consentement.

L'amendement 247, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'amendement 149 tombe.

M. le Rapporteur - L'amendement 246 substitue aux mots « cellules de la moelle hématopoïétique » les mots « cellules hématopoïétiques issues de la moelle osseuse ».

Les amendements 248 et 249 font de même.

M. le Ministre - Avis favorable.

L'amendement 246, mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 248 et 249.

Mme Jacqueline Fraysse - Dans le IV de cet article, une distinction est faite, parmi les produits cellulaires humains à finalité thérapeutique, entre ceux qui sont des spécialités pharmaceutiques, relevant des dispositions relatives aux médicaments, et ceux qui sont des préparations.

Cette distinction est en fait assez floue et, au vu de la définition du médicament qui figure à l'article L. 511-1 du code de la santé publique, il n'est pas impossible de considérer que chaque produit cellulaire à finalité thérapeutique en est un. On risque ainsi d'élargir le champ du commerce de ces produits humains. Notre amendement 102 vise à faire en sorte que les produits cellulaires continuent de relever uniquement du don.

M. le Rapporteur - Rejet, car le développement des biotechnologies rend nécessaire la reconnaissance des produits cellulaires comme une spécialité pharmaceutique.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 102, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Jacqueline Fraysse - Notre amendement 100 vise à exclure les établissements et organismes à but lucratif de la liste de ceux qui sont potentiellement autorisés à assurer la préparation, la conservation, la distribution et la cession à des fins thérapeutiques des tissus et de leurs dérivés.

Certains établissements privés sont déjà autorisés à produire des préparations de tissus cellulaires, mais il n'est pas inutile de préciser dans la loi qu'il ne peut s'agir que d'établissements à but non lucratif, comme c'est déjà le cas, par exemple, pour les préparations de peaux destinées à traiter les brûlés.

M. le Rapporteur - La commission a rejeté cet amendement, mais elle a pris en considération les arguments de Mme Fraysse. Ainsi qu'elle l'a elle-même remarqué, le matériel nécessaire à certaines greffes de peau est déjà préparé dans des laboratoires privés, qui ne doivent pas être stigmatisés. L'agence de biomédecine va contrôler tous les produits cellulaires, qu'ils soient issus de laboratoires privés ou publics, à but lucratif ou non.

L'amendement 100, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 64 rectifié précise que la déclaration est adressée au ministre de la recherche et, le cas échéant, à celui de la santé.

L'amendement 64 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 221 vise à harmoniser les délais pendant lesquels les ministres de la recherche et de la santé peuvent s'opposer à la constitution et à l'utilisation de collections d'échantillons biologiques.

M. le Rapporteur - L'amendement 65 est retiré, et la commission a donné un avis favorable à l'amendement 221.

L'amendement 221, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 219 est de cohérence.

L'amendement 219, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 238 étend l'harmonisation des procédures proposée par l'amendement 182 à l'ensemble des situations où des collections servent à des recherches biomédicales. Rien ne justifie de réserver cette simplification aux recherches portant sur des produits de santé. D'autre part, dans un souci de simplification, il propose d'appliquer à ces situations le régime des recherches biomédicales, au lieu d'un troisième régime distinct de ce dernier et du régime des collections.

L'amendement 238, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Claeys - L'amendement 148 vise à ce que le ministère de la recherche puisse faire la déclaration préalable quelle que soit la nature de l'établissement.

L'amendement 148, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Claeys - L'amendement 150 rétablit un rapport au ministre de la santé plutôt qu'à l'agence régionale d'hospitalisation.

L'amendement 150, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 281 est rédactionnel.

L'amendement 281, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 250 est de cohérence.

L'amendement 250, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 251 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 251 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Yves Le Déaut - L'amendement 128 ajoute à « organismes » les mots « ou centres de recherche », car ces derniers peuvent également conduire des recherches sur les cellules et les tissus.

M. le Rapporteur - Avis défavorable, car le terme générique d'organismes inclut les centres de recherche.

M. le Ministre - Même avis. La notion de centre de recherche n'est pas une réalité juridique spécifique et cet amendement pourrait être source d'ambiguïtés.

L'amendement 128, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 282 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 282 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 220 est à la fois rédactionnel et de coordination.

L'amendement 220, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'article 8, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 8 BIS

M. le Rapporteur - L'amendement 71 rectifié est de cohérence.

L'amendement 71 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 8 bis, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 10, mis aux voix, est adopté.

ART. 11

M. le Président - Je vais maintenant appeler l'article 11 du projet de loi, qui a été adopté par les deux assemblées en des termes identiques, mais sur lequel la commission a déposé deux amendements.

M. le Rapporteur - Les amendements 252 et 72 sont de coordination.

Les amendements 252 et 72, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 11, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 12 BIS A

M. le Rapporteur - L'amendement 73 est de coordination avec l'article premier A.

L'amendement 73, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 12 bis A est ainsi supprimé.

APRÈS L'ART. 12 BIS A

M. le Rapporteur - L'amendement 74 insère une division pour mieux structurer le texte.

L'amendement 74, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 12 BIS

M. Alain Claeys - Nous abordons avec cet article le sujet difficile de la propriété intellectuelle. En première lecture, nous avions unanimement voté un amendement sur la non-brevetabilité du vivant. A cette époque, la France avait saisi la Commission européenne sur l'interprétation de l'article 5 de la directive sur les inventions biotechnologiques, dont deux alinéas apparaissent contradictoires. Les réponses de la Commission n'étant pas satisfaisantes, il a été proposé de transposer cette directive sans son article 5. Néanmoins, les revendications présentées par les équipes de recherche ou les industries à l'office européen des brevets de Munich sont toujours analysées en fonction de la directive européenne.

Monsieur le ministre, vous avez combattu pour faire comprendre que cette directive n'était pas éthiquement acceptable. Aujourd'hui, d'autres arguments se font jour. Les premiers sont économiques : un brevet doit favoriser l'innovation et le transfert des connaissances. Or, de nombreux économistes considèrent aujourd'hui que les brevets qui incluent une séquence de gènes génèrent moins une innovation qu'une rente. Les seconds sont scientifiques : le gène est lié à son environnement et il est difficile de différencier les différentes applications des mêmes gènes.

La situation présente donc nombre de difficultés. Or, la Commission doit faire un rapport d'étape sur l'application de la directive. Il est temps de lui faire connaître notre position. Personne ici ne souhaite supprimer la propriété intellectuelle ou les brevets. La solution semble être de réserver les brevets aux applications et d'en exclure les séquences géniques, sachant qu'elles ne font pas partie des inventions, mais de la connaissance. Cette solution rend nécessaire une renégociation avec la Commission, mais aucune autre ne saurait être efficace, ne serait-ce que parce que l'office des brevets appliquera toujours la directive. La représentation nationale doit faire connaître son choix, qui donnera un argument supplémentaire à l'exécutif français dans sa demande de renégociation.

La propriété intellectuelle a trop longtemps été hors de la sphère du politique et de la décision publique. Les brevets ne sont pas une compétence exclusive des juristes. Les brevets, que ce soit aux Etats-Unis, au Japon ou en Europe, sont de plus en plus larges et donnent lieu à de plus en plus de contentieux. On laisse donc les juristes prendre des décisions à notre place.

Le moment est venu pour le politique de prendre ses responsabilités. Ce faisant, nous aiderons l'exécutif vis-à-vis de la Commission européenne, mais aussi l'Union européenne vis-à-vis des Etats-Unis ou du Japon.

M. Jean-Claude Lefort - Lors de l'examen de ce texte en première lecture en janvier 2002, l'Assemblée nationale, dont vous étiez membre, Monsieur le ministre, avait considéré que le vivant, par nature, ne pouvait faire l'objet de brevets. C'est à l'unanimité qu'elle avait voté notre proposition par laquelle le corps humain et ses éléments isolés, étaient déclarés « inaliénables, non patrimoniaux et incessibles. » Cette déclaration de principe visait à s'opposer à la directive européenne 98/44. L'enjeu était alors clair : il était urgent de renégocier cette directive. Rien n'a, hélas, été fait en ce sens, comme le titre II bis nouveau de ce texte, en particulier l'article 12 bis, nous en apporte la preuve. Pis, l'actuel Gouvernement et le ministre de la santé lui-même sont revenus sur la décision unanime de l'Assemblée nationale en adaptant le droit national à la directive. Monsieur le ministre, je n'insiste pas sur le grand écart auquel vous avez été conduit. Sachez-le en tout cas, nous ne pouvons pas accepter votre nouvelle position, fût-elle justifiée, fallacieusement d'ailleurs, par la nécessité d'un pis-aller pour éviter une injonction de la Cour européenne de justice ou un contentieux avec l'OMC.

Quant à la réécriture de l'article proposée par le rapporteur, elle ne réduit en rien le risque de brevetabilité du vivant puisqu'aucun champ n'est soustrait à l'application de l'article 5, en particulier alinéa 2, de la directive. Au contraire, elle ouvre une porte à la marchandisation du vivant, ce qui est inacceptable, au nom de l'humanité même.

Il faut renégocier au plus vite cette directive européenne et, si besoin est, créer une nouvelle exception française. Cette directive est loin de faire l'unanimité parmi les pays européens, dont beaucoup ne l'ont pas encore transposée. Ce Gouvernement a su, en d'autres circonstances, faire entendre la voix de la France sur la scène internationale et lui rendre sa grandeur. Il doit pouvoir le faire sur cette question aussi. Notre pays aurait beaucoup à y gagner.

M. le Ministre - Je n'ai rien à contredire dans les propos de M. Claeys ni de M. Lefort. Je souhaite simplement rappeler les faits et rétablir une certaine vérité historique.

C'est à mon initiative que fut introduit en 1994 dans les premières lois de bioéthique un article disposant que le corps humain, y compris la séquence, totale ou partielle, d'un gène, ne pouvait être breveté. C'était et cela reste ma conviction profonde. J'eus ensuite l'occasion de rédiger, pour le compte de la Délégation à l'Union européenne, un rapport intitulé : « Brevetabilité du vivant : une solution à la française », dont les conclusions furent soumises, fait rare, à un vote de l'Assemblée et y recueillirent l'unanimité. Je dois avouer qu'ensuite, un changement de majorité étant intervenu, je ne suivis plus de très près la question jusqu'en 1999, jusqu'à ce que je découvre avec stupeur au Conseil de l'Europe que la France avait soutenu la directive 98/44, le gouvernement de l'époque n'ayant formulé alors aucune réserve. Je décidai immédiatement de lancer une pétition, que beaucoup d'entre vous signèrent, ainsi que des dizaines de milliers de citoyens, puis de l'adresser par courrier électronique au Président de la Commission. Je fis alors également tout ce qui était en mon possible pour me faire entendre au niveau européen. Et lorsque la loi de bioéthique vint ici en discussion en première lecture en janvier 2002, j'ai effectivement, comme l'Assemblée unanime, voté votre amendement, Monsieur Lefort, qui reprenait exactement celui que j'avais déposé en 1994. Comment en effet pourrait-on être favorable à la brevetabilité du vivant, et non pas d'ailleurs seulement de l'humain ?

M. Jean-Claude Lefort - Tout à fait.

M. le Ministre - Simplement, depuis janvier 2002, plusieurs éléments nouveaux sont intervenus. Sept pays européens ont déjà transposé la directive en l'état. Par ailleurs, celle-ci s'applique de fait : ce ne serait donc qu'un simulacre que d'introduire dans notre droit une disposition dont nous savons pertinemment qu'elle ne pourrait pas s'appliquer. Enfin, la Commission a engagé le 23 octobre dernier un recours en manquement à l'égard des huit pays n'ayant pas encore transposé la directive.

Je n'ai pas changé d'avis et je soutiens toujours l'action engagée par l'Institut Curie contre Myriad Genetics au sujet de la propriété des gènes prédisposant au cancer du sein. Il n'en reste pas moins que la directive européenne s'impose à nous. Je n'ai pas ménagé mes efforts à Bruxelles et j'ai rencontré, à plusieurs reprises, mes homologues européens. Pourtant, l'Allemagne s'apprête à transposer le texte et les autres pays, à l'exception du Luxembourg, devraient la suivre. Il m'a clairement été dit qu'il ne serait possible d'envisager une renégociation qu'une fois la directive transposée dans tous les pays...

M. Henri Emmanuelli - On vous a pris pour un naïf !

M. Jean-Claude Lefort - Vous l'avez cru ?

M. le Ministre - Comment imaginer qu'un texte déjà transposé par sept pays puisse ensuite être revu par les huit autres !

Une directive européenne relative aux biotechnologies est indispensable pour le développement de la recherche et de nos entreprises en ce domaine. Un consensus existe sur le fait que l'on peut breveter la technologie, mais non le vivant qui en est le support. Un brevet global peut inclure un gène, celui-ci ne doit pas pour autant en être protégé et interdit d'accès. Sur cette position, il semble possible de trouver l'accord d'une majorité de pays pour exiger la renégociation.

M. Jean-Claude Lefort - Même à 25 ?

M. le Ministre - Il me faut aussi évoquer la continuité de l'action de l'Etat. Vous m'avez reproché d'avoir fait « le grand écart ». Mais franchement, qui l'a fait ? Moi, qui suis resté totalement fidèle à mes convictions ou ceux qui n'ont pas bronché quand la directive a été adoptée et s'insurgent aujourd'hui ? Pour ma part, je n'ai pas changé d'avis. Simplement, je dois aujourd'hui, avec ma collègue Claudie Haigneré, permettre le développement des biotechnologies dans notre pays. Je comprends mal l'attitude de ceux qui ont soutenu sans mot dire le gouvernement en 1999. Nous n'avons pas de leçons à recevoir de la part de ceux qui sont à l'origine même du débat que nous avons ce soir (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Quand j'ai soulevé le problème en l'an 2000, M. Claeys a étudié la question et il s'est rallié à ma position, jugeant, lui aussi, inacceptable de breveter le vivant.

Je vous propose d'adopter aujourd'hui un texte qui n'est, certes, pas l'expression de notre conviction profonde (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

M. Henri Emmanuelli - C'est lamentable !

M. le Ministre - Pourquoi n'assumez-vous pas vos responsabilités comme j'assume les miennes ? Le texte s'impose aujourd'hui à nous et le Gouvernement a le devoir de le défendre (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains). Il nous permet de continuer à proposer une renégociation de la directive que vous avez acceptée en 1998 (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Alain Claeys - Si je reprends la parole, ce n'est pas dans un esprit d'obstruction, ni de polémique. Je regrette d'ailleurs le ton adopté par le ministre : un responsable politique ne pétitionne pas, il prend des décisions.

La négociation de cette directive a duré dix ans et a engagé des gouvernements successifs, ils en partagent la responsabilité, comme me l'a confirmé encore récemment M. Alain Pompidou, qui est beaucoup moins sectaire que vous sur ce point !

Ce que j'ai dit correspond à la vérité. Première vérité, cette directive aujourd'hui s'applique. Il y a même des signataires de la pétition qui ont déposé des brevets dans le cadre de cette directive.

Deuxième vérité, quels que soient les correctifs qu'on voudra y apporter par voie d'amendement pour tenir compte de l'opinion publique française, cela n'affectera en rien l'application de la directive, que l'Office européen des brevets a intégrée dans son règlement intérieur.

Alors on peut toujours faire semblant, ou rejeter la responsabilité sur d'autres, comme vous le faites, cela vous vaut un court succès de tribune, mais ne résout pas le problème.

Notre pays est aujourd'hui confronté à un enjeu important, qui n'est pas seulement éthique, mais aussi scientifique et économique. Pourquoi les entreprises de biotechnologie ont-elles déposé des brevets très larges ? Pour attirer le maximum de capital-risque. Et cela a eu pour double conséquence de tuer l'innovation et d'empêcher la diffusion des connaissances.

Sur ces deux points, les politiques doivent réagir. On ne peut admettre que les lobbies se fassent de l'argent en gérant un certain nombre de contentieux et que le droit des brevets s'élabore en dehors de la représentation nationale. Si la France veut peser sur les évolutions au niveau européen, elle doit affirmer clairement sa position : à savoir que nous acceptons des brevets pour les applications, à condition que les gènes soient exclus du champ du brevet. Cela nous permettra de diffuser plus facilement la connaissance scientifique et évitera de rendre un brevet dépendant d'un autre.

Voilà pourquoi nous demanderons un scrutin public sur notre amendement. Quand le Président de la République et Lionel Jospin ont entrepris leur démarche commune auprès de la Commission européenne, c'est parce qu'ils avaient la même analyse et cherchaient à agir dans l'intérêt de la recherche, au-delà des clivages politiques.

C'est pourquoi, Monsieur le ministre, je regrette ce discours partisan qui fait tache dans notre débat (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Claude Lefort - Monsieur le ministre, si l'expression « grand écart » vous a choqué, je la retire. Reste que votre discours est très paradoxal : « je suis d'accord avec vous, mais je ne peux pas faire autrement » ; - « j'voudrais bien, mais j'peux point » (Rires).

Je vous rappelle que l'Assemblée nationale unanime s'était opposée à la directive et qu'elle était entrée en conflit avec le Gouvernement français de l'époque à ce sujet.

Je remarque aussi que sept pays seulement l'ont transposée, elle a donc beaucoup de retard. La transposer telle quelle, c'est nous obliger à l'appliquer sans réserve. Or il est des sujets sur lesquels il vaut mieux une bonne crise qu'un mauvais accord !

Enfin, je vous rappelle qu'en 2002 vous aviez insisté sur la nécessité que l'Assemblée nationale soit unie sur ce sujet et elle l'avait été. Or votre position, aujourd'hui, la divise. Vous dites que vous ne voulez pas de la brevetabilité du vivant et je suis bien d'accord avec vous : alors mettez vos actes en accord avec vos paroles et disons ensemble : « Non, sur cette planète, tout n'est pas marchandise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Valérie Pecresse, rapporteure pour avis de la commission des lois - Je partage la position de M. Claeys : la question des brevets doit devenir un sujet politique. On a beaucoup avancé sur les brevets des logiciels et c'est une bonne chose.

Je rejoins également M. Claeys sur la nécessité de lancer un processus de renégociation de la directive de 1998.

Cela dit, cette position me conduit à des conclusions radicalement différentes des siennes. Cette directive s'impose, nous devons respecter nos engagements. Je travaillais à la Présidence de la République quand elle a été adoptée en 1998 et je peux témoigner de l'indignation du député Mattei de l'époque et de son combat sans faille, depuis, contre le brevetabilité du vivant.

M. Jean-Claude Lefort - Personne ne l'a contesté !

Mme la Rapporteure pour avis - La directive s'applique de plein droit dès lors qu'elle est suffisamment claire. Alors nous pouvons toujours nous faire plaisir en ne la transposant pas, mais cela ne changera rien, si ce n'est que cela risquera d'induire en erreur des centres de recherches qui croiront, de bonne foi, avoir droit à des licences alors que ce ne sera pas le cas : ce serait donc la voie ouverte à de nombreux contentieux. Nous devons impérativement nous aligner sur l'arrêt rendu par la Cour européenne de justice, et nous le devons d'autant plus que, comme l'a souligné le ministre, nous ne pouvons prétendre renégocier un texte que nous avons accepté et que nous refuserions ensuite d'appliquer. Il serait fort dangereux d'adopter cette posture.

M. Jean-Claude Lefort - Mais à quoi sert donc le Parlement français ? Nous ne sommes pas des notaires !

Mme la Rapporteure pour avis - Il s'agit de respecter la parole de la France.

M. le Ministre - J'aurais pu tenir le discours qu'a tenu M. Claeys. Qu'a-t-il dit, en effet ? Que la directive s'applique, quelles que soient les modifications apportées au texte du Gouvernement, et qu'il est contre la brevetabilité des gènes, mais favorable à celle des produits. L'article, tel qu'il est rédigé, ne dit pas autre chose.

M. Jean-Claude Lefort - C'est faux !

M. le Ministre - Lisez-le ! S'il est rédigé ainsi, c'est justement parce que j'essaye de trouver le meilleur chemin vers la renégociation, et de convaincre les pays qui ont transposé la directive...

M. Jean-Claude Lefort - ...sept sur quinze seulement !

M. le Ministre - ...- certains à contrecoeur, d'autres sans état d'âme - et ceux qui s'apprêtent à le faire, que le gène humain doit rester hors du champ de la brevetabilité.

M. Jean-Yves Le Déaut - Vos arguments ne tiennent pas. Un message politique fort est indispensable, d'autant que les centres de recherche publics ne sont pas concernés, car ils sont hors du champ des brevets. Par ailleurs, sachant que l'on peut breveter un gène associé à une fonction et que, le temps passant, on découvrira de plus en plus de fonctions, on ira inéluctablement vers le brevetage de l'ensemble du génome, ce que nous ne voulons pas. Finissons-en avec cette casuistique jésuite, et disons ce que nous avons à dire, sinon nous perdrons définitivement la bataille des biotechnologies, domaine où les Etats-Unis ont déjà une supériorité écrasante, ce qui provoque la fuite des cerveaux européens.

M. Alain Claeys - Je ne pense pas que le Président de la République ait abandonné ce combat, et c'est pourquoi la solution consistant à transposer la directive dans l'article 5 a été envisagée. Elle est politiquement compréhensible mais inapplicable. Il faut progresser et, pour cela, le législateur doit faire passer un message fort. Il n'y a pas d'entre deux possible ! La directive s'appliquera telle qu'elle est rédigée aussi longtemps qu'elle n'aura pas été renégociée on peut donc adopter tous les amendements que l'on veut, se faire plaisir et faire croire à nos concitoyens que l'on a pesé sur la décision, mais cela sera sans effet - et je suis persuadé que Mme la ministre de la recherche le pense comme moi.

Un acte politique fort est nécessaire, car il en va du développement de la recherche en Europe et en France de nos intérêts économiques. Il est vrai qu'une renégociation de directive est un événement rare et une entreprise difficile mais certains sujets exigent que l'on ait ce courage, car s'il suffisait d'une pétition pour parvenir à ses fins, cela se saurait.

Nous sommes prêts à soutenir le Président de la République et le Gouvernement dans la renégociation.

Mme la Rapporteure pour avis - Une renégociation, c'est surtout long. Si, dans l'intervalle, la France n'a pas transposé une directive qui s'applique à tous les pays de l'Union, elle mettra sa recherche dans un mauvais cas.

M. Jean-Claude Lefort - C'est faux !

Mme Christine Boutin - J'ai participé à tous les votes sur ce sujet depuis des années, mais je n'ai pas signé la pétition...

M. Alain Claeys - Moi non plus.

Mme Christine Boutin - Je comprends bien les arguments juridiques qui ont été avancés, mais la question est de savoir si la voix de la France a encore une portée politique, si cette France, si souvent porteuse des droits de l'homme, ne dit pas qu'elle est hostile à la brevetabilité du vivant - ce que nous pensons tous - de quels droits de l'homme parle-t-elle ?

Je suis de ceux qui croient qu'être parlementaire a encore un sens et que le politique a encore un rôle en France. Je suis donc convaincue qu'affirmer une position politique forte aiderait le Président de la République et le Gouvernement à renégocier la directive.

M. le Président - Je suis saisi, par le groupe communiste et républicain, d'une demande de scrutin public sur l'amendement 169, et par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public sur l'amendement 152.

Mme Jacqueline Fraysse - L'amendement 169, qui tend à réécrire l'article, s'inscrit exactement dans la logique du Gouvernement, dont le texte, en l'état, viserait à nous éviter de nous lier définitivement les mains, le brevetage étant limité à la technique et le gène en étant exclu. Mais ce n'est qu'un v_u, et rien ne dit que cette interprétation sera retenue ! La France doit se distinguer dans ce domaine comme elle a su le faire pour préserver l'exception culturelle, avec des résultats positifs. Même si elle est compliquée, une renégociation est possible. Il est surprenant d'entendre Mme Pecresse dire que le brevet doit entrer dans le champ politique pour ajouter aussitôt après que le droit prime, puisque la directive s'applique. Il faudrait savoir ! Pour notre part, nous en faisons une question politique, et nous disons au ministre, qui affirme chercher le meilleur chemin, que cela suppose de ne pas accepter la situation actuelle. Il y faut de la détermination, de la fermeté et du courage.

Refuser cette transposition, c'est faire preuve de courage. Il n'y a pas de compromis possible sur le commerce du vivant et sur la biodiversité. On ne peut subordonner de telles questions à des arguties juridiques ou à des impératifs économiques immédiats.

L'amendement 170 de M. Lefort poursuit le même objectif.

M. Alain Claeys - Par l'amendement 152, notre groupe propose notamment de rédiger ainsi l'article L. 611-18 du code de la propriété intellectuelle :

« Le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que ses éléments, y compris la séquence totale ou partielle d'un gène, ne peuvent constituer des inventions brevetables.

« Une invention constituant l'application technique d'une fonction d'un élément du corps humain peut être protégée par brevet, cette protection ne pouvant couvrir l'élément du corps humain lui-même. L'application est concrètement et précisément exposée dans la demande de brevet ».

Le Sénat propose de créer de « petits » brevets de produits, la portée de l'inclusion de la séquence génétique dans le brevet étant limitée à la simple application technique d'une seule fonction, sans préjudice d'autres applications. Cette proposition méconnaît la signification même d'un brevet de produit, laquelle suppose nécessairement la dépendance des brevets portant sur les applications ultérieures. La transposition de la directive, telle qu'elle est proposée par le Sénat, ne permettra donc pas de faire l'économie du contentieux.

Au plan juridique, il faut d'ailleurs relever que les articles 5 et 9 de la directive retiennent la notion de brevets de produits larges, qui, par elle-même, « génère de la dépendance ». La prétendue reconnaissance par la Commission européenne d'une certaine flexibilité dans l'étendue de la protection à conférer à des inventions portant sur des éléments du corps humain ne résiste pas à la réalité des enjeux économiques en cause.

Au plan scientifique, on peut douter de la pertinence à s'en tenir à une approche réductrice, méconnaissant la véritable dimension du rôle tenu par le milieu et les interactions qu'il crée.

Enfin, les revendications trop larges des brevets de produits ne peuvent conduire qu'à des situations de monopole et de rente, sources d'appauvrissement collectif.

Il semble donc moins onéreux de placer les séquences génétiques en dehors des revendications, pour n'accorder que des brevets d'application ou d'utilisation.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé les trois amendements.

M. le Ministre - Je me suis déjà longuement expliqué sur ce sujet mais je veux bien redire très simplement que le texte adopté par le Sénat dispose que les séquences totales ou partielles d'un gène prises en tant que telles ne sont pas brevetables et que le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ne peut constituer une invention brevetable.

M. Jean-Yves Le Déaut - Faux !

M. le Ministre - S'il est légitime de breveter les inventions en biotechnologies, les gènes en sont donc expressément exclus. J'appelle votre attention sur le fait que cette rédaction est la seule possible si l'on veut initier une renégociation de la directive sans rien abandonner de nos convictions sur la non-brevetabilité du vivant. La voix de la France peut s'exprimer par ce texte.

Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.

M. Jean-Yves Le Déaut - Je doute que vous puissiez nous assurer que la rédaction proposée fera obstacle à toute prétention à une dépendance par rapport à un brevet déjà déposé !

M. Jean-Claude Lefort - Monsieur le ministre, vous n'êtes plus dans le paradoxe mais plutôt dans un exercice de haute voltige qui vous conduit à faire le grand écart...

M. le Ministre - Vous vous répétez !

M. Jean-Claude Lefort - Vous affirmez deux choses parfaitement contradictoires. Vous nous dites - et nous le récusons - : « on ne peut se soustraire à la directive européenne », mais vous prétendez que la rédaction adoptée par le Sénat aboutit à contrarier la directive, de sorte que le texte que vous soutenez serait finalement identique, à quelques mots près, au nôtre - que vous récusez pourtant !

Est-il sérieux, sur de tels sujets, de se comporter comme un joueur de bonneteau ? En l'occurrence, vous manquez au devoir de sincérité qui vous oblige d'ordinaire.

L'Allemagne n'ayant pas ratifié la directive, profitons de l'arrivée des dix en mai prochain pour proposer aux vingt-cinq un nouveau projet de directive. Ne mettons pas le doigt dans l'engrenage de la marchandisation du vivant et retrouvons l'unanimité qui avait prévalu en 2002. Ne nous plaçons pas dans la perspective de devoir demain expliquer à nos enfants que la moindre parcelle de leur corps ne leur appartient plus ! La France ne peut souscrire à une vision exclusivement marchande de la réalité. Monsieur le ministre, je vous supplie de rester fidèle à vos principes. La faute d'un précédent gouvernement ne peut justifier votre propre renoncement.

M. le Ministre - Je déplore que le texte qui vous est soumis soit interprété par certains de manière erronée. J'ai beau relire les différents amendements, je ne puis m'empêcher de considérer qu'ils n'apportent que des modifications malhabiles et, partant, inopportunes.

Monsieur Le Déaut, les objections que vous soulevez sur la dépendance et sur la marchandisation des brevets ne tiennent pas.

Quant à vous, Monsieur Lefort, je ne conteste ni votre sincérité ni votre talent oratoire, mais je vous demande de comprendre que nos convictions sur ces sujets ne sont pas contradictoires. Je ne peux que vous renvoyer à l'article L. 611-18 tel que le propose le Sénat : « Ne peuvent constituer des inventions brevetables le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte d'un de ses éléments, y compris la séquence ou séquence partielle d'un gène ».

S'agissant de la directive, je rappelle que nous ne sommes pas favorables à sa transposition ligne à ligne et que nous défendrons notamment la non-transposition de ses articles 5 et 6. Notre objectif, c'est de faire bouger les lignes pour faire triompher notre point de vue.

M. Jean-Marie Le Guen - C'est précisément ce qu'a défendu M. Claeys !

M. Alain Claeys - Monsieur le ministre, vous pouvez tordre le texte du Sénat dans tous les sens : il reste en total désaccord avec le nôtre. Soyons lucides. L'office européen des brevets continuera à breveter une séquence génétique et une application. Nous considérons donc qu'au point où nous en sommes, il faut renégocier la directive.

A la majorité de 22 voix contre 20, sur 43 votants et 42 suffrages exprimés, l'amendement 169 n'est pas adopté.

L'amendement 170, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Henri Emmanuelli - Dans ce débat, le point de vue de Mme Haigneré, ici présente, m'a beaucoup intéressé... (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP)

A la majorité de 22 voix contre 15, sur 38 votants et 37 suffrages exprimés, l'amendement 152 n'est pas adopté.

M. Jean-Claude Lefort - Jour sombre pour la France !

Mme la Rapporteure pour avis - L'amendement 4 tend à réorganiser les dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives à la brevetabilité du vivant. Après l'article L. 611-17 posant le principe général de non-brevetabilité des inventions dont l'exploitation commerciale serait contraire à la dignité de la personne humaine, il place, dans l'ordre : les dispositions relatives au corps humain ; les dispositions relatives aux races animales ; les dispositions relatives aux obtentions végétales.

Mon sous-amendement 52 reprend les termes mêmes de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 9 octobre 2001, en indiquant que la protection par brevet ne couvre un élément du corps humain que dans la mesure nécessaire à la réalisation et à l'exploitation d'une application technique particulière.

M. le Rapporteur - Le sous-amendement 75 est d'harmonisation rédactionnelle.

M. le Ministre - Avis favorable à l'amendement et aux deux sous-amendements.

Les sous-amendements 52 et 75, successivement mis aux voix, sont adoptés, de même que l'amendement 4, ainsi modifié.

M. le Rapporteur - L'amendement 76 est de coordination.

L'amendement 76, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 77 corrigé est rédactionnel.

L'amendement 77 corrigé, accepté par le Gouvernement, est adopté, de même que l'article 12 bis, ainsi modifié.

La séance, suspendue à 23 heures 35, est reprise à 23 heures 50.

ART. 12 TER

M. le Rapporteur - Cet article modifie le code de la propriété intellectuelle afin de faciliter l'octroi des licences obligatoires de dépendance. L'amendement 5 propose d'y mentionner le principe de l'autorisation mutuelle que doivent s'accorder deux titulaires de brevets dépendants, en-dehors de toute procédure judiciaire tendant à l'octroi d'une licence obligatoire de dépendance.

L'amendement 5, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Les accords internationaux signés par la France rendent possible de délivrer des licences d'office en cas de pratique anti-concurrentielle. Afin de garantir la sécurité juridique du dispositif, l'amendement 78 précise que le caractère anti-concurrentiel d'une pratique est constaté à l'issue d'une procédure administrative ou juridictionnelle, lorsque les décisions sont devenues définitives.

L'amendement 78, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 12 ter, ainsi modifié.

ART. 13

M. le Ministre - L'amendement 237 a pour objet de définir les catégories de personnel qui pourront exercer les fonctions de responsable d'unité pour les activités relatives aux préparations de thérapie génique et aux préparations de thérapie cellulaire xénogénique.

L'amendement 237, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 267 apporte une simplification dans le domaine des recherches biomédicales portant sur les préparations de thérapie génique.

L'amendement 267, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 13, ainsi modifié.

ART. 14

M. le Rapporteur - L'amendement 80 est un amendement de coordination.

L'amendement 80, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 14, ainsi modifié.

AVANT L'ART. 15

Mme Christine Boutin - L'amendement 108 corrigé vise à supprimer le terme « reproductif » dans l'intitulé du chapitre premier, pour supprimer la distinction entre clonage reproductif et thérapeutique - qui n'a pas lieu d'être, ainsi que je m'en expliquerai dans un instant.

L'amendement 108 corrigé, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 15

Mme Christine Boutin - Cet article est relatif à l'interdiction du clonage reproductif. Je voudrais attirer votre attention sur cette étrange distinction que fait la loi entre le clonage reproductif et le clonage thérapeutique. En 1992 et 1994, j'avais déposé des amendements visant à interdire le clonage. Ils avaient été rejetés, la gauche comme la droite considérant que cette idée relevait de la science-fiction. Etant donné mes positions bien connues sur les droits de l'homme et de l'embryon, qui ne sont guère « politiquement correctes », mes propositions concernant le clonage ne pouvaient être qu'excessives ou relever du fantasme.

Dix ans et quelques Dolly plus tard, les uns et les autres se sont esbaudis et ont dénoncé les différentes formes de clonage. Ce projet de loi qui interdit le clonage reproductif est censé nous rassurer. Comment en effet envisager une humanité constituée à l'identique ? On propose même la constitution d'un délit contre l'espèce humaine. Mais on distingue également le clonage reproductif du clonage thérapeutique, qui est certes encore interdit parce que l'opinion n'est pas encore tout à fait prête et que les pressions, qui existent, ne sont pas encore suffisantes, mais qui apparaît beaucoup plus acceptable que le clonage reproductif. Le clonage thérapeutique est le cheval de Troie, nous le savons, pour autoriser toutes les manipulations futures...

Je tiens à rappeler solennellement qu'il n'y a aucune distinction entre clonage thérapeutique et reproductif. Les techniques sont identiques. Seules les finalités sont différentes. Le clonage reproductif est un clonage thérapeutique que l'on a laissé se développer. Au risque de choquer, on pourrait même considérer que le clonage thérapeutique constitue une agression encore plus grave contre l'humanité. Un clone possède en effet les qualités humaines. Le clonage reproductif, auquel je reste absolument hostile bien sûr, a au moins le mérite de permettre la création d'un être humain. Le clonage thérapeutique aboutit, lui, à la création d'un embryon qu'on empêche de devenir un homme. C'est le triomphe d'une vision utilitariste de l'homme que je ne saurais partager.

J'appelle avec solennité l'attention de l'Assemblée sur le fait que si nous acceptons de distinguer clonage reproductif et clonage thérapeutique, entre lesquels il n'existe aucune différence sinon dans la finalité, nous faisons un pas supplémentaire vers la réification de l'embryon et l'instrumentalisation de l'homme.

M. Jean-Marie Le Guen - L'amendement 153 revient au texte initial adopté par l'Assemblée. Le Sénat identifie en effet totalement la personne à son patrimoine génétique, ce qui est faux sur le plan scientifique et dangereux sur le plan philosophique.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, non que le texte adopté initialement par l'Assemblée fût mauvais, mais la définition du clonage reproductif proposée par le Gouvernement et acceptée au Sénat présente l'avantage de reprendre les dispositions de la convention d'Oviedo. Estimant que la France a un rôle à jouer pour faire adopter une convention internationale interdisant le clonage reproductif, nous avons donc préféré cette rédaction.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 153, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christine Boutin - L'amendement 109 corrigé vise à interdire de la même façon clonage reproductif et clonage thérapeutique. Il n'y a aucune raison de les distinguer, dans la mesure où la clonage consiste à créer un embryon génétiquement identique à une autre personne humaine, et cela que la finalité soit de donner naissance à un enfant ou de produire des cellules souches à des fins thérapeutiques. Le clonage thérapeutique est d'ailleurs même plus répréhensible que le clonage reproductif dans la mesure où il instrumentalise l'embryon, celui-ci étant spécifiquement créé à une fin matérielle.

En distinguant entre deux formes de clonage prétendument différentes, alors qu'elles ne font qu'une, on prépare notre pays à autoriser, à terme, le clonage thérapeutique.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement. Madame Boutin, je ne saurais vous suivre quand vous affirmez qu'il n'existe aucune différence entre clonage thérapeutique et clonage reproductif, au motif que la première étape est la même dans les deux cas. C'est faire là un mauvais procès à la communauté scientifique. Vous ne me convaincrez jamais que fabriquer un embryon destiné à demeurer dans un tube à essais est la même chose qu'en fabriquer un destiné à être implanté dans un utérus... même si l'on peut regretter que l'on ne puisse pas mieux contrôler le passage d'un projet à l'autre. Le clonage thérapeutique est condamné seulement par le code la sécurité sociale, tandis que le clonage reproductif l'est par le code pénal.

M. le Ministre - Même avis.

M. Alain Claeys - Si l'on suivait votre raisonnement jusqu'au bout, Madame Boutin, il vaudrait aussi pour le diagnostic préimplantatoire, technique autorisée, mais aussi strictement encadrée par le législateur en 1994. En effet, non encadrée, elle pourrait conduire à l'eugénisme. Fallait-il pour autant priver de ses bénéfices les couples dont les enfants peuvent être porteurs d'une anomalie génétique ?

Je comprends que vous puissiez être contre le clonage thérapeutique et respecte votre position, mais vous ne pouvez pas prétendre qu'il ne se distingue pas du clonage reproductif. Certains médecins, criminels devrais-je dire, comme le Docteur Antinori, entretiennent à dessein la confusion, plaidant que le clonage reproductif est aussi un clonage thérapeutique dans la mesure où il apporte une solution à certaines infertilités. Toutes ces notions sont déjà bien confuses pour nos concitoyens, dont on peut se demander ce qu'ils pensent quand ils entendent le chef d'une secte traiter de clonage au journal télévisé de 20 heures ! Nous avons un rôle pédagogique à jouer, et pour cela, devons éviter tout amalgame.

Mme Christine Boutin - Décidément, nous ne sommes pas d'accord. Si je me permets de dire à notre excellent rapporteur, qui est aussi mon ami, qu'il n'existe aucune différence entre clonage thérapeutique et clonage reproductif, c'est que je ne suis pas seule de cet avis - et je ne suis pas allée consulter les raéliens pour me forger mon opinion ! C'est aussi l'avis d'un scientifique aussi éminent qu'Axel Kahn (Interruptions bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains).

Je suis, pour ma part, opposée à toute forme de clonage, un clonage reproductif n'étant qu'un clonage thérapeutique qui s'est poursuivi. Le chercheur décide seul si le clone qu'il a fabriqué demeurera dans un tube à essais ou sera implanté chez une femme. Vous avez le droit de considérer que le clonage thérapeutique est moins grave que le clonage reproductif. Souffrez que ce ne soit pas mon avis et que je ne puisse accepter cette matérialité. Prenons nos responsabilités. Disons clairement ce que nous voulons. Pour ma part, je ne veux être complice d'aucun flou.

M. le Rapporteur - Chère Christine Boutin, considérant que clonage thérapeutique et clonage reproductif sont deux étapes d'un même processus, vous condamnez la première au motif que la seconde pourrait suivre. Imaginez qu'un chercheur découvre une bactérie, la cultive pour étudier les antibiotiques efficaces contre elle et rechercher un vaccin, et qu'un Saddam Hussein s'empare du produit de ses recherches pour lancer une guerre bactériologique. A-t-il eu tort de s'engager dans ces recherches. Est-il criminel ? Pourquoi n'acceptez-vous pas de dissocier les deux étapes ?

M. Jean-Claude Lefort - On n'a pas trouvé d'armes bactériologiques en Irak...

Mme Jacqueline Fraysse - Je crois que nos divergences sont trop grandes pour être surmontées, mais le débat fait progresser la réflexion. Madame Boutin, effectivement, la technique est identique, qu'il s'agisse de clonage thérapeutique ou reproductif. Mais mettre le résultat de ce procédé technique dans une éprouvette pour soigner l'embryon ou l'implanter dans l'utérus d'une femme pour reproduire une personne, ce n'est pas la même chose !

C'est vrai que le clonage thérapeutique n'est pas encore au point, il faut continuer à travailler.

Mais ce n'est pas le seul domaine où une découverte peut être utilisée pour le pire comme pour le meilleur : le nucléaire en est un exemple. Le débat doit donc porter sur l'utilisation que nous faisons des conquêtes scientifiques et nous sommes unanimes à condamner le clonage reproductif. Doit-on pour autant s'interdire a priori une utilisation au service de la santé ? Je crois que non. C'est notre rôle de légiférer pour que les progrès scientifiques soient mis au service de l'homme.

Mme Catherine Génisson - Je souscris aux propos de Mme Fraysse. La même technique peut être utilisée à des fins très différentes. Notre position est qu'il ne faut pas fermer la porte au clonage thérapeutique, même si nous reconnaissons que cela pose des problèmes très sérieux.

Mme Christine Boutin - Effectivement, nous n'arriverons pas à nous convaincre, mais ce débat a le mérite de mettre en évidence la question de fond qui nous divise depuis le début des discussions sur la bioéthique : quand commence la vie humaine ?

Monsieur le rapporteur, vous me parlez bactéries ! Ne dites pas cela ! Pas vous ! Jamais une bactérie ne pourra devenir une personne. Jamais un atome ne pourra devenir une personne. Or le clone, lui, peut devenir une personne. Je trouve qu'il y a une contradiction énorme entre le débat que nous venons d'avoir sur la protection du vivant et les dernières interventions. Vous me parlez atomes et bactéries, moi je vous parle de l'homme.

Au moins il y a progrès sur un point : nous sommes d'accord pour dire que la technique est identique pour le clonage thérapeutique et le clonage reproductif.

Je pense d'ailleurs s'il n'y avait pas la crainte d'une remise en cause de la législation sur l'avortement, nous serions tous d'accord. Eh bien je vais être claire : je ne souhaite pas, pour ma part, revenir sur cette législation. En revanche, je veux qu'on regarde de plus près ce qui se passe avec la PMA, le DPI, etc. Quand on met en contact un ovule et un spermatozoïde : cela donnera une personne ! Et lorsqu'on fait un clone, si on le laisse se développer, il deviendra une personne ; si on décide de ne pas le laisser se développer et l'utilise à des fins thérapeutiques, on instrumentalise ainsi une personne humaine !

M. Alain Claeys - Cette assimilation entre clonage reproductif et thérapeutique est opérée aussi par certains pays, qui ont bloqué l'excellente initiative prise par la France et l'Allemagne auprès de l'ONU pour faire interdire le clonage reproductif humain. Les Etats-Unis, le Vatican et une quarantaine d'autres Etats veulent joindre les deux types de clonage dans une même condamnation. Je voudrais, Monsieur le ministre, que vous nous confirmiez la position de la France

M. le Ministre - Elle est assez claire : la France veut obtenir l'interdiction du clonage reproductif, ce qui correspond à un v_u unanime des Etats. Mais certains tiennent à l'interdiction simultanée du clonage reproductif et du clonage thérapeutique, alors que d'autres, dont la France, souhaitent qu'on commence par condamner le clonage reproductif et qu'on discute à un autre niveau du clonage thérapeutique

Le résultat de certaines positions jusqu'au-boutistes, c'est qu'aucune interdiction n'a été édictée jusqu'à présent. La France et d'autres pays regrettent cette situation.

L'amendement 109 corrigé, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 6 est rédactionnel.

L'amendement 6, mis aux voix, est adopté.

L'article 15, mis aux voix, est adopté.

ART. 15 BIS

Mme Christine Boutin - L'amendement 110 corrigé est défendu.

L'amendement 110 corrigé, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 15 bis, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ART. 16

M. le Rapporteur - L'amendement 82 est rédactionnel.

L'amendement 82, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 16

M. le Rapporteur - L'amendement 83 est de cohérence.

L'amendement 83, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 16 est ainsi supprimé.

ART. 17

M. le Ministre - L'amendement 222 tend à permettre les recherches sur les embryons porteurs d'une anomalie détectée lors d'un diagnostic préimplantatoire dès lors que cette recherche vise au développement de la médecine embryonnaire.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

Mme Christine Boutin - Je rappelle qu'il y a quelques années on nous avait assuré que jamais il n'y aurait de recherche sur l'embryon et on se posait encore des questions sur le DPI. Aujourd'hui il semble ne plus y avoir de réserves... Pourtant le DPI n'a pas pour objectif de soigner l'embryon, mais de sélectionner celui qui convient aux parents.

L'amendement 222, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Avec l'amendement 254 rectifié, nous abordons la question, ô combien grave, du « bébé-médicament » - un très mauvais terme auquel je proposerai volontiers de substituer celui de « bébé de l'espoir » et, à dire vrai, du double espoir.

En l'état de notre droit, des parents dont un enfant est atteint d'une maladie incurable qui le condamne à très brève échéance ont le droit de recourir au diagnostic préimplantatoire pour sélectionner un embryon indemne de cette maladie. C'est le premier espoir.

Ce dont il s'agit aujourd'hui, c'est d'autoriser la deuxième étape : le prélèvement, à la naissance de cet enfant, dans le cordon ombilical, de cellules-souches qui permettront peut-être de guérir l'aîné, autrement condamné. Tel est le sens de l'amendement, qui vise donc à élargir le champ des indications du DPI, à titre de traitement expérimental. Cette possibilité est toutefois très strictement encadrée.

En premier lieu, elle sera limitée aux seuls cas dans lesquels le pronostic vital d'un enfant, menacé par une maladie génétique incurable, entraînant la mort « dès les premières années de la vie », peut être amélioré « de façon décisive » par l'application d'une thérapeutique rendue possible par la réalisation du diagnostic.

En outre, il est précisé que, dans ce cas, le DPI aura pour seul objet de permettre l'application d'une thérapeutique, sur un enfant déjà né et malade, qui ne porte pas atteinte au respect de l'intégrité du corps de l'enfant né du transfert de l'embryon in utero. C'est notamment le cas des prélèvements de cellules-souches du cordon ombilical pour le traitement de la maladie de Fanconi.

En tout état de cause, il est important de rappeler que le recours à une nouvelle tentative de fécondation in vitro - FIV - est subordonné à l'épuisement des stocks d'embryons surnuméraires conservés après une première FIV. Je regrette de parler de « stocks », Madame Boutin, mais c'est le mot couramment utilisé...

Mme Christine Boutin - Logique !

M. le Rapporteur - Enfin, la réalisation du DPI dans un but thérapeutique sera soumise à l'autorisation de l'Agence de la biomédecine, qui devra présenter, dans son rapport annuel d'activité, un bilan de l'application de ces dispositions. Celui-ci permettra de déterminer s'il convient de maintenir la possibilité de recourir, à titre exceptionnel, à ces traitements expérimentaux.

M. le Ministre - Il s'agit d'un amendement d'initiative parlementaire et, comme je l'ai dit dans mon exposé liminaire, il est des sujets sur lesquels il faut voter en conscience. Le Gouvernement s'en remettra donc à la sagesse de l'Assemblée.

Le sujet est tragique, puisqu'il s'agit, d'un côté, d'un enfant condamné et, d'un autre côté, d'un enfant expressément conçu pour soigner ce malade.

Le choix est donc tragique, et la possibilité technique existe : deux cas au moins sont rapportés. Le bonheur retrouvé d'une famille dont l'enfant est sauvé ne peut se discuter mais, il faut le savoir, cet amendement marque une rupture dans les comportements, puisqu'il autorise à choisir un embryon en fonction de ce que l'on attend de lui.

Je ne suis pas certain que nous disposions du recul suffisant pour légiférer, ni, d'ailleurs, qu'il faille légiférer pour un très petit nombre de cas. Toutefois, l'amendement a été minutieusement rédigé, pour éviter tous les débordements, et l'on ne peut se prononcer en fonction des incertitudes qui demeurent, car la technique évoluera.

Par ce choix, extrêmement difficile, je souligne enfin que l'on s'écarte singulièrement de l'assistance médicale à la procréation, car il s'agit de bien autre chose que de simple procréation.

Comme je vous l'ai dit, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Mme Christine Boutin - Je ne pensais vraiment pas que l'on arriverait là, si vite, quand on a commencé à rédiger les lois relatives à la bioéthique. Mais, de dérives en bons sentiments, de techniques qui permettent tout aux embryons surnuméraires dont on ne sait que faire, on est bel et bien arrivé à ce que le ministre a, avec raison, qualifié de rupture.

Je suis triste, étonnée et malade de constater que c'est l'un des nôtres qui propose cela, en utilisant, avec sincérité, les méthodes qui ont servi avec constance depuis dix ans. Les bons sentiments, d'abord - mais au moins M. le rapporteur a-t-il parlé clairement de « sélection », ce qui n'avait jamais été explicitement dit jusqu'à ce jour. Les mots, ensuite : qui peut être contre un « enfant de l'espoir » ? Mais comme M. Fagniez sent que, malgré tout, il y a quelque chose de gênant, qui inquiète, il nous rassure immédiatement en expliquant que ce sera un traitement « expérimental ».

Seulement, ce coup-là, on nous l'a fait à chaque fois ! Et puis, vous avez eu l'élégance de vous excuser d'employer le mot « stock » en parlant d'embryons. Mais c'est la logique même de l'amendement ! Et encore : « quoi de plus beau que le bonheur d'une famille ? » Mais quelle sera la vie de ce fameux « enfant de l'espoir » ? Quel regard portera sur lui sa famille, et en particulier son aîné ? Il sera peut-être exalté et heureux ; peut-être sera-t-il traumatisé, aussi. N'utilisons donc pas le beau mot de bonheur à contretemps !

Que faisons-nous, au cours de ce débat ? Après avoir, tout à l'heure, accepté la brevetabilité du vivant, nous accepterons, demain, la recherche sur l'embryon et, entre-temps, nous nous apprêtons à accepter l'instrumentalisation d'un enfant ! Encore devons-nous nous féliciter que l'on prévoie de ne pas attenter à sa vie !

La philosophie qui sous-tend cet amendement est indigne de notre pays. Vraiment, Monsieur Fagniez, vous allez loin !

M. Alain Claeys - Notre amendement 154 corrigé est dans le même esprit que celui de la commission. Ce n'est pas sans de multiples interrogations que nous avons décidé, il y a quelques mois, de le déposer, car c'est une décision grave. En ce qui me concerne, je m'y suis résolu après avoir participé aux débats de la commission nationale d'éthique à ce sujet.

La décision est grave car elle concerne l'enfant à naître et elle revient à élargir le champ de l'AMP, technique initialement destinée à lutter contre l'infertilité.

En 1994, le législateur a voulu mettre en place le DPI, mais il a tout de même fallu cinq ans pour que paraissent les décrets d'application et que soient créés les trois centres français, à Paris, Montpellier et Strasbourg. A la demande des médecins et des chercheurs, le comité national consultatif d'éthique a envisagé les situations très particulières où le recours au diagnostic préimplantatoire pourrait être étendu.

Elles concernent notamment ceux que l'on qualifie grossièrement de « bébés médicaments » et que j'ai préféré, maladroitement sans doute, appeler des « bébés de l'amour », le rapporteur parlant quant à lui de « bébés de l'espoir »...

Mme Christine Boutin - On a même entendu parler de bébés sauveurs !

M. Alain Claeys - Pour nous, les lois bioéthiques n'ont pas vocation à trancher la relation singulière qui se noue entre une équipe médicale et un couple en situation de détresse. Du reste, ce sont eux qui prennent la décision finale...

Mme Christine Boutin - Et l'enfant ? Se soucie-t-on de ses droits ?

M. Alain Claeys - Le premier des droits, c'est celui de l'enfant à naître.

Mme Christine Boutin - C'est vous qui dites cela !

M. Alain Claeys - De quel droit refuser à un couple la possibilité que son enfant à naître puisse aussi apporter - dans des conditions strictement encadrées - à son grand frère, ou à sa grande s_ur malades le moyen de vivre ?

Croyez bien, Monsieur le rapporteur, que nous n'avons pas sur ce sujet de susceptibilité d'auteur : nous sommes tout prêt à fusionner notre amendement avec le vôtre, mais soyons conscients qu'en votant cet amendement commun, nous prendrons une responsabilité qui ne doit pas être sous-estimée. Nous en sommes, Madame Boutin, bien persuadés.

M. le Rapporteur - Je reprends la parole pour préciser les conditions dans lesquelles la commission a adopté, à une très large majorité, cet amendement important. J'ai réfléchi pendant six mois avant de prendre une décision et j'ai rencontré tous les intervenants français concernés par le sujet. Et je me suis bien gardé d'aller à Chicago, en Belgique, au Royaume Uni ou ailleurs car je considérais qu'il était de notre devoir de prendre une position spécifiquement française à même de trancher les problèmes qui se posent à nos compatriotes.

Mme Boutin m'a reproché de céder à la tentation du compassionnel ou de faire de la casuistique. Avec un brin de condescendance, elle a même laissé entendre que, gagné par une émotivité mal maîtrisée, je n'avais pas su dire non. Il est des cas, chère collègue, où la facilité consiste justement à dire oui ou non sans aller au fond des choses. Au sein de la commission, nous nous sommes fait un devoir de réfléchir longuement et d'apporter une réponse équilibrée.

J'ai employé à dessein le terme d'enfant de l'espoir pour une raison simple. Dans les cas qui nous intéressent, seul le recours à la PMA permet de garantir que l'enfant à naître sera indemne. S'il n'y est pas fait recours, rien ne peut garantir qu'il ne sera pas lui aussi porteur de la maladie. Comprenons-nous bien, contrairement à ce qui a pu se pratiquer ailleurs - et notamment à Chicago - l'objectif n'est pas de faire naître un enfant dans l'intérêt thérapeutique d'autrui mais de s'assurer que l'enfant à naître est indemne. Dès lors, il est logique d'éliminer les embryons porteurs de la maladie. Au reste, 80 % des embryons surnuméraires ne sont pas utilisés...

Mme Christine Boutin - Cet argument, on l'a déjà entendu !

M. le Rapporteur - Doit-on s'interdire d'y regarder de plus près pour implanter ceux qui seront le plus profitables ? On ne porte d'ailleurs aucune atteinte à l'intégrité de cet enfant à naître...

Mme Christine Boutin - Encore heureux !

M. le Rapporteur - Est-il préférable de ne pas recourir au diagnostic pré-implantatoire, si cela fait courir au jeune enfant le risque de subir une greffe de moelle sous anesthésie générale avant sa troisième année ?

Dans certains pays, on envisage de faire naître des enfants pour tenter de sauver des petits leucémiques, lorsque les chimiothérapies ont échoué et que la greffe est impossible.

Madame Boutin, au terme de votre très brillant exposé - tout de même un peu dur à mon endroit ! - on aurait pu croire que nous étions disposés à laisser dériver les choses ! La vérité, c'est que nous faisons le choix d'un double espoir : celui de faire naître un enfant indemne, et celui que cette naissance permette de guérir un autre enfant (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Merci, enfin, Monsieur Claeys, d'avoir indiqué que vous étiez disposé à faire converger votre amendement avec le nôtre.

Mme la Rapporteure pour avis - Rappelons ce que le droit actuel permet de faire et soyons attentifs à la situation concrète des parents dont l'enfant est atteint d'une maladie génétique incurable. Le risque que la mère de cet enfant soit tentée de mettre au monde un autre enfant, y compris par les voies naturelles, au risque de l'instrumentaliser en vue de sauver son aîné, existe déjà. Du reste, un tel comportement constitue-t-il une menace ? N'est-il pas naturel de la part d'une mère désespérée ?

Dès lors, il est logique de recourir au DPI pour s'assurer - comme la législation le permet déjà - que l'enfant à naître est indemne, et que sa naissance pourra donc contribuer à la guérison de son frère ou de sa s_ur. En l'état du droit, nous serions dans la situation absurde où le médecin serait en mesure de déterminer lequel des embryons pouvant donner lieu à implantation n'est pas porteur de la maladie mais où il n'aurait pas le droit de le dire à la mère ! Une telle situation n'est pas seulement absurde : elle est abominable. Peut-on imaginer qu'un médecin ne mette pas tout en _uvre pour accéder au désir légitime de la mère de mettre au monde un enfant bien portant et de donner une chance de guérison à son enfant malade ?

Il est vain d'opposer un raisonnement abstrait à des situations aussi tragiquement concrètes.

M. Michel Piron - A titre personnel, je me suis d'abord senti en profond désaccord avec les propos de Mme Boutin mais je veux bien considérer avec elle que ces situations soulèvent des questions presque impossibles à trancher.

Certains ont parlé de « double espoir ». Soit, mais comment faire la part entre le premier - celui de mettre au monde un enfant indemne - et le second - celui de profiter de cette naissance pour soigner un enfant gravement malade ? La pression que font peser de tels dilemmes sera lourde à supporter pour des familles déjà douloureusement éprouvées. Est-il envisageable que l'on en vienne à considérer un jour l'enfant à naître non plus comme une fin mais comme un moyen ? C'est là que l'injonction kantienne reprend tout son sens !

Mme Christine Boutin - Je n'ai pas compris toute la démonstration de Mme Pecresse : dans la technique du DPI, on choisit bien l'embryon qui est le plus « acceptable »...

Monsieur Fagniez, ne voyez surtout pas dans mes propos de tout à l'heure une attaque personnelle.

Monsieur Claeys, je ne comprends pas votre raisonnement. Vous dites que le législateur n'a pas à interférer dans le dialogue entre le couple et le médecin. A quoi servons-nous, alors ? Si nous faisons des lois sur la bioéthique, c'est bien pour fixer des limites et éviter les dérives ! Cela fait plusieurs fois dans la soirée que le sujet revient : je commence à m'inquiéter... Peut-être que, sur ces sujets si importants, nous ne sommes malheureusement qu'un théâtre d'ombres...

M. Alain Claeys - Je voudrais répondre.

M. le Président - Non, vous vous êtes déjà exprimé. L'Assemblée étant pleinement informée, nous allons procéder au vote. Je vous demanderai seulement de me dire si vous vous ralliez à l'amendement de la commission.

M. Alain Claeys - Seulement un mot à Mme Boutin : il est un élément que le législateur ne peut pas apprécier, c'est le désir de l'enfant pour lui-même.

Monsieur le Président, nous retirons notre amendement au profit de celui de la commission.

L'amendement 154 corrigé est retiré.

L'amendement 254 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 17 modifié, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à cet après-midi, à 15 heures.

Prochaine séance ce matin, jeudi 11 décembre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 1 heure 5.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 11 DÉCEMBRE 2003

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Discussion de la proposition de loi (n° 1141) de MM. Luc-Marie CHATEL et
Jacques BARROT tendant à redonner confiance au consommateur.

M. Luc-Marie CHATEL, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Rapport n° 1271.)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

1. Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 593) relatif à la bioéthique.

M. Pierre-Louis FAGNIEZ, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Rapport n° 761.)

Mme Valérie PECRESSE, rapporteure pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Avis n° 709.)

2. Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 1233) relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.

M. Jean-Paul ANCIAUX, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Rapport n° 1273.)

A VINGT-DEUX HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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