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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 70ème jour de séance, 178ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 3 MARS 2004

PRÉSIDENCE de Mme Hélène MIGNON

vice-présidente

Sommaire

FORMATION PROFESSIONNELLE
ET DIALOGUE SOCIAL (CMP) 2

RESPONSABILITÉS LOCALES (suite) 8

ART. 67 (précédemment réservé) (suite) 8

ART. 68 11

ART. 69 12

ART. 70 13

ART. 70 BIS 13

ART. 70 TER 13

APRÈS L'ART. 70 TER 14

ART. 71 14

APRÈS L'ART. 71 15

ART. 72 15

APRÈS L'ART. 72 19

ART. 73 19

ART. 73 BIS 21

ORDRE DU JOUR DU JEUDI 4 MARS 2004 22

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

FORMATION PROFESSIONNELLE ET DIALOGUE SOCIAL (CMP)

Mme la Présidente - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la CMP sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte élaboré par la CMP sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.

M. Claude Gaillard, rapporteur de la commission mixte paritaire- Ce texte aborde deux des questions les plus problématiques du droit du travail en France : la formation professionnelle et le dialogue social.

Rénover le dialogue social, renforcer la formation professionnelle, c'est le défi monsieur le ministre, que vous avez lancé à la France.

Votre projet n'est qu'une étape, mais une étape historique. C'en est fini de considérer que la lutte contre le chômage et les inégalités ne peut être gagnée qu'à coup d'interdits et de règles rigides.

Malgré la faible marge de man_uvre laissée par les accords inter professionnels, la navette législative a été fructueuse.

Tout d'abord, jusqu'à présent, notre système de formation professionnelle profitait essentiellement aux plus qualifiés. Au lieu d'offrir une seconde chance aux salariés, il les condamnait en quelque sorte à une double peine. Au contraire, le présent projet reconnaît un droit individuel à la formation pour tous les salariés. Il clarifie la mise en _uvre des plans de formation d'entreprise, et élargit l'accès à la formation en alternance grâce au contrat de professionnalisation. Enfin, l'effort financier des entreprises est accru.

En première lecture, l'Assemblée a instauré une information annuelle obligatoire des salariés sur leurs droits acquis, de surcroît transférables en cas de licenciement. Elle a encore inscrit les formations diplômantes au rang de celles justifiant une formation plus conséquente pour les nouveaux contrats de professionnalisation. Le Sénat a amélioré l'accès à la formation des mères de famille, des travailleurs souffrant d'illettrisme, et des personnes handicapées. Il a précisé les obligations de formations des employeurs et a instauré un « titre formation » pour financer les frais de l'employeur dans le cadre du « Droit individuel à la formation ». Il a enfin précisé le temps de formation des contrats de professionnalisation.

Il a par ailleurs proposé la création d'un Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie qui se substitue à trois instances préexistantes.

Dans la mesure où nous souhaitons améliorer le contrôle des fonds affectés à la formation professionnelle, la CMP a précisé que ce nouveau conseil devrait contrôler l'ensemble des sommes collectées au titre de la formation professionnelle et de celles qui lui sont affectées.

Pour ce qui est du dialogue social, votre projet lui donne un second souffle.

Tout d'abord, vous réaménagez le principe de faveur. Désormais, les accords d'entreprise pourront déroger aux accords de branche, sauf pour les salaires minimaux, les classifications, la prévoyance collective, et les fonds mutualisés de la formation professionnelle.

Ensuite, le projet instaure le principe de l'accord majoritaire. L'Assemblée a précisé le texte ; quant au Sénat, il a ouvert à la négociation d'entreprise l'ensemble des champs ouverts à la négociation de branche, et précisé le régime juridique des accords de groupe ou de ceux passés dans les entreprises dépourvues de représentation syndicale.

Il a par ailleurs enrichi le titre III par un nouveau volet relatif à la participation afin d'adapter l'intéressement à la dimension européenne des entreprises françaises, de faciliter le franchissement du seuil de cinquante salariés pour les entreprises ayant conclu un accord d'intéressement, d'assujettir à l'obligation de participation les entreprises localisées dans les « zones franches », de favoriser les plans d'épargne entreprise, et de remédier à la faible diffusion des dispositifs de participation dans les petites entreprises.

Ces propositions sont intéressantes, mais la CMP a adopté un amendement pour limiter l'obligation de négocier un plan épargne entreprise - PEE - aux seules entreprises dotées de délégués syndicaux ou d'un comité d'entreprise, afin de ne pas pénaliser nos PME. Le dialogue social est un droit et une nécessité, non un dogme.

Cet après-midi, le Sénat a adopté les conclusions de la CMP sans les amender. Je vous invite à faire de même. A cet égard, je regrette qu'une astuce de procédure retarde l'adoption définitive de ce texte. Ce n'est pas rendre service aux partenaires de la formation professionnelle.

Monsieur le ministre, votre texte n'est qu'une étape, mais nous serons à vos côtés pour le chemin qu'il reste à parcourir... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gaëtan Gorce - Les socialistes ne vous suivront pas dans cette marche à reculons.

Si nous nous réjouissons du retour de certaines dispositions « oubliées » en première lecture, notamment le principe d'adaptation en matière de formation professionnelle, il reste beaucoup à dire sur le volet dialogue social, redoutable machine à découdre le droit du travail.

Vous avez présenté, en première lecture, la position commune adoptée par les partenaires sociaux le 16 juillet 2001, comme votre principale source d'inspiration. Il n'en est rien.

Une lecture attentive du texte issu de la CMP montre que rien n'a changé : l'accord majoritaire est escamoté et, pire, l'accord dérogatoire est généralisé.

Certes, l'accord majoritaire est reconnu, mais il l'est de manière à la fois timide et hypocrite, puisque ce que vous reconnaissez en fait, c'est le droit d'opposition, qui existait déjà. Mieux aurait valu aborder la question sous son autre angle, en prévoyant que s'expriment ceux qui sont majoritairement favorables à un accord. De même, on peut craindre que ce qui est présenté comme un accord majoritaire dans les entreprises ne soit un accord à propos duquel une minorité peut s'exprimer. Autrement dit, il aurait été préférable de privilégier une approche positive plutôt que négative. De notre point de vue, la démocratie sociale doit s'appuyer sur une vraie majorité, pour réintroduire les grandes organisations dans le jeu du dialogue. C'est donc une occasion manquée, nous le répétons. Au moins auriez-vous pu prévoir une clause de rendez-vous. Vous ne l'avez pas souhaité, et c'est regrettable. L'auriez-vous acceptée que nous aurions eu le sentiment qu'un processus était en marche, par étapes. Ce à quoi nous assistons, c'est bien à une opération politique, sans volonté de faire évoluer les choses.

Mais le pire n'est pas là ; il tient à ce que vous généralisez l'accord dérogatoire, remettant ainsi en cause le principe de faveur, dont le Conseil d'Etat a estimé, dans son avis du 22 mars 1973, qu'il s'agit d'un « principe général du droit du travail ». Le texte pose donc éventuellement un problème, préoccupant, de constitutionnalité.

Le principe de faveur a pour effet, on le sait, qu'en cas de conflit de normes, c'est la plus favorable au salarié qui doit s'appliquer. Il a pour conséquence, aussi, la diffusion des acquis obtenus par les salariés d'une entreprise aux salariés de la branche et, en ce sens, il fait office de verrou au dumping social. C'est aussi un élément essentiel de la viabilité d'un accord de branche.

Il est vrai que, depuis des années, les organisations patronales, dont le MEDEF, ont le principe de faveur en ligne de mire. Il est patent qu'elles ont exercé une pression visible, ostensible, ostentatoire - comme il vous plaira... - pour qu'il soit remis en cause ; c'est ce que fait le texte qui nous est soumis ce soir, par une disposition ajoutée au projet initial. Et c'est ainsi que, par un mécanisme simple et pervers, vous généralisez l'accord dérogatoire, transformant du même coup un élément de droit commun en élément de négociation. Autrement dit, ce qui, jusqu'à maintenant, était automatiquement étendu à la branche ne le sera qu'après négociation, c'est-à-dire avec une contrepartie. Par ce texte, vous introduisez le marchandage au c_ur même du droit du travail, ce droit qui devrait protéger les salariés. Par ce texte, vous faites que le socle des droits sociaux sera désormais négociable à la baisse dans les entreprises, d'autant que d'autres dispositions, parce qu'elles tendent aussi à la remise en cause de l'actuelle hiérarchie des normes, introduisent un marchandage supplémentaire et, en même temps, restreignent la diffusion des acquis sociaux des entreprises les plus avancées sur le plan social vers les autres.

On comprendra l'ampleur de nos craintes, que l'analyse du texte renforce encore. Il ouvre la voie à l'éclatement du droit du travail puisque vous permettez qu'il y ait autant de droits que d'entreprises. On a vu, déjà, ce qu'il en a été du droit de licenciement. Le risque, ici, est d'autant plus grand que vous autorisez la conclusion d'accords d'entreprise dérogatoires, sans maintenir le garde-fou du référendum.

En conclusion, ces dispositions ajoutées au texte initial ne font que boucler un système qui traduit une modification radicale des principes de la négociation collective. Sans doute s'agit-il d'une « révolution » pour le MEDEF mais, pour nous, il s'agit bien davantage de réaction sociale, puisque vous remettez en cause des dispositions essentielles du code du travail.

Certes, le droit du travail doit évoluer, mais le progrès social doit demeurer et donc le principe de faveur, qui le permet. Le groupe socialiste était prêt à débattre de l'évolution souhaitable mais il ne peut accepter une telle remise en cause de la hiérarchie des normes. Voilà qui le conduira à voter contre le texte et, probablement, à saisir le Conseil constitutionnel. Point n'est besoin d'être Nostradamus pour comprendre que nous serons amenés à revenir sur ces questions essentielles, et notamment sur le principe de faveur.

M. Jean Lassalle - Le groupe UDF retient une double inquiétude. En effet, le progrès incontestable que constitue le droit individuel à la formation risque d'être effacé par les interrogations que suscitent l'application du contrat de professionnalisation et le risque que le droit à la dérogation, s'il est mal encadré, ne bouleverse la hiérarchie des normes.

Le groupe UDF a toujours exprimé son attachement au développement de la formation professionnelle ; il est donc convaincu du bien-fondé des dispositions proposées dans ce texte, dans l'esprit du compte épargne-temps-formation proposé par notre collègue Hervé Morin il y a deux ans. Ce projet traduit une avancée sociale voulue et approuvée par les partenaires sociaux. Nous aurions toutefois aimé voir levées les inquiétudes relatives aux contrats de professionnalisation.

Au-delà, le texte issu de la CMP comporte des améliorations significatives, qu'il s'agisse de la lutte contre l'illettrisme, de l'ouverture de l'apprentissage aux jeunes handicapés ou de l'objectif fixé à la formation professionnelle de contribuer au retour à l'emploi des femmes qui ont arrêté de travailler pour élever leurs enfants.

Enfin, l'Assemblée a introduit des dispositions relatives aux salariés en CDI et à l'information des salariés en CDD sur leur droit à la formation.

Nous avions demandé que l'on prenne des dispositions volontaristes pour assurer plus de transparence dans le financement de la formation professionnelle. Ce sera le cas avec la création du Conseil national chargé d'évaluer les fonds et avec l'obligation faite aux organismes spécialisés de communiquer aux contrôleurs de l'administration les renseignements qu'ils détiennent.

S'agissant du dialogue social, nous sommes favorables au principe majoritaire qui responsabilise les partenaires sociaux, pour autant qu'il ne porte pas atteinte au pluralisme syndical. En revanche, nous sommes très réservés sur la possibilité de déroger par un accord de branche ou d'entreprise à une règle supérieure plus favorable. C'est bouleverser la hiérarchie des normes et risquer une anarchie sociale qui fragilisera la situation des salariés. Au contraire, lors de la compagne présidentielle, François Bayrou avait proposé d'inscrire le droit à la négociation dans la Constitution.

Nous sommes également réservés sur les modalités de relance du dialogue social, mais nous approuvons la partie consacrée à la formation professionnelle. Le groupe UDF votera le texte de la CMP (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Frédéric Dutoit - La précipitation dont vous faites preuve vise à cacher les effets terribles de ce texte pour notre droit social. Habilement, vous présentez deux réformes, utilisant l'une pour faire passer l'autre.

Il s'agit d'abord du droit à la formation professionnelle tout au long de la vie. Certains éléments comme la création d'un droit individuel à la formation et l'augmentation des contributions patronales sont positifs, mais d'autres constituent des dérives.

D'abord, la formation n'aura plus lieu forcément pendant le temps de travail. Ensuite, le choix de cette formation est soumis à l'approbation de l'employeur ce qui rendra difficile de choisir une formation sans relation avec l'emploi exercé. Du reste, les vingt heures par an cumulables sur six ans suffiront à l'adaptation à un poste, mais pas à acquérir une autre qualification.

La formation ne se fera pendant le travail que si elle concerne une adaptation au poste de travail ; si elle vise au développement des compétences, elle se fera hors temps de travail. Cette distinction est arbitraire et rien ne garantit que l'employeur définira honnêtement avec le salarié les objectifs de la formation.

Enfin, le contrat de professionnalisation est trop court, et la formation de 24 mois par autorisation de branche n'est que dérogatoire. Le temps en formation passe de 25 % à 15 %, sauf dérogation. On exclut donc les jeunes en contrat par alternance.

En second lieu, la réforme du dialogue social constitue une atomisation de notre droit du travail. Vous la présentez comme l'aboutissement d'une position commune des organisations syndicales. En réalité, elles la condamnent toutes, sauf le MEDEF, dont le Gouvernement se fait le principal complice pour procéder à une refondation sociale.

Après avoir démantelé le processus de réduction du temps de travail, supprimé les emplois-jeunes et les contrats aidés ainsi que les articles de la loi de modernisation sociale permettant de lutter contre les licenciements boursiers, vous cédez une fois de plus aux injonctions du patronat sans reculer devant la provocation à l'égard du monde du travail.

Vous prétendiez baisser les impôts : c'était pour favoriser les riches tout en diminuant la portée de l'ASS ; réformer les retraites : pour fragiliser le système par répartition et faire place à la capitalisation ; sauvegarder les services publics : c'était pour ouvrir la voie la privatisation ; relancer l'économie pour l'emploi : plans sociaux et délocalisations se généralisent.

De même aujourd'hui, vous prétendez rénover le dialogue social. En réalité vous instaurez la précarité avec le contrat de mission et vous supprimez des garanties collectives, et bientôt ce sera la suppression d'un jour férié et la remise en cause du droit de grève !

Nous aurions pu nous féliciter qu'un gouvernement se décide enfin à rénover le droit de la négociation collective. Mais c'est une occasion gâchée. En réalité, vous remettez brutalement en cause la hiérarchie des normes, vous instituez autant de règles que d'entreprises par l'extension des accords dérogatoires et vous donnez la préférence au droit d'opposition sur l'accord majoritaire.

Comment accepter qu'un accord signé par des partenaires sociaux minoritaires engage toute une profession, voire tout le monde du travail ? Il est vrai que c'est vous qui avez cassé un accord majoritaire sur les 35 heures dans la restauration, lésant ainsi 750 000 salariés, ignoré un vote majoritaire à EDF, conclu un accord ultra-minoritaire sur les retraites et entériné l'accord minoritaire sur les intermittents du spectacle !

En vérité, il n'y a dans ce texte ni autonomie de la négociation ni affirmation du principe d'accord majoritaire, mais un vrai recul social, pour libérer le marché. Ce projet en lequel vous voyez « la mère de toutes les réformes » est plutôt le fils légitime de la refondation sociale voulue par le Medef. Toutes les organisations syndicales y voient, comme nous, un démantèlement programmé du code du travail. L'une d'entre elles vous a d'ailleurs reproché de privilégier « une mécanique d'opposition à la négociation ».

Il faut rejeter ce texte de régression sociale sans précédent, pour réformer la démocratie sociale en donnant plus de droits aux salariés. Nous continuerons à défendre nos propositions en ce sens et nous voterons contre ce projet.

M. Michel Bouvard - Rénover le dialogue social est un défi qu'il nous faut relever dans un monde en rapide changement. Cela suppose des syndicats forts et crédibles, et une volonté de tous les partenaires de discuter ensemble.

Après bien des errements, ce texte marque le retour aux principes originels de la République et à l'esprit du CNR tel que le voulait le général de Gaulle, c'est-à-dire que le législateur détermine les principes fondamentaux du droit du travail et du droit syndical. Le 6 janvier 2000, le Président de la République rappelait pour sa part que la démocratie politique ne progressera qu'en s'appuyant sur la démocratie sociale.

Ce texte consacre également la priorité donnée à la formation professionnelle tout au long de la vie, et en fait le pivot de la politique de l'emploi. Enfin, la CMP a introduit des dispositions concernant la participation, notion imaginée il y a des décennies mais qui reste pleinement d'actualité.

Jusqu'à présent, notre système de formation présentait de nombreux défauts. En premier lieu, il bénéficiait surtout aux salariés les plus qualifiés, travaillant dans les plus grandes entreprises, consacrant ainsi une France à deux vitesses. Au lieu de réduire les écarts de formation initiale, il les creusait, au lieu d'offrir un droit à une seconde chance, c'était une « condamnation à une double peine ». En second lieu, pendant trop longtemps, politique de formation professionnelle et politique de l'emploi ont été conçues de manière distincte. Or, la formation tout au long de la vie est une sorte d'assurance-chômage et la meilleure garantie contre l'éviction des seniors du marché du travail. Les économistes parlent de capital humain et d'employabilité pour signifier, plus simplement, le fait que le travail a changé depuis l'époque des Trente Glorieuses, qu'il offre à tous des chances nouvelles, mais que pour pouvoir les saisir, chacun doit prendre soin de son savoir, l'enrichir en permanence et l'adapter aux besoins de la société.

Le Sénat a amélioré l'accès à la formation des mères de famille souhaitant retravailler, des travailleurs souffrant d'illettrisme et des personnes handicapées. Il a également distingué l'adaptation du salarié à son poste de travail, qui constitue une obligation pour l'employeur, de la capacité du salarié à occuper un emploi, à laquelle l'employeur doit simplement veiller. Il a institué un titre formation pour le financement des frais incombant à l'employeur dans le cadre du droit individuel à la formation. Il a encore introduit la possibilité de définir par accord interprofessionnel les modalités de mise en _uvre des nouveaux dispositifs de formation en l'absence d'accord de branche. Enfin, il a amélioré la règle retenue pour la proportion de temps de formation dans les contrats de professionnalisation.

Ces progrès importants ont été permis par le travail du Parlement sur un texte pour lequel les accords sociaux laissaient relativement peu de marge de man_uvre.

Ce projet consacre également un véritable renouveau du dialogue social. Je n'y insiste pas, si ce n'est pour rappeler le soutien du groupe UMP, très attaché à ce dialogue laissé trop longtemps en jachère. Aujourd'hui, les partenaires sociaux sont à nouveau capables de signer des accords, nous nous en réjouissons et la représentation nationale a le devoir d'accompagner ces accords en les intégrant dans la loi.

Je m'attarderai davantage sur la participation, élément moteur du dialogue social. Si les modifications apportées au titre II sont limitées, le Sénat a souhaité enrichir le titre III de cinq articles additionnels qui visent à adapter l'intéressement à la dimension européenne des entreprises françaises, à faciliter le franchissement du seuil de 50 salariés pour les entreprises ayant conclu un accord d'intéressement, à assujettir à l'obligation de participation les entreprises localisées dans les zones franches, qui ne sont donc pas, à nos yeux, des zones de non-droit social.

Ces propositions pragmatiques visent à lever les obstacles législatifs au développement de la participation, notamment dans les petites entreprises, et à encourager la négociation collective. Nous savons combien ce thème de l'épargne salariale est vital, tant du point de vue de nos entreprises que de celui du financement des retraites, et nous avons donc accueilli favorablement ces propositions. Toutefois, il était nécessaire que les dispositifs d'intéressement et de participation ne soient pas rendus trop complexes pour les PME. En particulier, même si les plans d'épargne d'entreprise actuels sont plus souvent octroyés que négociés par les chefs d'entreprises, il semblait plus raisonnable de limiter l'obligation de négocier un tel plan aux entreprises dotées d'un délégué syndical ou d'un comité d'entreprise. A défaut, on aurait fait peser sur les petites entreprises une contrainte insupportable, alors que nous nous efforçons de simplifier leurs obligations administratives. Le dialogue social, c'est un droit, une nécessité, pas un dogme.

Ce projet de loi porte en lui un grand espoir, non celui de voir régner l'angélisme dans les relations entre syndicats, patronat et pouvoir politique, mais celui que chacun prenne sa part de l'effort de réforme commun. Si l'opposition n'a pas compris les changements auxquels notre pays est confronté, heureusement, les syndicats ont réalisé que des adaptations étaient nécessaires aux progrès du dialogue social que conforte le présent projet. Cette loi sera donc importante dans l'histoire sociale de notre pays. C'est pourquoi nous saluons le travail accompli par la commission des affaires sociales, par le Sénat et par la majorité. Le groupe UMP apporte tout son soutien à ce texte et vous remercie, Monsieur le ministre, du temps que vous avez consacré à ce travail utile pour notre pays (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Ce projet, qui revêt une importance particulière à mes yeux dans l'action de rénovation que le Gouvernement mène depuis deux ans, a fait l'objet d'un travail exemplaire au cours des derniers mois.

Le texte adopté en commission mixte paritaire répond à mes attentes. Outre des amendements de cohérence et de coordination, la CMP a adopté des améliorations de fond. Ainsi, le nouveau Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie contribuera-t-il, ainsi que vous l'aviez souhaité en première lecture, à l'initiative de M. Ueberschlag, à l'évaluation des politiques menées et à un contrôle régulier de l'emploi des fonds de la formation professionnelle. Quant à l'obligation de formation qui incombe à l'employeur pour assurer l'adaptation des salariés à leur emploi, la rédaction reprend la jurisprudence à laquelle je m'étais moi-même référé, qui n'a jamais été remise en cause. Mais ce qui va sans dire va mieux en le disant et le texte est parfait.

De même, la partie relative au dialogue social a fait l'objet d'améliorations. Je pense notamment à la réécriture de l'article 38 qui, dans un souci de clarté et d'intelligibilité de la loi, recense désormais les dispositions législatives qui pourront être mises en _uvre par accord d'entreprise.

L'article sur la négociation des Plans d'épargne entreprise a été utilement amendé. La Commission mixte paritaire a su trouver le bon équilibre : l'obligation de négocier un PEE s'imposera désormais lorsqu'il y a un délégué syndical ou un comité d'entreprise. A défaut d'accord, le chef d'entreprise pourra toujours mettre en place un PEE, ce qui va bien dans le sens de l'intérêt des salariés, tout en respectant ses prérogatives.

J'adresse mes remerciements à la majorité qui s'est montrée fidèle à ses convictions, y incluant l'UDF, qui nous a rejoints dans notre démarche. Merci aussi aux rapporteurs, Claude Gaillard et Jean-Paul Anciaux, ainsi qu'au président Dubernard pour leur appui constant et pragmatique.

Ensemble nous avons mené à bien cette réforme fondamentale de la formation professionnelle avec la reconnaissance d'un véritable droit individuel à la formation pour tous les salariés. Nous avons rénové les règles du dialogue social en généralisant l'accord majoritaire et en élargissant l'autonomie des accords d'entreprise.

Cette réforme est le symbole de la volonté de réforme du Gouvernement. En matière sociale, bien sûr, dans le respect du dialogue avec les partenaires sociaux, mais plus généralement parce qu'il réalise ainsi, pas à pas, les réformes trop longtemps différées et dont la France a besoin pour retrouver son dynamisme et garantir la pérennité de son modèle social (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

Mme la Présidente - Je rappelle que les explications de vote et le vote auront lieu le 7 avril, après le vote sur l'ensemble du projet relatif aux responsabilités locales.

La séance, suspendue à 22 heures 25, est reprise à 22 heures 35.

RESPONSABILITÉS LOCALES (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux responsabilités locales.

ART. 67 (précédemment réservé) (suite)

M. Frédéric Dutoit - Notre amendement 1154 vise à supprimer les III et IV de cet article, qui transfèrent aux régions les personnels TOS des lycées. Il est hypocrite de dire qu'ils pourront choisir de rester dans la fonction publique d'Etat car ils seront dans ce cas placés en détachement, sans limitation de durée, dans la fonction publique territoriale.

Les grands objectifs éducatifs risquent de se heurter aux soucis des gestionnaires territoriaux, confrontés aux difficultés financières qui vont résulter de ce projet. Cette approche libérale de la décentralisation contribue à faire de l'éducation nationale un instrument économique, et non plus un outil de développement individuel et collectif.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur de la commission des lois - Avis défavorable.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales - Même avis.

L'amendement 1154, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1155 est défendu.

L'amendement 1155, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - Notre amendement 1156 est de repli. Je veux souligner à quel point vous allez casser le statut des TOS : les grilles de rémunération salariale sont identiques dans les trois fonctions publiques, mais la plupart des personnes transférées ne bénéficieront pas de primes, qui ne sont distribuées que par les collectivités les plus riches et selon des critères très subjectifs. En outre, les nouvelles charges financières des collectivités obligeront celles-ci à abandonner ou privatiser certaines missions ; que deviendra alors le personnel - par exemple celui qui assurait la restauration sous statut d'Etat lorsque celle-ci sera concédée à de grands groupes privés ? De surcroît, rien ne garantit que les personnels seront exclusivement affectés aux anciennes missions de l'éducation nationale : non seulement un agent pourra travailler dans plusieurs établissements, mais il pourra aussi dépendre d'autres services du département ou de la région qui l'emploie : il pourra être le matin dans un collège, l'après-midi dans un autre et le soir au conseil général...

L'amendement 1156, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1157 est défendu.

L'amendement 1157, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 382 de la commission est retiré.

M. Pierre Lequiller - Mon amendement 91 est défendu.

M. le Rapporteur - La commission a émis un avis défavorable pour des raisons juridiques, les précisions apportées étant d'ordre réglementaire. Mais c'est incontestablement un amendement pédagogique, destiné à rassurer et à préciser le rôle du chef d'établissement et ses rapports avec les personnels concernés. A titre personnel, j'y suis donc favorable.

M. le Ministre délégué - A mon grand regret je vais demander à M. Lequiller de retirer cet amendement, car il est satisfait par l'article L. 421-23 du code de l'éducation, non modifié par le projet, et qui dispose que « les agents de l'Etat ou des collectivités territoriales affectés dans un établissement public local d'enseignement conservent leur statut, sont administrés par la collectivité dont ils dépendent statutairement, et sont placés sous l'autorité du chef d'établissement ». Il est inutile de le répéter, d'autant que c'est d'ordre réglementaire.

M. Pierre Lequiller - Cet amendement a le mérite de bien préciser les responsabilités des uns et des autres. Les collectivités locales sont responsables du recrutement des TOS, mais il faut que la responsabilité de leur gestion des TOS relève bien du chef d'établissement. Cela est souhaité à la fois par les chefs d'établissement et par les collectivités locales. Je suis heureux que le rapporteur soit personnellement favorable à cet amendement.

M. René Dosière - Comme membre de la commission des lois, je ne peux qu'appuyer la position du rapporteur. Notre commission a examiné attentivement cet amendement et le suivant, le 1309, qui lui est identique. Nous avons conclu que cet amendement était important. A titre personnel, sans engager mon groupe, j'y suis favorable.

M. Jean-Pierre Brard - Pourquoi M. Lequiller a-t-il déposé cet amendement, qu'il n'a pas trouvé un mot pour défendre ? C'est un amendement esthétique, destiné à dissimuler l'essentiel, c'est-à-dire le transfert des charges et l'augmentation de la fiscalité ! « Cachez ce sein que je ne saurais voir »... Le chef d'établissement, c'est comme la Sainte Trinité, tout est en un, puisque tout lui est subordonné : pas besoin d'un amendement à ce sujet, c'est dans l'ordre des choses... Le but de cet amendement est simplement d'occuper le devant de la scène. Pourquoi sinon déposer deux amendements identiques ? Le fond de l'affaire est dissimulé : c'est l'augmentation de la fiscalité locale, résultant du désengagement de l'Etat.

M. le Ministre délégué - Heureusement que M. Brard a pris la parole pour défendre M. Lequiller ! Avec de tels amis on ne va pas loin... Je comprends bien M. Lequiller. Ce qu'il propose est déjà prévu dans le code de l'éducation qui précise que, pour l'exercice des compétences incombant à la collectivité de rattachement, le président du conseil général ou régional s'adresse directement au chef d'établissement. Il lui fait connaître les objectifs fixés par la collectivité de rattachement et les moyens que celle-ci alloue à cet effet à l'établissement. Le chef d'établissement est chargé de mettre en _uvre ces objectifs et de rendre compte de l'utilisation de ces moyens. M. Lequiller apporte, j'en conviens, des précisions supplémentaires ; mais, juridiquement, elles sont d'ordre réglementaire.

M. René Dosière - Mais la loi est supérieure au règlement.

M. le Ministre délégué - Oui, mais vous connaissez la distinction des articles 34 et 37. A l'origine, le Conseil constitutionnel a même été institué pour protéger le domaine réglementaire des empiètements de la loi... (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) Je vous accorde que, depuis, de l'eau a coulé sous les ponts.

M. Pierre Lequiller - L'amendement est maintenu. Le 1309 est identique.

M. le Rapporteur - Même avis. Au Ve siècle, Monsieur Brard, la secte alexandrine des Monophysites se signalait par sa difficulté à distinguer les trois visages de la sainte Trinité ; je vous en dirai plus à la suspension (Sourires).

M. le Ministre délégué - J'ai un doute sceptique. Sagesse.

Les amendements 91 et 1309, mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Présidente - Sur l'article 67, je suis saisie par le groupe communiste et républicain d'une demande de scrutin public.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles - L'amendement 495 de la commission des affaires culturelles a le même objet que le 383 de la commission des lois : il faut une convention pour organiser les relations entre les chefs d'établissement et les présidents des différentes collectivités. Le Gouvernement avait prévu cette convention ; le Sénat l'a supprimée, et nous proposons de la rétablir. Je me rallie à la rédaction de la commission des lois.

M. le Ministre délégué - Favorable.

L'amendement 495 est retiré.

L'amendement 383, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Mon amendement 617 rectifié, conformément aux préoccupations de M. Lequiller et de M. Bonrepaux, met cartes sur table pour la péréquation et l'étend à tout le territoire national.

M. le Ministre délégué - Je préfèrerais que cet amendement de MM. Daubresse et Lequiller soit retiré.

M. le Rapporteur - Nous avons eu à ce sujet un long débat en commission, et j'avais demandé le retrait de cet amendement de M. Lequiller. Mais M. Bonrepaux l'a judicieusement sous-amendé pour qu'il s'applique à toute la France. Comme rapporteur, j'ai recherché une synthèse, sur un problème qui dépasse les clivages partisans, et je maintiens cet amendement.

M. le Ministre délégué - Ce n'est pas grave ; nous sommes habitués aux doublons et aux répétitions... Mais l'article 88 dispose déjà que la commission d'évaluation des charges fera un rapport sur ce point. Cela en fera deux !

M. Augustin Bonrepaux - Sur tous les bancs, nous avons été d'accord pour retirer l'amendement de M. Lequiller, que j'avais sous-amendé, au bénéfice de celui de M. Daubresse, qui est plus général et satisfait tout le monde. C'est un amendement important, et l'objectivité dont fait preuve le rapporteur est de nature à nous redonner confiance. Ses amendements sur la compensation vont également dans le sens que nous souhaitons. Un amendement aussi équilibré devrait être soutenu par tous.

M. René Dosière - Je crois que vous faites une confusion, Monsieur le Ministre. Vous dites : avant les transferts, il y aura un avis de la commission d'évaluation des charges. Or, le rôle de cette commission n'a pas été modifié depuis 1982-1983, époque à laquelle j'avais l'honneur d'en faire partie. Elle est chargée de constater les dépenses de l'Etat, au moment du transfert, alors que, par cet amendement, nous demandons au Gouvernement un rapport sur les inégalités constatées et sur les efforts entrepris pour y remédier avant le transfert. A titre d'exemple, je peux vous assurer que la Picardie et sans doute aussi le Nord-Pas-de-Calais sont beaucoup moins bien dotées en personnel TOS que les régions PACA ou Midi-Pyrénées. Ainsi pourrons-nous apprécier, non les efforts de l'Etat, mais ceux qu'il aurait dû faire. C'est bien pour cela que le Gouvernement s'oppose à cet amendement. Heureusement, M. Daubresse, en bon élu local, a le sens des réalités.

M. Jean-Pierre Brard - Exceptionnellement, je ne suis pas d'accord avec M. Bonrepaux. M. le ministre a un meilleur sens politique que MM. Daubresse et Lequiller, car il sait que pour satisfaire les parlementaires sans s'engager, il suffit de leur promettre un rapport. MM. Daubresse et Lequiller proposent de dresser le bilan des inégalités, mais croyez-vous qu'elles seront corrigées ? Pas du tout ! On va redistribuer ce qui existe, multipliant ainsi les injustices. MM. Daubresse et Lequiller sont schizophrènes car ils soutiennent un texte qu'ils ne pourront pas défendre devant leurs électeurs. En effet, il est dans la droite ligne de la politique de M. Raffarin qui vide les caisses publiques en allégeant l'impôt des plus riches, et fait ensuite payer les collectivités locales ! Je ne soutiendrai pas cet amendement.

M. le Ministre délégué - M. Lequiller a réclamé à l'instant une péréquation pour les Yvelines. J'aurais pu en faire de même pour les Hauts-de-Seine !

On ne peut pas faire de la péréquation à chaque transfert, au risque de la détourner de son objectif : soutenir les territoires les plus handicapés. Si les trois quarts des communes de plus de 10 000 habitants sont éligibles à la DSU, il n'y a plus de péréquation !

Votre amendement me gêne en ce qu'il induit une obligation pour le Gouvernement de rééquilibrer la répartition des ATOS, qui n'est, par ailleurs, pas prévue dans le projet de loi.

M. le Rapporteur - Il ne s'agit pas d'imposer un rééquilibrage au Gouvernement, mais un simple rapport sur les inégalités et les efforts accomplis pour les résorber. Dans la mesure où M. le ministre de l'intérieur a défendu la loyauté des transferts...

M. Jean-Pierre Brard - Et vous l'avez cru ?

M. le Rapporteur - ...cette demande ne me paraît pas exorbitante.

M. Gérard Léonard - Elle ne mange pas de pain !

L'amendement 617 rectifié, mis aux voix, est adopté.

A la majorité de 59 voix contre 20, sur 81 votants et 79 suffrages exprimés, l'article 67 modifié est adopté.

M. René Dosière - Hélas !

ART. 68

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1160 tend à supprimer cet article qui alourdit considérablement la charge financière du département des Pyrénées-Orientales et de la région du Languedoc-Roussillon en leur confiant le fonctionnement du collège de Font-Romeu.

Grâce à Mme Buffet qui a relancé les sections sport-études, une unité de formation et de recherches en sciences et techniques des activités physiques et sportives a été créée et rattachée à l'université de Perpignan. Cet établissement, qui relève de plusieurs institutions, dont le ministère des sports, ne peut connaître de transferts de compétence hors conventionnement, afin de ne pas alourdir sa charge financière.

M. Jean-Pierre Brard - L'amendement 1529 tend à supprimer l'article 68 qui transfère aux régions la propriété des lycées à section bi-nationale ou internationale situés dans leur ressort. Or, la plupart des établissements concernés privilégient l'étude des langues étrangères pour lesquelles nous avons déjà accumulé un retard considérable.

C'est vrai que nous pourrions avoir la témérité de croire que les moyens nécessaires seront effectivement alloués aux établissements visés. Mais en irait-il de même pour un nouveau lycée international dans la Creuse, l'Ain ou l'Ariège ?

Par ailleurs, ces établissements doivent passer des accords avec les Etats étrangers dont ils enseignent la langue pour pouvoir accueillir leurs élèves. Depuis quand un département en a-t-il le pouvoir ? Vous démembrez les responsabilités régaliennes de l'Etat.

Je constate que la justesse de mon argument vous trouble, Monsieur le ministre, ce qui vous oblige à écouter, en stéréophonie, vos conseillers d'une oreille et moi de l'autre... C'est que je parle en connaissance de cause, puisque MM. Carrez, Beaudoin, Pajon et moi-même préparons l'ouverture d'un lycée international. La disposition que vous prévoyez traduirait-elle une défiance à l'égard du Quai d'Orsay, que vous considéreriez incapable de conclure de tels accords ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Ce dont il s'agit ici, ce n'est pas de pédagogie mais de bâtiments. Autrement dit, nous faisons pour les lycées internationaux ce qui a été fait en 1982 et en 1983 pour les autres lycées et pour les collèges et qui leur a été grandement salutaire, chacun en convient.

M. Jean-Pierre Brard - Ce que vous dites est inexact s'agissant des établissements nouveaux. La pédagogie au sens strict continuera de relever de l'Education nationale, mais qui, sinon les collectivités territoriales, décidera du choix des langues étrangères et des modalités d'accueil des élèves étrangers ? Tout cela leur est transféré, que vous l'admettiez ou non, et c'est d'ailleurs ce que nous a dit M. Darcos. Ayez donc l'humilité de reconnaître que vos collègues de l'Education nationale ont peut-être des compétences dans ce domaine...

M. le Ministre délégué - Sans aucun doute, mais vous n'êtes pas leur porte-parole.

M. Jean-Pierre Brard - Il n'empêche qu'ils vous contredisent.

M. le Ministre délégué - Aucunement ! Veuillez me dire quel point du texte dispose qu'une création de lycée international échapperait au droit commun.

M. Jean-Pierre Brard - Tant M. Darcos que le recteur et le préfet de région nous ont dit, à Gilles Carrez et à moi, que ces décisions ne seront désormais plus prises par l'Etat, qui renonce donc à l'une de ses compétences régaliennes, que vous transférez aux régions car vous n'avez aucune ambition pour notre jeunesse... (Protestations sur les bancs du groupe UMP) ni, donc, pour sa maîtrise des langues étrangères.

M. Michel Piron - Par cette argumentation laborieuse, vous cherchez à nous faire prendre des vessies pour des lanternes, alors que le texte établit clairement que la propriété des établissements est transférée, ce qui ne signifie pas, que je sache, que leur est transférée la propriété des langues étrangères ! Nous laissons donc à l'Etat ce qui lui revient : la définition des programmes, la nomination des professeurs et ces fameuses langues étrangères auxquelles nous attachons autant d'importance que vous. Si stéréophonie il y a, c'est bien dans l'interprétation que vous faites d'un texte qui ne se prête pourtant pas à l'exégèse dans laquelle vous vous complaisez.

M. Gérard Léonard - Très bien !

Les amendements 1160 et 1529, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Ministre délégué - Par l'amendement 1270, le Gouvernement permet l'unité de gestion des classes maternelles et élémentaires de deux lycées internationaux, confiée aux départements concernés.

M. le Rapporteur - Avis très favorable à une disposition que je remercie le Gouvernement d'avoir reprise à son compte.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 498 est retiré.

L'amendement 1270 mis aux voix, est adopté.

L'article 68, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 69

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1161 est défendu.

L'amendement 1161, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 386 est de précision.

L'amendement 386, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 69, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 70

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1162 est de suppression. Quel sera le rôle du maire si toutes ses compétences sont confiées aux EPCI ? Ici, on invite à constituer des réseaux d'écoles, mais outre que la décentralisation ne permettra l'ouverture d'aucune classe nouvelle, on ne sait rien du sort futur de la dotation globale.

L'amendement 1162, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 1609 est rédactionnel.

L'amendement 1609, accepté par le Gouvernement mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - Les amendements 88 rectifié et 1366 viennent en discussion commune.

M. Jacques Pélissard - L'amendement 88 rectifié est défendu.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Pour ce qui est de l'accueil des élèves, l'amendement est satisfait.

En revanche, et bien que vice-président d'un EPCI de grande taille, je considère que le pouvoir d'inscrire les élèves doit rester au maire, pour des raisons de proximité (Très bien ! sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. le Ministre délégué - Même avis.

L'amendement 88 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté non plus que l'amendement 1366.

L'article 70, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 70 BIS

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 499 est retiré.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1163 est de suppression.

L'amendement 1163, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 70 bis, mis aux voix, est adopté.

ART. 70 TER

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L'amendement 500 est retiré.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1164 est de suppression. Je m'étonne que le rapporteur pour avis retire ainsi, sans qu'il y ait eu discussion, des amendements adoptés en commission.

L'amendement 1164, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Depuis 1999, Montreuil a signé avec l'Etat un contrat d'objectifs et de partenariat pour la réussite scolaire, qui a de bons effets. Mais ce type de coopération ne doit pas permettre à l'Etat de se désengager de sa mission de service public éducatif. L'amendement 1530 a pour objet de le protéger contre la tentation de transférer des charges aux collectivités dans ce domaine.

M. le Rapporteur - Défavorable. L'article L. 211-1 du code de l'éducation s'applique de façon générale, sans qu'il soit la peine de le rappeler ici.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Brard - M. Daubresse nous a pourtant dit que le Parlement était dans son rôle en confirmant des dispositions existant ailleurs..

M. le Rapporteur - Pour apporter une précision. Ce n'est pas le cas ici.

M. Jean-Pierre Brard - Je veux proposer en quelque sorte une assurances tous risques contre les transferts.

L'amendement 1530, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 387 est rédactionnel.

L'amendement 387, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 70 ter, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 70 TER

M. Jean Tiberi - Depuis 2002, à Paris, Lyon et Marseille le maire peut choisir lui-même ses représentants dans les conseils d'école parmi des personnalités qualifiées. En revanche, le conseil d'arrondissement doit les choisir en son sein. Par souci de parallélisme, l'amendement 1335 rectifié prévoit que le maire d'arrondissement pourra, comme le maire de la ville, choisir les représentants au conseil d'école comme il le souhaite. En second lieu, il prévoit que la commission mixte siège à la mairie d'arrondissement et qu'en cas de partage des voix, le maire d'arrondissement a voix prépondérante. Cela va dans le sens d'une gestion décentralisée des équipements de proximité.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre délégué - Sagesse.

M. Frédéric Dutoit - Je suis maire d'arrondissement à Marseille, et favorable à la déconcentration. Il me semble démocratique que le conseil d'arrondissement désigne ses représentants.

M. Jean Tiberi - Certes. La nouveauté ici est que le maire d'arrondissement n'aura pas à choisir au sein de son conseil.

M. Frédéric Dutoit - Espérons alors que les choix ne seront pas partisans. Sous cette réserve, je ne suis pas opposé à l'amendement.

L'amendement 1335 rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 71

M. Frédéric Dutoit - L'article transfère aux régions les quatre écoles de formation des officiers de la marine marchande de Haute-Normandie, Bretagne et Provence, et ce à titre expérimental puisque ce sont des établissements d'enseignement supérieur qui, de ce fait, n'entrent pas dans le champ de la décentralisation. Il s'agit clairement d'un transfert de compétences aux régions qui ont d'ailleurs déjà largement financé la rénovation des bâtiments. En fait l'Etat veut faire des économies. Notre amendement 1165 est donc de suppression.

L'amendement 1165, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 71 mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 71

M. Augustin Bonrepaux - Le département de l'Orne a été récemment condamné pénalement pour avoir, dans le cadre de ses compétences en matière de voirie et de transports scolaires, attenté à la vie d'autrui de manière non-intentionnelle. On mesure là les lacunes du droit régissant les normes de sécurité quant à l'aménagement d'aires de stationnement pour les cars scolaires. Il est nécessaire que ces aires permettent aux parents d'y déposer leurs enfants en toute sécurité. Pourtant, aucun texte ne fixe pour cela de normes obligatoires. Nous proposons donc, dans la mesure où ces compétences des départements sont réaffirmées par ce projet, de préciser que « pour l'organisation des transports scolaires, le département aménage en tant que de besoin les abords de la voirie départementale. »

M. le Rapporteur - Vous soulevez un problème difficile. Tous les élus locaux conviennent qu'il faut le régler, MM. Gest et Estrosi l'ont rappelé en commission. Cette dernière a néanmoins rejeté l'amendement, pour des raisons juridiques.

M. le Ministre délégué - Quelque chose m'échappe : le département a la compétence en matière de voirie et de transports scolaires, que voulez-vous de plus ?

Mme Marylise Lebranchu - Il n'y a pas de norme de référence.

M. le Ministre délégué - Ça, c'est le deuxième paragraphe de votre amendement. Ce que vous proposez est nécessaire, mais je préférerais que nous attendions les conclusions du groupe de travail qui détermine actuellement les conditions d'élaboration d'une réglementation.

M. Augustin Bonrepaux - Le second paragraphe, dont je n'ai pas donné lecture, renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des normes.

Certes, il y a un groupe de travail, mais en attendant ses conclusions, les départements risquent d'être à nouveau condamnés. Voter l'amendement inciterait peut-être le groupe de travail à accélérer les choses et la discussion pourrait se poursuivre sur de nouvelles bases lors de la navette. Vous pourriez, me semble-t-il, Monsieur le ministre, vous en remettre à la sagesse de l'Assemblée.

M. le Ministre délégué - La loi ne peut créer l'obligation de respecter un décret qui n'est même pas paru ! Je suis ouvert à ce qu'on règle ce problème lors d'une prochaine lecture, mais votre amendement n'est pas bien conçu.

Mme Marylise Lebranchu - J'entends bien cet argument, mais il serait ennuyeux qu'on nous dise la même chose en deuxième lecture. Le système actuel incite même les départements à ne pas créer de zones de stationnement ce qui leur évite le risque d'une condamnation. Ceux qui souhaitent le faire doivent être couverts en cas de contentieux par un décret qui fixe les normes de référence. Si le Gouvernement prend l'engagement que le sujet sera bien traité lors d'une lecture ultérieure (M. le ministre délégué fait un signe d'assentiment), il me semble que nous pourrions retirer notre amendement.

M. Augustin Bonrepaux - Le rapporteur, qui siègera à la CMP, s'engage-t-il également à ce que ce problème soit traité par une rédaction qui satisfasse les juristes comme les départements ?

M. le Rapporteur - J'ai confiance dans la parole du ministre, et je prends l'engagement que me demande M. Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux - Dans ce cas, je retire l'amendement 823.

ART. 72

M. Patrick Bloche - Comment ne pas avouer notre totale incompréhension quant aux dispositions relatives au patrimoine et aux enseignements artistiques ?

Quelle mouche vous a donc piqués pour vouloir décentraliser à tout prix le service de l'inventaire général qui emploie 272 fonctionnaires dans tout le pays ? Il a été, dès sa création en 1964 par André Malraux, l'un des premiers services déconcentrés de l'Etat, bien avant la naissance des DRAC. Aujourd'hui, ce sont de petites équipes pluridisciplinaires intégrées dans les DRAC, le niveau régional étant pertinent pour tout le travail de recherche réalisé.

Il se situe donc en amont du classement des monuments historiques ou de leur inscription à l'inventaire supplémentaire. Les données de l'inventaire permettent l'établissement d'un document essentiel, l'atlas du patrimoine.

Très tôt, une politique active de partenariat avec les collectivités territoriales a été développée par les services régionaux de l'inventaire. Sa disparition, en tant que service public national, ne répond à aucune logique ; elle comporte aussi des risques évidents. Le fondement de l'inventaire, c'est de recenser, étudier et faire connaître. Or, cette unité va être rompue. Si le contrôle scientifique et la définition des normes doivent rester des compétences d'Etat, il n'en va pas de même de la conduite de l'inventaire dont vous souhaitez la dévolution aux régions.

Par ailleurs, en gardant la logique de partenariat vous auriez maintenu un garde-fou essentiel, celui de la neutralité de l'Etat. Quand les régions seront maîtresses du choix des terrains d'étude, on peut craindre que la logique des aménageurs s'impose, car elles seront à la fois juges et parties de la programmation et elles ne prendront pas les initiatives nécessaires.

On retrouve ici des intentions aussi funestes que celles qui ont conduit, l'été dernier, à privatiser les fouilles archéologiques. Partout, c'est le retrait de l'intervention de l'Etat, son démembrement qui est à l'ordre du jour. Je souhaite que la commission et le Gouvernement nous expliquent cette décentralisation totalement injustifiée, qui ne se comprend que dans la logique de réduction de la place de l'Etat qui sous-tend votre politique culturelle depuis près de deux ans.

M. Frédéric Dutoit - Vous ne serez pas étonné, Monsieur le ministre, que j'aille dans le même sens puisque vous poursuivez votre implacable logique de désengagement de l'Etat. Conçu dès l'origine comme un programme national dans sa méthodologie, mais régional dans sa mise en _uvre, l'inventaire général est largement réalisé en partenariat. Alors qu'il faudrait renforcer les synergies, vous voulez le décentraliser. L'entreprise de connaissance initiée par André Malraux suppose pourtant une approche indépendante, fondée sur des critères scientifiques et assurant une égalité de traitement sur tout le territoire national.

La décentralisation de l'inventaire ne se justifie ni par une nécessité budgétaire ni par une quelconque autre raison. Pourquoi ce dogmatisme ? Mon groupe demandera un scrutin public sur cet article.

M. Patrick Bloche - Notre amendement 518 de suppression est défendu.

M. Frédéric Dutoit - Cet article prétend, certes, donner une reconnaissance légale à l'inventaire général du patrimoine culturel, mais en le décentralisant il menace sa cohérence scientifique. C'est pourquoi nous proposons par notre amendement 1166 de le supprimer.

M. le Rapporteur - Monsieur Bloche, la mouche s'appelle le gouvernement de M. Jospin qui, à l'article 111 de la loi sur la démocratie de proximité, et suivant en cela les recommandations de M. Mauroy, préconisait une expérimentation de décentralisation de l'inventaire.

On ne peut pas faire pire que ce que fait l'Etat, et certaines régions ont la volonté de faire mieux. André Malraux a eu une intuition géniale, mais maintenant que l'inventaire des grands monuments est fait, il faut descendre au niveau régional. L'Etat garantira la validité scientifique de l'atlas. Avis défavorable donc.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois - Autant les TOS se sont opposés à leur transfert, autant les personnels de l'inventaire ont manifesté leur souhait d'être décentralisés, mais au niveau des régions, considérant qu'au niveau des départements les équipes scientifiques n' auraient pas une taille suffisante.

La méthodologie reste évidemment nationale ; en revanche l'opérationnel est régional, et peut même être délégué aux départements s'ils le souhaitent.

Mais si vous ne voulez pas décentraliser l'inventaire, Monsieur Bloche, c'est sans doute que vous ne voulez pas décentraliser quoi que ce soit...

M. le Ministre délégué - Monsieur Bloche , je me réfère à nouveau à la Bible, le rapport Mauroy... Je vous renvoie à la page 64 et à la proposition n° 29 : « transfert de la compétence en matière d'inventaire du patrimoine aux départements avec transfert des personnels concernés ». En raison de l'insuffisance des équipes techniques qui seraient disponibles au niveau d'un département, nous avons préféré le niveau régional. Je vous renvoie également, comme le rapporteur, à l'article 111 de la loi sur la démocratie de proximité. Tout le monde a été piqué par la mouche !

Le patrimoine concourt à l'identité de la région. Lui en confier la compétence, c'est le meilleur moyen de lui donner une âme. Faites donc confiance aux élus locaux ! Il ne s'agit pas de confiance aveugle, puisque l'Etat conserve le contrôle technique et l'inventaire national.

M. Patrick Bloche - La décentralisation culturelle est une réalité qui est bien antérieure à 1982 puisqu'elle a commencé dans les années 60-70 par la décentralisation théâtrale. Entre le « désert français » de la fin des années 70 et la carte actuelle des équipements culturels, c'est une véritable révolution qui a eu lieu. Elle s'est aussi traduite sur le plan budgétaire : le budget culturel global des collectivités est aujourd'hui double de celui de l'Etat. Le ministère de la culture a d'autre part été le premier à se décentraliser, et à l'heure actuelle 80 % des subventions sont directement attribuées par les DRAC. La situation dont nous partons est donc un mélange harmonieux de décentralisation et de déconcentration. Et si je me permets de vous interroger, si vos réponses n'ont pas levé l'incompréhension entre nous, c'est qu'en la matière nous avions déjà, depuis quarante ans, un inventaire organisé au niveau des régions. Ce service était engagé dans un partenariat et une mutualisation forte avec les collectivités territoriales. Pourquoi le désorganiser, alors qu'il fonctionnait bien ? La crainte que nous avons, c'est de retrouver la même logique qui a présidé à la réforme de l'archéologie préventive : c'est de segmenter des chaînes historiques, et que s'impose la seule logique des aménageurs.

Les amendements 518 et 1166, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Patrick Bloche - L'amendement 519 ne devrait pas poser de problème, compte tenu des garanties que nous ont données le ministre et le rapporteur, ainsi que le président de la commission des lois : il s'agit, au-delà de la nouvelle organisation qui nous est proposée, de maintenir l'idée que l'inventaire est un service public national, ce qui offre toutes les garanties scientifiques que nous revendiquons et qui sont indispensables pour éviter toute fracture dans la collecte des données de l'inventaire.

L'amendement 519, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Patrick Bloche - L'amendement 520 ne peut qu'être adopté : le ministre et le rapporteur nous ont assurés que l'Etat continuera à définir les normes et le contrôle scientifique et technique. Nous proposons simplement de l'inscrire dans la loi.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Cet amendement est déjà satisfait : le projet prévoit que les opérations d'inventaire du patrimoine culturel sont soumises au contrôle scientifique et technique de l'Etat. On ne peut être plus clair.

M. le Ministre délégué - En effet c'est le III de l'article 72 : l'amendement est donc inutile.

M. Michel Piron - S'agissant d'un article à connotation culturelle, je m'étonne que ce simple exercice de lecture n'ait pu être fait...

M. Patrick Bloche - Je maintiens l'amendement, car la réponse qu'on nous fait est incomplète...(M. le président de la commission des lois s'exclame).

Mme la Présidente - M. Bloche a la parole.

M. Patrick Bloche - Si vous voulez que je prenne ma revanche pour les cent vingt heures que j'ai passées dans l'hémicycle comme rapporteur du Pacs... Je ne peux accepter que le président de la commission des lois puisse m'interrompre alors que j'ai toujours maîtrisé mon temps de parole.

La réponse qu'on m'a faite, dis-je, est incomplète. Je souhaite que l'Etat continue à définir les normes nationales. Or ce n'est pas écrit.

L'amendement 520, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Présidente - Sur l'article 72, le groupe communiste et républicain demande un scrutin public.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1167 tend à supprimer le II de l'article 72. Son but est de préserver la nécessaire continuité territoriale nationale en matière d'inventaire, afin de maintenir la capacité d'approche globale de celui-ci et de conserver un niveau d'expertise suffisant.

L'amendement 1167, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Patrick Bloche - L'amendement 521 renvoie aux rapports Delevoye et Mauroy, ainsi qu'à la loi sur la démocratie de proximité : autant de références qui traduisent une capacité de réfléchir à une décentralisation voulue, mesurée, consciente et qui ne démembre pas l'Etat. Sous couvert de « décentralisation », cet article se borne à un transfert de personnel sans transfert de compétence. Il crée en outre pour les collectivités des obligations nouvelles, qui ne s'imposent pas aujourd'hui à l'Etat. Ce transfert de personnel s'accompagnera-t-il d'un transfert équivalent de moyens ? Ce n'est pas sûr : une part significative des agents, notamment ceux embauchés par les associations, ne correspond pas à des emplois budgétaires. En outre la pyramide des âges fait que 50 % des personnels concernés partiront en retraite dans les cinq ans, ce qui pèsera sur les caisses du BCRD : il n'existe pas de corps ni de fonction correspondants en collectivité. Il semble donc souhaitable de procéder à une expérimentation avant tout transfert définitif des personnels.

L'amendement 521, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Piron - L'amendement 154 corrigé est défendu.

L'amendement 154, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Patrick Bloche - Les moyens alloués aux collectivités par la région, après le transfert des opérations d'inventaire, doivent être précisés dans la convention conclue entre les deux parties, ce qui nécessite une concertation préalable entre les parties. Tel est l'objet de l'amendement 522.

M. le Rapporteur - Par définition, une convention entre la région et la collectivité candidate s'impose, aussi votre amendement est-il superfétatoire. Défavorable.

L'amendement 522, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - Notre amendement 1169 tend à préserver la continuité territoriale au niveau national en matière d'inventaire, tout en autorisant la collaboration entre l'Etat et les collectivités locales qui souhaitent y participer.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Cet amendement est satisfait car rien n'interdit la collaboration entre l'Etat et les collectivités locales.

L'amendement 1169, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

A la majorité de 35 voix contre 12, sur 47 votants et 47 suffrages exprimés, l'article 72 est adopté.

APRÈS L'ART. 72

M. le Ministre délégué - Par l'amendement 1271, le Gouvernement entend permettre aux personnels bénéficiant, à la date de promulgation de cette loi, d'un contrat de travail avec une association ayant pour objet l'inventaire du patrimoine culturel, d'être recrutés par les collectivités locales.

Il s'agit en réalité d'un amendement de la commission, victime de l'article 40, et repris par le Gouvernement.

M. le Rapporteur - Je remercie le Gouvernement tout en proposant d'écrire : « les départements, les communes, et leurs établissements publics ».

M. le Ministre délégué - Favorable.

L'amendement 1271 rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 73

M. Patrick Bloche - Cet article a pour objet de permettre aux collectivités territoriales d'acquérir des monuments historiques. L'Etat se déleste de son patrimoine, sans la moindre compensation budgétaire ! Faute de préciser ce qui a vocation à rester propriété de l'Etat, vous mettez de surcroît en péril l'exploitation historique et scientifique de ces lieux de mémoire.

Il est encore heureux que ce transfert ait lieu à titre gratuit car les collectivités devraient en assurer l'entretien, voire la restauration ! En effet, rien ne garantit que seuls les monuments en bon état de conservation seront concernés par cette disposition. Quel coût, alors, pour les collectivités ! Et le subventionnement prévu par ce même article n'est en rien une garantie, puisque vous n'en précisez pas la hauteur. Par ailleurs, qu'adviendra-t-il des personnels transférés ?

Au-delà de nos clivages, prenez conscience de cette bombe à retardement dans le budget de vos collectivités !

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis de la commission des finances - Tout d'abord, sur 40 000 monuments protégés, seuls 1 % sont la propriété de l'Etat. Pourquoi n'en avez-vous pas nationalisé davantage si l'Etat représente une telle garantie ?

Ensuite, vous avez mal lu l'article : la collectivité ne devient propriétaire que si elle le souhaite. Enfin, le droit commun du subventionnement par l'Etat des monuments historiques qui ne sont pas sa propriété n'est pas modifié.

M. Edouard Landrain - La commission René Rémond a bien montré que cette acquisition était basée sur le volontariat.

Par ailleurs, le mauvais état de certains monuments est souvent à imputer à la carence de l'Etat !

M. Michel Piron - Vous vous plaignez que l'Etat transfère des ruines, et vous réclamez toujours plus d'Etat ! Les élus locaux sont responsables et nous devons leur faire confiance.

M. Patrick Bloche - J'ai bien dit que le transfert serait possible si les collectivités territoriales en faisaient la demande ; je n'ai donc trompé personne.

Emmenés par le président de la commission des affaires culturelles, certains d'entre nous ont été amenés à visiter un fort lyonnais en état de grand délabrement. Aujourd'hui, si ce fort, propriété du ministère de la défense est restauré, sa restauration sera assumée par l'Etat, par la région Rhône-alpes, par le département du Rhône, par la ville de Lyon et, pourquoi pas, par des mécènes privés. Mais demain, dans un cas semblable, que se passera-t-il ? Les associations qui militent en faveur de la restauration du bâtiment interpelleront les élus locaux pour qu'ils demandent son transfert, les élus ne pourront refuser (Protestations sur les bancs du groupe UMP) et les collectivités territoriales devront de ce fait assumer des charges considérables. Voilà pourquoi nous demandons, par l'amendement 523, la suppression de l'article.

M. le Rapporteur - Avis triplement défavorable : parce que M. Bloche n'a pas lu l'article (M. Patrick Bloche proteste) ; parce que le subventionnement des travaux réglera la question du coût ; parce qu'une collectivité volontaire pour un transfert ne va pas réduire ses effectifs. J'ajoute que les articles 88 et 89, que M. Bloche n'a manifestement pas lus non plus, (M. Patrick Bloche proteste) apportent des garanties précises en matière de compensation.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1168 est défendu.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable aux deux amendements.

Les amendements 523 et 1168, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Patrick Bloche - Je déplore les procès d'intention que me fait le rapporteur, tout en répondant à côté. Le fait est que, dans sa grande générosité, l'Etat transfère aux collectivités les ruines qu'il n'a pas su entretenir (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. le Rapporteur - J'ai répondu précisément à une question précise.

M. Patrick Bloche - Non. Aussi, par l'amendement 524, nous proposons qu'au moins on limite les frais, si je puis dire, en vérifiant la capacité financière des collectivités volontaires à un tel transfert. Car si elles n'ont pas les moyens de régler seules les salaires des agents contractuels affectés à ces monuments, on risque en plus de transférer des bâtiments qui resteront fermés.

L'amendement 524, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 1607 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 1607 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Patrick Bloche - Il est indispensable d'inscrire dans la loi que certains monuments ne sont pas transférables et de définir desquels il s'agit afin de protéger des ensembles inestimables et indivisibles comme les cathédrales, leurs cloîtres et leurs palais épiscopaux attenants.

Certes, la commission René Rémond a rendu ses conclusions, mais elles ne sauraient engager le Parlement et le Gouvernement. Je me félicite donc que, dans une atmosphère plus apaisée que celle qui règne dans cet hémicycle, la commission des affaires culturelles, saisie pour avis, ait accepté l'amendement 501 identique à l'amendement 525.

M. le Rapporteur - Je comprends l'intention des auteurs de ces amendements, et je sais que la majorité de la commission les a adoptés mais, à titre personnel, je suis très sceptique sur leur valeur juridique, tant les notions évoquées sont floues. Qu'en sera-t-il, par exemple, des palais épiscopaux qui ne sont pas attenants aux cathédrales ?

M. le président de la commission - La commission des affaires culturelles a manifestement cherché à faire plaisir, mais ce n'est pas une bonne idée. La proposition, loin de favoriser le développement culturel va le brider. Je suis résolument opposé à l'amendement.

M. le Ministre délégué - Maintenant que la commission Rémond a rendu ses conclusions, un très difficile travail d'élaboration d'une liste est en cours. La définition des critères pertinents est complexe, et le Gouvernement ne souhaite pas que l'on définisse dès maintenant des contraintes. Avis défavorable aux deux amendements.

M. Patrick Bloche - Je me limitais à reprendre les conclusions de la commission Rémond dans la loi. C'est donc avec un grand désarroi que je me heurte à ces refus répétés d'une proposition qui apporte pourtant des garanties indispensables.

Les amendements 501 et 525, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 388 est de précision.

L'amendement 388, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 73, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 73 BIS

M. le Président de la commission - L'amendement 389 supprime cet article introduit à l'initiative du sénateur Fauchon ad museum, puisqu'il vise le Louvre. Il est demandé à cet établissement de mener une politique territoriale active, ce qui est déjà prévu par la loi relatives aux Musées. En reprendre les termes pour un seul établissement relève du bavardage. Le Louvre a passé un contrat d'objectifs et de moyens 2003-2005 dans le cadre de la décentralisation culturelle. Il a un projet d'antenne en région et les collectivités peuvent faire acte de candidature sur la base d'un cahier des charges remis en septembre 2003. Enfin, sur 4 600 peintures déposées dans les régions, 1 300 sont transférables.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Sans doute la loi est-elle parfois un peu bavarde. Dans l'amendement 502, nous reprenons ces dispositions pour l'ensemble des musées nationaux. En faisant plaisir aux sénateurs, nous encouragerons le prêt.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement n'est pas favorable à l'article rédigé par le Sénat. Il est donc favorable à l'amendement de suppression. Mais l'amendement 502 convient et le Gouvernement y est également favorable. Peut-être faudrait-il retirer l'amendement 389 pour pouvoir le voter.

M. le Président de la commission - La commission des lois ne peut être d'accord pour répéter la loi sur les Musées. Elle reste en faveur d'une suppression pure et simple.

L'amendement 389 mis aux voix, est adopté. L'article 73 bis est ainsi supprimé.

La suite de la discussion est renvoyée à une prochain séance.

Prochaine séance ce matin, jeudi 4 mars, à 9 heures 30.

La séance est levée à 1 heure 5.

                Le Directeur du service
                des comptes rendus analytiques,

                François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 4 MARS 2004

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Discussion de la proposition de loi (n° 1191) de M. Daniel PAUL et plusieurs de ses collègues contre la précarité de l'emploi.

M. Daniel PAUL, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Rapport n° 1460.)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

1. Communication du Médiateur de la République.

2. Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 1218), relatif aux responsabilités locales.

M. Marc-Philippe DAUBRESSE, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 1435).

M. Dominique TIAN, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Avis n° 1434).

M. Serge POIGNANT, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Avis n° 1423)

M. Laurent HÉNART, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Avis n° 1432).

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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