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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2003-2004 - 71ème jour de séance, 181ème séance

3ème SÉANCE DU JEUDI 4 MARS 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC

vice-président

Sommaire

RESPONSABILITÉS LOCALES (suite) 2

ART. 88 BIS 2

APRÈS L'ART. 88 BIS 2

ART. 88 TER 3

APRÈS L'ART. 88 TER 3

ART. 89 3

APRÈS L'ART. 89 10

AVANT L'ART. 90 14

ART. 90 16

APRÈS L'ART. 90 17

ART. 92 17

ART. 93 18

ART. 95 18

APRÈS L'ART. 95 18

APRÈS L'ART. 96 18

AVANT L'ART. 98 18

APRÈS L'ART. 98 19

ART. 98 QUATER 19

AVANT L'ART. 99A 19

ART. 99A 20

ART. 99 20

ART. 100 20

ART. 100 BIS 20

APRÈS L'ART. 100 BIS 24

APRÈS L'ART. 100 TER 24

ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 5 MARS 2004 28

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

RESPONSABILITÉS LOCALES (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux responsabilités locales.

ART. 88 BIS

M. Augustin Bonrepaux - La compensation des transferts doit être intégrale. Nous devons être attentifs à ce que les compensations soient calculées au mieux et vérifier que leur évolution suivra celle des charges transférées. Il est question d'attribuer aux collectivités une part des sommes tirées des conventions d'assurance et de la taxe sur les véhicules de société. Mais ces véhicules sont concentrés là où justement il y a des sociétés ! Les charges, elles, ne suivent pas la même répartition. Il faudra donc établir une carte des compensations et s'assurer que des collectivités ne verront pas leurs charges augmenter et leurs ressources diminuer.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République - L'amendement 410 est défendu.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du plan - L'amendement 225 rectifié est identique.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales - Avis favorable.

Les amendements 410 et 225 rectifié sont adoptés.

L'article 88 bis ainsi modifié, est adopté.

APRÈS L'ART. 88 BIS

M. Alain Gest - L'amendement 1516 précise que toute modification des recettes d'origine fiscale ayant pour conséquence de modifier la structure des recettes des collectivités locales ou de diminuer leur autonomie fiscale doit, après concertation avec les collectivités, être accompagnée de mesures pour garantir cette autonomie fiscale. Après la décision de réformer la taxe professionnelle, il devient important de garantir les ressources des collectivités locales. Cependant, compte tenu des informations données par le rapporteur plus tôt et des engagements pris par le ministre, je retire cet amendement.

M. Augustin Bonrepaux - Je le reprends !

M. le Rapporteur - Cet amendement est satisfait par celui que nous avons adopté tout à l'heure. C'est pour cela que M. Gest l'a retiré !

M. le Ministre délégué - Non seulement il est satisfait, mais le débat indispensable est programmé pour le 13 avril.

M. Augustin Bonrepaux - Cet amendement traduit bien l'inquiétude qui se manifeste sur tous les bancs, et le souci que la compensation des charges soit intégrale. Je n'ai qu'une remarque à faire : en cas de diminution des recettes fiscales, ce n'est pas la peine de prévoir une concertation avec les collectivités ! Croyez-vous qu'elles aient une solution miracle ? Pour le reste, cet amendement est parfaitement justifié. Nous n'avons pas aujourd'hui les garanties suffisantes. L'expérience de la décentralisation du RMI ne peut que nous engager à être prudents !

M. Alain Gest - L'amendement n'est plus justifié du tout !

M. René Dosière - Je vois, dans cet amendement, l'attachement nouveau de la droite à l'autonomie fiscale des collectivités locales. Après tout, les conversions, si tardives qu'elles soient, sont toujours les bienvenues : celle-ci date d'environ cinq ans.

M. le Ministre délégué - Deux ans ! Auparavant, vous vous êtes attachés à raboter les ressources fiscales locales !

M. René Dosière - Dès 1981, dans la troisième ou quatrième version de mon ouvrage sur les finances communales, je soulignais que l'Etat commençait à remplacer la fiscalité locale par des dotations, ce qui conduirait à une perte d'autonomie des collectivités. Cela n'a fait que s'amplifier, et j'ai toujours souligné combien ce processus était dangereux. Mais la plupart des élus étaient très heureux, lorsque le gouvernement de Michel Rocard diminuait la taxe d'habitation de certaines personnes et permettait aux communes d'augmenter leurs impôts ! Ce n'est qu'après, lorsque le gouvernement Jospin a mis fin à certains impôts un peu lourds, que vous avez découvert l'autonomie fiscale des collectivités locales !

Je suppose que lorsque M. Gest parle de « toute modification des recettes d'origine fiscale », il fait allusion à la décision du Président de la République de supprimer la taxe professionnelle ! Les intercommunalités sont très inquiètes de cette décision - prise d'ailleurs sans guère de concertation - car il s'agit d'une de leurs ressources principales. Voilà qui méritait quelques explications. Retirer l'amendement après avoir parlé, c'était nous empêcher de nous exprimer à notre tour !

M. Jean Launay - L'exposé des motifs de cet amendement est très révélateur : il commence par « Suite à la décision prise par l'Etat de réformer la taxe professionnelle ». L'Etat se résume-t-il à son sommet ? Nous pouvons nous inquiéter de la façon dont ces décisions seront compensées. Toutes les collectivités sont inquiètes, aujourd'hui, de savoir comment leur budget sera alimenté. Quelle invention va remplacer la taxe professionnelle, qui va être supprimée par celui qui l'a lancée ?

L'amendement 1516, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 88 TER

M. le Rapporteur - L'amendement de suppression 411 est de coordination.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - L'amendement 226 est identique.

Les amendements 411 et 226, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés et l'article 88 ter est supprimé.

APRÈS L'ART. 88 TER

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 1112 corrigé est défendu.

L'amendement 1112 corrigé, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint - Tous les élus locaux, quelle que soit leur sensibilité, savent pertinemment que les dépenses d'équipement des collectivités locales connaissent, depuis dix ans, une évolution particulièrement négative. Il y a par exemple une décennie que la TVA grevant les investissements n'est plus intégralement remboursée, tandis que la dotation globale d'équipement a été retirée aux communes de plus de 20 000 habitants. L'amendement 1113 corrigé rétablit une compensation intégrale de la TVA. Une telle mesure donnerait un nouvel élan à l'investissement immobilier public, et donc à la croissance et à l'emploi.

L'amendement 113 corrigé, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - L'amendement 1115 tombe.

ART. 89

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - Dans l'article 89, le texte revient sur ce qui a été évoqué à l'article 19 : la confirmation des engagements financiers conclus au titre des contrats de plan Etat-région. S'agissant du cas particulier des engagements de mise à deux fois deux voies de certaines routes dont la réalisation sera inachevée lors de l'entrée en vigueur de la loi, le Gouvernement a bien voulu, et je l'en remercie, que nous pointions avec les DDE l'avancement des travaux. Il ressort de ce bilan que treize routes nationales sont concernées, pour 691 kilomètres, dans quinze départements, le cas de l'Ile-de-France étant particulier...

M. René Dosière - Je suppose que la RN2 figure dans ce nombre...

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - Non, parce qu'elle n'est pas incluse dans la voirie à transférer. Nous fondant ensuite sur les montants consignés dans les documents préparatoires des contrats de plan, nous avons repris les chiffres correspondant à la tranche 2007-2020 et nous avons considéré le FCTVA et l'effet du décroisement qui fait que pour les routes restant nationales, le département n'aura plus à participer financièrement.

M. Jean-Pierre Balligand - C'est la moindre des choses.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - Pour chaque département, il restera à engager des investissements jusqu'en 2020. Il apparaît que sept départements seront « gagnants » et huit - dont l'Aisne - seront « perdants ». Pour ces derniers, le Gouvernement s'est engagé à ouvrir des discussions tendant à moduler le transfert de voirie et à trouver les moyens, au cas par cas, d'une compensation. Cette approche nous paraît meilleure que de prévoir un dispositif spécifique pour huit cas particuliers.

Je vous propose donc de prendre acte de la situation existante et de recueillir l'engagement pris par l'Etat de compenser la perte subie par les collectivités locales.

M. Augustin Bonrepaux - Et qu'adviendra-t-il de la RN20 ? Je n'ai eu aucune réponse du ministre à ce sujet. Or, l'Etat entend, en la transférant, se décharger d'une voie qui traverse deux départements, l'Ariège et les Pyrénées-Orientales. Outre que c'est imposer à l'Ariège des charges très lourdes, les engins de déneigement du département des Pyrénées-Orientales devront transiter par le tunnel de Puymorens, et traverser l'Ariège...

Ce désengagement est-il vraiment ce qu'il y a de mieux à faire, alors que la culture française ne cesse de reculer en Andorre, et que cette voie est la seule qui permet de rejoindre la principauté depuis la France ? L'amendement que j'avais déposé à ce sujet aurait satisfait M. Bouvard, lui aussi montagnard et lui aussi au fait des spécificités des départements frontaliers. Mais, en ce qui concerne ce point précis, le problème concerne aussi le ministère des affaires étrangères (Mouvements divers) et même le Président de la République, en sa qualité de co-prince d'Andorre (Rires sur plusieurs bancs).

M. Frédéric Dutoit - Il s'agit, sur cet article, de fixer les règles du jeu en matière de compensation des charges induites par les transferts aux collectivités territoriales, pour les investissements à venir, qu'il s'agisse des infrastructures portuaires, du personnel - et notamment les TOS - ou des routes nationales. A ce sujet, je viens d'apprendre avec joie que vos amis des Hautes-Alpes et des Alpes-Maritimes bénéficieront de compensations différentes de celles des autres départements...

Se pose évidemment la question des modalités de calcul des compensations financières des charges transférées, et nos griefs demeurent. Il suffit d'analyser le paragraphe I de l'article pour avoir un aperçu des déséquilibres potentiels des finances locales. Ainsi, s'agissant des routes nationales, et plus précisément des crédits d'investissement, il est précisé que le transfert de charges s'accompagne du transfert concomitant de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées. La cohérence formelle de l'énoncé ne peut être mise en doute, mais il ne peut rassurer les élus.

Il convient en effet d'asseoir le calcul des compensations sur les dépenses réellement exécutées sur plusieurs exercices et plus précisément, sur des exercices qui n'ont pas été caractérisées par une austérité budgétaire concomitante à la baisse de l'impôt sur le revenu des plus riches.

Or, que dit le texte ? Que le calcul se fera « hors taxes et hors fonds de concours » et que les conditions d'application seront arrêtées par décret pris en Conseil d'Etat. Vous créez ainsi les conditions pour que le montant des compensations diminue année après année (Protestations sur les bancs du groupe UMP), ce qui conduira les collectivités territoriales à rechercher de nouvelles ressources. La pression fiscale locale augmentera encore et encore ; on s'apercevra alors que les mêmes causes produisent les mêmes effets, mais l'on ne pourra pas dire que l'on ne savait pas. Avec une honnêteté intellectuelle qui l'honore, le rapporteur pour avis Laurent Hénart observe d'ailleurs que : « Le simple octroi aux collectivités territoriales des moyens consacrés par l'Etat à ces compétences à la veille du transfert n'est pas satisfaisant si un bilan de l'existant n'est pas réalisé », et aussi que « rien n'assure que les dépenses consenties avant le transfert aient été situés à une hauteur satisfaisante ». Comment mieux dire ?

Avec une décentralisation de cette sorte, c'est un grand classique du répertoire des relations tumultueuses entre l'Etat et les collectivités territoriales que nous nous apprêtons à rejouer. Il n'est pas sûr que les spectateurs de ce divertissement sinistre - pour ne pas dire cynique - seront pris d'une envie folle d'applaudir cette chronique d'un désastre annoncé tant par le rapporteur pour avis que par M. Bouvard.

M. Jean-Pierre Balligand - Rappel au Règlement. Etant donné le risque extrême de dégradation des relations entre la France et la principauté d'Andorre, souligné par notre collègue Augustin Bonrepaux, je demande la présence de M. de Villepin (Sourires sur divers bancs).

M. le Président - Le propos aura certainement reçu l'attention qu'il mérite...

M. Michel Bouvard - S'agissant des transferts de voirie, il reste encore quelques points à éclaircir, Monsieur le ministre délégué ! Certes, il y a quelques jours, vous avez bien voulu annoncer qu'étaient pris en compte les programmes de protection du réseau d'altitude figurant à la convention interrégionale du massif alpin au titre des régions PACA et Rhône-Alpes, pour un montant de 91,5 millions d'euros. Mais le Gouvernement a repoussé l'amendement qui autorisait les collectivités à se prononcer sur les normes applicables à certaines catégories de voies. Or le département de la Savoie a le privilège de regrouper 17 % du linéaire français de tunnels et j'ai eu la curiosité de demander à la DDE combien il nous en coûterait de rendre ces ouvrages conformes aux normes les plus récentes - mise en conformité qui interviendra forcément après le transfert et qui entraînera donc des dépenses pour notre collectivité. Pour le tunnel du Siaix, ces travaux se monteront à 21 millions d'euros ; pour le tunnel du Chat, ils coûteront de 10 à 50 millions ; pour celui de Ponserond, un million ; pour celui des Echelles, 5 millions ; pour celui de la Balme, deux millions ! Soit au total quelque 75 millions d'euros... Qui va payer ?

D'autre part, certains secteurs de montagne sont répertoriés comme exposés à des mouvements géologiques et le montant des investissements destinés à prévenir ceux-ci et à sécuriser les routes nationales a été évalué par les services de l'équipement à 88 millions d'euros environ, rien que pour la Savoie. Il en coûtera, par exemple, 23 millions pour le secteur de la Tarentaise, 8 pour la Maurienne, 55 pour les gorges de l'Arly, un pour les gorges de Chaille et un pour les gorges de la Balme.

Nous ne pouvons admettre le transfert qu'à la condition de savoir précisément ce qu'il en sera sur ces deux points ! Il serait en effet anormal que les départements doivent seuls faire face à ces deux dépenses - en particulier le nôtre où le revenu par habitant est très nettement inférieur à celui de l'Ile-de-France.

M. René Dosière - Le rapporteur pour avis vient de nous livrer des informations du plus haut intérêt et notre seul regret est de n'en avoir pas disposé plus tôt, car elles nous permettent de mieux mesurer l'ampleur des problèmes soulevés par ces transferts de routes. Je souhaiterais donc que le Gouvernement nous apporte des réponses précises. Nous aimerions en particulier connaître le cadre et les objectifs de la concertation prévue : quels « arrangements » raisonnables pouvons-nous attendre ? Par exemple, allez-vous continuer de demander une participation aux collectivités, au titre des routes nationales qui ne leur seront pas transférées ?

M. le Ministre délégué - J'ai déjà répondu.

M. René Dosière - Si tel est le cas, fort bien. Mais il est d'autres questions qui attendent une réponse.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Je voudrais précisément en soulever une, relative au paragraphe VII, c'est-à-dire au transfert aux régions des écoles de formation aux professions paramédicales. Dans mon département, à la différence d'autres où ces formations relèvent d'associations ou de la Croix-Rouge, les infirmières et les aides-soignantes sont formées dans des écoles dépendant des hôpitaux. Or les responsables de ces écoles ignorent quelles sommes exactes leur sont consacrées dans le cadre de la dotation globale ! Pouvez-vous éclairer les conseils régionaux sur les conditions du transfert ?

M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République - Je veux reposer, au bénéfice de M. Dosière aussi, une question que j'ai déjà posée il y a quelques jours, Monsieur le ministre délégué.

Une observation, pour commencer. Les concours des départements aux travaux réalisés par l'Etat vont disparaître, ce qui autorisera l'Etat à ne plus contribuer à la mise à deux fois deux voies : d'où un jeu à somme nulle, mais entaché d'une certaine hypocrisie - on ne donne plus, on ne reçoit plus, mais il faut payer pour avoir !

J'en viens maintenant à ma question, ou plutôt à un plaidoyer pro domo. Il existe des routes départementales qui sont en fait des voies de transit internationales et que les départements concernés n'auront pas les moyens d'aménager comme il convient. Ces fausses départementales, vraies transeuropéennes, ne pourraient-elles être incluses dans les contrats de plan ? J'aimerais obtenir une réponse favorable, je ne vous le cache pas, car je connais un cas en particulier - mais je sais qu'il y en a beaucoup d'autres.

M. le Ministre délégué - Madame Guinchard-Kunstler, c'est à la commission d'évaluation qu'il reviendra par définition d'évaluer le coût du transfert des formations paramédicales, et je ne doute pas qu'elle parvienne à mettre au point une méthode pour ce faire. La situation ne peut être à ce point opaque qu'elle échoue !

Monsieur Bouvard, il sera évidemment tenu compte des routes de montagne. Les montants transférés seront, dans ce cas, de 20 % supérieurs, en moyenne, à la moyenne nationale, qui sera de 10 000 € par kilomètre...

M. Michel Bouvard - Oh, non ! C'est indécent !

M. le Ministre délégué - Le débat me contraint de vous répondre, ce qui me met évidemment en difficulté. Quand j'étais enfant, j'ai appris que, dans une négociation, le premier qui avançait un chiffre avait perdu...

En revanche, le Gouvernement regardera avec bienveillance votre amendement sur les aménagements concernant les risques naturels. Ainsi vous n'aurez pas tout perdu.

M. Villepin, qui connaît l'importance d'Andorre, serait sûrement présent s'il n'était retenu (Sourires). Mais M. Balligand a oublié de mentionner l'évêque d'Urgel, qui est co-prince d'Andorre avec le Président de la République. La nationale 20, Monsieur Bonrepaux, devrait nous réunir, puisqu'elle passe à Antony pour aboutir chez vous. Que vous défendiez l'Ariège, je le comprends ; quant à Andorre, on dit que s'y exerce de la contrebande...

Plaisanterie à part, M. Hénart a très bien exposé le dispositif. Le fonctionnement, en matière de routes transférées, est couvert par l'article 88. L'investissement courant est financé dans cet article, au III. Ce qui fait débat, c'est l'investissement de renouvellement, avec notamment la question, soulevée par M. Hénart, des mises à deux fois deux voies et de leur cohérence. La solution que propose le Gouvernement, c'est-à-dire le décroisement, offre de nombreux avantages. D'abord elle clarifie les financements ; M. Dosière pose à ce sujet une question à laquelle j'ai déjà répondu. Sur la demande du président Clément, le Gouvernement a pris l'engagement qu'il ne serait plus fait appel aux départements pour le financement des routes qu'il conserve. L'effet du décroisement n'est donc pas négligeable. C'est une clarification ; cela évite les effets d'aubaine ; et cela couvre les besoins annuels de voirie, car cela dégage pour les cent départements un excédent annuel de 50 millions d'euros. Reste que cela ne se passe pas partout de la même façon : pour certains c'est neutre, pour d'autres c'est positif, pour d'autres encore, négatif.

M. René Dosière - Comme l'Aisne.

M. le Ministre délégué - Par la technique du décroisement, le Gouvernement prend l'engagement, dans le cadre d'une concertation, qu'il n'y aura pas de pénalisation des départements qui font problème, et qu'à chaque fois on trouvera un équilibre.

M. Michel Bouvard - Je constate que le Gouvernement ne répond pas sur le problème de l'impact des normes. Je constate qu'il ne répond pas sur les risques naturels potentiels. Et quand vous dites, Monsieur le ministre, qu'en montagne le surcoût est de 20 % en moyenne, je rappelle qu'il est évalué à 67 % par les propres services du ministère de l'équipement ! C'est bien naturel, quand on sait que la Savoie a 340 000 mètres carrés de murs de soutènement contre 400 pour la Loire-Atlantique. Si ce soir la moitié des députés de Savoie et de Haute-Savoie est présente, c'est bien que nous sommes conscients de ces enjeux ; et je ne peux me satisfaire des réponses qui nous sont apportées.

M. Augustin Bonrepaux - Je demande à M. le ministre une réponse plus précise sur Andorre. Le gouvernement français est responsable de l'accès à un pays voisin. Peut-il abandonner la route qui le dessert ?

M. le Ministre délégué - J'aurais dû vous le préciser : il y a effectivement là un problème particulier, et il y aura une concertation pour trouver une solution. A M. Bouvard, je rappelle que nous sommes dans une loi de décentralisation, dont le propre est de transférer ce que dépense l'Etat ; et c'est ce qui est fait. L'inventaire des besoins est certainement supérieur ; mais ici il s'agit de compenser un transfert à hauteur de la dépense effective de l'Etat, c'est-à-dire 20 % en moyenne en montagne - avec d'importantes variations en fonction de l'altitude.

M. Michel Bouvard - Et les normes ?

M. le Président de la commission des lois - Et les routes départementales dans les contrats de plan ?

M. le Président - Le débat a eu lieu très largement. Abordons les amendements.

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 1116 est défendu.

L'amendement 1116, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 413 rectifié est de coordination.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - L'amendement 227 a le même objet ; sa rédaction est un peu différente.

L'amendement 413 rectifié, accepté par le Gouvernement , mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'amendement 227 tombe.

Mme Muguette Jacquaint - Les amendements 1117 et 1118 sont défendus.

Les amendements 1117 et 1118, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Michel Piron - L'amendement 1571 est retiré.

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 1119 est défendu.

L'amendement 1119, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement est favorable aux amendements identiques 228 et 930 corrigé.

M. Michel Bouvard - A propos du 930 corrigé, et en remerciant le Gouvernement de prendre en compte ce problème, je veux revenir solennellement sur la question des normes. Je n'entends pas renoncer sur ce point. Il est trop facile d'édicter des normes avant de se retirer et de transférer le patrimoine aux départements, à qui on laisse la facture (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste et républicain). Cette facture est de 55 millions d'euros pour mon département, c'est-à-dire six points de fiscalité ! Je ne peux accepter qu'on continue à édicter des normes sans en supporter les conséquences financières.

M. Jean Lassalle - Très bien !

M. le Président - J'indique déjà que le groupe socialiste demande un scrutin public sur l'amendement 847. Je reviens aux amendements 930 corrigé et 228.

M. le Rapporteur - La commission des lois en a longuement discuté. Elle avait préféré la concision à une rédaction qui semble redondante avec ce que le projet dit déjà des aménagements de sécurité. Mais après le débat qui vient de se tenir, l'avis favorable du Gouvernement et compte tenu de la nécessité de prendre en compte les risques naturels, on peut y voir une précision, à laquelle je ne m'opposerai pas.

M. le Ministre délégué - Je rappelle, en réponse à la véhémente protestation de M. Bouvard, qu'à l'article 12 le Sénat a introduit un dispositif qui devrait le satisfaire : « Les collectivités territoriales définissent conjointement avec l'Etat les programmes de recherche et de développement des savoir-faire techniques dans le domaine routier. Elles sont associées à la définition des normes et définitions techniques correspondantes, adaptées à la spécificité de chacun des réseaux. » Vous le voyez, on ne va pas vous imposer des normes. D'autre part, je le répète, le Gouvernement est favorable aux amendements, et il lève le gage.

M. Jean-Pierre Balligand - Je ne suis pas un élu de la montagne. Mais, à MM. Bouvard et Bonrepaux qui avaient défendu des amendements relatifs aux charges liées à la mise aux normes des routes de montagne à l'article 12, il avait été indiqué que la question serait traitée au présent article. Respectons l'engagement !

M. Michel Piron - Argument spécieux !

M. Jean-Pierre Balligand - Les arguments défendus par nos collègues avaient porté. Il ne faut pas que le transfert ait des conséquences catastrophiques pour les zones de montagne et ce n'est pas la notion d'édiction conjointe des normes qui va résoudre quoi que ce soit !

M. Xavier de Roux - Absolument !

M. le Ministre délégué - Vous n'avez cessé de dire l'inverse !

M. Jean-Pierre Balligand - Pas du tout, et ce serait un marché de dupes que de définir ensemble des règles qui n'emporteront des conséquences financières considérables que pour l'une des parties ! L'Etat n'a pas le droit d'exercer sur les collectivités une sorte de tutelle normative !

M. Augustin Bonrepaux - Le problème que soulève M. Bouvard est d'une grande actualité. Il serait abusif de transférer les routes tout en conservant la faculté d'imposer des normes auxquelles les collectivités ne pourraient satisfaire qu'au prix d'énormes investissements. Je propose par conséquent un sous-amendement disposant que les charges nouvelles liées à de nouvelles normes édictées par l'Etat sont également prises en compte.

M. le Président - Monsieur Bonrepaux, il convient de nous faire parvenir un sous-amendement écrit et lisible !

M. le Ministre délégué - On ne fait pas la loi comme ça !

M. Augustin Bonrepaux - Mon sous-amendement - auquel a été attribué le numéro 1617 - est parfaitement compréhensible. Il tend à ajouter : « ainsi que les charges nouvelles liées à de nouvelles normes décidées par l'Etat ».

M. le Ministre délégué - N'importe quoi !

M. le Rapporteur - Je rappelle que nous avons eu en commission des débats longs et passionnés et que chacun était libre de déposer des amendements... Quoi qu'il en soit, je suis défavorable à ce sous-amendement.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement est tout à fait défavorable à ce sous-amendement et à cette manière de travailler ! (Murmures)

M. Jean-Pierre Brard - Le Gouvernement n'a pas à se prononcer sur les modalités du travail parlementaire.

Le sous-amendement 1617, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Piron - Je rappelle à toutes fins utiles que les articles 12 et 89 traitent de deux sujets tout à fait distincts. Il s'agit, dans l'article 12, d'associer les collectivités à la définition des normes techniques, cependant que l'article 89 traite des incidences financières du transfert d'une partie du réseau et de sa mise aux normes.

Les amendements 228 et 930 corrigé, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - A l'unanimité.

M. René Dosière - Par l'amendement 847, nous proposons qu'une convention entre l'Etat et le département définisse les modalités du transfert financier et les moyens en personnels qui l'accompagnent. Cette proposition est tout à fait conforme à l'esprit de la décentralisation en ce qu'elle permet d'introduire une grande souplesse dans la définition des moyens à accorder aux collectivités selon leur spécificité et une logique de concertation entre l'Etat et les élus locaux.

M. le Rapporteur - Pourquoi demander un scrutin public sur une proposition aussi peu justifiée, dans la mesure où le troisième alinéa de l'article satisfait toutes vos attentes ! J'ai en outre fait adopter un amendement prévoyant que le comité des finances locales se prononce sur tous les transferts de personnel. Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis.

A la majorité de 48 voix contre 20 sur 70 votants et 68 suffrages exprimés, l'amendement 847 n'est pas adopté.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - L'amendement 229 rectifié est défendu.

M. le Ministre délégué - Défavorable.

M. le Rapporteur - La commission est favorable à cet amendement car il tend à réparer une injustice. Dans l'état présent de notre droit, les frais de reproduction et de reprographie à usage pédagogique sont assumés par l'Etat dans les collèges et lycées alors qu'ils restent à la charge des communes pour les écoles du premier degré. Il est apparu qu'il était possible d'y remédier via les dotations de solidarité - DSU et DSR.

M. Guy Geoffroy - Je soutiens sans réserve cet amendement car, passant de la situation de proviseur à celle de maire, j'ai découvert cette aberration. Les dépenses de photocopies dans les écoles incombent manifestement à l'Etat (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

M. le Ministre délégué - Mais on ne sait même pas combien cela coûterait !

M. Xavier de Roux - On s'en fiche !

L'amendement 229 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - A l'unanimité !

M. le Ministre délégué - Quand il s'agit de faire payer l'Etat ! (Sourires)

M. le Président - Le Gouvernement lève-t-il le gage ?

M. le Ministre délégué - Soit.

M. Jean-Pierre Brard - Attention à la deuxième délibération !

L'article 89 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 89

M. Jean Lassalle - L'amendement 1369 est défendu.

L'amendement 1369, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - La future réforme de la taxe professionnelle doit aboutir à son remplacement par un nouvel impôt ; auquel réfléchit une commission récemment mise en place par le Premier ministre. Pour l'heure, sont prévues, pour une période de dix-huit mois, des exonérations de taxe sur une série d'investissements. Afin d'éviter toute difficulté aux collectivités durant cette période transitoire, l'amendement 475 rectifié prévoit que l'exonération de taxe professionnelle sur les nouveaux investissements leur sera compensée par voie de dégrèvement, ce qui est la seule manière de garantir une compensation à l'euro près.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - L'amendement 236 rectifié est identique à un mot près au précédent. Il y est question de dégrèvement temporaire en faveur de l'investissement « productif », et non pas « industriel ».

M. le Rapporteur - Le terme investissement productif est préférable. Je retire donc l'amendement 475 rectifié.

L'amendement 475 rectifié est retiré.

M. le Ministre délégué - Je confirme ici solennellement qu'il s'agira bien de dégrèvement. La commission mise en place par le Premier ministre et présidée par M. Fouquet élabore une réforme de la taxe professionnelle, dont le premier objectif est de favoriser l'emploi. Tout à fait d'accord sur le fond avec cet amendement, le Gouvernement préférerait, pour des raisons de cohérence, qu'il trouve place dans le projet de loi de mobilisation pour l'emploi qui sera présenté au printemps.

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - L'amendement 236 rectifié était un amendement d'appel. Nous souhaitions obtenir deux engagements de la part du Gouvernement, d'une part, sur la nature des investissements concernés et la durée de la franchise, d'autre part, sur le fait qu'il s'agirait bien d'un dégrèvement. Après les précisions apportées par le ministre, je retire l'amendement.

M. Augustin Bonrepaux - Je le reprends.

M. René Dosière - A la veille de l'examen du titre IX du texte relatif aux communes et à l'intercommunalité, il s'agit là d'une disposition singulièrement importante. Près des deux tiers des structures intercommunales sont passées à une taxe professionnelle unique (TPU), qui est leur seule ressource, et voilà que l'on s'apprête à supprimer la taxe professionnelle ! Reconnaissez qu'il y a de quoi être inquiet pour les collectivités concernées comme pour l'avenir de l'intercommunalité.

La taxe professionnelle est aujourd'hui acquittée à 55 % par l'Etat, donc par les contribuables nationaux. Les entreprises ne la supportent plus qu'à 45 %, et encore peuvent-elles la déduire de l'impôt sur les sociétés. Le poids ne leur en est donc pas insupportable. Le Président de la République souhaite néanmoins aujourd'hui, lui qui il y a trente ans l'a créée, la supprimer et la remplacer par un impôt « qui ne pénalise pas l'industrie ». Cela signifie-t-il que le nouvel impôt sera acquitté par les ménages ? Nous souhaiterions une réponse sur ce point.

Lors de l'examen du projet de loi de finances au Sénat, le sénateur du Luard, membre de votre majorité, avait proposé de supprimer pendant dix-huit mois la taxe professionnelle restante sur les équipements, c'est-à-dire exactement ce que propose aujourd'hui le Président de la République. M. Lambert lui avait alors répondu qu'une telle disposition, limitée dans le temps, risquait de « propager une illusion qui s'effondrerait au-delà de la date d'application ». Il ajoutait que de telles variations brouilleraient la perception par les gestionnaires d'entreprises de la réalité des charges et concluait en mettant en doute l'efficacité économique d'un tel mécanisme. Vous comprendrez dans ces conditions que nous nous interrogions. Le président de la commission des finances du Sénat, l'un de vos amis...

M. Jean-Pierre Brard - Un ami embarrassant !

M. René Dosière - ...déclarait d'ailleurs, quelques jours après l'annonce du Président de la République, que pour retrouver un niveau satisfaisant d'activité industrielle et tertiaire, il fallait songer à ne plus faire peser sur les entreprises le coût de la solidarité et évoquait les pistes de la CSG, de l'impôt sur le revenu ou de la TVA. Nous sommes là encore en droit de nous interroger. Or, comme pour tout problème embarrassant, vous renvoyez à un texte ultérieur. Pour l'heure, l'amendement était parfaitement justifié pour donner toutes garanties aux collectivités, le temps que l'on sache ce qu'il adviendra de la taxe professionnelle - principale ressource des collectivités, que le Président de la République a tout seul décidé de supprimer...

M. Augustin Bonrepaux - Pourquoi ai-je repris cet amendement ? Tout d'abord, la compensation du produit d'un impôt par une dotation de l'Etat est-elle conforme à la Constitution ?

M. le Rapporteur - La mesure est temporaire.

M. Augustin Bonrepaux - Dans l'article 2 du projet de loi organique de financement, je n'ai nulle part trouvé trace parmi les « ressources propres des collectivités » des compensations de l'Etat comme les dégrèvements.

Par ailleurs, les déclarations successives des membres du Gouvernement ici même sont contradictoires. Ainsi lors de l'examen du projet de loi relatif aux territoires ruraux, M. Delevoye nous a expliqué que la Constitution interdisait de compenser les allégements ou les exonérations de taxe professionnelle que les collectivités pouvaient décider pour favoriser l'installation sur leur territoire de médecins ou de vétérinaires. Qu'en est-il ? Nous attendons des réponses claires.

Enfin, s'agissant de la future réforme de la taxe professionnelle, je tiens à mettre en garde le Gouvernement mais aussi nos collègues, sur tous les bancs. C'est la principale ressource des collectivités, et même la seule ressource des groupements intercommunaux à TPU. Le transfert d'une partie de cet impôt sur la valeur ajoutée entraînera d'importants transferts de ressources entre collectivités. Ainsi, les collectivités qui concentrent les entreprises à forte valeur ajoutée comme les banques ou les compagnies d'assurances, qui sont le plus souvent les grands centres urbains, y gagneront-elles tandis que celles qui accueillent des industries comme le textile, la papeterie, la chimie... perdront des ressources. Les inégalités s'accentueront.

Le Président de la République aurait été bien avisé de réfléchir aux conséquences de sa décision. La proposition la plus raisonnable serait d'augmenter la cotisation minimale par rapport à la valeur ajoutée. Sans chambouler rien, elle permet d'alléger les charges des entreprises de main-d'_uvre sans perte pour l'Etat. Mais ce système vous gêne, car c'est nous qui avons relevé cette cotisation dans la précédente réforme.

Il s'agit là de questions particulièrement importantes, qui méritent quelques explications sur les orientations du Gouvernement.

M. Xavier de Roux - La taxe professionnelle a été créée il y a trente ans, et il y a au moins vingt ans qu'on sait que c'est un mauvais impôt ! Il est donc bon de la remplacer. Il est d'ailleurs à noter qu'elle est aujourd'hui payée à 55 % par l'Etat, sous forme de compensations. Invoquer le fait qu'elle soit une ressource de l'intercommunalité est donc un faux argument. La question est de savoir par quoi elle va être remplacée.

Cet amendement, relatif au financement des collectivités, a toute sa place dans notre débat. Je n'ai pas compris pourquoi nos rapporteurs ont voulu le retirer pour le renvoyer à un prochain texte. Le financement des collectivités locales est intimement lié à la taxe professionnelle, et donc à sa remplaçante.

M. Jean-Pierre Balligand - Sur la procédure, il faut dire au rapporteur de la commission des finances qu'il ne peut pas retirer un amendement adopté par la commission ! Il peut faire connaître son avis à titre personnel. Il aurait dû être d'autant plus prudent qu'il s'agit d'un amendement de M. Carrez, rapporteur général du budget et spécialisé dans les finances locales à l'association des maires de France. M. Carrez tenait beaucoup à cet amendement. Non plus que M. de Roux, je ne peux comprendre qu'on reporte cette proposition. Il s'agit d'un garde-fou, et de quoi sommes-nous en train de parler, si ce n'est de garanties pour les collectivités ?

Sur le fond, il sera extrêmement difficile au Gouvernement - je lui souhaite bien du plaisir ! - de garantir une somme constante. La part de la valeur ajoutée dans la taxe professionnelle va être augmentée, alors que, contrairement à ce qu'on entend souvent, elle est déjà énorme. Le changement est loin d'être neutre pour les collectivités et leurs groupements. L'amendement de la commission des finances constituait un bon garde-fou, et je demande un scrutin public.

M. le Président - Sur l'amendement 236 rectifié, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public ; je rappelle que cet amendement a été repris par M. Bonrepaux.

M. le Rapporteur - Il ne faut pas mélanger deux débats. Le premier concerne la suppression de la taxe professionnelle, dont chacun sait qu'elle est à bout de souffle et qu'elle a d'ailleurs été vidée de sa substance par la réforme Strauss-Kahn, que nous avons largement votée. Nous avons besoin de garanties sur l'autonomie financière des collectivités locales ainsi que sur le caractère fiscal et le produit de ce qui la remplacera. Ces garanties ont été données par le ministre de l'intérieur en commission des lois.

Le second débat concerne le dispositif temporaire pour relancer l'investissement productif, qui fera partie de la loi de mobilisation pour l'emploi qui sera présentée très prochainement par le Gouvernement. Le rapporteur pour avis a demandé par quel type de mesure on compenserait cette incitation à l'investissement. Le Gouvernement a répondu qu'il était d'accord sur le dégrèvement. Avec un engagement si clair et sachant qu'un texte va être incessamment consacré à ces problèmes, je pense que nos amendements sont satisfaits !

M. Laurent Hénart, rapporteur pour avis - Gilles Carrez a présenté cet amendement comme un appel. Il savait que la mesure proposée par le chef de l'Etat allait en faveur de l'emploi et souhaitait donner des certitudes aux entreprises et des assurances aux collectivités locales. Je tiens à préciser que j'ai retiré l'amendement en accord avec lui, car il estime que ses préoccupations avaient été satisfaites par le ministre.

Ensuite, le présent projet de loi ne traite que très peu de matière fiscale, pour la bonne raison que la loi organique n'est pas encore votée. Par ailleurs, lorsqu'il y a transfert entre l'Etat et les collectivités locales, l'article 36 de la loi organique sur les lois de finances nous impose de légiférer dans une loi de finances.

Enfin, la mesure ne serait pas temporaire qu'elle soulèverait certainement un problème de constitutionnalité, comme l'a dit M. Bonrepaux. Mais elle est prévue pour dix-huit mois. C'est un des points sur lesquels le Gouvernement souhaite affiner la rédaction, afin que nous puissions voter sans risque. Le retrait nous permet de prendre le temps de trouver cette rédaction.

M. le Ministre délégué - MM. de Roux et Dosière ont traité la taxe professionnelle de mauvais impôt. C'est oublier qu'elle a succédé à nettement pire, la patente ! Accuser celui qui l'a mise en place d'avoir créé un mauvais impôt est d'une singulière mauvaise foi. Ensuite, si l'on doit réformer cet impôt, c'est aussi parce qu'il a connu une grave dérive. Il a été déséquilibré, en particulier, par la suppression de la part salaires par le gouvernement Jospin, qui n'a d'ailleurs pas été intégralement compensée, car la dotation compensatrice ne tient pas compte de la croissance. Cet impôt est donc devenu presque insensible à la croissance et a considérablement réduit l'autonomie fiscale des collectivités. Enfin, si cet impôt était si mauvais, que ne l'avez-vous réformé durant les cinq ans de votre dernier mandat ? Vous l'avez rendu encore pire !

M. Jean-Pierre Balligand - Vous dites tout et son contraire !

M. le Président - Monsieur Balligand, vous n'avez pas la parole.

M. le Ministre délégué - Monsieur Balligand, vous n'avez sans doute pas assez parlé pour satisfaire votre conception du dialogue : vous intervenez longuement et lorsqu'on vous répond, vous interrompez !

Pendant cinq ans, vous avez rendu cet impôt encore plus anti-économique et inadapté aux besoins des collectivités. Si quelqu'un a fait un cadeau au Medef, c'est bien vous, en déchargeant discrètement les entreprises de l'équivalent de 10 milliards d'euros sans aucune contrepartie !

M. Jean-Pierre Balligand - Mais si !

M. le Ministre délégué - Cet impôt pèse désormais principalement sur l'industrie, plutôt que sur les services. Vous l'avez centré sur le secteur de notre économie le plus handicapé, et qui crée les emplois industriels que vous ne cessez de réclamer !

Quant au dégrèvement, Monsieur Balligand, ce n'est pas une dotation : c'est l'Etat prenant en charge des impôts qui restent déterminés par les collectivités territoriales. Il s'agit donc bien de ressources propres, puisque, à supposer que certaines collectivités augmentent la taxe professionnelle, l'Etat paiera encore, sans discuter et sans limite. Mais il va de soi qu'un tel système ne peut durer indéfiniment. Le Gouvernement, qui estime que ce mécanisme aura sa juste place dans le projet de mobilisation pour l'emploi, considère de plus que le dispositif doit être cerné au plus près, car il n'entend pas dégrever des investissements non créateurs d'emploi, bâtiments ou voitures de fonction par exemple. Des choix précis doivent être faits, qui restent à affiner, mais le principe est posé. Je le confirme, il s'agira bien d'un impôt sur les entreprises, localisable et modulable par les collectivités territoriales elles-mêmes.

Quant à votre suggestion, Monsieur Bonrepaux, elle est intéressante et sera examinée avec attention, car l'impôt n'est pas de droite ou de gauche, il est bon ou il est mauvais...

M. Jean-Pierre Brard - Parlons donc des impôts de Mme Bettencourt !

M. le Ministre délégué - Mme Bettencourt vous obsède, chacun le sait, mais le jour où, excédée par l'ampleur des prélèvements, elle ira s'établir à l'étranger et délocalisera ses entreprises, vous la regretterez ! La proposition de M. Bonrepaux demande, je le disais, à être examinée, et le Gouvernement le fera vite, mais l'on ne peut improviser sauf à remettre en question l'efficacité d'un dispositif conçu pour favoriser l'emploi. Vous pouvez donc vous amuser avec des amendements d'appel (M. Balligand et M. Bonrepaux protestent) pour faire un peu d'obstruction mais, pour toutes ces raisons, l'avis du Gouvernement est défavorable.

M. Jean Lassalle - Brillante démonstration !

M. Augustin Bonrepaux - Je ne peux accepter l'accusation d'obstruction. Nous savons aller vite quand cela se peut, mais il ne saurait être question d'escamoter une question qui, quoi que vous en disiez, préoccupe vivement les élus, qui savent bien que votre dispositif menace l'équilibre des finances locales. Quand on annonce des transferts de charges, mieux vaudrait savoir comment on les compense ! Vous nous dites que le Gouvernement s'apprête à des dégrèvements, et que ces dégrèvements sont conformes à la Constitution. Voilà qui est curieux ! Lorsque, il y a quelques semaines à peine, j'ai proposé un dispositif similaire, mais limité dans le temps, pour inciter les jeunes médecins à s'installer à la campagne, le Gouvernement m'a répondu qu'une telle disposition était inconstitutionnelle ! Le propos est incohérent. Mieux vaudrait, aussi, que les collectivités territoriales sachent dès ce soir comment la compensation s'opérera et, en tout cas, qu'elles le sachent avant que la loi organique soit votée. Si l'on en reste à la formulation d'aujourd'hui, comment empêchera-t-on que cette compensation soit gelée lorsque l'Etat sera en grande difficulté financière ? Ce sont bien les collectivités territoriales qui feront les frais de ces arrangements, et ce sera contraire à la Constitution.

A la majorité de 48 voix contre 14 sur 64 votants et 62 suffrages exprimés, l'amendement 236 rectifié n'est pas adopté.

La séance, suspendue à 23 heures 20, est reprise à 23 heures 35.

AVANT L'ART. 90

M. René Dosière - L'amendement 848 vise à accorder « le droit de vote et d'éligibilité pour l'élection des conseils des collectivités territoriales » aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant en France.

Ce n'est pas d'aujourd'hui que les socialistes défendent une telle disposition. Nous l'avions introduite en première lecture dans la loi sur la démocratie de proximité...

M. Alain Gest - A la veille d'élections, déjà !

M. René Dosière - ...Mais nous avons dû la retirer au Sénat pour que le texte puisse être adopté dans des délais convenables. Si nous la présentons à nouveau aujourd'hui, c'est parce qu'il nous semble que les esprits ont évolué entre-temps. En témoignent les discours tenus lors de la discussion de la loi sur le port de signes religieux à l'école : même à droite, on s'est prononcé pour tout ce qui peut favoriser l'intégration de l'ensemble des générations issues de l'immigration.

La semaine dernière, Monsieur le Président, j'ai participé dans votre département, à Armentières, à un débat avec le recteur de la mosquée de Lille. Il y avait là nombre de personnes d'origine marocaine, venues en France à une époque où les industriels du Nord avaient besoin de main-d'_uvre et qui ont pu entendre ce jour-là toute une série de propositions généreuses - dont celle-ci. Certes, leurs enfants ont en général la nationalité française, mais c'est loin d'être le cas de cette première génération, pour des raisons diverses. Accorder le droit de vote à ces personnes dès lors qu'elles justifient d'une certaine durée de résidence sur notre sol est une mesure qui s'impose d'autant plus qu'elles ne retourneront pas s'établir au Maroc et qu'elles regardent la France comme leur pays.

Certes, cela ne suffira pas à assurer leur intégration, mais cela y contribuera ! Abstenez-vous par conséquent d'agiter le chiffon rouge ! D'ailleurs, les Belges ne viennent-ils pas, après d'autres, d'accepter que les étrangers « non communautaires » puissent être élus ? Ne soyons pas les derniers à adopter ce genre de disposition qui a par ailleurs toute sa place dans une loi relative aux responsabilités locales !

M. le Rapporteur - Rejet : la disposition va contre l'article 88-3 de la Constitution.

M. le Ministre délégué - C'est aussi une disposition qu'on avance à la veille de chaque élection, pour remobiliser le Front national !

M. Guy Geoffroy - La ficelle est assez grosse, en effet !

M. le Ministre délégué - Comment ne serais-je pas favorable à l'intégration ?...

M. Jean-Pierre Brard - Vous en êtes d'ailleurs un bon exemple !

M. le Ministre délégué - ...Mon père a vécu longtemps sans avoir le droit de vote. Mais la France naturalise cent mille étrangers par an, ce qui est exceptionnel en Europe. Les Allemands, par exemple, ont longtemps pratiqué le droit du sang...

M. René Dosière - Ils ont changé !

M. le Ministre délégué - Ils changent, mais tout doucement. Et dans les autres pays que vous citez en exemples, si l'on accorde le droit de vote aux étrangers, c'est pour ne pas leur accorder la nationalité, pour les maintenir au rang de citoyens de deuxième zone. Nous, nous entendons en faire des citoyens à part entière et c'est pourquoi nous naturalisons aussi généreusement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président de la commission - Excellente réponse !

M. Jean-Pierre Brard - Le rapport à la nationalité est une question très intime, étroitement liée à l'histoire familiale de chacun, et on ne peut en traiter de manière caricaturale, en opposant naturalisation et droit de vote. On le peut d'autant moins que les décisions de naturalisation sont entourées de quelque opacité : il est beaucoup plus facile d'obtenir la nationalité française lorsqu'on a la peau claire ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Ministre délégué - Reportez-vous au Journal officiel et vous verrez que ce n'est pas vrai !

M. Jean-Pierre Brard - A quoi le verrai-je ? La couleur de peau n'est pas indiquée !

M. le Ministre délégué - Mais la nationalité, si.

M. le Président de la commission - Vous savez bien que l'immigration, en France, provient majoritairement des pays du Sud !

M. Jean-Pierre Brard - On naturalise aussi plus rapidement ceux qui peuvent remporter des médailles dans les compétitions sportives - ce que je ne critiquerai pas, étant moi-même intervenu en faveur d'un de ceux-là, mais je critique le fait qu'on oublie les autres.

Votre position, Monsieur le ministre délégué, n'est pas celle, plus courageuse, qu'ont défendue naguère M. Juppé et M. Séguin.

Un écrivain qui habite Montreuil m'a raconté qu'il venait, à quarante ans, de s'inscrire sur les listes électorales. Pourquoi pas plus tôt ? C'est, m'a-t-il dit, qu'il ne voulait pas aller voter sans sa mère, qui était là depuis plus longtemps que lui, et qui était privée du droit de vote. Voilà qui doit faire réfléchir.

Je pense aussi à de vieux travailleurs algériens, qui habitent ma ville depuis 1959, qui ont participé à la création de la richesse de notre pays, et qui sont des laïques fervents, mais ont choisi de rester Algériens. Ils remplissent toutes les obligations du citoyen français, à commencer par le fait de payer l'impôt. Les parents de certains d'entre eux ont donné leur vie pour la France. Qui a le plus contribué à la défense du sol national, les Allemands, ou les tirailleurs sénégalais ?

M. Xavier de Roux - Lisez le code de la nationalité !

M. Jean-Pierre Brard - Je ne propose pas de refuser le droit de vote aux citoyens communautaires, mais de le donner à tous les résidents étrangers, dans des conditions à déterminer. Je soutiens donc énergiquement l'amendement de M. Dosière. Sur ce sujet, un consensus serait sans doute possible avec des hommes comme M. Juppé ou M. Séguin.

M. Frédéric Dutoit - Je suis élu de Marseille, ville que caractérise depuis sa création la mixité de sa population. Je voterai l'amendement de mes amis socialistes, d'autant que j'ai déposé une proposition de loi dans le même sens. Je pense d'ailleurs que la précédente législature aurait dû prendre cette mesure. Votre argumentation, Monsieur le ministre, ne tient pas : nul ici ne considère les étrangers comme des citoyens de second ordre. Mais il est important que des personnes qui habitent notre pays depuis des années, qui contribuent tous les jours à la richesse de ce pays, et qui sont pour la plupart imposables, notamment aux taxes locales, puissent participer aux choix de gestion des collectivités locales dans lesquelles ils vivent : c'est une mesure de justice.

L'amendement 848, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 90

M. René Dosière - L'amendement 850 prévoit que les résidents étrangers puissent être consultés dans le cadre de la procédure de consultation. Celle-ci n'a qu'une valeur d'avis, mais ce serait un pas en avant.

M. le Rapporteur - L'amendement 415 rectifié de la commission propose une nouvelle rédaction de l'article, qui rétablit pour une bonne part le texte initial du Gouvernement. Le Sénat, désireux de mettre l'accent sur la démocratie représentative, oublie la démocratie participative. Or, le président Clément, dans son excellent rapport sur la révision constitutionnelle, écrit que la décentralisation ne doit pas être réservée aux élus locaux, et n'est pas un simple outil de gestion, mais qu'elle requiert une adhésion active des citoyens. Nous revenons donc au texte initial, qui permettait l'organisation de consultations dans les collectivités territoriales et notamment dans les communes. Nous modifions toutefois ce texte initial pour souligner le caractère facultatif de l'inscription à l'ordre du jour d'un projet de délibération faisant suite à une pétition, car ce caractère facultatif est imposé par l'article 72, alinéa premier, de la Constitution. L'amendement rend également ce principe facultatif pour les consultations organisées par les groupements, puisque dans ces derniers on ne peut - même si je le déplore - utiliser l'outil référendaire. Enfin nous précisons les modalités d'organisation de la consultation en nous inspirant des dispositions introduites dans le code général des collectivités territoriales par la loi du 1er août 2003 relative au référendum local.

M. René Dosière - Notre amendement 849 est identique à celui de la commission.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1120 est défendu.

M. Jacques Pélissard - L'amendement 79 également.

M. le Rapporteur - Avis défavorable à l'amendement 850 : il est contraire à l'article 72-1 de la Constitution.

M. le Ministre délégué - Même avis.

L'amendement 850, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Nous en venons aux sous-amendements à l'amendement 415 rectifié.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Le sous-amendement 1563 corrigé de M. Deflesselles rétablit entièrement le texte du Gouvernement, dont on ne peut imaginer qu'il soit contraire à la Constitution : nous avons affaire à de grands juristes. Il supprime donc le caractère facultatif de l'inscription à l'ordre du jour de l'organisation d'une consultation.

M. Frédéric Dutoit - Le sous-amendement 1592 corrigé est défendu.

M. Jean-Pierre Brard - La consultation des électeurs par les collectivités territoriales sur des décisions qu'elles envisagent d'adopter est une démarche démocratique qu'il faut encourager. C'est l'occasion de développer la démocratie participative, à l'heure où la démocratie représentative, même si elle n'a rien perdu de sa légitimité, traverse une crise. Mais pour de tels débats la transparence est indispensable. Il faut informer les électeurs des tenants et des aboutissants des décisions envisagées, et garantir à ce sujet une information pluraliste. Chaque groupe de l'assemblée délibérante concernée doit pouvoir faire connaître son avis sur la décision envisagée, et ces éléments doivent être communiqués à chaque électeur : tel est l'objet du sous-amendement 1535. Celui-ci a été élaboré par les citoyens de la ville de Montreuil dans le cadre du contrat de législature qui me lie à eux, et qui leur permet de travailler sur les textes importants soumis à l'Assemblée nationale, et de faire à leur sujet des propositions que je me fais un devoir de rapporter ici - comme je l'ai fait déjà sur le saturnisme.

M. le Rapporteur - Défavorable au sous-amendement 1563 corrigé : je l'ai dit, le caractère facultatif de la consultation est imposé par la Constitution. Même avis sur le 1592. Défavorable également au 1535 : la référence aux groupes politiques n'a pas de sens dans les petites communes, auxquelles cet article, de portée générale, doit pouvoir s'appliquer. En outre il faut éviter d'encadrer trop lourdement cette procédure, qui doit rester informelle.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement est favorable au rétablissement de son texte par l'amendement 415 rectifié. Il est défavorable au sous-amendement défendu par M. Tian, qui supprime le caractère facultatif. Certes, celui-ci ne figurait pas dans notre texte initial. Mais un débat a eu lieu, notamment au Sénat, sur l'obligation de procéder à une consultation dès lors qu'un certain pourcentage de la population le demande par pétition. Il y avait alors un caractère automatique et obligatoire, d'où cette précision qui ne figurait pas dans le texte initial. Avis forcément défavorable, pour des raisons constitutionnelles.

Les sous-amendements 1563 corrigé, 1592 corrigé et 1535, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 415 rectifié, mis aux voix, est adopté et l'article 90 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 90

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1121 est défendu.

L'amendement 1121, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 416 rend obligatoire la consultation de la population en cas de fusion de communes.

M. le Ministre délégué - Favorable.

M. Jean-Pierre Balligand - Et Dunkerque ! C'est scandaleux !

L'amendement 416, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Gest - L'amendement 35 tend à faciliter la circulation de l'information entre la collectivité et ses membres élus, en permettant à ces derniers d'avoir accès aux moyens de communication attachés aux nouvelles technologies.

M. le Rapporteur - La commission est favorable à cet excellent amendement.

L'amendement 35, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 91, mis aux voix, est adopté.

ART. 92

M. le Rapporteur - L'amendement 417 rétablit le texte initial de cet article, supprimé par le Sénat pour des raisons inexpliquées. Rien ne justifie de se priver du très utile outil d'évaluation que constituera le Conseil national des politiques publiques locales.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement se réjouit de ce rétablissement.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Il est en effet essentiel d'aller aussi loin que possible dans la voie d'une évaluation neutre et objective de la décentralisation.

L'amendement 417, mis aux voix, est adopté et l'article 92 est ainsi rédigé.

ART. 93

M. le Rapporteur - L'amendement 550 de M. Carrez rétablit le texte du Gouvernement.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable (Murmures), le Gouvernement étant satisfait des améliorations apportées par le Sénat.

L'amendement 550, mis aux voix, est adopté et l'article 93 est ainsi rédigé.

L'article 94, mis aux voix, est adopté.

ART. 95

M. le Rapporteur - L'amendement 418 est défendu.

L'amendement 418, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 95 ainsi modifié.

APRÈS L'ART. 95

M. le Rapporteur - Les amendements 420 et 419 sont de coordination.

M. le Ministre délégué - Favorable, sous réserve d'une rectification de la numérotation de la section - remplacer section 8 par section 7.

M. le Rapporteur - D'accord.

Les amendements 420 et 419, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 96, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 96

M. Alain Gest - Considérant que l'Etat exerce une compétence générale en matière électorale, j'ai proposé de restituer au préfet l'ensemble des prérogatives actuellement dévolues aux conseils généraux en matière de sectionnement électoral. Mon amendement est devenu le 421 rectifié de la commission.

M. le Rapporteur - C'est l'amendement gagnant ! (Sourires)

L'amendement 421 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 97, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ART. 98

M. Jean-Pierre Balligand - L'amendement 852, auquel M. Derosier tient beaucoup, remplace, dans l'intitulé du chapitre II, les mots « contrôle de légalité » par l'expression « contrôle administratif des actes ». Il est à nos yeux essentiel de rappeler aux services des préfectures que seul un contrôle administratif des actes est de leur compétence, le reste appartenant au juge.

M. le Rapporteur - Rejet. Nous connaissons cette vieille lubie de M. Derosier. La notion de contrôle de légalité est consacrée par le CGCT et, de manière implicite, par la Constitution elle-même, et il ne fait aucun doute qu'il incombe au préfet de l'exercer.

M. le Ministre délégué - Même avis, d'autant qu'il émane de ce « contrôle administratif » un parfum d'opportunité. Il évoque des temps antérieurs à la décentralisation de 1982. Vous avez eu le grand mérite de supprimer la tutelle administrative, n'y revenons pas ! Quant au juge administratif, il exerce le contrôle juridictionnel, non le contrôle de légalité.

Le préfet joue le rôle du parquet en l'espèce : il défère un acte s'il pense que celui-ci n'est pas conforme à la loi - et ce rôle lui a été reconnu encore par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 12 février sur la loi organique relative au statut de la Polynésie française.

Pour toutes ces raisons juridiques, je suis opposé à l'amendement.

L'amendement 852, mis aux voix, n'est pas adopté.

APRÈS L'ART. 98

M. Jean Lassalle - L'amendement 203 de Mme Comparini est défendu.

M. le Rapporteur - L'idée est bonne mais tel que rédigé, l'amendement serait probablement inconstitutionnel. Il faudra profiter de la navette pour trouver une meilleure solution.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

L'amendement 203, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les articles 98 bis et 98 ter sont successivement adoptés.

ART. 98 QUATER

M. Frédéric Dutoit - Je me réjouis que le Sénat ait supprimé l'article 98 qui, une nouvelle fois, dessaisissait le Parlement en habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnances en matière de contrôle de légalité.

J'en viens à l'article 98 quater. Nous ne sommes pas opposés aux simplifications adoptées par le Sénat, qui faciliteront le travail des mairies et des préfectures - notamment la réduction du nombre d'actes soumis à l'obligation de transmission au préfet. Mais il faut excepter les certificats d'urbanisme. Nous savons tous que les règles d'urbanisme ne sont pas assez respectées dans notre pays. Des promoteurs immobiliers peu scrupuleux profitent parfois de leur collusion avec des municipalités, et plus souvent du manque de vigilance des mairies et des préfectures, pour mener à bien leurs opérations spéculatives. Alléger le contrôle de légalité en matière d'urbanisme serait un bien mauvais signal. D'où notre amendement 1122 qui tend à supprimer le 3° du I. Le maire des quartiers nord de Marseille que je suis est particulièrement sensible à toutes ces questions.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Egalement.

L'amendement 1122, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 422 et 423 sont rédactionnels.

L'amendement 422, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, ainsi que l'amendement 423 et l'article 98 quater modifié.

L'article 98 quinquies est adopté.

AVANT L'ART. 99A

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1240 précise que l'organe délibérant peut décider, à l'unanimité des membres présents, de ne pas procéder aux nominations ou aux présentations au scrutin secret.

M. le Rapporteur - Je suis favorable à cet amendement de bon sens. Le sous-amendement 1611 est de conséquence.

M. le Ministre délégué - Sagesse.

Le sous-amendement 1611, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 1240 ainsi sous-amendé.

ART. 99A

M. le Rapporteur - L'amendement 1544 rédige l'article de façon plus claire.

M. le Ministre délégué - Avis favorable.

L'amendement 1544, mis aux voix, est adopté et l'article 99 A est ainsi rédigé.

ART. 99

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1241 est défendu.

L'amendement 1241, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 99, mis aux voix, est adopté.

ART. 100

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1242 tend à supprimer l'article.

L'amendement 1242, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 425 et 426 sont de coordination.

Les amendements 425 et 426, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés de même que l'article 100 modifié.

ART. 100 BIS

M. Jean Lassalle - Avant d'intervenir sur cet article, je souhaiterais dire combien, moi qui suis encore pour ainsi dire un député stagiaire (Sourires), je trouve nos travaux formidables. Il faudrait mieux les faire connaître à l'extérieur, où nos concitoyens ont souvent une mauvaise image du travail des élus.

Je me réjouis que la commission propose de supprimer l'article 100 bis qui rendait les centres communaux d'action sociale facultatifs. Je crois en nos 36 000 communes, que nous avons bien raison de garder car elles sont le premier lieu de la démocratie et de l'expression des citoyens. Il faudrait donner, notamment aux plus petites d'entre elles, où le maire est bien souvent l'homme à tout faire qui sonne les cloches, distribue le courrier, conduit le car scolaire, plus de moyens, en particulier de formation, pour leur CCAS. Il faudrait aussi permettre la création de CCAS intercommunaux, sous réserve bien sûr de l'accord des communes concernées.

M. le Rapporteur - C'est avec une certaine stupeur que nous avons appris que le Sénat avait décidé de supprimer le caractère obligatoire des CCAS. Tous les élus communaux savent combien ces structures, où la politique sociale s'élabore en étroite concertation avec les associations, sont précieuses. Le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles a essayé de trouver un compromis par le biais d'un amendement fixant un seuil de population en dessous duquel un CCAS n'aurait pas été obligatoire et ouvrant la possibilité de CCAS intercommunaux. Etant donné l'émotion suscitée par le vote du Sénat, votre commission a estimé que le mieux était de supprimer purement et simplement l'article, et elle a déposé un amendement 427 en ce sens, soutenu par l'ensemble des commissaires, toutes tendances politiques confondues.

M. le Président - Sur les amendements de suppression 427, 33, 855 et 1243, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

M. Christian Cabal - L'amendement 33 est défendu.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - J'ajouterai aux propos du rapporteur que, dans l'histoire des politiques sociales, les CCAS ont été un des premiers acteurs. Ils ont dès l'origine été un excellent relais de l'Etat sur le terrain. Par ce projet de loi, l'Etat se décharge d'une grande partie de ses politiques sociales sur les départements. Il en est d'autant plus essentiel que les CCAS continuent d'exister ! L'Etat est sur le point d'abandonner l'ensemble de ses instruments de politique sociale, et nous commençons déjà à en voir les conséquences sur le terrain.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1243 est défendu.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - La loi impose à toutes les communes de créer des CCAS. Les sénateurs ont constaté qu'elle n'était pas appliquée. J'ai déposé, après concertation avec les acteurs concernés, un amendement 516 qui expose une solution équilibrée. Il prévoit de maintenir l'obligation, sauf pour les communes de moins de 2 000 habitants, et surtout de permettre aux EPCI d'exercer cette compétence. Je pense que cette rédaction résoudrait l'ensemble des problèmes. Si l'on se contentait de supprimer l'article, la délégation aux EPCI, qui est demandée par les CCAS, ne serait pas possible.

M. le Président de la commission - J'ai été absolument stupéfait d'apprendre que la loi n'était pas respectée par un nombre important de communes. Mais qu'on veuille légiférer pour consacrer ce défaut de respect de la loi, c'est un comble ! Supprimer les CCAS serait un abominable symbole pour notre majorité. Je pense que nous nous honorerions de supprimer l'amendement du Sénat de façon unanime. Le CCAS regroupe des intervenants divers. Il est particulièrement intéressant d'y rencontrer des personnes qui n'ont pas voulu ou pas pu être élues, et qui participent ainsi à la vie de la commune.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Tout à fait !

M. le Président de la commission - Contrairement à M. Tian, je ne pense pas qu'il faille transférer les CCAS vers les EPCI. Le conseil général a une vocation sociale affirmée, et la collectivité qui est le plus au contact des administrés, c'est la commune. Il ne faut pas rechercher un effet de taille avec le transfert vers les EPCI : au contraire, s'agissant du social, plus on travaille à petite échelle, plus on connaît les besoins et plus on est efficace. L'amendement de M. Tian ne me semble donc pas intéressant. Je demande à toute l'Assemblée de supprimer l'amendement du Sénat.

M. le Ministre délégué - Le problème est particulièrement délicat. Je partage à l'évidence tout ce qui a été dit sur l'utilité des CCAS, qui présentent le grand avantage de faire participer à l'action sociale communale des associations caritatives et des bénévoles, qui jouent par ailleurs un rôle d'intermédiaires utiles sur le terrain. Mais il ne faut pas oublier que le Sénat avait des raisons d'agir. Il a d'abord voulu rétablir le parallélisme avec l'autre institution sociale de la commune, les caisses des écoles, qui ont été rendues facultatives par la loi démocratie et proximité de M. Vaillant.

M. René Dosière - Les caisses des écoles sont moins importantes !

M. le Ministre délégué - J'en conviens. Le Sénat a également constaté que, sur 36 000 communes, 31 000 ne se sont pas dotées d'un CCAS. Ce chiffre est ahurissant ! Le taux de CCAS augmente avec la taille des communes : seulement 7 % des communes de moins de 500 habitants en ont un, et 22 % des communes de moins de 2 000 habitants, contre 80 % pour les communes de moins de 10 000 habitants. C'est pourquoi l'idée d'un seuil est intéressante.

Dans la situation actuelle, les préfets devraient donc déférer 31 000 communes devant le juge administratif...

M. le Rapporteur - Peut-être que certaines créeraient un CCAS !

M. le Ministre délégué - Peut-être n'est-ce pas le mieux pour elles ! Nous comptons 21 000 communes de moins de 500 habitants. Beaucoup n'ont qu'un quart de poste de secrétaire pour la mairie, et vous voulez leur demander de créer une structure nouvelle ? Je ne suis pas certain que ce soit très opportun, toute « dimension symbolique » mise à part ! L'idée de seuil ne me paraît donc pas pouvoir être écartée d'un revers de main, pas plus d'ailleurs que le transfert aux communautés de communes. Que ces petites communes fassent un CCAS à plusieurs ne paraît pas déraisonnable ! Une légère incitation fiscale pour les EPCI permettrait sans doute de développer les CCAS dans les petites communes. Reste un problème, en cas de seuil : si cohabitent dans l'EPCI des communes qui doivent avoir un CCAS et d'autres qui n'y sont pas obligées, la majorité sera difficile à obtenir.

Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée. Il a proposé un amendement qui tend à favoriser la constitution de CCAS par les EPCI. Dans ce cas, il faut veiller à ce que les CCAS intercommunaux aient exactement le même périmètre que les EPCI. On ne va pas ajouter encore un découpage ! Je suis contre la proposition de ne constituer les CCAS intercommunaux qu'avec les communes volontaires, car cela rendrait le dispositif illisible.

On a chatouillé la queue du dragon. Jusqu'à maintenant, personne ne s'inquiétait que 31 000 communes ne soient pas en règle. Aujourd'hui, la question est posée publiquement. Le Parlement va-t-il voter un texte en sachant qu'il ne sera pas respecté par la grande majorité des communes et en espérant que tout le monde laissera faire ? Sous couvert d'esprit social, c'est une belle hypocrisie ! Si l'Assemblée et le Sénat décident que les CCAS sont obligatoires, les 31 000 communes qui n'en ont pas devront s'en doter !

M. le Président de la commission - J'en suis désolé, mais il me faut contredire le ministre : une caisse des écoles n'a jamais défini la politique sociale d'une commune. Nous sommes, ici, dans une autre dimension et je suis convaincu que si 31 000 communes n'ont pas de CCAS, c'est surtout par ignorance. Je sais d'expérience que j'aurais scandalisé les 750 habitants de la commune dont j'étais le maire si j'avais imaginé proposer la suppression du centre communal d'action sociale ! Ce n'est pas parce qu'un dispositif qui devrait fonctionner ne fonctionne pas qu'il faut le supprimer ; mieux vaudrait que les préfets incitent, par circulaire, les communes à se doter d'un CCAS. Mais supprimer un outil de valeur et faire se fondre les CCAS dans les EPCI, c'est bafouer le principe de subsidiarité. La politique sociale relève des communes et du département.

M. Michel Piron - Ne pourrait-on faire la synthèse de l'idéal et du possible en simplifiant la définition des CCAS ? Qu'ils deviennent, s'il le faut, une simple commission, et il s'en créera davantage. Mais qu'au moins les préfets rappellent à l'ensemble des communes que cette instance a une grande utilité.

M. Jean Lassalle - M. le ministre a raison quant aux faits. Mais ce n'est pas parce que 31 000 maires, abasourdis par tout ce que l'on exige d'eux, se sont assoupis au moment de créer des CCAS qu'il faut jeter l'éponge. Les questions d'ordre social doivent être traitées au plus près, et l'important est de donner aux édiles les moyens de réactiver les CCAS. Si les problèmes sociaux restent sans solution dans une commune, ils se transfèrent de proche en proche au chef-lieu de canton, à la préfecture puis dans les banlieues des grandes villes, avec les conséquences que l'on sait.

Cela dit, l'intervention du président de la commission m'a troublé : je me suis rendu compte, en l'écoutant, de n'être pas certain de vouloir que les CCAS se rattachent aux EPCI. Mieux vaudrait peut-être qu'ils se rattachent aux conseils généraux.

M. Jean-Pierre Balligand - Pas ça ! Pas vous !

M. Jean Lassalle - Etant donné le doute dans lequel je me trouve, je me prononcerai en faveur de la possibilité d'un rattachement des CCAS aux EPCI et aux conseils généraux.

M. René Dosière - L'amendement 516 de notre collègue Tian est intéressant, mais il me paraît bon de rappeler que si les amendements de suppression sont adoptés, ils feront tomber les suivants, dont celui-là et celui du Gouvernement.

M. le Président - Cela n'avait échappé à personne.

M. René Dosière - Etant donné la complexité du débat, il faut avoir conscience que le vote des amendements de suppression sera un vote couperet.

M. le Président - Sur lequel le groupe socialiste a demandé un scrutin public.

M. Jean-Pierre Balligand - Nous retirons cette demande.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler - L'argumentation du président de la commission des lois a une forte valeur symbolique et il a raison de dire qu'en supprimant l'obligation faite aux communes de créer un CCAS, on semble les autoriser à se désintéresser des questions sociales. L'essentiel, c'est que les communes se sentent responsables des politiques sociales et l'intérêt des CCAS est qu'ils permettent un travail en concertation avec les associations et la mobilisation de tous. Cela vaut d'autant plus qu'étant donné les transferts de compétences organisés dans la première partie du texte au bénéfice des conseils généraux, les CCAS seront désormais les seuls lieux de concertation en matière de politique sociale. A titre personnel, j'estime donc que l'amendement 516 de notre collègue Tian est le plus sage, en ce qu'il permet la création d'un CCAS dans le cadre d'un EPCI.

M. Augustin Bonrepaux - Certaines communes ne peuvent se doter d'un CCAS. Pour autant, il serait inconcevable qu'une telle entité se crée à l'échelon départemental, car il s'agit d'un service de proximité. L'amendement 516 de M. Tian répond à ces préoccupations.

M. Frédéric Dutoit - Je demeure favorable à la suppression de l'article.

M. Jean-Pierre Balligand - A ce stade du débat, il me paraîtrait préférable de voter la suppression de l'article et de lui trouver, au cours de la navette, une rédaction nouvelle sur la base de l'amendement de M. Tian. On voit bien qu'il existe, d'une part, un grand attachement aux CCAS mais que, d'autre part, les présidents de conseils généraux s'inquiètent...

M. le Président de la commission - Je n'ai jamais dit cela !

M. Jean-Pierre Balligand - Je n'ai nommé personne. Il n'empêche que certains s'inquiètent à l'idée que des EPCI s'occuperaient d'action sociale. Il faut donc concilier ces exigences. Nous ne pouvons nous satisfaire d'une situation dans laquelle les petites communes, dépourvues de CCAS, envoient systématiquement les personnes en difficulté vers les communes de 3 000 habitants ou plus, qui en ont un.

M. le Ministre délégué - D'où l'utilité des EPCI !

M. Jean-Pierre Balligand - La solution ne pouvant venir des conseils généraux, c'est en effet du côté de l'intercommunalité qu'il faut la chercher. M. Tian a fait des propositions en ce sens et, comme nous ne pouvons nous diviser ni, a fortiori, pratiquer la politique du pire sur un tel sujet, je suggère que nous votions la suppression de l'article et donnions mandat à la commission des lois de trouver une porte de sortie honorable en travaillant dans l'esprit de cet amendement.

M. Michel Piron - Je demande une brève suspension afin de régler ce point.

M. le Ministre délégué - Cela en vaut en effet la peine.

La séance, suspendue le vendredi 5 mars à 1 heure, est reprise à 1 heure 10.

M. le Rapporteur - Je le répète, il nous faut donner une réponse claire aux CCAS et aux associations et, pour cela, nous devons rétablir l'obligation faite aux communes de créer des centres d'action sociale. Cela étant, M. Tian a effectué un travail remarquable, en liaison avec l'UNCCAS, afin d'essayer de régler un problème qui, nous le voyons bien, est d'une extrême complexité : la solution serait intercommunale. Resterait à savoir si, dans ce cadre, la création d'un centre d'action sociale ne devrait pas être obligatoire. Comme nous ne pouvons improviser, je propose que la commission des lois et celle des affaires sociales approfondissent ensemble la réflexion après que nous aurons voté les amendements de suppression (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Les amendements 427, 33, 855 et 1243, mis aux voix, sont adoptés et l'article est ainsi supprimé.

M. le Président - Tous les autres amendements à cet article tombent.

APRÈS L'ART. 100 BIS

M. Alain Gest - Afin d'éviter des dérives que certains d'entre nous ont eu à déplorer, l'amendement 1507 vise à inscrire dans le code de l'action sociale l'incompatibilité entre l'exercice d'un mandat municipal et la qualité de salarié d'un CCAS.

M. le Rapporteur - Avis favorable, mais il n'est pas utile de citer maire et adjoints. Mentionner les seuls « conseillers municipaux » aura le même effet.

M. Alain Gest - Il vaut mieux faire référence aux « élus municipaux » dans ce cas.

M. Michel Piron - Et supprimer le mot « élus » à la fin de la phrase !

M. le Président - La première phrase ajoutée à l'article L. 132-6 se lirait donc : « Les élus municipaux ne peuvent être salariés du centre d'action sociale de la commune dont ils sont les représentants. »

M. Alain Gest - J'accepte cette rectification.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre délégué - Avis favorable également, sous réserve que nous procédions à une autre modification lors d'une lecture ultérieure : les incompatibilités ont leur place dans le seul code électoral !

L'amendement 1507 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 100 ter, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 100 TER

M. Frédéric Dutoit - J'annonce tout de suite que je demanderai un scrutin public sur les amendements 1248 et 1249.

On le sait, une loi particulière dite « PML » régit les trois plus grandes villes de France, Paris, Marseille et Lyon. Elle les a dotées de mairies d'arrondissement dans le but de rapprocher les citoyens des élus. L'expérience a montré que ces mairies étaient très efficaces pour intéresser les citoyens à la gestion publique. Les élus d'arrondissement sont par excellence des élus de proximité, les premiers concernés par l'action avec la population. La loi PML leur a donné un fort pouvoir de concertation avec les citoyens, notamment par le biais des comités d'initiative et de consultation d'arrondissement, les CICA.

Depuis lors d'autres lois ont été votées, notamment la loi sur la démocratie de proximité et la loi sur l'intercommunalité. Parmi les trois villes, Paris est un cas particulier, même si je sais que ses élus réfléchissent à des perspectives d'intercommunalité ; mais celle-ci existe depuis longtemps à Lyon. A Marseille il y a maintenant un peu plus de deux ans que nous avons une communauté urbaine, dotée par la loi de compétences importantes, qui concernent surtout la vie quotidienne des citoyens. C'est également vrai à Lyon.

Mes amendements n'ont pas pour objet de transférer des compétences nouvelles aux mairies d'arrondissement, mais de leur donner plus de force et d'efficacité auprès des mairies centrales, et des intercommunalités dans le cas de Lyon et de Marseille. Un exemple : tous les rapports qui retracent l'activité des mairies centrales passent en conseil d'arrondissement, certes pour avis seulement, mais ce n'est pas négligeable. Pourtant le législateur, en adoptant la loi sur l'intercommunalité, a négligé de prendre en compte les trois grandes villes. De sorte qu'aujourd'hui, à Lyon et Marseille, tout ce qui concerne la vie quotidienne des gens - voirie, assainissement, nettoiement, etc - passe à la communauté urbaine, mais n'est pas nécessairement soumis aux communes qui la composent, ni a fortiori aux mairies d'arrondissement. Une telle situation ne peut perdurer : elle constitue un recul en matière de démocratie et de proximité.

Le but de mes amendements est donc d'harmoniser ces trois lois qui régissent Paris, Marseille et Lyon : la loi « PML », la loi sur la démocratie de proximité, et la loi sur l'intercommunalité. L'amendement 1246 tend à faciliter la délimitation des périmètres des quartiers pour favoriser la création de CICA ou de conseils de quartier là où ils font défaut. D'autre part, il permet aux villes de Paris, Marseille et Lyon de substituer, sur la base du volontariat, des CICA de quartier aux conseils de quartier que rend obligatoires la loi sur la démocratie de proximité. Ceci doit créer des possibilités accrues de contact avec la population. Enfin l'amendement rend facultative à Paris, Marseille et Lyon la création de conseils de quartier, afin de permettre la pérennisation des CICA ou la création de conseils s'étendant sur un groupe de quartiers.

M. le Rapporteur - Je m'exprimerai globalement sur les quatorze amendements de M. Dutoit. La commission a constaté que dans la loi sur la démocratie de proximité il avait été très difficile de faire évoluer les choses. Elle estime que sur un sujet tel que Paris, Marseille et Lyon, il est indispensable de trouver des consensus. On ne peut légiférer à partir de propositions particulières, d'où qu'elles viennent - et il ne s'agit pas ici d'un problème d'étiquette partisane, mais parfois peut-être d'origine géographique. Nous avons essayé de le faire à la marge, sur les conseils d'école, parce qu'il y avait un consensus ; mais on ne peut agir ainsi globalement. Vous posez pourtant de vraies questions, sur lesquelles on ne pourra avancer qu'en trouvant des consensus tant politiques que géographiques, afin que les dispositifs présentés ne soient suspects d'aucune arrière-pensée partisane. La commission est donc opposée à vos quatorze amendements, mais estime que le chantier mérite d'être rouvert.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Je suis comme M. Dutoit maire d'arrondissement à Marseille. Quand M. Tibéri a fait sa proposition hier, nous étions tous deux désarçonnés : ce n'était pas à sa place dans ce projet. Il y a pourtant beaucoup de choses à toiletter concernant Paris, Marseille et Lyon, ne serait-ce que la question de l'état civil des mairies d'arrondissement. Un conseiller d'arrondissement ne peut pas marier, ce qui est stupéfiant. Il y a des jours où l'on manque d'élus pour marier les gens, comme on en manque pour siéger dans les conseils d'école... Il y a donc bien des choses à réviser dans la loi « PML », mais ce n'est pas le lieu de le faire, même si beaucoup d'idées avancées par M. Dutoit sont intéressantes. J'indique, d'autre part, qu'il existe à Marseille un important dispositif de comités d'intérêts de quartiers, ce qui rend peut-être inutile le dispositif proposé par cet amendement.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement partage cet avis : la loi sur Paris, Marseille et Lyon mérite d'être revisitée. Mais le Gouvernement ne veut pas qu'on puisse avoir le sentiment qu'à l'occasion de la loi de décentralisation il prend une revanche sur les élections qu'il a perdues, à Lyon ou à Paris. De même, Monsieur Dutoit, il souhaite qu'à Marseille aussi vous puissiez trouver un accord avec la majorité. Le Gouvernement n'est pas hostile à l'idée de procéder, au Sénat ou en deuxième lecture, à une modernisation de la pratique des mairies d'arrondissement, mais les différentes sensibilités doivent se rapprocher pour parvenir à une sorte de consensus. Vos amendements ne sont donc pas nécessairement mauvais, mais ils sont prématurés, et c'est pourquoi j'y suis défavorable.

L'amendement 1246, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - Je note, Monsieur le ministre, que vous ouvrez la porte à une réflexion sur Paris, Marseille et Lyon. Pour ma part, comme député de Marseille et maire d'arrondissement, je n'ai aucun problème particulier. Il me semble simplement que dans ces trois villes, quelles que soient les majorités, nous pouvons faire un pas de plus dans le sens de la proximité, que je préfère appeler démocratie interactive, et pour combler le hiatus avec les textes aujourd'hui en vigueur. A Marseille, le maire nous a généreusement permis de disposer, dans les communes de la communauté urbaine comme dans les mairies d'arrondissement, des rapports de la communauté urbaine ; mais ce n'est que de l'information. Les mairies d'arrondissement, qui sont pourtant en contact constant avec les citoyens, sont dans l'impossibilité de leur donner des réponses concrètes et de peser sur les décisions.

C'est pourquoi cet amendement vise à améliorer la procédure de consultation des conseils d'arrondissement sur les projets de délibération concernant les affaires dont l'exécution est prévue dans les limites de l'arrondissement.

L'amendement 1247, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1248 vise à étendre aux EPCI la procédure de consultation des conseils d'arrondissement sur le montant des subventions attribuées aux associations, à l'instar de ce qui existe déjà dans le cadre communal.

A la majorité de 19 voix contre 2 sur 21 votants et 21 suffrages exprimés, l'amendement 1248 n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1249 est défendu.

A la majorité de 17 voix contre 2 sur 19 votants et 19 suffrages exprimés, l'amendement 1249 n'est pas adopté.

M. le Président - Sur le vote de l'amendement 1254, je suis saisi par le groupe des députés communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1250 institue une procédure de conciliation en cas d'avis défavorable d'un conseil d'arrondissement sur un projet de délibération du conseil municipal, sur le montant de subventions que celui-ci propose d'attribuer ou sur les projets relatifs au PLU.

L'amendement 1250, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1251 précise les dispositions du CGCT relatives à la gestion des équipements de proximité par les conseils d'arrondissement.

L'amendement 1251, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1252 institue une commission mixe paritaire communale et des CMP d'arrondissement pour mettre en _uvre la nouvelle procédure de conciliation.

L'amendement 1252, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1253 vise à répondre un problème récurrent en donnant aux conseils d'arrondissement la faculté de passer des marchés publics sans formalités préalables.

L'amendement 1253, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1254 vise à permettre la création de plusieurs CICA par arrondissement et à permettre aux habitants de l'arrondissement d'en devenir membres aux côtés des représentants des associations.

A la majorité de 19 voix contre 2 sur 21 votants et 21 suffrages exprimés, l'amendement 1254 n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1255 permet au maire d'arrondissement de donner délégation de signature aux responsables de sa mairie, à l'instar des dispositions existantes pour les maires de Paris, Marseille et Lyon.

L'amendement 1255, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1256 vise à améliorer l'information du maire d'arrondissement, chargé de donner un avis sur tous les permis de construire de l'arrondissement, sur les demandes d'utilisation du sol et sur les déclarations d'intention d'aliéner présentées pour des immeubles de l'arrondissement.

L'amendement 1256, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - L'amendement 1257 apporte une précision rédactionnelle.

L'amendement 1257, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit - Le dernier amendement tombe. Mais M. le ministre peut-il préciser dans quel délai la réflexion sur l'évolution du dispositif PML, qui intéresse des millions de Français, pourrait s'ouvrir ?

M. le Ministre délégué - Cela peut intervenir dans la navette. Il vous suffit de vous mettre d'accord !

M. Michel Piron - L'amendement 1177 est défendu.

L'amendement 1177, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, vendredi 5 mars, à 9 heures 30.

La séance est levée à 1 heure 40.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 5 MARS 2004

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 1218), relatif aux responsabilités locales.

M. Marc-Philippe DAUBRESSE, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

(Rapport n° 1435.)

M. Dominique TIAN, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

(Avis n° 1434.)

M. Serge POIGNANT, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

(Avis n° 1423.)

M. Laurent HÉNART, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

(Avis n° 1432.)

2. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 1436), portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en _uvre certaines dispositions du droit communautaire.

M. Guy GEOFFROY, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

(Rapport n° 1456.)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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