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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 21ème jour de séance, 50ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 9 NOVEMBRE 2004

PRÉSIDENCE de M. Yves BUR

vice-président

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2005
      -deuxième partie- (suite) 2

      OUTRE-MER (suite) 2

      QUESTIONS 27

      ORDRE DU JOUR DU MERCREDI 10 NOVEMBRE 2004 32

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2005 -deuxième partie- (suite)

OUTRE-MER (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de l'examen des crédits de l'outre-mer.

Mme Christiane Taubira - La discussion budgétaire est un exercice habituellement sans surprise mais ce n'est le cas cette année puisque l'un des rapporteurs, M. Alain Rodet, a osé écrire que ce budget baisse de 86 millions, soit de 7,6%. Selon le rapport, cette baisse s'explique par deux ajustements, l'un concernant le fonds sur l'emploi, l'autre la CMU complémentaire. Comment dès lors proclamer que l'emploi en outre-mer est une priorité gouvernementale ? Le chômage ne cesse d'augmenter, sans compter le nombre de ceux qui, dans le cadre de ce que l'on appelle l'« économie informelle », inventent tous les jours des moyens de survivre sans le secours de l'Etat. Je ne doute pas que le Gouvernement s'expliquera sur la baisse de 130 millions de la dotation du fonds pour l'emploi dans les DOM.

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer - Absolument.

Mme Christiane Taubira - Mais le rituel s'accomplit néanmoins et certains députés vous abreuvent de félicitations sans considération pour ceux qui sont broyés par un système éducatif inadapté, un dispositif de santé publique fortement dégradé, une insuffisance chronique de logements et, en Guyane, un territoire enclavé qui empêche le désengorgement des villes et favorise l'accès des seules multinationales aux ressources naturelles.

S'agissant du passeport mobilité, 4 868 étudiants sont concernés en outre-mer sur 1,8 million de personnes, dont 50% ont moins de vingt ans. Le rapporteur fait état de 10 600 passeports en incluant les jeunes partis en formation et à la recherche d'un premier emploi. Pourquoi pas, mais le chiffre demeure dérisoire et il est indécent de s'en vanter.

Quant à la dotation logement, qui n'a pas cessé de progresser jusqu'en 2002, elle stagne en AP et régresse en CP. 7 774 logements ont été construits en 2004 alors que pour la seule Guyane, ce sont 6 000 logements par an qui seraient nécessaires. Votre passeport logement, annoncé à grand renfort de conférences de presse, ne comprendra que 800 places pour un coût total de 500 000 euros.

En outre, s'agissant de la dotation de continuité territoriale, il est indécent de claironner un montant de 31 millions quand le dispositif n'est même pas en place en Guyane.

Enfin, concernant l'insécurité, les opérations « anaconda » ne sont que de la poudre aux yeux. Je note d'ailleurs que tous les journalistes ne sont pas les bienvenus, comme si nous étions revenus au temps d'un service public audiovisuel aux ordres.

Je pourrais évoquer l'inconsistance de ce budget, les ambitions affichées pour le développement durable en zone intertropicale, la réforme du code forestier, l'arbitraire concernant le choix des équipements ruraux, mais également les risques, pour l'outre-mer, du projet de traité constitutionnel. Comme nous aurons l'occasion de revenir sur ces questions dans le cadre des débats de la commission nationale d'orientation, je préfère insister sur la conception que vous vous faites de l'outre-mer.

Plus que des territoires, ce que vous appelez l'outre-mer ou « les outre-mer », ce sont d'abord des cultures et des histoires. Ces dernières années, Madame la ministre, nous vous avons vu déconcertée et, ces dernières semaines, exaspérée. Pourtant, tout avait bien commencé : en début de législature, vous ne tarissiez pas d'éloges et proclamiez que l'outre-mer était la chance de la France et ses ressortissants des Français à part entière. Mais vous n'arrivez pas à admettre notre exaspération : nous en avons assez des discriminations et des escroqueries d'Etat sur la créance de proratisation, le salaire minimum, l'indemnité d'éloignement et les allocations familiales.

outre-mer, nous prenons les mots au sérieux : nous croyons à la liberté car nous n'avons jamais cessé de la conquérir, là-bas contre l'esclavage, le déracinement, le mépris de nos langues, ici avec des célébrités comme Félix Eboué ou des milliers d'anonymes. Nous croyons à l'égalité car nous sommes passionnés de justice. Nous croyons à la fraternité car notre histoire nous dispose à accueillir les différences. Nous croyons à la citoyenneté et nous entendons exercer nos droits aussi pleinement que nous accomplissons nos devoirs. Nous croyons à la démocratie qui est le règne du droit et nous sommes soucieux de protéger les plus vulnérables. Nous croyons enfin à la République parce que nous pensons que seul le souci de l'intérêt général assure l'épanouissement de tous. Nous avons en revanche des préventions ataviques à l'endroit de la soumission, de la docilité, de la servilité. Nous avons confiance en nous parce que nous connaissons nos succès et nos talents.

A ce propos, je rends hommage à Béatrice Vernaudon qui a fait preuve de courage moral et politique en sacrifiant ses intérêts partisans pour les intérêts supérieurs de la Polynésie : nous sommes fiers d'elle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) Ce gouvernement a choisi de laisser pourrir la situation en Polynésie. Il prétend que les institutions ne sont pas bloquées alors que les services administratifs sont désemparés par les ordres et les contre-ordres. En ce moment même, une grève générale vient d'être lancée en Polynésie : 2 000 salariés sont mobilisés pour une marche pacifique dans les rues de Papeete. Cessez donc de jouer avec le feu en faisant du juridisme face à une crise qui menace la démocratie. Seule la dissolution de l'assemblée de Polynésie permettra à la justice de l'emporter.

Il y a plus de soixante ans, Frantz Fanon écrivait : « Ceux qui aiment les nègres sont aussi malades que ceux qui les détestent ». Par-dessus tout, nous partageons une exigence : le respect. Nous ne le demandons pas, nous ne le quémandons pas. Nous l'exigeons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Louis-Joseph Manscour - Le projet de budget 2005 pour l'outre-mer est en baisse, nul ne peut le nier, et vous avez vous-même reconnu, Madame la ministre, le caractère artificiel de l'augmentation de ses crédits. Les chiffres sont comme les sacs, ils prennent la forme de ce que l'on y met ! Mais nos populations ultramarines ont une lecture lucide des politiques de l'Etat. Avec leur simple bon sens, elles savent lorsqu'elles bénéficient ou non d'une politique volontariste et progressiste. Elles ne peuvent être trompées, ni par des effets d'annonce, ni par des artifices de présentation. Nos compatriotes ne sont donc pas dupes.

Bien que votre projet de budget ne représente que 18% de l'effort national en faveur de l'outre-mer, il devrait néanmoins refléter les priorités que le Gouvernement a définies, à savoir l'emploi et le logement. Or, il n'en n'est rien.

En matière d'emploi, première préoccupation des Domiens, force est de constater que le FEDOM accuse cette année une baisse historique de 32%. Et cela au moment où des milliers de travailleurs perdent leur emploi ou sont menacés de le perdre dans des secteurs tels que l'agriculture, touchée fortement par la crise de la banane, ou le tourisme, confronté à une conjoncture néfaste depuis deux ans. Que de personnes en situation dramatique ! Vous justifiez cette baisse par une sous-consommation des crédits, mais ce faisant, vous confondez, Madame la ministre, l'effet et la cause. Nombreux sont, en effet, les demandeurs d'emploi qui, souhaitant bénéficier d'une formation ou d'une aide à la création d'activité, se sont vu refuser ces financements par les Directions départementales du travail et par l'ANPE, faute de crédits suffisants. De plus, si crédits non utilisés du FEDOM il y a, ne conviendrait-il pas de les réaffecter à d'autres mesures en faveur de l'outre-mer afin de répondre aux attentes de nos compatriotes en grande difficulté ?

L'an dernier, lors de la discussion budgétaire, vous annonciez que vous alliez remplacer les emplois aidés par des emplois marchands. Nous avons bien assisté à la suppression des emplois-jeunes, mais les créations d'emplois marchands n'ont pas suivi. En tout état de cause, les résultats ne sont pas à la hauteur des 700 millions d'exonérations de cotisations sociales, qui profitent essentiellement aux entreprises.

Vous me répondrez sans doute que les crédits inscrits au budget de l'outre-mer ne sont pas les seuls que l'Etat consacre à l'emploi dans les DOM. C'est bien là ce qui m'inquiète, car les crédits affectés par le ministère de l'emploi et celui de l'économie dans les DOM sont également en baisse significative pour 2005.

Le constat est le même pour le logement : alors qu'il s'agit, paraît-il, d'une priorité pour le Gouvernement, vous prévoyez pour la Ligne Budgétaire Unique 2005 la même somme qu'en 2004, soit 173 millions d'euros. Or, nous savons trop bien que les crédits logement de l'outre-mer ont fait l'objet, durant ces dernières années, de gels et d'annulations, qui mettent les opérateurs de l'habitat social dans une situation bien délicate.

Mais le manque de crédits ne concerne pas seulement le logement et l'emploi, il touche à toutes les mesures afférentes à la solidarité nationale envers l'outre-mer. On peut ainsi déplorer la baisse de 15,6 millions des fonds affectés à la CMU et la diminution de 24% des crédits des offices de l'eau, au moment même où la Martinique rencontre, à cause des pesticides, des problèmes importants en matière de pollution des eaux.

Quant au passeport mobilité, ses résultats sont mitigés. Trop peu de jeunes bénéficient de cette aide, qui s'avère très ciblée et si restrictive que nombre de familles hésitent à affronter, pour une issue aléatoire, un véritable parcours du combattant. Les demandes de passeport logement se heurtent également à bien des difficultés.

Je m'inquiète également, Madame la ministre, de certaines tentatives de remise en cause de droits acquis pour les DOM - je pense au dispositif de la TVA non perçue récupérable, institué pour les entreprises, ou aux congés bonifiés, qui assurent une forme de continuité territoriale.

A cet égard, la discussion budgétaire est l'occasion de rappeler, sans verser dans la polémique, la discrimination qu'applique le Gouvernement en ce domaine. Si l'on ne peut que se féliciter de la mesure visant à assurer la continuité territoriale entre l'outre-mer et la métropole, il convient de s'interroger sur les modalités de financement de cette mesure et de s'offusquer de son insuffisance.

Madame la ministre, vous avez vous-même reconnu que le système n'était pas satisfaisant en 2004. Assurément ! Alors qu'en Corse et dans les régions ultrapériphériques européennes, le principe de continuité territoriale se manifeste naturellement par des moyens importants finançant un véritable service public, qui bénéficie à tous les voyageurs, résidents ou non, et au fret, il revêt, lorsqu'il s'applique à l'outre-mer, l'aspect d'une dotation : réduction du prix d'un seul billet d'avion par an et par personne résidant outre-mer. La hausse du pétrole que nous connaissons actuellement suffit à limiter considérablement les avantages découlant de cette réduction.

Pour 2005, la Corse touchera au titre de la continuité territoriale près de 174 millions d'euros pour 260 000 habitants, alors que l'outre-mer ne percevra que 31 millions pour près de 2,5 millions d'habitants !

Mme Christiane Taubira - C'est dérisoire ! Et insultant !

M. Victor Brial, rapporteur spécial de la commission des finances - Avant, c'était zéro !

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des lois - Et 31, c'est mieux que zéro !

M. Louis-Joseph Manscour - Pour combler ce manque, le Gouvernement demande aux régions et à l'Union européenne de prendre en charge une partie de la continuité territoriale, ce qui n'est nullement demandé à la Corse. En faisant cette demande à nos régions, vous les obligez à créer de nouvelles charges pour les contribuables domiens. On comprend qu'elles se montrent réticentes et qu'elles refusent de cautionner un système qui les rendrait complices de mesures discriminatoires à notre propre endroit.

Au vu de tous ces éléments et de la baisse de 23% des moyens de vos services, je doute fort, Madame la ministre, que le Gouvernement puisse respecter les engagements pris par le Président de la République en faveur du développement économique et social durable de l'outre-mer. Vous nous présentez votre troisième projet de budget. Je suis au regret de vous dire qu'ils reproduisent tous le même schéma : effets d'annonce et promesses, gels et annulations de crédits, manque d'ambition. Vous semblez appliquer les maîtres mots de votre Premier ministre : « confiance et patience ». Mais, Madame la ministre, en outre-mer comme partout ailleurs, la confiance ne s'octroie pas, elle se mérite. Votre projet de budget ne mérite pas ma confiance, souffrez donc que je vous dise que je ne le voterai pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Eric Jalton - Je ne polémiquerai pas sur la question de savoir si le budget de l'outre-mer est en augmentation ou en diminution, selon le périmètre retenu, d'autant qu'aucune règle ne dit qu'un budget en baisse est forcément mauvais, et qu'en outre ce budget ne représente que 17% des crédits que l'Etat consacre aux territoires ultramarins - sans compter les concours financiers de l'Union européenne. A ce sujet, il nous faudra d'ailleurs veiller à ce que l'évolution de l'Union n'entraîne pas un affaiblissement des aides apportées à nos régions.

Le niveau d'exécution de vos budgets et de consommation des crédits afférents étant ascendant, Madame la ministre, je ne peux que vous encourager à poursuivre dans cette voie.

Néanmoins, en matière d'emploi, objectif prioritaire de votre budget, les indicateurs socio-économiques sont très contrastés. La Guadeloupe est le département français d'Amérique qui a le plus fort taux de chômage et le département de France qui a la plus forte proportion d'emplois non déclarés. Dans de nombreux secteurs, en particulier le BTP, les effets de la loi de programme tardent à venir. Nous attendons avec impatience le premier rapport triennal d'évaluation de l'impact des exonérations de sécurité sociale ; en attendant, est-il judicieux de se désengager brutalement en matière d'emplois aidés dans le secteur non marchand ?

Plus de la moitié des chômeurs guadeloupéens sont des chômeurs de longue durée, très souvent faiblement diplômés. Quel a été l'impact en Guadeloupe du dispositif des contrats jeunes en entreprise adopté en 2002 ? Ne peut-on pas inciter davantage les entreprises à jouer le jeu des contrats aidés en alternance ? Quelles mesures peut-on prendre pour inciter les demandeurs à s'inscrire à l'ANPE, afin notamment de faciliter l'accès des chômeurs de longue durée à une formation professionnelle ? Pouvez-vous nous assurer que les dispositions en faveur de l'emploi prises dans le plan national de cohésion sociale seront mises en application outre-mer, et singulièrement en Guadeloupe ?

S'agissant du logement social, deuxième axe prioritaire de votre budget, j'aimerais en savoir davantage sur le dispositif des prêts sociaux location-accession, qui va être mis en place en 2005 ; je suis pour ma part très attaché à l'accession sociale à la propriété.

Concernant la continuité territoriale, nous prenons acte que le dispositif est d'ores et déjà opérationnel en Guadeloupe, mais nous attendons évidemment, à défaut d'un dispositif plus performant, une révision régulière des dotations.

Nous nous réjouissons que le passeport mobilité ait été élargi à l'Union européenne et à certains déplacements à caractère sportif, et que l'avance des frais ait été en principe supprimée. Nous devons veiller à rendre ce dispositif de plus en plus opérationnel.

Nous saluons également le « passeport logement », mais nous souhaiterions en savoir plus sur ce dispositif encore expérimental.

Enfin, Madame la ministre, sachez qu'après la sauvegarde de l'octroi de mer et la révision du FRDE, les communes de Guadeloupe attendent avec impatience la révision des modes de calcul et de répartition des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales d'outre-mer. La dotation spécifique de l'outre-mer, si elle se concrétise, sera la bienvenue. Nous comptons sur vous pour ne pas oublier les engagements que vous avez pris devant la représentation nationale le 4 juin dernier pour compenser par des mesures spécifiques les handicaps des îles du Sud de la Guadeloupe. Nous comptons également sur vous pour continuer à défendre auprès des autorités nationales, européennes et internationales nos économies agricoles fragiles ; la loi de modernisation agricole sera l'occasion de jauger la volonté gouvernementale dans ce domaine.

Pour conclure, permettez-moi de vous solliciter solennellement pour qu'ensemble et sans a priori, nous nous intéressions de plus près aux conditions de fonctionnement de la police, de la gendarmerie et de la justice en Guadeloupe. Il y va du crédit de la démocratie car le silence ou l'inertie des autorités sur certaines affaires poussent trop de Guadeloupéens à se poser des questions, à tort ou à raison. Le sentiment désagréable qui prévaut depuis longtemps est celui d'un Etat de droit à plusieurs vitesses, ce qui ne peut que faire le lit des extrémismes et des égarements de toutes sortes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Philippe Edmond-Mariette - Nous voici arrivés au moment de faire le bilan de la politique conduite outre-mer. Force est de constater que ce budget est en diminution, mais vous nous avez dit et répété, Madame la ministre, que l'important était d'avoir les moyens de sa politique et de garantir sa parfaite exécution.

Mais alors pourquoi observe-t-on, dans les deux domaines prioritaires que sont l'emploi et le logement, des gels et parfois même des suppressions de crédits ?

En matière d'emploi, les statistiques peuvent être trompeuses car nombre de érémistes ne sont pas inscrits à l'ANPE. De plus, la durée moyenne du chômage est particulièrement longue outre-mer. Alors, pourquoi une réduction de 90 millions du FEDOM ?

Il nous faudra, nous élus de l'outre-mer, nous battre pour prendre toute notre part dans le plan de cohésion sociale, et notamment obtenir la mise en place des maisons de l'emploi et la création de plates-formes « vocationnelles », afin que nos territoires ne soient pas, comme au moment de la création de 41 zones prioritaires de M. Borloo, les oubliés de la République.

Pour le logement, certes nous constatons des efforts. Mais que se passe-t-il avec la LBU, spécialement en Martinique, qui enregistre le plus faible taux de LBU par habitant depuis cinq ans ? Les gels sont très importants, et si les crédits de paiement ne sont pas débloqués dans les tout prochains jours, Madame la ministre, les constructeurs et promoteurs vont déposer leur bilan !

L'inquiétude grandit avec l'élargissement de l'Europe. La loi modifiant l'octroi de mer est excellente, mais aujourd'hui, sur la scène européenne, le Premier ministre doit à vos côtés défendre les RUP et obtenir les dérogations rendues nécessaires par notre géographie et l'étroitesse du marché. Ce soutien du Gouvernement est indispensable, notamment pour la banane et pour la filière rhum-sucre-canne.

De plus, la Martinique doit rester dans l'objectif 1 et, à ce titre, être éligible encore pour longtemps aux fonds structurels, tout en bénéficiant des aides d'Etat à finalité régionale. Il y a là une obligation morale car la France des trois océans enrichit l'Europe et permet son rayonnement.

C'est d'ailleurs pourquoi le désenclavement de l'outre-mer s'impose. D'abord par un transport aérien digne de ce nom et par des obligations de service public imposées aux compagnies. Ensuite en matière de technologie de l'information et de la communication, les prix des abonnements à Internet étant prohibitifs outre-mer. Quelles suites a-t-on données à l'engagement interministériel concernant le projet d'extension du câble Americas ? Enfin à l'échelle locale, par la mise en place d'une autorité régulatrice du transport maritime.

Je ne peux terminer sans évoquer deux séries de menaces qui pèsent sur les ultramarins. La première concerne l'exonération de TVA, le refus de verser aux fonctionnaires les indemnités d'éloignement, la remise en cause des points de bonification dans l'éducation nationale. L'autre concerne le trafic de drogue : pouvons-nous admettre que les dispositifs soient davantage tournés vers la protection des côtes européennes que vers celle des rivages des départements français d'Amérique ?

L'an dernier déjà Madame la ministre, je disais « non » au poker budgétaire au détriment des ultramarins. Votre audition en commission des finances du Sénat a jeté le trouble sur la volonté gouvernementale. Votre majorité choisit-elle l'outre-mer pour faire preuve d'indépendance et attaquer certains dispositifs spécifiques ?

Nous sommes mardi, mais pas le mardi-gras... Alors faisons tomber les masques ! Pouvez-vous nous assurer, Madame la ministre, qu'il n'est plus question de remettre le couvert, que nous n'aurons pas une TVA sucrée, une surrémunération si mince qu'elle pourrait disparaître et des discriminations financières qu'aucun élu de votre majorité n'admettrait pour sa région ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Michel Buillard - Malgré un contexte difficile, Madame la Ministre, vous avez su obtenir du Premier ministre que la Polynésie bénéficie d'un soutien budgétaire accru et nous vous en sommes reconnaissants. Les indépendantistes ont beau colporter des rumeurs de désengagement de l'Etat, notre collectivité continuera de percevoir les dotations du FIDES et du FIP. En outre, le gouvernement s'emploie à rattraper les retards de paiement au titre de l'ancien fonds de reconversion devenu la DGDE ainsi que du RST (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Je rappelle d'ailleurs que vous vous y étiez déjà engagée auprès du gouvernement Temaru et c'est pourquoi le procès que certains vous intentent est injuste : au contraire, vous essayez par tous les moyens de combler les retards accumulés par les gouvernements socialistes. Mieux : les engagements pris par le Président de la République sont tenus : la DGDE en 2002, le passeport mobilité en 2003 - 650 de nos jeunes en ont déjà profité -...

Mme Christiane Taubira - Aucun n'en voulait !

M. Michel Buillard - ...et, en 2004, la continuité territoriale. Cela, ce n'est pas M. Paul, mais le Président de la République et Brigitte Girardin !

Un autre procès d'intention vise les élus que nous sommes, au sujet de l'utilisation des fonds publics (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). La Polynésie française est une collectivité décentralisée de la République. Elle est assujettie aux mêmes contrôles que toutes les autres. (Mêmes mouvements). Laissez-moi parler, Madame Taubira, je suis un élu d'outre-mer comme vous ! Et je tiens à dire le sentiment de révolte que j'éprouve à entendre les accusations qui ont été lancées de cette même tribune contre le gouvernement Flosse. Je vous invite à consulter le document établi par un expert indépendant pour la période 1992-2002 : il y est fait état d'une croissance de 4% par an pendant dix ans et d'un taux de chômage qui fera sans doute bien des envieux dans le reste de l'outre-mer : 12% !

M. Christian Paul - Acceptez donc une commission d'enquête !

M. Michel Buillard - Pardonnez-moi si mes propos sont quelque peu excessifs mais, je le répète, c'est la révolte qui gronde en moi. Je ne puis laisser passer les accusations proférées contre M. Flosse et, à travers lui, contre la Polynésie et tous ses élus. Comment n'être pas révolté, par exemple, quand on entend soutenir que M. Flosse aurait fomenté un assassinat ? De la violence verbale, maintenant, on passe peu à peu aux voies de fait... Cependant, qu'a fait M. Temaru, lui ? Je vous invite à prendre vos distances avec ce monsieur ! Interrogez donc MM. Tefarere et Terorotua ! Ce sont eux qui ont fait chuter le gouvernement Temaru...

M. Louis-Joseph Manscour - Ils ont été achetés !

M. Michel Buillard - Interrogez-les donc sur le rôle qu'ils ont joué dans les événements de 1995 - incendie de l'aéroport et de la ville de Papeete dont il a fallu reconstruire des quartiers entiers. Voilà ce qu'ont produit les manœuvres de l'ami avec qui vous dînez ce soir ! M. Temaru a une grande part de responsabilité dans les événements de 1987, 1991 et 1995 ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Christiane Taubira - On est en 2004 !

M. Michel Buillard - Je veux ici rétablir la vérité et, si j'y parviens, j'aurai contribué à une meilleure information de la représentation nationale et du peuple français qui nous écoute !

Merci, Madame la ministre, pour le travail que vous fournissez au service de la Polynésie française ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Eric Raoult - Il a touché où cela fait mal !

M. Pierre Frogier - Depuis de longues années, mes chers collègues, nous soutenez la Nouvelle-Calédonie dans le travail qu'elle a entrepris pour surmonter ses antagonismes internes et pour relever le pari de l'intelligence. Dans cette Assemblée, ensemble, nous avons su, des accords de Matignon à aujourd'hui, faire, comme l'a écrit Jacques Lafleur, « les bons choix pour la Nouvelle-Calédonie dans la bonne politique pour la France ».

Madame la ministre, je tiens aussi à saluer la continuité, la justesse, la sincérité de votre action en faveur de l'outre-Mer français. Ce projet de budget en porte, une nouvelle fois, la marque malgré la conjoncture.

Vous savez l'attention que je porte à l'enseignement privé. Je me réjouis qu'aujourd'hui même se tienne une réunion ministérielle sur la question des retraites et des validations de service : j'y vois l'aboutissement de démarches engagées depuis deux ans. Mais je vous remercie également d'avoir accepté, avec M. Lamour, de pérenniser l'aide spécifique à la mobilité des sportifs, en application du protocole d'accord que nous avons signé, il y a un an, à Nouméa.

Cependant, d'autres dossiers restent en suspens : le financement de la construction des collèges et l'organisation de la transition entre les contrats de plan qui s'achèvent et ceux qui vont débuter en 2006. Je sais toutefois que vous vous employez à résoudre ces problèmes et je mesure pleinement les difficultés budgétaires à surmonter.

Je suis conscient également que votre action ne se résume pas à ce projet de budget. Ces dernières semaines sont venues plusieurs mesures que nous appelions de nos vœux : je pense par exemple au traitement du surendettement des ménages et au projet de loi autorisant l'adhésion à la convention relative à la conservation et à la gestion des stocks de poissons grands migrateurs dans le Pacifique occidental et central.

Par ailleurs, INCO a annoncé, après vingt-deux mois de suspension, la reprise de la construction de son usine de nickel et de cobalt dans le sud de la Grande Terre : décision capitale pour toute la Nouvelle-Calédonie car Goro Nickel est un chantier exceptionnel, de dimension mondiale et qui va créer des milliers d'emplois au profit de notre jeunesse. La réalisation de ce fabuleux projet vient récompenser les efforts inlassables de Jacques Lafleur mais nous sommes conscients aussi de ce qu'elle doit à l'aide de l'Etat et à la généreuse défiscalisation décidée par le Président de la République lors de sa venue, en juillet 2003.

Le soutien du Chef de l'Etat va également à l'usine du Nord, un autre projet métallurgique dont nous espérons qu'il pourra également se concrétiser dans les prochains mois.

Du point de vue institutionnel, la Nouvelle-Calédonie est entrée depuis le 9 mai dans une période d'instabilité : les élections aux assemblées de province et au Congrès l'ont privée d'unité et d'une majorité politique cohérente et stable. Cette situation suscite, chez nos compatriotes, interrogations et inquiétudes. Elle fragilise les équilibres issus de l'accord de Nouméa et remet en cause les conditions du développement.

Bien que le Rassemblement, signataire de l'accord de Nouméa, demeure, au sortir de ces élections, le premier parti de Nouvelle-Calédonie, il a été exclu de toutes les responsabilités par une coalition hétéroclite qui va du Front national aux indépendantistes les plus dogmatiques, et cela à l'initiative d'un parti monté de toutes pièces par des dissidents du Rassemblement et le représentant local de l'UDF. Cette coalition contre nature s'efforce de construire une unité factice sur l'exclusion et l'éloignement de la France. Ainsi, nos compatriotes métropolitains résidant depuis moins de dix ans en Calédonie, seront privés de l'aide à la continuité territoriale financée par le contribuable français ! Pis : on nous annonce, sous prétexte de protéger l'emploi local, des mesures draconiennes et discriminatoires pour l'entrée dans la fonction publique territoriale. Et je ne parle pas de l'instauration d'une « carte d'identité du citoyen calédonien ». Tout cela est en totale rupture avec l'esprit de l'Accord de Nouméa !

C'est dans ce contexte que la visite à Nouméa de votre collègue du tourisme a suscité de vives réactions parmi les parlementaires calédoniens. Il nous semble en effet qu'il aurait dû se montrer plus attentif à nos préoccupations plutôt que de répondre de manière précipitée à une invitation inopportune.

L'accord de Nouméa, que vous avez soutenu de manière quasi unanime, est innovant et exemplaire, mais il repose aussi sur des équilibres fragiles et sur des concessions réciproques. Je compte donc sur votre vigilance et votre soutien. En attendant, et pour les mêmes raisons, je voterai votre budget, Madame la ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Grignon - Dans un contexte budgétaire difficile, vous nous proposez une enveloppe de 1,7 milliard d'euros dont l'essentiel - 1,15 milliard - doit aller à la politique de l'emploi. Ces crédits venant du ministère du travail permettront de tenir les objectifs fixés dans la loi-programme, dans des conditions d'efficacité et de clarté accrues. Il me paraît donc inutile de polémiquer : ce budget est un bon budget - et il ne correspond au reste qu'à 15% des actions de l'Etat en faveur de l'outre-mer.

J'utiliserai le très court temps de parole dont je dispose pour traiter de sujets essentiels pour Saint-Pierre-et-Miquelon.

J'appelle votre attention sur les difficultés que rencontrent les collectivités locales. Le sénateur-maire de Miquelon, ne manquera pas de vous faire part de ses préoccupations et j'ai, pour ma part, déjà évoqué avec vous celles de la commune de Saint-Pierre et de la collectivité territoriale. Différentes réunions ont eu lieu à ce sujet courant 2004 au ministère de l'outre-mer. Des engagements ont été pris concernant le financement de gros chantiers dans les travaux et bâtiments publics. Pourriez-vous faire le point sur la concrétisation des ces engagements, les appréciations des responsables locaux et du représentant de l'Etat divergeant parfois ? Les collectivités locales ne pourront pas s'en sortir sans revalorisation substantielle des diverses dotations de décentralisation ni sans que le compteur de la dette de l'archipel soit remis à zéro. Il faut rappeler qu'il fut nécessaire d'emprunter après que la France eut perdu devant le tribunal arbitral sur les frontières maritimes à New York et qu'un moratoire eut été décidé sur la pêche à la morue en 1993. J'ai déposé une proposition de loi qui devrait permettre de trouver des solutions.

Cela est indispensable car le moral n'est pas bon à Saint-Pierre-et-Miquelon. Le BTP va mal, le commerce et l'artisanat également. Licenciements économiques, fermetures d'établissements, baisses considérables des chiffre d'affaires, hausse des coûts du transport, chute des recettes douanières et fiscales, difficultés bancaires dues à l'absence de toute concurrence, émigration de plus en plus importante : le tableau est sombre. Certes, tout cela tient beaucoup à la politique locale, ou plus exactement à l'absence de politique locale qui a trop longtemps prévalu. Mais les mesures précédemment citées seront indispensables à la nouvelle équipe qui aura le courage de prendre en charge la destinée de l'archipel pour redonner espoir à sa population. Au-delà de mesures budgétaires, une volonté politique ferme dans certains domaines relevant de la politique étrangère de la France est également nécessaire.

On le sait, la stratégie actuelle des grandes compagnies pétrolières met à mal les politiques budgétaires. A Saint-Pierre-et-Miquelon, les premières victimes en sont les familles à faibles revenus et les retraités les plus modestes dont les dépenses de chauffage, surtout durant nos hivers très rigoureux, explosent, suite à l'augmentation du prix du fuel domestique. Non contentes de ces profits, les compagnies étranglent également notre zone économique exclusive autour de notre archipel. Les gouvernements de la Nouvelle-Ecosse et de Terre-neuve viennent en effet d'accorder un permis d'exploitation pétrolière à la société Conoco Phillips sur sept millions d'acres, répartis en dix secteurs, prenant presque totalement en tenaille l'étroit couloir de la zone exclusive. Cette société nord-américaine a vu son permis d'exploration reconduit dans la zone française sans obligation de forage mais seulement quelques obligations de dépenses locales, bien floues. Madame la ministre, le Gouvernement peut-il influer un tant soit peu sur les agissements des compagnies pétrolières ? Quelles sont les obligations exactes de Conoco Phillips à l'égard de notre pays ? Quels moyens et quels garde-fous sont prévus ? Est-il envisageable d'inciter une compagnie pétrolière française à s'intéresser à cette partie du monde ? Où en sont les négociations avec le Canada sur l'exploration et l'exploitation des ressources d'hydrocarbures transfrontalières au large de Saint-Pierre-et-Miquelon ? Où en est le cahier des charges qui devait être adopté par décret en Conseil d'Etat et transférer au conseil général les compétences en matière de gestion des ressources du sous-sol marin ? De manière plus générale, la France a-t-elle la ferme intention, comme le Canada l'a fait avant elle, de revendiquer sa juridiction sur le plateau continental au-delà des 200 milles marins ? Je me sens un peu seul dans ce combat, auquel personne ne semble croire.

Dans le contexte économique et social actuel de l'archipel, l'avenir de la protection sociale intéresse tout particulièrement les habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon. Notre législation accuse en ce domaine un important retard. J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec vos collègues du Gouvernement chargés de ces questions au sujet du futur décret devant établir le régime d'invalidité dans l'archipel, de celui devant mieux coordonner les régimes de protection sociale local et métropolitaine, de l'application à Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions de la réforme des retraites - comme le calcul sur les 25 meilleures années ou la possibilité de départ anticipé pour ceux qui ont commencé à travailler jeunes -, des décrets relatifs à l'amélioration de la situation des handicapés, de la réforme des prestations familiales -sur ce dernier point, j'ai remis un projet d'ordonnance à Mme Roig. J'avoue qu'il est irritant pour un parlementaire de devoir inlassablement revenir sur des problèmes non résolus du fait des lenteurs, quand ce n'est pas de la mauvaise volonté, des administrations centrales vis-à-vis de l'outre-mer. Où en sont tous ces dossiers ?

Je conclurai en évoquant la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon et l'affaire du Shamrock. L'armateur de ce navire a longtemps bénéficié du monopole de la desserte de l'archipel et perçu, à ce titre, des subventions de l'Etat. Ses diverses sociétés ont aujourd'hui déposé le bilan, son navire est immobilisé depuis juillet, avec son équipage, par la justice américaine à Portland. Les premières victimes de cette lamentable affaire sont les marins de Saint-Pierre-et-Miquelon, dont une partie avait été licenciée en mai 2002 et l'autre ne subsiste aujourd'hui que grâce aux secours d'une association. Mais les contribuables font aussi les frais de cette situation. Les subventions de l'Etat en matière de desserte maritime ou aérienne ne sont pas des rentes de situation attribuées au profit des responsables des sociétés détentrices d'un monopole. L'argent des contribuables doit être utilisé dans l'intérêt général. Je souhaite donc qu'un audit soit diligenté sur l'utilisation de ces subventions publiques dans les dernières années. Un contrôle très rigoureux devra également être prévu lors de la prochaine délégation de service public relative à cette desserte et la plus grande attention portée au sort des marins victimes de cette affaire.

Ces observations faites, j'apprécie, Madame la ministre, votre ténacité dans la défense de l'outre-mer et je voterai votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Mansour Kamardine - Je salue la présence parmi nous, à cette heure tardive, du Président Debré qui, comme chaque année, tient à assister à nos débats sur l'outre-mer. (Applaudissements sur tous les bancs)

Madame la ministre, l'examen du budget de l'outre-mer pour 2005 me donne l'occasion de faire un bilan d'étape de votre action à la tête du ministère. Je traiterai essentiellement de Mayotte, circonscription que j'ai l'honneur de représenter ici, d'autant que les orateurs précédents ont largement abordé les priorités de votre budget.

A votre arrivée aux affaires, Mayotte était un territoire presque en déshérence : pas de sécurité sociale, des hôpitaux et des dispensaires saturés, un taux de chômage de près de 50%, un SMIC plafonné à 430 € par mois, des allocations familiales dérisoires, de surcroît plafonnées, un taux d'échec scolaire record, d'extrêmes difficultés pour les jeunes désireux de poursuivre leurs études hors de Mayotte, une immigration clandestine défiant toutes les prévisions, une fonction publique à la base juridique des plus aléatoires.

Face à ce chaos, vous avez sans retard ouvert les chantiers indispensables sur le plan institutionnel, social et économique. En deux ans et demi seulement, vous avez transformé cette collectivité, jusqu'alors oubliée de la République. Aujourd'hui, les résultats sont là. Mayotte figure dans la Constitution française et son appartenance à la République ne fait plus débat. Grâce à l'action inlassable du Chef de l'Etat, la CIG de juin 2004 a reconnu sa vocation à intégrer les régions ultrapériphériques, vieille revendication des Mahorais. En disant oui au projet de Constitution européenne, qui sera soumis à référendum l'année prochaine, nous aurons, je l'espère, l'occasion de réaffirmer notre attachement à la cause européenne.

La décentralisation s'est engagée sous les meilleurs auspices à Mayotte. L'exécutif de la collectivité départementale est désormais transféré au président du conseil général, et l'Etat a pris progressivement en charge ses missions régaliennes.

Sur le plan économique, la piste d'aviation a été mise aux normes internationales, le deuxième quai de Longoni est en chantier et les études de conception du marché de Mamoudzou sont en cours, grâce à la convention de développement signée à Paris en décembre 2002.

Sur le plan social, les textes relatifs à la sécurité sociale ont été publiés ; les allocations logement et l'épargne logement sont en place ; une vingtaine de décrets sont en cours d'élaboration qui devraient conforter la situation juridique de près de 8 000 fonctionnaires ; le SMIC sera augmenté de 20% en deux ans.

Le renforcement des effectifs des forces de sécurité a permis de lutter plus efficacement contre l'immigration clandestine et les reconduites à la frontière se sont multipliées.

L'alignement progressif du prix de l'électricité sur celui de la métropole est engagé. Après celle de janvier 2003, une deuxième baisse a eu lieu le 1er juillet 2004.

Je souhaite que ces chantiers se poursuivent, certaines mesures méritant même d'être améliorées. Je pense entre autre aux aides au logement, à la réorganisation de la dispensation des médicaments dans les hôpitaux et les dispensaires par des professionnels formés à cet effet. La future convention qui doit être conclue avec les professions libérales est la clé de la réussite de cette réforme. Si celle-ci n'était pas signée rapidement, les initiatives prises localement pour créer un premier laboratoire d'analyses médicales et un premier cabinet de radiologie seraient vouées à l'échec. Il faut au contraire encourager ces professions pour qu'elles se disséminent sur l'ensemble du territoire.

L'habitat insalubre est une préoccupation majeure à Mayotte. Il faudrait construire 2 000 logements par an dans les dix prochaines années pour tenir compte de l'évolution démographique.

Pour rendre encore plus efficace la lutte contre l'immigration clandestine, le plan Radar doit être mis en place sans retard. De nouvelles vedettes sont attendues depuis 2003 : leur retard de livraison est inacceptable.

2005 devra aussi être l'année d'ouverture d'autres chantiers. Je pense au déplafonnement des allocations familiales après la réforme historique de la polygamie, mais aussi à l'aide aux parents isolés ou à la réduction de la fracture numérique. Sur ce dernier point, un accord de janvier 2000 signé par les principaux acteurs de la vie politique mahoraise a fait du développement des technologies de l'information et de la communication une priorité de l'action de l'Etat sur l'île. Internet sera le socle des connaissances au XXIe siècle. Il y va donc de l'égalité des chances pour notre territoire.

En votant votre budget ambitieux, Madame la ministre, je tiens à vous exprimer la gratitude des Mahorais et ma conviction dans la réussite des réformes en cours et à venir. Mayotte, désormais inscrite dans la Constitution nationale, figurera sans doute prochainement dans celle de l'Europe. C'est pourquoi j'ai déposé sur le bureau de l'Assemblée une proposition de loi organique portant actualisation et mise en conformité du statut de Mayotte avec la Constitution.

Face à l'ampleur de vos résultats, nous sommes nombreux à être blessés par les attaques viles et injustes dont vous êtes l'objet de la part de l'opposition, Madame la ministre. Qu'il s'agisse de la consultation aux Antilles ou des évolutions au sein de l'assemblée de Polynésie, vous avez su rester digne de votre charge, et tous les procès que les socialistes instruisent contre vous à la tribune de l'Assemblée ont été sanctionnés par le Conseil d'Etat : c'est la meilleure réponse. Pour nous, sur ce point, le doute n'est pas permis. Car nous savons que vos fidèles compagnons s'appellent : transparence, légalité républicaine et fidélité aux engagements de la France. C'est votre force, c'est votre fierté. Elle est aussi la nôtre, pour que vive la France éternelle sur tous les océans, et que vive la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Gabrielle Louis-Carabin - La présentation de ce budget permet à la représentation nationale et particulièrement aux députés de l'outre-mer d'examiner la pertinence des choix budgétaires du Gouvernement. Le budget du ministère de l'outre-mer est-il en hausse ou en baisse à périmètre constant ? Cette question, Madame la ministre, vous est posée chaque année pour juger de la crédibilité de l'effort budgétaire de l'Etat pour nos compatriotes. Mais peut-on juger du sérieux et de l'efficacité d'un budget uniquement en fonction des sommes qui y sont inscrites ? Non, et la gestion du précédent gouvernement nous l'a prouvé. Depuis 1998, l'affichage politique consistait à annoncer des progressions spectaculaires de crédits, pour un catalogue de dispositifs qui se sont révélés inadaptés aux spécificités de l'outre-mer. Les budgets successifs ont été sous-consommés: ils sont les témoins d'une politique budgétaire peu ambitieuse qui, en restant constamment au stade de l'intention, a faussé le pouvoir de contrôle de la représentation nationale.

Ces formidables effets d'annonce ont révélé leurs limites au regard du développement durable. Vous avez donc décidé de rechercher une politique qui s'efforcerait de s'adapter aux besoins réels de l'outre-mer. Je ne crois pas que la rengaine de la hausse ou de la baisse des crédits d'une année à l'autre permettra de rendre compte de votre politique de courage, Madame la ministre. Le développement durable de la Guadeloupe ne dépend pas d'une perpétuelle hausse des crédits, mais de la gestion d'un budget constant, au service d'un contrat d'objectifs. Les moyens mis en place doivent être capitalisés pour la réalisation du contrat que vous nous proposez pour la troisième année consécutive.

Avant d'évoquer les priorités de votre contrat d'objectifs pour l'outre-mer, c'est-à-dire l'emploi et le logement, je vous parlerai de la dotation de continuité territoriale que nous avons inscrite dans la loi programme. Cette loi a été votée par des députés responsables, à l'écoute des besoins de leurs compatriotes. Car en établissant ce dispositif, nous avons permis au conseil régional de la Guadeloupe de rendre opérationnelle la continuité territoriale, en finançant avec l'aide de l'Etat la prise en charge d'une partie du billet d'avion pour certains passagers. Cette mesure vient compléter le passeport mobilité, été mis en place dès votre arrivée au Gouvernement, pour nos jeunes soucieux d'un avenir professionnel porteur. J'en profite pour préciser à mon collègue député de la Guadeloupe et président de région que depuis la rentrée 2003 l'étudiant n'avance plus le prix du billet - formule qui pénalisait trop les étudiants issus de milieux modestes - désormais le billet est remis par le CROUS.

Madame la ministre, la priorité que vous accordez à l'emploi et au logement, haussés au rang de grandes causes nationales, est tout à votre honneur. Votre logique constante d'égalité économique sur le long terme se confirme avec l'évolution de la situation de l'emploi. Fin juillet 2004 le taux de chômage global a diminué de 5,6% par rapport à l'année précédente. Voilà sur quoi il faut juger de l'efficacité de vos choix budgétaires. Une politique soutenue et constante en faveur de l'emploi est nécessaire outre-mer. En l'inscrivant dans le cadre de la politique nationale de l'emploi, vous confortez la solidarité budgétaire de l'Etat.

Par ailleurs, le transfert de 678 millions d'euros de crédits du ministère de l'emploi au ministère de l'outre-mer renforcent les dispositifs de la loi programme, qui vise le développement de l'emploi dans le secteur marchand. Les moyens sont ainsi concentrés en faveur d'une politique qui met en avant l'initiative privée de nos compatriotes.

Si l'augmentation des possibilités d'emploi durable pour les jeunes et les femmes, particulièrement touchés par le chômage, est un objectif louable, elle passe aussi par des mesures d'insertion concentrées sur la formation professionnelle. Il serait donc intéressant de connaître les efforts réalisés en ce sens, notamment en matière de tourisme, et leurs effets.

Parler de l'emploi, c'est évoquer aussi les grèves qui paralysent constamment la Guadeloupe. Je souhaiterais que soit mis en place en Guadeloupe une instance destinée à restaurer le dialogue social trop souvent rompu. Elle participerait à l'apaisement des conflits et à la prise de conscience de leurs conséquences économiques dans notre région.

La seconde priorité de votre budget, le logement, vise à améliorer les conditions de vie de nos populations. La politique de promotion de l'habitat, avec la construction de logement neufs et la résorption de l'habitat insalubre, est essentielle, car elle est vecteur de cohésion et de solidarité sociale. Il est important de soutenir l'aide à l'accession sociale en faveur des plus défavorisés : les Guadeloupéens sont particulièrement sensibles à l'accession à la propriété.

L'aide qu'apporte votre budget aux communes dans leur mission d'éradication du logement insalubre et de développement du foncier équipé doit être soulignée. Par ailleurs, la contribution à l'amélioration de l'habitat passe par la réhabilitation du parc locatif social et une utilisation optimale de la LBU, qui revêt une importance réelle pour nos régions.

Les efforts engagés par votre ministère sont louables : ils posent des bases solides pour le développement pérenne de la Guadeloupe. Certains membres de l'opposition ont eu le culot de m'écrire pour me demander de voter contre le budget de l'outre-mer... J'ai ici le courrier qui atteste de cette tentative de manipulation. Députée de la majorité, responsable des intérêts de mes compatriotes, je rappelle que j'ai voté la loi programme en 2003 - vous non ! J'ai voté la continuité territoriale - vous non ! Aujourd'hui en Guadeloupe certains - le conseil régional - tirent fierté de sa mise en place ! Avant de m'inviter à voter contre le budget de Mme Girardin, et d'en appeler comme le président du conseil régional à un sursaut de dignité, harmonisez votre discours ! Arrêtons la gesticulation partisane et travaillons dans l'intérêt de nos populations. Je voterai votre budget, Madame la ministre, parce que j'ai confiance en votre action et en votre courage. Gardons le cap, améliorons ensemble le développement de la Guadeloupe.

Je conclurai sur un sujet préoccupant, qui me tient à cœur car il concerne les jeunes Guadeloupéens : celui de la drogue et de l'alcool. Je saisis l'occasion de ce débat pour vous demander solennement qu'une mission sur les ravages de la drogue et de l'alcool en outre-mer soit confiée à un parlementaire. Le Gouvernement se doit d'accompagner cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Juliana Rimane - Votre budget pour 2005 connaît une forte augmentation. Elle tient essentiellement au transfert des crédits du ministère de l'emploi destinés à compenser les exonérations de cotisations sociales dans les DOM prévues par la loi de programme pour l'outre-mer. Le regroupement au sein du ministère de l'outre-mer des financements des actions spécifiques menées par l'Etat en faveur de l'emploi et de l'insertion est source de plus d'efficacité et de lisibilité. Force est de constater que ces mesures ont montré leur pertinence puisque partout dans nos départements ultramarins le chômage est en baisse, même si, en Guyane, les effets sont moins flagrants en raison de la crise du secteur spatial. Toutefois le taux de chômage reste deux fois plus élevé que celui de la métropole, ce qui s'explique en partie par la faiblesse des tissus économiques locaux et par le dynamisme démographique. Il s'agit donc maintenant de faire porter les efforts sur ces deux points. D'une part en restructurant et en modernisant les secteurs d'activités, notamment la pêche et l'agriculture en Guyane, et en incitant les entreprises à venir s'établir outre-mer ; à cet égard la défiscalisation n'a pas tenu toutes ses promesses. D'autre part en améliorant et en adaptant la formation des jeunes aux besoins locaux et en poursuivant la lutte contre l'immigration, facteur de croissance démographique non maîtrisée, particulièrement en Guyane.

L'emploi et le logement, les deux défis majeurs qui se posent outre-mer, sont des enjeux de cohésion sociale. La programmation de la ligne budgétaire unique a permis sans conteste d'augmenter significativement le volume du parc de logement social et de faire reculer celui de l'habitat dégradé et insalubre. La baisse des autorisations de programmes de la LBU est donc d'autant plus regrettable que, comme l'a bien montré Mme Tjibaou dans son récent rapport au Conseil économique et social, les besoins restent élevés. En Guyane, le nombre de logements à construire chaque année jusqu'en 2006 est estimé à 2 500, dont 1 500 logements sociaux, alors qu'au cours des dernières années les autorisations constatées oscillent autour de 1 000 logements, en prenant en compte les opérations d'amélioration et de réhabilitation. Par ailleurs les chiffres sont tout à fait parlants quant à l'état des logements existants : 14,3% n'ont pas l'eau courante, 10% sont privés d'électricité, 20% ne sont pas pourvus des éléments de confort, 13% sont insalubres. Si le développement des logements sociaux est donc nécessaire, le renforcement des aides en direction des logements intermédiaires ne l'est pas moins. Je souhaite que, dans son plan de cohésion sociale, votre collègue M. Borloo porte une attention toute particulière à la situation alarmante des collectivités d'outre-mer.

Madame le Ministre, l'action du Gouvernement en faveur de l'outre-mer a apporté des résultats probants. Les chiffres du chômage ont baissé, notamment grâce aux effets de la loi de programme. L'insécurité a également diminué, en particulier en Guyane, grâce aux nouveaux moyens accordés à la police et à la gendarmerie. L'accès aux soins des plus démunis s'est amélioré, grâce à l'augmentation du plafond d'éligibilité à la couverture maladie universelle en faveur des ultramarins. Cependant beaucoup reste à faire. En Guyane, les difficultés financières des collectivités locales sont récurrentes. La forte croissance démographique du département, alimentée par une immigration massive, pèse sur les budgets de communes qui accusent depuis longtemps un retard en matière d'infrastructures et de superstructures. L'effort à consentir pour construire des voiries, mais surtout des écoles et des équipements sociaux, sanitaires et culturels, est hors de portée pour ces communes.

Je me réjouis que l'amendement que j'avais déposé avec plusieurs de mes collègues, tendant à attribuer 80% de l'enveloppe du Fonds Régional de Développement Economique aux communes, ait été adopté lors de l'examen du projet de loi relatif à l'octroi de mer. Je regrette toutefois que le problème posé par le prélèvement de 35% des produits de l'octroi de mer au bénéfice du Conseil Général de la Guyane n'ait pas été réglé à cette occasion. Le projet de réforme du mode de calcul de la dotation globale de fonctionnement, qui prend en considération la superficie du territoire communal, est encourageant, mais il faudrait également compenser le retard d'équipement, la faiblesse des ressources fiscales et les nouveaux besoins créés par l'augmentation rapide de la population.

A l'intérieur comme à l'extérieur du territoire, le principe de continuité territoriale est loin d'être respecté. Le manque d'infrastructures routières, l'inadaptation des équipements portuaires et aéroportuaires, l'insuffisance et le coût des transports aériens, renforcent l'enclavement de certaines communes, les empêchant de se développer.

S'agissant de la desserte aérienne entre la Guyane et la métropole, l'arrivée d'Air Caraïbes, qui dessert la Guyane via les Antilles, crée une concurrence - limitée - avec Air France. Vous avez heureusement mis en place la dotation de continuité territoriale. En ne délibérant pas sur les critères d'attribution, le conseil régional de la Guyane prive cependant de nombreux Guyanais de cette aide au voyage. Qu'entendez-vous décider pour que ceux-ci ne soient pas pénalisés ?

Si ces avancées doivent être saluées, elles restent insuffisantes pour rendre le transport aérien accessible à tous. Le coût prohibitif des titres de transport empêche encore de nombreuses familles guyanaises de prendre l'avion, notamment en haute saison.

La persistance des blocages au développement de la Guyane, en dépit des moyens financiers mobilisés par l'Union européenne et par l'Etat, soulève des interrogations quant aux méthodes de gouvernance. Il faut localiser les points de blocage et de dysfonctionnement. S'agit-il de l'organisation de l'Etat, des rapports entre l'Etat, les collectivités locales et les élus, ou de la circulation des informations ? A l'heure de la modernisation de l'Etat, la Guyane se doit de trouver des solutions adaptées à ses spécificités.

Beaucoup reste à faire. Les mesures prises par le Gouvernement en faveur de l'outre-mer ont permis de l'engager dans la voie du développement. Votre budget, Madame le Ministre, participe à ce vaste chantier, et je le voterai. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. André Thien Ah Koon - En période de redressement budgétaire, un bon budget est celui qui finance les besoins les plus urgents tout en réalisant des économies pour sauver la France de la déroute bancaire. Si notre situation budgétaire est fragile, les priorités doivent être clairement affichées, et notre action orientée vers les familles qui connaissent des conditions de vie difficile.

Nous devons assurer l'accès aux soins des plus démunis. L'augmentation, à l'initiative du Premier ministre, du plafond d'éligibilité à la CMU complémentaire dans les DOM avait permis de réintégrer 11 000 personnes dans le dispositif à la Réunion, des personnes que le gouvernement précédent avait abandonnées sans couverture complémentaire. Plus de 20 000 personnes âgées et handicapées se trouvent encore exclues du dispositif à la Réunion. Le coût de la vie, plus élevé qu'en métropole, ne leur permet pas d'adhérer à une mutuelle. Le plafond de la CMU complémentaire devrait donc être indexé sur le coût de la vie dans les DOM.

L'accession à la propriété des occupants de logements sociaux devient une priorité sociale et politique. Les familles les plus modestes aspirent elles aussi, légitimement, à constituer et à transmettre un patrimoine. L'argent public ne peut continuer à être confisqué par les SEM et autres organismes HLM, au détriment de la cohésion sociale. Cette situation crée des classes sociales sans perspectives d'avenir, les confinant dans un désoeuvrement qui conduit droit à l'insécurité. Notre pays n'est pas un modèle du genre en matière d'accession à la propriété : plus de 4 millions de familles vivent dans des HLM. Moi-même président de SEM, je trouve anormal qu'une SEM puisse s'enrichir sur le dos des pauvres.

J'ai interpellé en ce sens M. le ministre délégué au logement, et je vous demande, Madame la ministre, de relayer auprès de votre collègue cette attente de près de 60 000 familles réunionnaises.

L'emploi reste notre première préoccupation. Grâce à vous, la loi de programme met en place un dispositif conséquent en faveur du développement de nos territoires: Ce texte est le détonateur économique tant attendu : il se fonde sur une logique d'activité et de responsabilité. A la Réunion, cependant, la mobilité et la capacité à créer des emplois ne suffisent pas à compenser l'augmentation de la population active. Nous vous demandons donc de maintenir les emplois aidés - CES, CEC - au même niveau dans les DOM, tant que le chômage n'aura pas décru de manière significative. Couplés avec les futurs contrats d'avenir et d'insertion RMA, ces contrats permettront de répondre aux attentes des populations ultramarines.

Il faut favoriser une plus grande ouverture de nos régions aux économies voisines. La Réunion doit profiter de sa situation géographique, à mi-chemin entre l'Asie et l'Europe, pour devenir un pôle industriel où seront achevés des biens semi-finis en provenance de ces pays, en vue d'une réexportation vers le marché européen. Dans cette perspective, des relations de co-développement avec les pays de l'Océan indien devraient être initiées. Les mesures de protection du marché CEE - lois anti-dumping, quotas - sont un autre levier à sauvegarder.

Enfin en complément de ce qui a été entrepris en matière de continuité territoriale, le Gouvernement doit engager une réflexion sur les prix des transports aériens en outre-mer. Non seulement leur niveau ne facilite pas le rapprochement des familles, mais ils plombent l'activité touristique, créatrice d'emplois. Il faut faire preuve de vigilance sur les tarifs de dumping encore pratiqués par Air France, dont le but inavoué est d'éliminer la concurrence des petites compagnies régionales et de faire payer le billet trois fois plus cher aux Réunionnais, comme cela se pratiquait encore récemment. Air France doit accompagner le développement de l'outre-mer, et non contribuer au pillage de son économie. Cette forme de politique coloniale doit cesser.

Je connais votre détermination à faire progresser l'outre-mer. Je ne doute pas que vous continuerez inlassablement à vous battre pour préparer ensemble l'avenir de l'outre-mer, facteur indéniable de rayonnement économique et culturel de notre pays dans le monde. Je vous remercie encore pour la loi de programme. Vous avez défendu l'octroi de mer, l'OCM sucre. Ne vous laissez pas décourager par des attaques injustes : vous faites votre travail et vous avez notre confiance. Je voterai votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Béatrice Vernaudon - La crise politique ouverte voici un mois en Polynésie menace aujourd'hui la paix sociale. Dans ce contexte troublé, les montants significatifs des transferts de l'Etat contribueront à rassurer la population.

Les montants cumulés des sommes inscrites au budget de l'outre-mer en faveur de la Polynésie peuvent paraître modestes : ils représentent 45 millions d'euros sur un budget de 1,7 milliard, soit 2,6%, en augmentation de plus de 11%.

Ils financent les trois grands programmes que développe le ministère. Sur le premier, l'emploi outre-mer, la Polynésie bénéficie d'une somme de 2 millions d'euros consacrée aux chantiers de développement et d'une enveloppe d'un million destinée au passeport mobilité pour les jeunes en formation. Je tiens d'ailleurs à saluer cette initiative, qui vous revient.

Sur le second programme, relatif à l'amélioration des conditions de vie, 4 millions sont consacrés au dispositif de continuité territoriale, dont je vous remercie publiquement, tant il est essentiel au développement des liens entre la Polynésie et la France. Ce dispositif est novateur, nous devons le faire connaître et le rendre plus opérationnel.

Sur le dernier programme, je salue votre intervention décisive pour faire réinscrire les crédits du fonds intercommunal de péréquation - FIP -, supprimés depuis 2001. Ces crédits représentent une enveloppe de 32 millions d'euros, dont 8 millions au titre de 2005 et 24 millions au titre du rattrapage progressif des trois années « oubliées » entre 2001 et 2003. Ils serviront l'ambitieux projet de réforme communale tant attendu, permettant de mettre en œuvre les nouvelles compétences dévolues aux communes, en les dotant de compétences et en donnant un nouvel élan au développement local. Cette réforme est fondamentale pour construire la Polynésie de demain et impose les efforts conjugués de l'Etat ainsi que du pays tout entier.

Les 45 millions destinés à la Polynésie figurant dans le budget du ministère de l'outre-mer masquent le milliard supplémentaire en provenance des autres ministères. Ces crédits, en augmentation de 2,5% entre 2004 et 2005, proviennent essentiellement du ministère de l'éducation et des charges communes. La DGDE constitue ainsi une rente de 151 millions qui permet à la Polynésie d'envisager sereinement le financement de ses grands travaux d'aménagement et d'équipement.

Le rattrapage de 189 millions étalé jusqu'en 2010 permettra, selon le Gouvernement, de compenser en partie l'absence de renouvellement du contrat de développement qui finançait le logement social. J'insiste néanmoins sur la nécessaire contractualisation de la politique en faveur du logement pour répondre à la demande, notamment dans les zones urbaines : nos logements sociaux, en effet, se ghettoïsent de plus en plus.

Le financement de notre système de protection sociale nous préoccupe également, faute du renouvellement de la convention relative aux actions de solidarité et de santé publique. Cette convention finance essentiellement le régime de solidarité territoriale qui offre une couverture sociale complète aux plus démunis, lesquels représentent aujourd'hui 20% de la population. Elle finance également les actions de santé publique ainsi que la formation des personnels médicaux et sociaux. Je salue à ce propos l'initiative de M. le ministre de la santé et de la protection sociale qui, malgré l'absence de cadre règlementaire, a prévu près de 20 millions de crédits en 2004 et 2005 pour sauvegarder une partie des financements de l'Etat.

Je plaide pour la reconduction du contrat de ville, puissant levier de développement des politiques d'insertion et de proximité. Le renouvellement de ce dispositif traduira la volonté d'étendre à la Polynésie les effets du plan de cohésion sociale que nous allons examiner.

Je salue l'effort global de l'Etat en faveur de la Polynésie et souhaite que ce budget aide à réconcilier les Polynésiens avec eux-mêmes et avec la République après qu'ils auront été invités à s'exprimer,...

M. Jean-Christophe Lagarde - Très bien !

Mme Béatrice Vernaudon - ...condition sine qua non du retour à la paix sociale et pour que la Polynésie poursuive son développement harmonieux au sein de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe socialiste)

M. Jean-Christophe Lagarde - Très bien !

Mme Christiane Taubira - Honneur et respect à Madame Vernaudon.

M. René-Paul Victoria - Il y a trente-quatre ans mourrait le général de Gaulle. J'envisagerai notre discussion en gardant à l'esprit sa conception du débat politique lorsqu'il considérait que la seule querelle qui vaille est celle de l'Homme.

Je rappelle la situation préoccupante de la Réunion concernant l'emploi. En 2004, 10 000 jeunes sont sortis du cursus scolaire et plus de la moitié sans aucune formation. D'année en année, un chômage structurel s'installe qui compromet fortement notre cohésion sociale. Le taux de chômage du département de la Réunion est trois fois supérieur à celui de la métropole !

La situation du logement est également préoccupante : près de 23% des ménages vivent en état de surpeuplement et la chute de la LBU a essentiellement affecté le logement locatif social. La Réunion ne dispose en outre que de très peu de places de CHRS et de 81 places d'hébergement d'urgence. La politique du logement relevant de la compétence de l'Etat, je propose que les SIDOM soient désignés comme opérateurs pour la construction des logements d'urgence.

Malgré ces difficultés, l'économie réunionnaise est dynamique, les créations d'entreprises augmentent et nos activités, en se modernisant, gagnent des parts de marché. Dès lors, les moyens dont disposent les DOM sont-ils à la hauteur des espérances ?

S'agissant de la politique en faveur de l'emploi, le Gouvernement privilégie les exonérations de charges fiscales et sociales. Les premiers résultats de la loi programme pour l'outre-mer sont encourageants puisque le chômage a un peu reculé. Ainsi, pour la première fois en 2004, le rythme de progression des effectifs employés dans le BTP a progressé en moyenne de 2% par mois. Nous devons néanmoins rester vigilants et je souhaiterais qu'un bilan d'étape soit dressé sur le volume des exonérations accordées et le nombre effectif de créations d'emplois.

M. Jean-Christophe Lagarde - Très bien.

M. René-Paul Victoria - La diminution des crédits du FEDOM est inquiétante, alors que la Réunion a besoin de plusieurs volets d'insertion orientés vers la formation et la qualification. Vous avez eu raison d'évoquer la nécessité d'une meilleure fongibilité du FEDOM afin d'être plus efficace, mais je souhaiterais que celle-ci soit étendue à l'ensemble des actions de soutien à l'emploi.

De même, nous attendons énormément du plan de cohésion sociale afin qu'il réponde au contexte particulier de la Réunion par un effort spécifique de solidarité.

En créant la CMU et en liquidant l'aide médicale gratuite, le gouvernement Jospin a plongé des dizaines de milliers de personnes dans la détresse, exemple malheureux de « casse sociale » dénoncée aujourd'hui par l'opposition (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Le gouvernement Raffarin a réparé une partie de cette casse (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), mais un effort supplémentaire est aujourd'hui nécessaire pour permettre un plus large accès à la CMU.

Le passeport mobilité constitue une réponse pertinente aux attentes de nos jeunes...

M. Louis-Joseph Manscour - Il ne fonctionne pas.

M. René-Paul Victoria - ...mais ils sont encore trop nombreux à se voir opposer une réglementation tatillonne. Il ne s'agit évidemment pas d'ouvrir le robinet à tout va, mais nous voulons être sûrs que tout projet de mobilité justifié puisse être accompagné.

En ce qui concerne la continuité territoriale, les avancées obtenues doivent être confirmées.

Je salue le Président Debré qui, une fois de plus, à permis à notre débat sur l'outre-mer de se dérouler dans les meilleures conditions possibles. J'ai également une pensée pour celui qui fut le Premier ministre du général de Gaulle, cher au cœur des Réunionnais, et qui estimait que sans l'outre-mer, la France ne serait pas la France.

Après avoir entendu l'ancien ministre des DOM-TOM parler de trahison, d'ingérence, de pression, d'impunité, de forfaiture, d'abandon, de drame, d'oppression, mais aussi M. Lurel qui a également parlé de désastre et de drame, je témoigne de ce que l'outre-mer n'a pas été habitué à pareil vocabulaire. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) L'outre-mer fait partie intégrante du peuple français, et je ne peux, en tant qu'élu de la nation, accepter de tels propos venant, qui plus est, d'un ancien ministre. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Soyez assurée, Madame la ministre, de mon soutien et de ma confiance. Je voterai votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer - Au moment où nous examinons l'effort financier de la Nation pour l'outre-mer, je voudrais rappeler la contribution, qui n'a pas de prix, apportée par nos compatriotes d'outre-mer à la République. J'ai une pensée très forte en ces instants pour Patelise FALEVALU originaire de Futuna qui a donné sa vie pour la paix. Et je tiens à saluer certains des membres de sa famille, qui sont ici, avec nous. Je les assure de mon soutien, de ma solidarité et de ma sympathie en ces moments si douloureux et je crois que toute l'Assemblée s'associe à mes paroles. (Applaudissements sur tous les bancs en direction des tribunes)

Je remercie le Président de l'Assemblée d'avoir maintenu l'examen du budget de l'outre-mer à un jour et à une heure qui conviennent aux députés d'outre-mer. Cette tradition manifeste un profond respect des élus de l'outre-mer et des populations qu'ils représentent. Je remercie également les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis d'avoir enrichi nos débats par la qualité de leurs travaux et la pertinence de leurs interrogations.

Si le budget du ministère de l'outre-mer pour 2005 s'élève à 1 milliard 710 millions d'euros, soit une progression de 52% par rapport au projet de budget que je vous ai présenté l'an dernier, je m'empresse de vous dire que je n'ai jamais disconvenu du caractère quelque peu artificiel de cette progression. Cette hausse très importante est en effet liée au transfert sur mon budget de 678 millions d'euros de crédits destinés à la compensation des exonérations de cotisations sociales dans les départements d'outre-mer, qui étaient jusque là inscrits sur le budget du ministère de l'emploi. Ce n'est donc pas une dépense nouvelle. Mais j'ai souhaité qu'elle figure dès 2005 dans mon budget par anticipation de la réforme de la gestion publique introduite par la nouvelle loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Etant donné que l'abaissement du coût du travail sera un axe fort dans l'action « abaissement du coût du travail et dialogue social » du programme 1'« emploi outre-mer », il me paraît cohérent que figurent dans mon budget tous les dispositifs propres à l'outre-mer, dont font partie les exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale de la loi de programme.

Car l'esprit de la LOLF, Messieurs Lurel et Manscour, ce n'est pas le périmètre constant que vous érigez en dogme de la sincérité budgétaire ! Avec la LOLF, cette question de périmètre constant n'aura plus aucun sens. C'est aux résultats que j'aurai obtenus au regard des moyens mobilisés et par rapport aux objectifs fixés qu'il faudra alors vous intéresser.

Mais si vous souhaitez rester dans un schéma qui demain sera suranné, il faut le faire avec rigueur ! Si l'on retranche les crédits destinés à la compensation des exonérations sociales, il faut, inversement, rajouter les transferts effectués à partir de notre budget, à savoir les 37,7 millions d'euros et les 969 emplois qui sont transférés au ministère de l'intérieur en vue de la globalisation des moyens affectés au fonctionnement des préfectures d'outremer. Après la préfecture de la Martinique l'an dernier, ce sont les préfectures de la Guyane, de la Guadeloupe, de La Réunion et de Saint-Pierre-et-Miquelon qui rentreront en 2005 dans ce processus.

Par ailleurs, 1,9 million d'euros est transféré au budget du ministère de la santé au titre de sa contribution au budget de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.

M. Victorin Lurel - On l'a évoqué.

Mme la Ministre - Mais ce que vous oubliez de prendre en compte, Monsieur Lurel, ce sont les dotations qui sont réduites sans que la mission assurée par le ministère soit elle-même remise en cause. Ainsi, la participation de l'Assurance maladie et l'affectation de droits sur les alcools forts au financement de la couverture maladie universelle complémentaire aura un impact sur les dépenses effectuées à ce titre sur le budget de l'outre-mer. Cet impact a été chiffré à 15 millions d'euros. Mon budget a donc été ajusté à due concurrence. Mais il ne s'agit pas d'une économie qui serait faite au détriment des bénéficiaires de la CMU. Le niveau de prestations en 2005 sera exactement le même qu'en 2004 et le périmètre d'intervention sera constant, bien que la dotation soit diminuée. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

De la même façon, la réforme du prêt à taux zéro procurera une économie structurelle sur notre dotation d'aides au logement, la LBU, qui permettra de dégager de fait des moyens nouveaux, qui n'apparaissent pas en tant que tels sur mon budget. Cet impact, estimé à 12 millions d'euros, doit donc être rajouté au budget 2005 de l'outre-mer.

M. Victorin Lurel - C'est compliqué, la gymnastique !

Mme la Ministre - Il convient donc, si l'on rentre dans votre logique étroite, de retrancher de mon budget 2005 le transfert reçu du budget du travail et de rajouter les prélèvements au profit d'autres ministères ainsi que l'ajustement du financement de la CMU complémentaire et l'impact de la réforme du prêt à taux zéro.

En revanche, je ne comprends pas, Monsieur Lurel, que vous retranchiez également les mesures nouvelles : ce sont bien elles, pourtant, qui participent à l'évolution du budget d'une année sur l'autre, ce sont elles que vous votez. Si mon budget n'était composé que de mesures acquises, vous n'auriez même pas eu besoin de vous déplacer aujourd'hui ! De surcroît, ces mesures nouvelles s'inscrivent dans le périmètre d'intervention du ministère de l'outre-mer. La dotation de continuité territoriale, que je sache, a bien été mise en place en 2004, même si je n'avais pas de crédits inscrits à ce titre dans le PLF 2004.

C'est donc une somme ramenée à 611,4 millions d'euros qu'il conviendrait, dans votre logique, de retirer du PLF 2005 pour le comparer, à périmètre constant, au PLF 2004. Le budget 2005 serait donc en toute rigueur, à périmètre constant, en baisse de 27 millions d'euros par rapport à 2004, soit une diminution de 2,4%.

MM. Victorin Lurel et Louis-Joseph Manscour - Bien plus que cela !

Mme la Ministre - Non. Par ailleurs, faut-il considérer la loi de finances pour 2004 comme le socle de ce que vous appelez le périmètre constant ? Je ne le crois pas. Pour comparer le budget d'une année sur l'autre à périmètre constant, il faut raisonner toutes choses égales par ailleurs. Or en matière budgétaire, aujourd'hui plus qu'hier, rien n'est rigoureusement semblable d'un exercice sur l'autre et il apparaît difficile de limiter l'examen du budget à la seule variabilité des crédits.

M. Christian Paul - Prenez donc 2002 comme base !

Mme la Ministre - Non, Messieurs Paul et Lurel, on ne peut donc pas parler de baisse historique. Le chiffre de 94 millions d'euros, que je conteste ne représente d'ailleurs même pas la moitié des crédits que vos amis n'éprouvaient pas le besoin d'utiliser pour l'outre-mer, de 1997 à 2002, et qu'ils laissaient sans emploi en fin d'année. 188 millions d'euros en 1999, 222 millions d'euros en 2000, ils sont là les chiffres historiques ! Je rappelle que le taux d'exécution du budget de l'outre-mer qui était de 81% en 1999 est passé à près de 92% un an après mon arrivée rue Oudinot.

En tout état de cause, je n'ai pas à rougir d'une baisse qui représente la participation de mon ministère à l'effort national de maîtrise de la dépense publique. Elle me permet au contraire de recentrer les interventions du ministère sur ses deux priorités que constituent l'emploi et le logement.

La politique pour l'emploi mobilise près de 67% des crédits. Avec les crédits du FEDOM, les exonérations de cotisations sociales et la formation professionnelle des jeunes menée par les unités du service militaire adapté, c'est un total d'un milliard et cent cinquante millions d'euros que je vais pouvoir pleinement consacrer à l'emploi.

Sur le FEDOM, la fongibilité complète des crédits me permettra de financer avec plus de souplesse et d'efficacité les mesures en faveur de l'emploi et de l'insertion des publics les plus démunis. La diminution des crédits ouverts pour 2005 au titre du FEDOM n'implique aucunement, Monsieur Rodet, un recul de l'action de mon ministère en matière d'emploi, mais traduit la prise en compte de différents facteurs parmi lesquels l'ouverture outre-mer des contrats d'avenir prévus par le Plan national de cohésion sociale et financés par le ministère de l'emploi, la diminution constante du coût des emplois-jeunes, le transfert des compensations d'exonération des cotisations de sécurité sociale de l'article 10 vers l'article 51.

Par ailleurs, il est également prévu le transfert sur mon budget, en cours de gestion 2005, des crédits destinés au financement des stages d'insertion et de formation à l'emploi, les SIFE, et des stages d'accès à l'entreprise, les SAE, gérés jusqu'alors par le ministère de l'emploi.

Ma priorité demeure le développement de l'emploi dans le secteur marchand, sans lequel il n'y a pas de développement durable possible. Par conséquent, outre l'allégement des charges sociales, je privilégie les dispositifs qui me permettent de mener une politique de l'emploi dynamique en faveur du secteur marchand. Il s'agit notamment des contrats d'accès à l'emploi et des dispositifs créés par la loi de programme du 21 juillet 2003 en faveur des jeunes diplômés et en faveur des jeunes à Mayotte et à Wallis et Futuna.

Vous avez évoqué, Monsieur Brial, la question du niveau de la prime à la création d'emploi instituée à Wallis et Futuna par la loi de programme. Cette prime est calculée en pourcentage du SMIG et elle est versée pendant trois ans maximum. Son montant est de 20% du SMIG pour les deux premières années et de 10% pour la troisième année. Avant d'envisager une modification de ces taux, il me paraît souhaitable de procéder à une première évaluation de cette mesure.

Les mesures de redéploiement de l'encadrement des unités du service militaire adapté permettront d'améliorer encore la formation des jeunes ultramarins effectuée grâce à ce dispositif, dont la qualité et l'efficacité sont unanimement reconnues. En 2004, ce sont ainsi près de 2.000 jeunes qui auront été formés par le SMA, avec un taux d'insertion professionnelle supérieur à 71%. Ce taux est de 83% à la Martinique et de 94% en Guadeloupe.

Je voudrais ici répondre, Monsieur Brial, à votre question sur les dispositifs destinés aux élèves en grande difficulté scolaire. Ces élèves peuvent bénéficier d'un dispositif d'accompagnement spécifique, sur la base d'un "projet d'établissement" construit en partenariat avec les autorités académiques et les responsables des collèges et du lycée de Wallis et Futuna. S'agissant du partage des compétences entre la collectivité et l'Etat en matière d'enseignement, je soumettrai la question à M. Fillon mais il m'apparaît, en première analyse, qu'une discussion associant les élus et les représentants de l'enseignement à Wallis et Futuna devrait avoir lieu pour mettre à plat l'ensemble de ce dossier.

Monsieur Frogier, en parfait accord avec François Fillon, je ne suis pas opposée au principe d'ouvrir une nouvelle discussion sur les modalités d'établissement de la dotation générale des collèges, à la condition qu'elle résulte d'un diagnostic partagé de la situation locale entre les services de l'Etat et ceux de la Province-Sud. Ce diagnostic devra porter sur l'évolution des effectifs jusqu'en 2010 et le coût de la construction scolaire. Une mission d'appui technique se rendra su place avant la fin de l'année 2004.

Enfin, les mesures en faveur de l'emploi qui seront prises dans le cadre du plan national de cohésion sociale seront bien entendu appliquées outre-mer, n'en doutez pas Madame Bello. Il s'agit notamment de la mise en place des maisons de l'emploi, de la modernisation et du développement de l'apprentissage et du contrat d'avenir, destiné à faciliter l'insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et de l'allocation de solidarité spécifique. Je rassure M. Thien Ah Koon : les CEC et les CES seront maintenues.

M. Victorin Lurel - C'est une bonne nouvelle.

M. le Ministre - De même, chaque jeune en difficulté d'insertion bénéficiera d'un accompagnement renforcé, qui sera pour lui, Monsieur Jalton, une réelle incitation à utiliser les services de l'ANPE. Je vous précise par ailleurs que le dispositif des contrats jeunes a bénéficié à 380 jeunes dans les départements d'outre-mer.

S'agissant de la cohésion sociale, je salue l'initiative prise à la Réunion par la présidente du conseil général, Mme Dindar, d'associer toutes les forces vives à l'élaboration d'un plan local de cohésion sociale. J'apporte mon plein soutien à cette démarche qui vous tient particulièrement à cœur, Monsieur Audifax.

Les résultats de la politique que nous menons sont encourageants, comme vous avez bien voulu le rappeler, Monsieur Quentin. Depuis l'entrée en vigueur de la loi de programme, l'emploi salarié dans le secteur marchand a augmenté de 2,2% dans les départements d'outre-mer alors qu'il a diminué de 0,3% en métropole. En Guadeloupe, Monsieur Jalton, l'emploi salarié a augmenté de 5,20% en un an (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Le rythme des créations d'entreprises s'accélère dans les quatre départements d'outre-mer : entre le premier trimestre 2003 et le premier trimestre 2004, elles ont augmenté de 24,5% en Guadeloupe et en Guyane, de près de 15% à la Réunion et de plus de 5% en Martinique.

Quant au taux global de chômage dans les départements d'outre-mer, il est en recul de 4,2% par rapport à l'année dernière, alors qu'il a augmenté de 0,5% en métropole. Le chômage de longue durée a baissé de 10,4% alors qu'il a progressé de 3,9% en métropole, et le chômage des jeunes a diminué de 0,1% tandis qu'il a augmenté de 1,8% en métropole.

En outre, la défiscalisation constitue un puissant levier de développement, comme vous l'avez rappelé, Monsieur Quentin. Au 30 septembre dernier, 257 dossiers avaient été déposés auprès de Bercy, soit autant que sur l'ensemble de l'année 2003, représentant un total d'investissements, hors nickel, de plus de 1,3 milliard. Une charte de qualité a été signée en ma présence il y a quelques jours pour améliorer l'image et l'efficacité de la défiscalisation, qui fait encore trop souvent l'objet de critiques injustes.

Je comprends bien, Monsieur Victoria, votre souci de mesurer les effets de la politique visant à créer des emplois durables dans le secteur marchand. La loi de programme prévoit l'établissement en 2006 d'un bilan des exonérations de charges sociales. L'évaluation doit être faite, Monsieur Lagarde, non pas tous les ans mais tous les trois ans. J'ai toujours dit qu'elle permettrait d'ajuster les mesures. Il serait sûrement utile cependant de tenir ici même, dès 2005, un symposium sur le développement économique de l'outre-mer, réunissant les parlementaires et les forces vives de chaque région et de chaque collectivité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Victorin Lurel - Voilà une bonne proposition !

Mme la Ministre - Outre les crédits directement consacrés à l'emploi et à l'insertion sociale, deux dispositifs où nous intervenons en partenariat avec les collectivités locales contribuent à répondre aux enjeux spécifiques de l'outre-mer en matière de formation et de mobilité professionnelle : la dotation de continuité territoriale et le passeport mobilité.

La dotation de continuité territoriale, Madame Carabin, constitue une véritable mesure nouvelle de ce budget 2005. Elle permettra, comme le souligne M. Buillard, de compléter les aides destinées à pallier les handicaps structurels des collectivités d'outre-mer. Indexée sur le taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement, soit 3,29%, elle fait l'objet d'une inscription de 31 millions d'euros. Elle sera gérée de façon décentralisée et permettra la prise en charge de tout ou partie du coût d'un billet d'avion entre les collectivités territoriales d'outre-mer et la métropole. Je me réjouis que sept collectivités sur neuf en aient délibéré à ce jour et je regrette avec vous, Madame Rimane, que le conseil régional de Guyane n'ait pas voulu définir de critères d'attribution -mais je suis respectueuse du principe d'autonomie des collectivités et je ne puis me substituer à lui. Mon objectif est d'aider environ 200 000 passages par an entre la métropole et l'outre-mer ; on pourra dresser un premier bilan à la fin de l'année prochaine.

Vous avez exprimé le souhait, Monsieur Brial, que les nouveaux chiffres de la population issus du recensement de 2003 puissent être pris en compte dans le calcul de la dotation de continuité territoriale pour Wallis et Futuna. Ce sera bien le cas pour 2005.

En revanche, l'article 60 de la loi de programme précisant que la dotation de continuité territoriale est destinée à faciliter les déplacements des résidents des collectivités d'outre-mer entre celles-ci et le territoire métropolitain, elle ne peut bénéficier aux voyages entre Wallis et Nouméa.

C'est au vu des bilans de l'année 2005, qui devront être transmis par chaque collectivité au cours du premier trimestre 2006, que le Gouvernement examinera les évolutions à apporter au dispositif.

Le financement du passeport-mobilité, qui permet la prise en charge de billets d'avion vers la métropole au bénéfice d'étudiants et de stagiaires en formation professionnelle sera assuré en 2005 au même niveau qu'en 2004.

Vous regrettez, Monsieur Victoria, que certains jeunes soient freinés dans leur désir de mobilité par une réglementation que vous jugez trop contraignante. Cependant divers assouplissements ont été apportés depuis 2002.

On peut estimer à plus de 12 000 le nombre de passeports qui auront été délivrés au 31 décembre 2004. je me félicite de ce succès.

Il est un autre aspect de la continuité territoriale qui, Monsieur Kamardine, vous importe beaucoup : la réduction de la fracture numérique. Consciente des difficultés qui existent à Mayotte, je viens de prendre l'initiative d'engager avec le ministère des affaires étrangères, France Télécom, SRR, la filiale de SFR et l'ALD une réflexion, à laquelle seront bien évidemment associés les élus mahorais. La maîtrise d'ouvrage de la politique tendant à réduire la fracture numérique devra être confiée au conseil général de Mayotte avec l'appui financier de l'Etat et de l'Europe, dès lors que Mayotte deviendra une région ultrapériphérique.

Monsieur Grignon, vous avez évoqué les questions relatives à l'amélioration de la protection sociale à Saint-Pierre-et-Miquelon. Le décret du 29 juillet dernier institue l'assurance invalidité ; de nouveaux droits sont définis, notamment la possibilité de cumuler les prestations avec une activité professionnelle, un droit d'option restant maintenu pour les personnes invalides. La récente loi sur le droit des personnes handicapées est applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans le respect des spécificités législatives de la collectivité. En ce qui concerne l'amélioration du régime local des prestations familiales, un projet d'ordonnance est en cours d'élaboration ; il faut examiner la possibilité d'intégrer de nouvelles prestations comme l'allocation de parent isolé et l'allocation de logement social. Enfin, sur la question de l'extension de la retraite anticipée « longue carrière » à Saint-Pierre-et-Miquelon, je partage votre avis : les assurés sociaux de Saint-Pierre-et-Miquelon doivent pouvoir obtenir une pension de vieillesse dans les mêmes conditions que ceux de métropole. Une mesure législative est nécessaire car il faut modifier l'article 6 de la loi du 27 juillet 1987 qui a créé le régime d'assurance vieillesse à Saint-Pierre-et-Miquelon. Le ministère de la santé vient de me confirmer son accord. Je m'emploie à rechercher le support juridique le mieux adapté pour introduire une telle disposition.

Vous avez évoqué, Monsieur Brial, la situation de l'agence de santé de Wallis-et-Futuna. Son budget, qui était de 10,2 millions en 2002, sera de 16 millions en 2005. De plus, nous avons réglé la question ancienne de la dette de l'agence, qui était de 11,5 millions.

Les évacuations sanitaires dans vous déplorez l'accroissement sont largement dues à la hausse constante des accidents de la circulation. Dans le domaine de la sécurité routière, il y a de grands progrès à faire.

Enfin, le détachement de praticiens hospitaliers et la passation d'une convention avec le centre hospitalier Gaston Bourret doit permettre de limiter le recours à l'intérim.

Je voudrais souligner combien mon action outre-mer serait vaine si elle n'était pas accompagnée par l'action des collectivités locales.

Vous avez bien voulu rappeler, Monsieur Quentin, que le Gouvernement a mené à bien la réforme de l'octroi de mer, confortant ainsi un régime menacé de disparaître. En outre, avec la réforme du FRDE, les communes recevront de nouvelles ressources d'investissement.

A cet égard, M. Beaugendre a eu raison de relever que mon soutien aux collectivités ne se limitait pas au cadre du présent budget. Ainsi, je pense répondre au souhait de MM. Almont, Brial et Grignon en leur indiquant que j'ai obtenu que la spécificité des communes d'outre-mer soit prise en compte dans la DGF, conformément aux termes de l'article 47 de la loi de programme. Le critère de superficie entrera donc dans le calcul de la DGF des communes, ce qui devrait régler les problèmes particuliers aux communes de Guyane, Madame Rimane.

D'autre part, le coefficient de majoration du ratio démographique permettant de calculer la quote-part outre-mer de la dotation d'aménagement a été porté de 10 à 33%, grâce à un amendement que vous avez voté avec le soutien du Gouvernement.

Enfin, dans le calcul de cette même quote-part, la dotation nationale de péréquation a été étendue aux collectivités d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie.

J'espère qu'ainsi les communes d'outre-mer bénéficieront d'un rattrapage dont le Comité des finances locales avait évalué le montant à quelque 30 millions d'euros et qui s'ajoutera, bien entendu, aux mesures liées à l'indexation de la DGF - soit, pour cette dernière, une progression de 3,29%.

M. Victorin Lurel - Remboursez-vous les trois années de DGF ?

Mme la Ministre - Je précise à l'intention de M. Brial que cette réforme de la DGF est une réforme nationale, pour laquelle les circonscriptions territoriales de Wallis et Futuna sont assimilées à des communes.

Soyez également rassuré, Monsieur Grignon : les communes de Saint-Pierre et Miquelon bénéficieront de la hausse de la quote-part de la dotation d'aménagement ! Grâce à cette mesure, j'envisage par ailleurs de créer une quote-part « ultrapériphicité » destinée à compenser une partie des handicaps structurels des communes d'outre-mer : les trois circonscriptions de Wallis et Futuna et les deux communes de Saint-Pierre et Miquelon bénéficieraient ainsi d'un abondement supplémentaire.

Je partage, Monsieur Kamardine, votre souci de lutter contre l'immigration clandestine à Mayotte. Pour ce qui est des radars de surveillance, le marché négocié lancé au début de cette année a été attribué le 28 juin. Il vient d'être notifié à la société SOFRELOG qui a mis en place le système du CROSS de la Manche et le système SIVE utilisé par l'Espagne dans le détroit de Gibraltar. Compte tenu des travaux de viabilisation, des délais de construction et d'acheminement et du temps nécessaire pour les essais, ces deux radars devraient être opérationnels, le premier à la fin de l'été prochain et le second au dernier trimestre de 2005.

Monsieur Grignon, je vais solliciter une mission de l'Inspection générale des finances afin d'analyser les finances de la collectivité territoriale et des communes de Saint-Pierre-et-Miquelon, de déterminer dans quelle mesure les difficultés rencontrées sont structurelles et d'arrêter des remèdes. Lors de ma visite du 30 janvier 2003, j'avais pris des engagements financiers : tous ont été tenus. En particulier, j'avais annoncé que la commune de Saint-Pierre bénéficierait d'une subvention exceptionnelle d'équilibre d'un montant équivalent à la dette pour les travaux d'eau et d'assainissement qu'elle supporte. Cette aide de 450 000 € a été effectivement déléguée en 2003. D'autre part, j'avais réservé une ligne de crédits de 200 000 € sur le chapitre 67-51 pour financer des travaux d'intérêt général urgents et... je constate que cette dotation n'est pas totalement utilisée à ce jour !

Pour le financement des investissements en 2003 et 2004, le ministère a accordé à l'archipel 7 202 000 € d'autorisations de programme au titre du FIDOM et 61 000 € de subventions pour Miquelon, 56 000 pour Saint-Pierre au titre du chapitre 67-51.

Enfin, j'ai demandé une subvention exceptionnelle d'équilibre de 100 000 € dans la loi de finances rectificative afin de remédier aux difficultés du syndicat mixte « eau et assainissement » de Miquelon.

Ma deuxième priorité va au logement. S'agissant du logement social et de la résorption de l'habitat insalubre, j'ai veillé à ce que l'effort soit maintenu à la même hauteur qu'en 2002 et 2003, avec 270 millions d'euros en autorisations de programme et 173 millions en crédits de paiements. Vous dites vrai, Madame Rimane, ces crédits peuvent paraître insuffisants au regard des besoins mais je vous garantis qu'ils seront consommés intégralement. Il est exact que la LBU subit cette année encore un gel mais le Premier ministre est saisi des conséquences dommageables de cet état de fait et j'espère qu'une décision favorable sera prise rapidement. En tout cas, je vous puis vous assurer, Monsieur Edmond-Mariette, que cette ligne unique ne sera affectée par aucune annulation cette année.

Cependant, plus que les moyens qui me sont attribués compte pour moi le résultat. Je souhaite que, grâce au plan de cohésion sociale de M. Borloo et, en particulier, à une exonération de taxe foncière portée de 15 ans à 25 ans, nous parvenions à réaliser 1000 logements sociaux supplémentaires en 2005.

Pour ce qui est de la réhabilitation de l'habitat insalubre, Madame Rimane, j'ai souhaité que les crédits de la RHI soient déconcentrés au niveau du préfet. La mesure est maintenant effective et le préfet est désormais responsable de la programmation et du suivi des opérations. Même s'il est un peu tôt pour porter un jugement, les premiers échos sont particulièrement favorables et je me réjouis que, sur un sujet aussi important pour la vie quotidienne de nos compatriotes, la décision soit redonnée au « terrain ». Je compte beaucoup sur la LOLF pour assurer la fongibilité qui permettra de traiter l'habitat insalubre en fonction de l'urgence des situations.

Monsieur Audifax, vous avez souligné avec raison l'importance du FRAFU dans l'aménagement foncier. L'Etat a tenu ses engagements et apporté seul la totalité des 19 millions d'euros inscrits au contrat de plan de La Réunion - et d'ores et déjà programmés. Cependant, la présidente du conseil général a annoncé une participation de 10 millions, ce qui devrait contribuer à débloquer la situation.

L'effort de l'Etat en faveur de la construction de logements sociaux en accession à la propriété et locatifs sera renforcé par la montée en puissance des dispositions fiscales de la loi de programme. Le ministère de l'économie a estimé à 35 millions la dépense qui sera ainsi injectée dans le BTP outre-mer.

Au total, Monsieur Thien Ah Koon, les moyens fiscaux et budgétaires consacrés au logement outre-mer seront en augmentation de 6% !

S'agissant de la banane, Monsieur Beaugendre, on ne peut prendre en compte l'augmentation du SMIC dans les coûts de production qu'au travers d'une revalorisation de la recette forfaitaire de référence utilisée actuellement dans le cadre du volet interne de l'Organisation Commune du Marché de la banane. Cette revalorisation, il ne faut pas se le cacher, sera difficile à obtenir. C'est pourquoi il convient de travailler activement auprès de la Commission pour réformer ce volet interne afin de le rendre plus conforme aux besoins des planteurs. Le Gouvernement salue l'initiative des planteurs signataires de l'accord de Madère et confirme qu'il fondera sa position de négociation à Bruxelles sur celui-ci.

Pour ce qui est du sucre, le Gouvernement veillera auprès des différentes instances communautaires à ce que le règlement de la future OCM prenne pleinement en compte la situation et les besoins de la filière « canne sucre » des DOM. En particulier, il fera tout pour obtenir une compensation maximale de la baisse du prix du sucre.

Je remercie MM. Buillard et Kamardine pour leurs encouragements et leur soutien. Madame Vernaudon, afin de limiter l'impact financier qu'aura sur les communes de Polynésie la création de la fonction publique prévue par la loi du 27 février 2004, il est prévu d'intégrer les agents à rémunération égale à leur situation antérieure et selon un calendrier arrêté par la commune à compter de l'élaboration des cadres d'emploi par le Haut-commissaire.

Quant au contrat de développement, qui s'achève à la fin de cette année, il n'est pas dans nos projets de lui donner un successeur. En revanche, pourront être conclues en tant que de besoin des conventions particulières entre l'Etat et la Polynésie française pour contribuer au développement de cette collectivité dans les domaines où l'aide de l'Etat sera indispensable.

Monsieur Brial, je vous rappelle que Wallis-et-Futuna bénéficie d'un double dispositif contractuel avec un contrat de développement conclu entre 2000 et 2004 et une convention spécifique conclue pour la période 2003-2007. Dans le cadre du premier, l'Etat s'est engagé pour 37 167 000 € ; au 31 décembre dernier, 28 928 000 € d'autorisations de programme avaient été délégués par l'ensemble des ministères contributeurs, soit 78% du montant prévu. En 2004, le ministère de l'outre-mer aura délégué 1,4 million d'autorisations de programme supplémentaires au titre du FIDES, portant ainsi sa contribution depuis le début du contrat à 8 569 000 €, soit 81,8%.

Afin de permettre une meilleure exécution du contrat, il a été décidé de le proroger d'une année supplémentaire, ce qui permettra d'en préparer un nouveau pour les années 2006 et suivantes.

Quant à la convention de développement, elle est d'un montant de 25 millions d'euros, financé pour moitié par le ministère de l'outre-mer. Celui-ci a respecté strictement ses engagements et a mis à disposition du préfet deux tranches de 2,5 millions d'euros d'autorisations de programme en 2003 comme en 2004.

Comme je vous en ai informé le 20 juillet, Monsieur Grignon, les négociations avec le Canada sur l'exploration et l'exploitation des ressources d'hydrocarbures transfrontalières dans la ZEE française au large de Saint-Pierre et Miquelon sont aujourd'hui considérées comme achevées. S'agissant de notre revendication d'une juridiction sur le plateau continental au-delà des 200 miles marins, le secrétariat général de la mer a récemment référencé nos possibles prétentions - ce qui signifie que nous devons rester vigilants.

Concernant le dossier saint-pierrais, et comme je m'y étais engagée ici-même le 11 février, les autorités françaises ont décidé de déposer un dossier auprès de la Commission des Limites du Plateau Continental. A cette fin, les expertises bathymétriques au large de Saint-Pierre et Miquelon seront inscrites au programme dit « Extraplac » dès 2006. Le ministère des affaires étrangères avisera le Canada de cette décision.

Monsieur Beaugendre, vous m'avez alertée sur les délais d'indemnisation après les catastrophes naturelles. Tout est mis en œuvre pour indemniser les victimes dans les meilleurs délais. Cela étant, un délai minimal est nécessaire pour garantir la qualité et le niveau de l'indemnisation. S'agissant de la tempête tropicale Jeanne qui a frappé la Guadeloupe le 13 septembre dernier, le ministère de l'intérieur examinera le 18 novembre prochain les dossiers de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour neuf communes. Le comité interministériel du Fonds de secours se réunira, pour sa part demain, pour étudier les dossiers d'indemnisation des dégâts causés aux équipements publics de ces communes.

J'en viens à la situation en Polynésie. On n'a cessé de nous présenter le scrutin du 23 mai comme l'horizon indispensable de l'expression démocratique, au motif que les alliés locaux du parti socialiste l'avaient emporté dans les îles du Vent - avec 0,4% d'avance sur la liste de M. Flosse dans le cadre d'un scrutin à un seul tour ! Or, le commissaire du Gouvernement devant le Conseil d'Etat, magistrat impartial, propose l'annulation de ce scrutin en raison de graves irrégularités commises dans des bureaux de vote tenus par des élus indépendantistes alliés de M. Temaru. (« Eh oui !» sur les bancs du groupe UMP) Je ne commenterai pas davantage ces conclusions, dans l'attente de la décision définitive du Conseil d'Etat. Je constate simplement que si celui-ci suit le commissaire du Gouvernement, on aura désormais du mal, sur certains bancs, à parler de « légitimité » et de « valeurs » de la République pour les opposer au simple respect de la loi, qui est, depuis le début, la stricte ligne de conduite du Gouvernement dans cette affaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Christian Paul - Si seulement c'était vrai ! (« C'est vrai !» sur les bancs du groupe UMP)

Mme la Ministre - Où est la « légitimité » d'un gouvernement local arrivé au pouvoir sans majorité, aux termes d'un scrutin populaire gravement vicié, et qui prétend se maintenir malgré le vote d'une motion de censure parfaitement régulière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Où sont les valeurs de la République quand un Gouvernement renversé par la voie légale occupe illégalement les bâtiments publics, transformés en salles de prières ?

Je suis surprise, Monsieur Lagarde, que vous vous opposiez désormais à la modification d'un mode de scrutin que vous dénonciez avec force il y a peu.

M. Jean-Christophe Lagarde - Vous voulez encore magouiller ?

Mme la Ministre - Pour ma part, je ne me prononcerais que sur des propositions parlementaires, s'il devait y en avoir. Pas plus aujourd'hui qu'hier, le Gouvernement ne souhaite prendre la moindre initiative relative au mode de scrutin.

Ce sont vos amis, M. Temaru, M. Schyle, et Mme Bouteau, qui souhaitent le changement.

M. Victorin Lurel - On aura décidément tout entendu ! (« Taisez-vous !» sur les bancs du groupe UMP)

Mme la Ministre - M. Temaru a même demandé, outre la suppression de la prime majoritaire, la création d'une circonscription unique. Cela va rappeler de bien mauvais souvenirs aux Polynésiens, lorsque le parti socialiste avait tenté d'imposer cette réforme, ce qui avait fait dire aux regrettés Boris Léontieff et Lucien Kimitete que les socialistes assassinaient les archipels (« Eh oui ! sur les bancs du groupe UMP).

M. Victorin Lurel - Vous ne croyez pas vous-même à ce que vous dites !

M. Jean-Christophe Lagarde - Vous avez fait une loi sur mesure pour M. Flosse, et vous voulez encore la changer !

Mme la Ministre - A l'examen objectif de ce budget, élaboré certes dans un contexte contraint, il est patent que le ministère de l'outre-mer s'inscrit résolument dans la politique de modernisation de l'Etat en anticipant la réforme de la gestion publique prévue par la LOLF. J'ai souhaité que nous soyons épaulés dans cette démarche par un cabinet d'audit et des contrôleurs de gestion, que nous sommes en train de recruter. Soyez persuadés que je ferai tout en 2005 pour que mon ministère s'engage dans cette réforme, avec volonté et dynamisme, dans le respect des engagements du Président de la République et de la loi de programme, gage d'un développement social et économique durable de l'outre-mer (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La séance, suspendue le mercredi 10 novembre à 0 heure 20, est reprise à 0 heure 35.

QUESTIONS

M. Michel Vaxès - Ma question devait être posée par mon collègue Jacques Brunhes, empêché ce soir ; je la relaie d'autant plus volontiers que je partage sa préoccupation. Madame la Ministre, à la réunion du Comité des signataires de l'accord de Nouméa, le 17 juin 2003 à Koné en Nouvelle Calédonie, vous aviez indiqué que pour l'Etat, la question du corps électoral, disposition clé de cet accord, était réglée, les blocages qui empêchaient son établissement ayant été levés. En juillet 2003, le Président de la République, lors de sa visite dans ce territoire, a confirmé l'engagement de l'Etat de rétablir cette clause essentielle et précisé que cela se ferait après les élections provinciales du 9 mai 2004 et avant la fin de son mandat en 2007.

Le FLNKS, tout en prenant acte de cette promesse, a souhaité sa mise en application rapide après les élections de mai. Par ailleurs, les dirigeants de la nouvelle majorité « Avenir ensemble » issue de ces élections, actuellement à la tête du Congrès et du gouvernement de la Nouvelle Calédonie, ont précisé au FLNKS qu'ils étaient favorables au rétablissement du corps électoral tel que les signataires en étaient convenus lors du Comité de signataires de Koné. Ce qui n'a rien d'étonnant puisqu'ils étaient membres du RPCR au moment de la signature de l'accord de Nouméa en 1998. Le président actuel du Congrès, Harold Martin, en était même le co-signataire.

Rien n'empêche donc désormais l'Etat de tenir parole sur cette question primordiale, qui avait fait l'objet de longues et difficiles négociations et qui constitue le point d'équilibre de l'accord, dont dépend la réussite du processus de Nouméa. Allez-vous proposer de mettre ce sujet à l'ordre du jour de la prochaine révision constitutionnelle ?

Mme la Ministre - Ce sujet sensible a fait l'objet d'un engagement très clair du Président de la République, lors de son voyage de 2003 en Nouvelle-Calédonie. Il a dit que la question du corps électoral serait réglée avant la fin de son quinquennat, et je ne peux que confirmer que cet engagement sera tenu, conformément à l'esprit de l'accord de Nouméa. Vous avez évoqué un changement d'interlocuteurs en Nouvelle-Calédonie : je pense qu'il faudra procéder à nombre de vérifications sur le consensus qui avait été obtenu quand j'avais réuni le Comité des signataires à Koné. La question est trop importante pour n'être pas réglée de façon consensuelle, d'autant qu'elle est intimement liée à celle de la citoyenneté en Nouvelle-Calédonie.

Mme Christiane Taubira - Avant de poser ma question, je dirai qu'en entendant tout à l'heure Mme la ministre s'attribuer tant de satisfecit sur tous les sujets, j'hésitais entre l'attendrissement et la compassion. Car des situations humaines et sociales aussi écorchées que le sont parfois les nôtres s'affadissent singulièrement quand elles se traduisent en phrases et en chiffres...

La santé publique en Guyane connaît une situation grave. L'hôpital de Cayenne est classé maternité de niveau 3 et centre de référence. Je souhaite savoir quand le Gouvernement va se décider à construire le pôle femme-enfant qui permettra de rassembler les services de maternité, de pédiatrie et de néonatologie. La réponse qui invoque le plan Hôpital 2007 ne saurait suffire, car 2007 est l'échéance du programme, alors que fin 2004 nous en sommes encore aux études.

Les indicateurs sanitaires sont très inquiétants. L'espérance de vie est inférieure de quatre ans à la moyenne nationale. Les taux de mortalité infantile et périnatale sont trois fois supérieurs à la moyenne nationale. Sida et toxicomanie font des ravages ; les maladies infectieuses et endémiques comme le paludisme, la dengue ou la tuberculose provoquent une forte morbidité. Enfin le mercure reste une préoccupation essentielle. Par ailleurs nous constatons empiriquement une prévalence des cancers, probablement liée à certaines activités industrielles, comme les activités spatiales par exemple : il serait temps de tenir des registres permettant de mesurer le phénomène.

Pour ce qui est des médicaments antipaludéens, le processus législatif et réglementaire est bouclé : le déclenchement du processus de remboursement dépend de la demande des fabricants. Or ils ne la font pas, peu intéressés par une maladie endémique de régions pauvres. Le Gouvernement est-il décidé à ne plus laisser traiter ce dossier comme une affaire commerciale, mais à le prendre en charge comme un dossier de santé publique ?

Enfin, le déficit structurel de l'hôpital de Cayenne est lié essentiellement à certaines catégories de patients, à l'enclavement du territoire et au sous-équipement, voire à l'inexistence de certaines spécialités, d'où résultent de coûteuses évacuations sanitaires. Quelles dispositions entendez-vous prendre pour remédier à ces problèmes ?

Mme la Ministre - Il est vrai que la situation de la santé publique en Guyane est difficile. La situation financière du centre hospitalier de Cayenne est en effet très dégradée. C'est pourquoi le ministère de la santé a notifié en juin à l'ARH une dotation complémentaire de 7,5 millions d'euros. En même temps la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins a organisé dès le début de l'été une mission d'appui et de réalisation d'un audit de la situation budgétaire et comptable de l'établissement. Les conclusions de cette mission permettront de définir les conditions du redressement. Mais, sans attendre, une autorisation d'emprunt de 20 millions d'euros a été accordée au centre hospitalier. Un sujet connexe est celui du recrutement des médecins : j'ai conscience de la difficulté à maintenir en permanence en Guyane un effectif suffisant de médecins et de personnels hospitaliers. Il n'y a malheureusement pas de solution miracle ; outre le recours à des personnels intérimaires et la coopération avec des établissements métropolitains, déjà pratiqués, nous examinons les conditions dans lesquelles pourraient être exceptionnellement autorisés à exercer des médecins titulaires de diplômes étrangers.

Vous avez évoqué deux fléaux : le sida et le mercure. Même si la lutte contre le sida a enregistré des progrès, ils restent insuffisants. C'est pourquoi le plan national de lutte contre le VIH comporte un volet particulier pour les départements français d'Amérique, qui se décline en Guyane sous la forme d'un programme régional 2003-2005 combinant prévention, formation des personnels et prise en charge des malades. Pour ce qui est du mercure, j'ai obtenu que la prévention et la réduction des risques sanitaires liés à une exposition prolongée à ce métal fassent partie des objectifs du plan national « santé environnement » adopté par le Gouvernement en juin 2004 pour la période 2004-2008. En outre des arrêtés du préfet de Guyane ont limité, puis interdit à compter du 1er janvier 2006 le recours au mercure dans l'orpaillage. Bien sûr la mesure ne portera tous ses effets que si nous parvenons à éradiquer l'orpaillage clandestin. Quoi qu'il en soit c'est un sujet sur lequel je suis déterminée à tout faire pour que nos populations ne soient plus exposées à ce risque inadmissible à notre époque.

Sur les autres points, je vais examiner avec le ministre de la santé la meilleure façon de répondre aux préoccupations particulières de la Guyane dans le cadre de notre politique de santé.

M. Victorin Lurel - Madame la ministre, lors de votre audition par la commission des finances du Sénat le 27 octobre, vous vous êtes déclarée prête à étudier une suppression du système de TVA non perçue récupérable. Vous avez également souhaité le remplacement rapide du système des congés bonifiés. La commission des finances du Sénat a donc votre feu vert pour déposer des amendements en ce sens. Son président annonce déjà « une réforme des compléments de rémunération dans les DOM ».

Après l'examen de la loi de finances par le Sénat, nous serons, nous autres députés, mis devant le fait accompli puisque nous ne serons saisis que des conclusions non amendables de la commission mixte paritaire.

Réaffirmez-vous que la politique du Gouvernement outre-mer ne se fait pas par voie d'amendement et que vous vous opposerez à l'adoption de ceux qui ont été annoncés ?

D'autre part, 70 000 tonnes de canne à sucre n'ont pu être récoltées en Guadeloupe. Indemniserez-vous ces pertes de revenus ?

Enfin, respecterez-vous l'engagement que vous avez pris avec M. Devedjian, lors des assises des libertés locales, de rembourser la DGF amputée en 2000, 2001 et 2002, des communes de Guadeloupe? J'espère que vous ne vous contenterez pas, comme vous l'avez annoncé à Joël Beaugendre, de rembourser les seules communes ayant engagé un contentieux contre l'Etat. Ce serait contraire à votre parole. Le conseil général de Guadeloupe, lui, a remboursé.

Mme la Ministre - Qu'il s'agisse de sur-rémunérations, de congés bonifiés ou de remboursement de la TVA non perçue, je ne change pas de position : l'outre-mer ne doit pas refuser par principe les réformes. Il n'y a donc pas de sujet tabou.

En revanche, trois conditions doivent être réunies pour engager des réformes sur des sujets aussi complexes. Premièrement, elles doivent être préparées sur le terrain - et non à Paris - en concertation avec les élus, les milieux économiques, les organisations syndicales. Deuxièmement, elles doivent être précédées d'un diagnostic économique et financier exhaustif. Nous disposons de nombre de rapports qui exposent les effets pervers de ces dispositifs, sans jamais énumérer leurs apports - consommation des ménages, activité économique... Nous devons donc disposer d'une analyse économique étayée avant d'envisager toute réforme. Troisièmement, enfin, les économies budgétaires dégagées par une éventuelle réforme doivent être reversées à l'outre-mer pour soutenir son développement économique et social.

Je n'accepte pas les réformes à coups d'amendements parlementaires. Je m'y suis d'ailleurs opposée l'an dernier. Cela ne m'empêche pas de mandater des études sur tous ces sujets, et j'ai demandé un rapport au Conseil économique et social.

Je ferai un sort particulier aux congés bonifiés. Nombre de nos compatriotes d'outre-mer qui vivent en métropole souhaitent en effet une réforme de ce système, qui n'est plus adapté à leurs besoins et peut même avoir des effets pervers tels que la discrimination à l'emploi. Les bénéficiaires du système préfèreraient, semble-t-il, rentrer tous les ans pour des périodes plus courtes plutôt que de partir tous les trois ans pour deux mois. Je travaille avec les associations, notamment l'AMEDOM. Je les réunirai de nouveau prochainement. Nous ferons en tout cas un grand progrès dans l'intérêt de tous nos compatriotes si nous réussissons à réformer ce système.

Quant à la dotation du conseil général, elle fait partie des ardoises que j'ai héritées de mes prédécesseurs. J'essaye de régler le problème : je n'ai rien d'autre à ajouter.

En ce qui concerne le sucre, le comité du fonds de secours a décidé en octobre dernier une indemnisation des planteurs à hauteur de 260 000 euros. N'hésitez pas à me saisir à nouveau si ces mesures ne suffisaient pas.

M. Alfred Marie-Jeanne - Il n'existe pas de liaison maritime régulière en Martinique dans le cadre du service public. Or, le transport maritime est un moyen, dans un espace géographique aussi circonscrit que la Martinique, de pallier la saturation du réseau routier et ses incidences néfastes sur l'économie, la santé et l'organisation sociale.

Ni la loi sur l'organisation des transports intérieurs, ni le code général des collectivités territoriales, ni la loi sur la démocratie de proximité n'offrent de conditions de sécurité juridique, économique et budgétaire suffisantes à la création d'un système organisé de transport maritime.

Ne conviendrait-il pas d'élaborer un nouveau dispositif législatif et de désigner une collectivité publique déterminée comme autorité organisatrice des transports ?

Mme la Ministre - L'organisation de transports maritimes en Martinique est sans doute une réponse adaptée à la saturation du réseau routier. Les collectivités de Martinique doivent présenter la ou les collectivités à qui reviendra l'organisation de ce service public.

La loi d'orientation sur les transports intérieurs permet déjà de créer un syndicat mixte regroupant les collectivités locales concernées. Si la concertation locale débouchait sur un autre choix, le Gouvernement proposerait une modification législative dans le projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles que je vous présenterai en 2005. La question pourrait aussi être résolue grâce aux pouvoirs normatifs que l'article 73 de la Constitution reconnaît aux départements et aux régions d'outre-mer.

M. Eric Jalton - Le Président de la République a consacré la lutte contre le cancer comme une priorité. Conformément au plan cancer, les femmes de plus de cinquante ans feront ainsi l'objet d'un dépistage du cancer du sein. Ce programme a débuté le mois dernier en Guadeloupe. Mais les 2 000 Marie-Galantaises concernées sont contraites de se rendre en Guadeloupe continentale, le matériel de mammographie de l'île de Marie-Galante étant obsolète.

Le 28 avril, le ministère de la santé s'est engagé, dans le cas où le service public hospitalier serait la seule ressource d'un secteur isolé pour la mammographie et où des investissements s'avéreraient nécessaires, à débloquer des fonds exceptionnels. Le directeur de l'ARH de Guadeloupe a donc adressé au ministère une demande de subvention exceptionnelle, restée sans réponse. Sollicité par l'Association guadeloupéenne pour le dépistage des cancers, qui finance les frais de transport par bateau des 2000 femmes concernées, je vous demande d'intervenir auprès du ministre de la santé pour que les engagements pris soient tenus ou, à défaut, de boucler le budget en finançant la moitié du prix de l'appareil sur le budget de votre ministère.

Mme la Ministre - Les femmes de Marie-Galante doivent aujourd'hui se déplacer à Pointe-à-Pitre pour subir l'examen radiologique du dépistage. J'ai donc le plaisir de vous confirmer le principe d'un cofinancement avec l'ARH pour l'achat d'un nouvel appareil.

M. Eric Jalton - Je remercie Mme la ministre de ce geste que la population appréciera en attentant qu'une collectivité territoriale digne de ce nom soit créée à Marie-Galante et aux îles du sud de la Guadeloupe.

M. Louis-Joseph Manscour - Mme la ministre a répondu à mes questions sur les congés bonifiés et sur la TVA.

M. Victorin Lurel - Je souhaiterais que Mme la ministre explicite son point de vue concernant l'évolution statutaire des îles du nord, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, qui, selon sa déclaration devant la commission des finances du Sénat, devra se faire à budget constant par redéploiement des crédits de la région Guadeloupe.

Le déficit de la commune de Saint-Martin s'élevant à 16 millions, les besoins en infrastructures et en personnels étant importants, il semblerait que l'évolution statutaire des îles du nord se ferait donc en amputant les dotations destinées à la Guadeloupe. Dans le cas contraire, comment seraient financées les nouvelles compétences confiées à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy ?

En outre, quelle est la position juridique du Gouvernement sur les conséquences de cette évolution statutaire eu égard à l'Europe ? Une sortie du droit commun européen permettrait-elle de concilier le statut dérogatoire des deux îles et le bénéfice des fonds structurels ?

Mme la Ministre - Je l'ai déjà dit : la part des dotations de l'Etat actuellement attribuée à la Guadeloupe et qui correspond à la population des deux îles du nord sera désormais versée aux deux nouvelles collectivités selon les critères habituellement retenus pour le calcul de ces dotations.

De plus, ces deux collectivités étant pourvues de l'autonomie fiscale, elles devront dégager les ressources nécessaires à leur fonctionnement. L'Etat, quant à lui, adaptera l'organisation de ses services à la création des deux collectivités.

Depuis 2002, un effort important a déjà été réalisé pour renforcer l'action de l'Etat dans ces îles et en particulier pour lutter contre la délinquance et l'immigration clandestine à Saint-Martin. Le changement de statut de l'île n'implique nullement une réduction de ces moyens.

La question du statut des régions ultra périphériques de l'Europe est un faux débat. Si Saint-Martin et Saint-Barthélemy souhaitent garder ce statut, elle le conserveront. Je rappelle que dans le nouveau traité européen, nous avons non seulement confirmé le statut de RUP de nos quatre DOM, mais nous avons également prévu une évolution possible de ce statut jusqu'à son éventuel abandon par ces territoires.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions. J'appelle les crédits inscrits à la ligne outre-mer.

Les crédits inscrits aux titres III et IV de l'état B, mis aux voix, sont adoptés.

Les crédits inscrits aux titres V et VI de l'état C, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'outre-mer.

Prochaine séance cet après-midi, mercredi 10 novembre, à 15 heures.

La séance est levée à 1 heure 10.

              Le Directeur du service
              des comptes rendus analytiques,

              François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MERCREDI 10 NOVEMBRE 2004

A QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement

A DIX-SEPT HEURES :

2. Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800).

Rapport (n° 1863) de M. Gilles CARREZ, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Santé, famille, personnes âgées et personnes handicapées ; articles 77 à 79

Rapport spécial (n° 1863 annexe 37) de M. Gérard BAPT, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

- Santé

Avis (n° 1864 tome 11) de Mme Bérengère POLETTI, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

- Personnes handicapées

Avis (n° 1864 tome 12) de Mme Geneviève LEVY, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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