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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 57ème jour de séance, 139ème séance

2ème SÉANCE DU LUNDI 7 FÉVRIER 2005

PRÉSIDENCE de M. François BAROIN

vice-président

Sommaire

      RAPPELS AU RÈGLEMENT 2

      RÉFORME DE L'ORGANISATION DU TEMPS
      DE TRAVAIL DANS L'ENTREPRISE (suite) 2

      ART. 3 (suite) 3

      ORDRE DU JOUR DU MARDI 8 FEVRIER 2005 12

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

RAPPELS AU RÈGLEMENT

M. Gaëtan Gorce - Je souhaite faire un rappel au Règlement relatif à l'organisation de nos travaux (Murmures sur les bancs du groupe UMP), car je considère qu'il est de mon devoir de tenter à nouveau d'obtenir une réponse du Gouvernement. Monsieur le ministre délégué aux relations du travail, de quelle manière entendez-vous donner suite à la demande des organisations syndicales d'ouvrir les négociations qui n'ont pas eu lieu avant l'examen de ce texte, lequel n'a d'ailleurs fait l'objet d'aucune forme de concertation ? Le secrétaire général de la CFDT a posé à ce sujet des conditions parfaitement raisonnables, en demandant notamment que la négociation collective ne puisse être contournée d'aucune façon et que toutes les dispositions n'ayant rien à voir avec les 35 heures ne soient pas remises en cause. Le Gouvernement est-il enfin disposé à répondre à ce vœu de dialogue social ?

M. Jean-Pierre Brard - Si l'on ne veut pas que notre Assemblée ressemble à un théâtre d'ombres, il faut y tenir des débats en phase avec la réalité du pays. Depuis plus de trois ans que ce gouvernement est aux affaires, croyez bien que nous ne sommes pas les seuls à trouver le temps long ! Au reste, il semble que les effets de la réforme de la sécurité sociale atteignent jusqu'aux membres du Gouvernement, puisque eux-mêmes ne semblent plus avoir les moyens de s'appareiller pour entendre le mouvement social... (Sourires sur quelques bancs) Après les coups de pied aux fesses électoraux du printemps dernier, l'avertissement de samedi dernier a été sévère. Allez-vous laisser le pays continuer à s'enfoncer dans la morosité ou sortirez-vous enfin de votre autisme, particulièrement destructeur pour la cohésion sociale ?

M. le Président - Chers collègues, je donne encore la parole à M. Le Garrec pour un rappel au Règlement, mais je souhaite que nous puissions ensuite poursuivre nos travaux dans des conditions normales. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; « Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Le Garrec - Vous connaissez mon souci de rigueur : je ne puis laisser persister l'erreur que j'ai commise en baptisant Népomucène au lieu de Thémistocle l'honorable parlementaire Lestiboudois, de surcroît biologiste, et non filateur à Elbeuf...

Cet après-midi, notre collègue Soisson a fait une intervention clef sur la nécessité qui se ferait jour désormais d'individualiser les rapports entre le salarié et le chef d'entreprise. Il convient de bien mesurer toutes les conséquences d'une telle évolution.

Quant à notre rapporteur, dont je ne saurais mettre en doute la compétence, je me fais un devoir de l'empêcher de commettre l'erreur qui consisterait à faire référence à l'article L. 212-15-3 du code du travail, lequel traite quasi exclusivement des cadres au forfait...

M. Patrick Ollier - Ce n'est pas un rappel au Règlement !

M. Jean Le Garrec - A l'évidence, M. Morange s'est livré à une interprétation par trop extensive de cet article du code.

RÉFORME DE L'ORGANISATION DU TEMPS DE TRAVAIL
DANS L'ENTREPRISE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi de M. Patrick Ollier et plusieurs de ses collègues portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise.

ART. 3 (suite)

M. Hervé Morin - Notre amendement 87 est important, en ce qu'il tend à mettre fin à une injustice introduite par les lois Aubry, et combattue en son temps par le parti communiste notamment : les salariés des entreprises de moins de vingt salariés ne bénéficient pas du même régime de majoration des heures supplémentaires que ceux des « plus de 20 », alors même qu'ils n'ont déjà pas accès aux avantages sociaux liés à l'existence d'un comité d'entreprise ou d'un accord de prévoyance complémentaire. Particulièrement inéquitable, la prorogation jusqu'en 2008 du régime dérogatoire risque également de démotiver les salariés des « moins de 20 » désireux de faire des heures supplémentaires.

Le Gouvernement doit réfléchir aux moyens de mettre fin à cette injustice, d'autant plus que ce sont les petites entreprises - je pense aux menuisiers, aux maçons, aux ébénistes... -, qui ont le plus besoin de faire effectuer des heures supplémentaires. Ce sont donc les salariés de ces entreprises qu'il faut motiver et récompenser.

Le dispositif actuel nuit à la création de valeur ajoutée et de richesses. La question de fond est de savoir si les 35 heures empêchent notre pays de produire davantage. Sur le sujet, notre proposition est exactement celle de François Bayrou lors de la campagne présidentielle, à savoir le maintien de la durée légale du travail à 35 heures, avec majoration de 25% des heures supplémentaires de la 35e à la 39e heure pour tous les salariés, quelle que soit la taille de l'entreprise, et réduction à due concurrence des cotisations sociales de façon que cela ne coûte rien aux entreprises.

Monsieur le président, je vois que vous m'invitez du geste à conclure, mais c'est un amendement important...

M. le Président - Ce n'est pas parce qu'il est important que vous disposez de davantage de temps pour le défendre.

M. Hervé Morin - Nous n'avons pas jusqu'à présent abusé de notre temps de parole. Je défends ici un amendement important de façon argumentée, contrairement à nos collègues socialistes.

M. le Président - Ne perdons pas de temps. Je vous ai adressé un signe amical. Veuillez conclure.

M. Hervé Morin - Le dispositif que nous proposons mettrait fin à l'inégalité entre entreprises de moins et de plus de vingt salariés. Si l'on veut vraiment créer des emplois et de la richesse, plutôt que de distribuer des aides aux grands groupes, il faut aider les petites entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Pierre Morange, rapporteur de la commission des affaires sociales - Avis défavorable. Ce dispositif coûterait au moins plusieurs centaines de millions d'euros...

M. Hervé Morin - Ce n'est pas grand-chose.

M. le Rapporteur - ...ce qui ne serait pas sans conséquence sur l'équilibre des comptes sociaux et sur la dette publique, pour lesquels vous demandez, à juste titre, qu'il n'y ait aucun dérapage. Et il serait d'autant plus coûteux qu'il concernerait toutes les entreprises, et pas seulement celles de moins de vingt salariés.

Il serait en outre complexe à mettre en œuvre, certains salariés n'étant pas soumis à un décompte horaire, mais forfaitaire, de leur temps de travail. Il risquerait d'y avoir là une différence de traitement.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail - J'ai eu l'occasion de rappeler cet après-midi que le Gouvernement n'était pas favorable à une différenciation des règles selon la taille des entreprises. C'est d'ailleurs pourquoi a été prévue une date-butoir pour le régime transitoire actuel. Vous proposez, vous, une tout autre solution. Nous partageons votre analyse sur le fait que l'essentiel des emplois se crée aujourd'hui dans les petites entreprises et comprenons donc vos préoccupations. Mais votre proposition ne coûterait pas moins de 500 millions d'euros et irait à l'encontre de l'unification et de la simplification recherchées en matière de calcul et d'exonération des cotisations sociales, notamment par la loi Fillon qui les a déconnectées de la réduction du temps de travail. Enfin, nous souhaitons que cette période transitoire soit exploitée par les partenaires sociaux pour négocier non seulement sur le régime des heures supplémentaires, mais aussi sur de nombreux autres points, comme c'est toujours le cas lorsque s'engage le dialogue social. Pour l'heure, nous souhaiterions le retrait de cet amendement, tout en reconnaissant l'opportunité d'une réflexion sur le champ des exonérations. Mais ce n'en est ici ni le lieu ni le moment. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. Alain Vidalies - Ne nous laissons pas abuser par le débat qui vient de s'ouvrir entre l'UDF et le Gouvernement ! Nous voyons bien, en effet, que, lorsque pour la première fois dans l'histoire de notre droit social, on rend possible de déroger individuellement aux dispositions légales ou conventionnelles, l'UDF approuve ce qui est un concept fondamentalement anglo-saxon !

Que les heures supplémentaires en question ne s'imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel de 220 heures, modifié par décret juste avant l'ouverture de ce débat, voilà la cerise sur le gâteau ! Vous expliquez, sous couvert d'argument social, qu'il faut améliorer la rémunération des heures supplémentaires, mais en mettant cela à la charge de la collectivité. En quoi vous séparerez-vous donc de l'ultra-libéral M. Novelli, qui assume cependant, lui, ses positions avec courage, tandis que ses collègues de l'UMP, qui partagent les mêmes idées, essaient de se faire plus discrets ?

Le groupe socialiste demande un scrutin public sur cet amendement 87.

M. Hervé Morin - Nous en souhaitions un également.

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur le ministre, vous venez de nous dire que le Gouvernement n'est pas favorable aux différences de traitement. C'est avoir la mémoire courte ! Rappelez-vous la dernière loi de finances où ont été votées sept milliards d'euros d'augmentations d'impôts pour les plus modestes et six milliards de baisse pour les plus riches : n'est-ce pas une « différence de traitement » ?

Quant à vous, Monsieur Morin, voilà que vous vous opposeriez désormais aux grands groupes, au grand capital. C'est en réalité qu'avec votre groupe, vous ramez comme des galériens pour essayer de proposer autre chose que l'UMP. M. Novelli, lui, au moins, a des propositions, qu'il assume « avec courage », nous a dit M. Vidalies, avec témérité et inconscience même, dirai-je. Vous avez bien fait référence à François Bayrou, et même à ses ambitions présidentielles, secret de Polichinelle, mais enfin...

J'en viens à l'amendement lui-même. Vous pensez qu'il faudrait faire davantage d'heures supplémentaires. Or, chacun sait que plus leur quantité augmente, moins il y a d'embauches et plus il y a donc de chômage. (« Faux ! » sur les bancs du groupe UMP) Lorsque nous avons défendu la semaine dernière un amendement visant à ce que le refus d'effectuer des heures supplémentaires ne puisse être un motif de licenciement, l'UDF est restée muette. Lorsqu'il s'agit de protéger les salariés, en dépit de circonlocutions seulement destinées à amuser la galerie, vous vous abstenez, mais lorsqu'il s'agit de charger encore davantage le baudet, tout en jouant le Saint-Bernard des PME, vous ne résistez pas !

Le discours de M. Morin était tout à fait intéressant, dans le genre paternaliste. Il ne parle pas en effet de rémunérer les salariés, mais de les « récompenser »... Je pense à ces dauphins que j'ai vus l'été dernier, à qui, après qu'ils se soient donnés en spectacle, on jette du poisson pour les récompenser. Ce que M. Morin propose, c'est de récompenser les salariés qui accepteront de sacrifier encore un peu plus de leurs droits sur l'autel du profit, fût-ce celui des petites entreprises.

Quand on est passé de l'écartèlement à la guillotine, c'était un progrès, car il y avait moins de souffrance ; mais le résultat n'en était pas moins le même. M. Morin propose un peu la même chose pour le droit du travail : le résultat sera pire, mais on aura passé de la pommade pour diminuer la douleur... Nous ne pouvons donc soutenir cet amendement, et il est important de le démasquer au fond.

M. Hervé Morin - Eh bien, nous, nous assumons ! Depuis 2002, nous demandons au Gouvernement d'avoir le courage de considérer que les 35 heures sont une erreur historique pour notre pays, et nous affirmons qu'il appartient au législateur de remettre en cause un système qui interdit à nos compatriotes d'être correctement rémunérés. Nous assumons l'idée que la France ne saurait être le seul pays occidental à travailler moins de 1 600 heures, quand tous les autres en font plus de 1 800.

Nous regrettons donc que le Gouvernement ait manqué de courage, et que nous ayons ce débat dans des conditions qui donnent à nos concitoyens le sentiment qu'on remet en cause les 35 heures - alors qu'in fine ce n'est pas le cas : il suffisait, ce week-end, de lire la déclaration des directeurs des ressources humaines, estimant que le compte épargne-temps ne changerait pas grand-chose, pour se convaincre que ce n'est pas ce qui permettra à notre pays de produire davantage... Nous assumons l'idée que la France doit travailler plus si elle veut dégager plus de valeur ajoutée et permettre à nos compatriotes de gagner mieux leur vie. Nous n'avons aucune hésitation à dire que les salariés doivent être traités de la même façon dans les entreprises de moins et de plus de vingt salariés. Nous n'avons aucune hésitation à dire que les lois Aubry ont consacré 6 milliards d'euros à payer le non-travail, et que les 35 heures ont coûté 15 à 20 milliards par an si l'on inclut le coût pour les collectivités locales : des sommes que l'on aurait pu consacrer à bien d'autres choses, comme les universités, la recherche, ou des politiques sociales comme celle du handicap... Nous affirmons sans hésiter que les 35 heures sont une erreur historique ; le Parlement doit se saisir de cette question, autoriser ceux qui veulent rester à 35 heures de le faire, mais permettre à notre pays de produire davantage. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Brard considère les heures supplémentaires comme un facteur de chômage. Comment peut-on penser ainsi, comme si les hommes étaient interchangeables ? Quand un maçon est sur un mur pendant trente-cinq heures, va-t-on pouvoir le remplacer par un autre salarié pour quatre heures ? Il a un savoir-faire, une compétence. La folle idée que les hommes sont interchangeables ne pouvait venir qu'à des marxistes (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP). On ne peut remplacer indéfiniment les hommes par les hommes, sauf à considérer qu'ils sont tous les mêmes, c'est-à-dire qu'ils ne valent rien !

Donc nous assumons. Et depuis 2002 nous aurions aimé que le Gouvernement assume de même. En 2002 nous avons tous fait campagne contre les 35 heures : jamais nous n'avons entendu un de nos électeurs les défendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Hervé Novelli - M. Morin a tout à fait raison de considérer, comme nous tous d'ailleurs sur ces bancs, que les 35 heures ont été une erreur historique. La réduction du temps de travail ne peut être justifiée que par des progrès de la productivité, et c'est toujours une erreur de violer les lois de l'économie. Au-delà de cet accord sur le jugement - qui a été celui de la mission d'information -, l'amendement de M. Morin a aussi le mérite de souligner que la division entre les entreprises de plus et de moins de vingt salariés n'est pas saine. La mission d'information l'avait bien noté, et elle avait proposé un dispositif semblable à celui de M. Morin. Mais nous l'avions chiffré. M. le ministre nous a rappelé que le coût de cet allègement de charges était d'environ 500 millions d'euros.

M. Hervé Morin - Et alors ? On a trouvé un milliard pour les restaurateurs...

M. Jean Le Garrec - Il a raison.

M. Hervé Novelli - Il faut raison garder. Quand on sait qu'en 2005 le coût brut des 35 heures sera de 15 milliards, il faut écouter le Gouvernement quand il nous dit que cette dépense de 500 millions est impossible, car les finances de notre pays sont dégradées. Songez que le coût des 35 heures représente un point de PIB... Par conséquent, tout en comprenant bien le sens de l'amendement, le groupe UMP ne pourra le voter.

A la majorité de 62 voix contre 8, sur 70 votants et 70 suffrages exprimés, l'amendement 87 n'est pas adopté.

M. Gaëtan Gorce - Rappel au Règlement.

M. le Président - Fondé sur quel article ?

M. Gaëtan Gorce - L'article 58, alinéa 1. Puisque le Gouvernement n'a pas répondu à notre question, sur le point de savoir s'il entendait donner suite à la demande de discussion exprimée fortement ce week-end par les partenaires sociaux, peut-être les auteurs de la proposition de loi, dont plusieurs sont présents, accepteraient-ils de le faire ? Je pose donc la question à MM. Morange, Novelli, Ollier ou Dubernard : êtes-vous prêts à suspendre ce débat pour ouvrir la discussion avec les syndicats, qui la demandent tous ? Si vous voulez répondre non aux partenaires sociaux, dites-le clairement maintenant : ne laissez pas le Gouvernement le faire à votre place !

M. le Président - Permettez-moi, à titre pédagogique, de relire l'article 58 alinéa 1 : « Les rappels au Règlement et les demandes touchant au déroulement de la séance ont toujours priorité sur la question principale ; ils en suspendent la discussion. La parole est accordée à tout député qui la demande à cet effet soit sur-le-champ, soit, si un orateur a la parole, à la fin de son intervention. » Mais il faut lire aussi le deuxième alinéa, qui dit : « Si, manifestement, son intervention n'a aucun rapport avec le Règlement ou le déroulement de la séance, ou si elle tend à remettre en question l'ordre du jour fixé, le Président lui retire la parole. » Votre intervention pourrait être critiquée au regard de ces trois critères !... Je vous rends maintenant la parole pour présenter l'amendement 64.

M. Gaëtan Gorce - Si je me suis permis à l'instant de faire ce rappel au Règlement, Monsieur le président, c'est qu'il était nécessaire à la bonne marche du débat (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Marie Le Guen - Voilà comment ils interprètent les propos du président : de façon partisane ! (Mêmes mouvements)

M. Gaëtan Gorce - Mon rappel au Règlement était destiné à éclairer un point politiquement important : comment le Gouvernement et la majorité entendent-ils répondre aux partenaires sociaux ? Voilà qui n'est tout de même pas sans conséquences.

M. le Président - Venons-en à l'amendement 64.

M. Gaëtan Gorce - Cet amendement vient en discussion parce que nous n'avons pas eu de réponse du Gouvernement et de la majorité sur l'attitude qu'ils vont tenir face aux partenaires sociaux. Je suis très inquiet quand je vois comment la majorité conçoit la concertation et le dialogue social. Des centaines de milliers de personnes défilent pour demander le dialogue : on n'en tire aucune conséquence. On veut passer, faire voter le texte. Or on voit bien où nous mènent vos propositions, et c'est pourquoi les partenaires sociaux sont unanimes à les contester. Vous pérennisez un dispositif de discrimination entre les salariés selon la taille de l'entreprise. Ce dispositif, qui consiste à calculer différemment la rémunération des heures supplémentaires ou à modifier le seuil d'imputation du contingent, n'avait été introduit pour la période de 2000 à 2002 que pour favoriser la transition et permettre aux petites entreprises de s'adapter à la nouvelle législation. Mais aujourd'hui vous proposez, après l'avoir prolongée déjà par deux fois, d'installer définitivement cette discrimination. Or elle est socialement grave, car c'est dans ces entreprises que les problèmes sociaux se posent de la façon la plus vive, que les conditions de travail sont les plus délicates, et que les garanties collectives font le plus souvent défaut. Vous installez définitivement un système à deux vitesses.

Environ les deux tiers ou les trois quarts des salariés sont aujourd'hui passés aux 35 heures. Mais si la proportion est de 70 ou 80% dans les grandes entreprises, elle atteint à peine 20 ou 25% dans les entreprises de moins de vingt salariés. Or votre dispositif encourage en fait ces entreprises à ne jamais passer aux 35 heures. Allez donc dire à leurs 6 millions de salariés qu'ils n'auront pas droit aux 35 heures et qu'il y aura dans ce pays deux législations pour la durée du travail ! C'est grave ! Peut-être rencontrez-vous beaucoup de chefs d'entreprise qui se plaignent du caractère insupportable des 35 heures, mais nous rencontrons, nous, beaucoup de salariés qui ne comprennent pas l'injustice qui leur est faite.

M. le Président - Je vous remercie.

M. Gaëtan Gorce - Permettez-moi d'aller au bout de mon argumentation. Nous sommes là sur un point important...

M. le Président - Tout est important : c'est pourquoi il faut respecter les temps de parole.

M. Gaëtan Gorce - La majorité institutionnalise une injustice. C'est extrêmement grave, sur le plan social comme sur le plan juridique. Nous ne pouvons donc l'accepter.

M. le Rapporteur - La commission a émis un avis défavorable à cet amendement.

M. le Ministre délégué - Le Gouvernement partage l'avis de la commission. Puisque vous m'avez demandé quelles étaient nos intentions, je voudrais vous rappeler les propos du Premier ministre...

M. Bruno Le Roux - C'est une provocation ! Depuis ce matin, nous lui demandons de venir ici ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Patrick Ollier - Le Premier ministre n'est pas aux ordres du groupe socialiste !

M. le Président - Laissez le ministre s'exprimer, Monsieur Le Roux.

M. le Ministre délégué - Je ne méprise évidemment pas les manifestations. Mais nous sommes dans une démocratie, et c'est le Parlement qui vote la loi. Par conséquent, le débat se poursuit selon le calendrier prévu. (M. Le Roux proteste violemment)

M. le Président - Ne m'obligez pas à vous rappeler à l'ordre, Monsieur Le Roux.

M. Gaëtan Gorce - Le Gouvernement ne répond pas aux questions qu'on lui pose !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Rappel au Règlement sur le déroulement du débat. Nos discussions de la semaine dernière ont été très intéressantes. Je regrette d'ailleurs que le contenu de notre débat ait été si peu expliqué : s'il l'avait mieux été, il y aurait eu bien plus de gens encore pour défiler (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Nous avions tous compris vendredi matin que rendez-vous était pris pour après la manifestation de samedi après-midi. Nous avons entendu le Premier ministre invoquer le débat parlementaire : nous attendions donc qu'il vienne s'exprimer devant nous. Il y a en effet provocation quand le ministre délégué nous relit une déclaration que nous avons tous entendue ce matin et selon laquelle c'est au Parlement que les choses se passent ! Que le Premier ministre vienne plutôt nous dire comment il répond aux 500 000 hommes et femmes qui sont descendus dans la rue ! Et si c'est la montre que vous jouez, on le leur dira !

M. Jean Le Garrec - Je voudrais dire au ministre qu'on ne peut pas confondre provisoire et indéfini. Nous avions considéré, s'agissant des petites entreprises, qu'il fallait quelque délai avant d'aller plus loin. Nous avions fixé le terme à 2002. La loi Fillon l'a repoussé à 2005, et vous nous proposez maintenant de le reporter à 2008 !

Cet article est truffé de problèmes. Par exemple, le décompte se fait à partir de la trente-sixième heure, ce qui permettra de grappiller 47 heures de travail : c'est inacceptable.

M. Hervé Novelli - Cela ne date pas d'aujourd'hui !

M. Jean Le Garrec - Le ministre l'a reconnu, ce sont les petites entreprises qui créent des emplois. Avec ce texte, leurs salariés pourront travailler 44 heures pendant douze semaines et 41 heures pendant trente-cinq semaines. Laissons de côté la santé et les conditions de travail : pourquoi voulez-vous que des entreprises à qui l'on offre cette possibilité embauchent quand, au surplus, le coût de l'heure supplémentaire n'est majoré que de 10% ?

Nous aurions souhaité la venue du Premier ministre, car sa déclaration comportait de lourdes erreurs. Par exemple, il faudrait le double accord du salarié et du chef d'entreprise : c'est faux ! Le double accord n'est prévu que pour le temps choisi ! Ou bien le Premier ministre ne connaît pas suffisamment le texte, ou bien il trompe délibérément les salariés, ce qui ne serait pas acceptable.

Quand vous parlez des abattements sur les cotisations, Monsieur Novelli, n'oubliez pas que les 17 milliards incluent les abattements Juppé et les abattements Balladur.

M. Patrick Ollier - C'est 15 milliards !

M. Jean Le Garrec - Soit, mais il y a tout de même un milliard pour l'hôtellerie-restauration. Dans le cadre des 35 heures, ces abattements étaient liés à des contreparties - discussions sur l'emploi, l'organisation du travail, les salaires. Vous les avez fait disparaître. Alors, de grâce, Monsieur Novelli, arrêtez de nous donner des leçons !

M. le Président - Sur le vote de l'amendement 64, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Mme Martine Billard - M. Morin a parlé d'erreur historique : l'argent consacré aux 35 heures aurait, nous a-t-il dit, pu être consacré à d'autres priorités. Mais les erreurs historiques sont ailleurs ! Les sommes consacrées à la baisse de l'ISF et de l'impôt sur le revenu auraient pu l'être bien plus utilement à l'éducation ou à la santé, par exemple.

Les 35 heures ont été bénéfiques à la santé des salariés. En outre, ils ont pu consacrer le temps ainsi libéré à des activités tout aussi productives pour la société. Je sais bien que dans les rangs de la majorité, on ignore parfois qu'il peut y avoir de l'emploi dans le secteur non marchand.

Permettez-moi de vous citer la partie XIII du traité de Versailles, consacrée au travail, dont l'article 427 précise que « le travail ne doit pas être considéré simplement comme une marchandise ou un article de commerce. »

M. Jean-Pierre Soisson - Nous sommes tous d'accord !

Mme Martine Billard - Je l'extrais d'un livre de M. Ernest-Antoine Seillière, intitulé Qu'est-ce que le Medef ? Ceux qui entendent revenir à la négociation individuelle entre le salarié et son employeur sont donc particulièrement en retard - leur référence doit être la loi Le Chapelier de 1791 !

Quant aux dérogations pour les petites entreprises, qu'est-ce qui nous garantit que vous ne continuerez pas à les proroger, tous les trois ans ? Déjà, avec celle que vous venez de décider, les salariés auront perdu du pouvoir d'achat pendant huit ans ! Vous pouvez toujours répondre que, pour les deux premières années, c'était le fait du gouvernement précédent : les salariés étaient prêts, alors, à supporter une courte stabilisation de leur salaire en contrepartie des 35 heures. Mais pour les six années suivantes, et sans aucune contrepartie, c'est autre chose ! Je pense que vous aurez des problèmes pour trouver des salariés pour vous soutenir en 2007, au moment où vous en aurez besoin !

A la majorité de 66 voix contre 26, sur 92 votants et 92 suffrages exprimés, l'amendement 64 n'est pas adopté.

M. Jean-Marc Ayrault - J'arrive tout juste de Turquie, où j'ai accompagné le président de l'Assemblée. Je tiens à rendre hommage à tous les députés qui ont siégé très tard dans la nuit de jeudi, mais je ne trouve pas très digne pour l'Assemblée nationale d'avoir mené ses travaux à marche forcée jusqu'à six heures et demie du matin, au détriment de leur qualité. Je crois que ce sentiment est partagé bien au-delà des bancs du groupe socialiste. Sur un texte aussi important, il me semble que le Gouvernement aurait pu prendre le temps de la réflexion. Notre détermination, en tout cas, est intacte, surtout après les déclarations faites ce matin par le Premier ministre. Dans la loi de cohésion sociale que vous avez vous-même fait voter, vous avez réclamé que toute législation soit précédée d'une négociation. Nous ne demandons rien d'autre ! Après les manifestations de samedi, les organisations demandent unanimement à être reçues. Faites-le avant de nous obliger à poursuivre nos travaux sur ce texte ! Pour l'instant, le groupe socialiste doit faire le point et je vous demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 22 heures 35, est reprise à 23 heures 5.

M. le Ministre délégué - L'amendement 154 du Gouvernement vise à clarifier la proposition en supprimant le 1° du I, qui n'est pas nécessaire dès lors que le 2° introduit par la commission définit avec suffisamment de précision le contenu du régime transitoire applicable aux entreprises de moins de 20 salariés encore non couvertes par un accord de branche. Ce régime donne aux partenaires sociaux le temps nécessaire pour conclure des accords de branche ou d'entreprise appropriés aux caractéristiques des entreprises de petite taille.

M. le Président - Je suis saisi de trente-six sous-amendements.

M. Gaëtan Gorce - Nos amendements 2075 à 2083 visent à préciser la portée de cet amendement. Nous ne pouvons partager la volonté du Gouvernement et de sa majorité de maintenir en permanence une discrimination entre les salariés des petites entreprises et ceux des grandes. Il faut que chacun le comprenne, ce qui est proposé par le Gouvernement, c'est que les salariés des petites entreprises n'aient jamais droit aux 35 heures. Cette disposition est contraire à ce que réclament les partenaires sociaux : un véritable calendrier du passage aux 35 heures.

On invoque la liberté ; vous prenez en fait beaucoup de libertés avec la liberté. Ce que demandent les salariés des petites entreprises, c'est de bénéficier des mêmes avantages que les autres. Or, les trois quarts d'entre eux ont été privés de la réduction du temps de travail.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné ces sous-amendements, auxquels je suis défavorable.

M. le Ministre délégué - Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Brard - C'est un peu court !

M. Jean-Pierre Soisson - Ce débat, nous l'avons déjà eu dans la nuit de jeudi à vendredi. Nous avons tranché.

L'amendement du Gouvernement ne fait que répondre à une demande des députés socialistes, qui ont estimé imprécise l'expression « dans l'attente de ». Le Gouvernement répond à leur attente et j'espère qu'ils vont nous suivre dans le vote de cet amendement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Parmi les tours de passe-passe du Gouvernement, il nous est proposé de faire disparaître toute référence aux accords de branche étendus. Le retrait de cette mention s'inscrit dans la logique de M. Novelli visant à casser les instruments de la négociation sociale.

L'accord étendu a pourtant un double intérêt. D'une part, l'examen de la convention par la commission nationale évite les détournements de procédure. D'autre part, la validation ministérielle peut entraîner la mise en jeu de la notion d'ordre public social. Quoique entamée aujourd'hui, cette notion a encore une réalité. Elle rappelle qu'il existe une limite en deçà de laquelle on ne peut aller sans rompre l'acquis collectif garanti dans le Préambule de la Constitution de 1946.

Nous ne sommes donc pas dans l'anecdote, mais dans le fond du débat. Il faut maintenir un processus de validation. Quant à l'extension, elle garantit la protection des parties, et pas seulement celle des salariés.

M. Alain Vidalies - Ce débat n'est pas anecdotique en effet. Vous voulez manifestement détruire le droit du travail. Et en deux ans, le bilan est assez étonnant ! La loi de cohésion sociale a osé remettre en cause la hiérarchie des normes entre la loi, le règlement, l'accord de branche et l'accord d'entreprise. Lors de la première rédaction de la présente proposition de loi, vous faisiez encore référence à la notion d'accord de branche étendu, mais c'était encore trop.

M. le Président - Nous en venons à neuf sous-amendements identiques.

M. Alain Vidalies - Le sous-amendement 2059 procède de la même logique. Rappelons tout de même que les dérogations autorisées au niveau des accords de branche avaient été étendues à l'accord d'entreprise et à l'accord d'établissement, sans que l'Assemblée nationale puisse en débattre. Et pour cause ! Le Gouvernement s'était contenté de déposer un seul article pour étendre au niveau de l'entreprise toutes les dérogations possibles au niveau de la branche. Ce n'est qu'en lisant le rapport que l'on a pu réaliser que cette extension concernait des matières aussi importantes que les heures supplémentaires, le travail le dimanche ou le travail de nuit. Par crainte du juge constitutionnel, le Sénat a déposé ensuite des amendements pour que la dérogation soit valable texte par texte, et l'accord obtenu en CMP a empêché l'Assemblée d'y revenir.

Avec ces amendements, nous souhaitons vous rappeler notre opposition à ce dispositif.

M. Jean Le Garrec - Le sous-amendement 2060 est identique. Le Gouvernement ne cache plus guère sa volonté de démanteler le système.

M. Jean-Pierre Brard - Il se tait, surtout !

M. Jean Le Garrec - Son amendement est un aveu ! Parce qu'il estime que les accords d'entreprise et de branche, a fortiori les accords de branche étendus, seront très difficiles à obtenir, il laisse aux entreprises jusqu'à 2008 pour les réaliser, et en attendant, les autorise à passer des accords directement avec le salarié. Le Gouvernement est pris en flagrant délit d'individualisation des rapports entre l'entreprise et le salarié.

M. Jean-Pierre Brard - La main dans le sac !

M. le Président - Sur le vote des sous-amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis.

M. Gaëtan Gorce - Je ne m'étonne pas de cette réponse, même si je ne comprends pas que le rapporteur ne défende pas davantage un texte dont il serait l'un des auteurs. L'opposition a le souci d'éclairer le débat, et les explications précises de MM. Vidalies, Le Garrec, Le Bouillonnec ont le mérite de faire apparaître tous les dangers de ce texte.

M. Alain Vidalies - Le sous-amendement 2050 tend à remplacer « l'accord ou la convention fixant » par « la convention ou l'accord de branche étendu fixant ».

M. Patrick Ollier - Quel est l'intérêt ?

M. Alain Vidalies - Votre question prouve bien que le débat est à reprendre ! Là réside toute la question de la transformation par le pouvoir politique d'un accord contractuel signé au niveau de la branche, ou au niveau interprofessionnel, en norme. Et voilà que vous supprimez ce pouvoir de décision.

M. Hervé Novelli - Il faut faire confiance à la convention !

M. Alain Vidalies - Vous écartez même la nécessité d'une appréciation des pouvoirs publics pour déroger au droit conventionnel. Au reste, votre formulation est elle-même assez saugrenue : qu'est-ce qu'un accord de branche non étendu ? Vous créez là un objet juridique non identifié ! Je vois d'ailleurs que la majorité ne suit pas mon raisonnement... (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) En fait, vous tendez à rétablir un droit archaïque, ce qui sied finalement assez bien à cette majorité !

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis.

M. Gaëtan Gorce - Je suis assez sidéré du silence de notre rapporteur ! Pour rester dans Cyrano de Bergerac, je dirais que nous venons d'entendre la tirade des faux-nez (Sourires). Et je serais tenté de dire à M. Morange : « c'est un peu court jeune homme ! » Au demeurant, son brio n'eût pas été de trop pour tenter de convaincre, car, aujourd'hui, plus personne ne peut vous suivre.

M. Alain Vidalies - Les sous-amendements 2068 à 2074 sont rédactionnels.

M. le Rapporteur - Soucieux de donner raison à M. Gorce, je m'en tiens à une réponse laconique : avis personnel défavorable.

M. le Ministre délégué - Même avis.

M. le Président - Sur le vote des sous-amendements 2050 à 2058, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Les sous-amendements 2075 à 2083, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

A la majorité de 74 voix contre 30, sur 104 votants et 104 suffrages exprimés, les sous-amendements 2059 à 2067 ne sont pas adoptés.

A la majorité de 74 voix contre 30, sur 104 votants et 104 suffrages exprimés, les sous-amendements 2050 à 2058 ne sont pas adoptés.

Les sous-amendements 2068 à 2074, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 154, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marc Ayrault - Sur le prochain vote, je demande la vérification du quorum.

M. le Président - Je vous donne acte de votre demande.

Mme Martine Billard - Notre amendement 47 vise à supprimer le II de l'article, dont l'application conduirait à faire passer en convention de forfait jours une part croissante de salariés, au risque de leur faire effectuer jusqu'à 80 heures hebdomadaires, soit deux semaines de 40 heures en une ! Belle évolution : nous ne sommes plus dans la logique du « travailler plus pour gagner plus » mais dans celle de « On achève bien les chevaux » ! Comment la majorité peut-elle sérieusement songer à une telle réforme alors que 87% des cadres de moins de 34 ans, sans doute plus conscients que leurs aînés qu'il y a une vie après la journée de bureau et qu'il faut partager le travail, veulent conserver leurs jours de RTT ? Quant aux femmes cadres, 95% d'entre elles sont hostiles à toute remise en cause de la RTT, estimant à bon droit qu'il n'y a pas lieu de se ruiner la santé pour 10% de rémunération supplémentaire, et que la vraie conquête serait plutôt de faire voler en éclats le fameux « plafond de verre » qui les empêche d'accéder aux postes de direction. Comment concevoir que la « liberté » de travailler plus donnée, à 5% d'entre elles, remette en cause les droits acquis de toutes les autres ? Il y a loin du discours aux actes : vous annoncez un plan « santé au travail » et une série de mesures tendant à réaliser l'égalité hommes-femmes ; dans les faits, vous nous soumettez un texte dangereux pour la santé des travailleurs et singulièrement défavorable aux salariées.

M. Jean-Pierre Soisson - Rappel au Règlement : Mme Billard a évoqué le sort de ces « pauvres femmes » et j'estime ce terme attentatoire à la dignité des femmes. (Murmures sur divers bancs)

M. Jean-Pierre Brard -Voilà un féministe averti !

Mme Martine Billard - Je n'ai pas employé cette expression.

M. Gaëtan Gorce - Notre amendement 65 est identique à celui de Mme Billard. Il est inconcevable que, dans la logique inacceptable de l'opting out, une décision individuelle permette de déroger à un accord collectif. Cela serait contraire à toute notre tradition juridique. Dans notre pays, il n'est pas admis que l'on puisse se mettre d'accord en faisant fi des lois et des accords collectifs.

Pour achever cette soirée particulière en empruntant une fois encore à Edmond Rostand, je décourage par avance ceux qui feraient à M. Vidalies le reproche de Roxane à Cyrano : « Mais pourquoi parlez-vous de façon peu hâtive ? Auriez-vous donc la goutte à l'imaginative ? ». S'il s'exprime parfois avec lenteur, Alain Vidalies ne manque jamais d'imagination !

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre délégué - Défavorable. Nous nous sommes déjà expliqués sur le sujet.

M. le Président - J'ai été saisi par le président du groupe socialiste, en application de l'article 61 du Règlement, d'une demande de vérification du quorum, avant de procéder au vote des amendements identiques 47 et 65. Je constate que le quorum n'est pas atteint. Le vote sur ces amendements est reporté à demain, à 16 heures 15.

La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.

Prochaine séance demain, mardi 8 février, à 9 heures 30

La séance est levée à 23 heures 45.

                Le Directeur du service
                des comptes rendus analytiques,

                François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 8 FEVRIER 2005

NEUF heures TRENTE : 1rE SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions orales sans débat.

2. Fixation de l'ordre du jour.

QUINZE HEURES : 2e SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Suite de la discussion de la proposition de loi (n° 2030) de M. Patrick OLLIER et plusieurs de ses collègues portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise.

Rapport (n° 2040) de M. Pierre MORANGE, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

3. Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (n° 1623), relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.

Rapport (n° 1663) de Mme Muriel MARLAND-MILITELLO, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3e SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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