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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2005-2006 - 1ème jour de séance, 2ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 4 OCTOBRE 2005

PRÉSIDENCE de M. Jean-Louis DEBRÉ

Sommaire

ACCUEIL DE NOUVEAUX DÉPUTÉS 2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

PRIORITÉS
DU GOUVERNEMENT 2

CRISE SOCIALE 3

NÉGOCIATION D'ADHÉSION
DE LA TURQUIE
À L'UNION EUROPÉENNE 4

REVENDICATIONS SOCIALES 5

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION ÉTRANGÈRE 6

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT
(suite) 6

LUTTE CONTRE
LE TERRORISME 6

LUTTE CONTRE LE CHÔMAGE 7

SÉCURITÉ SOCIALE 7

BIOCARBURANTS 8

SOCIÉTÉ NATIONALE
CORSE MÉDITERRANÉE 9

SNCM 10

TAUX DE TVA
DANS LE BÂTIMENT 11

FIXATION DE L'ORDRE
DU JOUR 11

CRÉATION DE MISSIONS D'INFORMATION 12

RÈGLEMENT DÉFINITIF DU BUDGET DE 2004 12

ARTICLE PREMIER À 7 29

ART. 8 30

ART. 9 À 11 31

ART. 12 31

ART. 13 31

A N N E X E
ORDRE DU JOUR 31

La séance est ouverte à quinze heures.

ACCUEIL DE NOUVEAUX DÉPUTÉS

M. le Président - Je suis heureux d'accueillir parmi nous Marc-Philippe Daubresse, Patrick Devedjian, Laurent Hénart, Marie-Anne Montchamp et Eric Woerth, qui retrouvent notre hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

PRIORITÉS DU GOUVERNEMENT

M. Bernard Accoyer - Monsieur le Premier ministre, l'emploi et le pouvoir d'achat constituent la double priorité de votre Gouvernement. Nous partageons cette priorité, qui avait été aussi, trois ans durant, celle du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin.

Depuis cinq mois, les chiffres du chômage sont favorables...

Plusieurs députés socialistes - ...Manipulés !

M. Bernard Accoyer - ...et 80 000 chômeurs ont retrouvé un emploi. Depuis trois mois, la consommation des ménages s'est redressée, ce qui nourrira la croissance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Pour autant, certaines catégories de nos concitoyens demeurent inquiètes. Répondre à leurs inquiétudes, au premier rang desquelles l'emploi, c'est précisément la priorité de votre action, que nous soutenons. Les solutions ne résident certainement pas dans le conservatisme et l'immobilisme prônés par l'opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste). Ce sont au contraire les décisions et les modernisations qui ouvriront la voie du progrès économique et social pour notre pays.

En cette rentrée parlementaire, pouvez-vous, Monsieur le Premier ministre, préciser à la représentation nationale les mesures que vous nous proposerez, et que votre majorité soutiendra et enrichira, afin que nous préparions ensemble l'avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique de Villepin, Premier ministre - J'écoute le message que nous adressent les Français. Le Gouvernement veut répondre à leurs inquiétudes et à leurs aspirations. Ils veulent des résultats. Nous nous battons pour cela. Tout d'abord, en faveur de l'emploi, avec de nouveaux outils comme le contrat nouvelles embauches, le chèque-emploi dans les très petites entreprises, le dispositif Défense deuxième chance qui a démarré il y a quelques semaines en Seine-et-Marne, le congé parental rénové... Nous souhaitons accompagner chacun dans un parcours personnalisé vers l'emploi, en particulier les jeunes les plus en difficulté et les chômeurs de longue durée. Nous allons encourager l'activité plutôt que l'assistance par l'activation des minima sociaux et l'augmentation de 50 % de la prime pour l'emploi. Déjà, les résultats de cette action se font sentir puisque, depuis trois mois, on compte 80 000 demandeurs d'emploi en moins, soit une décrue très nette, même si ce n'est pas assez encore. Il faut poursuivre et amplifier notre effort. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Nous nous battons également pour le pouvoir d'achat, au jour le jour. Nous avons institué une aide à la cuve de fioul pour nos compatriotes les plus en difficulté. Nous agissons aussi face au problème crucial du logement. Nous voulons inciter les entreprises à récompenser leurs salariés en leur donnant la possibilité de distribuer gratuitement des actions et de leur verser un bonus de mille euros - lequel ne se substituera pas aux hausses de salaires. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Nous avons également engagé une grande réforme de la fiscalité et 70 % de l'allègement prévu bénéficieront aux classes moyennes, c'est-à-dire aux foyers gagnant moins de trois mille euros par mois.

Plusieurs députés socialistes - Ce n'est pas vrai !

M. le Premier Ministre - Nous continuerons d'agir ainsi tout en inscrivant notre action dans une vision plus large. Nous avons fait le choix d'une grande politique industrielle, de recherche et d'innovation. Aux côtés des pôles de compétitivité, d'ores et déjà retenus, nous allons, dans un souci d'équilibre du territoire, créer, à la demande du Président de la République, des pôles d'excellence durable en matière agricole, touristique, culturelle. Personne ne sera laissé au bord du chemin. Nous avons également engagé un important effort de rénovation de nos infrastructures avec dix milliards d'euros consacrés à l'investissement public.

Vous l'aurez compris, la France doit faire la course en tête. Il nous faut de l'audace, du courage, de l'énergie. Les Français en ont à revendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

CRISE SOCIALE

M. Jean-Marc Ayrault - Monsieur le Premier ministre, j'aurais pu vous poser une question sur l'appel à violer la Constitution lancé par votre Garde des Sceaux (Protestations sur les bancs du groupe UMP), j'aurais pu vous interroger sur les opérations ultra-médiatiques de votre ministre de l'Intérieur ou sur votre division avec le numéro 2 du Gouvernement (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Mais aujourd'hui, la France est en colère : la seule croissance que connaisse notre pays est celle du nombre de mécontents. Loin des sondages flatteurs, des centaines de milliers de salariés témoignent en ce 4 octobre d'une crise globale qui n'en finit plus. Cette France en colère, c'est la France du travail, la France qui peine, la France qui endure le chômage de masse et les licenciements, même lorsque les entreprises font des bénéfices, comme c'est le cas avec Hewlett Packard. C'est la France qui endure les salaires bloqués, l'inflation de l'essence et des loyers, la pénurie de logements, la faillite des universités et des hôpitaux, c'est la France qui n'admet plus que la République laisse ses valeurs de solidarité et de justice sociale tomber dans le caniveau. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) Comment retrouver la confiance, quand vos choix budgétaires ne sont ni sincères, ni justes, ni efficaces ? Comment exprimer une volonté quand les marges de manœuvre sont aussi faibles que les divisions de votre Gouvernement sont fortes ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Comment cimenter la cohésion nationale et sociale quand vous précarisez le travail et culpabilisez les chômeurs ? Comment préserver le service public quand, à la hussarde, vous privatisez la SNCM ? Des « mille jours » de votre prédécesseur à vos « cent jours », rien n'a changé. C'est à ce fiasco, Monsieur le Premier ministre, que la nation vous somme de répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Dominique de Villepin, Premier ministre - J'ai écouté attentivement vos critiques et vos leçons, mais j'ai attendu en vain vos propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Et pourtant, dans une démocratie moderne, l'opposition devrait avoir aussi un rôle constructif. Vous pouvez décider de manifester en tête - ou en queue - de cortège, mais ne l'oubliez pas, le message des Français s'adresse à tous, à vous, comme à nous...

Mme Martine David - Surtout à vous !

M. le Premier ministre - ...au centre, à la droite, à la gauche, à l'Etat et aux entreprises. Faut-il vous rappeler le message du 21 avril et celui du 29 mai ? En ce 4 octobre, nous serions bien inspirés de faire preuve d'un peu d'humilité, d'écouter ce que disent les Français, d'écouter ceux qui manifestent et ceux qui ne manifestent pas, d'écouter ceux qui ont un emploi et ceux qui n'en ont pas (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). C'est ce que fait le Gouvernement : nous apportons des solutions aux problèmes du chômage et du pouvoir d'achat, nous défendons l'avenir de notre pays. Qui a proposé à la France une politique de recherche ambitieuse ? Vous ou nous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) J'entends l'impatience, le découragement, parfois, de certains de nos compatriotes. Il faut aller plus loin, et c'est précisément pour cela que toutes les marges de manœuvre budgétaire ont été mobilisées en faveur de l'emploi et du pouvoir d'achat. Deux conditions sont nécessaires pour obtenir des résultats. D'abord, défendre l'intérêt général en toute circonstance : il s'agit de garder le cap de la croissance sociale. Ensuite, se rassembler en refusant de céder aux divisions de la politique politicienne.

Défendre l'intérêt de la France : c'est précisément pour cela que nous sommes réunis ici. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

NÉGOCIATION D'ADHÉSION DE LA TURQUIE À L'UNION EUROPÉENNE

M. le Président - La parole est à M. Bayrou. (« Hou ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. François Bayrou - Hier soir, à minuit, Monsieur le Premier ministre, les négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne ont été ouvertes avec l'assentiment du Gouvernement français.

M. Jacques Floch - Très bien.

M. François Bayrou - Que l'on soit pour ou contre, cette décision est frappante à plusieurs égards.

Premièrement, elle a été prise contre l'avis des peuples européens et contre l'avis du peuple français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et de plusieurs députés UMP).

Deuxièmement, cette décision contrevient aux engagements que vous aviez vous-même formulés devant les Français. Le 2 août, vous affirmiez en effet qu'il n'était pas concevable qu'un processus de négociation puisse s'ouvrir avec un pays qui ne reconnaîtrait pas chacun des membres de l'Union européenne. Vous auriez d'ailleurs pu ajouter, avec un pays qui occupe militairement un pays de l'Union - Chypre. Si tel n'était pas le cas, disiez-vous, il serait urgent d'attendre. Nous avons approuvé cette fermeté, songeant également au génocide arménien. Or, hier, à Bruxelles, vous avez fait exactement le contraire.

Troisièmement, cette décision est lourde de conséquence parce qu'elle signifie que l'Union ne sera pas la puissance politique solidaire et intégrée que la France voulait construire, mais bien plutôt une vague zone de libre échange sans aucune volonté politique. Il suffit d'ailleurs de constater la part que les Etats-Unis ont prise dans cette décision.

Quatrièmement, cette décision signifie que le Président de la République et le Gouvernement décident seuls, que l'on n'écoute pas le peuple et qu'il est interdit au Parlement de s'exprimer sur une question fondamentale.

Votre Gouvernement a abandonné le projet européen de la France. Vous lancez l'Europe dans une fuite en avant sans projet, sans Constitution et sans budget. Faute d'unité, elle ne pourra avoir de volonté et les peuples risquent de s'y reconnaître de moins en moins.

Mesurez-vous, Monsieur le Premier ministre, le désarroi que vous avez ainsi créé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Dominique de Villepin, Premier ministre - Merci de me donner l'occasion de ramener un peu de sérénité dans ce débat. La politique consiste à regarder la réalité en face : pas celle d'hier, mais celle d'aujourd'hui et de demain. Or, il y a en Europe vingt-cinq Etats, vingt-cinq gouvernements, vingt-cinq peuples. Lorsque vous parlez au nom de la France, je n'ai rien à dire, mais lorsque vous le faites au nom de l'Europe, je dois vous inviter à la mesure.

La Turquie doit-elle entrer en Europe ?

Plusieurs députés UMP - Non !

M. le Premier ministre - Cette question reste ouverte. Une autre était posée : devait-on s'opposer à la poursuite d'un processus engagé depuis 1963 ?

Plusieurs députés UMP - Oui !

M. le Premier ministre - Les Vingt-cinq y ont répondu à l'unanimité en décidant d'ouvrir les négociations.

Le processus des négociations est parfaitement contrôlé. A chaque étape, les vingt-cinq Etats de l'Union pourront être consultés et voter. Un rendez-vous est d'ailleurs prévu dès 2006 pour faire le point sur l'évolution des négociations.

Ce processus sera par ailleurs long et ouvert. Il dépendra des Européens - la déclaration précise que l'Europe doit être en mesure d'absorber la Turquie - et de la Turquie elle-même : sera-t-elle capable de le mener jusqu'au bout et de satisfaire aux exigences européennes ? Enfin, il s'agit d'un processus conditionnel : au bout du chemin, les Français seront consultés, c'est à eux que reviendra le dernier mot.

Ce processus offre donc toutes les garanties. La vraie politique ne consiste pas à attiser les peurs, mais à assumer ses responsabilités...

Un député UDF - Et ses déclarations ?

M. le Premier ministre - ...en fonction de l'idée que l'on se fait des intérêts de son pays, pour aujourd'hui et pour demain. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

REVENDICATIONS SOCIALES

M. Alain Bocquet - Mes collègues du groupe communiste et républicain... (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

Plusieurs députés UMP - Où sont-ils ?

M. Alain Bocquet - ...manifestent en ce moment au côté des centaines de milliers de personnes qui défilent partout en France pour défendre leur emploi, leur pouvoir d'achat, leurs salaires, leurs droits et les services publics. En leur nom je m'adresse à vous, avant de les rejoindre. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Vous aviez annoncé, Monsieur le Premier ministre, que vous redonneriez le moral aux Français en cent jours. C'est raté : 75 % d'entre eux soutiennent la journée de mobilisation d'aujourd'hui ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). C'est dire leur inquiétude, leur colère et leurs attentes. L'aveuglement ultralibéral de votre gouvernement s'est durement manifesté cet été : contrats nouvelles embauches qui légalisent les licenciements sans motif, extension de la précarité, démantèlement du code du travail et des services publics, privatisations à marche forcée des autoroutes, d'EDF ou, à coup de GIGN, de la SNCM ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). La sanction des chômeurs est le pendant de votre impuissance devant les diktats des licencieurs boursiers : face à Hewlett Packard, vous ressemblez à une poule qui aurait trouvé un couteau ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Les Français n'en peuvent plus de votre politique toute vouée aux intérêts des grandes sociétés et des boursicoteurs. Ils l'ont dit lors du référendum. Votre amie et complice Mme Parisot (« Ah ! » et interruptions sur les bancs du groupe UMP), la présidente du Medef, ose clamer qu'on ne peut donner ce que l'on n'a pas. Ça suffit ! Les entreprises du CAC 40 attendent cette année 75 milliards d'euros de bénéfices, un record historique ! Le groupe Total, en rackettant les automobilistes, roule au rythme d'un milliard de profits par mois, soit une augmentation de 44 % en un an ! Les richesses s'accumulent dans les mains d'une poignée de privilégiés, et c'est la majorité du peuple qui en paye le prix : la France est en régression sociale.

Pourtant, l'argent existe ! Il pourrait servir à revaloriser les salaires et financer les besoins sociaux et collectifs, ce qui donnerait un coup de pouce à l'économie ! Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin prendre la mesure de la vague de fond qui monte dans tout le pays ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP).

M. Dominique de Villepin, Premier ministre - Vous êtes aujourd'hui bien seul, Monsieur le président Bocquet (Sourires), mais j'ai grand plaisir à vous répondre : mon gouvernement est mobilisé sur l'ensemble des fronts. Face aux menaces de délocalisation ou de restructuration, il agit, comme vous l'avez vu à Romans, pour les entreprises Kélian et Jourdan, à Grenoble face à Hewlett Packard ou à Marseille avec Nestlé et la SNCM. D'autres gouvernements, que vous souteniez, n'avaient rien fait d'autre que le constat de l'impuissance publique. Ce n'est pas le style du mien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) .

Nous agissons aussi dans le domaine des services publics, car il faut les moderniser. Le plan Hôpital 2007, la rénovation des bâtiments universitaires, l'évolution de la Poste participent de cette ambition de modernisation. En matière sociale, nous agissons pour défendre la sécurité sociale et la pérenniser. Le déficit de l'assurance maladie, qui était de plus de 12 milliards, va revenir à 6 milliards en 2006. Il en faut, du courage et de la constance pour en arriver là ! Enfin, le projet de budget pour 2006 porte la marque de notre détermination : nous avons fixé l'objectif de croissance à 2,25 %. Il en faut de l'audace, il en faut du courage pour faire cela ! Mais nous serons au rendez-vous de la croissance, car toute notre énergie et tous nos moyens y sont consacrés. Il serait tellement plus facile de rester les bras ballants à regarder passer le train de l'histoire, celui des pays qui relèvent le défi ! Mais la France est debout ! Elle travaille, elle avance et elle gagnera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION ÉTRANGÈRE

M. le Président - Je suis heureux de souhaiter la bienvenue à une délégation de l'Assemblée nationale de la République socialiste du Vietnam, conduite par le président du groupe d'amitié Vietnam-France. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent).

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT (suite)

LUTTE CONTRE LE TERRORISME

M. Alain Marsaud - Ces derniers jours, les autorités judiciaires et les services d'enquête spécialisés ont accentué les actions de lutte contre le terrorisme, et ils aboutissent. Dans un monde plus dangereux chaque jour, notre appareil de lutte contre le terrorisme s'est révélé adapté, et de nombreux Etats voudraient s'en inspirer.

Pour autant, notre législation, parfois ancienne, devra être améliorée en vue de répondre aux nouvelles menaces telles que nous les avons perçues dans les attentats de Madrid, de Londres et de Bali. Le gouvernement envisage effectivement, dans les jours qui viennent, de renforcer notre législation et notre réglementation. Pouvez-vous, Monsieur le ministre d'Etat, nous faire connaître les grandes lignes de cette réforme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire - Je tiens d'abord à rendre hommage au travail remarquable de la police et des juges du pôle antiterroriste, qui sont un exemple dans le monde entier. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Ils sont en première ligne et obtiennent des résultats.

La menace terroriste en France est une réalité : Depuis 2002, 102 individus ont été écroués en raison de liens avec une activité terroriste sur le territoire national. On imagine ce qui aurait pu arriver si la police et la justice n'avaient pas été efficaces en amont.

Face à cette situation, il faut en premier lieu manifester notre fermeté. Depuis le début de l'année, nous avons expulsé 19 prédicateurs dont les propos étaient incompatibles avec les valeurs de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) On mesure leur responsabilité quand on sait que les terroristes interpellés sont de plus en plus jeunes.

En second lieu, nous essayons de nous inspirer de ce qui est arrivé ailleurs, à New York, à Madrid ou à Londres : cela pourrait nous arriver, puisque c'est la démocratie qui est visée. Le texte que nous avons élaboré sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, et que je présenterai le 19 octobre au conseil des ministres, tire sans aucun complexe les leçons des victoires obtenues par les Anglais dans la recherche des coupables. Nous utiliserons la vidéo-surveillance, car les droits de l'homme sont d'abord ceux des victimes potentielles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Ensuite, il faudra conserver la trace de certains individus qui disparaissent plusieurs mois dans des pays à risque, et dont les services de police doivent savoir ce qu'ils y font. Cela concerne aussi les liaisons téléphoniques et enfin, les délais de garde à vue, car aujourd'hui, quatre jours sont insuffisants dans le cas de certains mouvements financiers internationaux. Le Garde des Sceaux et moi-même aurons une discussion très ouverte à ce sujet avec la représentation nationale.

S'il est un domaine qui exige le consensus national et ne se prête pas à la polémique, c'est bien celui de la lutte contre le terrorisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

LUTTE CONTRE LE CHÔMAGE

Mme Françoise Branget - La cohésion sociale et la politique de l'emploi sont des priorités du Gouvernement. Les choix sont clairs. C'est d'abord d'inciter au travail, avec l'assouplissement des 35 heures, c'est ensuite une politique de soutien à l'emploi durable. Les réalisations sont déjà significatives, avec la mise en œuvre du plan de cohésion sociale, qui date d'à peine huit mois, et grâce à la mobilisation de toutes les énergies avec le plan d'urgence de 4,5 milliards lancé par le Premier ministre.

En août, le nombre de demandeurs d'emploi a baissé pour le cinquième mois consécutif. Monsieur le ministre de l'Emploi, pouvez-vous nous donner des détails sur cette bonne nouvelle, résultat de la mobilisation du Gouvernement, ainsi que votre sentiment sur l'évolution dans les mois à venir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement - Effectivement, cela faisait cinq ans et demi que le chômage n'avait pas diminué pendant cinq mois de suite. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) On peut donc considérer que la tendance est structurelle. Pendant les dix-huit derniers mois du gouvernement de M. Jospin, le chômage avait constamment augmenté. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Le Garrec - Incroyable !

M. le Ministre - Cela nous renvoie à l'époque où l'on disait que, contre le chômage, on avait tout essayé.

Revenons au présent. Contre le chômage des jeunes et de ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi, nous avons agi hier. Demain, nous allons encore nous mobiliser, et d'abord par des mesures techniques comme les contrats d'apprentissage, les contrats de professionnalisation. Nous allons faire en sorte que les demandeurs d'emploi soient vus au moins une fois par mois, et non une fois tous les onze mois comme précédemment, organiser des bilans de compétence, accompagner les demandeurs, prévoir les besoins. Mais cette mobilisation relève aussi d'un état d'esprit. Et de ce point de vue, Monsieur le Premier ministre, que vous soyez venus, pendant les vacances, sans journalistes, rencontrer les directeurs départementaux du travail (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) puis tous les cadres de l'ANPE, qui est en voie de restructuration, prouve à quel point le Gouvernement se mobilise. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

SÉCURITÉ SOCIALE

M. Jean-Marie Le Guen - C'est une dame de 60 ans, qui fête son anniversaire aujourd'hui, et pourtant elle vit dans la plus grande précarité. Elle s'est occupée de tous les Français sans distinction de condition, elle les a aidés à surmonter les accidents de la vie, à préparer leur retraite.

Aujourd'hui c'est elle qui appelle au secours ! Depuis trois ans vous l'avez ruinée (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Vous avez distribué son argent à certains de votre clientèle, qui vivent sur son dos depuis des années (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Vous n'avez jamais couvert ses dépenses. Et quand elle a eu besoin d'un traitement de tout son système de santé, vous lui avez dispensé des soins palliatifs... En 2007, elle sera si affaiblie et surendettée que vous pourrez enfin lui imposer la tutelle des assurances privées - votre but depuis des années. Cette grande dame, la sécurité sociale, aura-t-elle un avenir après vous ? Vous lui souhaitez un bon anniversaire : est-ce pour lui rappeler qu'à 60 ans elle doit partir, comme tant de seniors aujourd'hui ? Devra-t-elle aussi payer le prix fort pour accéder aux soins qui lui sont nécessaires ? Monsieur le Premier ministre, votre attitude envers la sécurité sociale a un nom : la non-assistance à personne en danger ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités - Vous avez mieux commencé que vous n'avez fini, comme souvent... Mais si vous avez commencé en parlant bien de la sécurité sociale, vous auriez mieux fait d'agir pendant cinq ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) La non-assistance à personne en danger, elle s'est produite pendant ces années où vous aviez la croissance et où vous n'avez rien fait, alors que les problèmes ne cessaient de croître. A cette époque, lorsque sur tous les bancs, y compris ceux de vos alliés communistes, on réclamait une mesure d'équité pour laisser partir en retraite ceux qui avaient travaillé dès 14, 15 ou 16 ans, vous n'avez rien fait, rien répondu (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Aujourd'hui, nous avons décidé, au nom de la justice sociale, de permettre à ces Français qui incarnent la valeur du travail de partir à la retraite : c'est cela aussi, la sécurité sociale. Vous pouvez en parler : nous, nous agissons.

Mme Martine David - Et les douze milliards de déficit ?

M. le Ministre - Et n'oublions pas l'aide à la complémentaire. Cette majorité a mis en place l'an dernier une mesure qui permet à 250 000 Français soit de prendre une complémentaire, soit de faire face à leurs besoins financiers. Là est la différence entre ceux qui parlent beaucoup et ceux qui agissent. Cette belle dame qu'est la sécurité sociale n'a pas l'âge de la retraite : elle a un bel avenir devant elle, et grâce à nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

BIOCARBURANTS

M. Michel Raison - Ma question, malgré sa connotation agricole, s'adresse à M. le ministre délégué à l'industrie, pour en souligner la nature transversale : elle porte en effet sur les biocarburants. Malgré l'atout qu'ils représentent, la France a pris du retard. Cet atout est quadruple. Il est environnemental, avec la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il est agricole, augmentant les débouchés et favorisant l'utilisation des jachères. Il est industriel, avec l'amélioration de la balance commerciale et la création d'emplois. C'est enfin un atout pour l'indépendance énergétique.

Les Américains, malgré leurs importantes réserves de pétrole, produisent et utilisent les biocarburants beaucoup plus que les Européens. Qui plus est, ils augmentent leur production de 20 % par an, disputant au Brésil la première place mondiale. La France développe sa production depuis vingt ans, et pourtant c'est l'Allemagne qui est devenue le premier producteur européen de diester. L'Espagne, avec une production deux fois plus importante que la nôtre, est le premier producteur européen d'éthanol, suivie de près par la Pologne.

Le développement des biocarburants doit s'opérer à tous les niveaux. Concernant l'huile brute, le ministre de l'Agriculture nous proposera une avancée dans le projet de loi d'orientation. Pour le diester et l'éthanol, nous devons tout faire pour redevenir le leader européen. Face à l'envolée du prix du pétrole, le Premier ministre a annoncé plusieurs mesures d'économie d'énergie. L'une d'elles concerne les biocarburants : l'objectif est désormais une consommation de 5,75 % en 2008, de 7 % en 2010 et de 10 % en 2015 - ce qui revient à anticiper de deux ans la première de ces échéances par rapport aux directives européennes. Nous sommes aujourd'hui, Monsieur le ministre, dépendants des pays producteurs de pétrole. Que comptez-vous faire pour que demain nous ne soyons pas dépendants du Brésil, des Etats-Unis ou simplement de nos voisins européens ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

M. François Loos, ministre délégué à l'industrie - Monsieur Raison, vous avez raison (Sourires). Les biocarburants que produit la France ont remplacé l'an dernier 400 000 tonnes de pétrole importé. Notre objectif est de remplacer en 2008 trois millions de tonnes de pétrole importé ! Vous aviez déjà voté ce principe dans la loi de programmation sur l'énergie adoptée cet été, où les 5,75 % figuraient comme objectif pour 2010. Mais le Premier ministre a décidé de rapprocher ce délai, en construisant plus rapidement les installations nécessaires. En conséquence, dans les prochaines semaines, un nouvel appel d'offres pour la production de biocarburants sera lancé pour 1,8 million de tonnes. Il sera défiscalisé dans le budget de l'an prochain à hauteur de 25 € par hectolitre pour les esters qui entrent dans le gazole, et de 33 € par hectolitre pour l'éthanol où l'ETBE qui entrent dans l'essence. Cela assurera aux investisseurs de bonnes perspectives, permettant une réalisation rapide. Afin de parer aux problèmes de débouchés qui pourraient surgir, M. Bussereau et moi-même allons réunir tous les acteurs pour en traiter. Le Premier ministre a dit qu'il fallait aller plus vite et plus loin : nous le faisons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

SOCIÉTÉ NATIONALE CORSE MÉDITERRANÉE

M. Dominique Tian - Monsieur le Premier ministre, la SNCM est proche du dépôt de bilan. Déjà, en 2003, l'Etat avait apporté 69 millions d'euros, mais l'entreprise continue de perdre 30 millions par an. En janvier 2005 M. Raffarin avait lancé un appel d'offres pour trouver des partenaires capables d'investir dans l'entreprise. Soixante-dix investisseurs furent contactés, mais deux offres seulement sont venues... Aujourd'hui le Gouvernement souhaite plus que jamais assurer la survie de la compagnie, en trouvant un accord avec les syndicats du personnel. A votre demande, Monsieur le Premier ministre, M. Breton et M. Perben sont venus hier à Marseille pour annoncer que l'Etat entendait maintenir une participation de 25 % au capital de l'entreprise, comme le souhaitaient notamment M. Gaudin, maire de Marseille, et M. de Rocca Serra, président de l'Assemblée de Corse. Les salariés se verront proposer 5 % du capital. Ce sont des garanties majeures pour la pérennité de l'entreprise et de l'emploi. Une nouvelle rencontre est prévue demain à Marseille, avec MM. Breton et Perben. Pouvez-vous faire le point sur ce dossier sensible ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Dominique de Villepin, Premier ministre - Le dossier est complexe. Deux questions se posent. Tout d'abord, pouvions-nous attendre davantage pour agir ? Non, car la situation de cette entreprise est catastrophique. Au cours des quinze dernières années, plus de 1,2 milliard de fonds publics lui ont été versés. Trente millions de pertes annuelles, plus de 200 millions de dettes, et l'entreprise est aujourd'hui au bord du dépôt de bilan, sous le contrôle du tribunal de commerce.

Le Gouvernement a-t-il fait le nécessaire ? La réponse est oui. En effet il a tenté en 2003 une recapitalisation de 69 millions, et rien n'a changé dans la situation de l'entreprise. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a alors lancé une procédure d'appel d'offres. Celle-ci a abouti il y a quelques jours : 70 entreprises ont été contactées, deux sociétés financières ont fait une offre, toutes les deux exigeant une privatisation à 100 % de la SNCM. Ce n'est que parce que la société financière finalement retenue a accepté d'ouvrir le tour de table qu'une autre solution a pu être envisagée. Celle-ci réunit une société financière, un opérateur industriel qui connaît bien le secteur des transports, l'Etat, qui est prêt à monter jusqu'à 25 %, et les salariés. C'est une bonne proposition, qui ne s'accompagne d'aucun licenciement sec : nous pouvons même dire que c'est inespéré. Cette proposition est à la fois soucieuse de bonne gestion et respectueuse de nos engagements européens, et elle ménage l'intérêt du contribuable français comme celui de tous les salariés. Parce qu'elle repose sur le dialogue social, Dominique Perben est venu vendredi à Marseille, il y est retourné lundi avec Thierry Breton, et tous deux y seront à nouveau mercredi. Il faut maintenant que chacun prenne ses responsabilités. Un comité d'entreprise doit se réunir le 10 octobre : c'est dire à quel point il y a urgence. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

SNCM

M. Paul Giacobbi - J'associe à ma question mes collègues Sylvie Andrieux, Christophe Masse, Simon Renucci et Emile Zuccarelli.

Monsieur le Premier ministre, après avoir martelé depuis plus d'un an que la SNCM ne valait rien et qu'elle était au bord de la faillite, vous avez lancé une procédure de cession opaque dans sa forme et surprenante sur le fond. Où est donc le cahier des charges de cet étrange appel d'offres qui n'a fait l'objet d'aucune mesure de publicité formelle ? Pourquoi l'offre de la Connex, qui proposait une entrée progressive au capital et un apport de 75 millions a-t-elle été écartée prématurément au profit de celle de M. Butler, qui apporte 40 millions de moins et qui exige 10 millions de plus de l'Etat ? Vous allez encore invoquer l'Europe, mais celle-ci avait pourtant affirmé par la voix de M. Barrot : « Peu importe le statut juridique de l'entreprise, qu'elle reste publique ou soit privatisée ne change rien ; l'important, c'est que l'aide publique soit apportée en vue d'une ultime restructuration, qu'elle soit proportionnée et qu'elle n'altère pas la concurrence ». Vous avez affirmé pourtant qu'il n'y a qu'une solution alternative au dépôt de bilan. C'était il y a une semaine la privatisation à 100 %, nous en sommes aujourd'hui à 70 %, tandis que le second de votre gouvernement, dans un bel élan de loyauté à votre égard, souhaite que l'Etat se désengage encore moins et convoque d'ailleurs les parlementaires corses, sans doute pour leur exposer son point de vue. En une semaine, et à travers les deux têtes de sa direction bicéphale, votre gouvernement nous a donc proposé trois solutions « uniques »... Nous en souhaitons une quatrième, qui garantisse enfin le service public et la pérennité de l'entreprise. En effet pendant ce temps, le dépeçage de la SNCM a commencé, avec la prise de contrôle de Sud Cargo par le groupe CMA-CGM, champion historique et incontesté de l'achat à vil prix des actifs maritimes de la République (Vives interruptions sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - Veuillez poser votre question.

M. Paul Giacobbi - Monsieur le Premier ministre, pas ça, pas vous. Etes-vous prêt à renverser le cours des choses, dans l'unique souci de l'intérêt public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Pas ça, pas vous, Monsieur Giacobbi, surtout pas vous, s'agissant d'une entreprise que vous connaissez bien et qui, certes détenue aujourd'hui à 100 % par l'Etat, assure des missions de service public par le bais d'une délégation. Je rappellerai d'abord quelques chiffres, car autant d'imprécision, ce n'est pas digne (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste ; le ministre poursuit son propos dans le brouhaha). La SNCM est hélas chroniquement déficitaire - ce qui ne veut pas dire que l'argent y a été mis à fonds perdus. Vous ne pouvez prétendre que vous n'avez pas été informés : M. François Goulard a dit le 26 janvier, dans cet hémicycle, ce qui allait se passer. Vous dites qu'il y a eu une offre de la Connex, c'est faux : il n'y a eu que deux offres. Pourquoi ? Parce que l'entreprise est dans une situation trop difficile. Elle est depuis le 29 avril 2004 sous le contrôle du tribunal de commerce de Marseille, qui a désigné un mandataire ad hoc. Un plan a été mis en œuvre mais hélas, il n'a pas marché. Le deuxième plan de recapitalisation non plus. Aujourd'hui, il faut 113 millions pour apurer les dettes. Comment allons-nous faire ? La jurisprudence de Bruxelles le dit, il faut que l'Etat se désengage progressivement. C'est ce que ce gouvernement a décidé de faire, à travers une offre réunissant des partenaires financiers, un opérateur industriel, l'Etat et les salariés. Voilà la vérité. Vous ne l'aviez pas fait, nous le ferons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

TAUX DE TVA DANS LE BÂTIMENT

M. Michel Piron - Monsieur le Ministre délégué au budget, le projet de loi de finances que vous avez présenté il y a quelques jours vise prioritairement, avec la prime pour l'emploi comme avec la réforme fiscale, à favoriser l'emploi. Or il est une mesure importante à cet égard : le maintien de la TVA à taux réduit dans le bâtiment (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Le taux de 5,5 % actuellement applicable aux travaux de rénovation a généré un volume de travaux supplémentaires de quelque deux milliards par an et permis la création de 40 000 emplois, notamment dans l'artisanat. Or, depuis quelques semaines, on évoque la possibilité que le taux remonte à 19,6 % à compter du 1er janvier prochain. Pouvez-vous nous certifier qu'une telle augmentation n'est pas envisageable, et rassurer ainsi l'ensemble des professionnels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat - La présentation du projet de loi de finances sera pour Thierry Breton et moi-même l'occasion, cet automne, de vous proposer des réformes ambitieuses pour l'emploi, le pouvoir d'achat et la compétitivité de la France. Ces mesures concerneront notamment l'impôt sur le revenu, la prime pour l'emploi, mais aussi la taxe professionnelle qu'il est grand temps de réformer. Dans ce contexte, nous sommes très attentifs aux secteurs créateurs d'emplois, et la TVA sur les travaux dans les logements à 5,5 % reste pour nous un objectif majeur, d'autant plus qu'elle a permis la création de 40 000 emplois, et la réalisation de 2 milliards d'euros supplémentaires de travaux. C'est vous dire si le rendez-vous de Bruxelles est important. Le prochain Ecofi de novembre sera pour le Gouvernement l'occasion de se démener pour convaincre nos partenaires de la nécessité de proroger cette mesure. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 20, sous la présidence de M. Bur.

PRÉSIDENCE de M. Yves BUR

vice-président

FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le Président - La Conférence des présidents a fixé ce matin l'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 21 octobre inclus. Elle a également arrêté le calendrier de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances, ainsi que celui des séances d'initiative parlementaire et de questions orales sans débat jusqu'à la fin de l'année. Ces documents seront annexés au compte-rendu de la présente séance.

La Conférence des présidents a également décidé que le vote solennel sur le projet de loi d'orientation agricole et la première partie du projet de loi de finances auraient lieu, respectivement, le mercredi 12 octobre et le mardi 25 octobre, après les questions au Gouvernement.

CRÉATION DE MISSIONS D'INFORMATION

M. le Président - La Conférence des présidents a également décidé, en application de l'article 145, alinéa 3, du Règlement, la création de deux missions d'information, respectivement intitulées « L'effet de serre » et « Grippe aviaire : mesures préventives ».

RÈGLEMENT DÉFINITIF DU BUDGET DE 2004

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi portant règlement définitif du budget de 2004.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat - Débattant du projet de loi de règlement du budget de 2004 avant d'aborder l'examen du projet de loi de finances pour 2006, nous sommes en conformité avec les exigences de la LOLF qui, depuis le 1er janvier 2005, régit les travaux budgétaires et va nous conduire à présenter dans quelques jours le premier budget entièrement au format LOLF. Pour l'heure, nous examinons la dernière loi de règlement à l'ancien format.

Les pères de la LOLF ont souhaité revaloriser la place de la loi de règlement et en faire, à l'avenir, un temps fort de la vie parlementaire. Ce sera l'occasion pour le Parlement, non seulement, de vérifier l'exécution chiffrée du budget, mais aussi d'évaluer l'efficacité de la dépense publique, la performance de l'administration, et de disposer d'éléments sur le patrimoine de l'Etat. Un chaînage vertueux sera ainsi établi entre les projets annuels de performance - PAP -, annexes explicatives au projet de loi de finances, et les rapports annuels de performance - RAP -, qui présenteront les résultats obtenus et serviront de support à l'examen de la loi de règlement. Les outils de la réforme se mettent peu à peu en place. Si nous venons de déposer les PAP, il faudra attendre 2007 pour disposer des premiers RAP. En dépit de notre légitime impatience, nous devons aujourd'hui rendre compte de la gestion de 2004 selon les modalités prévues par l'ordonnance de 1959.

Cette loi de règlement, photographie fidèle de la situation budgétaire de notre pays à la fin de l'exercice 2004, met en valeur ses atouts, notamment la totale maîtrise des dépenses de l'Etat, en même temps qu'elle permet de tirer les enseignements sur les progrès restant à réaliser. A cet égard, 2004 aura été une année utile, notamment pour codifier dans la LOLF les outils de bonne gestion de l'exécution. Je pense notamment à la réserve de précaution ou à la règle d'affectation des éventuels surplus de recettes fiscales.

Aussi bons soient les résultats de 2004 avec une réduction de 13 milliards d'euros du déficit budgétaire, il nous faut poursuivre nos efforts car la dégradation de nos finances publiques est devenue structurelle, causée par la politique procyclique des années 1999 à 2001 qui a gaspillé les fruits de la croissance.

L'exécution budgétaire 2004 comporte deux motifs principaux de satisfaction. Le premier tient à la stabilisation effective des dépenses de l'Etat, qui s'établissent à 283,6 milliards d'euros, inférieures de 55 millions d'euros au plafond autorisé par le Parlement. En 2004, comme déjà en 2003 et en 2002, pas un euro de plus que ce plafond n'a été dépensé.

M. Didier Migaud - Ce n'est pas ce que dit la Cour des comptes.

M. le Ministre délégué - La maîtrise des dépenses n'est pas un engagement pris en l'air par le Gouvernement. Celui-ci dit ce qu'il fait, fait ce qu'il dit, et rend des comptes. Il était important de parvenir à stabiliser les dépenses. Tout d'abord, au regard de l'autorisation parlementaire, dont le respect s'impose à nous. Ensuite, pour montrer aux Français que, malgré un contexte économique et financier difficile, les finances de l'Etat étaient tenues. Enfin, pour assurer nos partenaires européens de la crédibilité de nos engagements en matière de réduction des déficits publics. C'est ainsi que se construit la confiance. Il a été possible d'atteindre cet objectif grâce à la constitution précoce d'une réserve de précaution de sept milliards d'euros, portant sur quatre milliards de crédits initiaux et quelque trois milliards de crédits de report. Ces opérations ont été conduites dans une totale transparence vis-à-vis du Parlement qui a été informé préalablement de toutes les mises en réserve et annulations.

Le second motif de satisfaction tient à la gestion du rebond conjoncturel des recettes en 2004. L'année 2003 avait été difficile, avec une diminution des recettes fiscales de plus de 3 %, la langueur de l'activité économique ayant eu une incidence mécanique sur leur produit, en recul de neuf milliards d'euros. Dans ce contexte difficile, le Gouvernement a décidé de laisser jouer ce que les économistes appellent les stabilisateurs automatiques, c'est-à-dire de ne pas compenser les pertes de recettes fiscales par des augmentations d'impôts ou des économies supplémentaires, ce qui aurait amplifié les effets du cycle et précipité notre économie dans la récession. Ce choix a été payant puisqu'en 2004, nous avons retrouvé une croissance annuelle de 2,3 % et qu'en 2005, en dépit de la hausse du pétrole, nous restons dans le peloton de tête de la zone euro pour ce qui est de la croissance.

Plus de croissance signifie plus de recettes. La question est ensuite de savoir ce que l'on en fait. Le Gouvernement a fait un choix simple et clair, affectant en totalité le surplus de 9,2 milliards d'euros à la réduction du déficit.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. le Ministre délégué - Tout oppose la gestion du rebond conjoncturel de 2004 à l'épisode calamiteux des années 1999 à 2000, où le surplus de recettes fiscales, pléthorique mais éphémère, issu de la bulle internet a été dilapidé, entraînant une profonde dégradation, devenue structurelle, de nos finances publiques. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Sur les 70 milliards d'euros de recettes supplémentaires encaissées de 1998 à 2001, la précédente majorité en a affecté 55 % à des augmentations de dépenses pérennes comme les 35 heures, 30 % à des baisses d'impôts non financées. Seuls 15 % l'ont été à la réduction du déficit.

En 2003 et 2004, il en a été tout autrement.

M. Augustin Bonrepaux - On voit le résultat !

M. le Ministre délégué - Le surplus de recettes a été intégralement affecté à la réduction du déficit qui s'établissait, fin 2004, à 43,9 milliards d'euros. De 2003 à 2004, le solde s'est amélioré de 13 milliards, plus forte réduction du déficit budgétaire jamais enregistrée. Cela récompense les efforts engagés depuis trois ans, dans un contexte économique au départ très ingrat, avec une diminution de moitié de la croissance par rapport aux années antérieures. Je tiens ici à rendre hommage à l'ensemble des ministres des finances qui, depuis 2002, ont œuvré à ce résultat.

M. Didier Migaud - Il y en a eu beaucoup !

M. le Ministre délégué - Cela n'altère en rien le mérite de chacun !

En bref, depuis trois ans, nous avons totalement maîtrisé la dépense, ne dépassant pas d'un euro le plafond autorisé, tout en finançant des politiques publiques qui ont stimulé la croissance, dont le retour a généré un surplus de recettes fiscales - alors même que le taux des impôts a diminué. Ce surplus a été intégralement affecté à la réduction du déficit.

Quels enseignements tirer de cette exécution 2004 ? Le premier est qu'il faut améliorer nos outils de pilotage de l'exécution budgétaire. C'est ce que nous avons fait. Le second est qu'il faut poursuivre l'assainissement de nos finances. C'est précisément le cap de notre politique budgétaire.

L'année 2004 a été mise à profit pour enrichir notre palette d'instruments afin de mieux gérer l'exécution budgétaire. Nous avons progressé dans deux directions, et tout d'abord en réformant les modalités de la régulation budgétaire. Le Gouvernement, en accord avec la commission spéciale présidée par Michel Bouvard, grâce à l'aide de MM. Lambert et Migaud, a proposé un dispositif propre à améliorer nos procédures en la matière. La régulation faisant l'objet de critiques récurrentes, nous avions en effet besoin d'un instrument de pilotage de l'exécution budgétaire. Personne ne pouvait se satisfaire des procédures actuelles : ni le Parlement, qui votait les crédits sans connaître les mesures de régulation, ni les ministères, privés de toute visibilité sur leurs crédits. Le dispositif adopté en juin dernier prévoit une information obligatoire du Parlement, dès le projet de loi de finances initial, sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour respecter l'autorisation fixée par le Parlement ; il prévoit également une mise en réserve systématique, au sein de chaque programme, d'une part des crédits. Ces crédits constituent une tranche « conditionnelle » s'ajoutant à la tranche ferme sur laquelle chaque gestionnaire pourra compter.

Dès le PLF 2006, nous sommes au rendez-vous pour appliquer cette modification de la LOLF ; le pourcentage que nous avons retenu est de 2 %, ce qui correspond à une mise en réserve nette de 4 milliards ; c'est la moitié de ce que nous avons dû faire en 2005. Je précise enfin que le taux sur les crédits hors rémunération a été fixé à 5 %, soit une tranche ferme de 95 % dès le 1er janvier.

Nous devions également progresser sur la gestion des surplus fiscaux, l'objectif étant d'éviter la répétition de l'épisode calamiteux de la « cagnotte ». Grâce à la loi organique votée en juillet dernier, nous avons comblé un manque important dans la LOLF. Dorénavant, le Gouvernement doit préciser à l'avance et en toute transparence l'utilisation qu'il fera des éventuelles plus-values de recettes fiscales qui apparaissent en cours de gestion. Cette disposition vise à éviter que les plus-values de recettes liées à la conjoncture économique soient détournées de l'impératif de diminution des déficits et de la dette. La loi organique impose désormais une information du Parlement à la fois préalable et a posteriori puisque le Gouvernement devra naturellement rendre compte de la gestion des plus-values de recettes au titre de l'exécution de la loi de finances.

Nous proposons un dispositif simple : si un surplus est constaté, celui-ci doit être utilisé intégralement pour réduire le déficit. Une seule exception est prévue : les éventuels surplus fiscaux sur les recettes pétrolières, du fait de la hausse des prix, seront restitués aux Français. L'Etat ne bénéficiera pas en la matière de « recettes d'opportunité » : c'est la raison pour laquelle, à la demande du Premier ministre, nous avons réuni avec Thierry Breton, une commission de transparence sur la fiscalité pétrolière présidée par Bruno Durieux et composée de parlementaires représentant toutes les sensibilités politiques. Elle doit rendre ses premières conclusions avant le début de l'examen du PLF 2006.

Notre objectif central reste l'assainissement de nos finances publiques. La réduction du déficit budgétaire en 2004 est incontestablement une bonne nouvelle. L'esprit de responsabilité qui me guide m'interdit cependant tout triomphalisme car il demeure à un niveau encore beaucoup trop élevé. La persistance de cette situation est évidemment problématique. Le déficit du budget de l'Etat est en fait structurel, et d'abord en raison de l'absence de réformes pendant la précédente législature : nous avons dû, dans un contexte économique moins facile, mener les réformes trop longtemps différées, notamment celles des retraites et de l'assurance maladie ; ensuite, la politique budgétaire ouvertement expansionniste des années 1999-2002, avec des dépenses nouvelles colossales comme les 35 heures ou les baisses d'impôts non financées, a contribué à aggraver la situation, de même que les transferts toujours plus importants de recettes de l'Etat au profit d'autres collectivités publiques.

A cet égard, le déficit budgétaire prévu pour 2006 traduit une stabilisation par rapport à l'année 2005. Plusieurs éléments rendent l'exercice particulièrement difficile pour 2006, notamment la forte augmentation des prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne et des collectivités locales - plus 3 milliards en 2006 contre plus 0,7 milliard en LFI 2005 -, ou la perte, pour l'Etat, d'une recette de 3 milliards puisque la CADES cesse, à compter du 1er janvier prochain, ses versements au budget général. Au total, l'effort de redressement du déficit budgétaire de l'Etat est en réalité proche de 5 milliards.

Face à cette situation contraignante notre stratégie comporte trois volets.

Tout d'abord, une politique économique pour développer l'emploi, renforcer notre potentiel de croissance, et, ce faisant, renforcer le socle de ressources de l'Etat et des organismes sociaux : c'est le plan d'urgence pour l'emploi - le contrat nouvelles embauches, le lissage des effets de seuil pour les PME, les mesures d'incitation à la reprise d'un emploi pour les chômeurs et titulaires de minima sociaux -, ce sont également les mesures pour soutenir le pouvoir d'achat - la hausse du SMIC, la revalorisation de la PPE -, ce sont enfin les dispositions propres à accroître les investissements et à renforcer l'attractivité du territoire - avec notamment la réforme de la TP et le dégrèvement pour investissements nouveaux.

Ensuite, une exigence accrue dans la maîtrise des dépenses : les dépenses 2006 sont stabilisées en volume pour la troisième année consécutive. Comme chaque année depuis 2003, nous respectons cette règle d'or. Mais nous souhaitons aller plus loin à partir de 2007 : les conditions sont réunies pour se fixer une plus haute ambition grâce à la LOLF et à la réforme de l'Etat. L'objectif est désormais, à moyen terme de stabiliser en valeur les dépenses de l'Etat. Le Premier ministre a décidé de franchir en 2007 une première étape avec une progression des dépenses moins rapide que l'inflation. Ainsi, faire diminuer les dépenses de 1 % en volume dégage une marge d'économies de 3 milliards, soit environ l'équivalent du coût de la réforme fiscale que je soumettrai à votre approbation en automne.

Enfin, l'effort de l'Etat doit être désormais partagé. Alors que les dépenses de l'Etat sont stabilisées en volume pour la quatrième année consécutive et que celles des administrations sociales reviennent progressivement à un rythme d'évolution plus raisonnable, les dépenses des collectivités locales continuent de progresser rapidement...

M. Augustin Bonrepaux - Vous les avez transférées !

M. Didier Migaud - C'est scandaleux !

M. le Ministre délégué - ...à un rythme de 3 % en volume. Chacun connaît les augmentations spectaculaires des impôts dans certaines régions, avec la palme d'or pour le Languedoc-Roussillon. L'Ile-de-France n'est pas non plus en reste avec plus de 25 % d'augmentation. Les régions de gauche sont incapables d'assumer leurs rapports compliqués avec les hausses d'impôt. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe socialiste) Cette situation est intenable pour nos finances publiques et difficilement compréhensible pour nos concitoyens. Il est donc urgent de travailler ensemble et c'est dans cet esprit que j'ai proposé, en juin dernier, la réunion d'une conférence annuelle des finances publiques afin de concevoir dans la concertation une norme consensuelle et indicative de dépenses.

L'année 2004 a été bonne sur le plan budgétaire, qu'il s'agisse de la maîtrise de la dépense, de la réduction du déficit, ou encore des progrès réalisés en termes de méthode dans la gestion de l'exécution. Les nouveaux outils mis en place pour réformer la régulation budgétaire et la gestion du cycle économique concourent au même objectif de renforcement de l'information du Parlement. Ils contribueront également à l'assainissement de nos finances publiques.

Ce projet de loi de règlement est essentiel à nos finances publiques, et je vous demande, au nom du Gouvernement, de bien vouloir l'approuver. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances - Je rappelle que l'examen du projet de loi de règlement est la dernière étape de l'exercice de notre responsabilité budgétaire après le vote de la loi de finances initiale et celui des différentes lois de finances rectificatives. La loi de règlement a pour but de constater définitivement les recettes réellement encaissées, les dépenses effectives et le résultat budgétaire de l'exercice. Elle ouvre donc des crédits complémentaires et procède à des annulations ; elle détermine le montant des soldes débiteurs ou créditeurs des comptes spéciaux qui seront reportés à la gestion suivante ; elle « transporte » aux découverts du Trésor le résultat budgétaire, les pertes et les profits ainsi que les soldes débiteurs ou créditeurs des comptes spéciaux qui ne sont pas reportés sur la gestion suivante ; enfin, elle peut contenir des dispositions tendant à reconnaître l'utilité publique de dépenses comprises dans une gestion de fait.

J'y insiste : ce projet de loi de règlement est sans doute le dernier du genre.

M. Michel Bouvard - Il faut l'espérer !

M. le Rapporteur général - Certes, la LOLF ne s'applique juridiquement qu'à partir du budget de 2006, mais je souhaite vous faire une proposition dans la ligne de l'excellent rapport de MM. Migaud et Lambert. Ne pourrions-nous pas modifier profondément les conditions de discussion de la loi de règlement dès l'année prochaine, pour l'examen de celle de 2005 ? En effet, le PLF 2005 a été présenté en mode « pré LOLF » puisque nous disposions de pré-projets annuels de performances. Un certain nombre de chapitres budgétaires ont de plus été globalisés, rendus fongibles au titre de l'expérimentation.

Nous pourrions examiner sur la base de ces rapports de performance l'exécution de la loi de finances pour 2005. Cela serait possible sous deux conditions. D'abord, la discussion devrait avoir lieu au début de l'été, avant le débat d'orientation budgétaire pour 2007 : la préparation du budget pour 2007 doit en effet tirer bénéfice de l'examen approfondi de l'exécution 2005. Ensuite, il faut remplacer la discussion largement formelle qui a cours pour l'instant par un débat plus long, bénéficiant notamment de la présence des ministres les plus dépensiers, ou en tout cas concernés par les programmes les plus critiques. Si nous voulons renforcer le rôle du Parlement, un des meilleurs moyens est de mieux exercer notre responsabilité de contrôle de la dépense publique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Ce contrôle est également indispensable pour atteindre nos objectifs de maîtrise de l'évolution des dépenses.

Quelles leçons pouvons-nous tirer pour 2006 de l'exécution du budget 2004 ? Cette exécution a été absolument exemplaire. L'objectif de dépense, d'abord, a été totalement tenu.

M. Didier Migaud - Mais non !

M. le Rapporteur général - Conformément au principe de stabilité en volume, les dépenses n'ont pas progressé plus vite que l'inflation. Le seul bémol...

M. Didier Migaud - Quand même !

M. le Rapporteur général - ...a été l'ouverture de crédits en loi de finances rectificative, qui ont conduit à une augmentation des reports de crédits. Ceux-ci se montent donc pour 2005 à 9,7 milliards, chiffre à mettre toutefois en balance avec les 14 milliards que nous avons trouvés en 2002 ! Par ailleurs, vous avez pris devant la commission, Monsieur le ministre, l'engagement que le collectif pour 2005 ne contiendrait pas d'éléments susceptibles d'augmenter les reports sur 2006.

Du côté des recettes, l'exécution a été tout aussi exemplaire. Les prévisions avaient été prudentes, avec un taux de croissance fixé à 1,7 % et une faible élasticité fiscale. La probabilité de bonnes nouvelles était donc forte. Ce sont en définitive 10 milliards de recettes supplémentaires que nous avons enregistrés, qui ont été intégralement affectés à la réduction du déficit. La répartition des recettes supplémentaires par rapport à 2003 a été très vertueuse : 7 % pour les baisses d'impôts, 31 % pour l'accroissement des dépenses et 62 % pour la réduction du déficit, lequel est donc passé de 57 milliards en 2003 à 44 en 2004. C'est du jamais vu ! Cela montre que les chemins du redressement des finances publiques sont praticables. J'ajoute que si les socialistes avaient affecté 60 % des augmentations de recettes depuis 1998 à la réduction du déficit, le budget pour 2001 aurait été à l'équilibre ! Au lieu de cela, les fruits de la croissance ont été gaspillés et transformés en dépenses nouvelles.

M. Augustin Bonrepaux - Et que faites-vous, depuis deux ans et demi ?

M. le Rapporteur général - Sur la base d'une croissance de 2,25 %, on peut tabler sur un surplus de recettes quasi certain de 10 milliards. La reconduction des dépenses en volume consommera 5 à 6 milliards. Le reste doit être partagé entre les réductions d'impôt et la baisse du déficit. Il en découle que des baisses d'impôts supérieures à 5 milliards ne peuvent qu'aggraver le déficit. Je pense que pour l'instant, les surplus de recettes doivent être totalement affectés à la réduction des déficits, et je me réjouis que cette préoccupation soit reprise dans le projet de budget pour 2006. Celui-ci fait apparaître une stabilité en volume des dépenses pour la quatrième année consécutive, des prévisions de recettes raisonnables et un déficit stabilisé malgré un contexte économique difficile. Il s'inspire donc du comportement vertueux adopté en 2004.

Les ajustements de crédits qui nous sont proposés se montent, dans le budget général, à 0,9 milliard d'ouvertures de crédits et à 3 milliards d'annulations, qui sont pour une bonne partie fonction des dégrèvements et remboursements toujours difficiles à évaluer. En ce qui concerne les budgets annexes, le BAPSA, qui va être remplacé par le FFIPSA, bénéficie d'un abondement de 2,8 milliards au titre de 2004 mais conserve malgré cela un déficit de 3,2 milliards - qui sera transféré au FFIPSA. C'est dire combien nous devons être vigilants dans ce domaine. Quant aux comptes spéciaux du Trésor, celui pour les avances à l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole bénéficie de 5,8 milliards de plus et celui relatif à l'affectation des produits de cession et titres, parts et droits des sociétés de 1,7 milliard. Il ne s'agit pas là de nouvelles dépenses, mais d'opérations de trésorerie.

Pour finir, l'exécution du budget pour 2004 a été exemplaire et a contribué à notre volonté de redressement des dépenses publiques. La commission des finances vous invite donc à voter le projet de loi de règlement du budget de 2004 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Hervé Mariton - Le budget 2004 signe l'amélioration de nos finances publiques. Nous en félicitons le Gouvernement et l'encourageons à poursuivre dans cette tâche pour l'exécution du budget 2005, qui n'est pas achevée, et pour 2006. La loi de règlement fait état d'une gestion sérieuse, après une élaboration qui l'avait été tout autant. Pour autant, nous ne sommes pas sortis de nos difficultés financières. Ayons l'humilité de reconnaître que les chiffres clefs se dégradent moins vite plutôt qu'ils ne s'améliorent ! Ce n'est déjà pas si mal, comparé à ce que d'autres ont fait !

Les objectifs de dépenses ont été tenus. Il était bien de poser la règle d'une évolution des dépenses qui ne serait pas supérieure à l'inflation, il est encore mieux de l'avoir respectée. Elle l'a été au report près. Quelques tensions ont pu se produire, mais qui reflètent la difficulté de la préparation budgétaire : pour l'essentiel, la discipline a été respectée. Pour la suite, il est important de se rapprocher de la règle du 0 % en valeur, que vous avez déjà évoquée lors de précédents débats budgétaires. Cela devrait être le cas dès la préparation du budget pour 2007, pour gager la réforme fiscale qui doit avoir lieu. Du point de vue de la méthode, présenter dans le budget 2006 une réforme fiscale qui exige une double dose de vertu budgétaire est excellent pour obliger à la discipline quant aux dépenses. La maîtrise des dépenses est une nécessité du point de vue de l'orthodoxie budgétaire, mais la qualité de l'analyse et le sérieux de la gestion ne suffisent pas : il faut faire adhérer les Français à notre projet par le biais de la réforme fiscale. L'année 2007 a donc une double raison de se rapprocher de la règle du 0 % en valeur.

Les dépenses ne doivent pas être examinées d'un pur point de vue quantitatif : il faut utiliser une méthode plus exigeante qui permette d'en évaluer la qualité. C'est au cœur de la responsabilité du Parlement. Notre groupe est particulièrement attaché à la maîtrise des dépenses qui, seule, peut améliorer les finances publiques. C'est un choix politique, comme de dire que nous sommes redevables de chaque euro dépensé devant nos compatriotes. Les deux critères de l'évolution des dépenses en quantité et en qualité sont indissociables. Nous ne chassons pas la dépense en tant que telle : il y a de bonnes dépenses, des dépenses intelligentes, mais elles doivent toutes l'être.

Les recettes ont été bien gérées et intelligemment utilisées. La préparation du budget pour 2004 avait permis d'anticiper des surplus de recettes, qui ont été affectés pour partie à des dépenses nécessaires et pour partie à la réduction du déficit. Il faut rester attentifs à cette proportion, car la situation des finances publiques l'exige.

En 2004, nous avons aussi bénéficié d'un surplus, qui n'était pas anticipé. Le Gouvernement a su l'utiliser au mieux, en affectant ces 10 milliards à la réduction du déficit, ainsi ramené à 44 milliards. C'était une nécessité que d'agir ainsi, et de le faire avec constance, modestie et pédagogie. Constance et modestie, car à l'annonce de ces 10 milliards, on pouvait être tenté de dire : tout va mieux. Certes, la nouvelle était bienvenue, mais il ne fallait pas perdre de vue l'état de nos finances. Dans de tels cas, prenons garde de ne jamais crier victoire trop vite, alors que le chemin de la réduction du déficit est aussi long.

M. le Rapporteur général - Très juste.

M. Hervé Mariton - Vous avez mis en place cette année comme l'an dernier une commission d'évaluation de la fiscalité pétrolière. Et dans ce domaine, la pédagogie est bien nécessaire. Certains, dans l'opposition, ne résistent pas à la tentation de faire croire que l'Etat s`enrichit sur le dos des citoyens - étrange distinction d'ailleurs. Or la réalité, c'est que l'Etat y perd à court terme et perdra probablement plus encore à long terme, étant donné les changements de comportements. Bien sûr, il est toujours plus facile d'expliquer aux citoyens que l'Etat agit à leurs dépens et doit leur restituer l'argent. Mais ce n'est pas le cas, tout simplement. En fait, il n'y a pas eu plus-value mais moins-value sur la fiscalité pétrolière, mais l'Etat en a quand même redistribué une partie... Cela ne facilite pas la pédagogie auprès de nos concitoyens. Pourtant, cette fiscalité pétrolière n'est pas si compliquée. Quelques additions et soustractions, voilà une bonne occasion de faire de la pédagogie sur la politique fiscale, mais aussi la politique énergétique, dans les semaines qui viennent.

Enfin, et nous nous en réjouissons, le déficit de l'Etat est passé de 3,9 % à 3,1 % du PIB. C'est insuffisant, mais c'est mieux. Le déficit des administrations publiques, malheureusement, est resté à 3, 6 %. C'est tout l'enjeu de la réforme de la sécurité sociale, qui commence à porter ses fruits, ainsi que de l'appel à la responsabilité des collectivités locales. Celles-ci ne peuvent rester indifférentes à un débat qui préoccupe toute la nation et nous devons manifester notre vigilance.

Reprenant l'idée d'une conférence sur les finances publiques, vous proposez que la responsabilité de leur pilotage - face à l'Union européenne et à nos concitoyens - soit partagée. Dans le projet de budget pour 2006, vous le faites. Il faudra s'y tenir. Il est bien de répondre à l'exigence de responsabilité et de modération de nos compatriotes, mieux de proposer des solutions concrètes concernant la taxe professionnelle ou le bouclier fiscal, mieux encore de les mettre en œuvre.

Le budget 2004 n'a pas tout réglé. Mais majorité et gouvernement ont prouvé qu'ils étaient capables de progresser sur la voie de l'assainissement des finances publiques. Le chemin est long. Tenons le cap. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Didier Migaud - D'abord, j'espère que c'est la dernière fois que nous examinons un projet de loi de règlement sous cette forme et qu'à partir de l'an prochain, nous pourrons échapper à cette parodie de débat, à laquelle nous contribuons tous depuis un certain nombre d'années.

S'agissant de la LOLF, je salue le travail réalisé. Mais je rappelle solennellement que c'est un outil pour mieux présenter, évaluer, contrôler les finances publiques. L'assimiler a priori à la réduction de la dépense publique ou de l'emploi public, c'est en détourner l'esprit. C'est le sentiment de l'ensemble de la commission des finances et, de temps à autre, certains ministres devraient assumer leurs choix politiques. Réduire la dépense publique, ce n'est pas mon choix ; je peux comprendre que ce soit celui de la majorité, mais ne confondons pas l'outil qu'est la LOLF avec cet objectif politique, si l'on veut que la réforme réussisse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

J'en viens au projet de loi de règlement. 2003 fut une année noire, la pire depuis 1993 ; 2004 fut celle de la dérive. Tous les indicateurs économiques et sociaux se sont dégradés. Pourtant la croissance mondiale était forte, même si vous vous plaignez sans cesse de ne pas en avoir bénéficié comme nous. En réalité, cette croissance mondiale est très dynamique depuis 2003. Mais en France, la croissance était meilleure jusqu'en 2002. Depuis, les statistiques ne sont plus aussi positives.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Cela mérite un débat.

M. Didier Migaud - J'y suis prêt. Ce sont les données objectives.

M. le Ministre délégué - Monsieur MIGAUD, n'oubliez pas la comparaison avec la croissance dans la zone euro. La nôtre est toujours supérieure.

M. Didier Migaud - Cela a été vrai quelques mois, mais malheureusement, ce ne n`est plus.

De même, pour le pouvoir d'achat, la croissance qui était satisfaisante de 1999 à 2002, diminue depuis lors (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), sur fond de politique fiscale très injuste. Vous nous donnez des leçons sur les prélèvements obligatoires. Mais leur taux par rapport au PIB a diminué jusqu'en 2002, et depuis lors il remonte. Vous financez la baisse de l'impôt sur le revenu et de l'impôt de solidarité sur la fortune par une augmentation des prélèvements pesant sur l'ensemble des Français.

Quant au déficit public, la cagnotte de 10 milliards de 2004 n'a permis que de réduire le déficit public de 0,6 % du PIB alors qu'en 1999, nous l'avions réduit de 1 % du PIB, en y affectant une cagnotte qui n'était que de 3,4 milliards, quand même vous exigiez à l'époque qu'on rende l'argent aux Français, compte tenu d'une croissance plus forte - grâce à la politique du Gouvernement peut-être.

M. René Dosière - C'est certain.

M. Didier Migaud - Le déficit public avait constamment diminué de 1997 à 2001. Depuis 2002, ce n'est plus le cas, et malgré la soulte d'EDF en 2005, il restera supérieur à 3 % du PIB, après avoir dépassé les 4 %.

Sur le chômage ensuite, M. Borloo a menti effrontément en réponse à une questiond'actualité: le chômage avait baissé de 1997 à 2001. Il a augmenté de nouveau et se stabilise à 9,9 %. Ce n'est pas un succès pour votre politique.

On peut aussi prendre pour indicateur le nombre des titulaires du RMI, qui, après une diminution constante en 1999, en 2000, en 2001, a augmenté à nouveau, avec des pics importants en 2004 et 2005, ce qui traduit le caractère injuste de votre politique. Quant à la dette publique, dont vous parlez beaucoup, Monsieur le ministre, elle était passée de 58,7 % à 56,2 % du PIB entre 1998 et 2001 : elle est aujourd'hui remontée à 66,2 % ! Je pourrais citer bien d'autres chiffres, qui montrent que la réalité contredit votre discours, ainsi le retour du déficit commercial, ou la compétitivité de la France, dont vous parlez beaucoup, mais qui décroît depuis juin 2002 : ici encore je me fonde sur les chiffres mêmes de Bercy, mais aussi de l'OCDE et de la Banque de France. Cette compétitivité s'était en revanche accrue entre 1997 et 2001... Les mêmes chiffres montrent que l'attractivité de notre pays, en progression régulière de 1997 à 2001, décline régulièrement depuis 2002.

M. Jean-Pierre Gorges - C'est l'effet retard !

M. Didier Migaud - En juin dernier je vous défiais de citer un seul indicateur qui fût plus favorable aujourd'hui qu'hier. Vous aviez mentionné la création d'entreprises. Mais les chiffres cessent de vous être favorables si l'on considère leur mortalité : les défaillances d'entreprises connaissent une hausse importante, et c'est là encore le fruit de votre politique. Nous souhaiterions bien sûr des réponses sur tous ces points ; mais je comprends que vous préfériez la méthode Coué à la pratique des comparaisons objectives...

Au total les comptes publics restent largement dans le rouge, et les déficits sont abyssaux. Celui du budget général profite certes du surplus de recettes fiscales, mais cette amélioration reste bien fragile. C'est ce que montre par exemple le taux de couverture des dépenses par les recettes : alors qu'il atteignait 89,1 % en 2000, en progression constante depuis 1997, il n'est aujourd'hui que de 84,7 %. De même le solde primaire - dont nous avons proposé qu'il redevienne l'indicateur central du pilotage de nos comptes publics - alors qu'il a été positif en 1999, en 2000 et en 2001, est systématiquement négatif depuis. Surtout les très mauvais résultats des comptes sociaux interdisent toute amélioration du déficit public, qui reste à 3,6 % du PIB, soit 59,7 milliards d'euros.

La situation financière des collectivités locales, confrontées aux multiples désengagements de l'Etat et aux transferts non compensés, se dégrade : pour la première fois depuis 1995, leurs comptes affichent un déficit. La Cour des comptes pointe clairement la responsabilité de l'Etat dans cette situation : « les impôts locaux et les transferts courants entre administrations publiques, écrit-elle, progressent deux fois moins vite que les prestations et autres transferts ». Ce qui réfute votre discours imputant la responsabilité de la hausse des impôts aux collectivités locales.

Vous ne tenez pas non plus votre engagement de maîtrise des dépenses. Le Gouvernement affirme régulièrement qu'il ne dépense pas un euro de plus que ce qu'a autorisé le Parlement en loi de finances initiale. Cette affirmation sert à justifier une pratique de la régulation budgétaire peu respectueuse de l'autorisation parlementaire et de la sincérité budgétaire. Dès la discussion de la loi de finances sont annoncées des « réserves de précaution », en fait des gels de crédits, qui se soldent en réalité par des annulations remettant en cause le financement des politiques publiques. L'année 2004 n'aura pas fait exception sur ce point. Et malgré ces gels et annulations, l'engagement de respect du plafond de dépenses n'est pas tenu ! Là aussi les insincérités sont de plus en plus nombreuses. La Cour des Comptes note ainsi que « l'exécution budgétaire de 2004 n'a été conforme à la norme fixée sur la dépense qu'au prix d'une augmentation des reports de crédits et d'un blocage des dépenses militaires en capital en fin d'année ». La progression des dépenses est en outre minorée artificiellement par la transformation de dépenses budgétaires en dépenses fiscales : vous y avez recouru en 2005 comme en 2004, et vous vous proposez de persévérer en 2006. La Cour des comptes note ainsi que la norme de progression de la dépense « ne tient pas compte de l'évolution des autres catégories de dépenses, consommées par d'autres canaux, que sont les prélèvements sur recettes, les remboursements et dégrèvements d'impôts et les dépenses fiscales ». Au total, les dépenses constatées en exécution progressent de 4,5 % en 2004, alors qu'elles avaient baisé par exemple de 1,9 % en 2000.

Pour leur part, les recettes fiscales ont connu une forte progression, surtout grâce à l'impôt sur les sociétés. Mais ce ressaut conjoncturel ne doit pas masquer l'effet à long terme de votre politique fiscale. Celle-ci est injuste, et creuse les inégalités, mais elle est également inefficace. Elle ne s'adresse qu'à un nombre restreint de Français alors qu'elle mobilise des sommes très importantes, sans avoir les effets escomptés, notamment sur la consommation. Le président de notre commission des finances lui-même déclarait au début de l'été : « J'étais de ceux qui pensaient que nous ne devions pas baisser l'impôt sur le revenu. Nous avons ainsi perdu 7 milliards d'euros, dont 80 % au bénéfice des deux tranches supérieures ». C'était le 6 juillet 2005... Peu de jours après, le Gouvernement annonçait de nouvelles baisses de l'impôt sur le revenu et de l'ISF. Après ce camouflet, j'ai été surpris de voir le président Méhaignerie justifier ces nouvelles baisses. Tout cela manque de cohérence. Ce qui est cohérent, en revanche, c'est la politique menée depuis juin 2002, avec la volonté de réduire l'impôt pour une minorité et de faire payer cette politique par le plus grand nombre.

M. le Président de la commission - Vous oubliez la prime pour l'emploi, et le plafonnement des niches fiscales !

M. Didier Migaud - Sur ces points aussi il y aurait beaucoup à dire. M. le ministre a eu le culot de parler de certaines mesures qui, dans le passé, n'avaient pas été financées, mais je ne suis pas sûr que vos mesures fiscales le soient davantage ! Il paraît en tout cas assez irresponsable de réduire les recettes fiscales alors que les déficits continuent de croître.

En conclusion, malgré un excédent considérable de recettes fiscales, trois fois plus important qu'en 1999, le déficit public a été faiblement réduit en 2004 et la dette a continué de progresser fortement. Sur le plan budgétaire et financier l'exercice 2004 est plus que décevant et n'a pas permis de sortir nos finances publiques de leur état critique. Sur le plan économique et social, nul besoin d'en rappeler le bilan, qui fut noir pour beaucoup de Français. Tout ceci appelle de notre part la plus vive désapprobation sur la manière dont vous conduisez les affaires du pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Nicolas Perruchot - Je trouve édifiante la nostalgie du passé que vient d'exprimer l'orateur socialiste (Murmures sur les bancs du groupe socialiste), cette façon de soutenir qu'on était les meilleurs... et que la sanction électorale n'était pas juste. Il est pourtant clair qu'une nouvelle approche s'impose, que vous avez échoué, et les Français l'ont compris.

Que dire de la présente loi de règlement ? Année après année, les constats sont les mêmes. Notre pays s'endette toujours plus. Aucune des mesures prises n'a été à la hauteur de la gravité de la situation de nos finances publiques. Chaque année, nous aggravons la charge qui pèsera sur nos descendants. A plus de 1 100 milliards d'euros, la dette publique française a crevé un plafond symbolique en 2004. Elle pèse désormais plus de 65 % du produit intérieur brut , contre moins de 57 % en 2001 - et 20% en 1981, Monsieur Migaud...

Face à cette réalité, le Gouvernement parle de rigueur budgétaire et vante la maîtrise des dépenses publiques. Mais qu'en est-il vraiment ? Cette prétendue maîtrise des dépenses est en réalité le fruit de changements de périmètre, de tours de passe-passe fiscaux, et autres farces et attrapes budgétaires utilisés pour dissimuler un laisser-aller de la dépense depuis bien trop d'années.

Ne faisons pas croire à nos concitoyens que la réduction du déficit de l'Etat, ramené de 56,9 à 43,9 milliards entre 2003 et 2004, est le fruit d'économies et de réductions des dépenses publiques. Elle n'est due qu'à une hausse mécanique des prélèvements obligatoires et des recettes supplémentaires, consécutives au redressement de la conjoncture économique, laquelle n'a donc aucunement servi à l'assainissement nécessaire des comptes de l'Etat.

Mais surtout, comme l'a montré la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances, la réduction de 10 milliards d'euros du besoin de financement de l'Etat n'est qu'un leurre, pour trois raisons. Tout d'abord, à l'occasion de la transformation du budget annexe des prestations agricoles en établissement public gérant le nouveau fonds, le FFIFSA, le déficit du BAPSA a été maintenu, en contradiction avec les règles applicables aux budgets annexes, et transféré directement au nouvel établissement. L'opération a permis de sortir 3,2 milliards d'euros du solde d'exécution du budget de l'Etat ! Habile manœuvre, mais qui ne règle rien sur le fond.

De même, la reprise de la dette du FOREC par la CADES procure à l'Etat un gain apparent de 1,1 milliard ; et les reports de charges se sont accrus de 1,1 milliard, essentiellement sur les dépenses d'investissement militaire. Tout cela fait déjà 5,6 milliards...

Et comment croire en la sincérité et la transparence des comptes alors que les entreprises EDF et COGEMA ont versé une soulte de 1,6 milliard au CEA, opération qui a été comptabilisée en transfert de capital, améliorant ainsi la capacité de financement des ODAC ? N'oublions pas non plus que l'année 2004 a bénéficié d'une conjoncture favorable, avec une croissance de 2,4 % alors que la loi de finances initiale avait tablé sur 1,7 %.

Nous ne pouvons plus nous permettre d'espérer une situation économique meilleure pour redresser les finances de la France : il faut revenir aux règles de bonne gestion budgétaire, comme nous le disons depuis 2002, afin que le niveau des prélèvements obligatoires et la progression de la dette ne deviennent pas un frein à l'emploi et à la justice sociale, thèmes chers à notre groupe.

Avec un déficit à 3 %, la dette publique augmente plus vite que la richesse nationale. Il faut dire la vérité : le taux de déficit qui permet de stabiliser la dette est de 2 % ; les critères de Maastricht, que nous ne parvenons pas à respecter, sont déjà trop laxistes.

Nous avons d'autres sujets d'inquiétude. Pour la première fois depuis 1995, les administrations publiques locales se retrouvent en déficit à la fin de l'année 2004. Et que dire des comptes de la sécurité sociale, avec un déficit du régime général qui atteint 11,9 milliards en 2004 et quasiment autant en 2005, ce qui est sans précédent dans son histoire ? De plus, pour la première fois, toutes les branches sont déficitaires. En outre, le déficit est minoré par le versement exceptionnel de 1,1 milliard de la CADES au régime général.

Les comptes de la nation démontrent une nouvelle fois que, comme le réclame depuis des années le groupe UDF, nous aurions dû faire les réformes nécessaires au dynamisme de notre pays. Malheureusement, toutes les règles simples de bonne gestion n'ont pas été appliquées en 2004, ni en 2005, et ne le seront pas plus en 2006... Comment expliquerons-nous à nos enfants et petits-enfants le poids de la dette que nous leur laissons ?

Le groupe UDF, qui n'avait pas voté le projet de loi de finances pour 2004, ne votera pas le projet de loi de règlement qui traduit, hélas, une grave dérive de nos finances publiques.

M. André Chassaigne - Je remplace à cette tribune mon ami Jean-Claude Sandrier. Sans doute son intervention aurait-elle été plus technique, mais je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'être un expert en politique fiscale pour comprendre la logique des choix budgétaires de la majorité depuis 2003 et mesurer l'impasse à laquelle ils conduisent.

Votre seul credo est la maîtrise résolue de la charge publique, le gel des dépenses de l'Etat et l'affectation des marges de manœuvre à la réduction du déficit. Malgré le manque de sincérité de vos lois de finances initiales, malgré la constance dans l'injustice, malgré l'inefficacité criante de votre politique budgétaire, vous persistez à vous glorifier d'un prétendu assainissement des finances publiques... Vous avouez du bout des lèvres que vos « résultats » sont fragiles, n'ignorant pas que la croissance repose essentiellement sur la consommation des ménages, auxquels vous avez forcé la main pour qu'ils puisent dans leurs bas de laine et contractent des emprunts.

Vous prétendez être seuls garants de la bonne gestion des deniers de l'Etat, alors que votre approche des finances publiques est bien faible, uniquement dictée par une étroite logique comptable. Vous feignez de promouvoir une fiscalité simple, neutre et efficace, mais vous ne visez en fait que la réduction du rôle de l'Etat à ses missions régaliennes. Pour vous, la fiscalité ne saurait avoir pour but de redistribuer, de corriger les inégalités, de garantir la pérennité des services publics, et rien n'est plus urgent que de lever les obstacles au développement de la logique marchande. Toute tentative de rendre l'impôt plus juste est jugée confiscatoire. Etroitesse d'esprit, ou aveuglement idéologique ?

Les mesures fiscales prises dans le courant de l'année 2004 et dans la loi de finances pour 2005 portent la marque de cet enfermement dogmatique, qui s'est traduit également par des allégements de cotisations sociales - que vous appelez avec horreur des «charges».

Tout à sa foi libérale, le gouvernement Raffarin avait cru qu'une politique de l'offre était la bonne réponse à l'atonie de la croissance : réduction des impôts sur les entreprises et des cotisations patronales, réduction de l'impôt payé par les ménages les plus aisés, tels étaient les moyens décisifs de relancer notre économie... Il est temps que vous preniez conscience de votre erreur car les faits n'ont cessé de vous contredire. En matière fiscale, votre politique n'a eu d'autre effet que d'aggraver les inégalités et la misère et de priver l'Etat de ses marges de manoeuvre. A qui voulez-vous faire croire que la priorité serait aujourd'hui de réduire l'impôt de solidarité sur la fortune, ou de réduire encore davantage l'impôt sur les entreprises et les cotisations sociales patronales, alors que vous savez fort bien que les entreprises n'utilisent ces ressources ni pour créer de l'emploi, ni pour investir ?

De grâce, Monsieur le ministre, cessez de venir nous expliquer doctement que vous détenez la vérité suprême. Dites-nous tout simplement que vous avez choisi de multiplier les cadeaux fiscaux aux entreprises et aux actionnaires et d'engraisser les plus riches. Votre politique n'est pas propre à « assainir les finances publiques », mais vise à réduire comme peau de chagrin la notion même de politique publique. C'est ce que l'ancien président du Medef appelait « solder l'héritage de la Libération » : il n'y a pas de quoi en être fier... C'est pourquoi nous voterons bien évidemment contre ce projet de loi de règlement.

M. Michel Bouvard - La loi de règlement du budget 2004 est encore examinée selon la procédure de l'ordonnance de 1959. Je ne vous cache pas, Monsieur le ministre, que pour tous ceux qui travaillent depuis maintenant cinq ans sur les nouvelles dispositions de la LOLF, il s'ensuit une frustration réelle. Après Gilles Carrez et Didier Migaud, je souhaite ardemment que nous puissions, dès la loi de règlement du budget 2005, assurer une présentation de l'exécution en format LOLF, c'est-à-dire dans la logique des rapports annuels de performance. Ce doit être possible, les projets annuels de performance étant dorénavant en place, et le nombre des expérimentations conduites sur le terrain en format LOLF représentant dès 2005 10 % des crédits engagés.

Certes, il faudra prendre en considération le fait que les responsables de programme n'étaient pas en charge de la mise en œuvre des politiques et que les missions n'étaient pas opérationnelles, mais vous conviendrez que notre mode de discussion de la loi de règlement ne peut perdurer au-delà de cette année, alors que la discussion du PLF 2006 va nous faire basculer complètement dans la logique de la loi organique.

Je saisis l'occasion de cette discussion pour m'adresser à la présidence : nous allons étudier jeudi les modifications de notre Règlement destinées à l'adapter à la nouvelle procédure budgétaire ; je souscris à celles qui sont proposées, mais je veux exprimer le regret qu'aucune ne concerne la loi de règlement. Il me paraît indispensable d'affirmer dès maintenant que celle-ci fera l'objet d'un examen par fascicule, c'est-à-dire par mission. Elle doit en effet, conformément à la loi organique, être le moment où le Parlement examine les résultats obtenus pour chaque mission. En l'absence de modification de notre Règlement, cet examen, qui devra être le pendant au débat de deuxième partie de la loi de finances, dont il constitue en quelque sorte le rendez-vous, pourrait se faire d'une manière globalisée, en l'absence des ministres responsables des missions et avec la seule présence du ministre du budget - qui est certes notre interlocuteur préféré, mais qui ne saurait être le seul (Sourires)... Je déposerai un amendement à ce sujet.

Avant d'en venir à l'exécution de la loi de finances pour 2004, je voudrais m'associer aux propos de Didier Migaud. La loi organique est un outil dont chacun fera ce qu'il voudra ; c'est un outil de transparence et de mesure de l'efficacité de la dépense publique, qui peut nous aider dans nos choix.

Mais qui dit choix, dit détermination de la politique que l'on souhaite mener. Or, il faut reconnaître que la confusion règne, entre la loi organique et les stratégies ministérielles de réforme, et je crains que ceux qui ont en charge l'action de l'Etat sur le terrain ne voient en la LOLF l'outil d'une politique de réduction aveugle des dépenses. Ce serait contraire à l'esprit de la LOLF qui est de donner des outils pour faire des choix.

S'agissant de l'exécution de la loi de finances pour 2004, il faut se réjouir de la réduction de 12,7 milliards du déficit par rapport à l'exercice antérieur.

Ce résultat est tout d'abord lié à l'accroissement de la recette fiscale, grâce à une croissance de 2,1 % pour une prévision de 1,7 %. A périmètre constant, les recettes fiscales progressent de 6,9 % notamment grâce à la TVA et à l'impôt sur les sociétés, et retrouvent un niveau supérieur à celui de 2002 - nous avons dépassé le cap difficile de l'année 2003 !

Mais ces chiffres sont également le résultat de la maîtrise des dépenses, et il convient de saluer l'action du Gouvernement qui nous aura permis, pour la deuxième année consécutive, de respecter le plafond de dépenses de la loi de finances initiale - 283,73 milliards.

La conjugaison de l'affectation des recettes supplémentaires à la réduction du déficit et de la maîtrise de la dépense aura ainsi permis une amélioration du solde du budget de l'Etat de 11,74 milliards par rapport à 2003. Il s'agit là d'une règle de bonne gestion, mais si la situation budgétaire est meilleure en exécution que l'année dernière, elle n'en est pas pour autant satisfaisante.

En 2004 encore, même si la progression de la dépense n'a pas dépassé l'inflation, l'Etat, malgré le surcroît de recettes, aura dû emprunter pour financer l'équivalent de 15 jours de dépenses de fonctionnement - c'est mieux que l'année dernière, où il s'agissait d'un mois ! Il est aujourd'hui urgent d'engager une étape décisive pour rétablir un équilibre entre la dépense de fonctionnement et les recettes. Rappelons en effet que les dépenses nettes du budget général ont encore augmenté en 2004.

Seule l'inscription du budget de l'Etat dans une logique de stabilité de la dépense à zéro peut permettre d'enrayer le cycle du déficit et de la dette.

La maîtrise de la dépense suppose de connaître précisément l'évolution des effectifs rémunérés par l'Etat. Or, la présentation actuelle de la loi de règlement ne permet pas de disposer, au moment de sa discussion, du nombre d'emplois budgétaires effectivement pourvus. Surtout, elle ignore les emplois rémunérés indirectement sur le budget des ministères pour leurs propres besoins, et ne prend pas en compte le cas des opérateurs publics dépendant de ces ministères.

Le plafond d'autorisation d'emplois de la loi organique sera un élément de transparence, mais je m'interroge sur la précision du dénombrement dans l'optique de la loi de finances pour 2006 dont nous commençons l'examen en commission. Le rapport de la Cour des comptes de juin, sur l'exécution de la loi de finances pour 2004, nous apprend ainsi que certains ministères auraient préféré utiliser leurs propres outils de comptage, plutôt que celui de la direction de la réforme budgétaire, qui présentait des insuffisances. Ces problèmes sont-ils aujourd'hui réglés ? Nous attendons des réponses précises, tant l'enjeu est considérable pour le suivi de l'évolution de la dépense de personnel, laquelle se serait accélérée en 2004, selon les conclusions de la Cour des comptes.

Il est urgent de réformer l'Etat, et il serait souhaitable que nous puissions disposer d'un bilan de la mise en œuvre des stratégies ministérielles de réforme à l'occasion de la loi de règlement.

Pourriez-vous nous dire quelques mots de ce bilan, car la Cour des comptes souligne que les expériences d'externalisation de certaines dépenses de fonctionnement sont encore marginales.

Permettez-moi enfin de constater qu'en matière de crédits d'investissement, nous nous sommes éloignés des objectifs de la loi de finances initiale pour 2004, sous l'effet de la rigueur de gestion, des gels et des annulations qui ont essentiellement porté sur les investissements. Il faut néanmoins reconnaître que ces crédits progressent, plus fortement pour les dépenses militaires que pour les dépenses civiles. Cette progression est toutefois due en partie à la refonte du mode de financement de RFF.

A périmètre équivalent, les autorisations de paiement progressent de 2 % et les crédits de paiement de 5,6 %.

En 2004 encore, la gestion des crédits d'investissement aura été perturbée par la régulation budgétaire, certes à un niveau moindre qu'en 2003, mais suffisamment pour affecter nombre d'opérations, en particulier les opérations contractualisées. A cet égard, il faut se féliciter des nouvelles règles adoptées à l'occasion de la récente modification de la LOLF. Les responsables de programme ne pourront plus à l'avenir s'abriter derrière la régulation pour justifier que leurs objectifs n'ont pas été atteints. Je salue le fait que pour la première fois apparaisse dans la loi de finances pour 2006 le taux des crédits mis en réserve conformément à une très ancienne revendication de notre assemblée.

Cette loi de règlement est pour nous une étape vers une meilleure maîtrise de la dépense, une meilleure capacité à orienter les choix vers une dépense plus efficace. Pour toutes ces raisons, je vous invite à approuver cette loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Augustin Bonrepaux - En 2004, la France a connu une croissance de 2,3 % grâce à la croissance mondiale, mais elle a malheureusement été mal utilisée, et cette loi de règlement nous prouve que nos comptes publics ne se sont guère assainis, contrairement à ce que l'on voudrait nous faire croire !

Aujourd'hui les contrats de plan sont en panne, les services publics asphyxiés, l'ensemble des services de l'Etat en cessation de paiement, au point que certains responsables administratifs locaux se tournent vers les collectivités locales pour mendier des crédits.

Oui, telle est la réalité de nos finances publiques, et la question aujourd'hui se pose de l'avenir de nos services publics, du poids de l'Etat, du respect de ses engagements, et surtout de l'avenir des collectivités locales.

Monsieur le ministre, leurs dépenses augmentent, mais c'est vous qui organisez les transferts et les déficits qu'elles doivent supporter ! Pour la première fois depuis 1995, les collectivités locales affichent un déficit et non un excédent - 1,9 milliard selon l'INSEE - et la Cour des comptes pointe clairement la responsabilité de l'Etat qui a transféré aux départements la charge du RMI et des subventions versées notamment à la SNCF et à la RATP, sans les compenser.

Pas plus les élus de la majorité dans le cadre de la commission d'enquête que M. Mariton dans son rapport ne font, bien évidemment, état de ces éléments !

Pourtant, les désengagements de l'Etat, hors contrats de plan Etats-régions, sont criants, à tel point que même Adrien Zeller, président de région, membre de l'UMP, l'a reconnu. Je dis bien « hors contrat de plan » car le désengagement de l'Etat dans ce cadre contractuel n'est plus à démontrer.

2004, pour les départements, c'est le début du chemin de croix, avec la décentralisation précipitée du RMI dés le 1er janvier. Le déficit s'élève à 462 millions d'euros, du fait de la promesse non tenue d'une TIPP évolutive et de l'augmentation du nombre de RMIstes. Où est la compensation promise ? Quand allez-vous rembourser votre dette aux départements ?

Et la situation ne fait qu'empirer en 2005, où le déficit excède un milliard. Vous promettiez de rembourser à l'euro près, c'est le moment de le prouver !

Les élus locaux, de droite comme de gauche, membres de la commission consultative, ont demandé que l'année de référence pour le calcul du RMI ne soit plus 2003 - il y a eu tant d'erreurs ! - mais 2004. Ils attendent toujours l'arbitrage du Premier ministre.

Ils ont aussi demandé l'application d'un système d'alimentation régulière des départements afin d'éviter des problèmes de trésorerie. L'Etat a refusé.

Et enfin, quid du déficit de 2006 ? Le président veut que les départements agissent pour les RMIstes, mais c'est ce que nous faisons, notamment grâce aux contrats d'avenir, qui nous coûtent chaque fois 20 % de plus que le RMI, ce qui ne fera qu'aggraver le déficit ! Et, comme la TIPP n'augmentera pas, la situation sera encore plus grave en 2006.

Ce n'est qu'en vous défaussant sur les collectivités locales que vous pouvez afficher une réduction du déficit budgétaire. Il vous est facile de désigner du doigt les mauvais élèves, mais c'est vous qui imposez les règles du jeu !

En 2004, vous avez gaspillé les fruits de la croissance, et n'avez en rien amélioré les comptes de la nation, reportant l'effort sur les collectivités et sur les ménages modestes. La situation, hélas, ira empirant, car après le RMI, vont être transférés les routes et les TOS, tous postes qui ne feront qu'augmenter, en particulier parce que les dépenses de personnels augmentent mécaniquement de 3,5 % chaque année, alors que de l'autre côté, les compensations sont gelées. Pour aggraver le tout, voilà que vous réduisez encore l'autonomie fiscale des collectivités en plafonnant la taxe professionnelle. Celles-ci n'auront plus pour seule solution que d'augmenter l'impôt des ménages, enfin des plus modestes, car pour les privilégiés, vous avez prévu le bouclier fiscal ! Au total, vous allez réussir dans les collectivités ce que vous avez si bien réussi au niveau de l'Etat, à savoir casser l'investissement et la croissance, accroître la dette et augmenter les prélèvements sur les plus modestes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. René Dosière - Comme vient de le rappeler la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances, l'un des principaux objectifs de la LOLF est d'améliorer l'information et de renforcer le contrôle sur les dépenses publiques. Vous-même, Monsieur le ministre, insistez dans une brochure adressée aux parlementaires sur l'exigence d'une transparence accrue réclamée par nos concitoyens et que la LOLF devrait garantir.

A la lecture du rapport de la Cour des comptes, il est pourtant une institution où règne toujours la plus grande opacité : la Présidence de la République, dont le budget officiel s'élève à 31 millions d'euros, quand il atteint en réalité 82 millions ! Cette différence s'explique par le fait que onze ministères prennent à leur charge un grand nombre de dépenses de la Présidence. Ainsi le ministère de la défense contribue-t-il à son budget pour 24 millions, celui des affaires étrangères pour 11 millions, celui de la culture pour 10 millions... C'est dire que le budget de la Présidence voté par le Parlement - 32 millions d'euros pour 2006 -, ne représente qu'un tiers des dépenses réelles. L'une des exigences de la LOLF n'est-elle pourtant pas d'obtenir une idée de la réalité des coûts ?

Aujourd'hui, il est impossible de savoir combien de personnes au total travaillent à la Présidence de la République. On sait en revanche que 783 sont mises à sa disposition tout en continuant d'être rémunérées par leur administration d'origine. Votre ministère lui-même, Monsieur le ministre, lui fournit 56 personnes, pour un coût de quelque 2,3 millions d'euros. La Cour des comptes souligne pourtant que, d'une manière générale, « le principe de la mise à disposition nuit à la lisibilité des dépenses réelles en les minorant dans l'administration bénéficiaire ». Alors que les dépenses officielles de personnel de l'Elysée ne sont que 13 millions d'euros, elles sont en réalité de 29 millions supérieures, si l'on tient compte de la contribution des différents ministères.

Plus étrange encore, l'Elysée taxe certains ministères - il n'est pas d'autre terme. Ainsi le ministère de l'outre-mer m'a-t-il indiqué, après que je l'ai interrogé plusieurs fois, que la Présidence de la République lui avait demandé en début d'année une certaine somme, en l'espèce 530 000 euros, somme qui lui a versée et a ensuite été engagée directement par la Présidence. Pourquoi donc ces 530 000 euros ne figurent-ils pas au budget de la Présidence ? Ces pratiques, me direz-vous, ne sont pas nouvelles, mais j'avais cru comprendre que ce Gouvernement était animé d'une volonté réformatrice... La LOLF vise à rendre plus lisibles les budgets des différents ministères et administrations. Pourquoi la Présidence de la République serait-elle la seule à ne pas modifier ses pratiques budgétaires ?

Je tiens ici à rendre hommage au ministère de la défense pour la rapidité et la précision toutes militaires, si j'ose dire, avec lesquelles il a répondu à mes questions. L'Etec, successeur du Glam, a assuré en 2003 3 050 heures de vol pour les déplacements officiels, dont 673 heures au profit de la Présidence de la République. Pourquoi le ministère de la défense supporte-t-il seul cette dépense de quelque neuf millions d'euros, le coût de l'heures de vol variant de 4 000 à 5 700 euros suivant le type d'avion utilisé ? Pourquoi les différents utilisateurs ne remboursent-ils pas leur quote-part ?

Je regrette d'autant plus l'opacité qui entoure le budget de l'Elysée, que celui-ci a sextuplé, en euros constants, entre 1995 et 2005, et que nous n'avons toujours pas obtenu d'explication convaincante de cette augmentation. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2002, nous avions pourtant voté, à l'initiative de notre collègue Didier Migaud, un article faisant obligation à la Présidence de la République de fournir des explications à l'appui de ses demandes budgétaires. Nous n'avons reçu à ce titre - mais quelques jours seulement, de sorte que la Cour des comptes a pu écrire dans son rapport que, sur ce point, la loi n'est pas respectée -, un document de trois pages ! C'est se moquer de la représentation nationale qui a expressément voulu la transparence ! Et le Premier ministre, que j'ai interrogé à ce sujet, ne m'a pour l'instant apporté que des réponses dilatoires et tout à fait insatisfaisantes - un parlementaire qui n'a pas fait l'ENA, ce qui est mon cas, n'en sait pas moins lire...

Je suggère donc que la Présidence de la République élabore dorénavant un véritable budget, sincère et transparent, incluant les différentes participations ministérielles. Pourquoi d'ailleurs ne joindrait-elle pas au jaune budgétaire un état récapitulatif des dépenses supportées par les différents ministères l'année précédente ? Cet effort de transparence est indispensable. L'Assemblée nationale présente, elle, son budget dans un document de 150 pages comportant 266 rubriques, quand l'Elysée se contente aujourd'hui d'un document de trois pages identifiant douze lignes ! L'autonomie financière, loin de signifier opacité, exige la plus grande transparence. Au moment où beaucoup de nos concitoyens connaissent des difficultés, l'argent public doit être utilisé de manière irréprochable. La Présidence de la République se devrait sur ce point d'être exemplaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

La discussion générale est close.

M. le Ministre délégué - Je répondrai tout d'abord au rapporteur général qui a fait une proposition très intéressante à laquelle le Gouvernement est très favorable. Je ne vois, pour ma part, que des avantages à entrer plus en détail, dès juin 2006, dans l'examen des dépenses sectorielles. La LOLF nous incite d'ailleurs à aller toujours plus vite et plus avant en matière de transparence. Engageons dès que possible une réflexion commune sur le sujet : je me tiens à la disposition de la commission des finances.

J'ai été sensible aux encouragements adressés par cet observateur attentif des dépenses publiques qu'est M. Mariton quant à la poursuite de l'assainissement de nos finances. Je lui confirme que nous franchirons une nouvelle étape en 2007 grâce aux nouveaux outils d'analyse et de performance que nous offre la LOLF.

M. Migaud a fait un bel exercice de pédagogie appliquée avec ses graphiques, qui étaient toutefois difficiles à lire. Sans doute n'ai-je pas corrigé complètement ma myopie (Sourires), mais je n'ai pas réussi à en distinguer toutes les courbes et toutes les lignes. M. Méhaignerie, pourtant chaussé de lunettes (Sourires), a eu comme moi un mal fou à trouver le graphique concernant la croissance européenne. Nous avons bien distingué la croissance mondiale, la croissance française, mais nous avons cherché en gémissant (Sourires) la courbe comparée de la croissance dans la zone euro. Il est vrai que, pour vous, il était sans doute difficile de reconnaître que la croissance française est supérieure à celle de la zone euro. Oui, l'arithmétique est têtue ! Certes, s'agissant des déficits publics, nous pouvons faire beaucoup mieux, mais reconnaissez que la maîtrise des dépenses à « 0 volume » pendant trois ans et l'affectation de la totalité des excédents de recettes à la réduction du déficit relèvent d'une bonne gouvernance. Une comparaison aurait d'ailleurs été possible avec les 70 milliards de recettes fiscales perçus de 1998 à 2001 et dont 15 % seulement ont été affectés à la réduction du déficit. Je note en outre que vous jonglez entre déficit budgétaire et déficit public selon ce qui vous arrange. Que n'avez-vous fait preuve, au moment voulu, de courage politique pour mettre en œuvre des réformes structurelles ?

M. Perruchot souhaite que l'on se montre plus exigeant dans la maîtrise des finances publiques et la conduite de la réforme de l'Etat. C'est précisément ce que nous faisons. J'espère que le débat sur le PLF 2006 nous donnera l'occasion de rapprocher nos points de vue. Je souhaite, en effet, que nous travaillions ensemble sur une matière qui ne tolère ni l'excès, ni la caricature. Je sais que vous n'avez pas personnellement propension à tomber dans ces défauts : puisse cette attitude se révéler contagieuse parmi vos amis !

M. Chassaigne, lui, est en parfaite adéquation avec son groupe. En matière d'idéologie et de dogmatisme, c'est un professionnel (Sourires). Rien ne saurait nous rapprocher, Monsieur le député : vous êtes un « fana » de l'économie administrée, moi, pas du tout ; vous pensez qu'une dépense publique en hausse est forcément positive, pas moi : une bonne dépense publique, c'est une dépense efficace.

J'ai écouté attentivement votre intervention, Monsieur Bouvard. Vous êtes de ceux qui ont beaucoup travaillé à l'élaboration de la « démarche LOLF », et je vous en remercie. J'ai eu l'occasion de le dire à M. Carrez : je suis en effet d'accord quant à une modification des conditions de discussion de la loi de règlement. Si je partage également votre point de vue sur la LOLF, outil qui ne doit pas se substituer à une démarche politique, il faut néanmoins l'utiliser pleinement au service de la meilleure politique possible. Il me semble que le groupe UMP considère aussi que la transparence et la performance en matière de dépense publique sont fondamentales. Quant au passage des effectifs budgétaires aux effectifs réels, les ETPT, équivalents temps pleins travaillés, il s'est déroulé à mon sens dans des conditions aussi normales que possible.

Ah ! Monsieur Bonrepaux, je ne me lasse pas de nos échanges ! Nous ne progressons pas d'un iota d'un débat à l'autre, mais il est vrai qu'il n'y a pas non plus de régression ! (Sourires) Et je pense que, lorsque nous évoquerons nos réformes ambitieuses en matière de fiscalité locale, vous rappellerez solennellement votre position : les dépenses de certaines collectivités locales explosent parce que l'Etat alourdit leur fiscalité et porte atteinte à leur libre administration. Reconnaissez au moins que l'Etat fait son devoir en matière de transferts, de subventions et de dotations. Il en ira de même en ce qui concerne les 450 millions de transfert du RMI.

M. Pascal Terrasse - Ils seront inscrits dans le collectif budgétaire ?

M. le Ministre délégué - Absolument.

M. Bonrepaux affirme de plus qu'un contrat d'avenir coûte 20 % plus cher qu'un RMI simple. Certes, mais une collectivité employeuse bénéficiera du travail du titulaire...

M. Augustin Bonrepaux - Nous avons signé ces contrats, mais reconnaissez qu'ils nous coûtent !

M. le Ministre délégué - ...et le département peut réinsérer le Rmiste dans le circuit de l'emploi, ce qui permettra à terme de réaliser des économies. Ou vous ne voulez pas voir cette réalité, ou vous ne croyez pas à la réinsertion par l'emploi.

Nous pourrions parler, depuis quelques années, du « quart d'heure Dosière ». Tous les ans, en effet, M. Dosière nous entretient pendant un quart d'heure des crédits de la présidence de la République. Je dis tous les ans, mais plus précisément, depuis 2001...

M. René Dosière - M. Jospin était Premier ministre.

M. le Ministre délégué - Or, vous êtes parlementaire depuis 1988. Que n'avez-vous inauguré alors votre quart d'heure ? Nous pourrions disposer aujourd'hui d'une analyse comparée avec la deuxième présidence de François Mitterrand... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Voyons, m'avez-vous entendu crier pendant l'intervention de M. Dosière ? Je n'imaginais pas susciter un tel trouble en faisant remarquer qu'il ne s'était spécialisé dans cette intéressante question que depuis 2001 !

Je rappelle aussi que la Présidence de la République n'est pas une administration centrale, et encore moins un ministère. Au même titre que les deux assemblées, et comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 décembre 2001, elle jouit de l'autonomie financière. C'est le corollaire d'un principe auquel nous sommes tous attachés : celui de la séparation des pouvoirs, qui implique que les pouvoirs publics déterminent eux-mêmes les crédits nécessaires à leur fonctionnement. Ces crédits doivent toutefois, naturellement, faire l'objet d'une information. Cette information a été notablement enrichie par le jaune budgétaire relatif aux budgets des pouvoirs publics : depuis le projet de loi de finances pour 2003, la présidence précise son projet de budget selon la nomenclature du plan comptable général et justifie sa demande de crédits, de façon grosso modo semblable à celle des assemblées parlementaires.

M. René Dosière - Vous vous moquez !

M. le Ministre délégué - Par ailleurs, un rapport a été associé au projet de loi de règlement qui présente l'exécution de ce budget.

M. René Dosière - Il est aussi vide que le jaune !

M. le Ministre délégué - Le jaune est calqué sur l'information fournie par les assemblées parlementaires !

M. René Dosière - C'est faux !

M. le Ministre délégué - Certains peuvent considérer qu'elle est insuffisante. On pourrait envisager une réflexion à ce sujet, mais j'y pose des conditions. D'abord, cette réflexion doit englober l'ensemble des pouvoirs publics : Présidence, assemblées, Conseil constitutionnel et Cour de justice de la République. Ensuite, elle doit être entreprise dans le respect du principe d'autonomie financière. Enfin, elle doit se faire dans le même esprit de concorde que celui qui a conduit à l'adoption de la LOLF, et donc bien loin du procès d'intention que M. Dosière a dressé. Son réquisitoire était très éloigné de la démarche de transparence et de juste information des parlementaires qui doit régir la séparation des pouvoirs, comme de l'esprit consensuel qui a présidé à l'adoption de la LOLF. Je pense que je viens de vous faire une proposition constructive et je suis à votre disposition pour l'approfondir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président - J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

ARTICLE PREMIER À 7

L'article premier, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 2 à 7.

ART. 8

M. Nicolas Perruchot - Comme la Cour des comptes l'a relevé, la transformation du budget annexe des prestations agricoles, le BAPSA, en FFIPSA n'a nullement conduit à une réduction de son déficit. Celui-ci est au contraire passé de 1,5 milliard en 2003 à 3,2 en 2004, ce qui contrevient aux règles applicables aux budgets annexes, et il a été transféré directement au nouvel établissement. La charge a ainsi été soustraite du solde du budget de l'Etat, sans aucun souci de la sincérité comptable. Tout à l'heure, le ministre a souhaité que cette loi soit une photographie fidèle. L'amendement 2 rectifié de M. de Courson abonde dans ce sens.

M. le Rapporteur général - Je ne comprends pas les arguments de M. de Courson. La loi organique imposait de supprimer le BAPSA. Son remplacement pas le FFIPSA s'est fait dans le cadre d'une totale transparence financière : dépenses et recettes seront suivies exactement dans les mêmes conditions. Par ailleurs, les crédits transférés au FFIPSA ont été abondés de la bagatelle de 2,8 milliards ! Certes, un déficit perdure, de 3,2 milliards, mais que nous connaissons bien : dès juillet 2002, en loi de finances rectificative, nous avons dû dégager des centaines de millions supplémentaires pour le BAPSA, et nous avons recommencé les années suivantes ! Nous savons que le BAPSA, ou FFIPSA, est structurellement déficitaire dans la mesure où on compte cinq à six retraités pour un actif ! Dès lors il est parfaitement normal que la solidarité nationale joue.

Certes, ce déficit n'est plus intégré dans le solde du budget de l'Etat, mais il l'est dans le besoin de financement public, comme l'est, par exemple, le déficit du fonds d'assurance vieillesse. La seule critique qui vaille consisterait à relever que ces déficits, qui sont relatifs à des dépenses de fonctionnement, sont financés par l'emprunt, mais nous ne pouvons pas faire autrement ! Si le Gouvernement s'emploie à réduire, malgré un contexte difficile, le déficit budgétaire, c'est justement pour réduire notre besoin de financement et ne plus avoir besoin de l'emprunt que pour des dépenses d'investissement. Avis défavorable.

M. le Président de la commission - Le monde agricole entre dans une période d'incertitude, en raison des débats sur la PAC ou dans le cadre de l'OMC, et il est bon de rappeler l'effort de productivité qu'il a fourni. Il reste que ces avances successives, qu'il faudra bien un jour rembourser, posent un vrai problème : nous en serons à près de 7 milliards fin 2006 ! Il faudra sans doute faire un effort dans ce domaine, du point de vue de la sincérité budgétaire, dans les prochaines années.

M. Didier Migaud - Bref, M. de Courson a raison, mais il faut quand même voter contre son amendement !

M. le Ministre délégué - Je suis aussi étonné que le rapporteur général par cet amendement. Le transfert s'est fait de façon parfaitement transparente et conforme à l'esprit de la loi organique ! L'article 40 de la loi de finances pour 2004 avait prévu que le FFIPSA reprenait droits et obligations du BAPSA. Le déficit l'a été comme le reste, de façon parfaitement claire. Je suis donc défavorable à cet amendement. Je ne méconnais pas les difficultés que pose la situation financière du FFIPSA : je m'en suis entretenu avec le président de son conseil de surveillance, Yves Censi. Mais il ne s'agit pas d'un simple problème comptable !

J'ai demandé une expertise approfondie, concernant tant le passif que le financement pour 2006, en concertation avec les instances de direction du FFIPSA et les ministres de l'agriculture et des affaires sociales. Il faut trouver des solutions pour améliorer la situation financière de ce régime, si important pour les exploitants agricoles. En application de la LOLF et de la LOLFSS, ce sujet relève désormais par principe du champ du projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais je suivrai cette question de très près. J'ai bien reçu votre message d'alerte, mais je souhaiterais que vous retiriez cet amendement, Monsieur Perruchot.

M. Nicolas Perruchot - Je le maintiens, car nous souhaitons une parfaite sincérité des comptes. Même si la possibilité en existe, nous ne le contestons pas, nous ne devons pas « déporter » une dette dans un établissement public créé pour cela ! C'est pratique ! Il s'agit de 3,2 milliards ! Si cet amendement n'est pas voté, nous verrons la même méthode utilisée souvent dans les années qui viennent.

L'amendement 2 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 8, mis aux voix, est adopté.

ART. 9 À 11

L'article 9, mis aux voix, est adopté, de même que les articles 10 et 11.

ART. 12

M. le Rapporteur général - L'amendement 1 est rédactionnel.

L'amendement 1, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 12 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 13

L'article 13, mis aux voix, est adopté.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance, ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 18 heures 45.

            La Directrice du service
            du compte rendu analytique,

            Catherine MANCY

A N N E X E
ORDRE DU JOUR

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra du mardi 4 octobre 2005 au vendredi 21 octobre 2005 inclus a été ainsi fixé en Conférence des présidents :

MARDI 4 OCTOBRE

        matin (10 heures) :

- Nomination, éventuellement par scrutin, des six vice-présidents, des trois questeurs et des douze secrétaires.

        après-midi (15 heures) :

- Questions au Gouvernement.

- Discussion du projet de loi portant règlement définitif du budget de 2004.

        soir (21 h 30) :

- Discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement.

MERCREDI 5 OCTOBRE

        après-midi (15 heures) :

- Questions au Gouvernement.

- Discussion du projet de loi d'orientation agricole.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

JEUDI 6 OCTOBRE

        matin (9 h 30) :

- Discussion de la proposition de résolution de M. Jean-Louis Debré tendant à modifier les dispositions du Règlement de l'Assemblée nationale relatives à la discussion des lois de finances.

        après-midi (15 heures) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

VENDREDI 7 OCTOBRE

        matin (9 h 30) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

        après-midi (15 heures) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

LUNDI 10 OCTOBRE

        après-midi (16 heures) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

MARDI 11 OCTOBRE

        matin (9 h 30) :

- Débat sur la politique de développement des infrastructures de transport et les conditions d'exploitation des autoroutes.

(Séance d'initiative parlementaire)

        après-midi (15 heures) :

- Questions au Gouvernement.

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

MERCREDI 12 OCTOBRE

        après-midi (15 heures) :

- Questions au Gouvernement.

- Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi d'orientation agricole.

- Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales.

JEUDI 13 OCTOBRE

        matin (9 h 30) :

- Discussion de la proposition de loi de MM. Pierre MORANGE et Damien MESLOT visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation.

(Séance d'initiative parlementaire)

        après-midi (15 heures) :

- Suite de la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales.

MARDI 18 OCTOBRE

        matin (9 h 30) :

- Questions orales sans débat.

        après-midi (15 heures) :

- Questions au Gouvernement.

- Discussion générale et discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

MERCREDI 19 OCTOBRE

        après-midi (15 heures) :

- Questions au Gouvernement.

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

JEUDI 20 OCTOBRE

        matin (9 h 30) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

        après-midi (15 heures) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

VENDREDI 21 OCTOBRE

        matin (9 h 30) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

        après-midi (15 heures) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

        soir (21 h 30) :

- Suite de la discussion générale et de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2006.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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