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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du jeudi 26 octobre 2006

Séance de 9 heures 30
14ème jour de séance, 27ème séance

Présidence de M. Éric Raoult
Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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financement de la sÉcuritÉ sociale POUR 2007 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

APRÈS L'ART. 13

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances – Par l’amendement 19, nous souhaitons ouvrir le débat sur la résorption progressive des niches sociales, dont l’ampleur n’a rien de négligeable. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer l’assiette salariale des cotisations sociales – 422,7 milliards d’euros en 2005 – avec celle de la CSG – 453 milliards. La sécurité sociale perd plusieurs dizaines de milliards par an ! J’ajoute que l’écart entre l’assiette de la CSG et celle des cotisations sociales a augmenté de 6,5 % en 2005. Nous nous heurtons donc à un véritable problème de financement pérenne de l’assurance maladie.

Par cet amendement, nous ne visons pas à supprimer, en tant que telles, les niches sociales, mais à mieux évaluer leur efficacité. Nous avions du reste demandé, l’an dernier, un rapport sur l’impact de tous ces dispositifs que le Gouvernement devrait nous remettre l’an prochain. Sans remettre en cause ces exonérations, nous souhaitons limiter les pertes qui en résultent pour l’assurance maladie.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour les recettes et l’équilibre général – Cet amendement a été accepté par la commission.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleVous avez devant vous un ministre embarrassé par cet amendement. (« Ah ? » sur les bancs de la commission)

En effet, j’en approuve totalement l’esprit. Telle qu’elle a été créée, la sécurité sociale doit être sanctuarisée, ses ressources servant à financer des droits permanents que les Français acquièrent chaque jour par leur travail. Hélas, les dispositifs d’exonération qui se sont accumulés au fil du temps ont transformé en passoire une partie du financement de la protection sociale. Qu’on veuille y mettre quelques rustines me semble de bon aloi !

Toutefois, l’État ne dispose pas aujourd’hui des moyens budgétaires qui permettraient d’élargir l’assiette des financements sociaux. C’est tout simplement impossible ! Dans le cadre de la réflexion ouverte en janvier dernier par le Président de la République, je vous propose de travailler ensemble et de réexaminer chacune des exonérations actuelles, qu’il s’agisse des tickets restaurant ou des chèques vacances. Dans les années à venir, je souhaite que nous parvenions à financer ces exonérations, qui ont leur utilité, sans pénaliser pour autant la sécurité sociale.

Le problème que vous soulevez ne date pas d’hier, mais il se pose avec d’autant plus d’acuité que le vieillissement de la population alourdit sans cesse les charges de la sécurité sociale. Pour toutes ces raisons, je ne peux que partager l’esprit de cet amendement. Il n’existe pas de désaccord entre nous…

Il reste que vous avez devant vous un ministre comptable des intérêts de l’État, Monsieur Bur. Le budget n’est pas aujourd’hui en mesure d’apporter des financements nouveaux. Pour autant, on ne saurait remettre en cause les politiques menées depuis des années en faveur des chèques vacances et des titres restaurants.

Je le répète : on ne pourrait alimenter le budget de la sécurité sociale par de nouvelles ressources que si l’État avait la capacité de les financer, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. C’est pourquoi j’ai le grand regret de vous demander, Monsieur Bur, de bien vouloir retirer cet amendement.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Vous avez devant vous, Monsieur le ministre, un rapporteur pour avis embarrassé (Sourires), tiraillé entre son désir de satisfaire votre demande et celui de faire aboutir la réflexion. Il ne s’agit pas de remettre totalement en cause ces exonérations, mais plutôt d’évaluer leur efficacité. À mon initiative, j’avais obtenu en 2003 l’engagement qu’un rapport détaillé serait remis tous les cinq ans sur l’état et l’évaluation du dispositif. Nous souhaiterions que ce rapport examine non seulement l’efficacité et l’équité des politiques menées, mais aussi d’éventuelles simplifications de nature à renforcer la cohérence interne de ces niches.

Si le gouvernement prenait un tel engagement, je retirerais naturellement l’amendement.

M. Claude Évin – Je comprends l’embarras du ministre et celui du rapporteur. Tous ceux qui ont eu à assumer des responsabilités dans ce ministère connaissent bien ce débat, qui revient chaque année.

À titre d’exemple, les mesures d’incitation à la création d’emploi poursuivent effectivement des objectifs louables, mais elles pénalisent les régimes sociaux du fait de la perte de recettes qu’elles provoquent. Or, on imagine très bien ce que peut répondre un ministre des finances à un ministre en charge de la protection sociale : s’il y a création d’emploi, il y a également création de recettes pour la protection sociale…

Mais l’amendement 19 n’entre pas tout à fait dans ce cas de figure : il ne s’agit pas, en effet, d’exonérations qui tendent à favoriser l’emploi et pourraient donc avoir un effet bénéfique sur les recettes de la protection sociale ; il s’inscrit dans une autre politique sociale. Je ne conteste pas les exonérations qui visent à accroître par exemple la consommation mais, en l’occurrence, celles sur les chèques vacances ne conduiront pas inéluctablement à l’augmentation des recettes de la sécurité sociale. L’amendement présenté par M. Bur me semble tout à fait justifié. M. Carrez, hier, a interpellé les ministres et les parlementaires qui ont tendance à se montrer prodigues. C’est oublier que les budgets sociaux, parfois, abondent aussi directement ou indirectement le budget de l’État. Prenons date : nous devrons revenir sur cette question tôt ou tard.

M. le Ministre délégué – Je remercie MM. Bur et Évin d’avoir soulevé ce problème. Si j’acceptais cet amendement, je devrais rendre des comptes à tous les Français qui on droit à un chèque restaurant par jour et qui n’auraient plus dès lors droit qu’à un chèque tous les trois ou quatre jours.

M. Claude Évin – Que l’État prenne la différence à sa charge !

M. le Ministre délégué – L’État devrait en effet compenser à l’euro près la diminution du montant des exonérations de cotisations sociales…

M. Claude Évin – Oui.

M. le Ministre délégué – …mais nous n’avons pas les moyens de le faire. M. le rapporteur a raison : il faut examiner l’ensemble des niches fiscales et sociales, et je m’y engage solennellement.

M. Claude Évin – À six mois des échéances !

M. le Ministre délégué – Les parlementaires qui sont intéressés par cette question peuvent évidemment se joindre à nous, et les Français pourront ensuite prendre en toute connaissance de cause les décisions qui, selon moi, finiront par s’imposer.

Mme Jacqueline Fraysse – L’État n’a pas les moyens de prendre à sa charge ces exonérations ? Mais le Gouvernement a allégé de 400 millions l’ISF ! Vous avez fait des choix, tout simplement. Nous avons les moyens de compenser ces exonérations mais votre politique n’est ni en faveur des salariés, ni en faveur de la protection sociale.

M. Claude Évin – Je ne doute pas de la sincérité de M. le ministre délégué, mais prendre l’engagement solennel d’engager une négociation afin d’identifier les niches d’exonérations fiscales à six mois des élections ne me semble pas une raison suffisante pour que cet amendement soit retiré.

M. le Rapporteur pour avis – Je retire l’amendement 19.

L'amendement 19 est retiré.

M. Bruno Gilles – Que se passera-t-il pour les entreprises et les salariés qui relèvent de branches ayant signé des accords de mise à la retraite avant 65 ans ? 124 branches couvrant entre 7 et 10 millions de salariés sont concernées. Si ce texte est voté en l’état, des millions de salariés partiront en retraite avant 65 ans et, comme des centaines de milliers d’employeurs, seront pénalisés : d’une part, le salarié recevra une indemnité moindre et d’autre part l’entreprise acquittera les charges patronales sur une indemnité qui n’est plus vraiment un salaire. Pour ne pénaliser personne sans grever les recettes sociales et fiscales, il suffit, comme le propose l’amendement 347, d’ajouter aux deux modalités actuelles de départ à la retraite – le départ volontaire et la mise à la retraite – une modalité supplémentaire ou une variante : cette troisième modalité serait le départ par accord conjoint du salarié et de l’entreprise. On étendrait ainsi le régime fiscal et social des mises à la retraite à cette forme nouvelle de départ. Enfin, cet amendement ne contrarie pas l’objectif de la loi du 21 août 2003 qui tend à prolonger l’activité des seniors, cette troisième catégorie ne précipitant nullement les salariés vers une retraite anticipée. Bien au contraire, l’entreprise peut inciter le salarié à différer son départ, sans évidemment le contraindre. En limitant le champ de la retraite par décision conjointe aux branches qui ont déjà signé des accords étendus de mise à la retraite avant 65 ans, l’amendement n’entraîne aucune perte de recette par rapport au statu quo.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – Avis défavorable car cet amendement, si intéressant soit-il, ne s’inscrit pas pleinement dans la politique favorisant l’emploi des seniors. Il pose toutefois une question importante à laquelle il serait bon que le ministre réponde.

M. le Ministre délégué – Certes, cet amendement est intéressant, mais la France est le pays de l’OCDE où l’on commence à travailler le plus tard, où l’on travaille le moins d’heures dans l’année…

M. Claude Évin – Nous sommes plus productifs.

M. Gérard Bapt – Et donc plus compétitifs.

M. le Ministre délégué – …et où l’on part à la retraite le plus tôt. C’est un immense gâchis dû aux errements de la politique de l’emploi depuis 1981. La baisse de la durée du temps de travail ne crée pas durablement d’emplois…

M. Claude Évin – Si !

M. le Ministre délégué – …et ce n’est pas parce que l’on contraint les travailleurs de plus de 55 ans à partir que les jeunes trouvent plus facilement du travail. Nous avons réussi le tour de force de compter le plus grand nombre de chômeurs parmi les jeunes et le plus de travailleurs de plus de 55 ans qui quittent leur activité avant d’avoir atteint l’âge de la retraite ! Nous avons le taux d’activité des seniors le plus faible de tout l’OCDE ! L’ambitieuse réforme des retraites de 2003 le montre : la priorité est au renforcement de l’activité des seniors.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour l’assurance vieillesse Exact.

M. le Ministre délégué – Ce projet comporte des dispositions qui ont d’ailleurs été présentées au Conseil économique et social au mois de juin : assouplissement des règles du cumul emploi-retraite pour les salariés qui avaient des revenus modestes, pré-retraite progressive…

M. Gérard Bapt – Ce n’est pas nouveau.

M. le Ministre délégué – …et dispositions pour améliorer la retraite des Français qui souhaiteraient continuer à travailler alors qu’ils peuvent bénéficier des droits à la retraite à taux plein. La surcote de 2 % ayant été insuffisamment incitative, nous la portons à 5 % au-delà de 65 ans. Nous vous demandons d’approuver une nouvelle règle qui vise à empêcher les entreprises de recourir à la facilité en se séparant des salariés les plus âgés. Cet amendement va à l’encontre de notre objectif et je vous demande de le retirer au bénéfice de l’engagement que nous avons pris : nous avons en effet demandé un rapport à l’inspection générale des affaires sociales et à l’inspection générale des finances…

M. Gérard Bapt – Encore un rapport !

M. le Ministre délégué – …qui nous permettra d’avoir un état des lieux très précis des accords d’entreprises et de branches existants prévoyant la mise à la retraite d’office à 60 ans.

Nous pourrons ainsi mesurer l’impact de ces dispositions conventionnelles et étudier les moyens de surmonter ces rigidités, dans l’intérêt des travailleurs comme des entreprises.

M. Bruno Gilles – Malgré toute l’amitié que je vous porte, Monsieur le ministre, il m’est difficile de retirer cet amendement, d’autant que mes collègues Tian et Vitel l’ont cosigné. Je m’attendais à votre réponse et à celle du rapporteur. Je me permets donc d’insister : si notre amendement est adopté, trois cas de figure seront possibles. Le salarié qui a droit à une retraite à taux plein avant 65 ans et part à la retraite sans demander l’accord de l’entreprise bénéficiera comme aujourd’hui du régime fiscal et social des indemnités de départ volontaire. Pour celui qui est éligible à une mise à la retraite avant 65 ans jusqu’au 31 décembre 2009 ou à 65 ans, rien ne change. Le salarié qui est éligible à une retraite à taux plein et s’entend avec l’entreprise sur un âge de départ à la retraite, enfin, verra ses indemnités bénéficier du régime fiscal et social des indemnités de mise à la retraite. Il n’est donc pas question de contraindre qui que ce soit, ni de priver l’entreprise de l’expérience des seniors. Je salue la vigilance de notre rapporteur sur la loi Fillon ; mais si celle-ci est mise à mal, c’est par un article du PLFSS qui abroge avant terme les dispositions de son article 16 sur la mise à la retraite avant 65 ans. Je maintiens donc l’amendement.

M. Pierre-Christophe Baguet – La proposition du Gouvernement a des conséquences très importantes sur l’économie de notre pays et pour des milliers de retraités. Je défendrai après l’article 19 un amendement presque identique à celui de M. Gilles, qui vise à aligner la fiscalité et le paiement des charges sociales de l’indemnité de départ à la retraite – IDR – sur celles de l’indemnité de mise à la retraite – IMR –. Je l’avais initialement déposé lors de l’examen de la loi sur la participation : M. Larcher m’a demandé de le retirer et de le représenter au moment du PLFSS. Il faudrait tout de même que le Gouvernement prenne ses responsabilités !

M. Gérard Bapt – Il faut certes améliorer le taux d’activité des seniors, mais n’oublions pas les jeunes. Il est facile de faire de grandes déclarations sur les préretraites progressives. J’observe cependant que ce dispositif existe depuis des années, et sans grand succès. Sans doute faudrait-il l’améliorer, mais je ne crois pas que l’on puisse en faire une « arme fatale ».

J’aimerais également, Monsieur le ministre, que vous vous engagiez à ce que le prochain plan social d’Airbus à Toulouse ne prévoie pas de préretraites. J’y serai en tout cas attentif.

Vous allez demander un rapport – un de plus – à l’IGAS. Je vous ai interrogé lors de la présentation de la motion de renvoi en commission sur le retard du rapport sur les MIGAC, qui devait nous parvenir, aux termes de la loi, avant le 15 octobre – rapport d’autant plus important que nous avançons à tâtons sur la réforme TAA. Avant de demander de nouveaux rapports à l’IGAS, adressez-nous d’abord ceux que la loi a prévus !

M. Pierre-Christophe Baguet – Très bien.

M. Denis Jacquat, rapporteur – M. le Ministre l’a dit, le problème principal est celui de l’emploi des seniors. Nous voulons que les salariés puissent travailler le plus longtemps possible. Les Français ne veulent pas seulement travailler, mais aussi avoir une retraite décente, laquelle passe par un allongement de la vie professionnelle.

M. Pierre-Christophe Baguet – Ce n’est pas comme cela qu’on va résoudre le problème !

M. le Ministre délégué – Je demande la parole.

L'amendement 347, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre délégué – J’avais demandé la parole sur l’amendement avant le passage au vote, Monsieur le président. Le Gouvernement a donc perdu une chance de convaincre l’Assemblée. Que puis-je faire, sinon demander une nouvelle délibération ? Cet amendement va en effet à l’encontre de toute la politique que nous voulons mener pour inciter à la prolongation d’activité des travailleurs âgés. Le système d’exonération de cotisations sociales des indemnités de fin d’activité est actuellement différent selon que cette fin d’activité résulte d’une mise à la retraite d’office ou d’une initiative du salarié. Si vous exonérez les indemnités de la même façon dans les deux cas, vous incitez les salariés et les entreprises à privilégier les départs anticipés à la retraite. Cet argument est déterminant. On ne peut vouloir une chose et son contraire : si nous voulons que les salariés âgés prolongent leur activité, nous devons en assumer toutes les conséquences.

M. le Président – Vous pouvez intervenir à tout moment, Monsieur le ministre. Mais comme vous n’êtes pas intervenu immédiatement après avoir levé la main, j’avais cru comprendre que vous renonciez à prendre la parole. Je prends note que le Gouvernement demande une deuxième délibération sur le vote de cet amendement.

M. le Ministre délégué – C’est par égard pour vous, Monsieur le président, que je ne me suis pas levé avant que vous ne me donniez la parole.

M. le Président – Votre courtoisie légendaire n’est pas la règle commune dans l’hémicycle. La présidence saura désormais que lorsque vous êtes au banc du Gouvernement, il convient d’être particulièrement attentif. Ne voyez pas malice de sa part dans cet incident.

M. Pierre-Christophe Baguet – Rappel au Règlement. Je partage votre raisonnement, Monsieur le ministre. Il y a une différence entre l’indemnité de mise à la retraite et l’indemnité de départ à la retraite. Lorsque l’entreprise verse 100, cela lui coûte 100 dans le premier cas – et le salarié touche 100. Dans le second cas, cela lui coûte 150 et le salarié ne touche que 80, sans compter qu’intervient ensuite la fiscalité. Aujourd’hui, le Gouvernement propose de supprimer l’IMR au nom de la sauvegarde de l’emploi des seniors, alors que c’est le dispositif le plus intéressant pour l’entreprise et pour le salarié. Ce faisant, on encourage une troisième solution : le licenciement. On ne règle donc pas le problème de l’emploi des seniors.

M. le Président – Je précise que la deuxième délibération interviendra à la fin de la troisième partie. Je demande à l’Assemblée d’être particulièrement attentive pour éviter un nouveau problème. Entre la présidence qui oublie de donner la parole au ministre et les députés qui chuchotent, la tâche n’est pas facile !

Art. 14

Mme Jacqueline Fraysse – Cet article vise à affecter à la CNAM le surplus du produit des recettes fiscales versées à la sécurité sociale pour compenser les allégements généraux de charges, conformément aux engagements pris. Mais la rédaction pose problème. On comprend bien que pour 2007, s’il y a surplus, il sera affecté à la CNAM. Mais que se passera-t-il en cas de solde négatif ?

M. Claude Évin – Il n’y aura plus de compensation.

Mme Jacqueline Fraysse – Le rapport ne répond pas à cette question et, selon l’exposé des motifs, « l’État n’assurera plus de compensation intégrale et les éventuels écarts constatés entre les recettes fiscales et les coûts des allégements généraux auront donc un impact, favorable ou défavorable selon les cas, sur les comptes des organismes de sécurité sociale ». Il s’agit là d’une violation caractérisée du principe de compensation intégrale des allégements. Cette politique d’exonération, inefficace pour l’emploi, sera de plus coûteuse pour les assurés sociaux. Or les montants sont importants puisque ce sont plus de 20 milliards d’allégements qu’il s’agit de compenser. Je vous demande de lever cette ambiguïté désastreuse.

M. Gérard Bapt – Il faut être clair sur cette question de compensation. Nous avions déposé un amendement, qui a été déclaré irrecevable, et qui demandait un rapport précisant que le montant des exonérations de cotisations sociales et les informations sur les recettes affectées pour la compensation seraient communiqués chaque année au Parlement lors de l’examen du PLFSS. Je souhaite que le ministre prenne en considération cette demande. C’est d’autant plus important que M. Fagniez annonce dans son rapport, page 39, qu’en 2007, le montant des exonérations non compensées va augmenter de près de 10 %. Que se passera-t-il en cas de solde négatif ? L’État assumera-t-il la différence pour que l’engagement de compensation soit respecté ? Il y a déjà 2,5 milliards d’exonérations non compensées, et le Président de la République a contribué à les augmenter en prenant un engagement auprès des agriculteurs.

M. Claude Évin – Notre amendement 219 prévoit qu’en cas d’écart entre le produit des impôts et taxes affectées et la perte de recettes liée aux allégements, il y ait toujours régularisation en loi de finances. Tel que l’article 14 est rédigé, il donne une sécurité de reversement en cas d’excédent, mais ne dit pas ce qui se passerait dans le cas inverse. Il faut une garantie dans les deux cas, comme le prévoyait le PLFSS pour 2006 et comme s’y est engagé le Président de la République.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – La question relève plutôt de la loi de finances. (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste) De toute façon pour 2006 et 2007, le solde de la compensation est excédentaire.

M. Gérard Bapt – Pour 2007, vous n’en savez rien ! C’est une intuition.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – On a de bonnes intuitions. La commission a donc repoussé cet amendement.

M. le Ministre délégué – Même avis.

L'amendement 219, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président – Les amendement 445 et 20 rectifié sont en discussion commune.

M. Claude Évin – Il y a encore une incertitude pour 2006. Notre amendement 445 garantit donc le fait que l’excédent constaté pour 2006 sera bien affecté à la CNAM. Je me réjouis de ce que M. Bur ait interprété le texte du Gouvernement de la même façon que nous, y compris pour 2006.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Pas vraiment. Notre amendement 20 rectifié précise que le surplus de recettes fiscales affectées à la compensation des exonérations de cotisations patronales n’est pas affecté systématiquement à la CNAM, mais lui est affecté uniquement pour 2007. Si la CNAM devient excédentaire, le surplus pourrait aller à d’autres branches encore déficitaires. Le Parlement doit pouvoir décider de l’affectation.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – La commission souhaite sécuriser l’affectation du surplus à la CNAM. Elle a rejeté l’amendement 445 et l’amendement 20, dans sa première version. À titre personnel, je suis favorable à l’amendement 20 rectifié.

M. le Ministre délégué – Le Gouvernement comprend l’inspiration des deux amendements initiaux, mais est favorable à l’amendement 20 rectifié qui offre une meilleure rédaction. M. Évin pourrait peut-être s’y rallier.

M. Gérard Bapt – On va de repli en repli. Le Gouvernement a habilement masqué une dépense par une recette affectée. Maintenant, il ne garantit plus la compensation à l’euro près, puisque, pour 2007, le Parlement ne sera saisi que si la compensation tombe en dessous de 98 %.

Je lis en outre, page 39 de l’excellent rapport de M. Fagniez, que ce mécanisme « contribue à rendre plus opaque le financement de la sécurité sociale, tout en permettant à l’État de minorer le volume de ses dépenses, l’affectation de ce panier de taxes étant considérée comme un prélèvement sur recettes et non comme une dépense. » Je crains donc que malgré l’amendement de M. Bur, le principe de la compensation intégrale ne soit, année après année, remis en cause.

M. Claude Évin – Pour 2007, nous pouvons en rester à l’amendement rectifié de M. Bur, qui n’insulte pas l’avenir, mais je crois qu’il faudra reprendre ce débat l’an prochain.

L'amendement 445 est retiré.
L'amendement 20 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur - L’amendement 375 est rédactionnel.

L'amendement 375, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 14 modifié, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 14

M. Claude Évin – Par l’amendement 268, nous proposons de porter de 2 à 6 % le taux de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine, dont le produit est actuellement versé au fonds de solidarité vieillesse pour 20 %, au fonds de réserve des retraites pour 65 % et à la CNAV pour 15 %. Cette hausse de taux apporterait un surplus de financement durable et pérenne – de l’ordre de 4 milliards par an – au fonds de réserve des retraites.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – Rejet.

M. le Ministre délégué – Défavorable.

M. Gérard Bapt – Je veux tout de même insister sur le fait que les nouvelles ressources affectées au FRR, qui a pour objet de préserver les retraites par répartition à l’horizon 2015, sont en décroissance depuis 2002. Le prélèvement sur les revenus du capital constitue la seule recette pérenne en augmentation. Sachant que nous ne sommes aujourd’hui qu’à 14 % de l’objectif qui avait été fixé lors de la création du FRR en 1999, à savoir disposer de 152 milliards en 2020, il serait raisonnable d’adopter notre amendement. Et nous aimerions qu’il soit au moins pour le Gouvernement l’occasion de nous dire comment il compte remédier à la faiblesse du fonds et financer les retraites par répartition.

L'amendement 268, mis aux voix, n'est pas adopté.

Art. 15

M. Philippe Vitel – Notre amendement 314 tend à supprimer cet article, qui affecte au fonds de réserve des retraites les sommes issues d’un contrat d’assurance sur la vie non réclamées à l’issue d’un délai de trente ans à compter du décès ou du terme du contrat. Cet article nous paraît en effet contraire au mécanisme de mutualisation du contrat d’assurance vie. Normalement, au terme du délai de prescription, les sommes sont acquises sous forme de participation aux bénéfices techniques à la mutualité des assurés. C’est le principe même du fonctionnement de l’assurance.

De plus, il est inutile de prévoir un nouveau dispositif concernant les contrats non réclamés, dans la mesure où ceux-ci sont appelés à disparaître sous l’effet combiné de deux dispositions. La loi de sécurité financière du 1er août 2003 ayant instauré une obligation d’information annuelle pour les contrats d’assurance vie, que le souscripteur ait ou non payé des primes au cours de l’année, il y a très peu de probabilité que les héritiers ne trouvent pas trace du contrat, La loi du 15 décembre 2005 a d’autre part retenu un dispositif de recherche des bénéficiaires en cas de décès. Ce dispositif a suscité plus de 3 000 demandes depuis le 1er mai.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – Le dossier est complexe et nous ne savons pas très bien combien nous pouvons espérer de cette disposition, peut-être 20 millions, peut-être plus à l’avenir. Compte tenu de ces incertitudes et de l’absolue nécessité où nous sommes d’abonder le FRR, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

M. le Ministre délégué – Le fonds de réserve des retraites n’est pas l’alpha et l’oméga de l’avenir des retraites, il ne constituera qu’une ressource d’appoint pour lisser la crête de dépenses à laquelle aura à faire face l’assurance vieillesse en 2020. L’essentiel est ailleurs : c’est la réforme des retraites, que certains veulent remettre en cause, prenant ainsi une lourde responsabilité.

À ce fonds d’appoint, nous affectons une recette d’appoint, qui ne lèse personne, puisqu’il s’agit de sommes en déshérence, qui n’ont plus de propriétaire. Quand quelqu’un meurt sans héritier, les sommes qu’il laisse vont à l’État. Là, elles iraient au fonds de réserve des retraites.

M. Gérard Bapt – Une fois n’est pas coutume, je soutiens la position du Gouvernement, ce qui est logique, puisque je demande que l’on abonde les ressources du FRR. Je ne vois pas pourquoi les banques devraient être les seules bénéficiaires du fait que l’on ne retrouve pas les ayants droit d’un défunt. Cela dit, je me demande pourquoi le Gouvernement prévoit un mode de gestion différent pour ces sommes. Cela me paraît inutilement complexe.

L'amendement 314, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – L’amendement 99 répond à la dernière remarque de M. Bapt, puisqu’il tend à ce que les avoirs visés à l’article 15 soient fondus dans la masse globale des avoirs du FRR plutôt qu’investis exclusivement, comme le prévoit le texte du Gouvernement, en titres de créance négociable. Pour des motifs de bonne gestion du fonds et compte tenu de la faiblesse des montants en cause, il paraît inopportun de réserver un sort particulier aux avoirs non réclamés de l’assurance vie.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – L’an dernier déjà, nous avions débattu de la gestion particulière de la soulte versée par les industries électriques et gazières. L’amendement 21, identique au 99, vise à supprimer cette règle particulière pour le FRR : en compliquer la gestion nuirait aux intérêts des salariés.

Depuis son démarrage en juin 2004, ce fonds de pension à la française réalise une performance globale de 18,5 %. En fonction de l’évolution du chômage, nous pourrons, le cas échéant, avoir recours à cette réserve vers 2020.

Mme Paulette Guinchard et M. Gérard Bapt – C’est le gouvernement de M. Jospin qui l’a créé !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Oui, mais ce fut la seule réponse de ce gouvernement à la question des retraites : convenez que c’est un peu faible, d’autant que les ressources de ce fonds étaient très aléatoires… Nous en avons poursuivi l’abondement…

Mme Paulette Guinchard - Pas suffisamment !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – …de sorte qu’il sera doté de 29 milliards à la fin de l’année. Nous devrons à l’avenir consolider ce fonds qui, outre son rôle de lissage des coûts des retraites, peut aussi contribuer à stabiliser le capital des entreprises françaises et européennes dans lesquelles il investit.

M. le Ministre délégué – Je salue la qualité des placements judicieux qu’ont effectués les gestionnaires du FRR.

M. Gérard Bapt – Saluons aussi son créateur, M. Jospin !

M. le Ministre délégué – Si nous proposons d’imposer le placement de cette nouvelle ressource en bons du Trésor, c’est aussi pour contribuer au désendettement de l’État.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – On ne peut pas courir deux lièvres à la fois !

M. le Ministre délégué – Je comprends votre réticence à ne pas affecter ces placements au désendettement de l’État, mais c’était précisément le souhait du Gouvernement. Je m’en remets donc à la sagesse de l’Assemblée.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Je comprends quant à moi l’embarras du ministre : on ne peut s’occuper à la fois des retraites et de la dette publique. L’essentiel, ici, est de défendre l’intérêt des salariés : c’est la raison d’être du FRR. Je demande donc à mes collègues de voter mon amendement et à M. le rapporteur Fagniez de ne pas retirer le sien.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur J’allais justement demander à M. Bur de ne pas flancher : la simplification proposée par nos amendements ouvrira au fonds la possibilité d’utiliser des produits bien plus dynamiques que ceux que propose le Gouvernement. Je salue la convergence d’opinion entre les deux commissions, qui devrait convaincre le ministre !

M. Denis Jacquat, rapporteur Le FRR, dont j’ai soutenu la création, doit rester fidèle à ses objectifs initiaux : régulièrement abondé en ressources pérennes, il doit permettre le lissage dans le temps des coûts du régime de base, notamment à partir de 2020. Je rejoins donc l’avis de mes collègues rapporteurs.

Mme Paulette Guinchard – Je suis ravie de constater que les élus de la majorité redécouvrent l’intérêt du FRR ! S’il faut en effet en défendre les objectifs, il faut aussi l’abonder : c’est ce que nous défendons régulièrement depuis 2002, jusqu’à l’amendement 268 que vous venez hélas de rejeter. D’ailleurs, la Cour des comptes s’en inquiète également.

Les amendements identiques 99 et 21, mis aux voix, sont adoptés.
L'article 15 modifié, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 15

M. Denis Jacquat, rapporteur – Le FRR doit disposer de toutes les possibilités de placement d’actifs sur les instruments financiers fournis par le marché afin d’optimiser le rendement de ses activités. L’amendement 100 vise donc à adapter son cadre de gestion à l’évolution des marchés financiers, dans le respect de sa politique d’investissement.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Le FRR, créé en 1999, n’est devenu opérationnel qu’en juin 2004, à cause de la complexité du montage administratif nécessaire au respect des règles de droit public. Aujourd’hui, il faut lui donner les moyens d’effectuer des placements efficaces et faciliter sa gestion afin d’améliorer sa performance globale au service des salariés. C’est l’objet de l’amendement 22, identique au précédent.

Mme Paulette Guinchard – Soyons honnêtes : le fonds a été largement abondé à ses débuts et son système de gestion n’a été mis en place que plus tard.

M. le Ministre délégué – Avis favorable.

Les amendements identiques 100 et 22, mis aux voix, sont adoptés.

Art. 16

M. Bruno Gilles - Parce qu’il sera difficile d’anticiper la variation de l’unité de compte générant des produits taxables au titre de la CSG et de la CRDS, l’amendement 315, identique au 23 de la commission, tend à exclure du champ d’application de l’acompte les contrats de capitalisation et d’assurance vie.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – Avis défavorable.

M. le Ministre délégué – Vous souhaitez éviter que l’encaissement anticipé de la CSG entraîne son application à des revenus non encore constatés. Je serais d’accord avec vous si c’était le cas !

Je tiens à préciser très clairement que cet amendement ne porte que sur des revenus de placement de l’année antérieure définitivement acquis et dûment constatés. Le risque que vous voulez corriger a été appréhendé dans la rédaction du Gouvernement et je vous invite par conséquent à retirer ces amendements sans objet.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Au bénéfice de ces précisions, je retire l’amendement 23.

M. Bruno Gilles – Je retire également le 315.

M. Gérard Bapt – M. le ministre peut-il nous préciser le bénéfice attendu de cette mesure, qui, je le reconnais, me semble astucieuse en ce qu’elle permettra, en 2007, d’abonder les caisses et divers fonds. Je trouve dans les rapports des indications contradictoires sur le surcroît de recettes prévisible : 365 millions d’un côté, 430 millions de l’autre… Qu’en est-il ? Comment justifier un tel écart ?

M. le Ministre délégué – Défavorable.

M. Gérard Bapt – Décidément, le ministre n’écoute jamais l’opposition ! C’est caricatural !

Mme Mignon remplace M. Raoult au fauteuil présidentiel.
PRÉSIDENCE de Mme Hélène MIGNON
vice-présidente

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – L’amendement 367 rectifié vient au terme d’une longue réflexion et constitue le premier volet de la réponse apportée à une demande forte de notre commission. À l’article 53 du projet, elle a en effet adopté un amendement visant à augmenter l’ONDAM de ville de 300 millions. Las, il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de notre Constitution. Par le présent amendement, nous augmentons les recettes de 2007 de 200 millions.

En matière de revenus de placement, le choix entre le prélèvement libératoire et l’imposition au barème de l’impôt sur le revenu est sans incidence pour la détermination du montant des contributions sociales dues. Par contre, compte tenu du mode de prélèvement, les recettes acquises à la sécurité sociale peuvent être décalées d’un an selon l’option retenue par l’épargnant. Nous proposons, pour les contributions sociales, de généraliser le mode de prélèvement à la source effectué par les organismes financiers. Pour 2007, il est prévu que le produit de la CSG collectée au titre de cette mesure – soit 200 millions – revienne exclusivement à la CNAMTS.

Cela permettra d’augmenter l’ONDAM de ville du même montant, sans aggraver le déficit. L’ONDAM doit donc progresser dans des proportions destinées à satisfaire un certain nombre d’exigences des assurés sociaux, que précisera Jean-Marie Rolland tout à l’heure. Cet ONDAM de ville était jugé tout à fait inacceptable. Nous y remédions en trouvant par nous-mêmes le mode de financement.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités Avis favorable. Mais il faut bien préciser les choses. Le relèvement est sans incidence sur les placements et le dispositif nous permet d’instaurer une sorte de prélèvement libératoire social, à l’image de ce qui existe depuis longtemps en matière fiscale. Lors de la séance de questions au Gouvernement d’hier, j’ai expliqué qu’il n’était pas illégitime de vouloir transposer au domaine social ce qui donne satisfaction dans le champ fiscal. Et je ne pense pas que M. Bur va me démentir…

M. Gérard Bapt – Même l’opposition est d’accord sur ce point !

M. le Ministre – Je vous en remercie. Cette modalité permet donc de relever l’ONDAM. Mais, ce qui est très important, c’est de débattre de ce qu’il faut faire de cette ressource. Politiquement, il est essentiel de bien percevoir que le relèvement de l’ONDAM pour les soins de ville doit bénéficier en priorité aux assurés sociaux, et, ensuite aux professionnels de santé. Cette décision n’aggrave pas le déficit. Par ailleurs, parmi les professionnels de santé, je ne pense pas aux seuls médecins. Mme Briot, M. Mallié et M. Préel, qui se sont beaucoup impliqués dans la création de l’ordre infirmier, peuvent confirmer que j’ai toujours indiqué que la création d’un tel ordre ne serait pas la seule avancée. Les infirmiers et les sages-femmes attendent de nouveaux progrès et nous sommes au rendez-vous.

M. Philippe Vitel – Finalement, Monsieur le ministre, je voudrais vous remercier aujourd’hui d’avoir fixé un ONDAM de ville initial à 0,8 % car cela nous a amenés, depuis deux mois, à aller à la rencontre de ces professionnels de santé, qui, chaque jour, font des efforts pour que notre système soit aussi bien géré que possible. Il ne faut pas oublier qu’ils sont passés d’une augmentation annuelle de 8 % en 2003 à une progression de 1,4 % en 2006. Ils vont se sentir épaulés par la décision de bon sens que nous allons prendre en votant cet amendement. Ils sont nos partenaires dans la réforme en cours. Rien n’est définitivement gagné, et il faudra continuer à se battre pour que perdure notre système universel et solidaire. Merci, Monsieur le ministre, de nous avoir donné l’occasion de ce dialogue. Tout le monde sera satisfait de cette décision.

M. Gérard Bapt – Il semble que des trésors d’ingéniosité ont été déployés pour que, sans prélèvement supplémentaire, nous puissions améliorer l’ONDAM. L’une des propositions émanait du Parlement, l’autre du Gouvernement. Et je pense que tout cela est passé dans le filtre de Bercy ! Cela dit, j’ai bien noté l’affirmation du ministre tendant à préciser que cette ressource ne serait pas affectée prioritairement à telle ou telle catégorie professionnelle. En effet, s’agissant des personnels de santé, il faut adopter une démarche donnant-donnant, ou gagnant-gagnant. Toute amélioration de statut doit être subordonnée à une amélioration de la qualité du service rendu à l’usager ou au respect des engagements pris dans le cadre de la maîtrise médicalisée des dépenses. Je souscris donc plus volontiers aux précisions du ministre qu’aux déclarations de portée générale de M. Vitel.

M. Jean-Pierre Door – Je m’associe aux propos de M. Vitel et je remercie à mon tour le ministre d’avoir entendu la demande des commissaires des affaires sociales de retenir un ONDAM pour les soins de ville plus réaliste, afin de répondre aux attentes des médecins, des infirmières et des assurés. Je mesure la difficulté de la démarche car il fallait trouver les ressources nécessaires sans déséquilibrer le système hospitalier. Certains ont du reste voulu faire croire que nous allions amputer les ressources de l’hôpital au profit des soins de ville : ils sont aujourd’hui démentis. Nous voterons sans réserve cet amendement important.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis  Je note que la redistribution de la CSG à laquelle conduit cet amendement ne se fera qu’au titre de l’exercice 2007 et qu’il faudra donc rouvrir le débat pour les années suivantes. Je m’interroge aussi sur l’ampleur des besoins à satisfaire. Certains ont évoqué les attentes des médecins, d’autres celles des infirmières, mais il faut aussi penser aux pharmaciens et à mes anciens collègues chirurgiens-dentistes : je ne doute pas qu’eux aussi ont des attentes. Espérons que ce relèvement sera suffisant pour satisfaire tout le monde et que cet argent contribuera directement à l’amélioration de la qualité des soins.

L'amendement 367 rectifié, mis aux voix, est adopté.
L'article 16 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 17

L'article 17, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 17

Mme Jacqueline Fraysse – L’amendement 43 vise à inciter l’industrie pharmaceutique à faire un effort en faveur de la recherche. Une importante étude relative à dix des plus grandes compagnies pharmaceutiques mondiales a été rendue publique le 18 septembre dernier. Elle porte sur la période 1996-2005 et a été réalisée par le professeur Léo-Paul Lauzon, titulaire de la chaire d'études socio-économiques de l'Université du Québec à Montréal. L'examen de l’état financier de ces multinationales du médicament, parmi lesquelles figurent Pfizer, Johnson&Johnson, GlaxoSmithKline et Novartis, est riche d'enseignements : si ces entreprises ont versé plus de 317 milliards de dollars à leurs actionnaires pendant ces dix ans, elles n’ont consacré que 43 milliards à leurs investissements et aux immobilisations, et elles ont affecté 739 milliards au marketing et à la publicité, contre seulement 288 à la recherche et au développement. Les frais de promotion ont été 2,5 fois plus élevés que les dépenses servant à mettre au point des thérapies innovantes au profit des malades !

Comme l’indique l’auteur de cette étude, de tels comportements sont contraires aux prétentions de l’économie capitaliste, qui postule que plus les profits sont gros, plus les firmes accroissent leurs immobilisations et investissent dans la recherche. Vos dogmes libéraux sont loin d’être automatiquement respectés ! Ces résultats devraient nous alerter. Nous devrions veiller à ce que les intérêts de la collectivité soient mieux garantis, comme l’ont demandé de nombreuses ONG lors du XVIe congrès international sur le sida.

Par cet amendement, nous proposons d’adopter des dispositions législatives visant à inciter les firmes pharmaceutiques à augmenter leur effort en matière de recherche. Toute entreprise concernée dont le taux de R&D serait inférieur au tiers du chiffre d’affaires comptabilisé au cours du dernier exercice clos subirait ainsi une majoration de la contribution due aux termes de l’article L. 245-2 du code de la sécurité sociale. Cette proposition raisonnable va dans le sens de l’intérêt général !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – La commission a rejeté cet amendement après avoir mené des échanges approfondis avec Mme Fraysse. Nous avons eu l’impression que le parti communiste souhaitait faire revivre le Gosplan, en imposant un cahier des charges aux entreprises et en dictant leurs dépenses. Je comprends bien qu’on s’étonne de l’ampleur des frais de marketing et de lobbying, mais ce n’est pas à la loi d’imposer aux entreprises leur comportement en matière de recherche, même si les biens produits – les médicaments – ne sont pas des biens ordinaires !

M. le Ministre – Je n’ai pas l’ambition de faire la synthèse entre les positions de Mme Fraysse et du rapporteur (Sourires). Vous avez déjà déposé des amendements comparables, Madame Fraysse, et je comprends bien l’esprit qui vous inspire, malgré mon désaccord sur vos propositions. M. le rapporteur refuse de son côté de figer la situation, et il a raison !

Si votre amendement était adopté, il y aurait encore moins de chances que les entreprises concernées investissent dans la recherche, car elles se trouveraient pénalisées. Or, vous ne souhaitez, vous aussi, qu’un surcroît de R&D dans l’industrie pharmaceutique ! Cela fait de trop nombreuses années que le pied a été levé dans ce domaine, et que certaines entreprises cherchent à faire passer pour des innovations des procédés qui n’en sont pas !

Sur tous ces points, je vous rappelle que nous travaillons déjà avec l’industrie pharmaceutique. Une réunion du Conseil stratégique pour les industries de santé devra notamment se tenir au début du mois de décembre. Nous souhaitons favoriser, et non pénaliser, les entreprises qui investissent dans la recherche et, pour ne rien vous cacher, celles qui le font en France ! Cela fait longtemps que nous en parlons cependant que d’autres pays agissent ! Voilà pourquoi nous comptons bientôt prendre des mesures destinées à favoriser la recherche en France dans le respect de la législation communautaire.

Oui, nous avons besoin de recherche pour bénéficier de vraies innovations ! Et, oui, je préfère que la recherche se fasse chez nous ! Si je suis défavorable à votre amendement, j’ai un rêve secret : que vous adoptiez notre dispositif quand nous le présenterons.

Mme Jacqueline Fraysse – Certains suggèrent, et c’est inacceptable, que mon groupe voudrait régir par la loi les entreprises. Ce n’est pas l’objet de notre amendement ! Nous pensons seulement que le médicament est une marchandise particulière…

M. le Ministre – C’est un produit de santé !

Mme Jacqueline Fraysse – …qui est d’ailleurs remboursée par la sécurité sociale, c’est-à-dire par l’argent public, ce qui n’est pas sans effet sur les chiffres d’affaires des industries pharmaceutiques ! Nous avons donc un droit de regard sur ce sujet, et j’espère que vous m’en donnerez acte. Nous avons le droit d’imprimer certaines orientations dans l’intérêt général.

Tout ce qui va dans le sens de l’incitation à la recherche me convient, Monsieur le ministre, mais vous ne pouvez nier qu’il existe un réel déséquilibre. Vous avez tort d’affirmer que mon amendement pénaliserait les industries pharmaceutiques et diminuerait la recherche ! Une entreprise qui accroîtrait ses dépenses de recherche, par exemple en diminuant ses dépenses de marketing, ne serait aucunement pénalisée ! Seules le seraient celles qui persistent dans leur comportement anormal et déséquilibré au regard des immenses besoins qui existent.

Pour toutes ces raisons, je maintiens cet amendement. Nous gagnerions vraiment à l’adopter !

M. Gérard Bapt – On peut effectivement discuter des seuils retenus par cet amendement : les entreprises que j’ai rencontrées investissent déjà deux fois plus que la moyenne des industries françaises… C’est dire l’effort qu’elles réalisent ! Nous devons les encourager. J’ajoute que le médicament n’est pas un produit comme un autre. Le Président de la République n’a-t-il pas lancé une initiative tout à fait originale, qui vise à fournir des médicaments aux pays en voie de développement grâce à une taxe sur les billets d’avion ? Dans ces conditions, comment peut-on prétendre qu’il s’agit d’un bien marchand comme un autre ?

Par ailleurs, il est tout à fait imaginable d’agir sur la structure des dépenses des entreprises en taxant les frais de marketing, ou de limiter l’action des visiteurs médicaux, qui incitent bien souvent à la prescription de médicaments.

Plusieurs députés UMP – C’est du pur fantasme ! Nous avons déjà voté des lois sur le sujet !

M. Gérard Bapt – Il est également envisageable d’alimenter la recherche fondamentale par le biais d’une taxation adaptée. Je pense notamment au plan cancer : la recherche fondamentale est indispensable si nous voulons des avancées dans les traitements. Or la recherche finalisée menée par l’industrie privée se limite bien souvent à des innovations de contournement.

Puisque le ministre a évoqué un rendez-vous avec l’industrie pharmaceutique, je regrette le refus de notre amendement relatif à la politique des génériques. Si l’on demande la participation de l’industrie pharmaceutique, il faut que les règles soient claires et protègent la propriété intellectuelle. Certains craignent en effet que certains génériques soient mis sur le marché sans que la durée des brevets soit respectée…

Mme la Présidente – Je vous demande de conclure, Monsieur Bapt.

M. Gérard Bapt – C’est que je n’aurai pas l’occasion de défendre mon amendement, Madame la présidente, car il a été bloqué en commission... C’est pourtant un sujet d’importance et j’aimerais que le ministre nous explique quelle position il compte défendre en matière de propriété intellectuelle, notamment contre les stratégies de contournement adoptées par certains laboratoires.

M. Jean-Pierre Door – Je regrette que Mme Fraysse porte un regard aussi suspicieux sur l’industrie pharmaceutique. Celle-ci fait depuis très longtemps partie du patrimoine de la France : c’est dans notre pays qu’ont été développées de très nombreuses molécules ! Taxer la recherche, c’est lutter contre la recherche (Protestations de Mme Fraysse). À l’occasion de la semaine du médicament, j’ai pu rencontrer certains dirigeants d’industries pharmaceutiques implantées dans ma circonscription, et j’ai pu constater que l’investissement dans ce domaine se porte déjà à 18 ou 20 %, c’est-à-dire un niveau bien plus élevé que dans d’autres secteurs. Il est donc regrettable que cet amendement mette toutes les entreprises dans le même sac !

J’ajoute que, grâce au CSIS, nous pourrons réfléchir aux modes d’action susceptibles de renforcer l’attractivité de notre territoire. Peut-être pourrions-nous prendre exemple sur la Grande-Bretagne, en favorisant les laboratoires qui embauchent dans notre pays. Mais je fais toute confiance aux membres du CSIS pour œuvrer en ce sens. Je voterai donc contre cet amendement.

M. Bernard Debré – Je suis, moi aussi, extrêmement surpris et peiné. Nous avions en France une des industries pharmaceutiques les plus compétitives au monde.

M. le Ministre – Et nous l’avons encore !

M. Bernard Debré – Elle demeure compétitive, mais la concurrence internationale est telle que nous avons des soucis à nous faire. Il serait donc aberrant de la pénaliser pour des raisons dogmatiques.

M. Claude Évin – Ce n’est pas ce que vous avez écrit dans votre livre.

M. Bernard Debré – Mais si ! Nous devons aider les entreprises qui font de la recherche.

M. Claude Évin – Elles seront heureuses de l’apprendre.

M. Bernard Debré – Je l’ai écrit dans mon livre, que vous avez mal lu ou mal interprété…

M. le Ministre – Il n’a lu que les pages de gauche ! (Sourires)

M. Bernard Debré – …et je le répète. Il convient d’autant plus d’aider l’industrie pharmaceutique que les molécules qui seront découvertes coûteront très cher, car elles viseront à traiter des maladies rares. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

L'amendement 43, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 18

Mme la Présidente – La parole est à M. Préel.

M. Bernard Accoyer – M. Préel doit certes intervenir sur cet article mais je souhaite demander une suspension de séance afin de réunir mon groupe pour examiner des questions techniques.

M. Jean-Luc Préel – J’ai longtemps travaillé avec M. Accoyer dans le cadre de plusieurs PLFSS et nous avons souvent demandé des suspensions de séance ensemble ! Je prendrai la parole après la suspension.

La séance, suspendue à 11 heures 35, est reprise à 11 heures 55.

M. Jean-Luc Préel – Je suis heureux que Bernard Accoyer ait pu réunir son groupe, et j’espère qu’il a obtenu un résultat satisfaisant pour la suite de nos débats.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Il est certain qu’il est difficile pour vous de réunir votre groupe !

M. Jean-Luc Préel – Soyez assuré que je l’ai fait.

M. Bernard Accoyer – C’est plus simple lorsqu’on est seul en séance que lorsqu’on est cinquante !

M. Jean-Luc Préel – Il ne me semble pas que vous soyez cinquante, Monsieur Accoyer.

J’en viens à l’article 18, qui fixe le taux de la contribution due par les laboratoires au titre de leur chiffre d’affaires. Nous avons déjà évoqué la politique du médicament hier et avant la suspension de séance, à l’occasion de l’amendement de Mme Fraysse. Le médicament n’est pas un produit comme un autre : il a vocation à soigner, et si possible à guérir, voire à prévenir les maladies. Nous sommes en attente de produits innovants et nous manquons de produits efficaces contre les maladies infectieuses ou les cancers. Or la recherche et le développement de nouvelles molécules sont de plus en plus onéreux. Les multinationales de l’industrie pharmaceutique, y compris notre grand laboratoire Sanofi-Aventis, sont présentes dans de nombreux pays. Si nous voulons que les investissements de recherche-développement se fassent en France, il est important d’entretenir des relations de confiance avec l’industrie pharmaceutique et d’avoir une vraie politique conventionnelle. Je vous ai entendu dire, Monsieur le ministre de la santé, que vous alliez réunir le Conseil stratégique des industries de santé, dont la dernière réunion remonte à dix-huit mois. Le pilotage de l’industrie pharmaceutique requiert en effet une visibilité sur plusieurs années.

L’an dernier, une taxe exceptionnelle avait été instituée puisque le taux de la contribution sur le chiffre d’affaires était passé de 0,6 % à 1,7 6%. Si tant est que le mot « exceptionnel » ait un sens, la logique aurait voulu que l’on revienne à 0,6 %. Vous ne faites que réduire la majoration, ce qui peut être interprété soit comme un pis-aller, soit comme une pérennisation de la surtaxe.

M. le Ministre – J’ai toujours dit que cette taxe diminuerait, mais je n’ai jamais dit qu’elle reviendrait à 0,6 %. Elle n’est d’ailleurs pas de nature, en elle-même, à ruiner l’attractivité du territoire France pour l’industrie pharmaceutique, qu’il s’agisse d’entreprises françaises ou d’entreprises étrangères. D’ailleurs, en me fondant sur le sentiment de responsables de grands groupes mondiaux et au vu de la politique du médicament menée dans certains autres pays européens, je peux vous assurer qu’on n’est pas près de cesser d’innover en France.

Bien sûr, on peut réunir le Conseil stratégique pour les industries de santé, mais ce qui est important, c’est d’élaborer un ordre du jour, et l’industrie y tenait aussi, après le PLFSS de l’an dernier. Cet ordre du jour est désormais établi et je souhaite que, dans les mois qui viennent, on avance notamment sur la valorisation de la recherche et sur le délai d’introduction d’un médicament sur le marché. Si ce délai est trop long, c’est aussi parce que, quand on passe à l’échelle européenne, il faut pratiquement recommencer à zéro parce que les AMM sont jugés par rapport aux placebos et non aux comparants. J’ai demandé au comité du médicament à Bruxelles, il y a trois semaines, que des actions soient entreprises afin de gagner du temps.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Notre amendement 24 rappelle que cette taxe est imposée à titre exceptionnel. L’an dernier, il était exceptionnel qu’elle soit à 1,76 %, cette année qu’elle soit à 1 % et c’est à titre tout aussi exceptionnel qu’on fixera un nouveau taux l’an prochain. En tout cas, elle n’est pas pérenne.

M. le Ministre – Mais le fait que nous tenions nos engagements n’a rien d’exceptionnel. Avis favorable.

M. Gérard Bapt – Si l’on veut que l’industrie pharmaceutique s’engage dans la concertation, il faut annoncer clairement ses intentions en ce qui concerne la taxe. Si on lui demande des engagements sur la recherche et l’innovation, il faut qu’elle sache de quelle capacité de financement elle dispose.

Par ailleurs, est-ce au cours de la prochaine réunion du conseil stratégique que vous fixerez votre stratégie en ce qui concerne la propriété intellectuelle ?

M. le Ministre  J’espère même que nous trouverons une solution avant début décembre. Se tient actuellement une réunion de travail au ministère entre le Comité économique des produits de santé et le LEM – les industries du médicament – pour mettre au point ce qu’on entend par protection de la propriété industrielle. Au-delà du cadre conventionnel, et en attendant la transposition d’une directive européenne, nous examinons également la possibilité de renforcer les dispositions législatives, ici ou éventuellement au Sénat.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – La commission a accepté l’amendement.

L'amendement 24, mis aux voix, est adopté.

Mme Jacqueline Fraysse – Notre amendement 44 revient sur la diminution de la taxe, pour en rester à 1,76 %. Les comptes de l’assurance maladie restent fragiles en raison de l’absence de réformes structurelles. Pourquoi diminuer encore ses ressources ? L’industrie pharmaceutique n’est pas à plaindre, et elle profite beaucoup de l’existence de la sécurité sociale. Réduire sa contribution de 100 millions alors que la pression sur les assurés sociaux s’accentue n’est pas acceptable. De plus, il faut tenir compte de ce que les résultats des laboratoires ne sont pas seulement acquis sur les médicaments remboursés, mais aussi sur les médicaments déremboursés lesquels, selon 60 millions de consommateurs, ont enregistré des hausses de 20 % à 350 %, ce qui est beaucoup…

M. le Ministre – C’est trop.

Mme Jacqueline Fraysse – C’est pourquoi nous n’acceptons pas ce cadeau de 100 millions.

M. Bruno Gilles – Dans le PLFSS pour 2006, on a bien dit que le taux de 1,76 % était exceptionnel. Par notre amendement 316, nous proposons donc de revenir au taux de 0,6 %. Notre amendement de repli 317 le fixe à 0,8 %.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – Pour une taxe exceptionnelle, il fallait trouver un taux moyen. Celui que propose le projet semble conforme au souhait général. La commission a donc repoussé ces trois amendements.

M. le Ministre – Avis défavorable également. Si le taux est fixé à 1 %, c’est aussi que la décélération des dépenses sur les produits de santé n’a pas été celle que l’on prévoyait.

Effectivement, Madame Fraysse, les hausses des produits déremboursés, dans de telles proportions, sont incompréhensibles et inadmissibles. Mais nous n’avons pas vraiment de moyen d’action. Nous pouvons agir de façon amiable, par voie conventionnelle, pour éviter ces augmentations au-delà du raisonnable. Les industriels du médicament m’ont fait part de leur accord de principe. Mais si l’on ne trouve pas de solution, nous agirons au niveau européen et nous prendrons nos responsabilités au niveau national en revenant devant le Parlement.

M. Gérard Bapt – Pour une fois, je ne suivrai pas Mme Fraysse. Il y a d’autres manières d’agir vis-à-vis des laboratoires, y compris en définissant des groupes homogènes de prix par molécule ou par catégories de médicaments. Il faut continuer à ajuster au mieux le prix du médicament et peut-être faire évoluer la façon dont les prix sont fixés par référence à une moyenne entre l’Angleterre, l’Allemagne et l’Italie…

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – C’est fait.

M. Gérard Bapt – Oui, mais en général on choisit comme référence les pays où les résultats des essais cliniques sont les plus favorables aux laboratoires.

Cela dit, aller plus loin dans la politique du générique amènera un jour à pratiquer le tarif forfaitaire de responsabilité. Quant aux médicaments à service médical rendu insuffisant, il faut conserver une certaine maîtrise publique sur leurs prix.

Enfin, la taxation profite à la sécurité sociale, mais pas aux assurances complémentaires, qui profitent en revanche d’une baisse des prix sur les médicaments remboursables.

L'amendement 44, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Ministre – Fixer un TFR, un tarif forfaitaire de remboursement, surtout à un niveau bas, comme on l’a fait en Allemagne avec la jumbo class, ce serait renoncer à mener à terme l’effort entrepris en ne donnant pas aux professionnels et aux patients le temps suffisant pour s’habituer aux génériques. Si nous avions appliqué le TFR, nous n’aurions jamais obtenu que les médecins et les pharmaciens signent avec l’assurance maladie la convention qui va nous permettre d’atteindre l’objectif de 70 % que nous nous étions fixé. L’essentiel est de convaincre tout un chacun que le générique est aussi bon pour la santé qu’un médicament de marque, mais meilleur pour la sécurité sociale. Je veux poursuivre dans cette voie.

L'amendement 316, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 317.
L'article 18 modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 19

M. Jean-Luc Préel – L’investissement hospitalier doit être encouragé. L’aide à l’investissement constitue d’ailleurs un volet extrêmement important du plan hôpital 2007. Cependant, une part importante de l’effort demeure à la charge des établissements, et l’aide apportée par l’État peut même parfois être inférieure aux montants de TVA dont ils sont redevables – car ils paient la TVA sur les investissements !

L’article 19 dispose que les établissements de santé peuvent reverser à la CNAM une partie du produit net comptable des cessions de leurs terrains et bâtiments. À quoi bon consacrer un article à une simple faculté ? Et qu’entend-on par « une partie » ? Tout cela est bien flou ! Par l’amendement 86, nous proposons donc de supprimer cet article par trop imprécis, qui ne peut que freiner l’investissement hospitalier et qui va en outre à l’encontre de l’objectif d’autonomie des établissements. Je regrette à ce propos que le président du conseil d’administration d’un établissement hospitalier ne soit même plus membre des conférences sanitaires de secteur.

M. Claude Évin – La notion d’autonomie des établissements mériterait d’être précisée, Monsieur Préel, car si un établissement peut prendre seul un certain nombre de décisions telles que passer un marché public ou engager une action en justice, il n’est pas si autonome que cela pour le financement de son fonctionnement ou de ses investissements…

Certains établissements ont un patrimoine de valeur, qu’ils peuvent décider de vendre afin de réaliser des investissements. Si vous leur dites, Monsieur le ministre, qu’ils devront reverser à la CNAM une partie du produit de cette vente, je ne suis pas sûr qu’ils persévéreront dans leur projet de cession ! Et même si vous précisez qu’il faut que ce reversement serve un projet d’investissement, l’article reste, pardonnez-moi, un peu absurde car d’un côté, l’établissement versera à l’assurance maladie une partie du produit de la vente et, de l’autre il devra négocier avec elle, ou avec le fonds de modernisation, une aide à l’investissement. Bref, je ne vois pas l’intérêt de cet article. C’est pourquoi nous proposons, dans l’amendement 242, de le supprimer.

M. Gérard Bapt – Je pense au CHU de Toulouse, qui envisage de céder une partie de son patrimoine immobilier. Comment expliquer à ses administrateurs qu’une partie du produit de la vente pourrait revenir à la CNAM ?

Je pensais d’autre part que cet article ne concernait que les hôpitaux publics, et non les établissements privés. Or, le rapport nous dit qu’une clinique pourrait avoir intérêt à reverser une partie du produit de ces cessions immobilières pour bénéficier d’une aide à l’investissement, notamment dans une perspective pluriannuelle. Il me semble que les aides du FMESPP obéissent à une autre logique fondée sur l’évaluation des besoins. On mélange tout !

Mme Jacqueline Fraysse – Avec cet article 19, le Gouvernement compte sur une accélération des cessions d'actifs des établissements hospitaliers pour abonder d’une centaine de millions le Fonds de modernisation des établissements de santé. La Fédération hospitalière de France, qui représente tous les hôpitaux publics, nous a alertés : on ne peut pas accepter un dispositif qui affaiblirait inéluctablement l'investissement hospitalier, sans permettre pour autant de faire faire des économies à la sécurité sociale.

Comme le précise la FHF, les hôpitaux réalisent déjà de nombreuses cessions d'actifs immobiliers. Elles sont destinées à alimenter leurs capacités d'autofinancement en vue de projets d'investissements. Toute réduction des revenus issus de ces cessions diminuerait leur capacité d'autofinancement et compromettrait ces projets.

Ce dispositif peut en effet être qualifié d’absurde, puisqu'il conduirait ces mêmes établissements à demander ensuite un soutien au FMESPP, qu'ils auraient contribué à abonder ! Vous êtes en train de créer une usine à gaz ! C’est pourquoi nous demandons nous aussi, par notre amendement 45, la suppression de cet article.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur La commission a repoussé ces amendements. Tout le monde est favorable à l’investissement hospitalier, et je comprends que chacun veuille, par ces amendements, laisser son empreinte sur le programme en cours. Et il n’est pas anormal en effet que les établissements hospitaliers puissent contribuer au financement du plan « Hôpital 2007 ». Cependant, je fais observer que le versement des établissements à la CNAM ne concerne qu’une partie seulement du produit des cessions.

M. Claude Évin – Heureusement !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur De surcroît, ce versement ne sera donc pas automatique, mais négocié par le directeur de l’ARH dans le cadre d’un programme d’investissement pluriannuel. La valorisation de ces cessions immobilières s’inspire de la démarche adoptée par le ministère des finances pour valoriser le patrimoine de l’État. Pour mettre tout le monde d’accord, j’ai proposé un amendement dont l’adoption devrait être acquise sans difficulté.

M. le Ministre – Même avis. M. le rapporteur a tout dit ! La valorisation des actifs immobiliers doit être encouragée dans le monde hospitalier.

L’effort consenti par l’État, Monsieur Préel, est bien supérieur au produit de la TVA sur ces opérations : les aides en capital dépassent un milliard d’euros, et les aides en fonctionnement dix milliards ! En outre, Monsieur Évin, les nombreuses discussions que nous avons eues avec les fédérations hospitalières et les responsables de conférence nous ont amenés à transformer une obligation en faculté, en capacité : ainsi, la discussion avec les ARH est garantie, et les établissements sans patrimoine ne seront pas défavorisés.

Il ne s’agit pas de vendre des bijoux de famille pour financer du fonctionnement ! Seules les dépenses d’investissement sont concernées. Enfin, les recettes escomptées n’ont rien d’illusoire, puisqu’elles sont inférieures au produit des cessions de l’an dernier.

M. Bernard Debré – Cette capacité de reverser implique celle de ne pas le faire : pourquoi voter une loi quand les établissements finissent de toute façon par prendre une décision autonome ? En outre, la destination de ce reversement n’est jamais précisée. Je suis donc impatient de prendre connaissance de l’amendement du rapporteur.

D’autre part, de nombreux hôpitaux reçoivent des dons de familles assortis de clauses, qui pourraient entrer en contradiction avec les cessions qu’ils décident.

M. Claude Évin – En général, toute décision d’investissement fait l’objet de discussions avec l’ARH. Le Gouvernement aborde cette question avec ceinture et bretelles : laissez donc la démarche de contractualisation dont vous vous réclamez se développer dans les projets d’investissement. Pourquoi introduire dans la loi cette garantie inutile, alors que l’ARH aura toujours la possibilité de négocier le financement de tel ou tel investissement ?

M. le Ministre – Le principe de spécialité ne permettait pas jusqu’à présent d’inclure les cessions d’actifs dans la discussion avec l’ARH.

M. Claude Évin – Je pourrais vous citer bien des cas contraires !

M. le Ministre – Peut-être, mais c’est souvent impossible !

M. Claude Évin – De toute façon, le principe de spécialité ne s’applique pas ici.

M. le Ministre – Si, il s’applique, de même que le principe d’autonomie. L’absence de volonté des acteurs hospitaliers d’entrer dans la discussion ne fait que retarder les investissements : c’est ce qu’il faut éviter.

Les amendements 45, 86 et 242, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – Les interventions des divers orateurs montrent combien l’amendement 101 est nécessaire ! Le produit des cessions immobilières ne saurait financer les dépenses courantes de la CNAMTS. Nous proposons de préciser que ces recettes exceptionnelles contribueront à financer les investissements hospitaliers.

M. le Ministre – Avis favorable.

L'amendement 101, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Comme l’État, les hôpitaux doivent être incités à mieux valoriser leur patrimoine grâce à un dispositif d’intéressement qui préserve leur autonomie. Il n’est pas question que la vente d’un patrimoine aille à un pot commun sans aucune garantie de retour via d’éventuelles subventions : une telle mécanique redonnerait l’avantage à l’administration, alors que les établissements sont parfaitement capables d’utiliser eux-mêmes leur patrimoine pour développer leurs investissements. L’amendement 25 rectifié, de bon sens, vise donc à ce que les produits de cessions non utilisés ne soient pas versés à la CNAMTS, mais au Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés afin de contribuer quand même au plan « Hôpital 2007 » et, peut-être aussi, au plan 2012.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – Préférant l’amendement précédent, la commission a rendu un avis défavorable.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis – Mais il est insuffisant !

M. le Ministre – L’amendement 25 rectifié a plusieurs inconvénients. Tout d’abord, il entraînerait une dégradation du solde de la CNAMTS ; or, nous devons respecter nos objectifs de déficit. Ensuite, les investissements ne doivent pas seulement profiter aux hôpitaux publics, mais aussi aux cliniques privées. Enfin, les investissements hospitaliers ne sont pas financés par le seul Fonds de modernisation, mais aussi par la prise en charge des frais d’amortissement au sein de la dotation.

M. Gérard Bapt – L’amendement 101 était un coup d’épée dans l’eau, puisque les fonds consacrés aux investissements hospitaliers iront dans une enveloppe commune, faute de quoi, nous dites-vous, le solde de la CNAMTS se dégraderait. Quant à l’amendement de M. Bur, il me semble poser problème dans la mesure où le Fonds de modernisation concourt à l’aide à la mobilité dans le cadre de restructurations hospitalières, mais non aux investissements proprement dits.

M. le Ministre – Si, il a les deux missions.

M. Gérard Bapt – Dans ce cas, je m’associe à l’amendement du rapporteur pour avis.

L'amendement 25 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 19 modifié, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 19

M. Pierre-Christophe Baguet – J’associe à l’amendement 176 mon collègue M. Fourgous, qui ne pourra défendre son amendement 3. Les routes de l’enfer sont parfois pavées de bonnes intentions. Au motif de protéger l’emploi des seniors, le Gouvernement nous propose un article 55 dont personne ne mesure encore les effets pervers. En effet, cet article vise à supprimer la possibilité, ouverte par l’article 16 de la loi Fillon, de mettre à la retraite des salariés de moins de 65 ans en vertu d’un accord collectif étendu, conclu avant le 1er janvier 2008 et comportant des contreparties en matière d’emploi et de formation professionnelle : devrait ainsi disparaître l’indemnité de mise à la retraite – l’IMR –, qui n’est soumise ni aux charges sociales ni à l’impôt : les entreprises ne pourraient plus recourir qu’à l’indemnité de départ à la retraite – l’IDR –, elle, assujettie à l’impôt comme aux charges.

L’amendement 176 vise à aligner le régime social et fiscal de l’IDR sur celui de l’IMR, c’est-à-dire à l’exonérer des charges sociales et fiscales dans les mêmes limites. La mesure présente un triple avantage : elle évite de faire subir aux salariés concernés une baisse importante de leur IDR ; elle évite l’augmentation du coût du travail et des charges des entreprises qui résulterait de l’obligation de provisionner les cotisations afférentes aux IDR ; elle satisfait les demandes légitimes – et unanimes – des organisations syndicales et patronales, telles que les avait rappelées M. Gremetz lors de l’examen du projet de loi sur la participation.

Je vais citer des exemples précis. M. Michel de Virville, secrétaire général de Renault, dont la compétence dans le domaine social est unanimement reconnue, m’a autorisé à faire part à la représentation nationale des conséquences de la mesure proposée par le Gouvernement pour sa seule entreprise. Alors que les provisions actuelles s’élèvent à 300 millions, l’actualisation de la provision – et sa reconstitution – exigeraient de 400 à 500 millions. Il m’a en outre rappelé que Renault représente un vingtième de l’UIMM : cela signifie que la mesure risque de coûter 10 milliards à l’économie française et qu’elle aura les mêmes conséquences pour les retraités eux-mêmes.

Pourquoi le Gouvernement s’entête-t-il, dans la seule perspective de recettes potentielles pour la sécurité sociale ? Est-ce parce que tout ce qui peut rapporter à court terme séduit, en particulier les services de Bercy, qui semblent escompter un surcroît de recettes compris entre 300 et 500 millions ? Mais quand bien même ce serait un milliard, Monsieur le ministre ! Si je reconnais volontiers qu’il est nécessaire d’abonder les recettes de la sécurité sociale, que pèse ce milliard potentiel face aux coûts que j’ai évoqués pour le pays comme pour nos concitoyens retraités ? N’y a-t-il pas d’autres pistes à creuser ?

En outre, il est faux de prétendre qu’une telle mesure aura un caractère protecteur pour l’emploi des seniors. Sous la pression de leurs salariés, les entreprises risquent de se rabattre sur l’indemnité de licenciement – l’IDL –, plus avantageuse que l’IDR, fiscalisée et soumise à charges. En empêchant les départs volontaires par des coûts excessifs, on ne contribue pas au règlement du problème de l’emploi en général. Enfin, n’est-il pas légitime qu’un employeur puisse remercier dignement ses anciens salariés, et ceux-ci ne méritent-ils pas un traitement équitable, par rapport à ceux de leurs collègues qui ont bénéficié d’une IMR ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur – La commission avait repoussé cet amendement, et l’adoption d’un amendement analogue après l’article 13 le satisfait. Défavorable.

M. le Ministre délégué – Monsieur Baguet, l’intention de votre amendement est généreuse. L’objectif premier du Gouvernement est de ne pas dégrader le montant des recettes de l’État et de la sécurité sociale. Si l’on exonère de charges sociales et fiscales les IDR, toutes les indemnités de départ à la retraite à l’initiative du salarié seront, à terme, exonérées. Et l’amendement adopté tout à l’heure, contre l’avis du Gouvernement, comportait un gage que nous nous sommes bien gardés de lever. S’il était définitivement adopté, cet amendement viendrait augmenter les droits sur les boissons alcoolisées. Implicitement, ses auteurs reconnaissent donc qu’il a un coût pour la sécurité sociale. Cela ne correspond pas à une moins-value de recettes.

Au-delà de cette discussion sur les finances de la sécurité sociale, il y a un débat sur les départs à la retraite anticipés. Qu’une entreprise de l’industrie automobile – vous en avez cité une – ayant de mauvaises habitudes pour ce qui concerne la gestion de sa pyramide des âges s’inquiète des effets des décisions prises par les partenaires sociaux et le Gouvernement pour encourager la poursuite d’activité, c’est une chose. Mais, dans le même secteur, d’autres entreprises, parce qu’elles ont des pratiques plus vertueuses, ne réclament en aucun cas une telle évolution. Je ne vous prête pas l’intention de vouloir légiférer pour un cas particulier…

M. Pierre-Christophe Baguet – Absolument pas !

M. le Ministre délégué – Mais nous devons avoir en tête l’ensemble des situations et poursuivre avec cohérence notre politique, laquelle consiste à favoriser la prolongation d’activité, conformément à l’intérêt général. Et nous devons aussi faire en sorte que, dans les décisions que nous prenons, il n’y ait pas d’effet d’aubaine lié au changement de régime des indemnités de retraite.

En tout état de cause, cette discussion a déjà eu lieu puisque votre Assemblée a adopté un amendement analogue contre l’avis du Gouvernement et des deux commissions saisies. Dès lors, le vôtre, Monsieur Baguet, n’a, à cette heure, pas de raison d’être. C’est pourquoi j’appelle votre Assemblée à le rejeter.

M. Pierre-Christophe Baguet – Entendons-nous bien. Je ne conteste pas qu’il y ait aujourd’hui des recettes pour la sécurité sociale et pour l’État, puisque des IDR sont versées. Mais de là à s’engager, sans aucune estimation préalable, dans la voie d’une suppression pure et simple de l’IMR, il y a une marge.

Pour ce qui concerne l’emploi : vous avez l’IMR qui ne coûte rien à l’entreprise et au salarié, l’IDL qui coûte aux deux et l’IDR qui coûte encore plus, au salarié comme à l’entreprise. À partir du moment où vous supprimez le dispositif le plus favorable, tout le monde va se replier sur l’indemnité de licenciement ! Cela ne réglera pas la question de l’emploi et les employeurs seront confrontés à une pression accrue de leurs salariés, lesquels demanderont à bénéficier de l’IDL.

Monsieur le ministre, tout à l’heure, vous avez demandé une deuxième délibération sur l’amendement de M. Gilles : maintenez-vous cette demande ou acceptez-vous que cet amendement soit validé dans les termes où nous l’avons adopté ? Dans ce dernier cas, je retirerai mon amendement dans l’attente de la discussion au Sénat. Mais je voudrais vous l’entendre dire.

M. le Ministre délégué – Monsieur le député, nous sommes d’accord sur un point : il n’y a pas eu d’évaluation qui permette de mesurer l’effet, pour la sécurité sociale, de l’exonération nouvelle que vous proposez et celui – à mon avis beaucoup plus faible – de la disposition dont nous débattons. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a chargé l’IGAS et l’IGF de procéder à une étude d’impact. À l’heure qu’il est, votre Assemblée – pas plus que le Gouvernement – n’est pas en mesure d’apprécier l’incidence des décisions que vous l’invitez à prendre pour ce qui concerne les charges sociales sur les IDR. Nous nous honorerions à ne pas prendre des décisions à l’aveugle sur un sujet aussi important…

M. Yves Bur, rapporteur pour avisTout à fait !

M. le Ministre délégué – …car il y va de l’équilibre de nos finances sociales. Tout à l’heure, le Gouvernement a demandé une deuxième délibération ; en ce moment même, je réfléchis sur l’opportunité de la maintenir ou non, et je vous apporterai une réponse dans la journée.

M. Pierre-Christophe Baguet – Je tiens à préciser que je ne parle pas seulement pour Renault – même si cette entreprise de ma circonscription m’est chère –, puisque la mesure concerne 124 accords de branche signés à ce jour, couvrant 7 à 10 millions de salariés. C’est donc bien l’intérêt général qui est en jeu, d’autant qu’il risque d’en coûter 10 milliards à la collectivité comme aux retraités. N’ayant pas de réponse sur la deuxième délibération, je maintiens mon amendement. Nous verrons bien au Sénat si l’IGAS et l’IGF sont en mesure de nous apporter des éléments complémentaires.

L'amendement 176, mis aux voix, n'est pas adopté.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu, cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 12 heures 55.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
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