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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

3ème séance du mercredi 8 novembre 2006

Séance de 21 heures 30
20ème jour de séance, 41ème séance

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann
Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

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LOI DE FINANCES POUR 2007 – seconde partie – (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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défense (suite)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense  Nous sommes réunis pour examiner les crédits de la mission Défense pour 2007, et je tiens à vous dire ma fierté du travail accompli depuis cinq ans (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). Cette fierté doit être aussi celle de ceux qui m’ont soutenue, publiquement et, pour certains, un peu moins publiquement. Depuis 2002, nous avons bien fait avancer les choses, et je tiens à remercier particulièrement la commission de la défense, son président, ainsi que les rapporteurs.

Je vais essayer de vous présenter les éléments qui nous permettent à juste titre d’être fiers. Mais il est aussi de notre devoir de regarder l’avenir et de mesurer les enjeux de la défense pour les prochaines années.

Le bilan, tout d’abord. Ce budget respecte pleinement la loi de programmation militaire que vous avez votée en début de législature. Comme MM. Cornut-Gentille, Fromion et Voisin l’ont rappelé, cette loi est respectée pour la cinquième année consécutive, et cela pour la première fois depuis vingt-cinq ans. Ce qui montre bien qu’avec de la volonté, on peut tenir ses engagements et avancer. C’est la différence entre la précédente législature et celle-ci.

Dans ce cadre, 75 milliards d’euros auront été ouverts pour les équipements, comme prévu, et comme en atteste le rapport parlementaire sur l’exécution de la loi de programmation. Les reports de crédits, Monsieur Teissier, reviennent de 2 milliards à 1,2 milliard d’euros à la fin de cette année, et ils seront totalement résorbés fin 2007. Je rappelle qu’entre 1997 et 2002, il avait manqué plus de 13 milliards d’euros, soit une annuité complète d’exécution de la loi de programmation ; aussi, quand on me parle de retards dans certains programmes, j’ai tendance à me tourner vers le côté gauche de l’hémicycle (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

Ma fierté vient aussi, et peut-être surtout, de l’action de nos armées depuis cinq ans. L’armée et la gendarmerie sont engagées dans 26 opérations extérieures, qui mobilisent 14 500 membres des forces armées, soit, compte tenu des rotations, environ 50 000 soldats. Avant la professionnalisation, lors de la première guerre d’Irak, nous n’avions même pas été en mesure d’assurer la relève des forces envoyées sur place.

50 000 soldats à l’extérieur, c’est très lourd, mais cela reste supportable ; et si les clignotants sont à l’orange, comme cela a été dit, c’est qu’ils ne sont pas au rouge ! Nous sommes en tension, mais pas en surtension. Ceci prouve que le travail réalisé depuis cinq ans nous permet de tenir nos engagements internationaux et d’assurer les besoins de notre protection.

Monsieur Le Bris, le rôle de nos forces n’est ni flou, ni superfétatoire. En Afghanistan, en Côte d’Ivoire, dans les Balkans, au Liban, nos forces armées jouent un rôle essentiel, et leurs missions sont claires. En Afghanistan, il s’agit de permettre à un pays, berceau et peut-être toujours base de repli du terrorisme, de redevenir un État sous la conduite de véritables institutions nationales. Ceci implique la lutte contre le terrorisme ainsi que des actions de stabilisation, auxquelles participent tant nos forces spéciales que nos forces engagées dans la FIAS.

En Côte d’Ivoire, si la situation politique n’évolue pas, la situation militaire est stabilisée. Nos forces y contribuent en soutenant les Casques bleus. Les pays qui fournissent des contingents à l’ONU n’acceptent d’ailleurs de le faire qu’à la condition que les forces françaises soient présentes.

Monsieur Carré, la situation au Liban est calme, mais extrêmement fragile. Je m’inquiète des risques de provocation de part et d’autre : des tentatives de certains pour contourner l’embargo sur les armes, mais également du survol du territoire libanais par des avions de la chasse israélienne. Je dois dire à la représentation nationale que des incidents se sont produits qui auraient pu être extrêmement graves. À plusieurs reprises, des avions israéliens ont adopté des attitudes hostiles à l’égard de bâtiments maritimes français et allemands et, tout récemment, à l’égard d’une installation terrestre de la FINUL. Une catastrophe a été évitée de justesse par nos militaires. Des F15 se sont présentés en piqué, puis en redressement immédiat, c’est-à-dire une posture d’attaque, qui correspond normalement à la délivrance de bombes ou à un tir de canon. En légitime défense, nos militaires ont retiré les caches de la batterie de missile, et à deux secondes près, ils tiraient contre les avions qui les menaçaient. Ceci n’est pas tolérable. J’appelle donc votre attention, après l’avoir fait à l’ONU, sur le nécessaire respect des forces de la FINUL et sur le risque que des pilotes irresponsables prennent en agissant ainsi.

M. Jacques Brunhes – Des pilotes ou leur gouvernement ?

Mme la Ministre – Les militaires français sont également engagés sur le territoire national, dans le cadre du plan Vigipirate, de la lutte contre les feux de forêt ou contre le chikungunya. Il convient de rendre hommage à ces hommes et ces femmes, pour leur action, leur dévouement, leur disponibilité.

Je voudrais, nous voudrions, rendre également hommage à leurs familles et à leurs proches, qui acceptent de longs éloignements (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Nous devons aussi rendre hommage à ceux qui sont morts ou qui ont été blessés : 13 militaires sont morts en service, 96 ont été blessés dans des opérations menées par les armées depuis douze mois. Il y a eu sept morts et 1 500 blessés chez les gendarmes. Ne les oublions pas.

Notre engagement en OPEX est un élément clé de notre diplomatie et de notre influence dans le monde. Comme M. Teissier et comme M. Voisin, je considère donc leur financement comme une priorité. Jusqu’en 2002, on ponctionnait leur budget sur celui des programmes. J’ai obtenu, grâce à votre soutien, qu’une provision soit constituée. En 2007, elle s’élèvera à 375 millions d’euros, soit le double de l’an dernier. Une nouveauté : cette provision concernera également la gendarmerie, pour 15 millions. Je tiens à ce propos à souligner que de plus en plus de gendarmes partent en OPEX. C’est une bonne façon de symboliser le caractère militaire de la gendarmerie.

M. Philippe Folliot – Très bien.

Mme la Ministre – En 2006, le coût des opérations aura été de 630 millions d’euros. Un certain nombre d’entre elles n’étaient pas prévues, notamment celle du Liban, dont le coût aura été, Monsieur Giscard d’Estaing, de 46 millions, et non pas, contrairement à ce qu’affirmait un certain hebdomadaire, de 460 millions. En année pleine, le coût de cette opération avoisinera sans doute 100 millions, avec un remboursement de l’ONU de 10 à 20 millions.

Vous m’avez interrogée, Monsieur Voisin, sur le financement des opérations intérieures. Nous n’avons pas cherché à créer pour elles le même système que pour les OPEX, car les surcoûts qu’elles génèrent restent limités et n’ont pas dépassé les 15 millions d’euros. Nous les avons donc autofinancées, mais il serait effectivement naturel d’inscrire ces surcoûts sur une ligne spécifique. C’est ce que nous prévoyons.

J’en viens à un troisième motif de satisfaction et de fierté : les armées ont reçu les moyens des missions que nous leur confions. Cela peut sembler évident, mais ce n’était pourtant pas le cas auparavant. En 2007, les moyens de la mission Défense augmenteront de 2,5 %, ce qui représente un effort important par rapport au budget de l’État.

Cela se traduira par des mesures importantes dans le domaine de l’équipement. Avec 16 milliards de crédits de paiement et 15,6 milliards d’autorisations d’engagement, auxquels s’ajoutent 3,6 milliards de reports de 2006, les commandes prévues seront passées. Nous pourrons ainsi commencer en 2007 la réalisation du second porte-avions. C’est un choix que je souhaite irréversible, car il correspond à la nécessité de la permanence à la mer, nécessité stratégique compte tenu de la multiplication des crises.

De ce point de vue, Monsieur Rivière, vous commettez une erreur en confondant ce qui relève de la coopération avec des économies d’échelle dans la mise en commun d’un certain nombre de capacités. Trois porte-avions au lieu de quatre, cela voudrait dire un porte-avions et demi en permanence à la mer. Vous dites que nous pourrions demander à la Grande-Bretagne de mettre à notre disposition l’un des siens. Non, ce n’est pas possible. D’abord, pour des raisons techniques, car les porte-avions britanniques ne sont pas équipés comme les nôtres, de sorte que nous ne pourrions pas y apponter et y catapulter nos avions. De plus, leurs porte-avions ne transportent pas, contrairement aux nôtres, d’armement nucléaire. Pour des raisons politiques ensuite : la Grande-Bretagne pourrait ne pas vouloir nous « prêter » un de ses porte-avions si elle était elle-même engagée dans des opérations. Et pourrions-nous accepter d’être dépendants d’un autre pays, fût-il un partenaire et un ami, pour une composante essentielle de notre capacité d’intervention ? Nous avons donc besoin de ce second porte-avions.

En dehors de cela, nous commanderons 50 missiles de croisière navals ; les 117 premiers VBCI ; 12 hélicoptères NH 90 dans leur version terrestre, ce qui permettra de remplacer les vieux Puma. J’aurais bien sûr préféré qu’une loi de programmation précédente nous ait déjà donné ces moyens… Nous allons également commander 5 000 systèmes FELIN. Je vous confirme par ailleurs que le contrat pour les sous-marins Barracuda sera signé avant la fin de cette année.

Mais je ne me contente pas de regarder aujourd’hui ou demain. J’essaie de me projeter plus loin et de préparer l’avenir. C’est pourquoi j’ai décidé que les commandes d’études amont seraient de 700 millions en 2007. Si j’ajoute les sommes consacrées au développement des programmes, cela fait 3,5 milliards que la Défense dépensera pour la recherche et le développement.

Vous m’avez interrogée sur les drones, Monsieur Rivière. Le SIDM a déjà effectué trois vols depuis septembre, sa mise en service est prévue pour la fin du premier semestre 2007. C’est un bon produit, qui durera et qui intéressera sûrement d’autres pays. Pour ce qui est du MALE, nous avons besoin, après l’accord avec l’Espagne, de trouver encore un nouveau partenaire. Ce sera sans doute l’Allemagne, mais il reste encore beaucoup à faire au niveau industriel.

Le maintien en condition opérationnelle reste une de mes priorités. La disponibilité des matériels que j’ai trouvée en 2002, Monsieur Boucheron, était extrêmement inquiétante. Et MM. Cornut-Gentille, Vitel et Giscard d’Estaing ont parfaitement raison de dire que la situation ne peut pas se rétablir en l’espace d’une année, mais demande une action de longue haleine. C’est pourquoi j’ai décidé d’augmenter les crédits de 10 %. Cet effort financier accompagne l’effort de modernisation, étant entendu que le maintien en condition opérationnelle réclamera de toute façon des moyens croissants, soit parce que nous aurons affaire à du matériel vieillissant, soit à cause de l’obsolescence de plus en plus rapide du matériel moderne et sophistiqué. Après ce qui a été fait pour le MCO aéronautique et le MCO naval, j’ai lancé un audit pour le MCO terrestre.

J’en viens aux effectifs, car les matériels ne sont rien sans les hommes et les femmes qui les servent. Mon objectif est que ces effectifs soient adaptés aux missions.

L’engagement qui avait été pris concernant le service de santé a été entièrement tenu. Des emplois ont également été créés à la DGSE, conformément à ce qui avait été prévu dans la loi de programmation militaire. On pourrait sans doute faire encore plus, Monsieur Fromion, mais les obligations de la loi de programmation militaire ont été remplies, ce qui n’est pas chose si fréquente.

M. Yves Fromion – Je ne l’ai pas contesté.

Mme la Ministre – Les effectifs de l’armée de terre, Monsieur Folliot, correspondent exactement à ses missions. S’il y a eu dans le passé des polémiques à ce sujet, je ne crois plus que ce soit le cas. Nous avons en effet regardé les choses de près avec l’État-major.

S’agissant de la réserve, dont le rôle est essentiel pour une armée professionnelle, les crédits inscrits nous permettront de faire un effort conséquent. Les 19 millions supplémentaires qui lui sont consacrés permettront de procéder à 62 000 engagements, soit deux fois plus qu’en 2002, au profit, notamment, du SSA et de la gendarmerie. Je suis heureuse de saluer, en la personne du rapporteur Beaulieu, l’un de nos réservistes de choix et je remercie M. Giscard d’Estaing d’avoir exprimé son attachement à la réserve.

Madame Païx, je suis tout à fait d’accord avec vos analyses : il faut donner à nos personnels des signes de reconnaissance et leur marquer que nous prenons en considération leurs contraintes particulières. À cet effet, le plan d’amélioration de la condition militaire est doté de 70 millions, cependant qu’un plan d’amélioration de la condition des personnels civils de la défense de 15 millions est également lancé. S’agissant plus précisément du logement, je mesure les astreintes auxquelles sont confrontés les personnels, et la difficulté de trouver un logement en région parisienne ou dans les zones les plus touristiques. Nous sommes parfaitement conscients qu’il y a là une préoccupation majeure pour les hommes et les femmes de la défense.

Au reste, Monsieur le rapporteur Vittel, j’ai obtenu qu’une part des 600 millions mis en réserve dans le fonds de prévoyance militaire soit affectée au parc immobilier destiné aux personnels, de sorte que des milliers de logements puissent être mis à leur disposition. J’en attends des résultats concrets dans les meilleurs délais, en particulier dans les régions où il est le plus difficile de se loger.

Autre élément essentiel du moral des troupes, les conditions d’exercice et d’emploi des personnels. J’ai fait de l’entraînement des hommes une priorité absolue, car il y va de la sécurité de nos interventions, et je tiens à préciser les chiffres puisque certaines données ont été diffusées. D’après les rapports d’activité des armées, les objectifs d’activité, pour les années 2005-2006, ont été atteints à 95 %. Si le taux d’activité n’est pas de 100 %, c’est que l’envol des prix du carburant a contraint à certaines économies et parce que nombre de nos forces sont engagées en OPEX. Je ne peux pas demander aux personnels présents sur les théâtres d’opérations extérieures de prendre sur leur temps de récupération pour parfaire leur entraînement. Compte tenu de ces éléments, je considère pour ma part que le degré d’activité de nos personnels est satisfaisant.

MM. Giscard d’Estaing, Hart et Bernard m’ont interrogée sur les prévisions de réalisation pour 2007 : elles sont de 100 % pour l’entraînement des pilotes de chasse, de 97 % pour le nombre de jours à la mer des bâtiments de marine, de 96 % pour les jours d’activité de l’armée de terre, de 88 % pour les pilotes d’hélicoptères de l’armée de terre et de 80 % pour les pilotes d’avions de transport. Cela est dû au fait que nous utilisons des matériels très anciens, qu’il convient de ménager dans l’attente de la livraison des nouveaux programmes, en 2007 et 2008.

En complément des interventions de MM. Cornut-Gentille, Voisin et Carré, je reviens sur les problèmes liés à la flambée des cours du pétrole : le prix du baril a presque triplé en cinq ans, ce qui nous a naturellement conduits à faire des économies. Le volume consommé a ainsi diminué de 15 % depuis 2002, sans que cela affecte l’activité des forces. Pour l’essentiel, nous avons obtenu ce résultat en retirant du service actif les vieux appareils et en nous efforçant à une gestion plus fine de la ressource. D’autre part, j’ai décidé d’augmenter de manière significative les dotations : en 2007, l’on disposera d’un tiers de ressource en plus par rapport à 2004. Depuis un an,nous mettons en œuvre un mécanisme de couverture contre le risque pétrole, en liaison avec l’Agence France Trésor. Enfin, lorsque les cours baissent, je demande à ce que l’on reconstitue les réserves sans attendre.

Au titre des motifs de satisfaction, je suis particulièrement fière que mon ministère soit, depuis quatre ans, à la pointe de la réforme de l’État. Nos objectifs sont connus : clarifier les responsabilités de chacun, mutualiser et « interarmiser » les moyens, diversifier les modes de gestion. Dans ce cadre, plusieurs actions importantes ont été menées : la réforme de la DGA, la création du service unique d’infrastructures, la réforme de l’État-major des armées, le nouveau statut général des militaires – que vous avez adopté l’année dernière, etc. M. Beaulieu m’a interrogée sur les systèmes de communication : la direction générale des systèmes de communication a été créée l’été dernier.

M. Bernard m’a questionnée sur l’externalisation des missions et le recours aux contrats de partenariat public–privé. J’en ai usé pour permettre aux armées de se recentrer sur les cœurs de métier. Lorsqu’un jeune choisit de devenir mécanicien à la Défense, c’est certes parce qu’il s’intéresse à l’entretien des véhicules, mais c’est aussi parce qu’il veut participer, à sa place, à l’œuvre commune de défense nationale. Dès lors, même si les règles applicables en matière de TVA ne nous aident pas forcément, nous avons accompli les efforts nécessaires pour qu’un certain nombre d’activités puissent être effectuées à l’extérieur, de façon à ce que les hommes et les femmes de la défense puissent se concentrer sur leurs missions. C’est ainsi que sont aujourd’hui externalisés le marché des véhicules de la gamme commerciale ou la gestion des logements de la gendarmerie. Après les hélicoptères de l’armée de terre à l’école de Dax, le réseau internet des bases aériennes et l’EIS, des projets de partenariat public-privé sont en cours pour ce qui concerne la formation des pilotes d’hélicoptères NH-90, les bâtiments de soutien ou l’affrètement des navires pour le transport stratégique. Et cette politique porte ses fruits, puisqu’en cinq ans, la modernisation du ministère a permis d’économiser 568 millions et de gagner en productivité.

Monsieur Brunhes, je ne suis pas d’accord avec vous lorsque vous prétendez que ces démarches ont affaibli la capacité de nos armées à remplir leurs missions et entamé le savoir-faire des personnels de la défense. Au total, notre pays dispose aujourd’hui d’une armée composée de militaires mieux payés, mieux entraînés, dotés de matériels plus modernes, plus disponibles, plus économes et plus efficaces. Et notre outil de défense s’en trouve évidemment renforcé.

Tel est le bilan de notre action. Il s’agissait d’abord de rattraper le retard pris entre 1997 et 2002, puis d’avancer dans la voie de l’adaptation de notre système aux nouveaux besoins. Pour aujourd’hui comme pour demain, une politique ambitieuse est indispensable. Les risques stratégiques majeurs – qu’ils soient liés à la prolifération nucléaire, au terrorisme, aux armes de destruction massive ou aux crises régionales, en constante augmentation – n’ont pas disparu. Si je suis d’accord, Monsieur Brunhes, qu’il faut essayer de régler les différends par les voies de la diplomatie et de la coopération, cela ne nous empêche pas d’avoir d’abord besoin de militaires pour nous protéger.

Au-delà de cet impératif de protection, nos besoins sont aussi liés à nos engagements internationaux, que ceux-ci procèdent d’accords bilatéraux ou de notre statut de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. La crise libanaise a d’ailleurs confirmé que la défense est l’outil principal de notre diplomatie. Elle constitue par conséquent un élément clé de notre rayonnement et de la diffusion de nos valeurs. C’est elle qui nous permet d’influer sur l’environnement international, en faveur de la paix et de la stabilité du monde. Cela doit nous conduire à conserver la capacité d’intervenir où et quand il le faut.

M. Quilès m’a interrogée sur le partenariat global dans le cadre de l’OTAN, dont il a été question il y a quelques semaines. Il s’agit en effet de l’un des objectifs que les Américains souhaiteraient faire valider. J’étais à Washington il y a quinze jours : j’ai indiqué à mes interlocuteurs que nous ne faisions pas de théologie et que nous voulions travailler selon une approche pragmatique. Nous sommes confrontés à des crises multiples, qui ont tendance à s’étendre. Nous ne pouvons donc pas négliger les contributions très opérationnelles de certains pays comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande ou le Japon. Mais la réponse ne peut être globale : elle doit être adaptée à chaque crise et nous devons examiner toute offre de contribution selon une approche ouverte. Nous ne voulons pas d’une structure figée, mais nous intervenons tantôt seuls, tantôt dans le cadre de l’OTAN, tantôt dans le cadre de l’UE : c’est à nous de choisir chaque fois, en fonction du contexte et du mandat.

La voix de la France est un espoir pour beaucoup de peuples. Nous avons donc l’obligation de conserver nos capacités à intervenir, conformément à notre histoire, à nos traditions et à notre vocation. Mais cela n’est possible que si nous avons une armée forte, qui crédibilise notre parole et la fait respecter. Si nous sommes davantage entendus que ne le sont d’autres, c’est aussi parce que, grâce à nos militaires, on sait que nous pouvons, s’il le faut, parler les armes à la main. Cette force doit être préservée.

Notre force de dissuasion a été largement évoquée. Cette ultime garantie contre les menaces extérieurs doit être conservée, et elle ne peut l’être que si elle est modernisée, l’obsolescence étant source d’inefficacité et, ipso facto, de perte de dissuasion. C’est faire preuve de beaucoup d’angélisme, Monsieur Brunhes, que d’en appeler au désarmement, comme s’il suffisait que la France renonce à sa force de dissuasion pour que les menaces disparaissent…

M. Jacques Brunhes – Je n’ai jamais dit cela !

Mme la Ministre – Nous ne sommes pas dans un contexte d’emploi, mais bien de protection ultime et je confirme, Monsieur Quilès, que notre doctrine d’engagement est inchangée.

M. Jacques Brunhes – Ce n’est pas vrai !

Mme la Ministre – D’ailleurs, à supposer qu’elle doive évoluer pour tenir compte de l‘évolution géopolitique, il me paraîtrait curieux que vous nous le reprochiez alors que vous nous faites grief de ne pas revoir notre doctrine d’utilisation des armements classiques. Mais, aujourd’hui, elle n’a pas changé.

M. Jacques Brunhes – Et l’Île Longue ?

Mme la Ministre – Certes, la question du terrorisme ne se règle pas par la dissuasion, mais tout État qui voudrait se livrer à des attaques terroristes contre notre pays doit savoir que nous pourrions y répondre. La défense anti-missile n’est en rien comparable à la dissuasion – et sa fiabilité n’est d’ailleurs en rien garantie en pareille situation, chacun le sait.

Je suis convaincue que la maîtrise de l’espace sera l’un des éléments de la puissance au XXIe siècle, comme le nucléaire l’aura été au siècle précédent. La prochaine loi de programmation militaire devra en tenir compte, et nous devrons nous employer à faire aller nos alliés de l’avant en ce domaine. Avec les lancements successifs d’Hélios et de Syracuse 3a et 3b, nous avons déjà franchi des étapes importantes, Monsieur Carayon, et renforcé ainsi notre autonomie d’appréciation et d’analyse. Nous devrons, c’est vrai, continuer d’augmenter nos capacités dans le domaine spatial.

Vous n’ignorez pas, Monsieur Michel, que la consommation des crédits suit les cycles de production ; voilà qui explique les fluctuations, classiques, des lignes de notre budget.

Il a été longuement question de l’Europe et je vous remercie, Monsieur Deflesselles, d’avoir rappelé avec talent l’impérieuse nécessité d’une défense européenne forte. Nous avons beaucoup avancé en ce domaine, la création de l’Agence européenne de défense en témoigne. Et M. Sainte-Marie, qui avance que nous pourrions réduire nos budgets de défense en développant des programmes européens, feint d’ignorer que frégates, missiles, avions de transport, Tigre, NH 90 et Helios sont fabriqués en coopération. Dois-je rappeler que la France est le seul pays qui participe à pratiquement tous les programmes confiés à l'Organisation conjointe de coopération en matière d’armement ? C’est la France qui entraîne les autres pays, et elle peut le faire parce que la loi de programmation militaire est intégralement respectée. Je puis en témoigner, l’ambiance a radicalement changé à partir du moment où la loi a été promulguée et lorsque nos alliés ont constaté qu’année après année, ses dispositions étaient respectées. J’ai alors pu entraîner mes collègues, car ils savaient que si la France s’engageait dans un nouveau projet, ses engagements seraient tenus.

Je le répète, l’Europe de la défense a beaucoup progressé. En réalité, c’est même le seul domaine dans lequel l’Union européenne a progressé depuis quelques années. C’est aussi un domaine perceptible pour les Européens, dont 80 % veulent l’Europe de la défense et souhaitent que davantage de crédits lui soient consacrés. Il n’est pas d’Europe politique possible sans Europe de la défense, et il n’est pas d’Europe de la défense possible sans un effort militaire prolongé de la France.

Cet effort devra donc se poursuivre au-delà de 2007, d’autant que la défense est un formidable levier pour notre économie. La défense est le premier recruteur public français et le second employeur public, ainsi qu’un investisseur de premier plan, qui donne du travail, directement ou indirectement, à plus de dix mille entreprises et à quelque deux millions de salariés.

Je vous ai trouvé bien critique, Monsieur Boucheron, à l’égard d’un programme industriel dont je suis fière – et certainement plus fière que ne pouvaient l’être mes prédécesseurs. S’agissant de GIAT, M. Alain Richard m’a transmis le dossier en déclarant : « Nous n’y avons pas touché, c’est explosif » ! Certes, les choses ont été difficiles pour les personnels, pour lesquels j’ai une pensée, mais aujourd’hui l’entreprise, bénéficiaire, est en mesure de passer des alliances européennes. Le temps est loin où l’on me conseillait de laisser tomber ce dossier…

M. Jean-Claude Sandrier – Il ne reste pas grand-chose !

Mme la Ministre – DCN a changé de statut et s’est rapproché de Thales. Que ce rapprochement ait pu suscité des difficultés, voire quelques crispations, c’est possible, mais c’est toujours le cas en semblables circonstances. Quoi qu’il en soit, nous disposons à présent d’un remarquable pôle naval qui servira à créer un pôle naval européen dont DCN-Thales sera le cœur et le moteur. C’est le seul moyen de lutter contre la concurrence des entreprises d’Asie du Sud-Est. C’est ce qu’il fallait faire pour le personnel, et je le revendique. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP)

Je considère par ailleurs que des efforts prolongés doivent être consentis en faveur de la recherche industrielle. Notre défense en a besoin, notre économie aussi, car la recherche militaire a des retombées civiles. La recherche, c’est la croissance de demain. Si nous voulons envisager l’avenir avec confiance, comme nous le devons car notre pays ne manque pas d’atouts, c’est la recherche qui nous donnera la marge technologique supplémentaire face aux pays émergents. Voilà qui devrait susciter le consensus, puisque c’est de l’avenir de la France et de l’emploi de demain qu’il s’agit.

Les PME, sur lesquelles M. Carayon m’a interrogée, ont été l’une de mes préoccupations constantes. J’ai veillé à ce qu’elles soient représentées dans toutes les instances pertinentes ; j’ai veillé lorsque des reports de crédits ont eu lieu, à ce que leurs créances soient honorées les premières, au début de l’exercice suivant ; j’ai veillé à ce que des crédits de recherche leur soient réservés.

Monsieur Fromion, j’ai lu votre rapport avec un grand intérêt. Il contient des propositions dont certaines, relatives notamment au contrôle des exportations, font déjà l’objet de décisions du ministère. D’autres seront également suivies d’effet.

M. Folliot m’a interrogée sur le rôle de la défense pour la cohésion sociale, et la journée d’appel de préparation à la défense a été plusieurs fois évoquée. J’ai cherché à la rendre plus attrayante en créant de nouveaux modules, telle l’initiation au secourisme. Le fait que les jeunes gens interrogés à l’issue de cette journée se disent, pour 85 % d’entre eux, satisfaits, montre que les efforts ont donné des résultats.

C’est dans le même souci de cohésion sociale que s’inscrit le plan « Défense deuxième chance », qui a de très bons résultats.

Le travail accompli au cours de cette législature prouve que la maîtrise des finances publiques et l’effort de défense sont des objectifs compatibles. C’est là un résultat sans précédent à mettre à l’actif de la majorité. L’intérêt supérieur de la nation, la sécurité des Français, la construction européenne exigent que nous poursuivions cette action dans la durée, nécessaire à l’efficacité, et en manifestant notre confiance aux forces armées. Je suis fière d’elles, et les Français le sont : jamais l’image de l’armée n’a été aussi bonne.

Au-delà de toute préoccupation électoraliste, nous devons poursuivre, ensemble, animés par le souci de l’intérêt général que les militaires défendent eux aussi en étant prêts à prendre tous les risques. Nous pouvons nous retrouver pour assumer notre responsabilité, qui est d’assurer la sécurité de nos concitoyens et le respect de nos engagements internationaux pour la paix et la stabilité dans le monde. Le faire tous ensemble nous permet d’être fiers de nos armées comme nous sommes fiers de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

questions

M. Jacques Desallangre – La France est engagée, à la demande de l’ONU ou de nos alliés, dans des opérations extérieures, par exemple en Côte d’Ivoire où elle a 4 000 soldats. Ces opérations ont coûté 600 millions en 2004, 532 millions en 2005, et 630 millions, avez-vous dit, en 2006.

Certes, en agissant ainsi, la France défend son rang et une vision du monde qui s’oppose au manichéisme de certains. Mais en Côte d’ivoire, elle a engagé des moyens, sa parole et son image, pour être finalement injustement accusée. Ni le pouvoir ni les opposants ne semblent accepter la présence des troupes françaises. Or, en droit international, cette présence n’est légitime que si elle recueille l’accord des belligérants ou du moins de l’État concerné. La présidence ivoirienne conteste la présence de nos forces, que des groupes manipulés par M. Gbagbo – qui ne doit son maintien qu’à la présence étrangère – menacent chaque jour.

Il n’est concevable d’intervenir et de risquer la vie de nos soldats que si cela évite un génocide, préserve les intérêts de notre nation ou améliore vraiment la vie d’un peuple, et surtout si notre présence est le prélude à une solution politique.

Quel est à ce jour le bilan des coûts et des avantages de la présence française en Côte d’Ivoire ?

Mme la Ministre – Nous sommes en Côte d’Ivoire dans le cadre d’une résolution de l’ONU qui prévoit une élection présidentielle démocratique. Celle-ci a été reportée d’un an. Si certains contestent notre présence, la grande majorité de la population ivoirienne soutient nos forces et le manifeste quotidiennement, car elle sait bien que sans la présence française, les massacres reprendraient. Nos soldats savent qu’ils sont là pour les éviter et permettre l’organisation d’élections grâce auxquelles les Ivoiriens retrouveront la stabilité des institutions et le chemin d’un développement fortement compromis actuellement.

M. Jean-Claude Sandrier – Suite à la restructuration de MBDA, décidée en 2005, l'établissement de Bourges subit l'essentiel des 270 suppressions d'emplois programmées dans la région Centre. Ce pourrait être bien plus si les 100 000 heures de charge en activités nouvelles prévues dans le projet de restructuration n'étaient pas effectives dans les années qui viennent. Dans le même temps, la situation financière de MBDA est florissante et l’augmentation des dividendes versés aux actionnaires représente le double du résultat d'exploitation.

Les postes supprimés à Bourges sont même plus nombreux que prévu dans le plan, en raison de départs en retraite non remplacés. Cela entraîne une perte de compétences qui, comme à chaque réorganisation, aboutit à installer en région parisienne les activités hautement qualifiées.

Pourtant, l'établissement MBDA de Bourges se consacre depuis toujours à une double activité, les missiles et l’aéronautique, ce qui peut lui permettre d’obtenir plus que les 100 000 heures de charges nouvelles décidées lors des discussions du projet de restructuration. Ainsi les compétences développées à Bourges peuvent permettre à Airbus de réaliser au mieux, et dans les délais, les nouveaux programmes A 380 ou A 350. D'autre part, il est nécessaire de mettre en oeuvre sans attendre le projet visant à déconstruire les munitions obsolètes.

Bourges et le Cher souffrent de choix politiques et industriels guidés par des visions financières à court terme. Quelles mesures comptez-vous prendre pour exiger de MBDA, où l'État participe au capital à travers EADS, un véritable projet industriel et économique, et une diversification de l'activité fondée sur l'aéronautique, au lieu d'encourager la course au rendement financier ?

Mme la Ministre – J’ai été souvent saisie par vous-même comme par M. Fromion et M. Vannson des problèmes de MBDA, ce que je comprends car les restructurations ont des conséquences sur le personnel. Il faut effectivement démonter des munitions obsolètes. Il y a là une possibilité que nous examinons dans un esprit très positif. Nous avons toujours essayé de donner à MBDA des charges de travail pour conserver le maximum de salariés.

M. Yves Fromion – Exactement.

Mme la Ministre – Mais l’entreprise a sa logique, contre laquelle nous ne pouvons pas aller. Nous essayons de faire le maximum, comme les parlementaires le demandent, en avançant certaines commandes par exemple. Mais nous ne pouvons pas nous substituer aux dirigeants de cette entreprise.

M. Dominique Caillaud – Avec ce budget 2007, vous maintenez fermement le cap en respectant pour la cinquième année la loi de programmation militaire. Je tiens à vous exprimer toute ma satisfaction et ma confiance.

Ma question concerne la reconversion. Après la loi du 24 mars 2005, le statut offre à ceux qui quittent l'état militaire les moyens d'un retour à une activité professionnelle dans la vie civile. Chaque année 29 000 militaires en fin de carrière ou de contrat quittent leurs rangs, 16 500 ayant droit à des prestations de reconversion. Je regrette d’ailleurs que la LOLF ait supprimé cet indicateur utile du nombre d’ayants droit à cette prestation.

Sur les 12 000 personnes qui n'entrent pas dans le champ de la reconversion, 11 290 étaient des militaires n'ayant pas quatre ans de service, dont un pourcentage important de gendarmes auxiliaires volontaires. On sait peu de choses sur cette catégorie.

Chaque armée organise ses propres actions de reconversion. Pour un objectif de 60 % fixé par le ministère, on atteint 56 % de reclassements, toutes armes confondues en 2005 – soit 48 % pour les officiers, 65 % pour les sous-officiers, 49 % pour les hommes du rang.

La LOLF a permis à la fois d'améliorer sensiblement l'utilisation des crédits de reconversion et de contenir les indemnités de chômage, sauf dans l'armée de l'Air. Le bilan est globalement très positif. Il m’inspire cependant trois questions.

Vous orientez-vous vers un maillage national d'établissements de reconversion inter-armées comme dans le cas du CMPF de Fontenay-le-Comte qui fait un remarquable travail pour l'armée de terre mais peine à recruter dans les autres armes ?

Maintenez-vous le principe d'établissements de reconversion à encadrement militaire avec des partenaires extérieurs de type AFPA, ou envisagez-vous l'externalisation des reconversions ?

Prévoyez-vous de généraliser des actions de soutien et de formation dans les quatre premières années à l'image de ce que met en œuvre l'armée de l'air, ces actions pouvant également stabiliser le parcours des jeunes recrues ?

Mme la Ministre – Améliorer l’indemnisation et l’efficacité de la reconversion est une priorité pour 2007. Nous avons déjà bien réussi, mais c’est pour nous une obligation, et c’est de plus un atout pour le recrutement. Nous avons commencé cette année à mettre en place le maillage inter-armées. Il ne s’agit pas de fusionner les structures mais de rationaliser les actions par la mutualisation des offres d’emploi notamment.

Il en ira de même pour les centres de formation en fonction de leurs besoins : ainsi, le centre militaire de formation professionnelle de l’armée de terre de Fontenay-le-Comte est déjà ouvert aux stagiaires des autres armées. Par ailleurs, 80 formations militaires de l’armée de terre sont menées en partenariat local avec l’association pour la formation professionnelle des adultes : cela permet aux établissements d’encadrement militaire d’offrir une formation aux militaires en reconversion. Enfin, l’action en faveur des militaires ayant moins de quatre ans de service est le second grand axe de notre effort : nous développons les services d’orientation, la coordination avec les missions locales d’insertion et la validation des acquis professionnels.

M. Patrice Martin-Lalande – La base aérienne 273, dans le Loir-et-Cher, abrite des unités de stockage et d’expédition de matériel, un centre d’impression de documentation technique, ainsi qu’un centre de vol à voile de renommée mondiale, et il emploie 401 militaires et 220 civils. La numérisation de nombreuses informations transforme profondément les conditions de travail de cet établissement dont l’avenir a fait l’objet d’une visite d’inspection du général Palomeros. C’est une question sensible au cœur d’un bassin d’emploi sinistré par l’effondrement des industries d’armement et la fermeture de Matra Automobile, et où furent signés les premiers contrats de site entre le Gouvernement et les collectivités. Quels projets le Gouvernement envisage-t-il de retenir pour préserver les emplois de cet établissement ?

D’autre part, comment contribuerez-vous au développement de l’établissement du matériel de Salbris, l’un des rares ayant survécu à la vague de suppressions d’activités qui frappe le bassin depuis quinze ans ?

Enfin, je tiens à saluer publiquement l’excellente décision de dépollution pyrotechnique de l’ex-site Giat de Salbris que vous avez prise en 2004 : c’est une contribution décisive à la création de 700 emplois à partir de 2008.

Mme la Ministre – Je sais combien vous êtes attentifs aux problèmes qu’a connus la région de Salbris, et je me réjouis que le ministère de la défense ait pu relayer vos efforts sur le terrain.

La base aérienne 273 de Romorantin-Lanthenay concentre en effet la moitié de notre stock aéronautique. Ces fonctions d’entreposage sont qualifiées ISO 9001 depuis 2002 : d’importants investissements s’imposaient donc. Depuis 2004, nous avons stabilisé les effectifs à 650 employés environ. Un projet de synergie entre les entrepôts de Salbris et de Romorantin est à l’étude, et je vous informerai des propositions qui me seront rendues dès le début de l’année prochaine. J’espère que nous pourrons ainsi trouver ensemble le moyen d’offrir aux populations de cette région les débouchés qu’elles attendent.

Enfin, je n’ai pas aujourd’hui les éléments pour vous répondre sur l’ETAMAT de Salbris, mais je vous écrirai dès la semaine prochaine pour vous donner les garanties que vous souhaitez.

M. Bernard Carayon – Le Gouvernement a entrepris un effort considérable pour les études amont. Néanmoins, je m’interroge encore sur les variations parfois très importantes d’une année sur l’autre – la part de certaines sociétés quintuple, ailleurs elle diminue. Les programmes d’études amont dépendent en partie de la réalisation de démonstrateurs, dont le coût est beaucoup plus élevé que les technologies de base. Le nombre de contrats ne dépassant pas quelques unités par an, les variations annuelles sont particulièrement fortes. Seriez-vous favorables à leur atténuation, afin que les groupes détenteurs de ces technologies-clé bénéficient des crédits d’études amont dans des proportions comparables aux autres ?

Mme la Ministre – Le phénomène que vous décrivez est normal. Naturellement, nous tentons de surveiller le volume de contrats par entreprise, car notre rôle est aussi d’innerver le réseau, notamment de PME. Les projets d’études amont sont décidés en fonction du plan prospectif à trente ans, qui donne une visibilité à long terme, mais aussi des enjeux de développement des entreprises. Les programmes futurs, eux, sont déterminés par les armées et la DGA. L’établissement d’un socle commun pose donc problème, et nuirait d’ailleurs plus aux PME qu’aux grands groupes, dont les budgets sont plus malléables. Sans cette adaptation permanente, on nous reprocherait un manque de réactivité : nous faisons donc le choix du dynamisme.

M. Jean-Claude Viollet - Le dispositif « défense deuxième chance » que vous avez initié en 2005 progresse de manière rapide et prometteuse. En douze mois, l’EPIDe a pratiquement accompli le parcours qui demanda vingt-cinq ans au service militaire adapté, et devrait accueillir 20 000 jeunes d’ici la fin 2008. Une évaluation encourageante a d’ores et déjà été menée après la sortie de la première promotion du centre de Montry.

Deux questions demeurent toutefois. Le manque de patrimoine immobilier, d’abord : des outils ont certes été mis en place, comme la société foncière Immobilier Insertion Défense, mais la lenteur et la complexité des transferts d’actifs en limite la capacité à lever des capitaux, contraignant l’EPIDe à se tourner vers des opérateurs privés et à transformer son budget de fonctionnement en investissement locatif. Que ferez-vous face à cette situation qui suscite la réticence du ministère des finances ?

D’autre part, le coût d’un volontaire est estimé à 28 000 euros hors amortissement, soit un budget de 560 millions en année pleine à partir de 2009. Pour 2007, sur les 160 millions nécessaires, 50 millions seulement seraient prévus sur le budget de l’emploi, le reste étant à la charge du Fonds social européen – dont le versement est toujours différé – et des dispositifs d’accompagnement dans l’emploi et d’aide au logement. Ce dispositif fragile n’appelle-t-il pas une coordination interministérielle plus large ?

Mme la Ministre – Je vous remercie de reconnaître la valeur du dispositif « défense deuxième chance », qui recueille un consensus dont je me réjouis. Certains souhaiteraient qu’il se développe plus vite, mais les résultats sont déjà importants : le premier centre s’est ouvert trois mois seulement après l’adoption du texte ! D’ailleurs, sa montée en puissance se poursuit à un rythme toujours plus rapide, et les résultats positifs de la première promotion sont très encourageants.

Cela étant, plusieurs difficultés subsistent, notamment d’ordre immobilier. Pour accueillir les jeunes concernés, il faut des locaux pouvant héberger jusqu’à 150 personnes et comprenant des lieux de pratique sportive. Or, nous manquons encore d’un patrimoine immobilier adapté. Des propositions nous sont faites, mais ces centres sont souvent isolés ou loin des bassins d’emploi, alors que nous souhaitons au contraire que le suivi d’insertion soit efficace. Les maires qui sont prêts à offrir des locaux n’acceptent pas forcément d’entrer dans le système élaboré par l’EPIDe. Dès lors, les retards s’accumulent, et nous essayons de les régler au cas par cas : c’est la seule manière de procéder. J’en appelle à chacun ici présent : nous recherchons des locaux aptes à accueillir ces jeunes.

Pour ce qui est du budget, je ne sais d’où vous tenez vos chiffres. Ce ne sont pas 50 millions d’euros qui sont prévus, mais 110 en provenance du ministère de la cohésion sociale, le complément venant de l’Union européenne. Je tiens à cet égard à remercier tout particulièrement M. Borloo, puisque c’est son ministère qui finance pour l’essentiel cette opération. Je remercie également le ministère de l’éducation nationale qui y participe et, une fois n’est pas coutume, Bercy, qui a donné son accord.

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions.

Sécurité

État B

Mme la Ministre – L’amendement 112 rectifié corrige une erreur matérielle.

L'amendement 112 rectifié, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.
Les crédits de la mission Défense, mis aux voix, sont adoptés.
La suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu demain, jeudi 9 novembre, à 9 heures 30.
La séance est levée à 23 heures.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
www.assemblee-nationale.fr

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