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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

2ème séance du mardi 14 novembre 2006

Séance de 15 heures
23ème jour de séance, 48ème séance

Présidence de M. Jean-Louis Debré

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La séance est ouverte à quinze heures.

M. le Président – J’ai le plaisir d’informer l’Assemblée que j’ai nommé ce matin une quatrième femme huissier de séance. C’est l’occasion pour nous de remercier l’ensemble du corps, qui accomplit un travail remarquable.

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

M. le Président – M. le Premier ministre m’a fait savoir qu’il ne pourrait assister aux séances de questions au Gouvernement cette semaine. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

service public postal

M. Jacques Desallangre - En mai, le président de La Poste a annoncé des bénéfices en hausse de 50 % pour 2005. La mission que lui avait fixée le gouvernement Raffarin – améliorer la rentabilité de l'entreprise La Poste – est donc remplie mais, pour cela, il y a un prix à payer : la dégradation significative du service public. Ainsi La Poste a-t-elle créé de nombreuses filiales qui sont autant de sociétés de droit privé, ainsi a-t-elle rationalisé son organisation en « dégraissant » ses effectifs et en augmentant la charge de travail, ainsi a-t-elle supprimé des bureaux de poste, notamment en secteur rural, ainsi augmentera-t-elle le prix du timbre chaque année. Mais la menace ultime qui pèse sur le service public de La Poste, c'est la libéralisation totale du marché prévue pour 2009 avec la suppression du dernier secteur réservé, ce secteur censé financer les sujétions de service public supportées par la Poste. Qui payera désormais la charge du service public, et comment ? Attend-on de nouveaux gains de productivité de l'entreprise ? Ce serait l'assurance d'une dégradation supplémentaire du service public. Imagine-t-on des subventions publiques ? La libérale Commission européenne n'en veut pas. Cela se fera-t-il par des taxes ? Ce serait le consommateur qui en supporterait le poids.

La charge pèsera-t-elle alors sur les nouveaux entrants et, dans ce cas, s’agira-t-il d’une contribution assise sur leur chiffre d'affaires, ou le service public sera-t-il partagé entre les opérateurs privés et La Poste ? Vous avez choisi la dernière solution, qui consiste pour le Gouvernement à se débarrasser du service public en le faisant assurer pour partie par les nouveaux entrants. Votre stratégie est bien de décharger La Poste des sujétions de service public qui lui coûtent, comme le dit son président, M. Baillly : « Nous défendons un dispositif dans lequel les nouveaux entrants prennent en charge une partie des missions de service public. » À quand, donc, la réalisation de ce projet libéral qu’est la mise aux enchères des missions de service public ? Monsieur le ministre, face à Bruxelles, défendrez-vous la solution qui permettra à La Poste de préserver sa mission et de disposer moyens de l’accomplir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et plusieurs bancs du groupe socialiste)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie La Poste, l’une des entreprises préférées des Français et l’un des symboles de notre service public, s’est lancée dans une modernisation résolue que je salue, et je tiens à réconforter les postiers qui se sont mobilisés aujourd’hui. En effet, la Commission européenne vient d’adopter un projet de nouvelle directive postale dont le Parlement européen et le Conseil européen vont maintenant se saisir. Ce texte va dans le sens souhaité par la France, qui a réaffirmé sa volonté de maintenir un service public postal de qualité (Protestations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste). En effet, le champ et les obligations de service public demeurent inchangés, la péréquation tarifaire est maintenue, les droits des consommateurs sont renforcés et l’aménagement du territoire n’est pas touché. La France est et restera attachée au maintien d’un service postal de qualité sur l’ensemble de son territoire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

Plusieurs députés communistes et républicains – Quelle réponse ! C’est n’importe quoi !

Tarifs bancaires

M. Jean-Marc Roubaud – Nos concitoyens jugent la tarification bancaire opaque et chère ; les frais de découvert, très importants, deviennent insupportables lorsqu’ils se cumulent. Je sais que cette question vous préoccupe, Monsieur le ministre de l’économie, et que, sous votre égide, une concertation a été lancée à ce sujet avec les représentants des associations de consommateurs et ceux des établissements bancaires. Vous avez aussi réuni le comité consultatif des services financiers. Monsieur le ministre, avez-vous été entendu par les banquiers ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Se sont-ils engagés à la modération ? (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains ; applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Les Français sont effectivement préoccupés et le Gouvernement, sans empiéter sur aucune prérogative, s’est intéressé de près aux relations entre les banques et leurs clients, allant jusqu’à créer une instance de dialogue sous l’égide du ministère. Nos efforts ont permis la mise au point d’un service bancaire universel et d’un droit au compte, et l’amélioration de la transparence tarifaire, les tarifs devant désormais être affichés dans les établissements. Mais il fallait faire davantage et c’est pourquoi, le 7 novembre, j’ai réuni les représentants des associations et des établissements pour faire le point sur les tarifs bancaires. On pourrait par exemple envisager que chaque titulaire de compte reçoive un relevé trimestriel ou annuel des frais bancaires qu’il a acquittés. Nous en débattons et je ne doute pas qu’une solution sera trouvée d’ici quinze jours, car une plus grande transparence est indispensable. Si, ce que je ne pense pas, aucun accord n’était trouvé, la question serait tranchée lors de l’examen du projet de loi sur la consommation. J’y suis prêt, mais je préférerais que la question soit réglée sans que nous ayons à légiférer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

croissance française

M. Éric Besson - Depuis fin août, le Gouvernement se livre, avec tambours et trompettes, à une opération de communication de grande envergure pour faire croire aux Français que « tous les clignotants sont au vert ». Les députés socialistes n’ont cessé de vous alerter sur votre erreur de diagnostic. Dette, pouvoir d’achat, commerce extérieur, tous les fondamentaux sont mauvais. Pourtant, M. Breton affirmait il y a quelques jours que tout portait à croire que notre économie continuerait à progresser au troisième et au quatrième trimestres.

Or l’INSEE annonce un croissance zéro pour le troisième trimestre et Eurostat le confirme. En 2006, la croissance française sera de nouveau bien inférieure à ce qu’elle était de 1997 à 2002, elle sera inférieure à la croissance mondiale et à celle de la zone euro.

Un député UMP - À cause des 35 heures !

M. Éric Besson - Pour la première fois depuis 1994, nous ferons moins bien que l’Allemagne.

L’heure n’est plus à la propagande, mais à la lucidité. Allez-vous reconnaître que vous vous trompez de diagnostic et de remèdes ? Allez-vous réorienter une politique injuste et inefficace ? Allez-vous modifier le projet de budget pour tenir compte de la gravité de la situation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie D’abord, je vous invite à un peu de réserve avant de commenter un chiffre encore précoce (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Certes, j’aurais préféré qu’il soit conforme à ce que l’ensemble….

M. Henri Emmanuelli – Pas nous !

M. le Ministre - …des instituts de conjoncture avaient prévu, c’est-à-dire une croissance de 0,5 % à 0,6 % pour le troisième trimestre. Prudence donc, car des réévaluation sont possibles, semaine après semaine.

Je retiens cependant que l’INSEE a fixé à 0 ,5 % et non plus 0,4 % la croissance du premier trimestre, ce qui donne en rythme annualisé une croissance de 3,4 % au premier semestre. Cela démontre…

Plusieurs députés socialistes – Que tout va bien !

M. le Ministre - ….que la France peut faire la course en tête.

Je retiens également qu’il ne faut pas relâcher l’effort, car l’héritage pèse (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), notamment les 35 heures que les Français ont payées trois fois, par ponction sur leur pouvoir d’achat, limitation des salaires et augmentation de la dette.

Nous avons fait beaucoup. Certes, il y a une pause au troisième trimestre. Mais les indicateurs qui sont à la disposition de tous les conjoncturistes montrent que le quatrième trimestre sera bon. De ce fait, beaucoup m’ont demandé d’augmenter la prévision de croissance. Je l’ai maintenue de 2 % à 2,5 % et je vous confirme que ce sera bien le cas. Un peu de pudeur, Monsieur Besson, car dans le budget que vous nous aviez laissé, vous prévoyiez une croissance de 2,5 % et vous avez fait 1 % ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Crise viticole

M. Yvan Lachaud – La situation des viticulteurs, notamment en Languedoc-Roussillon, devient dramatique. Les stocks de l’an dernier n’ont pas été écoulés et le vin se vend le plus souvent à perte. Il y a deux ans, on vendait encore 200 000 hectolitres par semaine à la cotation : la semaine dernière, on en a vendu 14 000... Monsieur le ministre de l’agriculture, vous avez pris des mesures l’an dernier, mais aujourd’hui, il faut un véritable plan social et des aides importantes pour les départs en retraite, ce qui permettrait de diminuer la production d’environ 20 %. Nous voyons dans nos permanences des hommes et des femmes qui n’ont plus de revenus. Les organisations agricoles et le collectif de base vous demandent de les recevoir en fin de semaine pour aborder la question du gel des cotisations salariales patronales ou des cotisations personnelles. Que comptez-vous faire pour répondre au désarroi des agriculteurs ?

M. le Président – La parole est à M. Cuq. (Protestations sur les bancs du groupe UDF et sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Christophe Lagarde - Où sont les ministres ?

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement  Pour aider les agriculteurs et viticulteurs du Gard, le ministre de l’agriculture a pris des mesures utiles en début d’année. Une enveloppe de 1 200 000 euros, dont 400 000 euros pour les seuls viticulteurs, a permis de prendre partiellement en charge les cotisations sociales. En juillet, un complément de 60 000 euros a été accordé et M. Bussereau a décidé qu’une nouvelle enveloppe de 130 000 euros serait attribuée prochainement au département. Le paiement a été reporté sur trois ans pour les cotisations personnelles des exploitants pour 2006 et deux ans pour les cotisations de leurs salariés, dans la limite de 60 % du montant dû. Les services du ministère préparent avec la caisse centrale de la MSA un nouvel aménagement de ces mesures de reports. Elles complètent celles prises depuis 2005 sur le plan fiscal et social et les aides à la trésorerie. Le Gouvernement a également pris des mesures pour faciliter la distillation et ainsi soutenir les cours. Enfin, des discussions sont en cours avec les organisations professionnelles, sous l’égide du préfet de région, sur un plan important de restructuration de la viticulture languedocienne comportant des départs en préretraite liés à des mesures d’adaptation foncière. M. Bussereau est très attentif à cette question. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Vie associative

Mme Claude Greff - Le ministère de la jeunesse et des sports est aussi celui de la vie associative, ce qui marque pour la première fois sur le plan institutionnel, la reconnaissance de ce secteur, dont le bénévolat est le moteur. Aujourd’hui, la France compte plus d’un million d’associations en activité et ce nombre ne cesse de s’accroître. Nous nous rendons compte chaque jour davantage qu’elles sont le terreau de la citoyenneté.

Vous avez voulu valoriser l’engagement de nos 13 millions de bénévoles en annonçant, lors de la première Conférence nationale de la vie associative, réunie par le Premier ministre le 23 janvier 2006, les vingt-cinq mesures destinées à favoriser le développement de la vie associative. Parmi ces mesures simples et concrètes, je citerai la protection juridique apportée aux bénévoles en matière d’assurance ou le titre-repas.

Afin que chacun puisse s’investir pour les autres et connaisse le plaisir de l’action citoyenne, il faut encourager le bénévolat. Pouvez-vous donc nous dire, Monsieur le ministre, quel est l’état d’avancement des mesures annoncées en début d’année ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative - Cette première Conférence de la vie associative a été une grande avancée. Sur les vingt-cinq mesures annoncées par le Premier ministre le 23 janvier dernier, vingt sont déjà opérationnelles.

Parmi elles, je citerai tout d’abord l’obligation qu’ont les ministères de consulter les associations avant toute rédaction de texte législatif ou réglementaire. Nous avons également décidé de signer des conventions pluriannuelles d’objectifs avec les grands réseaux et les grandes fédérations, avec des obligations de part et d’autre : pour l’État, celle de verser 50 % de la subvention annuelle avant le 31 mars de l’année en cours ; pour les associations, celle de créer des indicateurs de performance, étant entendu qu’il importe de savoir si l’argent public est efficacement utilisé. Pour renforcer la sécurité juridique des bénévoles des petites associations, l’État versera en 2007 un million pour la prise en charge de l’assurance responsabilité civile. Enfin, nous avons créé le chèque-repas pour bénévoles, en nous rappelant qu’un certain nombre de responsables associatifs avaient été traînés devant les tribunaux par les services fiscaux, qui avaient requalifié cette aide minime en avantage en nature ou en salaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

emploi des personnes handicapées

Mme Geneviève Colot - À plus de 90 %, ils donnent satisfaction à leurs employeurs. D'après ces derniers, ils sont plus motivés et plus accrocheurs que les autres. Pourtant, ils ont un taux de chômage deux fois plus important que la moyenne. « Ils », ce sont les personnes handicapées.

Nous avons voté le 11 février 2005 une loi sur le handicap, qui visait notamment à ce que les entreprises de plus de vingt salariés emploient 6 % de handicapés. Grâce à la volonté du Gouvernement, les choses bougent. La menace de sanctions financières fait réfléchir les employeurs privés. Mais le service public rechigne encore à faire aux handicapés la place qui devrait leur revenir.

Alors que s'ouvre la semaine pour l'emploi des personnes handicapées, le Gouvernement peut-il nous faire un premier bilan de cette loi ? Le Président de la République a fait de l’action envers les handicapés une priorité nationale. Pourtant, 23 % des entreprises de plus de vingt salariés n’emploient toujours aucun handicapé. Comment faire respecter la loi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleEn deux ans, l’emploi des personnes handicapées a augmenté de près de 5 %. Ce n’est pas suffisant et il y a encore beaucoup à faire, mais nous sommes en mouvement (Rires sur les bancs du groupe socialiste), après avoir trouvé une situation très critique, qui avait amené le Président de la République a décidé de faire de la citoyenneté des personnes handicapées une priorité de son mandat.

Vous avez parlé du seuil de 6 %, qui avait été fixé par une loi antérieure. Nous sommes aujourd’hui à près de 4 %. Il faut donc aller plus loin. C’est ce que nous faisons grâce aux mesures de la loi de 2005, en agissant sur l’école, les incitations pour les employeurs, le fonds d’insertion pour la fonction publique (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), l’application du plan de cohésion sociale, la possibilité de cumuler l’AAH avec un revenu du travail.

Avec M. Larcher, nous voulons aller plus loin dans la mobilisation et nous annoncerons donc dès demain des mesures visant à rendre plus efficace l’accompagnement du handicap par les maisons du handicap et par le service public de l’emploi (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), l’objectif étant que chaque personne handicapée se voie proposer un parcours d’insertion professionnelle et un engagement dans les six mois suivant sa demande à la maison départementale du handicap. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

situation de la presse écrite

M. Michel Françaix - France soir et L'Humanité sur le fil du rasoir, Politis et Libération en crise : la presse écrite d'opinion, axe majeur de la vie démocratique, est en péril. Mort des quotidiens indépendants, journaux sans journalistes, gratuits laissés aux mains des grandes marques, marchands d'armes et de béton ou financiers à la tête des journaux, voilà le triste bilan dont vous semblez vous satisfaire

Acceptez-vous les journaux sans journalistes que semble proposer Édouard de Rothschild à Libération ? Pensez-vous que deux ou trois journaux, adossés à des groupes puissants, qui fondent leur stratégie sur la seule chasse au marché publicitaire, suffisent ? Pouvez-vous vous contenter d'une presse gratuite sans vraie équipe rédactionnelle ?

Monsieur le ministre, épargnez-nous l'inventaire de vos mesurettes, qui ont toutes échoué puisque les aides à la presse ne remplissent plus leur objectif : faire vivre le pluralisme. Ce système dépassé et inadapté n'assure plus l'essentiel. Allez-vous enfin le refondre et mettre en place des aides qui permettent de soutenir les titres indépendants ?

Je ne peux pas croire que vous subissiez l'activisme de certains pour empêcher qu'il y ait un journal clairement engagé à gauche dans la compagne électorale (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Allez-vous donc tout mettre en œuvre pour éviter la disparition de Libération ?

Au vu de cette carence consternante, avez-vous encore la volonté d’arrêter ce scénario catastrophe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication - La question du pluralisme de la presse n’est pas, pour le Gouvernement et la majorité, un sujet de polémique, mais un sujet de conviction (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Depuis 2004, les aides directes à la presse ont augmenté de plus de 30 %, un effort sans précédent. Dans le cas de Libération, l’État ne méconnaît pas son rôle de gardien du pluralisme et met tout en œuvre pour l’assumer. Mon équipe et moi-même sommes en permanence mobilisés, tant avec la rédaction qu’avec les repreneurs.

Pour être efficace, l’État doit accompagner un projet,…

Un député socialiste – De plan social !

M. le Ministre - …mais il ne doit pas se substituer à la rédaction, car le projet doit rester celui d’une équipe de journalistes. Hors aides à la distribution, les aides directes versées à Libération ont augmenté de 26 % de 2004 à 2005.

En outre, dans le projet de loi de finances pour 2007, deux dispositions fiscales essentielles renforcent les fonds propres des entreprises de presse, et donc le pluralisme. Je souhaiterais que ces mesures soient bien comprises à l’extérieur, car elles représentent une chance pour l’avenir de Libération, comme pour celui d’autres quotidiens. Tout d’abord, la provision pour investissement des entreprises de presse, qui arrivait à expiration cette année, est reconduite jusqu’en 2010. Ensuite, un nouveau mécanisme de déduction de l’impôt sur les sociétés entrant dans le capital des entreprises de presse d’informations politiques et générales, est créé (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) et entre en vigueur immédiatement.

M. le Président – Veuillez conclure, Monsieur le ministre.

M. le Ministre – Enfin, nous sommes en train d’étudier, avec Bercy, les modalités d’extension du champ du mécénat au pluralisme de la presse d’information générale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

emplois-jeunes

Mme Pascale Gruny - Ma question s’adresse au ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Nous avons tous en mémoire la mesure, lancée en 1997, qui devait être emblématique du gouvernement Jospin, et qui a été heureusement abandonnée en 2002 par notre majorité : les emplois-jeunes. Il s’agissait de CDD de cinq ans dans les seuls secteurs associatif et public. Destinés aux jeunes de moins de 26 ans, ils ne comportaient aucune obligation de formation continue.

Un député communiste et républicain – C’est faux !

Mme Pascale Gruny - Comme nous l’avions dit, ces emplois ne s’adressaient pas à la bonne cible, et ils n’ont pas atteint ceux qui en avaient le plus besoin.

Un député socialiste – C’est faux !

Mme Pascale Gruny - Leurs titulaires ont été pour la plupart des étudiants bien formés et diplômés. Or, depuis plus de dix ans, les jeunes qui ont le plus besoin d’aide sont ceux qui n’ont pas, ou ont peu, de qualifications, ceux qui sont issus des quartiers où les difficultés sociales, éducatives et économiques se cumulent. C’est d’ailleurs dans ce sens que vont les initiatives du présent gouvernement. Monsieur le ministre, pouvez-vous dresser un bilan des emplois-jeunes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes - Depuis plus de vingt ans, le taux de chômage des jeunes est plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale. Cette réalité a peu évolué jusqu’à ce que nous mettions un certain nombre de dispositifs en place. Alors que les taux de chômage dans les quartiers en difficulté sont deux, trois, voire quatre fois plus importants que sur le reste du territoire, seuls 8 % des emplois-jeunes étaient faits pour ces jeunes-là, qui représentent pourtant plus de 15 % des inscrits à l’ANPE. En outre, ceux qui, au bout de cinq ans, n’ont pas eu la chance de décrocher un contrat dans une collectivité locale ou une association – 65 % d’entre eux ! – se sont retrouvés sur la case départ, c’est-à-dire au chômage, et 40 % y étaient encore un an après.

Voilà la raison des contrats jeunes dans l’entreprise, de l’ensemble des contrats aidés dans le plan de cohésion sociale, des contrats CIVIS ; 22 % de ces derniers s’adressent à ces jeunes, soit deux fois plus que la réalité dans les autres quartiers : la cible est atteinte ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Cela passe aussi par le développement de l’apprentissage : grâce à la loi sur l’égalité des chances, nous ouvrons 155 000 postes de formation en alternance dans les entreprises. Cela passe, enfin, par le parcours d’accès à la vie active dans les entreprises : 50 000 jeunes seront, dans les six mois à venir, en stage préparatoire à l’accès à la vie active.

Mais le problème de fond, c’est de faire en sorte que 70 000 jeunes ne sortent plus du système éducatif sans aucune formation. L’éducation, l’orientation sont les véritables réponses qui permettront de redonner confiance aux jeunes (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Un chiffre, pour terminer. J’étais hier à Villefranche, dans deux quartiers en difficulté ; le taux de chômage des jeunes y a diminué de 23 % en un an ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

plan rhône

M. Roland Chassain - Ma question s’adresse au ministre délégué à l’aménagement du territoire, et j’y associe mes collègues MM. Mourrut, Roubaud et Giro. J’intervenais le 9 décembre 2003 à la tribune de l’Assemblée, au lendemain des terribles inondations qui avaient touché le Midi, et particulièrement Arles et le pays d’Arles. Le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a mis en place le plan Rhône pour prévenir les drames humains que représentent les inondations. Cette année, 10,5 millions d’euros ont été consacrés aux études sur l’aménagement du Rhône, et, le 6 mars 2006, à l’occasion du comité interministériel d’aménagement du territoire, vous avez annoncé une ligne budgétaire d’1,5 milliards d’euros sur dix ans pour la mise en œuvre du plan.

Monsieur le ministre, je vous remercie pour le travail accompli, et je remercie également le ministre de l’intérieur, M. Nicolas Sarkozy, et la ministre de l’écologie, Mme Nelly Olin. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Un député socialiste – Ça, c’est une question !

M. Roland Chassain - Je joins à ces remerciements le préfet de région et les services de l’État. Depuis 2003, ce gouvernement a engagé des études et fait réaliser des travaux d’urgence (Même mouvement).

Certaines inquiétudes demeurent cependant. Comment le plan Rhône s’articulera-t-il ces dix prochaines années, notamment son volet « Prévention des risques liés aux inondations » ? L’État en assurera-t-il un financement exceptionnel à hauteur de 40 % ? Il est indispensable de mettre en place un statut particulier pour les communes situées dans les champs d’expansion des crues. De même, serait-il possible de créer un consortium regroupant des entreprises du BTP et des banques, pour réduire le calendrier des travaux de dix à deux ou trois ans ?

La doctrine de l'État en matière de plan de prévention des risques d'inondation est en cours de rédaction (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Elle restreint à ce jour considérablement les possibilités des communes riveraines du Rhône en matière d'urbanisme, ce qui pénalise l'économie locale et les emplois. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur le financement du Plan Rhône et sur la mise en place d'un statut particulier pour les communes et les administrés situés dans les champs d'expansion des crues, ainsi que sur la doctrine des plans de prévention des risques d’inondation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire  Le Plan Rhône, qui englobe l’ensemble d’une démarche sur le couloir rhodanien, est programmé sur dix ans – une durée plus longue que celle des contrats de projet État-région, qui couvrent la période 2007-2013. L’État a cependant prévu d’engager 160 millions d’euros sur sept ans. L’appel aux collectivités territoriales pour un montant équivalent permet d’espérer que les 500 millions nécessaires pourront être engagés sur la durée du Plan.

La protection des personnes est un impératif, mais elle ne doit pas conduire au gel total des territoires concernés. Nous avons lancé une vaste concertation et installé un comité de pilotage pour mettre le Plan en œuvre. Dans ce cadre, nous sommes en train de définir une doctrine de protection contre les crues. La doctrine spécifique au territoire rhodanien a été assouplie, dans le respect des principes relatifs à la sécurité des personnes, pour mieux prendre en compte les réalités locales et éviter de pénaliser les territoires concernés. S’agissant du financement, la négociation en cours permet de faire émerger des projets prioritaires et d’échelonner leur réalisation dans le temps. Les moyens nécessaires seront mis en place. Nous réfléchissons en même temps à l’optimisation des délais.

Je sais quels drames ont endurés ces dernières années le Vaucluse, les Bouches-du-Rhône, plus particulièrement la Camargue, et le Gard. Le Gouvernement mettra tout en œuvre pour répondre à vos aspirations dans le cadre du Plan Rhône. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Emploi et ressources des personnes handicapées

Mme Martine Carrillon-Couvreur – Cette semaine a lieu la dixième manifestation pour l’emploi des personnes handicapées, intitulée « Ouvrons nos portes à toutes les compétences ». Tout en saluant cet événement, j’aimerais que nous ouvrions aussi nos esprits à toutes les compétences. Nous devons écouter et entendre ce que disent les personnes en situation de handicap, celles qui travaillent et celles qui ne peuvent accéder à l’emploi. Je me fais leur porte-parole, car elles peinent souvent à faire entendre leur souffrance. Le Gouvernement a annoncé qu’il entendait revaloriser le pouvoir d’achat des plus modestes. Les personnes handicapées vous ont elles-mêmes alerté à plusieurs reprises sur cette question du pouvoir d’achat. Vous me répondrez que vous avez fait adopter la loi du 11 février 2005. Nous en attendions beaucoup, mais notre déception a été grande. Nous avons une obligation de résultat pour donner leur plein effet au principe de non-discrimination et à la lutte contre les inégalités. Nous ne pouvons nous satisfaire à cet égard de la situation de la formation et de l’emploi des personnes handicapées, dont le taux de chômage est deux à trois fois plus élevé que celui de l’ensemble de la population. Cela pose la question des ressources des personnes handicapées, l’AAH ne représentant aujourd’hui que 48 % du SMIC.

Par l’effet combiné des décrets du 29 juin 2005 et du 16 juin 2006, les travailleurs des entreprises et services d’aide par le travail – ESAT – perdent d’autre part 14 euros par mois, soit 1,5 % de leur pouvoir d’achat. Comment le Gouvernement entend-il corriger cette inégalité et garantir, par la solidarité nationale, un revenu d’existence digne à toutes les personnes handicapées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des députés communistes et républicains)

M. Jean-Claude Sandrier - Très bien !

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la familleJe suis heureux de vous entendre vous préoccuper de la situation des personnes handicapées (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). C’est nouveau : cela mérite donc d’être salué. (Mêmes mouvements) En 1975, quand la loi créant les centres d’aide par le travail et les entreprises adaptées a été adoptée, vous avez voté contre ! En 1987, quand la loi pour l’emploi des personnes handicapées, qui fixe un objectif d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés dans les entreprises et les administrations a été votée, vous avez encore voté contre ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste ; huées sur les bancs du groupe UMP) En 2005, quand il s’est agi d’adopter la loi sur l’égalité des chances, la citoyenneté et la participation des personnes handicapées, l’avez-vous fait ? Non : une fois de plus, vous avez voté contre ! (Mêmes mouvements) Aujourd’hui, vous vous préoccupez de l’application de cette loi. Je vous en remercie. Moi, c’est chaque jour et sur le terrain que je veille à ce que l’emploi des personnes handicapées se développe. C’est ce que je ferai encore demain, avec Gérard Larcher, en prenant de nouveaux engagements pour mobiliser les maisons départementales du handicap et le service public de l’emploi. Les résultats sont déjà au rendez-vous : l’emploi des personnes handicapées a progressé de 5 % en deux ans, les créations de places ont doublé depuis la fin de la législature socialiste. Vous préfériez imposer de nouveaux impôts pour financer les 35 heures : nous, nous avons donné la priorité aux personnes handicapées, aux personnes âgées dépendantes et aux enfants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

avenir du livret a

M. Jean Ueberschlag – Ma question s’adresse au ministre de l‘emploi, de la cohésion sociale et du logement, que je remercie de nous avoir rejoints malgré un emploi du temps chargé.

Le Livret A est le produit d'épargne favori des Français. Il est populaire, simple d'utilisation, défiscalisé et accessible à tous. Plus de 6 millions de Français en détiennent un, sans compter les détenteurs du Livret bleu du Crédit mutuel. À l'occasion des 190 ans de la Caisse des dépôts et consignations, le Président de la République a rappelé son attachement et celui de nos concitoyens au Livret A. Or, la Commission européenne a lancé fin juin une procédure d'infraction à l’encontre de la France, lui demandant de justifier l'exclusivité accordée à la Banque postale et aux caisses d'épargne pour la distribution de ce livret. Le Président de la République a exprimé, lors d'un récent entretien téléphonique avec son président, M. José Manuel Barroso, la préoccupation des autorités françaises : instrument d'épargne populaire indispensable, le Livret A est aussi un instrument irremplaçable de financement du logement social.

Alors que le Gouvernement mène une politique inédite et ambitieuse en faveur du logement sur tout le territoire et pour tous (Rires sur les bancs du groupe socialiste), il paraît inconcevable de se passer de la part de financement que représente le Livret A. Où en sommes-nous sur ce dossier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement - Je vous prie d’excuser mon retard. J’étais à Amiens, avec le Président de la République et M. de Robien, pour faire le bilan de dix années de zone franche urbaine, cet excellent dispositif que notre majorité a donné à la France. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

Avec l’épargne populaire, notre pays dispose d’un outil aussi original que performant pour financer de très grandes opérations de logement social à très long terme. Comme l’a rappelé le Président de la République lors de la célébration du 190e anniversaire de la Caisse des dépôts, nous sommes très attachés à ce mode d’accès au crédit et il n’est pas question de le remettre en cause.

Les fonds collectés permettent de se fixer des objectifs ambitieux. Ainsi, nous avons prévu de tripler la production de logements sociaux et elle a d’ores et déjà été plus que doublé. Des prêts de trente ans, au taux record de 2,5 %, permettront aussi de financer des logements 100 % écologiques. Enfin, en cette semaine de l’emploi des personnes handicapées, j’indique qu’une convention a été conclue avec l’OGIREP en vue de promouvoir le concept de maison universelle, agréablement habitable par tous, y compris les personnes présentant une situation de handicap particulièrement lourde. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

REFORME DES IUFM

M. Michel Roumegoux – La réforme de la formation des maîtres représente un enjeu de première importance car, par rapport aux générations précédentes, les élèves ont bien changé. Dans une société qui exige d’être de mieux en mieux formé, nos jeunes sont-ils bien préparés à leur futur emploi ? Ont-ils une connaissance suffisante du monde économique ? Leur formation n’est-elle pas trop éloignée des réalités du monde du travail ?

Quant aux jeunes professeurs, beaucoup se plaignent de la formation qu’ils ont reçue à l’IUFM, la jugeant trop théorique et peu en phase avec les réalités de terrain. En définitive, nombre de jeunes titulaires se considèrent comme un peu abandonnés face à leurs responsabilités.

Monsieur le ministre de l’éducation nationale, vous avez eu le courage de décider de réformer les IUFM et, le 3 octobre dernier, le Haut conseil de l’éducation vous a remis ses recommandations à ce sujet. Pouvez-vous dire aujourd’hui à la représentation nationale, mais aussi à tous les parents, enseignants et futurs enseignants, comment se profile cette réforme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche – La réforme des IUFM est très attendue car tout le monde la juge indispensable. À l’image de ce que pratiquent nombre d’autres pays, son principe directeur sera de faire alterner les périodes de formation théorique avec des expériences de terrain aussi précoces, nombreuses et diversifiées que possible. Je suivrai toutes les recommandations du Haut conseil de l’éducation, notamment pour ce qui concerne l’indispensable maîtrise du socle commun de connaissances, au premier rang desquelles se situe, naturellement, la maîtrise du français. Au-delà des connaissances universitaires, l’accent sera mis sur l’aptitude des futurs enseignants à gérer une classe et à accompagner chaque élève vers la réussite, quelles que soient ses difficultés de départ ou son origine sociale. Bien entendu, la formation dispensée sera conforme aux principes éthiques du service public de l’éducation.

S’agissant de l’adaptation au monde du travail, je souhaite que tout élève-enseignant effectue un stage en entreprise, de manière à mieux connaître le milieu économique et à pouvoir en connaissance de cause aider les élèves à s’orienter.

Intégrés aux universités, les IUFM seront dotés de moyens d’évaluation affinés, afin que nul stagiaire ne puisse être titularisé s’il ne possède pas le niveau de compétences requis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

service public postal

M. Émile Zuccarelli – Ma question s’adresse à M. Breton et porte à nouveau sur l’ouverture du secteur postal, sa réponse à notre collègue Desallangre ne m’ayant guère convaincu…

Depuis treize ans, la Commission européenne s’emploie à imposer l’ouverture à la concurrence des activités postales, et la loi française du 20 mai 2005 a consacré dans notre droit la libéralisation d’une part importante de ce marché. Si les plis de moins de 50 grammes restent – et c’est heureux ! – sous monopole, la Commission européenne a adopté, le 18 octobre dernier, un projet de directive visant à la libéralisation totale du secteur. On connaît les effets désastreux d’une telle politique sur l’emploi, le service public et les tarifs : les expériences britannique et allemande en témoignent.

Dans ces conditions, la grève des postiers qui a lieu aujourd’hui s’explique très bien. Reçue par le cabinet de M. Loos le 17 octobre, une délégation intersyndicale de la Poste n’a pas obtenu les éclaircissements qu’elle espérait sur la position du Gouvernement. Le ministre délégué à l’industrie s’est simplement engagé à écrire au commissaire McCreevy pour préciser « les conditions auxquelles la France est susceptible d’apporter son soutien au projet de directive »…

Pourtant, au nom de l’aménagement du territoire et du droit de chaque citoyen à disposer d’un réseau public assurant la péréquation tarifaire, c’est le principe même de la libéralisation totale que le Gouvernement devrait combattre, dans la perspective du Conseil des ministres européens chargé d’examiner le projet de directive. Et il ne suffit pas, Monsieur Breton, d’invoquer le service universel, puisque chacun sait qu’en jargon européen, le service universel, c’est le croupion du service public, après qu’on en a retiré l’essentiel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et sur divers bancs)

Le Gouvernement entend-il s’opposer à l’ouverture totale à la concurrence du secteur postal et, par conséquent, à la suppression du monopole pour les plis de moins de 50 grammes ? Va-t-il tout faire pour préserver ce service public essentiel ? (Même mouvement)

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l’industrie Puisque vous m’y invitez, je vais donc préciser à nouveau le contexte dans lequel la France va préserver l’intégralité des missions de la Poste. Les obligations liées au service universel seront respectées et la péréquation tarifaire sera maintenue…

M. François Brottes - Comment ?

M. le Ministre – De même, nous sommes déterminés à faire respecter le principe d’égalité d’accès de chaque citoyen au service postal. Enfin, le projet de directive ne restreint pas les missions de service public.

Plusieurs députés socialistes et plusieurs députés communistes et républicains - Mais si !

M. le Ministre – Pas du tout ! Il renforce en particulier l’aménagement du territoire et la presse.

J’ajoute que la réforme du financement des retraites des fonctionnaires de la Poste est essentielle. Elle sera menée dans l’intérêt des postiers et elle sera appliquée progressivement et équitablement dans un contexte concurrentiel. Ce sont là autant de garanties pour les postiers et le maintien des missions de service public ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions.

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éloge funèbre de nathalie gautier

M. le Président – Le 1er septembre 2006, je peux vous assurer, Monsieur, Florence, Sabine, Juliette et Fabrice, que nous avons tous appris la disparition de Nathalie Gautier avec une infinie tristesse. Certains d’entre nous avaient été témoins du malaise qui nous avait alertés sur son état de santé. Nous avions suivi avec inquiétude son hospitalisation et son rétablissement progressif nous avait rempli de joie. Nous avions tous espéré, lorsque nous l’avions revue ici, parmi nous, qu’il serait durable. Il n’en en a rien été. Avec Nathalie Gautier, notre assemblée a perdu une élue qui avait su apporter au service de la démocratie parlementaire sa jeunesse, son enthousiasme, sa simplicité, sa disponibilité mais aussi la force de ses convictions républicaines. Élue députée de la 6e circonscription du Rhône en 2002, elle avait su trouver rapidement sa place parmi nous et elle intervenait toujours au sein de son groupe politique, en commission comme dans cet hémicycle, avec à-propos et mesure. Je me souviens en particulier de son intervention lors du vote de la loi sur le port de signes religieux à l’école, dans laquelle elle avait exprimé ce que la laïcité avait apporté à l’émancipation de la femme, comme elle le faisait souvent au sein de la Délégation aux droits des femmes, où elle siégeait. Plus près de nous, je garderai le souvenir de sa présence au sein du jury du prix des députés dont elle était un membre assidu et écouté. Malgré ses multiples engagements dans son département et à l'Assemblée, malgré aussi les charges que nous pressentions lourdes d'une famille jeune et nombreuse, elle trouvait le temps de lire l'ensemble des ouvrages et de les commenter avec beaucoup de pertinence et cherchait en toutes occasions à faire partager son enthousiasme. Ouverte à toutes les questions de société, d'une curiosité insatiable, elle s'était prise de passion pour ce petit pays à l'histoire pourtant mouvementée et récemment entré dans l'Union européenne, la Lettonie, dont elle présidait le groupe d'amitié.

Cette disponibilité au sein de notre assemblée reflétait sa conception de l'engagement politique : des convictions fortes et une disponibilité de tous les instants au service de tous et plus particulièrement de nos concitoyens les moins favorisés. Car avant d'être députée de la nation, Nathalie Gautier était une élue locale. Élue conseiller municipal de Villeurbanne depuis 1983, adjoint au maire de cette commune de 1983 à 1995 puis de nouveau en 2001, conseiller général du Rhône de 1990 à 2002, elle puisait dans cet enracinement sa force et y forgeait ses convictions. Ses compétences en matière d'urbanisme l'ont amenée, à Villeurbanne comme à l'Assemblée nationale, à s'intéresser plus particulièrement aux conditions de vie de nos concitoyens, à leur logement, aux transports mais aussi à l'environnement. Pour Nathalie Gautier, la mission des politiques était un peu comme celle de l'architecte ou l'urbaniste : il s’agissait de façonner une cité à l’échelle humaine.

Avec elle, notre assemblée a perdu une parlementaire appelée à un brillant avenir et qui faisait honneur à la République. À vous, son époux, à vous Florence, Sabine, Juliette et Fabrice, ses enfants, à toute sa famille, je redis, en notre nom à tous, toute notre amitié, notre sympathie, notre affection.

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement - Le Gouvernement s'associe à l'hommage rendu à Nathalie Gautier, députée du Rhône.

En août dernier, la maladie contre laquelle elle a lutté courageusement l'a emportée. Jusqu'au dernier jour, Nathalie Gautier n'aura pas failli dans l'accomplissement de la mission que lui avaient confiée ses concitoyens. Au cours de ses vingt-trois années de vie publique, elle a montré combien elle voulait être utile à la collectivité et servir celles et ceux qui l'avaient choisie pour les représenter. C'est en 1983 que Nathalie Gautier obtient son premier mandat de conseillère municipale de Villeurbanne. Ses pairs l'élisent la même année adjoint au maire et elle le restera douze ans. Mère de quatre enfants, elle réussit à concilier avec sérénité et efficacité sa vie publique et sa vie de famille, répondant toujours à toutes les sollicitations.

Urbaniste de métier, elle se passionne pour tous les dossiers susceptibles d'améliorer la vie de ses concitoyens et s'investit pleinement dans les projets de sa ville. De nouveau adjoint au maire en 2001, elle se voit confier la délégation à l'urbanisme, responsabilité qu'elle exercera jusqu'à sa disparition. Elle réalise alors un travail remarqué en matière d'aménagement des espaces publics de la ville mais surtout de rénovation et de création de logements, dont elle fait l’une des priorités de son action. Sa disponibilité, son travail sur le terrain et ses qualités humaines lui valent la reconnaissance de ses concitoyens du canton de Villeurbanne Sud, qui l'élisent au conseil général en 1990. Ils lui renouvelleront sans interruption leur confiance jusqu'en 2002, date à laquelle elle démissionne, conformément à la loi sur le cumul des mandats. Forte de son assise locale, de son expérience d'élue de terrain, assurée du soutien de ses concitoyens, elle succède cette même année à Robert Bret, dont elle était depuis cinq ans la suppléante, comme députée de la 6e circonscription du Rhône. C'est tout naturellement à la commission des affaires économiques qu'elle siège. Elle peut y faire valoir son acquis professionnel et plus encore son expérience locale réussie. Animée par une passion certes maîtrisée, mais bien réelle, dotée d'un sens du dialogue au service de convictions solidement ancrées, elle est écoutée avec attention et estimée par tous ses collègues.

Pendant quatre ans, dans la continuité de ses engagements locaux, elle a participé aux débats sur la politique de la ville, le logement, les transports et l'urbanisme. Également sensible aux questions environnementales, elle a été six années durant membre suppléant puis membre à part entière du comité national de l'eau. Parallèlement, Nathalie Gautier défendait une autre cause, celle de la parité, qu'elle était déterminée à faire progresser dans notre société, elle qui avait réussi à s'imposer dans un milieu trop souvent dominé par les hommes. Membre actif de la Délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances, elle a plaidé avec force en faveur du respect de la dignité de la femme, notamment au cours de l'examen du texte sur le port de signes religieux à l’école. Chacun se souvient de cette voix calme avec laquelle elle savait exprimer ses convictions profondes. Elle laissera le souvenir d'une élue toujours disponible, attentive et dévouée, accomplissant ses mandats avec un sens aigu de l'intérêt général.

À ses quatre enfants, Florence, Sabine, Juliette et Fabrice, à son mari, à sa mère, à toute sa famille, au président du groupe socialiste ainsi qu'à ses collègues, j'exprime au nom du Gouvernement nos condoléances les plus sincères. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement observent une minute de silence)

La séance, suspendue à 16 heures 10, est reprise à 16 heures 35, sous la présidence de M. Leroy.
PRÉSIDENCE de M. Maurice LEROY
vice-président

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LOI DE FINANCES POUR 2007 -seconde partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007.

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outre-mer (suite)

M. François Baroin, ministre de l’outre-mer - Je remercie les rapporteurs pour leur travail très précis, fort utile pour mieux faire comprendre les atouts et les difficultés de l’outre-mer. C'est aussi un message positif pour nos concitoyens ultramarins car il montre l'intérêt que la représentation nationale porte à l'outremer.

Comme vous l'avez relevé, les crédits de la mission Outre-mer pour 2007 s’établissent à 2,03 milliards en autorisations d'engagement et 1,96 milliard en crédits de paiement. Vous vous félicitez, Monsieur Almont, qu'en les maintenant à ce niveau, alors que de fortes contraintes pèsent sur le budget de l'État, le Gouvernement manifeste son attachement aux départements et collectivités d'outre-mer. Bien entendu, comme le souligne M. Rodet dans son rapport, les crédits que je gère directement ne représentent qu'une partie – quelque 13 % – de l'effort budgétaire, financier et fiscal en faveur de l'outre-mer. Ce sont en effet près de 15 milliards qui contribueront, outre-mer, à l'autonomie financière des collectivités locales, à l'exercice des missions régaliennes de l'État et à la mise en oeuvre des priorités du Gouvernement. Dans le strict respect des engagements du Président de la République, le projet de budget 2007 soutient le développement des collectivités ultramarines et permet de décliner outre-mer la mobilisation nationale de lutte contre l'insécurité et de soutien à l'emploi et au logement.

Le soutien au développement des collectivités d'outre-mer passe par la reconnaissance des identités particulières, comme vous l'avez souligné, Monsieur Beaugendre, et par un plus large exercice des responsabilités locales : c'est tout le sens des projets de loi organique et ordinaire portant dispositions statutaires et institutionnelles pour l'outre-mer, qui sont actuellement soumis au Parlement.

Cette volonté politique forte se concrétise par un soutien financier accru aux collectivités d'outre-mer. Soyez rassurée, Madame Rimane : toutes les collectivités de Guyane bénéficieront de la reconduction du pacte de croissance, ce qui leur permettra de disposer d'enveloppes évoluant de façon dynamique, dans l’esprit du plan Guyane que nous venons de formaliser. Pour répondre précisément à votre question sur le financement des transferts de compétences, il existe un décalage entre les dépenses réelles du RMI des départements et la compensation financière versée. Allant ainsi au-delà de ses obligations légales, le Gouvernement a donc décidé de verser des dotations supplémentaires. Une dotation supplémentaire a été versée en 2006 et le Premier ministre a décidé de la porter à 500 millions pour les trois prochaines années. C’est le gage d’une politique inscrite dans la durée. S’agissant enfin de la compensation au département de ses dépenses de transport scolaire par voie fluviale, j'ai demandé au ministre de l'intérieur d'examiner si la dotation globale de décentralisation pouvait être augmentée. Je soutiens cette demande de compensation que j'estime légitime.

S'agissant du traitement des déchets en Guadeloupe, sujet que nous avons abordé, Madame Louis-Carabin, lors du déplacement du premier ministre dans l’île, les collectivités territoriales ont en charge la révision du plan départemental d'élimination des déchets ménagers et assimilés et l'élaboration du plan régional des déchets industriels et spéciaux. Ces plans doivent déterminer les sites de stockage en Guadeloupe et obtenir l'adhésion d'une intercommunalité restructurée, avant que se poursuive la réhabilitation des décharges non conformes à la réglementation communautaire. Autrement dit, la mise en conformité est indispensable mais, au préalable, une entente est nécessaire sur la méthode, le calendrier et les objectifs. Toutefois, l’urgence conduit l'État à s'engager à une intervention exceptionnelle dans le cadre du contrat de projet, en accompagnant les initiatives publiques ou privées en faveur des opérations jugées prioritaires.

Comme je m'y étais engagé, Monsieur Grignon, lors de mon déplacement dans l'archipel en septembre 2005, une convention cadre de développement sur dix ans doit être signée entre l'État et le conseil général de Saint-Pierre-et-Miquelon. Elle sera déclinée en un premier contrat pluriannuel 2007-2013, et l'État instruit actuellement les propositions des élus transmises par le préfet en octobre 2006. Les objectifs prioritaires concerneront le maintien et le développement du secteur de la mer, le tourisme, la santé, la formation professionnelle et la diversification économique. Le précédent contrat a été prolongé de deux ans afin d'en favoriser l'exécution et de préparer le document futur.

Je suis également très attentif à la situation financière des collectivités territoriales de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon. Je rappelle que, dans le cadre d'un protocole de restructuration et de redressement des finances signé par le maire, le préfet et le trésorier payeur général, l'État a versé 650 000 euros à la commune de Saint-Pierre fin 2005. Pour Miquelon-Langlade, un contrat pluriannuel de redressement a été négocié entre le préfet et le maire afin de résorber le déficit de la commune. Dans ce cadre, l’État versera une subvention exceptionnelle d'équilibre à la commune de Miquelon d'ici à la fin 2006.

Comme vous l'avez rappelé, la collectivité territoriale a enregistré en 2005 un important déficit – 5,8 millions, soit 18 % de ses recettes de fonctionnement. Ce déficit, uniquement d'investissement, a été repris dans le budget supplémentaire adopté par la collectivité en septembre 2006, budget qui a fait l'objet d'une saisine de la chambre régionale des comptes par le représentant de l'État, pour déséquilibre. Au vu de l'avis de la chambre, le représentant de l'État examinera avec la collectivité les moyens de redresser les finances et une demande de subvention exceptionnelle d'équilibre pourra alors être examinée.

Monsieur Brial, je vous remercie pour vos encouragements et votre soutien à l'action entreprise par le Gouvernement. Je sais que vous travaillez sans compter pour développer les îles Wallis-et-Futuna, et que vous avez obtenu la création d’un poste de sous-préfet, qui a été installé samedi...

M. René Dosière - C’est un grand facteur de développement pour Wallis-et-Futuna.

M. le Ministre - …ce qui raffermit la position de l’État, comme vous le souhaitiez.

Mais bien entendu, l'emploi constitue toujours la priorité du ministère de l'outre-mer. En lui consacrant 1,16 milliard, le projet de budget de la mission Outre-mer affecte près de 60 % de ses crédits à la lutte contre le chômage.

Comme vous le soulignez, Monsieur Audifax, le principe des exonérations de charges sociales propres à l'outre-mer reste conforme au dispositif de la loi de programme du 21 juillet 2003, dans l'attente des résultats définitifs de l'évaluation prévue par son article 5. Les dispositifs spécifiques financés par la mission outre-mer s’ajoutent aux mesures de droit commun tels que les contrats d'accompagnement dans l'emploi et les contrats d'avenir. Le Gouvernement accède ainsi à une demande insistante des élus. Je me suis fortement impliqué dans ce dossier car le mécanisme prévu permettra que des milliers de personnes aient accès à des formations qualifiantes. Au total, le projet de budget pour 2007 devrait permettre le financement de 57 400 contrats aidés dont 14 000 CAE inscrits sur le budget de M. Borloo.

Les moyens de la formation professionnelle sont renforcés outre-mer. Trois mille jeunes seront formés par le SMA en 2007, l’objectif étant que 72 % intègrent directement la vie professionnelle. Outre la chance qui leur est ainsi offerte d’une formation qualifiante, cet outil magnifique est une grande fierté pour l’outre-mer.

Les résultats sont conformes aux objectifs. Ainsi l'an dernier, le nombre d'emploi salarié dans le secteur marchand a progressé de 2,2% – 3,5 fois de plus qu’en métropole –, et le nombre de chômeurs a continué à diminuer pour s'établir à 21,9 %. C’est encore trop, bien sûr, mais la tendance est celle-là. Rien ne sert de nier l’évidence, la loi-programme a déjà produit ses effets, et il faudra conforter les dispositifs dérogatoires au droit commun, sans lesquels il n’est pas de perspective durable de développement. La commission d’évaluation dira quelles sont les évolutions souhaitables, mais le dispositif en lui-même ne peut être remis en cause.

Effectivement, Madame Louis-Carabin, les besoins de logements sociaux sont très grands dans les départements d'outre-mer et le retard particulièrement sensible aux Antilles. Le Premier ministre a pris des engagements ; ils seront intégralement tenus et c’est là un effort considérable. En premier lieu, pour vous répondre plus précisément, Monsieur Marie-Jeanne, il s'agit de rattraper dans les meilleurs délais le retard en crédits de paiement de la dotation consacrée au logement social dans les DOM car il en va de la survie de beaucoup d'artisans et de petites entreprises. Un premier montant de 30 millions proviendra de la Caisse des dépôts, et le Premier ministre s'est engagé à ce que la totalité des factures en retard soient payées avant la fin du premier trimestre 2007.

Pour ce faire, dès 2006, 30 millions de crédits supplémentaires seront ouverts sur le programme concerné du budget de l'outre-mer ; 9,6 millions en provenance de la réserve gouvernementale ont déjà été délégués dans les DOM ; 8,4 autres millions seront transférés dans les meilleurs délais et 12 millions seront ouverts dans le collectif de fin d'année. Avec les 60 millions utilisés dès cette année et les crédits de la LFI, les factures en souffrance pourront être payées en totalité.

Sans se contenter de ce rattrapage, Dominique de Villepin a décidé d'aligner la progression des crédits sur celle qui a été fixée en métropole par le plan de cohésion sociale et par l'engagement national pour le logement exprimé par la loi du 13 juillet 2006. Sur ma proposition, il a donc décidé d'augmenter de 20 % pendant les trois prochaines années les crédits du logement social outre-mer, soit, sur 120 millions au total, 60 millions dès 2007, 30 en 2008 et 30 en 2009.

Pour des questions de calendrier et de contraintes budgétaires, les crédits 2007 seront ouverts dans le collectif de fin 2006 et reportés, – j'ai obtenu une dérogation aux règles très strictes de report de la LOLF – soit 60 millions d'autorisations d'engagement et 13 millions de crédits de paiement.

Au total, 281 millions en autorisations d'engagement et 201 millions en crédits de paiement seront directement consacrés en 2007 au logement social outre-mer, soit une hausse de 5 % en moyens d'engagement et de 18 % en moyens de paiement, par rapport aux crédits votés en 2006.

Cet effort considérable passe par une réorganisation efficace de la politique du logement. Sur proposition de Jean Louis Borloo et de moi-même, sera mise en place, sous notre double présidence, une conférence nationale du logement outre-mer. Elle améliorera le pilotage de cette politique, en impliquant davantage les collectivités locales. Les opérateurs et les différents financeurs du logement y seront aussi représentés, afin de mieux coordonner les efforts. Ce rendez-vous régulier est nécessaire pour, après le rattrapage de la dette, donner une impulsion nouvelle à une politique du logement qui soit structurante.

J'attends, Madame Vernaudon, que la commission nationale d'évaluation fasse des propositions pour une défiscalisation qui orienterait l’épargne des ménages vers le logement social. Mais ces efforts seraient vains si nous ne nous attaquions pas aux problèmes de gouvernance et de rareté du foncier. Enfin, au sein de la conférence du logement, je souhaite rediscuter des conditions d'intervention de l'ANAH et du 1 % logement outre-mer.

Dès lors que ces financements complémentaires seraient disponibles pour le logement social, la réhabilitation de l'habitat insalubre et la mixité sociale, la pression sur la ligne budgétaire unique pourra être desserrée et l’on pourra procéder à une réelle relance du logement.

Une autre de mes priorités est de réaffirmer l'État de droit et de lutter contre l'immigration clandestine, ce qui passe par un renforcement des moyens et par une adaptation des textes, quand cela est nécessaire.

Des progrès significatifs ont été accomplis. Depuis le 1er janvier, la délinquance de voie publique outre-mer a baissé de 12,7 % et 16 707 éloignements d'étrangers en situation irrégulière ont été effectués. C’est plus qu’en 2005 et plus de la moitié – 53,39 % – du total national. La situation sans équivalent qui y règne justifie pleinement le dispositif juridique adapté que nous avons mis en place.

En Guyane, Madame Rimane, depuis le 1er janvier 2006, la délinquance générale hors infractions à la police des étrangers a baissé de 14,8 %, celle de voie publique de 17,7 % et les violences aux personnes de 16,35 % soit 453 victimes en moins. C’est le résultat d‘une volonté de l’État et d’une action sans faille sur le terrain des policiers et gendarmes auxquels je rends hommage. Le commissariat de la police aux frontières de Saint-Georges de l'Oyapock a été ouvert en septembre dernier et ses effectifs de plus de 30 policiers seront renforcés pour atteindre 60 fonctionnaires lors de l'ouverture du pont à l'horizon 2008. La compagnie départementale d'intervention de sécurité publique à Cayenne sera renforcée début 2007 d'une section supplémentaire de 25 fonctionnaires pour améliorer la sécurité de l'agglomération. Depuis septembre 2006, le groupe d'intervention régional a été réactivé et dispose d'une unité opérationnelle permanente dirigée par un commandant de gendarmerie nouvellement affecté.

Madame Taubira, le Gouvernement s'est engagé avec détermination à lutter contre l'immigration clandestine en Guyane, estimée à environ 40 000 personnes. Les effectifs de la police aux frontières ont augmenté de 53 % entre 2001 et 2005, et une antenne de l'OFPRA tient désormais des audiences foraines en Guyane. Les premiers effets sont très positifs, avec 6 585 éloignements effectués au 31 septembre 2006, soit 54 % de plus qu’en 2005.

Par ailleurs, une habilitation à légiférer par ordonnance sur la question des constructions illicites a été inscrite dans le projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer qui vous sera prochainement soumis.

Tandis que la situation semble se stabiliser à Haïti, notre politique a déjà permis de réduire notablement le nombre d'entrées irrégulières en Guadeloupe. Et depuis le début de l'année il n’y a eu que 431 premières demandes d’entrée contre 3 144 au cours des dix premiers mois de 2005, soit une baisse de 86 %.

La création d'une filière de biocarburant viable en outre-mer, notamment en Guadeloupe, est bien un objectif primordial pour l’autonomie énergétique, la consolidation des filières agricoles et la création d'emplois locaux. Le Gouvernement en a fait une priorité. La TGAP, créée par la loi de finances pour 2005, est applicable progressivement en métropole, mais ne le sera dans les DOM qu’au 1er janvier 2010. Ce délai permettra la concertation avec l'ensemble des acteurs, en particulier les collectivités locales, qui perçoivent la taxe spéciale de consommation sur les carburants. L'ensemble des ministères concernés, ainsi que l'ADEME, sont mobilisés sur le développement de nouvelles filières économiques en outre-mer.

Beaucoup d’entre vous se sont inquiétés de la situation du secteur de la banane. Le 20 septembre dernier, la Commission européenne a adopté une proposition de réforme du régime d'aide aux producteurs communautaires. Sur l'enveloppe prévue de 280 millions d'euros, 129,1 millions devraient être octroyés aux Antilles. Nous avons obtenu ce montant à partir d’une proposition plus basse de la Commission et nous continuons à négocier sur la clause de révision, dont le principe est accepté, pour revoir le montant de cette enveloppe, en cas de chute des prix liée à une modification du tarif douanier.

Pour le sucre, les négociations relatives aux conventions canne entre l’État, les industriels et les planteurs sont en cours aux Antilles. Les conventions d'équilibre actuelles seront intégrées à ces conventions. Par ailleurs, la demande d'augmentation du contingent fiscal en faveur des rhums traditionnels des DOM écoulés en métropole, est examinée par la Commission.

Comme vous le voyez, le Gouvernement ne ménage aucun effort pour accompagner la restructuration des deux filières essentielles de la canne et de la banane.

Pour conclure, comme l’a dit M. Quentin, il s’agit d’un budget dynamique, rigoureux et généreux. Je regrette donc vraiment, Monsieur Lagarde, le vote du groupe UDF car vous auriez pu nous accompagner pour aider au développement de l’outre-mer. Je regrette aussi, Monsieur Manscour, – mais comment s’en étonner à la veille d’élections – que les élus socialistes d’outre-mer se désolidarisent en public d’un budget dont ils vantent les mérites en privé.

Puisque de nombreux orateurs ont souligné que ce budget est le dernier de la législature, permettez-moi de dire à ceux qui ont voté l’ensemble des textes concernant l’outre-mer au cours de cette législature qu’ils peuvent être fiers de leurs votes. On peut toujours critiquer l’action gouvernementale, mais personne ne pourra contester le fait que tous les engagements pris par le Président de la République ont été respectés…

M. René Dosière - Y compris en Nouvelle-Calédonie ?

M. le Ministre – Oui, la parole donnée par Jacques Chirac a été intégralement tenue !

Notre débat s’est déroulé dans un climat apaisé, je m’en réjouis. Conformément à l’engagement pris l’an dernier par le Premier ministre, la représentation nationale est associée très étroitement à l’évaluation de la loi de programme. Et vous l’avez compris, Monsieur Edmond-Mariette, l’État n’engagera pas de réforme sans évaluation ni concertation. Cette méthode, qui accompagne un excellent niveau budgétaire, donne tout son sens à l’attention que porte le gouvernement de M. de Villepin aux spécificités de l’outre-mer.

Si je n’ai pas répondu à toutes les interventions, j’aurai l’occasion de compléter mon propos en répondant à vos questions. J’ai surtout répondu en matière budgétaire. D’autres sujets avaient été abordés, c’est vrai, notamment par M. Frogier : l’équilibre territorial et social de la Nouvelle-Calédonie, la situation polynésienne… Sur tous ces sujets, le calendrier est connu de tous, les rendez-vous sont pris. Nous aurons donc d’autres occasions d’en débattre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Christophe Lagarde - Rappel au Règlement. La règle est que nous puissions poser des questions et avoir des réponses. Nos questions n’étaient pas toutes d’ordre budgétaire, c’est vrai, mais on ne parle pas si souvent que cela, ici, de l’outre-mer et nous pouvions donc espérer davantage de réponses. Vous venez de dire que le calendrier était connu, mais pour la Polynésie, il n’y a pas de calendrier et l’assemblée de Polynésie n’a pas été consultée. Nous risquons donc d’être privés du droit d’amendement sur le texte que vous nous présenterez dans quelques semaines.

J’ai bien noté ce que vous disiez concernant le statut de la Nouvelle-Calédonie et j’ose espérer que cela signifie que les engagements pris seront tenus.

J’observe que vous ne m’avez rien répondu au sujet des « Domiens de métropole. » Vous êtes pourtant aussi leur ministre !

Enfin, j’ai bien entendu que vous regrettiez le vote du groupe UDF. Nous n’en maintenons pas moins notre position.

M. Louis-Joseph Manscour - Rappel au Règlement. J’ai beaucoup d’estime pour vous, Monsieur le ministre, mais je ne peux vous laisser dire que j’approuverai en privé un budget que je critique en public. Ce n’est pas le cas et si j’avais besoin d’une raison supplémentaire de voter contre, vous me l’avez donnée, car vous n’avez répondu à aucune des questions que j’ai posées. Et contrairement à ce que vous dites, ce vote contre n’obéit pas à des raisons électorales.

M. le Ministre – Je regrette que vous vous soyez senti visé, alors que je ne pensais pas forcément à vous quand je disais que certains élus d’opposition avaient l’honnêteté de reconnaître en privé les effets positifs de notre action. J’ai tenté de vous convaincre une dernière fois, je n’y suis, semble-t-il, pas parvenu. Cela n’altère en rien la qualité de nos relations personnelles.

Mon ministère ne gère que 13 % des moyens pour l’outre-mer, Monsieur Lagarde. Ceux-ci proviennent aussi des politiques de santé, d’éducation et autres, y compris pour ce qui concerne l’accompagnement des Domiens en métropole. Pour ce qui est du corps électoral, vous connaissez le calendrier…

M. Jean-Christophe Lagarde - Pas pour la réunion du Congrès.

M. le Ministre – C’est une prérogative du Président de la République. Il appartient au Gouvernement d’inscrire à l’ordre du jour les textes qui lui semblent nécessaires et conformes à la parole donnée. La représentation nationale prendra position, après quoi le Président de la République prendra la décision dont il a la responsabilité.

Enfin, sachez que je n’ai pas l’intention, à quelques encablures d’échéances électorales importantes, de proposer une modification du mode de scrutin en Polynésie, et ce d’autant moins que je n’ai pas été saisi d’une telle demande par l’assemblée territoriale de Polynésie.

questions

M. Michel Vaxès - Si j’ai bien compris, l’inscription à l’ordre du jour de notre assemblée du projet de loi constitutionnelle complétant l’article 77 de la Constitution et ayant pour objet de figer le corps électoral pour l’élection des membres du Congrès et des assemblées de provinces de la Nouvelle-Calédonie est un principe acquis. Nous nous en réjouissons, mais nous voudrions être rassurés, car nous n’ignorons pas que l’UMP néo-calédonien n’est pas favorable au « corps électoral figé » et que certains, au sein de la majorité, seraient tentés de remettre en cause la parole donnée lors des accords de Nouméa et confirmée par le vote majoritaire des deux assemblées en 1999.

Les groupes communiste, socialiste et UDF ont annoncé qu’ils voteraient ce projet. Qu’en sera-t-il du groupe UMP ? Je sais que vous n’êtes pas ici son représentant, mais la position du Gouvernement et du Président de la République sera sans aucun doute déterminante. Le Gouvernement peut-il donc nous rassurer ?

M. le Ministre – Je vais vous répéter ce que j’ai répondu tout à l’heure à M. Frogier et à M. Lagarde. Le calendrier est connu, puisque le projet de loi constitutionnelle a été adopté en conseil des ministres le 29 mars, qu’il sera examiné à l'Assemblée nationale le 12 décembre prochain et par le Sénat le 16 janvier 2007. En vertu de l’article 89 de la Constitution, la décision de convoquer le Congrès à Versailles n’appartient qu’au Président de la République. De son côté, le Gouvernement respecte la parole qui a été donnée en inscrivant le projet à l’ordre du jour et en permettant à chacun d’en débattre librement.

M. Gérard Grignon - Les futures négociations franco-canadiennes sur les quotas de pêche pour la campagne 2007-2008 s’annoncent difficiles, les Canadiens ayant déjà évoqué l’an passé la possibilité d’une réduction importante des TAC, voire d’un moratoire. De plus, ces discussions se situeront dans une période d’instabilité politique, puisque ce seront les élections présidentielles et législatives.

Vous connaissez l’importance des 80 emplois de la société Interpêche pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Compte tenu du marasme que j’ai décrit ce matin, il est évident que l’archipel ne pourrait pas faire face à de nouvelles difficultés.

Cette société est liée à l’État par une convention qui permet à son personnel de faire face aux périodes de chômage dues aux quotas. Cette convention arrivant à expiration à la fin de l’année, je demande qu’elle soit reconduite, considérant que ce personnel, victime de l’arbitrage catastrophique de New York entre la France et le Canada, possède un savoir-faire unique et mérite une attention particulière. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

M. le Ministre – La société Interpêches bénéficie depuis 2001 d’une convention d’aide au maintien de l’emploi permanent qui lui assure une certaine visibilité économique. Le Gouvernement est conscient de l’enjeu que représente pour Saint-Pierre-et-Miquelon la pérennité de cette société, qui, avec plus de 70 emplois, assure l’essentiel de l’emploi local et traite 80 % de la morue débarquée. C’est pourquoi nous prévoyons de prolonger cette convention dans l’attente de la renégociation, en 2007, de l’accord franco-canadien de 1994. Le Canada s’est engagé à ne pas dénoncer unilatéralement cet accord, ce qui nous amènera donc bien à la table des négociations. Nous avons la volonté de poursuivre dans la continuité des résultats obtenus avec la partie canadienne, dans le sens des intérêts de la pêche de l’archipel.

M. René Dosière - Je note que M. Brial a critiqué ce matin le train de vie excessif du gouvernement polynésien. Pour quelqu’un qui a soutenu les dépenses pharaoniques de M. Gaston Flosse, c’est un peu excessif.

Ma question porte sur l’immigration irrégulière à Mayotte. Monsieur le ministre, vous avez pris un certain nombre de dispositions répressives, insuffisantes, voire inutiles. La mission que j’ai menée avec Didier Quentin a, en effet, souligné que, pour régler cette question, un effort considérable était nécessaire en matière d’état civil. Mayotte est le seul territoire de la République où subsiste un droit civil musulman. Or, les enfants d’Allah n’ayant pas besoin de papiers, les sans-papiers y sont nombreux. Face à cette situation, il faut que le ministère de la justice et le vôtre agissent, à défaut de quoi les efforts resteront inefficaces. J’en appelle donc à une attention prioritaire sur l’état civil, qui mette à contribution l’ensemble des administrations.

M. le Ministre – Vous avez ce matin, de votre position de président, entendu des choses sur lesquelles vous réagissez maintenant, soucieux que vous êtes du devoir de neutralité auquel est tenue la présidence.

Vous connaissez bien Mayotte, puisque vous avez conduit la mission d’information qui a dressé un constat implacable de la situation locale. Le Gouvernement y a répondu par la création d’une commission de révision de l’état civil, que vous aviez proposée. Les travaux de cette commission ont été prorogés de cinq ans en 2005. Le ministère de l’outre-mer prend en charge la mise aux normes, la sécurité des locaux, la formation du personnel, la maintenance du matériel, notamment en versant une dotation annuelle de 300 000 euros. 30 000 dossiers ont été traités à ce jour.

Je compte créer, avec les ministres de l’intérieur et de la justice, une mission commune sur place pour évaluer les progrès réalisés. Il est important de nous donner des rendez-vous précis, pour tirer des enseignements de manière plus fréquente que tous les cinq ans. Une fois que les experts auront dressé l’état des lieux, il appartiendra au Gouvernement de formuler des propositions pour améliorer le droit fondamental à Mayotte. L’objectif du Gouvernement est de permettre à tous les Mahorais de disposer au plus vite d’un état civil. C’est un jalon nécessaire avant la départementalisation de cette collectivité.

M. Éric Jalton – Les collectivités d’outre-mer souffrent de la non-reconnaissance du fait syndical local. Pour les cas où les textes relatifs à la représentation syndicale n’autorisent que la présence de syndicats représentatifs au niveau national, se pose le problème de la participation des syndicats locaux, dans lesquels se reconnaît, en Guadeloupe, la majorité des travailleurs.

Au-delà de la formation des partenaires sociaux, prévue dans votre mission, et qui est fondamentale, la prise en compte de la représentativité syndicale locale favorisera le dialogue social, en permettant aux syndicats locaux d’être reconnus dans les organismes paritaires où ce n’est pas encore le cas. Cette mesure, sans incidence financière pour l’État, est susceptible de créer un climat social propice au développement économique.

J’avais fait part de mon sentiment, dans une question écrite, puis dans une question orale, à votre prédécesseur, Mme Girardin. Celle-ci m’avait répondu qu’elle était tout à fait favorable à une initiative en ce domaine, et qu’elle allait lancer une réflexion interministérielle avec ses collègues MM. Borloo, Larcher et Woerth. Au moment où l'Assemblée nationale s’apprête à examiner un projet de loi sur le dialogue social, pouvez-vous, Monsieur le ministre, m’informer des résultats de cette discussion et des suites que vous entendez donner à ce dossier ?

M. le Ministre – Le Gouvernement s’est saisi de la question du dialogue social, avec un projet de loi que vous aurez à examiner bientôt. La représentativité syndicale est un aspect essentiel du dossier qui ne se pose pas dans les mêmes termes dans la métropole et outre-mer, du fait de l’existence dans les DOM de syndicats locaux non affiliés aux centrales nationales. Le Gouvernement a confié au conseiller d’État, Raphaël Hadas-Lebel, une mission pour proposer des voies d’évolution. Son rapport, qui a été remis au mois de mai au Premier ministre, montre que la représentativité des syndicats non affiliés fait parfois l’objet de contestations devant les tribunaux, et que ceux-ci sont exclus de la gestion des organismes paritaires. J’ai donc saisi M. Larcher pour appeler son attention sur ce problème, et je ne doute pas que nous aurons la possibilité d’en discuter dans le cadre de la loi sur le dialogue social.

état b

M. René Dosière - L’amendement 226, contrairement à ce qu’il pourrait laisser croire, ne vise pas à diminuer le budget de l’outre-mer. Sans doute s’agit-il de supprimer 300 000 euros de ce budget, mais ce sont en réalité des sommes qui ne sont pas utilisées par le ministère de l’outre-mer. En me penchant sur les dépenses de la Présidence de la République, j’ai eu l’occasion d’interroger Mme Girardin, qui m’a dit que cette somme était versée en début d’année à la Présidence de la République et directement utilisée par les services de celle-ci. C’est le seul ministère qui procède de cette façon, les autres en assurant le paiement eux-mêmes.

Dans l’esprit de la LOLF, qui vise à assurer une plus grande transparence budgétaire, il serait légitime que cette somme soit inscrite non plus au budget de l’outre-mer, mais à celui de la Présidence de la République. Seul le Gouvernement peut opérer ce transfert d’une mission à une autre. Je ne doute donc pas que vous accepterez mon amendement et que votre collègue nous proposera d’augmenter d’autant le budget de la Présidence de la République dans quelques jours. La clarté et la transparence auront ainsi fait un petit pas.

M. Alain Rodet, rapporteur spécial de la commission des finances La commission n’a pas examiné cet amendement. Je comprends bien sûr la démarche de M. Dosière, mais les règles budgétaires ne nous permettent pas nécessairement d’opérer un transfert d’une mission – la mission outre-mer – à une dotation. Il ne faudrait pas que cet amendement aboutisse à la suppression des crédits en question.

M. le Ministre – J’apprécie la pertinence de la réponse du rapporteur… Les crédits qui sont prévus sur le budget des ministères ont pour objet de prendre en charge les déplacements outre-mer du Président de la République et des ministres concernés. Il n’est pas envisageable de les supprimer en l’absence d’une inscription budgétaire permettant de faire face à ce type de dépense. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

Les années précédentes, ces crédits ont notamment permis le déplacement des plus hautes autorités de la République à la Réunion lors de la crise du chikungunya, ou à la Martinique pour la cérémonie au stade Dillon suite à l’accident d’avion survenu le 16 août 2005 au Venezuela.

M. René Dosière - La LOLF ne restreint pas le pouvoir d’augmenter une dotation des pouvoirs publics. Un parlementaire ne peut transférer des crédits d’une mission à une autre : je ne peux que proposer une diminution de ces crédits, à charge pour le Gouvernement de présenter un amendement augmentant de la même somme la dotation de la Présidence de la République.

Votre réponse me surprend, Monsieur le ministre. Votre prédécesseur m’avait répondu très précisément, avant vous, sur l’usage qui avait été fait de ces crédits, mais jamais on ne m’avait dit qu’ils servaient aussi à financer des déplacements ministériels. Comment est-ce possible, puisque vous m’affirmez d’autre part que cette somme est déléguée en début d’année à la Présidence de la République, et que ce sont les services de la Présidence qui assurent ensuite les paiements ? il y a là un flou qu’il faut dissiper. Vous pourrez le faire par lettre. À défaut de réponse, il faudra bien que je vous pose une question écrite.

M. le Ministre – Je confirme ce que j’ai déjà dit. M. Dosière sait d’ailleurs fort bien que lorsque des ministres accompagnent le Président de la République, une partie de ses frais est prise en charge. Je vous le confirmerai par une lettre en bonne et due forme !

L'amendement 226, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christiane Taubira - Il faut désenclaver le territoire guyanais. 90 % de la population réside en effet sur le littoral, alors que 90 % du territoire reste inaccessible. Cette inaccessibilité favorise le pillage des ressources, la destruction de l’environnement – patrimoine forestier et réseau hydrographique –, les trafics en tout genre et la prostitution, voire la traite des femmes. Elle est également une cause d’insécurité pour les personnes et de forte criminalité, y compris entre clandestins. Il faut donc désenclaver le territoire par un réseau multimodal permettant d’assurer la circulation par les voies terrestre, aérienne, maritime et fluviale. La continuité territoriale est un principe qui se rattache à celui de l’égalité des citoyens et un attribut de citoyenneté. Il n’est pas concevable que les citoyens de l’intérieur du territoire supportent des charges exorbitantes pour se rapprocher des administrations, des lieux de décision, des organismes de formation ou d’autres services.

Le conseil régional a décidé depuis deux ans de ne pas percevoir la dotation de continuité territoriale, ce qui constitue une faute politique et un sacrifice financier inutile. Ce n’est pas une raison pour ne pas souscrire à la nécessité de désenclaver ce territoire et d’assurer la continuité territoriale à l’intérieur du territoire guyanais. J’avais donc déposé deux amendements. Le premier visait à introduire un article additionnel après l’article 50. Il a été déclaré irrecevable : j’avais eu le tort d’être trop raisonnable, en proposant de gager la dépense non par une augmentation au titre des articles 575 et 575-A du code général des impôts, mais par une augmentation de la DGF et de la dotation générale de décentralisation.

L’amendement 104 est un amendement de repli, qui tend à abonder l’action n° 3 « continuité territoriale » du programme « conditions de vie outre-mer » de 6 millions d’euros, en prélevant ces crédits sur l’action n° 3 « soutien et état-major » du programme « intégration et valorisation de l’outre mer ». Si cet amendement n’est pas adopté, je reviendrai à la charge à l’occasion de la discussion du texte portant diverses dispositions statutaires et institutionnelles pour l’outre-mer.

M. le Rapporteur spécial – La commission n’a pas examiné cet amendement, dont je comprends fort bien le sens. Mon rapport insiste d’ailleurs sur les problèmes de communication à l’intérieur de certains territoires ultramarins, dont la Guyane, territoire immense qui reste sous-administré. Je ne peux être défavorable à la proposition de Mme Taubira. Je m’en remets donc à la sagesse de l’Assemblée.

M. le Ministre – Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. L’augmentation constatée sur les crédits de l’action « soutien et état-major » se justifie par la nécessité de financer le dispositif des passeports électroniques – 1,3 million d’euros – et par la volonté de valoriser les collectivités d’outre-mer, notamment dans leurs aspects culturels et leur intégration en métropole – 0,8 million –, ainsi que la poursuite des missions régaliennes de l’État, comme la lutte contre l’orpaillage clandestin. Des crédits particuliers sont prévus pour financer l’organisation des consultations électorales outre-mer et une mesure de modernisation de l’organisation centrale du ministère, qui s’appuie sur les préconisations de la Cour des comptes – création d’un secrétariat général et d’un service juridique. Une réorganisation est en cours sur le rôle de coordination du ministère, qui lui donne une identité forte mais le conduit à ne gérer que 13 % des crédits de l’État à destination de l’outre-mer. Il s’agit de stabiliser ce rôle.

Le dispositif de continuité territoriale mis en place avec l’accord de la Commission européenne ne peut être étendu à la desserte intérieure C’est dommage, car il faudrait être plus pragmatique. La question qui se pose pour la Guyane intéresse aussi la Polynésie française, dont les archipels sont dispersés sur une étendue aussi vaste que l’Europe. Des pistes de réflexion existent pour aborder ces questions. Quoi qu’il en soit, l’État continuera d’apporter un financement au titre des liaisons aériennes d’aménagement du territoire. Le prochain contrat de projet prévoit des dispositions d’aménagement du Maroni. Cette analyse ne peut être dissociée de l’évolution du projet d’aménagement du parc amazonien.

Mme Christiane Taubira - L’amendement, qui a été déposé très tôt, aurait pu être examiné au titre de l’article 88. Je remercie néanmoins M. le rapporteur spécial de s’en être remis à la sagesse de l’Assemblée. Je ne désespère donc pas !

La lutte contre l’orpaillage clandestin ne sera pas possible tant que le territoire restera accessible à ceux qui veulent piller ses ressources naturelles. Ce n’est que lorsque le territoire sera désenclavé et que la circulation y sera normale qu’on pourra espérer faire régresser le phénomène. Il faut aborder le problème de façon méthodique, au lieu de continuer à consacrer des crédits à une lutte , dont, convenez-en, les résultats ne sont pas spectaculaires. Au reste, c’est un puits sans fond, puisque les orpailleurs clandestins s’organisent de mieux en mieux et intègrent le manque à gagner lié aux opérations répressives.

J’insiste pour que le gouvernement français ait la volonté de défendre auprès de la Commission européenne l’extension de la continuité territoriale, par delà l’Amazonie. Dès lors qu’il existe un indéniable enjeu de développement, je gage que la Commission de Bruxelles peut être réceptive à nos arguments, d’autant qu’elle admet qu’en matière de transports et de développement durable, un État membre puisse déroger aux règles communautaires de droit commun, en prévoyant une aide spécifique si une situation particulière le justifie.

L'amendement 104, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christiane Taubira - Ce n’est que partie remise !

Les crédits de la mission outre-mer, mis aux voix, sont adoptés.

ART. 50

L'article 50, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 50

M. le Ministre – L’amendement 249 proroge d’un an le dispositif du congé de solidarité, institué par la LOPOM du 13 décembre 2000 et qui arrive à expiration le 31 décembre prochain. Ce congé – qui a concerné environ 900 entreprises et 2 000 à 3 000 salariés, dont les deux tiers à la Réunion – est financé depuis l’origine par le programme 138 du ministère, lequel couvrira également la charge induite par sa prorogation, par redéploiement de crédits.

En outre, le Gouvernement, en concertation avec les parties concernées, propose d’aménager la mesure pour en maîtriser le coût. À ce titre, l’ancienneté requise pour le salarié bénéficiaire est porté de dix ans à quinze ans ; la prise en charge ne pourra se prolonger au-delà de 60 ans ; la contribution maximale de l’État passera de 60 % à 50 % ; le dispositif s’appliquera au BTP et aux secteurs économiques pour lesquels la loi de programme prévoit des exonérations de charges spécifiques. D’autres mesures d’ordre réglementaire seront prises, notamment pour ce qui concerne l’étalement sur cinq ans de la contribution des entreprises.

Au total, le coût de la prorogation sera limité à 1 million en CP et à 5 millions en AE. Une évaluation approfondie du dispositif sera menée par l’IGAS dès le début de l’année prochaine. La mesure proposée répond directement aux attentes des acteurs économiques locaux, telles que les ont relayées vos collègues Audifax, Victoria et Almont.

M. le Rapporteur spécial – La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, j’y suis favorable, même si je regrette que les modifications proposées rendent le dispositif un peu plus restrictif.

M. Bertho Audifax - Je remercie le Gouvernement d’avoir prorogé le contrat de solidarité car cela répond à une demande très forte de tous les élus. On peut toujours regretter que la prorogation ne se fasse pas exactement dans les termes d’origine, mais je suis tout de même très reconnaissant au ministre d’y avoir procédé. Dans la mesure où la participation de l’État entraîne un effort parallèle des entreprises, je souhaite que le décret permettant d’étaler sur cinq ans la contribution des entreprises ne se fasse pas attendre. Enfin, je me réjouis qu’une évaluation très fine du dispositif soit programmée dès de début de l’année prochaine. J’espère que l’on pourra alors envisager une sortir progressive du système.

M. Philippe Edmond-Mariette – Monsieur le ministre, sans doute faut-il se satisfaire de cet amendement. À la différence de M. Audifax, je considère cependant qu’il est difficile de s’en féliciter. Dès le 12 avril, j’avais posé une question d’actualité à ce sujet et je considère qu’il serait souhaitable de réécrire l’amendement gouvernemental pour plusieurs raisons. D’abord, dans notre République, la justice sociale commande d’aider en priorité les régions qui en ont le plus besoin et les nôtres sont donc prioritaires. Or, lors de l’examen du PLFSS pour 2007, nos collègues de la majorité ont adopté – contre l’avis du Gouvernement – un dispositif extrêmement favorable relatif au « départ décidé en commun », et il semble que le Gouvernement s’y rallie progressivement, en considérant qu’il répond à un besoin manifeste. Pourquoi restreindre le champ des mesures qui nous sont destinées alors que l’on accepte de nouveaux dispositifs pour la métropole ?

S’agissant du congé de solidarité, on a beaucoup de mal à connaître le montant de l’enveloppe globale : la contribution de l’État serait ramenée – et non « portée », comme il est écrit dans votre exposé sommaire – de 60 % à 50 %, chaque collectivité y participerait pour 12,5 % et les partenaires sociaux pour le solde. Et il faut bien préciser que si le dispositif ne s’élargit pas, c’est que les moyens font défaut. Le nombre de demandeurs, lui, continue d’augmenter, aussi bien à la Martinique qu’à la Réunion. Si des demandes restent en instance, c’est que l’enveloppe budgétaire est insuffisante.

Enfin, je voudrais savoir de quoi l’on parle lorsqu’on évoque la nécessite de corriger les effets pervers de la défiscalisation. Ce sont les ultramarins les plus fragiles qu’il convient de protéger en priorité ! À ce titre, il convient de porter la contribution maximale de l’État à 80 % – via un prélèvement sur les recettes de la TVA locale, propre à nos économies insulaires –, de sorte que tous les plus de 55 ans qui le souhaitent puissent partir en contrepartie de l’embauche d’un salarié de moins de 30 ans – ou d’un travailleur handicapé, quel que soit son âge. Ce serait un geste fort pour impulser une véritable dynamique d’embauche dans nos régions. Quant à la restriction du dispositif aux seules entreprises du BTP et à celles pour lesquelles la loi de programme prévoit des exonérations de charges spécifiques, elle n’est pas acceptable.

Je regrette de ne pouvoir sous-amender la proposition gouvernementale, car je demande que le congé de solidarité puisse être prorogé de deux ans et que la contribution maximale de l’État soit portée à 80 %. Ce sont des suggestions tout à fait réalistes que nous pourrions concrétiser à la faveur d’une suspension de séance. Car, comme le disait Napoléon Ier, ce n’est qu’une fois la décision prise qu’il faut faire entrer les juristes. Nous sommes prêts, Monsieur le ministre, à vous aider à gagner cet arbitrage favorable pour l’outre-mer.

M. René-Paul Victoria - Bertho Audifax et moi-même avons, avec d’autres élus de tous bords, beaucoup œuvré pour que le congé de solidarité soit prorogé. Je suis donc reconnaissant au Gouvernement d’avoir répondu à nos sollicitations. Le dispositif est évidemment perfectible mais le délai supplémentaire d’un an permettra de l’évaluer et d’examiner son éventuelle extension. À la Réunion, plus de 3 000 jeunes ont ainsi été embauchés. Cet amendement permettra à d’autres de s’insérer dignement dans la société par le travail et ceux qui sont en âge de partir pourront le faire dans de bonnes conditions. Merci, Monsieur le ministre, pour cet amendement !

L'amendement 249, mis aux voix, est adopté.

M. René Dosière – Rappel au Règlement fondé sur l’article 88, alinéas premier et 2, relatif à la procédure d’examen des amendements. Trois amendements viennent de nous être soumis, dont un du Gouvernement. La commission n’ayant pu les examiner, M. le rapporteur s’est exprimé à titre personnel. Or, cet article de notre Règlement dispose que la commission doit être en mesure de se réunir pour donner son avis. J’ajoute que nous avons décidé, dans le cadre de cette discussion budgétaire, d’avancer la date limite de dépôt des amendements de manière à organiser au mieux nos débats. Seul le Gouvernement peut se soustraire à cette obligation, mais quid des deux autres amendements ?

M. le Président – Acte vous est donné de votre rappel au Règlement.

M. le Rapporteur spécial - Je comprends M. Dosière, mais la mission Outre-mer a été examinée en commission le 4 octobre et le long délai qui s’est écoulé jusqu’à l’examen en séance publique explique cette situation un peu particulière.

Mme Christiane Taubira - Le Gouvernement pourrait quant à lui s’efforcer de déposer ses amendements dans des délais raisonnables, à moins qu’il ne témoigne ainsi de son manque d’intérêt pour nos débats.

M. le Président – Nous en avons terminé avec l’examen des crédits relatifs à l’outre-mer.

La séance, suspendue à 18 heures 5, est reprise à 18 heures 20.

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politique des territoires

M. le Président – Nous abordons l’examen des crédits de la mission Politique des territoires.

M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial de la commission des finances - La mission Politique des territoires se caractérise par l’évolution permanente de son périmètre, ce qui rend son évaluation difficile. On trouve une illustration de ce phénomène dans la réorganisation de l’ex-Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale – la Datar – en Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, qui a elle-même intégré l’ancienne mission interministérielle aux mutations économiques. De même, l’Agence française pour les investissements internationaux se rapproche d’UbiFrance. La mission peine donc à trouver sa cohérence, et l’instabilité de son rattachement ministériel n’y aide pas. De fait, la politique en faveur de l’aménagement du territoire a été successivement rattachée au ministre de la fonction publique, de la réforme de l’État et de l’aménagement du territoire en 2003 et 2004, au ministre de l’équipement et des transports et à son secrétaire d’État à l’aménagement du territoire en 2005, et enfin au ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, à son ministre délégué à l’aménagement du territoire et au ministre de l’équipement et des transports pour 2006 et pour 2007.

Je plaide donc en faveur de périmètres ministériels plus constants et inscrits dans la Constitution ou, au moins, en faveur d’une loi organique garantissant la continuité de l’action gouvernementale. J’appelle aussi à mieux stabiliser la mission pour rendre plus claires les dépenses d’aménagement du territoire, ce qui contribuera à accroître leur efficacité et permettra de les évaluer plus exactement d’un exercice à l’autre.

Le budget de la mission Politique des territoires devrait s’élever, en 2007, à 643 millions en autorisations d’engagement et à 612,5 millions en crédits de paiement. Hors programme Tourisme, pour lequel la commission des finances a souhaité conserver un rapporteur spécifique, les montants devraient être, respectivement, de 528,9 et de 556,8 millions. Le périmètre ainsi défini comprend quatre programmes.

Le programme Aménagement du territoire absorbe près de la moitié de ces crédits à lui seul. Si les autorisations d'engagement sont en baisse de 20 %, les crédits de paiement progressent de 1,45 %. Au fil des ans, l’écart s’est en effet creusé entre autorisations d’engagement et crédits de paiement – il était de 67 millions en 2005 et de 100 millions en 2006. Il en est résulté de fortes tensions dans le financement de certains projets. De nombreux élus locaux, dont des parlementaires – M. Carrez, M. Michel Bouvard, M. Trassy-Paillogues… – s’en sont rapidement alarmés et, en ma qualité de rapporteur spécial de ce budget, je me suis fait leur interprète auprès du Gouvernement, car cette situation n’était pas sans conséquences sur certaines politiques ou certains organismes d’une particulière importance – la politique de la montagne, les parcs naturels régionaux, les projets concernant Massy-Saclay, Seine amont et Seine aval, Saint-Étienne, l’agglomération lyonnaise, Marseille Euroméditerranée…

Le Gouvernement en a tiré certaines conséquences dès les premiers mois de 2006, « dégelant » en mai la réserve de précaution constituée sur les crédits du programme. Cette mesure a rendu disponibles 19,1 millions en autorisations d'engagement et 13,8 millions d'euros en crédits de paiement, mais cela n'a cependant pas suffi à combler les besoins spécifiques du FNADT. Aussi, un décret d'avance, le 1er août 2006, a ouvert 24 millions de crédits de paiement supplémentaires au profit du programme Aménagement du territoire. Cet apport, bienvenu, a permis d'éviter une crise de trésorerie mais c’était trop peu pour rattraper un écart de plusieurs années. J’appelle donc l’attention du Gouvernement sur les conséquences de cette situation, qui demande une réponse proportionnée. Tous les élus concernés se féliciteraient que vous puissiez la leur apporter dès aujourd’hui, Monsieur le ministre. Pour remédier aux retards pris, singulièrement notamment au cours de la période 2000-2002, comme l’ont noté MM. Bonrepaux et Launay, le volet territorial des contrats de plan État-régions doit continuer à pouvoir être mis en œuvre en 2007 ; il faut, pour cela, user de la faculté de prorogation de ces plans prévue dès l’origine.

Le programme Aménagement du territoire a servi de cadre, en 2006, à la création des soixante-six pôles de compétitivité désormais labellisés, auquel l’État consacrera 600 millions entre 2006 et 2008. Le Gouvernement a aussi engagé en 2006 la formation de pôles d'excellence rurale, pour un investissement de plus de 607 millions. Désormais, 176 de ces pôles sont labellisés, qui seront opérationnels en 2007, et une seconde vague se prépare. Pour les pôles d'excellence rurale comme pour les pôles de compétitivité, l’État doit maintenir la capacité budgétaire d’honorer strictement ses contributions. Cela doit conduire à ne pas multiplier les projets retenus, sous peine que les crédits de paiement correspondants fassent défaut, comme c’est le cas pour le FNADT.

Rien de tout cela ne remet en cause la poursuite d'une politique dynamique au service de la compétitivité des territoires, mais aussi de la solidarité entre eux, comme le montrent les retards comblés depuis 2002, en matière de téléphonie mobile et de couverture numérique du territoire.

Le programme Interventions territoriales de l'État est doté de 78,9 millions en autorisations d'engagement et de 68 millions en crédits de paiement. Il s’agit d’une sorte de mosaïque d'interventions régionales si variées qu’il est presque abusif de considérer cet ensemble comme un programme. Non seulement la fongibilité des crédits n'y joue qu'au sein des actions prises isolément, mais ces diverses interventions pourraient aussi bien trouver leur place au sein d'autres missions, dans d’autres programmes qui ont le même objet au sens de la LOLF : programme Prévention des risques et lutte contre les pollutions pour la préservation de la qualité de l'eau en Bretagne, programme Accueil des étrangers et intégration pour l'accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes, programme Gestion des milieux et biodiversité pour le plan gouvernemental sur le Marais poitevin...

Après avoir constaté, à regret, les fluctuations du périmètre budgétaire de la mission, j’en appelle aussi au respect intégral de la lettre de la LOLF.

M. Jean Launay - Très bien !

M. le Rapporteur spécial - Le programme Aménagement, urbanisme et ingénierie publique présente d'autres difficultés, quatre de ses six actions n’étant dotées d'aucun crédit. L'essentiel des agents qui travaillent à ce programme appartiennent en effet aux services déconcentrés, aux directions départementales de l'équipement. Or, du fait du transfert du réseau routier national aux collectivités territoriales, ces services sont en complète réorganisation. Une fois celle-ci achevée, 90 % des activités des DDE devraient correspondre à des tâches confiées par la direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction. Dès la prochaine loi de finances, il devrait donc être possible d’en finir avec cette présentation… particulière.

La dotation du programme Aménagement, urbanisme et ingénierie publique sera de 85,1 millions en autorisations d'engagement et d’autant en crédits de paiement. Elle diminue de 5 %, Cergy-Pontoise et Saint-Quentin-en-Yvelines perdront leur statut de villes nouvelles. Rappelons qu'un quart des logements construits en Île-de-France l’est dans le cadre des grandes opérations d'urbanisme de ce programme.

L’an dernier, nous avions supprimé par amendement deux millions de crédits destinés à la création d'établissements publics fonciers. C’était justifié puisque les deux établissements prévus ont vu le jour grâce aux seules dotations des collectivités territoriales concernées et à des emprunts gagés sur le potentiel fiscal de la taxe spéciale d’ équipement qui leur sera affectée.

Le programme Information géographique et cartographique a acquis une notoriété spectaculaire en 2006, grâce à l'ouverture par l'IGN du site Géoportail, qui donne accès à des images de meilleure qualité que celles d’un site fameux développé aux États-Unis. Conformément à mon amendement, adopté l’an dernier, le responsable du programme est désormais la directrice de la Recherche et de l'animation scientifique et technique du ministère de l'équipement ; ainsi la supervision du budget revient, très logiquement, à l'autorité de tutelle de l'IGN.

Le regroupement sur le site de Saint-Mandé permet la mise en vente du siège de Paris. L'IGN doit poursuivre sa mutation, à l’évidence positive. Sa dotation passera en 2007 à 75,5 millions. Il conviendra de vérifier qu’il atteindra bien comme prévu un taux de ressources propres de 51 % en 2007, contre seulement 45 % en 2006.

La mission Politique des territoires propose finalement, malgré des contours imparfaits, une politique d'envergure au service de l'aménagement du territoire. Mais les crédits de paiement doivent être en rapport avec les ambitions affichées, notamment en ce qui concerne le FNADT. Si le Gouvernement peut, à l'occasion de ce débat budgétaire, répondre aux inquiétudes dont je me fais l'interprète, l’Assemblée aura toutes les raisons d'adopter les crédits de la mission Politique des territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le tourisme – En premier lieu, je salue les notables avancées que constituent, pour la lisibilité de votre politique, l'intégration de diverses missions au sein des trois opérateurs que sont Maison de la France, ODIT France et l’Agence nationale du chèque vacance, la tenue effective des comités interministériels et la tenue régulière des Assises nationales, la codification des textes récents sur le tourisme, et la création du Conseil national du littoral.

Les dotations du budget du tourisme augmentent de 7 % en crédits de paiement et de 9 % en autorisations d'engagement. On ne peut que s'en réjouir, particulièrement pour l'action Promotion de la France et de ses savoir-faire, dotée de 41 millions en crédits de paiements, et pour le GIE Maison de la France, dont les crédits augmentent de 17 %. À ce propos, je félicite la direction de Maison de la France pour avoir insufflé une dynamique nouvelle dont on peut mesurer les effets positifs.

En revanche, la dotation de l'action Économie du tourisme diminue d’un million, ce qui se traduit par une réduction regrettable des moyens alloués aux contrats de plan et à ODIT France dont l'excellent document, Offre touristique, constitue une remarquable base de données et de propositions.

Pour le contrat de plan État-régions 2000-2006, les engagements de l'État ne seront pas tenus et 7,3 millions seulement seront affectés au paiement d'une partie de ses dettes. Comment comptez-vous apurer l'ensemble de la dette relative aux opérations engagées ou déjà réalisées ?

Dans les futurs contrats 2007-2013, seuls les pôles d'excellence rurale, excellente initiative certes, et le volet « développement durable » sont, pour l'instant, annoncés au titre de l'économie du tourisme, avec 1,4 million en crédits de paiement et 5,8 millions en autorisations d'engagement. C’est encore bien limité. Lors de votre audition par la commission des affaires économiques, vous avez indiqué que de nouvelles pistes venaient d'être ouvertes par le Premier ministre, et que les statistiques, le tourisme durable et le tourisme à vocation sociale figureraient également dans les contrats. Nous fondons beaucoup d'espoir sur ces perspectives.

En ce qui concerne l'action Accès aux vacances, nous regrettons, comme l'année dernière, l'absence de toute ligne budgétaire pour le programme de consolidation des hébergements du tourisme à vocation sociale. La situation est très préjudiciable, intenable même. Et les deux millions de fonds de concours de l'ANCV ne pourront y remédier.

Par ailleurs, sur ce programme, l’État doit encore plus de 16 millions, dont 4,9 millions à des associations de tourisme qui en sont très handicapées. La commission des finances a adopté à ce sujet un amendement de MM. Terrasse et Bouvard qui prévoit le redéploiement de 4,9 millions du programme Interventions territoriales de l'État vers le programme Tourisme. Si nous n’avons pas l’assurance que ces crédits, absolument nécessaires, figureront au collectif budgétaire de fin d'année, nous ne pourrons que soutenir cet amendement.

Je voudrais dire enfin ma préoccupation quant à trois domaines que je considère comme les « fondamentaux » de notre économie touristique : l'observation, la formation et l'organisation territoriale.

L'observation nécessiterait beaucoup plus de moyens, le renforcement des partenariats publics et privés et davantage de cohérence dans les méthodes employées par l'État et les collectivités.

Les formations supérieures pâtissent de l'absence d'une filière « tourisme » et de la quasi-inexistence de la recherche dans ce domaine.

M. François Sauvadet - C’est vrai.

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis - Enfin, notre organisation territoriale ne permet ni de mobiliser tout le potentiel de développement économique ni de consommer au mieux, au bénéfice du tourisme, des fonds publics dont on peut estimer le montant, crédits européens, crédits interministériels et crédits des collectivités inclus, peuvent être estimés à près de 2 milliards.

Comment obtenir un « mieux d'État » et une meilleure coordination entre les politiques régionales et départementales, entre les communes et leurs intercommunalités ? Comment donner aux communes à vocation touristique les moyens de renforcer leur pouvoir d’attraction et leur rayonnement économique ? De la réponse à ces questions essentielles dépend l'avenir de notre industrie touristique.

Toutefois, compte tenu des avancées que j’ai mentionnées et de l'augmentation globale des crédits, je propose à l’Assemblée de suivre l'avis de la commission des affaires économiques et d'adopter ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jacques Le Nay, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les interventions territoriales de l’État et pour l’information géographique et cartographique Pour la politique de l'aménagement du territoire, l’horizon s’éclaircit un peu. L'an dernier, on évoquait un tarissement des fonds structurels : grâce à l'action déterminée du Gouvernement, la France bénéficiera de 12,7 milliards sur la période 2007-2013 et de plus de 1,8 milliard pour 2007. On envisageait aussi la prolongation d’un an des contrats de plan. Finalement, l'échéance initiale pourra être respectée, grâce à l'effort exceptionnel consenti par l'intermédiaire de l'Agence de financement des infrastructures de transport, ce qui évite tout décalage avec la programmation prévue à l'échelon européen. Le taux d'exécution devrait dépasser 81 % à la fin de l'année, soit plus que celui de la précédente génération à la même échéance. De même, dans le projet de réforme des aides à finalité régionale, il n'était plus question de prime à l'aménagement du territoire après 2007. Grâce à une action déterminée auprès de Bruxelles, elle sera pérennisée, même si elle doit être beaucoup plus ciblée ; 38 millions sont prévus à cet effet dans le projet de loi de finances pour 2007.

Enfin, la situation financière est assainie. Louis Giscard d'Estaing et moi-même nous préoccupions particulièrement de l'exécution des crédits du FNADT, en raison du décalage déjà ancien entre autorisations de programme et crédits de paiement. Grâce à un abondement de 24 millions par décret d'avance cet été et à une enveloppe supplémentaire de 100 millions, ce passif va être apuré. Dans ces conditions, il est raisonnable d’annoncer pour le programme Aménagement du territoire des crédits de paiement en hausse de 1,5 %, pour atteindre 300,2 millions, tandis que les autorisations d'engagement sont revues à la baisse, à 317,5 millions, afin d’éviter de créer des dettes nouvelles. Il importe cependant de ne soumettre à aucune régulation budgétaire les crédits de paiement prévus.

Le programme Aménagement du Territoire affiche des priorités très fortes. Les crédits de l'action Attractivité et développement économique, qui financent les pôles de compétitivité, l'action de prospection des investissements étrangers de l'Agence française des investissements internationaux et l'accompagnement des mutations économiques, augmentent de 25 % en AE et de 15 % en CP. Dans le cadre des pôles de compétitivité, 165 projets de recherche et développement ont pu être soutenus depuis l'an dernier et d'autres vont l'être d'ici peu. La simplification des procédures a favorisé cette dynamique. À ce propos, où en est la réflexion du Gouvernement sur l'évolution du dispositif d'exonérations fiscales ? D'autre part, comment se fait-il que la moitié des crédits d'aide à l'investissement des pôles qui se constitueront en 2007 ne transite pas par le fonds interministériel unique ? Enfin, la nouvelle agence d'évaluation de la recherche pourrait sans doute évaluer l'efficacité du partenariat public-privé dans ces pôles

Le programme Aménagement du Territoire vise à soutenir les territoires les plus innovants comme ceux qui sont en pleine reconversion – ce sont parfois les mêmes, comme le bassin d'emploi d'Angers, qui bénéficie depuis 2003 d'un contrat de site et a été labellisé comme pôle. La fusion de la DATAR et de la Mission interministérielle sur les mutations économiques au sein de la DIACT permettra de renforcer l'accompagnement des mutations économiques, au-delà du seul suivi des contrats de site. Je m'étonne cependant que la mission de veille, assurée jusqu'ici par la MIME, soit confiée à un pôle interministériel, dont le secrétariat n'est pas assuré par la DIACT, alors que pour être pleinement efficace, l'accompagnement territorial doit largement précéder l'annonce de la restructuration. Comptez-vous associer davantage l'AFII à l'accompagnement des mutations économiques, afin de mieux intégrer en amont la stratégie des investisseurs étrangers ?

S'agissant de l'action Développement territorial et solidarité, le Gouvernement a fait le choix de prolonger d'un an le volet territorial des contrats de plan, afin de tenir compte de la signature tardive de nombreux contrats de pays. Cependant, les nouveaux projets déjà prêts pourront être signés dans le cadre de la nouvelle programmation dès 2007.

Les pôles d'excellence ruraux constituent déjà un succès, Monsieur le ministre. Vous nous avez indiqué en commission que le nombre de projets retenus serait porté de 120 à 200 au cours de la deuxième vague de labellisation. Pouvez-nous nous repréciser l'engagement financier associé à cette deuxième vague, ainsi que la partie prise en charge par le FNADT ?

Par ailleurs, je ne peux qu'approuver la labellisation des relais de service public, car la mutualisation de ces services, si utiles à la population, ne doit pas se faire au détriment de la qualité.

Vous avez fait de la résorption de la fracture numérique une de vos priorités. Les nouvelles technologies de l'information sont en effet cruciales pour l'attractivité des territoires, pour le maintien des populations en zone rurale et pour l'accès aux services publics. Le Gouvernement a annoncé en juillet dernier un plan de couverture en haut débit pour les zones rurales, doté de 10 millions d'euros, qui permettra d'équiper une école, une mairie ou un centre bourg. Mais se pose aussi la question des communes partiellement couvertes. L'attribution des licences Wimax constitue une première réponse, les communes pourront-elles avoir une connaissance précise de la couverture des zones blanches par les opérateurs retenus et du calendrier prévu pour l'installation de leurs équipements ?

La forte baisse des crédits du programme Interventions territoriales de l'État n'est qu'apparente, dans la mesure où elle est compensée par la progression considérable des crédits extra-budgétaires issus de plusieurs opérateurs, dont le principal est l'AFITF. Au total, ce sont bien 174 millions d'euros en AE et 111 millions d'euros en CP qui viendront alimenter ce programme. L'évolution de ces crédits reflète notamment une montée en charge du programme d'investissement pour la Corse, alors que le programme Bande rhénane en Alsace semble accuser du retard. Les difficultés rencontrées cette année pour articuler l'action Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes et les crédits ministériels de la mission Solidarité et intégration démontrent l’absolue nécessité de plans d'action qui soient réellement à vocation interministérielle. À ce titre, Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer si un décret de transfert entre le ministère de la cohésion sociale et le ministère de l'intérieur est intervenu pour permettre au préfet de région de faire face aux flux de population supplémentaires ?

Le programme Information géographique et cartographique est désormais quant à lui, sous la responsabilité du ministère de l'équipement, et non plus du directeur de l'IGN. Il comprend dorénavant, outre la subvention de l'IGN, les crédits du Conseil national d'information géographique, pour 80 000 euros. Ce changement de structure replace l'État dans un rôle de maître d'ouvrage et l'IGN dans celui de maître d'œuvre. La subvention de l'IGN est stable. Pour la première fois, le montant des recettes commerciales de l'établissement devrait dépasser en 2007 celui de la subvention de l'État.

Le succès du site Geoportail devrait favoriser la diffusion du référentiel à grande échelle, nouvelle carte numérique du territoire. Je m'étais interrogé l'an dernier sur la coexistence de sa composante parcellaire et du plan cadastral informatisé. Je crois avoir été entendu, car un article du projet de loi de simplification du droit permettra l'utilisation de la base de donnée parcellaire par les services du cadastre.

En conclusion, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption de ces trois programmes et je vous invite, mes chers collègues, à le suivre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jacques Bobe, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour l’aménagement, l’urbanisme et l’ingénierie publique - Au sein de la mission Politique des territoires, les crédits de paiement du programme Aménagement, urbanisme et ingénierie publique – AUIP – passent de 90 à 85 millions. Cette diminution de 5 % environ porte essentiellement sur les crédits de fonctionnement de la direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction. Elle est atténuée par une perspective d'abondement de 10 millions d'euros de fonds de concours. Le budget est donc maîtrisé sans préjudice pour les priorités de l'État.

Ces crédits ne constituent qu'une partie de ceux qui concourent au programme. Ainsi, s’agissant des DDE en charge de l’action quotidienne de l'État, les crédits figurent pour la deuxième année consécutive au sein de la mission Transports. Le projet annuel de performances comporte néanmoins une présentation récapitulative de l’ensemble de ces crédits, soit 1,3 milliard d'euros, dont 1,2 au titre des DDE. Bref, nous examinons aujourd'hui 6,5 % des crédits consacrés à l'AUIP !

Cette présentation n'est cependant qu'indicative et correspond simplement à l'état de la réflexion du ministère sur la ventilation des tâches de ses personnels entre programmes. Autrement dit, le périmètre budgétaire du programme n’est toujours pas arrêté. Dans ces conditions, le contrôle parlementaire ne peut pas encore être assuré de façon satisfaisante. Il nous a été promis que l'ensemble serait en ordre de marche pour l'automne 2007. Le ministre pourrait-il nous le confirmer ?

Au nombre des actions conduites, il faut citer l'achèvement du réseau des agences d'urbanisme. Douze agences sur les quinze prévues en 2001 ont été créées ; des désaccords entre acteurs de terrain empêchent la création des autres. Les crédits de l'État consacrés aux 49 agences existantes restent stables.

Le nombre des SCOT, des schémas de cohérence territoriale, continue de croître. Le taux de couverture des territoires urbains devrait ainsi atteindre 40 % en 2007. Cette progression ne doit cependant pas masquer la question du statut de ces grands documents d'aménagement, SCOT ou directives territoriales d'aménagement, par rapport aux autres documents, plans locaux d'urbanisme et plans de prévention des risques. Le Gouvernement pourrait-il nous indiquer si des réflexions sont engagées sur ce point ?

En 2005, 13 524 emplois et 11 345 logements auront été créés grâce à huit grandes opérations d'urbanisme, concernant notamment les villes nouvelles de Marne-la-Vallée et de Sénart, mais aussi Marseille, avec Euroméditerranée, et Saint-Étienne. Ces opérations apparaissent d'ores et déjà comme une réussite. Trois grandes opérations nouvelles sont engagées en Île-de-France. Il faut se féliciter de cette relance de la politique des pôles urbains, expression d'une urbanisation à la fois volontaire et concertée.

En matière d'ingénierie publique, les DDE n'apportent plus, depuis le 1er janvier 2006, une assistance technique gratuite qu'aux communes de moins de 10 000 habitants et aux EPCI de moins de 20 000 habitants. Au-delà, l’État est censé se limiter à une assistance à maîtrise d'ouvrage. Mais, outre que les communes ou EPCI nouvellement exclus du champ d'assistance de l'État n'ont pas toujours dans leurs services les compétences nécessaires, il arrive dans certaines zones qu’ils ne trouvent tout simplement pas de prestataires capables d'accomplir les tâches autrefois assumées par les DDE.

Pour faciliter la transition, la Direction générale de l'urbanisme a entrepris des actions de formation des services municipaux, ainsi que la réalisation de typologies des territoires, de façon à adapter les compétences des DDE aux types d'assistance demandés. Il semble toutefois que cela nécessite un accroissement et une diversification des qualifications requises au sein des DDE. Des mesures vont-elles être prises dans ce sens ?

La réforme du droit des sols tendait à simplifier ce droit et à faire disparaître des « nids à contentieux ». Son entrée en vigueur est prévue pour juillet 2007. Le début de l'été étant à la fois une période où le nombre des demandes augmente et le temps des congés pour les services instructeurs, il vaudrait mieux, de l'avis des maires, la reporter à la fin de l'été 2007. Qu'en pense le Gouvernement ?

En conclusion, l’évolution des crédits du programme AUIP apparaît satisfaisante et bien maîtrisée au regard des priorités de l'État. Tout en constatant que des étapes importantes, liées notamment à l'évolution des DDE, restent encore à franchir en 2007, la commission des affaires économiques a donc émis un avis favorable à leur adoption. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Pascal Terrasse, rapporteur spécial de la commission des finances pour le tourisme – Je vous prie tout d’abord d’excuser mon retard. En présentant les dotations du tourisme dans ce dernier budget de la législature, je suis obligé de souligner que ce très petit programme a eu à souffrir depuis quelques années d’un manque cruel de crédits, l’insuffisance étant régulièrement aggravée – sauf, peut-être, au cours du présent exercice – par des mesures de gel et d’annulation, dénoncées à plusieurs reprises par la Cour des comptes.

Le secteur du tourisme, qui contribue pour 6,4 % au PIB et emploie plus de 4 % de notre population active, nécessiterait un soutien plus affirmé. Si ses potentialités, en termes de création d’emplois et d’aménagement du territoire, sont considérables, les résultats sont en deçà des espérances légitimes. Tandis que le tourisme mondial a renoué avec une croissance supérieure à 5 %, la France ne cesse de perdre du terrain : le gain de clientèle internationale en 2005 dépasse à peine 1 %, quand l’Espagne connaît une augmentation de 6 %, et alors que la moyenne européenne est à 4,3 %. De même, les recettes progressent de 3,5 %, soit bien moins qu’aux États-Unis ou en Espagne. Les dépenses des Français à l’étranger continuent par ailleurs de réduire l’excédent du poste tourisme de notre balance des paiements, passé de 14 à 8,9 milliards d’euros entre 2000 et 2005. Quant aux clientèles européennes, qui constituent plus de 84 % de la clientèle étrangère et sont celles dont la répartition est la plus harmonieuse sur le territoire, elles sont en recul. Les destinations concurrentes de la France ont pris conscience des enjeux et y consacrent des moyens très importants !

Dans notre pays, au contraire, la prise de conscience tarde à se traduire en termes budgétaires. Des efforts de promotion ont toutefois été réalisés cette année, sous l’effet des événements : les troubles dans les banlieues et le chikungunya faisaient peser un risque sur le tourisme, et c’est donc à l’occasion de la signature des contrats de croissance que les crédits du secteur ont été revalorisés : 10 millions d’euros ont ainsi été promis, dont 2,6 millions sont des crédits pour 2006 de votre ministère, qui avaient été mis en réserve. Ces crédits sont nécessaires tant pour la relance de la destination France que pour le plan qualité tourisme ou la refonte du classement hôtelier. Ils restent cependant très insuffisants, en particulier s’agissant de l’hôtellerie familiale pour laquelle il faudrait un véritable plan de sauvegarde. Un récent décret pour l’adaptation des établissements au handicap va se révéler particulièrement coûteux dans certaines régions, et un accompagnement sera donc nécessaire, faute de quoi la situation de cette hôtellerie familiale risque de se dégrader fortement.

Les crédits du programme Tourisme se monteront en 2007 à 86 millions d’euros en autorisations de programme et à 81,6 millions en crédits de paiement. C’est une hausse, respectivement, de 8 et 7 %, mais qui ne représente, pour les CP, que 5,6 millions, ce qui ne couvre même pas l’amorce du plan d’apurement des dettes, de huit millions. L’augmentation profite surtout aux opérations de promotion à l’étranger, pour cinq millions. Les crédits de personnel augmentent, quant à eux, de 1,3 million. Le travail remarquable et reconnu d’un organisme comme Maison de la France nécessiterait des moyens plus importants ! Les évaluations menées par la commission des finances montrent que, sur ce terrain aussi, la France est en recul par rapport à ses concurrents européens, nettement plus actifs.

Les crédits des actions 2 « Économie touristique » et 3 « Accès aux vacances » diminuent. En ce qui concerne l’action 2, le levier le plus important de la politique touristique dans les territoires est constitué par les contrats de plan État-régions, dont la programmation pour 2000-2006 vient de s’achever, laissant une dette de 35,275 millions d’euros. On ignore la part du tourisme dans ce déficit, de même que la place que ce secteur occupera dans les nouveaux contrats de projets. Il avait au départ été écarté par le Premier ministre, qui a ensuite, semble-t-il, changé d’avis. Dans ma région, je vois comment ces contrats fonctionnent, et je pense que le tourisme n’est pas assez pris en compte.

M. Jean-Pierre Dufau - C’est le parent pauvre !

M. Pascal Terrasse, rapporteur spécial - Des reconversions sont nécessaires. La chance de nos sites et de nos paysages, c’est qu’ils ne sont pas délocalisables. Les touristes, eux, le sont et, de fait, ils vont ailleurs.

Les crédits pour les nouvelles programmations s’élèvent à 7,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 1,9 million en crédits de paiement : 44 % des 400 pôles d’excellence rurale validés sur l’année concernant le tourisme, cela nous donne à peine 6 000 euros par an pour chaque PER !

Pour la troisième année consécutive, aucun crédit n’a été inscrit pour la consolidation du tourisme social, malgré les engagements pris par l’État à l’égard des associations, et en dépit du fait qu’elle représente l’élément essentiel de l’action 3. Pour l’exercice 2005, à la demande unanime des parlementaires, des crédits ont été ouverts en loi de finances rectificative. Une telle solution étant devenue impossible pour 2006 du fait de la LOLF, le ministère du tourisme devait faire appel à un fonds de concours de l’Agence nationale des chèques-vacances, mais cette procédure n’a pas fonctionné. Et votre ministère est aujourd’hui redevable aux associations de 11,2 millions d’euros, dont 4,9 millions correspondent à des factures exigibles depuis deux ans. Sans parler des dettes du volet social des contrats de plan ! L’existence de nombreuses structures s’en trouve menacée. Il y va de la crédibilité de l’État, et la commission des finances a donc adopté à l’unanimité un amendement, que j’ai cosigné avec Michel Bouvard, visant à abonder les crédits de ce programme. Il s’agit d’un secteur irremplaçable pour la démocratisation des vacances et la revitalisation de nos territoires.

Mes chers collègues, je vous invite à adopter les crédits du programme Tourisme, compte tenu de l’amendement que nous présenterons. À titre personnel, je voterai conformément au choix de mon groupe (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Daniel Garrigue - La politique d’aménagement des territoires, qui avait fait les grands jours de la DATAR, a connu ensuite une certaine difficulté d’être, entre la mise en œuvre de la décentralisation et la montée en puissance des programmes européens.

M. Jean-Pierre Dufau - C’est le moins qu’on puisse dire !

M. Daniel Garrigue - Ces dernières années ont été cependant marquées par une volonté de réappropriation de cette politique par l’État, ce dont nous nous félicitons, en souhaitant que ce soit durable. Cette volonté s’est d’abord affirmée par la recherche d’une plus grande cohérence, en inscrivant dans une durée identique – 2007-2013 – les futurs contrats de projet entre l’État et les régions, et les programmes des fonds structurels européens, axés les uns et les autres autour des mêmes priorités : la compétitivité, l’innovation et le développement durable.

Un deuxième élément positif est le souci du réalisme dans la mise en œuvre des moyens, avec, en particulier, la montée en puissance des crédits de paiement du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, qui permet de respecter les engagements pris, compte tenu des 100 millions supplémentaires annoncés par le Premier ministre pour le futur collectif budgétaire.

Comme l’a observé Louis Giscard d’Estaing, si les crédits de paiement permettent de tenir les engagements antérieurs, il est important que de nouveaux engagements soient pris pour assurer le renouvellement des projets. Plutôt que de baisser les autorisations d’engagement, mieux vaudrait rechercher le rythme de croisière approprié !

Troisième élément : la création d’outils novateurs, comme les pôles de compétitivité et les pôles d’excellence rurale. La politique à l’égard des territoires ruraux est une part importante de la politique des territoires et 300 pôles d’excellence rurale devraient donc voir le jour d’ici à la fin de l’année.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire - 400 !

M. Daniel Garrigue - L’augmentation des dotations de solidarité rurale, qui bénéficient aux bourgs centres, participe du même esprit, tout comme la loi sur le développement des territoires ruraux. La politique des services publics en milieu rural passe par la réaffirmation du rôle des préfets, voulue par la loi de 2004 et qui a permis un effort d’information et de concertation indispensable et par l’attention portée aux services publics de base – école, mais aussi poste, avec le maintien de l’ensemble des points de contact. Une importance nouvelle est attachée aux services aux personnes, notamment en matière de santé, et à la réduction de la fracture numérique.

J’appelle cependant votre attention, Monsieur le ministre, sur la situation particulière des villes moyennes. Rarement parties prenantes dans les pôles de compétitivité, elles sont également écartées des pôles d’excellence rurale en raison de leur nombre d’habitants. Elles n’en constituent pas moins un tissu économique et social qui participe de la spécificité du territoire français. L’accroissement démographique et l’augmentation du PIB dans les dernières années leur doivent beaucoup. Elles ont d’ailleurs bénéficié d’un soutien important des pouvoirs publics, mais elles ne sont pas suffisamment prises en considération dans les futurs contrats de projet. Or elles ont encore besoin d’être soutenues pour assurer leur désenclavement et développer leurs infrastructures.

Sous ces réserves, je vous apporte, au nom du groupe UMP, le soutien que mérite ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont – Stables en 2006, les crédits du programme tourisme affichent pour 2007 une augmentation de 8 % en autorisations d'engagement et de 7 % en crédits de paiement. Cette hausse doit cependant être relativisée, le Gouvernement ayant décidé de reconduire presque à l'identique la réserve de précaution constituée en 2006, ce qui implique la mise en réserve de 0,15 % des crédits de paiement et autorisations d'engagement ouverts au titre des dépenses de personnel, et de 5 % aux autres titres.

On ne peut que souscrire à l’augmentation des crédits d’un secteur qui procure quelque 2 millions d'emplois et réalise un chiffre d’affaires de l'ordre de 70 milliards d'euros, même si nos résultats subissent un léger tassement.

S’agissant des priorités que vous avez définies, je me félicite de la poursuite des actions de promotion à l'étranger de la destination « France », de la contribution au développement du plan « qualité tourisme », destiné à favoriser la croissance des activités touristiques, et de l'augmentation des moyens consacrés à l'accès aux vacances, volet qui avait été délaissé ces dernières années. Rappelons que quatre Français sur dix ne partent pas en vacances. Espérons que la création d'un véritable pôle social du tourisme par la fusion, d'ici la fin de l'année, de l'Agence nationale des chèques vacances avec le GIP « Bourse Solidarité Vacances » contribuera à plus d'équité. « Si l'accès aux vacances se démocratise progressivement, note l’INSEE dans une étude publiée le 26 juillet, les écarts restent importants selon les niveaux de vie, 54 % des Français les moins aisés ne partant pas en vacances, la proportion étant seulement de 16 % pour les autres. » Sur les 21 millions de nos concitoyens qui ne partent pas en vacances, 8 millions y seraient contraints pour des raisons financières.

Parce que la proportion de non partants est passée de 33,9 % en 2002 à plus de 34,9 % en 2005, ce qui témoigne d’une dégradation du contexte socio-économique, il est impératif de jouer sur les deux leviers de l'aide à la personne et de l'aide à la pierre. Or le rapport entre le nombre de lits rénovés et le financement apporté par l'État le dialogue social met en évidence une baisse de ce dernier. On comprend que les acteurs du tourisme social s’inquiètent de l'absence de moyens alloués au plan de consolidation du patrimoine du tourisme social, obligeant les associations et les collectivités locales à assumer la charge. J’espère que vous pourrez nous apporter une réponse satisfaisante, car il n'y a pas d'autre alternative que de renoncer à rénover, c'est-à-dire de condamner les structures existantes, ou d’entreprendre les travaux avec la contrainte d'un autofinancement plus important – qui se répercutera sur les prix de séjour.

Pour les associations du tourisme social, cette situation est d'autant plus préoccupante que l'État et l'Agence nationale des chèques vacances leur doivent plus de 18 millions d'euros pour des opérations de rénovation déjà réalisées ou engagées. Ces retards mettent en péril l'existence même d'un certain nombre de ces associations, qui représentant 30 000 emplois et contribuent à l'économie locale pour au moins un milliard d'euros. Faute de réponse positive de votre part, nous adopterons l’amendement déjà évoqué.

Toujours relativement aux « impayés » de l'État le dialogue social, pouvez-vous nous apporter des précisions sur le plan programme expérimental « vacances seniors », dont la mise en œuvre a été confiée à l'UNAT lors du comité interministériel du tourisme de l'été 2004 ? Il semble qu’une partie des sommes engagées n'ait pas été réglée par l'État.

Je souhaite aussi vous faire part de l'inquiétude des acteurs locaux, qui ne comprennent pas l'absence d'un volet tourisme clairement identifié dans les prochains contrats de projets État-Région, alors que le développement touristique est présent dans les chartes de pays. Ce flou ne peut que nous interpeller.

Le groupe socialiste ne votera donc pas ce budget. Je saisis cependant l’occasion de ce débat pour saluer, à titre personnel, Monsieur le ministre délégué, la courtoisie dont vous avez toujours fait preuve à l'égard de la représentation nationale, dans le respect des convictions de chacun. Au-delà des appréciations divergentes que nous portons sur la politique du Gouvernement, vous avez été un ministre respectueux de l'opposition, ce qui n’était pas la règle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme - Merci.

M. François Sauvadet - Dernier de la législature, ce budget n’en est pas moins un budget important. Il ouvre en effet une étape, celle des contrats de projet, qui pourront, je l’espère, être signés rapidement afin qu’il n’y ait pas de rupture du soutien budgétaire – mais vous avez vous-même reconnu que l’État devait continuer à accompagner l'ingénierie des projets…

M. Jean Lassalle - Très bien !

M. François Sauvadet - C'est heureux, car les procédures ne sont pas toujours simples. Je lance donc un appel à la simplification, notamment pour les procédures qui concernent des crédits européens – je pense notamment au programme Leader. Bref, il faut concilier l’exigence de sécurité dans la mobilisation des crédits et celle de la simplification. Je réitère aussi mon appel à l’État, mais également aux régions, pour que les contrats de projet soient signés rapidement. Je sais que vous êtes dans cet état d’esprit, Monsieur le ministre, puisque vous étiez prêt, pour qu’il n’y ait pas d’interruption dans le financement, à décaler la date jusqu’à fin 2007 ou à engager de nouveaux crédits.

Vous avez été un ministre volontaire (« C’est vrai ! » sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP). Vous avez lancé des initiatives importantes comme les pôles de compétitivité, dont notre collègue Christian Blanc a été l'un des promoteurs. Vous avez aussi fait progresser une idée moderne, à savoir que les territoires ruraux n’appartiennent pas nécessairement au passé, mais sont aussi des territoires d’excellence. Le concept de pôle d'excellence rurale, qui vaut reconnaissance de ce qui a été entrepris là, témoigne d’une approche moderne de l’aménagement du territoire, qui tranche avec les conceptions passéistes tendant à opposer les villes et les campagnes. Votre vocation, Monsieur le ministre, c’est de faire en sorte que chacun ait un destin là où il habite.

Au-delà, l’avenir de nos territoires ne sera pas nettement assuré si l’on ne garantit pas à chacun un accès facile aux technologies – plus vraiment nouvelles – de l’information et la communication que représentent l’Internet à haut débit et la téléphonie mobile. Vous avez, dans ce domaine aussi, fait preuve de détermination et votre projet ambitieux de couverture totale des zones non desservies dans le courant de l’année prochaine coûtera cher.

M. Jean Lassalle - Chez moi, cela ne marche toujours pas !

M. François Sauvadet - En tout cas, il faut avancer dans cette voie sans faiblir.

J’avais de vrais doutes sur l’efficacité des zones franches dans les quartiers difficiles. L’expérience montre que le dispositif fonctionne et qu’il entraîne, le plus souvent, un retour d’activité particulièrement bienvenu. Il convient donc d’approfondir la réflexion sur les zones franches rurales, tant il apparaît parfois indispensable de traiter de manière inégalitaire les territoires les plus fragiles, pour les rendre plus attrayants dans la compétition qui les oppose à ceux que n’affecte aucun handicap. Cela pose, bien entendu, la question délicate des zonages et des politiques ciblées…

M. Michel Bouvard - Il y a déjà les ZRR !

M. François Sauvadet - Et les actions en faveur des zones de montagne, dont nul ne songe à contester le bien-fondé !

M. Michel Bouvard - Heureusement !

M. François Sauvadet - Nous sommes très attachés à la revitalisation des territoires les plus fragiles, et cela justifie que l’on envisage de « flécher » certaines actions. Je note au passage que la détermination du Gouvernement a finalement permis d’obtenir une mobilisation des crédits européens à un niveau satisfaisant.

S’agissant du maintien des services au public et de la continuité de la présence des services publics sur le territoire, les objectifs du Gouvernement ne sont pas discutables. Par contre, il est inadmissible que des postes d’agents publics, pourtant ouverts et financés, ne soient pas pourvus faute de candidats. Les pouvoirs publics doivent parvenir à convaincre leurs agents que l’on ne fait pas carrière qu’en ville et que l’affectation en zone rurale ne doit pas être ressentie comme un envoi au purgatoire. Il faut, Monsieur le ministre, trouver coûte que coûte des titulaires pour les postes à pourvoir, sinon l’objectif de présence permanente de l’État dans tout le territoire ne sera pas atteint (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF).

On a beaucoup parlé, récemment encore, du désespoir des quartiers urbains sensibles car il s’exprime souvent avec violence. De la désespérance, sourde, disséminée, silencieuse mais tenace, il y en a aussi dans nos campagnes…

M. Jean Lassalle - Oh oui !

M. François Sauvadet - Et si elle ne se traduit pas par des actes ultra-violents, elle s’exprime parfois dans les urnes.

M. Jean Lassalle – 80 % de « non » au référendum européen !

M. François Sauvadet – Une charte de présence des services au public a été élaborée sous votre autorité et je m’en félicite. Cela ne lève cependant pas toutes les interrogations. S’agissant du service postal, nous avons parfois le sentiment que la performance n’est pas vraiment au rendez-vous et une évaluation fine de la tenue des objectifs affichés nous semble indispensable. Ce n’est pas la volonté politique des uns et des autres que je conteste, mais notre capacité collective à mesurer objectivement les résultats de l’action menée. Je souhaiterais notamment que les contrats passés par l’État avec des entreprises pour remplir des missions de service public soient discutés au Parlement, de sorte qu’en cas de dysfonctionnement, les responsables de ces entreprises ne répondent plus aux élus : « On ne peut pas faire autrement ! » sans que ces derniers aient la possibilité de le vérifier.

S’agissant du tourisme, je sais qu’il existe, au sein du Gouvernement, une vraie volonté d’avancer, même si certaines mesures très attendues n’ont pas été prises. Je n’aurai pas l’indélicatesse d’insister sur la TVA dans la restauration, car la décision concerne l’ensemble du Gouvernement. S’agissant de la prévention du tabagisme passif, j’aurais préféré que l’on ne procède pas par décret. L’exemple espagnol montre que la concertation peut déboucher sur des solutions raisonnables. Par ailleurs, il est impératif de ne pas pousser à la fermeture les lieux d’animation irremplaçables que sont les bars-tabac en zone rurale. Ce sont des lieux de vie, et il faut les considérer comme tels.

Enfin, il est impératif que tous les sites touristiques deviennent rapidement accessibles à toutes les personnes en situation de handicap ou de mobilité réduite. L’accessibilité n’est pas un souci annexe mais une priorité absolue. Il faut donc aider les professionnels à investir. Lorsqu’ils ne sont pas en mesure de le faire par leurs propres moyens, la solidarité nationale doit trouver à s’exercer.

Messieurs les ministres, votre projet de budget n’est certes pas idéal. Il traduit cependant une véritable volonté politique, au travers notamment de la mesure phare des pôles d’excellence rurale, mais aussi des pôles de compétitivité et des contrats de projets. Il convient de mobiliser les moyens nécessaires pour qu’ils vivent et prospèrent. Vous vous y attachez, et nous vous en remercions.

À titre d’encouragement, nous voterons ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP).

M. Frédéric Dutoit – Je m'en tiendrai à ce qui dans ce budget concerne l'aménagement et le développement des territoires. Ce qui intéresse les Français, c'est la réalité de votre action et de ses conséquences. Or, un premier constat s'impose : alors que vous parlez de renforcer le pouvoir d’attraction des territoires et de concourir à leur développement, en réalité, vous faites tout le contraire.

Un seul exemple : celui de la situation de nos collectivités locales, condamnées aujourd'hui à l'asphyxie. Cette situation n'est pas le fruit de simples erreurs de calcul ou de quelques effets pervers, mais bien d'une stratégie délibérée d'étranglement des finances locales. Or le pouvoir d’attraction d’un territoire ne tient pas seulement à ce que vous nommez sa compétitivité, et qui traduit en fait le degré d’assujettissement des politiques économiques aux dogmes libéraux. La séduction d’un territoire est aussi – et peut-être surtout – affaire de volonté politique, de qualité des infrastructures et des services publics, de capacité à investir dans la recherche et la formation ou de garantir un cadre de vie propice au développement économique, ce qui passe par la mixité sociale et le soutien accordé aux familles et aux plus démunis.

En somme, c'est la capacité d'action des collectivités locales et le soutien accordé par l'État à leurs différents projets qui sont les seuls garants du développement économique et d'un aménagement équilibré des territoires.

Sur ce plan, votre politique se solde depuis cinq ans par un terrible échec. Les marges de manœuvre des collectivités ont fondu, et vous avez réduit l'action de l'État à quelques opérations phares, visant à faire croire que l'on pouvait faire plus avec moins.

Marseille, ma propre ville, dirigée par votre ami politique, Jean-Claude Gaudin, en subit les conséquences directes…

M. Christian Estrosi, ministre délégué Ah bon ! Mais ça va plutôt bien à Marseille !

M. Frédéric Dutoit - Surtout dans les quartiers dont je suis l’élu !

M. Christian Estrosi, ministre délégué Y aurait-il un lien de cause à effet ?

M. Frédéric Dutoit - Le rapport de la chambre régionale des comptes a révélé l'échec de votre politique, que le maire de Marseille et sa majorité relaient dans une ville en très grande difficulté.

Pour illustrer mon propos, je me bornerai à évoquer votre fameux dispositif des « pôles de compétitivité ». À Marseille, huit pôles technologiques ont été retenus, dont deux de dimension mondiale. Ce nombre important témoigne de nos atouts économiques et industriels et la constitution de ces pôles pourrait être un levier et permettre de la croissance et des créations d'emplois. Or, c’est précisément là que votre action montre ses limites. Pour vous, l'aménagement du territoire vise d'abord à mettre en compétition les territoires et à les spécialiser tout en centralisant les pouvoirs de décision. Cela vous conduit à négliger le débat et la concertation sur les moyens d'un véritable développement économique, et à privilégier des stratégies à courte vue en usant de vieilles recettes qui ont fait la preuve de leur inefficacité, telles que les exonérations de charges des entreprises sans contrepartie en termes d'emploi. Ainsi, sur 1,5 milliard, 300 millions ont été consacrés à des exonérations et seulement 400 constituent des crédits directs. Que dire de l'investissement dans la recherche, où les fameuses synergies entre entreprises et centres de recherche ne visent qu’à subordonner ceux-ci à celles-là, au détriment de l'investissement dans la recherche publique ?

Vous avez des conceptions bien pauvres de l'aménagement et du développement des territoires. Comment prétendre oeuvrer dans l'intérêt de tous quand rien n'est fait pour soutenir la croissance? Votre politique de moins-disant fiscal comme vos politiques sectorielles dans les domaines stratégiques tels que l'enseignement ou la recherche sont en évidente contradiction avec vos prétendus objectifs. Dans ces conditions, nous ne voterons évidemment pas votre budget.

M. Léonce Deprez - C’est la vingtième année que je monte à la tribune pour commenter le budget du tourisme, non que je sois particulièrement passionné par cette question mais je le suis en revanche de tout ce qui peut contribuer à créer de la vie. Je viens du Pas-de-Calais minier, ce pays noir qui a tant souffert et qui a su s’ouvrir à une vie nouvelle. Je me suis fait le défenseur de cette recherche à l’association des maires de France, à l’association France-Progrès ou ici même, à l'Assemblée nationale. Sous le gouvernement de M. Balladur, j’ai été chargé d’une mission sur le sujet et j’ai publié un rapport en 1995. Mais c’est un ouvrage que je me permets aujourd’hui de vous offrir aujourd’hui, Messieurs les ministres, où je développe l’ensemble de mes idées. Je souhaite que tous y trouvent des raisons d’espérer en l’avenir du tourisme dans notre pays.

Dans ce domaine, on n’évoque pas suffisamment les devoirs de l’État. Or, sa responsabilité est considérable. L’économie touristique colle à la peau des territoires…

M. Jean Lassalle - Très bien.

M. Léonce Deprez - …qui sont notre patrimoine commun. Générer une vie nouvelle, c’est attirer clients et touristes du monde entier ! Je suis très heureux, en dépit des menaces, qu’une véritable politique d’État ait été maintenue, notamment à travers les agréments délivrés aux collectivités territoriales.

Le premier devoir de l’État, c’est d’élever le niveau de vie : l’économie touristique implique la croissance économique et donc un pouvoir d’achat en hausse. En outre, l’État doit favoriser une organisation territoriale de l’économie touristique.

M. Jean Lassalle - Exact.

M. Léonce Deprez – S’il n’y avait pas 2 280 communes constituant de véritables pôles touristiques ou 580 stations classées, l’économie touristique serait un échec.

M. Jean Lassalle - Très bien.

M. Léonce Deprez – Il convient également d’œuvrer à un aménagement du temps afin de créer les conditions d’une économie touristiques pluri-saisonnière. Cela implique une véritable politique interministérielle, comme en témoigne d’ailleurs votre présence, Messieurs les ministres délégués à l’aménagement du territoire et au tourisme. M. Perben pourrait d’ailleurs également être là. Enfin, l’économie touristique doit avoir une dimension européenne et la France doit en être la locomotive. Les Anglais misent tout sur le secteur privé, mais nous, nous devons développer les partenariats public-privé. Sans effort public, notamment de la part des départements et des régions, il n’y aura pas d’investissements privés.

M. Jean Lassalle - Très bien. Au Panthéon !

M. Léonce Deprez – Je n’insiste pas, mais je me permets à nouveau de renvoyer à mon livre où toutes ces idées sont exposées et développées. Je voterai bien entendu le budget de cette mission.

M. Jean Launay - La mission Politique des territoires se prête à une analyse des difficultés d’application de la LOLF. En effet, s'il y a un domaine où les interventions sont dispersées et, donc, où la logique transversale de la LOLF devrait s'appliquer, c'est bien celui-ci ! Or, M. Louis Giscard d'Estaing semble convenir que la mise en oeuvre de la LOLF n'est pas satisfaisante : « La mission peine à dessiner une stratégie d'ensemble pour ses différents programmes, qui semblent encore trop souvent juxtaposés », écrit-il. Il estime également que les interventions du programme Interventions territoriales de l'État « pourraient aussi bien trouver leur place au sein d'autres missions ».

Mais il faut aller plus loin. M. le rapporteur spécial affirme que la mission est dotée de 612,5 millions de crédits de paiement. Or, le dernier « jaune » budgétaire présenté en application de l'ancienne procédure d'examen du budget précisait qu'en 2005, les crédits budgétaires de l'État consacrés à l'aménagement du territoire s’élevaient à 4,9 milliards. Où est le respect de la logique de la LOLF et où est passée la différence ? Le rapport pour avis de M. Jacques Bobe fournit une partie de l'explication. Les crédits qu'il rapporte sont de 85 millions, mais l’application de la politique qu'il contrôle requiert 1,2 milliard car elle est mise en oeuvre par les DDE, dont les crédits relèvent de la mission Transports. Sur les 4,3 milliards de crédits manquants, en voilà près d'un tiers de retrouvés ! L'ancien mode d'examen permettait de mettre en évidence les différents moyens affectés, mais dans l'état actuel des choses, on ne peut plus rien constater du tout ! En fait, la logique interministérielle de la LOLF n'est pas mise en œuvre. Le rapporteur spécial se plaint par exemple, à juste titre, du caractère erratique du rattachement institutionnel de l'aménagement du territoire, plus exactement de la DIACT, ex-DATAR, qui aura changé trois fois de ministère de rattachement au cours de la législature !

Mais le problème n'est pas seulement là. La mission étant interministérielle, pourquoi n'y a-t-il sur les bancs du Gouvernement que deux ministres ? Pourquoi les ministres de l'équipement, dont relèvent les DDE et l'IGN, ainsi que ceux de la cohésion sociale et du logement, dont relève pour partie la direction générale de l'urbanisme, ne sont-ils pas là ? Comment le Parlement pourrait-il travailler utilement et comment la LOLF pourrait-elle fonctionner si le pouvoir politique lui-même se refuse à tirer les conséquences de celle-ci ?

Concernant les territoires et la compétitivité, je m’exprime également au nom de M. Pierre Cohen, député de Haute-Garonne retenu à Toulouse en raison des problèmes d’EADS. Sous couvert de compétitivité, vous organisez le déclin. Alors que la décentralisation et l’aménagement du territoire avaient jusqu’ici fait l’objet d’un relatif consensus, vous changez fondamentalement ces deux politiques en instaurant une compétition entre les territoires. La décentralisation apportait l’armature politique et l’autonomie de décision au plus près du citoyen, cependant que l’aménagement du territoire avait pour objet de mieux répartir les infrastructures et les moyens humains, intellectuels et industriels sans lesquels le principe de l’autonomie de décision locale serait vain.

À quoi assistons-nous aujourd’hui ? La sortie des contrats de plan État-régions et la négociation de contrats de projet confirment qu’en guise de décentralisation, on assiste surtout à la punition systématique, par le Gouvernement, des collectivités passées à gauche – Gouvernement qui signe le désengagement de l’État par une moindre participation financière et je déposera un amendement à ce sujet.

Nous sommes aussi nombreux à penser, comme notre collègue Marylise Lebranchu, que vous appliquez, de manière implacable, une idéologie qui se résume à attribuer des fonds publics à la concentration du capital humain ou financier, une idéologie qui clame que seul ce qui est gros est compétitif et que seul ce qui est compétitif doit être aidé par l’octroi d’argent public. Vous « fléchez » toutes les politiques publiques, pour ce qui est de la recherche – domaine dans lequel, il est vrai, vous aviez pris beaucoup de retard – en créant l’hégémonie des pôles de compétitivités. Les autres territoires en souffrent. Je ne prétends pas qu’il faudrait se désintéresser des grands groupes, des grandes métropoles, des grands centres de recherche, je dis que la concentration de tous les moyens publics à leur profit, sous prétexte de compétitivité internationale, constitue une triple erreur.

En premier lieu, abreuver de fonds publics des établissements déjà compétitifs, c’est dépenser les deniers publics à fonds perdus. Le lien entre un territoire et une entreprise n’est pas le même selon qu’il s’agit d’une PME ou d’une multinationale, et ceux qui exigent une rentabilité de 15 % ne se soucient guère de l’enracinement local.

Ensuite, vous confondez structuration et concentration, accentuant ainsi les effets négatifs des forces du marché, légitimant et accélérant ce que l’aménagement du territoire avait précisément vocation à combattre.

Enfin, en ne réservant aucun crédit à ce qui n’est pas déjà champion, vous ne préparez pas la relève. Où est l’État stratège qui doit préparer l’avenir de la France ?

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont - Très bien !

M. Jean Launay - La politique de développement territorial que vous appliquez n’est pas la nôtre. Vous avez brisé le consensus national et les contrats de projet ne sont pas les avatars d’une politique digne d’aménagement du territoire. Revenons à la DATAR ! Si les mots ont un sens, il n’est pas indifférent de remplacer « aménagement » par « compétitivité » ! Ce n’est pas notre vision de la République, et c’est pourquoi nous ne pourrons voter votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

M. Dominique Caillaud - Je traiterai plus particulièrement du programme Information géographique et cartographique. En le créant, la LOLF prenait acte de la place croissante prise par l'information géographique au sein des collectivités locales et des services de l'État, et le succès qu’a rencontré Géoportail a montré l'intérêt soutenu que lui portent nos concitoyens. On peut féliciter l'IGN de la réussite de ce projet, sans doute accéléré par la pression de la concurrence internationale. Ce succès montre combien il est utile d'analyser, dans notre projet loi de finances, le développement rapide du marché de l'information géographique et de le soutenir.

Le programme Information géographique et cartographique est essentiellement consacré à l'IGN, qui est à présent placé sous la tutelle du ministère de l’équipement, ce dont je me félicite. Toutefois, le développement de l'information géographique se fait actuellement dans un grand nombre de services de l'État et la progression de ces différents budgets devrait être perceptible dans cette mission. De même, devrait y apparaître le financement du CNIG, qui mériterait mieux...

Ces observations faites, j'évoquerai le budget de l'IGN, dont la subvention, fixée à 75,561 millions, croît de 900 000 euros, pour tenir compte des nouvelles missions qui lui sont confiées. Les crédits sont répartis entre production d’informations géographiques, pour 61 millions, et recherche, pour 14,1 millions. Ce second budget a fait l'objet d'un effort particulier, nécessaire pour permettre à l’Institut de suivre l’évolution rapide des nouvelles technologies et s’adapter la création de nouveaux outils.

On notera que l’Institut a respecté l’engagement, pris dans le contrat d'objectifs et de moyens, de se procurer par ses activités commerciales des ressources propres à hauteur de 50 % de la subvention. Son budget prévisionnel s’établit donc à 126,5 millions et ses activités propres à 45,2 millions. L’accroissement de la subvention compense utilement les efforts exceptionnels consentis par l'IGN en 2006 pour financer les charges nouvelles en particulier celles du Géoportail. Le budget 2007 exigera donc de l’opérateur qu’il poursuive ses objectifs – maintien des charges de personnels, poursuite des gains de productivité, mise à disposition de nouveaux produits.

Reste à évoquer l'avenir. Un nouveau contrat d'objectifs et de moyens devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2007. J’appelle votre attention, Monsieur le ministre, sur l'ardente obligation de ne pas laisser un trop long délai entre le terme du contrat en cours et le suivant, dont l’élaboration devrait donner l’occasion d’une réflexion sur le statut actuel de l’IGN et le bien-fondé de son maintien. En regroupant dans un même établissement des missions de service public, de formation supérieure et d’activités commerciales nationales et internationales, on prend le risque de dessiner un ensemble aux contours trop imprécis pour que l'analyse des coûts respectifs des missions puisse être valablement conduite. Le rapport Lengagne avait recommandé l’adoption d’une comptabilité analytique qui a été mise en œuvre, mais des missions d’audit ultérieures ont souligné que des progrès restent à accomplir et nous espérons de meilleurs résultats.

L'obligation faite à l’IGN de se procurer des ressources propres, y compris pour accomplir ses missions de service public, et la fusion de ses activités commerciales ne favorisent pas la transparence et la clarté nécessaires aux partenariats qu'IGN noue et continuera de nouer avec les collectivités publiques, le secteur privé et les opérateurs techniques internationaux. Voilà pourquoi le nouveau contrat d'objectifs et de moyens doit être l’occasion de réfléchir à la structure et au modèle économique de l'IGN.

Fort de sa remarquable évolution au cours des dernières années, celui-ci dispose aujourd'hui des compétences, d'un savoir-faire et d'un dynamisme qui lui permettent de franchir avec succès les obstacles et de s'engager dans une croissance qui lui offrira des résultats à la mesure du marché très dynamique qu'est celui de l'information géographique.

Il va sans dire que nous voterons les crédits de cette mission (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 30.
La séance est levée à 20 heures 10.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.
Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.
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