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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

1ère séance du mercredi 21 février 2007

Séance de 9 heures 30
64ème jour de séance, 146ème séance

Présidence de Mme Hélène Mignon
Vice-Présidente

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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droit au logement opposable (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi adopté au Sénat, après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

Mme la Présidente – Nous nous étions arrêtés hier soir au cours de l’article 3. La commission a demandé la réserve des articles et amendements suivants jusqu’aux amendements portant articles additionnels après l’article 6 L inclus.

avant l'Art. 6 M

Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales L’amendement 20 rectifié est un amendement rédactionnel, qui intitule le chapitre II : « Dispositions en faveur de la cohésion sociale ». Il est identique à l’amendement 59 rectifié de la commission des affaires économiques.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité - Favorable.

Les amendements 20 rectifié et 59 rectifié, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

Art. 6 M

Mme Martine Billard - Si je me réjouis de l’introduction de dispositions concernant le droit à domiciliation, qui corrigent une situation aujourd’hui peu lisible, je relève cependant une contradiction entre le titre, qui parle bien de « droit à domiciliation », et la rédaction de l’article, qui fait de la domiciliation une obligation pour le bénéfice de prestations. Les deux n’entraînent pourtant pas les mêmes conséquences, et si le droit à domiciliation n’est pas mentionné explicitement, il sera plus difficile de le faire reconnaître. C’est pourquoi l’amendement 177 propose d’écrire que « le droit à la domiciliation est reconnu à toute personne ne disposant pas d’une résidence stable afin de lui garantir une adresse postale ».

Mme la Rapporteure - La commission a émis un avis défavorable, car l’amendement, en renvoyant à un décret la liste des droits auxquels la nouvelle procédure donne accès, pose un problème de droit. Selon l’article 34 de la Constitution, c’est au législateur qu’il incombe de préciser ces droits. Quant à l’adresse postale, elle fera l’objet d’un amendement ultérieur de la commission.

Mme la Ministre déléguée - L’article vise à simplifier la procédure de domiciliation ; il ne s’agit pas de remettre en cause le principe de l’obligation de domicile pour le bénéfice des prestations sociales. Le dispositif permet de disposer d’une adresse administrative permettant le suivi des différents droits par les organismes concernés. Avis défavorable.

Mme Martine Billard - Je crois qu’il y a quiproquo. Ce que vous allez voter est une obligation de domiciliation, et le titre relatif au droit à domiciliation devient dès lors purement fictif.

L'amendement 177, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Dominique Tian - Le terme « bénéfice » risque de créer une confusion. Si les personnes sans domicile fixe bénéficient des prestations sociales dans les conditions de droit commun, les organismes débiteurs peuvent éprouver des difficultés à leur verser ces prestations. Écrire plutôt « service » permettrait de lever toute ambiguïté quant à une éventuelle condition nouvelle pour l’attribution des prestations. Tel est l’objet de l’amendement 193.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

Mme la Ministre déléguée - Sagesse. Le terme de « bénéfice » peut en effet paraître restrictif, en ne visant que le versement des prestations, alors que la domiciliation est nécessaire pour en faire la demande, avant même tout versement.

L'amendement 193, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 129 exclut du champ d’application de la procédure les demandeurs de l’aide médicale d’État, pour lesquels la procédure de domiciliation prévue à l’article L. 252-2 du code de la famille et de l’aide sociale s’applique.

L'amendement 129, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - La rapporteure a indiqué qu’il appartenait au législateur de définir les éléments concernant la mise en œuvre de la domiciliation. Avec l’amendement 124, nous proposons un de ces éléments, en prévoyant d’insérer à l’alinéa 6, après les mots « titre national d’identité », les mots « d’un titre de séjour, d’un acte d’état civil, à l’accès aux services postaux et bancaires ». Parmi les situations que les CCAS ont à connaître, certaines concernent des personnes en attente de décisions concernant leur titre de séjour. Il nous paraît légitime de prévoir ces situations dans le dispositif.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable, car l’amendement rendrait obligatoire une domiciliation pour accéder aux services bancaires et postaux. Il est préférable de garantir l’accès de ces services aux bénéficiaires de l’attestation de domiciliation créée par le nouveau dispositif, comme le prévoit un amendement à venir de la commission.

Mme la Ministre déléguée - Même avis. Il ne nous paraît pas justifié d’obliger ces personnes à se domicilier pour exercer des droits liés à la vie quotidienne. En revanche, les personnes sans domicile stable en possession d’une attestation de domicile en cours de validité, ne doivent pas se voir privées de l’exercice de ces droits. Le Gouvernement donnera un avis favorable à l’amendement 340, portant sur la notion de service essentiel garanti par la loi

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Je ne comprendrais pas que les personnes demandant un titre de séjour ne soient pas intégrées dans ce dispositif. Pourquoi les exclure de la domiciliation ? Je pense également aux actes d’état civil : qu’en est-il des personnes en situation irrégulière qui donnent naissance à un enfant sur le territoire français ?

Mme la Ministre déléguée - Pour obtenir un titre de séjour, la domiciliation n’est pas requise.

L'amendement 124, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Ministre déléguée – L’amendement 130 vise à préciser les règles de répartition des compétences entre départements. Si le droit commun en matière sociale est constitué par la règle du domicile de secours, il y a lieu de maintenir les dérogations actuelles pour l’APA, la prestation de compensation et le RMI, et de prévoir que le département compétent est celui dans lequel la personne a élu domicile.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

Mme Martine Billard - Que se passe-t-il lorsqu’une personne change de département ? Le versement de son RMI par le département d’origine sera-t-il interrompu le temps qu’elle fasse établir une attestation de domicile dans le nouveau département ?

Mme la Ministre déléguée -– Ce sont les mêmes règles que pour n’importe quel déménagement. Tant que la personne n’a pas signifié son changement, elle continue de toucher le RMI dans le département d’origine. Nous n’avons pas eu connaissance, à ce jour, de difficultés particulières.

L'amendement 130, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 383 précise que la limitation de la validité doit s’appliquer à l’élection de domicile elle-même, et pas seulement à l’attestation.

L'amendement 383 accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 131 vise à exclure du champ d’application de l’article 6 M les étrangers non ressortissants d’un État membre de l’Union européenne, d’un État partie à l’accord sur l’espace économique européen ou de la Confédération suisse, qui ne sont pas en situation régulière. La procédure de domiciliation n’a pas à s’appliquer à des personnes qui n’ont pas vocation à rester de façon stable sur notre territoire.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – J’ai bien fait de ne pas retirer l’amendement 124 ! Nous sommes dans une contradiction fondamentale. Le dispositif de domiciliation, lorsqu’il concerne les nationaux, est conçu comme une clé d’accès aux différents droits. Il prend une toute autre connotation lorsque l’on évoque les personnes non nationales ou non ressortissantes d’un État de l’Union : la domiciliation est alors perçue comme génératrice de droits, dont celui de rester sur le territoire.

J’estime que la domiciliation devrait pouvoir être possible – indépendamment des décisions prises par les autorités administratives sur le séjour des personnes – simplement afin de donner à ces hommes et à ces femmes un statut. Nous ne pouvons continuer de construire notre législation en niant la présence des étrangers en situation irrégulière : nous devons leur accorder un état – à l’image du Canada, qui compte 20 % de population immigrée – pendant la période où ils se trouvent sur le territoire. À Cachan, les gens nous disaient : « Ne niez pas notre existence ! » Mais lorsque l’on empêche leur domiciliation, on leur dénie la possibilité d’exister, pendant le temps où ils sont en France. On retrouve ce problème, dans une moindre mesure, au canal Saint-Martin, Madame la ministre !

M. Jean-Louis Dumont - Le problème n’est pas réglé !

L'amendement 131, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 132 apporte une précision.

L'amendement 132 accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 340, dont il a déjà été question, précise que la domiciliation permet la mise en œuvre des droits d’accès aux services bancaires et postaux.

L'amendement 340, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée – L’amendement 133 vise à supprimer l’alinéa 13, qui prévoit que la possession d’une attestation en cours de validité permet de justifier de la résidence en France.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

Mme Martine Billard – J’appelle votre attention sur les situations invraisemblables que pourrait produire un tel amendement ! La préfecture pourra justifier de l’absence d’attestation de domiciliation pour refuser un renouvellement du titre de séjour !

Mme la Ministre déléguée - Ne nous méprenons pas, Madame Billard. L’attestation de domicile est loin d’être le seul document exigé pour le renouvellement du titre de séjour.

Mme Martine Billard - Mais c’est un élément !

L'amendement 133, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 139 vise à limiter les possibilités de refus de domiciliation par les CCAS aux seuls cas où les demandeurs n’ont pas de lien avec la commune.

L'amendement 139, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - Il faut tenir compte de la réalité des situations à l’échelon local et adapter les activités de domiciliation au volume des demandes et à la capacité des CCAS de les traiter. C’est pourquoi l’amendement 140 prévoit que le représentant de l’État dans le département peut conclure une convention avec un organisme agréé.

Mme la Rapporteure - Favorable.

M. Jean-Louis Dumont – Cette loi donnera lieu à de nombreux décrets d’application. Il faudra donc veiller à la qualité et à la mise à jour de l’information délivrée au public. J’ai en tête le cas d’une personne à qui la sous-préfecture avait fourni des informations dépassées et omis d’indiquer qu’elle devait effectuer une autre démarche auprès des services de police. Cette personne a donc perdu son emploi. Sa situation a pu être régularisée ensuite, mais vous voyez qu’une application imparfaite de la réglementation peut être lourde de conséquences.

Mme la Ministre déléguée – Pour assurer cette qualité de l’information délivrée au public, un guide national de la domiciliation sera élaboré. Je veillerai en outre à ce qu’il soit mis à jour régulièrement.

L'amendement 140, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 134 est rédactionnel.

L'amendement 134, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard - L’amendement 178 a pour objet de rendre publique, dans chaque commune, la liste des organismes agréés pour procéder à l’élection de domicile. Si les personnes sans domicile fixe sont bien suivies par les associations, c’est souvent le parcours du combattant pour celles qui, sans être SDF, n’ont pas de domicile stable, et elles ont du mal à accéder à l’information.

Mme la Ministre déléguée - Le sous-amendement 380 vise à compléter cet amendement par les mots « dans le département ».

Mme Martine Billard - Cela me paraît en effet indispensable.

Mme la Rapporteure - Avis favorable à l’amendement 178. Quant au sous-amendement du Gouvernement, il n’a pas été examiné en commission, mais à titre personnel, j’y suis favorable.

Le sous-amendement 380, mis aux voix, est adopté.
L'amendement 178 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - Il paraît nécessaire que le président du conseil général donne son avis sur le cahier des charges que compte arrêter le représentant de l’État dans le département. Tel est l’objet de l’amendement 141 rectifié.

L'amendement 141 rectifié, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Néri - L’amendement 127 vise à supprimer l’alinéa 24 de cet article, qui prévoit que l’agrément aux centres communaux ou intercommunaux d’action sociale pour la délivrance d’attestations d’élection de domicile peut définir un nombre d’élections de domicile maximal. Cette disposition réduit en effet la portée de l’élection de domicile indispensable à l’obtention de droits fondamentaux – prestations sociales, titre de nationalité, inscription sur les listes électorales.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. L’article 6 M a justement pour objet de créer une procédure unique de domiciliation pour tous les domaines, que les CCAS seront tenus de mettre en œuvre. Les organismes agréés – c’est-à-dire les associations – n’interviendront qu’en complément. Il est donc normal qu’ils puissent limiter cette intervention à l’accès à certains droits, même si une pression s’exerce en faveur d’une domiciliation « généraliste ».

Mme la Ministre déléguée - Le droit effectif à la domiciliation reposera sur une juste répartition, assurée par le préfet. L’agrément doit donc pouvoir définir le nombre de domiciliations que l’organisme est tenu d’accepter. Avis défavorable à cet amendement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Nous ne comprenons pas bien le sens de cette disposition, qui institue à notre sens un quota de domiciliations. Dans la mesure où on ne peut présumer de la réalité sociale du territoire d’intervention du CCAS et des associations, une telle limitation n’a pas de sens. Que se passe-t-il une fois que le quota est atteint ? Dans ma commune, le CCAS et les associations se répartissent le travail : une domiciliation qui rend nécessaire un accompagnement social sera de préférence assurée par une association. Je crains que ces quotas ne conduisent à renvoyer systématiquement sur les CCAS, alors qu’un équilibre entre CCAS et associations est nécessaire.

Mme la Ministre déléguée - Le dispositif va se mettre en place chemin faisant. Nous avons voulu que les CCAS et les organismes agréés puissent faire face à la demande. C’est pourquoi l’agrément fixera un nombre maximum d’élections de domicile, en fonction des moyens et du réseau dont ils disposent. Il s’agit avant tout d’éviter les engorgements et de mettre en place un vrai maillage du territoire, pour être au plus près de nos concitoyens. Cela n’empêchera pas les préfets d’adapter le système.

M. Michel Piron - C’est le bon sens même !

Mme Martine Billard - Sans doute, mais le bon sens n’est pas toujours aussi bien partagé qu’on le voudrait. Si tous les quotas sont épuisés, cela peut empêcher des personnes d’élire domicile. Et sans domicile, elles n’ont plus de RMI ! Préciser d’emblée que l’on peut autoriser l’organisme à restreindre les domiciliations à certaines catégories de personnes ou à certaines prestations sociales me gêne tout autant. Nous savons en effet que les « multi-domiciliations » posent problème.

Mme la Ministre déléguée - Tout à fait.

Mme Martine Billard - Il est particulièrement éprouvant pour les personnes en difficulté de devoir aller et venir en permanence entre différentes administrations. Si on veut qu’elles reprennent pied, il faut simplifier leurs démarches. Vous faites tout le contraire : c’est pourquoi je voterai l’amendement de nos collègues socialistes.

L'amendement 127, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Dominique Tian - Le cahier des charges est l’un des éléments essentiels à partir duquel l’agrément peut être délivré ou renouvelé. L’évaluation du respect des engagements pris dans ce cahier des charges doit donc être un élément clé dans la procédure de renouvellement de l’engagement.

Compte tenu de son importance, il faut définir plus précisément le contenu du cahier des charges, et notamment les engagements de l’association. Ceux-ci pouvant varier selon les organismes, le renvoi à un décret fixant des engagements communs à tous n’est pas opportun. Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé l’amendement 195.

Mme la Rapporteure - Défavorable : cet amendement est satisfait par l’amendement 141 rectifié.

Mme la Ministre déléguée - Même avis.

L'amendement 195, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Martine Billard – Par l’alinéa 27 de l’article, on contraint les associations effectuant la domiciliation à s’assurer que la personne qui élit domicile auprès d’elles est bien sans domicile fixe – il conviendrait d’ailleurs d’élargir la possibilité de domiciliation aux personnes sans domicile « stable », mais j’y reviendrai. Outre qu’ils passent un temps infini à chercher des subventions, ces organismes croulent déjà sous les demandes de statistiques et de comptes rendus. Comment pourront-ils contrôler quoi que ce soit alors qu’ils n’ont aucun pouvoir de police ni d’investigation ? En cette matière, la seule possibilité, pour les associations, est de faire confiance. On leur délègue tout ce dont les pouvoirs publics ne sont pas capables, et c’est beaucoup. Si on veut qu’elles continuent de le faire, il faut veiller à ne pas les décourager. C’est le sens de l’amendement 180.

Mme la Rapporteure - Demander aux associations délégataires de rendre régulièrement compte de leur activité de domiciliation est bien le moins. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Dumont – On complexifie !

L'amendement 180, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure – Par l’amendement 341, identique à l’amendement 181 de Mme Billard, la commission substitue au terme « sans domicile fixe » le terme « sans domicile stable », prenant ainsi en considération le fait que les personnes qui ont besoin d’une domiciliation ne sont pas seulement celles qui sont à la rue.

Mme Martine Billard - L’amendement 181 est défendu.

Les amendements 341 et 181, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

Mme Martine Billard – Je ne conteste pas que les associations délégataires de service public doivent être contrôlées, mais, pour les raisons dites tout à l’heure, je m’oppose, par l’amendement 182, à ce qu’on les surcharge en les contraignant à de nouvelles tâches administratives. J’ai le souvenir que, lors de la création du RMI, les associations parisiennes étaient tenues de vérifier de manière pointilleuse si les fonds disponibles étaient bien affectés aux attributaires du RMI et non aux allocataires de l’ASS ou de l’API, toutes personnes qui se débattaient pourtant dans les mêmes difficultés. Ces organismes consacraient un temps infini à compiler les statistiques qui devaient être remises à la préfecture. Il est normal d’attendre des associations qu’elles travaillent dans le respect de leurs missions mais si l’on veut qu’elles se prêtent à la domiciliation, il faut cesser de les surcharger comme on le fait ici sans prévoir de les rémunérer pour ce travail. (M. Tian s’exclame) Mais enfin, les associations ne vivent pas d’amour et d’eau fraîche ! Et pourtant, on leur demande à la fois d’œuvrer bénévolement et de se livrer à un interminable travail statistique ! Si on veut qu’elles le fassent, qu’on les rémunère pour cela !

M. Michel Piron - C’est invraisemblable !

Mme la Rapporteure - Il me paraît normal que les associations délégataires, qui remplissent des missions essentielles, soient tenues de rendre compte de leur activité à l’État. La question de leur rémunération est autre.

Mme Martine Billard - Les deux vont de pair !

Mme la Ministre déléguée - Que, chaque année, l’État dispose d’un instantané de l’activité des organismes concernés me paraît essentiel. Que, par ailleurs, une réflexion se fasse sur la rémunération des prestations globales de ces associations est un autre problème.

M. Michel Piron - J’ai du mal à comprendre la manière dont vous envisagez les relations entre les associations et les pouvoirs publics, Madame Billard. Les associations jouent un rôle original, pour lequel elles sont aidées. A vous entendre, ces aides devraient être distribuées sans contrôle. (Exclamations et dénégations sur les bancs du groupe socialiste) Il est vrai que certaines associations sont parfois soumises à des contraintes importantes, mais c’est le sujet qui veut cela. Demander un compte rendu annuel d’activités subventionnées, n’est-ce pas le minimum ? Je serais ahuri qu’elles en soient dispensées.

M. Jean-Louis Dumont - On compte beaucoup sur les bénévoles et sur les militants, mais on formule à leur égard des exigences sans cesse croissantes. Ce qu’on leur demande ici, ce n’est pas un compte rendu annuel mais un compte rendu mensuel, sans doute pour préparer un futur rapport ciselé de la Cour des comptes, dont chacun appréciera les nuances. Chaque fois qu’on lance un nouveau projet, on définit une enveloppe budgétaire. Au début tout va bien, puis les crédits viennent, inéluctablement, à manquer et l’on se rend compte que les missions de service public ne peuvent être menées à bien que grâce à l’action des bénévoles. Je ne suis pas contre cet engagement, mais encore faut-il prévoir, aussi, la présence de professionnels ! Les problèmes dont nous traitons aujourd’hui sont compliqués car le public visé est en grande difficulté. Il faut beaucoup de temps, d’énergie et d’élans du cœur pour mener à bien une domiciliation, trouver un accueil d’urgence et mettre en place l’accompagnement social qui conduira à la réinsertion, mais il faut aussi beaucoup de professionnalisme. On complique les choses en exigeant des statistiques.

Mme la Ministre déléguée - Le Gouvernement a beaucoup travaillé pour faire évoluer le traitement social de l’urgence. En adoptant un amendement prévoyant qu’il ne serait plus possible de remettre à la rue les personnes hébergées dans les centres d’urgence, votre Assemblée a apporté une solution partielle au problème de la domiciliation, puisque 10 500 des 13 500 places d’hébergement d’urgence vont être transformées en hébergement de stabilisation. Je ne dis pas que tout est désormais réglé, mais chacun sait que les enjeux budgétaires sont massifs. Si le Gouvernement délègue 94 millions, c’est bien qu’il en est conscient – et les 1 051 millions de la loi de finances pour 2007 sont appelés à augmenter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Martine Billard - Les très grandes villes ont probablement des problèmes spécifiques. C’est le cas pour Paris, où, malheureusement, des milliers de personnes continueront d’errer même si le problème des places en centre d’hébergement est pour partie résolu. Or, ces gens ne sont pas suivis par les associations qui s’occupent des sans domicile fixe, et ils ne peuvent se faire domicilier chez les familles qui les hébergent parfois, sauf à les mettre en danger car les offices HLM interdisent l’hébergement de secours. A Paris, la demande de logement social ne cesse de croître et, faute de logements, il n’y sera malheureusement pas répondu.

M. Michel Piron - On peut aussi envisager des réponses territoriales !

Mme Martine Billard – Ces personnes, qui ne demandent pas un hébergement mais un logement, et qui ont besoin d’une attestation de domiciliation, exigent un travail différent de la part des associations. Celles-ci devront s’adapter.

L'amendement 182, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 135 du Gouvernement exclut du champ d’application de l’article 6 M les procédures de domiciliation des demandeurs d’asile. Ces derniers relèvent en effet d’une procédure spécifique, prévue par le décret du 14 août 2004. Permettez-moi cependant une correction, Madame la présidente : il faut lire « Les dispositions du présent chapitre » au lieu de : « Les présentes dispositions ».

Mme la Rapporteure - Favorable.

L'amendement 135 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée – L’amendement 136 complète l’alinéa 31 par les mots : « à l’exception des dispositions de l’article L. 264-4 qui sont déterminées par décret en Conseil d’État. »

L'amendement 136, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 137 vise à regrouper dans un seul et même article les règles relatives à la domiciliation des personnes sans domicile stable. Il s’applique également aux personnes demandant à bénéficier de l’allocation personnalisée d’autonomie.

L'amendement 137, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 138 tire les conséquences du regroupement dans un seul et même article des règles relatives à la domiciliation des personnes sans domicile stable.

L'amendement 138, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L’amendement 156 supprime l’alinéa 35 de cet article.

L'amendement 156, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 342 de la commission est rédactionnel.

L'amendement 342, accepté par le Gouvernement , mis aux voix, est adopté.

M. Dominique Tian - Il convient de préciser que les décisions de délivrance ou de retrait d'attestations de domicile prises par l’organisme agréé doivent systématiquement être adressées aux organismes de sécurité sociale compétents. Tel est l’objet de l’amendement 196 que j’ai déposé avec M. Giro.

Cette procédure permet à la personne sans domicile fixe de faire valoir ses droits même si elle n’est pas en possession de son attestation. Les associations perdent souvent de vue de nombreux SDF domiciliés auprès d’elles. Elles hésitent cependant à les radier de leur fichier, ne sachant pas s’ils ont élu ou non domicile auprès d’une autre association. Cette transmission aux organismes de sécurité sociale permettra de repérer les personnes sans domicile fixe domiciliées auprès de plusieurs associations et donc de procéder à une mise à jour régulière des fichiers des associations sans pour autant porter atteinte aux droits de ces personnes.

Mme la Rapporteure - La commission a émis un avis défavorable, car l’amendement 386 du Gouvernement lui a paru mieux répondre à cette préoccupation.

Mme la Ministre déléguée - Je vous propose, Monsieur Tian, de retirer votre amendement au profit du 386, qui prévoit un système d’information périodique des organismes de sécurité sociale et des départements. Une notification de chaque décision alourdirait trop la charge des organismes de domiciliation.

L’article visé est le L. 264-2, et non le L. 2664-2, comme il est écrit par erreur.

Mme la Présidente – L’amendement 386 est ainsi corrigé.

Mme la Rapporteure - J’ai déjà dit l’accord de la commission sur cet amendement.

M. Dominique Tian – Qu’entendez-vous par « périodique » ? N’est-ce pas un peu flou ? Je note d’autre part que vous renvoyez à un décret… Je pense que ma version était socialement plus intéressante.

Mme la Ministre déléguée - Il s’agira d’un relevé mensuel. Quant au décret, il sortira dans les meilleurs délais.

L’amendement 196 est retiré.
L'amendement 386 corrigé, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 21 de la commission corrige une erreur de référence.

L'amendement 21, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 343 précise que l’alinéa 46 s’applique aux seuls gens du voyage, non à l’ensemble des personnes sans domicile stable.

L'amendement 343, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 6 M, modifié, mis aux voix, est adopté.

après l'Art. 6 M

M. Étienne Pinte - Mon amendement 97 rectifié vise à allouer à l’action sociale en faveur des salariés intérimaires des financements supplémentaires, en particulier pour le logement et la formation professionnelle.

Les entreprises de travail temporaire versent aujourd’hui 0,15 % de la masse salariale des intérimaires à un organisme géré paritairement. Je propose que ses moyens soient accrus par une cotisation supplémentaire équivalant à 0,2 % de la masse salariale. Les entreprises de travail temporaire ont d’autre part une obligation légale fixée à 2 % de la masse salariale. Il est proposé de la porter à 2,3 % et de porter la contribution en faveur du congé individuel de formation de 0,3 % à 0,4 %.

La taxe d’apprentissage resterait applicable à la masse salariale des salariés permanents des agences, mais la masse salariale des intérimaires en serait exonérée, les salariés de la branche ne pouvant bénéficier des fonds sociaux correspondants puisqu’ils ne peuvent conclure de contrat d’apprentissage.

M. Dominique Tian – Mon amendement 203 rectifié, identique, répond à un souci de sécurisation des trajectoires professionnelles auquel le Gouvernement devrait être sensible.

Mme la Rapporteure - La commission est évidemment sensible à la préoccupation exprimée par les auteurs des amendements, mais elle a émis un avis défavorable, estimant que l’impact d’une exonération de taxe d’apprentissage sur le secteur de l’intérim – qui représente 3 % de l’emploi – n’avait pas été suffisamment évalué. Quelle serait l’incidence pour les CFA et les organismes de formation d’une diminution du rendement de la taxe d’apprentissage ?

M. Michel Piron - Prudence est mère de sûreté !

Mme la Ministre déléguée - Le Gouvernement n’envisage pas aujourd’hui, sans avoir au préalable consulté les partenaires sociaux, de relever les taux des contributions visées. On risquerait d’alourdir les contraintes pesant sur les entreprises de travail temporaire et au final de pénaliser les salariés.

Les amendements 97 rectifié et 203 rectifié, mis aux voix, sont adoptés.

Art. 6 N

M. Alain Néri – Cet article, introduit par le Gouvernement au Sénat, a pour objet principal d’autoriser l’État à expérimenter, conjointement avec les départements volontaires, un contrat unique d’insertion, qui fusionnerait les CAE, CIE et CI-RMA et qui serait ouvert aux bénéficiaires de minima sociaux.

On peut lire dans l’exposé des motifs que cette disposition « permettra de décloisonner les dispositifs existants et de gagner en efficacité » et que « ce contrat simplifié sera plus lisible pour le bénéficiaire comme pour l’employeur ». Est-ce à dire que les dispositifs Borloo sont compliqués et difficiles à mettre en œuvre ? Quel aveu !

Ce contrat unique serait assorti d’une aide modulable en fonction du degré d’éloignement de l’emploi du bénéficiaire, d’une part, des engagements pris par l’employeur en matière d’accompagnement, de formation ou de pérennisation du contrat, de l’autre. Le financement de cette aide, puisqu’il s’agit de minima sociaux, devrait être très clair : prise en charge par l'État pour les bénéficiaires de l'API, de l'AAH et de l'ASS et par le département pour les érémistes. Mais c’est justement cela qui cause notre inquiétude : la compensation par l'État du financement du RMI nous a déjà causé, à tout le moins, quelques déconvenues ! Chacun sait que les départements ne reçoivent pas la compensation à l’euro près que M. Copé nous promet toujours la main sur le cœur. C’est ainsi que l’État doit 9 millions au département du Puy-de-Dôme pour la seule année 2006 ! Nous craignons donc que cette proposition n’aboutisse à faire supporter aux départements la charge de l'insertion des exclus de l'emploi.

L’article 6 N complète l'article 142 rattaché à la loi de finances pour 2007, qui fait trois pages et a été adopté par amendements sans véritable discussion en séance publique, lors de l'examen des crédits de la mission travail et emploi. Le dispositif expérimental du contrat unique d'insertion déroge aux règles de versement de la prime de retour à l'emploi et de la prime forfaitaire mensuelle dont peuvent bénéficier les titulaires de minima sociaux reprenant un emploi, primes instituées par la récente loi du 23 mars 2006. Il déroge aussi aux règles des contrats d'insertion tels que les contrats d'insertion revenu minimum d'activité créés par la loi du 18 décembre 2003 et qui n'ont d’ailleurs jamais bien fonctionné : on ne connaît vraiment ni leur forme juridique – contrat à durée déterminée, indéterminée ou contrat de travail temporaire ? – ni leur durée – six mois au minimum et vingt-quatre au maximum ? – ni leur durée hebdomadaire – qui varie de 20 heures à 35 heures, contre 26 heures imposées… Le dispositif étend ces dérogations aux contrats d’avenir, contrats d'insertion dans l'emploi, contrats d'accompagnement dans l'emploi et contrats initiative emploi créés par la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005 – laquelle avait abrogé parallèlement les contrats emploi solidarité et les contrats emploi consolidés, auxquels vos dispositifs ressemblent pourtant de plus en plus étrangement…

Au total, ce que M. Borloo présentait comme des « dispositifs miracle » maintiennent en réalité les bénéficiaires de minima sociaux dans une précarité qui n’est pas acceptable. Aujourd’hui, le Gouvernement, par le biais d'amendements successifs, propose l'expérimentation par les départements d'un contrat unique d'insertion, avec des dispositifs dérogatoires selon les territoires. Cette manière de légiférer est insupportable. Un tel dispositif mériterait de faire l'objet à lui seul d'un texte législatif, qui devrait être précédé d'une étude sérieuse des dispositifs d'insertion existants et d'une vraie discussion publique avec les acteurs concernés, et en particulier les conseils généraux. Nous serions tout à fait disposés à participer à un tel travail de fond. Mais vous avez choisi une autre voie. Faut il comprendre que votre plan de cohésion sociale aurait fait fausse route pour cause de précipitation ? Ou que le Gouvernement aurait entrevu une brèche où s'engouffrer pour qu'à terme, ce soient les collectivités territoriales qui supportent la charge des bénéficiaires de minima sociaux, dont le nombre s'alourdit ? En effet, si vous faites diminuer artificiellement le nombre de chômeurs, le nombre de érémistes augmente concrètement ! Ce n’est pas une façon sérieuse de travailler.

Pour toutes ces raisons, et même si un contrat d'insertion plus simple, plus adaptable à chaque situation et géré au plus près du terrain peut être un bon moyen de rapprocher les personnes en difficulté de l'emploi, le groupe socialiste proposera de gagner en temps et en clarté en supprimant cet article, car ce sont des moyens réels qui doivent régler le problème de l'exclusion, non des dispositifs expérimentaux. Une réforme de fond est sans doute nécessaire, mais pas au détour d'un amendement gouvernemental et surtout pas à l’extrême fin de la législature.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - J’ajoute que les contrats d’avenir ont été créés par la loi du 18 janvier 2005, modifiés une première fois par la loi relative aux emplois de service du 26 juillet 2005 et à nouveau dans la loi relative au retour à l’emploi du 23 mars dernier. Et vous proposez aujourd’hui une autre modification, qui plus est dans un cadre expérimental ? Comment s’y retrouver ? Où est la force de l’instrument juridique qui permettrait de développer une véritable politique d’insertion ?

Par ailleurs, au fil de ces modifications, vous en revenez de plus en plus aux dispositifs que nous avions mis en place et que vous aviez supprimés. Cela démontre que le Gouvernement n’a pas d’intention politique en faveur des personnes en difficulté, mais qu’il est exclusivement animé par l’idée de transférer la charge des dispositifs qui leur sont consacrés vers les régions et départements. Il utilise ces instruments comme régulateurs budgétaires, et il l’a fait tout au long de la législature. L’amendement 122 propose donc la suppression de cet article.

Mme la Rapporteure - J’ai écouté vos arguments avec la plus grande attention, mais vous n’avez pas assez souligné la dimension expérimentale du contrat unique d’insertion, à laquelle nous sommes très attachés. Elle prévoit la mise en œuvre par l’État des mêmes règles que pour les personnes percevant le RMI, et il serait prématuré de revenir sur ces conditions pour l’instant. Avis défavorable.

Mme la Ministre déléguée - Même avis. Le Gouvernement, pendant cinq ans, a tout essayé pour apporter des solutions à ceux qui sont encore très éloignés de l’emploi. En l’occurrence, il est question, avec des départements volontaires, d’essayer des règles et une approche un peu différentes. Il s’agit bien là d’une expérimentation : nous ne voulons pas chambouler à la va-vite le code du travail, mais autoriser une expérimentation dans un contexte précis. Avis défavorable.

M. Alain Néri - Expérimentation sans doute, mais engagée dans la précipitation. Or, nous avons déjà été échaudés et ce dispositif nous rappelle de mauvais souvenirs. Ce n’est pas une façon sérieuse de travailler avec les départements. Lorsque les maisons départementales pour les personnes handicapées ont été mises en place, on nous a dit que c’était très urgent et on nous a même proposé une prime si l’on signait avant le 31 décembre 2005. Une première ! Mais aujourd’hui, malgré la bonne volonté de tous – État, associations, conseils généraux – on a les plus grandes difficultés à faire tourner ces maisons. Il ne faut donc pas confondre vitesse et précipitation. Il est vrai qu’il y a urgence sociale, mais ce n’est pas une raison pour s’engager dans des actions qui se retourneront contre ceux qu’on veut aider. Ce n’est pas votre bonne foi qui est en cause : je vous appelle simplement à un peu plus de responsabilité. Prenons le temps de la réflexion, du travail en commun avec l’ensemble des partenaires. Je vous demande de bien vouloir supprimer cet article, car l’enfer est parfois pavé de bonnes intentions.

Mme la Ministre déléguée – On ne peut pas parler de précipitation : pensez seulement au travail de Martin Hirsch avec l’agence sur l’initiative sociale, aux nombreux rapports qui ont été faits et à la proposition de loi examinée il y a peu de temps au Sénat ! Il ne s’agit pas d’une dernière disposition à la veille de la fin de la législature, mais d’une idée travaillée par de nombreux élus et accompagnée par des départements volontaires, de la majorité ou de l’opposition. Ce n’est qu’une expérimentation. N’en faisons pas plus. Mais s’il devait en sortir quelque chose, ce qui vous paraît aujourd’hui précipité pourrait ouvrir la voie demain à une évolution importante.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Le Gouvernement a commencé par supprimer les contrats emploi solidarité et les contrats emploi consolidés, simplement parce qu’ils avaient été faits par la gauche. C’est de la politique. Mais une fois qu’ils ont été supprimés, il a fallu quand même régler le problème. Après deux ans de difficultés, il s’est engagé dans le dispositif des contrats d’avenir, créé en janvier 2005 et modifié depuis à deux reprises. Qui peut prétendre que les contrats d’avenir sont aujourd’hui opérationnels ? Le dispositif législatif n’est pas en œuvre, et il ne peut pas l’être. Et vous venez aujourd’hui nous dire qu’il est important et urgent de décider une quatrième modification, à titre expérimental ! Vous appelez ça une action publique d’État ? Il faudrait cesser de rayer d’un trait tout ce qui a été fait par le gouvernement précédent pour ensuite remettre en place, sous la pression de la rue, des dispositifs mal ficelés, tels que cet amendement de trois pages présentés au Sénat. Vous êtes encore et toujours dans l’improvisation. Pour nous, l’action publique à l’égard des publics fragiles mérite mieux.

Mme la Ministre déléguée - Le dispositif CAE concerne aujourd’hui 250 000 personnes. Vous ne pouvez donc pas dire qu’il n’est pas appliqué. Quant aux contrats d’avenir, 110 000 ont été conclus dans l’ensemble du territoire. Enfin, il s’agit d’une expérimentation qui fait suite à différents travaux. Il est important de la mener à son terme pour ne pas laisser passer la moindre chance d’améliorer la situation.

L'amendement 122, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 344 est de précision.

L'amendement 344, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 345 vise à préciser que les départements, communes et EPCI ne sont pas autorisés à prescrire et mettre en œuvre les contrats d’avenir expérimentés, par cohérence avec l’expérimentation conduite par les conseils généraux pour les érémistes, qui prévoit également cette limitation.

L'amendement 345, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 346 est rédactionnel.

L'amendement 346, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 347 aligne la durée maximale de versement de l’aide de l’État au titre des CIE conclus en CDI sur celle déjà prévue pour ceux conclus en CDD.

L'amendement 347, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 348 est rédactionnel.

L'amendement 348, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – L’amendement 349 aligne la durée maximale de versement de l’aide de l’État au titre des CAE conclus en CDI sur celle déjà prévue pour ceux conclus en CDD.

L'amendement 349, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure – Les amendements 350 et 351 sont rédactionnels.

Les amendements 350 et 351, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Rapporteure – L’amendement 352 renvoie à un décret le soin de préciser les modalités de mise en œuvre de l’article.

Mme la Ministre déléguée – Favorable.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Eh voilà ! Il va falloir attendre un nouveau décret et tout le dispositif restera bloqué d’ici là !

L'amendement 352, mis aux voix, est adopté.
L'article 6 N modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 6 N

M. Frédéric Dutoit – L’amendement 276 reprend plusieurs aspects d'une proposition de loi que nous avons déposée en mars dernier. Notre groupe a en effet prévu plusieurs dispositifs pour combattre les abus manifestes dont sont victimes les stagiaires. Soumis à plusieurs organisations syndicales de salariés, d'étudiants et au collectif « génération précaire », ils recueillent leur approbation unanime. Aujourd'hui, parmi les nombreuses formes d'emploi atypique, est apparue une nouvelle forme : le stage. Détourné de son objectif pédagogique, le stage – et la convention qui en détermine les contours – tend à devenir un moyen ordinaire pour le patronat de s'attacher les services d'une force de travail qualifiée.

Dans un contexte de chômage massif, des jeunes en particulier, le patronat abuse du stage pour bénéficier ainsi d'une main-d'œuvre bon marché sans s'embarrasser des garanties protectrices obligatoires d'un contrat de travail. Nombre de jeunes sont ainsi « embauchés » via un stage, alors que leurs missions et leur durée de présence dans l'entreprise relèvent manifestement d’un contrat de travail. Comme le fait observer le collectif « génération précaire », la multiplication des stages pour les étudiants, liée à l'allongement de la durée des études, a fourni aux entreprises, administrations et associations une quantité croissante de stagiaires. Beaucoup d’étudiants s’ancrent ainsi dans la précarité, sans perspectives d’avenir professionnel ou personnel.

Sans objectif pédagogique clair, privés de tout contact avec le monde universitaire, ces jeunes sont en fait recrutés sous une nouvelle forme de sous-emploi. Par ce procédé, les stages ne constituent plus un tremplin pour l'emploi car ils sont devenus une forme d'emploi .

Nous entendons lutter résolument contre le remplacement du contrat de travail par une simple convention de stage. Cela suppose de mieux définir le sens des conventions et de réaffirmer le lien pédagogique entre les parties : l'employeur, l'établissement d'enseignement et l'étudiant. Lutter contre ces abus, c'est non seulement garantir aux salariés le respect de leurs droits, mais aussi réaffirmer la complémentarité des formations théoriques et pratiques et revaloriser le stage lui-même.

Compte tenu du développement massif des stages obligatoires, il importe donc de leur donner une définition légale, en vue d’accorder des droits nouveaux aux stagiaires.

L’absence de véritable distinction entre contrat de travail et convention de stage provoque de nombreuses dérives au regard du droit social comme l'absence de rémunération obligatoire ou la privation de certains droits sociaux. Il apparaît donc clairement que le statut juridique doit s'adapter à cette évolution et tirer l'enseignement de la pratique du stage. C'est pourquoi, avec cet amendement et la proposition de loi, nous souhaitons apporter des éléments de réponses aux manquements les plus pénalisants pour les stagiaires.

Il s'agit de renforcer la définition du stage dans l'enseignement supérieur et de préciser les points qui distinguent ce mode de formation pratique d'un contrat de travail. En conséquence, la conclusion de toute convention de stage ne doit pas se détourner de l'objectif pédagogique et respecter l'équilibre entre formations théorique et pratique. Cela pose les principes de sa durée comme de son renouvellement.

S'il y avait volonté d'en dénaturer l'objet, il convient de prévoir la requalification de la convention de stage en contrat de travail, et d'accorder au stagiaire les droits et obligations afférents au contrat de travail, tel qu'il sera requalifié par le tribunal.

C'est un élément fondamental du respect de la nature du stage, et cela apporte une garantie de préservation des droits du travailleur. Cette première mesure permet donc la requalification des conventions de stage en contrat de travail en cas d'abus.

Mme la Présidente - Je considère, Monsieur Dutoit, que vous avez défendu les amendements 276, 275 et 277.

M. Frédéric Dutoit - Soit.

Mme la Rapporteure – Avis défavorable. Le présent Gouvernement est en effet le premier à s’être efforcé d’encadrer les stages offerts aux jeunes en début de carrière professionnelle. Il s’agissait de trouver un équilibre entre deux impératifs : mettre fin à des abus manifestes et conserver une certaine souplesse, car les stages débouchent aussi sur des embauches. Dans le cadre de la loi pour l’égalité des chances du 31 mars 2006, il est prévu que les stages en entreprise doivent faire l’objet d’une convention et ne peuvent durer plus de six mois. Le versement d’une gratification est obligatoire dès lors qu’ils dépassent trois mois. Un décret, publié le 29 août 2006, est venu préciser le contenu des conventions. Il dispose ainsi qu’aucune convention de stage ne peut être conclue pour remplacer un salarié en cas d’absence, de suspension de son contrat de travail ou de licenciement, pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent pour faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ou pour occuper un contrat saisonnier. Ces précisions devraient vous satisfaire, Monsieur Dutoit…

M. Frédéric Dutoit - Pas du tout.

Mme la Rapporteure – Enfin, une charte des stages étudiants a été signée le 26 avril 2006 par MM. Larcher et Goulard, les représentants patronaux, les représentants des établissements d’enseignement supérieur et trois organisations étudiantes. Nous pensons qu’il convient par conséquent de laisser au dialogue social la possibilité de se déployer sans adopter de nouvelles mesures législatives.

Mme la Ministre déléguée – Le Gouvernement partage l’analyse de votre rapporteure. Conscient des abus auxquels pouvaient donner lieu les stages, il vous a soumis l’année dernière, dans le projet de loi pour l’égalité des chances, un article concernant l’encadrement des stages. Ses dispositions ont pour objet d’ancrer les stages dans leur vocation pédagogique et de prévenir toute dérive. S’agissant de la gratification des stagiaires, l’article 9 de la loi pose le principe d’une gratification obligatoire pour tous les stages d’une durée supérieure à trois mois consécutifs et renvoie aux partenaires sociaux la responsabilité de fixer le montant de cette gratification, par un accord ou une convention collective étendue. En effet, il apparaît qu’une négociation de branche est préférable à une négociation nationale interprofessionnelle, parce qu’elle permet de s’adapter aux particularités du secteur d’activité concerné. Toutefois, afin de garantir le droit reconnu au stagiaire, le Gouvernement publiera au printemps un décret fixant le montant de cette gratification dans les branches n’ayant pas conclu d’accord.

Les amendements 276, 275 et 277, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Frédéric Dutoit – Je vais défendre l’amendement 279, bien que je ne me fasse aucune illusion sur ses chances d’être adopté ! Je souhaite en effet redire l’opposition farouche de notre groupe au CNE, dont l’abrogation immédiate constitue une exigence non négociable. Cette entorse aux principes communs du contrat de travail, que certains voudraient voir diffuser via le « contrat unique » est en effet inacceptable, autant qu’inefficace pour combattre le chômage. Le CNE ignore des décennies d’avancées du droit social, en particulier pour ce qui concerne la justification du motif du licenciement et la limitation de la durée de la période d’essai. En outre, alors qu’il était promis qu’il créerait des emplois, force est d’admettre qu’il n’en est rien : le CNE est une tromperie. Selon une étude récente, 35 % des CNE ont été signés par des salariés déjà présents dans l’entreprise sous d’autres formes d’emplois. Et 71 % des entreprises signataires avouent qu’elles auraient embauché de toute façon, en CDI pour 40 % d’entre elles ! Las, vous leur avez offert la possibilité de plonger les salariés dans l’incertitude pendant deux ans. Une étude du ministère de l’emploi publiée en juin 2006 précise même que 90 % des CNE se sont substitués à des CDI ou à des CDD, et que seulement 60 % des contrats signés constituent de véritables créations d’emplois. En outre, l’INSEE révèle que 30 % de ces contrats ont été rompus dans les six mois suivant leur création. En d’autres termes, le CNE – comme nous l’avions prédit à l’époque de sa création – est venu se substituer à des contrats de travail plus stables, dans un contexte où la part des contrats précaires ne cesse de croître.

Enfin, selon une étude de la DARES publiée ce mois-ci, la moitié des CNE sont rompus au bout d’un mois. Avec cette politique, nos concitoyens sont victimes d’une double peine, condamnés aux petits boulots, donc aux petits salaires. Nous voulons rompre avec cette spirale infernale ; nous refusons de nous résigner et nous opposons au cassage des acquis sociaux et à la dilapidation de l’argent public une autre vision.

Trois mesures doivent être prises immédiatement pour relever le défi de l’emploi et des salaires : augmenter sans délai toutes les grilles salariales, et notamment porter le SMIC à 1 500 euros ; ouvrir dans chaque entreprises des négociations en faveur du remplacement des départs en retraite contre embauche ; enfin, légiférer, après concertation, pour appliquer un véritable plan national de sécurité de l’emploi instituant le droit pour chacun d’occuper un emploi stable et correctement rémunéré, ainsi que le droit à la formation tout au long de la vie, résorbant les formes dégradées de l’emploi et permettant aux salariés d’intervenir efficacement dans la marche de l’entreprise.

La période à venir va faire tomber les masques, en distinguant ceux qui veulent encore altérer le code du travail et ceux qui se placent résolument du côté du progrès social, ce qui passe d’abord par l’abrogation du CNE, suite logique de l’abandon du CPE.

M. Michel Piron - Le CNE ne mérite pas tant d’indignation, comme il ne mérite pas non plus d’éloges démesurés. La donnée de base sur laquelle il repose est que pour qu’il y ait des emplois, il faut qu’il y ait des employeurs, qui prennent des risques. M. Dutoit vient de citer différents rapports ; or, je lis dans ces rapports que la moitié des CNE rompus le sont à l’initiative des salariés. La plupart des chercheurs reconnaissent que ces contrats ont contribué à créer des emplois.

L'amendement 279, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Frédéric Dutoit – Tandis que 7,5 millions de nos concitoyens vivent sous le seuil de pauvreté, avec moins de 750 euros par mois, le nombre des « super-riches », dont le patrimoine dépasse les 20 millions, a augmenté de 24 % depuis 2000, pour atteindre les 2 000 foyers. Alors qu’un employé de la grande distribution gagne en moyenne 600 euros par mois, les patrons d'une société du CAC 40 en gagnent 200 000, et l’addition de leurs stocks-options se monte à 700 millions.

Nous proposons pour notre part de relever immédiatement les salaires, notamment en portant le SMIC à 1 500 euros.

M. Dominique Tian - C’est original !

M. Frédéric Dutoit - Nous sommes les seuls à le proposer.

Les écarts de richesses sont également liés à une réforme fiscale injuste, qui favorise la finance et les contribuables les plus aisés : réduction de l'impôt sur les sociétés par la suppression de la surtaxe Juppé – 500 millions –, plafonnement de la taxe professionnelle – 1,5 milliard –, allégement du mécanisme d'imposition des plus-values à long terme sur la cession de titres de participation des entreprises – un milliard –, réduction de la progressivité de l'impôt sur le revenu et intégration de l'abattement de 20 % – 885 millions pour 100 000 foyers –, bouclier fiscal – 250 millions pour 14 000 foyers –, abattement d'ISF pour les PDG et les hauts cadres actionnaires – 68 millions – ; au total, les cadeaux au capital et aux nantis s’élèvent à 6 milliards dans le budget pour 2007.

Pendant ce temps, les gens peinent à se loger. Ces 6 milliards n’auraient-ils pas été plus utiles à la relance de la croissance par la consommation et par l'augmentation du pouvoir d'achat ? L’amendement 278 vise à envoyer un signal au monde du travail, pour dire que nous avons entendu la nécessité d'augmenter les salaires.

M. Dominique Tian - Le signal, vous l’aurez aux présidentielles !

M. Frédéric Dutoit - Je vous rappelle, Monsieur Tian, qu’à Marseille, la moitié de la population n’est pas imposable sur le revenu.

M. Alain Néri - Ils n’ont pas pu bénéficier des baisses d’impôt !

Mme la Rapporteure - L’amendement relevant de la pétition de principe, j’émets un avis défavorable.

Mme la Ministre déléguée - Je suis d’autant plus défavorable à cet amendement que le Gouvernement, sous l’impulsion de Gérard Larcher, a relancé la négociation salariale dans les branches. Au terme de la première période, toutes ont ouvert des négociations et, sur 158 branches du secteur général, seules 21 n’étaient pas parvenues à un accord avant avril 2006. Au regard de ce bilan, et de l’avis unanime de la commission nationale de la négociation collective, le suivi a été reconduit. Le directeur général du travail réunira le 21 février les membres du comité de suivi pour dresser un bilan de la négociation depuis juillet 2006. Pour autant, il ne convient pas que l’État se substitue aux partenaires sociaux dans un domaine où la négociation annuelle est obligatoire. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement, en rappelant qu’aucun salarié ne peut être rémunéré en dessous du SMIC.

L'amendement 278, mis aux voix, n'est pas adopté.

Art. 6

M. Frédéric Dutoit – L'article 6 vise à introduire une mesure qui n'a pu l'être dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, ayant été censurée par le Conseil constitutionnel. Nous ne croyons pas que ces dispositions soient plus à leur place dans ce texte, et ce pour des raisons de fond que le Conseil constitutionnel n'a pas eu à invoquer, ayant d’entrée relevé un vice de procédure.

Cet article méconnaît le principe d'égalité entre assurés sociaux, en permettant aux travailleurs indépendants de moduler leur participation au financement de la sécurité sociale proportionnellement à leurs revenus. Pour le coup, certains déclareront un peu plus au titre de leurs revenus d'activité non salariée, avec tout ce que cela implique pour les recettes fiscales de l'État. À l’évidence, ces entrepreneurs vont payer moins pour leur protection sociale : en fait, on adapte le principe de mutualisation à la situation particulière des bénéficiaires de la couverture ! L’amendement 280 tend donc à supprimer cet article.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. La censure du Conseil constitutionnel n’a porté que sur la procédure. Le prélèvement social professionnel simplifie les obligations déclaratives des travailleurs indépendants, dont les déclarations seront contrôlables. Il contribuera à résorber le travail au noir, sans imposer des contraintes administratives lourdes ; je ne comprends pas que vous ne soyez pas favorable à cela, Monsieur Dutoit. C’est un dispositif équitable, qui favorisera le développement des activités non salariées, donc de l’emploi.

Mme la Ministre déléguée - Même avis. La cotisation sociale proportionnelle garantira une meilleure justice sociale, puisqu’elle instaure un principe de paiement des cotisations à hauteur des moyens du travailleur, renforcera l’égalité entre le salariat et les travailleurs indépendants, soutiendra le pouvoir d’achat des travailleurs les plus modestes et rendra l’emploi plus attrayant.

L'amendement 280, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 22 est de cohérence. Je demande que le Gouvernement lève le gage.

Mme la Ministre déléguée - Avis favorable, et je lève le gage.

L'amendement 22 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 353 est de précision.

L'amendement 353, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 23 est rédactionnel.

L'amendement 23, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - Les amendements 354 et 355 sont de précision.

Les amendements 354 et 355, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.
L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

après l’art. 6

M. Pierre-Christophe Baguet - L’amendement 109 est l’aboutissement d’une longue et vieille histoire. Son contenu – qui vise à clarifier les règles de décompte des effectifs dans les entreprises pour l’application des textes sur les institutions représentatives du personnel – a déjà fait l’objet de deux dispositions législatives adoptées par le Parlement, introduites dans la loi relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié. Le Conseil constitutionnel a censuré à deux reprises cette disposition, la première fois au motif qu’il s’agissait d’un cavalier législatif, la seconde fois pour une question de fond. Cette nouvelle rédaction tient compte des souhaits exprimés par le juge constitutionnel.

Il faut absolument régler ce problème, qui remonte à 2004, avant la fin de la législature : d’une part, la sécurité juridique commande de mettre un terme à cette situation suscitant de nombreux contentieux, d’autre part, les entreprises, persuadées que ce problème serait résolu en 2006, ont repoussé au premier trimestre 2007 leurs élections professionnelles.

Il n’existe pas d’obstacle politique, puisque notre majorité, qui a adopté par deux fois cette disposition, ne saurait se déjuger. Il n’existe pas plus d’obstacle constitutionnel, la rédaction nouvelle ne remettant pas en cause le préambule de 1946 et le droit des salariés de participer, par l’intermédiaire de leurs délégués, à la détermination collective de leurs conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises. Les entreprises fondent beaucoup d’espoir sur cet amendement, ne les décevons pas !

M. Dominique Tian - L’amendement 190 identique est défendu.

Mme la Rapporteure – La commission a accepté cette proposition, correspondant à une mesure votée dans le projet de loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié. À titre personnel, et après une nuit de réflexion...

M. Alain Néri - Vous avez empêché Mme la rapporteure de dormir !

Mme la Présidente - Allons, ce n’est pas la nuit des Longs Couteaux ! (Sourires)

Mme la Rapporteure - …je me pose la question ! Il est vrai que la jurisprudence fluctuante de la Cour de cassation justifie que l’on cherche à clarifier les règles de décompte des effectifs. Cela dit, comme l’a rappelé le juge constitutionnel, les salariés ont un droit constitutionnel à participer à la détermination des conditions de travail et à la gestion des entreprises par l’intermédiaire de leurs délégués. Le Conseil constitutionnel ayant estimé que ce droit appartenait aussi à tous ceux qui sont intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail, sommes-nous bien certains que cet amendement ne les exclut pas des règles de décompte ? Par ailleurs, le traitement différencié des élections au comité d’hygiène et de sécurité est discutable et va à l’encontre de la tentative de simplification du droit. Pour toutes ces raisons, à titre personnel, j’émets un avis réservé sur cet amendement que, je le répète, la commission a accepté ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme la Ministre déléguée – M. Larcher mène actuellement des consultations relatives au dialogue social. Aussi le Gouvernement n’entend-il pas revenir, à l’occasion de l’examen de ce texte, sur des dispositions relatives à la représentation des salariés. Certes, le problème existe, mais il doit faire l’objet de consultations. Le Gouvernement vous demande donc de ne pas adopter cet amendement.

M. Pierre-Christophe Baguet – Il l’a pourtant fait voter deux fois !

Mme Martine Billard - Je reconnais une chose à nos collègues, c’est l’obstination ! Cette disposition n’avait pas grand-chose à voir avec la loi sur l’égalité professionnelle ni avec la loi sur la participation ; cet amendement est toujours un cavalier législatif puisque le texte dont nous discutons ne porte pas sur le code du travail !

Pour une fois, je vais soutenir la ministre…

Mme la Ministre déléguée - Tout arrive !

Mme Martine Billard - …Une loi sur le dialogue social a été votée ici-même, l’engagement ayant été pris qu’il n’y aurait plus de modification sans concertation préalable avec les partenaires sociaux. Cela n’empêchait pas le dépôt d’amendements, comme le prouve cette ultime tentative de nos collègues.

M. Yves Censi - Certains se permettent de penser librement !

Mme Martine Billard – L’article L. 620-10 du code du travail prend en compte les travailleurs mis à disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure, au prorata de leur temps de présence au cours des douze mois précédents, et dans la mesure où ils ne remplacent pas des salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu.

Les travailleurs détachés de manière permanente font donc partie de l’entreprise. Ils peuvent représenter, dans un grand magasin comme la Samaritaine, jusqu’à la moitié des effectifs. À ce titre, ils ont été, lors de la fermeture de cette entreprise, inclus dans le plan social. Accepter votre amendement reviendrait à faire tomber un certain nombre de droits sociaux dans ces entreprises comptant une part importante de salariés détachés. C’est bien cela qui vous est demandé par le patronat de ces entreprises, et c’est bien la raison pour laquelle il faut repousser cet amendement !

M. Patrick Braouezec - Très bien.

M. Frédéric Dutoit – Vous profitez de ce texte pour enfoncer encore le clou de la déréglementation du code du travail. Après avoir discuté longuement sur le dialogue social, après avoir défendu votre attachement aux vertus de la négociation, vous présentez deux amendements qui nuiront aux institutions représentatives du personnel. Cette démarche fait suite à deux tentatives, toutes deux censurées : visiblement, vous y tenez !

Qu’en pensent les partenaires sociaux ? Le Gouvernement a pris l’engagement de toujours les consulter avant de légiférer. Je doute que cela ait été fait. Depuis l’ordonnance du 24 juin 2004, le calcul des effectifs à prendre en compte pour toutes les dispositions fiscales ou sociales dépend d’un seuil, unifié dans l’article L. 620-10. De ce calcul dépendent les dispositions relatives à la représentation du personnel, à la santé et à la sécurité, à l’emploi des personnes handicapées ou le droit à congé pour création d’entreprise. L’application d’une telle mesure aboutirait à une réduction drastique de la représentation des salariés, notamment dans les grands sites industriels où l’éclatement des statuts et la précarité posent les plus graves problèmes.

En outre, cette disposition constitue une violation flagrante du droit constitutionnel à participer à la détermination des conditions de travail. L’article L. 422-1 du code du travail dispose que les salariés extérieurs, qui, dans l’exercice de leur activité, ne se trouvent pas placés sous la subordination directe de l’entreprise utilisatrice, peuvent faire présenter leurs réclamations individuelles et collectives concernant les conditions d’exécution du travail par les délégués du personnel de l’établissement. En excluant du calcul des effectifs ces salariés sous contrat de sous-traitance, on diminuerait le nombre et les moyens des délégués du personnel.

Cela représente aussi un grand recul jurisprudentiel, dans la mesure où l’article L. 620-10 du code du travail intègre dans les effectifs les salariés extérieurs, notion consolidée par la jurisprudence depuis six ans maintenant. Ces amendements exercent par conséquent une pression visant à infléchir les décisions des juges. Enfin, ils vont à l’encontre de l’adaptation nécessaire du droit social à l’évolution des entreprises, comme aux pratiques d’embauche. J’espère que la majorité ne les votera pas !

M. Michel Piron - Il s’agit sans doute d’un vrai sujet, mais le moins que l’on puisse dire est qu’il n’est pas au cœur du projet dont nous débattons, et qu’il a fait naître de fortes nuances à l’intérieur de notre groupe, pour ne pas dire de chacun d’entre nous – la nuit semble avoir porté conseil…

Je me bornerai pour ma part à trois observations. En premier lieu, le sujet qui nous occupe est bien le droit au logement opposable, et non la réforme du droit du travail. Ensuite, de réelles incertitudes pèsent sur la constitutionnalité de cet amendement. Enfin et surtout, cet amendement nous ramène immanquablement à la question du dialogue social.

Mme la Rapporteure - Absolument.

M. Michel Piron – Les discussions en cours entre M. Larcher et les représentants syndicaux portent notamment sur la représentation syndicale. Oui ou non, acceptons-nous que le dialogue social soit un préalable à toute modification législative du droit du travail ? Bref, il y a bien des raisons pour ne pas adopter cet amendement ici et maintenant. Le dialogue en cours doit être mené jusqu’à son terme. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste)

Mme la Rapporteure - M. Piron vient de donner les trois raisons qui plaident pour le rejet de cet amendement. Je voudrais simplement insister, chers collègues de la majorité, sur le fait qu’un dialogue social est en cours. Au-delà de l’intention louable des signataires de cet amendement, c’est ce dialogue social que nous risquons de mettre à mal.

M. Patrick Braouezec – Pire : il serait révélateur d’autre chose !

Mme la Rapporteure - Le moment est donc mal choisi pour adopter cet amendement, sur lequel je suis très réservée.

M. Dominique Tian - Je rappelle à Mme Boutin que la commission a donné un avis favorable à cet amendement. En outre, il a été voté à deux reprises par l’Assemblée et par le Sénat. Il n’y a donc aucune ambiguïté, du moins du côté de l’UMP.

M. Alain Néri - Ça, oui !

M. Dominique Tian – Le Conseil constitutionnel a certes censuré cette disposition, mais la nouvelle version que nous avons rédigée tient compte de ses décisions.

Mme Martine Billard, M. Patrick Braouezec et M. Frédéric Dutoit - Non !

M. Dominique Tian – Enfin, cet amendement met fin à une insécurité juridique préjudiciable aux entreprises.

M. Jean-Louis Dumont - Généralement, les mauvais coups se font de nuit. Cet amendement, lui, vient en plein jour. Je rappelle simplement que le projet de loi portant diverses dispositions d’ordre économique et social a déjà porté un mauvais coup au corps électoral qui élira les conseils des prud’hommes en 2008. On s’est longuement interrogé pour savoir comment revenir sur les résultats des dernières élections. On vient de s’aviser que si le président de l’association en charge du statut d’employeur n’est pas fonctionnaire ou retraité, il n’aura pas le droit de vote. Certains de nos collègues de la majorité se livraient lundi à Versailles à des analyses sur le corps électoral de la Nouvelle-Calédonie. Cela ne les empêche pas, dans le même temps, d’organiser les élections aux conseils des prud’hommes en éliminant le plus possible de dirigeants ! Le Medef vous a peut-être convaincus, mais c’est là un mauvais coup porté au dialogue social. Dialogue social, disiez-vous. Un ministre peut bien en parler des heures, des jours, voire des mois. Pendant ce temps-là, sa majorité prépare ses mauvais coups !

Ce texte devait nous rassembler tous sur le droit au logement opposable, l’hébergement d’urgence, l’accompagnement social et la réinsertion. Nous dénonçons donc ces dérives.

M. Pierre-Christophe Baguet - Je rappelle à mes collègues socialistes et communistes que dans la loi portant diverses mesures d’ordre social votée à la fin de la précédente législature figuraient pêle-mêle le plan d’aide au retour à l’emploi, un article sur la télévision et un autre sur les colonies de vacances ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Bref, c’était un texte fourre-tout comme on n’en avait jamais vu ! Ne venez donc pas nous donner de leçons aujourd’hui ! Le texte s’intitule d’ailleurs « droit au logement opposable et diverses mesures en faveur de la cohésion sociale ».

Le problème n’est pas celui de la prise en compte des salariés dans les entreprises, mais celui du double décompte. Les salariés peuvent voter deux fois, et contrairement à ce que dit Mme Billard, cela concerne uniquement les délégués du personnel et les membres du comité d’entreprise.

L’article L. 620-10 du code du travail prévoit en effet qu’il faut prendre en compte, pour le calcul du nombre de sièges des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise, les « travailleurs mis à disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure ».

La jurisprudence et l'administration ont longtemps considéré que cette disposition ne concernait que l'intérim et les prêts de main-d'œuvre à but non lucratif. Les salariés des entreprises sous-traitantes et prestataires de services travaillant dans les locaux d'une entreprise d'accueil n’étaient donc pas pris en compte dans ses effectifs.

Mais en 2004, un revirement de jurisprudence a remis en cause cette interprétation. Les salariés des entreprises de nettoyage, de maintenance des machines, de restauration, de gardiennage… doivent désormais être décomptés dans les effectifs de l’entreprise d’accueil. Or ce double décompte provoque des franchissements de seuil indépendants des effectifs propres à l'entreprise utilisatrice. Comme en outre il détermine le nombre d'élus du personnel – délégués du personnel, membres du comité d'entreprise – et celui des heures de délégation, on arrive aujourd'hui à des cas aberrants.

Lors des dernières élections dans une grande entreprise, on a ainsi constaté que la prise en compte dans ses effectifs des salariés des entreprises sous-traitantes et prestataires de services faisait passer le nombre des délégués du personnel sur un de ses sites de 26 titulaires et 26 suppléants à 51 titulaires et 51 suppléants ! Dans une autre entreprise, le nombre de délégués du personnel est passé de 20 titulaires et 20 suppléants à 27 titulaires et 27 suppléants.

Dans ces deux cas, les salariés des entreprises sous-traitantes ou prestataires de services ont été décomptés deux fois – une fois dans les effectifs de l'entreprise d'accueil et une fois dans ceux des entreprises dont ils sont salariés.

Les contentieux risquant de se multiplier, la question doit être réglée rapidement par la loi, en conformité avec la dernière décision du Conseil constitutionnel.

Terminons sur une note d’humour à l’intention de Martine Billard. Les Verts sont pour le mandat unique. Ne devraient-ils pas être pour l’entreprise unique ?

Mme Martine Billard - Ce n’est pas très clair !

M. Alain Néri – Mme la rapporteure a parlé d’intention louable. Je ne partage pas son avis. Il s’agit au contraire d’un amendement provocateur, puisqu’il n’a rien à voir avec le droit au logement opposable. Bref, il est hors sujet, et comme la dernière fois, le Conseil constitutionnel ne s’y trompera pas !

Vous nous dites aussi, Madame la rapporteure, que le moment n’est pas bien choisi. Je me demande si nos collègues Tian et Baguet n’ont pas au contraire bien choisi leur moment pour essayer de faire adopter à la hussarde un amendement de régression sociale dans un texte éminemment social.

Il y a enfin – cela a été dit – des négociations en cours. Nous avons consacré dans un autre texte le principe selon lequel on ne peut modifier le code du travail sans négociation préalable avec les partenaires sociaux.

Pour toutes ces raisons, nous allons vous aider, Madame la ministre, en votant contre cet amendement anti-social. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Michel Piron - Ces amendements n’ont indéniablement aucun lien avec le droit au logement opposable et en justifier la présentation en arguant que des textes fourre-tout ont été adoptés à la fin de la législature précédente me paraît indéfendable. Ce n’est pas parce que des erreurs ont été commises sur les bancs socialistes que nous devons nous sentir obligés de les réitérer !

M. Jean-Louis Dumont - Voilà une belle rigueur ! (Sourires)

M. Michel Piron - En raison du risque d’inconstitutionnalité et parce que le dialogue social est nécessaire, ces amendements ne me semblent pas devoir être retenus. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains)

Mme la Rapporteure - Je tiens à ce que les choses soient claires. La commission a effectivement accepté ces amendements…

M. Alain Néri – Par erreur !

Mme la Rapporteure - …mais la nuit portant conseil, je vous avais ensuite fait part, Monsieur Tian, de mes réserves personnelles. Ayant, à l’instant, entendu les arguments échangés, je vous dis maintenant être contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) Je vous rappelle qu’ils ont été examinés dans le cadre de l’article 88, au sein d’une liasse de trois cents amendements dont il fallait débattre en peu de temps. Cela peut expliquer qu’ils aient été adoptés par la commission, dans une certaine précipitation. Quoi qu’il en soit, j’émets, à titre personnel, un avis contraire à celui qu’a exprimé la commission. (Applaudissements sur les mêmes bancs)

Mme la Ministre déléguée - Le sujet évoqué n’a rien à voir avec le droit au logement opposable. Le double décompte est une question de fond, qui doit être discutée comme un élément du dialogue social et, alors que le ministre délégué à l’emploi mène une négociation, le vote de ces amendements serait particulièrement malvenu. J’y suis donc opposée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des députés communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe UMP)

Mme Martine Billard – Ils seraient de toute façon inapplicables car, selon le code du travail dans les entreprises de moins de 50 salariés, délégués du personnel et CHSCT peuvent être confondus.

M. Frédéric Dutoit - Les auteurs de ces amendements me conduisant à défendre la position du Gouvernement, voilà qui est assez cocasse et probablement inédit…

Mme la Présidente - Cela démontre l’intelligence des députés ! (Sourires)

M. Frédéric Dutoit - Les communistes, qui se sont toujours prononcés en faveur du droit au logement opposable, ont engagé la discussion du projet dans un esprit constructif. Présenter de tels amendements à ce texte n’est pas innocent…

M. Alain Néri - C’est de la provocation !

M. Frédéric Dutoit - De la provocation en effet, et qui fleure la manœuvre politicienne, comme si l’on s’employait par tous les moyens à empêcher le consensus qui aurait pu se faire. (Protestations sur certains bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Dumont - Retirez-les !

Les amendements 109 et 190 identiques, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme la Rapporteure - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 12 heures 5, est reprise à 12 heures 20.

Art. 6 bis

M. Yves Censi - La discussion parlementaire sur l’article 71-12 de la loi du 9 décembre 2004, dite de simplification du droit, avait permis au Parlement de préciser les orientations qu’il souhaitait donner à l’organisation du nouveau régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants. Il souhaitait en particulier maintenir la distinction entre le régime et les gestionnaires. Pour cela, il convient d’indiquer clairement que la délégation de la gestion des prestations maladie et maternité aux organismes conventionnés est une délégation de plein droit. C’est pourquoi notre amendement 155 remplace les mots « peut confier » par le mot « délègue »

Mme la Rapporteure – La commission a repoussé cet amendement, considérant que la mise en place du régime social des indépendants – le RSI – et d’un interlocuteur social unique est le fruit d’une maturation très complexe et aboutit à un équilibre institutionnel que le présent amendement risquerait de remettre en cause.

Mme la Ministre déléguée - Les organismes conventionnés sont assurés de conserver, à partir du 1er janvier 2008, date prévue pour la mise en place de l’interlocuteur social unique des travailleurs indépendants, la totalité du service des prestations qui leur était auparavant confié par le régime d’assurance maladie des travailleurs indépendants.

Sur le plan juridique, l’habilitation donnée au Gouvernement par l’article 71-12 de la loi de simplification de décembre 2004 permet de donner à la caisse nationale du RSI la possibilité de confier ou non le service des prestations maladie aux organismes conventionnés actuels ou aux organismes de sécurité sociale. L’ordonnance qu’il vous est proposé de ratifier est donc strictement conforme à la loi d’habilitation.

M. Bas et M. Bertrand ont par ailleurs rappelé, le 28 mars dernier, la faculté ouverte par l’ordonnance d’un élargissement du conventionnement par le RSI à des organismes de sécurité sociale. En cas de désengagement des organismes conventionnés actuels, la continuité du service des prestations serait ainsi assurée.

C’est pourquoi le Gouvernement demande à M. Censi de bien vouloir retirer son amendement.

M. Yves Censi - Je ne le retire pas, car dans la loi d’habilitation, nous avions bien dit « délègue » et non pas « peut confier ». Quelle n’a donc pas été notre surprise de voir revenir dans l’ordonnance, au mépris de ce qui avait été voté dans l’hémicycle, les termes « peut confier » ! Quant à l’amendement sénatorial qui vise à conforter cette ordonnance, on ne peut pas dire qu’il soit très satisfaisant du point de vue du fonctionnement républicain.

M. Michel Piron - Je ne crois pas que l’on puisse me soupçonner d’un manque de solidarité envers le Gouvernement, mais là, j’ai une divergence avec lui, car la loi d’habilitation ne laissait en aucun cas la possibilité de déléguer ou pas. Ce n’était pas « peut confier », mais bien un indicatif valant impératif.

Faire de cette délégation une simple possibilité de délégation serait très gênant pour les organismes concernés, qui ne sauraient pas quel volume d’activité va leur être délégué ou non et ne pourraient donc pas déterminer de quel personnel ils ont besoin.

M. Louis Giscard d'Estaing - Très bien.

M. François Sauvadet - Le recours à l’ordonnance était dicté, nous avait-on dit, par la nécessité d’avancer plus vite. J’ai l’impression que l’on avance à reculons !

Derrière tout cela se pose la question de l’implication des professionnels. Il faut leur garantir que le choix qu’ils ont fait sera respecté et effectif. Or, une certaine ambiguïté demeure. Quelles sont donc les intentions réelles du Gouvernement en matière de délégation ?

Nous nous sommes tous engagés en faveur d’une simplification. Mais il est évident que celle-ci ne saurait se faire sans l’implication des professionnels eux-mêmes !

Mme la Ministre déléguée – Vous savez tous qu’il y a un recours devant le Conseil d’État. Les conclusions du commissaire du Gouvernement sont les suivantes : la délégation de service public est bien une possibilité de déléguer, pas une obligation de le faire. C’est exactement ce que nous disons aujourd’hui.

Mais bien sûr que le Gouvernement va déléguer ! Il n’a jamais été question de ne pas le faire ! Pour autant, le Gouvernement veut se garder la possibilité de reprendre la délégation s’il y a, à un moment ou un autre, une difficulté. Il faut tout prévoir ! Je suis donc défavorable à l’amendement.

M. Yves Censi – À l’évidence, nous ne partageons pas la même vision. Celle qui est portée par la ministre est véritablement collectiviste (Rires sur tous les bancs) alors que l’amendement promeut une vision de responsabilité. La responsabilité, c’est le maintien de la distinction entre régimes et gestionnaires. Le terme « délègue » est le seul qui permette de clarifier cette distinction. L’expression « peut confier » aboutit à une prise en main technocratique, et la volonté de l’administration sera que la gestion aboutisse forcément aux URSSAF. Je ne suis pas contre les URSSAF, mais je suis contre tout monopole et je ne vois pas pourquoi la loi en autoriserait un. Le mot « délègue » garantit la diversité.

Mme la Ministre déléguée – D’abord, il ne s’agit pas des URSSAF, puisque nous sommes dans le domaine de l’assurance maladie. Ensuite, rappelez-vous que lorsque la MNEF, par exemple, a connu des difficultés, il a bien fallu en reprendre la gestion ! Il faut pouvoir donner une délégation, mais aussi la reprendre, quitte à la redonner tout de suite à quelqu’un d’autre.

M. Yves Censi - Il ne faut pas considérer les organismes conventionnés comme complètement irresponsables ! À quoi aboutirait-on si l’on tenait ce type de raisonnement pour le régime agricole, en se demandant ce qui arriverait si les mutualités sociales agricoles ne parvenaient pas à assumer leur charge – j’ai même entendu parler de faillite de certains organismes conventionnés ? C’est non seulement totalement théorique, mais c’est aussi méconnaître la diversité des organismes conventionnés et la possibilité de se retourner sur d’autres organismes.

L'amendement 155, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Censi - La délégation de gestion aux organismes conventionnés concerne actuellement les organismes régis par le code de la mutualité ou bien prévus par le code des assurances. Le texte introduit par l'ordonnance l’élargit aux organismes de sécurité sociale, c'est-à-dire aux caisses primaires d'assurance maladie. Cette rédaction est contraire à la loi d'habilitation, qui n'a pas prévu de délégation de gestion des prestations de maladie aux régimes des salariés. Justifier cette disposition par la volonté d'assurer la continuité du service public des prestations dans le cas du désengagement des organismes conventionnés, outre que cela ne repose sur aucun fondement, ne correspond pas à la rédaction du Gouvernement qui crée une troisième catégorie d'organismes conventionnés à titre permanent. L’amendement 154 supprime donc cet élargissement.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable pour les mêmes raisons que le précédent amendement.

Mme la Ministre déléguée - Même avis.

M. Michel Piron - En effet, les raisons sont les mêmes !

L'amendement 154, mis aux voix, est adopté.

Mme la Rapporteure - L’amendement 356 est rédactionnel.

L'amendement 356, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 6 bis, modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 6 ter

M. Alain Néri – L'article 6 ter, adopté au Sénat à l'initiative du Gouvernement, modifie l'habilitation du 23 mars 2006 et l'ordonnance du 13 avril 2006 relative au contrat de transition professionnelle, ratifiée et modifiée par la toute récente loi du 30 décembre 2006. Cet article vise à porter de deux à trois ans la période d'expérimentation du contrat de transition professionnelle, destiné aux licenciés économiques et expérimenté dans sept bassins d'emploi. Je ne suis pas le seul à m’en étonner : Mme Boutin, dans son rapport, écrit elle-même qu’il est permis de s'étonner d’un second ajustement d'une ordonnance vieille de… huit mois ! Nous sommes là encore dans la précipitation.

Le contrat de transition professionnelle est destiné à faciliter le reclassement des salariés licenciés pour motif économique dans les entreprises de moins de mille salariés. L’habilitation du Gouvernement a été introduite par le biais d'un amendement gouvernemental au Sénat, sans que l'Assemblée nationale puisse s'exprimer puisque c’est la commission mixte paritaire qui est ensuite intervenue. Or, un peu plus d'un an auparavant, une convention de reclassement personnalisé avait été instituée, également destinée aux salariés licenciés pour motif économique dans les entreprises de moins de mille salariés, qui proposait des actions de formation professionnelle pour faciliter leur reconversion. Le contrat de transition professionnelle qui la remplace prévoit, lui, des périodes de travail chez un nouvel employeur dans le cadre de contrats à durée déterminée, c’est-à-dire une sorte de période d'essai, dans l'objectif de favoriser la mobilité professionnelle vers des emplois disponibles et ne nécessitant pas une formation importante. Il ne vise donc que des reconversions sur des postes de travail peu qualifiés. Est-ce vraiment l'objectif ? Ne devrait-on pas au contraire privilégier des reconversions qualifiantes, pour permettre aux salariés d'envisager une reconversion durable dans un parcours professionnel véritablement sécurisé ?

Selon l’article d'habilitation, le contrat de transition professionnelle est prévu à titre expérimental, pour une durée qui ne saurait excéder deux ans. La DARES ne disposant pas encore d’éléments statistiques à son sujet, il est difficile de se prononcer sur le succès du dispositif. Il n’y a donc aucunement lieu de prolonger la période d’expérimentation avant que le rapport d'évaluation prévu par l'ordonnance du 13 avril 2006 ne soit présenté par le Gouvernement au Parlement. Cela ne serait pas respectueux des droits du Parlement. C’est pourquoi l’amendement 123 tend à supprimer cet article.

L'amendement 123, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre Méhaignerie - Une expérimentation du contrat de transition professionnelle est engagée dans sept bassins d’emploi. Elle est extrêmement intéressante, car elle est la première étape de la sécurisation des parcours professionnels. Aujourd’hui, 70 % des licenciés pour raison économique adhèrent à ce contrat. Certes, ils y trouvent comme avantage le maintien de leur salaire pendant neuf à douze mois et le rattachement à l’association de la formation professionnelle des adultes, mais l’esprit même du contrat est le retour à l’emploi, le plus rapidement possible. Or, en l’état actuel des choses, le dispositif ne permet pas de recourir au contrat de travail temporaire, qui est pourtant une des voies par excellence qui permettent d’entrer dans une entreprise, de la tester et souvent d’obtenir un CDI. Cette interdiction est totalement incomprise, tant des salariés que des entreprises. Aujourd’hui, et après un contrôle de l’IGAS, tout le monde est convaincu qu’il faudrait permettre aux bénéficiaires du contrat de passer par l’intérim – actuellement, placés devant un dilemme, une partie d’entre eux préfèrent abandonner le contrat de transition professionnelle plutôt que de perdre la chance de gagner un emploi. C’est l’objet de l’amendement 79, qui est tout à fait conforme à la philosophie du dispositif.

J’ajoute que l’expérience en cours, extrêmement utile, nous permettra, dans un deuxième temps, d’aller vers une réelle sécurisation des parcours professionnels, en échange de la souplesse dont l’entreprise a besoin pour surmonter la peur de l’embauche.

Mme la Rapporteure - Avis favorable.

Mme la Ministre déléguée - Je remercie les auteurs de cet amendement. L’ordonnance d’avril n’avait effectivement pas prévu le recours aux contrats de travail temporaire, qui complète très utilement le dispositif. Le Gouvernement est très favorable à cet amendement.

L'amendement 79, mis aux voix, est adopté.
L'article 6 ter, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

Art. 6 quater

Mme la Rapporteure - L’amendement 357 apporte une précision.

L'amendement 357, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Paulette Guinchard - L’amendement 120 vise à permettre aux établissements sociaux et médico-sociaux d’exercer une action en justice directement contre les obligés alimentaires de leurs résidents. Votée dans la LFSS pour 2007, cette mesure a en effet été censurée par le Conseil constitutionnel. Les établissements s’efforçant de maîtriser les prix de journée pour rester accessibles au plus grand nombre, il convient de leur donner les moyens de faire respecter aux descendants – qui le peuvent – leurs obligations envers leurs parents.

L'amendement 120, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.
L'article 6 quater modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 6 quater

Mme Paulette Guinchard - Comme l’a montré un rapport de la MECSS, le reste à charge pesant sur les résidents des maisons de retraite et leurs familles reste excessif et les revenus de remplacement – et du patrimoine – des personnes âgées ne leur permettent pas d’assumer des charges d’hébergement croissantes. Au sein du secteur habilité à l’aide sociale, les structures d’hébergement ressortissant des CCAS sont exonérées de la taxe sur les salaires et ne s’acquittent pas de la TVA. Dans la majeure partie des cas, ce régime fiscal permet de proposer des prix d’hébergement accessibles au plus grand nombre. Par mon amendement 125, je propose d’harmoniser les conditions d’assujettissement social et fiscal du secteur habilité à l’aide sociale, en élargissant le bénéfice de l’exonération de taxe sur les salaires et en généralisant l’application du taux réduit de TVA – 5,5 % au lieu de 19,6 %. Cela devrait permettre au reste à charge de se stabiliser, sinon de diminuer.

Mme la Rapporteure – La commission n’a pas accepté cet amendement car l’impact financier d’une telle mesure semble difficile à évaluer. L’intention est bonne, mais les conséquences financières doivent être mieux appréhendées avant de prendre une décision. Mais peut-être le Gouvernement pourra-t-il nous éclairer ?

Mme la Ministre déléguée – Le présent Gouvernement a adopté plusieurs mesures tendant à faire diminuer le coût d’hébergement en maison de retraite…

Mme Paulette Guinchard - C’est vrai.

Mme la Ministre déléguée - …et plusieurs rapports lui ont été rendus à ce sujet. À l’évidence, l’exonération de taxe sur les salaires aurait un impact financier direct trop lourd sur les recettes de la sécurité sociale, et, pour les familles, ce qui serait économisé sur l’hébergement risquerait d’être répercuté sur les dépenses de soins. Le Gouvernement est donc défavorable à ce volet de l’amendement.

S’agissant de l’application du taux réduit de TVA, je ne dispose pas dans l’instant d’éléments nouveaux, mais il n’est pas exclu que le Gouvernement puisse l’envisager dans le cadre du volet logement du présent texte. La réflexion reste donc ouverte.

M. Yves Censi - Nous saluons l’efficacité du plan grand âge lancé par le Gouvernement en juin dernier. Le programme repose en effet sur des principes auxquels nous souscrivons sans réserve : affronter le défi de la longévité, donner aux personnes âgées un libre choix entre le maintien à domicile, l’accueil en établissement ou une solution intermédiaire, de type maison d’accueil rurale pour personnes âgées, les MARPA…

Mme Paulette Guinchard - Absolument ! Nous les connaissons bien !

Mme la Ministre déléguée – En effet.

M. Yves Censi - Le problème est que le régime fiscal applicable est différent selon que vous êtes considéré comme un locataire – par exemple dans un foyer-logement –, un résident ou l’hôte d’une maison d’accueil. Au terme des évolutions intervenues cette année, après l’adoption de la loi de finances et l’instruction fiscale qui a suivi, les MARPA ont été soumises à un régime analogue à celui des établissements touristiques. Il est pourtant difficile de considérer nos anciens accueillis dans ces structures comme des touristes ! Dès lors, si la totalité de l’amendement de Mme Guinchard ne peut être accepté, je souhaite que l’on corrige au moins les effets malencontreux de certains ajustements récents pour ce qui concerne l’application du taux réduit de TVA. Il serait regrettable que tout l’effort de revalorisation des petites retraites agricoles – dont les premiers effets se font sentir ce mois-ci – soit consacré, pour les personnes concernées, à payer l’assujettissement de leur loyer à la TVA !

Mme Paulette Guinchard - La question de la TVA est clairement posée. Il faut savoir que le prix d’hébergement supporté par la personne accueillie comprend – outre les frais liés à la fourniture du gîte et du couvert – une participation à l’amortissement des emprunts contractés pour créer la structure, un peu comme si les pensionnaires d’un internat participaient aussi aux charges de construction de leur dortoir… En commission et à la MECSS, nous sommes tous tombés d’accord sur le fait que l’application du taux réduit de TVA contribuerait à la maîtrise des coûts. C’est pourquoi je maintiens l’amendement 125, même si j’entends qu’il ne sera pas accepté en totalité.

Ce qu’a dit M. Censi sur les MARPA est très important. Au plan humain, il est primordial de maîtriser l’évolution des prix car, bien souvent, les familles se déchirent sur le point de savoir qui doit supporter la charge de l’accueil d’un parent dépendant. Il y a de vraies injustices et nombre de situations de discrimination. Je regrette que le monde politique, toutes tendances confondues, ne s’empare pas plus résolument de ces questions. Il est urgent de comprendre que la construction de maisons de retraites accessibles au plus grand nombre constitue une priorité nationale. (« Très bien ! » sur divers bancs)

Mme la Ministre déléguée – Vous avez raison, et je partage aussi l’opinion de M . Censi. À l’évidence, les MARPA ne sont ni des hôtels ni des résidences de tourisme et je souhaite que nous puissions aller vers l’application du taux réduit de TVA. Le Gouvernement va étudier la possibilité de vous présenter un amendement allant dans ce sens dès cet après-midi.

M. Alain Néri - Nous sommes confrontés à une situation qui va devenir de plus en plus difficile à gérer. L’espérance de vie augmente continûment, mais les personnes âgées deviennent à ce point dépendantes qu’elles sont obligées d’entrer en maison de retraite. En dépit de l’efficacité de notre dispositif de maintien à domicile et du succès de l’APA, il vient un moment où nos anciens sont obligés d’entrer en maison, et il est de notre devoir de veiller à ce qu’ils soient accueillis dans de bonnes conditions. Il faut donc construire massivement et rénover les structures existantes. Or, bien que les conseils généraux accomplissent des efforts importants, les prix de journée restent souvent prohibitifs, et parfois insupportables pour les personnes âgées ou leurs obligés.

En adoptant l’amendement 125, nous prendrons une mesure de solidarité et d’humanité, conforme de surcroît à l’évolution de la situation. En 1993, lorsque j’ai ouvert une maison de retraite dans ma commune, la moyenne d’âge d’entrée était de l’ordre de 76 ans ; aujourd’hui, elle est de presque dix ans supérieure, et cela n’est pas sans conséquences sur les charges communes car plus les personnes sont âgées, plus leurs ressources sont faibles.

On se tourne alors vers les obligés alimentaires, leurs enfants ; le drame, c’est que ceux-ci atteignent au même moment l’âge de la retraite, avec par conséquent une perte importante de ressources, qui va s’accentuer si la tendance de vos réformes se poursuit ! Les obligés alimentaires ne pourront pas payer le différentiel. C’est une grande détresse morale et psychologique de ne pas pouvoir permettre à ses parents de vivre décemment leurs dernières années. Il ne reste plus alors que l’aide sociale des conseils généraux, et c’est encore le contribuable départemental qui va payer. Pour toutes ces raisons, nous pourrions, dans un élan de solidarité et d’humanité, voter l’amendement de Mme Guinchard.

Mme la Ministre déléguée - Nous sommes tous d’accord sur l’enjeu, qui est l’équipement et le personnel des maisons de retraite, lesquelles accueillent de plus en plus des personnes âgées en situation de très grande dépendance. Mais l’amendement diminue les ressources de la sécurité sociale. Pour autant, il y a aussi dedans, sous-entendue, la question de la TVA à 5,5 % ; sur ce point, le Gouvernement vous proposera cet après-midi un amendement.

Mme la Rapporteure - Je ne voudrais pas laisser entendre que, parce que la commission a refusé l’amendement, nous ne serions pas sensibles à son aspect humanitaire. Nous adhérons à tout ce que vous avez dit, Monsieur Néri. Mais compte tenu de l’amendement du Gouvernement qui doit venir, je maintiens un avis défavorable.

L'amendement 125, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Présidente - Je vais lever la séance. Si nous ne siégeons pas ce soir, je saisis cette occasion pour vous dire que je quitte la présidence. Je tiens à remercier tous ceux qui m’ont aidée, durant toutes ces années, à travailler avec efficacité et dans la sérénité.

M. François Brottes - Madame la présidente, en comptant les amendements, nous avons vu que nous nous retrouverions ce soir et que nous aurions donc l’occasion de vous rendre hommage à ce moment-là.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.
La séance est levée à 13 heures 5.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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