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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 11 DÉCEMBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mardi 10 décembre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

DÉLINQUANCE «...»

MM. François Grosdidier, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

ÉDUCATION NATIONALE «...»

MM. Bruno Le Roux, Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

CANDIDATURE DE LA TURQUIE
À L'UNION EUROPÉENNE «...»

MM. Hervé Morin, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

DÉMOGRAPHIE MÉDICALE ET INFIRMIÈRE «...»

Mme Jacqueline Fraysse, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

SÉCURITÉ MARITIME «...»

MM. Louis Guédon, Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.

ACCÈS À L'INTERNET RAPIDE «...»

Mmes Valérie Pecresse, Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.

CHOIX DU DIRECTEUR GÉNÉRAL
DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS «...»

MM. Arnaud Montebourg, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

TRANSMISSION DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES «...»

Mme Marie-José Roig, M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.

MIXITÉ PROFESSIONNELLE «...»

M. Daniel Mach, Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.

DIALOGUE SOCIAL «...»

MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

ÉTATS GÉNÉRAUX DU SPORT «...»

MM. Jean-Marie Geveaux, Jean-François Lamour, ministre des sports.

MINES DE POTASSE D'ALSACE «...»

M. Michel Sordi, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.

Suspension et reprise de la séance «...»

2.  Prestation de serment des juges titulaires et suppléants de la Haute Cour de justice et de la Cour de justice de la République «...».
3.  Négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi. - Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi «...».
M. Dominique Dord, rapporteur de la commission des affaires culturelles.
M.
Maxime Gremetz,
Mme
Chantal Bourragué,
MM.
Gaëtan Gorce,
Francis Vercamer.
Adoption, par scrutin, de l'ensemble du projet de loi.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

4.  Loi de finances rectificative pour 2002. - Discussion d'un projet de loi «...».
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances.
M. Axel Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission de la défense.
M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

MM.
Marc Laffineur,
Didier Migaud,
Charles de Courson,
Michel Vaxès,
Philippe Auberger,
Gérard Bapt,
Jean-Yves Le Bouillonnec,
Michel Bouvard,
Jean-Louis Dumont,
Yves Censi.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
5.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.

DÉLINQUANCE

    M. le président. La parole est à M. François Grosdidier.
    M. François Grosdidier. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), quand on est, comme moi, un ancien parlementaire, un revenant dans cette assemblée, quand on a si souvent mesuré la difficulté pour tous les gouvernements d'honorer les engagements électoraux, quand on a vu des ministres pleins de bonne volonté s'épuiser à pédaler sur des vélos sans chaîne ou aux freins bloqués par des résistances technocratiques ou corporatistes, on ne peut que vous féliciter pour votre volontarisme. Vous tenez les engagements pris : merci et bravo ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Fayot !
    M. François Grosdidier. Alors que vous ne disposez pas encore des moyens supplémentaires humains et matériels que nous avons votés dans le budget pour 2003 ni des nouveaux pouvoirs juridiques que donnera aux forces de l'ordre la nouvelle loi dont nous débattrons en janvier, les crimes et délits sont pourtant en baisse : leur nombre a diminué de plus de 5 % entre novembre 2002 et novembre 2001. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Pouvez-vous détailler ces premiers résultats ?
    M. Bernard Roman. Encore une question téléphonée !
    M. François Grosdidier. Alors que vous êtes en butte aux critiques, aux procès d'intention et parfois aux vociférations d'une gauche politique, judiciaire et associative, qui avait, dans des communes comme la mienne et comme dans bien d'autres, laissé la loi de la jungle remplacer les lois de la République, êtes-vous, monsieur le ministre, déterminé à continuer sur cette voie et comment ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, le système statistique de la police et de la gendarmerie...
    M. Michel Delebarre. N'est pas encore parfait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... date de 1972. Il n'a pas été changé depuis trente ans. Que n'aurait-on dit, du reste, si le Gouvernement l'avait modifié ! Nous avons apporté un seul changement : nos prédécesseurs publiaient les chiffres une fois tous les ans, nous avons choisi, quant à nous, de les publier tous les mois car nous devons la transparence des résultats aux Français.
    M. Claude Gatignol. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'ailleurs, ne doutez pas une minute que, si les chiffres avaient été mauvais, on n'aurait pas manqué de me le faire remarquer sur les bancs de gauche de cet hémicycle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Si j'ignore qui gagne la guerre, je sais très certainement qui l'aurait perdue.
    Le mérite de ces bons résultats revient exclusivement aux policiers et aux gendarmes que nous devons saluer, les uns comme les autres. (Mêmes mouvements.) Plus intéressant encore : de mai à novembre, le taux d'élucidation des affaires a augmenté en France de 7,53 %, le nombre de personnes mises en cause pour crimes et délits a progressé de 8,5 %, et les gardes à vue de 13 %. Ces chiffres sont incontestables. Mesdames, messieurs les députés, les textes et les moyens ne servent à rien sans la mobilisation des forces de police.
    Alors va-t-on continuer, monsieur Grosdidier ? Oui ! Parce que nos concitoyens ne peuvent pas vivre lorsqu'ils ont peur. L'objectif du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin est simple : faire en sorte que la peur change définitivement de côté, qu'elle soit du côté des délinquants, pas du côté des honnêtes gens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

ÉDUCATION NATIONALE

    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste.
    M. Bruno Le Roux. Monsieur le Premier ministre, à la suite de la manifestation des enseignants, des personnels de l'éducation, des parents d'élèves et des étudiants, dimanche dernier,...
    M. Christian Estrosi. Un bide !
    M. Bruno Le Roux. ... vous avez déclaré « comprendre » les manifestants. Votre compréhension ira-t-elle jusqu'à revenir sur la terrible politique (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) mise en place par le ministre de l'éducation nationale qui rompt aujourd'hui avec l'égalité des chances et fragilise l'école de la République ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Ira-t-elle jusqu'à annuler les suppressions de postes d'enseignants et le gel du plan pluriannuel de recrutement ? Ira-t-elle jusqu'à revenir à la suppression des aides-éducateurs, qui remplissent pourtant aujourd'hui des missions indispensables à l'école ?
    M. Michel Delebarre. Très bien !
    M. Bruno Le Roux. Doit-on y voir un signe donné aux surveillants dont vous supprimez les postes alors qu'ils ont un rôle essentiel à jouer notamment pour la prévention de la violence dans tous les établissements ?
    M. Michel Delebarre. C'est vrai !
    M. Bruno Le Roux. Votre compréhension vaut-elle enfin abandon de l'amputation drastique des crédits du fonds social pour les collèges qui fragilise les élèves des milieux les plus défavorisés ?
    Au moment où vous préparez votre première vraie rentrée scolaire, monsieur le Premier ministre, et où votre ministre de l'éducation peine à justifier les coupes claires qui sont faites dans son budget, votre compréhension ne sera-t-elle qu'une formule destinée à faire oublier que l'éducation n'est plus une priorité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
    M. Yves Durand. Qu'en pense Marie-Caroline ?
    M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, j'ai pris quatre engagements devant la représentation nationale et je les tiendrai, bien évidemment. Je voudrais les rappeler aujourd'hui.
    Le premier concerne les aides-éducateurs. Je conviens volontiers que certains d'entre eux remplissent des fonctions essentielles, et qu'il faut même en augmenter le nombre. Je pense en particulier aux aides à la vie scolaire qui sont aujourd'hui 1 100. Le Président de la République a précisément annoncé qu'à la rentrée prochaine nous pourrions en recruter 6 000. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    Le deuxième engagement porte sur le nombre de surveillants. Ainsi que je l'ai maintes fois annoncé ici, je souhaite qu'ils soient plus nombreux à la rentrée 2003 que cette année. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je peux d'ores et déjà vous indiquer qu'il y en aura environ 6 000 à temps plein.
    Troisièmement, je me suis engagé à donner une priorité aux étudiants pour occuper ces postes. Le nouveau mode de recrutement sera en outre meilleur que l'ancien dispositif des MI-SE.
    M. Serge Janquin. En quoi ?
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. S'agissant notamment de la question de la validation des crédits dans les universités, donc de la validation des acquis de l'expérience, les négociations avancent bien. A cet égard, je pourrai très bientôt vous annoncer des bonnes nouvelles. La situation des nouveaux surveillants sera donc bien meilleure que celle des MI-SE. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Serge Janquin. Promesse !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Enfin, je me suis engagé à annoncer à la fois la nature exacte de ces dispositifs et leur financement au mois de janvier.
    M. Christian Bataille. Ce n'est pas très clair !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Je tiendrai évidemment ma promesse et je reviendrai devant vous à cette date. Pour l'heure, je souhaite préciser tous ces points avec les partenaires sociaux.
    Quant à la manifestation, je me suis laissé dire que certains d'entre vous avaient dû l'observer à la longue-vue car ils n'étaient pas franchement invités. Alors, de grâce, un peu de modestie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

CANDIDATURE DE LA TURQUIE
À L'UNION EUROPÉENNE

    M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Hervé Morin. Monsieur le Premier ministre, il y a trois semaines, jour pour jour, le groupe UDF, par la voix de Bernard Bosson, avait demandé au Gouvernement d'organiser un débat suivi d'un vote sur l'adhésion de la Turquie au sein de l'Union européenne. En effet, c'est la nature et la conception même de l'Europe qui seraient en cause. Veut-on faire de l'Europe une zone de libre-échange économique ? Ou veut-on que, unie et soudée, elle devienne un acteur du monde ?
    Jeudi soir prochain, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne se retrouveront à Copenhague, où cette question sera débattue. Monsieur le Premier ministre, ma question est donc extrêmement simple : quelle sera la position de la France, la vôtre, celle du Président de la République, sur l'intégration de la Turquie au sein de l'Union européenne ? Comptez-vous organiser un débat suivi d'un vote à l'Assemblée nationale sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président Morin, je vous remercie de votre question, car le débat sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne n'a rien de léger ni de superficiel. Nous le savons tous, les eaux du Bosphore sont turques. Pourtant, si une rive est asiatique, l'autre est européenne. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) La question est donc complexe et le débat mérite d'être ouvert dans tout le pays.
    Pour le Gouvernement, il s'articule en trois étapes. La première étape est le parcours turc pour atteindre les critères de Copenhague : critères de démocratie, critères économiques, critères sociaux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Deuxième étape, l'Union européenne devra apprécier ce parcours. C'est seulement à ce moment-là que - troisième étape - des négociations pourront éventuellement s'engager.
    Il faut donc que le débat ait lieu, mais il faut faire en sorte qu'il n'y ait pas de confusion dans l'esprit des Français. Une décision d'ouverture sera prise prochainement à Copenhague. Dix pays aujourd'hui sont en phase finale d'adhésion. La Turquie n'est pas dans ce cas. Elle est en phase préalable. Nous devons donc bien faire la différence.
    Au nom de la France, je souhaite qu'à Copenhague puisse être lancé un message de consensus qui soit un message d'ouverture, mais aussi de vigilance, car nous ne jugerons le Gouvernement turc que sur ses actes, et le peuple turc que sur sa capacité à adhérer à nos valeurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

DÉMOGRAPHIE MÉDICALE ET INFIRMIÈRE

    M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, le rapport Berland qui vient de vous être remis montre que la pénurie de médecins va s'aggraver. Il propose comme mesure prioritaire le relèvement du numerus clausus à l'entrée des études en médecine.
    Peut-on obtenir le silence, monsieur le président ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. J'ai connu pire, madame ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Jacqueline Fraysse. Certes, mais cela ne me satisfait pas !
    Ce rapport préconise de faire passer le nombre d'étudiants en médecine de 5 100 à 8 000 en quatre ans, ce qui ne peut être bien sûr qu'une première étape, puisque cette proposition n'empêchera pas, le rapport le montre, la diminution du nombre de médecins. Vous annoncez, monsieur le ministre, 400 étudiants de plus pour l'année 2003. Je m'en félicite, mais cela fait environ quatre médecins de plus par département. Compte tenu de la situation que nous connaissons et de la durée des études de médecine - sept ans et plus -, ne croyez-vous pas nécessaire de relever davantage le numerus clausus dès l'année 2003 ?
    En ce qui concerne les infirmières, je ne partage pas l'optimisme du rapport qui indique que les augmentations du nombre de places dans les écoles d'infirmières, arrachées notamment par les luttes sociales des années 2000-2002, suffiront. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Mais puisqu'il reconnaît une difficulté spécifique à l'hôpital, avec beaucoup de personnels âgés et une tendance à la désaffection des plus jeunes, quelles mesures envisagez-vous pour rendre plus attractifs les métiers de l'hôpital ? Allez-vous rétablir le paiement des études des infirmières en échange d'un contrat avec l'hôpital public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean Bardet. Les syndicats l'ont refusé il y a dix ans !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille, et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame la députée et chère consoeur, vous abordez un vaste sujet. Je centrerai, quant à moi, une réponse sur deux ou trois points particuliers.
    Vous m'avez interrogé sur la position du rapport Berland concernant le numerus clausus appliqué aux futurs étudiants en médecine. Je répondrai que la situation de la France, à cet égard, est paradoxale puisque la densité médicale est de 3,32 médecins pour 1 000 habitants, c'est-à-dire comprise dans la partie haute de la fourchette, qui va de 2,6 à 3,6, pour les pays développés comparables. C'est donc bien davantage un problème d'inégalité entre les régions et les spécialités. C'est là que réside l'anomalie.
    M. Richard Mallié. Eh oui !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il n'en demeure pas moins que mon intention est bien, dans un premier temps, de porter le numerus clausus des étudiants en médecine à 6 500 en deux ou trois ans pour éviter les effets d'accordéon entre des générations qui seraient pléthoriques et d'autres plus réduites. Croyez bien que l'observatoire national de la démographie des professions de santé, prévu dans la loi du 4 mars et que je vais mettre en place, permettra de suivre l'évolution de ces métiers.
    S'agissant des infirmières, je suis en mesure de vous donner plusieurs informations assez intéressantes.
    Rappelons tout d'abord que, le gouvernement précédent ayant déjà relevé les quotas des instituts de formation d'infirmières, la première génération de 26 000 sortantes arrivera sur le marché du travail en janvier prochain. Cela permettra déjà d'améliorer la situation. J'ai néanmoins l'intention d'augmenter encore ce nombre pour le porter à 30 000, mais la décision dépendra de la capacité des instituts à les accueillir, variable selon les régions.
    Par ailleurs, nous comptons mettre l'accent sur la formation professionnelle pour les aides-soignantes. Aujourd'hui, alors que 5 % à 15 % des places au concours d'aide opératoire leur sont réservées, nous n'atteignons que 10 % du quota en raison du coût des études. Je souhaite donc que les établissements les soutiennent dans le cadre, comme vous le souhaitez, d'engagements réciproques.
    M. Edouard Landrain. Très bien !
    M. le président. Monsieur le ministre, il faut conclure !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Enfin, la profession d'infirmière doit être reconsidérée. L'une des pistes du rapport Berland consiste précisément à tirer les professions paramédicales vers le haut. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jacques Desallangre. Très bien !

SÉCURITÉ MARITIME

    M. le président. La parole est à M. Louis Guédon, pour le groupe UMP.
    M. Louis Guédon. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, les ministres des transports des Quinze ont décidé, vendredi 6 décembre, à la demande pressante de la commissaire en charge des transports, Loyola de Palacio, de bannir de leurs ports, terminaux ou points de mouillage, les pétroliers à simple coque transportant du fioul lourd, du goudron ou du bitume.
    M. Michel Delebarre. Très bien !
    M. Louis Guédon. Afin de lutter contre les navires poubelles, le Président de la République a pris en effet au sommet de Malaga une initiative forte en limitant sévèrement l'accès à la zone des 200 milles pour les pétroliers de plus de quinze ans. Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous préciser les différentes avancées en matière de sécurité maritime ? Dans le même esprit, est-il envisageable d'interdire le recours à des pétroliers de plus de quinze ans ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
    M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le député-maire des Sables-d'Olonne, il est vrai qu'à Malaga, la France et l'Espagne ont pris ensemble des positions extrêmement fortes. Et nous avions la crainte, en arrivant au conseil des ministres des transports européens, de ne pas être suivis car la Grèce, l'Angleterre et les Pays-Bas conduisent traditionnellement des politiques maritimes différentes. Or la position franco-espagnole, qui avait été clairement affirmée, a été suivie.
    Cela va signifier, monsieur Guédon, l'accélération de la disparition des pétroliers à simple coque. L'objectif de quinze ans qui avait été fixé va vraisemblablement être raccourci de plusieurs années. Il va falloir ensuite interdire définitivement le transport de fioul lourd, de goudron, de bitume dans les navires à simple coque, par une mesure administrative de l'Union européenne. Cela pourra être fait dès le début de 2003. S'agissant de l'amélioration des contrôles, la France, qui a été longtemps mauvais élève, atteindra 25 % de navires contrôlés au début de l'année prochaine. Définir des zones maritimes sensibles s'avère, en revanche, plus compliqué, monsieur Guédon. A cet égard, une réflexion devra être menée avec les élus. Il faudra, en effet, trouver des zones et des ports refuges et on devine bien que les volontaires seront moins nombreux qu'on pourrait le souhaiter. Toutefois, ces zones refuges seront indispensables pour éviter ce qui s'est produit au large des rivages espagnols. Enfin, il sera nécessaire de modifier les normes internationales, de mettre en place - vous avez connu le problème en Vendée avec l'Erika - un mécanisme d'indemnisation complémentaire, dans le cadre européen, puis dans le cadre de l'organisation maritime internationale, et, surtout, d'améliorer la formation des équipages, car c'est la base de tout.
    Pour conclure, je veux dire à la représentation nationale avec bonheur que la position franco-espagnole, que nous pouvions penser être un peu en avance sur son temps, a été suivie par l'Europe et que le triste message de l'Erika et du Prestige a été entendu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

ACCÈS À L'INTERNET RAPIDE

    M. le président. La parole est à Mme Valérie Pecresse, pour le groupe UMP.
    Mme Valérie Pecresse. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies et je souhaiterais y associer mon collègue Alain Joyandet, député-maire de Vesoul.
    Madame la ministre, la fracture numérique a des conséquences dramatiques pour notre pays. Une grande partie de nos concitoyens n'a pas accès aujourd'hui à l'Internet rapide, c'est-à-dire au savoir et à l'information. Or dans les cinq premiers critères d'implantation des entreprises, figure, on le sait, la qualité des réseaux de télécommunications. Autant dire que de nombreux territoires ne pourront ni conserver leurs entreprises, ni en attirer de nouvelles, s'ils ne sont pas couverts rapidement et à un prix acceptable par des liaisons numériques à haut débit. Ainsi, les nouveaux moyens de télécommunications, qui pourraient résorber les inégalités entre nos territoires, risquent, en réalité, de les accroître. Même dans un département comme les Yvelines par endroits suréquipé, subsistent, sans aucun espoir de couverture à court terme, des zones rurales dont les habitants sont plongés dans le plus grand désarroi. Pourtant, par le passé, on a amené l'eau, l'électricité, le courrier, dans les territoires les plus reculés. Il faut faire de même avec l'Internet rapide.
    Des technologies de communication complémentaires existent qui permettraient d'établir des plans nationaux ou locaux d'équipement. Soyons lucides, les entreprises de télécommunications ne couvriront pas seules nos territoires : l'ensemble du secteur est fragilisé, des milliers d'emplois seront bientôt supprimés dans toute la France et les Yvelines ne seront pas épargnées.
    Pour résorber la fracture numérique, c'est donc l'Etat qui doit agir dans un cadre européen, en partenariat avec les collectivité locales, et vite ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Madame la ministre, comment le Gouvernement compte-il faire entrer réellement la France dans la société de l'information ? A quand l'Internet rapide pour tous ? Et comment y parvenir ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.
    Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Madame la députée, vous avez raison, réduire la fracture numérique, c'est-à-dire réduire les inégalités d'accès à Internet, est une urgence pour le Gouvernement et une nécessité impérieuse pour notre pays. Le Premier ministre a récemment présenté le plan RE/SO 2007 - pour une République numérique dans la société de l'information - pour faire progresser la France dans cette voie. J'ai la charge et l'honneur d'en assurer la coordination. Le haut débit constitue un élément très important de ce plan qui comprend deux aspects complémentaires.
    Il convient d'abord de généraliser la connexion permanente à Internet pour permettre aux Français de prendre conscience de ce qu'Internet peut leur apporter au quotidien : gain de temps, simplicité dans les formalités administratives, accès au patrimoine culturel, accès à une plus large connaissance dans les écoles, dans les lycées, - télétravail. Notre objectif est qu'en 2007, 10 millions d'abonnés puissent bénéficier du haut débit, soit un tiers des foyers français. Une première mesure a été prise. Depuis le 15 octobre, les tarifs de l'ADSL ont baissé, avec des forfaits à trente euros par mois. Ils sont encore un peu élevés, mais ils sont parmi les plus bas d'Europe.
    Il faut ensuite impérativement réduire la fracture numérique qui est aussi culturelle et sociale. L'accès à l'Internet haut débit est vital, non seulement pour les ménages, mais aussi pour les territoires, afin de leur permettre d'attirer et de conserver des entreprises qui, faute de connexion haut débit, s'implanteraient ailleurs.
    Grâce à l'action du Gouvernement, l'accès aux technologies non filaires sera amélioré. Ainsi en a-t-il été ces derniers mois de l'Internet satellitaire puisque les taxes sur les paraboles ont été réduites sensiblement.
    Par ailleurs, Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie et moi-même avons récemment, sur proposition de l'ART, offert la possibilité d'ouvrir des réseaux sans fil, de type Wi-Fi, dans trente-huit départements, sur des fréquences libérées par le ministère de la défense. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Enfin, un plan d'aménagement numérique du territoire sera présenté très prochainement à l'occasion du comité interministériel d'aménagement et du dévelopement du territoire. Il portera sur les technologies alternatives, sur les contenus ainsi que sur la participation et les modalités d'intervention des collectivités locales.
    Nous sommes donc très concernés et nous agissons concrètement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

CHOIX DU DIRECTEUR GÉNÉRAL
DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS

    M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste. (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mes chers collègues, je vous en prie, ne faites pas remarquer que c'est M. Montebourg qui a la parole !
    M. Arnaud Montebourg. Monsieur le président, mes chers collègues, nous souhaiterions que M. le Premier ministre lui-même s'explique devant la représentation nationale sur les conditions très curieuses dans lesquelles le Gouvernement s'apprête à chasser de son poste le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    L'affaire est d'importance car la Caisse des dépôts est actionnaire de toutes les caisses d'épargne de France. Elle a en charge la protection de l'épargne des Français et son directeur jouit d'un statut d'indépendance garantissant la Caisse contre toute intrusion gouvernementale. (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Pourtant, des indiscrétions sérieuses et concordantes ont permis d'apprendre que le président de l'UMP, M. Alain Juppé, avait usé de toute son influence et exercé une pression forte pour faire nommer à ce poste l'un de ses fidèles, M. Pierre-Mathieu Duhamel, fonctionnaire, dont il n'est pas inutile, monsieur le président, de préciser qu'il est mis en examen dans l'affaire des emplois fictifs de la ville de Paris (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), comme M. Juppé d'ailleurs. (Protestations et claquements de pupitres sur les mêmes bancs.)
    Ma question est assez simple, monsieur le Premier ministre : qui gouverne la France ?
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. En tout cas, ce n'est pas vous !
    M. Arnaud Montebourg. Est-ce bien vous ? Auquel cas nous vous demandons de garantir l'indépendance de la Caisse des dépôts et de prendre des engagements fermes devant la représentation nationale. Si vous ne le faites pas, nous aurons compris que c'est M. Juppé qui pratique en sous-main, pour votre compte, la chasse aux sorcières (Vives protestations et huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle),...
    M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues !
    M. Arnaud Montebourg. ... apportant ainsi une preuve supplémentaire de son sens si particulier de la tolérance républicaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, je préfère être à ma place qu'à la vôtre. Votre question est indigne ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Parler en ces termes d'un ancien Premier ministre de la France, Alain Juppé, c'est pitoyable ! Je veux lui dire mon amitié et la confiance que j'ai en lui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je peux vous dire en toute sincérité et sur mon honneur qu'il n'y a pas d'intervention, de qui que ce soit, sur ce type de dossier. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Quelle conception avez-vous donc du pouvoir (Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle se lèvent et applaudissent) pour penser que les nominations sont ainsi décidées sur des interventions ? Le seul critère de compétence, c'est la qualité des hommes et des femmes face aux responsabilités que nous leur demandons d'assumer. La preuve : regardez les ambassades de France, regardez les collaborateurs de M. Jospin...
    M. Bernard Roman. Et les préfets ?
    M. le Premier ministre. ... et vous verrez que quand il y a eu des compétences, il y a eu des nominations. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Ce que nous recherchons, ce sont des femmes et des hommes qui assument avec compétence et conscience le service public...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Ce n'est pas vrai !
    M. le Premier ministre. ... et la mission qui est la leur au service des Français.
    M. Bernard Roman. Et les recteurs ?
    M. le président. Ecoutez, monsieur Roman !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Et les préfets ?
    M. le Premier ministre. Monsieur Montebourg, la responsabilité, cela consiste non pas à se servir, mais à servir la France et les Français ! (Les députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle se lèvent et applaudissent. - Quelques députés du groupe Union pour la démocratie française applaudissent puis se lèvent également. - Huées sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Martine David. C'est une question qui a bien marché !
    M. le président. Un peu de calme, madame David !

TRANSMISSION DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

    M. le président. La parole est à Mme Marie-Josée Roig, pour le groupe UMP.
    Mme Marie-Josée Roig. Monsieur le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, vous avez annoncé, le 7 octobre dernier à Lyon, la mise en place en 2003 de mesures visant à favoriser la création d'entreprise en France. La dynamique que vous avez engagée aux côtés du Premier ministre a été saluée par l'ensemble des organisations représentatives du monde de l'entreprise...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Et des salariés ?
    Mme Marie-Josée Roig. ... comme un encouragement fort à entrepreneuriat.
    Aujourd'hui pourtant, force est de constater que l'état des lieux en matière de création d'entreprises est plutôt source d'inquiétude. En effet, 200 000 entreprises étaient créées il y a dix ans, contre 70 000 seulement aujourd'hui. On est en droit de s'interroger sur une telle baisse compte tenu de la période de croissance exceptionnelle qu'a connue le gouvernement précédent.
    Aussi votre démarche, monsieur le secrétaire d'Etat, qui traduit notamment l'engagement du Président de la République de créer un million d'entreprises en cinq ans, contribuera-t-elle, nous n'en doutons pas, à redynamiser la création d'entreprise en France.
    Je souhaite donc, monsieur le ministre, en qualité de présidente de l'Amicale parlementaire des petites et moyennes entreprises... (« Ah ! Voilà ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Le lobby !
    Mme Marie-Josée Roig. ... me faire le porte-parole de milliers d'entrepreneurs...
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Et les salariés ?
    Mme Marie-Josée Roig. ... qui s'interrogent aujourd'hui quant aux conditions de transmission ou de reprise de leur outil de travail alors que 50 000 entreprises par an meurent faute de repreneurs.
    M. le président. Chère madame, pourriez-vous poser votre question ?
    Mme Marie-Josée Roig. Il faut trouver les moyens de freiner cette hémorragie.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre afin d'améliorer les conditions de reprise des entreprises qui ont trouvé un successeur ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Madame la députée, votre question, à la différence de la précédente, touche au coeur des préoccupations des Français (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) : l'emploi, le développement des entreprises, le développement de notre économie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Et vous avez raison, dans les dix années qui viennent, près de 500 000 chefs d'entreprise, artisans, commerçants, membres des professions libérales, patrons de PME, vont passer la main.
    M. Michel Delebarre. Le secrétaire d'Etat des patrons aussi !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Nous devons donc améliorer les conditions dans lesquelles ces entreprises seront transmises. Il est important de se préoccuper de la création d'entreprise, il ne l'est pas moins de se soucier de la transmission des entreprises existantes.
    M. Jean-Paul Charié. Très bien !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement, le Premier ministre et moi-même avons annoncé le 7 octobre dernier qu'un projet de loi sur l'initiative économique serait présenté. Il comportera un volet très important sur la fiscalité de la transmission d'entreprise.
    M. Bernard Roman. Non !
    M. Maxime Gremetz. Et le dialogue social ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Vous avez cité, madame la députée, un impôt, la taxation des plus-values de cession, qui, à l'heure actuelle, prélève la substance même des entreprises au moment où elles sont fragilisées parce que l'entrepreneur va passer la main.
    M. Edouard Landrain. Mais bien sûr !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Un exemple de l'ambition de nos mesures : le seuil d'exonération des plus-values de cession sera quasiment doublé puisqu'il sera porté à 250 000 euros de chiffre d'affaires. Ainsi, des centaines de milliers d'entreprises échapperont à cette taxation de 26 %.
    M. Etienne Pinte. Très bien.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Madame la députée, le gouvernement précédent a considéré les entreprises comme des vaches à traire (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), le nôtre entend faire des entreprises le moteur de la croissance et de l'emploi. Et les actes suivent immédiatement les paroles. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

MIXITÉ PROFESSIONNELLE

    M. le président. La parole est à M. Daniel Mach, pour le groupe UMP.
    M. Daniel Mach. Ma question s'adresse à Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. La société d'aujourd'hui nous renvoie une image où le travail des femmes reste concentré dans les postes les moins qualifiés du tertiaire où elles représentent 76 % des employés. Parmi les trente et une catégories socioprofessionnelles répertoriées par l'INSEE, les femmes ne sont représentées que dans six d'entre elles.
    Par ailleurs, nous savons, madame la ministre, que le travail des femmes représente 85 % du temps partiel. Très peu de femmes font partie de l'encadrement supérieur des 5 000 plus grandes entreprises françaises. Dans la fonction publique, 13 % d'entre elles occupent des postes de direction alors qu'elles représentent 57 % des effectifs. On ne peut que déplorer ces inégalités entre les hommes et les femmes qui portent aussi bien sur l'accès aux postes à responsabilité que sur les salaires. Face à un tel constat, madame la ministre, que comptez-vous faire pour établir une réelle mixité professionnelle, vecteur de progrès social ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
    Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Oui, monsieur le député, la modernité repose en économie, comme en politique, sur une dynamique nouvelle entre les hommes et les femmes dans la gestion de la société. Oui, la mixité professionnelle, vous avez raison de le souligner, monsieur le député, est une chance pour l'économie moderne, elle est aussi un faceur d'équité et de justice sociale pour les femmes.
    Comment parvenir à donner du contenu à ce qui n'est encore aujourd'hui qu'une promesse ?
    Le Gouvernement a donné la priorité à la valorisation du rôle et de la place des femmes dans les entreprises, qui doit se faire avec les entreprises et non pas contre elles. Nous agissons dans l'esprit défini par le Premier ministre, qui consiste à libérer les énergies, les forces vives, et tous les potentiels humains, notamment ceux des femmes.
    Les pistes sont connues. Elle passent par l'égalité salariale, par l'accès facilité à la formation professionnelle et aux responsabilités, par une meilleure prise en compte, également de la parentalité dans l'entreprise et la création de services sociaux innovants. Plus généralement, il s'agit de faciliter l'implication des femmes dans les carrières professionnelles.
    Mais le Gouvernement a une seconde préoccupation, que vous connaissez : ces démarches innovantes au plan social doivent s'inscrire dans le cadre du dialogue social. Avec François Fillon, nous organisons dans quelques jours une table ronde réunissant l'ensemble des partenaires sociaux qui ouvriront un calendrier de négociations très importantes sur ce thème.
    Cette action n'exclut pas, bien entendu, les efforts qui doivent être faits dans la fonction publique, mais aussi en amont, à l'école, là où tout se construit et où le principe d'égalité doit être réactivé, pour devenir une sorte de gène organisateur de la société moderne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

DIALOGUE SOCIAL

    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le Premier ministre, aux préoccupations des Français sur l'emploi, les salaires et les retraites, vous répondez concertation et négociation sociale.
    M. Rudy Salles. Vous, vous n'avez rien fait !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais de quelle négociation s'agit-il ? Est-ce négocier que d'abandonner l'accord majoritaire sur les 35 heures dans la restauration ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Est-ce négocier que de supprimer le congé de fin d'activité avant même toute discussion sur l'avenir des retraites ? (Mêmes mouvements.)
    M. Christian Bataille. C'est une honte !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Est-ce négocier que de supprimer, sous la pression de votre majorité, tout ce qui peut protéger les salariés contre les licenciements ? (« Bravo ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Certes non ! Vous avez suspendu l'amendement Michelin qui contraignait à négocier sur la réduction du temps de travail avant tout plan social. Vous avez suspendu l'obligation d'informer le comité d'entreprise avant toute annonce publique ayant des conséquences sur l'emploi.
    M. François Goulard. Ce n'est pas vrai !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pensez-vous sérieusement favoriser ainsi la négociation ? Aujourd'hui, alors que l'Assemblée nationale va voter ce que vous appelez une « suspension » des principales dispositions de la loi de modernisation sociale, pas une organisation syndicale n'est dupe et ne se fait d'illusions sur les des vraies intentions qui vous animent.
    La CFDT, par la voix de François Chérèque, déplore « un vrai problème de méthode avec le Gouvernement : il négocie avec nous et fait modifier le texte par le Parlement ». Alors que la CGT évoque une « offensive anti-sociale ». Force ouvrière s'interroge en ces termes : « On va négocier sur quoi ? Sur la manière dont on va mettre les gens à la porte ? » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Applaudissements sur des bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Manuel Valls. Très bien !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En définitive, seul le MEDEF se réjouira d'une démarche qui lui ouvre la possibilité de rompre à bon compte avec le dialogue social !
    Monsieur le Premier ministre, vous affirmez être à l'écoute des Français, vous dites vouloir pratiquer la concertation, mais votre gouvernement, sous la pression de votre majorité, agit en sens contraire. Quand cesserez-vous de cacher derrière une fausse concertation votre politique de moins-disant social ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, en citant, comme vous venez de le faire, le secrétaire général de la CFDT, vous avez validé la méthode du Gouvernement. Car M. Chérèque a bien dit qu'il avait négocié avec le Gouvernement, mais que plusieurs amendements votés entre-temps par l'Assemblée pouvaient poser question. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Autrement dit, le Gouvernement a bien négocié avec les partenaires sociaux, pour suspendre une loi qui est une mauvaise loi, une mauvaise réponse aux problèmes économiques et sociaux de notre pays, une loi qui vise à mentir aux salariés plutôt qu'à leur dire la vérité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Si le Gouvernement a décidé de suspendre cette loi, c'est justement pour renvoyer aux partenaires sociaux le soin de présenter des propositions pour faire évoluer le droit du licenciement, à l'image de ce qu'ils avaient fait en 1986, à la suite de la suppression de l'autorisation administrative de licenciement.
    M. Jean-Claude Bateux. Les partenaires sociaux ? Le MEDEF, oui !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Curieuse conception du dialogue social,...
    Mme Martine David. On peut se poser la question, en effet !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... où les partenaires sociaux ne pourraient pas parler des questions difficiles, mais seulement des sujets qui ne fâchent pas ! S'ils veulent faire preuve de responsabilité vis-à-vis de l'opinion publique, les partenaires sociaux doivent aussi accepter de parler des sujets qui touchent à la vie de tous les jours des salariés, et en particulier répondre à la question de l'adaptation des entreprises aux réalités du marché.
    M. François Hollande. Et vous, que faites-vous ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Or ils ont accepté de le faire, et c'est cela, au fond, qui vous blesse le plus (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste) : qu'ils aient accepté de négocier sur un sujet où vous les aviez totalement ignorés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

ÉTATS GÉNÉRAUX DU SPORT

    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Geveaux, pour le groupe UMP.
    M. Jean-Marie Geveaux. Ma question s'adresse à M. Jean-François Lamour, ministre des sports.
    Dimanche dernier se tenait à Paris, au centre des congrès du parc des expositions de la Villette, la synthèse, véritable point d'orgue, des états généraux du sport. (« Allô ! Allô ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Annoncés par le Président de la République au printemps dernier, coorganisés par votre ministère et le comité national olympique et sportif, ces états généraux ont été une totale réussite. Près de trois mois durant, des centaines de responsables de l'ensemble du milieu sportif ont pu s'exprimer à l'occasion des multiples sessions qui se sont tenues dans toutes les régions de France.
    M. Alain Neri. Ce n'est pas vrai !
    M. Jean-Marie Geveaux. Des problèmes importants ont été soulevés, qu'il faudra résoudre assez rapidement : la réforme du FNDS, la lutte contre le dopage, le soutien, qu'il faut améliorer, des millions de bénévoles qui travaillent dans le milieu sportif.
    Après le temps des propositions, souvent innovantes, des suggestions, quelquefois aussi des doléances, le temps est venu de l'action. Ma question est très simple, monsieur le ministre : quelles mesures le Gouvernement et votre ministère entendent-ils prendre à court et à moyen terme pour répondre non seulement à l'enthousiasme suscité par les états généraux du sport, mais aussi aux attentes fortement exprimées par le monde sportif ? (Applaudissements sur les bancs de groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des sports.
    M. Jean-François Lamour, ministre des sports. Monsieur le député, avant de répondre à votre question, je commencerai par rappeler la méthode. Cette large concertation, coorganisée - cela aussi manquait au mouvement sportif - par le comité olympique français et le ministère des sports, aura permis de rassembler près de 10 000 contributions et d'établir un consensus, une sorte de diagnostic partagé par tous sur l'état du modèle français de la pratique sportive et surtout sur son évolution.
    Ces états généraux du sport ont permis de dégager trois principes. Le premier, c'est que le développement de la pratique sportive est un service public. La notion d'intervention de l'Etat a donc été réaffirmée, alors que certains l'imaginaient en perte de vitesse. L'Etat doit évidemment jouer un rôle de régulateur, d'aménageur du territoire mais aussi de garant en matière de formation, de préservation de la santé, de lutte contre le dopage. Il doit enfin être capable d'accompagner le mouvement sportif et les collectivités locales.
    Le deuxième principe, c'est l'unité du mouvement sportif, dans les fédérations et dans les clubs, l'unité de toutes les pratiques sportives. On a trop voulu, ces dernières années, opposer le sport professionnel et le sport amateur.
    M. François Rochebloine. C'est vrai !
    M. le ministre des sports. C'est à mes yeux une erreur. Les contributions des états généraux ont précisément permis de montrer à quel point l'unité du mouvement sportif, à travers les fédérations et les clubs, faisait consensus.
    Le troisième principe enfin, c'est la reconnaissance de l'engagement évident des collectivités locales dans la pratique sportive. Il faut savoir que lorsque l'Etat met un euro dans le sport, les collectivités locales, et plus particulièrement les communes, en mettent dix.
    M. François Rochebloine. Chiche !
    M. le ministre des sports. Dès lors, attachons-nous à utiliser au mieux ces 10 euros en faisant en sorte que, par exemple, des conseils régionaux des sports puissent décider, en amont et dans chaque région, de l'implantation d'un équipement ou des modalités de partage des divers projets.
    Parmi toutes les propositions qui peuvent ressortir de ces états généraux, deux mesures concrètes peuvent être mises en avant, qui intéressent en premier lieu les clubs. La première est la mise en place dans chaque département d'un « centre ressources » auprès duquel les petits clubs comme les dirigeants pourront trouver l'appui nécessaire pour construire un projet, s'assurer juridiquement ou encore gérer des feuilles de paie, pour ne prendre que ces exemples.
    M. François Hollande. Rendez-nous Mme Buffet !
    M. le ministre des sports. La deuxième mesure a trait au FNDS. Que va-t-il devenir ? Aussi a-t-il été décidé de créer un centre national de développement du sport, établissement public qui sera chargé de protéger cet outil essentiel pour financer le développement du sport, et une fondation, celle-là même que le Président de la République avait appelée de ses voeux,...
    M. Maxime Gremetz. Il est long, ce sportif ! Pas assez efficace !
    M. le ministre des sports. ... afin de susciter des actions de mécénat parmi les entreprises publiques, animées par une véritable éthique de l'engagement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

MINES DE POTASSE D'ALSACE

    M. le président. La parole est à M. Michel Sordi, pour le groupe UMP.
    M. Michel Sordi. Ma question s'adresse à Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.
    Madame la ministre, la fin de l'exploitation de la potasse en Alsace, pour regrettable qu'elle soit, dans la mesure où cette activité aura profondément marqué l'aventure humaine et économique de notre région, est devenue inéluctable. Elle a cependant été préparée de longue date afin d'assurer aux mineurs les mesures d'accompagnement nécessaires dans la perspective d'un arrêt de l'extraction de la potasse le 30 avril 2003. Rappelons que c'est grâce à l'attention particulière du Président de la République et à l'action du gouvernement d'Alain Juppé qu'un accord sur l'avenir du personnel des mines de potasse d'Alsace a pu se concrétiser en 1997.
    L'incendie du 10 septembre dernier à Stocamine, centre de stockage souterrain des déchets ultimes, a conduit à l'arrêt anticipé de l'exploitation de la potasse. Des négociations ont été engagées entre la direction et les représentants des salariés dans la perspective d'un accord d'entreprise qui a quelque difficulté à se concrétiser. C'est la raison pour laquelle l'intersyndicale vous a sollicitée pour une entrevue.
    Cet arrêt prématuré conforte également la légitime impatience des mineurs de voir se concrétiser un établissement public administratif garantissant leurs droits sociaux comme ceux des retraités et des ayants droit, conformément aux engagements pris par le chef de l'Etat. La réponse à cette préoccupation, partagée du reste par les mineurs des bassins houillers, est d'une nécessité d'autant plus impérieuse que l'ensemble des exploitations minières est appelé à fermer au cours des deux prochaines années.
    En matière de droits sociaux des mineurs, je ne peux passer sous silence l'héritage légué par le précédent gouvernement. (Protestations sur quelques bancs du groupe socialiste.) En cinq ans, aucune mesure de revalorisation de l'indemnité de logement n'a été prise. Et si, pour les retraites, un rattrapage différencié a bien été accordé à la veille de l'élection présidentielle, il ne permet que de rétablir le pouvoir d'achat des mineurs ayant pris leur retraite le plus récemment et pénalise injustement les retraités les plus âgés comme les veuves.
    Madame la ministre, sur la base des engagements pris par le Président de la République, pourriez-vous définir des perspectives claires et apporter des réponses concrètes de nature à rassurer tous les mineurs dans ce contexte particulièrement traumatisant ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, vous l'avez dit vous-même, la fermeture des mines de potasse d'Alsace était malheureusement devenue inévitable, pour des raisons économiques, mais aussi de sécurité. Le Gouvernement, comme vous pouvez l'imaginer, s'en préoccupe et s'intéresse tout particulièrement aux mesures d'accompagnement. L'incendie, que je déplore et dont il appartiendra à la justice de déterminer les causes, amènera à anticiper la fermeture des mines de potasse d'environ six mois.
    Les mesures d'accompagnement ont été prises en concertation avec les mineurs de potasse. Je voudrais à ce propos rendre hommage à leur travail exemplaire qui aura permis à l'industrie française de disposer d'une véritable vitrine en la matière et d'assurer son rayonnement.
    La négociation que vous avez évoquée relève bien sûr de l'accord d'entreprise, notamment pour régler la situation pour ce qui touche au chômage partiel lié à la cessation anticipée d'activité. Mais je suis tout à fait disposée, monsieur le député, à recevoir les salariés (« Ah ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), pour peu qu'ils le souhaitent,...
    M. Maxime Gremetz. Vous serez bien reçue !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. ... afin d'aborder en concertation l'ensemble des problèmes posés par l'après-mine.
    La création d'un établissement public est indispensable pour garantir les droits sociaux des salariés, des ayants droit et des retraités. Elle suppose, comme vous le savez, une mesure législative. A cet égard, je me réjouis qu'une proposition de loi ait été déposée dans ce sens par M. le député Mallié. Je puis d'ores et déjà vous annoncer que le Gouvernement l'approuve et la soutient.
    S'agissant enfin de la revalorisation des indemnités de logement et de retraite, je déplore comme vous l'immobilisme du précédent gouvernement. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Nous avons engagé une concertation très étroite avec la caisse autonome de sécurité sociale du secteur des mines. Des mesures seront très rapidement prises. J'espère de tout coeur qu'elles donneront satisfaction, tout au moins partiellement, aux revendications légitimes des intéressés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures dix.)
    M. le président. La séance est reprise.

2

PRESTATION DE SERMENT DES JUGES TITULAIRES ET SUPPLÉANTS DE LA HAUTE COUR DE JUSTICE ET DE LA COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE
    M. le président. L'ordre du jour appelle la prestation de serment devant l'Assemblée nationale des juges titulaires et des juges suppléants de la Haute Cour de justice ainsi que des juges titulaires de la Cour de justice de la République et de leurs suppléants.
    Aux termes de l'article 3 de l'ordonnance portant loi organique sur la Haute Cour de justice, les juges « jurent et promettent de bien et fidèlement remplir leurs fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes et de se conduire en tout comme dignes et loyaux magistrats ».
    Je vais inviter Mme et MM. les juges à bien vouloir se lever à l'appel de leur nom et, levant la main droite, à répondre par les mots : « Je le jure ».
    Avant de procéder à la prestation de serment, j'indique que pour nos collègues qui n'ont pu être présents aujourd'hui, elle aura lieu le mardi 17 décembre.
    (Il est procédé à l'appel nominal.)

    (Successivement, Pierre Albertini, Yannick Favennec, Michel Hunault, Christian Jeanjean, Alain Marleix, Christian Estrosi, Daniel Mach, Jean-Paul Bacquet, Jean Michel, André Vallini, juges titulaires, M. Dino Cinieri, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Pierre Morel-A-L'Huissier, Jacques Remiller, Tony Dreyfus, Gilbert Le Bris, juges suppléants, se lèvent à l'appel de leur nom et disent : « Je le jure. »)
    M. le président. Aux termes de l'article 2 de la loi organique sur la Cour de justice de la République, les juges « jurent et promettent de bien et fidèlement remplir leurs fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes et de se conduire en tout comme dignes et loyaux magistrats ».
    Je vais inviter MM. les juges à bien vouloir se lever à l'appel de leur nom et, levant la main droite, à répondre par les mots : « Je le jure ».
    Avant de procéder à la prestation de serment, j'indique que, pour nos collègues qui n'ont pu être présents aujourd'hui, elle aura lieu le mardi 17 décembre.
    (Successivement, MM. Francis Hillmeyer, Thierry Lazaro, Philippe Houillon, Jean-Paul Bacquet, Arnaud Montebourg, juges titulaires, MM. Georges Fenech, Jean-Marc Nesme, Jean-Paul Garraud, Xavier de Roux, Tony Dreyfus, Gilbert Le Bris, juges suppléants, se lèvent à l'appel de leur nom et disent : « Je le jure. »)
    M. le président. Acte est donné par l'Assemblée nationale du serment qui vient d'être prêté devant elle.

3

NÉGOCIATION COLLECTIVE
SUR LES RESTRUCTURATIONS
AYANT DES INCIDENCES SUR L'EMPLOI

Explications de vote et vote sur l'ensemble
d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (n°s 375, 386).
    La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Dominique Dord, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, mes chers collègues, au terme de la première lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi sur les négociations collectives, je dirai simplement, pour donner une idée de l'ambiance de nos débats à ceux qui n'ont pas pu y assister, que nous avons cherché un équilibre entre, d'une part, une meilleure protection des salariés exposés à une procédure de licenciement économique et, d'autre part, la nécessité de ne pas décourager les entreprises de créer des emplois dans notre pays.
    Les trois nuits et deux jours de discussions ont, bien entendu, mis en lumière nos divergences, notamment quant à la pondération à donner aux deux éléments que je viens de citer, mais elles se sont déroulées dans un climat d'écoute mutuelle et de respect attentif des positions des uns et des autres.
    Aujourd'hui, nous proposons de modifier le titre pour en faire un texte portant relance de la négociation collective en vue du licenciement économique. Il a plusieurs points forts sur lesquels je veux dire quelques mots.
    D'abord, c'est un texte clair qui ne comprend que trois articles qui se répondent et se complètent. Il est donc extrêmement lisible. C'est ensuite un texte qui innove dans sa méthode - certains s'en sont inquiétés, d'autres félicités - dans la mesure où il n'apporte pas une réponse immédiate aux questions posées, mais suspend un certain nombre de mesures et appelle les partenaires sociaux à négocier en vue d'éclairer la deuxième phase, qui interviendra dans dix-huit mois, quand un deuxième projet de loi statuera pour introduire dans notre droit social un nouveau droit positif en matière de licenciement économique.
    En outre, je crois pouvoir dire que c'est un texte juste, qui n'a touché à aucun des droits directs des salariés exposés à des procédures de licenciement, ou n'en a suspendu aucun.
    M. Gaëtan Gorce. Sauf sur le harcèlement !
    M. Dominique Dord, rapporteur. C'est aussi un texte équilibré car le Gouvernement a veillé à ne tomber ni dans le statu quo ni dans l'abrogation, préférant cette formule de suspension.
    M. Maxime Gremetz. Le « ni-ni » ne constitue pas une politique ! (Sourires.)
    M. Dominique Dord, rapporteur. Certes, mais c'est une méthode d'attente et de relance de la négociation collective en vue d'instaurer une vraie politique, ce que nous aurons dans dix-huit mois. C'est donc, je le répète, un texte équilibré.
    Les orateurs des groupes de l'opposition vont sans doute dire le contraire, mais, au fond, même les amendements qui ont été adoptés ont une portée relative, ce n'est que de la cohérence. Le cas typique, c'est l'amendement Michelin, sur lequel vous allez sûrement revenir. C'est l'obligation pour les entreprises de passer aux 35 heures avant de licencier.
    M. Alain Néri. Il s'agit de protéger les salariés.
    M. Dominique Dord, rapporteur. En réalité, quatre cinquièmes, pour ne pas dire neuf dixièmes des grandes entreprises sont déjà passées aux 35 heures.
    M. Maxime Gremetz. Mais c'est un geste symbolique pour le MEDEF !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Une telle obligation est donc vidée des neuf dixièmes de sa substance.
    M. Alain Néri. Alors c'est juste pour faire plaisir au MEDEF ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Ne vous énervez pas, mon cher collègue, votre groupe aura la parole dans les explications de vote.
    M. Alain Néri. C'est M. Raffarin qui s'est énervé tout à l'heure, pas moi !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Dord !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Même sur le harcèlement moral, il s'agit simplement, non pas de renverser la charge de la preuve comme je l'ai lu ici ou là, mais de la rééquilibrer, et il me semble qu'en ce domaine aussi les choses ont été faites avec équilibre.
    M. Maxime Gremetz. Un cheval, une alouette !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Pour parler vraiment d'équilibre, il faut aussi regarder les amendements qui ont été rejetés.
    M. Maxime Gremetz. Tous les nôtres !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Certains, comme ceux de M. Gremetz et du groupe communiste, essayaient une nouvelle fois de définir plus précisément le licenciement économique avec, au fond - je ne critique pas, mais ce n'est pas notre système de pensée et de références -, l'idée d'interdire dans une économie libérale toute possibilité de licenciement économique.
    M. Maxime Gremetz. N'exagérez pas !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Bien sûr, ce genre d'amendements ont été rejetés.
    De même, tous les amendements qui visaient à suspendre l'obligation faite aux entreprises d'assurer de toutes les façons possibles la reconversion et la formation de leurs salariés ont été soit rejetés soit retirés une fois que les débats ont pu avoir lieu dans cette enceinte.
    Certains diront bien entendu le contraire, mais je pense vraiment que ce texte est équilibré, clair, innovant dans sa méthode et juste. Je crois, mes chers collègues, que vous pouvez le voter en toute confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons nous prononcer sur un projet de loi qui vise à « suspendre » - une première dans l'histoire de ce parlement mais, vous avez raison, il faut inventer, innover ! - la loi de modernisation, dont je souhaite rappeler l'origine.
    Pendant tout le débat, vous avez voulu faire croire, monsieur le ministre, que cette loi trouvait sa raison d'être dans un sombre compromis politique au sein de la précédente majorité.
    M. Dominique Dord, rapporteur. C'est vrai !
    M. Maxime Gremetz. C'est totalement faux, je l'ai démontré.
    Elle répondait à une véritable situation économique et sociale dramatique pour des millions de salariés et leurs familles. Notre groupe a dû se battre avec détermination, c'est vrai, pour que la loi de modernisation sociale ait la portée qu'elle a, s'inspirant pour cela de nombreuses dispositions contenues dans une proposition de loi que nous avions déposée, élaborée avec de grands juristes du travail et toutes les organisations syndicales.
    Pouvait-on en attendre moins de notre part, après les charrettes de licenciements boursiers : Danone, Lu, Marks et Spencer, mais aussi Michelin, Moulinex, Magneti Marelli et bien d'autres encore ?
    Tous les salariés nous ont interpellés et nous ont demandé de réagir. Ils se sont mobilisés et cette loi, c'est aussi et surtout la leur. D'ailleurs, le MEDEF ne s'y est pas trompé, car la première demande inscrite sur le carnet de commande qu'il vous a adressé était d'abroger cette loi, qui s'attaque à son droit divin de licencier comme bon lui semble. Cela montre bien qu'elle était plus efficace que vous ne le clamez.
    Vous voulez l'enterrer en adressant au MEDEF un significatif « je vous ai compris », mais, malgré cet appétit vorace pour avaler tout ce qui permet un tant soit peu aux salariés de résister, vous n'avez pas pu aller aussi loin que vous l'auriez souhaité, en dépit des encouragements nourris de votre majorité à le faire.
    Vous avez tout de même osé suspendre l'amendement Michelin !
    M. Christian Ménard. Il s'est dégonflé tout seul !
    M. Maxime Gremetz. Cela n'a pas de conséquence, dites-vous. D'accord, mais c'est un geste symbolique pour le MEDEF, un geste significatif. C'était l'obligation pour l'employeur d'informer les représentants du personnel avant toute annonce publique - c'est-à-dire aux marchés financiers - du plan de licenciement. Et vous avez inversé la charge de la preuve en matière de harcèlement moral, véritable cavalier législatif, je le rappelle et je le maintiens.
    Mais vous avez calé sur la volonté de votre majorité de suspendre la jurisprudence Samaritaine, qui concerne l'obligation de réintégrer le salarié licencié abusivement, la redéfinition au rabais du harcèlement moral, l'obligation faite à l'employeur d'assurer tous les efforts de formation et d'adaptation avant de licencier, ou encore l'obligation pour une entreprise donneuse d'ordre d'informer les sous-traitants d'un risque de plan social.
    Cette « retenue » s'explique par votre peur, ô combien justifiée, de la réaction des salariés, qui, je l'espère, sauront saisir l'occasion de cette loi pour manifester leur désapprobation de votre politique de l'emploi, qui protège les employeurs contre les salariés.
    Les parlementaires communistes, dans ce débat, se sont attachés à être porteurs de propositions tendant à mieux encadrer les procédures de licenciement, tout en redonnant, comme vous venez de le dire, monsieur le rapporteur, une nouvelle définition du licenciement économique, et à organiser un droit de suspension en cas de contestation, en accordant des droits nouveaux pour les salariés : - droit d'opposition, droit d'information, droit de formuler des propositions alternatives, droit à la formation -, mais aussi à contrer la déréglementation du code du travail que vous orchestrez, toujours pour satisfaire le MEDEF,...
    M. Richard Mallié. Je préfère le MEDEF à la CGT !
    M. Maxime Gremetz. ... afin que le contrat se substitue progressivement à la loi. Vous bouleversez en profondeur la hiérarchie des normes, et faites fi des garanties que doit apporter la loi aux salariés, surtout dans le domaine du licenciement.
    Vous dites ouvrir un espace de dialogue, pour que les partenaires sociaux puissent trouver un terrain d'entente sur cette question des licenciements. C'est un marché de dupes, car comment imaginer que les salariés puissent eux-mêmes organiser leur propre licenciement ou ceux de leurs collègues ? C'est totalement immoral ! C'est pourquoi les syndicats, notamment la CGT et Force ouvrière, protestent fort justement contre l'enterrement de la loi de modernisation sociale.
    Vous parlez toujours, monsieur le ministre, de dialogue social, mais quelle crédibilité avez-vous...
    M. le président. Monsieur Gremetz, savez-vous que vous avez dépassé votre temps de parole ?
    M. Maxime Gremetz. Non, pas encore... Pas déjà !
    M. le président. Si. Je vous serais donc reconnaissant de bien vouloir terminer.
    M. Maxime Gremetz. Nous n'avons pas les mêmes montres, c'est évident !
    M. le président. Monsieur Gremetz, ne mettez pas en cause la présidence sur la qualité de son horlogerie ! (Sourires.) Ne perdez pas de temps !
    M. Maxime Gremetz. Vous parlez toujours de dialogue social, monsieur le ministre, mais quelle crédibilité avez-vous lorsque, de l'aveu même du secrétaire général de la CFDT, vous ne tenez même pas vos engagements minimum ?
    M. François Goulard. Vous avez essayé de négocier avec la CFDT ?
    M. Maxime Gremetz. Vous avez négocié avec lui, vous l'avez dit tout à l'heure, et il le dit dans une interview au Journal du dimanche, de ne suspendre que les articles de la loi de modernisation sociale contenus dans votre projet de loi. Or, avec votre majorité, vous êtes allé plus loin. Je cite M. Chérèque, très amer : « Comment négocier en confiance une réforme si, ensuite, elle peut être complètement modifiée par les députés ? » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Dominique Tian. On est là pour ça !
    M. Richard Mallié. A quoi sert le Parlement, selon vous ?
    M. Maxime Gremetz. Vous n'avez pas compris ce qui est en cause !
    M. le président. Monsieur Gremetz...
    M. Maxime Gremetz. Je termine.
    M. le président. Vous en êtes à six minutes cinquante-cinq. Dans trois secondes, je vous arrête. Dépêchez-vous.
    M. Maxime Gremetz. D'accord.
    Vous n'avez pas compris une chose essentielle, mes chers collègues. Pendant les trois jours et trois nuits de débats, M. le ministre et M. le rapporteur n'ont cessé d'expliquer qu'il ne fallait plus faire comme avant, passer d'abord à l'Assemblée, mais négocier, le Parlement devant tenir compte des résultats du dialogue social. C'est pourquoi nous voterons contre.
    M. le président. Merci, monsieur Gremetz, de votre courtoisie.
    La parole est à Mme Chantal Bourragué, pour le groupe UMP.
    Mme Chantal Bourragué. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme nous l'avons dit lors des débats sur le projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi, le texte qui nous est proposé aujourd'hui traite un sujet difficile. Chacune ou chacun d'entre nous a été confronté à des problèmes de licenciements dans sa famille, parmi ses proches, dans sa commune ou sa région.
    Rappelons une fois de plus que ce sont bien les personnes mises en difficulté par des licenciements qui sont notre première préoccupation, et que ce texte ne touche en rien à la protection des salariés.
    Ce texte veut corriger les principaux défauts de la loi dite de modernisation sociale, en particulier les difficultés juridiques. Il renvoie les partenaires sociaux à un dialogue plus constructif.
    Après deux jours consacrés à la discussion des motions de procédures, l'examen des articles n'a pas donné lieu à une grande résistance de la part de l'opposition socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Hervé Novelli. C'est vrai !
    M. Maxime Gremetz. Qu'en savez-vous ? Vous n'étiez pas là !
    M. Dominique Dord, rapporteur. On parle des socialistes, monsieur Gremetz !
    Mme Chantal Bourragué. Elle ne s'est pas véritablement mobilisée pour défendre un texte qu'elle avait dû, à l'époque, adopter sous la pression de ses partenaires communistes. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. C'est vrai !
    M. François Goulard. J'étais là, je m'en souviens !
    Mme Chantal Bourragué. La loi dite de modernisation sociale est caractérisée par sa complexité et organise une insécurité juridique finalement négative pour les salariés.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Tout à fait !
    Mme Chantal Bourragué. Tous ensemble, nous avons essayé de trouver une législation équilibrée, fondée sur la responsabilité des acteurs de terrain.
    Sans idéologie ni a priori...
    M. Frédéric Dutoit. Ben voyons !
    M. Alain Néri. Surtout pas !
    M. Jean-Claude Lefort. Le libéralisme n'est pas une idéologie ?
    Mme Chantal Bourragué. ... dans nos échanges, nous avons essayé de vérifier à chaque étape que nous préservions les intérêts des salariés sans paralyser le développement économique. Le libéralisme humanisé (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains)...
    M. Maxime Gremetz. Belle formule !
    Mme Chantal Bourragué. ... était bien au coeur de nos préoccupations.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
    Mme Chantal Bourragué. Bien entendu, la suspension de certains articles de la loi de modernisation sociale sera l'un des leviers d'une politique globale visant à renforcer l'attractivité du territoire français en Europe et dans le monde.
    Plusieurs amendements ont été adoptés par les députés. Ils vont dans le sens de la simplification des procédures.
    L'Assemblée a adopté un amendement suspendant pour dix-huit mois l'application de l'article 96, qui obligeait les entreprises à négocier un accord sur les 35 heures avant de procéder à un plan social, le fameux amendement Michelin. Il s'agit d'une mesure de cohérence avec l'assouplissement des 35 heures proposé par le Gouvernement. Il n'y a pas de raison de maintenir que le recours aux 35 heures favorise le développement de l'emploi.
    Mme Odile Saugues. Les 35 heures, vous les avez supprimées. Où est la cohérence ?
    Mme Chantal Bourragué. Monsieur le ministre, vous avez rappelé que, si la réduction du travail pouvait être un instrument défensif face aux difficultés de l'entreprise, c'était dans l'entreprise et dans le cadre du dialogue avec les salariés que ces solutions devaient être utilisées. C'est d'ailleurs ce que suggérait la loi de M. de Robien sur la réduction du temps de travail.
    Dans le même esprit, nous avons décidé de suspendre l'application de l'article 105 qui imposait aux chefs d'entreprise d'informer les élus du personnel avant toute annonce publique ayant des incidences sur l'emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s- communistes et républicains.)
    M. Alain Néri. Ben voyons ! Faut pas se gêner !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est vrai que c'était scandaleux !
    M. Jean-Claude Lefort. Terrible !
    Mme Chantal Bourragué. Non seulement cet article est inutile au regard du droit existant, mais il est source de confusion avec les règles de droit boursier et les sanctions qui frappent les délits d'initiés.
    M. Jean-Claude Lefort. C'est le libéralisme à visage humain !
    Mme Chantal Bourragué. Enfin, notre assemblée a adopté un amendement qui modifie la charge de la preuve (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) en matière de harcèlement moral.
    M. Maxime Gremetz. C'est scandaleux !
    M. Alain Néri. Quel aveu !
    Mme Chantal Bourragué. Je rappelle que le Conseil constitutionnel avait émis sur cette disposition de fortes réserves, rappelant qu'elle ne saurait dispenser la partie demanderesse d'établir la matérialité des éléments de faits précis et concordants.
    M. Jean-Claude Lefort. La réserve n'est pas un refus !
    Mme Chantal Bourragué. Il fallait trouver un équilibre entre la protection des salariés et la protection des entreprises contre des recours abusifs.
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    Mme Chantal Bourragué. Nous ne remettons pas en cause l'aménagement de la charge de la preuve...
    M. Maxime Gremetz. Ah non ?
    M. Gaëtan Gorce. Vous venez de dire le contraire !
    Mme Chantal Bourragué. ... mais nous harmonisons notre législation avec la directive européenne.
    Mme Odile Saugues. La revanche !
    Mme Chantal Bourragué. Désormais, le salarié devra établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.
    Le dernier amendement accepté concerne le régime de la médiation. Le choix d'un médiateur devra désormais faire l'objet d'un accord entre les parties. C'est le gage de son efficacité.
    M. Maxime Gremetz. C'était déjà dans la loi précédente !
    Mme Chantal Bourragué. Monsieur le ministre, au-delà de la suspension des articles les plus contestables de la loi dite de modernisation sociale, vous proposez avec ce texte une nouvelle approche des relations sociales.
    C'est en facilitant le dialogue que nous trouverons des réformes équilibrées et acceptées par tous. Les débats ont montré la nécessité de mettre l'accent sur la formation et le reclassement...
    M. Hervé Novelli. Très bien !
    Mme Chantal Bourragué. ... plus que sur l'allongement des procédures. C'est plus efficace pour la protection des salariés.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Bien sûr !
    Mme Chantal Bourragué. Dialogue, concertation, confiance envers les partenaires sociaux sont au coeur de cette démarche. Le groupe UMP y souscrit pleinement et c'est avec confiance que nous voterons ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Alain Néri. C'est la revanche sociale !
    M. le président. Je vous remercie, madame. Vous vous êtes exprimée pendant cinq minutes trente, alors que M. Gremetz avait parlé sept minutes trente.
    M. Maxime Gremetz. Oh non ! Vous en rajoutez toujours !
    M. le président. Avant de donner la parole aux deux derniers orateurs inscrits, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste.
    M. Gaëtan Gorce. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si je compte bien, cela fait cinq : les emplois-jeunes, la réduction du temps de travail, le programme TRACE, les CES et, maintenant, les garanties apportées aux salariés en matière de licenciement. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Ce sont cinq scalps, si je peux me permettre l'expression, qui vont maintenant orner votre ceinture. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous y allez sans doute avec plus de finesse et plus d'habileté que par le passé, mais les résultats sont les mêmes. Si vous masquez vos orientations, elles aboutissent bien aux mêmes résultats.
    Dans ce contexte, l'opinion est en droit de s'interroger, monsieur le ministre, sur les priorités que se fixe ce gouvernement.
    Plutôt que de mener une lutte sans merci, qui serait justifiée par le contexte économique et social, contre le chômage et les inégalités, vous avez fait le choix, au cours de ces six derniers mois, de supprimer un à un les différents avantages sociaux mis en place par la législature précédente. On aurait pu estimer que d'autres urgences pouvaient requérir l'intervention du Gouvernement et de cette assemblée.
    Votre libéralisme social n'est que votre façon très personnelle de traiter très libéralement le social, et même si Mme Bourragué vient d'inventer le libéralisme humanisé, c'est sans doute un peu comme l'UMP démocratisé. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste.) C'est le même qui décide et les autres qui écoutent et appliquent. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Ce débat aura au moins permis de faire tomber les masques.
    Les Français sauront désormais que, face à la menace du chômage, vous préférez abaisser la garde au moment où il faudrait au contraire la renforcer. Vous avez apporté la démonstration que vous et votre majorité n'avez que faire des inquiétude des salariés (Protestations sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), au moment où il serait plus que jamais nécessaire de renforcer leur protection. Vos protestations ne font que confirmer mon propos ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Yves Bur. Quelle prétention !
    M. Gaëtan Gorce. Dès lors, vous porterez la responsabilité de l'aggravation des plans sociaux et de la dégradation de l'emploi pour les mois qui viennent. Vous aurez à l'expliquer devant les salariés, et nous saurons vous demander des comptes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. René André. Des menaces ?
    M. Gaëtan Gorce. Nous savons aussi désormais que vous ne pouvez plus vous cacher derrière le paravent du dialogue social sur lequel vous cherchez à vous défausser.
    Toutes les organisations syndicales, sans exception, et M. Le Bouillonnec l'a bien indiqué pendant la séquence des questions, ont condamné votre méthode.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. C'est faux !
    M. Gaëtan Gorce. Le secrétaire général d'une des plus grandes confédérations n'a pas hésité à déclarer dans le Journal du dimanche que vous n'aviez rien compris. C'est tout dire ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Charles Cova. Parce que vous avez compris quelque chose, vous ?
    M. Gaëtan Gorce. Si vous jugez irrecevables les critiques de l'opposition, qu'avez-vous à dire de celles des partenaires sociaux qui expriment désormais ouvertement leur défiance ?
    Vous avez montré également que vous n'hésitiez pas à accroître les inégalités entre les salariés, bouleversant la hiérarchie des normes sociales. Confrontés au risque de licenciements, les salariés vont relever désormais d'au moins trois régimes juridiques différents, sans compter les dérogations possibles aux garanties qui leur sont pourtant assurées par la Constitution.
    Nous savons, enfin, que, pour vous, il n'y a urgence que pour supprimer les garanties apportées aux salariés. Mais l'urgence n'est plus la même lorsqu'il s'agit de mettre en place une nouvelle législation : quelques semaines suffiront pour supprimer la loi de modernisation sociale, mais il faudra trente mois pour lui substituer de nouvelles dispositions via la négociation et la mise en place de nouveaux textes.
    Durant tout ce débat, nous avons assisté, monsieur le ministre, à l'incroyable spectacle du défilé des députés de votre majorité, qu'ils soient du courant Juppé, du courant Sarkozy ou peut-être du courant Fillon (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), venus défendre non pas l'entreprise mais les chefs d'entreprise ! (Mêmes mouvements.) Reprenant le mot de Clemenceau, je dirai que ce n'est pas une majorité que vous dirigez, mais un conseil d'administration ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Les amendements des membres de la majorité que vous avez acceptés ne sont d'ailleurs rien d'autre que des dividendes que vous leur distribuez !
    M. René Couanau. C'est nul !
    M. Gaëtan Gorce. Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste rejettera la loi que vous proposez,...
    M. Hervé Novelli. On s'en fout !
    M. Gaëtan Gorce. ... qui a été élaborée dans la précipitation, modifiée dans l'improvisation, et que vous voulez faire voter dans l'urgence.
    L'urgence, monsieur le ministre, c'est que vous changiez de politique, afin de favoriser un vrai dialogue social et surtout pour engager enfin ce qu'on est en droit d'attendre d'un gouvernement, c'est-à-dire la conduite d'une véritable stratégie propre à soutenir la croissance et l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Richard Cazenave. Tout ce qui est excessif est insignifiant !
    M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Francis Vercamer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l'examen d'un projet de loi qui aura suscité de vifs échanges, voire des monologues un peu longs, et révélé, s'il en était encore besoin, des visions parfois surprenantes du monde de l'entreprise.
    M. Léonce Deprez. C'est vrai !
    M. Francis Vercamer. Il aura également révélé que certains éprouvaient des doutes surprenants quant à la capacité des partenaires sociaux à s'engager dans une véritable négociation constructive.
    N'en déplaise à ceux qui font de l'opposition entre les salariés et les entreprises leur fonds de commerce électoral, il n'y a pas aujourd'hui en France, d'un côté, les partisans acharnés d'un libéralisme favorable à l'initiative privée (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et apparentés)...
    M. Maxime Gremetz. Ah bon ?
    M. Francis Vercamer. ... et, de l'autre, les protecteurs des droits des salariés, droits qui seraient menacés par l'égoïsme des chefs d'entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Certaines interventions ont trop souvent tenté d'accréditer cette idée fausse. Celles et ceux qui attendent de cette assemblée qu'elle travaille d'abord sur les faits ne peuvent que regretter ces prises de position un peu surannées.
    Il y a d'abord et avant tout des élus soucieux de permettre à nos entreprises de progresser dans leur activité, pour mieux créer des emplois.
    Que le projet de loi débouche sur un droit de travail plus simple et plus clair, qui protège avec efficacité le salarié sans paralyser l'entreprise, voilà monsieur le ministre, l'objectif que le groupe UDF s'était fixé.
    La nécessité de recourir au dialogue social est apparue comme une constante lors des échanges qui ont eu lieu entre les parlementaires et vous-même. Mais c'est sur la manière de le susciter et sur les moyens de le mener à bien que les conceptions ont pu diverger.
    Pour notre part, nous estimons que, pour favoriser le dialogue social, il eût mieux valu abroger les dispositions les plus contestées du texte précédent.
    Cependant, le groupe UDF vous donne acte, monsieur le ministre, de votre volonté d'assumer vos responsabilités si, au terme de la période de suspension, le dialogue entre les partenaires sociaux n'aboutissait pas à l'élaboration de nouvelles règles concrètes.
    En tout état de cause, il est clair qu'il nous faut aujourd'hui en finir avec les dispositions de la loi de modernisation sociale qui fragilisaient les entreprises, surtout les entreprises en difficulté, et donc les salariés. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Par ailleurs, c'est toujours en raison de la priorité accordée à la négociation que nous accueillons favorablement plusieurs dispositions de votre texte, telles que celle prévoyant la possibilité pour les entreprises de conclure, à titre expérimental, des accords de méthode. Ceux-ci pourront, le cas échéant, nourrir la négociation interprofessionnelle et faire connaître les bonnes pratiques qui émanent du terrain.
    Plus largement, ce texte de loi doit être un premier pas vers une clarification et une simplification de notre code du travail. J'ai, en effet, insisté, lors de la discussion générale, sur le sentiment de grande complexité qu'éprouvaient tous les praticiens du droit du travail devant l'enchevêtrement des textes. Aussi, simplifier les textes, tout en plaçant la protection du salarié au coeur de notre droit du travail, constitue un grand chantier sur lequel nous invitons le Gouvernement à se pencher.
    Là encore, nous insistons pour que ce chantier soit ouvert avec celles et ceux qui pratiquent le droit du travail, aussi bien dans l'entreprise que dans les conseil des prud'hommes. Les partenaires sociaux, représentants des salariés comme des chefs d'entreprise, doivent être parties prenantes à ce travail.
    Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, le groupe Union pour la démocratie française votera votre texte. Et il ne le votera pas seulement parce qu'il constitue l'aboutissement d'une démarche visant à simplifier la vie de l'entreprise, il le votera aussi parce que c'est le premier acte de l'ambitieux chantier de refondation sociale que l'UDF appelle de ses voeux. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   474
Nombre de suffrages exprimés   474
Majorité absolue   238
Pour l'adoption   337
Contre   137

    L'Assemblée nationale a adopté.
    (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais, au moment où l'Assemblée nationale vient de voter ce projet de loi en première lecture, remercier le président Dubernard, le rapporteur Dominique Dord et l'ensemble de la majorité, avec laquelle nous avons, pendant trois jours, dialogué de manière constructive, pour aboutir à un texte équilibré qui, j'en suis sûr, sera à l'usage salué comme tel.
    S'appuyant sur sa majorité, le Gouvernement poursuit son cap, avec méthode et avec une calme détermination : mise en place des contrats-jeunes en entreprise - à ce jour, 23 000 ont été signés -, ce qui signifie que 23 000 jeunes sans qualification bénéficient aujourd'hui d'un contrat à durée déterminée (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) ; assouplissement des 35 heures, avec renvoi à la négociation pour l'essentiel, mais avec, dès aujourd'hui, la possibilité d'obtenir un contingent d'heures supplémentaires ; harmonisation des SMIC par le haut - c'est un sujet dont on parle assez peu à gauche de cet hémicycle (Applaudissements sur les mêmes bancs) ; révision ciblée de la loi de modernisation sociale.
    Pas à pas, nous affûtons la compétitivité de notre pays, nous réhabilitons la valeur du travail...
    M. François Goulard. Très bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et nous responsabilisons les partenaires sociaux.
    M. Dominique Dord, rapporteur, et M. Nicolas Forissier. Très bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Chacun s'en souvient, la loi de modernisation sociale a été votée sous le sceau de l'improvisation politicienne. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Certaines de ses dispositions se sont d'ailleurs vite révélées antiéconomiques et antisociales !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Tout à fait !
    M. François Goulard. Et perverses !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Aussi, nous avons décidé de les suspendre. Ce choix de la suspension plutôt que de l'abrogation prend le contre-pied des pratiques dogmatiques et hiérarchiques de nos prédécesseurs. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Elle permet, en effet, d'impulser un processus de négociation entre les partenaires sociaux, qui sont invités à proposer des solutions originales dans les dix-huit mois. Le Gouvernement prendra ensuite ses responsabilités.
    Ainsi que vous avez pu le constater, les déclarations des partenaires sociaux montrent que cette négociation aura lieu. Elle est déjà décidée. La question qui se pose est de savoir si elle aboutira ou si le Gouvernement et la majorité devront, à son issue, reprendre un certain nombre des éléments du débat et des expérimentations qui auront eu lieu dans les entreprises pour vous proposer un texte.
    Avec ce projet de loi, nous sollicitons les acteurs sociaux, nous permettons l'expérimentation dans les entreprises et nous introduisons le principe de l'accord majoritaire. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maxime Gremetz. Non !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. En réalité, nous remettons en marche, dans notre pays, et le dialogue social...
    M. Maxime Gremetz. Non !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et la compétitivité des entreprises.
    M. Yves Fromion. C'est cela la modernité !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avec ce texte, la majorité a surtout choisi de dire la vérité aux Français...
    M. François Goulard. Absolument !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... sur l'état de l'économie de notre pays et sur les risques de désindustrialisation qui pèsent sur lui !
    M. François Goulard. C'est vrai !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Elle a choisi de dire la vérité aux Français plutôt que de chercher à les tromper par des comportements politiciens tels que ceux qui n'ont abouti qu'à mettre notre pays en situation difficile sur le plan économique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Ce que je viens d'entendre à l'instant de la bouche de l'orateur du groupe socialiste, qui a travesti la réalité...
    M. Hervé Novelli. Absolument !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... en prétendant, par exemple, que le programme TRACE et les CES sont supprimés (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), et qui a caricaturé les positions du Gouvernement et de la majorité, allant même jusqu'à insulter cette dernière en laissant à penser qu'elle n'était pas légitime (Huées sur les mêmes bancs) et ne représentait pas tous les Français, tous les chefs d'entreprises et tous les salariés qui avaient choisi de lui accorder leur confiance (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), montre bien que si quelqu'un n'a rien compris, c'est bien le parti socialiste ! (Mêmes mouvements.)
    M. le président. La séance est suspendue.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de M. Jean Le Garrec.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

    M. le président. La séance est reprise.

4

LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2002

Discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2002 (n°s 382, 444).
    La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
    M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, ce collectif comporte plusieurs enjeux majeurs.
    Tout d'abord, il révise à la baisse les recettes fiscales de l'exercice 2002 par rapport à la prévision 2002 associée au projet de loi de finances pour 2003. Cela constitue une innovation majeure. D'habitude, le collectif de fin d'année cale les évaluations de recettes, à l'euro près, sur les hypothèses révisées du projet de loi de finances de l'année suivante, même si l'évolution des rentrées a rendu ces hypothèses virtuelles. Nous souhaitons procéder autrement. Nous avons inscrit le principe de transparence au coeur de notre politique budgétaire ; nous allons continuer à l'appliquer. C'est le premier enjeu de ce texte.
    Le collectif constitue aussi, de manière traditionnelle, le support d'ajustements divers portant sur les dépenses. Nous vous proposons effectivement d'importants redéploiements de crédits, traduisant notamment un effort d'économie important. C'est le deuxième enjeu de ce texte.
    Face à la situation financière très dégradée de France Télécom, M. Thierry Breton, président de l'entreprise, a élaboré un plan de redressement qui sera accompagné financièrement par l'Etat, actionnaire majoritaire. Un amendement du Gouvernement traduit cette démarche. C'est le troisième enjeu de ce texte.
    Enfin, ce collectif contient des dispositions législatives, fiscales et non fiscales, dont certaines sont importantes. Cet ensemble de mesures qui étaient nécessaires constitue le quatrième enjeu de ce texte.
    Premier enjeu : la sincérité du projet de loi de finances rectificative.
    Les dernières évaluations conduisent à constater des moins-values de recettes fiscales de 1,55 milliard d'euros en 2002, par rapport au collectif de cet été. Nous en prenons acte dans le texte qui vous est soumis.
    Cette révision est due à deux séries distinctes de causes : d'une part, des causes ponctuelles, dont l'incidence restera limitée à la gestion 2002 et qui n'affecteront donc pas l'année 2003 ; d'autre part, des causes dont les effets se prolongeront sur la gestion 2003 par un effet base bien connu dans les exercices de prévisions de recettes. Cet effet base se traduira, par rapport au projet de loi de finances pour 2003, par 700 millions d'euros de moins-values en 2003.
    La prévision de recettes de TVA nette est diminuée, pour 2002, de 600 millions d'euros. Cette révision résulte de deux facteurs distincts.
    Premier facteur : les remboursements et dégrèvements seront en augmentation de 300 millions d'euros. Cela est dû au raccourcissement du délai moyen de traitement des demandes des entreprises, qui constitue pour nous une source de satisfaction. Cette moins-value n'est pas pérenne, elle n'affectera pas nos recettes 2003.
    Second facteur : la TVA collectée sur les opérations d'importation est en retrait par rapport aux prévisions. La perte totale, estimée à 300 millions d'euros affectera, elle, nos recettes en 2003.
    Je voudrais souligner que les recettes de TVA hors importations sont, à ce jour, en ligne avec les prévisions. Les dernières rentrées sont satisfaisantes.
    Deuxième impôt révisé : l'impôt sur les sociétés. Cela ne concerne pas l'impôt brut, qui, à ce stade, est en ligne avec les prévisions, mais les dégrèvements, qui connaissent une augmentation ponctuelle de 300 millions d'euros.
    L'impôt sur le revenu, pour sa part, occasionnera une moins-value nette de 500 millions d'euros en 2002, exclusivement due à l'imposition à taux forfaitaire des revenus mobiliers. Nous estimons que cette perte de recettes affectera nos recettes 2003 à concurrence de 400 millions d'euros.
    Nous constatons enfin une perte de 150 millions d'euros sur la TIPP. Cette perte est due aux comportements de déstockage, en relation avec l'augmentation des prix du pétrole jusqu'à début novembre. Nos évaluations pour 2003 ne devraient pas être affectées par cette moins-value.
    Au total, les moins-values 2002 sont ainsi de 1,55 milliard d'euros. La part consolidable sur 2003 est de 700 millions d'euros. Je n'aurai pas, à l'occasion de cet exercice de transparence, la cruauté de rappeler les propos tenus il y a quelques mois par certains membres de l'opposition (« Si ! si ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), qui nous avaient accusés, lors de la présentation de l'audit des finances publiques, d'avoir délibérément noirci la situation.
    M. Jean-Yves Chamard. Eh oui !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. En fait, nous ne l'avions pas assez noircie.
    M. Charles de Courson. Absolument !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avez dérapé !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Comme nous l'avons annoncé à la commission des finances de votre assemblée le jour de l'adoption du collectif en conseil des ministres, nous avons pris en compte cette perte de recettes dans un amendement devant le Sénat. Je rappelle que l'Assemblée nationale s'était prononcée sur les recettes un mois avant le dépôt du collectif, bien avant que les prévisions qui fondent le présent collectif ne soient établies. Toutefois, le niveau du solde budgétaire 2003 est resté similaire à celui qu'avait adopté l'Assemblée, des mesures permettant de compenser ces pertes ayant, en effet, été prises lors du débat.
    Au total, le Gouvernement a fait une pleine et entière application du principe de sincérité, dont je rappelle qu'il figure désormais explicitement dans la loi organique relative aux lois de finances.
    M. Didier Migaud. Vous en tenez peu compte !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Deuxièmement, ce collectif contient diverses mesures d'ajustement en dépenses. Il retrace, en outre, un effort d'économie qui se monte au total à 2,6 milliards d'euros.
    Les ouvertures du projet de loi de finances rectificative portent, pour le budget général, sur 2 milliards d'euros. Elles appellent trois observations générales.
    Première observation, ces ouvertures sont, pour l'essentiel, neutres sur le besoin global de financement des administrations publiques en 2002, car une part importante concerne les relations de l'Etat avec les administrations de sécurité sociale ou les collectivités territoriales tandis qu'une autre part est destinée à être dépensée sur l'exercice 2003, notamment les ouvertures que nous opérons au profit de la défense.
    M. Jean-Louis Bernard. Bien !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Deuxième observation, pour une très grande part ces ouvertures couvrent des insuffisances liées aux sous-budgétisations de la loi de finances initiale pour 2002 ou à des dispositifs mis en place par le précédent gouvernement. C'est notamment le cas des ouvertures à caractère social, qui dépassent 800 millions d'euros.
    Troisième observation, le présent collectif traduit la priorité que le Gouvernement attache à la sécurité, intérieure et extérieure. S'agissant de la défense, on peut relever plus particulièrement 88 millions d'euros pour la couverture de divers besoins en fonctionnement des forces armées et 191 millions d'euros destinés à l'ajustement des crédits de recherche du ministère de la défense. S'agissant de la sécurité intérieure, 46 millions d'euros sont ouverts au titre de la mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.
    Enfin, le Gouvernement vous proposera un amendement traduisant la décision prise par le Premier ministre de versement d'une prime de Noël aux titulaires de certains minima sociaux. Nous procédons ainsi, contrairement au précédent gouvernement, afin d'éviter d'affecter les comptes de la sécurité sociale alors que l'Etat est en réalité le débiteur ultime de cette prime. Ce choix relève, là encore, de notre volonté de transparence. C'est d'ailleurs la troisième fois que nous opérons des rectifications dans le budget 2002 pour couvrir les dépenses occasionnées par les primes de Noël : celle d'aujourd'hui, qui concerne le Noël 2002, intervient en effet après celle pour l'an 2000, et celle pour l'an 2001. Et à chaque fois, il s'agit de 300 millions d'euros !
    M. Jean-Louis Bernard. Oh !
    M. Charles de Courson. Deux années dans le mur !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Le collectif retrace par ailleurs l'effort d'économie auquel nous nous étions engagés. Les annulations de crédits s'élèvent, en effet, pour le budget général, à près de 2,6 milliards d'euros et la quasi-totalité des ministères est concernée par cet effort de redéploiement.
    Compte tenu de ces différents paramètres, le déficit s'établit dans le collectif que nous vous soumettons à 46,8 milliards d'euros. Il sera porté, si vous adoptez l'amendement du Gouvernement sur la traduction de la prime de Noël, à 47 milliards d'euros.
    Troisièmement, ce collectif contient diverses dispositions législatives, fiscales et non fiscales. Le Gouvernement vous proposera en outre plusieurs amendements complétant son projet initial, qui ont pu être exposés jeudi dernier à la commission des finances, à l'occasion de la présentation du plan de redressement de France Télécom.
    Je commencerai d'ailleurs cette présentation en évoquant le dispositif que nous vous soumettons en faveur de France Télécom. Compte tenu de la qualité de ce plan, l'entreprise mérite le soutien de ses actionnaires, et, au premier rang d'entre eux, celui de l'Etat. L'Etat participera donc au renforcement des fonds propres en souscrivant à hauteur de sa part dans le capital, soit un investissement de 9 milliards d'euros. Il ne s'agit pas d'une dépense à fonds perdus. En souscrivant au renforcement des fonds propres, l'Etat défend son propre intérêt patrimonial dans cette entreprise. Ainsi, l'investissement de 9 milliards d'euros dans France Télécom ne pèsera pas sur les déficits publics. Il devrait en effet recevoir la qualification financière en comptabilité européenne, et donc être sans impact sur le déficit au sens du traité de Maastricht. Il ne modifie pas non plus l'équilibre budgétaire présenté par le Gouvernement pour l'année 2003.
    La réalité de l'effort fourni par la collectivité nationale se traduira en revanche dans le décompte de la dette publique totale. L'endettement nécessaire pour souscrire au renforcement des fonds propres sera en effet retracé dans la dette des administrations publiques. L'augmentation correspondant aux 9 milliards d'euros devrait représenter 0,6 % du PIB en 2003.
    La réalisation d'un investissement aussi exceptionnel nécessitait des dispositions d'organisation particulières que le Gouvernement a prises dans un souci d'efficacité et de transparence. L'établissement public ERAP va ainsi devenir prochainement un actionnaire important de France Télécom et se verra apporter l'ensemble des titres de l'entreprise détenus par l'Etat. Cet établissement souscrira à l'opération de renforcement des fonds propres de France Télécom à hauteur de la part détenue par l'Etat dans le capital de l'entreprise. Pour financer cet investissement, il devra contracter des emprunts dont le remboursement sera financé à la fois par le produit de la cession de titres détenus par l'Etat et, à plus long terme, par la cession de titres France Télécom. Il est nécessaire, pour que l'ERAP puisse emprunter aux meilleures conditions, de lui permettre de le faire avec la garantie explicite de l'Etat. Tel sera l'objet d'un amendement qui vous sera présenté.
    Outre ce dispositif en faveur de France Télécom, plusieurs autres dispositions du collectif méritent d'être mentionnées dans le cadre de cette présentation générale. Nombre des articles de ce texte ont un caractère technique, ce qui est de l'essence même d'un projet de loi de finances rectificative. Mais vous pouvez également relever, mesdames et messieurs les députés, que ce projet, au même titre que le projet de loi de finances pour 2003, respecte scrupuleusement les engagements pris par le Gouvernement.
    Ainsi, le collectif prévoit la suppression du décalage de deux ans pour l'éligibilité au FCTVA des dépenses exposées par les communes sinistrées à la suite des intempéries dramatiques des 8 et 9 septembre dans six départements du Sud-Est et des 6 et 7 juin dans le département de l'Isère.
    M. Michel Bouvard. En Savoie aussi ! Deux départements, l'Isère et la Savoie, étaient concernés.
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Je m'adressais à M. Migaud, qui n'écoute pas.
    Nous tenons cet engagement pris lors des débats sur le projet de loi de finances.
    De même, nous avions pris l'engagement, lors de la discussion du projet de loi de finances, d'adapter les dispositions fiscales aux cas de résidence des enfants en alternance. C'est l'objet de l'article 23 du projet, qui prévoit d'accorder des quarts de part à chaque parent qui assure en alternance la garde des enfants.
    Notons également que ce collectif apporte des solutions à des problèmes parfois anciens, répondant ainsi à des voeux maintes fois exprimés au Parlement.
    Ainsi, le collectif met en oeuvre un dispositif nouveau pour les pensions des anciens combattants de nos anciennes colonies qui seront désormais décristallisées et qui seront définies en fonction d'un critère de résidence conduisant à une augmentation comprise entre 20 et 120 % selon le pays de résidence et le type de pension.
    M. Jean-Louis Bernard. Très bien !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Autre disposition notable, la régulation des prélèvements opérés sur les attributions de dotation générale de décentralisation de certains départements au titre de la création de la couverture maladie universelle.
    Ce souci de réforme inspire également l'amendement que vous proposera le Gouvernement sur la parafiscalité agricole. L'Association nationale pour le développement agricole, l'ANDA, est aujourd'hui alimentée par neuf taxes parafiscales, fonction du volume de denrées produites. Dans l'optique de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances qui implique la disparition des taxes parafiscales, nous vous proposons de moderniser et de renforcer ce modèle.
    Après des échanges nombreux et constructifs avec la profession agricole, l'amendement du Gouvernement prévoit la création d'un établissement public, l'ADAR, l'Agence de développement agricole et rural, reprenant les missions de l'ANDA. A cet établissement sera affectée une seule taxe, plus lisible, assise sur le chiffre d'affaires de l'exploitation, facile à collecter et uniforme entre les diverses filières. Ce dispositif, conforme au droit communautaire, permet ainsi de poser la première pierre d'une démarche globale de réforme de la parafiscalité agricole.
    En matière fiscale, plusieurs autres dispositions méritent d'être mentionnées : la transposition de la direction communautaire qui fixe les règles de TVA applicables à la fourniture de services par l'Internet, la fixation de dates de dépôt spécifiques pour les déclarations de revenus souscrites par voie électronique, la prolongation du dispositif prévu en faveur des dons d'ordinateurs par les entreprises à leurs salariés - ce qui fut appelé en son temps l'« amendement Messier ».
    Notre texte poursuit les efforts de simplification engagés dans le cadre de la loi de finances pour 2003, qu'il s'agisse des règles de facturation en matière de TVA, des modalités d'attribution des exonérations et dégrèvements de taxes d'attribution pour les bénéficiaires de certaines aides sociales ou encore de la mise en place d'un interlocuteur fiscal unique au profit des entreprises.
    Le collectif budgétaire qui vous est présenté comporte en outre une disposition destinée à favoriser le développement de la flotte de transport maritime et les emplois dans ce secteur d'activité exposé à une concurrence internationale très vive. Nous proposons d'instaurer un régime de taxation au tonnage semblable à celui qui est déjà en vigueur chez un certain nombre de nos partenaires européens.
    Nous vous proposons également un aménagement du régime fiscal des biocarburants afin de mettre ce régime en conformité avec la réglementation communautaire. (« Très bien » sur plusieurs bancs de l'Union pour la majorité présidentielle.) Cet aménagement a inspiré un certain nombre d'amendements, dont la discussion nous permettra, j'en suis persuadé, de nouer un débat constructif au cours duquel le Gouvernement saura ne pas rester insensible aux arguments qui seront exposés.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Enfin !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Oui, cela change !
    Ainsi, le Gouvernement agit dans le cadre de ce collectif conformément aux engagements qu'il a pris devant vous. Il compense la baisse de 5 % de l'impôt sur le revenu, mise en oeuvre cet été, par des économies.
    Par ailleurs, confronté à une baisse des recettes en 2002, il choisit la transparence. Il refuse de jouer le jeu facile mais nocif des budgets virtuels.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Il va jusqu'au bout de la logique de la sincérité budgétaire en traduisant les conséquences sur l'exercice 2003 des moins-values de 2002, tout en veillant à ne pas laisser se détériorer l'équilibre du projet de loi de finances pour 2003.
    Enfin, le Gouvernement poursuit son action de modernisation et de simplification et il maintient son effort en faveur de ses priorités.
    Pour cet ensemble de motifs, je vous demande, mesdames, messieurs les députés, de bien vouloir adopter le projet de loi de finances rectificative qui vous est soumis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué au commerce extérieur, mes chers collègues, l'ajustement des plafonds de dépenses et des évaluations de recettes de ce deuxième collectif présente plusieurs particularités.
    D'abord, le Parlement a adopté cet été une première loi de finances rectificative. La majeure partie des mouvements de crédits au titre de l'exécution de la loi de finances pour 2002 auront donc été décidés ici même par les législateurs que nous sommes.
    Ensuite, le Gouvernement a choisi de rompre avec l'usage consistant à nous demander de valider des annulations déjà réalisées, qu'elles aient été prises par décret, depuis cette année ou, comme antérieurement, par arrêté. Il nous appartient donc de discuter de ces annulations et de les décider ou non en plus d'annulations déjà réalisées au titre de l'urgence et ayant fait l'objet d'un décret.
    L'occasion a été donnée à notre commission des finances de s'interroger sur l'opportunité de faire choisir à notre assemblée de procéder ou de ne pas procéder à une annulation directe de crédits. Nous avons approuvé un tel choix, considérant que cette responsabilité est la nôtre. Celui-ci nous impose d'examiner les propositions d'annulation de crédits ainsi que les propositions d'ouverture de crédits au regard de la politique d'ensemble mise en oeuvre par le Gouvernement.
    Bien sûr, cette politique est marquée par ces priorités qui répondent au choix des Français. Bien sûr, les moyens accordés à notre effort de défense font partie de nos priorités. Mais celles-ci, chers collègues, ne pourront être durablement soutenues qu'autant que nous saurons nous inscrire dans une politique budgétaire et fiscale cohérente. Nous avons déjà discuté des caractéristiques générales de cette politique et du contexte d'ensemble dans lequel elles s'inscrivent à l'occasion du premier collectif.
    Remarquons que le bien-fondé des évaluations présentées au mois de juillet dernier est confirmé : les recettes de l'Etat sont, hélas ! inférieures de 1,5 milliard d'euros à l'hypothèse la plus défavorable de l'audit. Et Dieu sait si, à l'époque, nous avions été critiqués sur les bancs de la gauche pour noircir le tableau !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avez encore aggravé les choses !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Rappelons ensuite que, toujours en juillet dernier, le Gouvernement avait pris l'engagement que la baisse de l'impôt sur le revenu de 2,5 milliards n'aggraverait pas le déficit.
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas le cas !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il fallait donc gager ces 2,5 milliards par des économies, ce qui est fait, mes chers collègues.
    Le dérapage des dépenses...
    M. Augustin Bonrepaux. Il est difficilement explicable !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... est lié à leur sous-estimation en loi de finances initiale, comme on le verra tout à l'heure à la faveur de quelques exemples.
    Le collectif prévoit 2,3 milliards d'euros d'ouvertures de crédits nettes supplémentaires pour le budget général. Ces ouvertures représentent 1,8 milliard d'euros pour les dépenses ordinaires et 185 millions d'euros pour les dépenses en capital. Au titre des dépenses militaires, il s'agit de 88 millions d'euros pour les dépenses ordinaires et de 210 millions d'euros pour les dépenses en capital, ce qui est loin d'être négligeable.
    Quant aux annulations, elles s'élèvent à 2,4 milliards d'euros, les économies les plus importantes portant sur les charges communes, concernant notamment des crédits qui avaient été prévus pour faire face à des mesures salariales d'ordre général.
    Le budget de la défense est mis à contribution pour un montant de 321 millions d'euros, essentiellement en capital. Les annulations sont là très sensiblement inférieures, je le souligne, au gel de crédits qui avait été pratiqué le 12 août dernier, ainsi qu'aux annulations des cinq dernières années.
    Le budget de l'emploi est lui aussi mis à contribution à hauteur de 259 millions d'euros.
    Le solde des mouvements de crédits proposés dans le collectif fait apparaître, compte tenu des annulations, d'une part, et des ouvertures, d'autre part, un solde net négatif de 153 millions d'euros.
    Quant à l'évaluation des recettes nettes du budget général, elle est réduite de 252 millions d'euros par rapport au collectif du mois de juillet. Mais ce dernier collectif avait déjà fortement réduit les prévisions de recettes par rapport à la loi de finances initiale de 2002. C'est ainsi que, par rapport au collectif, nous enregistrons 0,64 % de baisse de recettes fiscales par rapport à la prévision mais que, si l'on prend en compte la prévision initiale de 2002, il s'agit, sur l'ensemble des recettes nettes du budget de l'Etat, d'une moins-value de près de 4 %. C'est dire à quel point les recettes avaient été surestimées dans la loi de finances initiale pour 2002.
    Lorsque nous avons discuté du collectif lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2003, nous avons envisagé les principaux facteurs rendant compte de ces moins-values. Je n'y reviendrai donc pas. La prise en compte à la fois des dépenses que je viens d'évoquer et des recettes fait ressortir un déficit budgétaire de 46,758 milliards d'euros, soit 754 millions de plus que dans le collectif d'été. Mais la comparaison doit se faire avec la loi de finances initiale : ainsi, nous enregistrons dans le présent collectif un déficit supérieur de 54 % par rapport à celui qui avait été prévu en loi de finances initiale : 46,8 milliards d'euros contre 30 milliards d'euros en loi de finances initiale.
    La commission proposera à l'Assemblée plusieurs améliorations des différents articles du projet de loi de finances rectificative.
    L'une des dispositions prévue est attendue depuis plusieurs années : il s'agit, pour les entreprises de transport maritime, de la mise en place, d'ailleurs sous option, de la taxation forfaitaire dite « au tonnage », qui permettra l'essor de notre flotte de commerce et de l'emploi dans ce secteur. Je rappelle que la taxe au tonnage a été adoptée par la plupart des autres pays européens.
    L'article 18, qui aménage le régime fiscal des biocarburants, permet de donner une base légale à un dispositif annulé par un tribunal il y a quelques mois. Le Conseil a pris une décision le 25 mars dernier.
    Le dispositif que propose le Gouvernement est un peu violent, si je puis dire, en termes de réduction de la taxe intérieure sur les produits pétroliers au bénéfice des biocarburants. Nous avons eu à ce sujet une longue discussion et la commission a adopté un amendement allant dans le sens de la baisse, mais pas d'une baisse aussi importante que celle que propose le Gouvernement.
    La commission a adopté certains des amendements que le Gouvernement a présentés la semaine dernière, concernant notamment une partie du dispositif législatif qui permet la mise en place du plan de sauvetage de France Télécom.
    Je relève aussi dans le collectif budgétaire la traduction de la prime de Noël pour les titulaires du RMI et les chômeurs en fin de droits. Je confirme, monsieur le ministre, ce que vous venez de dire : nous finançons la prime de Noël, alors que le financement de celle de 2001 avait été oublié, tout comme le financement de celle de 2002. (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Michel Bouvard. Le Père Noël socialiste vivait à crédit !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il a donc fallu prévoir ce financement dans le collectif de juillet...
    M. Charles de Courson. Voilà le vrai Père Noël !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... et nous y revenons en cette fin d'année.
    En conclusion, mes chers collègues, sous réserve des amendements qu'elle vous proposera, la commission des finances vous demandera de voter ce second projet de loi de finances rectificative pour 2002. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées.
    M. Axel Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la commission de la défense, ce projet de collectif pour 2002 comporte de nombreux points positifs et un qui l'est moins.
    Premier point positif : l'ouverture de 88 millions d'euros au titre III. Elle couronne une gestion de ce titre d'une grande qualité. Toutes les dépenses supplémentaires apparues au cours de l'année, soit 896 millions d'euros, sont couvertes, qu'il s'agisse des rémunérations ou des opérations extérieures.
    Des reports de charges récurrents sur les loyers de la gendarmerie ou pour les arriérés de dette de la SNCF ont pu également être définitivement apurés au cours de l'année.
    Deuxième point positif : les autorisations de programme ouvertes au titre V par l'article 8 pour 4 650 millions d'euros. Elles étaient très attendues pour la poursuite de la réalisation du modèle d'armée 2015. L'une, de 1 326 millions d'euros, finance la dernière tranche du développement du missile nucléaire balistique M51, qui doit entrer en service à partir de 2015. Une autre, d'un montant de 3 114 millions d'euros, finance une commande globale de 59 avions Rafale à passer au premier trimestre 2003 : 46 avions pour l'armée de l'air, 13 pour la marine.
    Troisième point positif : les 211 millions d'euros de crédits de paiement ouverts au titre V, également à l'article 8. Il faut cependant savoir que cette somme ne concerne pas le budget de 2002 : elle a pour objet de respecter les décisions du conseil de défense relatives au périmètre de la loi de programmation militaire, lequel exclut la restructuration de la DCN et le budget civil de recherche et développement.
    Il faut se féliciter du confortement ainsi apporté par le projet de loi de finances rectificative au projet de loi de programmation militaire.
    Quatrième point positif, enfin : les articles 32 et 33. L'article 32 proroge le régime spécifique d'aliénation des immeubles inutiles au service du ministère de la défense qui a été instauré en 1987 et qui donne toute satisfaction, l'article 33 supprimant quant à lui le compte de commerce 904-01 relatif aux subsistances militaires et transférant les missions assurées sur ce compte à l'économat de l'armée, qu'il transforme en un EPIC l'économat des armées.
    Ces mesures de gestion doivent être approuvées.
    Le projet de loi comporte malheureusement, en regard de ces dispositions, un article particulièrement négatif, l'article 9, qui annule 321 millions d'euros de crédits de paiement du titre V. (Exclamations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    La commission de la défense a voté à l'unanimité un amendement tendant à supprimer cet article pour trois raisons.
    M. Jean-Jacques Descamps. Très bien !
    M. Axel Poniatowski, rapporteur pour avis. Les crédits dont l'annulation est proposée sont aujourd'hui gelés. Mais, contraitement aux années 1997 à 2000, ces crédits gelés correspondent pour une large part à des dépenses enagées. Des factures sont en attente.
    La suppression de ces crédits ne procède donc pas d'une bonne gestion. Si les annulations demandées sont accordées, les factures correspondant aux crédits engagés devront être payées sur des crédits de 2003. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Or le budget de l'équipement de la défense voté pour 2003, s'établissant à 13,640 milliards d'euros, est une première marche vers un montant annuel des plus de 14,5 milliards d'euros nécessaires à la réalisation du modèle d'armée 2015. Amputer cette première marche par des arriérés à payer menacera la réalisation du modèle, en contradiction avec le vote de l'Assemblée nationale sur le projet de loi de programmation militaire.
    Enfin, le Parlement a jugé en juillet dernier que la situation du budget d'équipement des armées justifiait un abondement de crédits. Celui-ci a été de 100 millions d'euros. Nous ne saurions nous déjuger en annulant, cinq mois plus tard, le triple de ce montant.
    La commission de la défense n'a donc adopté le projet de loi de finances rectificative que sous réserve de la suppression de l'article 9. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, je voudrais faire appel à la sagesse de mes collègues. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Jeudi dernier, à la requête de membres de la commission des finances, nous avons demandé au Gouvernement de reporter la discussion du collectif à cette semaine, plutôt que de travailler toute la journée du vendredi et la nuit du vendredi au samedi. Le Gouvernement l'a accepté tout en souhaitant vivement qu'en échange nous nous concentrions sur l'essentiel, afin que le débat ne dure pas trop longtemps.
    Il n'est pas besoin, chers collègues, de reprendre des amendements présentés trois fois.
    Le groupe socialiste a entendu par anticipation cet appel, et je l'en remercie puisqu'il a renoncé à deux motions de procédure.
    Nous devrions terminer cette nuit vers deux heures. Si nous n'y parvenons pas, nous nous retrouverons demain matin.
    Pour que le Gouvernement continue d'accepter nos initiatives, observons en échange la discipline qu'il nous a demandée. Je vous en remercie d'avance. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Didier Migaud. La majorité est de plus en plus une majorité de godillots !
    M. le président. Je vous remercie, monsieur le président Méhaignerie, pour cet appel à la sagesse. Les deux rapporteurs ont été quant à eux parfaits : ils ont strictement respecté leurs temps de parole.

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Marc Laffineur, à qui je demande de respecter à son tour le temps qui lui est imparti.
    M. Marc Laffineur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons la discussion d'un collectif budgétaire qui s'inscrit dans la ligne de conduite promise et tenue par le Gouvernement : faire preuve de transparence et de sincérité. Ainsi, compte tenu des dernières évaluations budgétaires disponibles et du financement des priorités gouvernementales, le déficit budgétaire s'est dégradé de 0,75 milliard d'euros par rapport à ce qui avait été voté dans le projet de loi de finances rectificative cet été, puisqu'il s'élève à 46,76 milliards d'euros.
    Le contexte international est difficile. Les perspectives économiques américaines pour le quatrième trimestre semblent moins favorables que prévu lors du troisième trimestre. Le taux de chômage a fortement augmenté. Le président américain a d'ailleurs dû changer son secrétaire au Trésor et l'incertitude irakienne pèse fortement sur l'économie américaine et mondiale.
    M. Augustin Bonrepaux. On aura tout entendu !
    M. Marc Laffineur. En Allemagne, les perspectives sont encore plus moroses, puisque la production industrielle a encore diminué de 2,1 % en octobre par rapport à septembre et de 1 % sur les deux derniers mois. Le chancelier qui vient d'être réélu fait d'ailleurs exactement le contraire de ce qu'il avait promis pendant la campagne électorale en alourdissant fortement les impôts, mais il est vrai que c'est un social-démocrate.
    M. Didier Migaud. C'est nul !
    M. Marc Laffineur. Malgré cela, le moral des industriels et des ménages français commence à aller mieux. Selon l'INSEE, contrairement à la situation observée en milieu d'année 2002, les perspectives de production de l'industrie manufacturière pour les prochains mois, le niveau des stocks et des carnets de commandes s'améliorent. Par ailleurs, alors que l'on sait qu'aujourd'hui, le meilleur soutien de notre croissance est la consommation de ménages, leurs dépenses en produits manufacturés, qui représentent un tiers de leurs achats, se sont redressées de 1 % au mois d'octobre après avoir baissé de 0,9 % en septembre.
    La Banque de France a maintenu sa prévision de croissance à plus 0,4 % pour le troisième trimestre 2002, c'est-à-dire 0,1 point de plus que la précédente estimation. Ces chiffres coïncident avec les perspectives économiques de l'OCDE qui prévoit, pour la zone euro, une croissance en hausse de un point entre 2002 et 2003. Par ailleurs, malgré l'existence d'un important décalage entre le taux d'inflation de pays comme l'Espagne, estimé à 4,7 % en octobre et l'Allemagne, estimé à 1,3 %, la Commission européenne maintient sa prévision d'un recul de l'inflation début 2003. La Banque centrale européenne a décidé de réduire d'un demi-point son taux directeur, ce qui doit doper l'économie européenne. Cependant, si les économies allemandes et américaines ne reprennent pas, la France restera isolée et aura du mal à avoir une croissance élevée.
    J'en viens à la présentation du projet de loi de finances rectificative pour 2002. Compte tenu du déficit supplémentaire de 15 milliards d'euros hérité de la gestion socialiste et de ses prévisions économiques...
    M. Augustin Bonrepaux. Vous êtes au pouvoir depuis sept mois ! Vous avez aggravé la situation !
    M. Marc Laffineur. Souvenez-vous plutôt de l'audit, calqué sur celui que vous aviez demandé ! Ce collectif affiche une perte de recettes fiscales de 1,55 milliard d'euros pour 2002, des ouvertures de crédits pour un montant de 2 milliards d'euros gagées par 2,6 milliards d'euros d'économies.
    La baisse du niveau des recettes fiscales est un point marquant de ce projet de loi de finances rectificative. Des causes structurelles que l'on retrouve dans le budget 2003 ont obligé le Gouvernement à baisser les recettes de 700 millions d'euros au Sénat. Nous aurions préféré que cela soit décidé à l'Assemblée nationale.
    S'agissant de la TVA, la prévision de recettes a été diminuée de 4,5 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale de 2002. En effet, 300 millions d'euros sont consacrés au raccourcissement du délai moyen de traitement des demandes des entreprises. On ne peut que s'en réjouir, car cela augmente la trésorerie des entreprises dans une période difficile pour elles, sans incidence sur 2003. Le reste de la diminution de la TVA sera répercuté en 2003. Le même mécanisme est appliqué à l'IS pour 300 millions d'euros sans incidece pour 2003. Pour la TIPP, on observe un déstockage qui entraîne une perte de 500 millions d'euros non renouvelable et qui n'affecte pas les recettes de 2003.
    J'en viens aux dépenses. Les ouvertures de crédits portent sur 2 milliards d'euros et les économies sur 2,58 milliards d'euros. Elles traduisent des dépenses destinées à financer les mesures promises par le Gouvernement dans les domaines de la défense et de la sécurité intérieure : 298 millions d'euros sont destinés au fonctionnement des forces armées et à la recherche du ministère de la défense et 46 millions d'euros à la mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Mais ces ouvertures sont, pour une grande part, également affectées au financement de mesures prises par le précédent gouvernement et qui n'ont été que partiellement financées : les contrats territoriaux d'exploitation, la CMU, suppression de la vignette automobile, les emplois-jeunes,...
    M. Augustin Bonrepaux. Pourquoi n'avez-vous rien prévu au collectif de juillet ?
    M. Marc Laffineur. ... le dispositif d'exonération de charges sociales patronales, les 35 heures, ainsi que le protocole hospitalier.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous n'avez rien prévu ! Vous avez fait un collectif et rien financé !
    M. Marc Laffineur. Je comprends que cela vous fasse mal, monsieur Bonrepaux !
    Il faut bien également prévoir l'ajustement des charges de compensation démographique des régimes de retraites à hauteur de 92 millions d'euros et 200 millions pour équilibrer le fonds national de chômage.
    Au total, les besoins en financement des administrations publiques passeront de 2,6 % à 2,8 % du PIB.
    Les principales dispositions d'ajustement prévues par ce projet de loi de finances rectificative pour 2002 portent sur des domaines divers et variés : les nouvelles technologies, l'écologie et le développement durable, la simplification fiscale, la mise en conformité avec le droit communautaire. On peut noter la fin de la distorsion de concurrence dans le commerce électronique communautaire, l'extension du champ des exonérations de la TGAP assise sur les déchets, la mise en place d'un interlocuteur unique pour les PME, le renforcement des bases légales de la tolérance administrative liée à la vente de tabacs hors débitants pour mieux lutter contre la contrebande, la revalorisation entre 20 % et 120 % des pensions des anciens combattants des anciennes colonies, les dispositifs de solidarité mis en oeuvre à la suite des inondations.
    On ne peut que se réjouir des amendements déposés par le Gouvernement, particulièrement de ceux qui concernent la situation financière de France Télécom et du Crédit lyonnais. En effet, France Télécom est l'opérateur le plus endetté au monde avec une dette de 70 milliards d'euros, des fonds propres négatifs de 6 à 8 milliards d'euros et une perte estimée cette année entre 18 et 20 milliards d'euros. Cette situation résulte d'investissements à l'étranger malvenus au moment où la bulle boursière était à son maximum - l'achat de Mobilcom pour 12 milliards d'euros a été particulièrement catastrophique. Mais c'est aussi le résultat de l'entêtement du gouvernement précédent, qui a laissé les comptes se dégrader au nom d'une idéologie qui ne pouvait souffrir l'ouverture du capital. A chaque acquisition, l'entreprise était obligée de payer en liquide, alors que toute autre entreprise privée aurait payé en actions.
    Les échéances de remboursement de dettes de 15 milliards d'euros en 2003, de 15 milliards d'euros en 2004 et de 20 milliards d'euros en 2005 auraient mis l'entreprise en dépôt de bilan en 2003 sans un plan de sauvetage qui redonne confiance en l'avenir de l'entreprise. Ce plan de sauvetage équilibré et volontaire est le suivant : un effort de gestion de la part de France Télécom pour 15 milliards d'euros en trois ans, 15 milliards d'euros de refinancement obligatoire et une recapitalisation de 15 milliards d'euros. Aujourd'hui, par amendement, le Gouvernement nous propose, par l'intermédiaire de l'ERAP, une ligne de crédits de 9 à 10 milliards d'euros, afin de redonner confiance aux marchés et de sauver l'entreprise.
    En ce qui concerne le Crédit lyonnais, le financement du prêt de 186 milliards de francs contracté par la CDR en 1995 - autre héritage des gouvernements socialistes d'avant 1993 -,...
    M. Jean-Yves Chamard. Eh oui !
    M. Charles Cova. Ils nous en ont laissé des pétards !
    M. Marc Laffineur. ... pour préserver de la faillite le Crédit lyonnais, à cette époque encore banque majoritairement publique, a permis de sauver l'entreprise. En dépit de sa privatisation tardive, en 1999, la Cour des comptes estimait, fin 2000, son déficit à 14,8 milliards d'euros. Encore une erreur de gestion socialiste !
    Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a donc décidé de céder à BNP-Paribas, par voie d'enchères publiques, les 11 % de participations que l'Etat détenait encore dans le capital du Crédit lyonnais, pour un montant de 2,2 milliards d'euros. Ceux-ci iront abonder pour 500 millions le fonds de réserves des retraites, pour 800 millions l'EPFR qui gère la dette du Crédit lyonnais, le reste étant destiné au désendettement des entreprises publiques.
    J'en viens aux zones franches urbaines. Je félicite également le Gouvernement pour les mesures portant sur les ZFU, à savoir le recul au 31 décembre 2007 de la fin du dispositif d'exonération des cotisations sociales patronales, l'ouverture des droits au régime d'exonération des cotisations personnelles d'assurance maladie-maternité pour les commerçants et les artisans qui installent leur activité dans une de ces zones entre le 1er janvier 2003 et 2007 et la prorogation du régime d'exonération de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les établissements créés entre le 1er janvier 2002 et le 1er janvier 2008. Il est, en effet, nécessaire de protéger les zones franches urbaines qui ont permis la création de 10 000 entreprises et de 50 000 emplois en cinq ans.
    S'agissant de l'Agence nationale de développement agricole, l'on peut se féliciter que l'ANDA soit désormais financée par une taxe unique, qui remplace neuf autres taxes, car la simplification fiscale est toujours souhaitable. En revanche, on peut s'interroger sur le fait que cette taxe porte sur le chiffre d'affaires. En effet, les grandes exploitations agricoles céréalières de la Beauce, à forte valeur ajoutée, et les petites exploitations d'élevage de viande du Maine-et-Loire, par exemple, qui ont un gros chiffre d'affaires, mais une faible valeur ajoutée, n'auront pas la même charge. La commission des finances a d'ailleurs repoussé cet amendement à l'unanimité en attendant vos réponses, monsieur le ministre.
    Autre domaine : l'aide au Liban. Je suis très attaché à l'aide aux pays en développement : 422 millions d'euros seront consacrés à la consolidation des dettes de ces pays. Cela fait partie des promesses du Président de la République et nous y tenons tous. Je me réjouis donc de la contribution française de 500 millions d'euros au désendettement du Liban, pays ami de la France qui, suite aux reconstructions d'après-guerre, connaît un endettement correspondant à 170 % de son PIB et qui réalise des efforts pour éteindre ses dettes.
    Enfin, je remercie le Gouvernement pour la reconduction de la prime de Noël et pour les 310 millions d'euros qui lui sont consacrés. Cela dit, je ferai la même remarque que Gilles Carrez : cela fait trois primes de Noël que le Gouvernement, l'Etat, donc les Français, sont obligés de financer cette année.
    Ce collectif budgétaire permet de tenir les promesses faites en matière d'efficacité, de clarté et de sincérité. C'est pourquoi le groupe UMP le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis que nous examinions ce collectif aujourd'hui, plutôt que vendredi dernier. Mon interprétation de ce changement de calendrier est néanmois différente de celle du président de la commission des finances. J'y vois l'illustration de la non-maîtrise par le secrétariat d'Etat aux relations avec le Parlement du calendrier de nos travaux. En effet, cela fait plusieurs fois que l'ordre du jour est bousculé, sans doute parce que le Gouvernement considère que l'Assemblée nationale doit ressemble à l'UMP et qu'il ne peut imaginer que des députés puissent vouloir discuter d'un texte ! Si vous avez pris du retard, c'est parce que vous aviez prévu trop peu de temps pour la discussion du texte sur la décentralisation !
    J'en viens à ce collectif budgétaire. J'avoue avoir été stupéfait en écoutant Marc Laffineur. Après avoir constaté, comme nous, une dégradation des comptes publics, un dérapage non contrôlé de nos finances publiques, contrairement à ce que dit le ministre délégué au budget, il nous ressort la même rengaine : « C'est la faute des socialistes », ou plutôt « de la majorité plurielle », bref de ceux qui étaient au pouvoir sous la législature précédente. Et il ajoute que la situation internationale y est aussi pour quelque chose, ce qui doit expliquer que c'est aujourd'hui le ministre délégué au commerce extérieur qui nous présente le collectif. La prochaine fois, ce sera peut-être le ministre des affaires étrangères ! Tout simplement pour pouvoir dire à chaque fois : « Ce n'est pas notre faute. »
    J'ai connu des Premiers ministres et des gouvernements de droite plus courageux que l'actuel Premier ministre et que l'actuel gouvernement. Je me souviens de M. Balladur expliquant, seulement quelques mois après sa nomination, qu'il se sentait pleinement responsable de la situation économique et budgétaire.
    M. Louis Giscard d'Estaing. Où est M. Fabius ?
    M. Didier Migaud. J'ai même entendu M. Juppé, après avoir dénoncé la gestion calamiteuse de son prédécesseur - c'était M. Balladur - et après avoir pris des mesures qu'il jugeait positives et nécessaires, reconnaître qu'il se sentait pleinement responsable de la situation. Je constate que ce n'est pas votre cas : c'est soit la faute de vos prédécesseurs, soit la faute des Américains, dont la reprise économique tarde. Ce n'est pas sérieux ! C'est la deuxième fois que vous nous faites le coup de l'héritage, après le collectif d'été.
    M. Charles de Courson. Et ce n'est pas fini !
    M. Didier Migaud. Cela masque en fait vos propres choix et vos propres contradictions, car ce collectif traduit bien une dérive budgétaire, votre propre incapacité à maîtriser la dépense publique. C'est le paradoxe : malgré une remise en cause massive de dépenses que nous considérons comme utiles au pays, le Gouvernement se révèle incapable de maîtriser la dépense publique et le niveau de déficit en raison du choix, que vous devez assumer, d'une réduction supplémentaire de l'impôt sur le revenu et de la priorité tout à fait déraisonnable que vous accordez aux dépenses militaires. Vous affirmez des priorités, mais, dans le même temps ; vous annulez des crédits affectés notamment à la sécurité routière, à l'entretien, la maintenance, au fonctionnement, à certaines interventions dans le domaine des transports, à des opérations d'investissement concernant les transports urbains.
    M. Jean-Louis Idiart. Et à la sécurité maritime !
    M. Didier Migaud. Ce faisant vous n'agissez pas dans le sens des priorités que vous affichez, notamment s'agissant de la sécurité. Certaines décisions sont même malheureusement en totale contradiction avec cet objectif. De la même façon, vous faites des économies en ce qui concerne la police et la sécurité maritime, alors même que notre pays et l'Espagne doivent faire face aux conséquences du naufrage du Prestige. Là encore c'est de l'irresponsabilité ! Nous ne sommes pas d'accord avec ces économies, d'autant que les dépenses que vous décidez ou les recettes dont vous vous privez nous paraissent trop ciblées sur une catégorie de nos citoyens et ne sont pas de nature à encourager la consommation. Je pense encore à la réduction supplémentaire de l'impôt sur le revenu et aux dépenses militaires. Lorsque le rapporteur de la commission de la défense nationale proteste contre des annulations de crédits, alors que ces crédits ne peuvent manifestement pas être consommés, cela traduit une absence de responsabilité, d'autant que je ne suis pas sûr que le Gouvernement soit en mesure d'appliquer la loi de programmation militaire qu'il nous a pourtant fait voter. Cette augmentation de l'effort national en matière de dépenses militaires ne nous paraît pas suffisamment réfléchie. Il faudrait mieux contrôler le budget de la défense nationale. On ne peut sans cesse parler de défense européenne sans s'interroger sur les conséquences qu'elle pourrait avoir sur notre propre budget de défense nationale. Nous devrions aussi réfléchir aux invitations que nous pourrions adresser à d'autres pays pour que cette défense européenne soit une réalité.
    Nous sommes donc en désaccord sur l'ensemble des priorités contenues dans ce texte et notamment sur les annulations de crédits. Je note d'ailleurs que ce collectif ressemble beaucoup à la loi de finances initiale. Il obéit à la même logique : un petit nombre de ménages bénéficie de mesures favorables tandis que, parallèlement, des dépenses importantes sont sacrifiées en matière d'éducation, de sécurité routière, de politique de la ville, de formation professionnelle. Ce sont les mêmes obsessions qui reviennent : il s'agit pour vous de remettre en cause des priorités que nous considérons comme très utiles pour le pays.
    Ce projet de collectif traduit en outre une dégradation budgétaire, dont vous êtes en grande partie responsable. Non, l'audit Bonnet-Nasse ne dit pas ce que vous voulez lui faire dire. L'aggravation de la situation relève en partie de votre responsabilité, et vous le savez parfaitement. En faisant le choix de prévoir des dépenses supplémentaires et notamment en réduisant de 5 % l'impôt sur le revenu, vous avez en effet aggravé le déficit budgétaire. Vous avez d'ailleurs eu l'honnêteté de reconnaître dans un certain nombre de documents budgétaires que votre responsabilité était au moins égale à 0,4 point de PIB. Vous le reconnaissez à l'écrit mais pas à l'oral : il y a encore du chemin à faire dans le domaine de la transparence et de la sincérité budgétaire.
    A cet égard, ce collectif traduit aussi l'insincérité de la loi de finances pour 2003. Lorsque, le 20 novembre dernier, le ministre du budget a informé la commission des finances de l'Assemblée nationale d'une révision à la baisse du niveau des recettes fiscales, il a indiqué que l'effet négatif sur la base de calcul retenue pour fixer le niveau des recettes fiscales en 2003 serait modifié au Sénat. La presse a relevé à juste titre une pratique sans précédent. De fait, aucun gouvernement n'a jamais dit en substance : « C'est vrai, la croissance effective n'est pas à la hauteur de nos prévisions et ce décalage se fait sentir de façon négative sur le niveau de nos recettes, notamment sur l'impôt sur le revenu. Mais cet effet, rassurez-vous, ne joue qu'en 2002, pas en 2003 ! »
    M. Charles de Courson. C'est seulement 700 millions !
    M. Didier Migaud. Monsieur le ministre, on ne peut pas dire qu'il s'agit seulement d'un effet de base. Si le décalage entre les prévisions de croissance que pas un seul organisme, d'ailleurs, ne partage, et la réalité de la croissance produit des effets négatifs en 2002, il se fera malheureusement également sentir en 2003, alors même que ce décalage sera encore plus fort l'an prochain.
    Ce décalage est très fort entre la réalité et le discours du Gouvernement, qui nous promet contre toute évidence 2,5 % de croissance moyenne pour 2003. Les commentateurs avisés ont du reste « apprécié » la nuance apportée, soit involontairement, soit au contraire très sincèrement, par le ministre Mer lorsqu'il a évoqué pour 2003 un rythme annuel de 2,5 % de croissance et non pas une croissance moyenne de 2,5 %. Donc non seulement le consensus des conjoncturistes est désormais de 1,8 %, soit un tiers de moins, mais au surplus l'INSEE lui-même fournit des données statistiques, et non des prévisions, qui contredisent totalement cette prévision gouvernementale dont par ailleurs les ministres nous disent qu'elle est surtout « l'expression d'une volonté ».
    Nous considérons, quant à nous, et nous aurons l'occasion d'y revenir, que les données de l'INSEE ne permettent pas d'arriver à la conclusion que vous présentez. Au demeurant, vos discours contredisent vos hypothèses de croissance puisque vous avez indiqué que la croissance n'accélérerait par la suite que très modérément, notamment en 2003. Cela signifie d'une certaine façon que vous trafiquez la présentation du budget. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Charles de Courson. Nous sommes choqués !
    M. Didier Migaud. Peut-être le mot est-il un peu fort pour vous.
    M. Jean-Louis Idiart. Disons plutôt que vous la tripotez ! (Sourires.)
    M. Didier Migaud. Le terme est sans doute plus sympathique.
    En tout cas, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas fonder sur les données de l'INSEE le rythme de croissance que vous retenez pour 2003. Compte tenu des révisions auxquelles vous avez dû procéder pour ce collectif, nous trouvons malheureusement que vous n'en ayez pas tiré les conséquences au niveau de la loi de finances initiale pour 2003.

    Pour terminer, je voudrais dire un mot de France Télécom. Le Gouvernement a fait connaître son soutien au plan d'action de France Télécom qui comprend, notamment, la mise à disposition par l'Etat d'une ligne de crédits de 9 milliards d'euros. L'Etat actionnaire assume donc ses responsabilités d'actionnaire majoritaire et cela nous paraît tout à fait légitime.
    Cependant le plan d'action laisse planer de nombreuses inconnues, en particulier sur l'emploi et les missions de service public. D'ores et déjà, la filiale Orange a annoncé la suppression de 2 000 emplois, mais aucun chiffre n'est donné quant aux réductions d'effectifs envisagées dans le plan. Le pire est donc à craindre.
    De même, rien n'est dit sur les missions de service public qui s'imposent à l'opérateur historique, comme à tous les opérateurs de téléphonie, notamment en matière d'aménagement du territoire et d'accès au service. On peut même redouter que le Gouvernement ait des arrière-pensées et prépare le démantèlement du service public, qui passerait par la privatisation de France Télécom. On nous a taxés de dogmatisme. Nous estimons que c'est plutôt le Gouvernement qui fait preuve de dogmatisme, en prétendant que le statut public de l'entreprise est à l'origine de ces difficultés rencontrées par l'entreprise alors que cela n'est absolument pas prouvé. Le statut actuel de France Télécom qui a d'ailleurs été créé par la loi du 26 juillet 1996, votée sous la responsabilité du Gouvernement d'Alain Juppé, n'est pas en soi la cause des difficultés de France Télécom et vous le savez bien. Le remettre en cause constituerait une erreur. Une telle attitude illustre bien le dogmatisme de la majorité.
    Nous voterons donc contre ce projet de collectif parce qu'il confirme des priorités qui ne sont pas les nôtres, parce qu'il remet en cause des actions de l'Etat qui nous paraissait tout à fait justes et nécessaires, et parce qu'il constitue, d'une certaine façon, l'aveu d'insincérité des comptes que vous nous avez présentés en loi de finances initiale. Cela vous fait sourire, monsieur le ministre du commerce extérieur.
    M. Jean-Yves Chamard. Il y a de quoi !
    M. Didier Migaud. Nous ne sourions pas, quant à nous, car votre politique budgétaire et économique conduit le pays dans le mur. La Commission européenne y a d'ailleurs fait allusion. Il est triste d'en arriver là. Cela augure malheureusement la mise en oeuvre de plans de rigueur qui pénaliseront au premier chef les ménages les plus modestes, qui sont les plus fragiles. Mais vous vous en souciez peu. Là n'est pas votre priorité. Vous avez choisi, au contraire, de cibler vos mesures sur un petit nombre de ménages aisés.
    M. Jean-Louis Dumont. Tout à fait !
    M. Didier Migaud. Contrairement à ce que nous avons fait les années précédentes (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), vous n'avez pas pris des dispositions pour soutenir la consommation et faire en sorte que notre pays connaisse des hypothèses de croissance supérieures à celles que vous prévoyez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Louis Dumont. Excellent !
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe UDF souhaite tout d'abord féliciter le Gouvernement pour l'effort de sincérité qu'il a accompli dans le cadre de cette deuxième loi de finances rectificative pour 2002. Il était d'ailleurs temps que les Français renvoient la gauche plurielle dans l'opposition compte tenu de la situation dont nous avons hérité et des difficultés qui s'annoncent. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    La sous-évaluation des dépenses de l'Etat en 2002 va donc atteindre 7,45 milliards d'euros, soit 2,8 % de plus que le montant fixé en loi de finances initiale, qui était de 266,3 milliards d'euros. Cette hausse est la plus forte des quatre dernières années puisqu'elle était de 1,4 % en 2001, de 2,2 % en 2000 et de 2,5 % en 1999.
    Lors du vote de la loi de finances pour 2002 - les membres de cette assemblée qui étaient là s'en souviennent - M. Fabius nous avait expliqué que la croissance serait de 2,5 % et que les dépenses de l'Etat n'augmenteraient pas de plus de 1,5 % en valeur, soit 4 milliards d'euros. Or nous en sommes à un peu plus de 11,5 milliards de francs. Avant mesures d'annulation, la hausse des dépenses de l'Etat sera donc presque trois fois supérieure à celle qu'avait prévue M. Fabius. Une nouvelle fois, la gauche a commis un mensonge d'Etat. Nous l'avions en effet prévu mais le rapporteur général et le président de la commission des finances l'avaient alors nié - n'est-ce-pas messieurs Migaud et Bonrepaux ?
    Après l'annulation des 2,5 milliards d'euros, qui servent uniquement à gager la baisse de 5 % de l'impôt sur le revenu, la hausse des dépenses de l'Etat va atteindre 8,9 milliards d'euros supplémentaires, soit plus de 3,8 %. Avec une croissance de 1 % en volume et une inflation autour de 1,5 % ou 1,6 %, les dépenses de l'Etat vont croître une nouvelle fois plus vite que la richesse nationale.
    Cependant, du fait des reports de crédits - cela apparaît dans les documents que nous envoie maintenant par quinzaines le ministère - l'augmentation réelle des dépenses de l'Etat dépassera les 3,8 %. En effet, au 15 novembre 2002, la hausse atteignait 4,7 % par rapport à la même période de 2001. C'est dire si le poids des dépenses publiques va encore augmenter !
    Mais, chers collègues de la gauche plurielle, vous ne vous êtes pas contentés de sous-évaluer volontairement les dépenses. Vous avez également volontairement sous-évalué les dépenses sociales.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Charles de Courson. Pour l'assurance vieillesse comme pour la branche famille, il n'y a pas de problème particulier ; d'année en année, les dépenses sont maîtrisées. Le vrai problème porte sur les dépenses de santé : on en est à plus 7,2 % ou 7,3 % de hausse pour l'assurance maladie. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Gérard Bapt. La faute à qui ?
    M. Augustin Bonrepaux. A quoi servent les collectifs ?
    M. Charles de Courson. Il en est de même pour les dépenses relatives au chômage.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous n'avez rien fait !
    M. Charles de Courson. L'ensemble des dépenses sociales va de nouveau augmenter plus vite que le PIB.
    Quant aux dépenses des collectivités territoriales, qui constitue la troisième composante des administrations publiques, les dernières estimations montrent qu'elles vont elles aussi progresser largement plus vite que le PIB, sous la pression en particulier de trois grands phénomènes. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Je veux parler des 35 heures, qui ont un effet destructeur dans les établissements sanitaires et sociaux (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), de l'APA, que vous n'avez que partiellement financée, laissant une facture de plusieurs milliards d'euros aux départements (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et, enfin, des nouveaux textes sur les SDIS, et en particulier l'adaptation à ces services des 35 heures.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous voulez les supprimer ?
    M. Charles de Courson. Bref, une fois encore le poids de la dépense publique va s'accroître dans la richesse nationale. Il est temps que le nouveau gouvernement inverse la tendance.
    Quant aux recettes fiscales, la surévaluation auquelle a procédé l'ancien gouvernement est encore plus grave qu'on le croyait au mois d'août. Par rapport au projet de loi de finances initiale pour 2002, les pertes de recettes fiscales nettes des dégrèvements de l'Etat vont atteindre en effet 7,25 milliards d'euros, soit une baisse de 3,6 % par rapport aux prévisions de M. Fabius. La chute du taux de croissance en volume de 2,5 % - prévisions de M. Fabius - à 1 % n'explique qu'une partie de cet écart. L'autre partie est liée à une surévalutation volontaire du précédent gouvernement. Au total, les recettes fiscales nettes baisseront de 7,1 milliards, passant de 198,6 milliards d'euros en 2001 à 191,5 milliards d'euros, soit une baisse de 3,8 %...
    M. Gérard Bapt. Vous avez baissé l'impôt sur le revenu !
    M. Augustin Bonrepaux. Dans ces conditions, pourquoi avoir décidé une réduction d'impôt ? Quelle gestion calamiteuse !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, seul M. de Courson a la parole !
    M. Charles de Courson. ... dont la réduction de 5 % de l'impôt sur le revenu - 2,5 milliards d'euros - ne représente que le tiers. Ainsi, deux tiers de la baisse sont dus à une surélévation volontaire des recettes de l'Etat. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Cependant, il ne suffit pas de prendre en compte les recettes de l'Etat. Il faut aussi dire quelques mots de l'impôt sur les sociétés. C'est le seul impôt sur lequel le Gouvernement fait l'hypothèse, à mes yeux trop optimiste, qu'il n'y aura pas de nouvelle baisse. Au 15 novembre 2002, l'impôt sur les sociétés avait diminué de 9,5 % par rapport à la même période de 2001. Or le Gouvernement s'en tient à une baisse de 8,5 %. Vu les mauvais résultats annoncés par nombre d'entreprises, je crains fort qu'on ne perde encore un milliard d'euros sur l'impôt sur les sociétés d'ici à la fin de l'année. Nous le saurons dans les jours qui viennent, lors du versement des derniers acomptes.
    J'en viens à présent aux problèmes que pose la situation des finances publiques au regard des critères de Maastricht. Le groupe UDF, qui a toujours été l'un des plus proeuropéens de cette assemblée, constate que nous allons bientôt frôler les plafonds fixés par Maastricht.
    Le Gouvernement nous a indiqué que, pour 2002, les déficits publics allaient passer de 1,4 %, tel que prévu par M. Fabius, à 2,8 %. Mais c'est sans compter sur les moins-values de recettes sociales. Répondant sur ce point à nos questions en commission, il a précisé qu'il faisait l'hypothèse qu'on tiendrait à peu près le déficit de l'assurance maladie, de l'assurance vieillesse et de la branche famille. J'en doute quelque peu, quant à moi. Cela signifie donc que nous allons frôler dès la fin de l'année le plafond de 3 %. Et le Gouvernement estime que, pour 2003, l'effet base sur les recettes sera faible, ainsi que la part des dépenses reconductible de celles que nous ouvrons. Permettez-moi d'être un petit peu moins optimiste. Certes, cela va sans doute jouer sur un milliard supplémentaire. Mais quand on commence à frôler les plafonds, un seul milliard peut poser de graves problèmes. Le groupe UDF craint donc que la pression de la dépense publique ne soit de nouveau difficile à inverser.
    Cependant, c'est sur le budget de la sécurité sociale plus que sur celui de l'Etat que les dérives seront les plus fortes si la situation économique de 2003 n'est pas conforme aux prévisions. Si, par exemple, la croissance de 2,5 % prévue pour 2003 tombe à 1,5 %, c'est-à-dire diminue d'un point, ce qui hélas ! peut arriver, selon les chiffres donnés par M. le ministre, le pourcentage du déficit par rapport au PIB augmentera de 0,3 à 0,4 point. Or comme nous sommes déjà à 2,6 % en prévision, cela signifie que nous atteindrions 2,9 %. Le moindre dérapage des finances publiques nous portera donc au-delà des 3 %.
    Aux termes du deuxième critère de Maastricht, le ratio d'endettement public ne doit pas franchir la barre des 60 %. Or, mes chers collègues, avec l'affaire France Télécom, qui a elle seule va représenter avec ses 9 milliards un endettement supplémentaire de 0,6 point de PIB, nous allons pulvériser en 2003 le plafond des 60 %.
    En conclusion, monsieur le ministre, le groupe UDF invite le Gouvernement à poursuivre dans la logique de transparence et de vérité à l'égard de l'opinion publique. Ne faites surtout pas du Fabius ! Certes, pour des raisons politiciennes et électorales, on peut toujours mentir à l'opinion publique (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...
    M. Jean-Louis Dumont. Caricature !
    M. Charles de Courson. ... mais les chiffres finissent toujours par dire la vérité. Nous avons ainsi découvert que le déficit était deux fois plus élevé que celui qui avait été voté.
    M. Jean-Louis Idiart. Il ne fallait pas baisser les impôts alors !
    M. Gérard Bapt. Il ne fallait pas augmenter les honoraires des médecins !
    M. Charles de Courson. Nous sommes de ceux qui pensent que, si au premier ou au deuxième trimestre 2003, la croissance n'est pas au rendez-vous, il faudra gérer avec une extrême rigueur tant le budget de l'Etat que les budgets sociaux. Sans cela, nous serons les derniers de la classe européenne.
    La conclusion est simple. Il faut vite engager les réformes : retraites, décentralisation, assurance maladie, Etat. La tâche sera très dure, car, pendant plus de dix ans, la France n'a connu que le conservatisme.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Exactement !
    M. Charles de Courson. Nous n'avons pas réformé le pays et nous sommes maintenant les avant-derniers de la classe européenne.
    Il faut donc du courage.
    M. Jean-Louis Idiart. Comptez sur l'UDF. Ils vous aideront, monsieur le ministre !
    M. Charles de Courson. La gauche, pendant ce temps, essaiera de se refaire une santé. Mais il en va de l'intérêt du pays.
    Nos collègues de gauche croient qu'une gestion rigoureuse est antisociale. Mais, c'est l'inverse qui est vrai. Seule une gestion rigoureuse permettra de faire baisser durablement le chômage structurel qui est l'un des plus élevés d'Europe. Qui paie le coût du chômage ? Ce ne sont pas en général les cadres moyens et supérieurs mais les moins qualifiés, dont le taux de chômage est à l'heure actuelle de plus de 20 %. Le prix de la politique laxiste qu'a menée la gauche a donc été payé par les couches sociales les plus modestes de notre pays.
    M. Gérard Bapt. C'est pour ça que vous faites des cadeaux aux plus riches !
    M. Charles de Courson. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ces couches ne votent plus pour vous, cher collègue.
    J'en viens très rapidement à quatre articles du projet de loi de finances.
    M. le président. Oui, rapidement.
    M. Charles de Courson. Premièrement, en ce qui concerne les biocarburants, le Gouvernement - mais votre discours, monsieur le ministre, ménageait une ouverture - a déposé un amendement erroné quant au niveau d'exonération de TIPP. Il y a eu une longue concertation avec la profession, notamment sur le bioéthanol. Si nous votions le projet en l'état, les trois usines de Dunkerque, du Havre et de Feyzin qui produisent du bioéthanol en France devraient fermer. Monsieur le ministre, comment la France respectera-t-elle ses engagements pris dans le cadre des accords de Kyoto ? Comment les énergies renouvelables pourront-elles représenter 21 %, dans le bilan énergétique français, contre 15 ou 16 % actuellement ?
    Il faut donc soutenir - et j'espère, avec l'accord du Gouvernement - l'amendement de la commission des finances sur le niveau de la défiscalisation et élargir au bio-éthanol, comme la commission des finances l'a proposé, les dispositions du texte. Il n'y a pas de raison de favoriser l'ETBE par rapport à l'incorporation directe.
    Deuxièmement, et le problème nous tient à coeur, au groupe UDF, l'inégalité à l'égard des anciens combattants des anciennes possessions françaises persiste depuis plus de trente ans. Il a fallu un arrêt du Conseil d'Etat pour réaffirmer le principe d'égalité entre tous les anciens combattants. D'ou ma question au Gouvernement : le texte tel qu'il est respecte-t-il le principe d'égalité ? Prenez le cas d'un ancien combattant de nationalité française qui s'est retiré au Sénégal et un de ses camarades sénégalais. Ils vivent tous les deux dans le même pays. L'égalité sera-t-elle rétablie en donnant à l'un une pension française et à l'autre une pension avec une décote sénégalaise ? L'article 1er de notre Constitution, et c'est à notre honneur, pose le principe d'égalité. Le texte gouvernemental le respecte-t-il, et est-il constitutionnel ?
    M. Jean-Louis Dumont. Mais qui a décidé de la cristallisation des pensions ?
    M. Charles de Courson. Troisièmement, - le texte du Gouvernement sur l'Association nationale pour le développement agricole - l'ANDA - n'est pas bon. D'ailleurs, la commission des finances ne l'a pas adopté. La moins mauvaise solution consisterait à transformer les neuf taxes parafiscales qui alimentent l'ANDA en taxes fiscales tout simplement. Il est inutile d'essayer de trouver un système homogène car vous n'arriverez jamais à trouver un équilibre entre les filières en retenant pour critère le chiffre d'affaires. Vous défavorisez ainsi toutes les filières dont un rapport valeur ajoutée sur chiffre d'affaires est bas et privilégiez celles dont le rapport valeur ajoutée sur chiffre d'affaires est élevé. Autrement dit, vous pénalisez toutes les cultures hors-sol et toutes les filières viticoles. Ce n'est pas acceptable.
    Quatrièmement, il nous faut, bien sûr, appuyer le plan du jeune président de France Télécom. Mais, mes chers collègues, si l'avance de neuf milliards n'a pas d'incidence sur le solde budgétaire au sens de Maastricht, elle en a une sur le critère d'endettement public. Et nous espérons tous que le nouveau président et son équipe vont redresser France Télécom. Sinon, la situation serait dramatique, obligeant une nouvelle fois les Français à combler le déficit avec leurs impôts. Même si nous transférons, comme l'a expliqué M. Mer à la commission des finances, l'ensemble des actions détenues par l'Etat à l'établissement public ERAP pour financer le remboursement de l'emprunt de neuf milliards d'euros, il n'en demeure pas moins que ce serait la nation française, actuellement propriétaire de France Télécom, qui s'appauvrirait.
    Voilà, mes chers collègues, les quelques réserves que je voulais exprimer, mais je ne doute pas, monsieur le ministre, que nous trouverons des compromis sur la plupart d'entre eux. Le groupe UDF votera donc à l'unanimité le projet de loi de finances rectificative pour 2002 pour les raisons que j'ai exposées au début de mon intervention. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de l'examen du collectif de printemps, nous avions attiré l'attention sur le ralentissement de l'économie, et avions particulièrement insisté sur la nécessité d'engager une politique de relance fondée sur un soutien plus important à la demande, assorti d'une amélioration qualitative des conditions de l'offre. Vous n'aviez pas, alors, de mots assez durs pour dénoncer l'aggravation du déficit public et le laxisme de la politique conduite par le précédent gouvernement.
    A peine arrivés au pouvoir, vous n'avez pas hésité, pour des raisons idéologiques, à réduire de 5 % l'impôt sur le revenu, mesure qui profite aux catégories sociales les plus aisées, et creuse ipso facto le déficit dont vous envisagiez de faire porter le poids aux catégories sociales les plus modestes.
    M. Jacques Remiller. Oh ! là ! là !
    M. Michel Vaxès. Vous avez refusé de donner un coup de pouce au SMIC et aux minima sociaux,...
    M. Charles de Courson. 11 % pour le SMIC !
    M. Michel Vaxès. ... et justifié vos choix en affirmant que de telles baisses d'impôts étaient le moyen de dynamiser la croissance en favorisant l'initiative des Français les plus dynamiques.
    Six mois plus tard, le bilan est sévère. L'activité n'a cessé de se ralentir. Les baisses d'impôts, loin de favoriser la consommation, ont alimenté l'assurance vie, les placements garantis, et l'encours moyen des dépôts à vue a continué de progresser, comme le notent les services de la Banque de France.
    En revanche, le chômage a continué de croître et la stabilisation du nombre de chômeurs en octobre, présentée comme une divine surprise, est loin d'annoncer une inversion de tendance : elle est pour une large part liée aux radiations - plus 79 % pour l'année - et aux entrées en stage - plus 27 %. Le nombre de personnes ayant retrouvé un poste de travail a reculé de 2,7 % par rapport à septembre, tandis que le nombre d'offres déposées à l'ANPE chutait de 3 % en un mois. Les licenciements économiques, les plans massifs de réductions d'effectifs, ont continué à marquer l'actualité sociale de ces dernières semaines, ils ne pourront que se multiplier avec la mise en cause des dispositions de la loi de modernisation sociale.
    Vous utilisez avec démagogie l'aspiration à la sécurité des biens et des personnes pour mieux faire accepter l'insécurité sociale massive dont est congénitalement porteuse l'économie à la merci des marchés financiers dont vous poussez les feux. Vous n'avez de cesse de répondre à l'exigence du MEDEF qui réclame toujours plus de flexibilité et de précarisation du travail, quelles qu'en soient les conséquences sociales et humaines.
    « Le ralentissement de l'été amenuise l'espoir d'une reprise rapide » titrait récemment la presse économique. Les chiffres sont là pour l'illustrer. Avec une croissance de 0,9 %, il faudrait désormais que le produit intérieur brut affiche une hausse de 0,4 % d'ici à la fin de l'année pour atteindre votre objectif, monsieur le ministre. Le respecter relèverait du miracle car rien n'annonce pareil retournement de tendance. Que dire dans ces conditions de la sincérité de la loi de finances rectificative ?
    Pourtant, au lieu de changer de cap, vous vous obstinez dans une fuite en avant libérale et vous annoncez des mesures de régulation budgétaire dès le mois de janvier prochain. Une annulation de 2,6 milliards de crédits, c'est considérable ! Elle va bien au-delà d'un simple redéploiement. En dépit de toutes vos dénégations, vous ne pourrez nous empêcher de faire le rapprochement avec les 2,55 milliards qu'a coûté la baisse de l'impôt sur le revenu.
    Que dire aussi de la légitimité et de l'efficacité des réductions d'impôts et des exonérations de cotisations sociales que, les chiffres en témoignent aussi, la stratégie financière des grands groupes a mobilisées contre l'emploi, en France et en Europe ?
    Dans ce contexte, vous annoncez d'ailleurs déjà de nouvelles coupes claires dans la dépense publique, indépendamment de leurs conséquences sur l'économie, l'emploi et la vie quotidienne du plus grand nombre.
    Prenant argument de la nouvelle loi organique, vous insistez sur le fait que l'autorisation budgétaire fixe le montant maximal de la dépense. Nous pensons, quant à nous, qu'elle devrait, au contraire, fixer le niveau des moyens nécessaires à la concrétisation d'objectifs chiffrés y compris en matière de créations d'emplois, de réductions des inégalités sociales ou territoriales fixés par le Parlement.
    Nous affirmons, dans cette perspective, la nécessité de disposer d'un secteur public industriel et de pôles publics dans les secteurs aussi stratégiques que la communication, l'énergie, l'eau, l'environnement ou le financement de l'économie, la nécessité aussi d'accorder de nouveaux droits d'intervention aux élus, aux citoyens et aux salariés.
    A l'inverse, sous couvert d'une décentralisation pervertie, vous entendez réformer l'Etat, non pour mieux satisfaire les besoins sociaux et humains mais pour réduire toujours plus le champ de l'action publique. Cette même logique vous pousse à accélérer les privatisations. Votre ambition est en fait de mettre toujours davantage l'Etat et les institutions de notre pays en conformité avec les attentes des marchés financiers et les exigences du MEDEF.
    Si certains des membres de votre majorité dénoncent la procédure d'alerte engagée par une Commission européenne, gardienne du dogme du pacte de stabilité qui refuse de prendre en compte les contraintes politiques qui sont les vôtres, ce n'est aucunement pour revendiquer un changement de cap de la construction européenne.
    Vous avez les yeux rivés sur le moindre frémissement de l'activité économique aux Etats-Unis. Pour vous, en effet, il n'y a de perspective que dans la reprise américaine qui, annoncée depuis plusieurs semaines, demeure plus que jamais incertaine dans son dynamisme et sa durée. La France, de concert avec ses partenaires européens, aurait pourtant la capacité d'apporter une contribution originale à une relance de l'activité au plan mondial, donnant priorité à l'emploi, au développement durable. Une telle entreprise supposerait de s'attaquer à l'obstacle sur lequel ont buté toutes les phases de reprise depuis trois décennies : l'excès de croissance purement financière, l'insuffisance de la demande globale et des dépenses pour les hommes. Le développement des populations elles-mêmes, celui de leurs capacités productives et de leur formation, de la qualité de leur vie sociale et de leur activité créatrice, mériteraient d'être le fondement d'une nouvelle croissance.
    C'est dans cette perspective que nous présenterons des propositions précises, pour avancer dans la voie d'une sécurité d'emploi et de formation, en France et en Europe.
    Il faudrait confier de nouvelles missions et un contrôle politique et social à la Banque Centrale Européenne dont la politique, obnubilée par la défense de l'attractivité des places financières européennes, a largement contribué à la dégradation de la situation économique. Une telle politique passe par un nouveau crédit sélectif répondant aux besoins des entreprises, qui donnerait priorité à l'emploi et à la formation.
    La dernière enquête trimestrielle de l'INSEE montre combien il serait nécessaire d'inscrire le collectif de fin d'année dans une politique de relance de l'emploi. Comme le note l'Institut d'études économiques, la question de la capacité de la demande intérieure à sauver la croissance est aujourd'hui de plus en plus posée. La progression de 0,7 % de la consommation des ménages au troisième trimestre n'est pas suffisante pour compenser le repli de l'investissement des entreprises, en baisse de 0,8 % contre moins 0,5 % au deuxième trimestre, tandis que les stocks pèsent à nouveau sur la croissance, qu'ils amputent de 0,3 point.
    Si les exportations - avec une progression de 1,2 % au troisième trimestre, soit à peine moins que le précédent - résistent, les importations, elles, ont décroché durant l'été et leur rythme de progression a été divisé par sept, passant de 1,4 % au deuxième trimestre à seulement 0,2 %. De même, la Banque de France confirme la dégradation de la santé des entreprises, qui rencontrent plus fréquemment des difficultés de paiement.
    Les choix que vous défendez ne pourront que nourrir le cercle vicieux et aggraver les difficultés. Comment ne pas s'inquiéter, par exemple, de l'essoufflement de l'effort d'investissement des collectivés locales que note la direction de la comptabilité publique ? Cette réalité justifie, à elle seule, pour soutenir l'activité, d'inclure les actifs financiers des entreprises dans l'assiette de la taxe professionnelle. Nous affirmons, quant à nous, la nécessité d'une fiscalité plus juste et plus efficace pour l'emploi et l'urgence qu'il y a à réformer le mode de calcul de l'impôt sur les sociétés pour conforter son rendement en incitant les grands groupes à privilégier, dans leur gestion, la création de richesses et d'emplois par rapport aux placements financiers !
    Comme chaque année, le collectif comporte plusieurs mesures présentées comme techniques, mais dont la portée ne saurait être sous-estimée. Là encore, il y a loin entre l'objectif figurant dans l'exposé des motifs et les choix effectivement proposés !
    Tel est le cas, par exemple, des moyens qu'il conviendrait de mobiliser pour répondre aux conséquences des sinistres naturels et industriels. Nous ne pouvons que partager l'amertume des acteurs économiques de la filière des biocarburants quant à la réduction de l'exonération partielle de TIPP.
    Nous nous interrogeons également à propos des conséquences sur l'aménagement du territoire, de la disposition de l'article 36 relative à la mise en cause de la gratuité de l'usage des fréquences pour les émetteurs de télévision numérique terrestre.
    Que dire enfin de l'article 35 où, refusant de suivre l'arrêt du Conseil d'Etat, vous maintenez une inégalité de traitement inacceptable vis-à-vis des anciens combattants ressortissants des pays anciennement placés sous la souveraineté française ?
    Vous comprendrez, monsieur le ministre, mes chers collègues, que pour toutes ces raisons, le groupe des député-e-s communistes et républicains rejette le projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, habituellement, une loi de finances rectificative de fin d'année - à plus forte raison si un premier collectif a été examiné en cours d'exercice à la suite d'un changement de majorité -, se résume à un simple document de régularisation. Or tel n'est pas le cas cette fois-ci. En raison de la conjoncture défavorable observée depuis le mois de septembre, les ressources attendues d'ici à la fin de l'année ne seront pas totalement au rendez-vous et le Gouvernement a estimé que la prévision de recettes pour 2002, pourtant déjà actualisée au mois de septembre, devait être révisée à hauteur de 1,7 milliard d'euros.
    C'est donc une première dans notre histoire budgétaire : pour la première fois, un collectif de fin d'année ne reprend pas la révision des recettes operée en septembre. C'est bien le signe de la volonté de sincérité du Gouvernement, qui serre au plus près la réalité des recettes et applique ainsi de façon stricte, et même rigoureuse, la loi organique du 1er août 2001.
    De surcroît, le Gouvernement, pour tenir compte des perspectives, a souhaité revoir les bases de la prévision pour 2003. C'était logique : du fait de ces perspectives défavorable, la base qui a servi aux évaluations doit être également réduite de 700 millions d'euros, la compensation étant assurée par des recettes fiscales supplémentaires. C'est ce que le Gouvernement a proposé par voie d'amendement, et c'est donc un double effort de rigueur qui est envisagé dans cette loi de finances rectificative.
    Toutefois, pour être parfaitement rigoureux sur le plan constitutionnel et respecter les formes, il aurait été préférable, monsieur le ministre, de présenter cet amendement à l'Assemblée nationale avant qu'elle n'ait achevé la première lecture de la loi de finances. La Constitution prévoit que c'est l'Assemblée nationale qui reçoit la loi de finances en premier ; or votre amendement, chacun le sait, était déjà prêt et il vous aurait été parfaitement possible, par lettre rectificative, de modifier en conséquence l'article d'équilibre avant le vote définitif de la loi de finances en première lecture.
    Par ailleurs, et c'est le deuxième point important, force est de reconnaître que, en raison même de la dégradation de la conjoncture - même s'il est permis de penser, au vu des éléments dont nous disposons, que cette dégradation est désormais stoppée et la situation maîtrisée -, plus les mois passent, plus nos chances de parvenir à 2,5 % de croissance moyenne en 2003 diminuent. Certes, et contrairement à ce que certains veulent laisser croire, elles ne sont pas tout à fait nulles ; mais, il faut l'admettre, elles ont bel et bien diminué.
    Dans de telles conditions, il était absolument indispensable de prévoir un exercice d'économies budgétaires et le Gouvernement a bien fait de nous l'annoncer dès maintenant. Qu'il s'agisse d'imposer un gel budgétaire à proprement parler, de provisionner un fonds d'actions conjoncturel ou de passer des conventions de bonne gestion comme cela se faisait dans le passé, tous ces artifices de phraséologie recouvrent la même opération. Il faut rappeler une bonne fois pour toutes, que contrairement à ce qu'a affirmé l'orateur précédent, si les lois de finances autorisent certaines dépenses dans la limite d'un plafond donné, elles n'imposent pas pour autant au Gouvernement en place de dépenser les sommes inscrites jusqu'au dernier centime d'euro.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il faut le rappeler !
    M. Philippe Auberger. Ainsi que l'a rappelé la loi organique du 1er août 2001, la loi de finances est une loi d'autorisation et non une loi de dépenses à tout va. Dans ces conditions, non seulement l'exercice annoncé par le Gouvernement pour le début du mois de janvier est justifié, mais il doit être mis en oeuvre le plus rapidement dans l'année, c'est-à-dire avant que les crédits ne soient engagés et par voie de conséquence dépensés. Plus la couverture sera large, plus l'efficacité de l'exercice sera grande. Nous ne pouvons donc qu'approuver le Gouvernement de s'y être résolu, et l'appuyer en conséquence.
    Je sais également, monsieur le ministre, que certaines sirènes répètent à l'envi qu'en diminuant les dépenses on ralentit la croissance. Ce raisonnement keynésien, quand bien même il est défendu par certains économistes très influents ou très éclairés, n'est pas pour autant totalement justifié.
    M. Jean-Louis Idiart. Arrêtez d'attaquer Keynes ! Que vous a-t-il fait ? Heureusement qu'il était là !
    M. Philippe Auberger. Tout dépend, naturellement, de la nature des dépenses et naturellement du délai dans lequel elles seront effectivement engagées. Les effets sur la distribution des revenus, sur la croissance et donc sur l'emploi ne seront pas les mêmes. Tout cela doit être analysé dépense par dépense.
    Quoi qu'il en soit, une chose est sûre : la loi de finances rectificative montre que le Gouvernement, en raison de la conjoncture, ne pourra pas tenir exactement les objectifs qu'il s'était fixés en matière de déficit pour l'année 2002. Si dérapage il y a - peut-être pas si considérable que certains l'affirment, mais dérapage léger tout de même -,...
    M. Didier Migaud. Quand même !
    M. Philippe Auberger. ... et si nous voulons éviter toute dérive supplémentaire en 2003, il nous faut impérativement être très vigilants et par voie de conséquence opérer cette réduction des dépenses dès le début de l'année. C'est peut-être cela, il faut en avoir conscience, qui nous permettra précisément, contrairement à ce que d'aucuns prétendent, de soutenir et de relancer la croissance. Quel est en effet le principal frein à la croissance aujourd'hui ? A mon sens, ce n'est pas le niveau des dépenses publiques, mais bien celui de notre déficit et du même coup de nos taux d'intérêt. Certes, la Banque centrale européenne a bien fait un geste jeudi dernier, mais minime...
    M. Gérard Bapt. Timide !
    M. Philippe Auberger. ... par comparaison à ce que sont devenus les taux d'intérêt aux Etats-Unis.
    M. Gérard Bapt. Et voilà !
    M. Philippe Auberger. Or c'est la baisse de nos taux d'intérêt qui commandera la relance de l'investissement, et non je ne sais quel système d'amortissement dégressif revu ou autres formules du même genre. Si donc nous voulons une diminution véritable et continue de nos taux d'intérêt, il va nous falloir donner des gages de bonne gestion de nos finances publiques à la Banque centrale européenne afin qu'elle apprécie favorablement nos efforts. C'est cela qui déterminera la reprise de la croissance dans notre pays. Telle est ma conviction : et c'est sur cette base, me semble-t-il, que le Gouvernement doit envisager son exercice d'économie en matière de dépenses dès le début de l'année.
    On me permettra également un bref commentaire sur un article très important de cette loi de finances rectificative : je veux parler de la garantie donnée pour faciliter le sauvetage de France Télécom. Chacun comprend qu'il y avait urgence et que des mesures s'imposaient. Le plan exposé jeudi dernier devant la commission des finances par le président Thierry Breton a convaincu la majorité des commissaires. En effet, non seulement il fait oeuvre de pédagogie, mais il fait reposer l'effort non seulement sur l'Etat et les marchés, mais également, il faut le souligner, sur France Télécom elle-même.
    Toutefois, une ambiguïté subsiste : l'Etat s'est engagé à financer l'augmentation de capital prévue à hauteur de 9 milliards, dont une bonne part au moins, bien que cela n'ait pas été totalement précisé, par voie d'endettement. Il y a là, monsieur le ministre, quelque chose d'assez paradoxal et finalement un réel danger, sauf à supposer que France Télécom revienne à meilleure fortune avec une incroyable rapidité. En effet, si France Télécom s'est surendettée, c'est qu'elle a payé ses acquisitions trop cher et surtout qu'elle n'a pas voulu les payer avec du papier, ce qui l'a conduite à s'endetter exagérément. Or, il y a quelque paradoxe à croire qu'elle se sauverait de son surendettement en recourant de nouveau à l'endettement, même si, je vous l'accorde, ce nouvel endettement ne la concernerait pas directement, mais par le truchement d'un véhicule. Quoi qu'il en soit, nos concitoyens auraient du mal à le comprendre.
    Le Gouvernement aurait donc tout intérêt, me semble-t-il, à annoncer très clairement que, s'il n'est pas possible de régler le problème dans l'immédiat par l'endettement, le compte d'affectation spéciale sera utilisé pour une augmentation de capital en bonne et due forme, à hauteur de 9 milliards. Cela me paraît d'autant plus indispensable qu'il n'y aura pas, à ce qu'on nous a laissé entendre, de dividendes pour 2002 ni probablement pour les deux ou trois années qui viennent ; on ne peut dans ces conditions guère attendre d'un appel au secteur privé sans un engagement résolu de l'Etat.
    En conclusion, mes chers collègues, ce collectif montre très clairement l'étroitesse de la marge dont dispose le Gouvernement pour assurer le redressement des comptes de la nation comme de ceux des entreprises publiques, sans oublier les aléas, incontestables, liés à la conjoncture.
    Dans de telles conditions, le groupe UMP, se doit évidemment de conjuguer ses efforts à ceux du Gouvernement afin que ce plan de redressement réussisse. C'est la raison pour laquelle nous voterons ce collectif budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors du collectif budgétaire de cet été, le Gouvernement avait noirci à plaisir la gestion de ses prédécesseurs, passant sous silence la dégradation économique du second semestre 2001 et l'absence du rebond espéré au 1er semestre 2002. Cela ne vous a pas empêchés de vous lancer dans une politique de cadeaux fiscaux en direction des ménages les plus aisés en prenant le risque d'aggraver le dérapage des dépenses publiques. Ainsi en a-il été de la baisse forfaitaire de 5 % de l'impôt sur le revenu, dont le coût, assurait-on, devrait être compensé par des économies. Or les économies sont là : votre collectif budgétaire prévoit d'annuler 2,58 milliards d'euros de crédits, comme indiqué dans la présentation générale, en soulignant que « les annulations de crédits excèdent légèrement par leur montant le coût en 2002 de la baisse de l'impôt sur le revenu adoptée lors du collectif d'été ».
    Notre inquiétude tient au fait que ces annulations touchent l'ensemble des dépenses sociales ou d'avenir, et particulièrement l'emploi - moins 259 millions -, le logement, sur lequel M. Méhaignerie avait pourtant attiré votre attention - moins 237 millions d'euros -, l'éducation - moins 93 millions d'euros -, ainsi que les dépenses d'investissement civil - moins 510 millions d'euros -, contredisant le discours du Président de la République qui avait mis en avant la nécessité d'accentuer l'effort de recherche et d'investissement !
    Mais ce collectif propose dans le même temps des augmentations de dépenses qui viendront directement aggraver le déficit : ainsi le secteur militaire bénéfice de 4,650 millions d'euros supplémentaires en autorisations de programme et de 298 millions d'euros en crédits de paiement.
    Autrement dit, vos cadeaux fiscaux n'ont pas été compensés par des économies. Le Gouvernement et sa majorité préfèrent aggraver le déficit qu'ils reprochaient tant à la gauche, et par des choix qui vous sont propres, et qui ne seront pas sans conséquences sur l'emploi, en renonçant à des mesures sociales qui auraient pourtant permis de relancer la consommation populaire, en sacrifiant des secteurs que vous présentez pourtant comme prioritaires. A preuve les 740 millions d'euros d'annulations qui ne manqueront pas d'affecter les ports maritimes et la protection du littoral à la veille d'une marée noire, ou encore les 48 millions d'euros de crédits de paiement initialement prévus pour les routes, au moment même où nous ne cessons d'entendre des discours sur la sécurité routière !
    Certains orateurs ont évoqué la question de France Télécom en termes mesurés, mais le président de la commission des affaires économiques de notre assemblée, M. Ollier, a annoncé son intention de demander à MM. Strauss-Kahn et Fabius de venir s'expliquer devant une commission d'enquête. Que dire de cette tentative de stigmatisation, sinon que la ficelle est grosse et la mémoire de M. Ollier bien courte ? A-t-il oublié que le précédent président de France Télécom, M. Michel Bon, avait été nommé par le gouvernement de M. Juppé ? A-t-il oublié que c'est le même gouvernement Juppé qui avait libéré, à la demande de M. Bon, le président de France Télécom de l'obligation de soumettre toute acquisition à l'accord formel du ministre ?
    Ainsi, le 20 mars 2000, M. Bon avait néanmoins exposé sa stratégie en Allemagne à M. Christian Sautter, successeur de M. Strauss-Kahn. Mais soixante-douze heures après, sans attendre l'avis du Trésor, Michel Bon signait l'accord avec Mobilcom par lequel il acquérait 28 % de son capital pour 3,7 milliards d'euros et acceptait de payer les investissements à venir liés à l'UMTS, la troisième génération de mobiles.
    J'avais interrogé, en commission des finances, M. le ministre du budget sur le bien-fondé d'une telle politique et sur la nécessité pour France Télécom, tout en redressant ses comptes, de continuer d'investir dans l'ADSL sur tout le territoire et à l'étranger dans les régions dites d'avenir. Le PDG, M. Breton, n'ayant cité, devant la commission des finances, que la Pologne comme territoire d'avenir, je l'avais interrogé, ainsi que M. Lambert, sur l'implantation de FTML Cellis, filiale France Télécom au Liban, tête de pont sur le Moyen-Orient. J'ai lu avec satisfaction que la PDG de France Télécom Mobiles International était arrivée aujourd'hui même à Beyrouth !
    Permettez-moi maintenant, monsieur le ministre, de faire état d'une demande particulière, en ma qualité de rapporteur du budget de la santé : je veux parler des annulations de 32 millions d'euros de crédits de paiement et d'autorisations de programme sur le titre VI, concernant le fonds d'aide à l'adapation des établissements hospitaliers, le FIMHO - soit 60 % des crédits inscrits par la loi de finances initiale pour 2002.
    Le Gouvernement a par ailleurs décidé de supprimer le FIMHO en 2003, prétextant de sa lourdeur. Mais il lui aurait été possible de simplifier et d'alléger la procédure. En fait, l'objectif est clair : il s'agit de réaliser des économies en désengageant l'Etat de l'investissement hospitalier qui sera désormais supporté par le seul budget de la sécurité sociale. C'est donc bien d'un transfert qu'il s'agit, puisque les économies ainsi réalisées par l'Etat en matière d'équipement hospitalier pour équilibrer les réductions de recettes dues aux cadeaux fiscaux faits aux ménages les plus aisés, seront désormais assumées par les assurés sociaux sur le budget de la sécurité sociale ! Malgré ces artifices, le budget de l'Etat n'en voit pas moins en octobre les dépenses exploser de 5 % sur un an, et les recettes reculer de 4,8 %, portant le déficit budgétaire à 52 milliards d'euros contre 30 milliards d'euros en octobre 2001.
    Socialement injuste, économiquement incertaine, insuffisante en termes de maîtrise des dépenses d'Etat comme des dépenses d'assurance maladie, votre politique économique et fiscale, telle qu'elle s'exprime dans ce collectif, mérite la censure de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de la discussion budgétaire pour 2003, nous avions exprimé la crainte que les moyens affectés au ministère du logement et au ministère de la ville ne soient pas à la hauteur des objectifs affichés respectivement par M. de Robien et M. Borloo.
    A l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2002, force est de constater que cette crainte est confirmée et même aggravée. Nous notons en effet que les budgets de ces ministères sont parmi ceux qui souffrent le plus durement des suppressions de crédits. En montant, le budget du logement arrive en tête au palmarès des annulations de crédits : moins 233,3 millions d'euros ; en pourcentage, le budget de la ville fait également partie des plus touchés : moins 17,42 % !
    Une fois de plus, des dépenses éminemment sociales font les frais des choix budgétaires du Gouvernement. Or non seulement ces choix sont injustifiés, mais ils trahissent les engagements pris par les ministres eux-mêmes.
    Les justifications avancées par le Gouvernement pour expliquer les suppressions de crédits de ces deux ministères ne nous ont pas convaincus. S'agissant des crédits pour l'accession à la propriété, le ministère de l'économie fait d'abord valoir « l'évolution favorable des taux d'intérêts au cours de l'année 2002 ». Cet argument a visiblement été faiblement apprécié par M. Gille Carrez qui regrette dans son rapport que « le Gouvernement n'ait pas transmis à la commission des finances les constatations de taux justifiant cette explication, ni les états mensuels d'attribution des prêts depuis août 2001, à la différence des années précédentes ».
    M. Jean-Louis Dumont. Il a raison ! Il n'y a pas que le taux pour l'accession !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. De manière plus générale, le Gouvernement prend prétexte de la sous-consommation de certains crédits pour justifier leur suppression. Là encore, nous jugeons l'explication un peu courte.
    M. Jean-Louis Dumont. Une sous-consommation organisée !
    La sous-consommation des crédits pour le logement est en effet due en bonne partie au gel décidé durant le mois d'août 2002.
    M. Jean-Louis Dumont. Ce n'est pas une nouveauté !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Le rapport précité évalue à 4,1 % leur taux de gel, ce qui correspond grosso modo au pourcentage que vous proposez d'annuler. Or comment ces crédits auraient-ils pu être consommés puisque vous les aviez gelés ?
    La sous-consommation des crédits n'est pas un meilleur argument pour légitimer la suppression de ceux de la politique de la ville. Il ne faut pas, en effet, confondre les problèmes. La faible mobilisation des ressources ne remet pas pour autant en cause leur utilité. Leur sous-consommation ne s'explique pas par l'absence de besoins.
    M. Jean-Louis Dumont. Tout à fait !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est même l'inverse lorsque l'effort financier demandé aux partenaires, en contrepartie du soutien de l'Etat, reste encore trop important pour les collectivités les plus en difficulté.
    Il ne s'agit donc pas d'économiser les fonds, mais de surmonter les obstacles à leur utilisation.
    Il semble bien, en définitive, que la seule justification des ces suppressions soit de permettre le financement de la baisse de l'impôt sur le revenu. Autrement dit, les dépenses sociales sont une nouvelle fois sacrifiées au bénéfice des plus aisés.
    Injustifiées, ces annulations de crédits trahissent également les engagement du Gouvernement. Lors de la presentation des orientations de son ministère en matière de logement, le 30 septembre 2002, M. de Robien avait fixé les grands principes qui devaient guider son action, parmi lesquels la nécessité d'offrir à chacun un choix réel pour se loger, la lutte contre l'insalubrité et l'effort en faveur de l'accession. Or le présent projet de loi supprime tous les moyens prévus pour les mettre en oeuvre.
    En matière d'accession au logement, non seulement le Gouvernement a mis fin à l'expérience de la prime à l'accession très sociale,...
    M. Jean-Louis Dumont. C'est scandaleux !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. ... mais il propose aujourd'hui d'annuler 4 millions d'euros attribués au fonds d'aide aux accédants en difficulté.
    M. Jean-Louis Dumont. La voilà, la politique anti-accession !
    M. Gérard Bapt. Autant de cadeaux pour les riches !
    M. Jean-Yves Le Bouillonec. Et surtout il envisage de supprimer 70 millions d'euros en AP et 60 millions d'euros en CP affectés à l'article 40 « accession au logement ».
    En matière de lutte pour la restauration de l'habitat, le décalage ente le discours et les actes est encore plus criant : 91,80 % des crédits engagés pour la lutte contre le saturnisme doivent être supprimés ; 15,12 % des crédits de l'ANAH passent à la trappe alors que les artisans du bâtiment ne cessent de déplorer l'insuffisance de ses moyens.
    Pour ce qui concerne la démolition, la suppression de 43,49 % des crédits de paiment dans le budget du logement est d'autant plus inacceptable que vous la justifiez par le fait que « la montée en charge des démolitions est plus lente que prévue ». Nous aurions beaucoup aimé entendre dire cela par le ministre de la ville, il y a un mois !
    De manière plus générale, la suppression de 17,42 % des crédits du ministère de la ville chargé du projet de rénovation urbaine, est en totale contradiction avec la démarche prétendument adoptée dans l'élaboration du budget 2003 et avec le projet de loi d'orientation qu'évoque le ministre de la ville.
    En fait, l'Etat veut se désengager de la politique du logement social et de la rénovation urbaine en cherchant à faire supporter le coût financier des besoins qui s'expriment, tant par les partenaires du 1 % et les bailleurs sociaux que par les collectivités locales. C'est cher payer la réduction de l'impôt sur le revenu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Louis Dumont. Excellente défense du logement social !
    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment d'examiner ce deuxième collectif 2002, je souhaite en premier lieu saluer l'effort de transparence du Gouvernement, conforme à la lettre et à l'esprit de la nouvelle loi organique sur les lois de finances.
    M. Jean-Louis Dumont. Pas tout à fait !
    M. Michel Bouvard. Ce collectif rompt ainsi avec la pratique précédente, qui consistait souvent à surévaluer les recettes, à sous-estimer les dépenses, ou à les faire glisser sur l'exercice suivant.
    M. Didier Migaud. Caricature !
    M. Michel Bouvard. Ainsi, le collectif tire les conséquences d'une conjoncture moins favorable que l'hypothèse retenue après le collectif d'été et la présentation du rapport Bonnet-Nasse, où les critiques n'avaient pas manqué sur un prétendu « pessimisme excessif » de notre part.
    M. Didier Migaud. Vous êtes souvent plus nuancé et plus fin !
    M. Michel Bouvard. L'intégration dans le collectif des moins-values fiscales de l'impôt sur le revenu, liées aux revenus immobiliers, de la TIPP du fait du déstockage des pétroliers, ou de l'impôt sur les sociétés en raison de dégrèvements supplémentaires, correspond à ce même souci de vérité.
    Nous notons avec satisfaction les mesures d'économies prévues par ailleurs pour compenser les ouvertures de crédits qui permettent de prendre en compte les sous-évaluations de certaines dépenses dans la loi de finances initiale ou l'évolution de la conjoncture économique, et je souhaiterais dans cette brève intervention, monsieur le président, mes chers collègues, insister sur les ouvertures de crédits pour le ministère du travail.
    En effet, ces inscriptions sont la meilleure réponse que nous pouvons apporter aux critiques entendues sur les bancs de l'opposition lors de la discussion et de l'adoption, le 14 novembre dernier, du budget de ce ministère. J'avais alors rappelé, comme rapporteur spécial, que, à la différence de la plupart des autres budgets de l'Etat, où les prévisions de dépenses pouvaient être programmées, il s'agissait là d'un budget affectant des situations humaines et personnelles pour lesquelles, au-delà des objectifs affichés, des mesures d'ajustement pouvaient être prises en cours d'année, en cas de besoin, comme pour les CES.
    Le ministre de l'emploi et de la solidarité s'y était engagé pour 2003, mais il ne s'agit pas seulement d'une promesse ou d'un engagement pour l'avenir : il s'agit aussi d'un engagement qui est déjà effectif, à la lumière de la pratique retenue pour ce collectif. C'est ainsi que les crédits du budget du travail sont majorés de 346,1 millions d'euros pour l'exercice 2002. La première majoration porte sur 51 millions d'euros au titre des emplois-jeunes, en complément d'une ouverture de 75,5 millions d'euros effectuée le 26 novembre par décret de virement.
    Ces crédits sont la démonstration des critiques que je formulais sur l'absence de transparence du budget 2002 du ministère du travail. En effet, il nous faut prendre en compte sur ces crédits 7 000 emplois-jeunes supplémentaires constatés au 31 octobre, alors que les crédits de la loi de finances initiale pour 2002 n'en finançaient que 9 000 - emplois-jeunes recrutés, de plus, principalement en début d'année, pour les raisons d'affichage que chacun a comprises, alors même que ces recrutements s'étalaient ordinairement sur toute l'année et étaient en partie compensés par des sorties du dispositif, système dénoncé par la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances.
    A ce coût électoral, qu'il nous faut régulariser, s'ajoutent les crédits nécessaires aux exonérations de charges sociales spécifiques aux départements d'outre-mer prévues par la loi d'orientation sur l'outre-mer de 2 000 : 79 millions d'euros viennent ainsi accroître un premier abondement dans le collectif d'été de 475 millions d'euros, alors que les crédits initiaux s'établissaient, pour l'ensemble des dispositifs d'exonération, à 731 millions d'euros. C'est le prix d'actions de soutien à l'emploi et de solidarité dans les territoires fragiles.
    Il s'agit enfin d'un complément de crédits au titre du fonds national du chômage à hauteur de 202,5 millions d'euros. Cette affectation intervient, là encore, dès l'exercice en cours, alors que pour le budget 2001, il avait fallu attendre la loi de règlement pour obtenir cette régularisation.
    Je veux donc saluer cette opération de transparence et de vérité, qui concerne aussi la prime de fin d'année, ouverte aux titulaires des minima sociaux - comme vous l'avez annoncé tout à l'heure, monsieur le ministre - que le collectif finance à hauteur de 300 millions d'euros. Nous devions cette solidarité aux plus défavorisés de nos concitoyens.
    La seule différence entre la majorité actuelle et l'opposition - comme l'a rappelé le rapporteur général - c'est que nous ne tirons pas de chèque sur l'avenir, et je souligne que le précédent collectif a dû procéder aux régularisations non seulement de la prime 2001, mais aussi de la prime 2000. Le Père Noël socialiste vivait à crédit ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Augustin Bonrepaux. Elles ont été versées tout de même ! Il ne faut pas l'oublier !
    M. Didier Migaud. Caricature !
    M. Alain Néri. Tout ce qui est excessif est insignifiant.
    M. Michel Bouvard. Monsieur le président, chers collègues, j'en aurai fini lorsque j'aurai évoqué brièvement le montage proposé par le Gouvernement pour éviter le naufrage de France Télécom. Il s'agit, au travers d'une mesure de recapitalisation extrêmement lourde, d'éviter non seulement une perte patrimoniale pour l'Etat et pour de nombreux actionnaires, notamment des particuliers et des salariés de l'entreprise, mais aussi de sauvegarder une entreprises qui joue un rôle essentiel dans notre économie. Il s'agit donc d'un pari sur l'avenir, pari aussi sur la mobilisation de l'ensemble de cette société.
    Permettez-moi simplement de dire ici, monsieur le ministre, mes regrets que, comme pour le Crédit Lyonnais, des dizaines de milliards de francs, des milliards d'euros, soient ainsi prélevés sur les capacités d'investissement du pays alors que les besoins en infrastructures restent insatisfaits.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avez raison d'être inquiet !
    M. Michel Bouvard. Je souhaite que la capacité de trouver des solutions dans ce type de situation, la capacité à mettre en place les ingénieries financières nécessaires, puisse demain être aussi mise en oeuvre, avec la même imagination, non pas sur des plans de sauvetage, mais sur les grands projets d'équipement créateurs d'emplois et de richesse, qu'attendent avec impatience de nombreux secteurs de notre pays. Pour notre part, nous attendons avec impatience les propositions de la mission d'audit sur les transports.
    Approuvant les mesures de transparence de ce collectif, ainsi que les différentes améliorations fiscales qu'il comporte, je souhaite vous assurer, monsieur le ministre, du soutien du groupe UMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
    M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, depuis votre installation, on entend systématiquement parler de déficit budgétaire et de difficultés. Ce déficit augmente inexorablement, régulièrement, et vous en donnez toujours la même explication : c'est la faute aux autres ! On vient encore d'entendre des collègues dire : aux Etats-Unis, à l'Allemagne ! D'autant que ce dernier pays a reconduit un social-démocrate. C'est évidemment aussi la faute de l'ancien gouvernement !
    Pourtant, vous pourriez vous demander si les mesures que vous avez prises depuis votre arrivée aux affaires n'ont pas eu, par hasard - à moins que vous ne l'ayez voulu ! -, des effets négatifs, qui auraient amplifié ce déficit. Lorsque vous allégez l'impôt sur le revenu pour certaines classes sociales, les recettes manquent évidemment, et le déficit se creuse.
    Je voudrais insister sur quelques-unes des mesures prises dans le domaine du logement.
    L'an passé, rapporteur spécial pour la commission des finances sur le budget du logement, j'avais attiré l'attention de vos prédécesseurs sur certaines mesures que l'on sentait poindre. Non seulement vous les avez poursuivies mais vous les avez amplifiées.
    Regardez ce qui se passe à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat. Après avoir asséché une partie de la trésorerie au nom de la rigueur dans la gestion...
    M. Didier Migaud. Dogmatique !
    M. Jean-Louis Dumont. ... vous lui enlevez des crédits. Et on voit apparaître ce qui ne s'était pas vu depuis plusieurs années : des listes d'attente. Qu'avez-vous, monsieur le ministre, contre les propriétaires résidents, souvent du milieu rural, qui tentent, fréquemment avec difficulté, de remettre en état leur logement ? Qu'avez-vous contre les résidents, encore du milieu rural, qui tentent, l'âge venant, d'obtenir quelques subsides pour vivre mieux dans leur logement ?
    Au-delà de l'ANAH, c'est tout simplement une tendance très lourde que l'on devine dans les dispositions de votre loi de finances rectificative relatives au logement. Depuis quelques années, l'objectif fixé était la construction d'environ 54 000 logements par an. Au moment d'examiner le présent projet, nous en serions à quelque 40 000 logements financés en 2002. On invoque le gel républicain, mais ce n'était qu'une mesure destinée à permettre au gouvernement issu des dernières élections de poursuivre.
    M. Didier Migaud. Bien sûr, c'était d'une tout autre nature !
    M. Jean-Louis Dumont. M. Le Bouillonnec vient de nous rappeler le gel d'août 2002. Et s'il y a eu dégel, partiel d'ailleurs, c'est parce que deux, trois ou peut-être même quatre ministres se sont rendus au début du mois d'octobre, à Lyon, au grand congrès des organismes HLM. Mais après avoir dégelé, on annule. Car entre-temps des DDE frileuses n'ont pas accordé les autorisations d'affectation des crédits.
    M. Didier Migaud. CQFD !
    M. Jean-Louis Dumont. Aujourd'hui, pratiquement 25 % des crédits affectés aux départements ne sont pas utilisés. Et pour que l'on puisse construire, encore faut-il que le plan de financement prévoie, après réalisation, des loyers compatibles avec les revenus de ceux qui vont résider dans les logements.
    M. Didier Migaud. Bien sûr !
    M. Jean-Louis Dumont. Non seulement le Gouvernement prend des mesures anti-logement, mais la Caisse des dépôts et consignations devient tout à coup frileuse et a tendance à refuser ses crédits...
    M. Didier Migaud. Eh oui !
    M. Jean-Louis Dumont. ... parce qu'elle souhaite que les organismes HLM mettent plus de fonds propres dans ces opérations de logement. En outre, alors que jusqu'à présent on considérait l'équilibre de l'opération dans sa globalité, on veut désormais que les opérations soient équilibrées annuellement. Or on connaît les difficultés rencontrées au cours des cinq premières années.
    A cet assèchement des crédits, une seule réponse : le marché y pourvoira... M. le ministre du logement avait beaucoup insisté sur les taux au cours de la présentation de son budget. Mais, pour accéder à la propriété, il faut un apport personnel. Un de vos amis, le ministre du logement de l'époque, M. Pierre-André Périssol, avait obtenu par la négociation que l'apport personnel puisse comprendre le 1 % logement. Or les aides globales au titre du 1 % logement sont passées de 100 000 francs par logement à moins de 40 000 aujourd'hui. On nous rétorque qu'il existe peu d'écart entre les taux de ces prêts et ceux des financements disponibles sur le marché. A la différence que le financement au titre du 1 % est considéré comme inclus dans l'apport personnel ! Alors que le nombre d'accédants à la propriété avait augmenté au cours de ces dernières années pour atteindre un ratio de 56 %, on sent aujourd'hui une chute de ces investissements.
    Monsieur le ministre, il faudrait tout de même nous expliquer les raisons d'une telle hargne, d'une telle iniquité s'agissant des mesures concernant le logement, qu'il s'agisse du logement locatif social ou de l'accession à la propriété. Jean-Yves Le Bouillonnec a évoqué la prime d'accession très sociale, qui représente 10 millions d'euros. Vous supprimez 237 millions dans le budget du logement, mais il suffisait de 10 millions pour redonner de l'espoir à ceux qui veulent se constituer un patrimoine, préparer leur retraite et, avec l'aide d'une commune, des organismes HLM, des coopératives tout particulièrement...
    M. le président. Monsieur Dumont, veuillez conclure.
    M. Jean-Louis Dumont. Je n'en suis qu'à la page 2 de mon intervention. (Sourires.)
    M. le président. Allons, monsieur Dumont !
    M. Jean-Louis Dumont. Je vais conclure, devant tant d'insistance.
    M. Augustin Bonrepaux. Il n'a pas dit l'essentiel !
    M. Jean-Louis Dumont. Il y a quelques jours, les télévisions nous ont montré comment votre gouvernement règle le problème des gens du voyage.
    M. Jean-Louis Idiart. Il suffit de faire appel à Sarkozy !
    M. Jean-Louis Dumont. Je rappelle simplement qu'une loi a été votée, qu'il suffirait d'appliquer.
    M. Michel Bouvard. Ah ! si c'était aussi simple !
    M. Jean-Louis Dumont. Je l'ai déjà dit à maintes reprises à cette tribune : je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous rappeliez à leurs devoirs ceux qui ont la responsabilité de mettre en oeuvre ces lois, et tout particulièrement les préfets de département. Qu'ils exigent la finalisation des schémas départementaux, l'utilisation des fonds inscrits dans le budget de l'Etat ou issus d'autres puissances financières qui peuvent intervenir, comme la CDC. En dépit des difficultés que soulève l'établissement d'un budget, il est des politiques de solidarité qu'on ne saurait sacrifier. Nous nous grandirions tous si demain était enfin mis en oeuvre ce qui est attendu depuis si longtemps et qui éviterait bien des problèmes.
    Pour conclure, tous ces crédits intéressent évidemment les entreprises du bâtiment et des travaux publics.
    M. Didier Migaud. Tout à fait !
    M. Jean-Louis Dumont. Toutes les mesures que vous prenez vont à l'encontre de l'emploi. Les carnets de commandes commencent à se réduire. Dans certaines régions, il n'y a plus de commande pour les travaux publics. Et dans le bâtiment, vous êtes en train d'organiser la pénurie alors que la vacance de logements diminue et que la demande recommence à augmenter.
    J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez répondre à toutes ces questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Monsieur Dumont, vous avez parlé neuf minutes trente, au lieu des cinq qui vous étaient imparties !
    M. Augustin Bonrepaux. Oui, mais quelles minutes !
    M. Didier Migaud. Nous n'avons pas vu le temps passer !
    M. le président. Surtout, M. Dumont !
    M. Jean-Louis Dumont. Et encore, je ne vous ai pas parlé de mes ponts ! (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. Yves Censi, dernier intervenant dans la discussion générale, que j'incite à ne pas prendre exemple sur M. Dumont.
    M. Yves Censi. Non, monsieur le président, je serai beaucoup plus bref.
    Monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais simplement insister sur le caractère responsable de ce projet de loi de finances rectificative de 2002.
    Monsieur le ministre, vous inaugurez là une pratique nouvelle qui, je l'espère, sera pérenne. Pour la première fois, en effet, un collectif d'automne fonde sa démarche sur un principe de réalité. Vous assumez pleinement votre responsabilité en y intégrant les ajustements financiers dus à la dégradation du déficit en cette fin d'année.
    Vous avez indiqué que la sincérité était un gage de confiance et de loyauté envers les Français. C'est surtout une attitude responsable si l'on considère que la responsabilité consiste à décider de mesures non pas en prenant ses désirs pour des réalités, en travestissant la réalité, comme le faisait votre prédécesseur,...
    M. Jean-Louis Idiart. Oh !
    M. Yves Censi. ... mais en tenant compte lucidement des faits. Il s'agit d'un préalable essentiel pour que s'exerce notre démocratie. En donnant au Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin une majorité à l'Assemblée nationale, les Français ont demandé que soient mises en oeuvre les priorités que nous leur proposions.
    M. Jean-Louis Idiart. Ils n'ont rien dit du tout !
    M. Yves Censi. Aujourd'hui, vous proposez un collectif qui se fonde sur deux objectifs : la transparence des évaluations budgétaires disponibles à ce jour et un ajustement qui respecte les priorités que le Gouvernement a définies avec l'accord des Français. Ainsi, vous affichez clairement les moyens disponibles et les choix de financement des priorités.
    Je me félicite que ce collectif ne soit pas fondé sur des spéculations sur l'avenir, mais sur des faits actuels et avérés, d'une part, et sur la volonté politique, d'autre part. C'est la meilleure méthode pour engager les Français à prendre en main pleinement et activement leur destin et celui de la France, et donc pour avoir une France responsable.
    Cet esprit de responsabilité se situe dans le droit fil des discussions que nous avions eues ici même l'été dernier. Vous nous accusiez alors de noircir le tableau, mesdames, messieurs de l'opposition. Les faits s'abattent pour la seconde fois cette année sur vos arguments, infondés à l'époque, et consciemment infondés. Le tableau de l'audit que vous critiquiez n'était pas pessimiste, il était réaliste trop réaliste à votre goût peut-être, et c'est sûrement ce qui vous déplaisait.
    Plus précisément, monsieur le ministre, vous permettez à la France d'aller de l'avant sans attendre, en mettant en oeuvre des dispositions fiscales et non fiscales d'importance, que ce soit pour aider au développement des nouvelles technologies et au développement durable,...
    M. Jean-Louis Dumont. On a eu l'avenir radieux, maintenant on a le développement durable !
    M. Yves Censi. ... pour faciliter la vie de nos concitoyens et de nos entreprises en initiant les simplifications administratives,...
    M. Augustin Bonrepaux. Il ne faut pas que ce ne soient que des mots !
    M. Yves Censi. Nous vous écouterons tout à l'heure, monsieur Bonrepaux.
    ... mais aussi les mesures de solidarité comme la prime de Noël - mon collègue Michel Bouvard a très bien développé ce qui devait l'être sur ce sujet.
    Dans ce cadre, n'oublions pas les catastrophes naturelles ou technologiques. Le naufrage du Prestige nous rappelle l'urgente nécessité de tout mettre en oeuvre pour encourager la solidarité publique.
    M. Jean-Louis Idiart. Vous supprimez des crédits ?
    M. Yves Censi. Je sais combien M. Lambert, ministre du budget, y est personnellement sensible.
    Je me permettrai à ce titre de défendre un amendement qui permettrait aux entreprises sinistrées qui reçoivent des dons de sortir ces derniers de leur assiette fiscale.
    M. Augustin Bonrepaux. Il faudrait tout de même rappeler que c'est un amendement de M. Bapt !
    M. Yves Censi. Je remercie M. Bapt de le soutenir également.
    Cet amendement va dans le sens de l'esprit de responsabilité qui vous anime et qui anime ce collectif. Si l'objectif est de venir en aide aux forces vives de la nation touchées par des catastrophes, il faut que la totalité des dons de la générosité des Français reviennent à la reconstruction et au redémarrage de ces mêmes entreprises.
    Compte tenu de ces éléments, monsieur le ministre, j'apporte un total soutien à ce collectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La discussion générale est close.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Je remercie ceux qui sont restés jusqu'à la fin de la séance et je vais essayer de répondre à quelques questions.
    D'abord, monsieur Dumont, je suis évidemment convaincu que l'examen d'un collectif n'est pas une occasion de revoir toutes les politiques du Gouvernement. Il ne s'agit pas de refaire la politique du logement à travers le collectif de fin d'année ! Notre méthode, c'est la sincérité budgétaire. Des crédits n'ont pas été consommés et sont de ce fait annulés. Il n'empêche que nous avons amendé nous-même le projet de loi de finances pour 2003 en ajoutant 30 millions d'euros au budget de l'ANAH de l'année prochaine. Nous allons donc dans le sens de la politique que vous souhaitez, qui fait l'objet d'un débat par ailleurs.
    M. Bapt a évoqué l'annulation des crédits du FIMHO et s'inquiète de ces dépenses qui doivent maintenant être payées par la sécurité sociale. En fait, nous mettons les primes de Noël à la charge du budget de l'Etat mais des dépenses qui étaient assurées par le budget de l'Etat seront maintenant à la charge de la sécurité sociale. Pour les primes de Noël, nous prévoyons 900 millions d'euros. Les charges du FIMHO qui sont transférées à la sécurité sociale sont d'un ordre de grandeur beaucoup plus faible.
    Par ailleurs, nous avons inscrit 304 millions d'euros dans le collectif pour les hôpitaux. Si les crédits consacrés au FIMHO sont en diminution, ce n'est pas parce que nous voulons réduire les moyens dont disposent les hôpitaux. C'est au contraire pour mieux les classer.
    La question des biocarburants a été évoquée par Gilles Carrez et par de nombreux intervenants comme Charles de Courson. Elle fera sûrement l'objet d'amendements et de discussions serrées. Sachez simplement que la volonté du Gouvernement est d'essayer de trouver la meilleure solution possible dans le sens que vous souhaitez, étant entendu qu'il y a des contraintes à respecter, notamment les décisions du Conseil de l'Union européenne qui a fixé un cadre. Il faut aussi tenir compte de ce qui a été négocié avec les professionnels. Bref, nous voulons faire réussir ces filières plutôt que les mettre en échec. Cela peut être une nouvelle forme d'industrie, et il faut évidemment leur donner les moyens de s'épanouir.
    Passons aux crédits militaires, dont M. Poniatowski a fait une présentation très précise. Nous avons une annulation de 310 millions d'euros. Mais, si elle était annulée, il faudrait annuler des ouvertures de crédits d'un montant équivalent. C'est un problème de tiroirs et de vases communicants dont il faudra sans doute parler plus longuement ce soir.
    Concernant les taxes de l'ANDA, vous avez été plusieurs, notamment Marc Laffineur et Charles de Courson, à rappeler quel était le risque de voir neuf taxes se transformer en une seule. Nous avons bien évidemment conscience qu'on ne peut pas faire avec une taxe la même répartition qu'avec neuf, mais nous avons le sentiment et cela a été concerté étroitement avec le ministère de l'agriculture, que les anciennes taxes peuvent être remplacées...
    M. Jean-Louis Idiart. Les organisations concernées ne sont pas d'accord !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. ... sans préjudice pour les filières concernées. Cela a été examiné de façon très précise, avec scénarios, mais, là encore, il faudra sans doute y revenir tout à l'heure.
    Vous avez été nombreux à intervenir sur la question de France Télécom. En fait, nous avons un exercice difficile à faire. On peut rechercher les responsabilités, mais ce n'est pas cela le problème. Nous devons veiller au niveau du déficit budgétaire global, il ne faut pas l'alourdir. C'est l'intérêt de la solution que nous avons choisie. Même si nous alourdissons la dette publique, nous n'alourdissons pas le déficit budgétaire. Nous ne voulons pas peser par nos décisions sur l'entreprise, il faut qu'elle conserve les meilleures chances de se développer parce que sa compétence n'est pas en jeu. Nous devons tenir compte évidemment du droit des actionnaires. Si vous essayez de tenir compte de ces différents critères, vous êtes à peu près obligés d'arriver à une solution telle que celle que nous vous proposons. J'espère qu'elle permettra à l'entreprise de redevenir une grande entreprise dont tous sont fiers.
    Dernier point, l'argument constitutionnel de Philippe Auberger, que plusieurs d'entre vous, Marc Laffineur notamment, ont évoqué. Le Gouvernement a un peu négligé la priorité que l'on doit donner à l'Assemblée nationale en matière financière. Il se trouve que nous n'avons pris conscience qu'un mois après le vote de la première partie du budget à l'Assemblée nationale de la nécessité de faire la modification budgétaire dont il est question.
    M. Didier Migaud. Vous êtes peu réactifs !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. Il était alors plus raisonnable d'introduire cette donnée au Sénat plutôt que de ne pas l'introduire du tout au prétexte qu'il aurait fallu le dire à l'Assemblée avant.
    M. Didier Migaud. Certes, mais vous raisonnez lentement !
    M. le ministre délégué au commerce extérieur. C'est donc encore par sincérité que nous avons agi ainsi.
    J'espère que cela n'y change rien, mais nous avons tout à fait conscience que la priorité revient à l'Assemblée nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Louis Dumont. La conclusion est bonne !
    M. Alain Néri. Redites-le-nous !
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

5

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique :
    Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2002, n° 382 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 444),
    M. Axel Poniatowski, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense et des forces armées (avis n° 448).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 2e séance
du mardi 10 décembre 2002
SCRUTIN (n° 104)


sur l'ensemble du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi.

Nombre de votants

474


Nombre de suffrages exprimés

474


Majorité absolue

238


Pour l'adoption

337


Contre

137

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :     Pour : 318. - MM. Jean-Claude Abrioux, Bernard Accoyer, Manuel Aeschlimann, Alfred Almont, Jean-Paul Anciaux, René André, Philippe Auberger, François d' Aubert, Jean Auclair, Bertho Audifax, Mme Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Jean Bardet, Mme Brigitte Bareges, MM. François Baroin, Jacques Barrot, Patrick Beaudouin, Joël Beaugendre, Jean-Claude Beaulieu, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, André Berthol, Xavier Bertrand, Jean-Michel Bertrand, Jean Besson, Gabriel Biancheri, Jérôme Bignon, Jean-Marie Binetruy, Claude Birraux, Étienne Blanc, Jacques Bobe, Yves Boisseau, Marcel Bonnot, René Bouin, Roger Boullonnois, Gilles Bourdouleix, Bruno Bourg-Broc, Mmes Chantal Bourragué, Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard, Michel Bouvard, Ghislain Bray, Victor Brial, Philippe Briand, Jacques Briat, Mmes Maryvonne Briot, Chantal Brunel, MM. Michel Buillard, Yves Bur, Christian Cabal, Dominique Caillaud, François Calvet, Bernard Carayon, Pierre Cardo, Antoine Carré, Gilles Carrez, Richard Cazenave, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, MM. Jean-Yves Chamard, Hervé de Charette, Jean-Paul Charié, Jean Charroppin, Jérôme Chartier, Roland Chassain, Luc-Marie Chatel, Jean-Marc Chavanne, Gérard Cherpion, Jean-François Chossy, Jean-Louis Christ, Pascal Clément, Philippe Cochet, Georges Colombier, Mme Geneviève Colot, MM. François Cornut-Gentille, Louis Cosyns, René Couanau, Édouard Courtial, Jean-Yves Cousin, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Charles Cova, Paul-Henri Cugnenc, Henri Cuq, Olivier Dassault, Jean-Pierre Decool, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Francis Delattre, Richard Dell'Agnola, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Yves Deniaud, Bernard Depierre, Léonce Deprez, Jean-Jacques Descamps, Éric Diard, Jean Diébold, Michel Diefenbacher, Jacques Domergue, Renaud Donnedieu de Vabres, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Philippe Douste-Blazy, Guy Drut, Jean-Michel Dubernard, Philippe Dubourg, Gérard Dubrac, Nicolas Dupont-Aignan, Mme Marie-Hélène des Esgaulx, MM. Christian Estrosi, Pierre-Louis Fagniez, Francis Falala, Yannick Favennec, Georges Fenech, Jean-Michel Ferrand, Alain Ferry, Daniel Fidelin, André Flajolet, Jean-Claude Flory, Nicolas Forissier, Jean-Michel Fourgous, Mme Arlette Franco, MM. Pierre Frogier, Yves Fromion, Claude Gaillard, Mme Cécile Gallez, MM. René Galy-Dejean, Daniel Gard, Jean-Paul Garraud, Claude Gatignol, Jean de Gaulle, Jean-Jacques Gaultier, Guy Geoffroy, Alain Gest, Jean-Marie Geveaux, Franck Gilard, Bruno Gilles, Georges Ginesta, Claude Girard, Maurice Giro, Louis Giscard d'Estaing, Claude Goasguen, Jacques Godfrain, François-Michel Gonnot, Jean-Pierre Gorges, François Goulard, Jean-Pierre Grand, Mme Claude Greff, MM. Jean Grenet, Gérard Grignon, François Grosdidier, Mme Arlette Grosskost, MM. Serge Grouard, Louis Guédon, Jean-Claude Guibal, Lucien Guichon, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Gérard Hamel, Emmanuel Hamelin, Joël Hart, Michel Heinrich, Pierre Hellier, Laurent Hénart, Michel Herbillon, Pierre Hériaud, Patrick Herr, Antoine Herth, Patrick Hoguet, Philippe Houillon, Jean-Yves Hugon, Michel Hunault, Sébastien Huyghe, Denis Jacquat, Édouard Jacque, Christian Jeanjean, Yves Jego, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Marc Joulaud, Alain Joyandet, Dominique Juillot, Didier Julia, Alain Juppé, Mansour Kamardine, Aimé Kergueris, Christian Kert, Jacques Kossowski, Patrick Labaune, Marc Laffineur, Jacques Lafleur, Mme Marguerite Lamour, MM. Edouard Landrain, Pierre Lang, Pierre Lasbordes, Thierry Lazaro, Mme Brigitte Le Brethon, MM. Robert Lecou, Marc Le Fur, Pierre Lellouche, Dominique Le Mèner, Jean Lemiere, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Gérard Léonard, Jean-Louis Léonard, Jean-Antoine Leonetti, Pierre Lequiller, Jean-Pierre Le Ridant, Céleste Lett, Mme Geneviève Levy, M. Gérard Lorgeoux, Mme Gabrielle Louis-Carabin, MM. Lionnel Luca, Daniel Mach, Alain Madelin, Richard Mallié, Jean-François Mancel, Thierry Mariani, Alain Marleix, Patrice Martin-Lalande, Philippe Martin (51), Alain Marty, Jacques Masdeu-Arus, Jean Claude Mathis, Pierre Méhaignerie, Christian Ménard, Denis Merville, Damien Meslot, Gilbert Meyer, Pierre Micaux, Jean-Claude Mignon, Pierre Morange, Mme Nadine Morano, MM. Pierre Morel-A-L'Huissier, Jean-Marie Morisset, Alain Moyne-Bressand, Jacques Myard, Jean-Marc Nesme, Jean-Pierre Nicolas, Yves Nicolin, Hervé Novelli, Jean-Marc Nudant, Patrick Ollier, Mme Françoise de Panafieu, M. Robert Pandraud, Mmes Béatrice Pavy, Valérie Pecresse, MM. Jacques Pélissard, Philippe Pemezec, Pierre-André Périssol, Bernard Perrut, Etienne Pinte, Michel Piron, Mme Bérengère Poletti, M. Axel Poniatowski, Mme Josette Pons, MM. Daniel Poulou, Daniel Prévost, Christophe Priou, Jean Proriol, Didier Quentin, Michel Raison, Mme Marcelle Ramonet, MM. Éric Raoult, Jean-François Régère, Frédéric Reiss, Jacques Remiller, Marc Reymann, Dominique Richard, Mme Juliana Rimane, MM. Jérôme Rivière, Jean Roatta, Camille de Rocca Serra, Mme Marie-Josée Roig, MM. Vincent Rolland, Jean-Marie Rolland, Philippe Rouault, Jean-Marc Roubaud, Michel Roumegoux, Max Roustan, Francis Saint-Léger, André Samitier, André Schneider, Bernard Schreiner, Jean-Marie Sermier, Georges Siffredi, Yves Simon, Jean-Pierre Soisson, Michel Sordi, Frédéric Soulier, Daniel Spagnou, Alain Suguenot, Mmes Michèle Tabarot, Hélène Tanguy, MM. Jean-Charles Taugourdeau, Michel Terrot, Mme Irène Tharin, MM. André Thien Ah Koon, Jean-Claude Thomas, Dominique Tian, Jean Tiberi, Jean Ueberschlag, Léon Vachet, Christian Vanneste, François Vannson, Alain Venot, Mme Béatrice Vernaudon, MM. Jean-Sébastien Vialatte, René-Paul Victoria, Philippe Vitel, Michel Voisin, Gérard Voisin, Gérard Weber, Éric Woerth, Mme Marie-Jo Zimmermann et M. Michel Zumkeller.
    Contre : 2. - Mme Sylvia Bassot et M. Jacques Bénisti.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Pour : 2. - MM. Bernard Derosier et Jean-Yves Le Déaut.
    Contre : 111. - MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Jean-Pierre Defontaine, Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, François Dosé, René Dosière, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, Jean-Paul Dupré, Claude Evin, Albert Facon, Jacques Floch, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Jean Glavany, Gaétan Gorce, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. François Lamy, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (32), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM. Roger-Gérard Schwartzenberg, Henri Sicre, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.
Groupe Union pour la démocratie française (29) :
    Pour : 17. - MM. Jean-Pierre Abelin, Pierre-Christophe Baguet, Bernard Bosson, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Charles de Courson, Stéphane Demilly, Jean Dionis du Séjour, Philippe Folliot, Francis Hillmeyer, Olivier Jardé, Yvan Lachaud, Maurice Leroy, Hervé Morin, Nicolas Perruchot, François Rochebloine, André Santini et Francis Vercamer.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 22. - MM. François Asensi, Gilbert Biessy, Alain Bocquet, Patrick Braouezec, Jean-Pierre Brard, Jacques Brunhes, Mme Marie-George Buffet, MM. André Chassaigne, Jacques Desallangre, Frédéric Dutoit, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Pierre Goldberg, Maxime Gremetz, Georges Hage, Mmes Muguette Jacquaint, Janine Jambu, MM. Jean-Claude Lefort, François Liberti, Daniel Paul, Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès.
Non-inscrits (13).
    Contre : 2. - Mme Martine Billard et M. Emile Zuccarelli.

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    Mme Sylvia Bassot et M. Jacques Bénisti qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « pour ».
    MM. Bernard Derosier, et Jean-Yves Le Déaut, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».