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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 12 FÉVRIER 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mardi 11 février 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES

1.  Débat sur la chasse «...».
M. Jean-Claude Lemoine.
M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.
MM.
Jean-Paul Chanteguet,
Charles de Courson,
Maxime Gremetz,
Philippe de Villiers,
Alain Gest.

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN

MM.
Pierre Ducout,
Stéphane Demilly,
François Liberti,
Antoine Carré,
Yves Cochet,
Pierre Lang,
Jacques Bascou,
Nicolas Perruchot,
Jacques Desallangre,
Joël Hart,
David Habib,
Roland Chassain,
Christophe Masse,
Jean-Pierre Decool,
Gilles Cocquempot,
Daniel Spagnou,
Didier Quentin,
François Régère,
Christian Estrosi,
Christophe Priou,
Daniel Garrigue.
Clôture du débat.
Mme la ministre.
2.  Ordre du jour de l'Assemblée «...».
3.  Déclaration de l'urgence d'un projet de loi «...».
4.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures).

1

DÉBAT SUR LA CHASSE

    M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur la chasse.
    L'organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle, la conférence des présidents a décidé de donner la parole en premier à un orateur de ce groupe.
    La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.
    M. Jean-Claude Lemoine. Monsieur le président, madame la ministre de l'écologie et du développement durable, monsieur le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier tous ceux qui ont voulu ce débat. Bien sûr, aux yeux de certains, ce débat peut paraître dérisoire, car ils considèrent que, comparé à beaucoup d'autres, le dossier chasse est secondaire. Pourtant, il n'existe pas de sujet négligeable, et ce problème est important. Il intéresse pas seulement le million et demi de chasseurs, mais aussi la totalité des ruraux et même tous les Français depuis les conflits médiatisés entre chasseurs et opposants à la chasse, conflits qui ont suscité incompréhension et méfiance.
    Avant d'aborder ce débat, il me paraît important de bien prendre en considération le fait que la chasse est, certes, un sport comme un autre, un loisir comme un autre, mais que c'est également beaucoup plus. C'est une tradition à laquelle tous les ruraux et nombre de citadins sont attachés et qu'ils veulent transmettre. La chasse est partie intégrante de la vie de nos campagnes. Elle se pratique isolément ou en groupe dans un espace de liberté. Elle unit et réunit toutes les couches sociales. Elle permet de connaître et de vivre des moments de convivialité et de bonheur, en famille, avec les enfants, les voisins, les amis, dans une nature vivante. Elle rythme la vie de nos campagnes. Elle participe à la dynamique rurale. Sans parler de son poids économique non négligeable ou de son rôle de régulation indispensable à notre agriculture.
    D'où l'importance de la chasse. Ce phénomène a d'ailleurs été bien perçu par la représentation nationale, puisque plus de 200 députés sont inscrits au groupe d'études sur la chasse, soit près de 40 % des membres de notre assemblée, et ce alors que seul sur cinq ou sur six pratique ce sport. C'est du jamais vu ! Et s'ils se sont inscrits, c'est parce que, jour après jour, dans leurs circonscriptions, qu'elles soient rurales ou citadines, leurs électeurs leur ont fait part soit de leur colère, soit de leur inquiétude, et cela parce que, depuis des années, la chasse est caricaturée, malmenée et décriée.
    Tous les ruraux, tous les chasseurs se sont sentis humiliés, vexés au plus profond d'eux-mêmes. Quant aux non-initiés, ils sont devenus inquiets et parfois même hostiles en raison des propos dénués de fondement qu'ils ont entendus.
    Depuis des années, plusieurs rapports et textes ont envenimé les conflits. Cette crise a pris une tournure politicienne avec les positions extrêmes du mouvement Chasse, Pêche, Nature et Traditions et celles d'une écologie politique dont le programme est anti-chasse.
    M. Yves Cochet. C'est faux ! (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Claude Lemoine. Et elle a connu son paroxysme quand le ministre chargé de la chasse fut choisi dans les rangs de l'écologie politique !
    Ce dossier est important, car il concerne ce qui est devenu un sujet de société en France. Votre tâche, madame la ministre, est difficile. En effet, il faut réconcilier les Français.
    Mme Christine Boutin. Tout à fait !
    M. Jean-Claude Lemoine. Il faut les convaincre que les ruraux et les chasseurs sont disposés, comme ils l'ont toujours été, à partager la nature, et qu'ils sont les meilleurs protecteurs de la faune et de ses habitats.
    Mme Christine Boutin. C'est vrai !
    M. Jean-Claude Lemoine. Il faut aussi rassurer au plus vite nos paysans et nos chasseurs, de plus en plus inquiets pour leur avenir. Ces derniers, après avoir entendu vos propos, madame la ministre, ceux du Premier ministre et ceux du Président de la République, ont espéré, en juillet dernier, que leur calvaire serait terminé,...
    M. Yves Cochet. « Leur calvaire » !
    M. Jean-Claude Lemoine. ... qu'ils seraient réhabilités. Ils ont apprécié les décisions raisonnables et mesurées que nous avez prises. Toutefois, concrètement, ils n'ont rien vu venir au cours de la saison de chasse 2002-2003, il faut le reconnaître.
    Il est urgent de régler durablement ces conflits, de dépolitiser ce dossier. Cela implique de prendre rapidement des mesures législatives...
    M. Yves Cochet. Croyez-vous ?
    M. Jean-Claude Lemoine. ... et réglementaires propres à garantir le libre accès de tous à nos campagnes et la préservation des espèces.
    Pour redonner confiance à tous les acteurs et construire une chasse durable, chaque intervenant exposera ce matin les mesures qu'il croit indispensables.
    Pour moi, comme pour nombre de mes collègues qui ne pourront pas s'exprimer, tels René André, Alfred Trassy-Paillogues, Jacques Briat et d'autres, la priorité des priorités est de faire cesser les contentieux - qui n'existent qu'en France- sur les dates d'ouverture et de fermeture des périodes de chasse aux oiseaux migrateurs.
    Vous avez pris, madame la ministre, des mesures équilibrées comme la suppression du décret Cochet et d'arrêtés fixant les dates de chasse.
    M. Yves Cochet. Non, ces mesures sont très déséquilibrées !
    M. Michel Hunault. Au contraire, ce sont de bonnes mesures !
    M. Jean-Claude Lemoine. Malheureusement, trop d'entre elles ont été annulées par le Conseil d'Etat, qui fait une lecture trop restrictive de la directive de 1979 et pénalise ainsi les Français en les privant de plusieurs semaines de chasse par rapport à leurs voisins belges, anglais ou espagnols, pour ne citer que ceux-là ; cette situation inacceptable doit cesser.
    Pour cela, l'Observatoire national, mis en place en juillet dernier, doit orienter prioritairement ses recherches en direction des espèces migratrices chassables, en complétant les connaissances actuelles. Nous vous demandons instamment, madame la ministre, d'accélérer ses travaux afin de parvenir rapidement à un changement, même minime, de la directive « Oiseaux », processus indispensable pour provoquer un revirement de la jurisprudence. Là est la source de toutes les difficultés rencontrées pour la fixation du calendrier cynégétique français.
    Deux autres problèmes doivent être impérativement réglés avant la prochaine saison de chasse, c'est-à-dire dans moins de six mois, et impliquent un texte de loi qui doit donc être applicable au mois d'août prochain.
    Mme Christine Boutin. C'est vrai !
    M. Jean-Claude Lemoine. Tout d'abord, il faut revenir sur cette disposition absurde qui fait du mercredi un jour de non-chasse. C'est une mesure vexatoire pour les chasseurs,...
    M. François-Michel Gonnot. Absolument !
    M. Jean-Claude Lemoine. ... qui revient à les faire passer pour des inconscients ou des assassins !
    C'est également une mesure préjudiciable aux espèces chassables, puisque, avant l'instauration de cette obligation, dans la majorité des départements, les chasseurs avaient eux-mêmes instauré plusieurs jours de non-chasse. Maintenant, il ne reste plus que le mercredi : la pression cynégétique a donc augmenté.
    Mme Christine Boutin. Eh oui !
    M. Jean-Claude Lemoine. Et, surtout, cette mesure est inopérante et ne règle en rien le problème de la cohabitation entre les chasseurs et les autres utilisateurs de la nature. Qui a jamais vu des scolaires - puisqu'il s'agit de leur sécurité - arpenter en cuissardes les marais, ou en bottes les champs de betteraves de la Beauce, en période scolaire, le mercredi ? Le mercredi étant un jour de congé, aucun enseignant ne se prive ce jour-là de ses vacances pour organiser des sorties avec ses élèves !
    M. François-Michel Gonnot. Bien sûr !
    M. le président. Merci de conclure, monsieur Lemoine.
    M. Jean-Claude Lemoine. L'interdiction de chasser le mercredi applicable sur tout le territoire national doit disparaître définitivement. Il faut, dans chaque département, laisser les fédérations proposer ou non à l'autorité compétente de déclarer un ou plusieurs jours de non chasse suivant, d'une part, l'état de conservation des espèces,...
    M. Jean-Pierre Grand. C'est cela la décentralisation !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Cela figure déjà dans la loi !
    M. Jean-Claude Lemoine. ... et, d'autre part, les types de territoires et leur fréquentation par des promeneurs. C'est la seule façon de régler intelligemment le partage de l'espace.
    Le second problème qui doit être réglé en urgence et implique également le recours à une loi concerne les fédérations, qui sont traitées de façon inadmissible. Elles sont soumises à un contrôle a priori, tant économique que financier, comme si leur comportement nécessitait une surveillance rapprochée. Pourquoi ces brimades ? Il faut les traiter comme les autres fédérations. Il convient de revoir au plus vite les statuts des fédérations et de supprimer ce contrôle a priori injustifié et humiliant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Enfin, avant la prochaine ouverture, en août prochain, des mesures réglementaires de simplification, d'harmonisation, de clarification et de précision doivent être prises. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)

    Les mesures de simplification doivent concerner, par exemple, l'examen du permis de chasser et sa validation annuelle via le guichet unique - nous attendons le décret relatif à cette mesure depuis si longtemps -, le transport du gibier et l'utilisation des appelants, les postes fixes et la mise en place d'un timbre amende pour toute infraction légère.
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Lemoine.
    M. Michel Hunault. Soyez indulgent, monsieur le président : il est bon !
    M. Jean-Claude Lemoine. Les mesures d'harmonisation doivent porter, par exemple, sur la légalisation définitive de la chasse de nuit et les carnets de prélèvement.
    Les mesures de clarification doivent concerner le rôle et le financement de l'Office national de la chasse, ou la garderie : les agents des fédérations ainsi que les techniciens de l'environnement et de la nature sont financés uniquement par les redevances payées par les chasseurs, alors que la nature est partagée par tous.
    Des mesures de précision doivent également être prises. Ainsi, il convient d'appliquer le rapport Baron, qui préconisait une année d'étude avant l'interdiction progressive de l'usage du plomb dans les zones humides, mais qui a été mis à mal par le décret Cochet, lequel doit être annulé.
    M. Jean-Pierre Grand. L'horrible décret Cochet !
    M. Jean-Claude Lemoine. Enfin, pour réhabiliter les chasseurs, qui en ont bien besoin, il me paraît indispensable que leurs représentants soient partie intégrante, en tant qu'utilisateurs de la nature, de certaines instances consultatives comme le Conseil national du développement durable ou la charte de l'environnement.
    Ces différentes mesures d'ordre législatif et réglementaire, qui doivent être prises très vite, sont de nature à rapprocher l'ensemble des Français, à sortir du blocage actuel, à rendre la nature à ceux qui l'aiment, qui la défendent, qui acceptent de l'entretenir et de l'aménager pour le maintien des espèces animales,...
    M. François-Michel Gonnot. Très bien !
    M. Jean-Claude Lemoine. ... pour partager en toute sécurité notre belle campagne,...
    M. Jean-Pierre Grand. Les vrais écolos, ce sont les chasseurs !
    M. Jean-Claude Lemoine. ... promouvoir une pratique durable et apaisée de la chasse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que vingt-huit orateurs sont inscrits dans le débat. Par conséquent, si les temps de parole ne sont pas respectés, ceux qui sont inscrits en dernier ne pourront pas intervenir, puisque la séance doit être levée à treize heures.
    Je demande donc à chacun de faire preuve de beaucoup de rigueur et de condenser au maximum son propos.
    La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pourquoi un débat sur la chasse ? Pourquoi aujourd'hui, et pourquoi à la demande du groupe majoritaire de l'Assemblée ? Là est la question.
    D'abord, ce débat tend à rétablir un certain nombre de vérités. Ensuite, il vise à préparer certaines décisions que nous attendons et pour lesquelles, madame la ministre, nous vous faisons confiance.
    Rétablir un certain nombre de vérités, d'abord. J'ai le sentiment, comme la commission que je préside, que le problème de la chasse doit sortir du champ de la polémique politicienne et du cadre des enjeux électoraux. (« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) C'est peut-être bien de votre côté qu'il faudrait regarder, car quand on se livre à la provocation comme l'ont fait certains ministres dans un passé récent (Protestations sur les mêmes bancs), il ne faut pas s'étonner de se retrouver prisonniers de certains enjeux que l'on a soi-même suscités. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Pierre Ducout. Vous parlez sans doute de Raffarin !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Il est bien évident que, dans un pays rural comme la France, où 80 % du territoire sont occupés par 20 % de la population, la chasse fait partie de la culture de nos terroirs. C'est un fait incontestable, et j'espère que nul ne songe ici à le contester.
    Or que la politique vienne, par extrêmes interposés, entraver toute tentative de dialogue constructif entre chasseurs et non-chasseurs est quelque chose d'insupportable. Ayons, mes chers collègues, la sagesse, tous ensemble, de consentir l'effort nécessaire pour aider notre Gouvernement et notre majorité à « dépolluer » ce débat (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), et de faire en sorte que la politique n'y entre pas, tout au moins aujourd'hui ; mais je ne me fais guère d'illusions.
    D'origine périgourdine, j'ai été bercé par la tradition de la chasse et, au long des décennies, j'ai vu évoluer la pratique de la chasse, traditionnelle ou classique. Aussi, je dois avouer que je suis stupéfait de constater la méconnaissance de nos concitoyens par rapport à cette donnée, qui, pour chacun des enfants de nos campagnes, est quelque chose de génétique, si j'ose dire.
    Il faut donc faire un effort d'information,...
    Mme Christine Boutin. C'est vrai !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... car le manichéisme consistant à dire que, d'un côté, il y a les bons et, de l'autre, les mauvais ne peut que gêner la sérénité nécessaire.
    Par ailleurs, la décision prise hier par le Conseil d'Etat ne contribue pas à apaiser les esprits.
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est vrai !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Chasser pour tuer n'est pas une finalité pour l'immense majorité des chasseurs, ce n'est pas vrai. En revanche, chasser en communion avec la nature, en respectant le gibier, en ne prélevant que le nécessaire est le fait du plus grand nombre des chasseurs.
    M. Yves Cochet. Chasser pour le plaisir de tuer ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Christine Boutin. Provocateur !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Non, monsieur Cochet, certainement pas ! Votre interruption témoigne d'une méconnaissance totale de ce qui fait partie des racines de la plupart d'entre nous dans cet hémicycle.
    M. Jean-Claude Lemoine. M. Cochet ouvre de nouveau les conflits !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Il faut rendre justice à ceux qui pratiquent la chasse, car ils sont les meilleurs partenaires de l'écologie et du développement durable.
    Mme Christine Boutin. Absolument !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Dans le même temps, il faut éviter que quelques excités donnent de la chasse la triste image que nous connaissons...
    Mme Christine Boutin. Ils sont minoritaires !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. ... et dénaturent cette pratique que nous voulons noble et respectueuse des équilibres naturels. Nous devons aussi dénoncer ces excès des plus excités, qui ne représentent en aucun cas la majorité des chasseurs.
    Mme Christine Boutin. Tout le monde a ses excités !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Pour répondre au souhait de M. le président de ne pas perdre de temps, je vais indiquer très rapidement ce que nous attendons de ce débat.
    Il s'agit d'abord, je l'ai déjà souligné, de rétablir un certain nombre de vérités. J'aimerais en effet que l'on puisse faire la part des prélèvements organisés par la chasse et de la disparition de certaines espèces liée à l'évolution de la société. Qui est responsable de la disparition de certaines espèces dans nos campagnes ? La chasse ou l'urbanisation qui gagne les campagnes, la chasse ou les routes et les autoroutes qui perturbent les équilibres naturels, la chasse ou la déforestation, la chasse ou certaines pratiques agricoles ? Posons-nous ces questions, ayons l'honnêteté d'y répondre en faisant la part des choses ; nous verrons que l'évolution de la société est malheureusement beaucoup plus responsable que la chasse de la disparition de certaines espèces dans nos campagnes.
    Aujourd'hui, madame la ministre, nous voulons vous inciter à prendre un certain nombre de décisions. Le temps compte, c'est vrai, et vous êtes dans une situation que vos prédécesseurs n'ont pas rendue facile. (« Absolument ! » sur les bancs de groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Aussi, la commission, comme la majorité, souhaite vous aider.
    Tout d'abord, M. Lemoine l'a très bien dit et je l'en remercie, deux types de dispositions semblent urgentes : les unes d'ordre réglementaire, les autres d'ordre législatif.
    M. Yves Cochet. Vous voulez une nouvelle loi sur la chasse ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Oui, monsieur Cochet, des dispositions d'ordre législatif sont nécessaires.
    M. Yves Cochet. Bon courage, madame la ministre !
    M. Edouard Landrain. Nous allons essayer ! Il ne faut pas baisser pavillon tout de suite !
    M. Roland Chassain. Nous avons des armes !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. En effet, la directive européenne de 1979 se borne à fixer des objectifs et à décrire les éléments essentiels d'un encadrement de la pratique de la chasse. Le principe de subsidiarité s'applique et donc l'Etat a la responsabilité de certaines décisions. L'article 2 est clair : « Les Etats membres prennent toutes les mesures nécessaires pour maintenir [...] ». En particulier, la directive ne se prononce pas sur un calendrier d'ouverture et de fermeture des périodes de chasse. Nous avons donc là matière à discuter, monsieur Cochet, et probablement à légiférer.
    M. Yves Cochet. C'est déjà fait !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Il faut d'abord, ainsi que M. Lemoine l'a souligné, assouplir la pratique de la chasse tout en préservant les équilibres. Il me semble important de laisser aux fédérations, dans les départements, la liberté de choisir le jour où il ne faudra pas chasser. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Pierre Ducout. Non !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Monsieur Ducout, ayons aujourd'hui la sagesse d'essayer de prendre les bonnes décisions.
    M. Pierre Ducout. Nous les avons déjà prises !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Arrêtons les invectives : elles n'apportent rien de constructif au débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Ensuite, et là je me tourne vers certains de mes collègues, il faut que l'Observatoire de la faune sauvage et des habitats soit créé le plus vite possible. Le ministre est confronté à des problèmes, il faut l'aider.
    Un décret doit être pris pour que l'observatoire soit créé. Mais comment le ministre peut-il le prendre si les interventions des uns et des autres l'empêchent d'arbitrer ? Je vous appelle, mes chers collègues, à faire en sorte de vous retrouver pour permettre au Gouvernement et à Mme le ministre de rédiger dans les meilleurs délais ce décret qui est indispensable à la mise en place de cet observatoire.
    M. Jean-Paul Chanteguet. On a surtout besoin de bon sens !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. On ne peut pas, d'un côté, réclamer des expertises scientifiques et, de l'autre, ne pas donner au Gouvernement les moyens de mettre sur pied le dispositif qui permettra ces expertises.
    Enfin, il faut revoir les statuts des fédérations. Le report des élections implique que les fédérations sachent quelles décisions le Gouvernement compte prendre pour leur offrir une organisation plus décentralisée, plus libre et plus responsable.
    M. Yves Cochet. Et plus démocratique !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. A cet égard, si la suppression du contrôle budgétaire a priori des fédérations semble une évidence, encore faut-il la décider.
    Il est par ailleurs nécessaire de mieux associer les chasseurs à toutes les structures locales qui traitent du développement durable, d'éclaircir le statut des gardes-chasse et de préciser le financement de l'Office national de la chasse. Il faut introduire plus de souplesse, plus de décentralisation pour mieux appréhender les problèmes sur le terrain. Bref, il faut redonner confiance aux chasseurs, les responsabiliser, plutôt que de chercher, de Paris, à donner l'impression de vouloir rétablir cette confiance par le contrôle.
    M. Edouard Landrain. Très bien !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Pour cela, la seule solution, c'est que le principe de décentralisation que nous souhaitons toutes et tous ici mettre en oeuvre soit appliqué le plus rapidement possible au secteur de la chasse.
    Jour de non-chasse, statut des fédérations, mise en place de l'observatoire, autant de mesures qu'il me semble nécessaire de mettre en oeuvre très rapidement.
    Je laisse à mes collègues, puisque le temps est compté, le soin d'entrer plus en avant dans les détails. Je souhaitais surtout intervenir, madame le ministre, pour vous dire que la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire serait vigilante quant à la manière dont les choses vont se dérouler.
    M. Yves Cochet. En effet !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. M. Lemoine va probablement être chargé d'une mission d'évaluation pour suivre, au nom de la commission, donc dans le cadre de l'Assemblée, l'évolution de ce dossier.
    Mme Christine Boutin. Très bien !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Je sais que le calendrier législatif est très chargé. Il n'empêche madame le ministre : nous attendons beaucoup de vous.
    Je conclurai en renouvelant la confiance que nous vous portons. Parce que vous êtes le ministre des équilibres naturels, vous êtes probablement, avec l'autorité et le sens de l'équilibre qui vous caractérisent, la personne la plus à même de prendre les bonnes mesures au bon moment.
    M. François-Michel Gonnot. Très bien !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Le bon moment, c'est avant l'été. Il ne s'agit pas d'attendre le texte sur le développement rural, qui doit venir plus tard.
    M. François-Michel Gonnot. Tout à fait !
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Cela relève de votre responsabilité, madame. Nous sommes prêts à vous aider, à essayer de nous mettre d'accord, dans le cadre de la majorité, pour que ce texte soit déposé le plus vite possible, afin d'apporter apaisement et réconciliation. Il ne faut plus tergiverser, il faut aujourd'hui décider.
    C'est dans cet état d'esprit que j'interviens au nom de la commission. Ce débat ne doit pas être un débat pour rien, il doit servir à décider, à organiser, dans les délais les plus raisonnables. Il doit permettre de faire comprendre, tant aux chasseurs qu'à ceux qui sont contre la chasse, qu'il n'est nullement question dans notre esprit d'opposer les uns aux autres, mais que nous voulons au contraire les réconcilier, dans le plus grand intérêt des équilibres naturels de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Claude Lemoine. Voilà qui est nouveau !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je me réjouis que l'occasion me soit proposée aujourd'hui d'exposer la politique de la chasse du Gouvernement. Je veux particulièrement remercier le groupe UMP et son président, M. Barrot, d'être les instigateurs de ce débat.
    Vous avez, monsieur le président du groupe d'étude sur la chasse, cher Jean-Claude Lemoine, rappelé les enjeux, et vous vous êtes fait l'interprète des attentes de vos collègues. Ce débat va nous permettre de conduire une réflexion d'ensemble et de faire le point après neuf mois d'action gouvernementale. Il nous permettra également de tracer des perspectives et de présenter un calendrier.
    Faisant suite au remarquable rapport Scherrer devant le Conseil économique et social, le débat sur la chasse traduit bien ce que le Premier ministre a appelé « la blessure rurale », en ce sens qu'il révèle une cassure entre les citadins et les ruraux, puisque 80 % des chasseurs habitent à la campagne.
    Ainsi, une nouvelle relation à la nature s'est peu à peu instaurée dans notre société qui tend à sanctuariser la nature et à repousser l'idée même de la mort. Le gentil Bambi autant que le Roi Lion de Walt Disney ont contribué à imprégner nos enfants de cette vision fausse de la nature prêtant aux animaux des sentiments calqués sur ceux de l'homme. Cette vision d'une nature où l'homme n'a plus sa place, sinon comme spectateur contemplatif, ne contribue pas à faciliter la compréhension du rôle de la chasse et des chasseurs par notre société moderne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    La chasse est en effet une activité complexe, aux multiples facettes. Quelle passion commune rapproche le fauconnier qui, l'oiseau sur le poing, lance sa buse de Harris sur un lapin sorti du terrier et le sauvaginier transi de froid qui, du fond de son hutteau, scrute l'étendue glauque d'un marais au petit jour ? Quelle passion commune, si ce n'est celle de la nature, du gibier, des saisons qui passent, des territoires aménagés et protégés ? (« Très bien ! », sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Les chasseurs se sont les premiers préoccupés des zones humides, de la préservation des haies, des aménagements pour la faune.
    M. Patrice Martin-Lalande. C'est vrai !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je n'ose même pas imaginer ce que serait la gestion de cet équilibre s'il n'y avait pas les chasseurs !
    M. Christian Estrosi. Bravo !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Faudrait-il restaurer le droit d'affût des agriculteurs ? Faudrait-il payer des fonctionnaires, et combien, pour tirer 350 000 sangliers, 400 000 chevreuils, 32 000 cerfs chaque année ?
    Mme Christine Boutin. Eh oui !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Qui prendrait en charge le coût de la protection, de la prévention des dégâts et des dégâts eux-mêmes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Au total, la collectivité devrait débourser chaque année plus de 150 millions d'euros, dont près de 30 millions pour indemniser les agriculteurs.
    La chasse participe ainsi à la gestion durable du patrimoine faunique et de ses habitats. Mais l'on ne saurait minimiser la dimension culturelle de cet héritage et son importance dans toutes les classes de la société. La chasse contribue à renforcer le lien entre les générations, à affranchir des origines sociales. Elle contribue à une activité économique importante : 23 000 emplois et plus de 2 milliards d'euros. Elle représente dans certaines régions un moteur pour l'économie locale, en Alsace, en Sologne, mais aussi ailleurs.
    M. Patrice Martin-Lalande. Eh oui !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. J'entends parfois dire qu'il y a beaucoup de chasseurs en France et que le nombre d'espèces chassables est plus important qu'ailleurs. Faut-il le regretter ? Pour ma part, je m'en réjouis ! C'est bien là une caractéristique de notre grand pays, de ses vastes territoires préservés de l'urbanisation. Cette campagne à la fois entretenue et sauvage, nos voisins nous l'envient. Tant qu'il y a des chasseurs, c'est qu'il y a de grands espaces naturels agricoles et forestiers où le gibier abonde. C'est la raison pour laquelle je suis personnellement attachée au maintien d'une chasse démocratique et populaire (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), éloignée du modèle allemand ou suisse, où des fonctionnaires ou une élite gèrent la faune, une chasse riche de sa diversité, à l'image de nos terroirs et de l'abondance de notre faune sauvage. On ne devrait d'ailleurs pas parler de la chasse, mais des chasses, puisque notre pays offre la palette la plus diversifiée de territoires, de gibiers, et surtout de pratiques.
    M. Patrice Martin-Lalande. Oui, c'est une richesse !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Cette chasse vivante, vigoureuse, sera d'autant mieux comprise et respectée par l'ensemble de nos compatriotes qu'elle s'ouvrira et s'adaptera. L'avenir de la chasse n'appartient pas qu'aux chasseurs : il est essentiel que tous ceux qui ont un intérêt objectif à la préservation des habitats de la faune sauvage unissent leurs efforts et acceptent de se parler, même si c'est difficile.
    M. Yves Cochet. C'est vrai !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je suis frappée par le manque de dialogue au plan national, alors que la collaboration est plus souvent constructive au plan local. Dans ma région, chasseurs, agriculteurs et naturalistes, travaillent ensemble pour la préservation de l'outarde canepetière ou la restauration des populations de castors. Néanmoins, la responsabilité des chasseurs est essentielle, et c'est pourquoi je souhaite que ceux-ci, trop souvent critiqués, reprennent l'initiative et bâtissent une stratégie de reconquête.
    La chasse participe aussi pleinement à notre identité et à nos spécificités régionales. A chaque fois que la chasse recule, c'est le Coca-Cola qui avance ! (Applaudissements sur plusieurs bancs de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Pascal Terrasse. Encore les Américains ? Après Walt Disney, le Coca-Cola ? Il faut envoyer des SCUD !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je voudrais maintenant présenter l'action que nous conduisons depuis neuf mois.
    Tout d'abord, nous avons renoué le dialogue. Nous avons organisé des rencontres régulières avec la Fédération nationale des chasseurs, les associations spécialisées, les fédérations départementales des chasseurs ; effectué des déplacements sur le terrain et des réunions à un rythme soutenu avec le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage ; mis en place un groupe de travail avec des sénateurs et des députés ; relancé des orientations régionales de gestion de la faune sauvage et d'amélioration de la qualité de ses habitats ; pris de nombreux contacts, à tous les niveaux, avec la Commission européenne.
    Ensuite, nous avons décidé des avancées significatives : des dates d'ouverture de la chasse avancées pour les limicoles, de fermeture retardée, notamment pour les bécasses et les tourterelles ; la suppression du timbre « gibier d'eau » ; le report des élections des fédérations départementales de chasse ; le renouvellement du conseil d'administration de l'ONCFS ; l'arrêté mustélidés après un rapport scientifique de l'ONCFS.
    M. Jean-Pierre Grand. Bravo !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Des outils pour aller plus loin ont été mis en place : une mission sur la fixation des périodes de chasse aux oiseaux migrateurs, confiée à Georges Dutruc-Rosset ; un rapport d'inspection sur les outils institutionnels par Pierre Roussel ; la nomination d'un conseiller technique « faune sauvage » au sein de mon cabinet ; la création de l'Observatoire de la faune sauvage et de ses habitats ; la création d'un groupe de travail sur la simplification.
    M. Pierre Ducout. Il faut choisir !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Ces avancées, nous les avons réalisées dans un contexte particulièrement délicat puisque j'ai trouvé une situation totalement bloquée à mon arrivée.
    M. Yves Cochet. Oh !
    M. Jean-Pierre Grand. Comme sur tous les dossiers !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. L'attitude sectaire de mes prédécesseurs à l'égard de la chasse et des chasseurs (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) s'est traduite par une suspicion forte envers mon ministère et son administration. Ce manque de dialogue avec les représentants des chasseurs les a orientés vers d'autres moyens d'action, les détournant de leur administration de tutelle.
    Enfin, la situation financière de l'Office, comme le divorce et les contentieux entre cet établissement et les institutions de la chasse, ont profondément déstabilisé l'édifice sur lequel le ministère s'appuie pour conduire sa politique.
    Les principes qui guident mon action se déclinent en quatre axes : donner à cette action une assise scientifique incontestable ; responsabiliser les acteurs et donner plus de proximité à nos décisions et à notre action ; clarifier et simplifier la réglementation pour en faciliter la compréhension et l'application ; enfin, restaurer la confiance entre les acteurs.
    Premièrement, donner une assise scientifique incontestable à notre action. Des décisions mal étayées ont été attaquées, et souvent annulées par la justice.
    M. Yves Cochet. Eh oui !
    M. Pascal Terrasse. Hier encore !
    M. Pierre Ducout. Et en décembre !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Cette situation a fortement contribué à confisquer aux chasseurs la libre détermination de leur politique dans un partenariat constructif avec les autres acteurs et avec l'administration, et finalement à les déresponsabiliser. Ces fondements scientifiques, le Premier ministre les a rappelés dans sa déclaration de politique générale : « Je souhaite fonder la gestion de la faune sauvage et des espaces sur des données scientifiques établies et partagées, et non sur des invectives. »
    Pour mettre fin à cette dérive, il convient de simplifier et de renforcer les outils de conseil placés à mes côtés, en créant rapidement un conseil scientifique pouvant travailler en liaison avec les conseils scientifiques régionaux du patrimoine naturel.
    Cette nouvelle configuration permettrait de rapprocher deux composantes, la gestion des espèces et la gestion des espaces, c'est-à-dire les habitats ; de clarifier le débat, en distinguant nettement le débat strictement scientifique, avec le conseil scientifique, du débat plus institutionnel et social, avec le conseil national ; de conforter et de clarifier les missions d'étude et de recherche appliquées sur la faune sauvage, actuellement dévolues à l'Office et au Muséum national d'histoire naturelle, mais aussi, dans le domaine des habitats naturels, aux conservatoires botaniques et à l'agence technique de l'environnement ; de développer une approche bio-géographique par grandes régions naturelles pour renforcer notre cohérence dans l'action et la proximité.
    Enfin, toujours avec l'objectif d'étayer nos décisions, l'Observatoire de la faune sauvage et de ses habitats a été créé par décret du 17 juillet 2002. L'organisation et la composition de l'observatoire viennent d'être arrêtées ainsi que son programme pour l'année 2003. Cet observatoire, favorablement accueilli,...
    M. Yves Cochet. Il est déséquilibré !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... nous aidera à sortir des contentieux chroniques qu'a connus la chasse ces dernières années.
    Il comprend un noyau de onze scientifiques reconnus, proposés par les principaux partenaires et désignés par moi. Mais, surtout, l'observatoire est un vaste réseau d'experts compétents dans des domaines permettant de mobiliser le plus grand nombre d'observateurs sur le terrain ; et je m'emploie à ce que ce partenariat soit réel.
    Deuxième principe : responsabiliser les acteurs. Les chasses sont à l'image de la diversité de nos terroirs. S'il convient de fixer un cadre national permettant à la France de respecter ses engagements internationaux et d'assurer l'équité de notre réglementation, la chasse doit cependant être gérée au plus près du terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe du l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Trois voies sont à explorer.
    Il convient de responsabiliser les associations existantes, dont certaines se sont vu confier par la loi des missions de service public. De nouveaux statuts ont été préparés en liaison avec la FNC.
    M. Jean-Claude Lemoine. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Ils ont été présentés au Conseil national de la chasse et de la faune sauvage le 4 février dernier et pourront être adoptés rapidement. Je vous proposerai d'alléger considérablement tous les contrôles qui avaient été instaurés par le précédent gouvernement et qui avaient été ressentis comme autant de mesures de défiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Je vous propose de maintenir le seul contrôle a posteriori, rendant aux chasseurs la pleine responsabilité de l'exercice de leurs missions. Sans remettre en question la participation de tous les chasseurs adhérents aux fédérations,...
    M. Yves Cochet. Ah !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... je souhaite rendre une place aux associations intermédiaires qui organisent la chasse au plus près du terrain et participent à la gestion des territoires : le système de scrutin sera donc adapté en conséquence. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Pour la mise en oeuvre de cette réforme, j'ai préféré repousser d'un an les élections dans les fédérations, car on ne change pas les statuts à la veille d'un renouvellement, ni le lendemain.
    M. Jean-Claude Lemoine. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Le décret est en cours d'examen par le Conseil d'Etat et sera signé dans les tout prochains jours. Modifiant assez sensiblement les statuts et s'agissant d'un deuxième report, j'ai pensé qu'il était préférable de procéder au renouvellement total des conseils d'administration.
    Ensuite, il faut décentraliser dans le cadre du mouvement engagé par l'actuel gouvernement.
    L'organisation fédérale de la chasse allie déconcentration et décentralisation mais, au-delà, il convient d'associer davantage les collectivités territoriales.
    Sans attendre les mesures que je pourrais proposer dans le cadre d'une loi sur le patrimoine naturel, je souhaite dans l'immédiat les associer davantage et systématiquement aux conseils évoqués précédemment ou aux conseils d'administration des établissements publics.
    M. Pierre Ducout. C'est ce que proposait la loi d'orientation sur la forêt.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. C'est en ce sens que des propositions ont été faites au Premier ministre.
    Enfin, la déconcentration des décisions à l'échelon régional ou départemental doit être renforcée. Les schémas départementaux de gestion cynégétique prévus par la loi rendent cette proximité possible.
    M. Pierre Ducout. Absolument !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. C'est à ce niveau, par exemple, que doit être débattue la question des jours de chasse, en fonction des usages locaux et des pratiques de chasse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) C'est dans cet esprit qu'a été rendue aux préfets la faculté de déterminer localement si belette, putois et martre peuvent ou non être piégés.
    Je m'arrêterai quelques instants sur la question des jours de chasse, devenue un symbole parce qu'on n'a pas voulu la traiter comme elle devait l'être.
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est vrai !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je vous proposerai donc prochainement un texte qui rendra l'initiative aux chasseurs et aux préfets, lesquels pourront déterminer ensemble, dans le département et selon les territoires, les mesures susceptibles d'être adoptées pour assurer la quiétude de la faune et le partage entre les chasseurs et les autres utilisateurs de la nature. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    S'agissant de la sécurité,...
    M. Pascal Terrasse. Et les dates de chasse, alors ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... il faut signaler les progrès considérables réalisés ces dernières années. On constate en effet une baisse régulière du nombre des accidents et, d'après les données, l'interdiction du mercredi n'y est pour rien. L'examen du permis de chasse - qui sera complété, à compter de cette année, par la formation pratique et l'examen pratique - contribue très efficacement à cette amélioration.
    M. Patrice Martin-Lalande. Tout à fait !
    M. Pierre Ducout. C'est nous qui l'avons voté !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Aujourd'hui, la chasse est moins dangereuse que bien des loisirs ou des sports de nature ! Je voudrais donc saluer les fédérations départementales de chasseurs et leur personnel, qui, sous l'autorité de leurs présidents, agissent au quotidien en faveur des missions d'intérêt général que la collectivité leur a confiées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Patrick Ollier, président de la commission. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Troisièmement, il convient de simplifier la réglementation car plus personne, y compris les spécialistes, ne s'y retrouve dans le maquis des textes. C'est pourquoi, en appui au travail qui sera conduit par les services, j'ai confié une mission à un groupe d'étude composé de spécialistes ayant eu à rédiger ou à appliquer les textes sur la chasse : il associe des parlementaires, des membres du Conseil d'Etat, des administrations, de l'ONCFS et de la FNC.
    La simplification doit surtout concerner la pratique quotidienne de la chasse, de la validation annuelle du permis de chasser au transport du gibier.
    Le chasseur ne comprend plus pourquoi, au nom des directives européennes, on lui impose des dates de chasse différentes de celles en vigueur à quelques kilomètres de là pour la même espèce, qui ne connaît pourtant pas les frontières. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. François-Michel Gonnot. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Cela montre d'ailleurs que, si les directives fixent un cadre général, elles permettent une déclinaison nationale, voire régionale.
    Les chasseurs n'admettent pas non plus que des espèces dont le statut a fortement évolué ces dernières années - je pense au pigeon ramier et au canard colvert,...
    M. Yves Cochet. Ou à la bécasse !
    Mme la ministre de l'éducation et du développement durable. ... qui, pour différentes raisons, se sont sédentarisés - soient gérées selon les mêmes principes que les autres espèces migratrices. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Ils comprennent encore moins lorsque ces espèces abondantes nécessitent des régulations pour limiter les dégâts aux cultures et qu'après en avoir interdit la chasse, on en autorise la destruction dans d'autres zones.
    M. Jean-Claude Lemoine. Absolument !
    M. Jean-Pierre Grand. Ils ont du bon sens, eux !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. La mise en oeuvre de la directive européenne du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages suscite de difficiles débats.
    M. Pascal Terrasse. Eh oui !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Les services de la Commission ont travaillé à la mise au point d'un guide interprétatif, dont la publication est prévue ce mois-ci, basé sur les travaux du comité ORNIS, chargé d'adapter les annexes de la directive. Ce guide en facilitera l'interprétation par les services de la Commission et les Etats membres. Il est sans effet immédiat, en revanche, sur la jurisprudence.
    La possibilité de dérogation offerte à l'article 9 de la directive reste encadrée et juridiquement fragile. La décision récente du Conseil d'Etat suspendant en urgence les deux arrêtés que j'avais pris sur la base de cet article en est l'illustration.
    M. Yves Cochet. Eh oui ! Et heureusement !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Elle rejoint la position de la Commission sur la nature des dérogations, position dont je vous avais informés il y a quelques semaines.
    Enfin, certains envisagent la renégociation de la directive.
    M. Pascal Terrasse. En effet !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Une telle démarche avait été engagée en 1994, à la demande de la France, et très vite abandonnée en raison d'orientations qui auraient conduit à un durcissement.
    M. Pierre Ducout. Absolument !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Quoi qu'il en soit, c'est une action à long terme, dont il faut bien apprécier tous les aspects avant de l'engager. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Pascal Terrasse. Abdication !
    M. Alain Vidalies. Renoncement !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Sur ces trois aspects, je maintiens des contacts permanents avec les services de la Commission...
    M. Pascal Terrasse. Abdication !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... et je vous propose, si vous en êtes d'accord, d'associer plusieurs d'entre vous à l'un des prochains contacts que nous aurons avec la DG environnement.
    M. Joël Hart. Très bien !
    M. Pascal Terrasse. Ce ne sont que des promesses !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Quatrièmement, il faut aussi restaurer la confiance entre les chasseurs et les pouvoirs publics.
    Il convient d'accorder une place importante à la concertation.
    M. Gérard Vignoble. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Mais il convient en retour que le monde de la chasse prenne l'initiative, redevienne une force de proposition et non de critique envers son administration de tutelle.
    M. Pascal Terrasse. Abdication !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. La mise en oeuvre de la charte de la FNC y contribuera.
    Il convient également d'être à l'écoute des non-chasseurs et des responsables des autres activités de plein air ou de nature.
    M. Pierre Ducout. Ils sont tétanisés !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. La concertation avec les gestionnaires de l'espace rural, agriculteurs ou forestiers, par exemple, est déterminante, car ce sont eux qui contribuent au maintien d'habitats favorables à la faune sauvage.
    Par ailleurs, je reste convaincue de la nécessité de conserver l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, outil remarquable, lieu de médiation entre l'Etat, les chasseurs et les autres acteurs.
    Ma priorité est de rétablir son équilibre financier dès le budget de 2004, sans pour autant accroître la redevance cynégétique payée par les chasseurs. Il nous faudra donc reconsidérer les conditions du financement de certaines missions.
    Je souhaite enfin clarifier les missions de l'Office national, conforter ses missions techniques et d'observation, notamment son rôle de secrétaire de l'Observatoire, réaffirmer ses missions de police de la faune sauvage et des milieux naturels, sous l'autorité des préfets de département et des procureurs, coordonnés par les préfets de région. Je sais combien les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage sont attachés à leur établissement, à leurs fonctions et plus généralement à leurs missions de service public. Ils méritent toute notre confiance et j'entends bien conforter leur rôle en traçant de vraies perspectives pour leur établissement.
    Ce travail de fond doit être mené en confiance avec les fédérations. Je vous propose, pour tourner la page du conflit qui a opposé l'Office aux fédérations, de désigner un médiateur - pourquoi pas l'un d'entre vous ? - afin de régler à l'amiable ce contentieux, dans lequel, finalement, les sommes en jeu des deux côtés proviennent de la poche des chasseurs.
    Voici donc notre stratégie à moyen terme, dont les effets ne seront pas tous immédiats, même si un certain nombre de décisions ont déjà été prises ou le seront dans les tout prochains jours.
    Je souhaite terminer en vous précisant notre calendrier.
    Après cette première étape du débat d'orientation, vous aurez très prochainement à vous prononcer sur un certain nombre de mesures intégrées à la loi d'habilitation que nous devrions vous présenter au printemps.
    M. Yves Cochet. Des ordonnances ! Voilà la solution !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Ces mesures concernent le statut des fédérations, la déconcentration du jour de non-chasse,...
    M. René André. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... l'instauration facultative, pour ceux qui le souhaitent, d'un guichet unique pour la validation annuelle du permis de chasser, la mise en place du fichier national des permis, la définition des heures légales de chasse de nuit,...
    M. Pascal Terrasse. Et les dates d'ouverture et de fermeture ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... ainsi que l'adaptation du statut des associations communales de chasse agréées.
    M. Alain Vidalies. Et les dates de chasse ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Il s'agit pour l'essentiel de mesures de simplication, de déconcentration et de responsabilisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    L'étape suivante, lors du second semestre 2003, concerne les mesures législatives qui constitueront le volet chasse de la loi relative aux affaires rurales.
    M. Pascal Terrasse. Quelle abdication !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Ces mesures porteront sur les territoires, l'organisation et la pratique de la chasse.
    Enfin, à l'horizon 2004, nous disposerons d'un nouveau support législatif avec la loi sur le patrimoine naturel, qui abordera des questions plus transversales, comme le statut des espèces.
    Sans attendre, nous avons engagé un programme ambitieux d'adaptation des textes réglementaires. Ce programme, présenté lors du dernier Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, concerne des mesures concrètes attendues des chasseurs.
    M. Jean-Claude Lemoine. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Premier volet, la pratique de la chasse ; pour la mise au point d'un système pratique de prélèvement maximal autorisé - PMA -, permettant d'une façon simple, pragmatique et efficace d'adapter et de contrôler le prélèvement national de certains gibiers, selon l'état de conservation de leur population, j'attends les propositions de la FNC ; pour clarifier et simplifier les dispositions relatives à l'utilisation des appeaux et appelants, j'attends également les propositions de la fédération,...
    M. Jean-Claude Lemoine. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... de même que pour la création d'un carnet de prélèvement pour la chasse de nuit, une définition des postes fixes, la recherche du gibier blessé à l'aide d'un chien de sang, l'entraînement des chiens de chasse, le timbre amende.
    Deuxième volet : la gestion des populations et des territoires, avec la mise au point du plan de chasse triennal ; la définition des plans de gestion pour le petit gibier et les espèces non soumises à plan de chasse ; les mesures en faveur de la faune sauvage dans le cadre de la gestion des jachères ; la régulation des rats musqués et ragondins ; la caractérisation des élevages de gibier ; les mesures d'accompagnement pour la substitution de la grenaille de plomb en zone humide.
    Troisième volet : l'organisation et la police de la chasse ; en complément des mesures législatives et de leurs textes d'application, je pense au travail de fond concernant la clarification des missions et le financement de l'ONCFS et à la situation de ses personnels, que j'ai déjà évoqués.
    M. Alain Vidalies. Et les dates ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Je souhaite pouvoir compter sur votre soutien pour régler au plus vite le problème du financement de la garderie, dont les chasseurs assuraient jusqu'à ce jour l'intégralité de la charge, alors que ses missions se sont considérablement élargies.
    Vous le voyez, mesdames, messieurs les députés, notre travail est fourni. Quels que soient les aléas, j'ai confiance en l'avenir de la chasse. Les chasseurs sont les acteurs incontournables du maintien de la biodiversité et de l'équilibre du monde rural. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Pierre Grand. Quel changement d'état d'esprit !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Dans un monde qui s'urbanise et se déshumanise, ils sont, avec d'autres, les gardiens de l'identité des territoires menacés. Un monde rural sans chasseurs perdrait son intégrité. Une France sans chasse perdrait beaucoup de son âme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la ministre vous avez donc convenu avec M. Jacques Barrot, président du groupe UMP, que la niche parlementaire du 11 février, réservée à ce groupe, serait consacrée à un débat sur les orientations en matière de chasse, pour préparer l'examen des mesures législatives sur la chasse que vous présenterez prochainement au Parlement.
    Vous avez d'ailleurs, le 11 décembre 2002, installé un groupe de travail réunissant des parlementaires de la majorité, chargé de réfléchir au contenu de ces mesures. Elles doivent selon vous s'organiser autour de trois axes de travail : simplifier la pratique de la chasse et clarifier la réglementation ; aider au dialogue entre les chasseurs et leurs différents partenaires ; donner davantage de proximité aux décisions et à l'action, dans la logique du mouvement de décentralisation engagé par le Gouvernement.
    Pour évoquer de tels sujets, pour préciser ces axes, était-il utile de nous mobiliser ce matin, pendant près de trois heures ?
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. Oui !
    M. René André. Vous n'étiez pas obligé de venir !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Je ne le pense pas ; je crois plutôt que votre échec sur le dossier des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau et aux oiseaux migrateurs, ainsi que l'impatience des députés de votre majorité vous imposent cet exercice de communication,...
    M. Charles de Courson. Exercice de vérité !
    M. René André. De réparation !
    M. Jean-Paul Chanteguet. ... que je trouve quelque peu déplacé si l'on considère la gravité de la situation, sur le plan économique et social comme sur le plan international.
    M. Charles de Courson. La chasse ne vous intéresse pas ?
    M. Jean-Paul Chanteguet. Néanmoins, pour nous, il ne peut être question de déserter, de fuir ce débat. Nous avons des choses à dire, nous qui avons eu le courage de porter et de voter la loi chasse, le 28 juin 2000.
    M. Edouard Landrain. Tu parles !
    M. Charles de Courson. Ah non, pas ça !
    M. René André. Vous avez été tellement mauvais ! C'est de la provocation !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Souvenons-nous tout d'abord des engagements pris par le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, le 12 juin, quelques jours avant le deuxième tour des élections législatives, à Montauban, afin de courtiser les chasseurs, de manière très médiatique, en présence de l'épouse du Président de la République, en leur promettant d'élargir la période de tir aux oiseaux migrateurs.
    M. Yves Cochet. C'est raté !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Des engagements très appréciés par la Fédération nationale des chasseurs, qui, par la voix de son directeur, se félicita des décisions « rapides et claires » du Premier ministre.
    Mais des engagements qui provoquèrent de vives réactions, tant de défenseurs de la nature, qui évoquèrent « une belle démonstration de démagogie politicienne à la veille du second tour des élections législatives »,...
    M. Yves Cochet. C'est vrai !
    M. Jean-Paul Chanteguet. ... que de politiques, qui n'ont pas hésité à parler de « braconnage électoral ».
    Mais des engagements qui, compte tenu de leur force, ont provoqué une vraie et grande déception dans les milieux cynégétiques. Ils se sont en effet sentis trompés et floués par le Gouvernement lorsqu'ils ont pris connaissance de la décision du Conseil d'Etat du 1er août 2002 qui n'autorisait pas la chasse aux canards et aux rallidés avant le 31 août, et de celle du 18 décembre dernier interdisant la chasse au-delà du 31 janvier pour les limicoles, oies, canards, rallidés et oiseaux de passage, à l'exception des pigeons, des tourterelles et de la bécasse des bois.
    Je ne crois pas un instant que les responsables du monde cynégétique n'aient eu la naïveté de penser que vos sept arrêtés du 18 juillet 2002 pouvaient avoir une durée de vie supérieure à quelques jours pour ceux concernant les dates d'ouverture et de quelque semaines pour ceux se rapportant aux dates de fermeture.
    M. Jean-Marc Lefranc. A cause de qui ?
    M. René André. Oui ! Qui les a attaqués ?
    M. Jean-Yves Cochet. Et qui les a jugés ?
    M. Jean-Paul Chanteguet. La complicité politique entre le Gouvernement et les responsables de la Fédération nationale des chasseurs est évidente. Il suffit de se référer aux déclarations de son président, reçu le 3 juin 2002 à Matignon, qui se réjouissait à cette occasion du « soutien » apporté aux chasseurs par Jean-Pierre Raffarin et de son engagement de « redonner à la chasse ses titres de noblesse qu'on lui avait un peu enlevés ces derniers temps ».
    M. Charles de Courson. C'est un discours anti-chasse !
    M. René André. Merci de reconnaître l'engagement du Gouvernement, monsieur Chanteguet !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Même si les annulations prononcées par le Conseil d'Etat conduisirent la Fédération nationale des chasseurs à parler d'une « nouvelle et cruelle déception », nous constatons que celle-ci est prête à aider le Gouvernement à se dépêtrer du dossier de la chasse.
    J'en viens maintenant à la loi chasse, qui fut votée en lecture définitive le 28 juin 2000 et que le groupe socialiste tient à revendiquer.
    M. Jean-Claude Lemoine. Ils continuent !
    M. René André. On vous la laisse !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Faire silence sur ce texte qu'il fait sien, ce serait faire injure au rapporteur de la commission de la production et des échanges d'alors, François Patriat, à l'origine des principales dispositions de ce texte.
    M. Jean-Claude Lemoine. Les Français ont apprécié !
    M. Charles de Courson. Et ils l'ont remercié.
    M. Jean-Paul Chanteguet. En quoi la situation de 1999 nous a-t-elle convaincus de la nécessité et de l'urgence de légiférer ?
    Comme vous le savez, le droit de la chasse est un droit ancien. La loi du 3 mai 1844 opéra une véritable révolution puisqu'elle institua le permis de chasse, interdit la chasse sur terrain d'autrui et la chasse de nuit,...
    M. Charles de Courson. Pas la chasse de nuit ! Revoyez l'histoire de la chasse !
    M. Jean-Paul Chanteguet. ... autorisa la chasse uniquement pendant les périodes d'ouverture, définit les modes de chasse autorisés par le permis, interdit également la commercialisation et le transport du gibier pendant les temps de chasse prohibée.
    Ces règles d'exercice de la chasse, depuis 1844, avaient peu évolué. Les quelques réformes qui furent adoptées ensuite eurent pour objet la mise en place d'une organisation structurée de la chasse sur le territoire, avec les fédérations départementales des chasseurs et l'Office national de la chasse, la création d'outils de gestion de la ressource cynégétique, avec le plan de chasse, le renforcement du contrôle sur l'activité de chasse, notamment par la délivrance du permis, et enfin la modernisation de la garderie et l'adaptation de la police de la chasse.
    Les chasseurs, quant à eux, se sentaient menacés et étaient préoccupés par leur avenir. En effet, leur nombre, en régression régulière, était passé de 2,5 millions dans les années 80 à seulement 1,4 million.
    Comme le rappelle François Patriat dans son rapport, « ils se sont convaincus, à tort ou à raison, qu'ils étaient victimes d'une stratégie délibérée tendant à restreindre, voire supprimer leur activité : la concomitance des arrêts des cours de justice européennes de Luxembourg et de Strasbourg, de récents arrêts du Conseil d'Etat [...] ont accru le développement d'un sentiment de malaise terreau de toutes les démagogies ».
    De plus, l'accès des citadins à la campagne pour y pratiquer des activités de découverte, de loisirs, pour s'y reposer, pour échapper aux contraintes de la ville, était un véritable besoin.
    Le projet de loi sur la chasse présenté le 16 février 2000 reprenait les dispositions du rapport de François Patriat ; il visait à relégitimer la chasse au travers d'une modernisation des institutions (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) et d'une adaptation des règles de la chasse au droit européen et à l'évolution de notre société.
    Pour la première fois depuis la création du ministère de l'environnement, un projet global sur la chasse était soumis au Parlement. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. René André. Avec le succès que vous savez !
    M. Jean-Marc Lefranc. Belle réussite !
    M. Jean-Claude Lemoine. Bien mauvais projet !
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Ils n'ont toujours pas compris !
    M. Jean-Claude Chanteguet. Pendant trop longtemps, on a reporté à plus tard le règlement des problèmes, préférant le statu quo qui, au fil des ans, n'avait fait qu'envenimer les conflits.
    M. Jean-Louis Léonard. La faute à qui ?
    M. Jean-Paul Chanteguet. Personne, aujourd'hui, ne peut contester les formidables avancées inscrites dans cette loi : la légalisation de la chasse de nuit dans vingt et un départements et celle de la chasse à la passée, l'instauration d'un jour de non-chasse, qui doit permettre un accès partagé aux espaces naturels et ruraux entre tous les usagers de la nature (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle),...
    M. Charles de Courson. Surtout le mercredi !
    M. Jean-Paul Chanteguet. ... la mise en place d'un « permis de chasser accompagné » ; la reconnaissance du droit de non-chasse ; la définition de l'acte de chasse ; l'élargissement des missions de l'Office national de la chasse et des fédérations départementales ; la redéfinition, enfin, de la place de la chasse dans la gestion des espaces naturels et des espèces sauvages.
    Oublier, comme beaucoup le font actuellement, de rappeler ces nouvelles dispositions est particulièrement injuste et réducteur, car il suffit de relire les débats qui ont eu lieu lors de l'examen de ce texte pour se rendre compte que nombre de demandes émises par les députés de l'opposition d'alors sont inscrites dans cette loi.
    Madame la ministre, votre position n'est pas facile : vos marges de manoeuvre sont limitées, entre une majorité qui attend que vous teniez les engagements pris par Jean-Pierre Raffarin, une Fédération nationale des chasseurs dont les revendications sont nombreuses, et la nécessité d'appliquer les directives européennes et les décisions du Conseil d'Etat.
    J'ai eu par hasard entre les mains un courrier du 31 octobre 2002 qui vous était adressé par le président de la Fédération nationale. Sa lecture attentive est riche d'enseignements : cela va de considérations sur le passé - par exemple : « nous sortons de cinq longues années de harcèlement législatif et réglementaire de la part de vos prédécesseurs à ce ministère » -...
    M. Edouard Landrain. Eh oui !
    M. René André. C'est vrai !
    M. Jean-Paul Chanteguet. ... à des attaques inopportunes comme : « je ne suis pas sûr que vous y parveniez en vous reposant dans vos services sur des héritiers du passé » ou des recommandations du style : « il faut dépolitiser ce dossier en soldant l'héritage vert et les hommes qui le perpétuent », ou encore : « supprimer les moyens et le fonds médiatique des opposants à la chasse ».
    M. René André. Analyse très juste !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Après la chasse à courre, je constate que M. le président de la Fédération nationale des chasseurs pratique la chasse aux sorcières !
    M. Yves Cochet. Voilà !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Face à de telles attaques, madame la ministre, il serait utile que vous fassiez connaître à la représentation nationale votre position, votre réaction. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. René André. Elle vient de le faire ! Vous n'avez pas écouté !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Pour les dates de la chasse au gibier d'eau et aux oiseaux migrateurs, il est urgent de sortir de cette guérilla juridique qui s'est traduite, depuis plus de vingt ans, par l'annulation par le Conseil d'Etat de plus de soixante arrêtés portant sur les dates d'ouverture et l'annulation par les tribunaux administratifs de quelque cent soixante arrêtés préfectoraux.
    M. Yves Cochet. Eh oui !
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est pourquoi, il est plus que nécessaire de revenir au schéma précédemment retenu, qui prévoyait que cette chasse n'était autorisée qu'entre le 1er septembre et le 31 janvier...
    M. Yves Cochet. Voilà !
    M. Jean-Paul Chanteguet. ... mais donnait la possibilité d'accorder des dérogations avant et après pour les espèces en bon état de conservation. On peut, madame la ministre, à ce sujet, se féliciter de la mise en place de l'Observatoire national de la faune sauvage et de ses habitats par un décret du 17 juillet 2002, un tel pôle d'expertise devant permettre l'adaptation du calendrier français à l'état effectivement constaté des espèces. J'avais le sentiment que la saison de chasse 2001-2002 s'était plutôt bien passée et que l'on allait vers un apaisement. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.). Les promesses électorales de Jean-Pierre Raffarin ont détuit le fragile équilibre qui était apparu. Il vous revient maintenant la responsabilité de retrouver le chemin d'une chasse apaisée. Pour notre part, nous redisons notre attachement aux dispositions contenues dans la loi chasse, qui est une loi équilibrée.
    M. Edouard Landrain. Tu parles !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Nous demandons, pour le jour de non-chasse, qu'il soit possible à l'autorité administrative de fixer, au regard des circonstances locales, après avis du conseil départemental de la chasse, un autre jour que le mercredi.
    M. Edouard Landrain. Il fallait le faire vous-même !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Nous souhaitons enfin que les problèmes de sécurité liés à toute action de chasse, en particulier lorsqu'il est recouru au tir à balles, fassent l'objet de mesures nouvelles.
    Pour conclure, madame la ministre, je voudrais revenir sur votre décision du 6 février de prolonger, au travers de deux arrêtés, la chasse à la grive jusqu'au 16 février et celle à l'oie cendrée jusqu'au 28 février, alors que vous saviez très bien que ces arrêtés seraient suspendus par le Conseil d'Etat, immédiatement saisi par des associations de protection de la nature. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Louis Léonard. Eh oui !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Cette décision traduit bien non seulement votre incapacité à faire face au problème des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier et aux oiseaux migrateurs, mais aussi une forme d'inconséquence. Ce n'est pas la marque d'une erreur ; c'est une faute politique. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Yves Cochet. Absolument !
    M. René André. Vous êtes un connaisseur en la matière !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Je crains, malheureusement, que vous n'ayez pas compris que, pour traiter ce dossier, c'est de courage qu'il faut faire preuve...
    M. Edouard Landrain. Ayez-en vous-mêmes un peu !
    M. Jean-Paul Chanteguet. ... et non pas de démagogie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « activité aussi vieille que l'humanité elle-même, la chasse fait partie de l'héritage culturel de toute société. Elle fut, dans l'exercice de son droit, une conquête de la Révolution française et elle reste aujourd'hui un facteur important de cohésion sociale dans le monde rural ».
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est vrai !
    M. Charles de Courson. « Ceux qui ne connaissent pas l'ambiance des sociétés de chasse communales ne savent pas que c'est l'un des loisirs les plus populaires dans le monde rural. »
    Mme Christine Boutin. C'est vrai !
    M. Charles de Courson. « Sans doute y a-t-il certains citadins, ou plus exactement certains tenants de l'intégrisme écologique, pour lesquels la chasse est une hérésie, une pratique d'un autre âge qui n'a plus lieu d'exister. »
    M. Yves Cochet. Ce n'est pas ce que nous disons !
    M. Charles de Courson. « Mais il y a surtout en face d'eux plusieurs millions de Français qui défendent leur pratique et qui ont le sentiment qu'en s'attaquant à la chasse, c'est en fait à leur culture et à leurs valeurs que l'on s'en prend. Il faut avoir contemplé un vol de canards au crépuscule venant se poser sur un étang dans le soleil couchant,...
    M. René André. Bravo !
    M. Charles de Courson. « ... il faut avoir entendu les légers craquements d'un chevreuil dans les bois... »
    M. Jean-Pierre Dufau. Le soir au fond des bois !
    M. Charles de Courson. « ... et les battements de son coeur à son approche, pour comprendre l'attachement viscéral de centaines de milliers de personnes à la chasse. »
    M. Jean-Pierre Dufau et M. Jean-Paul Chanteguet. On a déjà entendu ça !
    M. Charles de Courson. « Dans une société devenue majoritairement urbaine, les pratiques des chasseurs sont souvent mal connues, et les idées fausses savamment entretenues et exploitées par leurs détracteurs abondent.
    « Il nous faut aujourd'hui, mes chers collègues, enterrer ces vieux clivages afin que la chasse trouve une nouvelle place dans notre société et s'affirme comme une activité de gestion harmonieuse de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. »
    Telle était l'introduction du discours que j'ai prononcé le 28 mars 2000 au nom du groupe UDF (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...
    M. Pascal Terrasse. Je me disais bien, aussi !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Nous avons bonne mémoire !
    M. Edouard Landrain. Ils s'en souvenaient !
    M. Charles de Courson. ... et auquel je n'ai pas un mot à retirer. Je voudrais tout d'abord, au nom de mon groupe, remercier le groupe UMP, qui a mis à notre disposition sa séance d'initiative parlementaire pour que nous ayons ce matin un débat sur la chasse.
    M. Jean-Pierre Dufau. Et cet après-midi sur les élections régionales !
    M. Charles de Courson. Il était plus que temps de reparler dans cet hémicycle de la chasse et des quelque 1,5 million de chasseurs français que la précédente majorité est parvenue a dresser contre elle sans apaiser les tensions existantes. Nous sommes donc sur le point de rouvrir le dossier législatif de la chasse.
    M. Yves Cochet. Je crie : danger !
    M. Charles de Courson. Mme la ministre nous a en effet promis un volet chasse dans le projet de loi d'orientation sur le développement rural ainsi que dans l'ordonnance relative à la simplification administrative. Nous ne pouvons que l'encourager et la soutenir dans cette voie,...
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est vrai !
    M. Charles de Courson. ... car nous sommes nombreux, députés de la majorité, à avoir pris, lors de la campagne des législatives, des engagements précis sur ce sujet.
    M. Yves Cochet. Il faut pouvoir les tenir !
    M. Charles de Courson. Là aussi, il s'agit maintenant de tenir les promesses. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Louis Léonard. On les tiendra !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Bon courage !
    M. Charles de Courson. Vous le savez, madame la ministre, la majorité attend beaucoup du Gouvernement. Si la gauche a été sévèrement sanctionnée lors des dernières élections, c'est aussi pour sa politique en matière de chasse. Vincent Peillon ne fut-il pas la victime expiatoire d'une gauche plurielle dont une partie n'a rien compris non seulement aux chasseurs, mais surtout à l'expression profonde de la réalité qu'est la chasse ?
    M. Alain Vidalies. Ce n'est pas forcément un bon exemple quand on parle de sécurité !
    M. Charles de Courson. J'avais pourtant averti à l'époque les représentants de la gauche dite plurielle. La trahison de vos électeurs et la compromission avec vos partenaires verts finissent toujours par se payer en politique.
    M. Edouard Landrain. Eh oui !
    M. Jean-Pierre Dufau. Et vous, votre compromission avec l'UMP ?
    M. Charles de Courson. Les électeurs ont jugé. Quant à vos partenaires verts, je vous laisse juges du bénéfice de vos concessions. Ils ont repris leur indépendance ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Mes chers collègues, M. de Courson a la parole et lui seul !
    M. Alain Vidalies. Il nous agresse, monsieur le président !
    M. Yves Cochet. Cet après-midi, l'UDF sera compromise avec la gauche !
    M. le président. Monsieur Cochet, vous aurez la parole tout à l'heure !
    M. Charles de Courson. C'est ce contresens historique qu'il nous faut corriger aujourd'hui afin d'enterrer les clivages caricaturaux qui ont opposé urbains et ruraux, « écolos » intégristes et chasseurs, souveraineté nationale et compétence européenne. La chasse n'est un enjeu politique que pour ceux qui la combattent avec une haine aveugle, comme notre collègue Mamère.
    M. Alain Vidalies. Il est absent ! C'est petit !
    M. Charles de Courson. Pour nous, elle est une évidence historique qui nécessite de la part du législateur une adaptation à la modernité. Elle joue un rôle essentiel dans la gestion par l'homme de la faune sauvage, parce qu'elle obéit à des règles de prélèvement et parce qu'elle permet de prévenir et de réduire les dommages que les grands animaux peuvent causer aux activités agricoles ou à la sécurité de l'homme, en matière notamment de circulation routière. Elle contribue à l'équilibre de notre écosystème, ce qui oblige ses détracteurs à lui reconnaître un rôle environnemental majeur.
    Je voudrais aborder, dans un premier temps, ce qui a trait à l'organisation de la chasse et à la vie concrète des chasseurs.
    En ce qui concerne les institutions cynégétiques, madame la ministre, il faut donner aux fédérations départementales de chasseurs un véritable statut associatif. Finissons-en avec cette suspicion permanente ! Faisons confiance aux chasseurs en leur laissant la possibilité d'élire librement et dans de bonnes conditions leurs représentants, comme vous venez de l'annoncer. La jurisprudence constitutionnelle de 2000 doit prévaloir sur la législation héritée de Vichy,...
    M. Jean-Pierre Dufau. Pas d'amalgame !
    M. Charles de Courson. ... que défendait le rapporteur socialiste de la loi chasse. Celui-ci était allé jusqu'à nous menacer en commission en disant : « Il faut maintenir la désignation des présidents des fédérations de chasse par l'Etat. » Je lui avais alors répondu : « Monsieur Patriat, vous êtes un vichyssois. » Et il a fallu l'alliance de l'opposition et du groupe communiste pour battre M. Patriat en commission. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Pierre Ducout. C'est faux !
    M. Charles de Courson. Il en est de même d'ailleurs de la mesure scélérate proposée par l'un de nos collègues socialistes qui voulait empêcher les députés européens et les députés et sénateurs d'être présidents de fédération. C'était une mesure attentatoire aux libertés publiques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Moderniser la chasse, c'est aller vers plus de responsabilité. Ainsi faudra-t-il supprimer les contrôles a priori - vous l'avez annoncé dans votre discours, madame la ministre -, y compris le contrôle économique et financier sur les budgets des fédérations, tout en maintenant le contrôle a posteriori. Il faudra également revenir à une composition équilibrée de l'ONCFS - vous n'en avez pas parlé dans votre discours -, qui doit rester une structure publique de gestion de la chasse au lieu de devenir un office banalisé de protection de l'environnement, comme ce fut le cas sous le précédent gouvernement. C'est pourquoi les chasseurs doivent redevenir majoritaires dans son conseil d'administration.
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est vrai !
    M. Charles de Courson. Par ailleurs, son financement ne doit pas être assuré exclusivement par les cotisations des chasseurs. Sur ce point, madame la ministre, vous allez dans la bonne direction.
    Il convient en outre de distinguer la protection des espèces non chassables, dont le financement doit relever d'une subvention de l'Etat, de la protection des espèces chassables, dont le financement relève de la contribution des chasseurs. La chasse a tout à gagner à s'exprimer dans la démocratie, car la preuve sera ainsi apportée que les comportements responsables y sont dominants. Il faut donc faire sauter le premier obstacle et recréer ainsi les conditions d'une véritable transparence institutionnelle en renforçant la gestion cynégétique de proximité aux dépens d'une vision technocratique et idéologique des pratiques de chasse.
    Sur le sujet central des dates de chasse, notre position est connue, madame la ministre, et elle est partagée par un grand nombre d'élus. Nous souhaitons que soit enfin appliqué l'article 1er de la loi chasse, issu d'un amendement de M. Giscard d'Estaing et de moi-même, adopté, je le rappelle, à l'unanimité de l'Assemblée nationale (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste),...
    M. Alain Vidalies. Quel esprit d'ouverture !
    M. Charles de Courson. ... et qui permet de distinguer, en application du principe de subsidiarité, les domaines de compétence nationale et ceux de compétence communautaire. Ainsi ce fameux article 1er précise-t-il que la loi nationale fixe l'ensemble des règles et obligations qui s'appliquent à l'exercice de la chasse aux mammifères et aux oiseaux non migrateurs, et que le droit communautaire définit les principes que doit respecter la loi nationale quant à la fixation des règles et des obligations qui s'appliquent à la chasse aux oiseaux migrateurs. Comme je l'indiquais mercredi dernier dans une question d'actualité, le gouvernement précédent n'a jamais mis en oeuvre cet article,...
    M. Edouard Landrain. Il s'en foutait !
    M. Charles de Courson ... faute d'avoir déposé un rapport sur ses initiatives européennes dans le délai fixé par la loi, soit avant septembre 2000. Votre gouvernement, chers collègues de l'opposition, n'a même pas appliqué ce texte adopté à l'unanimité ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Vidalies. Oh le vilain !
    M. Charles de Courson. Le groupe UDF, que vous savez résolument favorable à la construction européenne, madame la ministre, souhaite voir enfin se concrétiser l'application du principe de subsidiarité dans le domaine de la chasse : faire relever de la réglementation nationale les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier et aux oiseaux non migrateurs afin que cessent les contentieux devant les juridictions entre la France et l'Union européenne. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Pour les gibiers et oiseaux migrateurs, l'Union européenne se contenterait de fixer les principes des dates de chasse. Ne détournons pas inutilement nos concitoyens de l'Europe alors qu'un juste retour à l'esprit des traités suffirait à lever tous les obstacles entre le droit communautaire et le droit national !
    Dans nos travaux législatifs, il nous faudra également reprendre la question du mercredi sans chasse. Je voudrais rappeler à mes collègues de gauche que ce n'est pas l'opposition qui a décidé cela. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Vidalies. Mais si !
    M. Charles de Courson. C'est le Conseil constitutionnel ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Vidalies. Vous n'aviez qu'à ne pas le saisir !
    M. Charles de Courson. Alors, ne dites pas le contraire et cessez d'attaquer les juridictions ! Ce n'est pas une attitude républicaine ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    M. Richard Mallié. Tout à fait !
    M. Charles de Courson. Je vous propose d'agir en ce domaine, madame la ministre, dans l'esprit de déconcentration que vous avez évoqué dans votre discours.
    M. Alain Vidalies. Vous avez mauvaise conscience !
    M. Charles de Courson. Donnez aux préfets la possibilité d'arrêter le ou les jours de non-chasse, sur proposition des fédérations départementales des chasseurs, avec la possibilité de fixer des jours différents selon les secteurs du département. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) La proximité de ces décisions fera que, sur le terrain, les droits des uns et la passion des autres seront également respectés.
    L'Observatoire de la chasse et de la faune sauvage doit être opérationnel très rapidement. Vous vous y êtes engagée, madame la ministre puisque vous avez publié l'arrêté hier. Il doit disposer de données scientifiques incontestables. On ne peut pas continuer à discuter des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse, avec des scientifiques dont certains disent que la population des bécassines régresse alors que d'autres prétendent qu'elle augmente.
    S'agissant de la simplification du permis de chasser, nous avons du pain sur la planche pour mettre en place le « guichet unique » - vous en avez parlé dans votre intervention.
    J'en viens à un sujet qui nous a occupés pendant des heures lors de l'examen de la loi sur la chasse, le problème de la compatibilité entre le droit de non-chasse et la loi Verdeil.
    M. Yves Cochet. Très bien !
    M. Charles de Courson. Il convient d'articuler les deux problèmes. La solution que nous avions proposée à votre prédécesseur, madame la ministre, lequel n'en a tenu aucun compte, consistait à préciser dans la loi que les parcelles sur lesquelles le droit de non-chasse est exercé doivent être regroupées sur un secteur de non-chasse par voie conventionnelle ou, à défaut d'accord conventionnel, par une décision administrative du préfet, afin d'éviter que le droit de non-chasse s'exerce au détriment du droit de chasse. En effet, si un massif forestier comporte de nombreuses petites parcelles et que deux ou trois propriétaires utilisent le droit de non-chasse, ils empêcheront les autres de chasser, ce qui n'est pas respectueux du droit des autres.
    M. Alain Vidalies. Et le droit de propriété ?
    M. Charles de Courson. A l'époque, la ministre, Mme Voynet, avait dit : « Ils n'ont qu'à s'entendre ! ». Je lui avais répondu que, lorsque les gens s'entendaient, tout allait bien et qu'il n'y avait pas besoin de loi. Celle-ci est justement faite pour trancher lorsqu'il y a désaccord.
    Madame la ministre, pour conclure, je dirai que le groupe UDF, lui, n'a pas changé son fusil d'épaule.
    M. Maxime Gremetz. Non : il est toujours à droite !
    M. Charles de Courson. Nous voulons restaurer un climat de confiance au niveau national comme au niveau européen, redonner à l'Etat son rôle d'arbitre impartial à l'échelle nationale et reconnaître aux associations sur le terrain et aux fédérations le statut de véritables partenaires dans le cadre d'une gestion contractuelle de l'espace rural. Le temps de la réconciliation est enfin venu. Pour atteindre ces objectifs qui sont également, je n'en doute pas, les vôtres, vous pouvez compter sur le soutien du groupe UDF et apparentés.
    M. Alain Vidalies. Et la discussion sur les dates de chasse ?
    M. Charles de Courson. En un mot, madame la ministre, aimez les chasseurs et ils vous le rendront au centuple ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie fraçaise et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Madame la ministre, j'ai quelque scrupule à dire ce que je pense, car vous avez la voix cassée. Cela dit, entre nous les relations sont toujours très franches, pour ne pas dire amicales. Permettez-moi donc de me réjouir de voir le Gouvernement et la majorité parlementaire sortir du bois et s'intéresser enfin à la chasse et aux chasseurs. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Claude Lemoine. Quel culot !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Laissons-les quand même s'épancher un peu !
    Symbolique est la tenue de ce débat au lendemain de l'annulation de l'arrêté permettant, par dérogation, de chasser l'oie cendrée dans le nord de la France et la grive dans le sud. L'arrêt rendu par le Conseil d'Etat s'appuie - cela ne saurait vous surprendre - sur l'interprétation de la directive 79-409 de la Commission européenne. Tout le monde savait que cet arrêté serait annulé. Il est trop facile de dire qu'on a fait tout son possible, puis de rejeter la responsabilité sur le Conseil d'Etat. Cela dit, il ne faudrait pas jouer trop longtemps à ce jeu-là avec les chasseurs.
    M. Jean-Claude Lemoine. Il vaut mieux s'abstenir pour être tranquille !
    M. Maxime Gremetz. Tout cela confirme que les mesurettes faites de bric et de broc ne peuvent régler durablement le grand problème d'une chasse populaire réglementée et apaisée.
    M. Pierre Ducout. Très bien !
    M. Maxime Gremetz. Cela conforte l'idée selon laquelle il faut évaluer le problème dans toute son ampleur et légiférer sur la base de données scientifiques incontestables.
    M. Jean-Claude Lemoine. Nous sommes d'accord !
    M. Maxime Gremetz. Nous estimons donc qu'il faut ouvrir un débat soutenu et sérieux avec la Commission de Bruxelles sur le contenu et l'interprétation de cette directive « Oiseaux », qui avait été proposée par la France, je le rappelle, messieurs, car vous semblez l'oublier - n'ayons pas la mémoire courte ! - et votée par les parlementaires européens français de droite et socialistes. Seul, avec les députés européens communistes, j'ai voté contre, vous pouvez vérifier ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Claude Lemoine. Ensuite, vous vous êtes abstenu !
    M. le président. N'interrompez pas M. Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. La directive 79-409, monsieur Lemoine, c'est Giscard d'Estaing qui l'a proposée ! Et qui a voté pour ? Vous étiez tous là, pas nous ! C'est vrai ou non ?
    M. Richard Mallié. Je n'y étais pas !
    M. Maxime Gremetz. Si ce n'est toi, c'est donc ton frère de droite ! (Rires.) C'est pareil ! Un petit rappel historique ne nuit jamais, d'autant que certains « révolutionnaires » de la chasse s'évertuent à faire oublier leur vote. Madame la ministre, si je me souviens bien, la seule et unique action du Gouvernement a été, il y a huit mois, une belle déclaration d'amour du Premier ministre aux chasseurs. C'était entre le premier et le second tour des élections législatives...
    M. David Habib. Comme par hasard !
    M. Maxime Gremetz. ... et il fallait tout mettre en oeuvre pour séduire l'électorat des chasseurs. Depuis, ceux-ci sont allés, me disent-ils, de déconvenue en déconvenue et, dans de nombreux départements côtiers, ils n'ont jamais aussi peu chassé que cette saison - j'y insiste.
    M. Pierre Ducout. C'est vrai, hélas !
    M. Maxime Gremetz. Avec la ministre actuelle, disent-ils, la situation est bien souvent pire que du temps des ministres Verts, Mme Voynet et M. Cochet. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Pierre Ducout et M. David Habib. Eh oui !
    M. Alain Gest. Je savais bien que vous les regrettiez !
    M. Maxime Gremetz. C'est un comble, vous en conviendrez.
    Le constat n'est pas très glorieux pour ce gouvernement de droite, qui préfère la communication à l'action. Je découvre pourtant, dans les annonces de Mme la ministre, la volonté de s'intéresser au dossier de la chasse. Mais quel temps perdu pour comprendre que cet acquis de la Révolution française mérite plus que de simples déclarations d'intention !
    M. Guy Teissier. Vous n'étiez pas là, à l'époque...
    M. Maxime Gremetz. Avant la Révolution française, il n'y avait que les seigneurs qui chassaient.
    M. Guy Teissier. Ce n'est pas vrai !
    M. le président. Monsieur Teissier, n'interrompez pas Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. La « pègre », comme nous, ne chassait pas. C'était un droit, un privilège, faut-il vous le rappeler ? Je sais bien que tout le monde n'est pas satisfait par l'abolition des privilèges...
    M. Guy Teissier. En Union soviétique, par exemple ?
    M. Maxime Gremetz. Restez en France, s'il vous plaît : ça suffit ! Je succède à Jean Catelas, député guillotiné par Vichy sur ordre des nazis. Et vous, où étiez-vous ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Guy Teissier. J'étais dans l'oeuf !
    M. Maxime Gremetz. Alors, arrêtez, s'il vous plaît !
    M. le président. Monsieur Gremetz, poursuivez. Monsieur Teissier, n'interrompez pas M. Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Pas ça !
    M. Guy Teissier. Vous êtes un stalinien. Honte à vous !
    M. le président. Monsieur Teissier, laisser s'exprimer M. Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Vous entendez ce qu'il dit ? Honte à vous, monsieur, qui étiez dans la collaboration avec vos amis !
    Mme Christine Boutin. Et la chasse ?
    M. Maxime Gremetz. Arrêtez !
    M. le président. Monsieur Gremetz, mes chers collègues, pas de dérapage. Nous en sommes à la chasse : restons-y !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas moi qui ai reçu M. Poutine.
    M. Joël Hart. Assez de provocations ! Revenons à la chasse.
    M.Maxime Gremetz. D'ailleurs, je ne l'aurais jamais reçu...
    M. Alain Gest. Cela ne risque pas d'arriver !
    M. le président. Mes chers collègues, veuillez laisser parler M. Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Et vous me décompterez le temps qu'ils m'ont fait perdre.
    M. le président. Vous savez bien que je contrôle très strictement.
    Mme Christine Boutin. Parlez-nous plutôt de la chasse, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Au-delà de ce constat qui n'est pas très glorieux, je remarque qu'on s'intéresse au dossier de la chasse. Quel temps perdu, je le répète ! La chasse est une activité démocratique et populaire, qui concerne des centaines de milliers de femmes et d'hommes, dont c'est souvent le seul loisir lorsqu'ils sortent de l'usine ou lorsqu'ils sont au chômage. Je sais de quoi je parle : dans la Somme - et je suis né dans la baie de Somme - comme ailleurs, la situation des salariés ne fait que se dégrader, notamment depuis que la loi de modernisation sociale a été immolée sur l'autel du profit.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Quel rapport avec la chasse !
    M. Maxime Gremetz. Voulez-vous les chiffres, que vient de me donner le directeur de l'ANPE ? N'en rajoutez pas ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) J'ai des fiches. Je peux les sortir, si vous voulez (« Oui » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle)...
    Avec ses fédérations départementales et près de 70 000 associations locales, le monde de la chasse a une organisation associative unique en Europe, considérée à juste titre comme un modèle d'autogestion réussie et d'autoréglementation. Vous cherchez à simplifier le système associatif. Ce système me convient parfaitement mais ce qui me déplaît particulièrement, c'est que vous annonciez que la plupart des mesures seront prises par ordonnance.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Mais non ! Je n'ai pas dit cela !
    M. Maxime Gremetz. Madame la ministre, vous avez le droit de me démentir. C'est en tout cas ce que j'ai lu. Et des représentants de chasseurs me l'ont dit.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Vous ne comprenez rien !
    M. Maxime Gremetz. Donc vous démentez ? J'en prends acte.
    Je n'accepte pas les ordonnances. Si, d'un côté, la Commission de Bruxelles rogne sur les pouvoirs de l'Assemblée nationale et que, de l'autre, le Gouvernement gère par ordonnances et par décrets, vous voyez ce que ça va donner !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Inutile d'argumenter : ce n'est pas vrai !
    M. Maxime Gremetz. Je n'insiste pas : j'en prends acte.
    M. Charles de Courson. La gauche : 52 ordonnances !
    M. Maxime Gremetz. Je ne fais pas de faux procès. J'aurais pu me demander si vous aviez peur du débat démocratique. Je ne le pense pas, votre groupe parlementaire ayant une majorité écrasante dans cette enceinte comme au Sénat.
    M. Guy Teissier. C'est la démocratie !
    M. Maxime Gremetz. Mais nous sommes en droit de nous interroger depuis neuf mois : pourquoi attendre pour présenter un projet de loi digne de ce nom ? Voilà des mois que j'entends parler d'un volet « chasse » dans le projet sur les affaires rurales. Mais ce projet est sans cesse renvoyé aux calendes grecques. Quant aux quatre heures de débat de ce matin, à quoi vont-elles servir ?
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. A vous entendre !
    M. Maxime Gremetz. Moi qui suis un parlementaire assez ancien, je ne me souviens pas qu'une niche parlementaire ait jamais été utilisée par un groupe sans qu'il y ait de texte à débattre !
    M. Charles de Courson. C'est une innovation !
    M. Maxime Gremetz. Grande innovation démocratique ! Il n'y a pas de texte à examiner, pas de vote à émettre ! Donc causons, causons, causons et re-causons. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Vous, vous causez pour rien !
    M. Maxime Gremetz. Eh bien, les chasseurs vont être contents. Vous allez voir, en baie de Somme. Le vent, ils connaissent. Mais ce n'est pas du vent qu'ils veulent.
    M. le président. Poursuivez, monsieur Gremetz, le temps s'écoule.
    M. Maxime Gremetz. Nous devons mettre au vote tout ou partie de la proposition de loi que j'ai déposée avec le groupe communiste il y a déjà plusieurs mois. Même si vous ne partagez pas toutes les mesures préconisées, certains articles font l'unanimité.
    M. Yves Cochet. Lesquels ?
    M. Maxime Gremetz. Par exemple, nous proposons d'intégrer le calendrier des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs dans un cadre législatif, seul susceptible, l'expérience le montre, de mettre un terme aux contentieux.
    M. Yves Cochet. Mettre les dates dans la loi ?
    M. Maxime Gremetz. Oui, monsieur Cochet. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Et c'est bien dommage que vous n'ayez pas accepté de le faire. (Rires sur les mêmes bancs.)
    Deuxièmement, nous proposons de reprendre immédiatement les négociations avec Bruxelles, pour aboutir à une interprétation sérieuse de la directive 79-409 sur les oiseaux sauvages.
    Troisièmement, nous proposons de supprimer le mercredi comme jour de non-chasse. Les préfets, les associations, les chasseurs et associations de protection de la nature sont suffisamment responsables pour définir des jours de non-chasse adaptés dans chaque département. Pourquoi instituer un jour de non-chasse pour le gibier d'eau, qui se chasse la nuit ? C'est risible !
    M. Yves Cochet. Le mercredi a vingt-quatre heures !
    M. Maxime Gremetz. Quatrièmement, enfin, il convient de pérenniser dans la loi la chasse de nuit. Vous semblez oublier que c'est la première fois depuis la Révolution française qu'on a inscrit dans la loi le droit à la chasse de nuit au gibier d'eau.
    M. Pierre Ducout. Absolument !
    M. Charles de Courson. C'est un droit coutumier !
    M. Maxime Gremetz. C'était une tolérance et ce n'était pas prévu dans la loi. On l'a reprise pour cinq ans, mais je pense qu'il faut la pérenniser.
    A ces propositions, j'en joindrai une autre : celle consistant à créer un secrétariat d'Etat à la chasse, secrétariat de plein exercice, placé sous l'autorité directe du Premier ministre. En effet, l'expérience prouve que les négociations avec Bruxelles sont difficiles et que les problèmes liés à la chasse sont très compliqués. Il serait bon qu'on ait un interlocuteur direct, qui s'y consacre entièrement.
    Je ne voudrais pas vous donner de conseils, madame la ministre, je m'en garderais bien. Mais va-t-on continuer à ne rien décider, au lendemain de l'abrogation de ces arrêtés par le Conseil d'Etat ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. De leur « suspension » !
    M. Maxime Gremetz. Vous auriez mieux fait de tenir une conférence de presse pour annoncer vos intentions, puisqu'il n'y a rien à voir, rien à discuter, rien à décider ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Quant à l'UMP, elle aurait mieux fait d'utiliser cette niche parlementaire pour faire voter des mesures concrètes qui auraient intéressé les 1 400 000 chasseurs de France.
    Cette politique doit désespérer toutes celles et ceux qui ont été abusés par les déclarations mensongères de M. Raffarin à la veille du second tour des législatives. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Il faut appeler un chat un chat ! Quand c'est bien, je le dis, quand ce n'est pas bien, je le dis aussi.
    M. Guy Teissier. Quelle élégance !
    M. Maxime Gremetz. Je dis ce que je pense. Faites comme moi !
    M. Philippe Vuilque. Tu as raison, Maxime !
    M. Maxime Gremetz. Ne jouez pas comme ça !
    Amédée de Courson dit qu'il n'a pas changé son fusil d'épaule, tout en se réjouissant que rien ne soit décidé au cours de ce débat. Moi non plus, je ne change pas mon fusil d'épaule : je continue à dire aujourd'hui ce que je n'ai cessé de répéter à la majorité hier. Au moins, je suis cohérent !
    M. le président. Il vous faut vraiment conclure, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je vais le faire, monsieur le président, mais tenez compte de toutes les interruptions !
    M. le président. Tout est décompté, monsieur Gremetz : ne vous laissez pas déstabiliser !
    M. Maxime Gremetz. Pas du tout, j'ai commencé à dix-huit !
    M. le président. Poursuivez.
    M. Maxime Gremetz. Agir ainsi est d'autant plus regrettable que la chasse ne devrait plus être un enjeu politique. Cela conduit inéluctablement à une impasse, comme les dernières élections l'ont démontré.
    M. Jean-Claude Lemoine. Il ne fallait pas s'abstenir !
    M. Maxime Gremetz. La diversité politique au sein du groupe « chasse » de l'Assemblée nationale, fort de ses 202 membres, prouve bien que, malgré l'absence de députés CPNT au Parlement, la chasse y est bien représentée.
    Chacun d'entre nous sait bien que la chasse est à la fois une passion et un véritable mode de gestion de la nature. Elle permet à des dizaines de milliers de bénévoles de contribuer quotidiennement à la protection de la nature. Elle représente aussi un formidable atout pour le développement durable de nos campagnes, avec plus de 28 000 emplois et près de 2,5 milliards d'euros par an. C'est toute cette richesse et cette diversité de nos terroirs que l'on défend lorsqu'on souhaite une chasse légitime, légitimée et apaisée.
    Madame la ministre, j'espère que vous allez sérieusement prendre ce dossier car la prochaine saison de chasse arrive vite, dans six mois. Vous avez pris des engagements qui ne seront pas faciles à tenir. Je me contenterai de quelques exemples qui concernent les oiseaux migrateurs.
    L'Observatoire national de la faune sauvage créé le 17 juillet devrait permettre de préparer la prochaine saison, grâce à des études nouvelles. Or, selon mes informations, il vous a fallu six mois pour rédiger l'arrêté concernant la composition de l'Observatoire, et le premier programme d'études ne sera pas lancé avant plusieurs semaines. Quelle inconscience d'avoir laissé dormir ce dossier, alors que, à défaut de connaissances scientifiques nouvelles, la chasse au canard ouvrira seulement le 1er septembre et fermera le 31 janvier. Six mois pour choisir une poignée d'experts scientifiques : je laisse mes collègues juger de la volonté du Gouvernement de régler les problèmes de la chasse. Sur le même sujet, chacun sait que nous devons engager des négociations permanentes avec la Commission européenne si l'on veut modifier la directive « oiseaux », ou au moins en faciliter l'interprétation.
    J'apprends que le « M. chasse » du Premier ministre ne participe même pas au déplacement de vos collaborateurs à Bruxelles ! De deux choses l'une : ou vous avez la volonté politique d'aboutir à une solution acceptable pour les chasseurs, et vous mobilisez toutes vos forces ; sept jours sur sept, pour obtenir un résultat, ou vous ne cherchez qu'à gagner du temps. Dans ce cas, je vous recommande de confier le dossier « chasse » au Premier ministre ou, mieux, au ministre de l'agriculture qui passe les trois quarts de son temps à Bruxelles.
    Ces deux exemples, parmi des dizaines, montrent que la chasse mérite plus qu'un débat sans vote ou une longue liste d'ordonnances sans débat. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Les chasseurs de France attendent de vous autre chose que de belles déclarations qui sont très souvent contredites par les faits ou par l'absence d'action.
    Madame la ministre, j'ai formulé le contenu de nos propositions. Elles correspondent à ce que pensent nombre de députés de tous les groupes de cette assemblée. Elles correspondent aux fortes attentes des chasseurs et de tous ceux qui ont la passion de la nature, de la régulation des espèces et des espaces.
    Evidemment, nous ne pouvons les adopter toutes en quatre heures,...
    M. le président. Merci de conclure, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. ... mais nous sommes placés devant nos responsabilités. Il faut, c'est ma conviction profonde, adresser un signe fort aux chasseurs, qui sont - et je parle plus particulièrement pour la baie de Somme - très en colère.
    Acceptez donc, chers collègues de la majorité, devant cette nouvelle impasse, que l'Assemblée nationale se prononce au moins sur une mesure, une seule, mais hautement symbolique : celle de la suppression du mercredi comme jour de non-chasse.
    Voilà, mes chers collègues, ce que j'entendais vous dire.
    M. François-Michel Gonnot. La gauche n'applaudit pas beaucoup !
    M. Maxime Gremetz. Je n'ai pas besoin d'applaudissements : vous m'avez approuvé tout le temps !
    M. le président. La parole est à M. Philippe de Villiers.
    M. Philippe de Villiers. Depuis le mois de juin 2002, les chasseurs attendent. Ils attendent avec impatience que le Gouvernement tienne les promesses électorales qui leur ont été faites,...
    M. Yves Cochet. Impossible !
    M. Philippe de Villiers. ... que les déclarations solennelles du Premier ministre, qui avait affirmé la nécessité de légitimer la chasse française, soient suivies d'effet et qu'on en finisse avec cinq longues années de harcèlement réglementaire.
    Aujourd'hui, le monde de la chasse attend de la nouvelle majorité un changement radical de méthode, d'une part, des résultats concrets et rapides, d'autre part. Sinon, les déclarations énamourées de la nouvelle majorité sur la chasse et les chasseurs frôleraient très vite le ridicule. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) 1,4 million de passionnés pratiquent cette activité ; ils veulent aujourd'hui des actes. Or, depuis bientôt neuf mois, le quotidien des chasseurs n'a presque pas changé, sauf pour les chasseurs de gibier d'eau, qui ont subi une réduction drastique de leur période de chasse dans l'indifférence la plus totale.
    Le projet de loi sur les affaires rurales, qui doit comporter un volet « chasse », a été reporté de novembre 2002 à juin 2003, ce qui repousse ainsi le toilettage de la loi Voynet qui a tant irrité le monde de la chasse.
    Le temps n'est plus à la parole. Il n'est pas non plus à la brimade. La brimade, cela voudrait dire que la prochaine initiative législative aurait pour objet de confirmer l'obligation d'un jour de non-chasse, à l'instar de ce que demandait François Patriat. Pourtant, comme le dit très justement le président de CPNT, chacun sait que, lorsque le jour de non-chasse n'était pas obligatoire, les trois quarts des fédérations avaient instauré deux, voire trois jours par semaine où la chasse était totalement ou partiellement interdite par arrêté préfectoral. Alors, pourquoi veut-on encore légiférer sur un sujet où les chasseurs ont prouvé leur responsabilité et leur bon sens ?
    Au-delà des promesses, où sont les actes ? Où en est le projet d'Observatoire de la faune sauvage, qui semblait être une priorité du Président de la République et du Premier ministre ? Depuis sept mois, tout le monde attend l'arrêté de désignation de ses membres, et aucune validation d'études n'est engagée à ce jour, alors que la prochaine saison de chasse ouvre dans six mois !
    Aujourd'hui, le temps est à l'action, selon une formule à la mode et non plus au débat. On aurait donc pu, et je fais cette observation sans aucun esprit polémique, mettre à profit cette matinée pour discuter sur un texte plutôt que dans le vide.
    M. Yves Cochet. Nous sommes d'accord !
    M. Philippe de Villiers. On aurait pu, par exemple, voter ce matin la suppression pure et simple du mercredi sans chasse et peut-être même adopter plusieurs mesures de simplification très attendues par la grande majorité des chasseurs de notre pays.
    Je voudrais dire enfin, dans le délai de cinq minutes qui m'est imparti, que la France doit recouvrer à l'avenir sa liberté pour résoudre les problèmes de la chasse et imposer les réformes nécessaires pour en revenir à la sérénité. Dans cette perspective, je demande au Gouvernement de supprimer le jour de non-chasse, de faire respecter les spécificités locales traditionnelles, de faire modifier les directives européennes Oiseaux et Habitat, de garantir la liberté de la chasse dans les zones Natura 2000 et de rétablir les libertés associatives pour les chasseurs. En un mot, il s'agit de rendre aux chasseurs leur liberté.
    J'ajoute, pour terminer, que je souhaite de tout mon coeur que l'UMP consente davantage d'efforts pour trouver des solutions aux problèmes de la chasse, au lieu de gaspiller son temps et son énergie à faire disparaître ses partenaires dans une réforme des modes de scrutin...
    M. Alain Gest. Vous sortez du sujet !
    M. Philippe de Villiers. ... qui va épuiser la majorité et le Gouvernement dans les semaines à venir.
    M. le président. La parole est à M. Alain Gest.
    M. Alain Gest. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre débat d'aujourd'hui, parce qu'il succède à une journée de tristesse pour le monde de la chasse, se doit de faire retrouver à ce dernier les chemins de l'espoir.
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est quoi, cette journée de tristesse ?
    M. Alain Gest. Je vais m'en expliquer.
    Madame la ministre, il me semble que vous avez déjà commencé à apporter des réponses d'espoir aux chasseurs. Il vous appartient à présent de démontrer que, dans ce domaine comme dans les autres, le Gouvernement entend tenir ses engagements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Oui, ce 10 février restera comme une journée de tristesse. Un mauvais coup a été porté, hier, à ceux qui s'efforcent de renouer les fils d'un débat serein sur ce qui n'est, après tout, qu'une tradition populaire.
    M. Yves Cochet. Il ne s'agit que de l'application de la loi !
    M. Alain Gest. Tristesse inspirée par la décision du Conseil d'Etat de suspendre l'exécution des arrêtés relatifs à la chasse des grives et des oies cendrées que vous aviez eu raison de prendre, madame la ministre,...
    M. Jean-Paul Chanteguet et M. Christophe Masse. Apparemment non !
    M. Alain Gest. ... ne serait-ce que pour démontrer la volonté politique du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christophe Masse. Démagogie !
    M. Alain Gest. Tristesse aussi de constater que le même jour, devant un tribunal de la Somme, un ancien député en mal de publicité tentait vainement de recréer une atmosphère délétère et conflictuelle...
    M. Jean-Paul Chanteguet. Ce propos est détestable !
    M. Christophe Masse. Vous risquez d'être confrontés aux mêmes problèmes ! Méfiez-vous, monsieur Gest !
    M. Alain Gest. ... à l'occasion d'une procédure judiciaire concernant des excès commis en 2000 par quelques chasseurs excédés. Loin de moi l'idée de nier la réalité des faits répréhensibles constatés ce jour-là. Mais comment oublier qu'ils avaient été précédés par tant de discours et de décision extrémistes de ce même ancien parlementaire, de ses amis et de ses alliés politiques ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    A l'évidence, ce 10 février est l'illustration de la situation dans laquelle vos prédécesseurs, madame la ministre, ont laissé le dossier de la chasse. Ils ont commencé par politiser le débat. Prisonniers de leurs alliances au sein de la gauche plurielle, les socialistes ont dû en effet donner des gages à leurs collègues écologistes.
    M. Guy Teissier. C'est vrai !
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est le passé ! Que proposez-vous pour l'avenir, monsieur Gest ?
    M. Alain Gest. Résultat : ils sont parvenus à faire surgir un nouveau parti politique, pour s'étonner ensuite que ses élus prennent des positions politiques à l'occasion de choix majeurs de notre vie démocratique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Maxime Gremetz. Relisez vos promesses ! Vous avez menti aux chasseurs !
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous en prie !
    M. Alain Gest. Par ailleurs, du fait de l'imbroglio juridique actuel, dont la précédente majorité est entièrement responsable, le Conseil d'Etat impose sa propre interprétation de la fameuse directive 79-409,...
    M. Jacques Desallangre. Que proposez-vous pour l'avenir ?
    M. Alain Gest ... en prétendant que son article 9 ne permet pas de déroger aux dispositions de l'article 7. Cette interprétation, à l'évidence très restrictive, conduit le pouvoir politique à être totalement dépendant du pouvoir judiciaire dans ce domaine. Mais je n'insisterai pas sur ce point qui a déjà été évoqué par vous-même, madame la ministre, et par certains intervenants.
    M. Maxime Gremetz. C'est dur de brasser du vent !
    M. Alain Gest. Cela explique que certaines espèces de migrateurs soient chassées dans d'autres pays européens voisins alors qu'elles sont protégées chez nous. Or cette situation est incompréhensible pour les chasseurs français de gibier d'eau.
    Nous avons donc prioritairement pour ambition de pacifier et de dépolitiser la chasse. A cet égard, l'Observatoire de la faune sauvage constitue un outil que chacun juge indispensable. Nous en avons attendu longtemps - trop longtemps même - la composition et la mise en place. Mais l'essentiel est fait. Cet observatoire doit permettre de renouveler les données scientifiques susceptibles de justifier les décisions à venir de nos juridictions. Il doit donc nous permettre de reprendre dans des conditions nouvelles le débat sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau pour 2003-2004. Sur ce point, je partage en effet l'avis de certains de mes collègues, y compris sur d'autres bancs que les nôtres...
    M. Maxime Gremetz. Tiens donc !
    M. Alain Gest. ... il ne serait pas imaginable d'aborder ces questions l'an prochain dans les mêmes conditions que cette année.
    M. Maxime Gremetz. On est pourtant parti pour !
    M. Alain Gest. Madame la ministre, nous comptons sur vous pour faire preuve de pragmatisme.
    M. Maxime Gremetz. Et le Conseil d'Etat ? Le problème de la majorité, c'est qu'elle n'est pas sûre du Conseil d'Etat !
    M. Alain Gest. S'agissant des jours de non-chasse, le gouvernement précédent a commis deux erreurs. Tout d'abord, il a tenté de faire croire que tous les chasseurs de gibier d'eau pratiquent leur sport favori tous les jours, ce qui est évidemment une contrevérité.
    M. Maxime Gremetz. Evidemment, c'est la nuit que ça se passe !
    M. Alain Gest. Ensuite, en prenant une mesure à caractère général, l'interdiction de chasser le mercredi, il a provoqué l'effet inverse de celui recherché.
    M. Alain Vidalies. Il y a une dérogation pour le gibier d'eau le mercredi ! Nous avions adopté un amendement pour que cette interdiction ne concerne pas le gibier d'eau !
    M. Alain Gest. Ainsi, de deux jours de non-chasse librement consentis, nous sommes arrivés à un seul jour sans chasse fixé autoritairement.
    M. Maxime Gremetz. On est tous d'accord sur ce point !
    M. Alain Gest. Madame la ministre, il faudra donc revenir sur cette disposition. J'ai cru comprendre que vous vous étiez également engagée à assouplir certaines dispositions réglementaires et législatives que Jean-Claude Lemoine a évoquées tout à l'heure.
    Je terminerai en disant que l'élu de la Somme que je suis - et je parle aussi au nom de mon collègue Jérôme Bignon -, n'a pas le sentiment de tenir des propos extrémistes. Venant d'un département qui recense plus de 18 000 chasseurs de gibier d'eau pour près de 30 000 chasseurs, je me sens même des obligations supplémentaires. Nous souhaitons en effet que notre département soit exemplaire. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si, voilà deux semaines de cela, la fédération départementale des chasseurs a signé avec le conseil général et le conservatoire du littoral, monsieur Cochet, une convention définissant le rôle de la chasse dans la protection des zones humides et les pratiques de chasse librement consenties. Notre objectif est de réunir ceux qui acceptent d'aborder le débat sur la chasse de manière pacifiée. Faire croire, comme certains, que tous les chasseurs sont de tristes individus vulgaires et avinés...
    M. Maxime Gremetz. On n'a jamais dit ça !
    M. Alain Gest. ... amènerait par contrecoup à présenter tous les anti-chasse sous les traits de drogués, sous prétexte que l'un de leur porte-parole aurait reconnu son penchant pour les pétards. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Yves Cochet. N'importe quoi !
    M. Alain Gest. La réalité de la chasse est tout autre, c'est un non-chasseur qui vous l'affirme. J'ai pris en effet la peine d'aller découvrir cette passion populaire qu'on comprend mieux quand on voit un chasseur préparer sa nuit de hutte et s'affairer autour de ses appelants, hutte qu'il a rejointe en mobylette, à la sortie de l'usine où il retournera le lendemain matin la tête pleine de souvenirs de nature.
    Madame la ministre, c'est bien de cette pratique que nous voulons parler aujourd'hui. Nous comptons sur vous pour prendre les décisions courageuses...
    M. Maxime Gremetz. C'est aujourd'hui qu'il faut les prendre !
    M. Alain Gest ... qui lui permettront de perdurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Desallangre. Courage, fuyons !
    (M. François Baroin remplace M. Rudy Salles au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,
vice-président

    M. le président. La parole est à M. Pierre Ducout.
    M. Pierre Ducout. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en préalable à ce débat sur la chasse, il faut d'abord constater, pour le regretter, que les rodomontades poitevines de M. Raffarin entre la présidentielle et les législatives n'ont pas beaucoup ému le Conseil d'Etat (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) au vu des décisions qu'il a prises en décembre dernier et hier.
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est vrai !
    M. François-Michel Gonnot. Voilà une intervention qui commence mal !
    M. Pierre Ducout. En février, la chasse au gibier d'eau et aux oiseaux migrateurs devrait être permise, dans la limite des prélèvements maximums autorisés. Or, en dehors de quelques gesticulations, la droite n'a guère avancé.
    Pour notre part, nous abordons ce débat de façon constructive. Il s'agit d'abord de dire à tous ceux qui, sur tous ces bancs, et au-delà de l'opportunité politicienne, considèrent ce débat avec un certain dédain, que la chasse, si elle respecte la nature et les espèces, est une activité porteuse de traditions anciennes, souvent représentative de la culture populaire dans de nombreuses régions. C'est également un élément de connaissance et d'aménagement de la nature. Pratiquée par près d'un million et demi de nos concitoyens, la chasse est un fait de société que l'on ne doit pas mépriser.
    M. Jean-Louis Léonard. On le savait !
    M. Pierre Ducout. La disparition possible des chasseurs dans une génération - la courbe est aujourd'hui descendante - constituerait donc un dommage pour la richesse culturelle, sociale, voire économique de notre pays.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Tout à fait !
    M. Pierre Ducout. Je voudrais également souligner que la gauche, au-delà de l'image simpliste portée par des chasseurs extrêmes, a su faire reconnaître la place de la chasse responsable dans notre société. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Paul Chanteguet. Tout à fait !
    M. Pierre Ducout. La loi chasse de juillet 2000, telle que nous l'avons votée, avec les arrêtés préparés initialement pour février 2002 par M. Cochet, mais que la position du Conseil d'Etat n'a pas permis d'appliquer, porte globalement des avancées que M. de Ponchalon, président de la Fédération nationale des chasseurs, et M. Poniatowski, responsable de la chasse pour la majorité, - et même s'ils ne le crient pas sur les toits -, ne mettaient pas en cause.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Eh oui !
    M. Pierre Ducout. D'ailleurs, ce qui a été voté en fin de compte, avec les décrets et arrêtés d'application prévus, aurait dans les faits permis de déboucher sur une position favorable des sénateurs de droite en commission mixte paritaire, je peux en témoigner pour avoir présidé cette commission.
    M. Jean-Paul Chanteguet. Eh oui !
    M. François-Michel Gonnot. Non : ce ne sont que des spéculations !
    M. Pierre Ducout. Les difficultés sur les périodes de chasse au gibier d'eau et aux oiseaux migrateurs proviennent de la directive européenne 79-409 - signée du reste sous un gouvernement de droite - dont les objectifs, par ailleurs, étaient louables : il s'agissait de parvenir à une gestion responsable des espèces. Le problème vient de la lecture particulièrement restrictive, certains pourraient dire intégriste, faite par la Cour de justice des Communautés européennes, en 1994. C'est le principe de protection complète pendant la période de vulnérabilité, c'est la prise en compte des risques de confusion entre les espèces, et des perturbations et du dérangement causés aux oiseaux.
    Or M. Lamy a déclaré devant le Conseil d'Etat, en janvier 2002, que cette position, très sévère par rapport à l'esprit de la directive, pouvait aboutir à l'extrême à interdire la chasse toute l'année. L'attitude du Conseil d'Etat dans cette affaire est très pointilleuse. On pourrait même dire qu'il en rajoute.
    Dans ces conditions, et pour essayer de faire appliquer la directive dans son esprit, Lionel Jospin avait engagé des démarches auprès de la commissaire européenne à l'environnement, Margot Wallström, autour d'un guide d'interprétation, ainsi que sur les éléments permettant des dérogations.
    L'actuel gouvernement a semblé vouloir poursuivre en ce sens. Madame la ministre, quelles sont les avancées éventuelles ou réelles de la mission de M. Dutruc-Rosset ? Nous n'avons pas bien compris pourquoi, en réponse à la question d'un de nos collègues, vous avez indiqué que l'Europe refusait des dérogations.
    Naturellement, il faut que la France apporte les éléments de connaissance de l'état des espèces, de leurs lieux et de leur calendrier de nidification : l'Office national de la chasse et de la faune sauvage est à même de le faire de manière responsable. En revanche, votre Observatoire national de la faune sauvage et de ses habitats s'apparente davantage à un « machin ». Et l'on peut craindre, à long terme, de n'y entendre que les extrémistes des deux bords.
    Que pensez-vous des dérogations qui semblent avoir été obtenues par les pays baltes au cours des négociations préalables à leur entrée dans l'Union européenne ?
    M. Alain Vidalies. Très bien !
    M. Pierre Ducout. Auront-elles force de loi par rapport à la Cour de justice ? La Cour ne pourra pas ne pas considérer le guide interprétatif établi par la Commission, même si elle peut fort bien ne pas le suivre. Quelle est votre analyse à ce jour ?
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Bonne question !
    M. Pierre Ducout. Posant la question de la légalité de la directive 79-409, la procédure engagée par l'UNACOM pourrait être considérée comme extrémiste, même si, en 1979, la Communauté européenne n'avait pas formellement compétence en matière d'environnement. Qu'en pensez-vous ?
    Pour conclure sur ce point, je rappellerai que la plupart des chasseurs de gibiers d'eau et d'oiseaux migrateurs ont montré leur sens des responsabilités. Il n'est pas possible d'accepter que la période de chasse, qui allait du 14 juillet à fin février et que nous proposions de ramener du 10 août à fin février, soit réduite à quelques semaines entre le 1er septembre et le 31 janvier. On ne ferme pas les plages aux estivants au mois de juillet et d'août, ni les pistes de ski en février !
    M. Joël Hart. Très bien !
    M. Pierre Ducout. Cette réduction, non justifiée dès lors que les PMA sont appliqués, va décourager la pratique de la chasse d'une partie de nos concitoyens. Rappelons que la fédération de la Gironde, première en nombre de chasseurs, gère depuis longtemps la chasse à la bécasse en ayant limité les prélèvements. Elle et la première à interdire la chasse en période de grand froid. Face à la décision rendue hier par le Conseil d'Etat, il nous faudra peut-être voter directement chaque année des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse, comme nous l'avions d'ailleurs fait ensemble en 1998.
    Permettez-moi à présent de rappeler six avancées de la loi de juillet 2000.
    « Il serait stupide de refaire la loi Voynet. »
    M. Alain Gest. Ça, c'est sûr !
    M. Pierre Ducout. « Nous demandons que son interprétation soit revue afin de coller au plus près à ce qui a été voté par le législateur », avait demandé M. de Ponchalon, en visant en particulier l'organisation interne des fédérations départementales de chasseurs.
    Premièrement, nous avons légalisé la chasse au gibier d'eau dans les départements et cantons qui le justifiaient. Sur ce point, je ne pense pas que le rapport que nous demandions, cinq ans après le vote de la loi, et qui doit montrer la richesse de la chasse au gibier d'eau ainsi que sa participation à l'aménagement de la nature, soit remis en cause par la droite.
    Deuxièmement, le jour de non-chasse a dans les faits été dévoyé par la saisine politicienne des parlementaires de droite (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), qui a débouché sur la fixation systématique du mercredi par le Conseil constitutionnel.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Eh oui !
    M. Pierre Ducout. La proposition de loi déposée par les députés de l'actuelle majorité avec notre excellent collègue P. Lang ne fait que reprendre l'esprit des dispositions que nous avions initialement votées en constatant que la plupart des fédérations départementales pratiquent un jour de non-chasse.
    Rappelons qu'avec certains collègues de gauche des régions de l'ouest et du sud de notre pays, j'avais permis que ce jour de non-chasse ne s'applique pas là où il n'était pas pertinent, à savoir pour la chasse aux colombidés entre le 1er octobre et le 15 novembre et pour la chasse de nuit au gibier d'eau.
    M. Maxime Gremetz. Le Nord est concerné aussi !
    M. Pierre Ducout. Troisièmement, nous avons institué l'Office national de la chasse et de la faune sauvage. Son organisation est à préciser, avec ses missions de police, mais aussi d'études et de recherche, et elle doit déboucher sur les orientations régionales et les schémas départementaux de gestion.
    Quatrièmement, s'agissant des dégâts causés par le gibier, il faut notamment poursuivre les discussions avec les sylviculteurs, comme je l'avais indiqué lors du vote de la loi d'orientation sur la forêt. En ma qualité de président de la CMP, j'avais bloqué leur participation dont les modalités ne me paraissaient pas au point.
    Cinquièmement, le droit de non-chasse a pu s'exercer sans problème majeur. Il faut rappeler à cet égard que l'objectif de partage de la nature entre tous les utilisateurs est fort louable. Il doit pouvoir être atteint grâce à un dialogue constructif, dans le cadre de chartes de massif et de conventions avec les propriétaires de l'espace rural, majoritairement privé. Cela se pratique d'ailleurs déjà dans nombre de départements.
    Sixièmement, des progrès importants ont été obtenus en matière de sécurité, en particulier pour les battues au gros gibier, grâce à une meilleure formation. Le nouveau permis de chasser, qui s'applique à compter de cette année et qui comporte une partie pratique importante, met précisément l'accent sur cet aspect.
    Madame la ministre, la chasse a été ma première culture, notamment la chasse à la palombe et à la bécasse. Elle m'a appris l'amour de la nature et le respect des espèces, en gascon d'ailleurs, langue qui pendant dix siècles a porté ces valeurs ainsi que celles de la convivialité. J'espère donc, avec l'ensemble de mes collègues du groupe d'études sur la chasse, auquel je participe depuis quinze ans, que nous pourrons sauver le chasseur respectueux et responsable, espèce aujourd'hui en voie de disparition. Il faut préserver les chasses traditionnelles et populaires. Souhaitons que, au-delà des annonces politiciennes, vous vous inscriviez dans cette démarche. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Merci, monsieur Ducout, d'avoir respecté votre temps de parole.
    La parole est M. Stéphane Demilly.
    M. Stéphane Demilly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ces dernières années, la chasse a quitté ses espaces naturels pour devenir une question politique et même politicienne.
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est vrai.
    M. Stéphane Demilly. Les chasseurs se sont retrouvés au banc des accusés,...
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est vrai !
    M. Stéphane Demilly. ... sur fond d'une méconnaissance du monde cynégétique, de ses traditions et de l'art de vivre qu'il incarne et, parfois, il faut le dire, d'un mépris total pour les 1 500 000 chasseurs qui n'ont d'autre désir que de pratiquer leur passion.
    Derrière tout cela, il y a de vrais enjeux de société. Ils touchent à l'usage que l'on fait de la nature, et le débat oppose ceux qui ont gardé un contact quotidien avec la nature et qui, de ce fait même, sont des acteurs de nature, et ceux qui conçoivent celle-ci comme un décor, une zone de libre circulation, et s'apparentent plus à des consommateurs de la nature.
    Certes, mes chers collègues, la chasse est moins ludique qu'un parc à thème et moins branchée qu'une techno-parade ou une rave party, mais elle replace l'homme dans un rapport direct avec la nature et les animaux. Elle nous renvoie à nos racines.
    Il faut donc sortir la chasse de l'impasse partisane dans laquelle le précédent gouvernement de la gauche plurielle, prisonnier de ses jeux d'alliance contre nature, a voulu l'enfermer. Par cette attitude, il a transformé une passion en mouvement électoral et incité les chasseurs à délaisser le permis de chasser pour le permis de voter.
    Il faut rendre à la chasse la place qui est la sienne et qu'elle n'aurait jamais dû perdre et redonner aux chasseurs le rôle qu'eux-mêmes revendiquent : celui d'acteurs du monde rural et environnemental et de gardiens d'une tradition et d'une culture qui se révèlent essentielles pour notre identité dans un monde globalisé.
    Je vous le dis avec force, mes chers collègues, il est temps, il est grand temps, de restaurer un climat de confiance entre les chasseurs et les pouvoirs publics.
    C'est d'ailleurs, comme cela a été rappelé, un engagement fort - et légitime - que notre majorité avait pris vis-à-vis des chasseurs lors des élections législatives de juin 2002. Le Premier ministre lui-même avait fait des promesses très claires sur ce sujet pendant la campagne électorale.
    M. Yves Cochet. Promesses non tenues !
    M. Stéphane Demilly. Ces engagements, ces promesses, il est de notre devoir impérieux de les tenir, dans ce domaine comme dans les autres. D'ailleurs, le climat évolue favorablement : au refus idéologique de tout dialogue avec les représentants de la chasse a succédé une réelle volonté d'ouverture et d'écoute, et je salue, madame la ministre, cette nouvelle attitude.
    M. Pierre Ducout. Démago !
    M. Stéphane Demilly. Mais, au-delà de cette volonté de dialogue, il est urgent à présent de passer aux actes...
    M. François Liberti. En effet !
    M. Jacques Desallangre. C'est bien ça le problème : passer aux actes !
    M. Stéphane Demilly. ... et de poser un certain nombre de gestes forts.
    L'impatience légitime des chasseurs, au nombre desquels j'ai l'honneur de me compter - et j'en suis fier -, se manifeste en effet de plus en plus. En outre, elle a été exacerbée par les récentes décisions du Conseil d'Etat d'annuler certains arrêtés régissant les dates de chasse aux oiseaux migrateurs.
    M. Yves Cochet. Voilà un député qui est ennuyé par le droit !
    M. Stéphane Demilly. Elu de la Somme, département qui, comme chacun le sait, compte de nombreux chasseurs, j'ai tous les jours l'occasion de constater cette exaspération.
    « Très bien ! », m'objecteront certains, « mais que pouvons-nous faire puisque nous sommes corsetés par Bruxelles et sa directive de 1979 sur les oiseaux sauvages ? »
    M. Jérôme Lambert. Vous aviez promis de la changer !
    M. Stéphane Demilly. L'argument de l'impuissance me paraît, pour ma part, aussi facile que pervers.
    Il est facile, d'abord, car certaines dispositions très simples et très attendues des chasseurs relèvent de décisions purement nationales dans lesquelles la Commission européenne ne joue aucun rôle. Je vais y revenir.
    Il est pervers, ensuite, car la dérobade consistant à faire jouer à Bruxelles le rôle parfois fort commode de bouc émissaire ne grandit pas l'idée de l'Europe à laquelle ma famille politique est si attachée.
    Pointer en permanence un doigt accusateur sur la Commission européenne, c'est conforter l'idée d'une Europe froide, technocratique, inaccessible, c'est fabriquer des eurosceptiques et même - pourquoi pas ? - des europhobes.
    En ce qui me concerne, paraphrasant un auteur célébre, je dirai, non pas que « l'enfer, c'est l'Europe », mais, au contraire, que « l'Europe, c'est nous ! ». L'Europe, c'est ce que nous en faisons en tant que citoyens et en tant qu'élus.
    Les solutions aux problèmes de la chasse passent par une véritable volonté politique, ici ou à Bruxelles.
    M. Jacques Briat. Bravo !
    M. Stéphane Demilly. Certaines décisions ne relèvent que de la représentation nationale. Je citerai pour seul exemple, mais il est emblématique - ou « symbolique », pour reprendre votre expression, madame la ministre -, le jour de non-chasse introduit par la loi du 26 juillet 2000.
    Cette disposition insidieuse, qui vise le mercredi - pour limiter la transmission du virus à nos enfants, n'ayons pas peur de le dire -,...
    M. Pierre Ducout. Discours de droite !
    M. Stéphane Demilly. ... peut-être abrogée par une simple décision législative du Parlement. C'est d'ailleurs, je crois, dans les intentions du Gouvernement. Il est urgent que cela soit fait.
    M. Yves Cochet. Il faut en parler au Conseil constitutionnel !
    M. Stéphane Demilly. Faire preuve de volonté politique, c'est, ensuite, sur la question de fond des dates de chasse aux oiseaux migrateurs, nouer un dialogue clair et scientifiquement motivé avec la Commission européenne, au lieu de privilégier la voie unique du décret administratif ou des arrêtés.
    Il faut le faire de façon dépassionnée, en se souvenant que l'objectif de la fameuse directive 79-409/CEE n'est pas, comme ceux qui se sont abusivement approprié le mot « écologie » ont essayé de nous le faire croire, de lutter contre la chasse, mais bel et bien de protéger les espèces d'oiseaux sauvages en préservant leur habitat.
    Cela est si vrai que le rapport de la Commission européenne du 25 mars 2002 sur l'application de la directive pour la période 1996-1998 souligne explicitement que les prélèvements dus à la chasse n'ont qu'un impact tout à fait mineur sur les populations d'oiseaux, bien loin derrière d'autres facteurs.
    La directive permet aux Etats membres de l'Union européenne de notifier à la Commission des dérogations aux régimes de chasse à condition qu'elles soient motivées scientifiquement. Plusieurs pays européens ne se sont pas privés de le faire durant la période concernée, si je me réfère à ce même rapport : 1162 dérogations ont été transmises par le Danemark, 729 par le Royaume-Uni, 323 par l'Espagne !
    Nous pourrons fournir des données scientifiques actualisés, via l'Observatoire national de la chasse, de la faune sauvage et des habitats, qu'il est urgent, madame la ministre, de rendre opérationnel.
    Par ailleurs, la directive elle-même peut être renégociée : vieille de vingt-cinq ans, adoptée à l'époque par neuf Etats seulement, elle n'a jamais été mise à jour et connaît partout des difficultés d'application.
    Je vous rappelle d'ailleurs qu'une tentative de modification avait failli aboutir au Parlement européen à l'automne 2000.
    M. Jérôme Lambert. Mais elle a échoué !
    M. Stéphane Demilly. C'est à ces conditions, et seulement à ces conditions, qu'un climat de confiance pourra enfin être restauré. La chasse pourra alors enfin quitter le terrain politique pour retrouver ses bois, ses plaines, ses marais, et poursuivre son existence pluriséculaire. Et, à ce moment-là, un dialogue serein et apaisé pourra s'instaurer entre tous ceux qui ont la nature pour seule préoccupation. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. François Liberti.
    M. François Liberti. Tout d'abord, un constat : si la loi sur la chasse du 26 juillet 2000 a permis quelques acquis - tout le monde se souvient du débat passionné auquel elle a donné lieu -, reconnaissons que nos modes et nos périodes de chasse sont remis en cause par les restrictions incluses dans cette loi sous la contrainte de la directive 79-409 de la CEE que nous estimons non conforme au traité de la CEE, et dénonçons avec de nombreuses associations de chasseurs d'oiseaux migrateurs.
    Cette directive a été, comme l'a rappelé il y a quelques instants Maxime Gremetz, approuvée par le gouvernement de M. Barre, par son ministre Jean-François Poncet et par tous les députés français du Parlement européen, toutes tendances politiques confondues, à l'exception des députés communistes, qui l'ont combattue. Or, depuis son adoption, on cherche à réduire toujours plus les périodes de chasse et, en fin de compte, à interdire la chasse populaire.
    Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt : la directive de 1979 relative aux périodes de chasse aux oiseaux migrateurs est la pierre angulaire de la législation sur la chasse, la source de tous les contentieux et le texte à partir duquel ont été prises les mesures qui ont réduit le droit de chasse.
    L'application de la loi sur la chasse de juillet 2000 conduit à faire deux remarques. Premièrement, les contentieux opposant les chasseurs aux associations de protection de la nature n'ont pas pour autant diminué, au contraire. Deuxièmement, le débat sur la chasse, que l'on voulait apaiser, s'en est, quant à lui, trouvé durci.
    Il est grand temps de tirer les conclusions qui s'imposent et de proposer enfin, dans un climat dépassionné, une loi visant à réformer et à simplifier le droit de chasse, conformément aux intérêts de tous.
    Comme plusieurs orateurs l'ont souligné, le gouvernement de M. Raffarin et la majorité parlementaire UMP avaient pris, lors de la campagne électorale, des engagements sur cette question. Ils doivent se traduire dans les faits. Vos propositions, madame la ministre, me laissent quelque peu sceptique. Elles n'apportent pas de réponses aux questions de fond qui ont nourri les contentieux, notamment les dates de chasse aux oiseaux migrateurs.
    Il est nécessaire, au vu des données juridiques et scientifiques mises en lumière par le rapport ORNIS émanant du comité scientifique de la Commission européenne, dont les avis ne peuvent être contestés, de permettre une chasse sélective durant tout le mois de février, jusqu'à son dernier jour.
    Qu'en est-il aujourd'hui ?
    Au lieu d'une réforme profonde de la loi sur la chasse qu'attendait et qu'attend toujours la grande majorité des chasseurs, vous n'avez su à ce jour que proposer deux arrêtés permettant de déroger à la loi pour la chasse aux oies, dont la période de chasse est prolongée jusqu'au 20 février, et pour la chasse aux grives, dont la période de chasse est prolongée jusqu'au 16 février. Ces deux arrêtés viennent d'ailleurs d'être cassés par le Conseil d'Etat, sans surprise pour personne et surtout pas pour le Gouvernement.
    Que dire aussi de notre débat d'aujourd'hui, sans texte, sans vote, donc sans décision ? Vous conviendrez que nous sommes loin du compte et que la besace est bien vide.
    Que deviennent la chasse à la bécasse, la chasse au gibier d'eau, qui réunissent une grande partie des chasseurs du littoral ? Seront-elles définitivement sacrifiées après le 31 janvier ?
    Il n'est pas sérieux de traiter ainsi les 1,5 million de chasseurs, qui veulent sortir des tensions politiciennes dans lesquelles vous et d'autres, pour des intérêts partisans, les avez enfermés.
    Il est nécessaire de prendre des mesures conservatoires relatives aux modes et aux périodes de chasse traditionnelles allant dans le sens de l'équité et des revendications raisonnables et légitimes des chasseurs, qui se prononcent pour la préservation des milieux naturels et la protection des espèces.
    C'est dans cette perspective que les députés communistes et républicains ont déposé, il y a quelques mois, une proposition de loi visant à réformer et à simplifier le droit de chasse dans sa globalité. Nous proposons, tout d'abord, que la détermination du calendrier des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs se fasse dans un cadre législatif : c'est, en effet, le seul moyen de mettre un terme aux contentieux.
    Nous demandons, ensuite, que les négociations avec Bruxelles soient reprises dans la perspective de l'élaboration d'un « guide interprétatif » des articles 7 et 9 de la directive 79-409 « oiseaux sauvages », en attendant que l'illégalité de celle-ci soit officiellement reconnue au terme des actions en cours devant la Cour de justice européenne.
    La troisième mesure contenue dans notre proposition de loi est la suppression de l'interdiction de chasser le mercredi. Cette interdiction - plusieurs orateurs l'ont souligné - est vécue dans le monde de la chasse comme une véritable atteinte à la liberté et une discrimination totalement injustifiée.
    Quelle est la réalité sur le terrain ? Bien souvent, la chasse ne se pratique que quelques jours - deux jours par semaine dans la plupart des départements -, sous l'autorité des fédérations départementales de chasse. Ayant une pratique ancestrale de la gestion, elles déterminent des plans de chasse au niveau tant des prises que des jours de chasse. C'est donc vers le retour à cette autogestion de la chasse qu'il faut tendre, en proposant des formules simples pour chaque département, qui permettent de respecter le droit de chasse et de garantir l'accessibilité des sites aux non-chasseurs.
    Il me paraît important de rappeler que la pratique de la chasse offre aussi une approche pédagogique et culturelle de la nature à la jeunesse rurale et périurbaine, lui permettant de mieux connaître la faune et d'apprendre à respecter certaines règles de protection de notre patrimoine cynégétique.
    Enfin, il est utile de pérenniser la chasse de nuit au gibier d'eau - qui est, d'ailleurs, un acquis de la loi du 26 juillet 2000 - en abrogeant le caractère provisoire de la réforme. Le délai de cinq ans doit être purement et simplement supprimé.
    M. Pierre Ducout. Le texte ne l'a pas repris !
    M. François Liberti. Si !
    M. Pierre Ducout. Non, cette proposition figurait simplement dans le rapport.
    M. François Liberti. Oui, mais elle y figure bien ! Telles sont les quatre mesures que nous préconisons. Elles doivent être prises dans l'urgence en complémentarité des éléments développés il y a un instant par mon collègue Maxime Gremetz et de ceux que présentera dans quelques instants mon collègue Jacques Desallangre, quand il exposera la proposition de loi que nous avons déposée il y a quelques mois.
    Ces mesures permettront de rétablir des liens sérieux de confiance avec des personnes passionnées, qui n'ont qu'un seul désir, pratiquer une chasse, dite « d'en bas », populaire, conforme à leurs coutumes et traditions, dans le respect d'une gestion équitable des plans de chasse et des espaces naturels, dans l'intérêt de tous, chasseurs et non-chasseurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Antoine Carré.
    M. Antoine Carré. Madame la ministre, ce débat sur la chasse est le bienvenu ; il permet aux élus d'exprimer les souhaits des représentants du monde de la chasse. Après le mécontentement né du vote et de la mise en oeuvre de la loi Voynet sur la chasse, il témoigne de votre volonté d'améliorer les conditions d'exercice de la chasse dans notre pays et démontre votre ferme intention et celle du Gouvernement de considérer avec respect les souhaits des chasseurs. Permettez-moi de vous en remercier.
    Les intervenants dans ce débat étant en nombre limité, je souhaite vous informer que j'associe à mes propos Marc Laffineur et Patrice Martin-Lalande, élus de départements où les problèmes cynégétiques sont identiques à ceux du Loiret.
    Dans un premier temps, de manière très synthétique et donc non exhaustive, j'évoquerai les problèmes posés par les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs.
    Si la situation est aussi difficile, c'est en partie parce que la France n'a jamais défendu ses positions au cours des années précédentes. Il faut espérer que, après la création de l'observatoire de la faune sauvage, les conclusions de celui-ci seront prises en compte et amèneront des modifications en ce domaine.
    Comment admettre, en effet, que la chasse au pigeon ramier soit fermée le 10 février et qu'elle soit rouverte dans le cadre de la destruction des nuisibles le 1er mars, alors qu'elle reste ouverte durant toute cette période en Espagne et en Angleterre, par exemple ?
    Comment admettre aussi que le canard colvert, gibier sédentaire à 95 % sur notre territoire, soit encore considéré comme un migrateur ?
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Tout à fait !
    M. Antoine Carré. Ce ne sont là que deux exemples, mais ils illustrent bien les difficultés qui résultent d'une interprétation trop rigoureuse d'une directive européenne ancienne. Ne pourrait-on envisager de la modifier à l'occasion de l'élargissement de l'Europe ou de s'en affranchir en inscrivant dans un texte de loi sur la chasse la notion de subsidiarité accordée à chaque nation ?
    Je voudrais évoquer maintenant les difficultés nouvelles rencontrées par les fédérations départementales de chasseurs dans leur fonctionnement quotidien. La dernière loi sur la chasse a institué un contrôle a priori du budget des fédérations départementales par le préfet. Il s'agit là d'une brimade et cette obligation doit disparaître.
    Quant au système proposé pour les élections des administrateurs des fédérations - un homme, une voix, ou un mandataire et quelques pouvoirs - il rend l'organisation des élections très malaisée et coûteuse. Il est difficilement applicable et doit être modifié. On pourrait accepter, par exemple, qu'un mandataire totalise au maximum un centième des pouvoirs des adhérents.
    S'agissant de l'adhésion obligatoire à la fédération départementale pour un titulaire de droits de chasse, si le principe est bon, encore faut-il que le titulaire soit possesseur d'un plan de chasse. Ou cette condition doit être remplie, ou bien l'adhésion n'est plus obligatoire.
    Le sujet des procès-verbaux de chasse peut être également évoqué. Ils doivent être portés à la connaissance des fédérations départementales. Et lorsqu'il s'agit de petites infractions, pourquoi ne pas se contenter du paiement d'un simple timbre-amende ? Cette mesure éviterait d'encombrer le bureau du procureur de la République, trop souvent amené à classer les petites infractions qui ne sont pas du domaine du grand braconnage.
    Pour ce qui concerne le tir de nuit, enfin, le plus simple serait de considérer que l'heure de référence est fixée par rapport au lever et au coucher du soleil ; cela éviterait bien des litiges devant les tribunaux.
    A tous ces détails techniques, on pourrait ajouter le droit de détruire toute l'année le rat musqué par piégeage ou à tir.
    Plus généralement, je tiens à insister sur la nécessité de simplifier les démarches effectuées par le chasseur pour valider son permis. Le guichet unique semble une solution satisfaisante. Les fédérations départementales pourraient ainsi délivrer une validation annuelle et encaisser les sommes correspondantes, y compris pour l'Etat, au moyen d'une régie de recettes. Cela suppose des moyens en personnel comme en matériel. Les fédérations départementales sont prêtes à relever le défi ; encore faudrait-il que les sommes prélevées jusqu'à présent par les perceptions pour les frais de gestion sur la redevance acquittée par les chasseurs - 6 à 8 euros par permis délivré - leur soient reversées.
    Dernier sujet : la suppression du mercredi comme jour de non-chasse est attendue. Il s'agit d'une atteinte au droit de propriété et à la liberté individuelle pour ceux qui chassent dans des domaines clos. L'idée de cette trêve hebdomadaire devrait faire l'objet d'un accord entre les fédérations départementales et les représentants de l'Etat, afin qu'elle ne soit plus vécue comme une véritable contrainte.
    Tous ces sujets sont prioritaires et méritent d'être évoqués lors de ce débat, afin qu'ils puissent, à l'occasion des lois à venir, être étudiés et réglés dans les meilleures conditions, et cela avant l'été. Je suis confiant, madame la ministre, en votre volonté et en votre détermination, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
    M. Yves Cochet. Madame la ministre, en neuf mois seulement, votre tableau de chasse est lourd : arrêtés d'ouverture suspendus au mois d'août, arrêtés de fermeture annulés en décembre, signature, la semaine dernière, de deux arrêtés prévoyant des dérogations que le Conseil d'Etat avait pourtant clairement interdites ; d'où, évidemment, sa décision de les suspendre hier.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. C'est faux !
    M. Jérôme Bignon. Il n'a jamais interdit les dérogations !
    M. Yves Cochet. Alors que la côte d'Aquitaine subit un désastre écologique de grande envergure, vous envisagiez, il y a encore quelques jours, d'autoriser la chasse aux oies à pédalos dans le bassin d'Arcachon. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Et alors ? Il ne manquait plus que ça ! Vous ne savez même pas comment c'est fait, un pédalo ! Vous n'en avez jamais vu de votre vie !
    M. Yves Cochet. Tout cela est de la politique de gribouille. Vous nous aviez fait part, ici même, de votre désir d'une gestion raisonnée des espèces. Pourtant, votre action pour la gestion de la bécasse est tout sauf raisonnable. Je tiens d'ailleurs à saluer la position lucide et courageuse du club national des bécassiers et de quelques présidents de fédérations qui ont demandé l'arrêt de la chasse de cette espèce. Comment peut-on continuer de chasser un animal dont tous les spécialistes - je dis bien tous - reconnaissent que la population connaît cette année de graves problèmes ?
    Par ailleurs, le programme que vous nous annoncez a largement de quoi faire frémir : suppression des contrôles financiers sur l'utilisation de l'argent des chasseurs, rétablissement du suffrage censitaire pour les élections dans les fédérations départementales, mise en place d'une caricature d'observatoire de la faune sauvage, autorisation de l'utilisation de produits toxiques pour la faune... J'arrête là parce que je n'ai que quelques minutes et aussi parce que j'ai pitié des âmes sensibles !
    M. Joël Hart. Ça vaut mieux !
    Mme le ministre de l'écologie et au développement durable. C'est vraiment n'importe quoi !
    M. Yves Cochet. Ce dont la chasse a besoin pour vivre raisonnablement se résume en cinq points : premièrement, la préservation de la qualité des habitats naturels ; deuxièmement, la formation des chasseurs ;...
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. La formation des Verts, oui !
    M. Yves Cochet. ... troisièmement la transparence et la démocratie dans les instances cynégétiques ; quatrièmement, le dialogue entre les chasseurs et les autres usagers ou protecteurs de la nature...
    M. Jérôme Bignon. Ça, c'est une bonne idée !
    M. Jacques Briat. Chiche !
    M. Jean-Marc Lefranc. Ils découvrent le gouvernement lorsqu'ils ne sont plus au pouvoir !
    M. Yves Cochet. Ce dialogue que j'avais précisément tenté d'organiser, figurez-vous ! Et tout le monde est venu, à ceci près que les chasseurs sont partis au bout de quelques minutes !
    M. le président. Mes chers collègues, laissez M. Cochet terminer son intervention.
    M. Yves Cochet. Premier point, disais-je, la qualité des habitats. Sans milieu naturel, pas de gibier, et sans gibier, pas de chasseurs ! Malheureusement cette évidence est loin d'être entrée dans les esprits. Chaque jour voit se dégrader la quantité et la qualité des habitats de la faune et de la flore. On a d'ailleurs du mal à comprendre l'opposition de certains à Natura 2000, qui est une chance pour le développement durable, pour l'aménagement du territoire, et un espoir pour les générations futures. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Une vraie catastrophe, plutôt !
    M. Jean-Louis Léonard. Cela explique tout !
    M. Yves Cochet. Allez donc en parler à M. Barnier !
    M. le président. Allons, monsieur Cochet, pas d'interpellations !
    M. Yves Cochet. Comme je suis interpellé, je réponds !
    M. le président. Ce n'est pas une raison pour céder à toutes les provocations.
    M. Yves Cochet. Il est désespérant de constater que lorsqu'on parle de chasse, les principaux, sinon les uniques sujets abordés sont les dates, les heures et les modes de chasse et les structures cynégétiques - le débat d'aujourd'hui en est la parfaite illustration -, alors que la première chose dont il faudrait s'inquiéter, ce sont bel et bien les habitats.
    M. Pierre Lang. Ça et le reste !
    M. Yves Cochet. J'y viens. Vous avez été missionné par M. le président de la commission des affaires économiques, qui n'est plus là. Comment se fait-il, d'ailleurs, que la commission ne soit pas représentée, monsieur le président ?
    M. le président. Nous avons un débat sans vote, monsieur Cochet. Vous ne disposez que de cinq minutes, je vous le rappelle, et vous êtes en train de perdre de précieuses secondes !
    M. Yves Cochet. Alors que l'on ne m'interrompe pas !
    Deuxième point, la formation. Il est indispensable de former les chasseurs à la connaissance de la faune et des habitats. Il faut aussi les former à la sécurité. La mise en place par le gouvernement précédent du permis accompagné et de l'épreuve pratique du permis de chasser allait dans ce sens. Des rumeurs, mais peut-être allez-vous les démentir, madame la ministre, circulent sur le fait que cette épreuve pratique serait reportée ou supprimée.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. N'importe quoi !
    M. Yves Cochet. Vous allez pouvoir nous éclairer sur ce sujet.
    Troisième point, la démocratie. Les chasseurs utilisent un bien commun à tous les Français, à tous les Européens. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Joël Hart. Les autres aussi !
    M. Yves Cochet. Il est donc normal que le fonctionnement de leurs instances officielles soit transparent. Les structures associatives locales ou nationales doivent rester dans les règles communes de la vie associative. Chaque chasseur a l'obligation, vous le savez, d'adhérer à une fédération départementale ; il n'a pas le choix. Il est donc normal en contrepartie que l'Etat contrôle l'utilisation des fonds confiés à ces fédérations.
    M. Jean-Pierre Grand. Le harcèlement n'est pas obligatoire !
    M. Yves Cochet. La suppression des contrôles ne peut être acceptable qu'avec l'institution de la cotisation volontaire et facultative, ce qui ferait des fédérations des associations comme les autres. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) On ne peut pas avoir le chasseur et l'argent du chasseur !
    Nous avions introduit le principe démocratique « un chasseur, une voix », et j'entends dire que vous allez revenir sur ce point.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Absolument !
    M. Yves Cochet. Je vous pose donc la question : allez-vous donner plus de voix aux riches parce qu'ils sont titulaires de plus de territoires de chasse ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) J'entends que vous nous éclairiez sur cette affaire.
    Quatrième point, le dialogue.
    M. Jérôme Bignon. Parlons-en, du dialogue !
    M. Richard Maillé. Il suffit !
    M. Yves Cochet. Les chasseurs ne sont pas les seuls utilisateurs des milieux naturels. Le dialogue avec les autres usagers est donc le gage d'une chasse acceptée par la majorité. L'expérience des autres pays européens nous démontre clairement que, lorsque les chasseurs se mettent d'accord avec les associations de protection de la nature, le problème des dates et des modes de chasse disparaît.
    Dernier point, la réglementation.
    M. le président. Très rapidement : vous avez déjà dépassé votre temps de parole.
    M. Yves Cochet. Il y a des lois, la loi « chasse » notamment. Son application est importante.
    Comment, par exemple, le gouvernement actuel, qui fait du respect de la loi un leimotiv, tolère-t-il que les chasseurs s'adonnent à cette pratique en dehors des périodes autorisées ou même déclarent à la télévision, en toute impunité, que la fermeture de la chasse du fait de la vague de froid n'a pas à être respectée ? Les gardes de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage doivent recevoir plus de soutien de votre part et leurs effectifs doivent être renforcés. Ils ne doivent plus être soumis aux menaces continuelles d'hommes armés dont le comportement est inacceptable (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle)...
    M. Jérôme Bignon. C'est scandaleux ! Caricatural !
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. N'importe quoi !
    M. Yves Cochet. ... et réprouvé par la majorité des chasseurs.
    Pour conclure, il nous faut cesser d'écouter les quelques extrémistes qui se fichent de l'avenir de la chasse...
    M. Jacques Briat. Il sont chez vous, les extrémistes !
    M. Jean-Claude Lemoine. Ce sont les Verts !
    M. Pierre Lang. Vous êtes un spécialiste !
    M. Yves Cochet. ... ou qui utilisent la chasse à des fins électorales. En effet, comme certains d'entre vous l'ont dit,...
    M. le président. Non, monsieur Cochet, ne relancez pas le débat : un mot, une phrase de conclusion au maximum.
    M. Yves Cochet. ... il faut dépolitiser la chasse. Nous devons écouter les chasseurs raisonnables,...
    M. Richard Mallié. Et ne pas céder à l'extrémisme vert !
    M. Yves Cochet. ... la plupart des associations nationales de chasse, spécialisées ou non. Nous devons veiller à ce que les élections des responsables cynégétiques soient démocratiques et que les porte-parole de la chasse soient ceux de la majorité et non ceux d'une minorité extrémiste. Nous devons agir pour que les milieux naturels soient protégés. Là est votre mission principale, madame la ministre.
    M. Jean-Pierre Grand. Applaudissements nourris à gauche !
    M. le président. La parole est à M. Pierre Lang.
    M. Pierre Lang. Madame la ministre, il me sera difficile, en quelques minutes, d'aborder tous les contentieux créés par vos prédécesseurs avec les chasseurs.
    M. Pierre Ducout. Depuis 1979 !
    M. Pierre Lang. Les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs constituent un problème épineux, pas facile à résoudre, car nous ne sommes pas les seuls décideurs. D'autant plus que les instances européennes ont été passablement irritées par l'attitude désinvolte des différents ministres de l'environnement, de 1995 à mai 2002, qui ont mis une mauvaise volonté évidente à leur transmettre les bases scientifiques justifiant la loi de 1994 sur les dates de fermeture par décret des oiseaux migrateurs, loi dont j'étais, avec les cosignataires de l'époque, sur tous les bancs, y compris notre excellent ami Pierre Ducout,...
    M. Pierre Ducout. Merci.
    M. Pierre Lang. ... l'auteur et le rapporteur.
    Mais là-dessus sont venus se greffer d'autres sujets de mécontentement. Jusqu'en 2000, chaque fédération départementale instituait, en fonction de ses traditions et des nécessités de la gestion de la faune, un ou plusieurs jours de non-chasse dans la semaine. La loi de Mme Voynet, sous la pression d'opposants intégristes, mais résolus, a institué un jour de non-chasse identique sur l'ensemble du territoire français, sous le mauvais prétexte de la sécurité des enfants. C'était en réalité un recul pour les autres utilisateurs de la nature.
    Nous devons modifier ce système, responsabiliser chaque département, décentraliser les décisions. La proposition de loi que j'ai déposée, cosignée par plus de cent députés, propose d'instituer, dans chaque fédération départementale, au choix de la fédération départementale, un jour de limitation totale ou partielle de l'exercice de la chasse. Ainsi, certains départements pourraient choisir un jour d'interdiction de la chasse dans la journée, tout en autorisant le passée du matin et du soir et la chasse à la hutte la nuit.
    M. Richard Mallié. Très bien !
    M. Pierre Lang. D'autres exemples pourraient être cités. En tant que président de la fédération départementale des chasseurs de la Moselle, je proposerais, si cette possibilité nous était laissée, d'interdire la chasse devant soi et les battues le mercredi, et de permettre l'affût du matin et du soir. D'autres pourraient proposer d'interdire la chasse le dimanche dans les forêts suburbaines autour des grandes villes, mais pas dans le reste du département.
    Une autre mesure a été ressentie comme un geste de défiance : celle qui a conduit à imposer à toutes les fédérations de chasseurs un contrôle a priori de leur budget en plus du contrôle a posteriori. Cela frise l'infamie pour les représentants bénévoles de nos 1 400 000 chasseurs. Comment une telle mesure a-t-elle pu être acceptée dans les rangs de l'ancienne majorité ?
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Eh oui !
    M. Pierre Lang. C'est à se demander si les quelques dizaines d'extrémistes du ROC ou de l'ASPAS représentaient plus que les 1 400 000 agriculteurs, employés, ouvriers et salariés qui constituent la base populaire de la chasse en France !
    Mais bien d'autres points doivent eux aussi être réformés, qu'il s'agisse des décrets sur le classement des armes et des munitions, du piégeage, etc. J'insisterai tout particulièrement sur la nécessité d'accorder un droit de priorité aux locataires de droits de chasse dans les forêts domaniales qui ont bien géré leurs territoires.
    Le dernier sujet que je voudrais évoquer a plus spécifiquement trait aux trois départements régis par la loi locale : Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle. Il s'agit de la réforme du syndicat des chasseurs qui, contrairement à ce que laisse supposer son nom, n'est pas une organisation de défense mais une association chargée de payer les dégâts causés par des sangliers, dont le nombre, comme dans tout le reste de la France, est en très forte augmentation. La réforme que nous vous proposerons consistera à responsabiliser financièrement et localement les adjudicataires de chasse de façon à faire réellement baisser les dégâts causés par les sangliers aux cultures agricoles.
    Voilà, madame la ministre, les quelques réformes que nous attendons du Gouvernement. Sachez que nous vous faisons confiance et que nous sommes prêts à défendre toutes celles qui iront dans le bons sens, autrement dit qui permettront un exercice de la chasse raisonné, respectueux des équilibres agro-sylvo-cynégétiques, mais aussi de rétablir de bonnes relations entre les différents utilisateurs de la nature, en les réunissasnt plutôt qu'en les opposant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jacques Bascou.
    M. Jacques Bascou. Madame la ministre, nous voici réunis ce matin pour débattre de la chasse. Mais pourquoi un tel débat alors que cette séance est habituellement réservée à une proposition de loi ? Sans doute est-ce un nouvel exemple de l'affaiblissement des pouvoirs de l'Assemblée, le Gouvernement utilisant une niche parlementaire pour exposer sa politique en matière de chasse.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. C'est le bouquet !
    M. Jacques Bascou. Le sujet est important, c'est entendu. La chasse, par le nombre de ses pratiquants - 1,4 million, ce qui place la France au premier rang des pays d'Europe - et par son enracinement dans la tradition populaire, héritée de la Révolution française, mérite attention et considération.
    Mais faut-il encore débattre après toutes ces heures passées dans cet hémicycle lors de l'examen des lois de juillet 1998 et de juillet 2000 ?
    Ce qu'attendaient les chasseurs aujourd'hui, ce n'est pas un débat de plus, ce sont des actes. Or cette séance ne sert qu'à expliquer pourquoi les promesses de campagne du Gouvernement n'ont pas été tenues.
    La chasse a été prise en otage par la politique politicienne, par l'opposition d'hier. J'en veux pour preuve l'annonce faite par le gouvernement actuel de la suppression du mercredi comme jour de non-chasse, problème spécifiquement franco-français dans la mesure où jamais la réglementation européenne n'a interdit la chasse quelque jour que ce soit pendant la période légale.
    C'est la raison pour laquelle, par un amendement à l'article 24 de la loi de juillet 2000, nous avions permis aux chasseurs de choisir au niveau départemental leur jour de non-chasse, certaines fédérations allant même au-delà d'un seul jour non chassé. Des députés de l'opposition d'alors, aujourd'hui dans la majorité - la plupart siègent sur ces bancs -, ont alors saisi le Conseil constitutionnel pour supprimer cette disposition aujourd'hui présentée comme une grande avancée.
    Aujourd'hui, rien n'est réglé. Je ne parle pas de la chasse de nuit, désormais encadrée par la loi depuis le texte de juillet 2000, dans le respect de la directive communautaire « oiseaux » de 1979 et reconnue notamment dans les départements du littoral méditerranéen, où elle est traditionnelle. Ce qui pose problème, ce sont les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau et aux migrateurs, sujet particulièrement sensible sur la façade méditerranéenne et auquel sont attachés mes collègues Jean-Claude Perez, Jean-Paul Dupré et Kléber Mesquida.
    Faute d'avoir, à l'exemple des autres pays européens, intégré la directive « oiseaux » signée en 1979 par le Gouvernement français, les tribunaux s'en sont tenus à une interprétation particulièrement stricte des dispositions communautaires, rendant de fait inopérantes les possibilités de dérogation permises par la directive elle-même. La décision du Conseil d'Etat d'annuler vos arrêtés hier en est un nouvel exemple.
    Le précédent gouvernement avait demandé à Mme Wallström, commissaire européen, que soient précisées des notions non définies auxquelles se réfère la directive - période de nidification, époque de retour, espèce en mauvais état de conservation, prélèvement en petite quantité, risque de confusion -, ces précisions étant indispensables pour limiter les aléas juridiques. Aujourd'hui, il faut poursuivre les négociations avec Bruxelles pour éclaircir ces points.
    De même, des dérogations aux dates de fermeture sont possibles. D'autres pays les ont obtenues, comme l'Espagne, à 100 kilomètres de mon département, et des autres pays candidats à l'élargissement les ont demandées.
    Ces dérogations doivent se fonder sur des données scientifiques. Celles-ci s'enrichissent chaque jour d'études nouvelles qui sont avant tout des travaux d'observation. Elles ont été recueillies selon des méthodes différentes, des années différentes, dans des lieux différents, dans des conditions climatiques différentes, ce qui entraîne des interprétations différentes et donc des controverses sur les dates d'ouverture et de fermeture, mais justifie également un échelonnement des dates de fermeture qui n'est pas contraire à l'esprit de la directive. C'est le cas sur l'arc méditerranéen, où des mesures ont montré qu'une fermeture de la chasse aux grives à la fin février n'aurait pas d'incidence sur la conservation de l'espèce.
    Il faut donc poursuivre les négociations avec Bruxelles. Des représentants du Conseil d'Etat sont déjà intervenus en 2001 auprès de la Commission européenne afin d'obtenir l'assurance que les décrets et arrêtés pris par notre pays ne seraient pas jugés ensuite non conformes. Qu'en est-il ?
    Vous avez déclaré aux chasseurs que M. Dutruc-Rosset avait eu des contacts avec la Commission européenne pour tenter d'obtenir une réforme de la directive Oiseaux. Où en est-on ? Quelles initiatives européennes le Gouvernement a-t-il prises depuis six mois ?
    Ce sont ces questions que les chasseurs, au-delà des déclarations d'intention et des effets d'annonce, se posent aujourd'hui. Ce débat ne les aura pas éclairés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, selon certains théoriciens de l'action publique, un problème a d'autant plus de chances d'être réglé qu'on a laissé pourrir la situation. C'est une vision bien suspicieuse de la politique, mais comment ne pas la partager après dix ans de querelles stériles sur la fixation de la période de chasse, alors que tous les autres pays européens ont réussi à adopter un cadre législatif pragmatique et consensuel ?
    Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Parce que le précédent gouvernement n'a pas pris ses responsabilités, en refusant d'inscrire dans la loi les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse,...
    M. Pierre Ducout. On a essayé !
    M. Nicolas Perruchot. ... en n'engageant pas un examen scientifique et objectif des périodes de nidation, de reproduction et de migration des oiseaux, et en n'insistant pas auprès de la Commission européenne et de ses partenaires pour clarifier la portée exacte de l'article 7 de la directive Oiseaux de 1979, alors que la Cour de justice des Communautés européennes a développé une jurisprudence extensive, sans lien avec les études scientifiques diligentées au niveau du comité ORNIS et des groupes de réflexion nationaux.
    Pire : au cours des cinq dernières années, on a construit une image des chasseurs fausse et injuste, celle de personnages brutaux et vulgaires, à contre-courant de l'évolution vers plus d'urbanité, méprisants de la nature et de la tranquillité de leurs concitoyens.
    Maintenant que la situation est bel et bien pourrie, que les chasseurs sont las d'être pris pour des boucs émissaires et d'assister à une joute juridique entre Gouvernement et Conseil d'Etat, sans disposer d'une visibilité assurée quant aux conditions d'exercice de leur loisir, que les associations protectrices de la nature ne se satisfont pas non plus de la situation, il est bien temps d'agir.
    Nous attendons que l'interprétation de la directive Oiseaux de 1979 par les juridictions nationale et communautaire se fonde sur une analyse scientifique partagée. Madame la ministre, est-il prévu que les avis du nouvel observatoire de la faune sauvage, créé par le décret du 17 juillet 2002, soient transmis au comité ORNIS, qui devra obligatoirement les prendre en compte ? Sinon, je ne vois pas quel pourrait être l'apport de cette structure.
    J'aimerais qu'on m'explique pourquoi la chasse aux oiseaux migrateurs pourrait s'ouvrir dès le mois d'août en Grèce, en Finlande et au Portugal, et seulement à partir du 1er septembre en France.
    J'aimerais qu'on me dise pourquoi elle doit prendre fin chez nous le 31 janvier, alors qu'elle peut se poursuivre jusqu'à la fin du mois de février en Grèce et au Portugal.
    J'aimerais qu'on m'explique pourquoi la directive de 1979 renvoie aux Etats membres la responsabilité de fixer les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse, sur la base des observations scientifiques locales, alors que cette décision est entièrement déterminée par des principes prétoriens. Au nom de la protection complète des espèces, l'arrêt de la chasse devrait avoir lieu dès l'arrivée de quelques individus. Au nom du risque de confusion et du risque de dérangement, la période de chasses est réduite comme une peau de chagrin.
    Je suis parfaitement conscient des risques qui pèsent sur la survie des oiseaux migrateurs et des espèces rares, mais on ne peut décemment pas réduire la chasse à un risque auquel il faudrait appliquer le principe de précaution. Dans le doute, abstiens-toi ! Il me semblerait plus efficace et plus respectueux de la liberté individuelle d'étendre la règle du plan de chasse en limitant les prises autorisées pendant les périodes intermédiaires, au lieu d'interdire purement et simplement la chasse.
    De même, l'imposition du mercredi comme jour de non-chasse n'est pas dans l'esprit de la directive de 1979. Entre les attentes des promeneurs et les loisirs des chasseurs, il y a moyen de trouver une solution acceptable pour tous, qui ne soit pas imposée d'en haut de manière dogmatique.
    En outre, afin d'éviter que des contraintes financières trop fortes et dissuasives ne pèsent sur les chasseurs, notamment les plus modestes d'entre eux, les dégâts causés par le gibier devraient être pris en charge par l'Etat.
    Sur tous ces sujets, il faut passer d'une culture de la contrainte à une culture du dialogue et de la responsabilité. Madame la ministre, je compte sur votre détermination pour engager cette réforme, qui est une clef d'une protection de l'environnement réussie.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la chasse populaire et citoyenne est dans l'impasse depuis la décision de la Cour de justice des Communautés européennes de 1994. Durant la précédente législature, nous avons tenté de pacifier le débat en fixant dans la loi les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse. En 1998, puis en 2000, des dispositions législatives avaient cet objectif, mais je soulignais à l'époque que nous n'écartions pas pour autant le risque contentieux.
    A chacune de nos tentatives, nous nous heurtons en effet à l'interprétation intransigeante du Conseil d'Etat, qui reprend mot à mot la fameuse décision de la Cour de justice des Communautés européennes, bien que celle-ci ait outrepassé ses prérogatives. Dernière preuve, dernier avatar, hier, avec la décision du Conseil d'Etat cassant votre arrêté sur la date de fermeture de la chasse à la grive et à l'oie cendrée, madame la ministre.
    La chasse mérite mieux que l'exploitation politique et les promesses inconsidérées, et la droite n'a pas manqué d'en faire lors des dernières élections. Cessons de faire de la chasse un enjeu de polémiques électorales qui ne favorise que les extrémistes des deux camps et nuit aux vrais chasseurs.
    L'actuel gouvernement, après les promesses passées, fait la difficile expérience de la confrontation à la réalité juridique. Vous nous proposez un débat là où la loi, hier, a échoué. Alors que, dans l'opposition, votre production juridique était nourrie et vos propos catégoriques, aujourd'hui au pouvoir, vous nous proposez un simple débat qui vous permettra de tout dire sans rien faire. Intellectuellement, ce n'est pas satisfaisant. Messieurs de la majorité, vous ne vous en sortirez pas à si bon compte avec une opération de communication. Les chasseurs ne sont pas dupes. Un débat, c'est bien, des solutions, c'est mieux.
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. On va y venir !
    M. Jacques Desallangre. Mes collègues Maxime Gremetz et François Liberti se sont déjà attelés à la tâche en déposant une proposition de loi contenant des mesures concrètes et attendues par les chasseurs. Notre débat, pour ne pas être vain, doit déboucher sur des propositions également concrètes, une méthode efficace. Je ne doute pas que nous nous efforcions tous ensemble d'y parvenir.
    Pour résoudre avec sincérité le problème qui nous est posé depuis dix ans et dépassionner les affrontements stériles qui le polluent, il faut changer de méthode et, notamment, aborder de façon scientifique les questions posées par la préservation indispensable des espèces, préservation souhaitée par la quasi-totalité des chasseurs.
    La directive a fixé certains objectifs de préservation auxquels nous ne pouvons que souscrire, mais, par définition, une directive lie les Etats membres quant aux résultats à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens, en vertu de l'article 189 du traité.
    Aujourd'hui, l'une des clefs pour sortir de l'impasse est d'apporter des preuves scientifiques que les espèces de gibiers d'eau peuvent être chassées en février sans que l'on porte atteinte à leur préservation. Nous pourrions ainsi prouver que la loi française répond à la lettre aux principes de préservation des espèces fixés par la directive européenne. La stabilité juridique acquise par cette méthode scientifique assurera la pérennité de nos traditions de chasse. Dans mon département, les chasseurs sont prêts à accepter cette méthode intellectuellement rigoureuse, car ils comprennent qu'elle est une chance que nous devons saisir pour préserver la chasse populaire.
    Une commission scientifique d'experts indépendants doit donc être installée dans la perspective de remettre un rapport fondé sur des éléments objectifs. Le travail de cette commission pourrait déterminer pour chaque espèce le niveau de prélèvement acceptable permettant de préserver la ressource, et les dates de chasse par espèce en fonction de l'état global des populations. L'élaboration de ce rapport faisant autorité permettra également de trancher sur les accusations gratuites, car scientifiquement peu étayées, que se renvoient les partisans de l'extrême chasse et les anti-chasseurs.
    Sur la base de ces rapports scientifiques, nous pourrions étayer, asseoir notre volonté politique de régler enfin ce qui est devenu le grave problème de la chasse. Si cela est nécessaire - à mon avis, ce sera le cas -, la majorité gouvernementale pourra demain, sur ces bases, imposer la révision de la directive européenne comme elle le promettait hier, réformer l'interprétation abusive qu'en a faite la CJCE et revenir à l'esprit d'équilibre qui, en 1979, avait guidé ses rédacteurs.
    Ne nous voilons pas la face : jusqu'à présent la France n'a jamais présenté de dossier suffisamment solide à Bruxelles en dépit de l'insistance de parlementaires de tous bords. Il est temps que, tous ensemble, nous imposions au Gouvernement d'explorer cette piste scientifique, qui, avec d'autres décisions courageuses, nous permettra de sortir de l'ornière dans laquelle nous ont plongés au premier chef la CJCE mais aussi la surexploitation politique de certains extrémistes, dont des groupes idéologiquement anti-chasse.
    Les chasseurs font preuve de leur responsabilité et de leur attachement au milieu naturel en acceptant le débat sur le terrain scientifique. Soyons aussi responsables qu'eux : donnons cette chance à la chasse. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Joël Hart.
    M. Joël Hart. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me demandais ce matin si être parlementaire servait encore à quelque chose, quand on voit que les décisions prises par nos ministres, qui émanent de nos rangs sont brutalement cassées par un groupe d'hommes et de femmes qui, quel que soit le respect qu'on puisse leur porter, n'ont rien à voir avec ce qui se passe sur le terrain.
    Je tenais, madame la ministre, à vous dire, au nom des chasseurs de gibier d'eau de la Somme, un merci provisoire. Ils ont dit avant-hier : « elle a osé ». Merci pour eux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je tenais aussi à vous dire que les parlementaires de la majorité, mais sans doute au-delà si j'ai bien écouté ce matin, sont contents que vous ayez osé, parce que ça va remettre un peu les pendules à l'heure.
    Il faut qu'à Bruxelles, une fois pour toutes, il faut qu'au Conseil d'Etat ou ailleurs on se rende compte qu'il y a des changements.
    J'entends tout le monde parler de changements dans la climatologie, et je ne le conteste pas à Abbeville.
    M. Yves Cochet. C'est réel !
    M. Joël Hart. Il faut aussi en parler pour les oiseaux, les migrations, la chasse.
    J'entends aussi dire qu'il faut des jours de non-chasse pour respecter les gens qui vont se promener. J'ai été élevé dans un village de trente-cinq habitants. J'ai toujours chassé, avec mon père, puis seul. Jamais les gens qui se promenaient ne nous ont dit quoi que ce soit. Et nous ne leur disions jamais quoi que ce soit. On s'entendait bien. Alors, pourquoi, tout à coup, opposer des gens qui se promènent à des gens qui chassent ? Ceux qui chassent se promènent aussi !
    Dans un petit village, dans un petit territoire, il est rare de tirer un coup de fusil dans la journée, mais on rencontre les copains, les amis, on se retrouve le soir. C'est cela aussi la convivialité et le mélange social dont l'un d'entre vous parlait tout à l'heure. C'est important.
    M. Jacques Briat. Très bien !
    M. Joël Hart. Je souhaiterais donc, mes chers collègues - je ne suis pas un vieux parlementaire, je ne peux pas donner de leçons, mais je le dis avec sincérité -, que la chasse soit une question transversale, que nous en parlions, comme au groupe chasse d'ailleurs, sans nous demander si nous sommes de gauche ou de droite. J'ai apprécié tout à l'heure ce que disait Pierre Ducout.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. C'est vrai !
    M. Joël Hart. C'était posé, intéressant, objectif. Pourquoi ne pas le reconnaître ? Une fois pour toutes, essayons de travailler ensemble. Nous serons jugés par les chasseurs, leurs familles, les commerçants qui vivent de la chasse, tous ceux qui en vivent d'ailleurs, sur notre capacité à travailler ensemble sur un sujet, et non pas sur notre capacité à nous diviser, parce que nous sommes assis ici ou là sur les bancs de l'Assemblée.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
    M. Joël Hart. Quant au mercredi, madame la ministre, c'est une question de communication. Dans mon département - le président de la fédération est là - dans les territoires de chasse, dans les bois, on ne chasse pas cinq ou sept jours sur sept ! Il faut remplir une feuille et l'on ne peut cocher que deux jours dans la semaine pour chasser. Il y a cinq jours de non-chasse par territoire. Bien entendu, cela ne s'applique pas au gibier d'eau, mais on peut trouver des solutions. Qu'on ne nous accuse pas de vouloir chasser le mercredi pour chasser sept jours sur sept. Ce n'est pas vrai ! On chassera toujours deux ou trois jours, ou une journée, selon les fédérations. Qu'on décentralise, et on trouvera une solution.
    Dernier point : les chasseurs, sur le terrain, ne comprennent plus toutes ces vicissitudes administratives. Ils ne veulent pas savoir si c'est Bruxelles. Un grand nombre d'entre eux ne savent même pas, et c'est tant mieux, ce qu'est véritablement le Conseil d'Etat. Ils savent seulement que c'est au-dessus. Un Président de la République a parlé un jour de machin à propos d'une institution internationale, ils disent à peu près la même chose. Ils n'en veulent à personne. Ce qu'ils veulent, c'est pouvoir aller tranquillement poser leurs appelants et chasser, pas tuer des milliers de bêtes mais passer la nuit à chasser. Si le gibier ne vient pas, ce n'est pas grave : on s'est retrouvé et on a passé une bonne soirée ensemble. Parfois, on se réconcilie entre voisins, parce qu'il y a aussi bien l'ouvrier d'usine que le cadre, le fonctionnaire ou le chômeur. En baie de Somme, nombreux sont les RMIstes qui vont chasser à mobylette, le fusil en bandoulière.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Eh oui !
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. C'est la réalité !
    M. Joël Hart. Ils sont respectables, et ce n'est pas de la démagogie.
    Je crois honnêtement que nous devons dépasser nos réactions primaires, car elles sont toujours primaires quand nous parlons politique, et essayer de travailler pour les chasseurs, quelle que soit leur origine, quelle que soit leur chasse et quelle que soit leur conception de la haute administration, s'il en est une.
    Voilà ce que je voulais vous dire, madame la ministre, avec un peu de passion certes, mais beaucoup de sincérité, au nom de l'ensemble des chasseurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. David Habib.
    M. David Habib. L'UMP, appelée en renfort pour dissimuler les insuffisances de votre gouvernement, madame la ministre, nous propose un débat pour rien. D'aucuns le considèrent comme inutile parce qu'il n'est pas sanctionné par un vote. Pour ma part, au contraire, je l'apprécie et je note qu'au-delà des engagements partisans des uns et des autres, à l'exception notable d'une intervention, il y a sur ces bancs de vraies convergences.
    Si l'UMP souhaitait vous offrir un espace pour justifier votre démarche hésitante et apporter à la représentation nationale des explications aussi confuses qu'embarrassées après les déclarations tonitruantes du Premier ministre en date du 12 juin 2002, elle commettrait une grave erreur.
    Elu des Pyrénées-Atlantiques, je mesure la réalité de cette pratique aussi sportive que culturelle, la chasse, et je veux aborder quatre points qui me paraissent essentiels.
    Le premier concerne la chasse elle-même. Notre pays, on l'a dit, recense 1 400 000 chasseurs, qui représentent un poids économique certain, de 2 à 2,5 milliards d'euros. Aussi, notre groupe considère la chasse comme une réalité forte que l'on se doit de respecter et d'accompagner.
    Ma deuxième réflexion a trait à la dimension politique de la chasse et du débat qui l'entoure. Nous sommes de plus en plus nombreux à constater et à regretter l'instrumentalisation de la chasse dans le débat politique. Face au mouvement des chasseurs, qui est une originalité tricolore et que l'on ne saurait réduire à un mouvement populiste, il y a, c'est vrai, l'élitisme des associations environnementales qui n'ont eu de cesse de stigmatiser une population davantage attachée à une culture populaire et traditionnelle que désireuse de mettre en cause les équilibres naturels de nos régions.
    Dans ce débat politique il est temps de dire qu'il y a d'autres urgences que la chasse, y compris dans le Sud-Ouest. Il est également temps d'affirmer que les chasseurs sont des citoyens à part entière, que l'on ne saurait réduire socialement et politiquement à la pratique de ce loisir.
    Troisième réflexion : ce débat sur la chasse, non pas celui de ce matin mais celui que l'on a politiquement instrumentalisé dans le pays en vue de la présidentielle (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), n'est possible que parce que notre pays est incapable aujourd'hui de répondre avec crédibilité aux vrais défis du monde rural et de sa population, de plus en plus troublée. Toute disposition sur la chasse est vécue comme une énième mise en cause de nos territoires ruraux. On est donc face à un rôle identitaire de la chasse, que vous avez d'ailleurs rappelé, madame la ministre, en parlant de « blessure rurale ».
    Quatrièmement, il est temps d'apaiser non pas la chasse - elle l'est pour l'immense majorité des chasseurs -, mais le débat sur la chasse en recherchant la plus large convergence pour le jour de non-chasse. Oui, la loi qu'a fait voter l'ancienne majorité ne retenait pas de façon arbitraire le mercredi : elle laissait à chaque département le soin de se déterminer. Oui, nous sommes favorables à une initiative qui reprenne la volonté exprimée par l'ancienne majorité et que le Conseil constitutionnel, sollicité par les députés de l'opposition de l'époque, a censurée.
    M. Pierre Ducout. Eh oui !
    M. David Habib. Madame la ministre, votre mission comprend tant la gestion du milieu que celle de la chasse, et plus particulièrement la solution des questions relatives aux jours de non-chasse et aux dates d'ouverture et de fermeture. Pour ma part, je soutiendrai toute initiative qui ira dans le bon sens.
    Que vous le vouliez ou non, la poursuite de ces objectifs procède immanquablement de la même logique que celle qui a inspiré l'Assemblée lorsqu'elle a adopté la loi chasse de juillet 2000. N'est-il pas temps de mettre un terme à l'anachronique guérilla juridique sur les dates ? M. Ducout vient de vous proposer de procéder, comme en 1998, par voie législative. En effet, nous devons admettre qu'il existe un problème d'ordre réglementaire ; il convient donc d'éviter la censure de la juridiction administrative. Tout comme M. Ducout, nous suggérons que soit votée chaque année, en fonction de l'observation des espèces, une loi fixant les dates d'ouverture et de fermeture, en attendant d'imposer à Bruxelles une interprétation nouvelle et correcte de la directive « Oiseaux » de 1979.
    Voilà, mesdames, messieurs, le message qu'au nom du groupe socialiste, mais aussi au nom de mon département, les Pyrénées-Atlantiques, je souhaitais vous transmettre.
    Votre tâche est complexe, madame la ministre. Vous avez pris des engagements : il est temps de les tenir. Quant à nous, nous ne ferons rien pour vous compliquer la vie.
    M. Jacques Briat. Très bien !
    M. David Habib. Nous ne nous amuserons pas à saisir le Conseil constitutionnel, dès lors que seront préservés les équilibres rappelés par MM. Chanteguet, Ducout et Liberti. Vous avez aujourd'hui un devoir de réponse. Les Français, notamment en milieu rural, attendent que le Gouvernement s'exprime clairement, sans faire référence à des débats passés, qui ont été tranchés par les élections, et qu'il offre à la fois la stabilité juridique et les encouragements qu'ils attendent des pouvoirs publics. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Roland Chassain.
    M. Roland Chassain. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce n'est pas seulement en qualité de parlementaire, mais c'est aussi en tant que chasseur, représentant l'arc méditerrannéen et la Camargue, que je tiens à exposer à l'Assemblée nationale les attentes légitimes de nos compatriotes.
    La chasse, vous le savez, est avant tout un art de vivre en harmonie avec l'espace et la nature, une activité enracinée depuis des siècles dans le respect des pratiques traditionnelles transmises de génération en génération. C'est aussi une activité très liée au monde rural, pratiquée essentiellement par des gens simples - ouvriers, agriculteurs ou retraités - qui ont une véritable passion pour le terroir.
    Toutefois, depuis plus de vingt ans, des associations subventionnées avec des fonds publics et qui s'autoproclament « protectrices de la nature » intentent des procès en sorcellerie contre la chasse, avec le soutien sans faille, il faut le dire, d'une classe médiatique qui ne connaît de la nature que ce que l'on en dit dans les salons parisiens où les dimanche au Jardin des Plantes.
    M. Yves Cochet. Quelle caricature !
    M. Roland Chassain. Les détracteurs de la chasse oublient volontairement qu'ils s'attaquent non seulement à une activité de loisir mais aussi à une activité économique, qui représente plus de 2 milliards d'euros et 23 000 emplois.
    Si nous poursuivons dans la voie d'une politique dictée par l'idéologie écologiste extrémiste, nous n'aurons plus, dans quelques années, suffisamment de chasseurs pour assurer le rôle essentiel de régulation des espèces, de protection des récoltes et de gestion des espaces naturels.
    M. Richard Mallié. Eh oui !
    M. Roland Chassain. Prenons l'exemple de la Camargue, qui est la dernière grande zone humide d'Europe. Sans les chasseurs, qui investissent énormément d'argent et de temps pour aménager les marais, elle aurait bien du mal à exister. En effet, sans la chasse, les propriétaires assécheraient les marais, où viennent se nourrir les canards, pour produire des céréales. J'ajoute que ce ne sont pas les écolos qui ont fait la Camargue, mais bien ses habitants. Voilà la réalité !
    M. Richard Mallié. C'est vrai !
    M. Roland Chassain. Les jeunes sont aujourd'hui découragés et le renouvellement des générations a de plus en plus de mal à se faire. Il faut donc simplifier le permis et alléger les sanctions scandaleusement démesurées.
    Si nous ne réagissons pas, nous serons obligés de faire comme en Suisse, c'est-à-dire payer des fonctionnaires pour éliminer le gibier afin de réguler les espèces sauvages.
    Aussi nous attendons aujourd'hui des actes responsables qui rendent aux chasseurs toute leur place dans la société.
    Parmi les quelques mesures qui doivent être immédiatement mise en oeuvre, je citerai tout d'abord le rétablissement du droit de chasse le mercredi : l'expérience a montré que rien ne justifiait cette interdiction. De plus, c'est la mesure la plus efficace pour assurer une formation cynégétique aux jeunes.
    En second lieu - et c'est pour moi le point le plus important, notamment pour la chasse au gibier d'eau -, il convient absolument de clarifier les modes d'application de la directive 79-409, qui a fait l'objet d'une jurisprudence abusive du Conseil d'Etat et de la Cour de justice européenne, oublieux des principes qui avaient rendu possible son adoption par les Etats européens en 1979.
    La France doit fixer des dates d'ouverture et de fermeture différenciées selon les régions afin de tenir compte des réalités locales.
    Ainsi, pour les départements du sud, toutes les observations réalisées depuis quinze ans par le Muséum et l'Office national de la chasse démontrent que plus de 90 % des oiseaux sont volants au 15 août. Il semble donc indispensable de retenir cette date pour l'ouverture de la chasse au gibier d'eau. Vouloir retenir le critère de 100 % d'oiseaux volants est aberrant d'un point de vue scientifique : il s'agit d'une pure position idéologique anti-chasse.
    De même, la période de fermeture doit être fixée au 28 février, sauf pour le canard colvert, pour lequel la date du 31 janvier devrait être acceptée par l'ensemble des acteurs.
    Pour appuyer mon propos, je me contenterai de rappeler que quatorze associations de protection demandaient, en 1982, « l'interdiction de toute chasse pendant la période de nidification et de reproduction, soit du 28 février au 15 août ».
    Tous ces points ont été évoqués, madame la ministre, lors de la réunion qui s'est tenue le 7 février en Arles et à laquelle ont participé votre directeur de cabinet, des représentants des chasseurs et des élus.
    Enfin, il serait opportun d'envisager la création d'un comité interministériel de la chasse, associant notamment votre ministère et celui chargé de l'agriculture et des affaires rurales, afin de traiter l'activité cynégétique sous tous ses aspects,...
    M. Stéphane Demilly. Très bien !
    M. Roland Chassain. ... qu'il s'agisse d'aménagement et d'entretien de l'espace rural, de gestion des réseaux hydrauliques et de protection des récoltes.
    Madame la ministre, mes chers collègues, je vous en conjure, agissons en ayant un profond respect pour nos amis chasseurs, qui ont été méprisés et maltraités par l'ancienne majorité de gauche.
    Il faut rétablir les pratiques traditionnelles qui, comme le rappelait le président Jacques Chirac, le 13 avril dernier, « fondent notre culture nationale ».
    En conclusion, je dirai qu'une France sans chasseurs, ce serait comme un ciel sans étoiles. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Christophe Masse.
    M. Christophe Masse. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat qui s'ouvre aujourd'hui doit permettre de mettre en lumière tous les éléments de nature à aider à la préparation de mesures législatives importantes sur la chasse, et surtout contribuer à y réconcilier les chasseurs et certains Français.
    Nous sommes quelque 1,4 million de chasseurs. Comme il y a 60 millions de Français, cela fait environ 2 % de la population. Or, pour diverses raisons, cette population a plutôt tendance à nous critiquer. Il faut donc lui rappeler le rôle de la chasse, tant au niveau de la régulation cynégétique que de l'économie régionale et du respect des cultures et des traditions dans une démocratie.
    M. Jacques Briat. Très bien !
    M. Christophe Masse. Sans les chasseurs, la régulation cynégétique n'est plus naturelle. Pourtant, elle doit être organisée.
    Pour ce qui est de l'économie régionale, il faut savoir que, outre le fait qu'un chasseur dépense plus de 1 000 euros par an pour vivre sa passion, il est souvent le seul utilisateur payant d'un espace naturel.
    Enfin, dans une démocratie, le respect des cultures et des traditions nécessite une compréhension mutuelle et, surtout, une grande tolérance.
    Le cadre étant ainsi défini, examinons quels sont nos moyens d'action pour satisfaire à cette triple exigence.
    Ces moyens sont évidemment politiques, mais politiques avec un grand P - nous sommes ici pour en débattre -, et certainement pas politiciens. Or, malheureusement, madame la ministre, vous avez à deux reprises trompé les chasseurs. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Premièrement, parce que les engagements électoraux pris par votre majorité durant les élections législatives étaient des voeux pieux. Vous saviez très bien la faiblesse de votre argumentation et que vous seriez incapables de traduire ces engagements par des mesures législatives. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    M. Pierre Ducout. Tout à fait !
    M. Patrick Lemasle. Il a raison !
    M. Christophe Masse. Deuxièmement, parce que vous avez promulgué il y quelques jours des arrêtés de prolongation en sachant très bien que le Conseil d'Etat allait les casser. De la sorte, vous espériez peut-être rejeter la responsabilité sur les juges, dont je rappelle qu'ils sont là pour dire le droit et non pour l'interpréter. Ces arrêtés, c'était la chronique d'un échec annoncé.
    M. Patrick Lemasle et M. Pierre Ducout. Tout à fait !
    M. Christophe Masse. Vous avez donc à deux reprises promis de résoudre des problèmes, tout en sachant parfaitement que ce n'était pas possible. Aujourd'hui, 11 février 2003, nous en sommes donc au même point qu'en février 2002, la confusion et le mensonge en plus ! (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

    Nous débattons, fort heureusement, ce matin, je l'espère, dans de meilleures conditions, comme le montrent les nombreuses convergences qui se font jour.
    Le temps est devant nous pour préparer la saison 2003-2004. Les pistes de travail sont nombreuses, et j'en citerai quelques-unes.
    S'agissant de la journée de non-chasse, je crois que nous nous inscrivons maintenant tous dans la logique d'une journée de limitation totale ou partielle de la chasse.
    Nous pouvons également envisager le rattachement de la chasse au ministère de l'agriculture, afin de freiner l'opposition primaire entre chasseurs et écologistes, lorsqu'on sait le rôle complémentaire qu'ils jouent.
    Pour ce qui est de la directive de 1979, cause de tous nos maux, il est nécessaire de la remettre en cause. A ce sujet, nous avons appris qu'on avait laissé le choix à de nouveaux pays souhaitant entrer dans l'Union européenne de l'appliquer ou non ; il serait judicieux de profiter de l'occasion pour revenir sur cette directive.
    Par ailleurs, le principe de confusion - il s'agit de confusion entre les gibiers - a souvent été avancé par le Conseil d'Etat pour casser les derniers arrêtés. Or comme ce principe est peu développé dans la directive de 1979 mais largement interprété par le Conseil d'Etat, il semble indispensable que notre assemblée prépare un complément législatif pour empêcher l'arbitraire du Conseil d'Etat.
    La chasse n'est pas et ne peut pas être uniformisée sur tout le territoire français. Comme il existe des langues régionales, il existe des traditions de chasse régionales qui reposent sur des décennies de gestes et de techniques perpétuellement réalisés et qui concernent des gibiers spécifiques. Notre assemblée doit donc travailler pour mettre en oeuvre un dispositif tenant compte des spécificités départementales ou régionales et organisant des fermetures échelonnées tout au long du mois de février.
    En conclusion, je dirai que, à l'heure actuelle, la diminution de certains gibiers dépend beaucoup plus de la qualité des milieux naturels que des prélèvements effectués par la chasse.
    M. David Habib et M. Patrick Lemasle. Très juste !
    M. Christophe Masse. On ferait mieux parfois de ne pas fermer les yeux sur les activités de certains industriels pollueurs qui, pour masquer leurs crimes, montrent du doigt les chasseurs et financent largement des émissions télévisées dites « histoires naturelles » dans lesquelles la chasse est largement vilipendée.
    Mes chers collègues, il convient donc de continuer à travailler dans le sens de la réconciliation, en respectant et en faisant respecter les droits et les devoirs de chacun. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)     M. Richard Mallié. M. Masse est un grand chasseur !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
    M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat qui se tient aujourd'hui, lors d'une séance relevant de l'initiative parlementaire, nous donne l'occassion d'aborder les grands points concernant la chasse : jour de non-chasse, dates d'ouverture et de fermeture, statut des fédérations, prise en compte des données scientifiques dans le cadre de l'Observatoire. Toutefois, ce débat sans vote ne saurait suffire à apaiser les tensions : il doit être suivi de mesures concrètes et urgentes.
    On compare trop le chasseur à un tueur : le chasseur guerrier ! Les accidents de chasse sont abusivement médiatisés, occultant un point essentiel à la base de tout débat sur la pratique cynégétique : le potentiel traditionnel de la chasse.
    Je ne suis pas chasseur,...
    M. Jean-Claude Lemoine. Personne n'est parfait !
    M. Jean-Pierre Decool. ... mais je répète régulièrement que je défends la chasse comme une tradition. Au même titre que la pêche, que les activités de tradition, la chasse doit être protégée en tant qu'art de vivre, car elle elle a son utilité dans l'espace social.
    Faut-il rappeler que la chasse était à l'origine un moyen de subsistance pour l'homme ? Aujourd'hui, la pratique cynégétique doit être appréciée en tant qu'instrument de régulation de la faune sauvage dans le monde agricole et forestier. De même, les agriculteurs chasseurs sont, en tant qu'utilisateurs du territoire, associés au maintien et à la restauration des habitats.
    Sans la chasse, le gros gibier proliférerait, causant de nombreux dégâts aux cultures, aux exploitations agricoles et aux forêts. Qui indemniserait les exploitants agricoles dont les cultures seraient endommagées par le gibier en surnombre ? Qu'adviendrait-il de nos forêts déjà détruites par les tempêtes si la faune sauvage était insuffisamment régulée ? La chasse aide à la reconstitution des espaces naturels. Elle assure également un rôle dans le maintien de certains métiers ou savoir-faire traditionnels : les armuriers, les maréchaux-ferrants, les palefreniers, les éleveurs.
    La pratique cynégétique a sa place dans la maîtrise écologique, sociale et économique du territoire, répondant ainsi aux objectifs de développement durable.
    Dans ce contexte, l'équilibre durable des habitats naturels suppose, madame la ministre, qu'une réponse positive soit apportée à la demande que j'ai faite avec André Flajolet, député du Pas-de-Calais, et qui est aujourd'hui partagée sur tous les bancs, de maîtriser la lutte chimique pour réguler la population du rat musqué.
    On entend très souvent parler de rapports conflictuels entre les chasseurs et ceux qui se prétendent protecteurs exclusifs de la nature. Seules ces tensions sont médiatisées, alors que des exemples de projets concrets et communs existent.
    Ainsi, sur le territoire de ma circonscription, dans le Nord, et plus particulièrement dans la commune dont je suis le maire, j'ai constitué, en 2001, une commission extramunicipale composée de chasseurs, de « vertistes », d'agriculteurs, de randonneurs et d'autres personnes privilégiant le contact avec la nature. Grâce aux réflexions menées au sein de ce groupe qui pourrait paraître atypique, la part de responsabilité des uns et des autres a été prise en compte. Un chasseur a par exemple proposé à l'ensemble des membres de cette commission de mieux connaître une chasse traditionnelle en Flandre : la chasse à la hutte. Par ailleurs, nous créerons prochainement un chemin de randonnée des huttes. Cela a également permis aux acteurs de l'espace rural de prendre conscience de la gestion raisonnée et raisonnable du milieu naturel par les chasseurs. Cette commisison a, entre autres actions, édité un document visant à promouvoir la plantation de haies d'essences locales, en harmonie avec la faune sauvage environnante.
    Bref, nous avons fait localement la démonstration que les chasseurs sont les meilleurs partenaires de l'écologie.
    La chasse doit être sauvegardée, tant pour son utilité dans l'espace naturel que pour ses valeurs traditionnelles, qu'elle doit transmettre aux générations futures.
    Madame la ministre, c'est avec conviction que je vous demande de prendre très rapidement des mesures : il faut supprimer le jour de non-chasse et fixer des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs selon les spécificités locales. A l'heure de la simplification, que ce soit au niveau de l'administration, des entreprises ou des associations, simplifions aussi la vie des chasseurs ! (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Gilles Cocquempot.
    M. Gilles Cocquempot. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les différents aspects juridiques du dossier « chasse » ont clairement été décrits depuis ce matin. Je n'ai donc pas l'intention de revenir sur l'interprétation que donnent, aujourd'hui encore, les tribunaux, en particulier le Conseil d'Etat, de la directive européenne « Oiseaux » de 1979, ni sur certaines des avancées de la loi « chasse » votée en juin 2000. Ma contribution au débat de ce matin consistera plutôt à essayer d'être le plus constructif possible, et de dépasser les antagonismes entre chasseurs et antichasseurs.
    Député de la septième circonscription du Pas-de-Calais, je connais bien le dossier de la chasse, de même que tous mes collègues du Pas-de-Calais. Ce département compte de très nombreux chasseurs, à tel point que la fédération départementale des chasseurs est la deuxième de France.
    Sur le territoire qui me concerne, je connais parfaitement les trois types de chasse :
    La chasse au bois, tout d'abord, qui a ses règles, sur lesquelles je ne vais pas m'attarder.
    La chasse en plaine, ensuite, qui pose un problème particulier. Sa date d'ouverture ne peut être fixée avant le quatrième dimanche de septembre. Dans un contexte de pratiques culturales qui voient la moisson s'effectuer en quelques jours et les enlèvements de récolte intervenir de plus en plus précocement - mi-septembre, par exemple, pour les betteraves - cette date peut être considérée comme trop tardive.
    Enfin, la chasse au gibier d'eau, très développée sur le littoral. Et c'est pour ce type de chasse que la polémique est la plus forte, s'agissant en particulier des dates d'ouverture et de fermeture. Sur ce point, il appartient aux instances européennes de préciser une fois pour toutes les dispositions de la directive « Oiseaux ». Personnellement, je souhaite que nous parvenions à mettre en oeuvre une chasse véritablement apaisée en dépassant les clivages parfois artificiels entre chasseurs et antichasseurs et en tentant de revenir simplement au bon sens.
    Depuis quelques jours, à cause du Tricolor et de ceux qui dégazent ou font du déballastage en prenant le prétexte de ce naufrage, le littoral du Nord - Pas-de-Calais est touché par la pollution et des milliers d'oiseaux en sont victimes. Un certain nombre de chasseurs travaillent de façon anonyme - ils ne souhaitaient pas spécifier qu'ils étaient chasseurs - aux côtés des bénévoles pour nettoyer et sauver les oiseaux mazoutés. Ce ne sont pas les quelques canards qu'ils peuvent tuer lors d'une chasse à la hutte qui vont compenser les pertes subies.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Tout à fait !
    M. Gilles Cocquempot. Cette attitude des chasseurs méritait, je crois, d'être soulignée, car elle s'inscrit dans une volonté de défendre l'environnement et la nature.
    Je prendrai maintenant deux exemples très précis pour illustrer mon souhait de revenir au bon sens.
    Mon collègue Jean-Pierre Decool a soulevé un réel problème, celui du rat musqué.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Sous les ricanements de vos amis !
    M. Gilles Cocquempot. En effet, cette question pouvait paraître quelque peu décalée par rapport au contexte international, notamment. Il reste que c'est un vrai problème. Des journaux régionaux ont même titré : « La bataille du rat a commencé. » Je vous ai moi-même interpellée, madame la ministre, sur la non-utilisation des produits d'empoisonnement.
    M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
    M. Gilles Cocquempot. Ces animaux sont bien reconnus comme chassables mais ils se reproduisent en dehors des périodes de chasse. Il faudrait que les préfets prennent des dispositions pour qu'on puisse les détruire efficacement.
    Mon second exemple a trait aux espèces protégées, je pense au cormoran, qui, dans le marais audomarois, pose de plus en plus de problèmes.
    Ces espèces protégées sont aujourd'hui tellement nombreuses qu'elles deviennent nuisibles. Or nous ne pouvons pas les détruire. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le message que je voudrais essayer de faire passer à la représentation nationale est simple : nous devons collectivement revenir au bon sens de la ruralité pour apporter des solutions aux problèmes de société auquel nous sommes confrontés, et notamment permettre aux chasseurs de pratiquer leur loisir sur un territoire, dans le respect de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Daniel Spagnou.
    M. Daniel Spagnou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le choix des électeurs, lors des élections législatives du mois de juin 2002, a laissé espérer un véritable changement dans la gestion du dossier chasse. Mais il est apparemment très difficile de revenir sur ce qu'a fait le précédent gouvernement et d'abroger les règles mises en place par Dominique Voynet et Yves Cochet, qui ont instauré dans notre pays ce que l'on peut appeler une véritable « dictature verte ».
    Une dictature verte qui s'applique avec constance chaque fois qu'un arrêté ministériel sur la chasse est publié. Le scénario est en effet toujours le même, avec des associations qui s'occupent de protection de la nature et qui déposent en urgence un recours devant le Conseil d'Etat.
    Mme Bachelot, avec courage, a voulu autoriser la réouverture de la chasse aux oiseaux de passage jusqu'au 16 février.
    M. Jean-Claude Lemoine. Très bien !
    M. Daniel Spagnou. Mais, une fois de plus, plusieurs associations de protection de la nature ont saisi le Conseil d'Etat, qui a suspendu hier les deux arrêtés de la ministre.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Suspendu seulement.
    M. Daniel Spagnou. Nous voilà revenus une fois de plus à la case départ.
    Dans mon département des Alpes-de-Haute-Provence, comme dans les Hautes-Alpes ou les Alpes-Maritimes, c'est la grive qui est plus particulièrement concernée.
    Avec mes collègues Henriette Martinez et Christian Estrosi, et tous les autres élus du Sud-Est, nous savons bien, comme tout le monde en Provence, que la chasse de la grive au poste, à l'agachon ou à la cabane est très prisée dans notre région. S'il existe une chasse qui mérite le qualificatif de chasse traditionnelle, c'est bien celle-là. La grive représente une page de notre histoire.
    Au temps de Napoléon III déjà, la grive faisait parler d'elle. Les autorités de l'époque avaient voulu en effet supprimer l'usage des lèques, ces pièges constitués d'une pierre plate et d'un simple bâton qui servaient à piéger ces oiseaux. La polémique fit rage entre les gens de la Provence et ceux de la capitale, et la lèque fut finalement maintenue. Aujourd'hui, c'est un peu le même combat qui continue, mais contre Bruxelles cette fois.
    Faudra-t-il, comme au xixe siècle, supplier les membres de la Commission « de nous abandonner la grive, cette aumône vivante que le ciel jette aux pauvres, aux plus mauvais jours de l'année » ? Il faut espérer que non !
    Mais les chasseurs d'oiseaux migrateurs sont ulcérés et révoltés par le fait que la pratique de leurs modes et périodes de chasse traditionnels aient été remis en cause par la loi chasse du 26 juillet 2000 et surtout par la fameuse directive européenne 79-409.
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est faux !
    M. Daniel Spagnou. C'est contre cette directive qu'il faut aujourd'hui engager le combat : lors du dépôt, il y a deux ans, d'une déclaration écrite présentée par les députés européens CNPT et demandant la modification de cette directive, il manquait cinquante voix environ. Il faut que la droite, aujourd'hui majoritaire au Parlement européen grâce à l'entente PPE et Libéraux, revienne à la charge et fasse pression sur la Commission pour faire bouger les choses. Car toutes les dérogations que pourra prendre le Gouvernement français seront attaquées devant les tribunaux tant que cette directive sera en application.
    Aujourd'hui, un Monsieur chasse nommé par Jean-Pierre Raffarin, Georges Dutruc-Rosset, s'est mis au travail pour rassembler les éléments nécessaires à la rédaction d'une nouvelle loi chasse, la quatrième en neuf ans. De son côté, Mme Bachelot a installé un groupe de travail réunissant des parlementaires de la majorité qui réfléchissent sur le même sujet. Mais il ne faut pas réfléchir trop longtemps...
    Car ce qui est clair maintenant, c'est qu'il nous faut, une bonne fois pour toutes, simplifier la pratique de la chasse, clarifier la réglementation, aider au dialogue entre les chasseurs et leurs différents partenaires. Et il faut le faire vite, car il y a urgence.
    Nous devons en effet établir dans ce pays un cadre juridique stable et propice à une pratique sereine de l'activité cynégétique. Et, pour une chasse enfin apaisée, nous devons mettre en place sans tarder les réformes réglementaires et législatives promises et que le monde de la chasse attend avec une réelle et compréhensible impatience. Nous devons le faire avec et pour les chasseurs, et non pas contre eux. Je fais confiance à notre ministre, qui nous a prouvé sa détermination, pour mener à bien cette délicate mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.
    M. Didier Quentin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de préciser d'emblée que je m'exprime aussi au nom de mes collègues Jean-Louis Léonard et Louis Giscard d'Estaing.
    Dura lex sed lex, seraient tentés de dire les chasseurs, qui continuent de subir les impacts négatifs, que beaucoup d'entre nous avions prévus, de la loi chasse du 26 juillet 2000, loi à laquelle je m'étais vigoureusement opposé, avec de nombreux collègues de l'opposition d'alors, devenue majorité d'aujourd'hui.
    M. Pierre Ducout. C'est primaire ! Ça n'a rien à voir !
    M. Didier Quentin. La tentative de rétablissement par la voie réglementaire d'un calendrier de chasse des oiseaux migrateurs montre en effet ses limites.
    Même si les nouvelles périodes proposées au ministère de l'écologie par le bon rapport de M. Dutruc-Rosset se fondaient sur les travaux sérieux du comité ORNIS, les recours systématiques intentés auprès du juge administratif par des associations de soi-disant protecteurs de la nature ont anéanti les espoirs des chasseurs, car - et c'est bien là le fond du problème - la nouvelle réglementation est toujours tributaire du dispositif alambiqué prévu par le décret du 25 janvier 2001.
    A la suite de la publication de l'arrêté dérogatoire pour la chasse des oies cendrées, les réactions des chasseurs de Charente-Maritime, dont je me fais ici l'écho, sont significatives.
    Ils considèrent comme louable la volonté de déroger, dans le respect de la directive européenne - chasse d'une espèce en bon état de conservation dans des conditions strictes - et en application du principe de subsidiarité, comme l'avait proposé en juillet 2000 par un amendement voté à l'unanimité le président Giscard d'Estaing. Malheureusement, cette volonté est annihilée par les contentieux - deux arrêts du Conseil d'Etat hier encore - ainsi que par des complications administratives inutiles et une méconnaissance des techniques de chasse.
    Il y a plus grave : les dérogations accordées aux chasseurs à la tonne pour pratiquer le mercredi et tirer quelques oies en février ont ouvert une polémique inutile du côté des chasseurs à la passée, dont la plupart sont d'origine modeste.
    La lecture de ce qui est interprété comme des « mesurettes » laisse à penser que l'on prête seulement attention aux plus nantis des chasseurs de gibier d'eau.
    Madame la ministre de l'écologie, le report des réformes des fédérations et des ACCA que vous avez annoncé pour 2004 ouvre pour les chasseurs une chance historique de rétablir les équilibres avec une nouvelle loi chasse qui ose dire son nom.
    M. Pierre Ducout. Historique !
    M. Didier Quentin. Dans cet esprit, vous vous êtes à juste titre exprimée en faveur « d'une chasse vigoureuse et démocratique », estimant qu'une diminution du nombre des chasseurs à moins d'un million serait un drame, car nous verrions une prolifération excessive de nombreuses espèces.
    De plus, il semble inopportun à beaucoup d'essayer de trouver des solutions ponctuelles au port d'arme, au saturnisme, à l'aménagement du territoire rural, au jour de non-chasse, aux simplifications des formalités administratives ou aux sports de pleine nature. Les chasseurs espèrent et méritent la réouverture d'un vrai débat dans le prolongement de celui de ce matin et une approche globale de leur activité que je n'hésite pas à qualifier d'écologique. Cela devrait être l'une des traductions de la volonté du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin de simplifier le quotidien des Français, d'alléger « l'impôt paperasse » et de décentraliser le pouvoir de décision.
    A court terme, deux sujets particulièrement sensibles devront trouver des solutions concrètes.
    Premièrement, il ne me semble pas possible d'imposer aux fédérations départementales de chasseurs la gestion des dégâts du grand gibier et le guichet unique pour valider les permis sans réaffirmer la souveraineté de leurs assemblées générales pour en régler les détails et les modalités. N'oublions pas que les fédérations restent des associations et qu'à cet égard l'Etat devrait seulement exercer sur leur budget un contrôle a posteriori, sans aller jusqu'à encadrer le montant des cotisations.
    Deuxièmement, il ne me paraît pas non plus possible de déléguer encore plus de missions autrefois assurées par les services publics et l'Office national de la chasse sans étudier sérieusement les transferts de moyens correspondants.
    Repenser le rôle de l'Etat à l'égard du monde de la chasse est un aspect essentiel des réformes à entreprendre.
    Il n'est pas convenable d'exiger des chasseurs qu'ils continuent de financer, via la redevance cynégétique, les fonctionnaires de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage. On peut d'ailleurs s'interroger sur la légitimité de cet office dans sa version actuelle, car les contribuables chasseurs ont le sentiment qu'il fait doublon avec leur fédération nationale.
    L'Observatoire national récemment créé pour le suivi de la faune sauvage - et sur lequel reposent beaucoup d'espoirs quant à l'impartialité des travaux - ne pourra pas non plus fonctionner, s'il néglige la capacité de collecte et d'analyse des données des fédérations de chasseurs et si l'Etat est à la fois juge et partie.
    Si la police de la chasse relève du pouvoir régalien, comment ne pas prendre aussi en considération la lutte contre le braconnage menée efficacement par les fédérations, en leur donnant les moyens de suivre les procédures et en reconnaissant les vertus des services de surveillance de proximité qu'elles ont su créer ?
    Le dynamisme et la faculté d'adaptation dont ont témoigné les fédérations de chasseurs, en particulier en Poitou-Charentes, pour faire face à la complexité de la gestion de la faune sauvage ont aussi révélé une réelle capacité à créer des emplois. Sur ces quatre départements d'une région où tous les modes de chasse sont représentés et où est assuré un équilibre entre citadins et ruraux, les fédérations emploient en effet aujourd'hui soixante-quinze salariés à temps plein, soit 30 % de plus qu'en 1997.
    Voilà un bel exemple de la dimension sociale de la protection de l'environnement que le législateur devra garder à l'esprit pour conduire efficacement les réformes tant attendues vers une chasse apaisée, cette chasse apaisée que le Conservatoire du littoral a su mettre en place sur ses espaces protégés.
    Madame la ministre, les défenseurs de la nature que sont les chasseurs ont fondé de grands espoirs sur le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. Pour ne pas les décevoir, il est urgent d'agir, en faisant voter de nouveaux textes législatifs et en obtenant une révision de la directive « Oiseaux ». Vous pouvez compter sur notre chaleureux soutien pour y parvenir le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-François Régère.
    M. Jean-François Régère. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c'est pour moi un honneur de prendre la parole devant vous aujourd'hui au nom des députés UMP de la Gironde ici présents, Marie-Hélène des Esgaulx, Philippe Dubourg et Jean-Paul Garraud, mais également et surtout au nom de tous les chasseurs que je suis fier de représenter.
    Plusieurs points méritent d'être évoqués pour mettre fin à une situation devenue à la fois juridiquement instable et politiquement intenable. Madame la ministre, sortons enfin de cette impasse !
    Il nous faut solder le lourd héritage constitué par cinq années d'action gouvernementale hostile et engager des réformes claires et courageuses. Il est grand temps d'en finir avec la diabolisation de la chasse. Nous avons le devoir de raccrocher cette mauvaise loi au vestiaire législatif.
    La Gironde, département français qui compte le plus grand nombre de chasseurs, se partage entre des modes traditionnels de chasse extrêmement variés.
    La chasse française ne doit plus enregistrer de nouveaux revers : remplaçons le découragement par l'espoir.
    M. Jacques Briat. Très bien !
    M. Jean-François Régère. Ainsi, la suppression du jour de non-chasse doit être effective et non conditionnelle, qu'il s'agisse du mercredi ou de tout autre jour de la semaine. Le mercredi est par nature le jour des retrouvailles entre générations, le jour de transmission d'un savoir qui va bien au-delà du seul fait cynégétique.
    Permettez-moi de vous rappeler cette déclaration de M. Jacques Chirac, lors de la dernière campagne électorale pour les présidentielles : « Le monde rural est porteur de traditions et de cultures qui correspondent à une réelle proximité avec la nature. Il faut comprendre ces traditions, il faut s'imprégner de cette culture si l'on souhaite mettre un terme aux conflits qui se nouent autour de loisirs comme la chasse. »
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Eh oui !
    M. Jean-François Régère. Nous devons faire un effort de compréhension et de tolérance réciproques. La chasse reste une activité mal connue. Contrairement à de nombreuses idées reçues, elle joue un rôle essentiel dans la régulation des espèces sauvages - le sanglier et les cervidés rendent les routes dangereuses et font des dégâts dans les bois et dans les cultures -, la gestion des espaces naturels et la pérennité de traditions qui fondent notre culture nationale. Seul l'apaisement des conflits déclenchés par la révision de la loi chasse de juillet 2000 permettra de rétablir un consensus sur la question.
    Comme dans les pays voisins, où les directives communautaires sont appliquées avec davantage de pragmatisme, des solutions doivent être trouvées. Par exemple, à l'heure où le Conseil économique et social vient de souligner la nécessité de mettre un terme à la chasse à la tourterelle dans le Médoc, pour non-conformité avec le droit européen, la Commission européenne vient d'exempter un de nos nouveaux partenaires, Malte, de la législation européenne sur la chasse aux oiseaux sauvages, notamment à la tourterelle durant le printemps.
    Pourquoi, une nouvelle fois, deux poids deux mesures ? Faudra-t-il en arriver à demander à Bruxelles une exception culturelle pour la chasse ? Il faut en finir avec le diktat européen. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Seule la renaissance d'un dialogue effectif et objectif peut permettre de refonder une assise nouvelle pour une chasse sereine et apaisée. Dans le Médoc, par exemple, streptopelia turtur représente infiniment plus qu'un quelconque gibier migrateur : elle représente un fait de société. D'ailleurs, nous trouvons trace de cette chasse dès 1440. C'est pourquoi elle s'inscrit dans le contexte des « pratiques cynégétiques régionales » propres aux autres Etats membres.
    Je voudrais insiter sur le mécanisme de l'article 9 de la directive 79-409, qui permet de concilier droit communautaire et droit national. Pourquoi la France a-t-elle eu très peu recours à cette procédure, largement utilisée dans un grand nombre d'Etats, du Nord comme du Sud ? Elle constitue pourtant la seule voie pour dégager une solution légaliste et pragmatique.
    Comme m'ont demandé d'en faire part mes collègues girondins, cette technique juridique permettrait également d'étendre l'autorisation de la chasse au pédalo sur le bassin d'Arcachon. (Exclamations sur plusieurs bancs.)
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Absolument ! Mais M. Cochet est parti !
    M. Jean-François Régère. Ce mode de chasse très ancien, dur et technique, qui compte encore près de 2 000 amateurs, consiste à approcher les bandes de canards ou d'oies stationnant sur le bassin grâce à de minuscules bateaux à fond plat actionnés par des pédales.
    A ce sujet, la défunte dérogation spécifique à l'oie cendrée, cassée de façon incompréhensible par le Conseil d'Etat hier matin, ne fait qu'alourdir un dossier déjà bien plombé par nos prédécesseurs.
    Mme Marie-Hélène des Egaulx. Tout à fait !
    M. Jean-François Régère. De même, il est grand temps de mettre fin à l'incertitude juridique concernant la chasse de nuit au gibier d'eau.
    M. le président. Veuillez conclure rapidement, s'il vous plaît.
    M. Jean-François Régère. La loi sur la chasse du 26 juillet 2000 a prévu, dans son article 12, de suspendre l'interdiction de la chasse de nuit au gibier d'eau pour une période de cinq ans, à l'issue de laquelle le Gouvernement devait remettre un rapport d'évaluation au Parlement.
    Cette disposition frileuse et hypocrite, imposée à l'époque par Mme Voynet contre l'avis de tous les députés, y compris le rapporteur du texte (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste), n'est pas satisfaisante, car elle prolonge l'incertitude juridique pesant sur cette pratique qui ne pose pourtant aucun problème. (Exclamation sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Marie-Hélène des Egaulx. C'est vrai !
    M. Jean-Paul Chanteguet. Mensonges !
    M. Jacques Desallangre. Faites mieux ! On veut vous voir à l'oeuvre !
    M. Jean-François Régère. Il serait donc souhaitable de consacrer, dans un prochain texte législatif, la légalisation de cette chasse, comme celle de la chasse privée et clôturée de la caille japonaise, par exemple, qui permet d'entraîner nos plus jeunes chiens ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mes chers collègues, permettons à la chasse de garder son âme, son identité et sa culture, en élaborant un dialogue constructif avec des gens conciliants et raisonnables, loin des intégristes de chaque camp ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Paul Chanteguet. Il avait cinq minutes, monsieur le président.
    M. le président. Merci aux uns et aux autres de respecter leur temps de parole.
    La parole est à M. Christian Estrosi.
    M. Christian Estrosi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous ouvrons aujourd'hui un débat attendu et important. Attendu, parce qu'il offre à la majorité l'occasion de réaffirmer avec force les engagements que nous avons pris devant les Français au printemps dernier...
    M. Jean-Paul Chanteguet. Engagements non tenus !
    M. Christian Estrosi. ... concernant le caractère inaliénable de la liberté de chasse en France.
    M. Jacques Desallangre. Une fois qu'on a dit ça !...
    M. Christian Estrosi. Important, parce que nous devons marquer clairement une rupture avec les cinq années précédentes, qui ont fait des chasseurs des cibles et transformé la chasse en un médiocre enjeu de marchandage politicien honteux entre les divers courants de la défunte gauche plurielle.
    M. Jean-Paul Chanteguet. C'est faux !
    M. Jean-Claude Lemoine. Mais si ! Il a raison !
    M. Christian Estrosi. La gauche plurielle n'a laissé passer aucune occasion d'humilier nos amis chasseurs,...
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Absolument !
    M. Jacques Bascou. N'importe quoi !
    M. Christian Estrosi. ... depuis le marchandage entre M. Gayssot et Mme Voynet pour obtenir le feu vert de celle-ci à l'implantation d'un aéroport en Ile-de-France, en échange d'une loi chasse humiliante pour nos amis chasseurs, jusqu'à la loi de sécurité quotidienne, dans laquelle on a encore trouvé le moyen, avec la réglementation des ventes d'armes, de porter atteinte à nos amis sportifs et à nos amis chasseurs !
    M. François Liberti. Ce sont tes amis qui ont voté la directive au Parlement européen !
    M. le président. S'il vous plaît ! Pas d'interpellation ni de tutoiement !
    M. Christian Estrosi. Selon cette loi relative à la sécurité, en effet, les délinquants n'étaient pas ceux qui s'attaquaient aux dames âgées et aux honnêtes citoyens dans les rues et les quartiers de nos villes de France, non, les délinquants, les barbares et les voyous, c'étaient nos amis chasseurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Marc Nudant. Exactement !
    M. Christian Estrosi. Nous avons aujourd'hui l'intention de mettre un terme à ces attitudes et de rendre à nos amis chasseurs la considération qu'ils méritent. Et nous devons, par nos échanges, démontrer que nous entendons dépolitiser et dépassionner le débat sur la chasse.
    M. Jacques Desallangre. C'est du baratin ! De la flatterie ! Flatter, ce n'est pas aider !
    M. Christian Estrosi. La chasse mérite mieux que les caricatures et les anathèmes, car elle puise ses racines au plus profond de l'histoire de l'humanité. Elle a incarné la première activité organisée de la vie en société. Acquis essentiel de la Révolution, elle s'inscrit au plus profond de l'histoire et de la tradition de notre pays.
    M. Jacques Desallangre. Rappelez-vous que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l'écoute !
    M. Christian Estrosi. Les chasseurs se situent bien loin des clichés dans lesquels vous avez voulu les enfermer. Amoureux de la nature, ils jouent un rôle économique, social et écologique. Un rôle économique, car la chasse contribue largement à l'aménagement et à la protection d'une grande partie du territoire, en maintenant une activité dans des zones souffrant de désertification. Un rôle social, tant elle est l'expression d'une vie associative riche et intense, souvent l'un des derniers liens entre les individus. Un rôle écologique et, n'en déplaise à certains, les chasseurs doivent même être considérés comme de véritables écologistes : la relation du chasseur avec la nature se fonde sur une passion authentique, doublée d'une véritable connaissance du mileu naturel.
    Madame la ministre, vous l'avez rappelé tout à l'heure, mais je veux y insister, alors que nous avons de moins en moins d'éleveurs, de moins en moins de paysans,...
    M. Jacques Desallangre. C'est la conséquence de la politique bruxelloise !
    M. Christian Estrosi. ... si nous n'avions pas nos fédérations de chasse, les sociétés et les associations de chasseurs, qui ensemencerait nos terres ? Qui entretiendrait nos sous-bois et nos sentiers ? Qui nous éviterait de subir un certain nombre d'incidents écologiques majeurs...
    M. Jacques Desallangre. Venez-en au fait !
    M. Christian Estrosi. ... comme les incendies de forêt ou les intempéries dévastratrices causées par les orages de plus en plus importants provoqués par l'actuel réchauffement de la planète ? Voilà tout ce qui a été sacrifié sur l'autel des petits arrangements politiques entre amis de la précédente majorité, sous la pression des intégristes verts !
    M. Yves Cochet. Ah, ah, ah !
    M. Jacques Desallangre. Démagogie !
    M. Christian Estrosi. Aujourd'hui, nous devons aux chasseurs un débat serein. Nous devons affirmer toute la valeur de la chasse et garantir pour l'avenir les moyens juridiques d'une pratique apaisée. La loi chasse qui doit venir en débat sans plus attendre devra être une loi de respect et de confiance.
    Je me félicite, madame la ministre, de l'esprit d'ouverture, de sérieux et d'ambition dont vous avez fait preuve.
    M. Jacques Desallangre. Encore de la flatterie !
    M. Christian Estrosi. Vous avez tracé, avec la majorité parlementaire, des perspectives communes propres à dessiner une chasse moderne, respectant la capacité des chasseurs à gérer les espaces et les espèces.
    La France devra, à cet égard, régler enfin, dans la négociation avec Bruxelles, le problème des dates d'ouverture et de fermeture. Vous avez fait preuve de courage avec cet arrêté, hélas rayé hier - sinistre date - par le Conseil d'Etat. Mais, tout comme mon ami Daniel Spagnou, je veux, au nom de tous les amoureux de la chasse à la grive de ma région, vous remercier de cette initiative. Notre pays serait-il le seul à subir une directive qui offre une large latitude d'appréciation à nos partenaires européens ? Ce n'est pas sérieux.
    Que la volonté du Gouvernement ouvre enfin la voie de la négociation ! Ayons confiance dans la capacité des dirigeants de la chasse française à promouvoir une activité de sport, de loisirs et de nature responsable. Ainsi, le jour de non-chasse, dans sa forme actuelle, constitue une provocation inutile, qu'il convient de réformer. Nous devons mettre un terme à ce climat de défiance stupide en permettant aux acteurs locaux, aux représentants de l'Etat et aux fédérations de chasse d'en déterminer le jour.
    M. Jacques Bascou. Monsieur Estrosi, vous avez signé le recours devant le Conseil constitutionnel !
    M. Christian Estrosi. Ensemble, nous devons replacer la chasse au coeur d'une politique ambitieuse et responsable de l'environnement.
    Le Gouvernement, sur ce dossier, doit faire preuve d'initiative et de courage. Nous savons, madame la ministre, que vous n'en manquez pas. Ne laissons plus perdurer un débat qui sert de fonds de commerce aux professionnels de la polémique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jacques Desallangre. Parole d'expert !
    M. le président. La parole est à M. Christophe Priou.
    M. Christophe Priou. Madame la ministre, nous avons appris beaucoup de choses dans ce débat. Il nous a confirmé, d'abord, que vous étiez une femme de goût, puisque vous nous avez avoué préférer le coteaux du Layon au Coca-Cola, ce qui nous convient tout à fait ! (Sourires.)
    Nous sommes ici dans un débat national, pour défendre les traditions locales, dont une partie dépend de la réglementation internationale et européenne. Nous avons tous démontré notre attachement au maintien des traditions, qui contribuent à la sauvegarde de notre espace naturel, lequel n'est pas un espace sauvage. Partout en France, ce sont les us et coutumes des décennies ou des siècles passés qui ont façonné les espaces naturels.
    La Loire-Atlantique, dont je suis un élu, comprend des zones humides majeures, comme le lac de Grand-Lieu ou la Brière, aujourd'hui coincées entre béton et bitume ; je rappelle au passage que le déclin démographique, dans certaines régions, est lié à la disparition de la moitié des zones humides depuis 1950. Avec les acteurs que sont les chasseurs et les pêcheurs, nous rencontrons bien des difficultés pour entretenir ces espaces.
    Nous avons toutes les peines du monde à maintenir une agriculture d'élevage de marais. La prochaine loi sur les affaires rurales doit être l'occasion de défendre ces traditions, au même titre que l'élevage de montagne, parce que l'on s'est aperçu, notamment cette année, que l'augmentation du nombre de bovins en pâture dans les marais favorisait le retour d'espèces comme la bécassine. Cela montre bien que la préservation des espèces sauvages est liée à l'activité agricole et humaine.
    Nous rencontrons également des difficultés pour bien utiliser la taxe départementale des espaces naturels sensibles, car les zones humides ont besoin d'être curées. Il nous faut aussi assurer l'entretien des ouvrages hydrauliques - magnifiques bassins de rétention fort utiles contre les inondations pendant l'hiver et permettant de maintenir les niveaux d'eau pendant l'été - mais limiter leur emprise, car on s'est aperçu que les épidémies de botulisme ravageaient beaucoup plus les espèces que les volées ou les passées du soir ou du matin.
    Et puis, finissons-en avec les caricatures. Dans ma région, on a présenté les chasseurs comme les derniers barbares. Ce sont pourtant eux qui, après la passée du matin, vont construire le dernier Airbus ou le Queen Mary !
    Dans toutes les travées, ce matin, malgré la passion qui s'est parfois emparée du débat, on a entendu le même appel au bon sens et au dialogue. Nous avons tous reçu, ces dernières semaines ou ces derniers mois, des responsables d'associations cynégétiques, mais également d'associations de défense de la faune. Un représentant d'une des grandes associations de protection des oiseaux me disait : « Nous sommes prêts à hisser le drapeau blanc pour trouver un consensus. »
    Le consensus, pour commencer, sur la journée de non-chasse du mercredi. Je rappelle qu'en Loire-Atlantique, auparavant, nous ne chassions ni le mardi ni le vendredi : on a donc augmenté la pression de la chasse.
    Le consensus, également, sur le déclassement de certaines espèces comme le colvert. Dans la tradition locale, au mois de février, nous chassions la foulque macreuse, espèce en pleine vitalité, puisque aujourd'hui, sur les étangs privés, on fait des battues qui tournent au massacre, tellement les oiseaux prolifèrent.
    Enfin, il faut nous réconcilier avec les chasseurs comme avec les pêcheurs, qui se sentent tout autant brimés. Nous aurons l'occasion, lors de l'examen du texte sur les affaires rurales, de parler du timbre piscicole ou de la classification des plans d'eau.
    Nous avons besoin de tous ces acteurs pour maintenir la vie des espaces remarquables et lutter contre les espèces animales invasives ; ce week-end, en Brière, je crois que 4 000 ragondins ont été tués au cours d'une battue. Et, dans quelques mois, nous ferons appel aux pêcheurs et aux chasseurs pour arracher la jussie, espèce végétale invasive.
    Les chasseurs et les pêcheurs, il est bon de le rappeler, avec leur bon sens, nous rappellent à nos promesses du printemps dernier, et il est tout à l'honneur des élus de tenir leurs promesses, sans attendre la fin de la mandature... ou la prochaine dissolution. (« Ah ? » sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.
    M. Daniel Garrigue. Madame la ministre, depuis votre arrivée au ministère de l'écologie et du développement durable, vous avez abordé les problèmes de la chasse dans un esprit de dialogue, de cohérence et de raison qui répond aux attentes de la très grande majorité de la représentation nationale et, au-delà, de la grande majorité des Français. Malheureusement, vous le savez, nous sommes tributaires, en ce domaine, de décisions de justice qui ne procèdent pas de la même inspiration et, oserai-je ajouter, qui n'ont malheureusement pas la même légitimité...
    M. Alain Gest. Tout à fait !
    M. Daniel Garrigue. ... et créent un trouble profond dans beaucoup de régions de France. Mon collègue Thierry Mariani, par exemple, me faisait part ce matin des réactions des chasseurs de grives du département du Vaucluse.
    Nous sommes ainsi certainement, dans l'Union européenne, le pays où la chasse est la plus pénalisée. Pourquoi en sommes-nous là ? Parce que nous avons la chance - en l'occurrence, c'est plutôt une malchance - d'avoir une juridiction administrative qui exerce le contrôle juridictionnel le plus étendu de tous les pays de l'Union et élabore des constructions jurisprudentielles souvent irréversibles.
    M. Jacques Desallangre. Les politiques n'ont pas fait leur boulot !
    M. Daniel Garrigue. Le Conseil d'Etat a en effet bâti un certain nombre de notions - certaines venaient d'ailleurs de la Cour de justice des Communautés européennes - mais les a appliquées de manière extensive : par exemple la notion de « risque de confusion entre espèces chassables et espèces protégées » ou celle de « protection complète », qui s'applique dès l'apparition des premiers individus et non pas, comme dans la jurisprudence antérieure, en cas de présence vraiment significative de l'espèce à protéger. Le commissaire du Gouvernement, M. Lamy, dans ses conclusions, évoque même le « dérangement » et a l'audace de déclarer qu'il faudra bien prendre en considération cette notion, même si les études, à cet égard, ne donnent aucune véritable certitude.
    Le commissaire du Gouvernement revendique ainsi un véritable droit au flou juridique. Si on le suit sur ce terrain, c'est toute la chasse, demain, qui risque d'être interdite, voire la promenade ou la randonnée, et pourquoi pas toute présence humaine, puisque, par nature, celle-ci peut constituer un « dérangement ».
    M. Jacques Desallangre. Eh oui !
    M. Daniel Garrigue. Il faut ajouter à cela la question de la référence aux études scientifiques. Le Conseil d'Etat a raison de dire qu'il faut se baser sur de telles études. Mais pourquoi faire une distinction arbitraire, considérer certaines études comme scientifiques, notamment les rapports ORNIS ou Lefeuvre,...
    M. Pierre Ducout. Pas le rapport Lefeuvre !
    M. Daniel Garrigue. ... et qualifier le rapport Dutruc-Rosset, demandé par le Premier ministre, de « rapport administratif » ? Le Conseil d'Etat oublie sans doute qu'il est lui-même une juridiction administrative. J'espère que l'observatoire de la faune sauvage,...
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    M. Daniel Garrigue. ... que vous êtes en train de créer, aura droit à un autre traitement.
    M. Alain Gest et M. Roland Chassain. Très bien !
    M. Daniel Garrigue. Avec la superposition de la directive Oiseaux, des décisions de la Cour de justice des Communautés européennes et des arrêts du Conseil d'Etat, nous sommes donc dans la situation la plus défavorable et la plus pénalisante de tous les pays de l'Union européenne. C'est pourquoi 24 de mes collègues et moi-même avons demandé la constitution d'une commission d'enquête parlementaire afin de faire la lumière sur l'application de la directive Oiseaux de 1979 dans l'ensemble des Etats de l'Union européenne, et aussi d'étudier la situation des dix Etats qui nous rejoindront en 2004 au regard de cette directive. Il s'agit, sur cette base, d'établir une ligne de conduite...
    M. Maxime Gremetz. Une ligne droite !
    M. Daniel Garrigue. ... respectueuse de la protection des espèces, cohérente dans l'ensemble des pays de l'Union et raisonnable. Nous demandons que la chasse échappe dorénavant aux dérives purement idéologiques...
    M. Alain Gest. Très bien !
    M. Maxime Gremetz. Où est l'idéologie ?
    M. Daniel Garrigue. ... et que l'on trouve un équilibre entre la protection légitime, notamment des oiseaux migrateurs, et la pratique de la chasse, à laquelle la majorité des Français sont attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Le débat est clos.
    La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais d'abord vous remercier du large accord obtenu, tant sur le calendrier que je vous ai proposé que sur le contenu des mesures législatives et réglementaires que j'ai détaillées.
    Je remarque d'ailleurs que les critiques exprimées par certains, sur les bancs d'une gauche plus divisée que jamais,...
    M. Pierre Ducout. Pas du tout !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. ... relèvent du procès d'intention, sinon de la falsification ou de l'outrance.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
    M. Maxime Gremetz. Vous n'êtes pas sympa !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. D'autres, sur tous les bancs, ont su au contraire dépasser les clivages partisans, et je les en remercie.
    Je vous ai donc proposé trois supports.
    Premièrement, une loi d'habilitation. A cet égard, je vous précise au passage que je ne souhaite pas procéder par ordonnances. La loi autorisera le Gouvernement à en prendre, mais je proposerai des articles spécifiques pour la chasse ou, si le Conseil d'Etat disjoint, une loi spécifique. Il y aura donc bien un débat au Parlement.
    M. Maxime Gremetz. Très bien ! Merci, madame la ministre.
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Deuxièmement, la loi « affaire rurales » pour les territoires, l'organisation et la pratique de la chasse sera présentée avant la fin de l'année.
    Troisièmement, en 2004, la loi « patrimoine naturel » traitera de questions plus transversales, comme le statut des espèces.
    J'ai également longuement détaillé un programme ambitieux de textes réglementaires qui concernera la pratique de la chasse, la gestion des populations, l'organisation et la police de la chasse. Je n'ai d'ailleurs pas relevé de critiques ou d'observations sur ce calendrier et son contenu. Je suis persuadée que ces mesures de bon sens vont dans la direction souhaitée par les chasseurs et tous ceux qui ont à coeur la préservation de notre patrimoine naturel.
    La question cruciale, celle qui a été évoquée sur tous les bancs, est celle des dates de chasse.
    M. Pierre Ducout. C'est vrai !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Rappelons l'incroyable feuilleton juridique qu'ont subi les chasseurs de migrateurs !
    Une directive de 1979, qui énonce des principes largement consensuels, votée par une grande majorité de députés, sauf par ceux qui font boutique du sentiment anti-européen.
    Une jurisprudence constante de la Cour de justice des Communautés européennes, minée par un sentiment anti-chasse et dont les décisions n'ont qu'un but : supprimer la chasse sur l'ensemble du territoire européen. (« Très juste ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Enfin, notre haute juridiction administrative annule des décisions pour deux motifs. D'abord, elle souligne l'absence de données scientifiques actualisées et fait référence à des travaux largement obsolètes, je pense notamment à la sédentarisation du colvert que tous les chasseurs et tous les amoureux de la nature ont pu observer. Ensuite, elle se fonde, pour annuler ces décisions, sur la jurisprudence contestable de la Cour de justice des Communautés européennes. Comment sortir de cette situation ?
    Premier moyen : la dérogation. La directive « Oiseaux », dans son article 9, prévoit des dérogations pour les motifs suivants : premier paragraphe - a) - « santé, sécurité publique, sécurité aérienne, dommages aux cultures », deuxième paragraphe - b) - « à des fins de recherche » et troisième paragraphe - c) - « pour permettre la capture - je souligne ce terme - de certains oiseaux en petite quantité ». Les dérogations présentées par les autres pays s'appuient toutes sur le paragraphe a) et c'est sur cette base que nous avons obtenu la validation des décisions pour les cormorans. C'est sur le fondement du paragraphe c) - « pour permettre la capture de certains oiseaux en petite quantité » - que le Conseil d'Etat a non pas annulé, mais suspendu mes deux arrêtés. Il s'est interrogé sur la signification du mot « capture », se demandant s'il était synonyme de chasse, et il a posé la question à la Cour de justice des Communautés européennes. J'ai voulu donner ces précisions pour bien expliquer le sens de la dérogation. Je note d'ailleurs que ces arrêtés constituent une avancée majeure - ils préparent largement les orientations que je vous ai présentées - dans la mesure où ils prévoient des prélèvements maximaux autorisés.
    M. Pierre Ducout. Nous aussi, nous les avions prévus !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. J'ai fait de même pour la bécasse récemment.
    M. Jean-Claude Lemoine. Très bien !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Deuxième moyen d'en sortir : la rénovation des réservoirs de connaissances dont dispose le Conseil d'Etat et qui sont largement obsolètes. C'est pourquoi j'ai créé l'Observatoire national de la chasse et de la faune sauvage par un décret du 17 juillet dernier. Certains ont parlé de retard, mais cet observatoire est un outil scientifique, pas un comité Théodule ! Il fallait donc, en concertation avec les acteurs, en fixer l'architecture et les critères de nomination de ses membres. Je réfute la démarche de ceux qui souhaitent en dénaturer la mission en en faisant un groupe de pression pour ou contre la chasse. La vérité scientifique ne se manipule pas, elle se constate et s'impose.
    M. Jacques Desallangre. Tout à fait !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Si nous faisions de l'Observatoire un lobby, il ne serait pas crédible devant la haute juridiction administrative et ne permettrait pas l'assouplissement nécessaire que nous souhaitons tous. Je précise d'ailleurs que cette démarche est valable aussi bien pour des décisions prises par arrêté que pour une loi, et que je ne réfute pas, bien au contraire, l'idée d'une loi annuelle, qui correspond à ma philosophie de la fixation des dates de chasse. Cette fixation ne peut relever que d'une démarche annuelle, qu'elle se manifeste par la voie réglementaire ou par la voie législative.
    Enfin, troisième moyen pour en sortir : la remise en cause de la directive 79-409.
    M. Jacques Desallangre. Dire que c'est la France qui l'a proposée !
    Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Contrairement à ce que je viens de lire dans une dépêche de l'AFP - visiblement, le journaliste n'a pas bien entendu ce que j'ai dit -, je ne repousse pas cette éventualité. J'ai simplement appelé votre attention, mesdames, messieurs les députés, sur l'extrême lenteur d'une telle procédure, qui ne déboucherait que dans plusieurs années alors que nous sommes dans l'urgence, ainsi que sur les dangers réels de durcissement, et non d'assouplissement, de la directive.
    Je veux aussi dire à ceux qui ont parlé de l'opportunité d'une renégociation dans le cadre de l'ouverture aux pays candidats que c'est Malte, et non pas les pays baltes - il ne faut pas confondre, monsieur Ducout ! - qui a demandé une dérogation pour certaines chasses traditionnelles, alors que l'ensemble des autres pays candidats à l'élargissement ont accepté sans réserves cette directive.
    Sans attendre, j'ai donc préféré renouer les fils du dialogue avec la Commission. A cet effet, j'ai rencontré à plusieurs reprises la commissaire Margot Wallström et, il y a trois semaines, j'ai eu une longue séance de travail avec Catherine Day, la directrice générale de l'environnement de la Commission européenne. Nous travaillons en totale association avec Georges Dutruc-Rosset et j'espère une collaboration étroite avec la commission d'enquête qui vient de nous être proposée. Nous avons déjà obtenu une très forte accélération des travaux du comité ORNIS. La Commission vient de nous adresser son projet de guide interprétatif et je souhaite le faire annexer à la directive, pour lui conférer une valeur juridique.
    Vous le voyez, mesdames, messieurs les députés, pendant ces neuf mois d'exercice gouvernemental, le dossier de la chasse a fait l'objet de ma part d'une attention soutenue et d'un travail constant. Ce travail, je souhaite le continuer avec vous pour faire de notre chasse ce qu'elle ne doit jamais cesser d'être : une chasse démocratique, une chasse populaire, une chasse durable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

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ORDRE DU JOUR DE L'ASSEMBLÉE

    M. le président. L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au samedi 15 février, puis du mardi 25 février au jeudi 6 mars 2003 inclus, a été fixé ce matin en Conférence des présidents.
    Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu de la présente séance.

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DÉCLARATION DE L'URGENCE
D'UN PROJET DE LOI

    M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant que le Gouvernement déclare l'urgence du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques (n° 574).
    Acte est donné de cette communication.

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ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Questions au Gouvernement ;
    Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi pour l'initiative économique ;
    Discussion du projet de loi, n°  574, relatif à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques :
    M. Jérôme Bignon, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 605) ;
    M. Pierre Lequiller, rapporteur au nom de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne (rapport d'information n° 597) ;
    Mme Marie-Jo Zimmermann, rapporteure au nom de la délégation de l'Assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information n° 604).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à treize heures dix.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
ORDRE DU JOUR
ÉTABLI EN CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
(Réunion du mardi 11 février 2003)

    L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra du mardi 11 février au samedi 15 février 2003 inclus, puis, après l'interruption des travaux, du mardi 25 février au jeudi 6 mars 2003 inclus, a été ainsi fixé :
    Mardi 11 février 2003 :
            Le matin, à neuf heures :
    Débat sur la chasse.
    (Séance d'initiative parlementaire.)
            L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures :
    Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi pour l'initiative économique  (n°s 507 rectifié-572) ;
    Discussion du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux, à l'élection des représentants au Parlement européen, et à l'aide publique aux partis politiques (n°s 574-605-604).
    Mercredi 12 février 2003, l'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures :
    Discussion des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour la sécurité intérieure (n° 595) ;
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux, à l'élection des représentants au Parlement européen, et à l'aide publique aux partis politiques (n°s 574-605-604).
    Jeudi 13 février 2003, le matin, à neuf heures :
    Discussion de la proposition de loi de MM. Jacques Barrot et Dominique Paillé tendant à la création de délégations parlementaires aux droits des enfants (n°s 586-594).
    Eventuellement, suite du débat sur la chasse.
    (Séance d'initiative parlementaire.)
            L'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures :
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative à l'entrée, à la circulation, au séjour et à l'établissement de leurs ressortissants (n°s 268-601) ;
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative à la circulation et au séjour en Principauté d'Andorre des ressortissants des Etats tiers (n°s 267-601) ;
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention de sécurité sociale entre la République française et la Principauté d'Andorre signée à Andorre-la-Vieille le 12 décembre 2000 (n°s 270-601).
    (Ces trois textes faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 107 du règlement.)
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux, à l'élection des représentants au Parlement européen et à l'aide publique aux partis politiques (n°s 574-605-604).
    Vendredi 14 février 2003, le matin, à neuf heures, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures :
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux, à l'élection des représentants au Parlement européen, et à l'aide publique aux partis politiques (n°s 574-605-604).
    Eventuellement, samedi 15 février 2003, le matin, à neuf heures, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures :
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux, à l'élection des représentants au Parlement européen, et à l'aide publique aux partis politiques (n°s 574-605-604).
    Mardi 25 février 2003, le matin, à neuf heures :
    Questions orales sans débat.
            L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures :
    Eventuellement, suite de la discussion du projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux, à l'élection des représentants au Parlement européen, et à l'aide publique aux partis politiques (n°s 574-605-604) ;
    Discussion du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique (n° 528).
    Mercredi 26 février 2003, l'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures :
    Suite de la discussion du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique (n° 528).
    Jeudi 27 février 2003, le matin, à neuf heures, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures :
    Suite de la discussion du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique (n° 528).
    Eventuellement, vendredi 28 février 2003, le matin, à neuf heures, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures :
    Suite de la discussion du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique (n° 528).
    Mardi 4 mars 2003, le matin, à neuf heures :
    Questions orales sans débat.
            L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement :
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (n° 606).
    Mercredi 5 mars 2003, l'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement :
    Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (n° 606).
    Jeudi 6 mars 2003, le matin, à neuf heures, et l'après-midi, à quinze heures :
    Discussion de la proposition de loi de M. Christian Philip relative aux privilèges et immunités de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge en France (n° 534) ;
    Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (n° 606).