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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 19 MARS 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mardi 18 mars 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».
M. le président.

IRAK «...»

MM.
Alain Bocquet,
Philippe Douste-Blazy,
Jean-Marc Ayrault,
Philippe Folliot.
Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.

CONFÉRENCE POUR L'EMPLOI «...»

MM. Bernard Accoyer, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
2.  Hommage à la mémoire de trois policiers victimes du devoir «...».
M. le président.

3.  Questions au Gouvernement (suite) «...»
LOI SUR LA SÉCURITÉ INTÉRIEURE «...»

MM. François Calvet, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

SITUATION DES FINANCES PUBLIQUES «...»

MM. Didier Mignaud, Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.

ÉVASIONS DE DÉTENUS «...»

MM. Jean-Pierre Door, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

CONVENTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS
POUR PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES «...»

MM. Jean-Pierre Dupont, Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées.

ÉDUCATION NATIONALE «...»

MM. Yves Durand, Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
M. le président.

Suspension et reprise de la séance «...»

4.  Entreprises de transport aérien. - Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Charles de Courson, rapporteur de la commission des finances.

EXPLICATIONS DE VOTE «...»

M.
François Goulard,
Mme
Odile Saugues,
MM.
Christian Blanc,
François Asensi.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption, par scrutin, de l'ensemble du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance «...»

5.  Allocation personnalisée d'autonomie. - Explications de vote et vote sur l'ensemble d'une proposition de loi adoptée par le Sénat «...».
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
M. Georges Colombier, rapporteur de la commission des affaires culturelles.

EXPLICATIONS DE VOTE «...»

Mme
Paulette Guinchard-Kunstler,
MM.
Jean-Luc Préel,
Maxime Gremetz,
Denis Jacquat.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption, par scrutin, de l'ensemble de la proposition de loi.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN

6.  Causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib. - Discussion d'une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête «...».
M. Patrick Ollier, président et rapporteur de la commission des affaires économiques.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

M.
Charles de Courson,
Mme
Odile Saugues,
MM.
François-Michel Gonnot,
François Asensi.
Clôture de la discussion générale.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.

Article unique «...»

Amendement n° 1 corrigé de Mme Saugues : Mme Odile Saugues, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 2 de Mme Saugues : Mme Odile Saugues, M. le rapporteur. - Retrait.

Titre «...»

L'amendement n° 3 de Mme Saugues n'a plus d'objet.
Adoption de l'article unique.

CONSTITUTION DE LA COMMISSION D'ENQUÊTE «...»

M. le président.

Suspension et reprise de la séance «...»

7.  Poste et télécommunications. - Discussion d'un projet de loi «...».
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.
M. Jean Proriol, rapporteur de la commission des affaires économiques.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

MM.
Gilbert Biessy,
Alain Cousin,
François Brottes,
Philippe Folliot.
Clôture de la discussion générale.
Mme la ministre.

Article unique. - Adoption «...»

8.  Saisine du Conseil constitutionnel «...».
9.  Décision du Conseil constitutionnel «...».
10.  Dépôt d'un rapport sur une proposition de résolution «...».
11.  Dépôt d'un rapport d'information «...».
12.  Dépôt d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».
13.  Dépôt de propositions de loi adoptées par le Sénat «...».
14.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    J'ai souhaité, en accord avec la conférence des présidents, que les quatre premières questions portent sur l'Irak et que M. le Premier ministre, qui a bien voulu accepter de répondre à ces questions (« C'est bien le moins ! » sur quelques bancs du groupe socialiste), ne prenne la parole qu'après que les orateurs de chaque groupe se seront exprimés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

IRAK

    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, nous vivons des jours et des heures d'une gravité exceptionnelle. Cette nuit, George Bush a confirmé, avec cynisme et morgue, sa volonté de faire la guerre en Irak, contre l'avis de la communauté internationale, en torpillant l'Organisation des Nations unies, au mépris de sa charte, du droit, des résolutions du Conseil de sécurité, de l'opinion publique mondiale et de son opposition massive à cette entreprise militaire d'occupation.
    Chacun mesure la responsabilité historique que prennent les Etats-Unis, membres permanents du Conseil de sécurité, toujours prompts à en appeler aux valeurs morales de démocratie et de liberté, en décidant de l'usage de la force au nom de la défense de leurs intérêts stratégiques, financiers et pétroliers, et au nom de leur visée hégémonique. Les Etats-Unis veulent ainsi déstabiliser le monde pour le dominer sur tous les plans, économique, militaire, culturel et politique. Ils s'érigent en maître et gendarme du monde, c'est inacceptable.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et les communistes ?
    M. Alain Bocquet. La guerre de George Bush est une aventure non seulement illégale et illégitime, mais aussi particulièrement dangereuse. On connaît la dimension et la nature de ses conséquences, notamment celles d'une escalade incontrôlable des tensions et du terrorisme. Une telle attitude irresponsable ouvre la porte à tous les excès. Nous pensons aussi aux destructions et aux souffrances nouvelles infligées au peuple irakien, déjà victime de la dictature sanglante de Saddam Hussein et de l'embargo. Des enfants, des femmes, des vieillards et des hommes innocents vont périr sous des bombes, dans le fer et le feu.
    Monsieur le Premier ministre, nous avons apprécié, vous le savez, la ténacité et la fermeté de la France avec les soutiens d'autres pays pour éviter le désastre annoncé et pour que le désarmement de l'Irak se fasse par des voies pacifiques. L'actualité dramatique que nous vivons met d'ailleurs en exergue la nécessité d'un désarmement généralisé.
    Aujourd'hui, nous entrons dans une phase nouvelle, celle d'une guerre présentée comme imminente. Nous ne pouvons nous y résigner et accepter que s'instaure un monde unipolaire où régnerait la loi de la jungle et du plus fort, ce qui ferait basculer le monde dans le gouffre de l'horreur. Des millions de personnes en France, en Europe et ailleurs attendent de la France qu'elle poursuive son engagement jusqu'au bout pour faire triompher la voix de la raison, du droit et de l'intérêt de l'ensemble de la communauté internationale en prenant toutes les initiatives qui sont encore possibles et en refusant toute contribution, si minime soit-elle, à l'entreprise guerrière américaine.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
    M. Alain Bocquet. Je souhaite donc vous demander, monsieur le Premier ministre, ce que le Gouvernement compte entreprendre immédiatement pour contribuer à enrayer la logique de guerre. Dans cette crise majeure des relations internationales,...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
    M. François Liberti. De la dignité, s'il vous plaît !
    M. Alain Bocquet. ... l'Organisation des Nations unies a fait, comme rarement, la démonstration de son rôle irremplaçable pour opposer à l'usage de la force et à l'arrogance de la puissance brute la voix des peuples et la recherche de solutions pacifiques.
    M. Hervé de Charette. Arrêtez le baratin !
    M. Alain Bocquet. Ne faut-il pas, dans cet esprit, que la question de la paix et de la guerre fasse l'objet d'une réunion exceptionnelle de l'assemblée générale de l'Organisation des Nations unies ? Nous proposons également, monsieur le président, qu'une adresse du Parlement français soit immédiatement transmise à tous les parlements des pays européens et du monde pour peser dans le sens de la paix.
    Plus que jamais, et jusqu'au bout, le refus de la fatalité de la guerre doit s'exprimer avec la plus grande détermination. La France, qui a joué un rôle actif dans cet esprit, doit y contribuer par ses initiatives. Elles sont attendues. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Philippe Douste-Blazy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Philippe Douste-Blazy. Monsieur le Premier ministre, le groupe UMP voudrait dire une nouvelle fois sa fierté de voir la France s'imposer sur la scène internationale pour défendre la paix, mais aussi pour se faire respecter et pour rappeler que l'ordre mondial ne peut pas exister sans le respect du droit international...
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Excellent !
    M. Philippe Douste-Blazy. ... comme vient de le rappeler M. le Président de la République il y a quelques heures. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Alors que, malgré les effors de la diplomatie française, les hostilités sont sur le point de se déclencher, les Français se posent, me semble-t-il, deux questions.
    La première concerne notre pays : quelles mesures votre Gouvernement entend-il prendre pour prévenir les éventuelles conséquences de ce conflit sur notre sol, qu'il s'agisse de menaces terroristes ou de tensions issues du communautarisme ?
    La seconde question concerne l'avenir de l'Union européenne. Monsieur le Premier ministre, quelles initiatives allez-vous prendre pour que l'Union européenne puisse tirer les conséquences de cette crise sur son avenir politique ? Vous le savez, monsieur le Premier ministre, un seul devoir s'impose à l'Europe : c'est d'être unie pour affirmer d'une seule voix les valeurs universelles qui sont les siennes, et que nous soutenons sur tous les bancs de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.
    M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, chers collègues, l'ultimatum de M. Bush à l'Irak a fermé la voie d'une issue pacifique à la crise. Combien d'hommes, de femmes, d'enfants vont payer de leur vie cet aveuglement face à leurs souffrances ? Je veux d'abord exprimer la solidarité des socialistes de l'Assemblée nationale à l'égard du peuple irakien, qui subit le double joug de la guerre et de la dictature. Je souhaite également saluer le geste noble de M. Robin Cook, qui démissionne pour ne pas cautionner cette aventure guerrière. Enfin, je salue également la marche de toutes celles et de tous ceux qui, par millions, ont dit non au recours à la force, y compris aux Etats-Unis d'Amérique.
    Car le président américain prend la responsabilité de déclencher une guerre hors-la-loi,..
    M. Maxime Gremetz. Voyou !
    M. Jean-Marc Ayrault. ... c'est-à-dire contre l'avis de la seule instance habilitée à en décider : le Conseil de sécurité de l'ONU. Un coup terrible est porté à la grande idée qui guide la communauté internationale depuis cinquante ans, celle d'une sécurité collective fondée sur des règles de droit partagées par tous. Cette guerre, que M. Bush croit gagner en trois jours, porte en elle une onde de choc tragique pour le monde : crise avec le monde arabe et musulman, une nouvelle fois soumis à la loi de la guerre, au risque de provoquer un choc des civilisations que nous refusons ; crise de l'ONU, réduite au rôle de chambre d'enregistrement impuissante et délégitimée ; crise de l'OTAN, le bras armé de l'Amérique, où les alliés n'ont d'autre choix que de se soumettre ou de se démettre ; crise de l'Europe, dont certains dirigeants, sourds à l'appel de leurs peuples, ont préféré jouer les supplétifs d'une mauvaise cause ; crise, enfin, avec notre propre pays, l'ami loyal et historique que le gouvernement américain ose menacer de représailles. Le président Bush doit savoir que c'est toute notre nation qui est meurtrie par cette campagne injuste et malvenue. Le refus de cette guerre, mes chers collègues, n'est pas l'expression personnelle d'un homme, fût-elle celle du Président de la République. Elle est la voix du peuple français dans son écrasante majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

    C'est pourquoi, monsieur le président, monsieur le Premier ministre, je demande que le Parlement soit informé et consulté à tout instant. Ne nous résignons pas à l'inéluctable, restons les militants d'un ordre international fondé sur le droit et le respect des peuples à disposer d'eux-mêmes.
    M. Yves Fromion. Heureusement que vous êtes là !
    M. Jean-Marc Ayrault. Aujourd'hui, la France est écoutée du monde.
    M. Yves Fromion. Grâce à vous ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Monsieur Fromion, un peu de tenue !
    M. Jean-Marc Ayrault. Qu'elle utilise cette force. Depuis le mois de septembre, notre position est claire : nous nous sommes opposés à cette guerre, jusqu'à utiliser le droit de veto, avions-nous alors dit. Nous nous réjouissons que ce soit la position de la France. Justement, cette force-là, qui est écoutée du monde, nous souhaitons que la France l'utilise pour restaurer les pouvoirs de l'ONU et forcer la voie d'une conférence de paix au Proche et au Moyen-Orient. Nous souhaitons que la France retrouve l'ambition de construire une Europe qui soit maîtresse de son destin, capable de parler d'une même voix. Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt pour ces rendez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Philippe Folliot. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, l'honneur et la grandeur d'une nation se mesurent à ses capacités de fermeté et de dignité dans des circonstances exceptionnelles.
    Derrière le Président de la République, c'est une France rassemblée qui se trouve, dans la crise irakienne, être le symbole du respect du droit international et de la paix. Rien - je dis bien rien - ne saurait justifier qu'un Etat seul se comporte comme un empire, au mépris de la communauté internationale et de ses organes représentatifs, et puisse engager le monde entier dans une tourmente dont nul ne peut à ce jour apprécier les terribles conséquences politiques, stratégiques, économiques, sociales, environnementales et, surtout, humanitaires.
    Monsieur le Premier ministre, la politique de la France est juste et nous la soutenons depuis le premier jour. Fidèles à notre tradition, nous avons vocation à être un maillon indispensable dans la chaîne des peuples et des nations pour rapprocher l'Occident du Moyen-Orient, le Nord du Sud. Dans quelques semaines, dans quelques mois peut-être, viendra le temps de la reconstruction. La France s'honorerait d'aider ce peuple irakien qui aura connu, en moins de vingt ans, trois guerres, un embargo, avec leur cortège de souffrances, de morts et de désolation.
    Monsieur le Premier ministre, comment et dans quel cadre la France pourra-t-elle jouer le rôle que tous les peuples du monde attendent d'elle pour la future paix, la reconstruction de l'Irak, l'aide à son peuple et le nouvel ordre international ?
    Aujourd'hui, le droit international cède devant la force. L'ONU est désavouée et l'Europe écartelée. Quelles initiatives compte prendre le Gouvernement pour ressouder cette Europe en miettes qui ne pèse malheureusement pas dans les affaires du monde ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Permettez-moi, monsieur le président, de vous remercier d'avoir, par cette nouvelle forme de présentation des questions, permis l'expression de l'unité nationale derrière les positions de la France, celles du Président et de notre diplomatie.
    La guerre n'est pas déclarée et, jusqu'au bout, nous nous battrons pour la paix, pour les principes et les convictions qui ont guidé la démarche de la France dans ces terribles circonstances. Nous avons entendu l'ultimatum de quarante-huit heures qui a été adressé par le Président des Etats-Unis. Malgré cela, nous continuons à défendre les principes et à affirmer les convictions qui sont celles de la France. C'est le message qu'a formulé, il y a quelques heures, M. le Président de la République, c'est le message de la France, mais c'est aussi, aujourd'hui, celui d'une majorité de nations dans le monde.
    C'est d'abord le message de la légalité internationale. Nous voyons combien notre monde a besoin de règles internationales, et qu'elles soient respectées.
    L'ONU, qui a été construite, ne l'oublions pas, pour faire en sorte que les générations futures soient préservées du « fléau de la guerre », selon les mots de sa charte constitutionnelle, doit rester le lieu du droit international, et le Conseil de sécurité la seule instance à pouvoir autoriser l'emploi de la force. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Emile Zuccarelli. Très bien !
    M. le Premier ministre. C'est pourquoi nous sommes très engagés dans la défense de l'Organisation des Nations unies et du Conseil de sécurité. Nous voulons dire très clairement au monde que, pour la France, il ne peut y avoir d'engagement unilatéral de la force sans risque de fragiliser ce lieu de paix, ce lieu de droit qu'est l'Organisation des Nations unies. C'est un engagement en faveur du droit, en faveur de la légalité internationale.
    Deuxième grand principe, deuxième grande conviction, nous pensons que, à l'occasion de cette crise, l'Organisation des Nations unies a trouvé une forme pertinente de lutte contre le terrorisme et contre la prolifération : la démarche des inspections. Nous regrettons profondément qu'elle ne puisse aller à son terme, car elle produit des résultats. Elle a ainsi conduit le dictateur de l'Irak, pour lequel nous n'éprouvons aucune sympathie, à détruire plus de 70 missiles Al-Samoud. Nous avons vu que cette démarche des inspections est la démarche alternative à celle de la guerre : elle produit des résultats. C'est pourquoi la France a proposé, et continue de proposer, que l'on donne du temps aux inspections pour permettre ce désarmement de l'Irak, qui est l'objectif commun. La voie des inspections, redisons-le, est une alternative à la guerre. C'est là un principe, une conviction, que la France a développés et pour lesquels elle a, vous le savez, nourri de nombreuses propositions.
    Enfin, je voudrais dire combien il nous paraît dangereux aujourd'hui d'engager la force de manière unilatérale pour trouver, aux yeux des Américains, une réponse au 11 septembre. Pour nous, cette guerre n'est pas la bonne réponse à ces attentats, à l'occasion desquels nous avons partagé la révolte et partagé la solidarité. Mais la guerre qu'il faut aujourd'hui mener, c'est celle contre le terrorisme et la prolifération. Cette bataille-là exige l'unité de la communauté internationale, et elle exige que le Conseil de sécurité soit le lieu du droit. Car, autrement, comment empêcherons-nous que, dans le monde entier, un certain nombre de représentants de causes diverses se sentent, dans la position d'agressés, le droit d'engager des démarches terroristes et de menacer leur monde, le monde, notre monde, d'autant que le terrorisme est aujourd'hui, nous le savons, beaucoup plus dangereux, dans la mesure où les armes sont beaucoup plus accessibles et où il peut avoir une efficacité terrifiante avec des équipes beaucoup plus réduites.
    Dans notre lutte contre le terrorisme, nous avons besoin de l'union de tous les peuples et de l'ONU pour vraiment faire en sorte que, partout dans le monde, on mesure les effets de la prolifération. C'est pour cela que, si nous disons clairement que nous n'avons aucune sympathie pour le régime irakien, aucune sympathie pour ce dictateur et que nous voulons la suppression des armes de destruction massive qui sont en Irak, nous pensons que la voie choisie de manière unilatérale n'est pas la voie appropriée à cet objectif de la communauté internationale. La preuve en est que, pour leur démarche, les Etats-Unis n'ont pas réuni une majorité.
    Nous voulons continuer dans cette direction qui nous paraît très importante. Je réaffirme ici ce que le Président de la République a dit haut et fort : nous restons les alliés des Etats-Unis. Ce n'est pas parce que nous ne voulons participer à cette guerre que nous sommes en guerre contre les Etats-Unis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Nous avons aujourd'hui des désaccords importants, mais l'amitié que nous portons au peuple américain, la gratitude qui est la nôtre pour le sang versé par les Américains...
    M. Alain Marsaud. Très bien !
    M. le Premier ministre. ... nous autorisent à cette franchise, à cette sincérité qui nous permet de leur dire que cette guerre n'est pas la réponse appropriée à la situation de trouble que connaît le monde. C'est cette amitié qui nous permet de dire aux Américains qu'il faut une alternative à la guerre. Nous le dirons jusqu'à la dernière heure, parce que c'est notre conviction, parce que ce sont nos principes.
    Messieurs Bocquet, Douste-Blazy, Ayrault et Folliot, j'ai entendu vos inquiétudes, j'ai entendu le message fort que les uns et les autres partagent au nom de la nation française. J'ai entendu vos inquiétudes pour l'Organisation des Nations unies. Sachez que nous nous battrons pour faire en sorte que si la guerre, hélas ! se fait sans les Nations unies, voire contre elles, la paix, elle, se construise au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous mettrons toute notre énergie pour faire en sorte que ni l'OTAN ni la construction européenne ne soient fragilisées par cette crise mondiale. Vous m'avez interrogé sur les démarches qui avaient été les nôtres et qui seront les nôtres. Nous avons veillé - et j'ai personnellement veillé - à rester en contact permanent avec l'ensemble des Premiers ministres de l'Union européenne, afin de leur faire part de nos divergences sur la situation internationale, mais tout en insistant sur notre volonté de défendre avec conviction notre projet européen. J'espère, et je crois aujourd'hui possible, qu'en ce qui concerne la Convention pour l'avenir de l'Europe, par exemple, un mouvement de rapprochement s'engagera entre la proposition franco-allemande et la proposition hispano-britannique. Nous avons mené des contacts pendant toute cette période pour faire en sorte qu'en aucune façon ni l'Espagne ni le Royaume-Uni n'apparaissent comme des adversaires de la France, malgré nos désaccords sur cette crise. Nous veillons évidemment à ce que la construction européenne puisse trouver dans ces difficultés des forces nouvelles pour assumer son avenir. Mais, nous le savons, ni l'histoire ni la géographie n'ont rendu l'Europe naturelle : c'est la capacité de surmonter les diversités, la capacité de surmonter les difficultés qui ont permis à l'Europe d'affirmer son avenir. C'est dans cette voie que nous nous engagerons, les jours prochains, au Conseil européen.
    Notre engagement pour la paix est d'une extrême fermeté. Notre engagement pour l'Europe est d'une égale extrême fermeté. Je tiens à vous dire clairement aujourd'hui que, si la France est déterminée à parler franchement à ses alliés, elle est tout aussi déterminée à ne pas se tromper d'adversaire. La France n'est pas du jour au lendemain devenue militante du pacifisme. La France est militante, comme elle l'a toujours été, des droits de l'humanité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

CONFÉRENCE POUR L'EMPLOI

    M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Bernard Accoyer. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, concerne la situation économique et sociale et, plus spécifiquement, celle de l'emploi (« Elle est mauvaise ! » sur les bancs du groupe socialiste), dans un contexte de tension internationale que M. le Premier ministre vient d'évoquer (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et qui aggrave les perspectives économiques et financières.
    La France était déjà confrontée aux conséquences des mesures prises par le précédent gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste.) : gaspillage des fruits de la croissance, complexification des règles régissant la vie des entreprises, judiciarisation de la vie des entreprises...
    M. Albert Facon. Toujours la même chanson !
    M. Bernard Accoyer. ... et 35 heures généralisées et obligatoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Albert Facon et M. Michel Lefait. Allez donc le dire aux salariés de Metaleurop !
    M. Bernard Accoyer. Or l'emploi étant, monsieur le ministre, la priorité du Gouvernement, vous avez déjà pris d'importantes mesures concernant les contrats pour les jeunes en entreprises, la baisse des charges, comme vous nous avez proposé d'importantes mesures législatives pour la création, la vie des entreprises et la création d'emplois.
    M. Albert Facon. Et pour faciliter les licenciements !
    M. Bernard Accoyer. D'autres mesures sont en cours de réalisation, avec des financements supplémentaires pour les contrats aidés, les contrats emploi solidarité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),...
    M. Albert Facon. Paroles, paroles !
    M. Bernard Accoyer. ... les contrats emplois consolidés.
    M. Albert Facon. C'est du pipeau !
    M. Bernard Accoyer. Vous avez également annoncé un train de mesures concernant les contrats d'insertion dans la vie sociale,...
    M. Albert Facon. C'est faux !
    M. Bernard Accoyer. ... la transformation du RMI en revenu minimum d'activité, ainsi que les contrats initiative emploi.
    Monsieur le ministre, vous avez convoqué cet après-midi la Conférence nationale pour l'emploi et la formation professionnelle. Vous avez décidé, pour votre part, de travailler avec tous les partenaires sociaux, dans le dialogue social, pour mobiliser toutes les énergies...
    M. Maxime Gremetz. Pour les mobiliser dans la rue !
    M. Bernard Accoyer. ... en faveur de l'emploi. Pouvez-vous préciser, devant la représentation nationale, les objectifs qui seront fixés à cette conférence et les résultats que l'on peut en espérer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Christian Bataille. Bien téléphoné ! Allô ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, face à la dégradation de la situation économique internationale (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), le Premier ministre a souhaité que l'Etat et les partenaires sociaux se mobilisent autour de l'emploi.
    Sur les bancs du groupe socialiste. Oui, ils sont mobilisés contre votre politique !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je vais donc cet après-midi réunir l'ensemble des partenaires sociaux autour de cinq grands thèmes. Le premier, c'est la formation professionnelle.
    M. Jean-Paul Anciaux. Très bien !
    M. Richard Mallié. Il était temps !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Les partenaires sociaux ont engagé une négociation en vue de mettre en oeuvre l'engagement de la majorité sur l'assurance emploi. Cette négociation relève de leur responsabilité, mais la situation actuelle nous autorise à leur demander d'avancer plus vite. Ainsi, cet après-midi, nous annoncerons les moyens que le Gouvernement est prêt à mettre en oeuvre pour que réussisse cette négociation qui permettra à chaque Français d'être doté d'un compte individuel de formation professionnelle.
    Deuxièmement, il s'agit de faciliter le maintien au travail des salariés âgés de plus de cinquante ans. Cette question relève, là encore, d'une négociation entre les partenaires sociaux, mais le Gouvernement va l'encourager en proposant des mesures permettant d'accroître les aides apportées aux entreprises qui recrutent des salariés âgés de plus de cinquante ans.
    Troisième sujet : les restructurations industrielles.
    Mme Martine David. Cela s'appelle les licenciements !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement souhaite que la négociation engagée entre les partenaires sociaux s'articule avec le rôle de la mission chargée à la fois de l'action préventive et de la mise en oeuvre des plans sociaux. Dans ce cadre, il consentira un effort particulier pour augmenter les moyens, notamment en faveur des cellules de reclassement et des contrats de site.
    Enfin, le Gouvernement souhaite poursuivre sa politique de réorientation des contrats aidés, dans l'esprit que la majorité a souhaité,...
    M. François Hollande. Ce n'est pas le nôtre !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... c'est-à-dire : plus de responsabilité, la mise au travail de tous ceux qui le souhaitent et moins d'assistance,...
    M. Christian Bataille. Vous n'avez rien à dire !
    M. le président. Monsieur Bataille !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... car nous avons besoin, aujourd'hui, d'activer les dépenses de solidarité.
    Dans cet esprit, le Gouvernement va proposer la réforme du RMI et la mise en place, dès ce semestre, d'un revenu minimum d'activité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Hollande. Qu'est-ce que ça veut dire ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il proposera en outre que soit accrue l'attractivité du CIE, qui a été délaissé ces dernières années, alors qu'il permet aux entreprises de recruter des personnes qui sont au chômage depuis longtemps,...
    M. Christian Bataille. Baratin !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... ainsi que la création de 25 000 contrats d'insertion dans la vie sociale. Enfin, nous allons confirmer ce que le Premier ministre a annoncé à plusieurs reprises devant cette assemblée, c'est-à-dire l'engagement de 20 000 contrats emploi solidarité par mois (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste),...
    M. Albert Facon. A la Saint-Glinglin !
    M. Christian Bataille. Quand on n'a rien à dire, on se tait !
    M. le président. Laissez terminer M. le ministre !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... jusqu'à la fin de l'année 2003.
    Mesdames, messieurs les députés, l'ensemble de ces mesures représente un effort supplémentaire de 300 millions d'euros.
    M. Manuel Valls. Tout cela est bien laborieux !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement a décidé, en effet, face à une situation économique qui s'aggrave, d'accélérer le rythme des réformes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

2

HOMMAGE À LA MÉMOIRE
DE TROIS POLICIERS VICTIMES DU DEVOIR

    M. le président. Avant de donner la parole à l'orateur suivant, je veux être l'interprète de l'Assemblée pour saluer la mémoire des policiers qui sont morts la nuit dernière dans l'exercice de leurs missions.

3

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT
(suite)

    M. le président. Nous reprenons les questions au Gouvernement.

LOI SUR LA SÉCURITÉ INTÉRIEURE

    M. le président. La parole est à M. François Calvet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. François Calvet. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, hier soir, trois jeunes policiers ont été tués et un autre grièvement blessé au cours d'une course-poursuite dans les Hauts-de-Seine. Vous vous êtes immédiatement rendu sur place. Au nom de tous mes collègues, je tiens à dire combien nous nous associons à la douleur des familles et nous espérons que la quatrième victime se rétablira rapidement.
    Ces jeunes policiers, victimes d'un grave accident dans l'exercice de leurs fonctions, nous rappellent le trop lourd tribut que paie la police nationale dans la lutte contre la délinquance. Nos policiers doivent être soutenus chaque jour davantage par des moyens et un cadre législatif précis.
    A cet égard, nous avions adopté, le 12 février dernier, une loi sur la sécurité intérieure, afin que le Gouvernement dispose de moyens et de mesures adaptés. La semaine dernière le Conseil constitutionnel a déclaré cette loi conforme à la Constitution. (« Avec des réserves ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Calvet. Monsieur le ministre, les attentes de l'ensemble des Français sont grandes face à ce problème. Pouvez-vous nous dire aujourd'hui quelles vont être les modalités d'application de ce texte ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, je crois que le moins qu'on puisse faire est de citer les noms de ces jeunes policiers : Hubert Paris, trente-deux ans, marié, il avait deux enfants ; Florent Niel, trente ans, marié, père de deux enfants ; Cyril Farre avait vingt-cinq ans. Il sont morts hier soir, brûlés vifs dans leur voiture, désarticulée dans un platane. Ils sont morts victimes de leur devoir, en poursuivant quatre malfaiteurs sur deux motos. Ils n'ont écouté que leur devoir, ils ont voulu rattraper ces malfaiteurs qui venaient de dérober le sac d'une femme seule dans sa voiture. L'un des délinquants a été arrêté dans la nuit ; l'identité d'un autre est maintenant connue : il sera arrêté très prochainement.
    C'est effectivement, monsieur le député, l'occasion pour la représentation nationale dans son ensemble de redire combien les métiers de policier, de gendarme et de sapeur-pompier sont des métiers dangereux. Comme l'a demandé le président de l'Assemblée nationale, il nous faut nous associer à la douleur des familles et respecter profondément l'engagement de ces jeunes femmes et de ces jeunes hommes.
    Il est difficile de passer d'un sujet à l'autre, chacun le comprend. Et pourtant...
    La semaine dernière, le Conseil constitutionnel a validé la loi de sécurité intérieure : 143 articles, pas un article annulé, pas un mot modifié, pas une disposition interdite. Ouverture des coffres de voiture, fichiers, perquisitions, tout cela va pouvoir maintenant passer dans la réalité. Tout ce qui a été dit sur le caractère « liberticide » de ce texte s'est révélé faux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Tout ce qui a été dit sur ce texte prétendument « contraire aux droits de l'homme » s'est révélé faux ! Le Conseil constitutionnel a tranché : sa décision s'impose maintenant à tout le monde. A moins de contester le juge, et dans ce cas-là on n'est plus dans une démocratie. (Mêmes mouvements.)
    M. Christian Bataille. N'importe quoi !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Drôle de conception de la démocratie !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Dès demain, la loi sera promulguée. Dès la semaine prochaine une circulaire d'application sera adressée à tous les préfets, tous les commandements de groupements, toutes les directions départementales de la sécurité publique, les DDSP. Le mois prochain, tous les fonctionnaires de police et tous les militaires de la gendarmerie recevront la brochure en même temps que leur feuille de salaire. J'ai installé un tableau de bord mensuel des nouvelles infractions pour que, enfin, monsieur le député, quand vous votez des lois, celles-ci se traduisent par des faits, que vous puissiez l'évaluer et que le Gouvernement puisse vous en rendre compte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Enfin, tous les décrets d'application seront pris avant le mois de juin.
    Voilà la réponse à votre question, monsieur le député. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

SITUATION DES FINANCES PUBLIQUES

    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
    J'espère, monsieur Bataille, que lui, au moins, vous allez l'écouter dans le silence !
    Vous avez la parole, monsieur Migaud.
    M. Didier Migaud. Monsieur le Premier ministre, lorsque nous avions décidé, pour notre part, de plafonner les prix des carburants et du fioul domestique, c'était un choix politique : celui d'éviter les conséquences négatives pour les consommateurs d'une envolée des prix du pétrole.
    Le 21 juillet dernier, vous avez décidé, vous, de supprimer ce dispositif dit de la « TIPP flottante », geste qui correspondait, lui aussi, à un choix politique, mais celui d'alourdir le poids des taxes payées par le plus grand nombre alors que, dans le même temps, vous allégiez l'impôt des plus aisés. C'était non seulement injuste, mais illégal, puisque le Conseil d'Etat vient de condamner le Gouvernement et de l'obliger à rembourser les sommes illégalement prélevées.
    Mme Martine David. Eh oui !
    M. Didier Migaud. Contrairement à ce que vous affirmez, de mauvaise foi et en mauvais perdant, il ne s'agit pas de rembourser les compagnies pétrolières ; elles n'en ont pas besoin. Il s'agit, pour nous, de faire en sorte que les consommateurs soient remboursés et que les prix baissent. Par ailleurs, la somme est beaucoup plus élevée que vous ne le prétendez.
    Ce que nous avons fait, vous pouvez le refaire. Quand et comment allez-vous rembourser les consommateurs ? Allez-vous saisir cette occasion pour rétablir le dispositif de la TIPP flottante, et ce au moment même où l'augmentation des prix du pétrole - 15 % de hausse en un an en dépit de la baisse du dollar - pèse sur l'inflation et ampute le pouvoir d'achat des ménages ?
    M. Georges Tron. Vous avez laissé un déficit de 300 milliards !
    M. Didier Migaud. De même que vous avez menti sur la TIPP, vous mentez sur la réalité de la situation économique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Tous les feux sont au rouge : chômage, inflation, déficit et croissance. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) L'Irak n'explique pas tout, et votre politique est largement responsable de cette situation.

    Vous êtes aujourd'hui contraint d'avouer...
    M. Lucien Degauchy. D'avouer ?
    M. Jean Auclair. Il n'y a rien à avouer !
    M. Didier Migaud. ... que la croissance sera moitié moindre que ce que vous aviez promis il y a trois mois et de mettre en oeuvre un véritable plan d'austérité en annulant 1,5 milliard d'euros de dépenses, soit la moitié des crédits civils supplémentaires inscrits pour 2003, et en gelant 2,5 milliards d'euros de crédits.
    M. Georges Tron. Vous oubliez que vous avez laissé un déficit de 300 milliards !
    M. Didier Migaud. Etes-vous prêt, monsieur le Premier ministre, à demander un audit sur les raisons de la dégradation des comptes depuis votre arrivée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Plusieurs députés sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est vous qui les avez dégradés !
    M. Didier Migaud. Quand allez-vous enfin dire la vérité aux Français et présenter un budget rectificatif qui, cette fois-ci, prendra en compte la situation du plus grand nombre ?
    Monsieur le Premier ministre, ce n'est pas un sourire que nous vous demandons, mais des réponses précises. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, vous avez choisi le bon jour pour parler de la TIPP, puisque le prix du pétrole a connu une forte baisse aujourd'hui. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Augustin Bonrepaux. Oui, bon, répondez !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Comme vous, monsieur le député, je travaille sur la matière budgétaire depuis dix ans,...
    M. Albert Facon. On ne le voit pas !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... et, comme vous, j'ai pu constater que, environ une demi-douzaine de fois par an, le Conseil d'Etat fait une analyse du droit différente de celle du Gouvernement. Toutefois, j'ai pu observer que, en pareil cas, certains gouvernements n'hésitent pas à neutraliser telle décision du Conseil d'Etat en faisant adopter par le Parlement un article de validation. Pour ma part, je ne l'ai pas fait, monsieur Didier Migaud, par courtoisie républicaine à votre endroit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

    Cela étant, monsieur Migaud, ce qui est tout de même assez remarquable de la part d'un député socialiste comme vous, c'est que le recours que vous avez déposé va avoir pour conséquence que 22 millions d'euros...
    M. Didier Migaud. Non, il n'est pas question de ça !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... prélevés sur les Français vont être remboursés aux compagnies pétrolières, qui ne le demandent pas. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    S'agissant de la mise en place d'un dispositif correctif, je vous répondrai, comme je l'ai déjà fait lors d'une séance précédente, puisque c'est la seconde fois que vous posez cette question, monsieur le député, que cela pourra se faire si nécessaire.
    M. François Hollande. C'est déjà le cas !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Non, pour l'heure, ce n'est pas encore le cas, étant donné que le prix à la pompe est moins cher qu'en 2000, époque où le dispositif de la TIPP flottante a été mis en oeuvre. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Marcel Dehoux. Ce n'est pas vrai !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous ne répondez pas à la question, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Mensonge, avez-vous dit. Mais parliez-vous de l'année 2002 ?
    M. Georges Tron. Très juste !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Parliez-vous du taux de croissance de 2,5 % prévu pour l'année 2002 ?
    M. Jean Glavany. Nous parlons d'aujourd'hui !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est ce que vous aviez approuvé à l'Assemblée, alors que ce taux n'a été que de 1,2 ! Voilà, monsieur Migaud, la valeur de vos évaluations ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Augustin Bonrepaux. Et l'audit ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. A la différence de la pratique adoptée par le gouvernement que vous souteniez, monsieur le député, le présent gouvernement a choisi la sincérité. (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), qui est le meilleur gage de la confiance. Il a, à chaque fois, donné les éléments qui étaient à sa disposition. Ainsi, il a indiqué que le taux de croissance serait corrigé à hauteur de 1,3 %.
    Mme Martine David. Lamentable !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je me souviens que l'an dernier, à la même date, à quelques semaines de l'élection présidentielle et des élections législatives, vous aviez omis de communiquer sur la correction apportée au taux de croissance : un taux ramené à 1,5 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

ÉVASIONS DE DÉTENUS

    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe de l'UMP.
    M. Jean-Pierre Door. Monsieur le garde des sceaux. Les évasions successives, à quelques jours d'intervalle, de deux gangsters fichés au grand banditisme sont inquiétantes, et cela à plusieurs titres. L'une a eu lieu à Borgo, l'autre à Fresnes ; à chaque fois, les bâtiments ont été pris d'assaut par des individus équipés de véritables armes de guerre.
    Dans l'une comme dans l'autre des cellules des évadés, on a découvert des portables, des armements et, semble-t-il, même des explosifs. Dans une prison comme dans l'autre, la résistance s'est avérée impossible, voire dangereuse, vu le risque vital couru par le personnel. Dans un cas comme dans l'autre, les services de police sont évidemment écoeurés de voir leur travail - difficile et parfois mortel comme en témoigne le malheureux accident de la nuit dernière - réduit à néant, les détenus « se faisant la belle ».
    Monsieur le garde des sceaux, nous connaissons votre détermination à faire respecter la loi et la justice. Nous soutenons sans faille votre action. Ces deux évasions ne sont peut-être que l'expression, malheureusement, de la loi des séries. Aussi, pour éclairer la représentation nationale, pouvez-vous nous détailler les mesures que vous comptez prendre, afin que ceux qui le méritent restent derrière les barreaux et que la société soit à l'abri des malfrats ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, je partage votre émotion et votre colère contre ce type d'agissements parfaitement inadmissibles et contre lesquels vous pouvez compter sur ma détermination et sur celle du Gouvernement. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Plusieurs députés sur les bancs du groupe socialiste. Nous voilà rassurés ! (Sourires.)
    M. le garde des sceaux. Oh ! Attendez la suite ! Ces évasions appellent deux remarques : d'une part, le nombre global des évasions a diminué de moitié entre 2001 et 2002 mais, d'autre part, la violence des évasions résiduelles s'est accrue. Contre ce phénomène, nous avons tout d'abord commencé à prendre des mesures techniques indispensables, ce qui n'avait pas été fait auparavant (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),...
    M. Pierre Hellier. Eh oui !
    M. le garde des sceaux. ... pour équiper les établissements en matériels modernes - rayons X, systèmes de reconnaissance des détenus lors des entrées et des sorties -, pour assurer un contrôle effectif dans les parloirs, ou encore pour renforcer les miradors : c'est ainsi que, par bonheur, les deux miradors de Fresnes avaient été renforcés récemment.
    Mais, au-delà des mesures matérielles, il est indispensable de renforcer les effectifs.
    M. Maxime Gremetz. Oh oui !
    M. le garde des sceaux. En effet, la montée de la violence à l'intérieur même des établissements rend le travail des personnels de plus en plus difficile. Je me suis rendu ce matin à Fleury-Mérogis pour vérifier les dispositifs de sécurité, et j'ai pu constater combien nous avions eu raison, le Premier ministre et moi, de prévoir le recrutement de 2000 surveillants pénitentiaires supplémentaires pour la seule année 2003, mouvement qui se prolongera durant les cinq prochaines années, afin que non seulement il n'y ait plus de vacance de postes budgétaires, mais aussi que l'encadrement soit renforcé dans les établissements.
    Une troisième série de mesures concerne le renforcement de la discipline et le respect des procédures. J'ai réuni vendredi matin l'ensemble des directeurs régionaux de l'administration pénitentiaire pour leur donner clairement mes instructions, en leur demandant de les appliquer d'une manière extrêmement précise. Il s'agit de rendre de nouveau systématiques les fouilles individuelles et de réaliser régulièrement, dans les grands établissements, des fouilles systématiques. Il s'agit également, pour des raisons de sécurité, de regrouper les détenus les plus dangereux dans certaines parties des établissements pénitentiaires. Nous allons, entre autres, mettre en place des équipes régionales d'intervention et de sécurité pour renforcer les équipes de surveillants.
    En un mot, je veux non seulement rendre quasiment impossibles les évasions,...
    M. François Hollande. On en reparlera !
    M. le garde des sceaux. ... mais surtout renforcer la sécurité des personnels, car c'est d'abord à eux que je pense, compte tenu de la difficulté de leur travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

CONVENTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS
POUR PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES

    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dupont, pour le groupe de l'UMP.
    M. Jean-Pierre Dupont. Monsieur le secrétaire d'Etat aux personnes âgées, ma question concerne la réforme de la tarification des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (« Ah ! sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Liberti. Parlons-en !
    M. Jean-Pierre Dupont. C'est un sujet d'actualité, mes chers collègues, parce que des personnels d'établissements pour personnes âgées manifestent aujourd'hui...
    M. Bernard Roman. Les emplois-jeunes aussi !
    M. Jean-Pierre Dupont ... à l'appel de M. Luc Broussy, délégué général du Syndicat national des établissements et des résidences privés pour personnes âgées - le SYNERPA -, qui est également responsable du dossier « personnes âgées » au sein du parti socialiste ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Chacun s'accorde à reconnaître que la qualité de la prise en charge des personnes âgées dépendantes accueillies en établissement constitue un enjeu majeur pour notre société.
    M. Maxime Gremetz. On ne le dirait pas !
    M. Jean-Pierre Dupont. Aussi, afin d'inciter chaque établissement à s'engager dans cette voie, le principe d'une réforme de la tarification de ces établissements a été adopté par notre assemblée en 1997.
    Cette réforme vise à promouvoir la démarche « qualité » au sein de chaque établissement, à réduire les inégalités dans l'attribution des ressources et à clarifier les coûts incombant à chaque financeur. Sa mise en oeuvre à travers la signature des conventions tripartites entre les DDASS, le conseil général et les établissements a connu d'importantes difficultés. Si, en Corrèze, la moyenne des signatures pour les établissements est de l'ordre de 50 %, elle n'est en revanche que de 20 % pour l'ensemble du pays.
    La loi de financement de la sécurité sociale de 2003 tire les conséquences de ces retards et propose, avec réalisme, un report de la date de signature de ces conventions. Vous n'en avez pas moins, monsieur le secrétaire d'Etat, relancer la dynamique des conventionnements et fixer un objectif ambitieux pour 2003.
    M. le président. Mon cher collègue, pouvez-vous poser votre question ?

    M. Jean-Pierre Dupont. Face à l'inquiétude qui sévit et compte tenu du fait que la répétition est l'art de la pédagogie, pouvez-vous de nouveau, monsieur le secrétaire d'Etat, nous donner des précisions sur le financement de ces conventions et nous indiquer si les financements prévus seront maintenus. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
    M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le député, comme vous l'avez souligné, l'enjeu est d'importance : il faut en effet assurer une prise en charge de qualité aux personnes âgées. Les 650 000 personnes âgées accueillies dans les 10 000 établissements concernés et les 300 000 salariés qui y travaillent méritent toute notre attention.
    Dès notre arrivée, nous nous sommes attachés à amplifier la dynamique des signatures et du conventionnement. Les chiffres l'attestent : 330 conventions signées entre 2000 et 2001, contre 1 200 conventions en 2002, dont plus de 700 au second semestre.
    Par ailleurs, pour la première fois, nous avons inscrit un objectif volontariste dans la loi de financement de la sécurité sociale,...
    Mme Martine David. Cela ne suffit pas !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... en prévoyant que 1 800 conventions seront négociées et signées en 2003. L'Etat aura une action volontariste, afin que cet objectif soit tenu. Ainsi, nous financerons en partie les conventions signées en 2003. Par ailleurs, nous appliquerons pour certaines conventions l'article 32 du décret du 26 avril 1999, pris par nos prédécesseurs.
    Monsieur le député, nous faisons face non seulement à nos engagements mais aussi à ceux de nos prédécesseurs (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), car, en la matière, croyez-moi, les donneurs de leçons ne sont pas toujours les payeurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

ÉDUCATION NATIONALE

    M. le président. La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste.
    M. Yves Durand. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, c'est la troisième fois depuis que vous êtes au ministère que vous contraignez enseignants et parents à faire grève (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) contre ce qui est devenu une véritable hémorragie des crédits pour l'école. (« Pas vous ! » sur les mêmes bancs.)
    Après un mauvais budget est paru ce matin un décret d'annulation de crédits.
    M. Jean Auclair. Provocateur !
    M. Yves Durand. Les choses sont maintenant claires : l'éducation est sacrifiée ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean Auclair. Et vous, qu'avez-vous fait ?
    M. Yves Durand. Pour certains secteurs, la situation est catastrophique. Par exemple, pour ce qui est des crédits pédagogiques, ce sont plus de 90 % des crédits supplémentaires que vous aviez promis qui sont supprimés.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est honteux !
    M. Yves Durand. Il y a plus d'annulations de crédits qu'il n'y avait eu d'annonces de gel !
    Face à la colère du monde de l'éducation, monsieur le ministre, vous pratiquez un dialogue social qui s'apparente davantage à d'aimables discussions de salon...
    M. Lucien Degauchy. Une spécialité de la gauche caviar !
    M. Yves Durand. ... qu'à une concertation sérieuse et responsable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    S'agissant en particulier de la décentralisation il faut bien noter que votre désinvolture se double de votre duplicité. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En effet, aux représentants de toutes les catégories venus vous confier leur inquiétude quant à leur maintien au sein de l'éducation nationale, vous aviez assuré - je vous cite : « Je ne suis pas demandeur, le sujet n'est pas à l'ordre du jour et, de toute façon, rien ne sera fait sans votre avis, sinon votre accord. »
    Or c'est par la presse qu'ils ont appris la décision du Premier ministre d'exclure de l'éducation nationale plus de 110 000 d'entre eux !
    M. Jean Auclair. Et de ceux qui sont planqués, que faites-vous ?
    M. le président. Monsieur Auclair, n'en faites pas trop aujourd'hui !
    M. Yves Durand. Alors, monsieur le ministre, ou vous connaissiez les intentions du Premier ministre, et vous avez dupé vos interlocuteurs, ou vous les ignoriez, et c'est votre rôle à la tête de l'éducation nationale qui est en cause. (Protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe Union pour un mouvement populaire et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Monsieur Durand, posez votre question.
    M. Yves Durand. Monsieur le ministre, ma question est simple.
    M. le président. Posez-la, si elle est simple !
    M. Yves Durand. Entre la duplicité et l'inutilité, que choisissez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Auclair. Provocateur !
    M. le président. Monsieur Auclair, c'est terminé !
    La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, s'agissant des manifestations et des grèves, il va de soi que mon ami Xavier Darcos et moi-même nous les écoutons, nous les entendons et nous les comprenons. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Cela dit, entre écouter, comprendre et renoncer à exercer ses responsabilités, il y a une limite que vous me permettrez de ne pas franchir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    J'ajoute que vous aurez beaucoup de mal à expliquer la position qui est la vôtre aujourd'hui. A qui ferez-vous croire sérieusement qu'un système centralisé, qui gère aujourd'hui, si je prends l'ensemble du périmètre de mon ministère du 110 de la rue de Grenelle, près d'un million et demi de personnes ne peut pas bénéficier avec profit d'une petite dose de décentralisation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    A qui ferez-vous croire que la participation de nouveaux acteurs - je pense aux collectivités territoriales - ne sera pas bénéfique à notre système éducatif, comme ce fut le cas, d'une façon prodigieuse, dans les années 80 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) A mon avis, à personne ! En tout cas, pas à Pierre Mauroy, qui écrivait le 17 octobre 2000 à Lionel Jospin - je cite : « Après la première vague de décentralisation, la logique implique maintenant que les 95 000 personnels affectés aux tâches d'entretien et de maintenance soient mis à disposition des collectivités territoriales. » (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je poursuis ma citation : « Les collectivités gèrent et entretiennent ces bâtiments, alors que les personnels compétents ne sont pas placés sous leur autorité. Cette situation est incohérente. »
    On peut aimer l'incohérence et l'absence de courage, mais ne me demandez pas de cultiver cette absence de vertu sur le plan politique !
    Il faut maintenant ouvrir la négociation. J'ai évidemment reçu les partenaires sociaux à plusieurs reprises depuis trois jours, je l'ai fait encore ce matin et je les recevrai de nouveau tout à l'heure.
    M. Jérôme Lambert. Les décisions sont déjà prises !
    M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Ils savent parfaitement que rien de ce qui touche au service public ne sera abandonné : ni la définition des diplômes nationaux, ni celle des voies de formation, ni le recrutement national des professeurs et des cadres du système éducatif.
    Il faut les rassurer, car leur inquiétude est réelle, et je ne la sous-estime pas. C'est pourquoi nous allons les recevoir à nouveau avec mes collègues Xavier Darcos, Patrick Devedjian et Jean-Paul Delevoye. Aucun sujet ne sera tabou, tous seront abordés, y compris, évidemment, la définition, par la loi, et non plus par des circulaires ministérielles, des missions des personnels éducatifs. Cela sera, je pense, un grand progrès, pas seulement pour le service public de l'éducation nationale, mais aussi pour ces derniers. De toute façon, je le rappelle, ils auront le choix entre rester en position de détachement au sein de la fonction publique d'Etat ou intégrer tout de suite la fonction publique territoriale.
    La seule raison de ne pas réaliser cette réforme, ce progrès que Pierre Mauroy appelait de ses voeux, serait le manque de courage. Ne comptez pas sur moi pour y céder ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Mes chers collègues, le temps consacré aux questions au Gouvernement est écoulé, de même que celui consacré à leur retransmission télévisée. Je suggère donc à M. Cosyns et à M. Suguenot, qui n'ont pas pu poser leur question, de demander à leur groupe qu'il les inscrive pour la séance de questions de demain ou pour une séance ultérieure.
    Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)
    M. le président. La séance est reprise.

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ENTREPRISES DE TRANSPORT AÉRIEN

Explications de vote et vote sur l'ensemble
d'un projet de loi adopté par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France (n°s 632, 654).
    La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Mesdames, messieurs, nous arrivons au terme des travaux de l'examen en première lecture, par votre assemblée, du texte relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France.
    Je tiens d'abord à saluer la qualité du travail réalisé par vos rapporteurs et par les commissions. Ils ont rappelé et analysé avec beaucoup de pertinence les raisons qui ont conduit les gouvernements successifs à décider de la privatisation d'Air France en 1993 et à procéder à une première et large ouverture du capital en 1999. Depuis, aucun gouvernement n'est d'ailleurs revenu sur cette décision.
    L'été dernier, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a décidé la poursuite du processus pour donner de nouveaux espaces de liberté à Air France. Il s'agit de lui permettre de renforcer sa stratégie de partenariat et de lui donner les moyens de faire appel aux marchés pour soutenir sa politique d'investissement.
    Le projet de loi qui sera mis aux voix après les explications de vote a un double objectif : protéger en général les intérêts des compagnies aériennes françaises cotées en bourse, et en particulier les intérêts spécifiques d'Air France, ainsi que ceux de ses salariés. Il ne s'agit donc pas, contrairement à ce que certains ont pu dire, d'une nouvelle loi de privatisation.
    De plus, ce projet permet de donner à une entreprise de transport aérien les moyens de préserver sa licence d'exploitation et ses droits de trafic. Il permet en outre - j'allais dire surtout - d'associer les salariés à la future ouverture du capital, avec des offres classiques qui leur seront réservées, une possibilité d'échanger un salaire contre des actions. Enfin, le texte prévoit une période de deux ans pour donner le temps aux partenaires sociaux de négocier un accord d'entreprise qui se substituera alors au statut actuel.
    Je tiens à souligner une nouvelle fois le travail méticuleux des rapporteurs. A un texte très technique, vous avez apporté, monsieur le rapporteur, de nombreuses améliorations qui ont permis d'atteindre un meilleur équilibre entre l'efficacité des dispositions nécessaires à la sauvegarde des droits de trafic, le respect du droit de propriété, et la défense des droits de toutes les parties. Le texte amendé, tel qu'il vous est proposé aujourd'hui, a gagné en efficacité. Il est dans l'intérêt d'Air France, de ses salariés et de ses actionnaires, qu'il soit voté.
    Après son adoption définitive, le Gouvernement devra encore finaliser le décret d'application qui l'accompagne. Air France devra ensuite réunir une assemblée générale, comme le prévoit l'article 4 du présent projet de loi. Toutes les conditions seront alors réunies pour permettre au Gouvernement de décider, lorsque la situation s'y prêtera, de mettre sur le marché un second paquet d'actions, pour réduire de nouveau la participation de l'Etat au capital de la compagnie.
    Je souhaite confirmer à nouveau que le Gouvernement n'entend nullement brader les intérêts des contribuables et que cette opération n'interviendra que lorsque les conditions du marché le permettront. La société Air France disposera alors de tous les atouts pour valoriser la compétence et le savoir-faire de son équipe dirigeante et de l'ensemble de ses personnels auxquels je souhaite aujourd'hui, avec Dominique Bussereau, particulièrement en charge de ce dossier, rendre hommage pour le remarquable travail accompli au cours des dernières années, travail qui permet aujourd'hui à cette compagnie d'avoir de grandes ambitions pour son développement à l'échelle mondiale. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Charles de Courson, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord rappeler que ce texte est non pas un texte de privatisation d'Air France, mais un texte tirant toutes les conséquences de la loi qui a autorisé, en 1993, il y a dix ans, de privatiser Air France. Quels sont les quatre grands arguments en faveur de la privatisation ?
    Le premier argument est juridique. Le transport aérien n'est pas un service public. Seulement 6,2 % du chiffre d'affaires d'Air France correspondent à un service public et l'entreprise privatisée continuera à exercer des missions de service public dans le cadre de la directive communautaire du 23 juillet 1992.
    Le deuxième argument est économique. Le maintien du caractère public d'Air France nuit à ses alliances commerciales et capitalistiques. Les présidents Spinetta et Blanc l'ont rappelé, l'absence de rapprochement avec Iberia, Alitalia et KLM est liée au maintien du caractère public d'Air France. Les partisans de ce maintien signent, à terme, l'arrêt de mort de la compagnie en lui interdisant le regroupement avec d'autres compagnies en Europe. De plus, l'état des finances publiques est tel, que l'Etat n'est pas capable d'apporter à Air France les moyens financiers nécessaires à son développement.
    Le troisième argument est européen. La France s'est engagée en 1994 à l'égard de la Commission de Bruxelles à privatiser Air France dans le cadre de la recapitalisation de la compagnie. Etre contre cette privatisation, c'est refuser de respecter les engagements de la France.
    Le quatrième argument, et non des moindres, est d'ordre social. La privatisation d'Air France facilitera le dialogue social au sein de l'entreprise parce qu'elle entraînera la mise en place de conventions collectives, plus protectrices qu'un statut, et activera les pratiques sociales existantes. Trois syndicats ne sont pas hostiles à la privatisation : le SNPL, le syndicat des personnels commerciaux et, pour le personnel au sol, le syndicat des cadres, qui ont d'ailleurs progressé aux dernières élections.
    Enfin, la privatisation d'Air France permettra d'accroître la part du capital de l'entreprise détenue par les salariés. Si les deux possibilités d'achat d'actions prévues par le projet de loi sont utilisées au maximum, la part des salariés dans le capital d'Air France, actuellement de 13 %, pourrait plus que doubler et passer à un peu moins de 30 %.
    J'en viens au texte proprement dit. Des problèmes de fond ont été soulevés au cours de nos débats. Ils ont trouvé une réponse adaptée, équilibrée, proportionnée, dans le sens d'une meilleure protection des droits et libertés fondamentaux. Je me réjouis du dialogue nourri et du débat constructif qui ont été rendus possibles par le ministre et son ouverture d'esprit. Nous avons en effet adopté vingt-deux amendements, de la commission des finances ou du Gouvernement. Je voudrais rappeler les points les plus significatifs du texte.
    L'article 1er du projet de loi a été substantiellement modifié, sans que l'objectif légitime de préservation des intérêts socio-économiques des compagnies aériennes et de protection de l'intérêt général ne soit remis en cause. Cet article, je vous le rappelle, introduit un mécanisme de suivi, de contrôle et de régulation de la libre disposition des titres détenus dans les sociétés cotées de transport aérien, dans le but de préserver un certain équilibre dans la nationalité de leurs actionnaires et de manière à sécuriser leur activité. Je me réjouis que les amendements adoptés précisent la portée et la nature juridique des procédures introduites et renforcent les garanties des actionnaires en termes de voies de recours.
    Par ailleurs, si nous reconduisons, par les articles 2 et 4, les modalités actuelles de représentation des salariés au conseil d'administration d'Air France, nous le faisons sans empêcher la compagnie de pouvoir revenir un jour dans le droit commun des sociétés.
    Nous avons modifié l'article 3, qui aménage une transition de deux ans, à compter du transfert au secteur privé de la majorité du capital, pour permettre à Air France de négocier, avec les organisations syndicales, la banalisation de son statut. La compagnie pourra ainsi mener des négociations dès la promulgation de la loi, et non pas à compter de la privatisation, comme le texte le prévoyait initialement.
    Enfin, nous avons introduit deux modifications substantielles à l'article 5 du projet de loi, lequel aménage certaines mesures de promotion de l'actionnariat salarié à la société Air France.
    D'une part, les modalités concrètes de mise en oeuvre de l'échange « salaire-actions » ont été utilement précisées : la loi donnera désormais au ministre de l'économie la faculté de réguler le dispositif dans le cas où la demande des salariés serait plus forte que prévu et excéderait la limite fixée par le texte à 6 % du capital de la société.
    D'autre part, il était important de trancher la question de la nature juridique de la convention de remboursement entre l'Etat et Air France et nous avons clairement identifié la compétence juridictionnelle du juge judiciaire en spécialisant le TGI de Paris dans ce contentieux, évitant par-là même un inutile conflit de compétences.
    Au total, mes chers collègues, ce projet de loi est un texte important qui intervient dans une matière complexe, traversée par des évolutions juridiques profondes au niveau communautaire et marquée par une dimension sociale particulière, celle de la société Air France. C'est un bon projet de loi que votre commission des finances vous propose d'adopter aujourd'hui. Il devrait permettre d'accompagner la privatisation d'Air France dans des conditions équitables tant pour ses salariés que pour ses clients, dans l'intérêt de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Explications de vote

    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. François Goulard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. François Goulard. Vous avez bien fait, monsieur le ministre, de rappeler que la privatisation d'Air France relevait d'une loi votée en 1993, car, à entendre l'opposition la semaine dernière, nous aurions pu penser que c'était l'objet de ce texte. Il fallait également répéter que la majorité précédente non seulement n'a pas cru bon d'abroger cette loi, mais encore l'a utilisée pour ouvrir le capital de la compagnie. Il y a donc une contradiction à émettre les critiques que nous avons entendues dans cet hémicycle, la semaine passée.
    Comme vient de le dire Charles de Courson, Air France est en concurrence avec d'autres entreprises qui, pour la plupart d'entre elles, sont aujourd'hui privées, quand elles ne l'ont pas toujours été. Elle est appelée à nouer des alliances, y compris en capital, pour assurer son avenir et à recourir aux marchés financiers pour financer ses investissements. C'est une entreprise qui est appelée à prendre des risques, comme toutes celles qui interviennent sur des marchés concurrentiels, mais ces risques doivent être assumés par l'actionnaire et non par le contribuable. Ce n'est pas parce que la gestion récente d'Air France a été exemplaire qu'il faut oublier que l'entreprise a rencontré des difficultés et que, au total, elle a coûté au contribuable davantage que ce qu'elle pouvait lui rapporter. Oui, il est de l'intérêt de l'entreprise d'être privatisée et il est de l'intérêt des contribuables qu'elle le soit !
    Vous le faites, monsieur le ministre, dans des conditions qui sont de nature à préserver les intérêts patrimoniaux de l'Etat en adaptant le rythme de privatisation à l'évolution des marchés financiers. Vous le faites aussi dans le respect des intérêts du personnel, des collaborateurs d'Air France, en faisant en sorte - c'est une des dispositions importantes de ce texte - que la convention collective se substitue de manière harmonieuse au statut actuel.
    Ce texte comporte aussi des dispositions d'ordre technique qui visent à s'adapter à l'environnement juridique particulier de l'aviation civile, qu'il s'agisse des accords bilatéraux ou des évolutions récentes de la jurisprudence de la Cour de justice européenne. Il a été amélioré grâce à une excellente collaboration entre vous-même, monsieur le ministre, et nos commissions compétentes de l'Assemblée nationale. C'est donc avec une très grande satisfaction que le groupe UMP votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Pour le groupe socialiste, la parole est à Mme Odile Saugues.
    Mme Odile Saugues. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il existe un secteur particulièrement vulnérable et exposé aux conséquences d'un conflit international et d'une flambée des cours du pétrole, c'est bien le transport aérien. Vous comprendrez donc notre étonnement de voir ce gouvernement proposer à la représentation nationale la privatisation d'Air France en de telles circonstances,...
    M. Charles Cova. Cela n'a rien à voir !
    Mme Odile Saugues. ... d'autant que, les débats parlementaires l'ont souligné, rien ne justifie vraiment cette privatisation. Le seul argument de poids est celui que vous n'osez pas formuler : le Gouvernement est condamné à brader la première compagnie aérienne française (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française),...
    M. Jean-Marc Roubaud. Oh !
    Mme Odile Saugues. ... parce que les recettes de sa privatisation sont déjà inscrites dans votre budget 2003, un budget élaboré sur des prévisions de croissance irréalistes et insincères. Dès lors, qu'importe ! Qu'importe le contexte international et ses conséquences ! Qu'importe le cours de l'action d'Air France, actuellement au plus bas ! Qu'importent les dramatiques difficultés sociales que connaît ce secteur dans notre pays depuis la liquidation d'Air Lib ! Qu'importent les protestations des collectivités locales, qui constatent le désengagement de l'Etat en matière de réalisation d'infrastructures de transport ! Qu'importent les inquiétudes des salariés d'Air France, qui ont pourtant si résolument participé au redressement de la compagnie ! Qu'importent les contribuables français, qui, en 1994, ont sauvé Air France au travers de la recapitalisation et qui seront grugés par le Gouvernement,...
    M. Jacques Godfrain. Ils ont été grugés par votre gestion !
    Mme Odile Saugues. ... puisque, dans le meilleur des cas, vous annoncez que cette privatisation ne rapportera pas même le tiers du montant de la recapitalisation ! En fait, pour vous, seule compte l'idéologie. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Eh oui ! Vous êtes dans la lignée des gouvernements Balladur et Juppé, et vous n'avez qu'une obsession : faire reculer la présence de l'Etat, au mépris de l'emploi et de l'organisation du territoire.
    M. André Chassaigne. Très bien !
    Mme Odile Saugues. L'image que vous donnez de la compagnie Air France ne tient pas compte de la réalité. Vous la prétendez isolée sur la scène internationale alors qu'Air France, en juin 2000, a participé à la création de l'alliance SkyTeam, une alliance qui représente un trafic annuel de 204 millions de passagers et dessert 512 destinations dans plus de 110 pays.
    Vous décrivez une compagnie sclérosée, incapable de la moindre réaction du fait de son statut, mais vous omettez de rappeler qu'après les attentats du 11 septembre 2001, qui ont plongé le transport aérien dans une crise sans précédent, Air France a été l'une des rares grandes compagnies mondiales à résister à la tourmente et, surtout, la seule à ne prononcer aucun licenciement.
    Ne vous en déplaise, Air France a su évoluer grâce à ses salariés - je tenais à le souligner -, grâce à sa direction et grâce à un nouveau cadre législatif mis en place par votre prédécesseur, monsieur le ministre, au travers d'une ouverture de capital qui répondait aux attentes européennes, mais qui affirmait clairement le rôle de l'Etat dans le développement de la compagnie.
    M. Jean-Marc Roubaud. Oh ! la la !
    Mme Odile Saugues. Vous même, monsieur le ministre, avez récemment mesuré l'intérêt, pour l'Etat, de demeurer majoritaire dans le capital d'Air France, puisque vous avez convoqué, dans un tour de table très médiatisé, les entreprises de votre tutelle pour reclasser une partie des 3 200 salariés d'Air Lib. Le statut d'Air France aurait-il du bon lorsque le Gouvernement tente de sauver socialement la face et deviendrait-il honteux lorsque ce même gouvernement répond aux injonctions du MEDEF ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Louis Idiart. Très bien !
    Mme Odile Saugues. Ne trouvez-vous pas que, finalement, l'Etat, actionnaire majoritaire d'Air France, a toujours assumé ses responsabilités économiques, sociales et morales ? Peut-on en dire autant de la société Wendel et de M. Seillière ? Peut-on en dire autant de ces compagnies à bas coût qui fleurissent en Europe et dont les pratiques de prédateur et les tendances au cannibalisme devraient davantage préoccuper le Gouvernement que le statut d'Air France ?
    M. Jean-Marc Roubaud. Hors sujet !
    Mme Odile Saugues. Or, sur ce point, votre projet de loi est étonnamment muet. Pourtant, les interrogations ne manquent pas. Pourquoi prendre le risque de déstabiliser une entreprise qui réussit et la sacrifier sur l'autel de l'ultralibéralisme ? Allez-vous engager, après Air France, la privatisation d'Aéroports de Paris et livrer aux low cost l'aéroport d'Orly ?
    M. Maxime Gremetz. Bonne question !
    Mme Odile Saugues. Pourquoi votre projet de loi se refuse-t-il à définir les règles de service public ? C'est une carence importante
    Ce texte n'échappe pas à « l'effet d'aubaine » et à « l'effet pervers », deux risques stigmatisés par le Premier ministre dans une de ses déclarations au MEDEF. C'est pourquoi nous vous invitons à ne pas vous enfermer dans cette posture dogmatique. Les socialistes refusent le bradage annoncé de la société Air France et voteront contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Avant de donner la parole aux derniers orateurs inscrits pour les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Christian Blanc.
    M. Christian Blanc. Je ne vais pas reprendre le débat. Il faut conclure, non pas sur une question idéologique, mais sur une question de fait. Le problème n'est pas la privatisation d'Air France. Le problème, c'est son développement et son avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. André Chassaigne. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
    M. Christian Blanc. Nous aurons le plaisir de voter le texte du Gouvernement.
    M. François Liberti. Cela, on le comprend !
    M. Christian Blanc. Je voudrais simplement rappeler trois éléments clés d'une telle prise de position.
    M. Maxime Gremetz. Revanchard !
    M. le président. Monsieur Gremetz !
    M. Christian Blanc. Je le mets sur le compte de l'humour !
    D'abord, Air France n'est pas un service public. Que l'on me démontre que les lignes Paris-Tokyo, Paris-Los Angeles ou Paris-Pékin - je pourrais en citer quarante autres - sont des lignes de service public !
    M. François Liberti. Quel aveu !
    M. Christian Blanc. En droit français, rien ne permet d'affirmer que ce sont des lignes de service public. Air France est financée par ses clients, et non par des subventions. Puisque c'est une entreprise publique, il peut y avoir des devoirs de recapitalisation - cela a d'ailleurs très rarement été le cas -, mais là s'arrête l'intervention des deniers des Français dans l'exercice des missions d'Air France.
    M. André Chassaigne et M. Maxime Gremetz. C'est un peu laborieux !
    M. Christian Blanc. Ce sont des missions commerciales sur un marché mondial. Certes, comme toute entreprise privée, Air France pourra remplir des missions de service public. Ne reprenons pas cette discussion !
    Deuxième point, c'est une évidence, Air France est une grande entreprise internationale et la représentation nationale doit lui donner les moyens de son développement, c'est-à-dire les moyens de se battre à armes égales sur un marché mondial très concurrentiel et fortement concentré.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Daniel Paul. On verra les résultats !
    M. Maxime Gremetz. Vive le libéralisme !
    M. Christian Blanc. Le troisième point concerne la maîtrise du capital. Votre projet, monsieur le ministre, a parfaitement précisé les choses en la matière. Le capital sera maîtrisé par l'actionnariat français et communautaire. Cela n'a d'ailleurs rien de très original. C'est le cas de toutes les grandes entreprises privés européennes.
    M. André Chassaigne. Quel argument de qualité !
    M. Christian Blanc. C'est un argument qui a son poids !
    Il est donc nécessaire de privatiser Air France après dix ans d'attentisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et si nous l'avions fait comme c'était prévu, en février 1998, aujourd'hui Air France serait...
    Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Morte !
    M. Christian Blanc. ... la quatrième compagnie mondiale. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Pour terminer, je dois remercier le ministre Gilles de Robien pour avoir très rapidement mis ce projet à l'ordre du jour de notre assemblée et pour avoir eu ensuite la sagesse de prévoir qu'il « appuyerait sur le bouton »,...
    M. Maxime Gremetz. Du siège éjectable !
    M. Christian Blanc. ... le moment venu, en fonction de l'évolution du marché, quand les circonstances seront les plus favorables.
    Nous voterons ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. André Chassaigne. C'était au ras des pâquerettes !
    M. Christian Blanc. Laissez les pâquerettes où elles sont !
    M. le président. La parole est à M. François Asensi.
    M. François Asensi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le gouvernement Balladur inscrivit en 1993 vingt et une entreprises sur la liste des « privatisables ». Depuis lors, le chantier de la déconstruction sociale est allé bon train (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française) puisque seules deux entreprises de cette liste sont encore à capitaux publics majoritaires : la SNECMA et Air France.
    Aujourd'hui, et je pèse mes mots, le Gouvernement se prépare à enterrer Air France. (Protestations sur les mêmes bancs.) Il s'agit bien, monsieur le ministre, d'un texte de privatisation : vous abandonnez le statut public, ce qui est une condition sine qua non pour le changement de propriété.
    Permettez-moi de dresser brièvement un portrait d'Air France.
    Au cours de l'exercice 2001-2002, la compagnie Air France a réalisé le seul résultat bénéficiaire en Europe, et le troisième mondial parmi les compagnies aériennes. Du côté des entreprises privées et privatisées, l'image est moins glorieuse. British Airways, pour ne prendre qu'elle, enregistrait au cours du même exercice un déficit de 232 millions d'euros. Et après la faillite retentissante de la PanAm au début des années 1990, c'est au tour de Swissair et d'Air Liberté de connaître les affres du marché.
    La privatisation d'Air France fait partie des priorités du Gouvernement, alors que la guerre en Irak est imminente. En privatisant dans de telles circonstances, le Gouvernement ne pourrait obtenir une juste rémunération de son patrimoine, ce qui, si l'on s'en réfère à la décision du Conseil constitutionnel des 25 et 26 juin 1986, serait contraire à la Constitution.
    A travers la consolidation et le développement des participations croisées, vous programmez la disparition d'Air France et l'avènement d'une grande entreprise européenne privée qui s'appellera Air Europe. Une telle mesure ne sera pas sans conséquence sur toute la filière aéronautique, un des fleurons du patrimoine industriel français dont Air France constitue un maillon essentiel.
    Avec la privatisation d'Air France et la mise en place d'une compagnie d'envergure européenne, qu'adviendra-t-il des aéroports d'Orly et de Roissy ? L'abandon du troisième aéroport s'inscrit-il déjà dans une logique visant à constituer des plates-formes d'envergure et d'intérêt européens et non plus nationaux ? Ainsi, le hub de la future société Air France se trouvera peut-être, monsieur le ministre, à Milan ou à Amsterdam.
    La limitation des missions de service public d'Air France aux subventions que vous lui versez à ce titre révèle une approche délibérément restrictive. Je vais répondre à ce sujet au président Blanc. En matière de transport aérien, l'une des principales missions de service public est l'aménagement du territoire. Une telle mission nécessite une vision d'ensemble sur le long terme, afin de mener à bien une politique cohérente de développement et d'intermodalité. Non seulement vous renoncez à cet outil d'aménagement du territoire qu'est le transport aérien, mais vous encouragez, par le biais de la décentralisation promue par votre gouvernement, la libéralisation et la concurrence des territoires, notamment en matière de transport. Déjà, certaines autorités locales font la part belle aux compagnies « low cost », déstabilisant à terme le transport aérien et la cohérence des territoires.
    Je vais vous citer un exemple. Avec le soutien de la chambre de commerce de Strasbourg, Ryanair a pu proposer des voyages Starsbourg-Londres pour un euro. Or vous avez avalisé, monsieur le ministre, ces pratiques illicites. En effet, vous n'êtes pas intervenu comme vous y autorisait l'article L. 324-1 du code de l'aviation civile. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Si vous pouviez écouter tranquillement l'orateur... (« C'est vrai, c'est scandaleux ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est qu'il est mauvais !
    M. François Asensi. Il y a beaucoup de chahut dans l'hémicycle. C'est normal : parler de choses sérieuses, cela distrait les majorités de droite. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Dès lors, comment croire le Gouvernement, lorsque ce dernier se targue, dans le cadre du projet de loi, de mettre en place des garde-fous pour lutter contre l'anarchie du marché boursier ?
    Quant aux conséquences de ce projet de loi sur l'emploi, nous pouvons craindre le pire. Il suffit, pour s'en convaincre, de voir le « dépeçage » de Buzz par Ryanair. En termes de créations d'emplois, on estime à trois au maximum - sur 400 - le nombre de salariés français chez Easyjet. A ce rythme-là, les salariés d'Air Lib ne sont pas près de retrouver tous un emploi...
    La privatisation d'Air France, c'est l'arbre qui cache la forêt. En effet, vous ne vous arrêterez pas là, puisque se préparent déjà la libéralisation et la privatisation des transports ferroviaires et de l'énergie. Or ces secteurs sont trop stratégiques pour être abandonnés à la volatilité et à l'anarchie du marché boursier.
    M. le président. Monsieur Asensi...
    M. François Asensi. C'est pourquoi, monsieur le président, le groupe des député-e-s communistes et républicains votera contre ce projet de bradage du patrimoine national. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

Vote sur l'ensemble

    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi. (« On brade ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   497
Nombre de suffrages exprimés   495
Majorité absolue   248
Pour l'adoption   343
Contre   152

    L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mes chers collègues, je vais suspendre la séance, le temps d'enregistrer les nouvelles délégations de vote.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures dix.)
    M. le président. La séance est reprise.

5

ALLOCATION PERSONNALISÉE D'AUTONOMIE

Explications de vote et vote sur l'ensemble
d'une proposition de loi adoptée par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant modification de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n°s 642, 685).
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
    M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Mesdames et messieurs les députés, vous avez été nombreux à participer à la discussion de cette proposition de loi mercredi et jeudi derniers ; je tiens à vous en remercier. Je salue l'excellent travail de votre rapporteur, Georges Colombier, et la diligence avec laquelle il a oeuvré. J'adresse également mes remerciements au président de la commission des affaires culturelles, Jean-Michel Dubernard, qui nous a honorés de sa présence tout au long de nos débats,...
    M. Maxime Gremetz. Aujourd'hui, il n'est pas là !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... ainsi qu'au président de la commission des finances, Pierre Méhaignerie, qui s'est impliqué personnellement dans ce dossier.
    L'APA était menacée...
    M. Daniel Paul. Parlez au présent !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Oui ! Elle l'est encore !
    M. Bernard Derosier. Par votre majorité !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... en raison d'une grosse erreur d'évaluation et de l'insuffisance, de ce fait, de son plan de financement.
    M. Bernard Derosier. Quel culot !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. La charge qu'elle faisait peser sur les départements était insupportable.
    Malgré la situation très tendue des finances publiques, ce texte va permettre de sauvegarder l'APA, grâce à un apport supplémentaire de 400 millions d'euros de la part de l'Etat, qui finance ainsi un tiers de la somme nécessaire, les départements assurant le deuxième tiers...
    M. Bernard Derosier. Vous les rançonnez !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... et les mesures que nous allons prendre couvrant le tiers restant,...
    M. Maxime Gremetz. Sur le dos des familles !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... au moyen d'une meilleure maîtrise de la dépense en accord avec la nature de la prestation. Nous parviendrons ainsi à assurer le financement des 1,2 milliard d'euros manquant en 2003.
    Cette réforme allie responsabilité et engagement déterminé en faveur des personnes âgées.
    Responsabilité, car nous ne pouvions accepter les dérives financières qui nous ont été léguées. Nous ne pouvions accepter un alourdissement excessif de la fiscalité locale, qui s'effectue notamment au détriment des personnes âgées.
    M. Bernard Derosier. Vous ne renouvelez pas beaucoup vos arguments !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur Derosier, épargnez-nous votre mauvaise foi ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Monsieur Falco, ne vous laissez pas distraire !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Engagement déterminé, également, car l'effort de la nation en faveur des personnes âgées en perte d'autonomie continue de progresser fortement : de 1 milliard d'euros en 2001 et 2 milliards d'euros en 2002, il dépassera les 3 milliards d'euros cette année, soit un triplement en trois ans.
    Cette proposition de loi est une première étape.
    M. Maxime Gremetz. Vers la liquidation !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. C'est un texte d'urgence qui nous permet d'assurer l'équilibre financier de l'APA en 2003...
    M. Bernard Derosier. On en reparlera !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Vous ne faites que parler, nous agissons !
    M. Bernard Derosier. La tchatche, vous connaissez !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées... en intervenant avant le 31 mars, date limite du vote de leur budget par les départements. Nous attendons que toutes les évaluations en cours nous soient remises pour pouvoir, dans un second temps, conformément à la loi, définir en fin d'année, les modalités d'un financement assuré et pérenne de l'APA.
    Vous le voyez, l'APA est notre préoccupation. Nous avons réussi à la sauvegarder.
    M. Bernard Derosier. Non, à la démolir !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Nous avons réussi à conserver son caractère social et universel en garantissant son financement et en maintenant l'équilibre du texte. La dignité des personnes âgées reste au coeur de nos priorités. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Georges Colombier, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, sauver l'APA sans la démanteler, telle était la mission qui incombait à la majorité. Nous avons su y faire face en assurant le financement de cette aide pour l'année 2003. Alors que la loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie n'a pas deux ans, cette allocation est déjà victime de son succès et certains départements sont menacés d'asphyxie financière.
    M. Jean Auclair. C'est vrai !
    M. Georges Colombier, rapporteur. La situation est telle que l'adoption de mesures d'urgence propres à assurer le financement de l'APA en 2003 s'est avérée indispensable. C'est l'objet du présent texte, qui ne peut cependant être considéré que comme un dispositif transitoire. Une réflexion plus large doit être conduite, et est d'ailleurs annoncée pour l'automne 2003.
    Le sauvetage de l'APA pour 2003 est assuré grâce au texte que nous allons maintenant voter. Ces dispositions ont su parfaitement éviter deux écueils qui en auraient brisé l'efficacité : le recours sur succession, fortement dissuasif, et l'exclusion des personnes âgées classées en GIR IV, qui priverait d'aide à l'autonomie une catégorie qui en a pourtant cruellement besoin.
    Je pense que la véritable solution au problème de la dépendance passe à l'avenir par la création d'un risque spécifique au sein de la sécurité sociale. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maxime Gremetz. Nous y voilà !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Certes, la conjoncture économique actuelle ne permet pas de lancer ce processus dans l'immédiat, mais je souhaiterais que le Parlement s'y intéresse sérieusement lorsque le ciel de la croissance s'éclaircira.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Tout au long d'un débat parlementaire riche et constructif, de nombreuses propositions ont été formulées et certaines auraient mérité un meilleur sort. Cependant, la proposition de loi se devait d'être adoptée le plus rapidement possible pour que son efficacité soit optimale. C'est pourquoi je préconise l'adoption conforme de ce texte.
    Au cours du débat, nous avons eu l'occasion d'aborder des sujets qui mériteront un examen très attentif, tels que le devenir des professions d'aide à domicile ou la pérennisation des comités locaux d'information et de coordination gérontologique, dossiers sur lesquels M. le ministre a su nous rassurer.
    Par ailleurs, la commission, malgré des délais très courts, a pu auditionner le directeur du FFAPA et engager un débat permettant de préciser certains chiffres clés.
    En conclusion, je pense que la représentation nationale doit montrer dès aujourd'hui que son intention n'est pas de démanteler l'APA, mais de la financer pour 2003 et de remédier aux carences de la loi initiale en la matière. Il est temps de montrer l'intérêt que nous portons à nos aînés en sauvant une allocation qui gardera ainsi son caractère universel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Explications de vote

    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, tout en le mettant en évidence, l'APA a répondu à l'immense besoin d'accompagnement des personnes âgées dépendantes. Après le recul de la PSD, cette réforme était attendue par les personnes âgées, par leur famille et par tous les professionnels. En créant un véritable droit, l'APA a donné l'exemple de la réponse à un nouveau risque que notre société a le devoir de prendre en charge.
    La grande majorité des départements se sont investis de manière exemplaire dans la mise en place de ce nouveau droit, mais à quoi assistons-nous depuis plusieurs mois ? A la diffusion d'informations alarmistes sur le coût de cette allocation ou sur l'augmentation des impôts à laquelle seraient contraints certains conseil généraux. Ainsi, le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales nous a cité l'exemple de la Haute-Garonne qui aurait vu sa fiscalité augmenter de presque 30 %...
    M. Jean Auclair. Dans la Creuse, c'est 70 % !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ... alors qu'elle a progressé en réalité de 4 %. Depuis des mois, messieurs, vous n'avez de cesse de manipuler les chiffres et de multiplier les approximations.
    M. François Sauvadet. Oh !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Cette proposition de loi ne s'appuie sur aucun chiffre officiel et le rapport de la commission en est l'exemple flagrant. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean Auclair. Vous êtes de mauvaise foi !
    M. le président. Monsieur Auclair, vous n'avez pas la parole !
    M. Jean Auclair. Elle dit n'importe quoi, monsieur le président !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il nous a fallu attendre l'audition, à ma demande, du directeur du FFAPA, puis la séance publique, pour prendre connaissance des chiffres fournis par les services de l'Etat et par ce même directeur.
    M. Jean-Louis Léonard. Le budget des départements explose !
    M. Jean Auclair. Et c'est vous qui auriez dû le prévoir et y remédier !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous nous avez beaucoup parlé de difficultés de financement pour justifier le recul de votre gouvernement. Vous prétendez que le financement de l'APA n'était pas prévu.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est la vérité !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Or, pour l'année 2002 - écoutez-moi, monsieur Auclair -, les chiffres que vous avez cités pour le besoin de financement sont même plus faibles que ceux que Pascal Terrasse, Elisabeth Guigou et moi-même avions annoncés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Auclair. Hypocrite !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. C'est donc bien vous, monsieur le secrétaire d'Etat, qui n'avez pas voulu financer l'APA lors de la préparation du budget pour 2003. Vous avez préféré réduire l'ISF et amplifier la réduction d'impôt pour les emplois à domicile, mesures qui ne profitent qu'aux plus aisés.
    M. André Gerin. C'est ça, la vérité !
    M. Maxime Gremetz. Et la vérité gêne !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Ne croyez-vous pas que la prise en charge des personnes âgées dépendantes mérite mieux qu'une utilisation partisane ?
    En outre, le rôle de l'Assemblée nationale a été une fois de plus nié. Après le recours à l'article 49-3 pour la réforme des scrutins,...
    M. Jean Auclair. Heureusement !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ... c'est le vote conforme des deux assemblées qui a été exigé pour l'APA dès la première lecture. Le Gouvernement a interdit à sa propre majorité de déposer des amendements ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Pierre Soisson. On est libres !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. En réalité, plus que la proposition de loi, c'est le décret que vous allez prendre qui est inacceptable. Vous allez faire porter les économies sur les plus modestes, alors que, parallèlement, l'accroissement des réductions d'impôt ne profitera qu'aux gens aisés.
    M. Jean Auclair. C'est faux !
    Mme Marie-Renée Oget. Non, c'est vrai !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous n'avez pas fait le lien entre ces deux mesures : d'un côté, l'augmentation de la réduction d'impôt pour les gens qui peuvent employer du personnel à domicile ; de l'autre, la réduction de l'APA pour les personnes âgées les plus modestes. M. le secrétaire d'Etat a lui-même reconnu qu'apparemment cette relation n'avait pas été analysé.
    Le choix de votre gouvernement est clair : il consiste à laisser planer le soupçon sur les personnes âgées (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et leurs familles pour mieux les culpabiliser et les amener à ne plus demander ce à quoi elles ont droit.
    M. Jean Auclair. C'est le contraire !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Lorsqu'il s'agit d'appliquer une avancée sociale, la droite utilise toujours les mêmes arguments pour culpabiliser les intéressés et les noyer sous des procédures administratives. C'est ce que vous faites une fois de plus sans voir combien l'APA est un levier essentiel au service de l'emploi, sans voir qu'en diminuant le financement vous réduisez mécaniquement les créations d'emploi. Quelle erreur ! Ces emplois se trouvent, en effet, là où sont les personnes âgées,...
    M. Jean-Louis Léonard. Ce n'est pas vrai !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ... c'est-à-dire en milieu rural. Ainsi, en Creuse, c'est l'équivalent de 400 emplois qui a été créé.
    M. Jean Auclair. Oui et avec quoi va-t-on les payer ?
    M. Pierre Hellier. M. Auclair a raison !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Connaissez-vous beaucoup de politiques qui allient si bien créations d'emplois et prestations sociales ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean Auclair. C'est n'importe quoi !
    M. le président. Monsieur Auclair, je vous demande de vous taire !
    M. Jean Auclair. Non, je ne me tairai pas ! Les propos de Mme Guinchard-Kunstler sont inadmissibles !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Après la non-reconduction des emplois-jeunes, après la supension de la loi sur la réduction du temps de travail, après la suspension du volet antilicenciements économiques de la loi de modernisation sociale, vous mettez à mal un secteur potentiellement créateur de nombreux emplois. En réduisant l'APA, vous faites en même temps reculer l'emploi et vous diminuez le financement de la formation des aides à domicile, mettant ainsi un terme à la politique engagée par le gouvernement de Lionel Jospin, qui visait à reconnaître l'importance de cette profession. Vous la renvoyez à la non-reconnaissance.
    M. Charles Cova. Vous mélangez tout !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous cassez une fois de plus l'emploi. En outre, aujourd'hui, vous bloquez une grande réforme. Les associations des familles de malades d'Alzheimer ont d'ores et déjà exprimé leurs craintes devant le risque d'être isuffisamment aidées et de voir rogner le montant de l'allocation.
    M. Bernard Derosier. Mais le Gouvernement se moque de leurs préoccupations !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Pour la première fois en France, des retraités, des syndicats, des associations...
    M. Charles Cova. Agitées par la gauche...
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ... se mobilisent pour défendre les personnes âgées dépendantes (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), pour défendre l'APA et dénoncer le recul que vous faites subir aux maisons de retraite en refusant le financement par la sécurité sociale. Plus de 6 000 chefs d'établissement sont aujourd'hui en train d'expliquer ce recul. Même M. Larcher, sénateur de droite, président de la fédération hospitalière de France, a lancé un appel sur ce point.
    M. Bernard Derosier. Absolument !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous faites reculer les mesures de progrès prises par le gouvernement de Lionel Jospin au services des personnes âgées. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Décidément, le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a bien du mal à entendre la voix des personnes âgées dépendantes et de leur famille !
    Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, une société se juge à la manière dont elle honore ses anciens qui l'ont façonnée. A cet égard, la dépendance est l'un des défis majeurs que nous devons relever. Qu'elle soit physique ou psychique, la dépense liée au vieillissement est en effet particulièrement douloureuse pour les personnes et leurs familles. L'aide de la société pour y faire face est donc indispensable.
    L'APA a constitué un progrès important mais elle connaît des insuffisances : à domicile, en raison de la difficulté à trouver des intervenants compétents et formés ; en établissement parce qu'elle ne couvre pas les besoins réels. En effet, si la loi prévoyait une réforme ternaire de la tarification comprenant l'hébergement à la charge de la famille, le soin à la charge de l'assurance maladie et la dépendance financée par l'APA, tout le monde constate actuellement que l'APA ne finance pas la totalité des coûts de la dépendance et ne permet pas notamment de financer le personnel nécessaire à la prise en charge satisfaisante de la dépendance en établissement.
    L'APA a d'ailleurs souffert de sa mise en oeuvre concomittante avec la réforme des 35 heures et de la tarification qui a conduit à un surcoût important à la charge des familles, ce qu'elles n'ont pas toujours bien compris.
    M. Pierre Hellier. Eh oui !
    M. Jean-Luc Préel. Beaucoup aujourd'hui, dont votre rapporteur et le porte-parole de l'UMP, Denis Jacquat, demandent la création d'un cinquième risque de la sécurité sociale, c'est-à-dire le financement de la dépendance par la solidarité nationale. Les Allemands ont mis en place, il y a quelques années, un système de ce type qui prend en charge la dépendance jusqu'à 2 000 euros par mois. Une telle réforme coûterait sans doute en France 2 % de CSG. C'est aux Français de dire s'ils la souhaitent ou non.
    Le gouvernement précédent a confié l'APA aux départements, à la demande des conseils généraux. Mais en raison du succès rencontré par l'APA, qui s'est avéré supérieur aux prévisions, nous nous trouvons confrontés à un problème de financement. Comme d'habitude, les socialistes ont en effet proposé une solidarité à crédit. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    En tout état de cause, les départements ont déjà augmenté la fiscalité locale en 2002 et prévu une augmentation pour 2003. L'essentiel est donc fait et nous nous trouverons en régime de croisière. L'Etat peine néanmoins à financer sa part. Le projet de loi qui nous est soumis doit être jugé avec le décret prévu. Il n'est pas possible de les dissocier. Or ce décret, que nous ne serons appelés ni à amender ni à voter, nous paraît particulièrement injuste car les économies sont mal réparties avec notamment l'abaissement du plancher et le maintien d'une aide pour les revenus supérieurs.
    M. Maxime Gremetz. Eh oui !
    M. Jean-Luc Préel. Les deux textes visent à restreindre l'APA et son coût et donc à augmenter le coût laissé à charge des familles.
    M. Patick Demasle. Tout à fait !
    M. Jean-Luc Préel. Il ne s'agit en aucun cas d'une prise en charge pérenne de la dépendance.
    L'UDF n'a été associée ni à la réflexion en amont ni à la décision.
    M. Maxime Gremetz. Evidemment !
    M. Jean-Luc Préel. Nous considérons, quant à nous, que, si on le leur expliquait, les Français pourraient comprendre et accepter la nécessité d'un effort de solidarité nationale pour prendre en charge la dépendance. Si le raisonnement financier est compréhensible, l'UDF veut avec force faire remarquer que le coût politique de cette réforme sera hélas ! bien supérieur à l'économie réalisée. Dans ces conditions, la majorité de l'UDF ne peut accepter ce texte et s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)
    M. Bernard Roman. Bravo pour ce sursaut !
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous devons nous prononcer sur une proposition de loi cadenassée par le Gouvernement et sa majorité, et sur laquelle nous avons eu un débat bâclé. Après avoir sensiblement modifié l'ordre du jour, ce qui a bousculé nos travaux, le Gouvernement a opposé des fins de non recevoir à nos questions et à nos propositions tout au long de la discussion.
    M. André Gerin. Eh oui !
    M. Maxime Gremetz. Vous avez avoué, monsieur le secrétaire d'Etat, que, pour obtenir une adoption conforme, il était impossible de modifier la proposition de loi. Vous n'avez pas apporté de réponses aux questions que nous posions. Vous avez fui le débat de fond, qui pourtant s'imposait au regard de la situation.
    M. Albert Facon. Très juste !
    M. Maxime Gremetz. Le défi est clair : il s'agit de savoir comment financer l'APA de façon pérenne tout en assurant la continuité des droits aux bénéficiaires de la prestation. Mais vous êtes resté hermétique à nos propositions. Les familles et les associations apprécieront. En définitive, vous nous proposez de voter une proposition de loi inique qui tend à remettre en cause une avancée sociale concernant 800 000 personnes dépendantes et leurs familles.
    Face à la montée en charge de l'APA, les solutions que vous apportez sont en effet inadmissibles puisque vous restreignez l'accès au droit des bénéficiaires potentiels. Faire des économies sur la détresse des familles ayant en charge une personne âgée dépendante est profondément choquant,...
    M. André Gerin. C'est l'austérité !
    M. François Liberti. C'est indécent !
    M. Maxime Gremetz. ... alors que, dans le même temps, vous allégez l'impôt sur les grandes fortunes (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et multipliez les cadeaux aux grands groupes qui licencient en toute impunité.
    M. Bernard Roman. Carnage social !
    M. Maxime Gremetz. Particulièrement révoltante, monsieur le secrétaire d'Etat, est la suspicion que vous jetez sur les personnes âgées et leurs familles, qui devront justifier au franc le franc le bénéfice de leur allocation.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Quelle honte !
    M. Maxime Gremetz. C'est d'autant plus scandaleux que vous fermez les yeux sur l'utilisation des exonérations de cotisations patronales et des aides publiques.
    M. André Gerin. Exactement !
    M. Maxime Gremetz. Vous supprimez même les commissions de contrôle de l'utilisation des fonds publics. De ce point de vue, je ne m'étonne pas que vous refusiez d'examiner notre proposition de loi concernant les patrons voyous.
    M. Daniel Paul. Metaleurop !
    M. Maxime Gremetz. En accord avec les associations et les organisations syndicales, nous avons, quant à nous, proposé un droit - il ne s'agit pas de faire la charité - en créant un risque financé par la sécurité sociale, impliquant la participation financière des entreprises. Cette mesure aurait permis une meilleure prise en charge de la perte d'autonomie et aurait assuré sa pérennité.
    Vous avez préféré mettre au point un bricolage financier qui ne fait que répondre à une situation donnée, n'offre aucune perspective d'avenir et hypothèque ainsi toute pérennisation de l'APA. Car si la montée en charge se poursuit, quel financement pourrons-nous trouver demain ?
    M. Bernard Roman. Bonne question !
    M. Maxime Gremetz. C'est pourquoi nous continuons d'exiger la prise en charge de l'APA par la protection sociale. En ce qui concerne le problème financier posé cette année, nous avons fait des propositions alternatives, afin de ne pas en faire supporter le coût aux familles ni aux seuls départements. Parmi ces pistes de financement, la suppression de la réduction de l'impôt sur le revenu pour les deux tranches les plus hautes du barème correspondant exactement au manque à gagner pour combler le financement de l'APA, soit 1,2 milliard d'euros. On aurait pu aussi revenir sur l'aménagement de l'ISF, qui a coûté 500 millions d'euros. Ces mesures auraient permis d'épargner les bénéficiaires de la prestation, qui doivent supporter l'économie que vous espérez réaliser.
    Votre gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat, pioche dans les poches des personnes âgées et de leurs familles (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) ce qu'il donne aux plus riches de notre pays et au MEDEF ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Belle image de la solidarité nationale !
    M. André Gerin. Austérité !
    M. Bernard Derosier. Le Gouvernement dépouille les personnes âgées !
    M. Maxime Gremetz. Parce que vous vous contentez de contournez une difficulté financière, parce que vous ne faites que poser une rustine budgétaire, parce que ces dispositions amputeront l'APA de sa portée originelle, nous voterons contre cette proposition de loi.
    L'APA n'est ni trop ni pas assez généreuse : elle est juste, et demande même à être développée pour devenir une prestation de sécurité sociale. Aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, vous donnez le signal de son démantèlement. Nous entendons donc nous opposer au cynisme de ces dispositions qui placent les personnes âgées et l'APA dans la ligne de mire du Gouvernement. Nous continuerons de militer pour imposer un nouveau droit à la compensation de la dépendance. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. Avant de donner la parole au dernier orateur inscrit pour les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, lorsque notre assemblée a été saisie au printemps 2001 du projet de loi relatif à la création de l'allocation personnalisée d'autonomie, nous avons salué cette initiative.
    M. Alain Néri. Vous refusez le cinquième risque !
    M. Denis Jacquat. L'objectif du texte était d'accorder enfin aux personnes en perte d'autonomie une prestation conforme à leurs souhaits et besoins. Nous nous sommes ainsi engagés dans la suppression du recours sur succession, qui produisait un effet dissuasif à l'égard de certains bénéficiaires potentiels de la prestation spécifique dépendance. De même, nous avons approuvé l'extension de la prestation aux personnes classées GIR 4, mesure à laquelle nous ne touchons pas aujourd'hui.
    M. Bernard Roman. Il s'en est fallu de peu !
    M. Denis Jacquat. Bref, nous avons accepté de nombreuses dispositions du texte proposé et je tiens à indiquer que nous persistons à penser qu'il convient de les saluer et qu'il serait totalement inopportun de les remettre en cause. Cependant, au printemps 2001, et en dépit de ces avancées, un grand nombre de députés de l'opposition a choisi de s'abstenir au moment du vote relatif à ce texte.
    M. Yves Bur. C'est exact !
    M. Denis Jacquat. Comme je l'ai souligné à l'époque, cette abstention se voulait constructive car nous visions le succès de cette prestation et surtout sa pérennité. Or ces objectifs ne pouvaient être atteints si aucune amélioration n'était apportée au financement, clé de voûte du dispositif.
    Malheureusement, nos craintes se sont avérées justifiées. Il manquait ainsi 1,2 milliard d'euros pour l'année 2003. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et un certain nombre de départements ont dû procéder d'urgence à une très forte augmentation de leur fiscalité afin de pouvoir atténuer la déstabilisation de leurs finances tout en continuant à faire face aux besoins des personnes en perte d''autonomie.
    M. Alain Néri. Qu'ont fait les départements UMP ?
    M. Denis Jacquat. Vous n'avez pas le courage de votre politique. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Jacquat, je vous prie de continuer et ne pas vous laisser interrompre.
    M. Denis Jacquat. Monsieur le président, je suis surpris par l'hyperexcitabilité de certains de mes collègues. Lorsque nous étions dans l'opposition, nous faisions preuve de plus de dignité lors des débats sur les textes sociaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

    M. le président. Monsieur Jacquat, faisons preuve maintenant de dignité.
    M. Denis Jacquat. Aujourd'hui, il nous appartient de prendre de toute urgence les mesures qui s'imposent afin de remédier au déséquilibre financier auquel l'APA se trouve confrontée, car le 31 mars 2003 est une date butoir pour les budgets des conseils généraux. C'est pour cela - j'insiste sur ce point - qu'une adoption conforme était nécessaire.
    L'adoption de ce texte de transition permettra d'assurer le financement de l'APA pour l'année en cours. Laisser perdurer la situation actuelle équivaudrait à mettre en péril la survie de ce dispositif dont on sait qu'il correspond à une attente réelle de plusieurs centaines de milliers de personnes dans notre pays. Dans une deuxième étape, qui va se situer avant la fin de cette année, et à la lumière des résultats du nouveau bilan qui nous sera présenté prochainement, il faudra absolument que l'on s'oriente vers un montage financier stable en réfléchissant notamment au cinquième risque.
    M. Maxime Gremetz. Bien sûr !
    M. Denis Jacquat. Le groupe de l'Union pour un mouvement populaire adhère pleinement à ce texte. C'est grâce à lui que nous allons parvenir à sauver l'APA,...
    Mme Martine David. A quel prix !
    M. Denis Jacquat. ... en attendant la refonte plus globale que nous appelons de nos voeux et qui permettra d'asseoir définitivement ce texte dans notre édifice social. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vote sur l'ensemble

    M. le président. Je vais mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   498
Nombre de suffrages exprimés   486
Majorité absolue   244
Pour l'adoption   341
Contre   145

    L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. François Baroin.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,
vice-président

    M. le président. La séance est reprise.

6

CAUSES ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES
DE LA DISPARITION D'AIR LIB

Discussion d'une proposition de résolution
tendant à la création
d'une commission d'enquête

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire sur la proposition de résolution de M. Patrick Ollier et M. Jacques Barrot tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib (n°s 684 et 688).
    La parole est à M. le président et rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, mes chers collègues, le 17 février 2003, le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la mise en liquidation judiciaire de la société d'exploitation AOM-Air Liberté, appelée Air Lib. Il a en effet jugé « absolument impossible » le redressement de cette société, dont la licence d'exploitation avait déjà expiré depuis le 6 février 2003. Cette décision a mis fin aux espoirs placés dans la holding Holco, qui avait accepté de reprendre la société Air Lib le 27 juillet 2001, avec l'aide des pouvoirs publics.
    Ces événements s'inscrivent dans une histoire particulièrement chaotique et ont des conséquences considérables.
    Sur le plan social d'abord, pour faire face au licenciement des 3 200 salariés du groupe, le Gouvernement a mis en oeuvre une concertation très forte avec d'autres entreprises pour reclasser le plus grand nombre possible d'entre eux.
    Sur le plan économique, ensuite, la disparition d'Air Lib, qui transportait 3,3 millions de passagers par an, signifie la suppression du deuxième pôle aérien français. Cette disparition laisse Air France sans véritable concurrent d'origine nationale, ce qui n'est pas forcément une situation optimale.
    Sur le plan territorial, enfin, cette faillite porte atteinte à l'équilibre régional du transport aérien, puisque cette compagnie assurait en 2000 un tiers des dessertes vers les départements d'outre-mer et la Polynésie française, ainsi qu'une desserte compétitive pour de nombreuses villes de province.
    Mes chers collègues, une telle conclusion pouvait-elle être évitée ? L'observation des événements les plus récents montre que cette issue était inéluctable depuis quelques mois, sauf à engager les finances publiques dans le sauvetage incertain et excessivement coûteux d'une société privée. En effet, le plan de reprise de la société Air Lib, proposé en décembre dernier par le groupe néerlandais IMCA, n'était pas viable et nécessitait encore 300 millions d'euros de crédits de l'Etat, dont 172 millions sous forme de « subventions non remboursables ».
    Comment en est-on arrivé, depuis plusieurs années déjà, à une dégradation irréversible de la santé financière de cette entreprise, malgré un soutien public important ?
    Les salariés, en premier lieu, mais aussi les citoyens et les contribuables doivent savoir comment ont été utilisés les 130 millions d'euros accordés par les pouvoirs publics, notamment le prêt de 30,5 millions d'euros, décidé le 4 janvier 2002 par le Gouvernement, prêt qu'Air Lib n'est pas, aujourd'hui, en mesure de rembourser.
    Face à cette situation inacceptable et à ces interrogations, la commission des affaires économiques a été saisie le 5 mars 2003 d'une proposition de résolution de MM. Jacques Barrot et Patrick Ollier tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions de gestion d'Air Lib et sur l'utilisation des fonds publics par cette compagnie aérienne.
    Voyons si cette proposition est recevable, avant de juger de son opportunité.
    En vertu de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, ainsi que des articles 140 et 141 du règlement de l'Assemblée nationale, une telle proposition de résolution doit, pour être recevable, remplir deux conditions cumulatives.
    En premier lieu, elle doit déterminer avec précision les faits donnant lieu à enquête. La proposition initiale faisait référence aux « conditions de gestion d'Air Lib », société clairement identifiée. Il s'agissait d'étudier les circonstances économiques et financières ayant conduit cette compagnie à la faillite, malgré un important soutien public. Pour éviter toute ambiguïté quant aux intentions du Parlement, qui n'a pas vocation à s'immiscer dans la gestion d'une entreprise privée, mais doit suivre avec attention l'emploi des deniers publics, la commission des affaires économiques a voté une amélioration de cette rédaction, et je l'en remercie : il s'agit de faire référence aux « causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib ».
    La proposition de résolution mentionne en outre « l'utilisation des fonds publics par cette compagnie aérienne », formule qui recouvre l'ensemble des crédits français et communautaires accordés pour favoriser le redressement de l'entreprise. Par ces mots, la proposition de résolution indique que la commission d'enquête doit permettre d'établir l'emploi réel de ces fonds, dont le caractère public justifie à l'évidence un contrôle parlementaire, et de déterminer si cet emploi était conforme à l'objectif de redressement dans l'intérêt des salariés d'Air Lib et de l'équilibre de cette société.
    En second lieu, les faits ayant motivé le dépôt de la proposition de résolution ne doivent pas faire l'objet de poursuites judiciaires. Certes, la réponse, datée du 7 mars 2003, de M. Dominique Perben, garde des sceaux, à la notification par le président de l'Assemblée nationale du dépôt de la proposition de résolution, indique que les faits en cause « font actuellement l'objet d'une enquête judiciaire, ordonnée par le procureur de la République le 26 février 2003 ».
    Toutefois, il ne s'agit que d'une enquête de police, car elle n'a pas, à ce stade, conduit à engager des poursuites. La condition relative à l'absence de poursuites judiciaires est donc satisfaite à ce jour et permet, sur le plan réglementaire, la constitution d'une commission d'enquête.
    En ce qui concerne l'opportunité de la création de cette commission d'enquête, je me contenterai de deux observations.
    Tout d'abord, les circonstances qui ont conduit à la liquidation judiciaire d'Air Lib restent troubles. Lorsque le « projet Holco » présenté par M. Jean-Charles Corbet avait été retenu pour la reprise d'Air Lib, le groupeSwissair, qui détenait alors la moitié du capital de la compagnie, s'était engagé à verser à Holco 180 millions d'euros en échange de l'abandon des poursuites engagées à son encontre pour sa gestion catastrophique de la société. Or les 152,5 millions d'euros effectivement versés par le groupe Swissair avant qu'il ne fasse lui-même faillite n'ont pas intégralement bénéficié à Air Lib.
    Le système complexe de holding mis en place par le président d'Air Lib a en effet conduit au versement de sommes très importantes sur les comptes de deux filiales d'Holco : Holco Lux, établie au Luxembourg, à hauteur de 5 millions d'euros, et Mermoz UA, établie aux Pays-Bas, à hauteur de 14 millions d'euros.
    Par ailleurs, la holding Holco a eu recours à des cabinets d'avocats et de consultants pour un coût démesuré, la rémunération des personnels dirigeants étant en outre très importante. Tout cela a-t-il bien contribué à équilibrer les comptes d'Air Lib ?
    Enfin, le comité d'entreprise de la compagnie n'a jamais pu être correctement informé sur la gestion comptable de la société Air Lib et sur le périmètre véritable de la holding Holco, dont les activités étaient étroitement liées et qui partageaient certains matériels. Or, à ce jour, 10 millions d'euros détenus par le groupe Holco échappent toujours à la procédure de liquidation judiciaire.
    L'intervention de la représentation nationale pourrait réduire l'opacité qui a entouré le fonctionnement d'Air Lib et de la holding Holco, ainsi que les circuits financiers empruntés par les différents fonds destinés à soutenir Air Lib.
    En second lieu, le Parlement a vocation à contrôler l'usage fait par Air Lib des fonds publics qui lui ont été accordés. Air Lib a en particulier perçu, les 9 janvier et 28 février 2002, plus de 30 millions d'euros de crédits communautaires accordés par le précédent gouvernement, sous la forme d'un prêt au titre du fonds de développement économique et social.
    Ces fonds devaient être remboursés le 9 juillet puis le 9 novembre 2002. Contrairement à ses engagements, M. Corbet n'a jamais dévoilé le plan de restructuration crédible exigé à de multiples reprises par le nouveau gouvernement en contrepartie de cette aide. Surtout, les sommes prêtées n'ont pas été restituées - et ne pourront plus l'être, compte tenu de la liquidation judiciaire de la société.
    Air Lib a aussi bénéficié, depuis plus d'un an, de nombreuses remises dans le paiement de taxes et impositions diverses. Au 31 janvier 2003, les principales dettes publiques de l'entreprise concernaient l'URSSAF, pour 29 millions d'euros, la direction générale de l'aviation civile, pour 31,6 millions d'euros, et Aéroports de Paris, pour 27,2 millions d'euros.
    Les conditions dans lesquelles, depuis plusieurs années, ces deniers publics ont été accordés par les services de l'Etat puis utilisés par la société Air Lib appellent à l'évidence une étude approfondie, qui relève pleinement des attributions du Parlement.
    Votre rapporteur estime donc que le champ d'investigation de la commission d'enquête devrait inclure les conditions dans lesquelles les fonds publics ont été engagés ainsi que leur utilisation par la holding Holco. Etait-ce au mieux des intérêts des salariés et des équilibres de la société Air Lib ?
    Finalement, la commission d'enquête dont la création est proposée à notre assemblée peut réglementairement être constituée et disposerait des moyens appropriés pour permettre aux citoyens de déterminer si les fonds publics ont été réellement affectés au sauvetage de la compagnie Air Lib et d'en comprendre l'échec. Une telle démarche supposera un examen approfondi du périmètre et du fonctionnement de la holding Holco, tant sur le plan financier que commercial. Le sort injuste des salariés d'Air Lib et les enjeux stratégiques associés à l'existence de cette compagnie concurrente d'Air France appellent une réaction parlementaire.
    C'est dans cet esprit que la commission des affaires économiques a approuvé le rapport tendant à constituer cette commission d'enquête. Chers collègues, c'est dans cet esprit que je vous demande d'approuver tout à l'heure sa constitution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, chers collègues, pourquoi est-il opportun de créer une commission d'enquête sur les causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib et sur l'utilisation des fonds publics accordés à cette compagnie aérienne ? Trois types de considérations justifient le vote de la proposition de résolution dont nous débattons et dont je salue les auteurs, les présidents Ollier et Barrot. Ils ont souhaité, à juste titre, faire toute la lumière sur le feuilleton judiciaire et médiatique d'Air Lib, conclu aujourd'hui même par la liquidation définitive de la deuxième compagnie aérienne française.
    On lit, en effet, beaucoup de choses dans la presse sur les causes du dépôt de bilan d'Air Lib et sur le gestion de l'entreprise. Au-delà des polémiques et des rumeurs, la représentation nationale doit se saisir de ce sujet dans un esprit indépendant et serein pour tirer tous les enseignements économiques et stratégiques de la disparition d'Air Lib et informer nos concitoyens sur l'usage qui a été fait de leur argent à travers les aides publiques de l'Etat. C'est pourquoi le groupe UDF et apparentés s'associe pleinement à votre démarche et votera avec conviction votre proposition de résolution.
    La première série de questions porte sur l'utilisation des fonds publics. Sur les conseils des cabinets Mazars et KPMG qui ont reconnu conforme à l'intérêt public général le projet industriel de la compagnie, le gouvernement de l'époque a accordé un crédit-relais à Air Lib pour financer l'exploitation de la compagnie jusqu'à son retour à l'équilibre prévu en 2003. L'aide publique a alors pris la forme d'un prêt remboursable au moyen d'un GIE fiscal auquel s'ajoutait un report de charges publiques. C'est donc plus de 30 millions d'euros qui ont été prêtés en février 2002 à Air Lib au titre du FDES et quelque 90 millions d'euros de report de charges - URSSAF, taxes aéroportuaires, charges sociales - qui restent impayées au 31 janvier 2003. Au total, le montant de la dette publique d'Air Lib s'élève à quelque 120 millions d'euros - peut-être plus - que la compagnie aérienne ne pourra jamais rembourser : l'Etat et donc le contribuable français règleront la facture.
    Ces chiffres et la chronologie qui les accompagne devront faire l'objet d'un examen attentif pour savoir si l'Etat a bien agi en investisseur avisé en sauvant une première fois l'entreprise du dépôt de bilan en décembre 2001. Le business plan proposé par la compagnie était-il réaliste ? La garantie de la viabilité économique de la compagnie était-elle réellement acquise ? Par ailleurs, il faut s'interroger sur les responsabilités de la compagnie Swissair dans le montage précipité de ce sauvetage financier, car Air Lib a dû faire face aux défaillances de Swissair qui ont empêché la compagnie de financer une période transitoire jusqu'à l'équilibre qu'elle prévoyait au mois de mars 2003.
    La deuxième série de questions porte sur la gestion de l'entreprise par ses dirigeants. Je n'ignore pas que la commission des affaires économiques a banni de l'intitulé de la commission d'enquête le mot « gestion ». Il faut malgré tout s'interroger sur la gestion interne du groupe : il n'est pas interdit de penser à des malversations, à des abus de bien sociaux, étant donné l'ampleur des disparitions de crédits et la multitude de filiales du groupe Air Lib qui sont, pour la plupart, domiciliées hors de France. Certes, notre travail ne doit pas interférer avec des enquêtes judiciaires, mais bien des mystères restent à lever. Que sont devenues les sommes versées à Air Lib par Swissair, notamment ces 20 millions d'euros dont n'a pas bénéficié directement Air Lib ? Comme l'écrit Patrick Ollier dans son rapport, « l'utilisation de ces sommes demeure à ce jour peu transparente », et il parle d'or, si je puis dire. Nous devons la vérité sur ces zones d'obscurité aux 3 200 salariés d'Air Lib qui se retrouvent aujourd'hui en difficulté.
    Mais, au-delà des salariés d'Air Lib, ce sont tous les citoyens qui sont concernés. Je voudrais vous rappeler l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration. » Ce principe à valeur constitutionnelle prend tout son sens aujourd'hui. On réclame toujours plus de transparence, de responsabilité, et la commission d'enquête sur les comptes des entreprises publiques créée il y a peu répond à cette préoccupation. La commission d'enquête dont la création nous est proposée aujourd'hui également. Devant la perte des deniers publics d'Air Lib, le Parlement, représentant de « la société », a donc le devoir, en accord avec nos principes constitutionnels, de faire toute la lumière sur cette affaire.
    Car c'est la gestion des deniers publics et l'attitude de l'Etat face à cette gestion qui posent problème. Que tant d'argent ait été versé pour si peu de résultats et un si grand déficit, voilà qui peut susciter quelques questions. On peut s'interroger également sur l'action du précédent gouvernement et de son ministre des transports qui a usé de toute son influence pour suspendre la dette d'Air Lib envers les Aéroports de Paris - alors qu'Air Lib ne réglait plus depuis bien longtemps ses taxes d'aéroport - et envers l'URSSAF. Ainsi, de l'aveu même de Jean-Charles Corbet, président d'Air Lib, dans une lettre que beaucoup d'entre vous auront reçue et probablement lue, « peu de temps avant les élections présidentielles, l'Etat était devenu le prêteur de deniers d'une société virtuellement en cessation de paiements ». Ces propos sont-ils exacts ? A la commission d'apporter la réponse.
    Avant de conclure, je me permettrai une remarque afin de mettre un terme à certaines comparaisons hâtives.
    On ne peut faire l'amalgame entre Air France privatisée et Air Lib, comme j'ai pu l'entendre dire lors de l'examen du projet de loi relatif à la société Air France et que nous venons de voter. La situation d'Air Lib n'a rien à voir, en effet, avec la problématique de la privatisation d'Air France. L'échec d'Air Lib tient d'abord au fait que, dès sa genèse, la compagnie a été un gouffre financier, dont le modèle économique n'a jamais su trouver son équilibre. Ce sont les responsables de la société Air France, mais aussi d'autres compagnies concurrentes, qui le disent. Ni AOM ni Air Liberté n'ont disposé des fondamentaux qui leur auraient permis de réellement concurrencer Air France. En fait, cette compagnie n'avait pas les moyens de se développer.
    En conclusion, je me réjouis que notre assemblée joue pleinement son rôle de contrôle de l'utilisation des deniers publics. On dit souvent que gouverner, c'est prévoir. Mais on oublie toujours que prévoir, c'est tirer les leçons du passé. C'est pour donner à l'Etat et aux acteurs économiques de ce pays les moyens de réussir que les conclusions de cette commission d'enquête seront utiles et permettront, je l'espère, d'esquisser les principes d'une nouvelle gouvernance après avoir caractérisé les causes d'un échec. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues.
    Mme Odile Saugues. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'annonce, le 17 février 2003, de la mise en liquidation judiciaire d'Air Lib par le tribunal de commerce de Créteil, n'a pas été à proprement parler une surprise. Elle a cependant constitué un choc, en tout premier lieu pour les 3 200 salariés de cette compagnie.
    Nous avons tous en mémoire ces manifestations, sur les différents sites de l'aéroport d'Orly, protestant contre le non-renouvellement de la licence d'exploitation de la compagnie. Nous avons tous en mémoire ces banderoles brocardant l'attitude du Gouvernement et les déclarations des représentants des salariés rappelant que, dans la nuit du 5 au 6 février 2003, le ministère des transports avait traité à la hussarde les problèmes des salariés. Et nous avons tous en mémoire ces interventions musclées des forces de l'ordre pour disperser ces manifestations un peu dérangeantes, politiquement parlant.
    Je ne reviendrai pas ici sur l'étonnante partie de poker menteur à laquelle nous avons assisté depuis juillet dernier entre le Gouvernement, M. Corbet, puis la société IMCA.
    M. Alain Cousin Et les syndicats !
    Mme Odile Saugues. La fin d'Air Lib n'a pas été une surprise. Elle semblait même décidée dès cet été. J'espère que les travaux de la commission d'enquête nous permettront de revenir sur cette période pour comprendre les motivations réelles du Gouvernement.
    M. François-Michel Gonnot. Il faudrait s'interroger aussi sur celles du précédent gouvernement !
    Mme Odile Saugues. Je ne doute pas que cette initiative parlementaire nous permettra de revenir sur la défaillance du groupe Swissair ou sur l'échec, décidé par le nouveau gouvernement, du groupement d'intérêt économique destiné à financer le remboursement du prêt de l'Etat.
    Je ne doute pas non plus que cette commission d'enquête permettra à la représentation nationale de faire la lumière sur les conditions dans lesquelles deux A340 ont été vendus à la compagnie Air Tahiti Nui.
    La création de cette commission d'enquête parlementaire ne doit pas être, à mes yeux, une mesure de diversion tendant à faire oublier la chaîne de responsabilités qui a conduit Air Lib à la faillite. Aussi le groupe socialiste formule-t-il des propositions concrètes pour que le dossier Air Lib soit examiné dans sa globalité et que nul n'échappe à sa part de responsabilité.
    Sous la précédente législature, une proposition de création de commission d'enquête n'avait pas vu le jour. Celle-ci portait notamment sur le regroupement des compagnies françaises AOM, Air Liberté et Air Littoral sous les auspices de la maison mère, Swissair. Nous estimions en effet que la recherche d'un repreneur était prioritaire et que la sauvegarde de l'emploi devait l'emporter sur toute autre considération.
    Aujourd'hui, la situation a changé : l'aventure Air Lib est bien finie, et il convient d'en dresser le bilan. Or, nous avons l'impression que la majorité est atteinte d'hémiplégie dans cette affaire. En effet, certains dans la presse se réjouissent de la disparition d'« Air-Gayssot » mais ne veulent surtout pas entendre parler d'« Air-Seillière ». Pourtant, si le deuxième pôle aérien français a été confronté à de si fortes turbulences, c'est bien à cause d'un envol laborieux et d'une gestion aventureuse qui a conduit la fusion AOM-Air Liberté-Air Littoral à l'échec.
    Par ailleurs, nous estimons que le dossier Air Lib est révélateur d'une certaine dérive liée à la déréglementation du transport aérien qui ouvre l'appétit de certains investisseurs peu crédibles et encourage des pratiques commerciales particulièrement inquiétantes.
    Ainsi, les compagnies à bas coût, qui fleurissent actuellement en Europe et qui assurent jusqu'à 95 % du trafic de certains aéroports français, se sont distinguées récemment par des exigences assez nouvelles telles que la prise en charge, pendant quinze ans, par une région, de la communication de la compagnie à l'occasion de l'ouverture d'une ligne ou le règlement des frais d'hébergement des pilotes.
    Nous avons vu ces compagnies aériennes survoler l'aéroport d'Orly, attendant avec impatience la disparition de la compagnie Air Lib pour se partager ses créneaux horaires. Il nous semble que cette commission d'enquête devra faire la lumière sur les promesses qui auraient pu être faites à ces compagnies.
    Dans une interview récente, monsieur le secrétaire d'Etat, vous déclariez : « Le paysage aéronautique français pourrait connaître des évolutions à la suite du dépôt de bilan de la compagnie Air Lib. Nous devrions assister au cours des prochaines semaines à l'émergence de projets de compagnies déjà existantes ou de nouvelles compagnies pour prendre la place laissée vacante par Air Lib, s'agissant notamment de la desserte des DOM. » Vous poursuiviez : « Je pense également que les compagnies à bas coût poursuivront leur développement en France et que ces compagnies continueront à contribuer au développement du transport aérien. »
    Il y a là, incontestablement, de quoi alimenter les travaux de cette commission d'enquête.
    Enfin, à ce stade du débat, je ferai deux observations au nom de mon groupe.
    D'une part, il est pour le moins paradoxal de voir la majorité réclamer une commission d'enquête sur l'utilisation des fonds publics par une entreprise alors que, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2002, cette même majorité a abrogé les dispositions de la loi du 4 janvier 2001, dite « loi Hue », relative au contrôle des fonds publics accordés aux entreprises.
    La semaine dernière encore, nous vous proposions, dans le cadre du projet de loi sur la privatisation d'Air France, la mise en place de commissions régionales regroupant l'Etat et les collectivités locales pour garantir un meilleur contrôle de ces aides publiques dans le secteur du transport aérien, et vous avez de nouveau repoussé l'idée pourtant simple d'une utilisation plus vertueuse des fonds publics.
    Ma seconde remarque est plus générale : cette commission d'enquête montre finalement que l'Etat ne peut se désintéresser du transport aérien, qui est un secteur extrêmement fragile et hautement stratégique. A mon sens, cet intérêt ne doit pas se manifester qu'au travers de commissions d'enquête. L'Etat doit demeurer un acteur majeur dans le transport aérien, au travers de la définition des obligations de service public, d'une part, et au travers de sa place dans le capital d'Air France, d'autre part.
    Or, au moment même où vous nous proposez la constitution de cette commission d'enquête, vous venez de voter un projet de loi qui va profondément et durablement déstabiliser la compagnie Air France et qui ne fixe, j'y insiste, aucune obligation précise de service public.
    Je vous ferai par ailleurs remarquer que, grâce à son statut actuel, la société Air France est soumise au contrôle de la Cour des comptes.
    Bref, vous réclamez un contrôle des comptes de la seconde compagnie aérienne après sa disparition, et vous supprimez celui qui est en vigueur et qui a fait ses preuves pour la première compagnie aérienne française.
    Je conclurai, mes chers collègues, en réagissant brièvement aux propos tenus par M. le ministre des transports ce jour même sur LCI. Annoncer que 80 % des salariés d'Air Lib seront reclassés d'ici à un an et demi me paraît quelque peu hasardeux à l'heure où l'Etat se désengage d'Air France et n'aura plus les moyens de peser réellement sur les choix et les orientations de cette compagnie.
    Le transport aérien va considérablement souffrir de la crise internationale qui va entrer, dans ces prochaines heures, dans une phase militaire. Le moment est bien mal venu pour le livrer aux lois du marché. Le moment est bien mal choisi pour multiplier les promesses qui risquent d'être compromises par la privatisation d'Air France.
    Les salariés d'Air Lib n'attendent plus du Gouvernement des déclarations d'intention et des tours de table médiatiques, monsieur le secrétaire d'Etat.
    Nous espérons donc que nos amendements seront retenus par cette assemblée. Ils témoignent de notre souci d'établir toute la vérité sur l'histoire d'Air Lib et de mettre au jour toutes les responsabilités dans l'échec de la deuxième compagnie aérienne française. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. François-Michel Gonnot, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. François-Michel Gonnot. Je voudrais tout d'abord, au nom du groupe UMP, féliciter et remercier le ministre et le secrétaire d'Etat des efforts qu'ils ont déployés pendant plus de dix mois pour essayer d'y voir clair dans un dossier dont nous mesurons combien il est complexe, souvent opaque, et pour essayer d'explorer toutes les voies - je dis bien toutes les voies - qui auraient permis de sauver ce deuxième opérateur du transport aérien français, et donc les 3 200 emplois de cette compagnie aérienne.
    Je tiens également, au nom du groupe UMP, à saluer l'initiative du président de la commission des affaires économiques,...
    M. Jean-Marc Lefranc. Bravo !
    M. François-Michel Gonnot. ... qui, en nous proposant de créer une commission d'enquête sur les causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib nous permet de mettre à nouveau à plat le problème de l'utilisation de fonds publics par une entreprise privée. C'est le rôle du Parlement, en effet, assisté par la Cour des comptes, de veiller à la bonne utilisation des deniers publics. Il aurait été dommage que le Parlement manque cette occasion d'assumer pleinement sa compétence. Cette commission d'enquête est donc une initiative salutaire. Comme l'affirme notre rapporteur, une telle commission d'enquête n'aura pas vocation à se substituer à une procédure judiciaire en cours, en vertu de l'article 141 de notre règlement.
    Je tiens à rappeler que la liquidation judiciaire d'Air Lib comporte des conséquences dramatiques. Dramatiques, évidemment, sur le plan humain : 3 200 hommes et femmes se retrouvent aujourd'hui sans emploi, ballottés au gré des propositions de reclassement. Dramatiques également au regard du service public : Air Lib jouait un role essentiel en termes d'aménagement du territoire en ce sens qu'elle assurait un tiers des dessertes vers les départements d'outre-mer et la Polynésie. Dramatiques, enfin, sur le plan concurrentiel, car la disparition du second pôle aérien français prive le consommateur de choix sur les lignes intérieures et laisse Air France en situation de monopole.
    Air Lib, héritière de la compagnie Air Liberté, lancée en 1987, issue du rapprochement entre Air Outre-Mer et Minerve, filiale du Crédit lyonnais, n'a jamais réussi à touver son créneau de rentabilité sur un marché aérien intérieur largement dominé par la compagnie Air France. Les reprises successives par British Airways, entre 1997 et 2000, puis par Swissair, de 2000 à 2001, ont été des échecs. La compagnie aérienne a obtenu alors un sursis grâce au jugement du tribunal de Créteil, cela a été rappelé tout à l'heure, qui a retenu le projet Holco, piloté par M. Corbet, ancien commandant de bord de la société Air France. Ce sursis a été rendu possible par la manne financière versée par Swissair - 152,2 millions d'euros pour solde de tout compte et de toute poursuite judiciaire. Il a aussi été rendu possible grâce à la perfusion régulière de fonds publics à laquelle a procédé le précédent gouvernement, pour l'équivalent de 130 millions d'euros au total.
    Il ne s'agit pas ici pour nous de « charger » un bouc émissaire qui serait désigné à la vindicte publique par les syndicats de la compagnie ou par la presse. Cette commission d'enquête n'a pas prétention à devenir un tribunal de l'opinion publique. Elle a pour vocation de répondre à des doutes sur la gestion de cette compagnie aérienne, ainsi que sur l'utilisation réelle des fonds, notamment publics, qui lui ont été versés.
    Première question que l'on peut se poser : la structure « en gigogne » d'Air Lib dissimule-t-elle une fuite de capitaux, et des fonds publics octroyés, étrangère aux intérêts de la compagnie ? Contrairement à ce qui a été dit dans les médias, les structures en gigogne avec des activités parcellisées par filiales correspond à la pratique classique des compagnies aériennes, qui distinguent l'activité de maintenance de celle de restauration ou de celle de gestion des appareils, tout cela pour une meilleure lisibilité.
    Ce qui, par contre, est moins classique, ce sont des actifs placés à l'étranger pour des raisons fiscales, comme Holco Lux au Luxembourg et Mermoz UA aux Pays-Bas. Mermoz a été capitalisé à hauteur de 14 millions d'euros, officiellement pour des frais de maintenance des avions. Holcolux aurait été capitalisé à hauteur de 5 millions d'euros pour développer la formation par l'Internet et prendre des participations dans d'autres sociétés. Ces deux capitalisations respectives ont été réalisées au moyen de l'argent versé par l'ex-actionnaire Swissair à la holding Holco pour aider au redémarrage de la compagnie. Or il apparaît aujourd'hui que ces sommes, représentant le quart des fonds versés par Swissair, n'ont pas servi directement les intérêts de la compagnie. En effet, Holcolux est uniquement une société de portefeuille, sans aucun lien avec l'industrie aéronautique.
    Autre étrangeté : la direction de la holding Holco annonce, par exemple, que le sauvetage des filiales est possible au milieu de la débâcle d'Air Lib. Cette annonce paraît étrange quand on sait, par exemple, qu'ATL, responsable de la maintenance, avait pour seul client Air Lib. On peut donc s'interroger pour savoir si Holco ne cherche pas à soustraire le patrimoine de certaines filiales de la liquidation judiciaire qui affecte Air Lib.
    Jean Giraudoux disait : « Le privilège des grands, c'est de voir les catastrophes d'une terrasse. » Force est de constater que la situation de celui qui était hier le dirigeant d'Air Lib apparaît plus favorable que celle des 3 200 salariés aujourd'hui en proie aux problèmes de reclassement.
    Par ailleurs, l'Etat a versé, comme cela a été rappelé, 130 millions d'euros, et notamment un prêt de 30,5 millions décidé en janvier 2002 par le précédent gouvernement en faveur de la compagnie, qui n'est toujours pas en mesure de le rembourser. L'actif disponible de la compagnie est réduit aujourd'hui à 2,5 millions d'euros. Son passif atteint près de 280 millions d'euros, dont 130 millions d'arriérés de paiement dus à des organismes publics, URSSAF, direction générale de l'aviation civile, ADP, et autres redevances dues à d'autres aéroports.
    On peut également penser, comme l'a dit le rapporteur, que le prêt du FDES présente des irrégularités flagrantes.
    L'objet de cette commission d'enquête parlementaire va donc consister à examiner les trajets suivis par les fonds publics versés pour voir s'ils ont vraiment été utilisés dans l'intérêt de la compagnie. La complexité du montage juridique et l'existence de filiales strictement financières ne permettent pas aujourd'hui de l'affirmer avec netteté, loin de là. Il est donc naturel que le Parlement et, à travers lui, les pouvoirs publics cherchent la vérité.
    Seconde question à laquelle devra répondre la commission d'enquête : la disparition d'Air Lib était-elle inexorable ? Air Lib assurait 360 vols hebdomadaires au départ de l'aéroport d'Orly et transportait chaque année environ 3,3 millions de passagers sur des vols réguliers, ce qui en faisait le deuxième pôle aérien français. La compagnie représentait 6,5 % du trafic aérien, contre 77 % pour Air France et les compagnies franchisées.
    Outre l'aspect concurrentiel du marché aérien sur les lignes intérieures, Air Lib assurait en 2000 un tiers des dessertes vers les départements d'outre-mer et la Polynésie française, ainsi que, plus récemment, une desserte compétitive pour de nombreuses villes de province. Les vols assurés par les trente-trois appareils de la société Air Lib desservaient trente et une lignes, dont dix-neuf en France métropolitaine.
    Beaucoup d'observateurs ont noté dès le lancement d'Air Lib des failles dans le business model de la compagnie, notamment l'impossibilité de réduire les coûts de personnel, liée à une mauvaise gestion évidente et à un sous-emploi de celui-ci. Les pilotes se voyaient réduits à ne travailler que 40 heures par mois - je dis bien : par mois -, alors que leurs contrats de travail prévoyaient un forfait minimum de 60 heures de vol. Pour compenser les déficits de primes de vol, certains personnels navigants se partageaient, paraît-il, les recettes des ventes à bord de produits offerts par des sponsors.
    Air Lib semblait également pénalisée par des créneaux horaires moins favorables que ceux d'Air France. Par ailleurs, la volonté d'être compétitif sur les tarifs ne pouvait constituer une stratégie viable à terme, étant donné que les coûts de gestion d'Air Lib - personnels, taxe d'aéroport - étaient sensiblement les mêmes que ceux d'Air France. En effet, la compagnie avait développé une stratégie low cost, à l'instar d'Easyjet et de Ryanair, mais sans structure d'exploitation adaptée.
    Le segment de marché choisi par Air Lib semblait finalement inadapté. Le repreneur, Jean-Charles Corbet, avait, quant à lui, développé une stratégie expansionniste, avec une multiplication des dessertes, la conquête des marchés algériens et libyens, ainsi que l'ouverture de lignes en Afrique, où, depuis la disparition de Sabena, Air France se retrouvait en situation de monopole. Mais la faiblesse financière du projet conférait peu de réalisme à la stratégie de l'entreprise.
    Ce constat conduit naturellement à se demander, comme l'a fait tout à l'heure le rapporteur, si un tel échec pouvait être évité.
    C'est à juste titre que la disparition d'Air Lib a fait figure de drame national. Elle représente tant l'échec d'un projet à dimension humaine que l'échec d'un deuxième pôle aérien français. Enfin se pose la question de l'exploitation future des lignes desservies par Air Lib - les Antilles, Cayenne, ou encore Papeete - et donc celle de l'aménagement du territoire des départements d'outre-mer lié à cette desserte.
    Pour toutes ces raisons, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe UMP votera bien sûr la présente proposition de résolution tendant à la constitution d'une commission d'enquête. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. François Asensi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce projet de résolution vise à contrôler les fonds publics. Bravo ! Très bien ! Une des premières priorités de la majorité a été pourtant de remettre en cause la loi Hue, qui visait précisément à contrôler les fonds publics accordés à toutes les entreprises et incitait notamment à une grande vigilance à l'égard des entreprises qui licencient ou qui déposent des plans sociaux dramatiques pour les salariés et les régions.
    M. Jean-Marc Lefranc. Ça n'a rien à voir !
    M. François Asensi. Cette loi, dont nous, groupe communiste et républicain, étions les défenseurs, constituait une avancée majeure et nécessaire au vu de l'ampleur des aides accordées aux entreprises par l'Etat, donc par les contribuables, donc par les salariés. Elle s'avère aujourd'hui plus que nécessaire. Ainsi donc, vous voulez constituer une commission d'enquête, mais vous abrogez une loi positive qui visait justement à faire la clarté sur l'utilisation des fonds publics. C'est assez contradictoire !
    Aux termes de la loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances pour 2003, le total des exonérations de charges sociales accordées aux entreprises dépasse le budget du ministère du travail. Ces sommes considérables ne représentent en outre qu'une partie des avantages consentis aux entreprises, puisqu'il faut y ajouter les aides fiscales à l'investissement.
    Un des rôles du Parlement est d'assurer le contrôle de l'usage des fonds publics, et de veiller à la transparence dans l'utilisation des ressources publiques. Mais, en l'occurrence, vous menez une politique de contrôle au cas par cas : c'est une politique des petits pas, qui est loin des grandes avancées sociales que nous espérons en ces temps de crise économique et sociale, où les plans sociaux se multiplient. S'il est utile et légitime de contrôler l'usage des fonds publics pour Air Lib, cela ne le serait-il pas tout autant pour Metaleurop et pour beaucoup d'autres entreprises ?
    Ne nous trompons pas non plus sur les responsables. Ne réduisons pas le périmètre de l'enquête pour des raisons de convenance politique. Je ne sais pas qui est visé par la création d'une telle commission d'enquête. Les résultats de ses investigations nous l'apprendront. Mais j'ai le vague sentiment que l'ancien ministre communiste est un peu dans le collimateur de ceux qui proposent de la créer.
    Tragique pour des milliers de salariés et leurs familles, la faillite d'Air Lib est le résultat de quinze années de turbulences, au cours desquelles on croise des banques et des holdings qui ont défrayé les chroniques en leur temps : la banque Rivaud, le Crédit lyonnais. Un des autres acteurs importants de la tragédie d'Air Lib fut la holding financière Marine Wendel, présidée par le baron Seillière.
    Le prêt de 30 millions d'euros accordé au nom du Fonds européen de développement ne constitue pas en réalité le fond de l'affaire. Attention à ne pas crier haro sur l'aide publique !
    Il ne s'agit pas non plus de remettre en cause la liberté de gestion des entreprises privées. Mais cette liberté est encadrée par des textes législatifs et réglementaires. Il est légitime de s'assurer de la légalité des activités des entreprises. Or, dans ce dossier, un certain nombre d'irrégularités semblent avoir été commises.
    Par ailleurs, analyser en profondeur tous les mécanismes qui, sur la durée, ont mené à cette tragédie économique et sociale, c'est montrer ce à quoi le Gouvernement expose Air France en la privatisant.
    En 1999, après le dépôt de bilan d'AOM-Air Liberté, Air France avait fait une offre de rachat qui n'a pu être suivie d'effet, le ministère des finances s'étant, au nom de la concurrence, opposé à cette transaction en imposant des conditions inacceptables : Air France devait restituer 120 % des « slots » détenus par AOM-Air Liberté. Le gouvernement de l'époque - je le reconnais - a manqué l'occasion de créer un grand pôle public du transport aérien. Si cette occasion avait été saisie, nous ne serions sans doute pas dans cette situation, avec le dépôt de bilan d'Air Lib.
    Quant au plan Holco, approuvé par le tribunal de commerce de Créteil, je le rappelle, il s'inscrivait dans une autre logique : il ne s'agissait plus de s'inscrire dans une opposition frontale face à l'entreprise nationale, mais plutôt d'assurer une certaine complémentarité.
    Je parle du plan Holco, monsieur le président de la commission, je ne parle pas de la décision du tribunal de Créteil d'accorder la reprise de l'entreprise à M. Corbet.
    Des événements conjoncturels sont venus contrecarrer la mise en place de cette stratégie : d'une part, les événements du 11 septembre ; d'autre part, la défaillance de Swissair, qui n'a pas honoré tous ses engagements, il faut le rappeler. Swissair devait encore de l'argent à Air Lib. Je note que vous n'en avez pas parlé tout à l'heure, monsieur le rapporteur.
    Pour surmonter ces difficultés conjoncturelles, le Gouvernement a octroyé un prêt FDES de restructuration. Ce prêt était gagé sur la mise en place d'un GIE fiscal adapté et sur la créance Swissair. Ce montage n'a jamais vu le jour alors que le Gouvernement, au mois de janvier de cette année, déclarait qu'il était en accord avec un tel montage. Quant à Swissair, elle n'a pas, je le répète, honoré toute sa dette envers Air Lib.
    Le gouvernement actuel a renouvelé ce prêt. En janvier 2003, il arrivait à nouveau à échéance : il fut reconduit. Mais subitement, dès le mois de février, les avions d'Air Lib sont cloués au sol. La compagnie est en réalité abandonnée par le Gouvernement. A croire qu'il s'agissait véritablement d'ouvrir le ciel français et européen aux compagnies low cost. Les repreneurs éventuels d'Air Lib ne furent pas soutenus : aucune remise ne fut accordée sur les avions Airbus alors que, quelques temps auparavant, vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, accordiez à easyJet des prix plus intéressants pour l'achat d'Airbus.
    L'une des grandes escroqueries concernant ce dossier concerne l'infraction à la législation européenne. D'après les textes européens, le capital d'une compagnie aérienne doit être majoritairement détenu par des investisseurs européens. C'est pourquoi, en 1999, lors du rachat d'Air Liberté-AOM par Swissair, Marine Wendel était majoritaire dans le capital, ce qui a permis le feu vert des autorités françaises et européennes.
    Pourtant, lors des difficultés connues par la compagnie en 2001, M. Seillière lui-même avoua dans un journal qu'il n'était qu'un prête-nom et que, de fait, Swissair était le véritable gestionnaire, cela en violation du droit communautaire.
    De fait, Ernest-Antoine Seillière s'est prêté à une pratique qu'on appelle le portage avant de décider, à l'instar de Swissair, de se désengager d'Air Liberté et de provoquer son dépôt de bilan sans payer ses dettes. En effet, d'après un rapport établi par Ernst & Young pour le compte des autorités helvétiques, qui enquêtent sur les conditions de la faillite de Swissair, ni Swissair ni Marine Wendel n'ont jamais honoré leurs dettes à l'égard d'Air Lib.
    Attachés à la réglementation du marché et à la sanction des patrons-voyous, le groupe communiste et républicain, se prononce bien entendu pour la création de cette commission d'enquête, en espérant qu'elle fera la clarté sur les conditions qui ont entraîné cette véritable tragédie pour les salariés d'Air Lib, et aussi pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La discussion générale est close.
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
    M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais profiter de la discussion de la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions de gestion d'Air Lib, proposition que vient de rapporter le président Ollier, pour faire connaître l'opinion du Gouvernement sur celle-ci et pour faire le point sur le dossier Air Lib.
    Comme l'ont rappelé la plupart des orateurs, notamment François-Michel Gonnot et M. le rapporteur, la société Air Lib, née de la fusion des compagnies AOM et Air Liberté, a, malheureusement, été sous-capitalisée dès sa création.
    Le 27 juillet 2001, la société Holco, propriété de Jean-Charles Corbet, a été désignée par le tribunal de commerce de Créteil comme repreneur, dans le cadre d'un plan de redressement par voie de cession d'une partie des actifs et des personnels des compagnies AOM et Air Liberté.
    A cette occasion, le tribunal avait retenu l'offre qui apparaissait la mieux-disante au plan social, à savoir celle qui maintenait le maximum d'emplois.
    La nouvelle compagnie issue de la cession a pris le nom commercial d'Air Lib.
    Dès l'origine, il est apparu à la presse et à tous les observateurs que la compagnie était sous-capitalisée - d'au moins 80 millions d'euros - et que le projet de reprise était trop ambitieux par rapport aux moyens financiers, ou plus exactement par rapport à la quasi-absence de moyens financiers du repreneur. Cette compagnie s'est néanmoins vu attribuer une licence temporaire par le gouvernement précédent.
    Dès les premiers mois d'activité, les résultats d'Air Lib ne sont pas bons. Pour diverses raisons, dont certaines extérieures à l'entreprise, qui ont été rappelées notamment par M. Asensi et par Mme Saugues, en particulier la défaillance de Swissair, qui n'a pas versé la totalité des sommes prévues dans le cadre de la reprise et reste toujours redevable de 60 millions d'euros, la situation financière d'Air Lib s'est rapidement dégradée.
    Air Lib a, de sa propre initiative, comme l'a rappelé M. de Courson, interrompu le paiement des charges URSSAF et ASSEDIC d'octobre 2001 à mars 2002. Le gouvernement précédent a laissé faire, la situation financière de l'entreprise se détériorant progressivement.
    Par ailleurs, le 9 janvier 2002, trois mois avant les échéances électorales, il a accordé à Air Lib un prêt du fonds de développement économique et social de 30 millions d'euros, qui devait être remboursé le 9 juillet 2002.
    Le gouvernement précédent a, en outre, toléré qu'à partir de mars 2002 l'entreprise cesse de payer la totalité de ses charges publiques et parapubliques. Le problème de la survie de l'entreprise était donc à nouveau posé à partir du mois d'avril dernier.
    Le nouveau gouvernement, tout en tenant compte de cette situation, a voulu, au nom de l'emploi, ainsi que l'ont rappelé François-Michel Gonnot et Charles de Courson, donner toutes ses chances à Air Lib.
    Il a fait réaliser, en juillet, un audit sur les conditions d'exploitation des services de la compagnie et sur sa situation financière. Pour des raisons d'objectivité et afin de disposer des mêmes bases de données, le Gouvernement a choisi les mêmes cabinets d'audit que ceux qui avaient été retenus par le gouvernement précédent.
    Il s'agissait notamment de préciser le potentiel offert par la réorganisation du réseau moyen courrier avec l'introduction des services - de type bas coût - Air Lib Express qui venait d'être entreprise, sans d'ailleurs, M. Gonot l'a noté, que les conditions habituelles dont dispose une société aérienne à bas coût soient réunies.
    Conscients de la place occupée par Air Lib dans le transport aérien français, du rôle joué par cette compagnie en matière d'aménagement du territoire, en particulier par la desserte des collectivités d'outre-mer, et soucieux de maintenir l'emploi, Gilles de Robien et moi-même nous sommes efforcés au cours des derniers mois, avec l'accord du Premier ministre, de donner toutes ses chances à l'entreprise pour lui permettre de trouver un partenaire qui l'aide à se redresser, l'Etat ne pouvant jouer ad vitam aerternam le rôle d'un banquier.
    Pour ce faire, nous avons prolongé une première fois l'échéance du prêt de FDES, juqu'au 9 novembre, et avons à nouveau accordé un moratoire sur l'ensemble du passif échu vis-à-vis des administrations publiques. Toutefois, à cette occassion, le Gouvernement a demandé à Air Lib de préparer, conformément au droit communautaire, un plan de restructuration permettant le redressement durable de la compagnie.
    En novembre dernier, le président d'Air Lib a présenté au Gouvernement un investisseur potentiel, le fameux groupe néerlandais IMCA. Pour donner le temps à cet investisseur de préparer le plan de redressement, les échéances de remboursement ont été une nouvelle fois reportées, et ce jusqu'au 9 janvier 2003, et la licence de la compagnie à été renouvelée jusqu'au 31 janvier 2003.
    Je précise à la représentation nationale - mais nombre d'entre nous le savent - que la licence ne concerne pas seulement les questions de sécurité, mais a trait aussi à la capacité financière dont une compagnie doit disposer pour assumer les charges liées à l'exploitation d'une liaison, telles que le coût du carburant. D'une certaine manière, d'ailleurs, l'aspect financier a des conséquences sur le plan de la sécurité. Quoi qu'il en soit, tout cela étant assuré, nous avons renouvelé la licence.
    Le 9 janvier, date du rendez-vous prévu avec l'investisseur potentiel, celui-ci n'avait pas finalisé ses propositions.
    Pour sortir de cette situation, le Gouvernement a alors demandé, le 14 janvier dernier, que s'engage la conciliation qui avait été réclamée par Air Lib afin de préciser les conditions du remboursement des dettes publiques et de la participation d'IMCA au financement du plan de restructuration.
    L'Etat avait, à cette occasion, indiqué que les dettes de la compagnie vis-à-vis de lui-même et des créanciers publics - dont le montant total avoisinait 120 millions d'euros - ne devaient plus s'accroître, ce qui supposait qu'IMCA s'engage, dans le cadre de la conciliation, à apporter très rapidement de la trésorerie à Air Lib.
    Au terme de négociations intenses menées dans les deux dernières semaines de janvier, le conciliateur désigné par le président du tribunal de Créteil a finalisé le 30 janvier dernier un protocole de conciliation qui recueillait l'agrément de toutes les parties, et donc de l'Etat.
    Cependant, IMCA a subordonné la signature de ce document à l'aboutissement favorable de deux négociations séparées que la société avait engagées, d'une part, avec les personnels d'Air Lib en vue d'aboutir à une réduction des coûts de production - certains syndicats étaient d'accord, d'autres avaient fait publiquement part de leur opposition - et, d'autre part, avec Airbus en vue d'acquérir des appareils pour renouveler la flotte d'Air Lib. En effet, celle-ci avait pour particularité d'être composée d'appareils bien entretenus, mais anciens, comme des MD 83 - les anciens DC 8 - ou des DC 10, appareils coûteux en entretien et en carburant, posant à la compagnie des difficultés non sur le plan de la sécurité, mais d'ordre financier.
    Afin de permettre le développement de ces négociations, la validité de la licence d'exploitation d'Air Lib a une nouvelle fois été prolongée du 31 janvier jusqu'au 5 février. Malheureusement, ce délai n'a pas permis à la société IMCA de trouver un accord avec Airbus. Et, toute une longue nuit, Gilles de Robien et moi-même avons attendu la signature de cet accord.
    Dans ces conditions, IMCA n'a pas signé le protocole de conciliation que chacun se préparait à signer, y compris le Gouvernement, le 5 février, et la licence d'Air Lib n'a pu être renouvelée, la compagnie ne disposant plus de la trésorerie nécessaire pour poursuivre son activité.
    Les vols de la compagnie ont donc été arrêtés le 6 février à minuit. Le 13 février, le président de l'entreprise a déclaré la société en cessation de paiements, et, le 17 février, le président du tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation de l'entreprise.
    Telle est la chronologie des faits. Je me suis permis de la rappeler parce qu'elle éclaire un processus qui s'est déroulé sur la place publique car les médias se sont beaucoup intéressés au sort de cette entreprise.
    Mesdames et messieurs les députés, pour le Gouvernement, la création de cette commission d'enquête est tout à fait justifiée.
    Comme l'ont rappelé les intervenants, la disparition d'Air Lib a de très nombreuses conséquences, non seulement au plan social, mais également en termes économiques, notamment pour la région d'Orly - les élus du Val-de-Marne s'en inquiètent à juste titre -, et en termes d'aménagement du territoire, en particulier pour la desserte de l'outre-mer français.
    Il apparaît tout à fait légitime au Gouvernement que la commission que vous allez créer enquête sur les circonstances qui ont conduit à cette dégradation irréversible de la situation d'Air Lib et sur l'utilisation qui a été faite des aides considérables apportées par les pouvoirs publics pour tenter de sauver cette entreprise.
    Par ailleurs, il est exact que le repreneur d'Air Lib a mis en place un système complexe de holding avec plusieurs sociétés implantées dans divers pays de l'Union européenne. Cela ne facilite pas la lisibilité et rend plus complexe l'appréciation qu'il convient de faire de l'utilisation des sommes versées par Swissair au titre du protocole transactionnel qui a été signé à l'occasion de la reprise d'AOM et d'Air Lib en juillet 2001.
    La création de cette commission d'enquête paraît donc tout à fait bienvenue au Gouvernement car elle permettra d'avoir une meilleure visibilité, je dirais même une véritable visibilité du groupe Holco et des flux financiers qui ont pu transiter entre les sociétés de ce groupe. Cette information avait été également réclamée, mais en vain, dans le passé par le comité d'entreprise d'Air Lib, au nom des salariés de l'entreprise, et il me paraît intéressant de pouvoir la mettre aujourd'hui à la disposition des ex-employés d'Air Lib.
    Je pense enfin que votre enquête aura des vertus pédagogiques fortes, ainsi que l'a indiqué M. Charles de Courson, car elle permettra à l'avenir à l'Etat d'éviter de s'engager dans des processus d'aides répétitives et coûteuses alors que, dès le départ, certaines conditions ne sont pas réunies pour éviter la liquidation de sociétés assistées.
    Le Gouvernement est donc tout à fait favorable à la constitution de cette commission d'enquête et formule le voeu que celle-ci éclaire pleinement les citoyens et les employés d'Air Lib sur l'usage qui a été fait des fonds publics et permette de mieux comprendre les raisons de l'échec de cette démarche et le fonctionnement de la holding Holco.
    Permettez-moi d'apporter maintenant quelques informations complémentaires.
    D'abord, je tiens à vous indiquer que, à ce jour, la quasi-totalité des lignes exploitées par Air Lib et utiles à l'aménagement du territoire ont été reprises. En ce qui concerne la desserte de l'outre-mer, Air France a accru son offre sur le département de la Réunion et Corsair a augmenté la sienne sur les deux départements antillais afin de faire en sorte que nos compatriotes ultramarins bénéficient d'une desserte aérienne répondant à leurs besoins.
    De même, certaines des dessertes entre Paris et des villes de province sur lesquelles Air Lib était en situation de monopole ont été reprises. C'est le cas des dessertes entre Paris et Perpignan, Paris et Lannion et Paris et Annecy. Reste le cas de l'aéroport de Tarbes-Lourdes, qui n'était plus desservi, ce dont le maire de Tarbes et les députés des Hautes-Pyrénées se sont, à juste titre, émus. Il semble qu'il y ait, depuis, des pistes pour la reprise de cette ligne.
    Même si les solutions provisoires ne sont pas parfaites, le service est assuré là où Air Lib était indispensable à l'aménagement du territoire.
    Ensuite, vous savez que le processus de liquidation est en cours et qu'un certain nombre de repreneurs se sont fait connaître par voie de presse. L'Assemblée nationale doit donc en être informée. Ainsi, une société toulousaine qui s'appelle Aéris a proposé au juge liquidateur de reprendre une partie des actifs. De même, une compagnie anglaise bien connue, Virgin, a fait savoir qu'elle ferait des propositions. Il appartiendra naturellement à l'autorité judiciaire de déterminer les candidats les plus sérieux et les plus intéressants, pour une éventuelle reprise d'une partie d'Air Lib.
    Par ailleurs, je voudrais dire à Mme Saugues, qui a émis quelques réserves sur ce point, que le Gouvernement ne met en aucun cas en doute la parole de Jean-Cyril Spinetta, qui a spontanément proposé de reprendre 1 000 salariés au cours de l'année 2003. Or il était déjà possible de deviner, quand Jean-Cyril Spinetta a fait cette proposition, que 2003 serait une année difficile pour le transport aérien, surtout si, malheureusement, une guerre éclate en Irak. C'est donc en ayant toute conscience des difficultés qui risquaient de survenir que le président d'Air France a fait sa proposition. En tout cas, le Gourvernement n'a excercé aucune pression sur lui.
    De même, le président de la SNCF, dans une conjoncture qui n'est pas simple pour son entreprise, Aéroports de Paris, la RATP, des compagnies consulaires et d'autres compagnies aériennes ont fait des propositions de reprise du personnel.
    Aussi, madame Saugues, quand Gilles de Robien dit publiquement sur une chaîne de télévision, comme il l'a fait ce matin, qu'il a espoir que la quasi-totalité des salariés soient repris ou, en tout cas, reçoivent des offres de travail dans des délais raisonnables, ce ne sont pas des propos optimistes, mais des propos réalistes : cela correspond à l'effort qui est fait, en particulier par la cellule de reclassement.
    Dans cette affaire, mesdames et messieurs les députés, il faut, comme l'a dit le président Ollier, penser, au-delà de l'argent public, à la détresse des 3 200 salariés qui, aujourd'hui, paient les pots cassés. Le Gouvernement est heureux que l'Assemblée puisse se prononcer dans quelques instants sur la création d'une commission d'enquête chargée d'examiner les raisons de ce gâchis et les conditions dans lesquelles l'argent public a pu être utilisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Article unique

    M. le président. « Article unique. - Il est créé, en application des articles 140 et suivants du règlement de l'Assemblée nationale, une commission d'enquête de trente membres sur les causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib et sur les fonds publics accordés à cette compagnie aérienne. »
    Mme Saugues et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 1 corrigé, ainsi rédigé :
    « Dans l'article unique, substituer aux mots : "causes économiques et financières de la disparition, les mots : "conditions de gestion et les causes économiques et financières d'AOM-Air Liberté puis. »
    La parole est à Mme Odile Saugues.
    Mme Odile Saugues. Ainsi que je l'ai expliqué dans la discussion générale, cet amendement vise à élargir le champ d'investigation de la commission d'enquête au-delà du cadre de la dernière gestion de la compagnie. En effet, la gestion précédente semble avoir été tout aussi mauvaise. Il paraît moral d'enquêter aussi loin que possible dans le temps pour savoir qui a fait quoi et pour vérifier le plus complètement possible les conditions d'utilisation de l'argent public. D'où cette proposition visant à modifier le contenu de l'article unique de la proposition de résolution.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Patrick Ollier, président de la commission, rapporteur. La commission s'est opposée à l'adoption de cet amendement pour des raisons dont je me suis clairement expliqué au cours de la réunion de ce matin. La création d'une commission d'enquête a été proposée afin d'établir dans quelles conditions le dépôt de bilan d'Air Lib a pu survenir et dans quelles conditions les fonds publics ont été utilisés. Il n'est pas question d'élargir le champ d'enquête de la commission, et je demande donc à l'Assemblée de rejeter cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
    L'argent public a commencé à être versé à partir de l'obtention du prêt FDES, le 9 janvier 2002. Cette date doit donc être celle du point de départ de l'investigation de la commission d'enquête.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Saugues et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 2, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article unique par les mots : ", et sur les pratiques commerciales des compagnies aériennes dites à bas coût. »
    La parole est à Mme Odile Saugues.
    Mme Odile Saugues. Cet amendement, qui a été retiré au cours de son examen par la commission, vise à élargir le champ d'investigation de la commission d'enquête aux pratiques commerciales des compagnies aériennes dites à bas coût.
    J'aurais retiré cet amendement car le président de la commission nous avait convaincus que ces investigastions pourraient être menées et que la commission d'enquête pourrait auditionner les responsables de ces compagnies, dont les pratiques habituelles peuvent nous sembler quelque peu étonnantes. Pour ma part, j'ai parlé de racket auprès des collectivités locales, et mon jugement n'est pas sans fondement.
    Toutefois, comme cet amendement, que j'avais retiré en commission, revient en séance, je souhaiterais que M. le secrétaire d'Etat puisse me confirmer les propos tenus par M. le président de la commission.
    M. le président. Qu'en pense la commission ?
    M. Patrick Ollier, président de la commission, rapporteur. Cette commission d'enquête étant parlementaire, il ne vous a pas échappé, madame Saugues, que M. le secrétaire d'Etat n'y participera pas. Je vais donc me permettre de répondre sur le point que vous avez soulevé. Bien entendu, M. Bussereau pourra donner son avis après.
    Pour nous, la commission d'enquête ne pourra apprécier la gestion de l'entreprise avec l'injection des fonds publics qu'à partir de la date du 9 janvier 2002. C'est dans le cadre de la concurrence liée à l'activité d'Air Lib, à partir de cette date et jusqu'au moment du dépôt de bilan, que les responsables des entreprises aériennes à bas coût pourront être entendus, je n'y vois aucun inconvénient.
     Toutefois, il n'est pas question d'élargir le champ d'investigation de la commission d'enquête à l'ensemble des problèmes que vous avez évoqués concernant les sociétés aériennes à bas prix, car cela relève d'une autre commission d'enquête dont le cadre déborde largement celui de la commission d'enquête sur Air Lib. Voilà pourquoi je vous avais demandé de retirer votre amendement.
    Cela dit, je vous confirme que je ne vois pas d'inconvénient à ce que les responsables des entreprises en question puissent être entendus dans le cadre que j'ai défini.
    M. le président. Je ne comprends pas que cet amendement retiré en commission ait pu tout de même venir en discussion. Est-il, oui ou non, retiré, madame Saugues ?
    Mme Odile Saugues. Comme vous, monsieur le président, j'ai été étonnée que cet amendement soit appelé en séance publique. Cela dit, étant donné la confirmation que vient de m'apporter M. le président de la commission, je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.

Titre

    Avant de mettre aux voix l'article unique, j'indique à l'Assemblée que, conformément aux conclusions de la commission, le titre de la proposition est ainsi rédigé :
    « Proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes économiques et financières de la disparition d'Air Lib. »
    L'amendement n° 3 qui portait sur le titre n'a plus d'objet du fait du rejet de l'amendement n° 1 corrigé et du retrait de l'amendement n° 2.
    Le vote sur l'article unique auquel nous allons procéder maintenant aura donc valeur de vote sur l'ensemble de la proposition de résolution.

Vote sur l'article unique

    M. le président. Je mets aux voix l'article unique de la proposition de résolution.
    (L'article unique de la proposition de résolution est adoptée.)
    M. le président. En conséquence, l'Assemblée a adopté la proposition de résolution.

Constitution de la commission d'enquête

    M. le président. Afin de permettre la constitution de la commission d'enquête dont l'Assemblée vient de décider la création, MM. les présidents des groupes voudront bien faire connaître, conformément à l'article 25 du règlement, avant le mardi 25 mars 2003, à dix-sept heures, le nom des candidats qu'ils proposent.
    La nomination prendra effet dès la publication de ces candidatures au Journal officiel.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures dix.)

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POSTE ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

Discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi modifiant l'article 1-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications (n°s 677, 691).
    La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le président, monsieur le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, mesdames, messieurs les députés, la présentation de ce court projet de loi me donne l'occasion de faire avec vous le point sur la situation de France Télécom et la mise en oeuvre du plan d'action adopté par l'entreprise et le Gouvernement en décembre dernier.
    France Télécom est désormais engagée, de façon énergétique et déterminée, sur la voie du redressement.
    Les comptes de l'année 2002, publiés par France Télécom le 5 mars dernier, marquent un tournant pour l'entreprise. Tout d'abord, ils soldent le passé. L'ampleur de la perte nette - 20,7 milliards d'euros - s'explique par les provisions et amortissements exceptionnels liés aux acquisitions malheureuses et mal menées réalisées dans le passé. Mais ces comptes préparent aussi l'avenir. La performance opérationnelle de l'entreprise est remarquable. Avec 6,8 milliards d'euros, le résultat d'exploitation est en hausse de 30,9 % par rapport à l'année précédente.
    Au cours des derniers mois, sous l'impulsion décisive de son nouveau président, Thierry Breton, et de ses équipes, et grâce à l'action méthodique, experte et résolue du Gouvernement, France Télécom a repris son avenir en mains. Le Gouvernement a, en effet, désigné le 2 octobre dernier un nouveau président, en lui donnant pour mission de rétablir la situation financière de l'entreprise en restaurant la confiance.
    Sur proposition de Thierry Breton, le conseil d'administration a approuvé deux mois plus tard, après un audit approfondi, un plan d'action global qui comporte trois volets équilibrés.
    Le premier concerne l'amélioration des performances de l'entreprise, afin de dégager 15 milliards d'euros de trésorerie supplémentaire d'ici à fin 2005. Ce programme porte déjà ses fruits puisque la progression des résultats s'est accélérée fin 2002.
    Le deuxième a trait au refinancement de la dette, pour au moins 15 milliards d'euros. Il a déjà été mené à bien, puisque France Télécom a pu retourner sur les marchés pour lever en décembre 2002 et janvier 2003 plus de 9 milliards d'euros à moyen et long terme ; les lignes bancaires ont, par ailleurs, été renégociées. France Télécom a ainsi retrouvé une visibilité financière jusqu'à la fin de l'année 2004.
    Le troisième et dernier volet vise à renforcer les fonds propres à hauteur de 15 milliards d'euros. L'Etat s'est engagé à faire son devoir d'actionnaire en souscrivant à hauteur de sa part dans le capital, soit 9 milliards d'euros. L'opération sera réalisée lorsque les conditions de marché le permettront ; en ayant sécurisé son financement, France Télécom pourra choisir le moment opportun.
    Les marges seront dégagées par une gestion plus intégrée du groupe, une réduction des dépenses de fonctionnement et d'investissement, et une meilleure maîtrise des besoins de trésorerie du groupe. Ce plan est ambitieux, mais il est réaliste et il intègre d'indispensables marges de sécurité.
    La mobilisation de l'ensemble de l'entreprise, salariés et dirigeants, autour de ces objectifs a déjà permis de rétablir son image auprès des investisseurs. Elle sera déterminante pour le succès du plan d'action. Nous avons pleinement confiance en Thierry Breton, en l'équipe de direction largement renouvelée, et dans le dynamisme de l'ensemble des personnels de France Télécom pour mener ce projet à la réussite.
    Dans le cadre de ce plan, France Télécom a mis en place une politique de mobilité des personnels, fondée sur le volontariat.
    A ce propos, je vous informe que le Gouvernement a décidé de confier à M. Bertrand Maréchaux la mission « mobilité France Télécom » dont le principe avait été annoncé par Francis Mer le 5 décembre dernier. Elle aura pour but de satisfaire le mieux possible, en liaison avec la direction, les souhaits exprimés par les fonctionnaires de cette entreprise qui souhaiteront poursuivre leur carrière au sein des fonctions publiques. L'ensemble de ces mesures permettra de rendre plus flexible la gestion des effectifs et de contribuer à la compétitivité de l'opérateur.
    Grâce à cet effort, France Télécom mérite le soutien de ses actionnaires, au premier rang desquels figure l'Etat.
    Le plan d'action présenté par Thierry Breton offre des perspectives de retour sur investissement. L'entreprise ne demande pas à ses actionnaires d'éponger un passif, mais de l'aider à retrouver un bilan équilibré, dans leur propre intérêt. Aussi, l'Etat participera-t-il au renforcement des fonds propres de 15 milliards d'euros, en souscrivant à hauteur de sa part dans le capital de France Télécom, soit un investissement de 9 milliards d'euros.
    Cette somme considérable ne doit pas être minimisée par son expression en euros, puisqu'elle se monte à 59 milliards de francs. Elle représente donc un réel effort de la collectivité nationale en faveur de France Télécom. Mais, d'une part, c'est une somme à la mesure de la très grande entreprise qu'est devenue France Télécom, dont la marge d'exploitation pour la seule année 2002 représente 1,6 fois ce montant ; d'autre part, il ne s'agit pas d'une dépense à fonds perdus. En souscrivant au renforcement des fonds, l'Etat défend son propre intérêt patrimonial dans l'entreprise.
    Ainsi, cet investissement ne pèsera pas sur les déficits publics dans la mesure où il devrait en effet avoir la qualification d'« opération financière » en comptabilité européenne, laquelle est sans impact sur le déficit au sens du traité de Maastricht. Il ne modifie pas non plus l'équilibre budgétaire présenté par le Gouvernement pour l'année 2003.
    La réalité de l'effort fourni par le contribuable et la collectivité nationale se traduira dans la dette publique. L'endettement nécessaire au renforcement des fonds propres sera retracé dans le solde de la dette des administrations publiques qui devrait augmenter de 0,6 % du PIB en 2003.
    Par ailleurs, cet effort est nécessaire et répond à l'intérêt patrimonial et financier de l'Etat. La confiance des investisseurs dans le plan d'action de France Télécom a été démontrée par le redressement de son cours de bourse, qui a été multiplié par trois par rapport aux cours les plus bas enregistrés cet automne ainsi que par la capacité de l'entreprise à placer ses emprunts obligataires. Cette attitude des investisseurs ne peut que conforter l'Etat, actionnaire majoritaire, dans son soutien à la stratégie de l'entreprise.
    Le 25 février dernier, l'assemblée générale de France Télécom a donné au conseil d'administration l'autorisation de procéder à une augmentation du capital de l'entreprise lorsque les conditions lui paraîtront réunies.
    L'entreprise a indiqué que, compte tenu des moyens financiers dont elle disposait, trois périodes étaient envisageables pour réaliser l'opération : avant l'été 2003, à l'automne 2003 ou au printemps 2004. Le Gouvernement souhaite qu'elle se déroule en tenant le plus grand compte des actionnaires individuels et salariés.
    En participant au renforcement des fonds propres de France Télécom à hauteur de sa part au capital, l'Etat agit en « investisseur avisé » au regard des règles communautaires.
    La Commission européenne a été pleinement informée du plan de redressement de France Télécom et des modalités de l'intervention de l'Etat, actionnaire majoritaire. Le Gouvernement a précisé que, dans le plan proposé par Thierry Breton, l'Etat s'en tenait strictement au rôle d'« actionnaire avisé », soucieux de défendre ses intérêts patrimoniaux. D'autres Etats membres de l'Union européenne, actionnaires de leur opérateur historique de télécommunications, n'ont pas agi différemment lorsque leurs entreprises ont été confrontées aux mêmes besoins en fonds propres que France Télécom. Cela a notamment été le cas de KPN aux Pays-Bas et de Sonera en Finlande.
    Le 30 janvier dernier, la Commission européenne a décidé d'ouvrir une procédure d'enquête formelle sur la participation de l'Etat au plan d'action de France Télécom et sur le régime de taxe professionnelle applicable à l'entreprise. Cette procédure ne préjuge en rien de la qualification d'aide d'Etat et ne retarde pas le plan d'action de l'entreprise. Il est tout à fait normal que nous ayons à justifier nos choix vis-à-vis des autorités européennes, même si nous pensons que notre dossier ne laisse pas de doute quand au respect des règles communautaires.
    La réalisation d'un investissement aussi exceptionnel nécessitait des dispositions d'organisation particulières, que le Gouvernement a prises, dans un souci d'efficacité et de transparence. C'est ainsi que pour être en mesure de suivre en toute transparence l'évolution dans le temps de cet investissement le Gouvernement a fait le choix de confier l'ensemble des titres détenus par l'Etat dans le capital de France Télécom à une structure juridique distincte. Pour ce faire, l'ERAP, établissement public industriel et commercial, a vu ses statuts modifiés pour lui permettre de détenir des participations dans le secteur des télécommunications. Votre assemblée et le Sénat lui ont accordé, dans la loi de finances rectificative pour 2002, la garantie explicite de l'Etat pour les emprunts qu'il contractera afin de participer au renforcement des fonds propres de France Télécom.
    Ainsi, sans que les relations entre l'Etat et France Télécom s'en trouvent autrement modifiées, l'établissement public portera à la fois la dette nécessaire au renforcement des fonds propres de France Télécom et les titres de l'entreprise. Il sera ainsi possible de suivre, au fil du temps, le produit et le coût de l'investissement de la collectivité nationale dans France Télécom.
    Le projet de loi qui vous est soumis, mesdames, messieurs les députés, marque une étape importante dans le processus qui permettra à l'Etat de transférer à l'ERAP l'ensemble des titres France Télécom qu'il détient, et, le moment venu, à l'ERAP de souscrire au renforcement des fonds propres de France Télécom.
    Pour être en mesure d'y participer, l'ERAP a commencé à préparer un programme d'emprunts dont le premier a été lancé la semaine dernière. Leur remboursement sera financé par des produits de cession de titres détenus par l'Etat et, à plus long terme, après le succès du plan de redressement, par la cession de titres France Télécom.
    En conclusion, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, cette nouvelle étape du plan d'action pour France Télécom est un exemple de la politique que le Gouvernement entend mener vis-à-vis des entreprises dont l'Etat est actionnaire. Le Gouvernement s'attache à poursuivre avec ces entreprises une action déterminée, préparée et conduite de manière professionnelle, en assumant toutes ses responsabilités. Je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
    M. Jean Proriol, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà donc un projet de loi minuscule pour un problème gigantesque : ce projet minuscule, car il ne tend qu'à ajouter deux mots dans la loi, la conjonction de coordination « ou » et l'adverbe « indirectement ». Mais le problème est gigantesque, car il s'agit de la dette de France Télécom, 68 milliards d'euros, un record absolu en la matière. Les conditions dans lesquelles le « minuscule » et le « gigantesque » s'articulent sont un peu complexes. Nous connnaissons bien, maintenant, les circonstances dans lesquelles cette dette de 68 milliards d'euros s'est constituée. Le groupe France Télécom a été amené à participer à la très rapide restructuration du secteur des technologies de l'information au cours des années 1999-2001, par des acquisitions d'entreprises et par des prises de participations qu'il a dû payer en s'endettant, car il n'avait pas la possibilité, comme d'autres entreprises, d'offrir en échange ses propres titres.
    En effet, France Télécom était tenue de respecter la limite de la détention par l'Etat d'une part égale à au moins 50 % de son capital, limite qui lui a été imposée par la loi de 1990, et que nous ne changeons pas.
    Ce vaste ensemble d'opérations industrielles a pris parfois des dimensions financières très importantes, comme ce fut le cas avec l'achat d'Orange à Vodaphone en mai 2000, l'acquisition qui a coûté environ 50 milliards d'euros. Au total, ce sont près de 100 milliards d'euros qui ont été investis par le groupe France Télécom pour sa politique de développement industriel durant ces années de rapides évolutions technologiques, et 80 % ont été payés en cash. Certes, France Télécom a fait appel à l'Etat français, son actionnaire de référence, mais le Gouvernement de l'époque lui a opposé un refus et lui a conseillé de s'endetter, d'où la situation actuelle. Le service de la dette qui en résulte représente aujourd'hui une charge d'environ 4 à 5 milliards d'euros par an.
    Comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, le nouveau président, Thierry Breton, a présenté, le 5 décembre dernier, un plan pour assurer le redressement de l'entreprise. Ce plan comporte un volet d'économies de quinze milliards sur les trois ans à venir jusqu'en 2005. Au vu des comptes présentés récemment pour l'année 2002, il se révèle assez réaliste car l'entreprise montre une véritable capacité de rebond - elle dégage un résultat d'exploitation de 6,8 milliards d'euros, en augmentation de 30 % par rapport à 2001, ce qui lui permet largement de faire face au service de la dette, et même de dégager un résultat avant impôts, amortissements et provisions de 2,2 milliards d'euros. Si le résultat net s'établit néanmoins à un déficit de 20,7 milliards d'euros, c'est là pour l'essentiel l'effet du niveau très élevé des provisions exceptionnelles passées en 2002, à hauteur - tenez-vous bien ! - de 18,3 milliards d'euros. Ce niveau très élevé des provisions traduit l'échec de certaines des opérations industrielles que j'ai évoquées, notamment celles décidées dans les années 1999 à 2001, comme l'achat d'Orange ou les prises de participation dans l'entreprise allemande MobilCom et dans l'entreprise britannique du câblo-opérateur NTL.
    S'il est normal qu'une entreprise subisse parfois des revers, car c'est là la contrepartie obligée de la prise de risque économique, il est normal aussi de s'interroger sur les conditions dans lesquelles les investissements ont été décidés lorsque les revers atteignent des niveaux aussi considérables. Je rappelle que la commission d'enquête sur la gestion des entreprises publiques a pour rôle d'examiner le contexte dans lequel ces décisions, pour le moins désastreuses pour France Télécom, ont été prises. Heureusement, le passage de provisions pour les échecs industriels ne s'effectue qu'une fois et ce lourd résultat net négatif de 2002 va « libérer », en quelque sorte, les marges opérationnelles de l'entreprise pour l'avenir. Mais, parmi les mesures de redressement annoncées le 5 décembre 2002 par Thierry Breton, figure aussi une augmentation de capital de 15 milliards d'euros. Et ce volet du plan de redressement de France Télécom nous ramène à notre minuscule projet de loi.
    En effet, compte tenu de la part que l'Etat possède dans le capital de France Télécom, à savoir nominalement 55,4 % ce qui fait une part effective de près de 60 % des droits de vote en tenant compte des 8,5 % d'autocontrôle, l'Etat devrait logiquement contribuer à hauteur d'environ 9 milliards d'euros à l'augmentation de capital. Cette participation de l'Etat, à hauteur de sa part de capital, dans un processus de marché aux cotés d'autres investisseurs, est conforme au principe de l'« investisseur avisé » à l'aune duquel s'apprécie la compatibilité de ce genre de situation avec l'article 87, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne, qui interdit les aides publiques « qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence ». Ce principe signifie que la participation de l'Etat doit être telle que, dans des circonstances similaires, un investisseur privé aurait été amené à procéder à des apports de capitaux de la même importance, eu égard notamment aux informations disponibles et aux évolutions prévisibles à la date desdits apports.
    Pour ne laisser aucun doute à ce sujet, le Gouvernement a décidé de confier la gestion de la participation de l'Etat dans France Télécom à un établissement holding public à caractère industriel et commercial en l'occurrence l'ERAP : c'est une entreprise de recherche et d'activité pétrolière, mais elle a depuis longtemps abandonné ses recherches sur le territoire métropolitain faites de ressources à produire ou à trouver.
    M. Alain Cousin. Hélas !
    M. Jean Proriol, rapporteur. Hélas pour la France et l'Aquitaine, surtout !
    Ce transfert permettra une séparation comptable claire de toutes les opérations entre France Télécom et son actionnaire public et assurera de ce fait une très grande transparence de celles-ci. L'ERAP a une longue pratique de la gestion des participations de l'Etat dans les entreprises. Elle a géré jusqu'en 1996 le capital détenu par l'Etat dans Elf, puis les participations de l'Etat dans des entreprises du secteur nucléaire comme la COGEMA et AREVA, depuis la restructuration du secteur nucléaire français en septembre 2001. AREVA regroupe depuis cette date les anciennes activités de la COGEMA, de Framatome et de CEA-Industrie. Elle est détenue majoritairement - à hauteur de 79 % - par le CEA et seulement à hauteur de 3,2 % par l'ERAP. Aujourd'hui, l'ERAP gère cette petite participation dans AREVA, pour un montant total de 236 millions d'euros.
    Dès lors que l'ERAP aura récupéré la gestion de la part de l'Etat dans France Télécom, la contribution publique à l'augmentation de capital, qui sera ultérieurement décidée par France Télécom, pourra s'effectuer, avec toute la transparence nécessaire, selon la règle de « l'investisseur avisé ». La mise en place du dispositif devant permettre à France Télécom de bénéficier du concours de l'ERAP s'est en fait effectuée en trois temps.
    Tout d'abord, le décret du 2 décembre 2002 a modifié celui du 17 décembre 1965 portant organisation administrative et financière de l'ERAP, afin de permettre à l'ERAP de prendre des participations dans des entreprises appartenant au secteur des télécommunications.
    Ensuite, l'article 80 de la loi de finances rectificative pour 2002 a accordé à l'ERAP, pour ses futurs emprunts contractés dans le cadre de son soutien d'actionnaire à France Télécom, le bénéfice, en principal et intérêts, de la garantie de l'Etat dans la limite de 10 milliards d'euros en principal. Cette garantie est rendue indispensable par le fait que l'ERAP n'a pas d'activité industrielle visible et reconnue, puisqu'il ne s'agit que d'une structure de portage financier, employant tout au plus cinq personnes, dirigée par Mme Anne Duthilleul-Chopinet.
    Enfin, le présent projet de loi sur la modalité de détention par l'Etat du capital social de France Télécom constitue le troisième volet juridique de la préparation de l'augmentation de capital, puisqu'il modifie l'article 1-1 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, afin de permettre une détention « indirecte » par l'Etat de la majorité du capital de France Télécom.
    M. le président. Il vous faut conclure, monsieur le rapporteur.
    M. Jean Proriol, rapporteur. Ce texte vise donc uniquement à permettre à l'Etat de transférer à l'ERAP, établissement public national à caractère industriel et commercial, l'intégralité de sa participation dans le capital de France Télécom, afin de participer, le cas échéant, à une augmentation de capital dans des conditions respectueuses du droit européen, conformément au plan d'action annoncé par le Gouvernement le 5 décembre 2002.
    Si le Gouvernement a décidé de traiter la question avec ce minuscule projet de loi, c'est pour faire vite et mettre ainsi le plus rapidement possible l'entreprise France Télécom en position de profiter d'une évolution de la Bourse pour lancer, à une date qui sera sans doute dévoilée au dernier moment afin d'éviter la spéculation, l'opération d'augmentation de capital dont elle a besoin pour assainir sa situation financière.
    Jacques Attali écrivait, dans un article de L'Express du 19 septembre 2002 intitulé « La quatrième voie » : « Les entreprises publiques concurrentielles ne doivent pas être placées sous la tutelle des ministres, mais sous celle d'une instance spécifique chargée des seuls intérêts patrimoniaux de l'Etat. Pour y parvenir, il conviendrait de regrouper l'ensemble des participations concurrentielles de l'Etat dans une ou plusieurs sociétés publiques d'investissement. Ironie du temps, il appartient à un gouvernement libéral de mettre en pratique une réforme que la gauche aurait dû oser. » (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Gilbert Biessy.
    M. Gilbert Biessy. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté, aussi concis soit-il, institue une adaptation structurelle et fonctionnelle du service public de la poste et des télécommunications. L'enjeu est réel.
    Certes, nous ne pouvons que souscrire à la démarche consistant à faire participer l'Etat, à hauteur de sa part dans le capital, au renforcement des fonds propres de France Télécom, en tant qu'entreprise publique. Cette opération vise effectivement à renforcer l'équilibre financier de l'opérateur historique, sans que la participation publique au capital soit remise en cause. De plus, cette participation financière de l'Etat par le biais de l'ERAP, EPIC détenu à 100 % par l'Etat, permet d'éviter une condamnation quasi certaine de la part des institutions communautaires dans le cas où l'Etat aurait agi directement.
    A ce propos, permettez-moi d'exprimer notre stupéfaction face à une situation qui interdit à la France, Etat souverain jusqu'à nouvel ordre, d'agir librement dans une matière aussi sensible et cruciale que les services publics en général et la poste en particulier. Cet état de fait est d'autant plus dommageable que le droit communautaire est régi par les dogmes de la libre concurrence et du libéralisme économique. De tels postulats idéologiques se traduisent, plus que jamais, par des contraintes juridiques qui déterminent des options politiques nationales rimant avec processus de privatisation des entreprises publiques, déréglementation du secteur public et atteinte au statut des personnels des services publics.
    De fait, un certain nombre d'interrogations se font jour à propos de ce projet de loi qui peut paraître anodin au premier abord. Je commencerai par une question qui, aussi dérangeante soit-elle pour le Gouvernement, doit être posée : le déficit financier de France Télécom n'est-il pas une preuve flagrante de l'échec des stratégies de privatisation et de déréglementation qui font partie de vos credo et dogmes favoris ?
    De même, n'est-il pas temps que l'Etat, au nom de l'intérêt général, et comme il est de sa responsabilité, se montre plus attentif aux options d'investissement choisies par les dirigeants de nos entreprises publiques ? N'a-t-on rien retenu de l'épisode désastreux du Crédit lyonnais ?
    France Télécom a été victime en l'occurrence de choix stratégiques plus que douteux, destinés à satisfaire les marchés boursiers, mais qui furent finalement sanctionnés par ces mêmes marchés. L'entreprise, qui est un des fleurons de l'ensemble industriel et technologique national, s'est retrouvée piégée par des fluctuations boursières provoquées uniquement par l'appât du gain à très court terme.
    Les investissements en cause, à l'origine d'un trou financier béant, n'ont profité ni aux usagers du service public des télécommunications ni à son personnel. Au contraire, ce mouvement a conduit notamment à des attaques très rudes contre la majorité des salariés des services publics en matière de stabilité de l'emploi, de salaires et de conditions de travail. France Télécom fait à nouveau la « une » de l'actualité. Après le social et les colonies de vacances des enfants des agents cet été, c'est maintenant une attaque en règle contre les accueils du public et l'emploi.
    Depuis l'ouverture du capital, l'exploitant s'est lancé dans une course à la rentabilité effrénée guidée par des choix politiques dont personnels et usagers paient les conséquences : hausse de l'abonnement du fixe, tarifs des mobiles élevés, couverture insuffisante du territoire, files d'attente qui s'allongent, délais de réponse interminables, suppression de points de paiement, de facturation et d'accueil pour les uns, dégradation du quotidien du travail pour les autres, emplois supprimés, donc charge de travail accrue, mauvaises conditions de travail avec élargissement d'horaires et management par le stress, restructurations permanentes et filialisations de services, sous-traitance, y compris du commercial, casse du secteur associatif.
    Ces stratégies ont déstabilisé et fragilisé France Télécom, dont les principales victimes sont aussi bien les personnels de l'entreprise publique dont la situation se trouve précarisée que nous tous, en tant que citoyens, car France Télécom demeure un « bien commun » de la collectivité.
    Il est évident que les entreprises publiques, comme les services publics, ont besoin de se transformer. Les données technologiques évoluent, modifiant les conditions d'exploitation. L'environnement social et institutionnel se transforme, laissant apparaître de nouveaux besoins.
    Les problèmes de financement deviennent aigus. Tout statu quo devient problématique. Mais il faut débattre des finalités des évolutions avant de vouloir imposer telle ou telle solution.
    L'objectif est de faire évoluer les entreprises publiques non seulement pour qu'elles répondent mieux aux besoins des populations d'aujourd'hui, mais aussi pour qu'elles les anticipent au travers d'une politique de développement et d'investissement.
    Le pays a été privé dans la dernière période d'une véritable confrontation, qui lui avait permis d'élaborer globalement, pour les services publics en réseau, les grandes lignes d'une politique d'évolution et de développement. Quand elle a eu lieu, comme ce fut le cas pour le transport ferroviaire, la question des moyens financiers a été occultée. Or, dans une démocratie moderne, les usagers et les salariés doivent disposer de droits de proposition et de décision.
    C'est aux usagers d'exprimer leurs besoins et aux populations de choisir en toute connaissance et transparence. Ils ont le droit de voir leurs attentes discutées et d'avoir une information claire sur le coût, la sécurité, les risques et avantages des différentes solutions. C'est à ce stade que les salariés concernés ont leur mot à dire.
    Madame la ministre, si l'objet du projet de loi était de conforter le capital de l'entreprise publique, il aurait été susceptible de recueillir notre assentiment. Mais l'accepter, c'est souscrire à tous les enjeux qu'il sous-entend. M. le ministre Francis Mer a clairement annoncé, le 4 décembre 2002, au soir du conseil d'administration de France Télécom - et il l'a confirmé le 5 décembre -, qu'« une loi serait nécessaire pour qu'ERAP puisse recevoir l'ensemble des participations de l'Etat, et ultérieurement une loi de privatisation lui permettra, le cas échéant, de descendre en dessous de 50 % du capital par des cessions d'actifs ».
    Le premier étage a été l'avance de 9 milliards d'euros pour renforcer les fonds propres de l'entreprise par l'ERAP. L'objectif final est la recapitalisation, dès que le marché le permettra. Le deuxième étage sera le transfert de l'intégralité du capital vers l'ERAP. Le troisième étage sera peut-être la privatisation totale de France Télécom.
    Les véritables intentions du Gouvernement sont claires, madame la ministre. Vous comprendrez que pour toutes ces raisons notre groupe votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Cousin.
    M. Alain Cousin. Madame la ministre, chers collègues, ce projet de loi constitue un aménagement technique de la loi du 2 juillet 1990 destinée à sauver France Télécom d'une situation financière extrêmement dégradée, résultat de la politique du précédent gouvernement, faite d'inertie et de passivité, et qui a débouché sur une destruction de valeur pour l'actionnaire et pour l'Etat.
    Le cas de France Télécom est étroitement lié à l'échec du nombre d'opérations industrielles menées dans le cadre de stratégies d'expansion internationale, qui entraînent de lourdes provisions pour dépréciation d'actifs. Il semble que ces stratégies d'expansion aient été motivées par la recherche de l'effet de taille, sans prise en compte réaliste et sérieuse des coûts, ce qui a pu conduire la précédente direction de France Télécom à d'incontestables erreurs stratégiques.
    La dégradation financière de France Télécom est à elle seule considérable. L'opérateur public des télécommunications affiche un endettement de 68 milliards d'euros, soit sept fois celle d'Eurotunnel et cinq fois la facture du Crédit lyonnais. De telles comparaisons sont intéressantes.
    M. François Brottes. Cela n'a rien à voir !
    M. Alain Cousin. Le cas de France Télécom révèle en outre un grave problème de gouvernance des entreprises publiques. Acquisition d'une licence UMTS sans évaluation du rapport qualité-prix, rachat d'Orange au prix fort, participations prises dans la société britannique NTL et la société allemande MobilCom : autant de défaillances du système décisionnel au niveau du conseil d'administration.
    Le précédent gouvernement a failli dans son rôle de tutelle. Responsabilité des dirigeants, inconsistance du contrôle, passivité de l'Etat actionnaire : tels sont, en partie, les facteurs du désastreux bilan financier de France Télécom en 2002, que la commission d'enquête parlementaire sur la gestion des entreprises publiques, conformément à sa mission, tâchera de mettre en lumière.
    Le groupe de près de 121 000 salariés est contrôlé par l'Etat à hauteur d'un peu plus de 56 %. Fin 2001, il comptait 92 millions de clients dans le monde, dont 40 % hors de France.
    Contrairement à son aspect réduit, ce projet de loi doit permettre à France Télécom de profiter le plus rapidement possible d'une évolution favorable de la Bourse. L'entreprise sera alors armée pour lancer une augmentation de capital, dont la date sera dévoilée au dernier moment pour éviter la spéculation et une chute supplémentaire de la valeur du titre.
    La situation financière de France Télécom est extraordinairement dégradée : pour 2002, la perte nette a été de 20,7 milliards d'euros, la plus importante jamais enregistrée pour une entreprise française, malgré une progression continue de ses résultats opérationnels. Le bénéfice d'exploitation a en effet augmenté de 30,9 % sur l'année, avec 6,9 milliards d'euros, connaissant une accélération notable au second semestre. Le résultat brut d'exploitation a enregistré une hausse de 21 %, avec 14,9 milliards d'euros. Cette perte nette est imputable à un montant record de provisions exceptionnelles pour dépréciation d'actifs d'un montant de 18,3 milliards d'euros, qui permettent de solder les 100 milliards d'euros d'acquisitions réalisées en trésorerie jusqu'en 2000.
    La dette totale est évaluée à 68 milliards d'euros. Il convient de souligner que l'entreprise avait procédé à environ 100 milliards d'euros d'achats entre 1999 et 2001, dont près de 80 % ont été payés en cash, situation originale par rapport aux autres opérateurs européens.
    L'endettement net de France Télécom a été très fortement augmenté, de 14,5 milliards d'euros début 2002 à plus 60 milliards d'euros en 2001. Au 30 juin 2002, il atteignait près de 70 milliards d'euros. Le cours de l'action a chuté de 191 euros en mars 2000 à 10,63 euros en septembre 2002, et a connu une plongée de 75 % pour la seule année 2002.
    Lors de son audition, le 5 septembre 2002, par la commission des finances de l'Assemblée nationale, Thierry Breton a estimé que les résultats nets du groupe pour 2002 devraient être négatifs de 18 à 20 milliards d'euros, soit un peu plus du double de ce que nous avions connu en 2001.
    Quelles sont les causes de cette situation financière catastrophique ?
    La première provient d'un problème de gestion stratégique. France Télécom a poursuivi une politique de croissance externe qui l'a conduit à multiplier les acquisitions : 46,5 milliards d'euros pour l'acquisition d'Orange, 7,3 milliards d'euros pour une participation dans NTL, 3,8 milliards d'euros pour une participation dans Mobilcom, 2,5 milliards d'euros pour Freeserve, 4 milliards d'euros pour Equant et de multiples start-up, toutes surévaluées. Sans compter les 32,5 milliards d'euros programmés pour l'achat d'une licence UMTS et ramenés à 4 milliards d'euros à la suite des premières difficultés de l'opérateur.
    Deuxième cause : les opérations ont essentiellement été réglées en cash. France Télécom n'a pas financé ses acquisitions par des échanges de titres mais en s'endettant sur les marchés. Les réductions de valeur portées au bilan de l'entreprise sont autant de pertes pour l'actionnaire et pour le contribuable au travers de la participation de l'Etat dans le capital de la société.
    Troisième cause : la détention majoritaire du capital par l'Etat qui a poussé France Télécom à réaliser des opérations financières hasardeuses. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a réaffirmé que tout en « apportant aujourd'hui son soutien à France Télécom, l'obligation juridique d'une détention majoritaire du capital de l'entreprise a été l'une des causes de la crise financière actuelle ».
    Venons-en au processus de sauvetage de France Télécom, fondé sur un plan en trois phases, le plan « Top » de redressement de l'entreprise publique 2003-2005, destiné à réduire la dette et à renforcer les fonds propres. Il prévoit un rééchelonnement de la dette obligataire pour 15 milliards d'euros, une augmentation de capital pour 15 milliards d'euros, et un plan d'économies en interne pour 15 milliards d'euros.
    Pour information, le refinancement par emprunt auprès des branches et des marchés financiers est déjà effectué pour un montant de 15 milliards d'euros.
    Thierry Breton a précisé que pour 2003 le groupe espérait dégager jusqu'à 30 milliards d'euros de liquidités. France Télécom compte sur 6 milliards de liquidités dont elle dispose déjà, additionnés aux 9 milliards de l'Etat. A cela s'ajouteraient 6 milliards d'émissions obligataires et 2 milliards environ que l'opérateur pense pouvoir obtenir des cessions en cours.
    Trois étapes juridiques doivent permettent l'augmentation du capital. Premièrement, le décret du 2 décembre 2002 autorise l'ERAP, dont la nature est essentiellement pétrolière, à prendre des participations dans des entreprises appartenant au secteur des télécommunications. Deuxièmement, l'article 80 de la loi de finances rectificative pour l'année 2002 accorde la garantie de l'Etat dans la limite de 10 milliards d'euros. Cette garantie a été rendue indispensable par le fait que l'ERAP n'avait pas d'activités industrielles visibles et reconnues, étant donné qu'il ne s'agissait que d'une structure de portage financier employant à peine cinq personnes. Troisièmement, le présent projet de loi permet à l'Etat de détenir indirectement une partie du capital de France Télécom, puisqu'il détient 100 % du capital d'ERAP.
    Il fallait définir un cadre destiné à la future augmentation de capital de France Télécom. Le projet de loi permet le transfert de l'intégralité de la participation de l'Etat de France Télécom - à savoir 55,4 % - vers l'ERAP, établissement public industriel et commercial détenu à 100 % par l'Etat. Jusqu'à présent, la loi Quilès du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ne prévoyait une détention de la majorité du capital de France Télécom par l'Etat que directement, sans structure intermédiaire. Le projet de loi permet donc la détention du capital de France Télécom de manière directe « ou indirecte », via l'ERAP.
    Cette augmentation de capital doit évidemment s'effectuer dans des conditions de transparence complètes afin de respecter le cadre fixé par la Commission européenne pour l'utilisation des aides d'Etat aux entreprises. L'Etat doit se comporter en investisseur avisé, c'est-à-dire que les aides auxquelles il procède doivent intervenir dans des conditions similaires à celles qu'aurait pu effectuer un investisseur privé. Cette règle passe, notamment, par une séparation comptable entre l'Etat et la structure qui apportera les capitaux à France Télécom.
    A défaut, la Commission aurait pu enclencher une procédure « d'aide d'Etat » à l'encontre de la France et imposer des restructurations à Paris. Bruxelles, de son côté, a indiqué attendre la notification exacte du plan de sauvetage de France Télécom, avant de se prononcer sur sa validité, au regard de la législation européenne en matière de concurrence.
    Il n'y aura pas de dilution de l'Etat actionnaire dans le capital de France Télécom. Une augmentation de capital consiste à émettre des actions pour faire appel aux investisseurs privés et renforcer les fonds propres de l'entreprise. Une telle opération diminue la part de capital détenue par les actionnaires préexistants. Ici, l'augmentation de capital sera effectuée à due proportion de la part détenue par l'Etat dans le capital de France Télécom. Auparavant, l'ERAP aura recours aux marchés obligataires pour procéder à l'augmentation de capital qui doit rapporter 15 milliards d'euros. En d'autres termes, l'ERAP empruntera 9 milliards d'euros pour souscrire 9 milliards d'euros d'actions mises sur le marché.
    Enfin, je voudrais parler brièvement de l'avenir opérationnel de France Télécom. Le retour de l'entreprise à une situation financière saine dépendra de l'amélioration de ses performances opérationnelles sur la période 2003-2005, qu'il s'agisse de la rentabilité retrouvée de ses investissements que du plan d'économies tirées de sa restructuration. En d'autres termes, France Télécom devra se recentrer sur ses actifs principaux, le mobile, le fixe, l'internet et les services aux entreprises.
    Dans l'immédiat, le déploiement de l'UMTS sera décalé d'un ou deux ans. De même, le groupe devrait, selon toute vraisemblance, geler sa politique de recrutement jusqu'à 2003, mais il n'y aura aucun licenciement sec. Les investissements diminueront de 10 % l'année prochaine.
    Voilà, madame la ministre, toutes les bonnes raisons qui conduisent le groupe UMP à soutenir le projet de loi que vous nous soumettez aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. François Brottes.
    M. François Brottes. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à écouter l'argumentation du Gouvernement, nous avons rendez-vous aujourd'hui avec le pragmatisme : une idée simple, un texte court, « minuscule », pour reprendre le mot du rapporteur, une solution juridique qui semble s'imposer naturellement pour pouvoir mettre en oeuvre l'engagement de l'Etat dans France Télécom dans les meilleures conditions, eu égard aux règles communautaires en vigueur.
    Le contexte entourant ce projet de loi est connu de tous, même si nous n'en faisons pas tous la même analyse. France Télécom est une très belle entreprise publique. Son savoir-faire est depuis longtemps à la pointe d'une innovation technologique, issue des investissements de la recherche publique. Sa capacité à prendre une part active dans la réussite des transferts de technologie entre la recherche et l'industrie est à l'origine de plusieurs projets industriels d'envergure. Je citerai pour exemple le site de Crolles II et ses deux mille emplois, tout récemment inauguré par le Président de la République. Ce site, qui rassemble ST Microelectronic, Philips et Motorola, doit en grande partie son avènement à la complicité conjointe du CEA Leti et de France Télécom.
    Son personnel a un esprit de service remarquable, et c'est son éthique du service public qui lui donne aujourd'hui une notoriété et une réputation qui rendent France Télécom proche de tous les Français. Son niveau d'excellence dans les métiers du téléphone fixe, du mobile, ou du haut débit, lui permet d'afficher une croissance significative à laquelle M. Mer a récemment rendu hommage. Il a en effet rappelé dans cet hémicycle que France Télécom a affiché cette année un chiffre d'affaires en croissance de 8 %, un résultat d'exploitation qui augmente de 21 % et un résultat avant pertes exceptionnelles de 2,2 milliards. Son rayonnement international, dont on a beaucoup parlé, lui permet d'être désormais un opérateur à part entière, alors qu'une stratégie de repli sur soi l'aurait amenée à n'être qu'un sous-traitant de capacités de transport de télécommunications et, de surcroît, n'aurait pas permis l'émergence de nouveaux opérateurs. Rappelons-le, c'est d'abord France Télécom qui a assumé tous les risques du développement des nouvelles techniques de communications dans notre pays.
    Bien sûr - certains ont la mémoire courte -, il y a eu la bulle spéculative, qui a fait tourner la tête à tous les opérateurs. Mais fallait-il attendre que la raison revienne pour prendre position sur les nouveaux marchés ? Là est la question. En tout cas, ni le caractère public, ni la particularité nationale ne sont à l'origine des difficultés actuelles, puisque Vivendi ou Deutsche Telekom, par exemple, battent les records de France Télécom en matière d'endettement, n'en déplaise aux détracteurs patentés de notre opérateur historique. C'est d'ailleurs pourquoi le terme de « record absolu » utilisé par le rapporteur est tout à fait impropre. Mais je n'épiloguerai pas sur ce point...
    Bien sûr, il y eu l'inconséquence de la Commission européenne dans la « non-gestion » du dossier de l'UMTS, le téléphone de troisième génération. Celle-ci a en effet permis à tous les pays d'Europe de se lancer dans le délire d'une surenchère de l'attribution des licences pour engranger des recettes budgétaires exceptionnelles et opportunes, mais totalement en rupture avec la réalité des marchés potentiels. Dans ce déferlement d'inconscience, seule la France a fait preuve de sang-froid et de responsabilité, malgré la pression de plusieurs députés de droite - dont certains sont devenus ministres - qui trouvaient que l'Etat ne vendait pas assez cher ses licences UMTS. J'espère bien que, parmi les membres de la commission d'enquête constituée sur le sujet au sein de notre Assemblée, les pompiers pyromanes en question seront identifiés... En tout cas, je saurai le rappeler.
    Bien sûr, il y a eu le poids, énorme, de la régulation par l'ART - décidée dans la loi de 1996 par la même majorité qu'aujourd'hui -, où le jeu consiste à pénaliser au maximum l'opérateur historique pour mieux laisser le champ libre aux opérateurs entrants. De là à dire que certains d'entre eux se sont contentés de jouer les prédateurs sur le dos de l'opérateur historique...
    M. Jean Besson. Ce n'est pas vrai !
    M. François Brottes ... il n'y a qu'un pas, que je n'ose franchir car je suis, par ailleurs, vice-président de la commission d'enquête sur le loup, prédateur lui aussi protégé. (Sourires.)
    Bien sûr, il aurait peut-être fallu ne pas libérer France Télécom de l'obligation de soumettre toute acquisition à l'étranger à l'accord préalable de l'Etat. Mais n'est-ce pas un ancien Premier ministre, proche de la majorité actuelle, qui a coupé ce lien ?
    En tout état de cause, au-delà des mauvais procès où chacun veut réécrire l'histoire à sa façon - en se disant que si on avait su qu'après, ce ne serait pas tout à fait ce qui avait été prévu avant, les décisions prises auraient été tout autres - au-delà donc de ces considérations parfois dignes du café du commerce, force est d'admettre que France Télécom a déjà, dans la durée, plus rapporté à l'Etat que l'effort qui est demandé à l'Etat pour mener à bien le plan préconisé par Thierry Breton, le nouveau président de France Télécom.
    Ces préalables étant rappelés, j'en viens, madame la ministre, à votre projet de loi, qui permet à l'Etat de transférer à l'ERAP, établissement public national à caractère industriel et commercial, l'intégralité de sa participation dans le capital de France Télécom et de participer, le cas échéant, à une augmentation de celui-ci, conformément au plan d'action annoncé le 5 décembre dernier.
    Notons au passage que ce plan a un caractère strictement financier et que le volet social en est absent alors que, par touches successives, des décisions lourdes sont prises dans ce domaine, mais je conçois avec vous que là n'est pas le sujet d'aujourd'hui.
    Pour conclure, je voudrais vous dire que le groupe socialiste déterminera son vote en fonction des réponses que vous voudrez bien apporter aux questions que je vais maintenant vous poser.
    Avec ce blanc-seing que nous donnons à l'Etat pour faire détenir indirectement ses parts dans France Télécom par un intermédiaire, en l'occurrence l'ERAP, comment nous donner la certitude qu'au-delà d'une mesure de bon sens, il ne s'agit pas d'un tour de passe-passe pour échapper aux dispositions législatives en vigueur ? Sûrement, madame la ministre, en nous apportant des précisions utiles qui vaudront engagement du Gouvernement.
    Première question : même si, techniquement, le passage par l'ERAP n'est en rien assimilable à une privatisation, l'ERAP pourra-t-il, au détour de sa participation à une augmentation de capital de France Télécom, contribuer à faire passer la part de l'Etat en dessous des 50 % du capital sans qu'il soit nécessaire de revenir devant le Parlement pour modifier la loi sur ce point ?
    Deuxième question : même si l'ouverture à la concurrence n'oblige pas à la privatisation - il faut toujours le rappeler - mais oblige seulement à la régulation, pourriez-vous sur le point d'un retrait éventuel de l'Etat, que nous ne souhaitons pas, du capital de France Télécom, nous repréciser les intentions du Gouvernement et dans quel délai il souhaite les mettre en oeuvre ?
    Troisième question : même si vous n'avez pas souhaité attendre les résultats de la commission d'enquête parlementaire sur la gestion des entreprises publiques pour installer la nouvelle Agence des participations de l'Etat, quelle sera la présence de l'Etat au conseil d'administration de France Télécom ? Si vous me répondez que c'est l'ERAP qui se substituera à l'Etat dans ce conseil d'administration, quel sera alors le contrôle de l'Etat sur cet établissement public à caractère industriel et commercial ?
    Quatrième question : même si je considère que la Commission européenne n'est pas étrangère à la tourmente spéculative qui a dévasté le secteur des télécoms il y a quelques mois, quelle sera la position de la Commission, toujours prête à donner des leçons, face au montage juridique que vous nous proposez ? Quelles seraient les conséquences d'une éventuelle requalification de « l'opération patrimoniale » en cours en une aide directe de l'Etat ?
    Cinquième et dernière question : la création de l'ERAP étant de niveau réglementaire, toute évolution de statut se fera par la même voie, en raison de la théorie de l'acte contraire, sans intervention préalable du Parlement ; dans ces conditions, quelles assurances avons-nous sur la pérennité de l'ERAP ? En cas de dissolution de l'établissement public par décret, quel sera le sort réservé à son patrimoine ? Enfin, quel contrôle parlementaire pourrons-nous exercer en cas de changement de vecteurs ?
    Je ne doute pas, madame la ministre, que vous avez pris bonne note de ces demandes de précisions qui doivent éclairer la représentation nationale, mais aussi les salariés et les autres actionnaires de France Télécom. Je vous remercie par avance des réponses précises que vous voudrez bien apporter à ces cinq interrogations. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, dernier orateur inscrit, au nom du groupe UDF.
    M. Philippe Folliot. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues. Je voudrais tout d'abord excuser mon collègue Jean Dionis du Séjour qui a eu un empêchement de dernière minute. Ce travail est le fruit de notre collaboration et vous ne serez pas surprise, madame la ministre, de retrouver dans mes propos des idées qui lui sont chères et que vous lui connaissez bien.
    Nous voici face à un projet de loi dont notre rapporteur, Jean Proriol, disait à juste titre qu'il était « minuscule dans sa forme, mais gigantesque dans sa portée ». Pour réformer en profondeur, nul besoin de texte pléthorique : le principe d'efficacité - le minimum de causes pour le maximum d'effets - inspire l'action pragmatique du Gouvernement et la vôtre, madame la ministre : je vous en félicite.
    Cela étant, puisque les marges d'amélioration du texte par les parlementaires sont considérablement réduites du fait même de sa brièveté, profitons de la discussion générale pour le resituer dans un cadre plus global, celui de l'avenir de France Télécom et de la politique gouvernementale dans le domaine, stratégique pour la nation, des télécommunications et des nouvelles technologies.
    Où va France Télécom ? Et que veut l'Etat, son actionnaire principal ? Ce sont finalement les deux seules questions qui vaillent dans notre débat.
    Où va France Télécom, d'abord ? C'est finalement une des deux questions que se posent ses 220 000 salariés, ses 1,6 million d'actionnaires et l'ensemble des contribuables français.
    Pour notre part, le plan d'action consistant en un renforcement des fonds propres de France Télécom est indiscutable. Quand on a 68 milliards d'euros de dettes, le seul moyen de rééquilibrer son compte de bilan et de recréer la confiance des marchés, c'est bien, pour les actionnaires actuels, et donc en premier lieu l'Etat, de remettre la main au portefeuille et d'amener des fonds propres. Nous approuvons donc sans réserves ce volet du plan Ambitions FT 2005.
    Le montage financier choisi par l'Etat pour remplir ses obligations d'actionnaire principal de France Télécom ne nous pose pas de problèmes. Nous le savons tous, le transfert de la participation de l'Etat dans France Télécom à un établissement public à caractère industriel et commercial, en l'occurrence l'ERAP, vise à rendre conforme aux règles européennes instituées par le Traité le renforcement des fonds propres de France Télécom par l'Etat à hauteur de 9 milliards d'euros. La démarche d'« investisseur avisé » mise en avant pour justifier cette procédure devrait permettre à l'Etat français d'être « euro-compatible », si l'on se réfère à l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes.
    Le groupe UDF et apparentés approuve donc le volet du plan Ambitions FT 2005 concernant le renforcement des fonds propres de France Télécom, de même qu'il approuve le mode opératoire choisi par le Gouvernement. Nous voterons sans réserve pour ce texte.
    Pour notre part, nous trouvons pour le moins déplacées les leçons que l'opposition nous donne à ce sujet. Il reviendra à la commission d'enquête parlementaire d'établir les responsabilités dans la constitution de la dette aberrante de France Télécom, qui menace aujourd'hui de l'étouffer, mais des questions peuvent déjà être posées. Dans la période 1999-2001, où était donc passé l'Etat actionnaire, dirigé par le gouvernement de la précédente majorité ? Quel contrôle a-t-il assuré sur le management de France Télécom ? La réponse est malheureusement claire : l'Etat actionnaire était le plus souvent... aux abonnés absents. Parfois même en imposant son idéologie archaïque, par exemple lorsqu'il dicte, en mai 2000, les modalités du rachat d'Orange par emprunt pour ne pas descendre en-dessous du seuil sacro-saint de 50 % de participation de l'Etat dans l'entreprise. L'Etat a failli à sa mission d'actionnaire majoritaire et cette faillite a coûté cher à la France.
    Ce soir, donc, nous ne nous cacherons pas derrière notre petit doigt, nous n'aurons pas peur de l'adverbe « indirectement » et, pour être encore plus précis, nous ne ferons pas d'une participation majoritaire de l'Etat dans le capital de France Télécom un tabou sacro-saint. Nous sommes prêts à une discussion sur ce sujet, pourvu qu'elle soit au service d'une politique d'avenir en ce qui concerne le secteur des NTIC au niveau national et en ce qui concerne plus précisément l'entreprise France Télécom.
    Cela dit clairement, le reste du plan Ambitions FT 2005 nous pose plus de problèmes.
    La pression mise sur l'opérationnel ne risque-t-elle pas de casser l'élan opérationnel confirmé par les brillants résultats de 2002, alors que la crise est d'abord financière et que, justement, les réponses financières sont très timides ? Nous rejoignons en cela l'avis émis par la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications.
    Nos réserves portent aussi sur le « troisième 15 » du plan France Télécom 2005, dit « 15 + 15 + 15 ». Il est étonnant, alors que la crise de France Télécom est d'abord une crise financière, que le volet concernant spécifiquement la dette se résume au seul réaménagement de 15 milliards d'euros sur une dette de 68 milliards. Nous avons bien pris note - et nous la soutenons - de la politique de management de France Télécom qui consiste à conserver l'intégrité du groupe telle qu'elle a été dessinée par Michel Bon, autour d'activités et de marques à la fois solides, connues et d'avenir, telles que France Télécom, Orange, Wanadoo et Equant. Nous avons plus de mal à comprendre pourquoi France Télécom, aujourd'hui en très grande difficulté financière, se refuse à explorer la piste de la séparation des réseaux et des services, à moins qu'il ne s'agisse de conserver un avantage concurrentiel difficilement compatible avec l'esprit des directives européennes que nous aurons bientôt à transposer.
    M. François Brottes. C'est faux !
    M. Philippe Folliot. Le groupe UDF et apparentés, lors de la discussion du budget des postes et télécommunications, s'était déjà exprimé en faveur de la vente du réseau par France Télécom soit à l'Etat, soit, mieux encore, à un ensemble de SEM régionales dont l'actionnariat pourrait rassembler l'Etat, les conseils régionaux et les conseils généraux. Cette solution présente à notre avis desavantages majeurs. La vente de son réseau ne pourrait-elle pas progressivement apporter à France Télécom une recette située entre 15 et 20 milliards d'euros, lui permettant de diminuer de manière décisive son endettement ?
    M. François Brottes. Ce n'est pas du chemin de fer !
    M. Philippe Folliot. Elle permettrait aussi la pratique d'une concurrence plus loyale, plus transparente et donc, au fin al, bénéfique pour l'ensemble des acteurs du secteur des télécoms. Enfin, elle permettrait aux collectivités locales de se mobiliser dans le cadre des nouvelles dispositions adoptées en première lecture de la loi pour la confiance dans l'économie numérique autorisant les collectivités territoriales à devenir opérateurs des télécoms afin d'atteindre l'objectif fixé par le Premier ministre dans le plan RESO 2007. Même si nous ne sous-estimons pas les difficultés de la solution proposée, nous demandons que le Gouvernement et le Parlement, en liaison avec l'entreprise, l'étudient sérieusement et le plus rapidement possible.
    Il importe maintenant, de manière urgente, de remettre de la cohérence entre le plan RESO 2007 et le plan Ambitions FT 2005. Ce qui nous est proposé ce soir, à savoir l'augmentation à terme des fonds propres de France Télécom de 15 milliards d'euros dont 9 en provenance de l'Etat, répond clairement à chacun de ces deux plans. Votre projet de loi, madame la ministre, aura donc tout notre soutien. A nous de montrer de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace, pour qu'il en soit de même au niveau du volet opérationnel et financier du plan Ambition FT 2005. Le groupe UDF et apparentés est prêt à prendre toute sa place au sein de la majorité présidentielle et à vos côtés pour accomplir cette tâche. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La discussion générale est close.
    La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord de vous remercier de l'intérêt que vous avez porté, au-delà de la brièveté du texte, à la situation de l'entreprise France Télécom ainsi qu'au secteur des télécommunications.
    Monsieur le rapporteur, vous avez très précisément rappelé la portée technique de ce texte ainsi que son insertion dans le calendrier d'actions qui nous a guidés depuis neuf mois en ce qui concerne France Télécom. Je voudrais, en particulier, souligner la pertinence de vos propos lorsque vous avez insisté sur le rôle de structure juridique de l'ERAP, qui ne modifie pas les relations entre France Télécom et l'Etat. Vous avez également insisté sur le souci d'efficacité et de transparence qui a, en effet, conduit le Gouvernement à choisir cet établissement public. Je vous remercie de votre appui à ce texte.
    En réponse aux remarques de M. Folliot, je veux souligner que les efforts propres de l'entreprise pour dégager elle-même une capacité de désendettement de 15 milliards d'euros d'ici à 2005 sont à la fois indispensables et réalistes.
    Ils sont indispensables parce que, sans un effort très significatif de France Télécom, la perspective de désendettement de l'entreprise ne serait pas suffisante et ne permettrait d'ailleurs pas de justifier un effort des actionnaires pour accompagner l'effort propre de l'entreprise.
    Ils sont réalistes parce que le plan repose avant tout sur une meilleure gestion opérationnelle du groupe et sur une réduction mesurée des charges de l'entreprise ainsi que des investissements.
    Enfin, monsieur Folliot, vous avez évoqué certaines hypothèses, comme la séparation des réseaux, où vous voyez une bonne solution pour France Télécom. Il me paraît important de vous préciser que le plan d'action de France Télécom a été arrêté après avoir examiné toutes les solutions avec l'appui de conseils, au sein de l'entreprise et après un bilan très détaillé. La solution de séparation que vous évoquez n'a finalement pas été retenue au terme de cette longue étude, notamment parce qu'elle ne crée pas de valeur additionnelle et que nous avons une grande ambition industrielle pour France Télécom, en tant que groupe intégré.
    En réponse à votre série de questions, monsieur Brottes, je précise que le choix de l'ERAP comme structure juridique pour accueillir les actions France Télécom ne change rien aux relations entre l'Etat et l'entreprise, comme l'a indiqué votre rapporteur. Le Gouvernement continuera donc d'assumer toutes ses responsabilités d'actionnaire vis-à-vis de l'entreprise, y compris, bien évidemment, en maintenant sa présence au sein du conseil d'administration.
    Le contrôle de l'Etat sur l'ERAP sera assuré, comme sur tout établissement public.
    Il est par ailleurs clair que, si la détention du capital par l'ERAP devait devenir inférieure à 50 %, cette décision serait soumise préalablement à votre assemblée. Le Gouvernement a indiqué, et je vous le confirme, que si une telle évolution s'avérait nécessaire à l'avenir dans l'intérêt stratégique de l'entreprise, il n'y ferait pas obstacle.
    A votre question sur la position des autorités européennes, je répondrai que la Commission vérifiera précisément les relations entre l'ERAP et France Télécom. L'Etat, via l'ERAP, souscrira, à hauteur de sa part, aux côtés d'autres investisseurs. C'est d'ores et déjà un fait puisque France Télécom a pu lever, depuis deux mois, près de 14 milliards d'euros. Voilà une preuve, s'il en faut une, du comportement d'investisseur avisé de l'Etat.
    Enfin, monsieur le député, il est bien évident que si l'ERAP venait d'aventure à être dissous, ce qui est pour le moins éloigné de notre préoccupation du jour, son patrimoine reviendrait à l'Etat, et donc les actions de France Télécom également. Mais encore une fois, cette hypothèse est évidemment totalement théorique.
    Je voudrais rassurer M. Biessy : non, l'objectif du Gouvernement n'est pas de nuire au personnel de France Télécom ni de constater l'échec de la politique européenne des télécoms. Nous voulons au contraire, dans l'intérêt des salariés, maintenir France Télécom comme un grand groupe industriel européen. Nous voulons lui donner aujourd'hui les moyens que le gouvernement précédent lui avait refusés hier.
    Enfin, monsieur Cousin, je vous remercie de l'analyse que vous avez faite de la situation et du plan d'action de France Télécom. Je puis vous dire que le Gouvernement partage pleinement votre analyse, ce qui l'a conduit à apporter son soutien au plan présenté par le président de l'entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. J'appelle maintenant l'article unique du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

Article unique

    M. le président. « Article unique. - Au premier alinéa de l'article 1-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, il est ajouté, après le mot : "directement, les mots : "ou indirectement. »
    Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
    (L'article unique du projet de loi est adopté.)

8

SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

    M. le président. J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une lettre m'informant qu'en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, plus de soixante sénateurs ont saisi le Conseil constitutionnel d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques.

9

DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

    M. le président. J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel communication de la décision du Conseil constitutionnel, rendue dans sa séance du 13 mars 2003, sur la loi pour la sécurité intérieure.

10

DÉPÔT D'UN RAPPORT
SUR UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 18 mars 2003, de M. Pascal Clément un rapport, n° 698, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de résolution de MM. Jean-Louis Debré, Jacques Barrot, Jean-Marc Ayrault, Hervé Morin et Alain Bocquet tendant à compléter le règlement de l'Assemblée nationale et à modifier ses articles 14, 50, 65, 91, 104 et 128 (n° 613).

11

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 14 mars 2003, de M. Jean-Claude Mignon un rapport d'information, n° 697, fait en application de l'article 29 du règlement au nom des délégués de l'Assemblée nationale à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sur l'activité de cette assemblée au cours de la première partie de sa session ordinaire de 2003.

12

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 18 mars 2003, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la protection de l'environnement en Antarctique.
    Ce projet de loi, n° 699, est renvoyé à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.

13

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
ADOPTÉES PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 14 mars 2003, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à étendre aux communautés d'agglomération créées ex nihilo le régime de garantie d'évolution de la dotation globale de fonctionnement des communautés d'agglomération issues d'une transformation.
    Cette proposition de loi, n° 696, est renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 18 mars 2003, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à autoriser le vote par correspondance électronique des Français établis hors de France pour les élections du Conseil supérieur des Français de l'étranger.
    Cette proposition de loi, n° 700, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

14

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Mercredi 19 mars 2003, à quinze heures, première séance publique :
    Questions au Gouvernement ;
    Discussion du projet de loi, n° 638, renforçant la lutte contre la violence routière :
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 689).
    A vingt et une heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt heures vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmissions

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, les textes suivants :

Communication du 13 mars 2003

N° E 2232. - Recommandation de décision du Conseil relative à une modification de l'article 10.2 des statuts du système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne (« statuts ») émanant de la BCE (6163/03).
N° E 2233. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures et procédures visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle (COM [2003] 46 final).
N° E 2234. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de l'accord de coopération scientifique et technologique entre la Communauté européenne et la République du Chili (COM  82 final).
N° E 2235. - Communication de la Commission concernant les relations entre la Communauté et les pays tiers dans le domaine de l'aviation. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la négociation et la mise en oeuvre d'accords relatifs à des services aériens entre les Etats membres et les pays tiers (COM [2003] 94 final).

NOTIFICATION D'ADOPTIONS DÉFINITIVES
D'ACTES COMMUNAUTAIRES

    Il résulte d'une lettre de M. le Premier ministre qu'ont été adoptés définitivement par les instances communautaires les textes suivants :

Communication du 18 mars 2003

N° E 1421 (COM [2000] 95 final). - Proposition de règlement du Conseil relatif au soutien à certaines entités mises en place par la Communauté internationale suite à des conflits, pour assurer soit l'administration civile transitoire de certaines régions, soit la mise en oeuvre des accords de paix (adoptée le 22 mai 2000).
N° E 1771 (9946/01 COPEN 28 COMIX 451). - Initiative du Royaume de Suède en vue de l'adoption de la décision déterminant les dispositions de la convention de 1995 relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne et de la convention de 1996 relative à l'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne, qui constituent un développement de l'acquis de Schengen conformément à l'accord concernant l'association de la République d'Islande et le Royaume de Norvège à l'application, la mise en oeuvre et le développement de l'acquis de Schengen : actes législatifs et autres instruments (adopté le 27 février 2003).
N° E 2011 (COM [2002] 221 final). - Proposition de règlement du Conseil établissant les concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains produits agricoles et prévoyant l'adaptation autonome et transitoire de certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la Lituanie (adoptée le 22 juillet 2002).
N° E 2012 (COM 227 final). - Proposition de règlement du Conseil établissant les concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains produits agricoles et prévoyant l'adaptation autonome et transitoire de certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la Lettonie (adoptée le 22 juillet 2002).
N° E 2030 (annexe 1) (COM [2002] 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. Volume 8. - Section VII. - Comité des régions (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 2) (COM 300). - Avant-projet de budget général de la Commission européenne pour l'exercice 2003. - Office européen de recrutement (OER). - Commission européenne. - Section III. - Commission. - Direction générale du budget. - Document de travail (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 3) (COM [2002] 300). - Avant-projet de budget général de la Commission européenne pour l'exercice 2003. - Etat général des recettes. - Commission européenne. - Section III. - Commission. - Direction générale du budget. - Document de travail (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 4) (COM 300) - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 7. - Section VI. - Comité économique et social européen (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 5) (COM [2002] 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 5. - Section IV. - Cour de justice (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 6) (COM 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 4. - Tome I. - Section III. - Commission (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 7) (COM 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 4. - Tome II. - Section III. - Commission (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 8) (COM [2002] 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 0. - Introduction générale (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 9) (COM 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 1. - A. - Financement du budget général. - B. - Etat général des recettes. - C. - Effectifs. - D. - Patrimoine immobilier (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 10) (COM [2002] 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 4. - Tome III. - Section III. - Commission. - Annexe I : recherche et développement technologiques. - Annexe II : emprunts et prêts garantis par le budget général. - Annexe III : espace économique européen. - Annexe IV : liste des lignes budgétaires ouvertes aux pays associés d'Europe centrale et orientale, à Chypre, à Malte et à la Turquie. - Annexe V : classification des crédits en dépenses obligatoires et en dépenses non obligatoires (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 11) (COM [2002] 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 6. - Section V. - Cour des comptes (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 12) (COM 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 9. - Section VIII. - Médiateur européen et contrôleur européen de la protection des données (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2030 (annexe 13) (COM [2002] 300). - Avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2003. - Volume 2. - Section I. - Parlement (adopté le 19 décembre 2002).
N° E 2038 (COM 342 final). - Proposition de règlement du Conseil relatif à un mécanisme de sauvegarde transitoire applicable aux importations de certains produits de la République populaire de Chine et modifiant le règlement (CE) n° 519/94 du Conseil relatif au régime commun applicable aux importations de certains pays tiers (en raison de l'accession de la Chine à l'OMC et du pouvoir donné à la Commission de modifier la liste des pays de l'annexe I) (adoptée le 3 mars 2003).
N° E 2063 (10507/02 ENFOPOL 103 COMIX 435). - Décision .../.../ JAI du Conseil relative à l'utilisation commune des officiers de liaison détachés par les autorités répressives des Etats membres. Initiative du Conseil : actes législatifs et autres instruments (adoptée le 27 février 2003).
N° E 2195 (COM [2003] 59 final). - Proposition de règlement du Conseil sur les mesures que la Communauté peut prendre au regard de l'effet combiné des mesures antidumping ou compensatoires et des mesures de sauvegarde (adoptée le 6 mars 2003).
N° E 2209 (5194/03 SIRIS 6 COMIX 17). - Décision du Conseil modifiant la décision 2000/265/CE établissant un règlement financier régissant les aspects budgétaires de la gestion par le secrétaire général adjoint du Conseil des contrats conclus par celui-ci, en tant que représentant de certains Etats membres, concernant l'installation et le fonctionnement de l'infrastructure de communication pour l'environnement Schengen, dénommée « Sisnet » : actes législatifs et autres instruments (adoptée le 27 février 2003).

Retraits ou caducité

    Il résulte d'une lettre de M. le Premier ministre, en date du 18 mars 2003, que sont devenus caducs les textes suivants :
N° E 2098 (SEC [2002] 981 final). - Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen : lettre rectificative n° 2 à l'avant-projet de budget 2003. - Section III. - Commission (adoptée le 19 décembre 2002).
N° E 2126 (SEC 1144 final). - Lettre rectificative n° 3 à l'avant-projet de budget 2003. - Section III. - Commission : communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen (dépenses agricoles, accords de pêche internationaux, excédent budgétaire 2002) (adoptée le 19 décembre 2002).
N° E 2146 (SEC [2002] 1286 final). - Lettre rectificative n° 4 à l'avant-projet de budget 2003. - Section I. - Parlement européen. - Section II. - Conseil. - Section III. - Commission. - Section IV. - Cour de justice. - Section V. - Cour des comptes. - Section VI. - Comité économique et social. - Section VII. - Comité des régions. - Section VIII a. - Médiateur européen. - Section VIII b. - Contrôleur européen de la protection des données : communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen (adoptée par procédure écrite achevée le 6 décembre 2002 avec vote négatif de la France le 19 décembre 2002).
N° E 198 (SEC [1993] 1985). - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de certains accords textiles entre la CEE et certains pays tiers (Azerbaïdjan, Géorgie, Kazakstan, Kyrghizistan, Turkménistan).
N° E 484 (COM [1995] 389). - Proposition de règlement du Conseil relatif à la mise en oeuvre d'une action spéciale de coopération financière en faveur de la Turquie.
N° E 746 (COM [1996] 584). - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement 2377/90 établissant une procédure communautaire pour la fixation des limites maximales de résidus de médicaments vétérinaires dans les aliments d'origine animale (adoption partielle : seul l'article 1er a été adopté au Conseil du 3 mars 1997).
N° E 1213 (COM [1998] 585). - L'information émanant du secteur public : une ressource clef pour l'Europe : Livre vert sur l'information émanant du secteur public dans la société de l'information.
N° E 1214 (COM [1999] 6). - Livre blanc sur le commerce : communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions.
N° E 1277 (COM  101). - Livre blanc : la modernisation des règles d'application des articles 85 et  86 du traité CE. - Programme de la Commission n° 99/027.
N° E 1296 (COM  396). - Livre vert. - La responsabilité civile du fait des produits défectueux.
N° E 1402 (COM [2000] 155). - Programme de travail de la commission pour 2000 : communication de la commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions.
N° E 1405 (COM [1999] 719). - Livre blanc sur la sécurité alimentaire.
N° E 1406 (COM  614). - La création du ciel unique européen : communication de la commission au Conseil et au Parlement européen.
N° E 1407 (COM  640). - Les transports aériens et l'environnement : communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions.
N° E 1408 (COM [2000] 154). - Objectifs stratégiques 2000-2005 « donner forme à la nouvelle Europe » : communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions.
N° E 1414 (COM  66). - Livre blanc sur la responsabilité environnementale.
N° E 1424 (COM  200). - Réforme de la Commission : Livre blanc. - Partie I et partie II : plan d'action.
N° E 1429 (COM  87). - Livre vert sur l'établissement dans l'Union européenne d'un système d'échange de droits d'émission des gaz à effet de serre.
N° E 1461 (COM [2000] 212). - La politique de développement de la Communauté européenne : communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen.
N° E 1497 (COM  379). - Agenda pour la politique sociale : communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions.
N° E 1546 (COM  494). - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil relatif au financement de la politique agricole commune ainsi que divers autres règlements concernant la politique agricole commune.
N° E 1560 (COM [2000] 580). - Les services d'intérêt général en Europe : communication de la Commission (2001/C 17/04).
N° E 1637 (COM  769). - Livre vert de la Commission : Vers une stratégie européenne de sécurité d'approvisionnement énergétique.
N° E 1679 (COM [2001] 28). - Programme de travail de la Commission pour 2001 : communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions.
N° E 1684 (COM 68). - Livre vert. - La politique intégrée de produits (environnement).
N° E 1696 (COM 88). - Livre blanc. - Stratégie pour la future politique dans le domaine des substances chimiques.
N° E 1711 (COM 135). - Livre vert sur l'avenir de la politique commune de la pêche.
N° E 1776 (COM [2001] 336). - Livre vert. - Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises.
N° E 1777 (COM 428). - Livre blanc sur la gouvernance européenne.
N° E 1858 (COM 536). - Livre vert. - Indemnisation des victimes de la criminalité.
N° E 1883 (COM 681). - Livre blanc de la Commission européenne. - Un nouvel élan pour la jeunesse européenne.
N° E 1901 (COM 620). - Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions : programme de travail de la Commission pour 2002.
N° E 1924 (COM [2001] 745). - Livre vert sur la révision du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil (concentrations).
N° E 2044 (COM [2002] 180). - Communication de la Commission : plan d'action communautaire en vue d'éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (pêche INN ou IUU).
N° E 2045 (COM 181). - Communication de la Commission relative à la réforme de la politique commune de la pêche PCP (calendrier de mise en oeuvre).
N° E 2046 (COM 186). - Communication de la Commission définissant un plan d'action communautaire pour l'intégration des exigences de la protection de l'environnement dans la politique commune de la pêche.
N° E 2073 (COM [2003] 72). - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un protocole additionnel d'adaptation des aspects commerciaux de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Pologne, d'autre part, pour tenir compte des résultats des négociations relatives à de nouvelles concessions agricoles réciproques entre les parties.
N° E 2075 (SEC [2002] 823 final). - Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen. - Lettre rectificative n° 1 à l'avant-projet de budget 2003. - Section III. - Commission (pêche). Caduque le 19 décembre 2002.

annexes au procès-verbal
de la 2e séance
du mardi 18 mars 2003
SCRUTIN (n° 130)


sur l'ensemble du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France.

Nombre de votants

497


Nombre de suffrages exprimés

495


Majorité absolue

248


Pour l'adoption

343


Contre

152

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (363) :     Pour : 316. - MM. Jean-Claude Abrioux, Bernard Accoyer, Manuel Aeschlimann, Jean-Paul Anciaux, René André, Philippe Auberger, François d'Aubert, Jean Auclair, Bertho Audifax, Edouard Balladur, Jean Bardet, François Baroin, Jacques Barrot, Mme Sylvia Bassot, MM. Patrick Beaudouin, Joël Beaugendre, Jean-Claude Beaulieu, Jacques Bénisti, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, André Berthol, Jean-Michel Bertrand, Xavier Bertrand, Gabriel Biancheri, Jérôme Bignon, Jean-Marie Binetruy, Claude Birraux, Étienne Blanc, Emile Blessig, Roland Blum, Jacques Bobe, Yves Boisseau, Marcel Bonnot, René Bouin, Roger Boullonnois, Gilles Bourdouleix, Bruno Bourg-Broc, Mmes Chantal Bourragué, Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard, Michel Bouvard, Ghislain Bray, Philippe Briand, Jacques Briat, Mme Maryvonne Briot, M. Bernard Brochand, Mme Chantal Brunel, MM. Michel Buillard, Yves Bur, Christian Cabal, Dominique Caillaud, François Calvet, Pierre Cardo, Antoine Carré, Gilles Carrez, Richard Cazenave, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, MM. Jean-Yves Chamard, Hervé de Charette, Jean-Paul Charié, Jean Charroppin, Jérôme Chartier, Roland Chassain, Luc-Marie Chatel, Gérard Cherpion, Jean-François Chossy, Dino Cinieri, Pascal Clément, Philippe Cochet, Georges Colombier, Mme Geneviève Colot, MM. François Cornut-Gentille, René Couanau, Édouard Courtial, Jean-Yves Cousin, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Charles Cova, Paul-Henri Cugnenc, Henri Cuq, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Claude Decagny, Christian Decocq, Jean-Pierre Decool, Bernard Deflesselles, Francis Delattre, Richard Dell'Agnola, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Yves Deniaud, Bernard Depierre, Léonce Deprez, Éric Diard, Jean Diébold, Michel Diefenbacher, Jacques Domergue, Renaud Donnedieu de Vabres, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Philippe Douste-Blazy, Guy Drut, Jean-Michel Dubernard, Philippe Dubourg, Gérard Dubrac, Jean-Pierre Dupont, Nicolas Dupont-Aignan, Mme Marie-Hélène des Esgaulx, MM. Christian Estrosi, Pierre-Louis Fagniez, Francis Falala, Yannick Favennec, Georges Fenech, Jean-Michel Ferrand, Alain Ferry, André Flajolet, Jean-Claude Flory, Nicolas Forissier, Jean-Michel Fourgous, Marc Francina, Mme Arlette Franco, MM. Yves Fromion, Claude Gaillard, Mme Cécile Gallez, MM. René Galy-Dejean, Daniel Gard, Jean-Paul Garraud, Daniel Garrigue, Claude Gatignol, Jean de Gaulle, Jean-Jacques Gaultier, Guy Geoffroy, Alain Gest, Jean-Marie Geveaux, Franck Gilard, Bruno Gilles, Georges Ginesta, Jean-Pierre Giran, Claude Girard, Maurice Giro, Claude Goasguen, Jacques Godfrain, François-Michel Gonnot, Jean-Pierre Gorges, François Goulard, Jean-Pierre Grand, Mme Claude Greff, MM. Jean Grenet, Gérard Grignon, François Grosdidier, Mme Arlette Grosskost, MM. Serge Grouard, Louis Guédon, Jean-Claude Guibal, Lucien Guichon, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Gérard Hamel, Emmanuel Hamelin, Joël Hart, Michel Heinrich, Pierre Hellier, Laurent Hénart, Michel Herbillon, Pierre Hériaud, Patrick Herr, Antoine Herth, Jean-Yves Hugon, Michel Hunault, Sébastien Huyghe, Denis Jacquat, Édouard Jacque, Christian Jeanjean, Yves Jego, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Marc Joulaud, Dominique Juillot, Didier Julia, Alain Juppé, Mansour Kamardine, Aimé Kergueris, Christian Kert, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Jacques Kossowski, Patrick Labaune, Marc Laffineur, Jacques Lafleur, Mme Marguerite Lamour, MM. Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lang, Pierre Lasbordes, Thierry Lazaro, Robert Lecou, Jacques Le Guen, Michel Lejeune, Dominique Le Mèner, Jean Lemiere, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Gérard Léonard, Jean-Louis Léonard, Jean-Antoine Leonetti, Arnaud Lepercq, Pierre Lequiller, Jean-Pierre Le Ridant, Céleste Lett, Édouard Leveau, Gérard Lorgeoux, Mme Gabrielle Louis-Carabin, MM. Daniel Mach, Richard Mallié, Jean-François Mancel, Thierry Mariani, Mme Muriel Marland-Militello, MM. Alain Marleix, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Mme Henriette Martinez, MM. Patrice Martin-Lalande, Alain Marty, Jacques Masdeu-Arus, Jean-Claude Mathis, Pierre Méhaignerie, Christian Ménard, Alain Merly, Denis Merville, Damien Meslot, Gilbert Meyer, Pierre Micaux, Jean-Claude Mignon, Pierre Morange, Mme Nadine Morano, MM. Jean-Marie Morisset, Georges Mothron, Étienne Mourrut, Alain Moyne-Bressand, Jacques Myard, Jean-Marc Nesme, Yves Nicolin, Hervé Novelli, Jean-Marc Nudant, Patrick Ollier, Dominique Paillé, Mme Françoise de Panafieu, M. Robert Pandraud, Mme Béatrice Pavy, MM. Jacques Pélissard, Bernard Perrut, Etienne Pinte, Michel Piron, Serge Poignant, Axel Poniatowski, Mme Josette Pons, MM. Daniel Poulou, Daniel Prévost, Christophe Priou, Jean Proriol, Didier Quentin, Michel Raison, Mme Marcelle Ramonet, MM. Éric Raoult, Jean-François Régère, Frédéric Reiss, Jean-Luc Reitzer, Jacques Remiller, Marc Reymann, Dominique Richard, Mme Juliana Rimane, MM. Jean Roatta, Camille de Rocca Serra, Mme Marie-Josée Roig, MM. Vincent Rolland, Jean-Marie Rolland, Philippe Rouault, Jean-Marc Roubaud, Michel Roumegoux, Martial Saddier, Francis Saint-Léger, Frédéric de Saint-Sernin, André Samitier, François Scellier, Bernard Schreiner, Jean-Marie Sermier, Georges Siffredi, Yves Simon, Jean-Pierre Soisson, Frédéric Soulier, Daniel Spagnou, Alain Suguenot, Mmes Michèle Tabarot, Hélène Tanguy, MM. Jean-Charles Taugourdeau, Guy Teissier, Michel Terrot, André Thien Ah Koon, Dominique Tian, Jean Tiberi, Georges Tron, Léon Vachet, Christian Vanneste, François Vannson, Mme Catherine Vautrin, M. Alain Venot, Mme Béatrice Vernaudon, MM. Jean-Sébastien Vialatte, René-Paul Victoria, François-Xavier Villain, Philippe Vitel, Gérard Voisin, Michel Voisin, Gérard Weber, Éric Woerth, Mme Marie-Jo Zimmermann et M. Michel Zumkeller
    Abstention : 1. - M. Lionnel Luca.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (148) :     Contre : 127. - Mme Patricia Adam, M. Damien Alary, Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mmes Claude Darciaux, Martine David, MM. Jean-Pierre Defontaine, Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, Jean-Louis Dumont, Jean-Paul Dupré, Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mme Catherine Génisson, MM. Joël Giraud, Jean Glavany, Gaétan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (32), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM. Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Mme Christiane Taubira, MM. Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 26. - MM. Jean-Pierre Abelin, Pierre Albertini, Gilles Artigues, Pierre-Christophe Baguet, François Bayrou, Christian Blanc, Bernard Bosson, Charles de Courson, Stéphane Demilly, Philippe Folliot, Gilbert Gantier, Francis Hillmeyer, Olivier Jardé, Yvan Lachaud, Jean-Christophe Lagarde, Jean Lassalle, Claude Leteurtre, Hervé Morin, Nicolas Perruchot, Jean-Luc Préel, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet, Rodolphe Thomas et Francis Vercamer.
Groupe communistes et républicains (21) :
    Contre : 20. - MM. François Asensi, Gilbert Biessy, Alain Bocquet, Patrick Braouezec, Jacques Brunhes, Mme Marie-George Buffet, MM. André Chassaigne, Jacques Desallangre, Frédéric Dutoit, André Gerin, Pierre Goldberg, Maxime Gremetz, Georges Hage, Mmes Muguette Jacquaint, Janine Jambu, MM. Jean-Claude Lefort, François Liberti, Daniel Paul, Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès.
Non-inscrits (11).
    Pour : 1. - M. Philippe de Villiers.
    Contre : 5. - Mmes Huguette Bello, Martine Billard, MM. Yves Cochet, Alfred Marie-Jeanne et Emile Zuccarelli.
    Abstention : 1. - M. Éric Jalton.

Mise au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    Mme Irène Tharin, qui était présente au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote, a fait savoir qu'elle avait voulu voter « pour ».

SCRUTIN (n° 131)


sur l'ensemble de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à modifier la loi du 20 janvier 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie.

Nombre de votants

498


Nombre de suffrages exprimés

486


Majorité absolue

244


Pour l'adoption

341


Contre

145

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (363) :     Pour : 330. - MM. Jean-Claude Abrioux, Bernard Accoyer, Manuel Aeschlimann, Jean-Paul Anciaux, René André, Philippe Auberger, François d'Aubert, Jean Auclair, Bertho Audifax, Mme Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Jean Bardet, Mme Brigitte Bareges, MM. François Baroin, Jacques Barrot, Mme Sylvia Bassot, MM. Patrick Beaudouin, Jean-Claude Beaulieu, Jacques Bénisti, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, André Berthol, Jean-Michel Bertrand, Xavier Bertrand, Jean-Yves Besselat, Jean Besson, Gabriel Biancheri, Jérôme Bignon, Jean-Marie Binetruy, Claude Birraux, Étienne Blanc, Emile Blessig, Roland Blum, Jacques Bobe, Yves Boisseau, Marcel Bonnot, René Bouin, Roger Boullonnois, Gilles Bourdouleix, Bruno Bourg-Broc, Mmes Chantal Bourragué, Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard, Ghislain Bray, Philippe Briand, Jacques Briat, Mme Maryvonne Briot, M. Bernard Brochand, Mme Chantal Brunel, MM. Michel Buillard, Yves Bur, Christian Cabal, Dominique Caillaud, François Calvet, Pierre Cardo, Antoine Carré, Gilles Carrez, Richard Cazenave, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, MM. Jean-Yves Chamard, Hervé de Charette, Jean-Paul Charié, Jean Charroppin, Jérôme Chartier, Roland Chassain, Luc-Marie Chatel, Gérard Cherpion, Jean-François Chossy, Jean-Louis Christ, Dino Cinieri, Pascal Clément, Philippe Cochet, Georges Colombier, Mme Geneviève Colot, MM. François Cornut-Gentille, Louis Cosyns, René Couanau, Édouard Courtial, Jean-Yves Cousin, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Charles Cova, Paul-Henri Cugnenc, Henri Cuq, Olivier Dassault, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Claude Decagny, Christian Decocq, Jean-Pierre Decool, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Francis Delattre, Richard Dell'Agnola, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Yves Deniaud, Bernard Depierre, Léonce Deprez, Éric Diard, Jean Diébold, Michel Diefenbacher, Jacques Domergue, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Philippe Douste-Blazy, Guy Drut, Jean-Michel Dubernard, Philippe Dubourg, Gérard Dubrac, Jean-Pierre Dupont, Nicolas Dupont-Aignan, Mme Marie-Hélène des Esgaulx, MM. Christian Estrosi, Pierre-Louis Fagniez, Francis Falala, Yannick Favennec, Georges Fenech, Jean-Michel Ferrand, Alain Ferry, André Flajolet, Jean-Claude Flory, Jean-Michel Fourgous, Marc Francina, Mme Arlette Franco, MM. Yves Fromion, Claude Gaillard, Mme Cécile Gallez, MM. René Galy-Dejean, Daniel Gard, Jean-Paul Garraud, Daniel Garrigue, Claude Gatignol, Jean de Gaulle, Jean-Jacques Gaultier, Guy Geoffroy, Alain Gest, Jean-Marie Geveaux, Franck Gilard, Bruno Gilles, Georges Ginesta, Jean-Pierre Giran, Claude Girard, Maurice Giro, Louis Giscard d'Estaing, Claude Goasguen, Jacques Godfrain, François-Michel Gonnot, Jean-Pierre Gorges, François Goulard, Jean-Pierre Grand, Mme Claude Greff, MM. Jean Grenet, Gérard Grignon, François Grosdidier, Mme Arlette Grosskost, MM. Serge Grouard, Louis Guédon, Jean-Claude Guibal, Lucien Guichon, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Gérard Hamel, Emmanuel Hamelin, Joël Hart, Michel Heinrich, Pierre Hellier, Laurent Hénart, Michel Herbillon, Pierre Hériaud, Patrick Herr, Antoine Herth, Philippe Houillon, Jean-Yves Hugon, Michel Hunault, Sébastien Huyghe, Denis Jacquat, Édouard Jacque, Christian Jeanjean, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Marc Joulaud, Alain Juppé, Mansour Kamardine, Aimé Kergueris, Christian Kert, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Jacques Kossowski, Patrick Labaune, Marc Laffineur, Jacques Lafleur, Mme Marguerite Lamour, MM. Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lang, Pierre Lasbordes, Thierry Lazaro, Robert Lecou, Marc Le Fur, Jacques Le Guen, Michel Lejeune, Dominique Le Mèner, Jean Lemiere, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Gérard Léonard, Jean-Louis Léonard, Jean-Antoine Leonetti, Arnaud Lepercq, Pierre Lequiller, Jean-Pierre Le Ridant, Céleste Lett, Édouard Leveau, Gérard Lorgeoux, Mme Gabrielle Louis-Carabin, MM. Lionnel Luca, Daniel Mach, Richard Mallié, Jean-François Mancel, Hervé Mariton, Mme Muriel Marland-Militello, MM. Alain Marleix, Alain Marsaud, Jean Marsaudon, Mme Henriette Martinez, MM. Patrice Martin-Lalande, Philippe Martin (51), Alain Marty, Jacques Masdeu-Arus, Jean Claude Mathis, Pierre Méhaignerie, Christian Ménard, Alain Merly, Denis Merville, Damien Meslot, Gilbert Meyer, Pierre Micaux, Jean-Claude Mignon, Pierre Morange, Mme Nadine Morano, MM. Pierre Morel-A-L'Huissier, Jean-Marie Morisset, Georges Mothron, Étienne Mourrut, Alain Moyne-Bressand, Jacques Myard, Jean-Marc Nesme, Jean-Pierre Nicolas, Hervé Novelli, Jean-Marc Nudant, Patrick Ollier, Dominique Paillé, Mme Françoise de Panafieu, M. Robert Pandraud, Mmes Béatrice Pavy, Valérie Pecresse, MM. Jacques Pélissard, Bernard Perrut, Christian Philip, Etienne Pinte, Michel Piron, Serge Poignant, Mme Bérengère Poletti, M. Axel Poniatowski, Mme Josette Pons, MM. Daniel Poulou, Daniel Prévost, Christophe Priou, Jean Proriol, Didier Quentin, Michel Raison, Mme Marcelle Ramonet, MM. Éric Raoult, Jean-François Régère, Frédéric Reiss, Jean-Luc Reitzer, Jacques Remiller, Marc Reymann, Dominique Richard, Mme Juliana Rimane, MM. Jérôme Rivière, Jean Roatta, Camille de Rocca Serra, Mme Marie-Josée Roig, MM. Vincent Rolland, Jean-Marie Rolland, Serge Roques, Philippe Rouault, Jean-Marc Roubaud, Michel Roumegoux, Max Roustan, Martial Saddier, Francis Saint-Léger, Frédéric de Saint-Sernin, André Samitier, François Scellier, Bernard Schreiner, Jean-Marie Sermier, Georges Siffredi, Yves Simon, Jean-Pierre Soisson, Michel Sordi, Daniel Spagnou, Alain Suguenot, Mmes Michèle Tabarot, Hélène Tanguy, MM. Jean-Charles Taugourdeau, Guy Teissier, Michel Terrot, Mme Irène Tharin, MM. André Thien Ah Koon, Jean-Claude Thomas, Dominique Tian, Jean Tiberi, Georges Tron, Léon Vachet, Christian Vanneste, François Vannson, Mme Catherine Vautrin, MM. Alain Venot, Jean-Sébastien Vialatte, René-Paul Victoria, François-Xavier Villain, Philippe Vitel, Gérard Voisin, Michel Voisin, Jean-Luc Warsmann, Gérard Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann et M. Michel Zumkeller.
    Abstention : 1. - M. Michel Bouvard.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (148) :
    Contre : 118. - Mme Patricia Adam, M. Damien Alary, Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mmes Claude Darciaux, Martine David, MM. Jean-Pierre Defontaine, Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, Yves Durand, Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Joël Giraud, Jean Glavany, Alain Gouriou, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (32), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Germinal Peiro, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, MM. Jean-Jack Queyranne, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM. Roger-Gérard Schwartzenberg, Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 10. - MM. Gilles Artigues, Gilbert Gantier, Yvan Lachaud, Jean Lassalle, Claude Leteurtre, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet et Francis Vercamer.
    Contre : 1. - M. Jean-Christophe Lagarde.
    Abstentions : 10. - MM. Jean-Pierre Abelin, Pierre-Christophe Baguet, Christian Blanc, Bernard Bosson, Stéphane Demilly, Francis Hillmeyer, Olivier Jardé, Maurice Leroy, Hervé Morin et Jean-Luc Préel.
Groupe communistes et républicains (21) :
    Contre : 21. - MM. François Asensi, Gilbert Biessy, Alain Bocquet, Patrick Braouezec, Jacques Brunhes, Mme Marie-George Buffet, MM. André Chassaigne, Jacques Desallangre, Frédéric Dutoit, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Pierre Goldberg, Maxime Gremetz, Georges Hage, Mmes Muguette Jacquaint, Janine Jambu, MM. Jean-Claude Lefort, François Liberti, Daniel Paul, Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès.
Non-inscrits (11).
    Pour : 1. - M. Philippe de Villiers.
    Contre : 5. - Mmes Huguette Bello, Martine Billard, MM. Yves Cochet, Alfred Marie-Jeanne et Emile Zuccarelli.
    Abstention : 1. - M. Éric Jalton.

Mise au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Claude Leteurtre et Francis Vercamer, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu « s'abstenir volontairement ».