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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 21 JUIN 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du vendredi 20 juin 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Réforme des retraites.  - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 7 (suite) «...»

Amendements de suppression n°s 4564 à 4570 : MM. Daniel Paul, Jean-Pierre Brard, Maxime Gremetz, président, Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. - Rejet.

Rappels au règlement «...»

MM. Pascal Terrasse, Maxime Gremetz, Denis Jacquat, le président.

Reprise de la discussion «...»

Amendement n° 5020 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Brard, Daniel Paul.
Sous-amendement n° 11228 de Mme Marie-George Buffet : MM. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles ; le rapporteur, le ministre. - Rejet du sous-amendement.
M. Jean-Marie Le Guen.
Adoption de l'amendement n° 5020. L'article 7 est ainsi rédigé et les amendements n°s 4557 à 4563 et 4571 à 4612 n'ont plus d'objet.
M. Maxime Gremetz.

Suspension et reprise de la séance «...»

M. le président.

Après l'article 7 «...»

Amendement n° 10830 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le ministre, Pascal Terrasse, Jean-Pierre Brard, Maxime Gremetz. - Adoption, par scrutin, de l'amendement n° 10830 modifié.

Article 8 «...»

MM. Pascal Terrasse, Denis Jacquat, Jean-Marie Le Guen, le ministre, Maxime Gremetz, Mme Muguette Jacquaint, MM. Daniel Paul, Julien Dray.
Amendements de suppression n°s 4613 à 4619 : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin.
Amendements identiques n°s 4620 à 4626 : MM. Maxime Gremetz, Jean-Pierre Brard, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin.
Amendements identiques n°s 4648 à 4654 : MM. Daniel Paul, le rapporteur, le ministre, Pascal Terrasse. - Rejet.
Amendement n° 13 rectifié de la commission des finances : MM. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances ; le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Brard. - Adoption de l'amendement n° 13, deuxième rectification.
Amendements n°s 3041 de M. Terrasse et 12 de la commission des finances : MM. Pascal Terrasse, le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz, Jean-Pierre Brard - Retrait de l'amendement n° 3041.
Amendement n° 3041 repris par M. Gremetz. - Rejet par scrutin.
Adoption de l'amendement n° 12.
M. Pascal Terrasse.

Suspension et reprise de la séance «...»

Amendements n°s 4634 à 4640 : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 10763 à 10769 : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 14 de la commission des finances : MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre, Mme Muguette Jacquaint. - Adoption.

Rappels au règlement «...»

MM. Maxime Gremetz, Jean-Marie Le Guen, le président.

Reprise de la discussion «...»

Amendements n°s 4627 à 4633 : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 4641 à 4647 : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
MM. Pascal Terrasse, le président.
Adoption de l'article 8 modifié.

Après l'article 8 «...»

Amendement n° 3153 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Marie Le Guen, Maxime Gremetz. - Adoption par scrutin.
Amendement n° 15 de la commission des finances : MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre. - Adoption par scrutin.
Amendement n° 3154 de la commission des affaires culturelles : MM. Denis Jacquat, le rapporteur, le ministre.
Sous-amendement n° 11229 du Gouvernement : M. Jean-Marie Le Guen.

Suspension et reprise de la séance «...»

MM. Jean-Marie Le Guen, Pascal Terrasse, Maxime Gremetz, Jean-Pierre Brard. - Adoption, par scrutin, du sous-amendement et de l'amendement.

Article 9 «...»

MM. Pascal Terrasse, Denis Jacquat, Maxime Gremetz, Pierre Cohen, Mme Muguette Jacquaint, MM. Christophe Caresche, Julien Dray, Jean-Pierre Brard.
M. Maxime Gremetz.

Suspension et reprise de la séance «...»

Amendements de suppression n°s 4655 à 4661 : M. Jean-Pierre Brard, Mme Muguette Jacquaint, MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire ; Julien Dray, le ministre des affaires sociales. - Rejet par scrutin.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Résolution adoptée en application de l'article 88-4 de la Constitution «...».
3.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

RÉFORME DES RETRAITES

Suite de la discussion,
après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant réforme des retraites (n°s 885, 898).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée aux amendements identiques n°s 4564 à 4570 à l'article 7.

Article 7

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 7 :
    « Art. 7. - L'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale est complété d'un alinéa ainsi rédigé :
    « La commission de compensation est consultée pour avis sur tout projet de modification des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale. Ces avis sont rendus publics. »
    Je suis donc saisi de sept amendements identiques, n°s 4564 à 4570, déposés par Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    L'amendement n° 4564 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4565 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4566 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4567 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4568 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4569 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4570 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 7. »
    La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, mes chers collègues, nous proposons de supprimer l'article 7 qui élargit les compétences de la commission de compensation à l'examen des mesures affectant les mécanismes de compensation. Cette commission ad hoc, présidée par un magistrat de la Cour des comptes, est actuellement composée de représentants des régimes et a pour mission de donner un avis consultatif sur les montants des transferts de compensation entre les régimes de sécurité sociale. L'exposé des motifs indique que les mécanismes de compensation démographique entre régimes de retraite seront réexaminés « à travers une concertation spécifique avec les partenaires sociaux » et, que l'objectif poursuivi est « la suppression » du dispositif de surcompensation.
    Dans son rapport pour 2002, la commission des comptes de la sécurité sociale estimait le montant des transferts de compensation pour la vieillesse à 5 047 millions d'euros pour 2002, et à 5 441 millions d'euros pour 2003. Cela permet d'observer l'ampleur des compensations, qui, une fois de plus, met en lumière le besoin de financement. Je l'ai déjà évoquée ce matin, mais on n'insistera jamais assez sur l'ampleur du manque à gagner dans ce domaine, du fait des dettes d'un certain nombre d'entreprises - des dettes patronales - à l'égard de nos systèmes de protection sociale. Je citais, monsieur le ministre, les exemples de la région havraise, où l'URSSAF du Havre fait état de 52 millions d'euros de dettes pour 2002, et de la Haute-Normandie, qui compte 320 millions d'euros de dettes pour une seule année. Il faut donc s'attendre à des difficultés, si l'on continue de cette manière-là.
    Certes, pour certains régimes se pose un problème démographique. Certes, le principe de compensation entre les régimes participe du principe de solidarité. Toutefois, toutes les mesures de compensation doivent donner lieu à la transparence, à un débat au Parlement, ce qui n'est pas envisagé par cet article.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour défendre l'amendement n° 4565.
    M. Jean-Pierre Brard. D'une certaine manière, l'article 7 est platonique.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Ah !
    M. Jean-Pierre Brard. En effet, on nous dit que « la commission de compensation est consultée pour avis sur tout projet de modification des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale, et que ces avis sont rendus publics ». Par ailleurs, dans l'exposé des motifs du projet de loi, on va un peu plus loin, puisqu'il est dit que « le Gouvernement s'est engagé à réexaminer les mécanismes de compensation démographique entre régimes de retraite, à travers une concertation avec les partenaires sociaux ». Mais ce sont des engagements, comme disait quelqu'un, qui n'engagent que ceux qui les entendent et ont la naïveté de les prendre en compte.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. C'est original !
    M. le président. Monsieur Dubernard, c'est M. Brard qui a la parole !
    M. Jean-Pierre Brard. M. Dubernard a fait une remarque tout à fait intéressante : non, ce n'est pas original, mais...
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Mea culpa !
    M. Jean-Pierre Brard. Non, nous sommes vendredi. Le mea culpa, c'est dimanche matin.
    M. Pascal Terrasse. A quelle heure ?
    M. Jean-Pierre Brard. Ça dépend si c'est la grand-messe ou l'office de sept heures.
    M. Robert Pandraud. M. Brard regrette de ne pas avoir été au séminaire !
    M. René Couanau. C'est le Vendredi saint !
    M. Jean-Pierre Brard. Je disais donc que les explications censées éclairer l'article 7 n'engagent à rien. Par contre, on sait ce qu'il en coûte actuellement. Le sujet a été abondamment évoqué ce matin. Ainsi, sauf erreur de ma part, les collectivités territoriales paient pour compenser les régimes de retraite des clercs de notaire.
    M. René Couanau. Encore les clercs ! C'est une obsession !
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, vous reconnaîtrez que j'ai beaucoup de mal...
    M. le président. Faites comme si vous n'entendiez pas, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Mais, moi, j'écoute tout le monde, et je souhaiterais d'ailleurs que le Gouvernement en fasse autant, parce que l'écoute est la condition préalable du dialogue.
    Comme cet article n'engage à rien, sauf à faire semblant, nous proposons de le supprimer ce qui allégera le texte et évitera de créer des illusions.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Il paraît que nous sommes fatigués : nous allons montrer que ce n'est pas vrai.
    M. Pascal Terrasse. On l'a lu dans la presse. On va montrer le contraire !
    M. le président. Nul ne peut penser que vous soyez fatigués.
    M. René Couanau. C'était écrit dans L'Humanité, page 10 ! (Sourires.)
    M. Pascal Terrasse. Ils veulent nous énerver !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je rappelle, pour que les choses soient claires, que, lorsque nous passons un accord, nous le respectons. Hier, on a demandé d'activer le mouvement et de passer sur plusieurs amendements afin de terminer l'examen de l'article 5 et de permettre que la séance soit levée à une heure du matin. En contrepartie, le président de l'Assemblée nationale a proposé que, ce soir, nos débats s'arrêtent à vingt heures. Aujourd'hui, on me dit que ce ne serait pas sûr. Il ne faut pas jouer comme ça : un accord est un accord. S'il est remis en cause par le président ou un autre, nous en tirerons toutes les conséquences et tous les enseignements.
    M. René Couanau. C'est comme à la SNCF : vingt heures, ou vingt et une heures ou vingt-trois heures !
    M. Maxime Gremetz. Je le dis très solennellement, sans menaces, nous avons tenu nos engagements et nous espérons que vous tiendrez les vôtres. Nous n'étions demandeurs de rien et nous ne le sommes toujours pas aujourd'hui.
    Quant aux accords dont la presse parle, ils ne concernent pas le groupe communiste et républicain. Nous avons déposé des amendements et nous les défendrons jusqu'aux derniers.
    M. le président. Monsieur Gremetz, je n'ai pas à prendre connaissance d'accords. Je préside de la manière la plus impartiale qui soit. Tel est mon rôle, et je m'y tiens.
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. Non, attendez !
    M. Pascal Terrasse. Il est de droit !
    M. le président. Terminons l'examen des amendements que le groupe des député-e-s communistes et républicains présente. Je vous donnerai la parole ensuite.
    M. Robert Pandraud. Il y a eu accord ou pas ?
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 4564 à 4570.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. La commission a rejeté ces amendements, jugeant que les dispositions de l'article 7 correspondent en fait à un progrès, en termes de transparence. Jusqu'à présent, en effet, bien qu'ils portent sur des sommes importantes, le mécanisme de la compensation et, a fortiori, celui de la surcompensation, qui a été évoquée à plusieurs reprises depuis le début de nos travaux, étaient trop obscurs.
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 4564 à 4570.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais d'abord rappeler à M. Brard qu'il n'y a pas de jour pour le mea culpa, pas plus que pour l'autocritique. Et, puisqu'il est question d'autocritique, je crois qu'il pourrait faire la sienne à propos de cet amendement, car, à l'évidence, l'article 7 apporte une amélioration à notre système en proposant une procédure plus claire, plus transparente, ce qui était bien nécessaire. Je souhaite donc le rejet de ces amendements.
    Quant à l'intervention de M. Gremetz, je voudrais, sans m'immiscer dans le fonctionnement de l'Assemblée, rappeler que, au terme de notre Constitution, c'est le Gouvernement qui est maître de l'ordre du jour.
    M. Jean-Claude Lefort. Ça, on l'avait compris !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Or le Gouvernement, qui a l'intention de faire examiner ce projet de loi dans des délais raisonnables et décents, eu égard à l'importance du sujet, prendra le cas échéant les décisions qui s'imposeront, si jamais la décence n'était pas respectée. Je veux dire par là qu'il faudra peut-être, à ce moment-là, siéger plus longtemps, notamment certains jours où cela n'était pas prévu.
    M. Maxime Gremetz. Nous le ferons avec plaisir, mais nous saurons à quoi nous en tenir sur les engagements pris !
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques n°s 4564 à 4570.
    (Les amendements ne sont pas adoptés.)

Rappels au règlement

    M. Pascal Terrasse. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse, pour un rappel au règlement.
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, Maxime Gremetz vient de laisser entendre que tel ou tel arrangement aurait été passé entre le groupe socialiste et le groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Je lis en effet dans la presse que certains députés seraient gagnés par la lassitude.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Nous ne sommes pas là pour commenter la presse !
    M. Pascal Terrasse. Je vais dire les choses le plus simplement et le plus clairement possible. Le groupe socialiste et le groupe UMP ont, en effet, conclu un arrangement qui porte essentiellement sur la discussion des articles : hier, Jacques Barrot a indiqué qu'il souhaitait abréger nos débats, invoquant le règlement de notre assemblée qui laisse au président le loisir de ne faire parler que deux députés sur chaque article. Nous nous sommes arrangés : ce ne sont plus vingt ou trente députés qui prendraient la parole les uns à la suite des autres, mais trois ou quatre par article. Cette décision, prise ce matin, a été mise en oeuvre. C'est le seul arrangement.
    Nous avons des amendements à soutenir et nous les soutiendrons un à un. Nous y passerons nos journées, nos nuits, nos week-ends, s'il le faut, mais nous serons présents dans l'hémicycle. Que les choses soient claires : il n'y a pas de députés fatigués. Nous sommes là pour défendre nos convictions et je ne peux permettre que tel ou tel ministre déclare à la presse que nous sommes « paumés, épuisés ». Je trouve cette attitude purement scandaleuse.
    M. le président. Vous démontrez en effet que vous êtes loin d'être fatigué.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. Robert Pandraud. Ça veut dire que Gremetz a raison !
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour un rappel au règlement.
    M. Maxime Gremetz. J'entends bien, monsieur le ministre, que le Gouvernement est responsable de l'ordre du jour. Mais je rappelle aussi que, d'après le règlement de l'Assemblée, ce n'est pas le ministre qui décide des jours où nous siégeons. Or j'ai bien indiqué qu'il s'agit d'un engagement pris par le président de l'Assemblée nationale et pas par le ministre. Hier, nous avons accepté de ne pas défendre certains amendements pour voter l'article 5 avant une heure du matin. M. Debré a dit que, comme les socialistes ne voulaient pas siéger samedi, jour de la Fête de la musique à laquelle ils souhaitaient participer, il proposerait au bureau que, pour les fonctionnaires et les députés qui sont là depuis le début de la semaine, nous terminions aujourd'hui à vingt heures. Cet engagement ne peut être remis en cause que par le bureau de l'Assemblée nationale, pas par le ministre.
    Quoi qu'il en soit, nous sommes frais et dispos. La majorité est un peu abattue, mais je le comprends, elle s'ennuie, c'est normal.
    M. le président. Monsieur Gremetz, tout le monde, dans l'hémicycle, est frais et dispos...
    M. René Couanau. A commencer par le président !
    M. le président. ... et vous venez d'en donner la preuve. Nous pouvons donc clore le débat sur ce sujet.
    La parole est à M. Denis Jacquat, qui va nous démontrer à son tour qu'il est frais et dispos.
    M. Denis Jacquat. Au nom de l'UMP, je tiens à indiquer que, ce matin, sous la présidence de François Baroin, il a été publiquement décidé de limiter le nombre d'inscrits, que ce soit pour le groupe communiste...
    M. Jean-Pierre Brard. Et républicain !
    M. Denis Jacquat. ... pour le groupe socialiste ou pour le nôtre.
    Un accord a été conclu et a parfaitement fonctionné ce matin. Je loue même publiquement le groupe communiste...
    M. Jean-Pierre Brard. Et républicain !
    M. Denis Jacquat ... qui, voyant l'unanimité qui se dégageait sur un article, a su retirer tous ses amendements.
    M. Jacques Barrot. Exactement !
    M. Denis Jacquat. Deuxièmement, je tiens à indiquer que, étant médecin de profession, j'ai vu, à midi, tous mes amis, avec le professeur Dubernard et Bernard Accoyer qui sont aussi médecins.
    Mme Muguette Jacquaint. En très bonne santé !
    M. Denis Jacquat. Jusqu'à nouvel ordre, le groupe UMP est à la disposition de l'Assemblée nationale vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
    M. le président. La conférence des présidents a déterminé les jours où nous siégeons : nous siégeons aujourd'hui et lundi. Il appartiendra à la conférence des présidents qui se réunira mardi prochain de décider si l'ordre du jour des jours suivants doit être modifié. Mais nous n'en sommes pas là et nous poursuivons notre débat.
    M. Jean-Claude Lefort. On finit donc à vingt heures ce soir !

Reprise de la discussion

    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, a présenté un amendement, n° 5020, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 7 :
    « I. - L'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « La commission de compensation est consultée pour avis sur tout projet de modification des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale. Ces avis sont rendus publics. »
    « II. - Dans l'avant-dernier alinéa de l'article L. 134-5 du code de la sécurité sociale, les mots : "par le dernier, sont remplacés par les mots : "à l'avant-dernier.
    « III. - A la fin de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 134-5-1 du code de la sécurité sociale, les mots : "au dernier alinéa de l'article L. 134-1 sont remplacés par les mots : "à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 134-1. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cet amendement est de coordination.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. J'indique que cet amendement est une réécriture de l'article 7 pour coordination et que son adoption aurait pour conséquence de faire tomber les amendements n°s 4557 à 4563 et 4571 à 4612. Je le signale avant le vote pour éviter que l'on puisse, par la suite, m'adresser des reproches qui ne seraient pas justifiés.
    M. Jean-Pierre Brard. Contre l'amendement, monsieur le président !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, contre l'amendement.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, il ne vous a pas échappé que des amendements de coordination ont souvent un effet déflagrateur. Je me souviens que, jeune député, alors que je défendais une série d'amendements sur la taxe d'habitation, destinés à établir un lien entre les revenus et la taxe d'habitation, M. Douyère a déposé subrepticement un amendement portant sur un point de détail et dont l'adoption a eu pour conséquence de faire tomber tous les miens.
    Quel est l'objet de l'amendement que vous avez défendu, monsieur Accoyer ? Tout simplement d'abréger la discussion. C'est une ruse. Mais moi je vous propose d'aller jusqu'au bout...
    M. Pascal Terrasse. De la nuit !
    M. Jean-Pierre Brard. ... de la démarche et et de proposer au nom de la commission, après l'avoir réunie, un amendement tendant à supprimer tous les articles, que, bien entendu, le Gouvernement pourrait ensuite rétablir en demandant une seconde délibération. Un tel procédé nous fera gagner encore plus de temps, mais ne donnera sans doute pas l'image d'une discussion ouverte. Vous rusez avec le règlement - ce que vous êtes les mieux placés pour faire - pour nous bâillonner.
    M. René Couanau. Allons ! Allons !
    M. Jean-Pierre Brard. Et cela n'est pas bien !
    Vous avez dit, monsieur Fillon, qu'il n'y pas d'heure pour faire son mea culpa ou son autocritique. C'est absolument vrai, et il n'est même pas nécessaire que le jour soit levé. (Sourires.) J'appartiens, quant à moi, à un courant de pensée qui avait pour tradition de faire l'autocritique... des autres. (Rires.) Vous avez cité hier M. Kataïev, un auteur du réalisme socialiste que je ne connaissais pas, mais j'observe, monsieur le ministre, que, alors que moi, j'ai renoncé à cette tradition perverse, vous, vous l'avez rachetée - sans doute en solde - pour la pratiquer à votre tour, ce qui fait de vous un apôtre du centralisme démocratique, qui a fait faillite ailleurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jérôme Rivière. C'était l'hommage du vice à la vertu !
    M. Jean-Marie Le Guen. Excellent !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Je me rends compte que le fait de ne pas avoir développé les raisons du dépôt et de l'adoption de cet amendement de coordination a fait naître - et j'en suis profondément affecté - un doute insupportable dans les rangs de nos collègues du groupe des député-e-s communistes et néanmoins républicains. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Claude Lefort. Pas « néanmoins » !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Je retire ce mot.
    Si cet amendement n'était pas adopté, le code de la sécurité sociale comporterait un certain nombre de références erronées après que l'article 8 aura été adopté. Il s'agit d'un véritable amendement de coordination, qui tire les conséquences d'un changement introduit dans ce code.
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, nous avions souhaité la suppression de l'article 7, mais la majorité l'a maintenu. Nous en prenons acte. Toutefois, soucieux de faire avancer les choses, nous proposons de sous-amender l'amendement n° 5020, d'autant que tout le monde s'accorde à dire que les sommes en jeu sont très élevées ; on parle de millions d'euros.
    M. René Couanau. De milliards !
    M. Daniel Paul. L'amendement prévoit que « la commission de compensation est consultée pour avis sur tout projet de modification des règles affectant les mécanismes de compensation entre régimes de sécurité sociale. Ces avis sont rendus publics ».
    Si ces avis sont rendus publics, pourquoi ne pas accepter de préciser que ceux-ci soient « transmis aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle bugétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux commissaires désignés par leurs groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat au sein des commissions sus-mentionnées ».
    Je considère, en effet, que ces différentes commissions méritent, de par les responsabilités qui sont les leurs, d'être destinataires de ces avis et de ne pas attendre qu'ils leur soient transmis par la presse.
    Il s'agit d'un sous-amendement de précision, qui reprend les termes de notre amendement n° 4599 et qui devrait recueillir l'accord de tous.
    M. le président. Je suis saisi d'un sous-amendement, n° 11228, présenté par Mme Buffet et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains et ainsi rédigé :
    « Dans le I de l'amendement n° 5020, après les mots : "Ces avis sont rendus publics, insérer les mots : "et transmis aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux commissaires désignés par leurs groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat au sein des commissions sus-mentionnées. »
    La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il vaudrait mieux écrire que ces avis sont transmis au Parlement, puisque les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat n'ont pas le même intitulé.
    M. le président. Pour des raisons de clarté, je propose que l'on s'en tienne au texte du sous-amendement n° 11228.
    Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 11228 ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La remarque de M. le président de la commission des affaires culturelles, est fondamentale.
    Bien entendu, ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission, puisqu'il vient d'être déposé en séance. Toutefois, à titre personnel, il ne me paraît pas possible de désigner de façon spécifique qui doit recevoir ces avis car cela impliquerait de rendre des arbitrages quelque peu délicats. Par ailleurs, si ces avis sont adressés au Parlement, il est bien évident que les présidents des deux assemblées en assureront la diffusion.
    Mme Muguette Jacquaint. Ce n'est pas nominatif !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. A titre personnel, le sous-amendement ne me paraît pas pouvoir être accepté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que celui de la commission : défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 11228.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5020, non sous-amendé.
    Il est adopté...
    M. Jean-Marie Le Guen. Non ! il n'est pas adopté !
    M. le président. Vous voulez que je vérifie, monsieur Le Guen ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Oui !
    M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5020, non sous-amendé, présenté par le rapporteur du texte et ayant recueilli un avis favorable du ministre, ...
    M. Jean-Marie Le Guen. Pendant que vous y êtes, dites-leur aussi ce qu'il faut voter, monsieur le président !
    J'aimerais savoir si le président de séance préside la séance ou le groupe de l'UMP - qui, lui, en tout cas, n'est pas dirigé !
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous n'avez pas la parole !
    M. Jacques Barrot. Je vous demande, monsieur Le Guen, de bien vouloir retirer vos propos insultants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Maire Le Guen. Non ! Je confirme !
    Je vous demande, monsieur le président,...
    M. le président. Monsieur Le Guen, je ne vous ai pas donné la parole !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... la parole pour un rappel au règlement.
    Je ne sache pas que vous ayez donné la parole à M. Barrot. Je demande à bénéficier des mêmes conditions que celui-ci. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Marie Geveaux et M. Jacques Le Guen. C'est pitoyable !
    M. Jérôme Rivière. C'est nul !
    M. Eric Raoult. On n'est plus à l'AJS, monsieur Le Guen !
    M. le président. Monsieur Le Guen, M. Barrot s'est levé,...
    M. Jean-Marie Le Guen. Il s'est réveillé !
    M. le président.  ... il s'est exprimé en une phrase, et c'est tout !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il est apparu très clairement, monsieur le président, que ce sont vos appels répétés et insistants sur l'origine des amendements qui ont suscité chez nos collègues un élan soudain, dont je les félicite, pour lever le bras et obtenir un nouveau comptage et que c'est à la suite de ma remarque que le président du groupe UMP s'est réveillé. (« Pitoyable ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5020.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé et les amendements n°s 4557 à 4563 et 4571 à 4612 tombent.
    M. Maxime Gremetz. Je demande la parole.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Ce qui vient de se passer est très grave et nous voulons réunir notre groupe pour en tirer les conséquences.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures trente, est reprise à quinze heures quarante.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Personne n'est fatigué, c'est une évidence. (Sourires.) Mais je souhaite que le débat, qui est difficile, se poursuive dans des conditions de sérénité comme il convient pour un débat de cette importance. Il me serait très désagréable de devoir rappeler en permanence que ces conditions sont fondamentales pour la qualité de nos travaux. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Après l'article 7

    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, a présenté un amendement, n° 10830, ainsi rédigé :
    « Après l'article 7, insérer l'article suivant :
    « I. - Les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale cessent d'être applicables au titre des exercices postérieurs au 1er janvier 2012. Les versements effectués à partir de l'exercice 2003 sont progressivement réduits à cette fin dans des conditions prévues par décret. »
    « II. - Les pertes de recettes pour les régimes d'assurance vieillesse sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cet amendement met fin au mécanisme de la compensation spécifique entre régimes spéciaux d'assurance vieillesse. En effet, ce mécanisme, tant dans son principe que dans ses effets financiers, fait l'objet de nombreuses critiques justifiées, notamment au sein du Conseil d'orientation des retraites. Le relevé de décisions du 15 mai 2003 a mentionné l'objectif d'une suppression de la surcompensation.
    Le taux d'application actuellement fixé à 30 % serait progressivement réduit de 3 % par an à compter de l'exercice 2003, jusqu'à devenir nul en 2012.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Sur le fond, le Gouvernement ne peut qu'être favorable à cet amendement car, comme le rapporteur vient de le rappeler, le principe de la suppression de la compensation spécifique est mentionné dans le relevé de conclusions du 15 mai. Il me semble toutefois un peu prématuré d'établir dès maintenant le calendrier de cette suppression, que nous n'avions d'ailleurs pas adopté dans le relevé de conclusions. Les intérêts financiers en jeu sont très importants et une discussion approfondie serait souhaitable au préalable. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Les propos de M. Fillon à l'instant me semblent différents de ceux tenus par M. Delevoye ce matin. En effet, celui-ci nous a expliqué que le dispositif de surcompensation devait être progressivement arrêté.
    Je le rappelle, nous sommes favorables à la compensation démographique à l'intérieur des régimes de retraite, cela permet d'obtenir les moyens nécessaires pour équilibrer les comptes de certains régimes. Dans le même temps, nous pensons que, s'agissant notamment de la CNRACL, organisme qui est siphonné depuis de nombreuses années et qui se trouve en grande difficulté, il faut prendre la décision de stopper le mécanisme dans les meilleurs délais. Alors que je demandais ce matin au ministre quelle serait la progressivité de la fin de cette surcompensation pour la CNRACL justement, il ne nous a pas fourni de précision. Pour le coup, l'amendement du rapporteur, en proposant de réduire de 3 % par an le taux d'application du mécanisme, est très clair, il nous permet de voir comment les choses vont s'organiser. Il répond parfaitement au souci et aux interrogations exprimés par le groupe socialiste. Nous ne pouvons qu'y être favorables.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour répondre à la commission.
    M. Jean-Pierre Brard. Plus exactement, si vous le permettez, pour répondre au Gouvernement.
    M. le président. Si vous voulez !
    M. Jean-Pierre Brard. Pour une fois, en effet, je suis d'accord avec la commission et je ne voudrais pas que mon propos soit mal compris par M. le rapporteur.
    Quelle est la situation des collectivités territoriales ? Du fait des dispositions qui ont été prises depuis un peu plus d'un an, le chômage augmente et la politique sociale des villes coûte plus cher. La dotation de solidarité urbaine Ile-de-France a été considérablement réduite, tandis que les emplois-jeunes ne sont progressivement plus financés. Pour 2004, par exemple, le transfert de charges que ma ville devra subir, notamment à cause des effets des dernières dispositions de la réforme de la taxe professionnelle, représente 3,5 millions d'euros, ce qui est considérable. Dans les charges indues qui pèsent sur les communes - mes collègues de Seine-Saint-Denis ici présents, Robert Pandraud, Eric Raoult, connaissent fort bien ces problèmes -, la CNRACL pèse lourd. En effet, nous devons verser un abondement qui n'est pas destiné à financer directement les charges pour les agents des collectivités publiques territoriales.
    L'intérêt de l'amendement présenté par M. Accoyer, c'est d'entrevoir, enfin, une perspective pour sortir de ce système injuste. Non pas que les régimes ne doivent pas être compensés. Il est tout à fait normal par exemple que les anciens mineurs touchent la retraite à laquelle ils ont droit. Mais je ne vois pas pourquoi il reviendrait à la CNRACL de la financer. C'est la solidarité de la nation tout entière qui doit la prendre en charge.
    Je soutiens donc l'amendement de la commission et je ne partage pas l'avis de M. le ministre.
    Si d'aventure, monsieur le président - encore qu'il ne peut pas le faire, s'agissant d'un amendement de la commission -, le rapporteur était tenté de le retirer, je le reprendrais.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ai dit : sagesse !
    M. Jean-Pierre Brard. Ah, vous vous en remettez à la sagesse d'assemblée ?
    M. le président. Vous n'aviez pas entendu ?
    M. Jean-Pierre Brard. Dans ces conditions, je vous prie de m'excuser. Je vous aurais épargné mon discours, encore que je suis sûr que cela vous aura intéressé ! (Sourires.)
    Mais si c'est à la sagesse, monsieur le ministre, que vous faites appel, et que vous renoncez à l'exercice du centralisme démocratique...
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avec regret ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. ... vis-à-vis des députés de l'UMP, donc que vous les libérez véritablement, je crois que nous avons une chance de faire adopter l'amendement.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Compte tenu de l'importance de cet amendement, le groupe des député-e-s communistes et républicains demande un scrutin public.
    M. le président. Monsieur le ministre, puisque vous vous en remettez à la sagesse de l'Assemblée, est-il sage de penser que vous levez le gage ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Bien sûr, monsieur le président.
    M. le président. Sur l'amendement n° 10830 modifié, compte tenu de la suppression du gage, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   73
Nombre de suffrages exprimés   73
Majorité absolue   37
Pour l'adoption   73
Contre   0

    L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité. (Applaudissements.)

Article 8

    M. le président. « Art. 8. - L'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est rédigé comme suit :
    « Art. L. 161-17. - Toute personne a le droit d'obtenir, dans des conditions précisées par décret, un relevé de sa situation individuelle au regard de l'ensemble des droits qu'elle s'est constitués dans les régimes légalement obligatoires de retraite.
    « A compter d'un âge et dans des conditions fixées par décret, chaque personne reçoit communication d'une estimation globale du montant des pensions de retraite auxquelles les durées d'assurance ou les points qu'elle totalise lui donnent droit, à la date à laquelle la liquidation pourra intervenir, eu égard aux dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles en vigueur.
    « Afin de permettre d'assurer ce service aux futurs retraités, il est institué un groupement d'intérêt public doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière composé de l'ensemble des organismes assurant la gestion des régimes mentionnés au premier alinéa, ainsi que des services de l'Etat chargés de la liquidation des pensions en application du code des pensions civiles et militaires. Les dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique sont applicables à ce groupement d'intérêt public.
    « Pour la mise en oeuvre des droits prévus au premier et au troisième alinéas, les membres du groupement mettent notamment à la disposition de celui-ci, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, les durées d'assurance et périodes correspondantes, les salaires ou revenus non salariés et le nombre de points pris en compte pour la détermination des droits à pension de la personne intéressée.
    « Pour assurer les services définis au présent article, les organismes mentionnés au présent article sont autorisés à collecter et conserver le numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques des personnes concernées, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. L'article 8 a pour objectif de faciliter le droit à l'information des assurés sociaux et en particulier de celles et ceux qui souhaiteraient obtenir, avant d'atteindre l'âge de la liquidation, des informations sur les conditions de liquidation de leurs droits à la retraite.
    Il existe en France, aujourd'hui, un organisme privé qui, depuis quelques années, permet à ceux qui le demandent de connaître les perspectives de retraite.
    M. Denis Jacquat. La Caisse nationale d'assurance vieillesse offre aussi ce service.
    M. Pascal Terrasse. Pour autant, ce n'est pas satisfaisant car seules quelques personnes, qui disposent des moyens de se payer ces services, en profitent. Dans le même temps, la demande des assurés sociaux en la matière est forte.
    Dans cet esprit, l'article 8 permet d'avancer, je dois le reconnaître, même si quelques incertitudes demeurent, que je vais vous exposer.
    Les parlementaires qui, au sein du COR, ont participé à un groupe de travail intitulé « Prospectives et inégalités » se sont penchés sur ce droit à l'information. Les informations fournies sont soit individuelles, soit elles concernent l'ensemble des systèmes notamment en matière de fonctionnement. Dans ce cadre, nous pensons qu'il est très important que chaque salarié, bien avant la liquidation de ses droits, puisse bénéficier de ces informations.
    Le système qui nous est proposé dans l'article 8 permettrait aux assurés sociaux dans un premier temps âgés de cinquante-huit ans d'obtenir un certain nombre d'informations concernant à la fois le régime de base, mais également le régime complémentaire, pour arriver, à terme, à un accès à l'information dès cinquante-cinq ans.
    Nous pensons qu'il serait souhaitable que les salariés puissent bénéficier d'une information avant l'âge de cinquante-cinq ans. Il faudrait réfléchir à un outil qui permette de faire des simulations. Il ne s'agit pas tant d'évaluer très précisément le montant exact des pensions de retraite, que de donner aux gens les moyens de savoir comment les droits à la retraite seront liquidés. Cela exige de fournir des informations individuelles mais aussi des informations à caractère prospectif.
    Je voudrais insister sur ce point car les situations individuelles des personnes souhaitant liquider leur pension de retraite sont complexes et diverses. De plus en plus de retraités sont des polypensionnés qui ont exercé des carrières professionnelles dans plusieurs branches, et donc qui dépendent de plusieurs régimes de retraite.
    En conclusion, si nous considérons que l'article 8 est plutôt positif, un point nous paraît essentiel, celui de l'âge auquel chaque salarié pourra prétendre à ce droit à l'information. La montée en charge va se faire trop lentement, nous semble-t-il. Ce droit devrait être garanti dès l'âge de cinquante ans.
    D'après les informations dont je dispose, il semblerait que la commission des finances ait déjà réfléchi à cette idée. Si elle venait à proposer un amendement dans ce sens, nous y serions évidemment très sensibles, car nous considérons l'aboutissement à cinquante-cinq ans, au terme du processus, insuffisant. Les salariés n'ont pas seulement besoin d'information, ils ont surtout besoin de garanties quant à la façon dont leurs droits seront liquidés. Plus tôt ces garanties seront affirmées, plus tôt ils seront rassurés.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Lorsque le contexte change, il est très important de vérifier si les objectifs d'un système sont toujours adaptés, et s'il doivent éventuellement être complétés. La société bouge, la démographie évolue, il faut poser des principes clairs.
    Par l'article 1er, nous avons réaffirmé le choix d'un système par répartition. Ensuite, nous avons posé des principes complémentaires : solidité financière du système de retraite, égalité de traitement entre cotisants - l'équité - et mise en place de marges de choix individuels encadrées.
    Parmi celles-ci figure le droit des assurés à l'information. Dans une société où les citoyens sont mieux formés, le droit de chacun à une information complète sur sa situation personnelle doit être un principe de base. Tel est le sens de cet article. Je n'oublie pas que la CNAV est précurseur en ce domaine.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, le droit à l'information est essentiel. Et nous-mêmes, en interpellant le Gouvernement d'une façon très régulière, contribuons à l'information des citoyens de ce pays, notamment sur la réalité de la loi que vous préparez, sur ce qui va se passer pour le montant de leurs pensions et sur le fait que l'avenir de cette réforme n'est pas assuré.
    A l'inverse, dans un certain nombre d'articles de presse, le Gouvernement et sa majorité font en sorte que l'on ne débatte que sur le débat, et non sur le fond. C'est ainsi que des commentaires plus ou moins tendancieux sont distillés pour que la presse relate l'ambiance, ou la supposée ambiance, de nos débats, plutôt que d'évoquer les interpellations que nous ne cessons de vous adresser.
    En matière d'information, la majorité a fait ses choix, qu'il importe de rappeler.
    Il paraît que le Gouvernement a l'intention d'écrire à l'ensemble des Français. Voilà une information telle que vous la concevez : une information qui n'est en fait que propagande. Vous avez l'intention de dépenser des sommes considérables au nom d'une information qui ne sera pas faite, afin d'endormir un peu plus les citoyens pour leur faire oublier la réalité de votre réforme.
    Personnellement, je ne verrais aucun mal à ce que vous écriviez à l'ensemble de nos concitoyens si vous preniez dans le même temps l'engagement de leur décrire la situation réelle dans laquelle ils se trouveront individuellement après l'adoption de votre réforme. La plupart s'apercevrait alors des diminutions considérables de droits à pension auxquelles ils seraient confrontés.
    On voit le sens dans lequel vous voulez aller. J'en veux pour preuve les informations, très sélectionnées, qui sont dispensées sur un site du ministère de la fonction publique. On peut, à travers cette sélection, voir un certain nombre de choses que vous me permettrez de commenter et qui devraient mettre la puce à l'oreille de nos concitoyens.
    J'ai sous les yeux une visualisation « papier » de ce site, à partir duquel on peut recourir à un simulateur.
    Parmi les cas non traités par le simulateur figure celui des « fonctionnaires qui atteindront leur âge d'ouverture des droits après le 1er janvier 2020, certains paramètres de la réforme auront pu évoluer d'ici là ».
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Effectivement !
    M. Pascal Terrasse. Cela signifie que vous allez faire évoluer, conformément à votre logique, la durée de cotisation de quarante ans à quarante et un ans, quarante-deux ans et quarante-cinq ans. Vous vous apprêtez à mettre en perspective votre réforme de façon glissante, et voilà pourquoi vous vous dispensez de préciser les paramètres que vous souhaitez voir évoluer.
    Sous l'intitulé « Avertissements », on peut lire les deux phrases suivantes : « Le temps partiel est comptabilisé, mais ne porte que sur les années passées. L'outil » - le simulateur - « considère que vous poursuivez votre carrière à temps plein. »
    Voilà un encouragement positif ! Voilà une perspective enthousiasmante pour nombre de nos concitoyens ! Mais comment pouvez-vous, compte tenu de la politique de l'emploi qui est la vôtre et de la situation économique dans laquelle nous nous trouvons, calculer la retraite de nos concitoyens en vous fondant sur le fait que, dorénavant, ils auront droit à une carrière à temps plein ?
    Telles sont les conditions dans lesquelles votre gouvernement a l'intention de mener une politique d'information. C'est vrai pour la retraite mais si, demain, ce type de pratique est adopté pour les droits individuels, il y aura, pour reprendre une expression qui a été déjà utilisée, une « troisième supercherie ».
    Nous ne cesserons de dénoncer cette situation. Nous prendrons pour cela le temps nécessaire, mais nous le ferons et l'on verra à la longue qu'un certain nombre de vos affirmations sont erronées. Quoi qu'il en soit, les questions que nous vous posons sur le niveau des pensions et sur la fiabilité de votre réforme n'ont toujours pas reçu de réponses. La vérité apparaîtra à travers la critique que nous continuerons d'exprimer à l'encontre de votre texte.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je serai bref, monsieur le président.
    Je répondrai à M. Le Guen que l'année 2020 borne notre réforme. Nous aurions pu faire le choix de l'année 2040, option qui avait été envisagée par le Gouvernement. Nous avons préféré nous en tenir à 2020 car nous pensions qu'il était raisonnable de nous appuyer sur des hypothèses vérifiables et qui ne seraient donc pas susceptibles d'être complètement bouleversées.
    Tout le raisonnement de M. Le Guen sur l'après-2020 traduit au mieux une crainte, au pire un fantasme. En tout cas, il ne reflète pas du tout les intentions du Gouvernement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je voudrais répondre au ministre !
    M. le président. D'une phrase, alors.
    Vous avez la parole.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je voudrais faire partager mes fantasmes à M. le ministre, en lui répétant une des phrases que j'ai citées et qui figure sur le site ministériel dont j'ai parlé.
    M. le président. Rapidement, monsieur Le Guen, car il y a d'autres inscrits sur l'article !
    M. Jean-Marie Le Guen. Soit, monsieur le président. Mais il s'agit d'un point important et cela m'évitera d'y revenir...
    M. le président. D'autres orateurs du groupe socialiste doivent également s'exprimer !
    M. Jean-Marie Le Guen. S'il vous plaît, monsieur le président !
    M. le président. Vous n'avez pas à me dire : « S'il vous plaît » !
    M. Jean-Marie Le Guen. Puisque le ministre ne m'a pas écouté, je me répéterai donc : le simulateur ne traite pas les cas des « fonctionnaires qui atteindront l'âge d'ouverture des droits après le 1er janvier 2020, certains paramètres de la réforme auront pu évoluer d'ici là ». Il s'agit donc bien de paramètres de calcul jusqu'au 1er janvier 2020, et non après 2020.
    Que le ministre relise avec attention les documents ministériels, et il s'apercevra que les critiques que j'ai formulées sont fondées.
    M. Jean-Marie Geveaux. Elles sont au contraire infondées !
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, le droit à l'information des assurés sur leur retraite est évidemment indispensable à la vie démocratique, et surtout à l'exercice de la citoyenneté. Qui pourrait s'y opposer ?
    D'ailleurs, une information authentique et sincère leur permettrait de mesurer concrètement, en espèces sonnantes et trébuchantes, ce qu'ils vont perdre avec la réforme des retraites que vous leur concoctez.
    L'information réelle, celle qui doit être donnée, ce n'est ni la lettre du Premier ministre, si creuse - elle évoque une réforme « équitable » et « juste » -, ni l'affirmation selon laquelle le projet de réforme susciterait une réelle adhésion. Car 65 % des Françaises et des Français disent et répètent sur tous les tons - ce qu'ils continueront de faire, n'ayez pas d'illusions à cet égard ! - que cette réforme est une mauvaise réforme. Pourquoi sont-ils de cet avis ? Parce qu'ils font le vrai calcul !
    D'ailleurs, vous avez tellement de difficultés que vous accusez tout le monde de désinformer l'opinion publique. Alors que vous disposez de tous les moyens médiatiques possibles, vous vous livrez à un pilonnage médiatique considérable en dépit duquel vous n'arrivez pas à convaincre les Françaises et les Français, dont 32 % seulement - ce sont ceux qui ont le plus - pensent que votre réforme est une bonne réforme.
    Le droit à l'information peut être affirmé, mais encore faut-il qu'il soit respecté.
    Votre article 8 est paradoxal. En effet, vous transférez sur les assurés la responsabilité d'obtenir l'information qui les concerne, déchargeant les caisses de leurs devoirs de leur dispenser cette information.
    C'est absolument anormal ! N'importe quelle administration doit informer ses usagers. N'importe quel député doit informer ceux qu'il représente de ce qu'il a voté, de ce qu'il a fait, de ce qu'il n'a pas fait. Or, avec votre mesure, si les assurés veulent être informés, ils devront faire la démarche eux-mêmes. S'ils ne demandent pas s'ils ont droit à une retraite, ils ne l'auront pas.
    Je vais donner un exemple personnel.
    Je pensais qu'en tant que député, donc en activité, je ne pouvais pas liquider ma retraite du privé. Or j'ai appris, incidemment, que j'y avais droit dès l'âge de soixante ans.
    M. Daniel Paul. Comme M. Juppé !
    M. Maxime Gremetz. Non, pour M. Juppé, ce n'est pas fait pareil : il y a déjà droit, c'est la loi. Tout comme M. Fabius.
    M. le président. Je vous en prie, ne citons pas de noms !
    M. Maxime Gremetz. Je ne veux pas en citer, monsieur le président. Simplement, la loi est mal faite. (Sourires.)
    Dans le public, on a le droit de prendre sa retraite à partir de cinquante ans alors que, dans le privé, il faut, comme je viens de l'apprendre, avoir soixante ans. Voilà deux ans que j'ai droit à la retraite mais ma caisse ne m'en a jamais informé.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Elle savait bien que vous n'alliez pas prendre votre retraite ! (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. J'ai même le droit, ce qui est un peu plus scandaleux, de cumuler ma retraite du privé avec mon indemnité parlementaire. Et quand j'ai demandé à ma caisse pourquoi je n'avais pas été informé, elle m'a répondu qu'elle n'avait pas à le faire car c'est à l'assuré de demander les informations.
    Mais revenons à l'article 8.
    Dans cet article, le masque de la pétition de principe sur l'information cache mal un réel désengagement, ainsi que le montre votre recours à un groupement d'intérêt public. Peut-être craignez-vous la réaction des assurés s'ils devaient voir arriver automatiquement dans leurs boîtes aux lettres le calcul de leur retraite de misère !
    M. le président. Monsieur Gremetz...
    M. Maxime Gremetz. Vous savez pertinemment que ce sont les salariés aux revenus les plus modestes qui font les frais de l'individualisation grandissante des démarches face aux diverses administrations. En laissant l'information à l'initiative des individus, vous favorisez encore les salariés les plus formés, donc les plus informés.
    Vous contribuez à aggraver l'inégalité devant l'information !
    Nous souhaitons au contraire maintenir l'obligation d'informer les assurés. Il convient de préserver cette démarche d'anticipation, qui relève pleinement des missions des caisses.
    Nous ne voulons pas le moins : nous voulons le mieux. Tel est le sens de nos amendements.
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. L'article 8 prévoit le droit d'information des assurés sur l'état de leurs annuités et sur le montant des pensions. A priori, cet article est positif. Qui ne souhaiterait ici que les assurés soient mieux informés ? D'autant que, dans son principe, le COR était favorable à cette information. Mais, concrètement, cette disposition tend à inscrire dans la loi une procédure qui existe déjà dans la pratique.
    Dans leur ensemble, les caisses du régime général et des régimes complémentaires fournissent déjà une information aux assurés sociaux. Elles répondent aux demandes des assurés et leur dispensent les informations de façon automatique à partir de cinquante-huit ans, et bientôt de cinquante-cinq ans.
    M. Pierre Hériaud. Sauf à M. Gremetz !
    Mme Muguette Jacquaint. Certes, l'information devrait être étendue, mais sa qualité demeure suffisante.
    Pourquoi donc légiférer sur le sujet ? Je pose la question. Pour faire un coup médiatique auprès des assurés et faire semblant d'être « démocratiques » ? Pour instituer une stucture qui devra répondre à d'autres impératifs, ainsi que cela a déjà été dit ? J'espère, monsieur le ministre, que vous apporterez à cet égard un démenti, notamment sur le fait qu'à partir de fonds publics une information serait apportée aux assurés aisés sur les opportunités d'investissement dans les fonds de pensions pour compléter la perte de revenus des pensions issues de la répartition ?
    On nous objecte l'argument de plus de démocratie. Permettez-moi d'en douter ! Car un groupement d'intérêt public n'est qu'éphémère. On peut penser que l'on ne donnera que les informations que l'on voudra donner. Le GIP ne sera-t-il pas utilisé pour convaincre les assurés sociaux, les retraités et les futurs retraités que la réforme des retraites est, comme on le répète depuis plusieurs semaines, une bonne réforme, alors que tout prouve le contraire ?
    L'article 8 ne me semble que répondre à un impératif : faire supporter aux fonds publics une information.
    Nous sommes favorables à la fourniture de cette information aux assurés et à l'ensemble de nos concitoyens, mais nous sommes contre une information qui se voudrait uniquement publicitaire, telle que celle que vous proposez !
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Je ne sais comment qualifier l'article 8 car, sous l'apparence innocente de sa formulation, il y a comme une sorte de parfum de perversité. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Geveaux. Oh !
    M. François Scellier. Voilà qui commence à devenir intéressant !
    M. Daniel Paul. Je ne résisterai pas au désir de citer le rapporteur : « Le présent article reconnaît aux assurés le droit de connaître de manière globale leurs droits. Cela doit, le cas échéant, leur permettre de prendre à temps les décisions nécessaires afin de préparer leur retraite en toute connaissance de cause. Il prévoit en outre l'élargissement au régime complémentaire du précalcul de la pension, actuellement circonscrit aux régimes de base. L'âge auquel interviendra ce pré-calcul, aujourd'hui fixé par décret à cinquante-neuf ans pour les régimes de base, devrait être abaissé à cinquante-huit ans, puis, par étapes, à cinquante-cinq ans. Le même décret pourra prévoir une estimation sur la base d'une carrière type à un âge plus précoce. Ce pré-calcul devra faire l'objet d'une coordination entre les régimes concernés. »
    Il y a là, au-delà d'une grande cohérence, une parfaite duperie, tout simplement parce que cela va faire apparaître la nécessité, pour les ayants droit, d'aller chercher ailleurs, le plus tôt possible, un complément à leur maigre retraite, du moins pour ceux qui le pourront.
    Je suis l'élu d'une circonscription en zone urbaine sensible, zone franche et autres spécificités, ou 63 % des foyers ne paient pas l'impôt sur le revenu. J'ai du mal à imaginer que, dans ces 63 % de foyers il y ait des gens qui, le moment venu, puissent trouver des compléments leur permettant d'améliorer leur situation. Mais j'irai plus loin, car il ne s'agit pas uniquement de gens en difficulté. J'ai ici la fiche de paie d'une gérante de magasin qui arrive à cinquante-six ans et qui, toute sa vie, a exercé ce genre d'activité. Le montant de sa rémunération, en février 2003, était de 970 euros.
    M. Maxime Gremetz. C'est beaucoup !
    M. Daniel Paul. Et son conjoint émarge, pour 169 heures de travail, à 721 euros, c'est-à-dire au-dessous du SMIC. Et l'on sait très bien que dans le commerce, on ne fait pas 169 heures par mois. On est plus souvent au-delà de 200 heures. Donc, pour une grande majorité de personnes, quel que soit leur statut, la question qui se pose c'est de savoir si elles vont avoir une retraite décente tout simplement. D'ailleurs, vous ne cherchez pas à rendre cette retraite décente, vous faites en sorte qu'elle soit adéquate pour les pousser à souscrire des assurances, à prévoir des garanties, à cotiser à certains fonds. Leur délivrer une information précoce vous aidera en ce sens. En tout cas, tout est mis en oeuvre dans votre réforme pour encourager les assurés sociaux à investir sur les marchés financiers ou à travailler plus que de raison. Voilà pourquoi nous ne voterons pas l'article 8.
    M. le président. La parole est à M. Julien Dray.
    M. Julien Dray. Cet article renvoie à une question essentielle. En effet, une réforme moderne devrait justement permettre aux assurés sociaux, à ceux qui aujourd'hui connaissent les vicissitudes du marché de l'emploi et sont amenés à avoir plusieurs emplois dans leur vie, d'obtenir le maximum d'informations concernant leurs droits à la retraite et de s'organiser sérieusement pour obtenir une retraite digne et décente. Combien ont rencontré, dans leurs permanences, ces gens qui, dans les dernières années de leur vie, découvrent brutalement qu'ils n'auront pas les points de retraite nécessaires pour partir tranquillement. Ils connaissent alors des situations très difficiles, d'autant que, souvent, leurs conditions de vie ou leur état de santé ne leur permettent pas de poursuivre leur activité. Une réforme moderne devrait permettre de les informer. Chacun d'entre nous pourrait alors suivre l'évolution de ses droits à la retraite. Nous aurions une bonne information et une réforme moderne, mais nous ne sommes pas dans ce cadre.
    En l'occurrence, on laisse à l'individu la possibilité d'accéder à l'information. Ainsi, ceux qui vivent dans des conditions difficiles, au jour le jour, parce qu'ils n'ont pas la sérénité leur permettant de réfléchir à l'avenir, seront amenés à reporter à plus tard l'échéance de la connaissance de leurs droits et ils découvriront, évidemment, des situations de plus en plus difficiles. Avec une réforme moderne, chacun aurait cette information en amont, ce qui lui permettrait de savoir où il en est. Mais ce n'est pas le cas. On prétend donner un droit, mais celui-ci ne sera utilisé que par ceux ayant des conditions de vie leur permettant de le faire. Comme l'ont dit mes collègues avec force arguments, ceux qui auront accès à ce droit pourront prévoir, donc se diriger vers des formes de capitalisation. Il y a là un vice caché.
    Nos propositions, qui devraient être retenues si M. le ministre était vraiment soucieux de défendre le système collectif de retraite par répartition, devraient permettre une information systématique pour éviter toute inégalité. Comme le disait M. Gremetz, nous avons tous connu ce genre de situation - c'est mon cas -, puisque avant d'être parlementaires nous avons souvent exercé d'autres fonctions. Ceux qui étaient fonctionnaires ou hauts fonctionnaires avaient une meilleure information que ceux qui ont eu de multiples emplois et ne savent pas aujourd'hui où ils en sont en matière de droits à la retraite. Ils découvrent leur situation alors qu'ils n'ont pas les moyens de souscrire à un régime de retraite complémentaire, notamment parce qu'ils ont pris des crédits. Si la réforme dont nous débattons avait vraiment pour objectif de défendre le droit à la retraite par répartition, si c'était vraiment une réforme moderne comme le dit M. Jacquat, elle devrait prévoir une information régulière des salariés, tous les cinq ou dix ans, pour qu'ils sachent quels seront leurs droits à la pension. Ainsi chacun pourrait prendre ses dispositions. Mais ce n'est pas le cas, bien au contraire. En ce sens, le Gouvernement et la majorité sont cohérents dans la mesure où, en affirmant un principe, ils ouvrent la porte à la retraite par capitalisation, réaffirmant ainsi le principe du choix individuel pour la retraite. Voilà pourquoi nous sommes hostiles à cet article. Comme on le dit souvent, l'essentiel se niche dans les détails. Le détail, en la matière, c'est que nous allons vers une plus grande individualisation du droit à la retraite avec tous les systèmes qui en découleront. Nous souhaiterions avoir des réponses plus précises du ministre en charge de cette réforme et qui est tellement attentif à ce que nous disons que, j'en suis sûr, il ne manquera pas...
    M. le président. Monsieur Dray !
    M. Julien Dray. Monsieur le président, je crois connaître le règlement de l'Assemblée nationale : tout parlementaire peut interpeller le ministre dans la discussion, y compris dans un débat d'amendements. C'est notre liberté ! Souhaiter la réponse du ministre n'a rien d'incorrect me semble-t-il, au contraire cela peut nous permettre d'avancer.
    M. Pascal Terrasse. Absolument !
    M. Julien Dray. Je reste persuadé que l'on pourrait trouver des points d'accord. Je considère que rien n'est fermé dans ce débat, en tout cas je l'espère. Adopter cet amendement serait un geste qui permettrait de concrétiser les intentions qui ont été affirmées et les engagements plus précis qui ont été pris pour répondre à cette situation.
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 4613 à 4619.
    L'amendement n° 4613 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4614 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4615 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4616 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4617 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4618 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4619 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 8. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Ces amendements visent à supprimer l'article 8 pour toutes les raisons que nous avons déjà indiquées. Nous proposons qu'une vraie information de qualité soit délivrée normalement à tout citoyen, à tout salarié, sans but détourné de propagande. J'ai vu qu'on insistait beaucoup sur le fait qu'il fallait informer très longtemps à l'avance et j'ai bien compris pourquoi. Bien entendu, M. le Premier ministre ne dit pas que les retraites vont baisser, mais il explique, dans son interview au Monde, que pour permettre aux Français de compléter leur retraite, il va prévoir une mesure fiscale. Il admet donc que sa réforme ne permettra pas d'avoir une retraite décente, qu'elle va même diminuer le niveau des pensions. C'est pourquoi, nous proposons la suppression de l'article 8 et nous demandons un scrutin public sur ces amendements.
    M. le président. Sur les amendements n°s 4613 à 4619, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. En fait, les auteurs de ces amendements voudaient que le droit des assurés à l'information ne soit pas amélioré de manière décisive, pour le régime de base et pour les régimes complémentaires, bref que les futurs retraités restent dans un flou générateur d'inquiétude et d'anxiété.
    Il est paradoxal que nos collègues proposent la suppression d'un article qui constitue, à l'image de ce qui a déjà été mis en place en Suède et de ce qui est en train de l'être en Allemagne, un progrès dans le mécanisme qui accompagne la vie active des salariés et qui doit leur permettre de préparer le plus tôt possible leur retraite. Ces dispositions sont d'autant plus justifiées lorsque la carrière n'est pas linéaire ou quand elle s'est déroulée dans plusieurs secteurs d'activité, dans plusieurs entreprises affiliées à des caisses parfois différentes. Il est bien évident qu'il faut prendre en compte l'inquétude que partagent tous les salariés face au niveau de revenus dont ils disposeront au moment de la retraite.
    L'inquiétude est la mère de l'anxiété et tend à faire naître des tensions dommageables auxquelles l'article 8 pourrait mettre un terme. C'est pourquoi la commission n'a pas accepté ces amendements de suppression.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'article 8 est très important. Il donnera plus de liberté à chaque Français pour choisir sa retraite et permettra d'avancer vers une retraite à la carte.
    Il comporte déjà, en soi, des avancées importantes, notamment en permettant une information sur l'ensemble des régimes existants qui est, nous le savons, la difficulté majeure que nous rencontrons dans notre pays, compte tenu du nombre de régimes, de l'existence d'un régime général et de régimes complémentaires. Le but que je poursuivais, en présentant cette réforme, était de parvenir à un dispositif aussi efficace que la fameuse « enveloppe orange » suédoise. Je reconnais que cet article n'a pas encore atteint ce niveau, notamment parce que nos régimes de retraite sont différents, mais les amendements proposés par le rapporteur pour avis de la commission des finances vont permettre d'améliorer encore la rédaction du texte et de répondre, pour une large part, aux interrogations formulées par plusieurs orateurs socialistes. Je souhaite donc, évidemment, que ces amendements de suppression soient rejetés.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix les amendements identiques n° 4613 à 4619.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   72
Nombre de suffrages exprimés   64
Majorité absolue   33
Pour l'adoption   8
Contre   56

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 4620 à 4626.
    L'amendement n° 4620 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4621 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4622 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4623 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4624 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4625 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4626 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer les premier et deuxième alinéas du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement n° 4630.
    M. Maxime Gremetz. Cet amendement vise à supprimer les mesures qui vont dans un sens défavorable à une bonne information des assurés, notamment sur leur reconstitution de carrière. Nous voulons que les choses soient faites correctement afin que les gens puissent se déterminer en toute connaissance de cause. Ils doivent disposer d'une information de qualité, objective et qui indique clairement les démarches à suivre. (Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et quittent l'hémicycle.) Tiens, je vois des collègues qui s'en vont peut-être au congrès de l'UMP. C'est leur droit évidemment.
    M. Daniel Paul. L'Assemblée aussi, c'est important !
    M. Maxime Gremetz. Un congrès est toujours important. Ce n'est plus ce que c'était, mais enfin c'est quand même important. Ils vont décider de la composition du bureau politique. On a abandonné le Politburo, c'est eux qui le reprennent !
    M. Jean-Pierre Brard. Ils l'ont racheté en solde !
    M. Maxime Gremetz. Comme quoi les traditions nationales ont la vie dure !
    M. le président. Monsieur Gremetz, reprenez le fil de votre propos !
    M. Maxime Gremetz. Justement les bureaux politiques en général informent très mal...
    M. Jean-Pierre Brard. Vous parlez d'expérience !
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait ! (Sourires.) Et j'assume !
    M. Richard Mallié. Oui, eh bien, nous, on n'assume pas !
    M. le président. Le débat n'est pas entre M. Gremetz et M. Brard !
    M. Maxime Gremetz. Le courage, c'est d'assumer et d'informer sérieusement.
    Cet amendement s'inscrit parfaitement dans la logique que nous avons défendue quant à la nécessaire information des assurés, élément à la fois de démocratie et de citoyenneté.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 4621.
    M. Jean-Pierre Brard. On reconnaît bien là la grande dextérité du ministre. Quelques difficultés existent, néanmoins. Preuve en est que le Premier ministre a éprouvé le besoin d'écrire à tous les Français. Et on assiste à une vraie campagne de pilonnage : Michel Rocard et M. Piketty se sont exprimés dans le Le Monde. Et aujourd'hui, c'est au tour de M. Chérèque de le faire. Est-ce une tentative de repêchage ? En tout cas, il tient le même discours que vous et c'est tout à fait étonnant. Je ne sais qui nuit le plus à l'autre. Est-ce vous, monsieur le ministre ? A votre corps défendant, bien sûr, car vous n'avez pas intérêt à lui nuire. Ou bien est-ce lui, compte tenu de l'image complètement dégradée qu'il a gagnée avec ses exploits du mois de mai, au cours de cette nuit fatale ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Tout cela est fort intéressant.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Vos propos sont inadmissibles !
    M. le président. Monsieur Brard, ne vous laissez pas interrompre, continuez !
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous remercie, monsieur le président, de rappeler nos collègues à l'ordre.
    Cet article 8 est tout à fait comparable à la langue d'Esope. Il peut être en effet la meilleure ou la pire des choses : la meilleure si votre projet de loi était bon, mais la pire s'il aboutit à pousser les Français vers M. Bébéar et M. Kessler. De fait, vous vous êtes évertué jusqu'à présent, à ne pas dire aux Français quelles seraient les conséquences de la mise en oeuvre de votre projet de loi. Or il faudra bien qu'à un moment ou à un autre M. Bébéar et M. Kessler ramassent la mise. Le meilleur moyen d'y parvenir ne consiste-t-il pas, après avoir endormi les Français, à les inviter à aller voir quelle sera le montant de leur retraite, demain ? Comme le disait M. Accoyer, l'inquiétude est la mère de l'anxiété.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est vrai, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Je suis tout à fait d'accord avec vous...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Alors votez cet amendement !
    M. Jean-Pierre Brard. ... même si cet aphorisme ne figure dans aucun dictionnaire des citations. Quand les Françaises et les Français feront calculer le taux de remplacement de leurs revenus d'activités, tel qu'il résulte de l'application de l'article 8, alors effectivement, l'aphorisme signé M. Accoyer prendra tout son sens : les gens seront très inquiets et comprendront qu'ils ont des fondrières sous leurs pas.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ce n'est pas possible !
    M. Jean-Pierre Brard. « Retraite à la carte, liberté accrue », disait tout à l'heure M. le ministre. Vous parlez d'une liberté ! Quand les gens vont se rendre compte qu'avec les nouvelles règles, ils n'auront pas droit à une retraite à taux plein parce que, même en travaillant aussi longtemps qu'il est possible, si tant est que M. Seillière et consorts le leur permettent, le taux de remplacement réel sera trop faible, ils n'auront plus évidemment qu'à se tourner vers M. Kessler et M. Bébéar, qui sont déjà là avec leurs contrats pour compléter le montant de la retraite.
    D'ailleurs, je vois que M. Balladur écoute très attentivement.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. M. Balladur est constamment présent !
    M. Jean-Pierre Brard. M. Balladur, dans cet hémicycle, c'est un peu la statue du Commandeur. J'avais déjà fait cette observation un jour, alors que M. Sarkozy, qui occupait un ministère où il était moins en vue et moins vibrionnant qu'aujourd'hui, intervenait et qu'apparaissait derrière lui, telle une statue tutélaire, M. Balladur. Aujourd'hui, quand vous y regardez bien, M. Balladur est toujours dans le même rôle. Je ne pense pas à Don Juan quand je parle de statue du Commandeur. Encore que cette évocation semble susciter en vous, monsieur le Premier ministre, quelque nostalgie... (Sourires.)
    M. le président. Monsieur Brard, revenez-en au texte !
    M. Jean-Pierre Brard. Je voulais dire simplement par là, monsieur le président, que de M. Edouard Balladur à François Fillon, il y a une vraie continuité puisque le socle de l'édifice de déstabilisation, c'est 1993, c'est M. Balladur.
    M. le président. Monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. D'ailleurs, monsieur Balladur, on attendrait que vous soit reconnue la paternité de toute la démarche avec plus de sentiments de reconnaissance à votre égard que votre successeur - d'une certaine manière, M. Fillon - n'en a exprimé publiquement jusqu'à présent.
    M. Jean-Luc Warsmann. On s'égare !
    M. le président. Monsieur Brard, concluez, je vous prie !
    M. Jean-Pierre Brard. Il faut rendre à César ce qui lui appartient. Et dans la distribution des mauvais coups, les bénéfices doivent être partagés entre M. Balladur et M. Fillon.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements qui viennent d'être soutenus ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il s'agit d'un démontage, paragraphe par paragraphe, de l'article 8.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous, vous faites de la démolition, nous on démonte !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est le protocole habituel de fonctionnement de nos collègues du groupe communiste et républicain. Il s'agit d'une manoeuvre destinée, je le redoute, à ralentir quelque peu le cours de nos travaux...
    M. Maxime Gremetz. Arrêtez avec ça !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... qui, chacun en conviendra, ne méritent pas d'être ralentis davantage. Surtout, ces amendements porteraient un mauvais coup à l'un des articles essentiels de ce projet de loi qui vise à donner aux salariés une information dont ils ont le plus grand besoin au regard des droits qui seront les leurs, au moment de leur retraite, pour les régimes de base et complémentaire.
    Dans ces conditions et je ne reprendrai pas ces explications pour les autres amendements de repli du Parti communiste, l'amendement a été rejeté.
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas le Parti communiste, mais le groupe communiste et républicain !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je demande d'abord un scrutin public puis je ferai un appel au règlement.
    M. le président. Sur les amendements identiques n°s 4620 à 4626, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Monsieur Maxime Gremetz, souhaitez-vous vraiment faire un rappel au règlement ?
    M. Maxime Gremetz. Je veux dire au rapporteur qu'il ne faut pas mélanger les institutions et les partis politiques. Dans la Constitution, les uns et les autres ont un rôle particulier.
    Monsieur le rapporteur, parlez donc du groupe communistes et républicains qui compte aussi parmi ses membres M. Brard et M. Desallangre. En outre, le Parti communiste est très divers, comme l'UMP d'ailleurs. Nous avons en effet appris que seize députés - et même dix-neuf à présent - appellent à augmenter de 1 % l'impôt sur les sociétés. Voilà l'occasion d'un grand débat démocratique ! Deux autres députés UMP considèrent, quant à eux, que les patrons gagnent trop et qu'il faut constituer une commission d'enquête parlementaire et ils ont raison. Je l'ai proposé moi aussi et nous nous rejoignons sur ce point. Comme quoi tout cela est divers et il faut respecter cette diversité. Monsieur le rapporteur, je vous en prie, ne confondez pas les institutions et les partis !
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4620 à 4626.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   58
Nombre de suffrages exprimés   58
Majorité absolue   30
Pour l'approbation   10
Contre   48

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 4648 à 4654.
    L'amendement n° 4648 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4649 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4650 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4651 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4652 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4653 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4654 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi libellés :
    « Rédiger ainsi le début du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale :
    « Art. L. 161-17. - Le groupement d'intérêt public mentionné au présent article est tenu d'adresser périodiquement, à titre de renseignement, à ses ressortissants, les informations nécessaires à la vérification de leur situation au regard des régimes dont ils relèvent. La périodicité de cette information devra être, en tout état de cause, de durée inférieure au délai de prescription des créances afférentes aux cotisations sociales.
    « Toutefois... (Le reste sans changement.) »
    La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Je souhaite expliquer de nouveau, en quelques mots, que nous ne pratiquons nullement la politique du pire. Vous avez refusé la suppression de cet article, monsieur le ministre. Nous proposons donc qu'il soit amendé pour que les renseignements qui doivent être mis à la disposition des futurs retraités le soient sans qu'ils aient à le demander. Il convient de maintenir une démarche d'anticipation, laquelle relève des missions des caisses et serait après l'adoption de cet amendement, transférée au groupement d'intérêt public.
    M. Pascal Terrasse. C'est en effet important !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Je soutiens cet amendement. Pour reprendre ce qu'a dit à juste titre Jean-Marie Le Guen, il nous paraît important que les informations soient communiquées à espace régulier aux salariés. Or avant de faire une demande auprès du groupe d'intérêt public encore faut-il savoir que cet organisme existe. Il faut donc maintenir l'information des assurés sans attendre que ceux-ci se manifestent, à l'instar de ce qui se fait dans les caisses d'assurance complémentaire. Ainsi je reçois, tous les cinq ans, au titre de l'Ircantec un bulletin qui me permet de connaître le nombre de mes points.
    M. Richard Mallié. On reçoit ce document tous les ans !
    M. Pascal Terrasse. Je suis informé sans rien avoir à demander à l'Ircantec.
    Le nouveau système doit fonctionner de la même manière si l'on veut qu'il soit crédible. Cet amendement est salutaire. Il correspond au fond au souhait exprimé par Jean-Marie Le Guen. Le groupe socialiste le votera donc sans aucune difficulté.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4648 à 4654.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, a présenté un amendement, n° 13 rectifié, ainsi rédigé :
    « I. - Après le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, insérer l'alinéa suivant :
    « Les régimes et les services de l'Etat chargés de la liquidation des pensions sont tenus d'adresser tous les cinq ans, et à certaines étapes de la vie active, un relevé de la situation individuelle de l'assuré au regard de l'ensemble des droits qu'il s'est constitués dans les régimes légalement obligatoires de retraite. Les conditions d'application de cet alinéa sont définies par décret. »
    « II. - En conséquence, dans l'avant-dernier alinéa de cet article, substituer aux mots : "au premier et au troisième alinéa, les mots : "aux trois premiers alinéas. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Le droit à l'information, dont il a beaucoup été question tout à l'heure, est, selon nous, la clef de la responsabilisation en matière de retraite. Nous l'avons vu, ce débat sur les retraites parle à l'ensemble des Français. Mais c'est grâce à l'information qu'une évolution et un changement de comportement pourront se produire.
    Dans notre esprit, ce droit à l'information doit être un véritable service public. Il doit pouvoir intervenir le plus tôt possible, mais aussi le plus souvent possible. Aujourd'hui, il y a place pour la désinformation - certains ne se sont d'ailleurs pas privés d'en faire. Demain, avec le droit à l'information, chacun aura la vision la plus précise possible de sa véritable situation par rapport à la retraite. Actuellement, il n'est qu'embryonnaire : seuls les avocats, par l'intermédiaire de la Caisse nationale des barreaux, disposent de cette information aujourd'hui. Il importe donc de développer ce droit.
    Cette information comporte deux aspects : la connaissance des droits qui sont d'ores et déjà acquis, au titre des différents régimes, et le précalcul de la pension auquel chacun a droit aujourd'hui, au moment de son départ à la retraite. Le présent amendement concerne bien évidemment la connaissance des droits à pension accumulés.
    Le premier alinéa du projet reconnaît un droit individuel à cette information, droit que la Cour de cassation avait, jusque-là, réduit à une information collective sur les systèmes de retraite. Mais le texte prévoyait également un abandon de la transmission automatique, tous les cinq ans, les assurés étant obligés de faire la demande pour obtenir cette information. Le présent amendement vise précisément - et en ce sens il devrait recueillir un assentiment unanime - à rétablir cette automaticité de la transmission afin que l'information soit accessible à tous et pas seulement aux Français et aux Françaises qui en feraient la demande.
    Cela étant, il convient de rectifier la rédaction de cet amendement qui a été approuvé par la commission des finances et de supprimer les mots : « et à certaines étapes de la vie active ». En effet, l'automaticité étant prévue tous les cinq ans, cette précision est superflue.
    M. René Couanau. Très bonne initiative !
    M. le président. L'amendement n° 13, deuxième rectification, se lirait donc ainsi : « Les régimes et les services de l'Etat chargés de la liquidation des pensions sont tenus d'adresser tous les cinq ans un relevé de la situation individuelle de l'assuré... (Le reste sans changement.) »
     Quel est l'avis de la commission saisie au fond ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a accepté cet amendement qui enrichit effectivement le dispositif prévu par le Gouvernement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ai décrit tout à l'heure dans quel esprit le Gouvernement avait rédigé l'article 8. D'une certaine manière, le Gouvernement l'avait rêvé et le rapporteur l'a fait. (Sourires.) Avis favorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Notre jeune collègue Xavier Bertrand a l'imagination pertinente. On ne peut rien trouver à redire contre cet amendement qui apporte plus de transparence. Mais il aura notamment pour conséquence - et j'imagine que M. Bertrand n'y avait pas pensé, car je ne vois aucune malignité dans sa démarche - de pousser les gens, à mesure qu'ils découvriront l'ampleur du désastre, dans les bras de M. Bébéar et de M. Kessler.
    M. Eric Raoult. Et que faites-vous de Mme Bettencourt ? (Sourires.)
    M. le président. Monsieur Raoult !
    M. Jean-Pierre Brard. Notre collègue Eric Raoult est d'une injustice avec Mme Bettencourt que je ne peux laisser passer. Je dois rappeler que celle-ci n'est pas spécialisée dans les fonds de pension. Elle en bénéficie certainement, mais elle ne les diffuse pas. Elle ne vend que des bombes aérosols et autres, mais pas de produits pour les retraites.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13, deuxième rectification.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 3041 et 12, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 3041, présenté par MM. Terrasse, Gorce, Le Garrec, Bartolone, Beauchaud, Mmes Clergeau, David, M. Durand, Mmes Génisson, Guinchard-Kunstler, Hoffman-Rispal, MM. Masse, Mathus, Mme Mignon, MM. Nayrou, Néri, Mme Oget, M. Renucci et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Au début du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, remplacer les mots : "A compter d'un âge et dans des conditions fixées par décret, par les mots : "A compter de 55 ans et dans des conditions fixées par décret. »
    L'amendement n° 12, présenté par M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis, est ainsi rédigé :
    « Au début du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, substituer aux mots : "A compter d'un âge et dans des conditions fixées par décret, les mots : "Dans des conditions fixées par décret, à partir d'un certain âge et aux étapes importantes de sa vie active. »
    La parole est à M. Pascal Terrasse, pour soutenir l'amendement n° 3041.
    M. Pascal Terrasse. Comme l'ont déjà indiqué notre collègue Le Guen et les membres du groupe communiste, nous considérons qu'il est nécessaire qu'une information individualisée intervienne le plus tôt possible. Compte tenu du précédent amendement du rapporteur de la commission des finances, nous souhaitons qu'elle ait lieu avant l'âge de cinquante-cinq ans et à intervalles réguliers.
    On pourrait ainsi imaginer qu'à partir de quarante ans et tous les cinq ans, une information automatique soit adressée à chaque assuré social. Une telle information porterait sur la carrière et sur une simulation des droits ouverts à pension. Naturellement ce document serait adressé à l'assuré social dans le respect de la réglementation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement n° 12.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. L'amendement n° 12 concerne le deuxième point du droit à l'information, que j'ai déjà évoqué, à savoir le pré-calcul. Il est prévu que l'âge auquel celui-ci aura lieu, qui est aujourd'hui fixé à cinquante-huit ans, soit abaissé à cinquante-cinq ans, ce qui est très bien. Néanmoins il est nécessaire que le précalcul puisse intervenir avant cet âge. C'est l'objet de la référence aux « étapes importantes de la vie active » contenue dans l'amendement.
    Mme Muguette Jacquaint et M. Maxime Gremetz. Evidemment.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. Dans mon esprit, nous sommes dans le premier temps de la réforme, qui se veut progressive. Il nous faut tenir compte des contraintes liées aux différents régimes et aux différentes caisses. Tout ce qui est souhaitable n'est pas possible. C'est la raison pour laquelle il convient de renvoyer la mesure à un décret, mais en précisant : « à différentes étapes de la vie active ». Il est en effet essentiel qu'à un âge charnière, qui peut être de quarante-cinq ans, monsieur le ministre, l'assuré social puisse disposer d'un pré-calcul afin d'aborder en toute connaissance de cause la partie de sa carrière qui se situera entre quarante-cinq ans et son départ à la retraite.
    Un autre point nous semble tout aussi important - je ne sais pas s'il s'agit d'un rêve, monsieur le ministre - mais il serait bien que dans dix ans le système suédois trouve une application en France et qu'un véritable droit à l'information soit instauré pour tous les régimes, avec une information annuelle. (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il est apparu à la commission saisie au fond que l'amendement déposé par la commission des finances était plus adapté à la problématique que celui de M. Terrasse, tout simplement parce que...
    M. Pascal Terrasse. Il est présenté par l'UMP !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... des différences existent selon les catégories professionnelles. Ainsi, pour les fonctionnaires de catégorie B active, l'âge de cinquante-cinq ans prévu par l'amendement de M. Terrasse ne représente pas un grand intérêt.
    M. Pascal Terrasse. Et pour le régime général ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il y a donc lieu de laisser au Gouvernement la faculté de décider par voie réglementaire ce type de paramètre, ce qui est évident pour le cas précis. C'est la raison pour laquelle la commission a adopté l'amendement présenté par Xavier Bertrand et adopté préalablement par la commission des finances.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Les deux amendements participent du même esprit et visent le même objectif. Comme le rapporteur de la commission des affaires sociales l'a dit, l'amendement n° 12 de la commission des finances est plus opérationnel, même s'il reprend, au fond, la démarche de M. Terrasse. Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement et souhaiterait que M. Terrasse veuille bien retirer le sien.
    Je saisis l'occasion qui m'est offerte pour tenter d'éclairer le débat. Le Gouvernement souhaite que l'information soit la plus complète possible, avec pour objectif de se rapprocher progressivement de modalités qui ressemblent à l'enveloppe orange suédoise. Cependant, nous rencontrons des difficultés propres au système français, liées non seulement au grand nombre de régimes de retraite, mais aussi à notre culture juridique et administrative, qui nous a habitués à considérer toute information qui nous est communiquée officiellement comme une information parfaitement fiable, sur laquelle on peut, le cas échéant, s'appuyer pour entamer un contentieux. Dans les pays anglo-saxons, plus pragmatiques, il est possible de proposer des simulations...
    Mme Muguette Jacquaint. Nous y voilà ! Des simulations !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... qui n'ont pas exactement la même signification. Il faut bien comprendre, en effet, que plus les informations sont communiquées en amont du départ à la retraite, plus elles s'apparenteront à des simulations. Il est en effet impossible de prévoir, dans le détail, quelle sera la carrière de chacun, et c'est là le coeur du problème qu'il nous faut résoudre. Notre objectif doit être de fournir des documents qui fassent bien la part des choses entre, d'une part, les droits passés, qui, naturellement, doivent être des informations parfaitement fiables, qui engagent ceux qui les diffusent, et, d'autre part, les simulations pour l'avenir, qui doivent faire l'objet d'un statut particulier.
    M. René Couanau. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je commencerai par faire une remarque. Je trouve que le rapporteur pour avis a fait de gros efforts pour enrichir le texte.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Absolument !
    M. Jean-Pierre Brard. Il est vrai qu'on ne lui oppose pas l'article 40, à lui ! (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. Et je ne dis pas ça parce qu'il est picard, comme moi. (Sourires.) Le problème, c'est qu'avec cet amendement il a aussi pensé à l'enrichissement d'AXA !
    M. Jean-Marie Geveaux. C'est une obsession !
    M. Maxime Gremetz. Non, je ne suis pas obsédé !
    M. Jean-Pierre Brard. C'est vous qui êtes obsédés ! C'est pathologique, même !
    M. Maxime Gremetz. Enfin, depuis combien de temps AXA vit-il sur le marché de la santé et de la retraite ?
    M. Jean-Marie Geveaux. Il y en a d'autres !
    M. Maxime Gremetz. Il y a surtout AXA et Bébéar, vous le savez bien, et je pense que M. le rapporteur y a beaucoup pensé. Cet amendement est révélateur. D'ailleurs, il rejoint la proposition de M. Raffarin, quand il dit qu'il faut que les Français se préparent une bonne retraite. Pourquoi veut-on que les salariés soient informés avant cinquante-huit ans, c'est-à-dire juste avant le départ à la retraite ? Parce que si, auparavant, ils avaient une retraite garantie et connaissaient leurs droits, maintenant ils ne les connaîtront plus, et encore moins si on ne les prévient pas ! Et ils se réveilleront avec une retraite de misère, c'est évident !
    Mme Muguette Jacquaint. Ils ont intérêt à épargner !
    M. Maxime Gremetz. Dès aujourd'hui, vous le voyez bien, les gandes compagnies, font campagne sur le thème : « Epargne-retraite : faites votre retraite vous-même ». Cette information sera donc extrêmement importante pour les salariés. On pourra leur dire : « Attention, vous n'aurez que ça, il faut combler le reste ». Il faut avouer qu'il fallait y penser, monsieur Bertrand. Vous êtes jeune, mais vous êtes prévoyant.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. Je ne sais pas quand je prendrai ma retraite, monsieur Gremetz...
    M. Maxime Gremetz. Je soutiens donc l'amendement présenté par M. Terrasse et je suis contre celui de M. le rapporteur de la commission des finances.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. On comprend bien la logique de ces amendements qui sont, d'une certaine manière, des amendements de précaution parce que la voie dans laquelle nous engage le Gouvernement avec son projet de loi est très dangereuse pour les futurs retraités. Il faut dire, monsieur le ministre, que vous avez des soutiens très actifs et même compromettants. Par exemple, François Chérèque, dans Le Monde de cet après-midi, va plus loin que vous. Il est plus extrémiste encore. Vous, vous n'osez pas dire - vous avez la tête politique et la prudence qui va avec - que le président du MEDEF donne des signes de bonne volonté : vous connaissez trop bien M. Seillière pour savoir que, quand il agit ainsi, c'est simplement une illusion d'optique. M. Chérèque, lui, a la foi du charbonnier et voit, d'une certaine manière, en M. Seillière, un nouvel apôtre de ses croyances. Et ce qui est formidable, monsieur le ministre, c'est que vous allez chercher les Suédois à la rescousse.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. Et les Suédoises !
    M. Jean-Pierre Brard. Voilà une bonne idée. L'échange le plus ancien que nous ayons eu avec les Suédois, me semble-t-il, c'est le cadeau que nous leur avons fait en leur envoyant Bernadotte. Mais quand il y a des bonnes choses, d'habitude, vous ne les voulez pas : par exemple, le niveau des prélèvements obligatoires, qui, dans ce pays sont plutôt confortables sans que cela ait découragé les grands groupes suédois, qui prospèrent.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et la durée de cotisation ?
    M. Jean-Pierre Brard. Alors vous trouvez des arrangements : avec vous, ce n'est pas le menu, c'est la carte. Vous picorez donc dans la carte suédoise. Je comprends bien que la gastronomie suédoise ne soit pas votre tasse de thé - et là je serais assez près de vous rejoindre - mais ce que je comprends moins c'est que vous preniez ce qui est mauvais et que vous laissiez ce qui pourrait améliorer notre ordinaire.
    D'une certaine manière, si on ne pense qu'à l'avenir des Français, peut-être l'amendement de Xavier Bertrand est-il meilleur que celui de M. Terrasse, car pour financer le gouffre devant lequel ils vont se trouver, mieux vaut que nos concitoyens aient vingt ans d'avance sur l'âge de la retraite que cinq ans, comme le propose notre collègue Terrasse.
    Monsieur le ministre, je vous l'ai dit plusieurs fois, vous remettez en cause la solidarité, puisque vous poussez aux fonds de pension, qui est une démarche essentiellement individuelle. A cet égard, je vous renvoie à une pensée de Cicéron sur la vieillesse - la plus originale, d'ailleurs, qu'il ait formulée dans Les Devoirs - selon laquelle, pour vivre une retraite et une vieillesse heureuses, toutes les tranches d'âge doivent être solidaires. L'argument développé par Cicéron est en deux temps. Il énonce tout d'abord une position de principe assez classique : « Comme à des âges différents correspondent des fonctions différentes, que le jeune homme a d'autres tâches que le vieillard, il convient de parler ici de distinctions à établir. »
    M. le président. Monsieur Brard, Cicéron, c'est parfois...
    M. Jean-Pierre Brard. Non, monsieur le président, c'est moins long que Proust !
    M. Jérôme Rivière. Il a écrit cela en fin de vie !
    M. Jean-Pierre Brard. « Il appartient à un jeune homme » - et je ne pense pas à Xavier Bertrand - « de respecter ses aînés, de choisir les meilleurs parmi eux » - cela peut vous concerner ! - « les plus dignes d'éloges, de suivre leurs avis et de les prendre pour guides : la génération montante, encore sans expérience, a besoin », monsieur Xavier Bertrand, « pour s'affirmer et se gouverner, du savoir acquis par les gens d'âge. »
    Je vois que cela vous plonge dans la perplexité !
    M. le président. Nous allons méditer cette pensée de Cicéron.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Cette citation de Cicéron pourrait être également adressée au porte-parole du Parti socialiste. (Sourires.)
    Pour ma part, j'ai entendu les arguments de notre collègue Brard selon lesquels il serait bon de retenir l'amendement n° 12. Dans ces conditions, et au vu des éléments dont le ministre vient de nous faire part, je vais, ce qui est tout à fait exceptionnel depuis deux semaines, lui faire plaisir : je retire l'amendement n° 3041 et j'appelle à voter pour celui de la commission.
    M. Jean-Marie Geveaux. Quelle sagesse !
    M. le président. L'amendement n° 3041 est retiré.
    M. Maxime Gremetz. Je le reprends.
    M. le président. Sur l'amendement n° 3041, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 3041 repris par M. Gremetz.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   56
Nombre de suffrages exprimés   53
Majorité absolue   27
Pour l'adoption   12
Contre   41

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    Je mets aux voix l'amendement n° 12.
    (L'amendement est adopté.)
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, je demande une suspension de séance de dix minutes afin de réunir mon groupe.
    M. le président. Elle est de droit.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures trente-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 4634 à 4640.
    L'amendement n° 4634 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4635 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4636 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4637 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4638 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4639 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4640 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. L'amendement n° 4634 est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements identiques n°s 4634 à 4640.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 10763 à 10769.
    L'amendement n° 10763 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 10764 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 10765 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 10766 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 10767 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 10768 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 10769 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Dans le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, supprimer les mots "de permettre. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. L'article 8 propose de modifier la rédaction de l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale. Nous sommes déjà intervenus pour expliquer les dangers de cette modification de la loi : danger d'une information « efficace » et danger de privatisation de cette information à destination des assurés sociaux. La nature de cette modification législative masque mal la réalité de la réforme ainsi mise en oeuvre.
    Pourquoi une telle modification ? Principalement pour instituer le groupement d'intérêt public, institution qui ne permet absolument pas de certifier la mission qui lui est dévolue mais qui permet clairement d'individualiser l'information à destination des assurés sociaux. Voilà pourquoi nous demandons la suppression du troisième alinéa de l'article 8.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission, qui a été saisie de pas moins de 6 200 amendements par nos collègues du groupe communiste...
    M. Jean-Pierre Brard. Et républicain.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... et républicain,...
    M. Jean-Pierre Brard. Cent fois sur le métier remettez votre ouvrage !
    M. le président. Monsieur Brard, laissez M. le rapporteur s'exprimer.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... la commission donc ne s'était pas rendu compte que cet amendement rédactionnel 10763 apportait un élément positif au texte. Bien que la commission l'ait rejeté, il me semble - on verra ce qu'en pense le Gouvernement - qu'il y aurait un certain intérêt à ce qu'il fût adopté par l'Assemblée.
    M. Jean-Pierre Brard. La concordance des temps est parfaite !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'amendement est meilleur que l'argumentaire qui l'accompagnait. L'argumentaire était destiné à démontrer que le Gouvernement, qui, naturellement, allait refuser cet amendement, avait des arrière-pensées que le groupe communiste et républicain dénonçait. Or le Gouvernement trouve cet amendement excellent et souhaite que l'Assemblée le vote.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques n°s 10763 à 10769.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    M. le président. M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis, a présenté un amendement, n° 14, ainsi rédigé :
    « Compléter le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale par la phrase suivante : "La mise en oeuvre progressive des obligations définies par le présent article sera effectuée selon un calendrier défini par décret en Conseil d'Etat. »
    La parole est à M. le rapporteur pour avis.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, les divers régimes ne sont pas préparés à faire face aux nouvelles obligations relatives à ce droit à l'information. L'amendement permet une mise en place progressive du dispositif.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. La parole est à Muguette Jacquaint, contre l'amendement.
    Mme Muguette Jacquaint. Cette réforme implique des modifications très importantes et M. Bertrand lui-même dépose un amendement pour demander une mise en oeuvre progressive parce que les services ne sont pas prêts. Avouez tout de même qu'on aurait pu, c'est ce que nous demandions, prendre plus de temps pour assurer réellement l'information des salariés, en particulier de la fonction publique.

    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.
    (L'amendement est adopté.)

Rappels au règlement

    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour un rappel au règlement.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, nous nous étions mis d'accord avec M. Debré. Moi, ça ne me pose aucun problème que nous siégions ce soir, mais quand nous prenons un engagement, nous le tenons. Si nous avons rempli les engagements que nous avions pris hier et si celui qui a pris un engagement ne le tient pas, il n'y aura plus de compromis possible parce que la confiance sera totalement perdue. Une fois on me la fait, pas deux fois, je vous le dis ! Je suis un peu surpris que mes collègues de l'UMP viennent me voir en me demandant si j'ai vu Debré ! Non, je n'ai pas vu Debré ! Il doit être au congrès de l'UMP, je suppose. Il ne doit pas être très difficile de le joindre. J'avais pris le soin de demander au vice-président ce matin si c'était confirmé pour que chacun puisse prendre ses dispositions. Le secrétaire général me dit qu'officiellement il y a séance ce soir mais qu'au vu de ce qui se sera passé aujourd'hui, le président peut décider de l'annuler, qu'il revient en fin d'après-midi et décidera à ce moment-là et qu'il vaudrait donc mieux que je me fasse confirmer les choses à ce moment-là.
    J'en ai parlé à M. le rapporteur, qui m'a dit qu'il essaierait de le joindre entre douze heures et quatorze heures, n'est-ce pas, monsieur le rapporteur ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. J'ai dit que j'essaierais.
    M. Maxime Gremetz. Voilà où on en est. Si, dans cette assemblée, on ne peut pas faire confiance à la parole donnée, si la loyauté et le respect des engagements ne prévalent pas, ça pose un problème, et chacun en tirera les conséquences, c'est tout.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je comprends parfaitement que nos collègues de la majorité trouvent le débat un peu long. Nous, nous estimons qu'il est de notre devoir de le mener dans le détail, de revenir sur un certain nombre de sujets. Mais pour l'organisation de nos débats, la règle, dans notre assemblée, c'est une discussion collective.
    Il était prévu, et je confirme les propos de Maxime Gremetz, que nos travaux s'arrêtent à vingt heures. Nous nous sommes organisés les uns et les autres, mais nous pouvons changer d'attitude et d'organisation. Si certains de nos collègues de l'UMP pensent qu'ils peuvent modifier comme ça les règles du jeu, elles seront effectivement modifiées, mais je crois que personne n'a rien à gagner à la crispation en fin d'après-midi et ce soir. La discussion doit aller à sa vitesse. Nous avons pris acte du fait que le Gouvernement ne souhaitait pas appliquer l'article 49-3 et nous n'avons pas d'autre combat qu'un examen loyal de ce texte. Dans ce contexte, je ne vois pas qui peut avoir intérêt à faire déraper nos discussions.
    M. le président. Il n'est pas question, monsieur Le Guen, de faire déraper quoi que ce soit. Il est six heures. Dans une demi-heure ou trois quarts d'heure, si vous voulez, je suspendrai la séance pour que l'on prenne contact avec le président de notre assemblée et que chacun soit bien informé des conditions dans lesquelles se poursuivra notre travail.

Reprise de la discussion

    M. le président. L'amendement n° 5089 de M. Jean Dionis du Séjour n'est pas défendu.
    Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 4627 à 4633.
    L'amendement n° 4627 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4628 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4629 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4630 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4631 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4632 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4633 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 4627.
    Mme Muguette Jacquaint. Il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4627 à 4633.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous avions demandé un scrutin public !
    M. le président. Monsieur Le Guen, laissez-moi présider !
    Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 4641 à 4647.
    L'amendement n° 4641 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4642 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouzec ; l'amendement n° 4643 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4644 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4645 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4646 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4647 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale. »
    la parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 4641.
    Mme Muguette Jacquaint. Cela va toujours dans le même sens. Il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4641 à 4647.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, il me semble que le groupe socialiste avait demandé un scrutin public sur tous ces amendements. Je voulais savoir si les feuilles vertes que j'ai signées à l'instant vous ont été communiquées.
    M. le président. Non, je n'ai pas eu de feuille verte.
    M. Jean-Pierre Brard. Encore La Poste ! (Sourires.)
    Mme Muguette Jacquaint. Ce sont les grévistes !
    M. le président. Je dois dire que M. Gremetz, qui, lui, a l'habitude, me communique régulièrement des feuilles vertes et, si possible, m'en avertit à l'avance.
    Je mets aux voix l'article 8, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 8, ainsi modifié, est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Après l'article 8

    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, et M. Jacquat ont présenté un amendement, n° 3153, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Après la première phase du premier alinéa de l'article L. 132-27 du code du travail, est insérée une phrase ainsi rédigée :
    « Cette négociation porte également sur la question de l'emploi des salariés de plus de 50 ans, sur leur accès à la formation professionnelle ainsi que sur les aménagements possibles de fin de carrière ».
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La négociation entre les partenaires sociaux doit inclure la question fondamentale de l'emploi des salariés de plus de cinquante ans. C'est un enjeu majeur pour notre pays, compte tenu du faible taux d'employabilité des salariés de plus de cinquante ans en particulier. Sur cette question esssentielle, il convient d'organiser plus précisément la négociation entre les partenaires sociaux, afin que la présente réforme s'en trouve consolidée.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement ne me semble pas opportun car je le trouve parfaitement cosmétique. Il tend à faire croire qu'il y aura des discussions de bonne foi sur l'emploi de ceux que l'on appelle souvent les seniors, alors même qu'à l'évidence le Gouvernement ne s'est pas donné les moyens d'imposer au MEDEF un véritable changement de culture sur ce sujet.
    Non seulement il ne l'a pas imposé au MEDEF mais il ne se l'impose même par à lui-même. Nous avons en effet appris il y a quelques jours que l'AFP avait l'intention de demander à nouveau un programme de préretraite. Comme vous le savez, l'AFP est très directement dépendante de la commande publique puisque, lors de chaque débat sur le budget de la communication, nous essayons de faire en sorte que les abonnements pris par l'Etat viennent largement abonder ses comptes.
    En fait, le Gouvernement et la commission en viennent à utiliser ce type d'argument pour faire la part du feu. Imposer par la loi ce type de discussion, alors que l'on n'a pas, après un dialogue viril, imposé une telle obligation au MEDEF et que cette question aurait dû être réglée avant même qu'un texte de loi ne soit proposé ici, nous semble totalement inutile. Ce n'est qu'un leurre.
    Le problème, et c'est une question qui a déjà été abordée dans nos travaux mais sur laquelle nous interviendrons à nouveau, c'est de savoir si vous allez transformer de jeunes retraités en chômeurs âgés. S'il n'y a pas un changement de culture profond, une mobilisation forte, un engagement considérable des pouvoirs publics pour amener un changement d'attitude chez les responsables d'entreprise qui ont toujours comme premier objectif d'évacuer les travailleurs âgés au prétexte qu'ils auraient une moindre productivité, c'est une politique de cynisme social et d'irresponsabilité économique.
    Cette question concerne le MEDEF, mais nous aimerions qu'elle concerne aussi l'Etat, car l'Etat est l'un des principaux employeurs. Pendant toutes les manifestations, des instituteurs ou des infirmières sont venus expliquer qu'ils n'imaginaient pas pouvoir continuer, aussi longtemps que cela sera désormais nécessaire, à exercer l'ensemble des tâches qu'ils ont l'habitude d'exercer.
    Cette question est parfaitement légitime, peut-être pas pour toutes les professions de la fonction publique. Dans un grand nombre d'entre elles sans doute, on peut travailler aussi bien à soixante et un ans qu'à cinquante-neuf ans. Néanmoins, il est clair que l'employeur public qu'est l'Etat devrait prendre l'initiative d'une autre politique des ressources humaines. La question posée, c'est le changement de nature du travail tout au long de la vie. Encore faudrait-il que l'Etat employeur public ait la volonté et la capacité de mener une gestion des carrières afin que des personnes qui ne peuvent plus physiquement assumer totalement leurs tâches aient la possibilité de continuer.
    Oui ou non, l'Etat employeur public a-t-il affiché avant même que cette loi ne soit discutée la volonté de faire en sorte que les travailleurs âgés se trouvent dans une situation d'emploi maximal correspondant à l'évolution des carrières ?
    M. le président. Merci, monsieur Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. On le sait bien, en effet, il faudra une évolution des carrières, y compris dans le secteur public. C'est sans doute ce qui manque fortement dans la gestion de la fonction publique : cette capacité à faire évoluer tout au long de la vie les fonctions, qui doivent être évidemment dissociées des statuts. Ce n'est pas un problème. Encore faudrait-il que l'Etat affiche véritablement une volonté politique en la matière.
    M. le président. Sur l'amendement n° 3153, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Cet article additionnel pose une question sérieuse, car la France est un des pays où le taux de salariés de cinquante à cinquante-cinq ans est le plus bas.
    Quand on connaît un peu les entreprises, industrielles ou de service, on a le droit de se demander pourquoi. Il me semble qu'il y a à cela deux causes essentielles. On connaît des centaines de licenciements dits économiques, collectifs pour le moins et souvent boursiers, où ce sont précisément les salariés de cette tranche d'âge qu'on licencie le plus facilement.
    Dans nombre d'entreprises, aussi, après avoir bien pressuré le personnel, l'avoir bien exploité, bien usé, on décide de le rajeunir. On supprime aussi des catégories de salariés qui ont pourtant de l'expérience, alors qu'on parle souvent de la transmission du savoir, du savoir-faire, et de la formation.
    Songeons que ces salariés travaillent dans des conditions souvent très difficiles. La France compte encore 6,5 millions d'ouvriers, selon la stricte définition de l'INSEE, travaillant en particulier dans l'industrie. Mais il existe aussi, dans certaines catégories de services, des ouvriers spécialisés, de véritables OS à la chaîne, dont les conditions de travail sont plus que compliquées.
    Si l'on veut en effet faire travailler davantage ces catégories, c'est qu'il manque à l'évidence un certain nombre de générations : si 34 % des cinquante-cinq - soixante-quatre ans travaillent, 66 % ne travaillent pas. De plus, dès qu'il y a des licenciements - les charrettes que nous connaissons actuellement -, ce sont elles qui sont le plus touchées. On nous dit qu'il faut changer de pensée et de culture : de ce point de vue, les employeurs aussi ont du travail à faire pour se débarrasser de cette idée selon laquelle, dès qu'un salarié homme ou femme, vieillit, il produit moins et moins rapidement, et qu'il est préférable de le remplacer par un jeune, plus productif.
    D'autre part, parler de leur accès à la formation est risible. Pendant toute leur vie, ces salariés n'ont jamais eu accès à la formation professionnelle. Je peux vous montrer les plans de formation professionnelle dans les entreprises : les comités d'entreprise n'ont pas un mot à dire, on se contente de les informer, mais, vous le savez bien, la formation va aux plus formés, pas à ceux qui en ont vraiment besoin. Parler de la formation, c'est un voeu pieux.
    Je comprends le souci qui s'exprime là et je ne suis pas contre cet amendement, mais je considère qu'il faut étudier sérieusement la question et réfléchir à des propositions concrètes pour relever ce défi.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 3153.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   57
Nombre de suffrages exprimés   51
Majorité absolue   26
Pour l'adoption   44
Contre   7

    L'Assemblée nationale a adopté.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis, a présenté un amendement, n° 15, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 173-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les caisses et services gestionnaires des régimes de base d'assurance vieillesse ont l'obligation de se transmettre directement ou indirectement, lorsque ces informations sont nécessaires à la liquidation des pensions, les données relatives à la carrière de leurs ressortissants et notamment les périodes prises en compte, la durée d'assurance et la nature des trimestres validés au plus tard en décembre de l'année qui précède le 56e anniversaire de l'assuré puis, en cas de modification, en décembre de chaque année suivante. »
    Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. le rapporteur pour avis.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. La coordination entre les multiples régimes de retraite est indispensable dans le domaine de l'information. C'est une des raisons qui justifient la création du groupement d'intérêt public prévu par l'article 8. Cet article additionnel vient tout simplement compléter ce dispositif et participe de la même démarche.
    M. François Goulard. Très bien ! Il a raison !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a adopté l'amendement de M. Bertrand.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avis favorable.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 15.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   55
Nombre de suffrages exprimés   50
Majorité absolue   26
Pour l'adoption   49
Contre   1

    L'Assemblée nationale a adopté.
    (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Guillaume. C'est Gremetz qui s'est trompé !
    M. François Goulard. Ça valait vraiment le coup de demander un scrutin public pour ça !
    M. Jean-Luc Warsmann. C'est vraiment de l'obstruction !
    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, et M. Jacquat ont présenté un amendement, n° 3154, ainsi rédigé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Dans un délai de cinq ans, le Gouvernement remettra un rapport au Parlement présentant les mesures législatives et réglementaires prises concernant la mise en place d'un système dégressif de charges sociales, à due proportion de la part de salariés de plus de cinquante ans dans l'entreprise. »
    Sur l'amendement n° 3154, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    M. Richard Mallié. C'est scandaleux !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est ridicule !
    M. Jean-Claude Lefort. Ah bon ?
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. La question de l'emploi des salariés de plus de cinquante ans constitue un enjeu majeur au sein du débat sur les retraites : notre pays se caractérise en effet par la faiblesse du taux d'activité des salariés de plus de cinquante ans (34 % entre cinquante-cinq et soixante-quatre ans).
    Une des raisons d'une telle faiblesse est, entre autres, le coût de ces emplois pour les entreprises. Pour compenser ce handicap, il serait utile de réfléchir à la mise en place d'un système de charges sociales dégressives, en fonction de la part des salariés de plus de cinquante ans dans l'entreprise.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président...
    M. le président. Je vous ai vu, monsieur Gremetz, vous aurez la parole tout à l'heure.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je voudrais aussi intervenir sur l'amendement !
    M. le président. Vous aurez également la parole.
    M. René Couanau. Ce n'est pas le café du commerce, ici !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Monsieur le président, la commission a adopté cet amendement à l'unanimité. Bien que sa portée soit limitée et qu'il puisse être amélioré dans sa rédaction, il est très important, car il touche à un thème qui nous tient à coeur, à une des difficultés sociales et humaines les plus importantes de notre pays : la faible « employabilité » des salariés de plus de cinquante-cinq ans. Le taux est en effet le plus faible d'Europe.
    Nous avons entendu, en particulier sur les bancs de l'opposition, diverses réserves et interrogations sur les perspectives contenues dans le projet de loi, qui prévoit une amélioration importante du taux d'emploi au-delà de cinquante-cinq ans.
    Mme Muguette Jacquaint. Ça, on verra !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il s'appuie, en toute logique, sur des phénomènes démographiques que nous connaissons tous : l'évolution de la pyramide des âges et le départ en retraite chaque année, dès 2006, de 300 000 salariés de plus, vont produire mécaniquement de nouvelles embauches.
    Toutefois, la charge plus lourde, en termes de salaires, que représentent les salariés en fin de carrière pour les entreprises, conduit à atténuer cette tendance.
    M. Maxime Gremetz. Ce sont les patrons qui ne veulent pas payer !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il convient donc d'entreprendre une réflexion sur le sujet afin d'envisager des dispositions incitatives.
    J'entends bien M. Gremetz s'inquiéter de voir institué un nouvel allongement de charges.
    Une autre lecture et une autre rédaction pourraient être apportées à l'amendement. Un mécanisme dégressif peut se faire à solde global égal pour les entreprises. Les rédacteurs de l'amendement et ceux qui l'ont adopté en commission n'ont nullement l'intention de se lancer dans un nouveau dispositif d'allégement généralisé des charges, et il s'agit simplement de mettre en oeuvre une pondération qui prenne en compte la réalité des charges, au regard des grands objectifs de la nation, afin que celle-ci puisse utiliser au mieux les capacités de travail de tous les autres salariés, quel que soit leur âge.
    Tel est l'esprit dans lequel l'amendement a été réalisé. Il a surtout pour objectif d'engager un débat approfondi sur la question et d'interroger le Gouvernement avec précision, sur un point particulièrement important du projet de loi, vous le savez, monsieur le ministre.
    M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 11229.
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous ne l'avons pas, monsieur le président !
    M. le président. Il sera distribué.
    M. Jean-Marie Le Guen et M. Jean-Claude Lefort. Nous ne l'avons pas : nous demandons une suspension de séance !
    M. le président. Je vous demanderai, monsieur le ministre, de lire avec soin le sous-amendement, afin que nos collègues en prennent connaissance. (« Nous ne l'avons pas ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Il va vous être distribué, mes chers collègues. Il est court et j'ai demandé à M. le ministre de le lire avec précision. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il est toujours permis de présenter oralement un sous-amendement.
    L'Assemblée a déjà voté diverses dispositions touchant à ce sujet important, notamment, à l'article 5, un amendement de la commission prévoyant l'organisation d'une conférence tripartite sur l'emploi des personnes de plus de cinquante ans.
    Dans ce contexte, si le Gouvernement peut être favorable à la demande de présentation d'un rapport sur la question du maintien au travail des salariés âgés de plus de cinquante ans, la rédaction de l'amendement est en revanche trop restrictive puisqu'elle désigne un seul dispositif pour aider au maintien des salariés âgés de plus de cinquante ans, qui est le système dégressif de charges. Il n'est pas certain que ce soit là le système le plus efficace et qu'il n'y ait pas d'autres voies à explorer afin d'améliorer le taux d'activité des salariés âgés de plus de cinquante ans. Le sous-amendement que présente le Gouvernement consisterait à remplacer les mots « prises concernant la mise en place d'un système dégressif de charges sociale, à due proportion de la part des salariés de plus de cinquante ans dans l'entreprise » par les mots « prises pour favoriser le maintien en activité des salariés âgés ». Cette nouvelle rédaction permettrait au rapport d'envisager l'ensemble des dispositifs nécessaires au maintien en activité dans l'entreprise des salariés âgés de plus de cinquante ans.
    M. René Couanau. Très bien !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole, monsieur le président.
    M. le président. Vous l'aurez tout à l'heure, monsieur Le Guen.
    Je suis en effet saisi d'un sous-amendement, n° 11229, présenté par le Gouvernement, ainsi rédigé :
    « Dans l'amendement n° 3154, après le mot : "réglementaires, substituer aux mots : "prises concernant la mise en place d'un système dégressif de charges sociales, à due proportion de la part de salariés de plus de 50 ans dans l'entreprise les mots : "prises pour favoriser le maintien en activité des salariés âgés. »
    M. Alain Néri. Nous n'avons pas le texte !
    M. Jean-Claude Lefort. Nous voulons le texte !
    M. Jean-Marie Le Guen. Cela commence à bien faire !
    M. le président. Monsieur Le Guen, il arrive fréquemment que des sous-amendements soient présentés oralement. M. le ministre a lu le texte de celui-ci avec précision.
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, je vous demande une suspension de séance, afin d'examiner le sous-amendement que nous aimerions voir distribuer dans l'hémicycle.
    M. Jean-Luc Warsmann. Nous sommes en pleine obstruction !

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures trente.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Sur le sous-amendement n° 11229, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je souhaite intervenir sur le sous-amendement, mais je suis également conscient qu'il se déroule dans notre assemblée un certain nombre de manoeuvres sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir.
    Je comprends tout à fait pourquoi le Gouvernement a déposé un tel sous-amendement. En effet, l'amendement présenté par notre collègue Jacquat, pour qui j'ai beaucoup d'estime et d'amitié,...
    M. Denis Jacquat. Merci !
    M. Jean-Pierre Brard. Ça va lui faire perdre des voix !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... me surprend et me laisse perplexe. N'a-t-il été déposé que pour gagner du temps ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Richard Mallié. C'est l'hôpital qui se « fout » de la charité !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ou s'agit-il de faire croire que la majorité fait quelque chose pour l'emploi des seniors ?
    M. Jérôme Rivière. Vous n'avez jamais rien fait !
    M. Jean-Marie Le Guen. L'amendement prévoit que, dans un délai de cinq ans, le Gouvernement remettra un rapport au Parlement sur les mesures législatives et réglementaires prises pour mettre en place un système dégressif de charges sociales en fonction de la part des salariés de plus de cinquante ans dans l'entreprise. Autrement dit, dans cinq ans, le gouvernement devrait donc nous donner des informations sur ce que nous aurons voté ! C'est tout de même un peu extraordinaire, même si ce genre de disposition n'a rien de déterminant.
    Mais cela ne s'arrête pas là. Ce qui est encore plus extraordinaire, c'est de dire que la politique que le Gouvernement et la majorité souhaitent mettre en oeuvre pour les seniors consiste à ne pas prélever de charges sociales sur les salaires de ces derniers !
    D'un côté, on affirme que le financement de cette réforme sera assuré notamment par le développement de l'emploi, car cela permettra d'accroître le produit des charges sociales. Mais, d'un autre côté, on propose, pour favoriser le développement de l'emploi, de supprimer les charges sociales pesant sur les emplois des seniors. Mais c'est le serpent qui se mord la queue !
    M. Jean-Pierre Brard. Et il est venimeux !
    M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement montre que vous n'avez absolument aucune idée de la façon dont vous allez financer la politique des retraites. Ce serpent est en effet venimeux, comme le dit fort justement M. Brard.
    Car dire qu'on va créer de l'emploi pour les seniors sans que cela contribue au financement des retraites. C'est admettre qu'il s'agit de leur assurer un minimum vital...
    Mme Muguette Jacquaint. Bien sûr !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... que la protection sociale, notamment les retraites, ne pourra plus leur fournir !
    On se trouve dans une logique d'organisation d'emplois aidés « déchargés » ayant pour finalité de fournir des compléments de rémunération à des salariés ou à des retraités dépourvus de moyens suffisants d'existence et obligés de retravailler pour toucher de maigres salaires. Tel est l'objet implicite - pour ne pas dire parfaitement explicite - de l'amendement.
    Il n'est donc pas étonnant que le Gouvernement cherche à masquer cette mise en lumière d'une politique catastrophique en proposant un sous-amendement, qui ne gomme pas l'aspect « cosmétique » de l'amendement, mais masque le dévoilement quelque peu impudique de la politique menée en direction des seniors.
    M. François Guillaume. Des grands mots !
    M. Jérôme Rivière. Non, des gros mots !
    M. Jean-Marie Le Guen. On peut tout à fait comprendre ce qui motive le Gouvernement. Celui-ci ne veut plus entendre parler de baisse des charges sociales, mais, avec une générosité totalement imprécise, de politique mise en oeuvre en faveur des seniors.
    Seulement nous n'avons toujours pas, au moment où nous débattons - et nous en sommes tout de même à l'article 8 du texte -, l'énoncé de la politique que vous entendez mener pour l'emploi de ces salariés, et l'emploi en général. Ainsi, le secrétaire général de la CFDT,...
    M. le président. Monsieur Le Guen...
    M. Jean-Marie Le Guen. ... pourtant partie prenante de l'accord avec vous, déplore aujourd'hui dans Le Monde votre absence de politique de l'emploi en faveur des seniors, et en faveur de l'emploi en général.
    M. Richard Mallié. Cela fait dix minutes que vous parlez !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je sais, mes chers collègues, que, pour vous,...
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Ça suffit !
    M. le président. Merci, monsieur Le Guen !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... l'essentiel n'est pas de traiter de ce type de problème, puisqu'un rapport vous indiquera dans cinq ans quelle politique aura été menée. Pour autant, il ne me semble tout de même pas inutile, au détour de ce sous-amendement, d'interpeller le Gouvernement sur la question.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Je voudrais revenir sur l'employabilité des plus de cinquante ans. En fait, la position du Gouvernement en la matière est très en deçà des objectifs qu'il se fixe. Beaucoup de personnes, au moment où elles atteignent l'âge de soixante ans et partent en retraite, n'ont déjà plus d'activité professionnelle.
    Nous avons déjà évoqué ces difficultés hier. Plutôt que d'allonger la durée de cotisation au-delà de soixante ans, il nous paraît préférable de maintenir les salariés âgés, souvent qualifiés, dans l'employabilité. Or, M. Chérèque l'a indiqué dans un quotidien national aujourd'hui, le MEDEF freine des quatre pieds.
    Pour maintenir des personnes qualifiées âgées dans l'employabilité au-delà de cinquante ans, il faut pouvoir proposer une politique de formation tout au long de la vie, performante, assortie de moyens. Malheureusement, tel n'est pas le cas. Nous constatons, au contraire, une baisse des crédits, notamment à l'Agence nationale de la formation professionnelle pour les adultes. Du coup, il est bien difficile de respecter cette orientation.
    Plutôt que d'affirmer quelques principes à travers un amendement et un sous-amendement, il faudrait que le Gouvernement et l'Etat dégagent les moyens nécessaires. D'ailleurs, M. Chérèque le reconnaît lui-même : on va de rapport en rapport, de négociation en négociation, mais, en réalité, il ne se passe rien du tout.
    Les intentions sous-tendues par l'amendement sont sans doute intéressantes, mais sur le terrain il n'y a pas aujourd'hui de volonté affirmée de la part du Gouvernement pour assurer une formation tout au long de la vie. Nous avons certes pu lire, ici et là, que le Gouvernement allait engager une politique dans ce domaine dans le courant de cette année, mais on ne voit absolument rien venir, et même on voit les crédits de la formation évoluer dans un sens défavorable, tandis que les crédits de l'éducation nationale sombrent dans les abîmes.
    Le sous-amendement du Gouvernement est, certes, sympathique, mais il ne reste qu'à l'état d'intention et, en réalité, il ne fait pas avancer le dossier. Nous ne pouvons que le regretter.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. C'est un sous-amendement intelligent. En effet, il faut oser nous présenter un amendement qui, en définitive, explique qu'une des raisons de la faiblesse du taux d'activité des salariés de plus de cinquante ans est le coût de ces emplois pour les entreprises. M. Fillon s'est dit qu'on ne pouvait pas dire ça aussi crûment - c'est indigne pour les salariés. Ces gens, avant d'être licenciés à cinquante ans et même avant, ont été utilisés par ces entreprises. On les licencie parce qu'on considère qu'ils ne sont plus assez efficaces, qu'ils ne sont plus assez créatifs, qu'ils ne sont plus assez productifs, qu'ils ne sont plus assez agiles. De plus, ils coûtent cher. C'est normal, ils ont de l'ancienneté, du savoir-faire, des qualifications. Ce ne sont pas des CDD, ce ne sont pas des intérimaires, ce sont des emplois stables, durables, soumis à des conventions collectives. Ce ne sont pas les salariés qui ne veulent pas travailler, ce sont les entreprises qui ne veulent plus les employer après avoir tiré d'eux le maximum.
    Comment réagit-on face à cette réalité ? Puisque ces salariés coûtent cher aux entreprises, on propose de baisser le coût du travail. Comme cela, les entreprises embaucheront tout de même un peu. C'est comme si on cherchait à placer des gens handicapés en disant à des employeurs : « Prenez-les, on va vous aider » ! Mais qu'est-ce que c'est que cette politique inhumaine et indigne à l'égard des salariés ?
    M. Fillon, considérant que les choses ne pouvaient pas être dites si clairement, propose - c'est en cela que je parlais d'intelligence - un rapport au Parlement pour présenter des mesures législatives et réglementaires sur la mise en place d'un système dégressif de charges sociales à due proportion de la part de salariés de plus de cinquante ans dans l'entreprise !
    Voilà la grande politique qui nous est présentée pour favoriser l'emploi, l'épanouissement, la formation, la qualification ! Vous vous rendez compte ! Le sous-amendement dit la même chose que l'amendement mais d'une autre façon, plus discrètement. Il masque la réalité et propose une version morale, plus acceptable.
    M. Pascal Terrasse. Absolument. C'est un cache-sexe !
    M. Maxime Gremetz. Moi qui suis un ouvrier, un salarié, je me sens atteint dans ma dignité quand je lis ça !
    M. Michel Voisin. Nous sommes nombreux ici M. Gremetz à être salariés !
    M. Maxime Gremetz. Comme si ces salariés, qui ont tant donné, étaient une charge pour la société ! D'un point de vue humain et moral, ce n'est pas bien du tout !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, dernier intervenant.
    M. Jean-Pierre Brard. Je trouve que l'amendement de M. Accoyer est impudique, pour reprendre le terme de M. Le Guen. Il propose d'alléger les charges pour les travailleurs âgés alors que l'expérience a montré qu'une telle politique ne ralentit pas la hausse du chômage.
    L'allégement des charges présente l'avantage, si l'on suit la logique de M. Accoyer, de creuser des déficits, ce qui permet de voter de nouveaux textes qui remettent en cause les systèmes de solidarité qui ont été progressivement construits dans notre pays.
    Vous vous référez à l'étranger quand cela vous arrange, mais à l'étranger on ne trouve pas ces usines à gaz que représentent ces mécanismes d'allégement de charges. Néanmoins, les salariés ne sont pas mis à la retraite si tôt. Votre logique est de faire confiance à M. Seillière, et de ne prendre aucune mesure véritablement coercitive.
    J'en viens au sous-amendement présenté par M. Fillon. Il est toujours délicat de faire l'exégèse des textes de M. Fillon, il faut d'abord en percer le sens profond. Au premier degré, il n'est pas impudique du tout par rapport à l'amendement de M. Accoyer, puisque M. Fillon fait sauter la référence à l'allégement des charges. Mais en réalité, il est rédigé de telle manière que le Gouvernement a les mains entièrement libres.
    Nous avons donc le choix entre deux solutions : l'immorale, c'est la proposition de M. Accoyer, la morale, celle du Gouvernement. Mais si on veut vraiment favoriser le maintien en activité des salariés âgés, il faut pénaliser et renforcer le coût de leur éloignement de l'entreprise. Du reste, il me semble, monsieur le ministre, que vous avez évoqué de telles hypothèses la semaine dernière dans votre discours liminaire.
    Il n'est jamais très prudent de signer un chèque en blanc à un gouvernement, quel qu'il soit. Et, pour être dans le champ de la politique depuis un certain temps...
    M. Jérôme Rivière. Trop longtemps !
    M. Jean-Pierre Brard. ... nous savons bien qu'il vaut mieux que les choses soient clairement dites pour ne pas avoir de mauvaises surprises.
    M. le président. Monsieur Brard, veuillez conclure.
    M. Jean-Pierre Brard. Je termine, monsieur le président.
    En fin de compte, la logique de M. Accoyer oppose les plus âgés et les plus jeunes. Et je reviens à Cicéron que je n'ai pas eu le temps de citer complètement tout à l'heure.
    M. René Couanau. Citez-le en latin !
    M. Jean-Pierre Brard. Non, Vatican 2 est passé par là !
    M. René Couanau. Ça restera entre nous ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. A l'époque, vous savez que l'occupation reine était l'agriculture - ça doit vous dire quelque chose à Sablé, monsieur le ministre. Cicéron fait ce commentaire : « De fait, l'agriculteur, si vieux soit-il, à qui l'on demande pour qui il plante, n'hésite pas à répondre : "Pour les dieux immortels, qui veulent que, sans me contenter de recevoir ces biens de mes ancêtres, je les transmette aussi à mes descendants. »
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix le sous-amendement n° 11229.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   65
Nombre de suffrages exprimés   64
Majorité absolue   33
Pour l'adoption   51
Contre   13

    L'Assemblée nationale a adopté.
    Je mets aux voix l'amendement n° 3154, modifié par le sous-amendement n° 11229.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   65
Nombre de suffrages exprimés   65
Majorité absolue   33
Pour l'adoption   55
Contre   10

    L'Assemblée nationale a adopté.

Article 9

    M. le président. « Art. 9. - I. - L'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale est modifié comme suit :
    « 1° Au premier alinéa, après les mots : "une activité non salariée sont insérés les mots : "relevant du ou desdits régimes » ;
    « 2° Après le premier alinéa sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
    « Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle à la reprise d'une activité procurant des revenus qui, ajoutés aux pensions servies par les régimes mentionnés au premier alinéa ainsi que par les régimes complémentaires légalement obligatoires régis par le livre IX, sont inférieurs au dernier salaire d'activité perçu avant la liquidation de la ou desdites pensions et sous réserve que cette reprise d'activité, lorsqu'elle a lieu chez le dernier employeur, intervienne au plus tôt un an après la date d'entrée en jouissance de la pension.
    « Lorsque l'assuré reprend une activité lui procurant des revenus qui, ajoutés aux pensions servies par les régimes mentionnés au premier alinéa ainsi que par les régimes complémentaires légalement obligatoires régis par le livre IX, sont supérieurs au plafond mentionné à l'alinéa précédent, il en informe la ou les caisses compétentes et le service de ces pensions est suspendu. » ;
    « 3° Le dernier alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
    « Les dispositions du premier alinéa ne sont pas opposables à l'assuré qui demande le bénéfice d'une pension au titre d'une retraite progressive prévue par des dispositions législatives ou réglementaires, notamment par les articles L. 351-15 du présent code et L. 732-29 du code rural. »
    « II. - L'article L. 634-6 du code de la sécurité sociale est remplacé par les dispositions suivantes :
    « Art. L. 634-6. - Le service d'une pension de vieillesse liquidée au titre des régimes d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales et dont l'entrée en jouissance intervient à compter d'un âge fixé par décret en Conseil d'Etat est subordonné à la cessation définitive des activités relevant du ou desdits régimes.
    « Les dispositions du premier alinéa ne font pas obstacle à l'exercice par l'assuré d'une activité procurant des revenus inférieurs à des seuils adaptés selon les zones géographiques concernées et déterminés dans des conditions fixées par décret.
    « Lorsque l'assuré reprend une activité lui procurant des revenus supérieurs à ceux prévus à l'alinéa précédent, il en informe la caisse compétente et le service de la pension est suspendu.
    « Les dispositions du premier alinéa ne sont pas opposables à l'assuré qui demande le bénéfice de sa pension au titre de l'article L. 634-3-1 du présent code. »
    « III. - Les dispositions du présent article sont applicables aux pensions prenant effet à compter du 1er janvier 2004. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. L'article 9 est inquiétant. Il facilite le cumul emploi-retraite alors que la France connaît l'une de ses plus graves crises dans le domaine de l'emploi - près de 160 000 chômeurs en plus selon les prévisions communiquées hier pour la fin de l'année, soit un taux de chômage de 9,6 % à la fin de l'année. Et le dispositif qui nous est proposé va vraisemblablement alourdir encore le chômage dans les années qui viennent, notamment du fait de l'allongement de la durée de cotisation.
    L'article 9 permet de revenir sur une décision qui remontait, sauf erreur de ma part, à 1982 sur le cumul emploi-retraite - dont l'application avait, d'ailleurs, été reportée d'année en année au fil des projets de loi de financement de la sécurité sociale. Ce dispositif concerne environ trois cent mille personnes.
    Le cumul emploi-retraite est un moyen de contourner le problème de l'âge de départ à la retraite. Compte tenu de la faiblesse des pensions qui seront servies dans les années à venir du fait de ce texte et, donc, de l'appauvrissement des retraités, un certain nombre de travailleurs âgés de plus de soixante ans, voire de soixante-cinq ans, seront contraints de cumuler une faible pension de retraite avec un salaire.
    Cela va soulever un problème, notamment chez les jeunes qui voudront entrer sur un marché de l'emploi où les personnes âgées cumulant une retraite et un salaire seront moins exigeantes. Ce n'est pas bon pour la jeunesse, alors que ce sont déjà en grande partie les jeunes qui peinent, aujourd'hui, à trouver le chemin de l'emploi.
    Tel qu'il est présenté aujourd'hui, le dispositif ne nous permet pas d'obtenir des assurances sur le cumul entre des revenus tirés, d'une part, de la retraite et, d'autre part, d'un salaire. C'est un véritable problème.
    On pourrait imaginer, et l'article, d'ailleurs, l'évoque, un dispositif de cumul emploi-retraite dans certaines zones, je pense aux zones rurales, où il est difficile de trouver des professionnels, notamment dans l'artisanat et le commerce. On pourrait permettre aux personnes qui le souhaitent de continuer à exercer leur métier, même après leur cessation d'activité.
    Je pense également aux membres des professions médicales qui éprouvent de grandes difficultés à s'installer dans le milieu rural. Certes, ce cumul emploi-retraite devrait obéir à certaines conditions. Il ne s'agirait pas de généraliser le dispositif, mais d'essayer de maintenir les acteurs économiques dans des zones fragiles, rurales ou urbaines.
    Le dispositif qui nous est proposé mettra en concurrence celles et ceux qui ont la chance d'avoir une activité professionnelle, qu'ils pourront cumuler avec une retraite, au détriment des jeunes qui veulent entrer dans la vie active, qui, eux, ne pourront pas accéder à l'emploi.
    L'article 9, tel qu'il est présenté aujourd'hui, loin de simplifier et d'harmoniser les règles de limitation du cumul entre l'emploi et la retraite, aura des conséquences particulièrement douloureuses, notamment pour les jeunes. Au moment où on parle de supprimer le cumul des mandats, il serait regrettable de favoriser un cumul de revenus. Ce serait particulièrement indécent à un moment où le chômage s'aggrave.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Comme l'a dit fort justement Pascal Terrasse, nous abordons un article important puisqu'il concerne le cumul emploi-retraite.
    Alors que tous les parlementaires disposent des mêmes documents, la lecture que nous en faisons est totalement différente. C'est surprenant !
    M. Jean-Pierre Brard. Mais vous lisez à l'envers !
    M. Denis Jacquat. L'argument selon lequel la réforme risque, en incitant à travailler plus longtemps, de pénaliser les jeunes sur le marché de l'emploi n'est pas fondé.
    En effet, la France cumule le taux d'activité des salariés de plus de cinquante ans le plus bas d'Europe - 32 % pour les hommes de cinquante-cinq à soixante-quatre ans, contre 37 % en Europe - et une entrée tardive sur le marché de l'emploi des jeunes - le taux d'activité des seize-vingt-quatre ans est dans notre pays d'environ 29 %. Cela montre qu'il n'est pas contradictoire de vouloir inverser les deux tendances à la fois. D'ailleurs, les pays européens où le taux d'activité des jeunes est élevé connaissent également un taux d'activité élevé des seniors.
    En outre, dans notre pays, l'évolution démographique conduira certains métiers à connaître une pénurie de main-d'oeuvre. La réalité du marché du travail fait qu'un départ à la retraite n'est pratiquement jamais compensé par l'embauche d'un jeune. En conséquence, le fait que certains retraités puissent reprendre une activité professionnelle n'aura absolument aucune incidence négative sur l'emploi des jeunes.
    L'article 9 vise à assouplir les règles existantes en les simplifiant et en les harmonisant.
    Certains sont farouchement hostiles au cumul emploi-retraite. Je viens d'un département industriel et où il y a beaucoup de militaires : la Moselle. Or, dans notre département, où l'on aime l'armée comme on l'aime au niveau national, on veut une armée professionnelle qui soit performante. Pour cumuler professionnalisme et performance, il faut une armée jeune. Or les jeunes militaires, à qui est proposé un contrat au moment de leur engagement, veulent être rassurés sur leur avenir, pour eux-mêmes et pour la politique de défense de notre pays.
    L'article 9 est indispensable.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, s'il n'avait pour objet de mettre en oeuvre une régression sociale d'ampleur qui touchera chaque foyer de notre pays et qui condamnera pour des années à venir la majorité des retraités à la misère, votre projet prêterait à sourire par l'inconséquence de certaines de ses dispositions, notamment celles relatives au cumul de la retraite et de l'emploi que vous tentez d'imposer à l'article 9.
    D'après son exposé des motifs, cet article « a pour objectif de simplifier et d'harmoniser les règles de limitation du cumul entre un emploi et une retraite ». Comme si nous manquions de main-d'oeuvre ! Trois millions de chômeurs, ce n'est sans doute pas suffisant pour pourvoir à tous les emplois !
    Le principal objectif est donc de permettre le cumul des pensions avec des revenus d'activité, dans la limite du montant du dernier salaire et après une durée d'inactivité effective d'une année.
    Autrement dit - soyons clairs et précis -, cela conduira les employeurs à licencier au plus vite, d'autant qu'ils sauront qu'un an plus tard ils pourront récupérer le même salarié sans rien dépenser, puisque ce sera l'Etat qui paiera la différence entre le salaire et la retraite.
    Extraordinaire ! On n'a jamais vu ça ! Là, on bat tous les records !
    Au surplus, on paiera les entreprises pour maintenir en poste des salariés qui ont de l'expérience, une qualification, la capacité de transmettre leur savoir, y compris aux jeunes. Il faut le faire !
    Mais dans quel système sommes-nous, sinon dans celui le plus indigne, où seule règne la loi du fric, où l'on ne respecte pas les gens, ni leur personnalité, ni leurs qualifications ?
    Il s'agit d'une véritable régression sociale. Personne n'a jamais osé appliquer de tels dispositifs !
    M. Pascal Terrasse. Pourquoi parlez-vous aussi fort ?
    M. Maxime Gremetz. Pour vous réveiller !
    M. Pascal Terrasse. Trois ministres sont là rien que pour toi, Maxime !
    M. le président. Monsieur Terrasse, je vous en prie !
    M. Maxime Gremetz. Il y a en effet trois ministres au banc du Gouvernement. Nous sommes très flattés par leur présence. Comme j'ai parlé très fort, ils ont dû bien m'entendre.
    M. le président. Ils vous ont entendu, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Tant mieux !
    Qu'a dit le COR ? Que « la situation de l'emploi s'accompagne depuis de longues années d'une exclusion des actifs de plus de cinquante-cinq ans sous formes diverses - les préretraites, le chômage. Moins de la moitié des salariés du secteur privé sont encore en activité au moment où ils liquident leur retraite ».
    Posons clairement les données : la France connaît un âge moyen de départ à la retraite parmi les plus bas d'Europe - 58,7 ans. Mais à qui la faute ? Le nombre des chômeurs de plus de cinquante-cinq ans est celui qui a le plus augmenté ces dernières années. Rien qu'en 2001, environ 550 000 personnes, soit l'équivalent d'une classe d'âge, se trouvaient en situation de préretraite ou au chômage, dispensées de rechercher un emploi parce que dans l'impossibilité d'en obtenir un sur le marché du travail. Elles sont les premières victimes d'une politique managériale des entreprises, qui considèrent qu'une main-d'oeuvre n'est exploitable que jeune, jusqu'à une certaine limite d'âge. Quand cette main-d'oeuvre n'est plus tout à fait productive, on la jette comme un Kleenex. Tout est bon pour s'en débarrasser. La conséquence est immédiate : les salariés dits « âgés » sont les premiers à remplir les charrettes de licenciements ou de départs en préretraite, volontaires ou, bien souvent, involontaires. Les exemples chiffrés sont légion qui prouvent cette situation, qui n'est pas nouvelle.
    Monsieur le ministre, vous voulez quant à vous les faire travailler plus longtemps.
    M. Pascal Terrasse. Eh oui !
    M. Maxime Gremetz. Vous voudriez leur imposer de reculer leur départ en retraite et leur offrir en cadeau des moyens qui existent déjà dans la pratique. A plusieurs titres, cette proposition est grave et ridicule.
    M. le président. Monsieur Gremetz...
    M. Maxime Gremetz. Je termine, monsieur le président. Ne soyez pas impatient...
    M. le président. Je ne le suis pas !
    M. Maxime Gremetz. ... car nous allons passer de longues nuits ensemble.
    Messieurs les ministres, réfléchissez bien car ce que je viens de dénoncer, la société française ne l'a jamais connu, pas même aux pires moments.
    Vous osez le faire, mais vous verrez ce qui arrivera !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. M. Gremetz fait un peu de terrorisme !
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen.
    M. Pierre Cohen. Monsieur le ministre des affaires sociales, par l'article 9, vous proposez un assouplissement du cumul emploi-retraite. Cette disposition me semble aller à l'encontre de beaucoup de principes que vous avez vous-même évoqués depuis le début du débat.
    En premier lieu, le cumul emploi-retraite est relativement mal vu par une bonne partie des Français. A un moment où le chômage augmente et où les jeunes ont énormément de difficultés à trouver un premier emploi, il paraît difficilement acceptable que l'on assouplisse les règles en vigueur pour faciliter un tel cumul.
    A ce propos, je souhaite manifester à mon tour ma désapprobation quant à la possibilité offerte aux députés de cumuler retraite et activité. J'espère que ce débat nous donnera l'occasion de mettre fin à cette contradiction, à cette anomalie qui est dénoncée par l'ensemble des Français.
    Plus généralement, que cache l'assouplissement en matière de cumul emploi-retraite ? Je crois tout d'abord que vous n'êtes pas complètement convaincu de ce que vous avez négocié avec les syndicats et le MEDEF, ni de ce que vous avez annoncé, à savoir que vous redonneriez réellement la possibilité aux seniors de trouver un emploi.
    Essayons de comprendre ce que représente le cumul emploi-retraite pour des gens qui ont cinquante-cinq ou soixante ans : c'est la possibilité, lorsque l'on dispose d'une retraite relativement faible, d'exercer une activité, qui est généralement sous-payée et qui est relativement intéressante pour les patrons puisqu'ils profitent du travail de personnes qui ont une expérience et une compétence, mais qu'ils rémunèrent avec des salaires qui sont évidemment moindres que si ces personnes avaient conservé leur emploi. On aboutit donc à une marché de dupes : le montant de la retraite est relativement affaibli, mais assorti d'une sorte de carotte, à savoir la possibilité d'exercer un emploi qui pourrait apporter un bon complément de ressource.
    Par ailleurs, la disposition que vous proposez est une insulte aux propos de M. Chérèque, auxquels vous vous référiez continuellement la semaine dernière et dont vous ne parlez plus aujourd'hui. En effet, M. Chérèque a très clairement dit que votre projet manquait d'une véritable politique de l'emploi.
    L'article 9 suffit à démontrer que votre projet de loi est essentiellement fondé sur une remise en cause du montant des retraites, compte tenu de votre parti pris en faveur de l'augmentation du nombre des années de cotisation. Vous devez pourtant savoir qu'un grand nombre de salariés ne parviendront pas à justifier du nombre d'années de cotisation prévu. Ils toucheront donc des retraites qui ne seront pas à taux plein. On y voit l'amorce d'autres moyens pour compenser cette situation. On a déjà parlé de la capitalisation, sur laquelle nous reviendrons.
    A l'article 9, vous imaginez une petite carotte à l'intention de ceux qui n'auront pas les moyens de capitaliser : les petits travaux, les petits emplois. Nous sommes absolument contre !
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. A l'occasion de l'article 9, je voudrais revenir sur la situation préoccupante de l'emploi, notamment des jeunes.
    Dans ma propre ville et mon département, le chômage des jeunes remonte en flèche depuis un an, ainsi qu'en témoignent les chiffres.
    On a parlé de 150 000 suppressions d'emplois depuis quelques mois, et en particulier de l'augmentation du nombre des jeunes demandeurs d'emplois.
    Cette situation n'incitera pas au maintien au travail des seniors, bien au contraire.
    L'article 9 tend logiquement à supprimer les nouvelles conditions de cumul d'une pension de retraite avec des revenus d'activité.
    Il n'est en aucune manière un outil légitime pour sauvegarder notre système par répartition, sinon qu'il permet de contrecarrer la baisse attendue, du fait de votre projet, du niveau de pension, en assurant un revenu de complément aux retraités. Dès lors, pour vivre plus ou moins correctement, un retraité sera dans l'obligation d'allonger sa durée de cotisation, et même au-delà de la période requise, pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Il n'aura plus le choix.
    M. Gremetz a dit que nous n'avions jamais vu cela. Il a raison.
    Je voudrais revenir sur un exemple que j'ai cité hier, concernant une situation que connaissent de nombreuses femmes dans notre pays.
    A la Spler, une entreprise de blanchisserie industrielle, les conditions de travail sont d'un autre âge. En cette période de canicule, les employées ont dû travailler en supportant des températures dépassant les 50°.
    Quelle est la volonté de l'employeur ? Elle n'est pas de faire baisser la température. Il s'agit plutôt de trouver du sang nouveau car, à partir de quarante-huit ou cinquante ans, les femmes qui travaillent dans de telles conditions demandent d'elles-mêmes à cesser leur activité.
    Vous pourrez toujours inciter l'employeur à conserver les personnes âgées de plus de cinquante ans, mais cela ne servira à rien. En revanche, les exonérations de charge l'inciteront certainement à embaucher des jeunes, que l'on continuera à sous-payer, à exploiter. Et elles-mêmes arrivant à l'âge de cinquante ans...
    M. François Guillaume. Quelle logorrhée !
    Mme Muguette Jacquaint. C'est ce que l'on appelle les « salariés Kleenex », monsieur le ministre.
    Vous comprendrez donc pourquoi nous sommes opposés à l'article 9.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. L'article 9 est aussi important qu'il est inquiétant. Il relève même d'une certaine forme de cynisme car, au moment où le chômage des jeunes redevient très préoccupant, le Gouvernement ne trouve rien de mieux que d'assouplir les conditions du cumul emploi-retraite.
    C'est évidemment l'emploi des jeunes qui en fera d'abord les frais.
    La question des retraites pose aussi celle de l'équilibre des générations. Or ce seront les jeunes qui veulent s'insérer dans le marché de l'emploi qui seront finalement pénalisés.
    Mais l'article 9 est aussi une forme d'aveu : les retraites ne suffiront pas pour maintenir le pouvoir d'achat, le niveau de vie et de subsistance d'un certain nombre de personnes dans notre pays. Il permettra à des salariés qui partiront à la retraite sans un niveau convenable de vie et de subsistance de trouver un complément de revenu.
    Nous sommes donc extrêmement inquiets. Cet article va dans le mauvais sens et démontre qu'une fois de plus, vous n'avez pas de véritable politique de l'emploi.
    Et c'est cela qui nous inquiète depuis le début de cette discussion. Sans politique volontariste de l'emploi, nous n'arriverons pas à financer les retraites. Il faut absolument une politique très volontariste en la matière pour que le niveau des retraites soit garanti. C'est pourquoi nous nous opposerons très fortement à cet article.
    M. le président. La parole est à M. Julien Dray.
    M. Julien Dray. Je vais commencer en revenant sur un débat qui nous oppose dans cet hémicycle. La majorité nous dit qu'il faut repenser la question du travail dans notre société, lui redonner toute sa place, le valoriser, le défendre, parce qu'il donne un statut, est créateur de richesses et nous préserve d'une société d'assistés. A ce degré de généralité, nous ne pouvons qu'être d'accord. C'est le droit au travail qui crée le statut de citoyen. Il est un des éléments qui façonnent la citoyenneté. Le problème c'est que la vision que la majorité a de la société ne correspond en rien à la réalité.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Quel ton péremptoire !
    M. Julien Dray. J'ai débattu de la question avec plusieurs d'entre vous, y compris récemment avec M. Jean-François Copé, qui n'est plus dans l'hémicycle. Selon lui, la société se partage entre ceux qui veulent travailler, auxquels il faut donner la possibilité de le faire autant qu'ils le désirent, et ceux qui ne veulent pas travailler, et M. Copé me disait d'ailleurs que c'était leur droit. La politique du Gouvernement c'est donc de donner la possibilité à ceux qui le veulent de travailler le plus longtemps et le plus possible. J'ai un ton péremptoire, parce que je ne crois pas que ce soit cela la réalité. En tout cas, ce n'est pas celle à laquelle je suis confronté. Je n'ai jamais rencontré de gens qui voulaient perdre leur vie à la gagner. Ils veulent avoir un droit au travail, c'est-à-dire avoir une activité et être reconnus dans la société, et ne pas être considérés comme des assistés. Mais je n'ai jamais vu des gens qui voudraient travailler plus de huit heures par jour et ne plus avoir de vacances, tout simplement pour accumuler des richesses, et d'autres qui ne rêveraient que d'une chose : ne jamais travailler et être des assistés. Chacun d'entre nous peut avoir recontré des exceptions dans sa circonscription, mais j'ai plus souvent rencontré des gens qui recherchaient du travail.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. Julien Dray. Ce qui serait indécent, c'est d'en arriver à la situation que certains d'entre nous ont vécue durant la période du chômage de masse, dans les années passées, où des milliers de jeunes et de moins jeunes ne pouvaient accéder au marché du travail, étaient en situation de chômage de longue durée, alors que d'autres, en même temps, accumulaient un maximum d'activités. Une telle disparité est injuste et nous la dénonçons. Or la mesure que vous proposez l'installe et même la généralise. C'est inacceptable. Je ne le souhaite pas pour le pays, mais imaginons que nous revenions à la période des années noires du chômage qui frisait les 4 millions. Quelle serait alors la situation avec les dispositions que vous proposez ? Nous aurions des jeunes qui voudraient entrer sur le marché du travail et des gens qui seraient en fin d'activité mais qui, parce que le montant de leur retraite ne leur serait pas garanti, seraient conduits à rechercher du travail. C'est un terrible conflit de générations dont vous seriez là à l'origine...
    Mme Muguette Jacquaint. C'est plutôt l'exploitation des jeunes et des vieux !
    M. Julien Dray. ... entre ceux qui défendraient leur activité et les autres, qui les pousseraient dehors pour prendre leur place. Voilà ce que nous voulons éviter. « Le diable est souvent dans les détails », dit-on. On retrouve la diablerie du projet de la majorité à l'article 9, parce qu'il créera inévitablement une situation de conflit. D'ailleurs, sur le fond, vous revendiquez ce conflit, parce que vous partez du principe que les individus ont des intérêts particuliers et vous ne voyez plus l'intérêt collectif. Or l'intérêt de la société, c'est que des règles existent et qu'elles s'appliquent à tous. Il faut donc créer les conditions d'un droit au départ à la retraite à un niveau garanti pour empêcher un conflit de générations ou un conflit entre ceux qui ont un emploi et ceux qui n'en ont pas.
    M. le président. Je vous remercie !
    M. Julien Dray. Je vous prie de m'excuser, monsieur le président, mais je n'ai pas terminé ! Cette discussion est importante. Elle aura d'énormes conséquences que nous devrons gérer. Il faut donc aller au fond des choses.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est péremptoire et présomptueux !
    M. Julien Dray. Nous avons le temps, comme le dit M. le ministre. Nous avons toute la soirée, peut-être même tout l'été, pour faire cette démonstration. C'est une question importante pour tous les parlementaires. Que répondront-ils dans quelques semaines ou dans quelques mois, si cette réforme est adoptée, au jeune qui viendra leur dire : « Je ne comprends pas, je cherche du travail et je n'arrive pas à en trouver, alors qu'il y a des personnes âgées qui voudraient partir à la retraite et qui ne le font pas ! » Ce qui me gêne encore plus, c'est la situation - elle existe, je l'ai vue de mes propres yeux et je suis sûr que beaucoup de parlementaires l'ont vue également - des vieux travailleurs, que décrivait parfaitement Mme Muguette Jacquaint. Aux Etats-Unis, lorsque vous entrez par exemple dans l'une de ces entreprises de services...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cela fait sept minutes qu'il parle, monsieur le président. M. Dray aurait-il droit à un double temps de parole ?
    M. le président. Non, il va conclure !
    M. Julien Dray. Je m'apprête à conclure avec cette image qui illustre bien la démonstration que je veux faire. Nous avons tous vu, aux Etats-Unis, dans des entreprises de services, dans des fast-foods ou des magasins, des dames assez âgées qui marchent difficilement. Nous sommes tous saisis par l'angoisse de cette situation.
    Lorsque nous interpellons ces dames en leur demandant : « Mais comment se fait-il que vous soyez dans cette situation ? »
    M. René Couanau. On va pleurer !
    M. Julien Dray. Je sais que vous êtes un homme de coeur, monsieur Couanau, et que vous êtes sensible à cet argument.
    M. Jean-Pierre Brard. Ce sont des larmes de crocodile !
    M. René Couanau. M. Dray devrait regarder sa montre ... (Sourires.)
    M. le président. Monsieur Dray, je vous demande vraiment de conclure !
    M. Julien Dray. Oui, je vais conclure. Je veux seulement aller jusqu'au bout de cette image, celle de ces vieux travailleurs qui voudraient pouvoir s'arrêter et qui ne le peuvent pas. Et à la question « Pourquoi êtes-vous là ? », ils nous répondent : « C'est parce que nous n'avons pas la possibilité d'avoir une bonne retraite que nous sommes obligés de continuer ». Voilà ce que nous voulons éviter ! Voilà pourquoi cet article 9 est extrêmement dangereux et doit être combattu. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Nous avons reçu du renfort. Nous avions tout à l'heure un beau trio de ministres, il ne manquait plus...
    M. le président. Monsieur Brard, vous intervenez sur l'article !
    M. Jean-Pierre Brard. Tout à fait, mais je souhaite resituer mon propos dans le contexte temporel, au sens propre.
    M. Maxime Gremetz. Il faut bien se distraire un peu !
    M. Jean-Pierre Brard. Il ne manquait plus que monsieur le ministre de tout, M. Sarkozy, et M. le ministre des affaires étrangères qui aurait pu nous informer sur les expériences étrangères. Avec ce quintette, on aurait pu avoir un débat d'enfer !
    M. Denis Jacquat. Et anticiper sur la fête de la musique ! Dommage que M. Aillagon ne soit pas là !
    M. Jean-Pierre Brard. Non, je n'ai pas proposé que M. Aillagon se joigne à nous, car je ne suis pas sûr que la retraite des intermittents du spectacle ait grand-chose à gagner avec ce projet gouvernemental.
    M. le président. Je vous en prie ! Revenons à l'article !
    M. Jean-Pierre Brard. L'article qui nous occupe, traitant du cumul emploi-retraite, est la contrepartie logique de la dégradation du niveau des pensions à laquelle va conduire votre projet. Vous l'habillez du manteau de la réhabilitation de la valeur travail, dont vous avez fait l'un de vos thèmes idéologiques favoris, pour justifier les atteintes que vous portez aux acquis sociaux des salariés. Votre goût certain pour la sémantique, monsieur le ministre Fillon, s'affirme de plus en plus. Par exemple, vous opposez la bougeotte à la justice, et vous avez fait des déclarations fortes, ce matin. Les envolées lyriques dans cet hémicycle vous ont certainement inspiré quand, devant vos amis de l'UMP, vous avez déclaré que « la réforme est l'état permanent de la République ». Moi, je connaissais la Révolution permanente de Trotski et ses résultats peu convaincants. Mais je ne voudrais pas comparer votre destin au sien, ce serait très désagréable.
    M. le président. Monsieur Brard !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Mais c'est intéressant !
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Accoyer, je vous donnerai un cours particulier si vous voulez.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. De trotskisme, il m'en faudra plusieurs !
    M. Jean-Pierre Brard. Cet article va même jusqu'à autoriser qu'une activité réduite puisse être poursuivie chez le même employeur, étant précisé qu'une activité est considérée comme réduite lorsqu'elle procure des revenus qui, ajoutés à l'ensemble des pensions et allocations perçues, n'excèdent pas le dernier salaire d'activité. On voit ainsi apparaître l'organisation de petits emplois sous-payés susceptibles de fournir, à des entreprises séduites par l'aubaine, une main-d'oeuvre à bon marché. Notre collègue tout à l'heure avait raison de faire référence aux Etats-Unis où l'on sait bien comment les choses se passent.
    On nous dit que cette disposition va opportunément encourager les plus de cinquante-cinq ans à travailler à un moment où il est nécessaire d'élever le taux d'activité chez les salariés de plus de cinquante-cinq ans. Cela est vrai, mais ce n'est pas la bonne méthode pour parvenir à ce résultat. La bonne méthode consiste à permettre aux salariés, par l'organisation du travail, l'adaptation des tâches et des postes de travail, l'amélioration des motivations au travail, la poursuite de leur activité dans l'entreprise dans laquelle ils ont déjà accompli tout ou partie de leur vie professionnelle. C'est là une question de respect des salariés et de reconnaissance de leur qualification et de leur savoir-faire. S'agissant plus spécifiquement du cas des parlementaires, il est étonnant, pour ne pas dire plus, que les hauts fonctionnaires puissent cumuler leur pension avec les indemnités parlementaires. Il serait souhaitable de mettre fin à cette situation qui choque nos concitoyens.
    M. Pascal Terrasse. C'est un vrai scandale !
    M. Jean-Pierre Brard. Comme vous le savez, M. de Courson a déposé un amendement très étrange qui ne porte pas sur la Cour des comptes, mais sur les parlementaires et les hauts fonctionnaires. Apparemment, il sait que cet amendement est anticonstitutionnel et nous serons très intéressés par le débat qui va s'ensuivre.
    M. le président. ... Parce que c'est dans la logique du débat que nous venons d'avoir sur l'article, nous allons aborder la discussion des amendements n°s 4655 à 4661. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maxime Gremetz. Ah non, monsieur le président !
    M. Pierre Cohen. Il est déjà dix-neuf heures trente !
    M. le président. Mais il est prévu que la séance se poursuive jusqu'à vingt heures ! Et je considère, monsieur Cohen, que ces amendements de suppression étant dans la logique de ce qui vient d'être dit sur l'article, nous pouvons les aborder.
    Sur les amendements n°s 4655 à 4661, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Nous souhaitons que M. le rapporteur et M. le ministre nous répondent avant d'aborder la discussion de ces amendements. Nous demandons de plus une suspension de séance pour nous renseigner sur l'organisation du débat de cette nuit, de demain et de dimanche.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à dix-neuf heures quarante-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Je suis donc saisi de sept amendements identiques, n°s 4655 à 4661.
    L'amendement n° 4655 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4656 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4657 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4658 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4659 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4660 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4661 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 9. »
    Je rappelle que, sur ces amendements, j'ai été saisi, par le groupe socialiste, d'une demande de scrutin public.
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Evidemment, on finit par avoir l'impression de se répéter un peu. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais il faut dire que vous nous y incitez, chers collègues, puisque, sur tous les amendements que nous avons défendus, vous n'en avez accepté que deux, et, malgré notre volonté d'apprécier à sa juste mesure le travail que nous avons accompli, il faut bien avouer que ces deux amendements que vous nous avez concédés ne sont pas d'une importance cardinale. En convenez-vous, monsieur Delevoye, car je note que vous me regardez avec circonspection ?
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Non avec intérêt !
    M. Jean-Pierre Brard. Intérêt et principal, comme disait La Fontaine !
    Monsieur le ministre, nous proposons de supprimer l'article 9 car la façon dont vous envisagez l'emploi n'est pas satisfaisante. Vous allez, en effet, figer l'emploi aux deux extrémités de la vie professionnelle : les seniors auront d'une certaine manière comme perspective le travail forcé pour avoir droit à une retraite convenable, et les jeunes ne pourront pas accéder aux postes qui ne seront pas ainsi libérés. Il est vrai que vous justifiez toute votre démarche par la démographie. Mais vous avez du mal à marcher sur deux jambes car la démographie, ce n'est pas seulement l'allongement de l'espérance de vie, c'est aussi la natalité que vous sous-estimez délibérément.
    D'ailleurs, je suis très frappé que, depuis le début du débat, vous n'en ayez pas parlé. Il est vrai qu'aborder ce sujet montrerait que votre raisonnement est déséquilibré. Bien sûr, je n'évoque pas la natalité dans un esprit nataliste, comme certains sur les bancs de la majorité pourraient le faire, c'est-à-dire comme une perspective avec des dispositions visant à ne pas favoriser le travail des femmes et même à les faire rester à la maison. Vous savez bien en effet que les femmes qui vont travailler sont dangereuses pour votre politique puisqu'elles sont susceptibles de confronter leur point de vue avec d'autres et de participer au mouvement social. Je parle d'ailleurs sous le contrôle des femmes députées qui, hélas ! ne sont pas nombreuses !
    Mme Maryvonne Briot. Vous n'avez pas regardé derrière vous !
    M. Jean-Pierre Brard. Je parlais non pas de qualité, mais de quantité, ma chère collègue !
    M. le président. Monsieur Brard !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il y a une misogynie récurrente chez notre collègue Brard. Il devrait se faire psychanalyser ! Cela relève d'une psychopathologie sévère ponctuée d'un segment de misogynie primaire !
    M. le président. Monsieur Accoyer ! Je crois que M. Brard est en train de conclure !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous savez, monsieur Accoyer, on a toujours tort de voir les autres à sa propre image ! (Sourires.)
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. Gardez vos turpitudes, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. S'agissant de la démographie, le raisonnement du Gouvernement est donc totalement déséquilibré. Si l'on analyse la situation en descendance finale, nous sommes à 2,19 naissances par femme, ce que vous n'avez pas du tout intégré dans la perspective de 2040. C'est pourquoi vous proposez des solutions bancales qui maintiendront des gens âgés au travail et empêcheront les jeunes de trouver un emploi.
    M. le président. M. Brard vient de présenter l'ensemble des amendements de suppression.
    M. Maxime Gremetz. Non !
    M. le président. D'autres signataires souhaitent-ils intervenir ?
    Mme Muguette Jacquaint. Oui !
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 4656.
    Mme Muguette Jacquaint. Travailler plus longtemps que le temps requis pour bénéficier d'une retraite à taux plein pose le problème du financement de cette réforme. Comme M. Brard vient de le dire, votre politique familiale incite les femmes sans qualification à rester chez elles. A la délégation aux droits des femmes, j'ai même entendu dire que, donner une allocation aux femmes peu qualifiées pour leur permettre de rentrer chez elles, c'était très bien. Et on avait cité pour illustrer ce propos l'exemple d'une entreprise où les femmes coupent des cous de poulets du début janvier jusqu'à la fin décembre. On m'a dit : madame Jacquaint, ces femmes vont être très heureuses de ne plus couper des cous de poulets !
    Permettez-moi de rappeler, pour apporter un peu de piquant dans cet hémicycle...
    M. Pascal Terrasse. Surtout quand on parle de poulets ! (Sourires.)
    Mme Muguette Jacquaint. ... qu'un article paru récemment dans la presse nous avait appris que, pour gagner encore en rentabilité, on avait trouvé comment fabriquer des poulets sans plumes !
    M. Pascal Terrasse. C'est incroyable !
    Mme Muguette Jacquaint. Peut-être que nous aurons un jour des poulets sans cou ! (Exclamations et rires sur divers bancs.)
    M. le président. Laissez Mme Jacquaint finir sa démonstration !
    Mme Muguette Jacquaint. Dans la grande distribution, des milliers de femmes, aujourd'hui à temps partiel, souhaiteraient travailler plus longtemps, monsieur le ministre. Et là, on ne peut pas dire que ces grandes enseignes n'ont pas les moyens de les rémunérer correctement ! M. Gremetz pourrait rappeler les profits réalisés par Auchan et Carrefour.
    Or, avec ce texte, on va continuer à faire travailler à temps partiel les femmes qui souhaiteraient passer à temps plein. Et elles se retrouveront avec des petites retraites. Elles auront eu des salaires très faibles dès l'âge où elles auront commencé à travailler, et comme elles n'auront pas ensuite de retraite satisfaisante pour vivre, on leur dira qu'elles peuvent poursuivre leur activité.
    Autrement dit, monsieur le ministre, ces femmes auront été dans une situation précaire tout au long de leur vie. C'est précisément ce que nous dénonçons. Et nous souhaitons la suppression de l'article 9 qui constitue un formidable recul.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement n° 4657.
    M. Maxime Gremetz. On a entendu des choses intéressantes cet après-midi, au congrès de l'UMP. Et je vais vous les rapporter car ce ne sont pas nos collègues de l'UMP qui pourront le faire, vu qu'ils n'écoutent pas plus là-bas qu'ici ce qui se dit.
    L'UMP déclare : la gauche n'a plus le monopole de la solidarité.
    M. René Couanau. Eh oui !
    M. Julien Dray. Et la droite n'a pas le monopole de la bêtise !
    M. Denis Jacquat. Laissez-nous donc tranquilles, monsieur Dray !
    M. Maxime Gremetz. M. Fillon y attaque la gauche, au nom de la justice. Pour la gauche, dit-il, la solidarité, l'égalité se confondent avec le statu quo. Nous sommes donc accusés d'immobilisme.
    M. Julien Dray. Eux, ils ne connaissent que la marche arrière !
    M. Maxime Gremetz. Mais le statu quo n'est pas l'allié de la justice, il est souvent celui de l'injustice, a-t-il ajouté. L'immobilisme creuse les inégalités, la réforme, elle, les fait reculer.
    C'est exactement ce que disait M. Seillière : la croissance, le chômage, ce n'est pas ça le problème. Il faut simplement réformer. Et peu importe le contenu de la réforme ! Or là pour le coup, avec ces dispositions concernant les travailleurs âgés, comme vous les appelez, ou les seniors, avec cet encouragement au cumul, retraite et petite partie de salaire payée par l'Etat, nous avons une sacrée réforme. Personne n'avait jamais osé en faire une semblable. Ça, on peut dire qu'en matière de réforme, vous êtes audacieux !
    Eh oui, vous nous proposez une réforme d'une régression sociale sans pareille ! Comme quoi il ne suffit pas de se prétendre le parti de la réforme. C'est le contenu de la réforme qui compte, on le voit avec cette réforme des retraites et les différentes dispositions que l'on dévoile peu à peu. Aujourd'hui, les gens ont bien compris que votre réforme n'était ni juste ni équitable. Ils ont pris conscience, en outre, qu'elle constituait une régression sociale et un formidable recul de civilisation.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Denis Jacquat a excellemment démontré tout à l'heure dans son intervention...
    M. Denis Jacquat. Merci.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... tout l'intérêt qu'il y avait à modifier, en les simplifiant, les règles relatives au cumul des revenus d'une activité rémunérée et d'un avantage vieillesse. L'une des dispositions importantes du texte tend en effet à améliorer l'employabilité des personnes de plus de cinquante ou cinquante-cinq ans, et plus âgées encore.
    Julien Dray a développé, à propos de la place et du rôle du travail dans la société, certaines analyses, qui correspondent à des choix philosophiques que nous respectons.
    M. Julien Dray. Mais qui ne sont pas les vôtres !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Pour notre part, nous pensons, cependant, que le travail est un moyen non seulement de s'épanouir mais aussi de gagner sa vie, d'augmenter ses revenus, et de contribuer au bon fonctionnement des entreprises - quelle que soit leur taille ou la nature des fonctions qui peuvent être occupées par des salariés ayant déjà atteint l'âge de la retraite.
    Ces salariés expérimentés représentent, chacun le sait, une ressources particulièrement riche, qui permet la transmission du savoir et, en particulier, la mémoire des connaissances.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est pour ça que les plus de cinquante ans sont licenciés !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Or les dispositions en vigueur jusqu'à présent ne permettaient pas d'utiliser comme il convient cette richesse, au sens le plus noble du terme, de notre nation. C'est notamment pour ces raisons que la commission, qui a étudié ces amendements de suppression, ne les a pas acceptés.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Même avis que la commission.
    Je voudrais simplement préciser que cet article s'est appuyé sur un rapport demandé à M. Boulanger par le Conseil d'orientation des retraites, et qui insistait très nettement sur la nécessité d'assouplir et d'harmoniser les régimes de base et complémentaire. Vous voyez donc que le Gouvernement tient compte de ses propositions.
    M. Julien Dray. S'il fallait tenir compte de toutes les propositions de tous les rapports !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. On voit bien, par ailleurs, que s'expriment des différences - et c'est ce qui fait tout le charme des débats parlementaires - entre deux conceptions économiques : d'une part, celle du partage du travail, aux termes de laquelle, d'une façon un peu simplificatrice, le maintien en activité d'une personne âgée se soldera toujours par l'impossibilité pour un jeune d'accéder à une offre d'emploi ; et, d'autre part, celle qui prend en compte le fait qu'il existe aujourd'hui un vrai problème d'augmentation de l'offre d'heures travaillées. A l'évidence, dans la société d'intelligence du xxie siècle, la liberté de choix offerte à une personne expérimentée de cumuler sa pension...
    M. Julien Dray. C'est une liberté ?
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. ... et d'apporter sa contribution intellectuelle et son savoir-faire à une entreprise pour la développer permettra, au contraire, d'accroître l'offre d'emploi pour les jeunes dont les formations seraient adaptées aux besoins de l'entreprise.
    Vous prétendez également que le Gouvernement n'avait pas tenu compte des problèmes de la démographie. Or, c'est exactement le contraire : j'ai entendu à plusieurs reprises le ministre des affaires sociales indiquer que parmi les paramètres utilisés pour analyser l'évolution de la société, figurait bien évidemment, outre le taux de croissance et le taux de productivité, l'aspect démographique. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles loin de chercher à opposer, comme vous semblez le dire, les femmes au foyer, qui seraient à nos yeux dangereuses, et les femmes au travail, qui seraient par définition vertueuses, nous souhaitons offrir aux femmes la plus grande liberté de choix possible et mener une politique incitative pour développer la natalité et améliorer la courbe démographique. Car elle est un facteur de croissance qui permet de soutenir les dépenses de solidarité.
    Nous émettons donc, évidemment, le même avis que la commission : nous sommes contre cet amendement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Julien Dray.
    M. Julien Dray. Nos amendements et ceux de nos collèges communistes - et républicains, j'insiste -...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ça ne coule pas de source !
    M. Maxime Gremetz. C'est une tautologie !
    M. Julien Dray. ... servent à quelque chose. En effet, de quoi parle-t-on ?
    On nous dit : le travail est une source d'épanouissement.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. On n'est pas sorti de l'auberge !
    M. Julien Dray. Pour nous, parlementaires, pour des cadres supérieurs, ou pour un certain nombre d'enseignants, oui, le travail peut être une source d'épanouissement. Mais qui peut penser que la caissière d'un supermarché peut vivre son travail comme une source de richesse intellectuelle et comme un moyen de s'épanouir ? Personne. Dans sa situation, on travaille parce qu'on y est contraint, pour gagner sa vie, pour survivre.
    Bien sûr, on peut parler du travail d'un point de vue philosophique, sans lui donner de consistance, mais alors les mots deviennent des mots magiques. Le travail est une liberté donnée à chacun : quelle pensée facile ! Ce n'est pas comme ça qu'est vécue la réalité. Avoir un travail posté, dans une usine, adossé à une machine, en subissant souvent les cadences infernales, vous trouvez que c'est épanouissant ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ce n'est pas le sujet de l'article 9 !
    M. Julien Dray. Eh bien si, monsieur Accoyer, c'est aussi cela, l'article 9 !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il n'a même pas lu l'article !
    M. Julien Dray. Vous vous énervez parce que vous vous apercevez tout à coup que vous êtes allés trop loin dans votre définition. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pourquoi ? Parce que cette catégorie-là de la population ne vous intéresse pas, elle disparaît de votre réflexion ! (Mêmes mouvements.)
    Depuis des heures, vous nous dites que votre réforme est une réforme de progrès. Or ce n'est pas vrai. Vous êtes d'ailleurs, et c'est grave, en train de tuer l'idée même de réforme qui, pour nos concitoyens devient, à cause de vous, synonyme de régression sociale.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Quelle modération de la part du nouveau porte-parole du PS !
    M. Julien Dray. S'il y a des crispations, aujourd'hui, c'est parce que ce que vous considérez comme les blocages de la société sont en réalité des acquis sociaux. Il a fallu des années de combat pour obtenir la journée de huit heures et le contrôle des conditions sanitaires de travail par l'inspection du travail, par exemple. Ce ne sont pas des blocages de la société, mais des libertés. Naturellement, vos réflexions n'en tiennent pas compte.
    Mais revenons-en à l'article 9. Je n'ai entendu aucune explication.
    M. Christophe Caresche. Un rapport...
    M. Julien Dray. On nous dit en effet : nous ne faisons que traduire un rapport. Monsieur le ministre, nous sommes ici un certain nombre de parlementaires à savoir ce qu'il en est des rapports : ils contredisent les précédents et seront à leur tour contredits. Vous êtes trop politique pour vous réfugier derrière un rapport.
    La question est donc la suivante : cet article ne va-t-il pas créer les conditions d'un conflit entre les générations ? A cette question, vous ne répondez pas. Or l'article 9 montre d'une manière éclatante que vous ne croyez pas à votre réforme et à sa capacité de garantir le niveau des pensions. La preuve : vous prévoyez déjà une soupape en permettant à ceux qui n'auront pas une bonne retraite de travailler le plus longtemps possible.
    Evidemment, il faut se battre contre cet article, car dans les années à venir, un tel dispositif conduira à la situation que je décrivais tout à l'heure et qui n'a rien à voir - je m'excuse de vous le dire, monsieur Accoyer - avec un quelconque épanouissement.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est du harcèlement !
    M. Julien Dray. Franchement, qui peut penser qu'être obligé, à soixante-dix ans, d'aller transmettre son savoir permet de s'épanouir ? Le progrès, pour une société comme la nôtre, n'est-ce pas plutôt de permettre à cette personne de finir dignement sa vie, dans la sécurité et avec une bonne retraite ?
    Il y a bien là deux conceptions qui s'affrontent. On retrouve, en effet, la gauche d'un côté et la droite, de l'autre, nous, qui défendons le progrès social, et vous, qui défendez la régression sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Vos propos, messieurs Accoyer et Delevoye, étaient assez intéressants et ils font réfléchir, surtout quand on les décode. Vous utilisez des mots horribles, tels que : « améliorer l'employabilité », mais les Allemands, - dont le système de formation est plutôt plus médiocre que le nôtre si l'on en juge par les critiques qu'on entend aujourd'hui outre-Rhin - arrivent à faire travailler les salariés allemands jusqu'à un âge qui est plus proche de soixante ans. Pourquoi en est-il autrement chez nous ? Parce que le patronat, placé sous la houlette du baron, est ultra-régrograde. La façon dont vous essayez de vous persuader que vous parviendrez à le civiliser est sympathique - si cet engagement est sincère - mais peu convaincante.
    Ce projet de loi portant réforme des retraites touche à l'avenir de la société et met en jeu des conceptions philosophiques très profondes du devenir de l'humanité, en particulier dans notre pays. Heureusement, nous avons la perspective de l'allongement de la vie. L'un de nos collègues le disait à la tribune, il y a une semaine : c'est la bonne nouvelle, comme on dit dans le Nouveau Testament. Mais pour vous, cet allongement, c'est pour travailler ; pour nous, c'est pour vivre. Certes, dans la vie, il y a le travail, mais vous savez bien que vous ne parviendrez pas à en allonger la durée de façon significative. En réalité, vous voulez faire travailler les gens pour enrichir ceux qui exploitent le travail.
    Tout à l'heure, monsieur Delevoye a évoqué le partage du travail avec la liberté de choix. Mais quand vous n'avez plus rien dans votre assiette, ou quand vous mangez des nouilles tous les jours, la liberté est assez limitée. Vous créez une situation sociale qui obligera les gens à cumuler pension et salaire, vous le savez bien.
    C'est un joli mot, le partage, mais il en est un dont vous ne voulez jamais entendre parler, c'est le partage des fortunes, des richesses.
    Mme Muguette Jacquaint. Ça oui !
    M. Jean-Pierre Blazy. Il ne faut pas exagérer tout de même ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Rien que d'y penser, vous entrez en transe ! Vous avez peur d'être tancés par ceux dont vous êtes les fondés de pouvoir. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Christian Vanneste. Qu'il arrête, on n'est pas là pour se faire insulter.
    M. le président. Monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Je termine, monsieur le président.
    Vous vous rappelez peut-être, mes chers collègues, ce beau film japonais, la Balade de Narayama, de Kurosawa, qui se termine par le choix de la tradition. Vous nous y poussez d'une certaine manière, et avec moins de talent que Kurosawa.
    M. Jean-Pierre Blazy. Certainement.
    M. Jean-Pierre Brard. En effet, que se passe-t-il à la fin de ce film ? Une vieille femme, pour ne plus être à la charge de sa famille, finit par convaincre son fils de l'emmener, là haut, dans la montagne, afin d'y mourir. En obligeant au travail forcé rallongé, vous êtes dans une logique qui est certes moins artistique que celle de Kurosawa, mais qui s'y apparente.
    M. le président. A la demande du groupe socialiste, je suis saisi d'une demande de scrutin public sur les amendements identiques n°s 4655 à 4661.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'assemblée.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je souhaite simplement rectifier une erreur de M. Brard : l'auteur de ce film n'est pas Kurosawa mais Imamura. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Brard, on ne va pas lancer un débat sur le cinéma. Connaissant bien ce film, je pense que M. le ministre a raison.
    M. Jean-Pierre Brard. Je tiens à exprimer...
    M. le président. Vos regrets ?
    M. Jean-Pierre Brard. ... non, ma gratitude car non seulement M. Fillon est l'élu d'une région où l'on trouve d'excellents produits du terroir (Sourires) mais, grâce à ses références culturelles, il enrichit également le débat. Je vous en suis d'autant plus reconnaissant, monsieur le ministre, que vos soutiens dans cet hémicycle sont peu nombreux à participer à cet échange culturel ! (Sourires.)
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4655 à 4661.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   61
Nombre de suffrages exprimés   61
Majorité absolue   31
Pour l'adoption   14
Contre   47

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

RÉSOLUTION ADOPTÉE EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

    M. le président. J'informe l'Assemblée qu'en application de l'article 151-3, alinéa 2, du règlement, la résolution sur la politique européenne d'asile, adoptée par la commission des lois, est considérée comme définitive.

3

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE
    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq, troisième séance publique :
    Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 885, portant réforme des retraites :
    M. Bernard Accoyer, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 898) ;
    M. François Calvet, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (avis n° 895) ;
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 899) ;
    Mme Claude Greff, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information n° 892).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt-heures quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexes au procès-verbal
de la 2e séance
du vendredi 20 juin 2003
SCRUTIN (n° 192)


sur l'amendement n° 10830 de la commission des affaires culturelles après l'article 7 du projet de loi portant réforme des retraites (extinction progressive de la compensation spécifique entre régimes spéciaux).

Nombre de votants

73


Nombre de suffrages exprimés

73


Majorité absolue

37


Pour l'adoption

73


Contre

0

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 57 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 9 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 193)


sur l'amendement n° 4618 de M. Gremetz tendant à supprimer l'article 8 du projet de loi portant réforme des retraites (droits des assurés à l'information).

Nombre de votants

72


Nombre de suffrages exprimés

64


Majorité absolue

33


Pour l'adoption

8


Contre

56

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 54 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 1. - M. Michel Dasseux.
    Contre : 2. - MM. Jean-Marc Ayrault et Jean-Claude Bateux.
    Abstentions : 8 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

    Mises au point au sujet du présent scrutin
    (Sous réserve des dispositions de l'article 68,
alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale)

    M. Jean-Marc Ayrault et M. Jean-Claude Bateux, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu « s'abstenir volontairement ».

SCRUTIN (n° 194)


sur les amendements n° 4625 de M. Gremetz et n° 4626 de M. Brard tendant à supprimer les 1er et 2e alinéas de l'article 8 du projet de loi portant réforme des retraites (droits des assurés à l'information).

Nombre de votants

58


Nombre de suffrages exprimés

58


Majorité absolue

30


Pour l'adoption

10


Contre

48

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 48 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 9 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 195)


sur l'amendement n° 3041 repris par M. Gremetz à l'article 8 du projet de loi portant réforme des retraites (fixation par la loi de l'âge nécessaire pour obtenir des informations sur le montant de sa retraite).

Nombre de votants

55


Nombre de suffrages exprimés

53


Majorité absolue

27


Pour l'adoption

12


Contre

41

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 41 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Abstentions : 2. - Mme Odile Saugues et M. Pascal Terrasse.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 196)


sur l'amendement n° 3153 de la commission des affaires culturelles après l'article 8 du projet de loi portant réforme des retraites (négociation relative aux conditions de travail des salariés de plus de cinquante ans).

Nombre de votants

57


Nombre de suffrages exprimés

51


Majorité absolue

26


Pour l'adoption

44


Contre

7

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 44 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 6. - MM. Xavier Bertrand, Roland Chassain, Jean-Pierre Decool, Bruno Gilles, Michel Lejeune et Richard Mallié.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Contre : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
    Abstention : 1. - Mme Martine David.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Abstentions : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 197)


sur l'amendement n° 15 de la commission des finances après l'article 8 du projet de loi portant réforme des retraites (obligation pour les caisses et services gestionnaires des régimes de base d'assurance vieillesse de transmettre les informations nécessaires à la liquidation des pensions).

Nombre de votants

55


Nombre de suffrages exprimés

50


Majorité absolue

26


Pour l'adoption

49


Contre

1

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 49 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Contre : 1. - M. Christophe Caresche.
    Abstentions : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22).
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 198)


sur le sous-amendement n° 11229 du Gouvernement à l'amendement n° 3154 de la commission des affaires culturelles après l'article 8 du projet de loi portant réforme des retraites (mention dans le rapport du Gouvernement au Parlement des mesures prises pour favoriser le maintien en activité des salariés âgés).

Nombre de votants

65


Nombre de suffrages exprimés

64


Majorité absolue

33


Pour l'adoption

51


Contre

13

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 49 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 2. - MM. Xavier Bertrand et Jean-Pierre Decool.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 2. - Mme Sylvie Andrieux-Bacquet et M. Pierre Cohen.
    Contre : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Abstention : 1. - M. Jean-Pierre Brard.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 199)


sur l'amendement n° 3154 de la commission des affaires culturelles après l'article 8 du projet de loi portant réforme des retraites (rapport du Gouvernement au Parlement relatif aux mesures législatives et réglementaires prises concernant la mise en place d'un système dégressif de charges sociales à due proportion de la part des salariés de plus de cinquante ans dans l'entreprise).

Nombre de votants

65


Nombre de suffrages exprimés

65


Majorité absolue

33


Pour l'adoption

55


Contre

10

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 51 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 3. - MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Claude Bateux et Christophe Caresche.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 200)


sur les amendements n° 4659 de Mme Jacquaint, n° 4660 de M. Gremetz et n° 4661 de M. Brard tendant à supprimer l'article 9 du projet de loi portant réforme des retraites (cumul emploi-retraite).

Nombre de votants

61


Nombre de suffrages exprimés

61


Majorité absolue

31


Pour l'adoption

14


Contre

47

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 3. - MM. Michel Lejeune, Jean-Pierre Nicolas et Xavier de Roux.
    Contre : 44 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 3. - MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Claude Bateux et Jean-Yves Le Bouillonnec.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

Mises au point au sujet du présent scrutin
    (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    M. Jean-Pierre Nicolas et M. Xavier de Roux, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».