Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session extraordinaire 2003-2004)

 

Première séance du vendredi 9 juillet 2004

19e séance de la session extraordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

    1

ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée aux amendements identiques n°s 2692 à 2703 à l'article 10.

Article 10 (suite)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, n°s 2692 à 2703.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, mes chers collègues, je souhaite revenir sur les conséquences concrètes de l'article 10.

Indirectement, on définit un « panier de soins ». Or on ne pourra déterminer que les actes ou les produits et prestations sont médicalement justifiés que de manière individualisée, dans le cadre de l'examen collectif d'un dossier médical. En réalité, la Haute autorité définira autoritairement, pour chaque pathologie, un cadre rigide dont il ne sera possible de sortir qu'en en faisant supporter la charge financière aux patients.

C'est bien le « début du commencement » d'une santé à deux vitesses. Le projet installe la régression - et il est injuste - en permettant une individualisation des sanctions financières et non une individualisation de la prise en charge thérapeutique. C'est un recul dont on ne mesure pas toujours les conséquences.

C'est bien de maîtrise comptable qu'il s'agit, monsieur le secrétaire d'État, et la preuve en est faite, vous ne pouvez plus le nier.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale, pour donner l'avis de la commission sur les amendements en discussion.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. La commission a rejeté ces amendements.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie, pour donner l'avis du Gouvernement.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. L'avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2692 à 2703.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2704 à 2715.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Ces amendements sont rédactionnels.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2704 à 2715.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2716 à 2727.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 10 du projet de loi s'inscrit dans une logique que nous ne pouvons partager. Il prévoit que les caisses d'assurance maladie vérifieront, au moment du remboursement, que les actes et médicaments prescrits correspondent aux critères de remboursement - tant en ce qui concerne les actes médicaux que les médicaments- et que les arrêts maladies sont médicalement justifiés. La vérification porte également sur le respect des références médicales et des accords de bonne pratique.

Certes, l'article lui-même ne prévoit pas de sanction, sinon que la prise en charge par l'assurance maladie est subordonnée au respect de ces conditions. Fort heureusement, et nous y reviendrons, la commission a adopté nos amendements visant à supprimer le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale. Faute de quoi, en cas de non-respect des bonnes pratiques médicales par le praticien, c'est le patient qui se serait vu refuser toute prise en charge, alors qu'il n'aurait pu en être tenu pour responsable.

Cependant, cet article 10 est à relier à l'article 13 du projet, qui est relatif aux sanctions applicables aux professionnels de santé, aux établissements de santé et aux usagers.

Les amendements en discussion, dans la logique de nos amendements précédents et à venir, prévoient la suppression du b du 2° du texte proposé pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale, lequel paragraphe dispose que les actes et les prescriptions doivent respecter les recommandations de bonnes pratiques cliniques et les références professionnelles mentionnées à l'article L. 162-12-15 du même code, qui stipule que les références sont « établies par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, à partir de critères scientifiques reconnus et, pour le domaine du médicament, par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ».

Comme l'écrit très justement le rapporteur dans son rapport, l'application de cette disposition demandera des moyens renforcés aux services des caisses. Or nous savons tous ici que ces moyens ne seront pas débloqués.

Mais surtout, ce dispositif est un outil supplémentaire de rationnement des soins, qui ne répond, je le répète, qu'à une logique comptable et fait fi de l'accès aux soins de façon égale pour tous.

En outre, nous ne pouvons nous empêcher de penser qu'il s'agit là d'un article quelque peu méprisant à l'égard des médecins, car il entrave leur liberté de prescription, et dit clairement que le médecin ne sait pas qu'il doit éviter tout abus et, pis encore, qu'il participe à leur amplification.

À ce propos, je note que les ordonnances ou les arrêts maladie de complaisance, que le ministre dénonce régulièrement, demeurent marginaux. Il est essentiel de dire la vérité : le phénomène ne concerne qu'un ou deux médecins pour 1 000, et le « nomadisme médical » n'est le fait - tenez-vous bien - que de 0,47 % des assurés !

Autant de raisons de refuser cette nouvelle entrave aux soins pour tous, et de demander à l'Assemblée d'adopter nos amendements de suppression.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Madame Jacquaint, j'ai en effet évoqué dans mon rapport la nécessité de moyens renforcés qu'à l'évidence cette réorganisation nécessitera. Mais je fais confiance à la Caisse nationale d'assurance maladie et aux travailleurs salariés, que vous connaissez et respectez comme moi, pour se développer. Rejet !

Mme Muguette Jacquaint. Elle n'existe plus !

M. Jean-Marie Le Guen. On l'a assassinée !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Oui, avec les 35 heures ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Nous n'interviendrons pas systématiquement sur tous les amendements de suppression proposés par le groupe communiste, mais nous en partageons l'esprit.

Nous sommes très inquiets car cet article et les suivants proposent de mettre en place une machine à contrôler et à dérembourser !

Monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, j'ai lu attentivement la dépêche de l'AFP qui rapporte vos commentaires sur la croissance élevée des dépenses de santé, qui a été de 6,6 % en 2003, dans la ligne des 5,6 % des cinq dernières années.

Depuis deux ans, le Gouvernement a laissé filer les dépenses de santé jusqu'à ce déficit abyssal, sidérant, catastrophique, appelant au sauvetage, et tout cela pour en arriver à un texte qui organise une machine à dérembourser !

L'article 10 et les articles suivants seront avant tout des moyens de contrôle et de pénalisation de la consommation des assurés et feront porter aux patients la responsabilité de prescriptions dont ils ne sont nullement responsables.

Tel est l'esprit dans lequel nous considérons les divers amendements de suppression déposés par le groupe communiste. Nous ne voulons pas, contrairement à ce que dit M. Accoyer, faire de l'obstruction en reprenant sempiternellement les mêmes arguments.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements...

Mme Muguette Jacquaint. Je demande un scrutin public !

M. le président. Il aurait fallu le demander plutôt, madame Jacquaint, car le vote est commencé.

Je mets aux voix, disais-je, par un seul vote les amendements nos 2716 à 2727.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Madame Jacquaint, demandez-vous un scrutin public sur les amendements suivants ?

Mme Muguette Jacquaint. Je demande un scrutin public sur les amendements identiques n°s 988 à 999.

M. le président. La présidence en prend bonne note.

Je suis saisi de douze amendements identiques, n°s 2728 à 2739.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Ces amendements visent à apporter une clarification rédactionnelle. En effet, le b du 2° du texte proposé pour l'article L. 314-1du code de la sécurité sociale précise que les actes effectués ou les traitements doivent répondre à des obligations. Notamment, les actes ou les traitements doivent respecter les recommandations de bonnes pratiques cliniques et les références professionnelles mentionnées à l'article L. 162-12-15 sans que l'on précise qu'il s'agit du code de la sécurité sociale.

Pour permettre une bonne lecture, et donc une bonne application du droit, il convient d'apporter la clarification rédactionnelle prévue par nos amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet !

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale, pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. L'avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. L'article 10 introduit un changement complet dans le fonctionnement de l'assurance maladie. Nous devons être conscients que nous sommes en train de faire de l'assurance maladie le super-contrôleur de l'ensemble des médecins et des patients.

Les relations entre l'assurance maladie et les médecins, il faut le reconnaître, n'ont jamais été tout à fait paisibles. Le mécanisme que met en place l'article 10 et la philosophie qui le sous-tend organisent une guérilla permanente entre l'assurance maladie et les médecins. Si on voulait rendre de plus en plus antagoniques les relations des médecins avec l'assurance maladie pour leur faire mieux accepter demain de travailler avec des assureurs complémentaires, on ne s'y prendrait pas autrement !

Au lieu d'organiser des protocoles de soins, on organise a posteriori, par des sanctions, la conduite de l'acte médical. Les contestations portant sur la prescription ou sur l'acte médical doivent être assumées entièrement par le médecin, qui est à même d'argumenter face à la caisse d'assurance maladie. Que penseront les professionnels de santé, et quel sera leur statut, lorsque vous sanctionnerez leur clientèle, sans même leur demander leur avis, en refusant leur prescription et en expliquant à l'assuré qu'il ne sera pas remboursé parce qu'il a un mauvais médecin ?

Pour les assurés, la situation sera tout aussi intenable, car ils seront doublement pénalisés : non seulement les prescriptions qui leur seront faites pourront ne pas être conformes aux normes de l'assurance maladie mais, de surcroît, ils ne seront pas remboursés. Le système de guérilla que vous organisez est scandaleux ! Vous faites de l'assurance maladie l'ennemi de l'assuré et du médecin. Vous créez entre les médecins et l'assurance maladie un fossé qui vous permettra de développer d'autant plus facilement la privatisation que vous mettez en œuvre en installant les complémentaires au cœur de la médecine de ville.

M. Hervé Mariton. N'importe quoi !

M. Jean-Marie Le Guen. On verra ce qu'en penseront les médecins ! C'est pire que le plan Juppé !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ce n'est donc pas une réformette ?

M. Jean-Marie Le Guen. Vous ne réformez pas, vous déformez !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2728 à 2739.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 988 à 999.

Sur le vote de ces amendements, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir ces amendements.

Mme Muguette Jacquaint. Ces amendements visent à supprimer le 3° du texte proposé pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale, qui est un outil supplémentaire de contrôle et d'encadrement des prescriptions médicales.

Cette disposition ouvre aux caisses et au service médical de l'assurance maladie le droit de vérifier que les actes réalisés ou les produits et prestations prescrits sont médicalement justifiés et correspondent aux accords de bon usage des soins - les Acbus - ou aux recommandations de bonne pratique. Or, limiter la prescription en fonction des Acbus, signés ou non, n'est pas sans poser certains problèmes.

Je prendrai deux exemples, tirés de la pratique quotidienne en cardiologie.

L'ordonnance d'un malade de soixante-douze ans retrouvant son domicile après un infarctus du myocarde comporterait, pour donner au patient toutes ses chances tout en respectant les recommandations de bonne pratique médicale, au moins cinq médicaments.

Pour un malade du même âge atteint de diabète, d'hypertension et d'arythmie, un traitement correct nécessiterait également cinq médicaments au moins, à condition encore de tirer habilement parti des différentes propriétés d'une même molécule.

Qu'adviendrait-il si ce malade venait à faire une poussée d'arthrose ou une bronchite,...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ou une crise de goutte !

Mme Muguette Jacquaint. ...nécessitant un traitement supplémentaire ?

Les exemples seraient nombreux dans différents domaines pathologiques. Votre démarche est totalement étrangère au raisonnement médical. Pourquoi cinq médicaments, alors qu'il n'existe aucune recommandation scientifique dans ce sens ? Pourquoi soixante-dix ans, alors qu'il n'est pas établi médicalement qu'on doive être soigné différemment selon qu'on a soixante-neuf ans ou soixante et onze ?

Le choix de cet âge limite de soixante-dix ans relève d'une logique administrative, et non médicale. À partir d'un certain âge en effet, le médecin raisonne à partir de l'âge physiologique du patient - pour un âge identique selon l'état civil, certains malades ont, en effet, une apparence plus jeune que d'autres. La conduite thérapeutique dépendra de cette appréciation, qui fait appel à toute l'expérience du professionnel.

Comme c'est souvent le cas, l'Acbus a ici un but purement économique, même si vous l'habillez de bonnes intentions : l'objectif serait de limiter le risque d'effets secondaires des médicaments. S'il est vrai que les personnes âgées sont plus sensibles à ces effets secondaires, ce n'est pas un règlement administratif qui permettra de régler le problème - et surtout pas de cette manière !

Quand un médecin décide d'une stratégie thérapeutique, il se réfère à des recommandations scientifiquement admises, représentant des « cas d'école ». Il est évident que chaque malade que l'on soigne ne correspond pas nécessairement à ces formes typiques, et tout l'art de la médecine consiste à prendre en compte différents paramètres, dont l'âge. La décision finale, qui implique des arbitrages dont les conséquences peuvent être graves, est souvent complexe et doit faire appel à toute l'expérience du praticien.

Cette réalité s'accorde mal avec la démarche simpliste qu'impose votre texte. C'est pourquoi nous défendons ces amendements de suppression.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements.

Madame Jacquaint, la limitation de certaines ordonnances à cinq médicaments relève du fantasme. La question a été soulevée et a donné lieu à des publications dans des journaux médicaux, mais on n'a jamais rien vu de précis ni de concret à cet égard. Dans certaines situations, ce serait de toute évidence une erreur que de limiter à cinq médicaments la prescription pour des patients à qui il en faudrait sept ou huit.

Mme Muguette Jacquaint. C'est bien de le réaffirmer !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Dans les excellents exemples que vous avez évoqués, les prescriptions sont multiples et les médicaments associés pourraient provoquer, de surcroît, des crises de goutte : cette pathologie manque dans votre exposé des motifs ! (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Muguette Jacquaint. Je ne suis pas médecin, mais vous avez bien compris mon propos !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Dites-le à ceux qui ont rédigé cet exposé des motifs !

Plus sérieusement, l'article 10 présente l'intérêt d'attirer l'attention sur les risques de complications liés aux associations médicamenteuses - le risque iatrogène. Bien que l'estimation soit très difficile à établir, selon les études les plus sérieuses huit mille personnes mourraient chaque année en France des suites de l'association toxique des médicaments qui leur ont été prescrits. C'est un problème sérieux, et des efforts sont nécessaires pour améliorer les pratiques.

Mme Muguette Jacquaint. Je fais confiance aux professionnels.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il faut être vigilant, sans pour autant écouter toutes les rumeurs. L'Acbus portant sur une limitation à cinq médicaments a été refusé par le Gouvernement, faute de fondement scientifique. Par ailleurs, les accords de bon usage doivent être respectés en vue de l'intérêt même des malades.

Mme Muguette Jacquaint. Là-dessus, nous sommes d'accord !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il y a de bonnes pratiques, et je pense que nous en sommes tous d'accord.

Avis défavorable, donc.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Nous sommes favorables à la suppression du 3°, sans pour autant faire nôtre chacun des arguments exposés. La limite d'âge de soixante-dix ans est, certes, purement aléatoire, mais il nous semble indispensable que, dans le cadre d'accords de bon usage de soins, des protocoles permettent de bonnes pratiques de prescription pharmaceutique.

J'ajouterai par ailleurs, à l'intention de M. le rapporteur, qu'en cas de crise de goutte, il faut ajouter à la prescription de l'allopurinol générique.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Vous avez gardé une certaine compétence !

M. Jean-Marie Le Guen. La confraternité règne !

M. Gérard Bapt. Je ne voulais que préserver M. Dubernard de la crise de goutte. C'est par pure sympathie !

M. le président. Mes chers collègues, tout cela est sympathique, chaleureux et convivial, mais, en bonne méthode, mieux vaut débattre sur le fond !

M. Gérard Bapt. Sur le fond, nous contestons formellement le fait que la prise en charge par l'assurance maladie, et donc un éventuel déremboursement, soient subordonnés au respect de conventions dont le patient n'est aucunement responsable, comme les engagements conventionnels, les recommandations de bonne pratique et les accords de bon usage de soins.

Nous voterons donc ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous avons toutes les raisons d'être attentifs à l'abus de prescription médicamenteuse, qui pose des problèmes réels dans notre pays.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est vrai !

M. Jean-Marie Le Guen. La mauvaise organisation de notre système de prescription peut trop souvent conduire certains médecins à prescrire des médicaments contradictoires. Quand il y a plus de sept mille spécialités sur le marché, il n'est pas facile de se rappeler toutes les contre-indications !

Voici plus de quinze ans, certains s'étaient battus pour mettre en place une aide à la prescription, au moyen notamment de fiches transparentes qui rappelaient aux médecins les interactions contradictoires. Malheureusement, ce dispositif avait été refusé par la profession médicale. Lorsque nous aborderons les articles consacrés au médicament, le groupe socialiste proposera, notamment, que les prescriptions se réfèrent à la dénomination scientifique, et non plus à la dénomination de marque. De même, puisque le ministre affirme que les professionnels seront désormais informatisés - c'est tout juste s'ils ne le sont pas déjà ! -, il conviendrait qu'ils soient dotés de logiciels leur permettant de vérifier que leurs prescriptions ne provoquent pas d'interactions médicamenteuses.

Mais indépendamment de cela, il est exact que nous avons, dans notre pays, la mauvaise habitude de prescrire trop de médicaments. Ceux d'entre nous qui se sont penchés sur la question savent que le lien entre le patient et le médicament s'avère un substitut à la relation médecin-malade, laquelle n'est pas ce qu'elle devrait être. Car les médecins sont placés trop souvent dans une situation de tension, compte tenu des contraintes de rapidité.

C'est pourquoi nous avions préconisé de réorienter vers la qualité la relation médecin-malade actuellement basée sur la quantité des actes, c'est-à-dire de payer au forfait pour alléger la pression de l'acte qui pèse sur le médecin. Cette pression étant allégée, le stylo se ferait également plus léger sur la feuille d'ordonnance.

Mais cette argumentation ne peut pas être utilisée à propos de l'article 10 du projet de loi. Car, contrairement à ce que j'ai entendu hier, celui-ci ne propose pas d'instaurer une surveillance médicale de la prescription du médecin puisqu'il ne porte que sur des « problèmes de liquidations médicalisées », comme le dit le Gouvernement avec ce sens de la poésie qui le caractérise. Il s'agit simplement de permettre à l'assurance maladie de vérifier que les prescriptions sont conformes à ce que le Gouvernement souhaite au plan économique. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il n'y a rien de médical dans ce dispositif, il n'y a que du contrôle financier.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Mais non !

M. Jean-Marie Le Guen. Il n'y a qu'une seule volonté, celle de contrôler les médecins et les assurés dans leur dos !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce n'est pas parce que vous le dites que c'est vrai !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 988 à 999.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 45

              Nombre de suffrages exprimés 45

              Majorité absolue 23

        Pour l'adoption 11

        Contre 34

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2740 à 2751.

La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. Avec cet article 10, consacré à la liquidation médicalisée, nous nous trouvons en plein dans une démarche de culpabilisation outrancière des assurés sociaux, qui, de surcroît, jette le discrédit sur les professionnels de santé.

L'article 10 prévoit que les caisses d'assurance maladie vérifient, au moment du remboursement, que les actes et les médicaments prescrits correspondent bien aux critères de remboursement et que les arrêts maladie sont médicalement justifiés. Cette vérification doit également porter sur le respect des références médicales et, le cas échéant, des accords de bonne pratique.

Il n'est pas choquant en soi que l'assurance maladie vérifie, lors de la liquidation, que les conditions d'admission au remboursement sont bien réunies. C'est conforme à sa vocation. Cette vérification est d'ailleurs de moins en moins effectuée du fait des insuffisances d'effectifs. Nous partageons l'idée de renforcer les moyens de contrôle par l'assurance maladie, lorsque leur utilisation n'est pas mal intentionnée et à condition que ce renforcement porte sur les moyens médicalisés et non sur un renforcement du contrôle administratif.

Or, dans la rédaction proposée, le risque est que le contrôle évolue vers une « protocolisation » obligatoire et systématique des actes médicaux.

C'est pourquoi nous proposons de supprimer, au 3° du texte proposé pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale, la référence à l'article L. 162-12-18.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. La référence de l'article L. 162-12-18 complète la liste des conditions pouvant faire l'objet de vérifications de la part des caisses et du service médical. En l'espèce, il s'agit des contrats de santé publique.

Or il est inimaginable de corseter les dépenses en matière de santé publique. Chacun voit bien l'idée sous-jacente : il reviendrait à la caisse de déterminer ce qui relève de la santé publique et pourrait dès lors être remboursable, et ce qui n'en relève pas et ne pourrait donc pas être pris en charge.

Comme pour les articles précédents du projet de loi, on touche une nouvelle fois à la relation entre le médecin et son patient. De quel droit le médecin-conseil de la caisse de sécurité sociale viendrait-il contredire une prescription médicale en la qualifiant d'« injustifiée », avant que celle-ci ne soit appliquée ?

Qu'il y ait un contrôle a posteriori sur l'opportunité médicale, très bien ; nous n'y sommes pas opposés. Mais dans le cas présent, il s'agit d'un contrôle quasi systématique a priori, avec à la clef des menaces de sanctions à l'encontre du seul malade. Et, parmi ces sanctions, les déremboursements ne sont pas les moindres.

Monsieur le ministre, comment pouvez-vous continuer à dire qu'il n'y aura pas, à nouveau, des déremboursements importants de médicaments ?

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, le groupe UMP demande une suspension de séance de vingt minutes.

M. le président. La séance est suspendue.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures dix, est reprise à dix heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

    2

SERVICE PUBLIC DE L'ÉLECTRICITÉ ET DU GAZ

Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire

M. le président. M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

                  « Paris, le 8 juillet 2004

« Monsieur le président,

« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.

« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter l'Assemblée nationale à désigner ses représentants à cette commission.

« J'adresse ce jour à M. le président du Sénat une demande tendant aux mêmes fins.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

Cette communication a été notifiée à M. le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

    3

ASSURANCE MALADIE

Reprise de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marie Le Guen. Je voulais vous remercier, monsieur le président, de la qualité d'écoute que vous manifestez à l'égard du Parlement. Lorsque nos collègues de la majorité ont jugé utile de demander une suspension de séance de vingt minutes, ils l'ont obtenue. Nous vous en donnons acte. Nous ne demandons absolument pas la même chose pour l'instant, mais peut-être serons-nous amenés ultérieurement à demander à notre tour une suspension. Nous serons heureux, dans ce cas, que la présidence accueille notre demande avec autant de diligence, de sympathie et de compréhension.

M. Pierre-Louis Fagniez. Notre demande était exceptionnelle, monsieur Le Guen !

M. le président. Monsieur Le Guen, vous faites un constat d'évidence, qu'il est toujours utile de rappeler dans cet hémicycle.

La parole est à M. Richard Mallié, pour un rappel au règlement.

M. Richard Mallié. Monsieur le président, je voudrais faire observer à notre collègue Jean-Marie Le Guen que la suspension qui vient d'avoir lieu est la première que le groupe UMP ait demandée depuis le mardi de la semaine dernière. Avec vingt minutes en dix jours, nous sommes encore loin de la durée des suspensions demandées par le groupe socialiste.

Discussion des articles (suite)

M. le président. Nous poursuivons l'examen des amendements à l'article 10.

Article 10 (suite)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que nous n'avions pas encore procédé au vote sur les amendements identiques nos 2740 à 2751.

Je les mets aux voix par un seul vote.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2752 à 2763.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Ces amendements sont défendus, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. La commission les a rejetés.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie, pour donner l'avis du Gouvernement.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. L'avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2752 à 2763.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2764 à 2775.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 10 vise à donner aux services des organes gestionnaires des régimes de l'assurance maladie une mission de « liquidation médicalisée ». J'ose à peine employer cette expression, mais c'est bien de cela qu'il s'agit : permettre aux caisses et au service médical de contrôler, dès la demande de remboursement, le respect de divers dispositifs ayant pour objet la mise en place d'une maîtrise des dépenses d'assurance maladie, notamment ceux mettant en place une maîtrise médicalisé et dont la création est proposée par le présent projet de loi.

Il s'agit bien, comme le précise le très riche rapport de M. Dubernard de « tirer les conséquences de la maîtrise médicalisée », et nous savons maintenant que, dans votre esprit, maîtrise médicalisée équivaut à maîtrise comptable.

M. Gérard Bapt. Hélas !

Mme Muguette Jacquaint. L'article 10 est le dernier article de la section 2 du titre Ier du projet de loi, section intitulée « Renforcement de la qualité ». Il s'agit donc, comme je le disais, de tirer les conséquences de la mise en place de dispositifs visant à renforcer la qualité des soins et qui conditionnent le remboursement des prestations au respect uniquement par le professionnel de santé de certaines conditions faisant de l'assuré une victime.

Il faut lire cet article à la lumière des perspectives ouvertes par les articles 13 à 15 du projet. L'article 13 élargit considérablement l'éventail des sanctions applicables aux professionnels de santé, aux établissements de santé et aux usagers. Quant aux articles 14 et 15, ils renforcent le contrôle des prescriptions d'arrêts de travail. Autant de gendarmes à la poursuite du fraudeur ! Ce projet a véritablement comme ambition de pénaliser les assurés. Il s'agit en réalité - et nous y reviendrons quand nous discuterons du financement de la sécurité sociale - de les accuser pour leur faire supporter l'essentiel des économies de votre plan.

Tout cela confirme notre analyse et milite en faveur de la suppression de la référence « , L. 183-1-1 ».

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2764 à 2775.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2776 à 2787.

La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. Ces amendements tendent à supprimer, au 3° du texte proposé pour l'article L. 314-1 du code de la sécurité sociale, les mots « et les accords prévus à l'article L. 162-12-17 », référence à un outil supplémentaire de rationnement des soins qui ne répond qu'à une logique comptable. Ce texte, en posant le contrôle par les caisses de la justification des prescriptions faites par le médecin à son patient avant d'en ouvrir le remboursement, organise une nouvelle barrière à l'accès aux soins de façon égale pour tous. Il s'agit d'un dispositif de contrôle supplémentaire. Avant d'engager le remboursement des soins, les caisses vérifieront si les prescriptions sont justifiées. Une nouvelle fois, le médecin se voit contrôlé dans sa prescription. La liberté de prescrire et d'apprécier la prescription s'en retrouve limitée.

Ce 3° est, en outre, une entrave au droit de prescrire, car il prévoit que les remboursements soient conditionnés, en supposant que le médecin ne le sache pas et qu'il participe ainsi à amplifier les abus, pénalisant ainsi les plus modestes des assurés sociaux.

Vous comprendrez que nous ne puissions approuver cette disposition.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques, nos 2276 à 2287.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous avons repris nos travaux après une suspension de séance. Nous sommes, maintenant, contraints de débattre de l'assurance maladie en l'absence du ministre de la santé, parti défendre sa loi de santé publique devant le Sénat. Ce n'est pas une fatalité, mais cela tient à la désorganisation des travaux parlementaires voulue par le Gouvernement !

Nous sommes censés surveiller l'action du Gouvernement. Or, alors que nous débattons de l'assurance maladie, le Gouvernement présente en deuxième lecture au Sénat le projet de loi relatif à la politique de santé publique. Pendant que nous sommes au moulin, M. Douste-Blazy est au four. Et il est en train de faire marche arrière, puisqu'il renonce à l'encadrement des publicités alimentaires en direction des enfants au profit d'une malheureuse obole représentant moins de 1 % des investissements publicitaires de la filière agroalimentaire. C'est là un recul considérable par rapport à ce que nous avons voté !

Attachés comme nous le sommes à notre travail de parlementaires, comment pouvons-nous ne pas réagir ? Hier, déjà, le ministre nous a quittés pour donner une conférence de presse. Sauf à abuser de la procédure - seule possibilité pour nous, parlementaires, de tenir une conférence de presse - nous ne saurions demander des suspensions de séances de plusieurs dizaines de minutes afin de critiquer la politique conduite par le Gouvernement tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Cette situation pose problème et nous ne pouvons continuer ainsi !

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Jean-Marie Le Guen. Dans le même ordre d'idées, j'ai entendu un de nos jeunes collègues, élu voici à peine une semaine, dénoncer l'obstruction des parlementaires de l'opposition. Reconnaissons que ce jeune parlementaire n'a pas fait beaucoup d'obstruction, puisqu'il n'a pas encore pris le temps de venir à l'Assemblée et encore moins de participer à ce débat, chacun aura pu le constater ! Il aura très rapidement attrapé les tics de ces parlementaires qui préfèrent effectivement vanter le travail en circonscription plutôt que le travail législatif. Cela augure bien de ce renouvellement !

Je ferme la parenthèse pour insister sur le fait que nous rencontrons donc toutes les difficultés du monde pour faire notre travail comme il convient.

Nonobstant la présence sympathique et compétente de notre secrétaire d'État,...

M. Marc Bernier. Ah ! Quand même !

M. Jean-Marie Le Guen.  ...nous ne pouvons, cédant à une torpeur, source d'un certain désintéressement et davantage liée au calendrier qu'à la météo, laisser passer sans réagir ces articles qui transforment notre assurance maladie et les caisses de sécurité sociale en ennemies des assurés et des médecins. On donne ainsi des outils juridiques et surtout l'impulsion politique à l'assurance maladie qui pourra ainsi avoir un œil sur le stylo du médecin qui rédige ses prescriptions et un autre sur le porte-monnaie du patient afin de savoir comment il est remboursé ! Cela revient à renverser totalement la logique des institutions sociales de ce pays...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Cela suffit !

M. Jean-Marie Le Guen. ...nées en 1945, sous couvert d'une pseudo-responsabilisation qui, derrière un discours purement formel, n'est que pénalisation !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. On connaît tout cela ! On l'a déjà entendu mille fois !

M. Jean-Marie Le Guen. Eh bien, vous allez l'entendre encore ! Je sais que c'est désagréable, monsieur le rapporteur !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Oui, il est désagréable d'entendre toujours la même chose !

M. Jean-Marie Le Guen. Il est aussi très désagréable d'entendre les déclarations du ministre au Sénat, alors que nous légiférons à la veille de week-ends...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Vous êtes élus pour cela !

M. Jean-Marie Le Guen. ...où les Français - c'est à juste titre leur sentiment - pourraient faire autre chose que consacrer leur temps à surveiller l'action des parlementaires ! Mais c'est évidemment à cette époque que surviennent les mauvais coups ! On profite très tranquillement de l'anesthésie de l'opinion pour transformer une institution sociale en un outil de régression et de contrôle social !

M. Gérard Bapt. M. Le Guen a raison !

M. le président. La parole est à M. Yves Bur, président de la commission spéciale.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Trop, c'est trop !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est exact !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Vous nous accusez de profiter de la torpeur de l'été ! Vous accusez nos collègues de ne pas participer plus activement au débat...

M. Jean-Marie Le Guen. Je parle de ceux qui donnent des leçons !

M. Gérard Bapt. Ne déformez pas les propos de M. Le Guen !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Cet avis peut être partagé sur l'ensemble des bancs de cette assemblée.

Concernant la torpeur du débat, vous êtes bien placé pour savoir pourquoi nous en sommes arrivés là. Cela fait maintenant plus d'une semaine que nous débattons de ce sujet extrêmement important et que nous assistons stoïquement, mais décidés, à toutes les manœuvres de ralentissement du débat,...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. D'obstruction ! N'ayez pas peur des mots !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...pour ne pas dire d'obstruction ! Vous êtes en train de dresser les Français contre l'assurance maladie qui serait derrière chaque médecin, à contrôler ses ordonnances.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous l'y mettez !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Il y a quelques articles de cela, vous nous disiez que nous ne nous occupions pas des médecins. Les professionnels de santé acceptent cette démarche vertueuse. Ils acceptent également que leurs engagements fassent l'objet de contrôles !

Mme Janine Jambu. Je ferais preuve de plus de prudence à votre place !

M. Jean-Marie Le Guen. Nous allons en parler !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ils acceptent d'être sanctionnés en cas de non-respect de cette démarche vertueuse.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous allons écrire à tous les médecins de France pour leur expliquer !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous réformons, certes, profondément notre assurance maladie. Nous pourrions naturellement préférer à cette réforme le modèle communiste de la prescription et de la consommation de soins à volonté,...

Mme Janine Jambu. C'est une insulte !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...l'essentiel étant de faire payer le patronat !

Mme Janine Jambu. C'est trop facile !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. De telles réformes et de telles propositions sont un peu courtes ! Quant aux vôtres, monsieur Le Guen, elles sont également très limitées. Il est vrai que vous et vos amis avez beaucoup critiqué nos propositions sur le dossier médical personnel...

M. Jean-Marie Le Guen. À juste titre ! Et vous avez été obligé de tenir compte de nos amendements !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...et sur le médecin traitant. Rien ne vous agrée dans cette réforme...

M. Jean-Marie Le Guen. Peu de chose !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...alors que vous vous dites favorables à ces deux mesures !

Maintenant, il ne dépend que de vous que le débat prenne un tour plus actif ! Vous en détenez la clé ! Pour notre part, nous y consacrerons le temps qu'il faudra.

Vous avez évoqué l'absence du ministre. Nous pouvons ici compter sur un secrétaire d'État...

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Un excellent secrétaire d'État !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...qui fait de l'excellent travail !

Quant aux débats qui se déroulent actuellement au Sénat sur le projet de loi relatif à la politique de santé publique, nous aurons l'occasion, monsieur Le Guen, d'y revenir lors de la réunion de la CMP et après.

Ne nous trompons pas de débat ! Ne cherchez pas de diversions pour ralentir la discussion ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous sommes ici pour sauver la « sécu » ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, M. le rapporteur ne vous a pas demandé la parole !

M. le président. Monsieur Dubernard, un orateur doit toujours prendre la parole après en avoir reçu l'autorisation du président. Néanmoins, il fallait aussi que ce souffle s'exprime ! (Sourires.)

La parole M. Alain Claeys.

M. Alain Claeys. Monsieur le rapporteur, si, comme vous le dites, vous voulez « sauver la sécu », vous avez perdu deux ans !

Nous ne nous trompons pas de débat, monsieur le président de la commission spéciale ! Il se passe quelque chose d'assez étonnant depuis dix jours dans cette assemblée.

Les concepts de dossier médical personnel et de médecin traitant sont unanimement acceptés. Ce sont des solutions de bon sens. Mais le devoir de l'opposition est d'expliquer - ce que nous faisons depuis une semaine - que, derrière, se cache une petite révolution qui modifiera profondément notre système d'assurance maladie solidaire. Vous n'avez, en effet, de cesse de parler à ce propos de déremboursement, de déconventionnement et vous cherchez à culpabiliser le patient.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est faux !

M. Alain Claeys. C'est de cela qu'il faut débattre, monsieur le président de la commission ! À chaque fois qu'ont été abordés les concepts de dossier médical personnel et de médecin traitant, il y avait, derrière, les notions de déconventionnement, de déremboursement, et de pénalisation ! C'est ce que nous entendons condamner ! Vous avez beau jeu de nous répondre que nous sommes opposés aux principes du dossier médical personnel et du médecin traitant ! Or chacun sait que le dossier médical personnel ne sera pas opérationnel en 2007  et que les 3,5 milliards d'euros d'économies ne seront pas atteints ! Cela a été précisé en commission ! En 2007, la mesure ne sera pas financée et elle ne sera donc pas efficace ! Vous aurez toutefois, à votre façon, profondément réformé l'assurance maladie solidaire en institutionnalisant le déremboursement et le déconventionnement.

M. Marc Bernier. C'est faux ! Quant à vous, vous n'avez rien fait pendant cinq ans !

M. Alain Claeys. Le fait mérite bien que l'on en débatte à l'Assemblée nationale !

Monsieur le président de la commission spéciale, vous ne faites que mettre en pratique ce qu'annonçaient, il y a quelques mois, M. le Premier ministre et M. Barrot, alors président de l'UMP. C'est un débat politique noble. Nous sommes contre cette politique et nous la combattrons y compris pendant l'été !

Nous n'accepterons pas d'être caricaturés ! Nous n'accepterons pas que des collègues, qui ne font pas acte de présence, nous accusent d'obstruction ! Nous faisons simplement notre travail. Il est de notre devoir, et il y va de notre honneur, de dire notre désaccord et de combattre des propositions que nous n'approuvons pas !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. M. Dubernard a rappelé qu'il était du devoir des parlementaires de siéger dans cet hémicycle. Il n'a jamais été question pour nous de remettre en cause notre travail et de refuser de discuter des projets de loi ! Nous l'avons très souvent dit et je le répète ! Je ne peux que regretter de devoir une nouvelle fois discuter d'un projet de loi alors que les jeux sont faits et que le Premier ministre a dit qu'il en irait ainsi et pas autrement.

Monsieur le président Yves Bur, si vous faites allusion à l'ancien modèle du groupe communiste, mettez-vous à la page car c'en est fini ! En revanche, nous sommes toujours fidèles aux valeurs pour lesquelles nous nous battons...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous aussi !

Mme Muguette Jacquaint. ...et au rang desquelles figure, comme c'est le cas concernant ce texte relatif à l'assurance maladie et à la sécurité sociale, la solidarité.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est notre cas aussi, madame ! En l'occurrence, vous n'avez pas de monopole !

Mme Muguette Jacquaint. Or, comme Alain Claeys l'a dit, vous remettez en cause ces valeurs de solidarité. Chacune des mesures de ce projet tend à culpabiliser les professionnels de santé ou les assurés sociaux. Vous voulez faire payer à ces derniers les soins qu'ils devront recevoir, comme s'il s'agissait de marchandises. S'ils n'en ont pas les moyens, tant pis pour eux : ils se soigneront comme ils pourront.

Une réforme est sans doute nécessaire mais je suis tout de même étonnée, monsieur le président de la commission spéciale, que vous preniez à la légère nos propositions sur la sécurité sociale, et plus particulièrement sur le financement de l'assurance maladie. Pourtant, lorsque les élus des groupes communistes du Sénat et de l'Assemblée nationale sont allés faire part à M. le ministre de leurs suggestions sur ce sujet important, il a reconnu leur sérieux, même si nous divergions largement quant à la stratégie à adopter. Nous les renouvelons dans le cadre de ce débat, et nous constatons que vous vous contentez très souvent de répondre : « Rejet ! »

Ce débat dure. Mais vous y avez tout intérêt afin de faire croire qu'il y a une concertation, une négociation, afin de vous donner une image démocratique. Cependant, avant même que le projet de loi ne soit adopté, vous avez déjà envoyé des consignes pour que les mesures qu'il contient soient appliquées, nous le savons tous. J'appelle cela un faux débat démocratique, et nous prendrons le temps qu'il faudra pour revenir sur chacune de nos propositions.

M. Jean-Marie Le Guen. Excellent !

M. Marc Bernier. Ce n'est pas terrible !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Tout de même, depuis le début de l'examen du projet de loi, l'opposition me semble avoir montré que ses questions étaient pertinentes puisqu'un certain nombre de ses amendements ont été acceptés. Heureusement, d'ailleurs, car il aurait été difficile de mettre complètement en application les concepts de dossier médical personnel ou de médecin traitant sans nos propositions, c'est le moins qu'on puisse dire. Finalement, nous avons donc tous intérêt à ce que le débat continue à se dérouler ainsi.

Quant au sauvetage de l'assurance maladie, tout le problème porte sur la manière : on peut sauver le malade en le laissant hémiplégique ou en lui redonnant une nouvelle vie. C'est sur ce point que nos avis diffèrent car nous n'acceptons pas que vous vouliez sauver le malade en améliorant les comptes de l'assurance maladie, certes, mais surtout en prenant dans les poches des assurés sociaux. Sur ce point, nous sommes en désaccord, et nous le disons depuis le début.

Et puis, on peut s'interroger sur la valeur de la parole du ministre, pardonnez-moi de le dire. Au début du débat, j'ai demandé à M. Douste-Blazy s'il maintiendrait, au Sénat, le fameux amendement sur les distributeurs de boissons et de friandises - qui fut défendu ici, lors de la deuxième lecture du projet de loi relatif à la santé publique, par notre collègue Yves Bur et adopté contre l'avis du Gouvernement, je le rappelle.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est exact !

Mme Martine Billard. M. le ministre m'a assuré que oui, qu'il ne fallait pas s'inquiéter. Or nous apprenons aujourd'hui que cette disposition va être totalement modifiée.

M. Jean-Marie Le Guen. À l'initiative du Gouvernement !

M. Gérard Bapt. Non ! Du lobby agroalimentaire !

Mme Muguette Jacquaint. Très juste !

Mme Martine Billard. Absolument : sous la pression du lobby de l'industrie des distributeurs.

M. Jean-Marie Le Guen. Le Gouvernement prescrit sous le contrôle des lobbies ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Martine Billard. Pour restreindre l'épidémie d'obésité qui commence à frapper la France - on voit les proportions qu'elle a prises dans d'autres pays -, nous avons eu à cœur de nous bagarrer ensemble et, en l'occurrence, nous nous sommes mis d'accord sur la manière de sauver le malade : arrêter de pousser à la consommation de sodas et de friandises dans les établissements scolaires. Mais nous apprenons finalement que, sous l'influence du lobby des distributeurs, une charte sera élaborée pour limiter le taux de graisses ou de sucres des produits mis en vente.

Ce n'est pas sérieux ! À chaque fois qu'une mesure embarrasse un lobby industriel ou incite tous les citoyens à prendre en charge leur santé, vous reculez. Par contre, quand il s'agit de prendre de l'argent dans la poche des assurés ou des malades, pas de problème : on les responsabilise en les faisant payer. La seule méthode que vous connaissez, c'est la sanction financière. Nous sommes vraiment en désaccord sur votre façon de régler les problèmes du système de santé et de l'assurance maladie.

En vous en tenant strictement à l'aspect financier, vous ne réglerez rien. Tant que vous n'aurez pas le courage politique d'affronter les lobbies pour vous attaquer aux causes de maladies comme l'obésité - on pourrait prendre d'autres exemples, comme la prévention des cancers -, la seule solution qui vous restera sera de piocher dans la poche des assurés.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

Mme Janine Jambu. J'avais demandé la parole !

M. le président. Mais la commission intervient lorsqu'elle le désire, ce qui, au demeurant, permet d'éclairer le débat.

Vous avez la parole, monsieur le président de la commission spéciale.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. J'ai la conviction que nous avons tous à cœur, dans cet hémicycle, de défendre la solidarité face à la maladie, même si, c'est vrai, nous divergeons sur la méthode. Pour ce qui nous concerne, nous avons le sentiment qu'une solidarité sans limites est une solidarité en danger, et nous voulons encadrer le système pour en éliminer les excès.

À cet effet, nous n'entendons pas nous contenter de quelques mesures phares de nature financière, car ce n'est pas l'essentiel. Ce qui est en cause, c'est la modification en profondeur des comportements face à la maladie, de la part, d'abord, des prescripteurs, les professionnels de santé, parce que ce sont eux qui détiennent le pouvoir médical, le savoir médical, parce que c'est à eux que les malades confient leur santé. Nous devons agir avec force pour conduire tout le monde à adopter une nouvelle attitude face à la consommation de santé.

M. Pierre-Louis Fagniez. Tout à fait !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ainsi, nous pourrons préserver la solidarité sans remettre en cause la bonne qualité des soins. En tout cas, c'est notre vision des choses, et je ne laisserai pas l'opposition la caricaturer par ses assauts.

Enfin, nous partageons plusieurs des préoccupations qui ont été exprimées en matière de santé publique. Peut-être aurons-nous l'occasion, en CMP, par exemple, de nous retrouver sur des propositions communes significatives vis-à-vis de ces enjeux majeurs.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur le président, je voudrais répondre aux accusations d'obstruction. J'ai indiqué, tout à l'heure, que mon intervention valait pour un certain nombre d'amendements tendant à supprimer telle ou telle partie de l'article 10, qu'il s'agissait d'une position générique et que, par conséquent, nous ne la répéterions pas systématiquement à l'occasion de chaque série d'amendements. Nous donnons notre avis sur les points essentiels du débat sans jamais faire d'obstruction - nous nous sommes déjà expliqués très clairement à ce sujet.

Cela étant dit, je ferai deux remarques, notamment à votre intention, monsieur le président de la commission spéciale.

Nous avons pu, en d'autres occasions, apprécier votre sincérité et votre intérêt pour les problèmes de santé publique. Mais nous ne croyons pas à la notion nouvelle de « solidarité encadrée » par les assureurs...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous n'acceptons pas cette caricature !

M. Gérard Bapt. Il y a là un clivage fondamental.

Mais venons-en un instant au travail parlementaire. Tout à l'heure, M. le ministre de la santé se plaignait de s'être couché à trois heures du matin parce qu'il avait dû défendre devant le Sénat non pas le projet de loi relatif à la politique de santé publique, comme je le croyais, mais celui relatif à la bioéthique. Ainsi, trois projets de loi dépendant du même ministre se télescopent actuellement entre l'Assemblée nationale et le Sénat.

M. Marc Bernier. Vous l'avez déjà dit !

M. Gérard Bapt. Considérant, par ailleurs, que M. le ministre organise des conférences de presse sur le thème de la santé publique, je juge opportun que nous soulevions ce type de questions, et ce n'est aucunement de l'obstruction. Des décisions fondamentales sont en train de se prendre au Sénat, et nous savons très bien que, quand le texte de la CMP nous reviendra, nous n'aurons pas la possibilité d'en débattre sérieusement et de rétablir les mesures que nous avions adoptées - avec l'accord de M. Bur, je le rappelle.

Un autre amendement tendant à lutter contre l'obésité avait été introduit par le ministre lui-même, sur les recommandations de la direction générale de la santé.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Gérard Bapt. Mais, alors que les industries agroalimentaires, l'an dernier, ont dépensé 1,5 milliard d'euros en publicité, on nous propose maintenant la création d'un fonds doté de 12 à 14 millions d'euros par an. J'expérimente, dans ma commune, une action de prévention de l'obésité juvénile de la dernière classe de maternelle à la dernière classe de primaire. Mais comment voulez-vous qu'un petit maire comme moi s'en sorte...

M. Richard Mallié. Il n'y a pas de petits maires !

M. Gérard Bapt. ...face à cette puissance financière, alors que les enfants sont plus souvent devant la télévision que face à leur maître ?

Mme Muguette Jacquaint. Il a raison !

M. Gérard Bapt. Nous faisons des efforts, nous en appelons à la solidarité active, citoyenne, pas seulement du corps médical et paramédical, mais de l'ensemble de l'équipe éducative, des parents d'élèves, et même des producteurs locaux, maraîchers et agriculteurs ! Mais que pouvons-nous faire avec des moyens aussi disproportionnés ?

De même, nous pensions avoir avancé sur le problème des distributeurs automatiques dans les établissements scolaires, mais on nous annonce maintenant que seules les boissons sucrées seront interdites, pas les boissons light ! Cela n'aura aucun effet car elles contiennent des additifs qui habituent au goût sucré ! C'est de la poudre aux yeux !

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Gérard Bapt. Admettez tout de même, monsieur Bur, que les navettes entre l'Assemblée et le Sénat du texte relatif à la politique de santé publique nous donnent des motifs d'indignation, sur la forme comme sur le fond !

M. Marc Bernier. Cela n'a rien à voir avec la présente discussion !

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié, pour un rappel au règlement.

M. Richard Mallié. Monsieur le président, nous débattons du projet de loi relatif à l'assurance maladie et nous en sommes à l'article 10. Alors, j'avoue ne pas comprendre pourquoi nous entendons tant parler de santé publique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Très bien !

M. Claude Évin. Les deux sujets sont liés !

M. Richard Mallié. Par ailleurs, on reproche au ministre de la santé de ne pas être présent. Mais le secrétaire d'État à l'assurance maladie est là.

M. Jean-Marie Le Guen. Qu'il réponde à nos questions, alors !

M. Richard Mallié. J'ai pratiquement siégé sans interruption depuis le début de l'examen du texte, c'est-à-dire depuis mardi de la semaine dernière à seize heures quinze ; je n'ai manqué qu'une séance, celle de vendredi soir dernier.

M. Jean-Marie Le Guen. Justement, cette séance s'est très bien passée !

M. Richard Mallié. Je suis navré de vous le dire, monsieur Claeys, car vous êtes un homme très courtois, mais il est manifeste que vous faites de l'obstruction, contrairement à vos dénégations. Quand on dépose 149 amendements identiques - nous allons bientôt y venir -, ce n'est pas de l'obstruction ? Quand les rappels au règlement n'ont rien à voir avec le texte en discussion, ce n'est pas de l'obstruction ?

M. Jean-Marie Le Guen. Mais non !

M. Richard Mallié. Laissez-moi vous répondre, monsieur Le Guen. Vous aurez beau nous reprocher de ne pas vouloir de la solidarité, le président Bur vous a démontré que c'est faux. S'il fallait bien intervenir pour réformer l'assurance maladie - nous sommes tout d'accord là-dessus, je crois -, il n'en reste pas moins que ce projet de loi maintient la solidarité entre tous les Français : chacun paiera selon ses ressources mais les besoins de tous les assurés sont identiques.

Cette réforme est trop importante pour donner prétexte à de faux débats. Il s'agit de responsabiliser les acteurs du secteur de la santé : premièrement, les patients ; deuxièmement, les professionnels de santé ; troisièmement, les gestionnaires de l'assurance maladie. Tel est le sens du projet de loi.

Arrêtons de discuter du sexe des anges, des distributeurs de confiseries ou de l'obésité !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est le dentiste qui parle !

M. Richard Mallié. Ces sujets n'ont rien à voir avec le texte. Je souhaite tout simplement, monsieur le président, que nous en revenions à l'article 10. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Reprise de la discussion

M. le président. La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. J'ai le sentiment que le président et le rapporteur de la commission spéciale perdent leur calme ! J'apprécie grandement que M. le secrétaire d'État, lui, le garde. Il est vrai que, comme M. le ministre, il n'a cessé de déclarer qu'il souhaitait une discussion sérieuse et approfondie qui débouche sur un texte amélioré. C'est d'ailleurs dans ce but que nous sommes tous là, vous et nous. Certes, nous ne sommes pas d'accord, mais, contrairement à ce que vous prétendez, nous ne faisons pas d'obstruction, nous ne faisons qu'exprimer notre opinion.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Oui, 149 fois de suite !

M. Richard Mallié. Voulez-vous que je précise ce que je viens de dire, madame Jambu ?

Mme Janine Jambu. Sans vouloir vous donner de leçon, n'est-ce pas cela la démocratie ? Il était bon de le rappeler, car, à vous entendre parfois, chers collègues de la majorité, on se demande ce qu'on fait là ! Nous sommes pourtant tout autant que vous des élus du suffrage universel !

En vous écoutant, monsieur le rapporteur, je me suis posé une question. Nous sommes là, dites-vous, pour trouver une solution préservant la solidarité, mais une « solidarité limitée ».

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je n'ai jamais dit ça !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Solidarité « encadrée », ce n'est pas la même chose !

Mme Janine Jambu. Qu'est-ce que cela veut dire ? Ou il y a solidarité, ou il n'y en a pas !

Il est trop facile, dans un pareil débat, de ridiculiser les propositions des communistes. Nous sommes en train de diffuser un dossier qui propose d'autres choix possibles pour la sécurité sociale.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Je l'ai lu !

Mme Janine Jambu. Avec intérêt sans doute ! Alors, vous aurez constaté que nous ne voulons ni privatisation, ni étatisation, mais un système moderne de sécurité sociale qui réponde, avant tout, aux besoins à la fois des patients et des professionnels de santé. Lisez et relisez cette brochure sérieuse, vous verrez que nous ne sommes nullement rétrogrades, comme on l'a entendu dire ici.

J'ai participé aux débats sur de nombreux textes, ces derniers temps, en particulier sur le statut d'EDF. Ce que j'ai entendu m'a parfois fait froid dans le dos. Bien sûr, on ne parle pas de privatisation, mais on nous explique qu'il n'y aura plus d'usagers mais des « clients ». Ce que j'ai entendu hier sur l'article 7 me fait craindre que, demain, il n'y ait plus de patients...

M. Richard Mallié. Nous, nous sommes impatients !

Mme Janine Jambu. ...mais des clients !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Caricature !

Mme Janine Jambu. Peut-être, mais il y a une certaine logique !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce n'est pas la nôtre !

Mme Janine Jambu. En tout cas, même si vous voulez précipiter le débat, vous ne réussirez pas à nous bâillonner !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous le savons !

Mme Janine Jambu. Nous sommes déterminés. Nous allons continuer à intervenir, en prenant le temps qu'il faut, comme M. le ministre et M. le secrétaire d'État nous y ont d'ailleurs invités. Alors, ne nous énervons pas et travaillons sérieusement, comme c'est notre devoir.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est ce que nous faisons depuis une semaine !

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. J'aimerais, moi aussi, donner mon point de vue au nom de l'UDF.

Présent depuis le début du débat, j'essaie de rester calme face à ce débat qui se prolonge, car, chacun en convient, il est très important pour le pays et pour nos concitoyens. La réforme de l'assurance maladie est, en effet, indispensable.

Le texte qui nous est proposé est-il parfait ? Aucun d'entre nous ne le pense au fond de lui, même à l'UMP. En particulier, on ne peut approuver le report des 32 milliards de déficit cumulé sur les générations futures. Quant au plan de financement, est-il à la hauteur ? Personne non plus ne le croit vraiment. Si les recettes sont certaines, les économies proposées - 10 milliards d'euros - ne seront sans doute pas au rendez-vous.

Le projet n'en comporte pas moins des mesures intéressantes, notamment l'instauration du dossier médical personnel, l'obligation du médecin traitant ou la création d'une Haute autorité, mais elles sont en partie dévoyées car, alors qu'elles devraient avoir pour seul but d'améliorer la qualité des soins - nous sommes tous d'accord sur ce point -, elles ont à chaque fois un volet financier destiné à faire des économies et prévoyant des sanctions, ce qui risque de dévaloriser ces bonnes idées et donc, à terme, de les faire remettre en cause.

L'article 10 sur lequel nous débattons à présent en est un bon exemple. Veiller à la qualité des soins et la contrôler, inciter aux bonnes pratiques médicales, tout cela est nécessaire et fait l'objet du premier volet de cet article. Mais pénaliser le patient parce que son médecin n'applique pas les bonnes pratiques est inadmissible.

S'agissant de l'obstruction à laquelle nous assistons depuis une semaine - et dans laquelle notre ami Jean-Marie Le Guen se montre un fin bretteur ! -, avons-nous tout oublié du passé ? Il serait préférable, bien sûr, que l'opposition soit constructive. Mais la majorité actuelle - moi-même et Bernard Accoyer, actuel président du groupe UMP, entre autres - ne s'est-elle pas adonnée, naguère, à semblable exercice lors de l'examen de textes présentés par Martine Aubry ou Élisabeth Guigou ? Nous avons bien su, à l'époque, nous battre pour essayer de les modifier car ils ne nous paraissaient pas à la hauteur. La majorité d'alors n'appréciait que modérément que nous intervenions sur tous les articles et défendions de très nombreux amendements.

Mes chers collègues de l'UMP, demandez donc à votre président de groupe : il garde certainement le souvenir de ce dont il était, d'ailleurs, très fier ! Pour ma part, je ne regrette pas de l'avoir fait !

En politique, il est bon d'avoir des convictions,...

Mme Muguette Jacquaint. Absolument !

M. Jean-Marie Le Guen. Alors, ça doit aller mal pour certains !

M. Jean-Luc Préel. ...de les défendre et de ne pas en changer selon que l'on est dans la majorité ou dans l'opposition. Il serait bon que l'UMP retrouve ses convictions. Je pense, monsieur le président, que vous qui exercez d'importantes responsabilités dans ce grand parti, vous y veillerez !

S'agissant de la CADES, sujet extrêmement important, lorsque Martine Aubry a prolongé la durée de vie de cette caisse de 2009 à 2014, j'étais l'un de ceux qui ferraillait contre cette mesure.

M. Gérard Bapt. Il s'agissait là de rembourser la dette de la droite !

M. Jean-Luc Préel. Mais Bernard Accoyer était plus combatif encore que moi sur le sujet...

M. Jean-Marie Le Guen. Est-ce possible ?

M. Jean-Luc Préel. ...et avait peine à trouver des mots assez virulents pour dire tout le mal qu'il en pensait !

Aujourd'hui, on nous propose encore de prolonger la durée de vie de la CADES. J'y reste opposé sur le principe et je le dirai le moment venu. Je pense que Bernard Accoyer saura convaincre ses collègues de l'UMP qu'il est inacceptable de faire porter sur les générations futures le déficit cumulé. C'est à nous d'assumer nos propres impérities !

Nos concitoyens comprendraient mieux la politique - et ce serait la meilleure façon de leur montrer combien elle est importante - si nous défendions nos convictions sans en changer selon que nous sommes dans l'opposition ou dans la majorité.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État, pour conclure cette partie du débat.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je n'ai pas l'ambition de conclure ce débat mais simplement d'y participer en présentant quelques remarques tant sur la forme que sur le fond.

D'abord, sur la forme, je reviendrai sur les commentaires récurrents qui portent sur ce qui se discute, en ce moment, au Sénat. Notre régime parlementaire comporte deux chambres, tout aussi honorables l'une que l'autre. Elles ont chacune leur place et contribuent toutes deux à l'édification de la loi. Chacun peut avoir son opinion sur ce système, il n'en reste pas moins que c'est le nôtre.

M. Jean-Marie Le Guen. Qui l'a remis en cause ?

Mme Muguette Jacquaint. Personne !

M. Jean-Marie Le Guen. En tout cas, pas à cette occasion !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. D'ailleurs, les groupes qui sont représentés ici le sont également au Sénat.

Le processus législatif prévoit une autre étape, celle de la commission mixte paritaire. Elle aura à traiter du texte relatif à la santé publique. Compte tenu de l'intérêt que vous portez à ces questions, monsieur Le Guen, je suis persuadé que vous participerez à ses travaux.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous voyez juste !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Le moment venu, dans le cadre institutionnel adéquat, vous saurez certainement exprimer vos idées. Alors, n'empiétez pas sur le rôle de la CMP !

Nous avons entamé la soixante-douzième heure de débat sur l'assurance maladie.

M. Richard Mallié. Seulement ?

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Est-ce la mi-temps ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Le Gouvernement l'a dit, nous avons le temps de faire cette loi de modernisation de l'assurance maladie. Il n'a pas à porter de jugement sur la procédure utilisée. Cela dit, quand 8 450 amendements ont été déposés, il est difficile d'y voir clair sur les positions de fond des uns et des autres.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous allons nous en expliquer !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous sommes à la disposition des parlementaires pour mener un débat de fond, mais il est plus facile d'en avoir un sur des amendements qui portent sur le fond du débat ! (Sourires.) Néanmoins, chacun est juge de l'attitude qu'il souhaite adopter dans ce débat.

Pour sa part, le Gouvernement s'est efforcé de répondre à toutes les questions qui lui étaient posées.

À présent, sur le fond, et pour répondre à des propos qui pouvaient - par extrapolation ! - relever de la caricature, n'oublions pas que si le débat parlementaire a débuté, il y a neuf jours, si je ne me trompe, dans cet hémicycle, le texte, lui, a une histoire : certains d'entre vous ont participé aux travaux du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ainsi qu'à ceux de la mission d'information présidée par Jean-Louis Debré.

En réalité, il est des points qui nous rassemblent : ce sont les mêmes valeurs et les mêmes principes qui doivent continuer à figurer dans notre système d'assurance maladie. Je ne crois pas qu'il y ait de débat idéologique sur la question.

Mme Muguette Jacquaint. Oh si !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Cela dit, c'est vrai, le Gouvernement et la majorité assument la responsabilité politique qui est la leur de le moderniser maintenant. Ç'aurait pu être fait auparavant, cela a été dit, et nous aurons à y revenir. Toujours est-il que nous réalisons ce travail de modernisation qui s'impose pour les Français.

M. Jean-Marie Le Guen. Un travail de destruction plutôt !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous y verrions plus clair, et nos compatriotes aussi, si les positions des uns et des autres étaient clairement exprimées. Or sur les principes, sur le dossier médical personnel, sur le médecin traitant, a priori nous sommes d'accord, mais au moment du vote nous ne le sommes plus ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Ce qui importe, c'est que, quand chacun devra prendre ses responsabilités et dire si, oui ou non, c'est la voie de l'action qui s'impose, ce seront les Français qui seront seuls juges.

Nous en sommes aujourd'hui à l'article 10. Le Gouvernement poursuivra avec le même sens de l'écoute mais aussi avec la volonté d'avancer, parce qu'il ne s'agit pas simplement d'élaborer un texte mais d'assurer l'avenir de notre système de sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Rappels au règlement

M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne répondrai pas sur le fond, car j'aurai l'occasion de le faire au cours du débat.

Mon rappel au règlement porte sur l'ordre du jour et la façon dont nous travaillons. Ce n'est pas avec le calendrier que nous impose le Gouvernement, nous obligeant à siéger sans interruption du lundi au dimanche, matin, après-midi et soir, qu'il fera marcher l'opposition à la baguette.

M. Richard Mallié. Faites votre mea culpa !

M. Jean-Marie Le Guen. Si le Gouvernement a l'intention de nous décourager par la longueur des débats, il se trompe lourdement. Nous ne baisserons pas les bras...

M. Richard Mallié. Nous non plus !

M. Jean-Marie Le Guen. ...et nous ne nous laisserons pas intimider par ces méthodes de choc. Le Premier ministre n'a-t-il pas fait adopter cette nuit des amendements scandaleux sur le statut des directeurs d'entreprise ?

M. Richard Mallié. Qu'est-ce que cela a à voir avec l'assurance maladie !

M. Jean-Marie Le Guen. Nous ne nous laisserons pas faire par un gouvernement qui manipule le Parlement en plein mois de juillet et porte des coups bas en déposant des amendements au dernier moment. Et s'il faut siéger jusqu'à la fin du mois d'août, nous serons là ! (« Nous aussi ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Ce sera un honneur !

M. Yves Bur. président de la commission spéciale. Nous irons à Paris-Plage !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. La majorité s'interroge sur le lien entre le débat qui a lieu au Sénat sur la santé publique et celui que nous avons ici sur l'article 10 du projet de loi relatif à l'assurance maladie.

Nous ne mettons pas en cause le débat qui retient le ministre au Sénat. Mais il nous semble difficile de mener à la fois un débat au Sénat sur la santé publique et sur la bioéthique et un débat à l'Assemblée nationale sur la sécurité sociale.

Nos collègues de la majorité pensent que la santé publique n'a rien à voir avec l'assurance maladie. Eh bien, mes chers collègues, si la santé publique n'a rien à voir avec la santé des Français et le financement de la sécurité sociale, c'est à n'y rien comprendre !

M. Richard Mallié. La santé publique fait l'objet d'un texte précis !

Mme Muguette Jacquaint. Un de nos collègues, socialiste, a évoqué la question de l'obésité. Nous avons eu en première lecture un long débat sur ce phénomène qui est apparu il y a plusieurs années, notamment chez les jeunes. Personne ne peut le nier, si nous ne parvenons pas à l'enrayer, nous pouvons d'ores et déjà nous préoccuper des répercussions qu'il aura en termes de santé et de coûts. À ce propos, dans un projet qui viendra prochainement en discussion, il est question d'une maison de l'adolescence. Je regrette d'ailleurs qu'un amendement discuté hier au Sénat n'ait pas pris en compte l'importante discussion que nous avons déjà eue précédemment sur l'obésité et le lobby agro-alimentaire.

Je tenais à démontrer, mes chers collègues, que santé publique et financement de la sécurité sociale sont à l'évidence indissociables.

M. le président. La parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. Hier soir, j'étais en province et je parlais des problèmes de l'assurance maladie avec des gens sérieux.

M. Gérard Bapt. Ce n'est pas comme ici !

M. Édouard Landrain. Lors de la discussion générale, j'ai souligné la maturité politique de l'Allemagne, où les grandes formations sont parvenues à un accord préalable sur un texte comparable à celui que nous examinons actuellement, et qui est un objet de satisfaction pour tous, puisque, dès les premiers mois, les comptes s'affichent au vert.

Par ailleurs, vous qui vous réjouissez tant de l'issue des dernières élections, méfiez-vous, car, aujourd'hui, l'opinion publique juge sévèrement l'obstruction à laquelle vous vous livrez !

M. Claude Évin. Ne seraient-ce pas plutôt vos amis ?

Mme Muguette Jacquaint. L'obstruction ne vous a pas gênés en d'autres temps !

M. Édouard Landrain. Tout le monde souhaite que l'assurance maladie soit modifiée et que le Gouvernement réussisse cette réforme. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Vous feriez mieux de vous inspirer de la maturité et du courage politiques dont ont fait preuve les Allemands ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Muguette Jacquaint. Soyez modeste !

Reprise de la discussion

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2788 à 2799.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je suis déjà intervenue à maintes reprises dans le cadre de cette discussion et je ne voudrais pas que nos collègues persistent à dire que nous faisons de l'obstruction. Mais il est impossible que nous parvenions à un consensus puisque nous avons de ce texte deux conceptions opposées.

Nous prendrons le temps qu'il faudra pour soutenir nos propositions, qui sont, je le rappelle, sérieuses, mais, pour ne pas rallonger le débat, monsieur le président, je me bornerai à dire que nos amendements nos 2788 à 2799 sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission est heureuse de parler enfin de l'article !

Ces amendements sont d'un immense intérêt intellectuel, puisqu'ils visent à ajouter les termes « dudit code », le code ayant déjà été plusieurs fois cité ! Si cet amendement est d'une logique implacable, il est redondant et la commission a été contrainte de le rejeter.

Voilà qui illustre parfaitement les non-sens de l'obstruction !

Mme Muguette Jacquaint. Ne nous provoquez pas, monsieur Dubernard !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Vous allez traumatiser le rapporteur, ma chère collègue !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je ne vous provoque pas, madame Jacquaint, c'est vous qui avez déposé des amendements provocants ! (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Afin de préserver la sérénité de nos débats, je me contenterai d'en demander le rejet.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2788 à 2799.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8131.

Est-il défendu, monsieur Le Guen ?

M. Jean-Marie Le Guen. Oui, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Rejet.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8131.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2800 à 2811.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Nous allons essayer de garder notre calme.

Monsieur le rapporteur, vous pouvez contester le sérieux des amendements déposés par le groupe communiste et républicain, mais la question n'est pas de savoir si notre opposition à ce projet est d'ordre intellectuel.

Quant aux amendements qui visent à rendre le texte plus clair et plus lisible, certains sont plus importants que d'autres, mais tous méritent d'être examinés. D'ailleurs, quand il n'y a pas lieu de s'étendre, nous disons simplement que ce sont des amendements rédactionnels. Cela étant, respectons-nous les uns les autres au cours de cet important débat.

Concernant les amendements nos 2800 à 2811, ils visent à supprimer un outil de contrôle comptable des prescriptions faites par le médecin à son patient.

Vous savez que les décisions de déremboursement de médicaments sont impopulaires. D'ailleurs, à l'occasion d'autres débats sur le déremboursement de médicaments jugés non importants, nous avions, ma collègue Jacqueline Fraysse et moi-même, dit que si ces médicaments n'étaient pas efficaces, il fallait les sortir du circuit. En revanche, j'estime que tout médicament important doit continuer à être remboursé.

Cet article pénalise le patient coupable d'avoir consulté un médecin qui n'aurait pas fait son travail correctement. Or les critères permettant d'établir le caractère déviant, au sens de la CNAM, d'une pratique médicale n'ont pas été précisés.

Si ce sont des critères purement médicaux, pourquoi ne pas recourir à la section des assurances sociales de l'Ordre des médecins, qui, je le rappelle, est composée d'un membre du corps de la juridiction administrative, d'assesseurs représentant les organismes de sécurité sociale et d'assesseurs membres de l'Ordre ?

Avec l'article que vous proposez, la collégialité de la décision de sanction disparaîtra. En outre, il ne s'agira plus d'une décision de justice, mais d'une décision administrative qui comportera un risque d'arbitraire plus grand.

C'est d'autant plus inacceptable que la décision s'appliquera à un patient qui aura par définition les plus grandes difficultés à se défendre sur la base d'arguments médicaux.

Pis, ce type d'arsenal répressif risque d'avoir pour conséquence la méfiance du patient à l'égard de son médecin. Or, on sait que la confiance est un élément essentiel de la relation médecin patient.

Nous vous demandons donc d'adopter cet amendement à un article qui jette la suspicion sur les médecins et sanctionne indûment les malades.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission s'est interrogée sur l'intérêt de tous ces amendements tendant à supprimer successivement chaque membre de la phrase : dans les amendements nos 2800 à 2811, ce sont les mots : « actes ou » qui sont visés ; dans la série suivante, les mots : « ou prestations » ; et enfin, dans les amendements nos 2824 à 2835, les mots : «, ou délivré les produits ».

C'est sans doute par souci de logique et pour favoriser la compréhension des députés que nos collègues du groupe communiste nous font ainsi avancer pas à pas et mot par mot. Mais je leur ferai remarquer que, lorsqu'un de leurs amendements a vraiment du sens, cela ne pose aucun problème de l'adopter. C'est ainsi que la commission a accepté l'amendement tendant à supprimer le dernier alinéa de l'article 10. Plutôt que de perdre notre temps à examiner l'opportunité de supprimer chacun des mots du projet de loi, nous ferions mieux de parler du fond.

M. Édouard Landrain. Très bien !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. L'avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je rassure nos collègues : mon intention n'est pas de faire de l'obstruction, au contraire. Je souhaite réagir à l'intervention de M. Landrain, qui, tout à l'heure, nous a donné une petite leçon de morale.

M. Édouard Landrain. Absolument, de morale politique. Vous en aviez besoin !

M. Gérard Bapt. Je vais suivre sa prescription, et le féliciter, ainsi que la majorité et le Gouvernement.

M. Claude Évin. Ça commence mal !

M. Gérard Bapt. Les dépenses de santé ont en effet atteint 10,8 % du PIB l'an dernier, contre 10,4 % en 2002. C'est un record, dans la mesure où elles n'avaient augmenté que de 1,5 % pendant les douze années précédentes. Je vous félicite de les avoir à ce point laissées déraper !

Avec une augmentation de 6,6 % en 2003, vous avez fait plus qu'en 2002 - elle était alors de 6,1 %. La dépense augmente de 7 % pour les médicaments, de 7,4 % pour les soins ambulatoires, de 7,5 % pour les dépassements permanents d'honoraires, malgré une décélération s'agissant des arrêts de travail et du thermalisme.

Un tel résultat vous permet maintenant de crier au loup et d'appeler au sauvetage de la sécurité sociale, grâce à un projet qui - nous le voyons article après article - n'a pour résultat que de pénaliser l'assuré.

M. Édouard Landrain. La morale politique, voilà vraiment ce qui vous manque !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Il importe de temps en temps de savoir remettre les pendules à l'heure. Plutôt que d'adopter l'attitude qui a été la vôtre, et qui consiste à laisser les dépenses filer sans rien faire (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), nous préférons réagir à l'augmentation des dépenses en modernisant l'assurance maladie. Cela s'appelle prendre ses responsabilités, et cela, nous savons le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2800 à 2811.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2812 à 2823.

La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. Décidément, monsieur le rapporteur, nous avons des visions très éloignées de ce qui touche ou non au fond du débat. Je considère que nos amendements sont vraiment des propositions de fond.

M. Richard Mallié. Vous voulez dire qu'avec elles, nous touchons le fond !

Mme Janine Jambu. D'ailleurs, s'agissant du déremboursement, nous avons aussi une expérience différente : lorsque nous en discutons avec eux, les intéressés s'y montrent très sensibles et ne l'acceptent pas si facilement.

Les amendements nos 2812 à 2823 visent à supprimer un outil de contrôle supplémentaire qui permet aux caisses de vérifier si les prescriptions faites par le médecin à son patient sont justifiées avant d'en ouvrir le remboursement.

Une nouvelle fois, le médecin se voit contrôlé dans sa prescription ; la liberté de prescrire et d'apprécier la prescription s'en retrouve limitée.

L'article L. 145-1 du code de la sécurité sociale, institué par la loi du 4 février 1995, dispose que les fautes, abus, fraudes et tout fait intéressant l'exercice de la profession de médecin sont soumis en première instance à une section des assurances sociales du conseil régional de discipline et en appel à une section des assurances sociales du conseil de l'ordre. L'arsenal répressif à l'encontre des médecins coupables de pratiques déviantes existe donc déjà. Force est de constater, cependant, qu'il n'a pas eu d'effet significatif sur le niveau tendanciel des dépenses de santé, non parce qu'il ne fonctionne pas de façon satisfaisante, mais parce que, fondamentalement, ces pratiques médicales ne sont pas la cause de leur élévation.

On s'en aperçoit aisément si l'on regarde de plus près le dérapage du coût des soins de ville, qui ont augmenté de 800 millions d'euros en 2003. L'épidémie précoce de grippe aurait coûté quelque 150 millions d'euros sur les seuls mois de novembre et décembre. Les effets de la revalorisation d'honoraires décidée en 2002 et 2003 sont estimés à 470 millions d'euros. À eux seuls, ces deux éléments expliquent donc près de 80 % de la hausse des soins de ville.

Comme la campagne sur la fraude à la carte Vitale - qui ne concernerait en fait que 0,01 % des assurés sociaux -, l'opération de chasse aux pratiques médicales déviantes relève de l'idéologie libérale et d'une logique comptable en matière de soins. Nous ne contestons pas la nécessité d'améliorer le système de soins, mais il faut le faire en menant des enquêtes de santé publique sérieuses, et non en gardant les yeux rivés sur les seules dépenses. D'autant plus que la sanction principale que vous proposez à l'égard du médecin responsable de ce que vous appelez des pratiques déviantes est le déremboursement de l'assuré social qui en est la victime. Convenez que c'est un peu fort !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2812 à 2823.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2824 à 2835.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 10 entend permettre de vérifier que les prestations sont médicalement justifiées. Dans le cas contraire, les sanctions applicables sont celles prévues à l'article 13 du projet de loi. Il est ainsi instauré un nouvel outil de contrôle destiné à permettre aux caisses de vérifier la justification des prescriptions faites par le médecin à son patient avant d'en ouvrir le remboursement.

Il s'agit de lutter contre les abus. Je ne nie pas leur existence, mais ils ne sont pas la cause essentielle du déficit de l'assurance maladie ! Celui-ci - devrons-nous le répéter sans fin ? - est bien plus lié à l'affaiblissement de la croissance et de l'emploi. Mon collègue Maxime Gremetz l'a montré à plusieurs reprises. Avec la montée du chômage, ce sont moins de cotisations qui entrent dans les caisses. Rappelons que 100 000 chômeurs coûtent à l'assurance maladie plus de 1 300 000 euros. D'où l'importance de lutter sans répit pour retrouver le plein-emploi. Tant que le Gouvernement ne prendra pas toute la mesure du coût du chômage, il continuera à s'interroger ainsi sur la nature des économies pouvant être faites - sur le dos des malades et au détriment de la qualité des soins - afin de boucher le trou de la sécurité sociale.

Comme le reste du projet de loi, l'article 10 participe de la campagne sur les fraudes dont serait victime la sécurité sociale. Or, si nous avons tous en tête des exemples d'abus, ceux-ci restent minimes. Une étude menée par la caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes prouve d'ailleurs qu'il s'agit d'un phénomène marginal. Portant sur 340 patients présumés « nomades », c'est-à-dire soupçonnés d'aller d'un médecin à l'autre, elle a montré que plus des deux tiers des actes étaient médicalement justifiés.

L'article 10 n'a donc d'autre objet, je le répète, que d'organiser le rationnement des soins apportés à nos concitoyens. C'est pourquoi je vous propose d'adopter ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2824 à 2835.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2836 à 2847.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Ces amendements sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2836 à 2847.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 2848 à 2859.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Ces amendements sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2848 à 2859.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques, n° 87, nos 1000 à 1011, n° 7494 et n° 7863.

J'indique d'ores et déjà que, sur le vote de l'amendement n° 7863, ainsi que des amendements identiques n° 87, nos 1000 à 1011 et n° 7494, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 87.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je vais laisser à Mme Jacquaint le soin de le défendre, car il est identique aux amendements nos 1000 à 1011.

M. Jean-Marie Le Guen. Il aurait pourtant été intéressant de vous entendre !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Mais je le remarque à nouveau : quand un amendement a du sens, la commission sait prendre ses responsabilités en l'acceptant.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement vise à supprimer le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 314-1, qui stipule que la prise en charge par l'assurance maladie est subordonnée au respect des conditions mentionnées au présent article. À notre grande satisfaction, il a été adopté par la commission, et Mme Martine Billard, M. Jean-Luc Préel et M. Philippe Vitel ont souhaité le cosigner.

En effet, il apparaît logique de ne pas subordonner la prise en charge par l'assurance maladie des soins délivrés aux patients au respect par le praticien des bonnes pratiques médicales.

On peut à la limite imaginer que les caisses demandent ces vérifications pour faire des analyses de santé publique ou mener des études médicales en vue d'améliorer les prises en charge, on peut imaginer ce type de contrôle pour parfaire les connaissances en matière d'activité de l'assurance maladie, mais, en aucun cas, de tels contrôles ne doivent conditionner l'ouverture du remboursement des soins car c'est injuste de faire supporter au malade les mauvaises habitudes de prescription d'un médecin.

Un malade ne sera pas remboursé parce que son médecin aura produit des prescriptions non justifiées. C'est une disposition inacceptable.

Voilà jusqu'où peut nous mener la pensée unique en matière de maîtrise des dépenses de santé. Le journal Le quotidien du médecin nous donne quelques éléments à ce sujet dans un article relatif à la deuxième édition du rapport sur l'exécution de l'ONDAM de la Caisse nationale d'assurance maladie.

Décortiquant les causes du dépassement de l'ONDAM 2003, la CNAM donne un coup de projecteur sur les soins de ville. Bien que plus faible en 2003 qu'en 2002, la croissance en valeur des soins de ville est l'une des plus soutenues depuis la création de l'ONDAM. La décélération constatée, bien que réelle, reste timide, et, surtout, selon la caisse, elle n'est pas à la hauteur des enjeux financiers. Nous y voilà !

Au passage, la CNAM, qui souhaite faire la chasse aux pratiques déviantes, regrette les limites de ses contrôles en écrivant qu'il n'existe pas aujourd'hui de possibilité d'actions intermédiaires simples à mettre en œuvre, de type sanctions financières, qui pourraient s'appliquer pour des faits plus importants que ceux relevant de la mise en garde mais ne relevant pas pour autant de sanctions ordinales.

Les médecins auraient donc des pratiques insuffisamment graves pour faire l'objet de sanctions de la part du Conseil de l'ordre, mais elles mériteraient tout de même d'être sanctionnées financièrement.

De surcroît, si l'article était adopté tel qu'il est proposé par le Gouvernement, la sanction financière s'appliquerait aux patients. Une telle mesure relève de la logique comptable, et non de la chasse aux pratiques médicales déviantes.

Nous sommes donc satisfaits, monsieur le président de la commission, que cet amendement, longuement discuté en commission, ait été adopté.

M. le président. Vous avez donc ainsi défendu en même temps les amendements n°s 1000 à 1011, madame Jacquaint.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour défendre l'amendement n° 7494.

M. Jean-Luc Préel. Comme je l'ai expliqué hier en intervenant sur l'article, nous sommes bien sûr d'accord pour permettre le contrôle des bonnes pratiques, dans le respect du secret médical, c'est-à-dire vérifier que les actes et les traitements prescrits l'ont été à bon escient, respectent les textes législatifs et réglementaires, mais surtout la qualité des soins. Il y a malgré tout des problèmes d'application. Il faut définir ces bonnes pratiques, elles doivent faire l'objet d'un consensus, les données doivent être communiquées en respectant le secret médical. Par ailleurs, la mise en œuvre du contrôle médical des caisses souffre aujourd'hui de graves insuffisances.

Par contre, l'on ne peut accepter le dernier paragraphe, qui pose de réels problèmes. Autant il est naturel de sanctionner des professionnels qui ne respectent les bonnes pratiques, et encore faut-il qu'ils aient l'occasion de s'expliquer sur leurs pratiques en appel, autant il est difficile de sanctionner le patient. Il est pénalisé parce qu'il est mal soigné, puisque son médecin n'applique pas les bonnes pratiques.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Jean-Luc Préel. Pourquoi devrait-il être en plus sanctionné financièrement ? Cela nous a paru tout à fait anormal.

C'est pourquoi nous avions déposé un amendement de suppression du dernier paragraphe de l'article, et nous avons été satisfaits de constater que l'ensemble des groupes étaient d'accord, ce qui a permis à la commission de présenter un amendement commun. S'il est adopté, cela redonnera tout son sens à l'article 10.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour défendre l'amendement n° 7863.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous avions de quoi nous satisfaire de la convergence des points de vue des parlementaires sur cette question, et nous pensions que l'essentiel avait été sauvé. Il est en effet impensable que les assurés soient doublement pénalisés lorsque leur médecin leur fait des prescriptions qui ne correspondent pas aux normes agréées par la sécurité sociale. Nous pensions aussi que c'était une façon de respecter le médecin. Son patient risque en effet d'être sanctionné par sa faute, sans qu'ils puissent en parler.

C'est donc avec beaucoup d'étonnement que nous voyons arriver un amendement du Gouvernement qui rétablit ce point essentiel de l'article 10, derrière un prétendu équilibre entre l'assuré et le médecin, qui, encore une fois, n'a absolument pas lieu d'être puisque l'assuré n'a pas à être emporté dans cette galère de la condamnation d'une prescription.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Jean-Marie Le Guen. Personne n'a été capable de nous donner un exemple concret pour nous expliquer comment on pourrait incriminer de façon crédible un assuré pour la prescription dont il a été doublement victime et dont il serait en l'occurrence coupable.

De façon parfaitement hypocrite, tout le monde va voter la suppression de cette disposition extraordinairement importante, et, dans quelques instants, le Gouvernement va défendre un amendement qui tend à la rétablir.

L'on voit donc bien là combien la majorité est contrainte par ce gouvernement à appliquer une politique dont elle ressent les effets néfastes pour les assurés. Le Gouvernement est tout entier tourné vers la chasse et la pénalisation des assurés, il entraîne avec lui sa majorité vers une balance entre assurés et médecins qui, encore une fois, n'a aucun sens. Les prescriptions, ce sont les médecins qui les font, pas les assurés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques n° 87, nos 1000 à 1011, n° 7494 et n° 7863.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 42

              Nombre de suffrages exprimés 42

              Majorité absolue 22

        Pour l'adoption 40

        Contre 2

L'Assemblée nationale a adopté.

En conséquence, l'amendement n° 7937 de M. Évin n'a plus d'objet.

Je suis saisi d'un amendement n° 8455 rectifié.

Sur le vote de cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour défendre cet amendement.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Vous avez été entendus : c'est pour cela que le Gouvernement a donné un avis favorable aux amendements de suppression du dernier paragraphe de l'article 10. On pouvait en effet comprendre que l'assuré supportait seul les conséquences d'une erreur imputable soit au patient soit au médecin.

Cela dit, il nous semble essentiel de savoir médicaliser la liquidation. Nous devons tirer les conclusions de mauvaises prescriptions.

Bref, l'assuré ne doit pas supporter seul les conséquences d'une erreur de prescription.

M. Jean-Marie Le Guen. Pourquoi « seul » ?

Mme Muguette Jacquaint. Il ne doit pas les supporter du tout !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Veut-on oui ou non avoir une régulation médicalisée des choses ? C'est la question essentielle et la réponse est oui. Il faut savoir en tirer les conséquences au bout de la chaîne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement. À titre personnel, je trouve qu'il précise bien les choses et j'y suis favorable.

Cela dit, monsieur le secrétaire d'État, je ne suis pas le seul à penser que cette notion de « liquidation médicalisée » n'a aucun sens pour le commun des mortels. Il faudrait expliquer que cela consiste à ne plus rembourser sur le seul fondement des prescriptions des médecins.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Cet amendement, c'est de l'hypocrisie totale ! Vous auriez mieux fait, monsieur le secrétaire d'État, de proposer un amendement tendant à remplacer le dernier alinéa de l'article 10 plutôt que de prétendre être favorable à sa suppression pour le réintroduire par la fenêtre.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

Mme Martine Billard. Je lis l'amendement : « Lorsqu'une anomalie est constatée par la caisse... » - nous sommes bien dans la liquidation comptable - « ...ou le service médical, ceux-ci apprécient les responsabilités respectives de l'assuré ou du professionnel de santé. » Une négociation va donc s'engager pour savoir quels sont les degrés respectifs de responsabilité du professionnel de santé et de l'assuré. Or, aux termes de l'article 10, le seul cas où la responsabilité de l'assuré est engagée est celui où l'assuré ne renvoie pas son arrêt de travail dans les temps. C'est le seul cas indiqué par l'article L. 315-2 du code de la sécurité sociale. Dans tous les autres cas, l'assuré ne peut absolument pas être tenu pour responsable des conséquences d'une mauvaise pratique médicale. Il ne peut donc y avoir, dans ce domaine, d'équilibre entre la responsabilité de l'assuré et celle du professionnel de santé.

De plus, les trois articles du code de la sécurité sociale mentionnés dans l'amendement, à savoir les articles L. 162-1-14, L. 162-1-15 et L. 315-2, renvoient aux articles 13, 14 et 15 de ce projet de loi. Or l'article 13 fait référence à l'inobservation des règles du présent code par les professionnels de santé ; la responsabilité concerne donc uniquement les professionnels de santé. L'article 14, avec une approche purement mathématique qui ne peut recueillir notre assentiment, porte sur le contrôle des professionnels de santé qui prescrivent des transports ou des arrêts de travail et ne concerne donc pas l'assuré. Quant à l'article 15, il permet la suspension des indemnités journalières en cas d'arrêt de travail abusif.

Sous prétexte de proposer une écriture plus équilibrée, le Gouvernement persiste à vouloir faire payer à l'assuré une éventuelle mauvaise pratique, qui peut être due à une erreur ou à la précipitation. La caisse aura beau essayer de trouver un équilibre entre l'assuré et le professionnel de santé, le seul qui, à la sortie, se fera avoir, c'est l'assuré qui verra ses frais non pris en charge. Au bout du compte, il n'aura plus qu'à payer de sa poche. C'est invraisemblable !

Depuis le début de notre discussion, je ne cesse de dénoncer, au nom des Verts, cette dérive : c'est l'assuré ou le malade qui est chargé de payer des erreurs qui sont commises en son nom par d'autres. Des erreurs sont commises dans toutes les professions, souvent par un tout petit pourcentage de ses membres. Ce n'est pas une raison pour stigmatiser l'ensemble de la profession.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Patrick Braouezec. Et légiférer à partir de là !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Les mots ont-ils encore un sens ? En tout cas, je partage le sentiment du rapporteur sur le caractère douloureux de l'expression « liquidation médicalisée ». Nous préférerions certes parler de « maîtrise médicalisée », mais, en l'occurrence, ce n'est pas possible. La maîtrise médicalisée consiste à organiser les soins et à demander aux praticiens de se conformer à des règles de bonnes pratiques et de bon usage des soins. La liquidation médicalisée se situe, elle, dans une logique de sanction envers soit les professionnels de santé, soit les assurés - ces derniers étant particulièrement visés par l'amendement du Gouvernement alors qu'ils ne sont en rien responsables des prescriptions qui leur ont été faites. Vouloir faire croire dans ces conditions à un traitement équitable des praticiens qui pourraient être mis en cause et des assurés n'a aucun sens. Si les premiers peuvent être à l'origine de problèmes, les seconds n'y sont absolument pour rien.

Mme Muguette Jacquaint. Ce sont les victimes !

M. Jean-Marie Le Guen. Absolument. Et ce sont les victimes que l'on va faire payer. C'est comme si un tribunal sanctionnait autant la victime que le coupable !

Cette démarche va engendrer des relations conflictuelles, en instaurant une distance considérable entre le patient et le médecin et en judiciarisant leurs rapports. En effet, le malade dont les prescriptions ne seront pas remboursées par la caisse d'assurance maladie se retournera bien évidemment contre son médecin et lui reprochera sa mauvaise prescription.

Mme Muguette Jacquaint. Les médecins devront prendre une assurance.

M. Jean-Marie Le Guen. En effet, et c'est sans doute l'assurance maladie qui paiera.

Ce dispositif, complètement vicieux, a été suggéré par des gens qui ont une conception de l'assurance maladie que nous avons toujours tous combattue, celle d'un organisme suspicieux envers tous les acteurs, médecins et usagers, et donneur de leçons. Nous étions tous d'accord en commission pour rejeter cette conception, ce qui nous a amenés à supprimer, il y a quelques instants, le dernier alinéa de l'article.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Jean-Marie Le Guen. Et voilà que, à présent, le Gouvernement veut contraindre la majorité à revenir en arrière. Sachez, mes chers collègues, que les professionnels de santé, auxquels vous semblez très attachés, seront informés par écrit, et personnellement, que vous vous êtes prononcés pour que l'assurance maladie surveille dorénavant leurs prescriptions et qu'ils doivent s'attendre à ce que l'assuré qui sera victime se retourne judiciairement contre eux.

M. Richard Mallié. Eh oui !

M. François Guillaume. C'est l'apocalypse !

M. Jean-Marie Le Guen. Avec ce vote, vous installez la judiciarisation des rapports entre les médecins et les patients, il faut que vous en preniez conscience. Pourtant, des études de l'assurance maladie montrent que les prescripteurs qui posent problème sont en réalité une minorité. Il serait facile d'agir sur ces personnes, non par la répression comme vous le faites, mais tout simplement par l'éducation.

M. Richard Mallié. Eh bien, il y aura une minorité qui ne sera pas contente.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Il fallait le faire.

M. Jean-Marie Le Guen. À la maîtrise médicalisée et à l'information,...

M. Richard Mallié. C'est de l'angélisme, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. ...vous préférez la répression systématique.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

Mme Marie-Jo Zimmermann. Vous aviez cinq ans pour agir.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous êtes dans une logique de maîtrise comptable, pire, de redressement de l'acte médical par l'assurance maladie. Vous faites de l'assurance maladie l'adversaire des médecins et des assurés. Bravo pour cette réforme sociale !

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. L'expression « liquidation médicalisée » ne me choque pas s'agissant de la liquidation d'un dossier de remboursement d'assurance, en l'occurrence d'assurance maladie. C'est le terme généralement employé dans ce cas.

Par ailleurs, cette réforme - et c'est ce qui nous encourage à la défendre ardemment - est axée sur la responsabilisation de chacun des acteurs, en définissant un équilibre entre droits et devoirs. Nous avions refusé la rédaction initiale de l'article car elle induisait une unilatéralité qui ne nous convenait pas. Mais l'amendement que propose aujourd'hui le Gouvernement corrige cet aspect, et donc nous le voterons.

Mme Muguette Jacquaint. Quelle pirouette !

M. Jean-Marie Le Guen. Et quelle girouette !

M. Philippe Vitel. Non, c'est du réalisme, du pragmatisme !

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Aujourd'hui, toute fraude constatée peut être poursuivie et donner lieu à condamnation.

M. Patrick Braouezec. En effet !

M. Gérard Bapt. La législation le permet, tout comme l'organisation de l'assurance maladie. De fait, un médecin vient d'être condamné à trois ans d'interdiction de soins par le Conseil de l'ordre pour avoir facturé 422 consultations fictives à partir de cartes Vitale. Les patients, bénéficiaires de la CMU, constatant qu'ils étaient censés avoir consulté à des moments où ce n'était pas le cas, ont signalé l'anomalie et la fraude a été sanctionnée. En aucun cas, les patients n'ont été condamnés à rembourser les visites qui avaient été facturées à leur insu. Ce faisant, la justice s'est exercée normalement, en poursuivant et condamnant le coupable, en l'occurrence le médecin - mais si cela avait été le patient qui avait fraudé, il aurait été condamné de la même façon.

Mme Janine Jambu. Ça, c'est une justice juste !

M. Édouard Landrain. Vous apportez de l'eau au moulin du Gouvernement !

M. Gérard Bapt. L'amendement du Gouvernement, s'il se situe un petit peu en retrait du projet initial, ne modifie pas réellement la logique de l'article 10.

Je ferai tout de même une proposition à M. le rapporteur de la commission. Sachant qu'entre 8 000 à 10 000 décès sont imputables chaque année à des problèmes d'ordre iatrogène - des erreurs de prescriptions ou des télescopages médicamenteux -, je propose de prévoir, par un sous-amendement, que lorsque l'assuré, victime de cette prescription indue, est décédé, il soit exonéré du remboursement. (Exclamations et rires.)

Mme Muguette Jacquaint. Ça, vous pouvez l'accepter !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Certains termes que je viens d'entendre m'amènent à réagir.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Ah oui !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. J'ai entendu parler de système « vicieux ». C'est plutôt le raisonnement qui a été utilisé qui l'est. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il faut savoir, à un moment donné, tirer des conclusions. L'opposition se déclare toujours d'accord sur le principe, mais jamais sur les modalités. Il faudrait qu'elle ait le courage de lire précisément ce qui est écrit dans l'amendement n° 8455 rectifié du Gouvernement : la caisse ou le service médical « apprécient les responsabilités respectives » - j'insiste sur ce mot - « de l'assuré ou du professionnel de santé dans l'inobservation des règles prévues au présent article ». Qu'elle cesse de dire que l'un est stigmatisé et l'autre oublié, ou le contraire suivant les moments !

M. Édouard Landrain. Bien sûr !

M. Jean-Marie Le Guen. Ben voyons !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. La vérité est simple : reconnaissez-vous, mesdames, messieurs, qu'il puisse exister des irrégularités, des abus ou des excès ? Nous, en tout cas, nous le disons.

M. Jean-Marie Le Guen. Il n'y a pas de responsabilité de l'assuré dans la prescription !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Et nous osons en tirer les conclusions. Nous voulons mettre un terme aux abus et aux excès mais en préservant le système. C'est l'objet de l'amendement n° 8455 rectifié. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 8455 rectifié .

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

.......................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

.......................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 49

              Nombre de suffrages exprimés 49

              Majorité absolue 25

        Pour l'adoption 37

        Contre 12

L'Assemblée nationale a adopté.

J'indique d'ores et déjà que, sur le vote de l'article 10, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je suis saisi de quatre amendements, nos 7489, 7490, 7491 et 7492, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. L'amendement n° 7489 propose de compléter l'article par un alinéa ainsi rédigé :

« Les caisses et le service médical pourront vérifier, au moment de la liquidation sur la base des informations que les assurés lui fournissent et sur les informations transmises par les professionnels dans le cadre des échanges informatisés entre ceux-ci et l'assurance maladie, que les référentiels médicalisés retenus sont respectés. »

Le succès de la politique de promotion des références médicales repose, entre autres, sur la capacité de l'assurance maladie à en contrôler le respect dès le remboursement.

L'amendement n° 7490 vise à compléter l'article 10 en prévoyant que le contrôle médical pourra, dans le respect du décret en Conseil d'État et pour les cas le justifiant, procéder à un examen du dossier médical.

L'amendement n° 7491 traite, lui, de l'Institut des données de santé. Le problème sera de savoir quel sera son rôle. Devra-t-il se borner à effectuer des relevés statistiques anonymes, les caisses continuant de disposer de services informatisés ? Nous pensons plutôt que, pour réaliser des économies de gestion, il devrait gérer l'informatisation du système. Le secret médical serait préservé, puisque les données transmises seront hiérarchisées.

Quant à l'amendement n° 7492, il vise à organiser le traitement des litiges : ceux qui surviendraient entre les praticiens et l'assurance maladie devraient être traités par une commission formée de professionnels de santé et de représentants de l'assurance maladie, à parité, tandis que les litiges avec les assurés seraient de la seule compétence de l'assurance maladie et des instances juridiques ad hoc en cas de contestation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements.

La création du dossier médical personnel a un seul objectif : améliorer la coordination et la qualité des soins. Or, il est à craindre que l'adoption de l'amendement n° 7490 ne compromette le succès de l'entreprise, car les assurés risquent de ne plus avoir confiance dans ce dossier. Il ne faut pas que celui-ci devienne un outil de « flicage ».

S'agissant de l'amendement n° 7491, la commission redoute qu'il n'entraîne une confusion entre les missions des différentes structures créées par ce projet. Il doit être clair que la mission de l'Institut des données de santé a trait, avant tout, à l'épidémiologie et consiste dans le recueil de données globales et anonymes, pour aider la Haute autorité de santé à élaborer ses recommandations.

Enfin, l'amendement n° 7492 a été rejeté par la commission, qui a trouvé sa dernière phrase inquiétante. En effet, il nous est apparu trop rigide de prévoir que « les litiges avec les assurés seront de la seule compétence de l'assurance maladie et des instances juridiques ad hoc en cas de contestation ».

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Le Gouvernement est également contre ces amendements. S'agissant de l'amendement n° 7489, le projet prévoit déjà un contrôle de l'application des recommandations de bonnes pratiques et des références professionnelles. Quant à l'amendement n° 7490, il ne nous semble pas opportun, et encore moins souhaitable, de laisser accéder au dossier médical personnel.

M. Jean-Marie Le Guen. Est-ce inopportun ou pas souhaitable ? C'est important !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Les deux ! Il est en effet essentiel de préserver le lien de confiance entre le patient et le médecin.

Pour ce qui concerne l'amendement n° 7491, si l'assurance maladie doit se doter d'outils efficaces pour la liquidation médicalisée, l'Institut des données de santé a vocation à favoriser le partage d'informations anonymes, à des fins statistiques.

Enfin, comme vient de le dire M. le rapporteur, les instances existantes ou prévues répondent aux préoccupations exprimées par l'amendement n° 7492.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7489.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7490.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7491.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7492.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'article 10, modifié par les amendements adoptés.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 55

              Nombre de suffrages exprimés 55

              Majorité absolue 28

        Pour l'adoption 40

        Contre 15

L'Assemblée nationale a adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance

    4

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures trente-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot