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Première séance du dimanche 11 juillet 2004

25e séance de la session extraordinaire 2003-2004


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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RAPPELS AU RÈGLEMENT

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour un rappel au règlement.

M. Hervé Mariton. Notre groupe souhaite exprimer son émotion et son indignation après l'agression d'une jeune mère de famille, avant-hier, dans le RER. Nous voulons témoigner notre sympathie à la victime et dire combien est forte notre volonté d'éradiquer de tels actes.

Il faut faire comprendre à nos concitoyens ce qui fait notre pays.

Il y a quelques semaines, un grand quotidien a engagé un débat sur ce qu'est « être français » aujourd'hui. Être français en 2004, et depuis longtemps, c'est partager la volonté de vivre ensemble. Cette volonté est abîmée par des actes aussi inqualifiables, contre lesquels nous devons tous nous mobiliser. Nous ne pouvons pas les laisser passer sans les condamner vigoureusement !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Le groupe socialiste s'associe à l'indignation exprimée par notre collègue de la majorité. L'acte qui a été perpétré est particulièrement ignoble, d'un symbolisme antisémite invraisemblablement violent, sans parler des conséquences psychologiques pour la victime. Le plus grave, c'est que les faits ont été commis par plusieurs personnes devant de nombreux témoins restés sans réaction.

Nous ne sommes pas en session ordinaire et nous ne pouvons pas demander au ministre de l'intérieur de venir nous informer des mesures qu'il entend prendre, mais j'ai entendu sa réaction. Nous ne pouvons que l'inciter à mettre en œuvre tous les moyens pour faire savoir, chez nous et dans le monde entier, que la France ne laissera pas au temps le soin de régler cette affaire. L'État doit montrer que nous ne céderons pas d'un pouce face aux actes antisémites.

J'exprime à la victime et à son bébé de treize mois notre compassion et l'assure que nous ferons tout ce que nous pourrons pour témoigner notre solidarité à elle-même et à sa famille, ainsi qu'aux personnes qui, aujourd'hui dans notre pays, se sentent visées. Mais la première visée, c'est la démocratie. Il faut combattre résolument les conceptions qui la remettent en cause.

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Le groupe des député-e-s communistes et républicains condamne cet acte d'une gravité particulière et exprime aussi sa sympathie aux victimes. Il faut condamner toutes les formes de racisme et toutes les violences qu'il engendre. Notre pays ne peut accepter que les trains de banlieue ou certains quartiers soient des lieux de non-droit. Il est temps de prendre les dispositions qui s'imposent, non seulement pour les problèmes liés à la sécurité au quotidien, mais aussi pour ceux qui, liés aux inégalités sociales, à l'apartheid social et spatial, engendrent des violences antisémites ou, plus généralement, racistes. Il faut une vraie politique de la ville et une vraie politique de sécurité.

M. le président. Mes chers collègues, l'indignation et la révolte que vous venez d'exprimer sont partagées par l'ensemble des députés. La France ne peut accepter passivement de tels agissements qui mettent à mal l'âme de notre pays et sa tradition. C'est la France qui est visée à travers ces actes ignobles. Puissions-nous tous nous retrouver dans la lutte contre le racisme, la xénophobie et l'antisémitisme, pour donner au monde une image de cohésion nationale face à ces actes odieux.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Je tiens à dire, au nom du Gouvernement, que la haine, l'antisémitisme, le racisme et la xénophobie sont certainement les pires dérives mortelles pour notre démocratie. Au moment où l'on parle tant du principe de précaution ou de sujets importants pour notre République, on oublie souvent la tolérance qu'il faut inculquer aux enfants de ce pays, quelque quartier qu'ils habitent, dès le plus jeune âge. Le communautarisme est le pire ennemi de la République.

Le Président de la République a récemment dénoncé la multiplication des actes antisémites dans un discours qui, au-delà des clivages, a été remarqué par tous. Toutes les familles de ce pays devraient y réfléchir, car il n'est pas possible d'accepter une dérive mortelle comme celle-là.

    2

ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l'Assemblée nationale a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 8400, portant article additionnel avant l'article 17.

Avant l'article 17

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour soutenir l'amendement n° 8400.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous abordons la politique du médicament. En la matière, nous nous appliquerons à satisfaire avec précision la curiosité du Gouvernement qui s'est plaint, à plusieurs reprises, de ne pas entendre les propositions de l'opposition. Ce n'est pourtant pas faute d'avoir expliqué notre position sur l'organisation du système de soins de premier recours, notamment pour la mise en place de réseaux ; émis des suggestions importantes, d'ailleurs retenues par l'Assemblée nationale, sur l'accessibilité à un médecin sur l'ensemble du territoire ; avancé plusieurs propositions sur la qualité des soins, la formation et l'évaluation, que nous pensons être de la responsabilité de l'État tandis que le Gouvernement les renvoie à une convention. Nous allons maintenant, à travers nos amendements, proposer une politique globale soutenue par des mesures particulières.

Sur ce sujet, les articles du texte de loi n'auront guère pour effet que celui de faire joli, car ils ne modifient pas de façon substantielle la politique du médicament. Le Gouvernement évoque la question mais ne la traite pas. En revanche, il propose un plan de financement, dont il nous dit espérer une économie de plusieurs milliards d'euros en termes de consommation, pour justifier l'équilibre financier de sa réforme. Si vous ne bougez pas, il y a fort à parier que l'industrie pharmaceutique, elle, le fera, ce qui aura des effets sur la consommation. Par exemple, vous allez bénéficier, sans y être pour grand-chose, du fait que certaines molécules essentielles vont sortir du domaine des princeps pour devenir génériques, ce qui entraînerait une diminution du coût global du médicament. Cela relève plus du laisser-faire que de la politique.

Notre pays se doit d'avoir une politique de rectification de sa consommation de médicaments. La France, avec 520 dollars de dépenses par habitant - ce sont les statistiques de l'OCDE qui prennent cette unité monétaire -, est le second pays consommateur au monde après les États-unis, dépassant de 20 % l'Allemagne qui vient juste après. Peut-on expliquer, et surtout accepter, une telle situation ? Est-ce un indice de bon fonctionnement de la santé dans notre pays ou de l'industrie ? Certainement pas ! L'importance de ce coût n'a rien de satisfaisant. Il traduit essentiellement une surconsommation de médicaments par les Français, un laisser-aller et de mauvaises habitudes, que différents gouvernements ont, certes, tenté de contrecarrer, mais de façon insuffisante.

Nous avons donc besoin de mettre en œuvre une politique qui nous ramène au niveau européen moyen. C'est ce que nous allons proposer, en présentant des mesures qui n'ont rien de bouleversant. Il s'agit simplement de nous aligner sur les pays européens les plus proches de nous. Pour cela, il faut prendre des décisions qui rompent avec les mauvaises habitudes.

Notre première proposition porte sur les génériques.

Notre pays est celui où ces médicaments coûtent le plus cher parce que, à une époque, nous pensions que toute la chaîne commerciale devait être intéressée à leur diffusion. C'est pourquoi il était entendu que leur prix ne pourrait pas être inférieur de plus de 30 % à celui des produits de marque. Cet argument ne vaut plus aujourd'hui et nous pourrions, sans dommage pour les marges des industriels, porter ce taux à 70 %.

Nous sommes dans une économie réglementée où les prix sont déposés. Nous demandons donc au Gouvernement d'intervenir pour faire baisser les prix des génériques et alimenter, en quelque sorte, la pompe de la consommation du générique, de manière à freiner le coût global du médicament.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour donner l'avis de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'assurance maladie.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. Cet amendement est contraire à l'esprit du projet de loi qui est, à la fois, d'élargir les compétences du CEPS et de modifier sa composition pour donner plus d'importance à l'assurance maladie au sein de celui-ci. La rédaction de l'amendement est, de ce point de vue, trop normative. C'est pourquoi la commission l'a repoussé.

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 8400.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Rejet de l'amendement.

Monsieur Le Guen, nous présentons un plan global.

Nous avons ainsi travaillé durant plusieurs jours sur la maîtrise médicalisée - dossier médical personnel, évaluation des pratiques, médecin traitant - et les dispositions qui ont été adoptées devraient permettre un début de changement du comportement de certains médecins. En l'occurrence, nous avons agi sur les volumes.

Il faut ensuite que notre action porte sur les prix. Depuis le plan Juppé de 1996, il est possible, dans notre pays, de fabriquer des médicaments génériques. Les États-Unis, la Grande Bretagne et l'Allemagne s'y étaient mis dès les années soixante-dix et si, en France, remboursés ou non, les génériques représentent 11 % des médicaments, ce taux, dans ces pays, s'étale entre 40 et 50 %. Une culture du générique s'est instaurée, que nous devons développer. Le fait que le pharmacien d'officine gagne plus en vendant ce type de médicament y contribue.

Au fur et à mesure que le marché des génériques augmentera, nous pourrons, monsieur Le Guen, jouer sur les prix. C'est ce que nous faisons. Nous allons très prochainement nous organiser avec l'industrie pharmaceutique, qui a parfaitement compris l'enjeu, non seulement pour aboutir à une baisse des prix des génériques, mais également afin qu'elle puisse disposer d'une lisibilité industrielle sur dix ans, ce qui manque actuellement.

Parallèlement, nous envisageons de faire baisser les prix des médicaments anciens et d'accroître ceux des médicaments nouveaux, les industries qui les produisent consacrant entre 15 et 30 % de leur chiffre d'affaire à la recherche. Si l'on veut garder des industries pharmaceutiques de haut niveau dans notre pays, il faut savoir payer l'innovation.

M. le président. La parole est à M. Simon Renucci.

M. Simon Renucci. Pour lutter contre la surconsommation de médicaments, unanimement dénoncée, il faut intervenir à trois niveaux : améliorer l'organisation de la sécurité sociale, associer davantage les praticiens, informer les consommateurs.

Nous devons donc d'abord améliorer l'organisation nationale de la sécurité sociale. Dans tous les domaines qui pèsent lourdement sur les finances de l'assurance maladie, il est indispensable de demander à l'ANAES d'établir des protocoles d'accord de soins qui soient reconnus de façon unanime et définitive et qui puissent être mis en œuvre rapidement. Il convient également de donner à l'agence plus de poids et de puissance de réaction à la fois dans son organisation et la mise en œuvre de ces protocoles.

Deuxièmement, il importe que les principaux acteurs de la prescription de médicaments, à savoir les médecins, soient associés à l'organisation régionale de la sécurité sociale. Or leur participation n'est pas prévue. Leurs représentants, démocratiquement élus, doivent pouvoir s'exprimer. Leur action au sein des unions régionales a montré qu'ils étaient des gens sérieux : ils se sont déjà battus pour fournir des évaluations et des informations aux praticiens et participent à l'information du public et à la prévention. C'est un échelon avec lequel il faudra compter et auquel il conviendra de donner plus de poids.

Les protocoles définis à l'échelon national devront être, après concertation, validés à l'échelon régional.

Le troisième pôle d'action est consitué par les consommateurs. Il n'est pas normal que les plus gros consommateurs de médicaments, parmi lesquels on trouve les personnes âgées qui ne savent pas toujours ce qu'elles prennent, ne soient pas informés des effets de ceux-ci et que ces derniers ne fassent pas l'objet d'une évaluation. Il est important que soit fournie, pour chaque pathologie lourde, qui grève les finances de la sécurité sociale, une véritable information sur l'efficacité des médicaments.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour quelques mots.

M. Jean-Marie Le Guen. Bien que nous essayions par tous les moyens, même en dehors de l'Assemblée nationale, de faire connaître nos propositions à M. le ministre, celui-ci continue à expliquer que l'opposition n'en a pas. Cela nous oblige à défendre nos positions plus au fond, monsieur le président.

La politique du médicament représente à peu près 20 % des dépenses de l'assurance maladie, soit 3 milliards d'euros. C'est dire la variable d'ajustement qu'elle représente. Or le projet de loi ne prévoit rien à cet égard. En effet la mise en œuvre de la maîtrise médicalisée est renvoyée pour l'essentiel à une convention qui sera prise ultérieurement et sur laquelle le Gouvernement n'a pas de politique d'application.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Comme si vous en aviez une avant !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il n'est jamais trop tard pour bien faire !

M. Jean-Marie Le Guen. Par ailleurs, le Gouvernement se désengage de la responsabilité de l'élaboration d'une politique du médicament en en renvoyant la mise en œuvre au CEPS.

À ce propos, je veux saluer la mémoire de M. Marmot, haut fonctionnaire décédé il y a quelques jours et qui a beaucoup œuvré pour le développement des médicaments génériques.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est exact !

M. Jean-Marie Le Guen. Faut-il prendre pour argent comptant le discours, qui me semble assez naïf et nécessiter pour le moins une évaluation, que M. le ministre nous tient en matière d'industrie du médicament ? Sommes-nous dans une période d'innovation fondamentale sur le plan pharmaceutique ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Oui.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas ce que disent les sociétés scientifiques.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Nous vous le prouverons.

M. Jean-Marie Le Guen. Devons-nous accepter les pressions d'une industrie pharmaceutique essentiellement américaine qui tend à augmenter les prix pour des raisons de rentabilité aux États-Unis sans lien aucun avec des avancées scientifiques ? Nous apprenons ainsi tous les jours que des produits présents depuis cinq ou dix ans sur notre marché ne sont pas aussi efficaces que prévu - je ne citerai pas de noms ; je ne suis pas là pour faire de l'anti-publicité - et même que leurs effets secondaires ont été sous-estimés.

Je rappelle, de plus, que si notre gouvernement boit naïvement les bonnes paroles dont l'abreuve l'industrie pharmaceutique américaine, le procureur de New York a lancé plusieurs procédures à l'encontre de cette dernière parce qu'elle refuse de donner l'ensemble des informations à sa disposition sur les effets réels de ses derniers produits. Nous y reviendrons plus en détail ultérieurement.

J'ajoute que l'industrie pharmaceutique n'est pas, pour l'essentiel, l'industrie des génériques.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ah ?

M. Jean-Marie Le Guen. À moins, monsieur le ministre, que vous ne réserviez le générique aux filiales des entreprises pharmaceutiques existant sur le marché français ! Il y a tout de même quelques personnes, ici et en dehors de cet hémicycle, qui connaissent l'industrie du générique, et j'affirme que l'essentiel du marché mondial du générique n'appartient pas aux laboratoires pharmaceutiques.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Sous-entendez-vous que le Gouvernement ne connaît pas cette industrie ?

M. Jean-Marie Le Guen. Je pense que vous n'en connaissez qu'une partie et que votre vision est quelque peu orientée.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Nous n'aurions donc pas de génériqueurs en France ?

M. Jean-Marie Le Guen. Si, ...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Quand même !

M. Jean-Marie Le Guen. ...mais ils ne représentent qu'une petite partie des génériqueurs sur le plan mondial.

Vous ne pouvez élaborer une politique en ne prenant en compte que les intérêts d'une ou deux entreprises, fussent-elles françaises.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'espère que non !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est pourtant ce que vous avez l'air de faire ! Je comprends que, dans ces conditions, vous ayez des difficultés pour faire baisser les prix des médicaments génériques.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Moi, je le fais, à l'inverse de vous !

M. Jean-Marie Le Guen. Vous ne faites rien du tout ! Ne soyez pas agressifs ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Accoyer. Provocateur !

M. Jean-Marie Le Guen. J'apprécie ce dialogue direct avec M. le ministre, monsieur le président, mais cela peut durer un certain temps. Nous pourrons continuer cette conversation, monsieur le ministre, quand vous voudrez et où vous voudrez.

M. Bernard Accoyer. Cette attitude est scandaleuse !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Quand vous voudrez, monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Je disais donc que les prix des médicaments génériques devaient évoluer à la baisse. Toutefois celle-ci ne peut résulter d'une simple discussion avec le syndicat français de l'industrie pharmaceutique. C'est pourtant ainsi qu'est bâtie toute votre politique. Vous le reconnaissez d'ailleurs vous-même. N'avez-vous pas dit que la charte de l'industrie du médicament découlait d'une discussion avec les industriels de ce secteur ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ah ! Ah !

M. Bernard Accoyer. Quelle logorrhée stérile !

M. Jean-Marie Le Guen. Prenez d'autres initiatives que celles qui vous sont dictées par une organisation professionnelle, si remarquable et sympathique soit-elle. Cela ne permet pas de conduire la politique d'un pays. Il faut avoir une ouverture d'esprit plus large. Vous ne pouvez construire la politique de la santé de France sous la dictée de l'industrie pharmaceutique.

M. le président. Merci, monsieur Le Guen !

M. Bernard Accoyer. Cela fait trois fois que vous répétez la même chose !

M. Jean-Marie Le Guen. Quand je parle du médicament, il est exact, monsieur Accoyer, que j'emploie à plusieurs reprises les mots : « industrie pharmaceutique ». J'aimerais employer encore plus souvent le mot « générique » mais, compte tenu de sa caractéristique, je ne l'utilise, évidemment, que de manière générique ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez. Existe-t-il un générique contre la logorrhée ?

M. le président. De manière générique, chaque orateur n'a droit qu'à cinq minutes.

M. Jean-Marie Le Guen. Mon intervention, monsieur le président, a été hachée. Je n'ai pu parler que par petites posologies.

M. le président. J'ai calculé les arrêts de jeu, monsieur Le Guen.

M. Alain Vidalies. M. Le Guen a parlé homéopathiquement !

M. le président. Soyez, comme M. Renucci, respectueux de la présidence.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne peux l'être plus, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous allons évoquer les questions liées à la politique du médicament à l'article 17. Nous savons, depuis le début de la discussion, que le groupe socialiste anticipe à chaque fois les discussions ...

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Pour pouvoir les recommencer !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...ce qui rend le débat redondant. Ce n'est pas une manière correcte de procéder.

M. Le Guen donne le sentiment de découvrir l'industrie du médicament. Dois-je lui rappeler que ses amis ont été au pouvoir entre 1997 et 2002 ? Ils avaient alors toute possibilité de développer une véritable politique du médicament. Or ils ne l'ont pas fait ! Ils n'ont pas su davantage développer les médicaments génériques que rassurer l'industrie pharmaceutique quant aux possibilités d'innovations.

Nous aurons l'occasion, lors de l'examen de l'article 17, d'évoquer toutes ces questions. Vous n'avez pas le monopole des propositions, d'autant que vous n'en avez jamais mises en oeuvre. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Vous non plus !

M. Alain Vidalies. Quelle agressivité !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous parlerons du médicament, mais à l'article 17.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8400.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quinze amendements identiques nos 6609 à 6623 présentés par des membres du groupe socialiste.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Notre amendement vise à insérer un article additionnel « générique », au sens propre, avant l'article 17. Il a vocation à définir un cadre dans lequel nous souhaiterions que le Gouvernement conduise la politique du médicament.

Je vous ai fait part, précédemment, de nos interrogations fortes sur le fait que le patient français - il s'agit presque d'un consommateur -, dépensait pour sa santé 20 % de plus que l'Allemand, 50 % de plus que l'Espagnol et 70 % de plus que le Hollandais, sans que, pour autant, le niveau de soins de nos voisins européens soit différent.

Nous avons, les uns et les autres, laissé filer une situation que nous contrôlons mal et qui est liée au problème de la formation médicale continue. Nous en avons déjà parlé, mais vous avez refusé d'avancer en la matière. Elle touche aussi à l'évaluation mais vous avez renvoyé cette dernière à la convention, sans prévoir les moyens d'une action de l'État. Elle touche enfin à l'information concernant le médicament, qui sera traitée dans différents articles.

Il existe une pression commerciale très forte. L'investissement commercial de l'industrie pharmaceutique en France serait de 23 000 euros par an et par médecin ; tel est le chiffre avancé par M. le rapporteur. Il faut faire évoluer tout cela.

Sommes-nous dans une période de l'histoire de la science et de l'industrie où nous connaîtrions une révolution dans le domaine du médicament ? Me réfèrant aux académies scientifiques je peux répondre par la négative. Il ne nous appartient pas d'en analyser ici les raisons, mais force est de constater que nous nous situons sur un plateau en matière de recherche pharmaceutique. Nous attendons des biotechnologies une nouvelle révolution scientifique mais nous ne verrons pas, dans l'approche du médicament, de révolution majeure avant cinq ou dix ans.

Nous sommes confrontés à une industrie mondialisée, globalisée. Nous connaissons l'intérêt que le gouvernement français a porté à la fusion entre Sanofi et Synthélabo.

M. Jean-Pierre Door. Entre Sanofi-Synthélabo et Aventis !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est ce que je voulais dire ! Vous êtes effectivement mieux placé que moi pour réciter les noms des valeurs cotées au CAC 40. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. C'était facile !

M. Jean-Marie Le Guen. Que voulez-vous, quand on me tend une perche, je la saisis !

M. le président. Monsieur Le Guen, ne vous laissez pas aller à la facilité !

M. Alain Vidalies. Le dimanche, c'est autorisé !

M. Jean-Marie Le Guen. Cela va surtout bientôt être l'heure de la messe. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Accoyer. Quel mépris ! Il faut respecter tout le monde !

M. le président. Monsieur Accoyer, je vous en prie !

M. Bernard Accoyer. Il est scandaleux de se moquer des convictions religieuses de nos compatriotes.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Revenons-en à la conférence nationale !

M. Jean-Marie Le Guen. M. le président Accoyer vient, en effet, de rappeler une tradition importante dans notre pays. J'imagine donc qu'il va, comme notre groupe, demander, une suspension de séance pour que chacun soit libre d'accomplir ses activités dominicales.

M. Hervé Mariton. Il y a des messes très tôt le matin !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est sans doute ce que vous vouliez dire, monsieur Accoyer. Nous souscrivons à votre demande.

M. Hervé Mariton. Au fait !

M. Jean-Marie Le Guen. Il avait été dit que nous ne travaillerions pas le dimanche.

M. Hervé Mariton. Au fait !

M. Jean-Marie Le Guen. Cela fait six ans que nous n'avons pas siégé un dimanche, en session extraordinaire de surcroît ! À cet égard, monsieur le président, vous disposez de toutes les statistiques. Pourriez-vous nous dire depuis combien d'années nous n'avons pas travaillé un dimanche lors d'une session extraordinaire ?

M. Hervé Morin. Depuis 1998 !

M. Jean-Marie Le Guen. Non ! En 1998, il s'agissait du pacs. Nous y reviendrons tout à l'heure. Vous étiez alors, messieurs, contre le travail le dimanche.

M. Hervé Mariton. C'est la revalorisation du travail !

M. Jean-Pierre Door. Il faut remettre la France au travail !

M. le président. Mes chers collègues, évitons les interpellations et revenons-en aux amendements.

Poursuivez votre propos, monsieur le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je suis interpellé sans cesse monsieur le président ! Des collègues m'interrompent à tout propos. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Ces interpellations continuelles font perdre un temps considérable.

M. Jean-Marie Le Guen. Après le CAC 40, on va passer à Wall Street.

L'essentiel des boîtes pharmaceutiques, pour employer ce terme générique, ...

M. Hervé Mariton. Vous pourriez parler français !

M. Jean-Marie Le Guen. Je voulais dire : « entreprises ». Évidemment, monsieur Mariton, cela vous choque. Sans doute faut-il faire montre de plus de déférence quand on parle des entreprises du CAC 40. Je saurai, la prochaine fois que l'on ne parle pas de « boîtes » mais d'entreprises.

Les entreprises pharmaceutiques mondiales, notamment anglo-saxonnes, affichent des exigences colossales en termes de taux de rentabilité, alors même qu'elles n'ont pas produit de révolutions scientifiques. Leurs produits, les fameux bluckbusters, dont M. Mariton parle avec aisance, ne sont pas suffisamment nombreux pour que ces entreprises puissent justifier de taux de rentabilité du capital compris entre 15 et 16 %, ce qui correspond à l'exigence des fonds de pension sur l'industrie pharmaceutique.

Qui paye ? Comment l'industrie européenne, singulièrement l'industrie française, peut-elle atteindre 15 ou 16 % de rentabilité du capital sans gains de productivité, sans nouveaux produits ? On nous assène continuellement qu'il faut payer l'innovation. Mais de quelle innovation s'agit-il ? Où est l'innovation générale, où sont les innovations particulières ? Que peut-on dire aujourd'hui sur ces fameux COX, ces produits qui devaient apparaître comme révolutionnaires, notamment dans le traitement des ulcères ?

M. le président. Merci, Monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. J'y reviendrai.

M. le président. Nous y reviendrons tous !

En attendant je vous indique d'ores et déjà que, sur le vote des amendements identiques nos 6609 à 6623, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Philippe Tourtelier.

M. Philippe Tourtelier. Ces amendements posent le problème de façon générale et permettent d'établir le lien avec d'autres amendements. L'un d'entre eux proposait ainsi que le médecin prescrive le médicament sous le nom de la molécule. Cet amendement a été refusé par la commission sous prétexte qu'une telle disposition ferait peser trop de charges sur le médecin. La commission a une bien piètre opinion des médecins si elle pense qu'ils ne connaissent pas le nom des molécules - et le patient que je suis ne pourrait dans ce cas qu'être inquiet -, à moins qu'elle n'ait retenu le point de vue de l'industrie pharmaceutique.

On a rappelé que celle-ci n'avait plus de réelle capacité d'innovation et qu'elle était en phase de rendement décroissant au niveau du capital. L'une des solutions est celle que vous proposez. L'autre se cache derrière votre refus de prescription du médicament sous son nom scientifique.

L'industrie pharmaceutique souhaite voir se développer l'auto-médication, accessible uniquement à ceux qui en ont les moyens financiers. Lorsqu'on se situe dans ce concept, on raisonne en termes non plus de santé, mais de marques. Vous vous situez dans le cadre du marché : Mme Fraysse comparait hier le médicament à des chaussures. Or, quand vous achetez Nike ou Adidas, vous payez 30 ou 40 % de plus.

Refuser d'inciter les médecins à prescrire les médicaments sous leur nom scientifique, comme refuser de réfléchir à l'étiquetage des médicaments, c'est préférer clairement les objectifs du marché à ceux de la santé.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Ces amendements ont pour but d'obtenir du Gouvernement la réunion, à intervalles réguliers, d'une conférence nationale sur la politique du médicament, afin de parvenir à diminuer de 20 % la consommation de médicaments.

Les chiffres cités dans le rapport et ceux du haut conseil comme ceux issus des rapports internes de l'assurance maladie, sont impressionnants. Chaque médecin généraliste prescrit, en moyenne, pour 260 000 euros de médicaments par an. Le rapport entre la prescription de médicaments et les honoraires est désormais de 2,4 contre 2 en 1991. Comment obtenir une amélioration de ce ratio alors que l'on constate une croissance quasi exponentielle ? Le nombre d'actes des médecins ne peut justifier ce chiffre, car il y a un décrochage entre l'évolution du nombre des actes et celle des dépenses de médicaments. La comparaison figurant dans le rapport du haut conseil traduit une différence entre l'évolution des dépenses liées au nombre des actes et celle des dépenses dues aux prescriptions médicamenteuses.

M. le président. Je vous prie de conclure.

M. Alain Vidalies. Je parle depuis moins de cinq minutes !

M. le président. Presque !

M. Jean-Marie Le Guen. On va acheter un minuteur, monsieur le président !

M. le président. Monsieur Vidalies, même si je mesure bien le temps écoulé en vous écoutant, j'ai fait vérifier par les services. Vous avez parlé quatre minutes et trente secondes. Je désirais vous prévenir qu'il ne vous restait que trente secondes. Concluez donc votre propos. (Sourires.)

M. Alain Vidalies. Je suis en déficit par rapport à M. Le Guen.

M. le président. C'est votre appréciation !

M. Alain Vidalies. En quoi nos amendements pourraient-ils remédier à cette situation ?

Il semble que nous n'ayons pas suffisamment d'éléments pour maîtriser le dossier. Ainsi la question posée par M. Dubernard aux responsables du médicament dans le cadre de la commission que vous avez vous-même présidée, monsieur le président, était révélatrice : « Nous autres, députés, avons beaucoup de difficultés à appréhender les dépenses de médicaments et leur répartition. On évoque, ici ou là, des chiffres étonnants, et nous souhaitons en savoir plus. Comment pouvez-vous, à votre place, contribuer à la maîtrise des dépenses de santé ? » Vous avouiez ainsi devant eux que le sujet vous échappe complètement. La réponse des professionnels fut tout aussi étonnante ; j'y reviendrai.

Nos amendements ont pour objectif de vous aider à mettre en place un mécanisme qui vous permette de connaître les raisons pour lesquelles les Français sont les champions du monde de la consommation de médicaments et de parvenir à une meilleure maîtrise de la politique de santé.

M. le président. La parole est à M. Simon Renucci.

M. Simon Renucci. Donner à chaque citoyen un accès égal à un traitement adapté et innovant, permettre le développement et la diffusion rapide des innovations tout en mettant en place un dispositif d'évaluation de l'apport thérapeutique, établir les conditions d'une sécurisation optimale du circuit du médicament : ces quelques principes fondamentaux, me dira-t-on, n'ont peut-être pas de rapport direct avec nos amendements, mais ils n'en doivent pas moins être respectés.

Il est également important de rappeler le caractère complexe de la régulation, qui, de fait, favorise les stratégies commerciales des industriels. Il apparaît dès lors indispensable d'impliquer tous les intervenants : les institutionnels, certes, mais surtout les acteurs eux-mêmes en incitant notamment à une approche professionnelle.

Or les médecins sont, pour la plupart, peu sensibilisés à la dimension médico-économique de la prescription et peu investis dans les systèmes de régulation d'où l'idée d'une étude au niveau régional ciblée sur un nombre déterminé d'affections, chroniques ou aiguës, mais, en tout état de cause, coûteuses, afin de disposer de référentiels précis susceptibles d'aider à la prévention - domaine dans lequel nous manquons d'indications - et de mieux faire connaître des prescripteurs les effets des médicaments concernés sur les personnes âgées, population connue pour sa propension à la surconsommation, non exempte d'effets iatrogènes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. Le sens de ces amendements est clair, mais l'ampleur du problème mérite que l'on s'y attarde quelque peu.

Chaque généraliste - l'un de mes collègues l'a rappelé - prescrit 260 000 euros de médicaments par an, soit un total de 16 milliards chaque année si l'on y inclut les médicaments prescrits par les médecins hospitaliers et délivrés par les pharmacies de ville. Le volume des prescriptions médicamenteuses dans notre pays est un phénomène tout à la fois massif et ancien.

Il est plus que temps de s'interroger sur le bien-fondé d'un niveau aussi élevé. Nous consommons trois fois plus d'antibiotiques que nos voisins allemands, deux fois plus de statines, ces médicaments anticholestérol, que nos voisins anglais, mais sommes-nous mieux soignés pour autant ? Que l'on soit spécialiste ou non, la question mérite d'être posée compte tenu de l'enjeu qu'elle représente.

On compte en moyenne quatre médicaments par ordonnance. Or, de l'avis même des spécialistes, les risques d'interaction médicamenteuse deviennent très importants à partir de trois spécialités.

De plus on dénombre 130 000 hospitalisations pour des accidents iatrogènes dus à des médicaments incompatibles et je ne parle pas des prescriptions de psychotropes. Il faudrait d'ailleurs s'interroger sur la surconsommation de ces produits en France par comparaison à d'autres pays.

M. Bernard Accoyer. Çà, après vingt ans de socialisme ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Le Guen. Cela mérite un rappel au règlement, monsieur le président ! Le président du groupe UMP ne sait visiblement pas se tenir !

M. Alain Vidalies. Absolument !

M. le président. Laissez M. Viollet s'exprimer.

M. Jean-Claude Viollet. Il faut impérativement revenir à un bon usage des médicaments en donnant la priorité à une politique de santé publique programmée sur le long terme et tournée vers la qualité.

On a parlé du développement des médicaments génériques, à la ville comme à l'hôpital ; cela fait effectivement partie des enjeux auxquels nous devons répondre. La mise en place de logiciels adaptés pourrait aider à la prescription de ces molécules.

Il est d'autres éléments déterminants comme la baisse des prix - je n'y reviens pas -, ou encore le développement d'une information et d'une formation médicale indépendantes. Chacun sait en effet que l'information et la formation de notre corps médical, plus généralement de nos professions de santé, restent très largement aux mains de ceux-là mêmes qui nourrissent la prescription et favorisent la surconsommation de médicaments.

Oui, un immense chantier se présente à nous. Oui, une plus grande transparence s'impose. J'ai cru deviner que l'industrie pharmaceutique et les entreprises du médicament n'y étaient pas très favorables, sans doute parce que c'est précisément là que réside une partie de la solution.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle, pour votre bonne information, les termes du paragraphe 6 de l'article 58 de notre règlement :

« Toute attaque personnelle, toute interpellation de député à député, toute manifestation ou interruption troublant l'ordre sont interdites. »

À bon entendeur, salut !

M. Jean-Marie Le Guen. Merci, monsieur le président !

M. le président. Cela s'adresse aussi bien à vous qu'à d'autres, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous, nous n'interpellons jamais nos collègues. Nous avons déjà fort à faire avec le Gouvernement !

M. le président. Je m'adresse à tout le monde.

La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Monsieur le ministre, les médicaments représentent 20 % des dépenses de l'assurance maladie. Un tel constat appelle une véritable politique de lutte contre la surconsommation médicamenteuse. Votre prédécesseur, M. Mattei, avait lancé l'hiver dernier, une campagne d'information sur le bon usage des médicaments, plus précisément pour les antibiotiques. Cela a marché. Pourquoi ne pas l'étendre à d'autres prescriptions ?

Comment se fait-il que le niveau des dépenses pharmaceutiques en France soit si élevé par rapport aux autres pays ? Vous-même n'avez pas hésité à citer l'exemple de l'Allemagne à propos des indemnités journalières. Pourquoi ne pas en faire autant pour la dépense pharmaceutique et fixer l'objectif de la ramener au niveau allemand ? Cela reviendrait à la diminuer d'un cinquième.

M. Jean-Marie Le Guen. Très juste !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Malheureusement, je n'ai pas trouvé trace d'une telle volonté dans votre article 17, mais peut-être ai-je mal lu ou mal compris : ne m'avez-vous pas fait remarquer hier que je n'étais pas médecin et que, de ce fait, je n'y comprenais pas grand-chose ? Effectivement, je ne le suis pas, mais il n'y a pas besoin d'avoir 577 députés médecins dans cette assemblée pour voter des lois. Je ne suis qu'une simple assurée sociale, monsieur le ministre, et, à ce titre, je suis en droit d'intervenir et de vous dire que votre texte me semble vraiment manquer de souffle et d'ambition. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Vidalies. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur le président, je tiens au préalable à dire combien j'ai été choqué par les propos scandaleux, méprisants, moqueurs, railleurs, à l'égard de ceux d'entre nous - et, au-delà, de tous les Français - qui ont une religion et une foi. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pierre-Louis Fagniez. Parfaitement ! Il a raison !

M. Jean-Marie Le Guen. Et ça continue ! Croyez-vous que nous n'en n'ayons pas ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'était donc de l'auto-raillerie !

M. Jean-Marie Le Guen. Cela commence à bien faire ! C'est décidé, je demande une suspension de séance ! C'est une véritable provocation !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Qui a provoqué ?

M. Alain Vidalies. De quel droit nous parlez-vous sur ce ton ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je parle sur le ton que je veux, et ce n'est pas vos vociférations qui m'impressionneront ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Vidalies. Ce n'est pas tolérable !

M. Jean-Marie Le Guen. Voyez où vous en êtes, monsieur Dubernard ! Répondez plutôt à nos questions ! Décidément, vous devez vous reposer !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Hurlez tant que vous voulez, monsieur Le Guen, vous ne me faites pas peur ! Chacun ici connaît les relations historiques que vous entretenez avec l'industrie pharmaceutique ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. C'est inadmissible !

M. le président. Puisque vous n'arrivez pas à vous calmer, je vais suspendre la séance !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je voudrais rappeler...

M. le président. Non, je suspends la séance !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures vingt-cinq, est reprise à dix heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Veuillez reprendre, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je conclus mon propos : la commission a repoussé les amendements identiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le Gouvernement fait de même.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Que nos collègues de la majorité ne s'expriment pas, c'est dans l'ordre des choses : cela fait partie de leur tradition de « parti godillot ». Du RPR, cette culture est passée à l'UMP ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

En revanche, je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement ne réagit pas à nos propositions.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Si vous en aviez, cela se saurait !

M. Jean-Marie Le Guen. Le Gouvernement pourrait utilement nous rappeler tout ce qu'il a fait depuis deux ans ou depuis quelques semaines.

Il pourrait nous expliquer pourquoi, malgré sa politique prétendument dynamique, le coût du médicament continue de croître dans des proportions importantes, alors que de plus en plus de molécules sont tombées dans le domaine public. Il pourrait nous dire aussi pourquoi la politique qui a été mise en oeuvre au mois de juin 2002 n'a pas porté ses fruits. Deux ans et demi après, on nous ressort exactement le même discours énergique sur les génériques. Pourquoi réussiriez-vous aujourd'hui, là où M. Mattei a échoué ? Que le Gouvernement nous explique les raisons de cet échec !

Nous aimerions par exemple, monsieur le ministre, que vous nous expliquiez pourquoi vous avez mis en place les TFR, les tarifs forfaitaires de responsabilité, que vous vous proposez d'ailleurs de reconduire, et pourquoi la différence de prix entre ces TFR et les produits princeps sera demain acquittée par les complémentaires.

Vous avez déjà mis fin, par les articles 4 et 5, aux tarifs opposables, pour les visites et les consultations, allez-vous faire de même avec les médicaments ? Si vous répondiez par l'affirmative je reconnaîtrais la cohérence de votre position, mais il n'y aurait bientôt plus rien à voir entre le prix payé par l'usager du système de santé et le montant remboursé par la sécurité sociale.

M. François Liberti. Très juste !

M. Jean-Marie Le Guen. Nous attendons donc que vous justifiiez votre propre politique, à défaut de donner votre sentiment sur la nôtre.

Quoi qu'il en soit, nous continuerons, amendement après amendement, à défendre nos propositions afin que les Français sachent qu'il existe une politique alternative à la vôtre,...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Tu parles !

M. Jean-Marie Le Guen. ...une politique plus respectueuse des finances publiques et de la santé publique. Le médicament, ce n'est pas forcément une histoire de gros sous. C'est avant tout une question de santé publique, de qualité des soins.

Ma collègue Chantal Robin-Rodrigo et mon collègue Jean-Claude Viollet se sont interrogés sur les prescriptions abusives, notamment de psychotropes, dont les effets peuvent être extrêmement pervers. Ils provoquent des moments de grand calme suivis de moments d'excitation. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les effets pervers qu'ils induisent sur nombre de nos concitoyens entraînent des attitudes paradoxales, qui amènent des rappels à l'ordre, y compris dans notre assemblée ! (Sourires .)

M. Jean-Luc Warsmann. Vous êtes un spécialiste.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. En 2002, monsieur Le Guen, la part de marché des génériques n'était que de 2 %.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Voilà le résultat de cinq ans de politique socialiste !

M. Jean-Marie Le Guen. En volume, en valeur ou en prescriptions ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. En volume, monsieur Le Guen.

Aujourd'hui, cette part s'élève à 11 %. Puisque vous me demandiez ce qui a été fait en deux ans en faveur des génériques, vous voilà renseigné ! C'est cela la politique du générique.

M. Jean-Marie Le Guen. Cela a commencé grâce au Gouvernement que nous soutenions.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le procès-verbal faisant foi, on verra qui a raison ou tort !

Puisque vous souhaitiez un exemple d'innovation je vous cite le Glivec.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est le seul !

M. Hervé Morin. C'est quoi le Glivec ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il n'y a pas que des médecins ici ! On dirait que les autres ne comptent pas !

M. le président. On peut en prendre ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'espère qu'il ne vous en sera jamais prescrit ! Le Glivec est en effet une molécule issue des recherches en biotechnologie et en nanotechnologie.

M. Jean-Marie Le Guen. Pour quelle maladie ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il permet de sauver 80 % de malades atteints de cancers...

M. Jean-Marie Le Guen. Quels types de cancers ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Des leucémies myéloïdes notamment, alors que, auparavant, 90 % des malades mouraient.

M. Jean-Marie Le Guen. Pourriez-vous développer ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur Le Guen, je vous en prie : je ne passe pas un examen d'accréditation ! Toutefois je suis à votre disposition. On verra celui qui connaît le mieux sa médecine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Le Guen. On pourrait aussi parler d'autre chose !

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Quand vous voudrez, où vous voudrez !

M. Jean-Marie Le Guen. On pourrait parler des transports par hélicoptères !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ou de la MNEF par exemple ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. Ou des parcmètres de Lourdes !

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. La consommation d'antibiotiques a baissé de 26 % en deux ans, madame Robin-Rodrigo. Vous l'avez rappelé et vous avez eu raison. Elle diminue parce que nous avons fait réaliser des études et que nous avons conduit une action d'éducation à la santé. Néanmoins, il est vrai que nous devons poursuivre cet effort sur d'autres molécules, les psychotropes en particulier.

Le TFR, monsieur Le Guen, est un tarif de remboursement, mais on l'utilise comme un mécanisme d'incitation à la substitution vis-à-vis des pharmaciens.

Dans quelques jours, nous allons présenter, en liaison avec l'industrie pharmaceutique, un plan d'économies de 2,5 milliards d'euros d'ici à 2007. Je n'ai rien vu de tel lorsque les socialistes étaient au pouvoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 6609 à 6623 .

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement nos 6609 à 6623 :

              Nombre de votants 66

              Nombre de suffrages exprimés 66

              Majorité absolue 34

        Pour l'adoption 16

        Contre 50

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Article 17

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 17.

M. Préel n'étant pas là, la parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous abordons la section IV du projet de loi, relative au médicament.

Le Gouvernement ne juge pas utile de modifier sa politique du médicament. Il nous a expliqué qu'il était satisfait du taux de pénétration des génériques. Il a également souligné qu'il ne fallait pas modifier la politique des prix. Il nous dira d'ailleurs sans doute qu'il n'a pas l'intention de modifier non plus la politique commerciale.

Ainsi que l'a rappelé l'un de nos collègues, le coût de la prescription médicamenteuse est beaucoup plus élevé que celui des actes du médecin. Il comprend, pour 10 %, le coût des visites médicales, c'est-à-dire ces interventions de représentants des laboratoires, au demeurant très qualifiés, qui viennent exposer aux médecins les avantages de tel ou tel médicament. Cette pression commerciale pose problème. Est-il véritablement utile que notre société dépense autant d'argent à cet effet ?

Notre politique du médicament, celle que nous vous proposons, est fondée sur trois éléments. Nous voulons agir à la fois sur les volumes, la structure et les prix, d'une façon concertée, coordonnée et transparente. En trois ans, il serait possible de diminuer de 20 % le coût du médicament, ce qui ferait gagner plus de 4 milliards d'euros à la sécurité sociale sans aucune diminution du remboursement et avec des conséquences positives sur notre système de santé.

De quoi s'agit-il ?

Notre pays a pris du retard en matière de génériques. Nous avions commencé d'agir et mis en place un certain nombre de mécanismes, mais nous avions eu le tort de nous en remettre, pour une part de la prescription, aux résultats de la négociation conventionnelle sur la rémunération des médecins notamment. Vous devriez y réfléchir, monsieur le ministre, car on vous opposera cet argument.

Cela a eu pour conséquence que le corps médical, contrairement à ses intérêts, ne s'est pas engagé dans la politique en faveur du générique. Peut-être y a-t-il été incité par les industriels qui pensaient que ce n'était pas intéressant. On peut se poser la question.

Toujours est-il que, pendant des années, la politique du générique s'est trouvée bloquée. Au bout d'un certain temps, conscients que cette attitude était irresponsable et mettait en danger l'équilibre de l'assurance maladie, les médecins sont revenus sur leur position. Cependant, les améliorations enregistrées n'ont pas permis à la France d'être au niveau d'autres pays dans ce domaine.

Au moment où un grand nombre de molécules tombent dans le domaine public, nous pourrions avoir une tout autre attitude.

Monsieur le ministre, vous souhaitez une baisse des prix des génériques de 30 %. Nous vous proposerons d'aller plus loin et nous verrons ce que vous ferez. En tout cas ne vous en remettez pas aux résultats de la négociation conventionnelle pour réduire la surconsommation médicale.

Sommes-nous d'accord pour valider le diagnostic du haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie sur la surconsommation médicale, notamment celle des statines, des antibiotiques et des psychotropes ? Devons-nous attendre la parution d'autres rapports ? Celui de M. Zarifian a déjà montré que, en matière de psychotropes, la France détient le record mondial de la consommation. Il est possible que cela ne soit pas dû uniquement à la pression commerciale, mais tienne aussi à d'autres facteurs plus compliqués, liés aux spécificités de notre pays ou au stress.

M. le président. Monsieur Le Guen, votre temps de parole est écoulé.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est pourtant très intéressant !

M. Jean-Marie Le Guen. M. Dubernard approuve.

M. le président. Veuillez conclure !

M. Jean-Marie Le Guen. En conclusion, sur ce sujet, nous aimerions avoir une vision plus générale de la politique gouvernementale, ce que ne permet pas, à l'évidence, l'article 17.

M. le président. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. Cet article ne témoigne pas de l'ambition du Gouvernement de placer la politique du médicament au cœur du texte. Il faut toutefois noter qu'il tend à transposer une directive européenne qui a pour objet d'empêcher les laboratoires de prolonger la durée de vie d'un brevet en ne modifiant qu'un élément d'une molécule sans modifier le principe actif. Cela est de nature à favoriser le développement des produits génériques, mais n'y a-t-il pas eu négociation avec les laboratoires ? Dans ce cas, quelles contreparties leur avez-vous accordé ?

Vous pouvez constater que j'ai été bref, monsieur le président !

M. le président. C'est parfait !

La parole est à Mme Cécile Gallez.

Mme Cécile Gallez. Monsieur le ministre, vous pouvez compter sur les pharmaciens pour développer l'usage des médicaments génériques. Faites-leur confiance en les autorisant à substituer dans tous les cas des génériques aux médicaments princeps prescrits par le médecin.

M. Pierre-Louis Fagniez. Tout à fait !

Mme Cécile Gallez. Je rappelle que, lorsqu'un médecin oublie une interaction médicamenteuse, le pharmacien est tenu pour responsable s'il n'a pas réagi. Il faut donc faire confiance à cette profession.

Certes, de nombreux pharmaciens sont opposés aux tarifs forfaitaires de responsabilité, mais l'Union nationale de la pharmacie a formulé des propositions. Elle est opposée au TFR systématique des génériques dont le taux est inférieur à 60 %. Elle souhaite un « TFR-balai » pour les génériques de plus de douze mois, dont le taux de pénétration est compris entre 10 et 45 %. Elle demande aussi la création d'un observatoire composé de représentants du ministère, de syndicats, des laboratoires de génériques, chargé de statuer semestriellement sur les génériques de plus de douze mois, dont le taux de pénétration est compris entre 45 et 60 %. Enfin, le prix des génériques devrait être inférieur de 40 % à celui des autres médicaments.

Évitez, monsieur le ministre, d'autoriser de délivrer les comprimés à l'unité, comme je l'ai entendu proposer à plusieurs reprises. De grâce, ne faites pas cela aux pharmaciens ! Mettre en vente des boîtes de vingt-huit comprimés a déjà été une erreur. Pour les traitements au long cours, des boîtes de trente-deux et de quatre-vingt-seize, prévues pour un traitement de trois mois, sont nécessaires pour éviter la multiplication des consultations.

Pour combattre des maladies relativement bénignes mais très répandues dans notre pays, comme la dépression nerveuse, d'autres affections psychiques et l'acné, je crois aux vertus de l'homéopathie. Veillez donc à ne pas trop dérembourser ces traitements.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Très bien !

Mme Cécile Gallez. Enfin, le texte ne comporte aucun article sur la prévention, alors qu'elle est utile. On a beaucoup agi pour le dépistage du cancer du sein. Autoriser le remboursement tous les cinq ans, par exemple, d'une densimétrie osseuse pour les femmes ménopausées éviterait des fractures du col du fémur coûteuses et traumatisantes.

M. Jean-Claude Viollet. Très bien !

Mme Cécile Gallez. On pourrait aussi développer le dépistage des déficiences visuelles chez le jeune enfant. Si vous souhaitez que les députés vous aident dans ce domaine, nous serons à vos côtés.

Sur les onze pharmaciens de l'Assemblée, je pense être l'unique femme et la seule présente, mais mes propos sont désintéressés, puisque je suis retraitée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Je suis en tout point d'accord avec Mme Gallez, puisque nous demandons une baisse de 40 % du prix des médicaments génériques, nous avons appelé de nos vœux en commission la création d'un observatoire et nous souhaitons que la prévention soit développée.

Monsieur le ministre, nous devons tous lutter contre la surconsommation des médicaments. Il faut donc revenir à un bon usage du médicament, ce qui passe par le développement des génériques, en ville comme à l'hôpital, par une aide à la prescription et par une baisse générale des prix des médicaments.

Les dépenses de médicament ont dérapé à l'hôpital. S'élevant à plus de 3 milliards d'euros en 2001, elles n'ont cessé d'augmenter pour atteindre un niveau inacceptable en 2003. Quelles mesures comptez-vous prendre ? En lisant votre projet de loi, je n'arrive pas à cerner votre politique dans ce domaine.

M. le président. Je préfère cette ambiance à celle de tout à l'heure.

La parole est à M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. Monsieur le président, je ne casserai pas cette ambiance puisque j'exprimerai mon accord avec les suggestions de Mme Gallez, mais je m'étonne que le ministre les ait écartées d'un revers de main. Je ne prétends pas détenir la vérité, mais je sais qu'elle appartient à ceux qui la cherchent et non à ceux qui se vantent de l'avoir trouvée. En matière de santé, nous sommes tous à la recherche de la vérité. Que chacun fasse donc preuve d'un peu de modestie !

Je veux insister sur le problème de la surconsommation médicamenteuse.

Les chiffres sont têtus : entre la France et le Danemark, le rapport est de un à deux, alors que les systèmes de santé sont comparables. Nous devons nous interroger sur l'efficacité d'une telle consommation.

Il convient aussi de développer l'information et la transparence. Les laboratoires pharmaceutiques devraient communiquer l'ensemble des informations en leur possession, y compris celles relatives aux interactions possibles, tout au long de la vie de leurs produits, et non se limiter à celles qui peuvent servir à obtenir l'autorisation de mise sur le marché.

Il faut revenir à une politique d'éducation à la santé et de prévention, de nature à réduire la consommation des médicaments et à retarder ou à empêcher l'apparition des maladies.

Il est indispensable de développer l'usage du générique en ville et à l'hôpital.

Le rôle des pharmaciens dans la prescription des génériques est connu et reconnu, Il faut aller plus loin en permettant aux médecins généralistes comme aux médecins hospitaliers de préconiser le générique et en diffusant mieux les logiciels à même d'encourager l'emploi de telles molécules.

Enfin, nous devons encore réduire considérablement le prix des génériques pour en développer la consommation et diminuer nos dépenses de santé.

C'est ainsi que nous trouverons le chemin d'une politique de santé responsable pour l'ensemble des partenaires, du malade au médecin, et pour chacun des acteurs de la santé.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Devant les membres de la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie, présidée par vous-même, monsieur le président, le président de la fédération des syndicats pharmaceutiques de France a indiqué : « L'acceptation du générique par les Français a reposé presque uniquement sur l'action des pharmaciens d'officine : il faut qu'ils soient davantage soutenus par les organismes publics, les médecins et les industriels ». Il constatait ainsi une déficience des politiques publiques. Pour un non-professionnel, une telle réponse sur un sujet aussi grave est impressionnante.

Il poursuivait : « Pourquoi la politique du médicament est-elle mal pilotée ? Parce que les médecins travaillent en aveugles et les pharmaciens en borgnes ».

Quant à M. Marimbert, directeur général de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, il déclarait : « Nous manquons de données sur l'utilisation concrète du médicament, en particulier pour rapprocher le diagnostic de la prescription. Faute d'outils suffisants, nous avons du mal à apprécier les conditions d'utilisation en situation réelle du médicament. » Nous sommes donc victimes de la déficence des moyens.

Monsieur le ministre, notre collègue de l'UMP a évoqué les questions que se posent les Français. Même si je ne suis pas de son avis sur le conditionnement des médicaments car j'approuve le fait que, dans d'autres pays, on en délivre uniquement la quantité nécessaire, j'estime que le Gouvernement doit s'exprimer sur ce sujet.

Dans votre projet, on ne peut s'empêcher de faire la comparaison entre le mécanisme très strict de contrôle des indemnités journalières et votre attitude à l'égard de la prescription des médicaments. S'agissant des indemnités journalières, un simple dépassement de la moyenne entraîne la pénalisation immédiate du prescripteur et, surtout, de l'assuré social. En revanche, rien n'est prévu en ce qui concerne la consommation des médicaments, alors qu'il serait facile de consulter les moyennes et de faire preuve d'une sévérité comparable. Les gisements d'économies sont pourtant d'égale importance et méritent tout autant notre intérêt, mais, dans un cas, vous faites preuve d'une grande rigueur, alors que, dans l'autre, vous manifestez une attitude très respectueuse à l'égard des prescripteurs. Pouvez-vous nous fournir des explications ? En tout cas, la comparaison est intéressante.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.


M. Yves Bur
, président de la commission spéciale. En tant que président du groupe d'études sur le médicament et les produits de santé, je vais vous livrer, chers collègues de l'opposition, quelques éléments de réflexion puisque vous reprochez au groupe UMP de ne pas s'exprimer.

Nous avons une politique du médicament...

M. Jean-Marie Le Guen. Depuis quand ?

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...résolument engagée par M. Mattei autour de différents volets.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous allons en parler !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. D'abord, la nécessité de valoriser l'innovation a été concrétisée à travers l'accord-cadre signé entre le Gouvernement et l'industrie du médicament. Elle a été accompagnée par une politique de promotion du générique. Comme l'a souligné M. le ministre, en 2002 la part des médicaments génériques était de 2 % en volume. Elle est aujourd'hui de 11 %.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est nous qui avons mis en place la substitution !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Néanmoins nous sommes bien loin derrière les pays européens où ils représentent, en volume, 40 %. On le voit, il y a donc encore des efforts à faire.

M. Jean-Marie Le Guen. Pourquoi M. Dubernard ne cesse-t-il de taper sur son pupitre ?

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous devons ensuite travailler sur la qualité de l'information délivrée au prescripteur. À l'évidence, tout le monde est d'accord pour reconnaître que la surprescription constitue un vrai problème. Néanmoins il est indispensable que, à travers une politique du médicament active, telle qu'elle est menée, on permette au site France de rester un pôle d'excellence pour l'industrie pharmaceutique et ce n'est pas rien !

M. Jean-Marie Le Guen. Aventis est parti aux États-Unis.

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Je défends l'industrie française, monsieur le président !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Hier, j'ai entendu nos collègues défendre avec beaucoup de conviction l'importance des cures thermales, tant pour la santé que pour l'économie locale.

Il est nécessaire, également, d'avoir une politique du médicament globale. Tout à l'heure, j'ai évoqué l'accord-cadre sur l'innovation qui permet de valoriser l'innovation au niveau du prix européen.

M. Jean-Marie Le Guen. Au niveau de Wall Street ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Monsieur Le Guen, laissez-moi terminer !

Des économies considérables pourront être réalisées grâce à cet accord-cadre.

Tout cela doit nous permettre de mieux utiliser le médicament et - vous avez eu raison de le souligner, monsieur Le Guen - de conduire à un changement de comportement des prescripteurs.

Les patients doivent aussi changer de comportement et comprendre que ce n'est pas l'accumulation de consommation de médicaments qui est la meilleure garantie pour guérir ou rester en bonne santé.

Longtemps, on s'est heurté, en matière de médicaments génériques, à l'opposition des médecins. Vous l'avez contournée en mettant en place le droit de substitution pour les pharmaciens et en les encourageant en ce sens.

M. Jean-Marie Le Guen. Ah !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Très juste !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Aujourd'hui, il s'agit bien de savoir comment promouvoir davantage encore le médicament générique.

A cet égard vous avez eu raison de souligner qu'il fallait faire encore baisser le prix des médicaments génériques. Nous devrons engager une réflexion à la fois sur le mode de distribution, sur les efforts d'accompagnement de la promotion du générique chez les pharmaciens, mais aussi sur le prix payé à l'industrie qui doit être réduit.

Nous savons que les génériqueurs mettent en œuvre des politiques de promotion très agressives. Une partie de cette promotion devrait revenir à l'assurance maladie.

Enfin, le problème du médicament est mondial et la France ne peut décider seule de la politique du médicament.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien ! Heureusement que vous êtes là pour le dire !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Aujourd'hui, le même débat est ouvert aux États-Unis sur le prix du médicament où il est considéré comme trop élevé par rapport à l'Europe.

M. Jean-Marie Le Guen. Très juste !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Et le risque, pour notre industrie du médicament comme pour l'assurance maladie, c'est bien ce qui va se passer aux États-Unis...

M. Jean-Marie Le Guen. Très juste !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...où une politique très active conduira à faire du médicament une marchandise comme les autres au sein de l'OMC. (Approbations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. Enfin le débat !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est bien au niveau européen...

M. Jean-Marie Le Guen. Oui !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. ...que nous devons mener une politique commune pour résister face à la pression des États-Unis qui considèrent que leurs médicaments sont trop chers et qui font pression pour que l'Europe paye sa part dans la recherche.

M. Jean-Marie Le Guen. Très juste !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Enfin, nous avons besoin d'une industrie pharmaceutique innovante. Nous devons réfléchir et nous battre pour que l'industrie française puisse continuer à être un pôle d'excellence et d'innovation, même si une grande partie de la recherche se passe aux États-Unis. La fusion entre Aventis et Sanofi est une bonne nouvelle à cet égard. (Approbations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. À valider !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Nous devons être certains que les innovations que nous valorisons sont de vraies innovations.

M. Jean-Marie Le Guen. Voilà !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce qui s'est passé s'agissant du COX-2 doit être exemplaire pour la suite.

Nous sommes prêts à payer l'innovation à son juste prix. Encore faut-il que le service médical rendu soit avéré. C'est aussi comme cela que nous défendrons les finances de l'assurance maladie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Le Guen. L'opposition applaudit plus que la majorité !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il est très important de comprendre que, si nous voulons avoir nos chances au niveau européen, il faut croire au pôle d'excellence, en particulier au partenariat entre recherche publique et recherche privée. Par exemple, s'agissant du cancer, on voit actuellement se développer un certain nombre de lieux, à l'échelle européenne, où deux à trois mille chercheurs peuvent, à partir du privé et associés au public - INSERM-CNRS - développer l'innovation.

On sait aujourd'hui que l'industrie pharmaceutique se développe davantage par des start-up et que les multinationales regardent de très près tous les laboratoires public-privé pour essayer de développer cette politique. Pour la première fois depuis dix ans, l'industrie pharmaceutique française a ses chances dans la mesure où elle doit recibler ses recherches autour de quelques domaines, comme la neuroscience, le cardiovasculaire et le cancer.

Mme Robin-Rodrigo nous ayant interrogés sur la politique du médicament à l'hôpital je lui rappelle qu'un accord-cadre a été signé le 30 avril 2004, pour en surveiller le prix à l'hôpital. Surtout je viens de signer un décret, le 1er juillet, qui vise à réglementer la rétrocession, c'est-à-dire la vente de médicaments à l'hôpital pour des malades qui ne sont pas hospitalisés, par exemple les patients en trithérapie. Jusqu'à présent, l'hôpital avait intérêt à vendre beaucoup de médicaments, car il prenait une marge de 15 % du prix. Désormais il y aura un forfait. Ainsi, les hôpitaux n'auront plus intérêt à la rétrocession.

Monsieur Vidalies, vous avez raison de dire que le pharmacien a plus intérêt que le médecin à vendre des génériques, et on ne pourra pas longtemps éviter ce débat dans notre pays. On ne peut pas mener une politique forte du générique sans ouvrir un dialogue avec les médecins pour qu'ils aient un intérêt à le prescrire.

Vous êtes un peu sévère quand vous prétendez que, d'un côté nous faisons beaucoup pour les indemnités journalières, les usagers, les arrêts maladie tandis que, de l'autre, nous laissons l'industrie pharmaceutique agir à sa guise. Je ne crois pas que cela soit fondé. En effet, et pour la première fois depuis très longtemps, nous allons présenter, la semaine prochaine, une convention pour économiser 2 300 millions d'euros d'ici à 2007. Je dois dire que, jusqu'à présent, l'industrie pharmaceutique a plutôt joué le jeu.

Monsieur Le Guen, le niveau de dépenses est plus révélateur du prix des médicaments que de la quantité consommée, parce que le nombre de boîtes vendues - environ 2,7 milliards - est resté stable. Pour autant, on dépense encore beaucoup trop d'argent en médicaments.

Madame Gallez, vous m'interrogez sur la vente de médicaments. Je suis opposé, comme vous, à la vente de boîte de 28 comprimés. C'est pourquoi, nous avons demandé, et les grossistes sont d'accord, des boîtes de 32, pour qu'une seule suffise à un mois de traitement. Nous demandons aussi des boîtes de 96 pour trois mois, afin d'éviter que le médecin ait à faire une ordonnance chaque mois.

Enfin, je ne suis pas favorable à la vente de médicaments à l'unité. D'ailleurs, beaucoup de pays sont en train d'abandonner ce système, pour des raisons d'hygiène.

Vous estimez que les femmes doivent, à tout prix, bénéficier tous les cinq ans d'une ostéodensitométrie. Peut-être, mais il appartiendra au haut comité de santé publique dont vous approuverez la création, je l'espère, de dire quels médicaments doivent être remboursés et ceux qui ne doivent pas l'être, quels actes médicaux sont utiles et quels sont ceux qui ne le sont pas.

On peut s'interroger sur la manière de mettre en place ce haut comité de santé publique ; on peut discuter de sa composition, mais il me semble que ce sera à lui de répondre à ces questions et certainement pas à qui que ce soit d'autre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Cela fait plusieurs fois que M. le ministre nous parle du haut comité de santé publique.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il s'agit, en fait, de la haute autorité de santé.

M. Jean-Marie Le Guen. Je suis prêt à accepter un amendement visant à la création d'un haut comité de santé publique ! (Sourires.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 7867 et 8430, pouvant être soumis à une discussion commune. L'amendement n° 8430 fait l'objet d'un sous-amendement n° 8474 du Gouvernement.

Monsieur Le Guen, considérez-vous que l'amendement n° 7867 a déjà été défendu ?

M. Jean-Marie Le Guen. Oh non, monsieur le président !

M. le président. Je ne me faisais pas d'illusion !

Je vous donne la parole pour le défendre.

M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement est très important car il vise à préciser les conditions de sécurité sanitaire dans lesquelles sont introduits un certain nombre d'éléments.

Nous avons beaucoup apprécié l'intervention de M. Bur qui a posé les bases d'une véritable politique du médicament dans notre pays. C'est, bien évidemment, dans le contexte d'une politique mondialisée, que nous devons réfléchir car si une industrie est mondialisée, c'est bien celle du médicament. Nous semblons nous poser moins de questions que nos collègues du Sénat américain quant au prix du médicament. En effet, ils passent des jours et des jours à discuter de la légitimité du prix du médicament et de ses modalités de remboursement.

M. Bur a eu parfaitement raison de souligner que, comme les membres du Congrès américain protestent contre le prix du médicament, l'industrie pharmaceutique se retourne vers l'Europe pour demander des hausses de prix, alors même que les États-Unis concentrent 80 à 90 % de la recherche. Aventis a tout de même déplacé l'essentiel de ses centres de recherche aux Etats-Unis et nous avons bien noté que le responsable de la fusion du nouvel ensemble nous avait laissé entendre qu'il serait question d'un éventuel rapatriement en Europe, singulièrement en France. Croyez bien que nous serons très vigilants à cet égard.


Nous parlons d'une industrie mondialisée, dont la valeur ajoutée se concentre aux États-Unis. Mais, comme les membres du Congrès contestent les prix du médicament, c'est finalement à l'Europe de payer la recherche menée aux États-Unis alors qu'elle ne bénéficie d'aucune retombée. Il y a là un enjeu politique majeur, que ce soit pour l'industrie, pour la recherche-développement, ou pour l'économie en général.

Si, pour défendre l'assurance maladie, il faut raisonner avant tout en termes de prix, nous devons réfléchir de façon globale et penser aussi recherche-développement, potentiel industriel, impact sur la santé publique, coût pour les assurés. C'est au Gouvernement de faire la synthèse.

Pour en revenir aux génériques, vous avez constaté, monsieur le ministre, tout comme la mission présidée par notre président, que c'est bien la législation adoptée sous le gouvernement précédent qui a induit le transfert de la demande vers les génériques. Autrement dit, aujourd'hui encore, malheureusement, la consommation de ce type de médicament est principalement le résultat de l'action du pharmacien et non de la prescription du médecin. La progression relative - encore insuffisante - dont vous vous vantez est en réalité le fruit de la politique du gouvernement précédent.

Bien que vous l'accusiez de tous les maux, ce gouvernement avait défini, dans ce domaine, un second axe qui a été entériné par votre prédécesseur. Vous nous donnez l'impression de débarquer, monsieur le ministre, mais il ne faut pas oublier que M. Jean-François Mattei a été ministre de la santé pendant deux ans. Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en novembre dernier, il avait tenu compte, dans sa présentation, des déremboursements des médicaments à service médical rendu insuffisant. Tout le monde le sait, à cause de la polémique que cela a suscitée.

M. le président. Merci, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je conclus.

Cette politique, on peut la discuter scientifiquement, mais elle a été initiée par le gouvernement socialiste. Je constate que la première chose que vous avez faite en arrivant, malgré le vote de novembre dernier, c'est d'y mettre fin et de renvoyer la question à l'examen de la future haute autorité de santé, ou de santé publique. Je ne porte pas de jugement, je souligne une contradiction.

M. le président. Merci, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais votre décision a un impact immédiat : les objectifs du PLFSS ne seront pas tenus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 7867 ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable, également, monsieur le président, mais je tiens à répondre à M. Le Guen.

Sans doute le gouvernement que vous souteniez avait-il esquissé certaines régulations, mais personne n'avait pris une seule décision concrète...

M. Jean-Marie Le Guen. Mais si !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...comparable à celle de M. Mattei. C'est le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin qui a agi et pas celui de Lionel Jospin. C'était ma première remarque.

Deuxième remarque : nous sommes résolus à continuer dans cette direction. C'est la raison pour laquelle nous allons créer la haute autorité de santé, qui dira quels sont les médicaments qui sont efficaces et ceux qui ne le sont pas, afin de mener, ensuite, une véritable politique dans ce domaine. Si des médicaments sont inefficaces, nous déciderons le déremboursement, sans trembler.

Troisième remarque : monsieur Le Guen comparez les prix des médicaments américains aux nôtres et vous m'en reparlerez. Ils sont de 20 % à 40 % plus chers !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, pour éviter qu'il ne tombe malencontreusement parce qu'il ne serait pas défendu je vous indique que je reprends l'amendement n° 8430 de Richard Mallié, qui fait l'objet du sous-amendement n° 8474 du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, vous n'avez appelé qu'un seul amendement ?

M. le président. Non, il y en a deux en discussion commune.

M. Jean-Marie Le Guen. Je n'avais pas entendu.

M. le président. Ils feront l'objet de votes séparés, mais peut-être voulez-vous retirer le vôtre ?

M. Jean-Marie Le Guen. Non !

M. le président. Cela ne m'étonne pas ! (Sourires.)

Vous avez la parole.

M. Jean-Marie Le Guen. Il est vrai, monsieur le ministre, que le prix facial du médicament américain est beaucoup plus élevé qu'en France. En revanche, même si vous vous êtes aussi penché sur la question, ni vous ni moi n'avons accès au prix réellement payé par les health maintenance organizations américaines qui achètent en gros. Avec toutes les rétrocommissions qui se pratiquent, comme vous le savez, dans d'autres secteurs, (Sourires) nous ne connaissons pas le prix réellement payé par les assureurs américains.

Par ailleurs, un débat a eu lieu au Congrès américain sur le sujet et cela mériterait que le président du groupe d'études sur le médicament de l'Assemblée organise un colloque. La politique de M. Bush a été discutée, les Démocrates ont fait une contre-proposition à laquelle certains sénateurs républicains se sont ralliés car ce sont rien moins que 500 milliards de dollars de dépenses qui ont été engagés pour les dix ans qui viennent en faveur de l'industrie du médicament. À un an de l'élection présidentielle, cela peut se comprendre car il semblerait que cette industrie ne contribue pas qu'un peu à la campagne de M. Bush.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous sommes en France !

M. Jean-Marie Le Guen. Certes, mais c'est nous qui payons ! L'industrie pharmaceutique est largement mondialisée et on ne peut en faire abstraction.

M. Bur a eu raison de souligner...

M. Jean-Luc Warsmann. Il a souvent raison, M. Bur !

M. Paul-Henri Cugnenc. Merci de dire que M. Bur a raison !

M. Jean-Marie Le Guen. ...qu'il nous faudrait une politique de prix et une politique industrielle communes avec les Allemands. Nous allons d'ailleurs présenter un amendement dans ce sens. Il est en effet indispensable de sortir de cette vision franco-française complètement étriquée pour s'engager non seulement dans une politique européenne du prix, mais aussi en matière industrielle.

Après les Américains, les Français et les Allemands sont les plus gros clients de l'industrie du médicament. Nous devons être courageux et innovants, perdre nos petites habitudes franco-françaises. Actuellement nous nous contentons de faire du ravaudage. On se gargarise du problème de la recherche, alors que les centres de décision ont majoritairement quitté le territoire national pour aller aux États-Unis. Voilà la réalité !

Au-delà, d'autres questions, d'ordre scientifique, se posent parce que, à part le Glivec, personne n'est capable de dire en quoi pourrait consister une nouvelle révolution pharmaceutique. Peut-être aura-t-elle lieu, mais il ne faut rien attendre des grandes firmes pharmaceutiques. De toute façon, cela ne justifie pas la pression que l'industrie américaine, par le biais des prix, exerce aujourd'hui sur le consommateur européen et qu'elle intensifiera demain.

Il s'agit de sujets majeurs pour la défense de notre assurance maladie. Il faut, bien entendu, promouvoir les génériques et lutter contre la surconsommation médicale, mais il convient aussi de prendre conscience que le continent européen livre une véritable guerre économique, engagée par certaines firmes américaines qui, à cause des niveaux de prix qu'elles demandent, ne trouvent plus de débouchés, même sur leur continent. Et ce serait au consommateur européen de payer pour l'industrie américaine ?

L'enjeu, monsieur le ministre, mériterait une politique d'une autre ampleur que celle que vous menez. Le président Bur a suggéré des pistes, je l'appelle à persévérer dans sa démarche.

M. le président. Merci, monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Nos amendements iront dans la même direction...

M. le président. Monsieur Le Guen, il est temps de terminer.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne vous savais pas si peu sensible à la politique du médicament, monsieur le président.

Et pourquoi M. Dubernard a-t-il l'air dédaigneux ?

M. le président. Merci, monsieur Le Guen. Peut-être pourriez-vous cesser vos provocations.

La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l'amendement n° 8430.

M. Hervé Mariton. Je ne suis ni médecin ni pharmacien, mais un simple citoyen député. J'essaie, avec mes collègues, que les choses aillent dans le bon sens et je m'efforce de soutenir ceux qui y travaillent.

M. Le Guen a raison de souligner que l'industrie pharmaceutique est essentielle d'un point de vue économique et que la politique du médicament est un élément majeur de la politique de santé, en particulier l'accès au médicament. Toutefois je m'en tiens aux faits, monsieur Le Guen. M. le ministre les a évoqués, ils sont éloquents, et même, en ce qui vous concerne, assez consternants.

M. Jean-Marie Le Guen. Ah ?

M. Hervé Mariton. Le Journal Officiel a publié, le 1er juillet 2004, le décret sur les conditions particulières d'accès à certains médicaments, baptisé décret « rétrocession ».

M. Jean-Marie Le Guen. De quoi parlez-vous ?

M. Hervé Mariton. Ce texte est essentiel pour l'accès à la santé de milliers de nos compatriotes et pour leur qualité de vie, puisqu'il met fin au parcours compliqué qu'il leur fallait suivre pour accéder à certains médicaments.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne comprends pas le rapport.

M. Hervé Mariton. C'est un progrès essentiel.

Ce décret a été pris en application d'une loi de 1992. Douze ans pour appliquer une loi, c'est trop ! Mais il est maintenant publié, et pas par vous.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais de quel décret parlez-vous ?

M. Hervé Mariton. Le décret « rétrocession » !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est quoi ?

M. Hervé Mariton. Ce décret rend accessibles certains médicaments qui n'étaient délivrés jusqu'à présent que par les pharmacies hospitalières. C'est important pour traiter un grand nombre de pathologies. Le progrès est tangible.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne comprends toujours pas.

M. Hervé Mariton. C'est pourtant simple !

Une loi a été votée en 1992, mais il ne suffit pas de voter la loi : il faut l'appliquer pour qu'elle ait un impact sur la vie de nos compatriotes.

M. Jean-Marie Le Guen. Je suis d'accord.

M. Hervé Mariton. Aujourd'hui, grâce au Gouvernement que nous soutenons, cette loi est devenue une réalité.

M. Jean-Marie Le Guen. Qu'est-ce que cela va changer pour les Français ?

M. Hervé Mariton. Cela va leur simplifier la vie !

Je suis l'élu d'une circonscription rurale dans laquelle certains citoyens n'ont pas facilement accès à une pharmacie hospitalière. Ils pourront maintenant se rendre dans une officine. Pour mes électeurs, qui sont des gens modestes, qui vivent très loin d'ici et qui devaient faire parfois cinquante kilomètres pour aller à l'hôpital, cela représentera un progrès concret en termes d'accès au médicament et de santé publique.

M. Paul-Henri Cugnenc. Très bien !

M. Jean-Marie Le Guen. Et alors ?

M. Hervé Mariton. C'est consternant ! Vous avez voté une loi en 1992, mais les décrets d'application ne sont pris que douze ans après ! Il aura fallu attendre 2004 pour que le Gouvernement que nous soutenons applique des textes qui n'ont que trop attendu. C'est ce qui s'appelle une politique du médicament, une politique de santé ! Le voilà, le rapport ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Le Guen. Je voudrais répondre, monsieur le président.

M. le président. Vous vous êtes suffisamment exprimé, monsieur Le Guen.

Je mets aux voix l'amendement n° 7867.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Jean-Marie Le Guen. C'est le même amendement que celui de la majorité.

M. le président. Non, ils étaient en discussion commune !

M. Jean-Marie Le Guen. On aurait pu réaliser une synthèse !

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Je suis choqué par le sectarisme de la majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Tout le monde a pu s'exprimer au cours de la discussion commune.

M. Jean-Marie Le Guen. Même sur le sous-amendement ?

M. le président. Oui.

Je mets donc aux voix le sous-amendement n° 8474.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8430, modifié par le sous-amendement n° 8474.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Rappel au règlement

M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, si nos collègues de la majorité n'avaient pas adopté une attitude sectaire les conduisant à repousser notre amendement, au seul motif qu'il est proposé par l'opposition, nous aurions gagné du temps puisque nous n'aurions voté qu'une fois. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Ils font de l'obstruction !

M. Paul-Henri Cugnenc. C'est vous qui en faites !

M. le président. Je vous remercie, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Si la majorité continue de faire la preuve d'un tel sectarisme,...

M. Philippe Vitel. M. Le Guen est un spécialiste !

M. Jean-Marie Le Guen. ...nos travaux n'avanceront pas aussi rapidement que nous pourrions le souhaiter. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous n'avons d'ailleurs pas demandé de scrutin public sur l'article 17.

M. le président. Vous avez oublié ! (Sourires.)

M. Jean-Marie Le Guen. Non, mais nous pouvons le faire !

M. le président. C'est trop tard, le scrutin a déjà été annoncé !

M. Jean-Marie Le Guen. Si vous insistez, monsieur le président, nous en demanderons désormais systématiquement un sur les prochains articles.

M. le président. Je ne me fais plus d'illusion depuis bien longtemps, monsieur Le Guen.

Reprise de la discussion

M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié par l'amendement n° 8430.

(L'article 17, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous en arrivons aux amendements portant articles additionnels après l'article 17.

Après l'article 17

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 8151, 7623 et 7967, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 8151 et 7967 ne sont pas défendus.

La parole est à Mme Billard, pour soutenir l'amendement n° 7623.

Mme Martine Billard. Ainsi que M. le ministre l'a rappelé, l'augmentation des dépenses de médicaments est liée à un accroissement non pas de la consommation mais des prix. Afin de lutter contre une telle augmentation des prix, il existe plusieurs solutions : poursuivre la politique en faveur des génériques, qui n'ont pas encore réussi à s'imposer, modifier le conditionnement et lutter contre les différences de prix portant sur des médicaments similaires.

La prescription par le médecin en dénomination commune internationale permettrait de lutter contre de telles différences, puisqu'elle donnerait au patient la possibilité de choisir le médicament correspondant le moins cher. Cela aurait nécessairement des incidences sur les prix.

C'est pourquoi, si nous souhaitons véritablement agir sur le prix des médicaments, il convient d'inscrire dans la loi l'obligation de prescrire en DCI. J'ai cru comprendre que la majorité n'était pas opposée à une telle mesure, mais qu'elle préférait l'incitation à l'obligation. Je pense que, lorsque de bonnes pratiques ont été identifiées - la prescription en DCI en est assurément une -, il faut prendre ses responsabilités et savoir passer outre les difficultés éventuelles que rencontreraient certains médecins.

Si quelques uns d'entre eux demeuraient réticents...

M. Philippe Vitel. La totalité !

Mme Martine Billard. ...ce serait regrettable mais ils devraient s'y mettre.

Par ailleurs, une campagne de communication très positive a appelé à la réduction de la consommation d'antibiotiques. Il serait temps qu'une campagne similaire appelle à la réduction de la consommation de psychotropes. La consommation des psychotropes est en effet invraisemblable en France, où elle est bien supérieure à la moyenne des autres pays. Les statistiques révèlent que, parmi les personnes de plus de soixante-cinq ans, 39 % de celles qui vivent à domicile et 66,4 % de celles qui sont en institution consomment des psychotropes. Or ces derniers constituent un facteur d'aggravation des chutes.

Le Gouvernement, monsieur le secrétaire d'État, doit s'engager à lancer une campagne appelant à la réduction de la consommation des psychotropes, laquelle aura des effets bénéfiques non seulement en termes de santé, mais également en termes financiers, puisque les psychotropes constituent l'une des catégories de médicaments qui pèsent le plus lourdement sur les dépenses de la sécurité sociale.

La prescription en DCI et des campagnes systématiques visant à réduire une consommation trop forte de certains médicaments constituent, à mon sens, deux objectifs majeurs.

M. Philippe Vitel. Cela n'a rien à voir !

M. le président. J'annonce d'ores et déjà que, sur le vote de l'amendement n° 7623, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie pour donner l'avis du Gouvernement.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

La question est en effet moins celle de l'obligation légale que celle des moyens permettant aux médecins de prescrire en DCI. Pour obtenir de véritables résultats en la matière, nous croyons davantage au développement de logiciels d'aide à la prescription.

Je donnerai un seul exemple : quel médecin prescrira, à la place d'un antalgique bien connu, du « chlorhydrate de dextropropoxyphène 30 mg, plus paracétamol 400 mg », alors qu'il s'agit tout simplement du Di-antalvic ?

M. Georges Tron. L'exemple est convaincant !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. M. le secrétaire d'État a souligné à juste titre qu'une telle obligation serait trop contraignante, surtout lorsqu'il s'agit d'écrire des formules chimiques.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Vous n'avez pas peur de vous montrer contraignant quand il s'agit de peser sur le nombre d'arrêts de travail !

M. Jean-Pierre Door. Pour développer les génériques, il vaut mieux faire confiance aux prescriptions des médecins et au droit de substitution des pharmaciens. Une telle confiance facilitera le développement des génériques en le rendant moins contraignant.

M. Jacques Le Guen. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Il est clair que vous n'osez pas franchir le Rubicon.

Vos arguments ne sont pas fondés. L'obligation légale de prescrire en DCI s'impose. Elle n'interdira en rien mais, au contraire, favorisera le développement de logiciels d'aide, lesquels devraient être fournis non pas par l'industrie pharmaceutique ou par le marché, mais par les organismes publics, qui ont vocation à aider les médecins à prescrire en termes de santé publique.

M. Paul-Henri Cugnenc. Monsieur Le Guen, soyez sérieux !

M. Jean-Marie Le Guen. Une telle politique aurait le mérite de la clarté la plus absolue. Elle est d'ailleurs pratiquée dans bien d'autres pays. Nous sommes l'un des rares pays au monde à continuer de prescrire les médicaments selon le nom de la marque, ce qui permet, évidemment, à la pression commerciale des représentants des laboratoires pharmaceutiques de s'exercer sur les médecins. Sur le même médicament, le même antibiotique notamment, plusieurs laboratoires viennent solliciter les médecins en usant de pratiques commerciales toujours plus élaborées, dont celle du me too - moi aussi ! - : plusieurs laboratoires reproduisent le même médicament sous un nom différent et pressent les médecins de le prescrire. Telle est la réalité.

Des médecins se sont manifestés au sujet des génériques : si les professionnels de santé ne sont pas aiguillonnés par une réelle volonté politique, ils ne les prescriront pas. Le développement des génériques en France, en l'état actuel des choses, passe uniquement par les pharmaciens. C'est le gouvernement précédent qui, par un acte volontaire, a lancé le développement des génériques. A l'époque vous vous y étiez d'ailleurs opposés. Il n'est qu'à relire vos déclarations, lorsque nous avons introduit le droit de substitution des pharmaciens. Vous aviez alors évoqué les mêmes arguments que ceux que vous utilisez aujourd'hui pour vous opposer à la prescription en DCI.

De plus les logiciels qui simplifient la prescription en dénomination commune internationale existent déjà. Ils pourraient parfaitement être fournis aux médecins par l'ANAES, la haute autorité de santé ou un quelconque organisme public, pour un coût dérisoire. Nous changerions alors complètement la nature de l'organisation commerciale du médicament en France et ferions diminuer de façon significative les dépenses de l'assurance maladie.

Tous les économistes de la santé sont favorables à l'obligation de prescription en DCI. Nous proposons nous-mêmes un amendement visant à l'adoption de cette mesure, mais à un autre article du projet de loi, en relation avec la question des logiciels.

Nous avons les moyens de franchir une étape importante dans cette voie sans porter atteinte à la recherche pharmaceutique dans notre pays. C'est une question de pure politique commerciale et de simples marges financières. Le rejet de cet amendement incitera les laboratoires présents en France à développer leur politique commerciale au détriment de la recherche. Tel est le message que vous leur enverrez : continuez à faire de la politique commerciale !

La France sera-t-elle le pays qui pousse les laboratoires pharmaceutiques à déserter la recherche pour développer leur seule politique commerciale ? Est-ce cela que nous voulons ? Le corps médical n'est-il rien d'autre, pour vous, qu'une cible commerciale ? Pensez-vous que les médecins n'ont pas mieux à faire que de recevoir des visiteurs médicaux qui leur revendent le même produit, sous des appellations différentes, deux, trois, voire quatre fois par semaine ? N'y a-t-il rien d'autre à faire que de laisser l'industrie pharmaceutique dépenser une telle énergie à vendre des marques ? Telle est votre politique !

M. Paul-Henri Cugnenc. Vous ne croyez pas que vous exagérez un peu ?

M. Jean-Marie Le Guen. C'est la vérité ! Sur un sujet aussi important, j'attends votre réponse. Mais il est vrai que les députés de la majorité n'ont pas le droit de s'exprimer ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Yves Bur président de la commission spéciale. Mais si !

M. Jacques Le Guen. Cette suspicion contre les professionnels est intolérable !

M. Jean-Marie Le Guen. Allez-vous vous décider enfin à affranchir les politiques de santé publique de la puissance commerciale ?

M. le président. Mes chers collègues, si j'appliquais strictement le règlement, j'arrêterais là la discussion sur l'amendement n° 7623.

M. Yves Bur président de la commission spéciale. Très bien !

M. le président. Mais si chaque orateur acceptait par avance de consentir un petit effort pour réduire son temps de parole, je pourrais donner la parole à Mme Billard et à Mme Guinchard-Kunstler, qui me l'ont demandée, ainsi qu'à M. le ministre, qui conclura. Nous passerons aussitôt après au vote sur l'amendement.

M. Alain Vidalies. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je serai brève, monsieur le président.

Monsieur le ministre, les logiciels d'aide à la prescription en DCI existent. Des médecins, en France, les utilisent. Quant au Di-antalvic, c'est l'exemple typique du médicament qu'il ne faut plus prescrire puisque plusieurs génériques lui correspondent. Continuer à le prescrire constitue donc une absurdité !

M. Jean-Marie Le Guen. Sauf si l'on vise à favoriser les lobbies pharmaceutiques !

Mme Martine Billard. Le pharmacien devrait être incité par la prescription du médecin à fournir le générique correspondant. Cet exemple n'est vraiment pas bon.

M. Jean-Marie Le Guen. Ça sert à financer le SU Agenais !

M. le président. Monsieur Le Guen, le débat est suffisamment intéressant en lui-même sans qu'il soit besoin de l'agrémenter par des remarques intempestives.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je formulerai trois remarques.

La première porte sur la forme et le fond de nos débats.

Sur la forme, le débat d'hier soir a été très clair mais, sur le fond, je suis très étonnée d'entendre sans cesse qu'il convient de faire confiance aux professionnels de santé et de contrôler les assurés sociaux. L'enjeu représenté par la consommation des médicaments appelle un travail de fond, en termes de confiance et de changement de comportement, auquel doivent participer les professionnels de santé comme les assurés sociaux.

Deuxièmement, avant-hier, un médecin généraliste est venu m'informer de ce que les logiciels que ses confrères et lui-même utilisent dans le cadre professionnel leur sont fournis par les laboratoires pharmaceutiques.

Troisièmement - je reviendrai sur la question, de peur d'abuser maintenant de mon temps de parole, monsieur le président - il convient de permettre véritablement aux usagers et aux professionnels de santé de changer leur comportement en matière de consommation de médicaments. Je pense en particulier à l'énorme consommation de médicaments, notamment de psychotropes, chez les personnes âgées. Dans les services gériatriques de longs et moyens séjours, la première mesure qui est prise à l'arrivée d'un nouveau patient consiste presque toujours en une pause médicamenteuse.

Mme Billard a évoqué à juste titre cette question, sur laquelle nous avons à fournir le même travail de fond que celui que nous avons su mener à bien sur les antibiotiques, en nous appuyant sur l'expérience de la CRAM de Bourgogne-Franche-Comté. Ce travail de fond, notamment sur le bon usage des psychotropes par les personnes âgées, appelle une relation de confiance entre médecins et patients. Il s'agit d'un véritable enjeu de santé publique.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. La commission présentera, après l'article 18, un amendement visant à charger la haute autorité de santé d'élaborer une charte de qualité des logiciels d'aide à la prescription, en vue de satisfaire vos remarques. Les médecins ont effectivement besoin de logiciels indépendants.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais pourquoi ne pas vous décider maintenant ? Les hommes politiques sont là pour prendre des décisions !

M. le président. La parole est à M. le ministre qui conclura le débat.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je ne peux pas laisser dire dans cette assemblée que les médecins français ne sont pas capables de prescrire les médicaments qu'ils souhaitent et qu'ils sont dépendants des visiteurs médicaux. Ce n'est pas vrai ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Le Guen. Tout à fait !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Nous avons en France des médecins de grande qualité et on n'a pas le droit de dire cela.

M. Jacques Le Guen. Assez de suspicion !

M. Jean-Marie Le Guen. L'opposition est mise en cause de façon scandaleuse ! Le ministre polémique. Je suis très déçu, d'autant qu'il s'agit d'un débat important.

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Cela va très mal se passer !

M. le président. Monsieur Le Guen !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je ne peux pas laisser dire non plus que l'industrie pharmaceutique ne ferait pas de recherche. Ce n'est pas vrai !

M. Jean-Marie Le Guen. Oh là là !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ensuite, sur le fond,...

M. Jean-Marie Le Guen. Enfin !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...il faut savoir que les malades ne connaissent pas le nom des médicaments en DCI. Toutes les études internationales - je vous les communiquerai si les demandez - montrent qu'il y a aujourd'hui un risque de mélanges et d'affections iatrogènes.

Enfin, nous allons en effet certifier des logiciels au niveau du ministère de la santé, en particulier de la haute autorité.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 7623.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° :

              Nombre de votants 85

              Nombre de suffrages exprimés 85

              Majorité absolue 43

        Pour l'adoption 30

        Contre 55

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Nous en venons à l'amendement n° 7868.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le défendre.

M. Jean-Marie Le Guen. Dans le souci de gagner du temps, je n'ai pas demandé la parole pour un rappel au règlement. Pourtant le ministre a, par deux fois, caricaturé - et le mot est faible - l'opposition et conclu que, sur le fond, il était contre la prescription en DCI.

Nous avons beau être un pays extraordinaire, les Français seraient plus bêtes que les autres Européens. Partout en Europe on prescrit en DCI sans que les gens s'assassinent. Selon vous les citoyens français ne connaîtraient que les petites boîtes bleues ou les petites boîtes jaunes et ils ne sauraient pas très bien faire la différence.

L'alphabétisation n'a sans doute pas progressé autant qu'on l'avait prévu. Les pharmaciens n'assument pas leur rôle. Comme les citoyens français ne savent pas lire de noms compliqués, il leur faut des petites pilules avec des noms de marque, car ils ne sauraient reconnaître que les marques, mais pas les noms génériques. Bref, les Français seraient incapables de comprendre.

M. le président. Venez-en à votre amendement.

M. Jean-Marie Le Guen. L'amendement n° 7868 permet d'ouvrir le débat sur la question du conditionnement du médicament.

Sans doute est-ce un pur hasard, mais l'industrie du médicament, fort talentueuse en matière de recherche, notamment de recherche marketing, est restée sur l'idée qu'il n'y avait que vingt-huit jours dans le mois, et pas trente et un. Cette question, après de multiples recherches, nous a fait penser qu'il y avait peut-être des problèmes à régler. Nous nous demandons donc s'il ne faudrait pas faire évoluer les conditionnements, de façon à les rendre plus conformes aux prescriptions des médecins.

C'est un élément, parmi d'autres, qui nous fait penser qu'il faut agir avec discernement. Nous ne prétendons pas pouvoir rentrer dans le détail des évolutions souhaitables en matière de conditionnement. Néanmoins nous nous rendons compte que plus nous laissons d'espace à la démarche commerciale, moins nous en accordons à la valorisation de la recherche. Plus nous ferons en sorte que l'industrie pharmaceutique existe d'abord par sa puissance commerciale, moins nous valoriserons sa recherche. C'est au nom d'une certaine vision de l'industrie pharmaceutique, et dans l'intérêt de celle-ci, que nous disons qu'il y en a assez de cette pression commerciale.

Certains de nos collègues de la majorité trouvent finalement très bien cette vie organisée, où l'on vient vous visiter, où l'on vous invite ici ou là. Pourtant beaucoup de médecins se sont lassés de cette stimulation certes sympathique, mais un peu pénible à la longue. Pour eux, leur profession ne se limite pas à recevoir des visiteurs médicaux, qui leur vendent des produits de marque, ou à être invités à des colloques.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Qu'avez-vous contre les colloques ?

M. Jean-Marie Le Guen. De nombreux colloques - pas tous - sont organisés dans des conditions scientifiques peu rigoureuses.

M. Jacques Le Guen. Encore la suspicion !

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas de la suspicion, c'est un fait ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Paul-Henri Cugnenc. C'est excessif, monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Chacun sait bien que, aujourd'hui, l'ensemble de notre système de santé a pour colonne vertébrale l'industrie pharmaceutique. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Le Guen. Ce n'est pas vrai !

M. Jean-Marie Le Guen. Cette dernière s'est glissée partout où la puissance publique n'avait pas fait son travail notamment dans les secteurs de l'information et de la formation.

Cela dit, je reconnais volontiers les insuffisances de notre propre action.

L'expérience a prouvé que nous ne pouvons pas nous contenter d'agir sur les prix et de récupérer de l'argent sur l'industrie pharmaceutique. Considérant que celle-ci gagnait beaucoup d'argent, nous l'avons fait. Vous le faites également ; soit mais une telle politique a des limites.

Il faut agir sur les structures.

Il faut éviter que les industriels soient soumis chaque année à une taxation venant sanctionner a posteriori une évolution inflationniste du coût de la santé.

M. le président. Merci, monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Il faut enfin laisser moins de place à l'industrie pharmaceutique dans la formation et l'information.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Rejet.

Je veux d'ailleurs souligner qu'il y a ceux qui demandent des rapports et ceux qui agissent. Nous, nous agissons ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Irène Tharin. Très bien !

M. Jean-Marie Le Guen. Applaudissements nourris sur les bancs de la majorité !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Le patient n'a rien à voir avec la question de la prescription en DCI à moins que - mais j'ai du mal à y croire - les laboratoires ne remplacent, sur les boîtes de médicament, le nom commercial par la formule en DCI. Votre réponse, monsieur le ministre n'avait donc aucun lien avec la question.

S'agissant de l'industrie pharmaceutique française, Aventis avait un site de recherches très développées à Romainville. Or il est en cours de fermeture, en dépit du projet alternatif à celui qui va être mis en œuvre, lequel aboutira à faire partir la recherche aux États-Unis. A ce propos, monsieur le ministre, vous n'avez pas donné votre avis sur ce projet des salariés d'Aventis, qui permettrait de continuer à développer une recherche de haut niveau en France.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Dans la matinée, nous vous avons dit que, manifestement, il y avait une différence très sensible entre le traitement de la question des indemnités journalières et celle du médicament. Vous nous avez répondu que c'était vrai, que la question pouvait en effet se poser pour les prescripteurs, mais qu'on verrait plus tard.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Non, ce n'est pas vrai !

M. Alain Vidalies. Quand on passe aux travaux pratiques, qu'il s'agisse de la prescription en DCI ou de l'indépendance des logiciels, personne ne s'oppose frontalement à des propositions qui paraissent évidentes au vu de la situation singulière que connaît aujourd'hui l'industrie française du médicament. Néanmoins, parce que, politiquement, vous ne voulez pas le faire, vous nous renvoyez à plus tard.

Or ces dispositions, notamment les deux mesures qui figurent dans votre projet de loi, donneraient à celui-ci une tout autre crédibilité. Pourquoi remettre à demain ce qu'on pourrait faire aujourd'hui ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7868.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 18

M. le président. J'ai plusieurs orateurs inscrits sur cet article.

La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Permettez-moi de dire, au nom du groupe UDF, combien nous sommes perplexes sur l'efficacité de l'article 18 pour lutter contre la surconsommation de médicaments.

Je me demande même si cette disposition est d'ordre législatif et si elle ne relève pas simplement du règlement et de l'article 37 de notre Constitution.

M. Jean-Marie Le Guen. Même pas !

M. Hervé Morin. Qui peut croire, monsieur le ministre, que la charte signée entre les partenaires du médicament - et dont la non-application n'emporte aucune conséquence - suffira à maîtriser la politique du médicament et les conditions de la promotion de celui-ci ?

C'est un peu comme pour les arrêts de travail, dont nous avons discuté hier. Nous avions indiqué que si tout existait déjà dans la loi et le règlement depuis 1996 et les ordonnances Juppé, rien n'avait été mis en œuvre. En effet il est toujours difficile de faire appliquer rigoureusement des dispositifs existants lorsqu'ils ont des conséquences concrètes.

Vous nous aviez indiqué de votre côté, monsieur le ministre, que 22 % des arrêts de travail étaient injustifiés. Or les services de l'Assemblée nationale, auxquels je m'étais adressé, n'ont pas retrouvé d'éléments ni les notes de la CNAM sur ce sujet. Quant au document que vous nous avez fourni, il concerne 22 % de poursuites d'arrêts de travail injustifiées.

Enfin, par le plus grand des hasards, j'ai retrouvé, grâce aux services de l'Assemblée, que vous aviez déclaré, il y a un mois, que deux ou trois médecins seulement par département prescrivaient des arrêts de travail abusifs, et que cela représentait environ 6 % du total. Il y a donc là des contradictions.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, comment pensez-vous réaliser 800 millions d'euros d'économies sur les arrêts de travail ? La note émanant du ministère de l'économie et des finances estimait d'ailleurs à 200 millions d'euros seulement les économies potentielles.

S'agissant du médicament, il en va de même. Il existe des procédures permettant de dérembourser des médicaments. Or tous les gouvernements, de droite comme de gauche, à l'exception de Jean-François Mattei il y a un peu plus d'un an, ont toujours calé ! L'AFSSAPS émet pourtant régulièrement des avis et des propositions de déremboursement total ou partiel. Cependant ces propositions tombent parce qu'aucun gouvernement n'a le courage d'agir.

On instaure donc de nouvelles procédures, de nouveaux dispositifs. Cela un côté un peu soviétique,...

M. François Liberti. Oh là là !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il ne faut pas exagérer !

M. Hervé Morin. ...mais, l'instauration de nouveaux mécanismes, la création d'une haute autorité, ne permettront pas de régler le problème. Aujourd'hui, en effet, la loi française contient déjà à peu près tout ce qu'il faut pour que chaque euro soit mieux dépensé en matière de santé, .

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.


M. Jean-Marie Le Guen
. Les propositions du projet de loi concernant le médicament, contenues dans deux malheureux articles, ne sont pas à la hauteur des enjeux. Il faut agir sur les prix, sur les volumes, sur les structures et sur la place exagérée prise par le médicament dans notre système de santé. Sans aller jusqu'à affirmer qu'elle en constitue la colonne vertébrale, l'industrie du médicament est cependant, au sein de ce système, l'élément autour duquel s'organise la circulation de l'information. N'est-ce pas un problème ? Celle-ci ne devrait-elle pas plutôt reposer sur une valorisation scientifique, sur les pratiques ou sur la recherche ? Mais non : la presse médicale est sous la dépendance de l'information pharmaceutique, sans parler de la visite ni de la formation médicale continue. L'environnement global est organisé autour du médicament.

Ce problème, qui concerne autant l'économie que la santé publique, se pose à toutes les majorités. Ce n'est pas une question idéologique.

Deux articles du projet de loi sont donc consacrés au médicament : le premier est l'application pour le moins bénigne d'une réglementation européenne - nous avons évoqué le cas des esters de glycol ; le second vise à mettre en place une charte de qualité pour la visite médicale. Cela tombe bien : avant même la présentation du projet de loi, le LEEM, c'est-à-dire le syndicat de l'industrie pharmaceutique, a eu la gentillesse de nous envoyer le projet de charte qu'il avait lui-même élaboré. Autrement dit, les industriels du médicament ont élaboré une charte et vous en avez fait un projet de loi.

Ce n'est pas beau, ça ? Un syndicat patronal rédige, pour ses membres, une charte visant à définir certaines bonnes pratiques, et le ministre se dit qu'il s'agit d'une bonne idée !

Je ne crois pas qu'un tel article relève de la loi, monsieur le président, ni même du décret ou du règlement, d'ailleurs. Il ne s'agit que d'un document à usage interne, élaboré par l'industrie pharmaceutique, ...

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Entre copains !

M. Jean-Marie Le Guen. ...dont on nous propose d'adopter ici le principe. De qui se moque-t-on ? Est-ce ainsi que l'on écrit les lois ? Ce n'est pas très raisonnable.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est même triste !

M. Jean-Marie Le Guen. Soucieux de respecter le calendrier - même si nous trouvons que les conditions dans lesquelles nous travaillons sont tout à fait regrettables -, nous avons consenti à siéger un dimanche. Et voilà que l'on nous demande d'approuver la charte écrite par le LEEM ! Non seulement ce n'est pas du ressort de l'Assemblée nationale, mais une telle mesure ne saurait se substituer à une politique du médicament.

D'ailleurs le LEEM n'a pas fait que cela : il a également fourni des argumentaires. Ainsi l'argument selon lequel la prescription en dénomination commune internationale provoque des accidents iatrogènes a justement été avancé devant la commission par les représentants de l'industrie pharmaceutique. Vous pourriez au moins, monsieur le ministre, éviter de le faire vôtre ! Expliquez-nous plutôt que cela serait trop compliqué à mettre en place, ou que vous trouvez de l'intérêt à la dynamique commerciale et concurrentielle qui anime l'industrie pharmaceutique. Objectez, comme l'ont fait nos collègues, que l'on ne peut pas indiquer aux médecins ce qu'ils doivent prescrire ; mais ne reprenez pas à votre compte des éléments qui contribuent à ce que notre pays soit le seul en Europe, voire au monde, à ne pas libeller les prescriptions en DCI. Une telle attitude est insultante pour la représentation nationale, et plus encore pour nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. Le but affiché de l'article 18 est la création d'une charte de qualité des pratiques professionnelles en matière de prospection et de démarchage pour les spécialités pharmaceutiques. Elle devra être conclue avant le 31 décembre 2004 entre le comité économique des produits de santé et un ou plusieurs syndicats représentatifs de l'industrie du médicament.

Je formulerai la même remarque que notre collègue M. Le Guen : il y avait certainement autre chose à faire en matière de politique du médicament. Vous auriez pu notamment agir en faveur de l'amélioration du remboursement ou de l'égalité d'accès aux médicaments innovants, ou réduire les marges de manœuvre des laboratoires qui freinent la recherche, plutôt que de mettre en place une charte dont la mouture a été élaborée par l'industrie pharmaceutique elle-même.

Le groupe communiste et républicain présentera plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 18 qui sont autant de propositions en la matière, mais je tiens à souligner d'emblée la situation de notre pays en ce qui concerne la découverte de nouvelles molécules.

Dans ce domaine, la part du Japon est passée de 11,3 % en 1979 à 29,7 % en 1994. Dans la même période, celle de la France est tombée de 15 % à 3,9 %. Certes, si j'en crois les indications du ministre, elle est remontée depuis à 11 %, mais nous sommes encore largement en dessous du niveau de 1974. La France, comme l'Allemagne d'ailleurs, a donc vu son influence considérablement réduite dans ce domaine, au profit du Japon - qui a pratiquement triplé la sienne en vingt ans - et, dans une moindre mesure, des États-Unis, ce qui permet à ces deux pays de maintenir leur leadership mondial.

Autre indication édifiante : l'augmentation de la consommation pharmaceutique, liée en grande partie aux enfants en bas âge, aux personnes âgées ou à celles atteintes de maladie grave, est due beaucoup plus au coût très élevé des médicaments innovants qu'à la progression des quantités consommées.

Tout cela incite fortement à ne pas laisser les mains libres à l'industrie pharmaceutique. Or rien dans votre projet, monsieur le ministre, particulièrement dans ces deux articles, ne témoigne d'une telle volonté de votre part.

M. le président. La parole est à M. Georges Tron.

M. Georges Tron. Je me réjouis personnellement de voir le Gouvernement se préoccuper du conditionnement des médicaments. Le paragraphe VI de l'article 18 reprend en effet les dispositions d'une proposition de loi dont j'étais l'auteur et que cent cinquante parlementaires avaient bien voulu signer. Son objet était de lutter contre le gaspillage des médicaments en s'attaquant au problème de l'inadéquation du conditionnement des spécialités pharmaceutique aux prescriptions des médecins. Je suis donc d'accord avec l'opposition pour estimer qu'il s'agit d'une question importante.

Pourquoi, mes chers collègues, peut-on présumer un gaspillage ?

Premièrement, cela a déjà été souligné, notre dépense moyenne de médicaments par habitant - 448 euros en 2000 - est l'une des plus élevées au monde. Or des informations récentes montrent que ce poste est celui qui contribue le plus à l'augmentation en volume de la consommation. C'est un premier indice.

Deuxièmement, sur 180 000 tonnes de médicaments produits en 2000, dont 70 000 tonnes d'emballages, 15 000 tonnes non vides ont été incinérées, dont un quart de boîtes qui n'étaient même pas entamées !

M. Jean-Marie Le Guen. Tout va bien !

M. Georges Tron. Cela vous donne, mes chers collègues, la mesure de ce qui peut paraître récupérable.

Troisièmement, enfin, on a pu constater environ 12 000 hospitalisations par an dues à des troubles iatrogènes, soit 0,65 % du nombre total de journées d'hospitalisation complète. Si on se livre à un rapide calcul - dont je reconnais bien volontiers le caractère approximatif -, sur la base du coût moyen d'hospitalisation publique ou privée, soit 300 euros, le coût de la iatrogénie médicamenteuse peut être évalué à environ 350 millions d'euros. Sans prétendre que l'on peut en faire l'économie à due concurrence, il est clair que des mesures appropriées pourraient permettre d'aller dans ce sens.

Le paragraphe VI de l'article 18 me paraît donc important pour deux raisons : d'une part, il tend à responsabiliser les patients en leur faisant prendre conscience de l'intérêt, au moins financier, d'une consommation réglementée ; d'autre part, en termes de santé publique, il peut également les conduire à adopter un comportement plus responsable en évitant la surconsommation et l'automédication.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Si un thème revient systématiquement dans les discussions que nous avons avec nos concitoyens autour du projet de loi sur la réforme de l'assurance maladie, c'est bien celui du médicament. À cet égard, les gens ont conscience qu'un travail de fond doit être effectué pour éviter la surconsommation et l'utilisation inadaptée. Voilà pourquoi j'ai plaidé pour qu'une relation de confiance s'installe entre professionnels et patients.

Trois problèmes sont systématiquement évoqués : celui du conditionnement des médicaments, inadapté à la prescription du médecin, celui de la surconsommation des médicaments et, au contraire, celui de la non-utilisation d'une partie d'entre eux.

M. Édouard Landrain. Tout le monde est d'accord sur ce point.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. À cet égard, et sans revenir sur ce qu'ont dit mes collègues, je ne peux que constater la faiblesse de vos propositions en la matière. L'article 18 ne constitue qu'un vœu pieux, dans la mesure où l'État n'intervient même pas dans la charte que vous voulez mettre en place. Vous vous bornez à reconnaître un accord élaboré au sein de la profession. Cela montre que vous ne voulez pas peser sur le phénomène.

A ce propos, je veux m'attacher à la question particulière de la consommation de médicaments par les personnes âgées. Dans ce domaine, en effet, nous faisons face à un véritable problème d'ordre culturel et, si nous n'osons pas mettre en place un dispositif adapté, nous n'arriverons pas à changer les choses.

Ainsi que la CNAM l'a clairement relevé, un travail de fond doit être effectué pour favoriser la bonne utilisation du médicament dans les structures d'hébergement des personnes âgées. A ce sujet je peux citer une expérience personnelle que j'ai vécue avant d'être élue députée.

Grâce à un travail énorme d'animation mené par le directeur d'une maison de retraite avec l'aide du médecin et des surveillants, qui a permis aux personnes âgées de changer complètement leur rapport à la vie, une économie de l'ordre de 50 000 euros a pu être réalisée en un an, uniquement sur l'achat de somnifères et d'anxiolytiques. Cela a permis à l'établissement d'embaucher du personnel pour mieux s'occuper des gens dont il a la charge.

Cet exemple montre qu'un travail doit être mené en faveur d'un changement culturel.

M. Édouard Landrain. C'est vrai !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. De même, la première décision que prennent les gériatres dans les services de court séjour est une pause médicamenteuse. Cela implique aussi un travail de fond.

C'est pourquoi votre refus d'adopter notre amendement à l'article 1er sur la mise en place d'un dispositif particulier autour de la iatrogénie est, à mes yeux, une véritable erreur politique, monsieur le ministre.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il faut un vrai travail de terrain et une impulsion au niveau national. Or vous, vous ne vous engagez pas dans cette voie.

M. Édouard Landrain. Cela relève de la responsabilité des directeurs de maisons de retraite !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. La place consacrée au médicament dans ce projet est significative. C'est la section la plus courte, avec deux articles seulement dont le principal concerne la charte.

On nous a pourtant expliqué que les dépenses de médicaments représentaient un quart des dépenses de santé et que c'était l'un des postes sur lequel on pouvait agir. Après tout le bruit fait autour des indemnités journalières, on s'attendait à de nombreuses propositions du Gouvernement pour une politique du médicament. Eh bien non ! La politique du médicament dans ce projet ne fait l'objet que de l'article 17 sur les génériques et de l'article 18 sur la charte.

Plusieurs de mes collègues ont déjà évoqué cette fameuse charte. En effet elle prête un peu à sourire. Vous auriez pu nous proposer de la même façon, monsieur le ministre, la charte de l'industrie des distributeurs automatiques à propos de la lutte contre l'obésité - dix propositions qu'ils ont envoyées à tous les parlementaires - et en rester là dans la lutte contre l'obésité. Il est vrai que, après la deuxième lecture au Sénat, on ne va plus très loin non plus dans ce domaine.

Quand il s'agit des assurés, des malades, soit on les fait payer, soit on met en place des politiques de sanctions drastiques. Pour les médecins, on est déjà un peu plus timide et l'on parle beaucoup d'incitation. L'industrie, elle, a droit à une charte des bonnes pratiques. L'équilibre est indéniable !

M. Jean-Marie Le Guen. Eh oui !

Mme Martine Billard. En fait il s'agit d'une charte de qualité des pratiques professionnelles des personnes chargées de la promotion par prospection ou démarchage pour les spécialités pharmaceutiques. Faut-il continuer à promouvoir, prospecter et démarcher pour vendre un médicament lorsqu'il existe un générique ? La charte permettra-t-elle de continuer à promouvoir, par exemple, la vente d'un médicament trente fois plus cher que son générique, alors que la toute petite avancée sur le médicament dans ce projet concerne les génériques ? Il y a comme une contradiction ! Ou alors cette charte ne sert à rien.

Bizarrement, la haute autorité de santé n'apparaît pas dans ce domaine. On pourrait pourtant penser qu'elle a tout son rôle à jouer avec ses agences sur cette question. Visiblement, exit la haute autorité : c'est l'industrie elle-même qui réglera la question.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Viollet, qui sera le dernier intervenant sur l'article.

M. Jean-Claude Viollet. Si l'on voulait résumer, on pourrait dire que ce projet est intransigeant avec l'assuré social, avec le malade, intransigeant avec le médecin, complaisant avec l'industrie pharmaceutique.

M. Jean-Marie Le Guen. Absolument !

M. Jean-Claude Viollet. On ne peut donc pas ne pas être choqué.

Sur les dénominations communes internationales, on n'avance pas. Le bridage des logiciels d'aide à la préconisation de produits génériques a été demandé et obtenu par l'industrie pharmaceutique. L'ouverture à la dénomination commune internationale aurait été un facteur de libération des prescripteurs.

Ce texte ne prévoit rien non plus sur l'information, sur la formation médicale, en particulier continue, laquelle, pour les mêmes raisons de libération du prescripteur, devrait pourtant bénéficier de financements publics renforcés.

Cette charte de qualité, selon le texte, aurait été passée entre le comité économique des produits de santé et un ou plusieurs syndicats représentatifs des entreprises du médicament, mais, curieusement, l'exposé des motifs parle uniquement du LEEM. À défaut de conclusion avant le 31 décembre 2004, elle serait arrêtée par décret en Conseil d'État et son application sera renvoyée à la convention entre les entreprises concernées et le comité économique, dont je ne rappelle pas la composition.

Je pense que cet article est un vœu pieux. Il est le résultat d'un arrangement entre le Gouvernement et le LEEM ; de plus il n'a aucune portée normative. Ainsi que cela a déjà été souligné, l'État et la haute autorité sont totalement absents de cette charte. Je pense qu'il faudrait à tout le moins affirmer le rôle de l'État dans la mise en place de la charte, introduire dans la loi les critères de qualité dont on parle - ils seraient alors à respecter par les visiteurs médicaux - et, enfin, évoquer les sanctions. On a parlé de sanctions pour les assurés sociaux et pour les médecins, mais où seront les sanctions pour l'industrie pharmaceutique ?

M. François Liberti. Nulle part !

M. le président. Nous en venons aux amendements à l'article 18.

Je suis d'abord saisi de l'amendement n° 7624 sur lequel le groupe socialiste a déposé une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Martine Billard, pour défendre cet amendement.

Mme Martine Billard. Cet amendement a pour but de préciser que la publicité sur les médicaments est exclusivement réservée à la presse spécialisée.

Certains pourraient estimer que tel est déjà le cas, et qu'il est donc inutile de l'écrire. A ceux-là je réponds d'abord que nous passons notre temps à réécrire des dispositions qui existent déjà. En outre, le lobbying s'exerce pour faire adopter par le Parlement européen un texte autorisant la publicité sur les médicaments vendus sur ordonnance. Pour l'instant, il a été rejeté mais il doit repasser devant le Parlement. On peut donc être inquiet devant le lobbying exercé par certains groupes, surtout quand on en voit les conséquences. Ainsi une personne faisant une chronique sur l'une de nos radios à propos du médicament a été licenciée. Cela démontre que le lobbying de l'industrie pharmaceutique est très puissant.

Compte tenu de ce risque, il est essentiel de réaffirmer dans notre droit que la publicité pour les médicaments est réservée à la presse spécialisée.

Il serait en effet particulièrement dangereux d'autoriser la publicité sur les médicaments dans l'ensemble des médias, pour une raison de santé publique. Les risques iatrogènes seront en effet d'autant plus augmentés puisque les patients découvriront des médicaments. Ne parlons alors pas de la pression sur les médecins ! Mieux vaut prévenir que guérir !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Rejet !

On ne peut pas laisser croire que la France est le seul pays à ignorer la DCI. Ce n'est pas vrai : il y en a d'autres.

M. Jean-Marie Le Guen. Il y a aussi la Guinée-Bissau ! (Sourires.)

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Cela est aussi le cas d'autres membres de l'Union européenne !

Si la charte n'est pas respectée, monsieur Morin, le comité économique des produits de santé demandera un reversement du chiffre d'affaires de l'entreprise au profit de l'ACOSS, qui est la banque de la sécurité sociale. Cela a donc un retentissement économique.

Mme Martine Billard. Qui sera chargé du contrôle ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ce n'est pas la charte dont vous parliez, monsieur Le Guen, qui sera certifiée. Vous avez reçu un projet de charte du LEEM. Que l'industrie pharmaceutique vous envoie la charte qu'elle souhaite voir mettre en oeuvre, très bien, mais cela n'a rien à voir avec celle qui sera retenue, car ce serait faire peu de cas du comité économique des produits de santé, des fonctionnaires qui y travaillent et de son directeur général.

M. Jean-Marie Le Guen. On n'a pas fini de se cacher derrière les fonctionnaires !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le comité économique des produits de santé est un organisme très sérieux. C'est lui qui va négocier la charte définitive.

C'est à partir de votre proposition de loi, monsieur Tron, que nous avons fait évoluer ce texte.

M. Jean-Luc Warsmann. Très bien !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je vous remercie pour ce dialogue très fructueux entre nous.

Le problème des médicaments dans les établissements pour personnes âgées est effectivement un sujet majeur, madame Guinchard-Kunstler. Un groupe de travail a été constitué. Je serais heureux que vous y participiez si vous le souhaitez.

Le comité économique des produits de santé, c'est l'État, madame Billard, monsieur Viollet. L'État est en effet majoritaire au sein de ce comité.

M. Jean-Marie Le Guen. Jusqu'à quand ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Cette situation a vocation à durer.

Pourquoi voulez-vous tous, madame Billard en particulier, tout différencier ? Il n'y a pas d'un côté la régulation médicalisée et, de l'autre, une action sur le médicament.

Avec le médecin traitant et le dossier médical personnel, il y aura une modification du comportement des professions de santé. La politique du médicament consiste certes à aller un peu plus loin sur le générique et sur la politique de prix, mais elle implique également que l'on agisse sur l'offre, donc sur les comportements. C'est un projet de loi global.

M. le président. Nous allons passer au vote sur l'amendement.

La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Comme je n'ai pas eu de réponse sur les conditions dans lesquelles seraient réalisées 800 millions d'économies en contrôlant les arrêts de travail, et pour permettre à M. Accoyer de faire en sorte que les pratiques et la tradition culturelle et religieuse de notre pays soient respectées, je demande la vérification du quorum.

M. le président. Comme j'avais préalablement annoncé le scrutin, je ne devrais pas, théoriquement, faire droit à votre demande, mais je sais que vous en feriez un drame devant la presse en expliquant qu'on vous a brimé. J'accepte donc, mais ce n'est pas la jurisprudence.

Je constate que le quorum n'est pas atteint.

Conformément à l'alinéa 3 de l'article 61 du règlement, le vote sur l'amendement n° 7624 est reporté au début de la prochaine séance, qui aura lieu à quinze heures.

    3

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1765, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures trente.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot