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Première séance du jeudi 15 juillet 2004

31e séance de la session extraordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Mardi matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 28.

Article 28

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 28.

La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Monsieur le président, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, mes chers collègues, avec l'article 28, nous entrons plus avant dans l'architecture de notre système d'assurance maladie et de santé. Il concerne plus précisément le dispositif conventionnel, c'est-à-dire la relation entre les caisses de sécurité sociale et les professions libérales de santé.

Je l'ai déjà dit dans la discussion générale et à propos de plusieurs articles, une critique fondamentale peut être adressée à votre projet de loi. Le dossier de l'assurance maladie, depuis qu'il est en débat - y compris au Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie -, est par trop resté cantonné à cette relation entre les caisses de sécurité sociale et les professionnels libéraux, comme si les problèmes se limitaient à ce niveau de l'organisation de l'offre de soins. Je sais que les partenaires sociaux ont la responsabilité unique de gérer les relations conventionnelles avec les professions libérales de santé, mais, pour traiter réellement tous les aspects de l'assurance maladie, il eût fallu aborder l'offre de soins dans son ensemble et pas seulement du point de vue des professions libérales de santé et de la médecine ambulatoire.

Que propose l'article 28 ? Relativement peu de nouveautés. Certes, avec l'introduction de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et des caisses complémentaires en tant qu'acteurs de la négociation conventionnelle, vous en modifiez le système. Mais l'idée d'une négociation conventionnelle à plusieurs niveaux avait déjà été introduite dans notre code de la sécurité sociale par la loi du 6 mars 2002. Vous n'avez pas manqué, monsieur le ministre, de critiquer l'absence de réforme au cours de la législature de 1997 à 2002. Pourtant, outre la loi, maintes fois évoquée, du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, celle du 6 mars 2002 a revu l'architecture du système conventionnel. Cette loi, Mme Guigou l'avait longuement préparée. Pendant un an, elle a conduit des discussions dans le cadre de ce que l'on a appelé le « Grenelle de la santé », lesquelles faisaient suite à la mission confiée à M. Glorion, alors président du Conseil national de l'ordre des médecins, et qui réunissait plusieurs personnalités incontestables en matière sociale, notamment M. Bernard Brunhes.

Vous ne modifiez pas l'architecture globale de cette loi du 6 mars 2002, si ce n'est en introduisant l'UNCAM dans la négociation de l'accord-cadre, ainsi que des conventions interprofessionnelles à l'article 6. Je ne suis pas certain, alors que vous affichez un souci de simplicité et de clarification des mécanismes, que l'article 28, entre autres, y contribue. Vous avancez comme une nouveauté la création d'un mécanisme d'opposition. Mais, concrètement, l'opposition d'organisations syndicales à l'application d'un arrêté ministériel, fondant sur le plan juridique les conventions médicales, existait déjà, nombre d'organisations syndicales ayant saisi le Conseil d'État sur ces conventions.

Non seulement, en ne voulant pas déborder la question des professions libérales de santé, vous ne réglez pas l'ensemble de l'organisation de l'offre globale de soins, mais l'article 28 prend appui sur la loi du 6 mars 2002 sans remettre fondamentalement en cause le dispositif conventionnel issu de cette loi.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. L'article 28, comme l'article 29, revêt une importance majeure en ce qu'il constitue le cœur même du dispositif d'optimisation des soins et de la maîtrise médicalisée, tout en mobilisant la responsabilité des acteurs.

Si le projet de loi dont nous débattons depuis quelques semaines est un cadre nécessaire qu'il ne faut pas rater, les négociations conventionnelles qui vont suivre seront tout aussi importantes. La recherche de la meilleure efficience possible, avec le concours des professionnels de santé, est porteuse d'espoir. Les conventions viseront le respect des engagements pris dans le cadre d'accords négociés avec les caisses, mais aussi l'évolution analytique des activités en volume et en prix, ainsi que les négociations tarifaires des professions de santé. L'organisation et la coordination des soins devront y faire l'objet d'un intérêt particulier, notamment s'agissant de la régulation des installations, lesquelles devront être soutenues par une politique incitative forte dans les zones déficitaires.

Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour rétablir un climat conventionnel normal, en panne sèche depuis quelques années. Dans ce but, il nous semble souhaitable d'abandonner le saucissonnage conventionnel actuel au profit d'une convention médicale assez large, composée de sections techniques, sociales ou médicosociales, en fonction des spécialités différentes et diverses. Le fonctionnement satisfaisant des unions régionales plaide en faveur d'une telle construction conventionnelle, qui réunirait tous les professionnels de santé. Si la loi ne réglera pas d'un coup tous les problèmes, les négociations conventionnelles contribueront à régler les détails techniques d'organisation et de coordination du système, veillant à assurer la permanence des soins.

Donner au dispositif conventionnel les moyens de réussir, c'est toute la valeur de ces articles, dont j'avoue ne pas comprendre pourquoi certains souhaitent les supprimer.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, nous sommes très heureux de vous retrouver.

M. Maxime Gremetz. Et de rester encore longtemps en votre compagnie !

M. Jean-Pierre Brard. Nous arrêterons là nos effusions, car nous ne voudrions pas vous nuire ! (Sourires.)

Je ne sais pas si, comme M. Door vient de le dire, les articles 28 et 29 ont une importance majeure. En tout cas, ils sont symboliques de la méthode gouvernementale. Sur cet article, qui porte sur les rapports entre les caisses de sécurité sociale et les professions libérales de santé, il vient de tenir des propos très intéressants. Vous l'avez mis en appétit, monsieur le ministre ! Comme toujours, vous avez éveillé chez les membres de votre majorité une fringale insatiable. M. Door ne vient-il pas de prôner une sorte de corporatisme de spécialités, qui irait encore plus loin que ce que vous proposez ?

Dans la nouvelle rédaction que vous proposez pour l'article L. 162-14-2 du code de la sécurité sociale, l'arbitre est désigné par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et au moins une organisation syndicale représentative des professionnels de santé libéraux. Mais vous ne donnez pas de définition de l'adjectif « représentative ». Nous connaissons la pratique gouvernementale qui consiste à conclure des accords avec des syndicats minoritaires, même si, s'agissant de ce texte, les grandes confédérations syndicales ne sont pas concernées. Pour vous, en fin de compte, « représentatif » cela veut dire avoir pignon sur rue et une plaque de cuivre bien astiquée.

M. Michel Piron. C'est bien dit !

M. Jean-Pierre Brard. Ce n'est sûrement pas, j'en conviens, une formule qu'aurait employée Marguerite Yourcenar !

M. Michel Piron. C'est vrai !

M. Jean-Pierre Brard. Mais elle semble vous évoquer quelque chose de très précis.

On voit bien que le Gouvernement est de nouveau dans la caricature et qu'il cherche des alibis.

M. Xavier de Roux. C'est vous qui êtes caricatural !

M. Jean-Pierre Brard. Vous, le grand spécialiste, vous savez de quoi il retourne quand on parle de caricature ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

L'arbitre que vous proposez n'est qu'un article de farces et attrapes, un faux nez dont vous affublerez des organisations prétendument représentatives, qui sera à la botte des caisses. Avec la nomination d'un « proconsul », qui sera également à votre botte, c'est bien l'esprit de l'étatisation qui plane sur votre texte, pas du tout celui de la démocratie sociale que nous revendiquons, qu'il faudra bien mettre en place à l'occasion du prochain changement de majorité.

M. Paul-Henri Cugnenc. Ce n'est pas pour ce soir !

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L'article 28 instaure une nouvelle procédure de conventionnement entre les professionnels de santé et la caisse nationale d'assurance maladie, visant à définir les tarifs, la rémunération des praticiens, ainsi que des engagements sur l'évolution de leur activité. Certes, il répond à une revendication du principal syndicat de médecins en créant, sur la base de la nouvelle loi relative au dialogue social, un droit d'opposition majoritaire des syndicats. Mais, en même temps, le Gouvernement en profite pour introduire, en cas de rupture de négociation, une procédure d'arbitrage. Désigné par le premier président de la Cour des comptes, l'arbitre aurait pour tâche d'élaborer un projet de convention « dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé », qui sera défini par la loi organique au mois d'octobre.

En fait, ce droit d'opposition vise plus à encadrer la contestation qu'à responsabiliser les parties. Le Gouvernement s'applique à re-corseter la procédure d'établissement des conventions nationales. Les syndicats médicaux risquent d'être surpris lorsqu'ils devront appliquer cette disposition, si elle est adoptée telle quelle.


Je profite de l'occasion pour interroger le ministre sur les intentions du Gouvernement après le grand émoi qu'a suscité chez les spécialistes de la santé publique en matière de nutrition le recul qui vient de s'opérer au Sénat à l'occasion de l'examen en nouvelle lecture du projet de loi relatif à la politique de santé publique. Une lettre pétition nous a été adressée : réunissant déjà en début de semaine 250 grands noms de la santé publique, elle comportait, ce matin, 400 signatures.

À l'occasion du débat qui nous réunit sur l'assurance maladie et, plus globalement, sur les problèmes de santé publique, il est important que le Gouvernement se ressaisisse et entende l'appel angoissé que, en dépit des moyens financiers importants dont disposent les lobbies, notamment agroalimentaires, lui adresse la communauté médicale et revienne sur les dispositions proprement scandaleuses adoptées par le Sénat.

M. Jean-Marie Le Guen. Avec l'accord du ministre !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. L'article 28 fixe le cadre d'une nouvelle procédure de conventionnement entre les professionnels de santé et la caisse nationale d'assurance maladie. Ces conventions visent notamment la définition des tarifs, frais et rémunérations des praticiens ainsi que des engagements portant sur l'évolution de leur activité.

S'appuyant sur la nouvelle loi relative au « dialogue social » - je mets ces termes entre guillemets ! - qui introduit un droit d'opposition majoritaire des syndicats, le Gouvernement semble faire un geste en direction des professionnels de santé concernés en facilitant l'établissement des conventions interprofessionnelles. Mais, en même temps, il introduit, en cas de rupture des négociations ou d'absence d'accord, le recours à un arbitre désigné par le Président de la Cours des comptes, lequel arbitre pourra être amené - cela ne s'était encore jamais vu ! - à élaborer un projet de convention dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé. Voilà qui est formidable !

M. Michel Piron. Eh bien, oui !

M. Maxime Gremetz. En droit - qu'il s'agisse de celui qui régit le travail ou de celui qui régit les conventions - cela ne s'est jamais vu !

Comme l'a rappelé M. Brard, la loi sur le « dialogue social » - c'est ainsi que l'appelle le Gouvernement - met déjà en cause les bases mêmes de notre législation sociale puisque, si, dans les entreprises, l'accord majoritaire repose sur le nombre de suffrages exprimés, au niveau des conventions, celui-ci ne tient plus compte des suffrages mais du nombre d'organisations. On voit bien où cela va mener.

M. Xavier de Roux. Absolument !

M. Maxime Gremetz. Or, maintenant, l'élaboration d'un projet de convention ne résultera plus de la confrontation des propositions formulées par les uns et les autres - comme le suppose le dialogue social - mais d'une décision de la Cour des comptes. C'est extraordinaire ! Comment peut-on confier à cette institution une telle tâche ?

Le droit d'opposition défini dans la loi relative au « dialogue social » relevant plus d'un droit de contestation que d'un droit de la responsabilité, le Gouvernement contribue, tout en donnant l'illusion d'une ouverture, à «recorseter » l'établissement des conventions nationales.

Nous qui sommes favorables au vrai dialogue social, nous demandons que les projets de convention soient élaborés à partir des propositions de tous les acteurs - État, caisses, représentants des personnels médicaux - et fassent l'objet d'accords.

Lors de l'examen d'un projet de loi antérieur, alors que nous parlions de droit d'opposition et que nous demandions que les organisations syndicales puissent présenter des propositions alternatives, le ministre du travail nous avait répondu qu'il ne fallait pas renvoyer tout au juge. Aujourd'hui, vous voulez renvoyer à la Cour des comptes. Ces deux langages tenus sur des projets de loi examinés à peu d'intervalle sont assez surprenants.

Pour toutes ces raisons nous demanderons la suppression de l'article 28.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Après avoir examiné les dispositions du projet de loi concernant les patients, qui visent à pénaliser ces derniers, nous abordons maintenant les relations entre les professions de santé et l'assurance maladie. Contrairement à ce que nous avons suggéré et demandé, il est prévu que la convention régisse l'organisation de notre système de soins, l'État se déchargeant complètement sur l'assurance maladie. La qualité, l'organisation et la continuité des soins tout comme la formation des praticiens, tout cela ne relève pas, selon vous, des prérogatives de l'État mais de la convention !

Les articles que nous allons examiner sont donc à la fois techniques et d'une grande importance.

M. Xavier de Roux. M. Évin a montré la continuité des dispositions proposées avec la loi Guigou. Il faudrait savoir !

M. Jean-Marie Le Guen. Ne pourriez-vous continuer votre sieste, cher collègue ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Brard. Il est somnambule : il parle en dormant !

M. Hervé Mariton. Vous ne pensez tout de même pas, monsieur Le Guen, que votre discours puisse réveiller quelqu'un !

M. Xavier de Roux. Expliquez-nous cette contradiction, monsieur Le Guen !

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. L'organisation syndicale du corps médical est, vous le savez, assez compliquée : très divisée, elle comporte pourtant certaines coordinations et structures très fortes. Cela tient, non seulement à l'individualisme du milieu médical, mais également à la persistance de discours syndicaux qui ne font qu'exacerber les revendications des professionnels de santé. Je dois dire à cet égard, que nous avons été plusieurs, l'année dernière, à être choqués par l'intervention, lors de la discussion sur la convention, de responsables politiques qui, au lieu de calmer le jeu, ont, en faisant miroiter l'ouverture de fenêtres de liberté, jeté de l'huile sur le feu et radicalisé les positions. Et vous n'étiez pas le dernier, monsieur le ministre, à le faire.

La situation que nous avons à gérer est donc assez complexe. L'article 28 est le résultat d'une première discussion. C'est en quelque sorte une convention à la convention puisque l'article a visiblement été écrit pour faciliter le travail de certaines organisations syndicales, une en particulier, ce qui semble indiquer que l'État s'apprête à s'aligner sur les revendications de celle-ci.

Cela étant, le mécanisme proposé est tellement complexe et difficile à comprendre qu'il ne sera pas sans effets sur le corps médical lui-même et il n'est pas certain qu'il tourne toujours à l'avantage de la négociation sociale.

Nous ferons plusieurs remarques sur ce mécanisme mais nous ne nous y opposerons pas complètement. Vous avez pris une responsabilité majeure en faisant reposer l'ensemble des efforts à accomplir en matière d'organisation des soins sur la convention. Mais le système conventionnel que vous avez retenu s'appuie sur des constructions déjà existantes - il a été fait notamment mention de la loi Guigou - qui sont, en quelque sorte, la cheville ouvrière de votre politique.

Ce système fonctionnera-t-il ? Il est permis de s'interroger. On décèle, sur tous les bancs de cette assemblée, une tentation à revenir à un syndicat unique, ce qui n'est pas de nature à produire des systèmes pérennes. Nous verrons ce qu'il en sera à la fois dans le débat qui va suivre dans cet hémicycle et dans les discussions conventionnelles qui ne manqueront pas d'avoir lieu dans les prochains mois.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. L'objectif du présent article est de définir un cadre qui facilite la négociation et la signature de conventions entre les professionnels de santé et l'assurance maladie. Il est de la plus grande importance que des conventions puissent être conclues. Notre vision de la démocratie sociale impose, en effet, l'instauration d'un climat de confiance entre les professionnels de santé, d'un côté, et l'assurance maladie, de l'autre.

Cela passe, tout d'abord, par l'allégement de la procédure d'approbation des conventions nationales par les ministres. Il est proposé de limiter le pouvoir d'approbation aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, de réduire le délai d'approbation à vingt et un jours et de limiter les motifs d'opposition à la non-conformité aux lois et règlements en vigueur ainsi qu'aux motifs de santé publique ou de sécurité sanitaire.

Cela passe, ensuite, par la création d'un droit d'opposition des syndicats non signataires. L'objectif est d'éviter l'adoption de dispositions conventionnelles auxquelles serait opposée la majorité de la profession concernée.

Cela passe, enfin, par l'instauration d'une procédure d'arbitrage en cas d'absence d'accord ou d'opposition de la majorité de la profession à un accord. Celle-ci se substitue au RCM, le règlement conventionnel minimal. Ainsi, un arbitre est choisi conjointement par les partenaires ou, à défaut, par le premier président de la Cour des comptes. Sa mission sera, en cas de désaccord entre les partenaires, d'arrêter un projet de convention dans le respect du cadre financier pluriannuel fixé par les lois de financement de la sécurité sociale.

Si l'UNCAM et au moins un syndicat représentatif adhérent à ce projet, il devient la convention soumise à approbation ministérielle. En l'absence d'adhésion, il s'applique en tant que règlement arbitral.

Il y a renforcement du lien contractuel entre l'assurance maladie et les professions de santé par l'affirmation du principe d'adhésion explicite aux conventions et accords.

M. Door a souligné l'intérêt des articles 28 et 29 et je l'en remercie. Il a attiré mon attention sur la création d'un cadre conventionnel global. C'est une possibilité qui existe. Nous en avons parlé, vous le savez, avec certains syndicats. L'imposer comme règle me semblerait aujourd'hui une avancée trop importante. Mais j'ai bien entendu son plaidoyer.

M. Évin trouve que l'article 28 n'apporte pas grand-chose à l'architecture actuelle. Il y a pourtant trois nouveautés : création d'un droit d'opposition, mise en place d'une procédure d'arbitrage et allégement des procédures d'approbation.

Concernant le pouvoir d'opposition des syndicats et l'arbitrage du premier président de la Cour des comptes, je répondrai à M. Bapt, que le dispositif que nous proposons a pour but de rénover le cadre conventionnel et de redynamiser la négociation entre les partenaires. Cela passe par une simplification des conditions de conclusion des conventions ainsi que, je tiens à le rappeler, par des dispositions renforçant l'applicabilité et la crédibilité des conventions.

La procédure d'arbitrage est effectivement nouvelle mais je ne vois pas en quoi elle limiterait la capacité des partenaires à négocier. Ce n'est qu'un ultime recours pour assurer l'efficacité du système.


Vous m'avez interrogé sur le projet de loi relatif à la santé publique. Je vous renvoie à certain nombre d'articles parus hier...

Mme Martine Billard. Pour le 14 juillet  !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'ai lu ce matin les articles dans la presse.

Monsieur Bapt, nous avons interdit que des produits trop sucrés soient accessibles dans les établissements scolaires : écoles primaires, collèges et lycées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Le Guen. Donc 400 professeurs de médecine n'ont rien compris ! Ils sont sans doute bêtes !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Lisez le texte, monsieur Le Guen. Le Sénat a adopté à l'unanimité - le groupe socialiste y compris - ce que nous avons proposé.

M. Maxime Gremetz. Quand je dis que c'est une chambre non représentative, qui ne sert à rien !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Et le groupe communiste aussi !

M. le président. N'engageons pas un débat là-dessus. C'est un autre sujet. Restons sur l'assurance maladie !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Messieurs de l'opposition, vous n'avez pas été capables de supprimer les barres sucrées à l'école ! Nous, nous l'avons fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Monsieur Gremetz, vous semblez découvrir qu'une négociation s'inscrit dans un cadre financier. C'est, pour moi, la moindre des choses.

M. Maxime Gremetz. Ah bon ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. La désignation de l'arbitre, vous avez raison, peut prêter à confusion.

Sa désignation par le Premier président de la Cour des comptes ne vise qu'à assurer son indépendance. Toutefois, nous ferons droit à un amendement qui permettra de lever toute ambiguïté.

M. le président. Sur l'article 28, je suis d'abord saisi de douze amendements identiques, nos 1672 à 1683.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. La rupture des négociations entraîne le recours à un arbitre désigné par le Premier président de la Cour des comptes, qui pourra être amené à l'élaboration d'un projet de convention dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé.

Le droit d'opposition défini dans la loi relative au dialogue social relève plus d'un droit de contestation que d'un droit de la responsabilité, et le Gouvernement continue à « recorseter », après avoir donné l'illusion d'une ouverture.

Trop de flou subsiste dans la définition de la méthode, ce qui laisse planer un doute sur les véritables intentions du Gouvernement et justifie par là même notre méfiance. L'habileté rédactionnelle du Gouvernement risque de dissimuler des arrière-pensées qui n'apparaîtront que plus tard au grand jour

Des difficultés d'interprétation sont à craindre, compte tenu du manque de rigueur dans la définition de la méthode. Notre méfiance nous conduit donc à proposer ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je voudrais livrer, messieurs les ministres, à votre réflexion une pensée de Paul Valéry, en réponse à vos propos sur l'unanimité, qui, vous le savez, sur les sujets importants, ne fait qu'abuser les nigauds. (Sourires.)

Paul Valery disait : « Ce qui a été cru partout, par tous et pour toujours, a toutes les chances d'être faux. » Je fais plus confiance, monsieur le ministre, aux propos de Paul Valéry, qui ont résisté à la charge des ans, qu'à l'opinion que vous avez formulée tout à l'heure.

M. Xavier de Roux. On peut dire cela !

M. Richard Cazenave. On pense à l'Union soviétique !

M. Jean-Pierre Brard. Celui qui a fait référence à l'Union soviétique est certainement un spécialiste en archéologie !

M. le président. Ne vous laissez pas interrompre, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Certains collègues sont très ignorants. Et comme ils n'ont rien à dire, ils nous entraînent ailleurs.

M. le président. J'interviendrai, monsieur Brard, pour que vous entriez à l'Académie française. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Merci ! J'ai le temps ! Car il paraît qu'il faut déjà avoir un âge canonique !

M. le président. Vous êtes immortel !

M. Jean-Pierre Brard. Nous pensons qu'il faut supprimer l'article 28.

Le Premier président de la Cour des comptes choisira l'arbitre.

Le Monde a fait, cette semaine, une description assez objective des rouages du pouvoir dans la France d'aujourd'hui. Tous les rouages sont dans une même main : nous vivons dans une sorte de République monarchique, où il n'y a pas cohabitation, du fait des institutions de la Ve République. Nous ne sommes pas loin du pouvoir absolu, où aucun équilibre n'est possible.

La référence au Premier président de la Cour des comptes semble traduire une volonté de neutralité et d'objectivité. Elle n'implique pas une possibilité de prise de parti.

Le Premier président actuel de la Cour des comptes est certainement un homme au-dessus de toutes critiques, dont on ne peut pas préjuger la prise de parti, puisqu'il s'agit de Philippe Séguin - un homme qui vous ressemble beaucoup, monsieur le président, par sa liberté d'esprit.

M. le président. Il vaut mieux avoir une liberté d'esprit que pas d'esprit du tout, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Je suis d'accord !

M. le président. Où en sommes-nous par rapport à l'assurance maladie ?...

M. Gérard Bapt. À la liberté d'esprit de M. Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Je pense que s'il y avait plus d'esprit dans le projet de loi qui nous est soumis, il y aurait moins de discussions. L'absence d'esprit républicain nous oblige à discuter longuement.

J'en reviens à l'arbitre. Le Monde décrit fort bien des mécanismes qui s'apparentent à une sorte de monarchie absolue. Cela ne nous place pas dans le domaine de l'arbitral, mais plutôt, messieurs les ministres, dans le champ de l'arbitraire.

Je vous livre une pensée de Benjamin Constant.

M. Jean-Claude Abrioux. Encore !

M. Jean-Pierre Brard. Il faut se cultiver, monsieur Abrioux, comme le dit M. Gremetz.

M. le président. Je vous en prie, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Abrioux, il ne vous est pas interdit de continuer à apprendre. Vous devriez vous inspirer d'une formule de Pirandello, que je citerai ultérieurement. (Sourires.)

Benjamin Constant disait : « L'arbitraire dans lequel vous êtes n'est pas seulement funeste lorsqu'on s'en sert pour le crime ; employé contre le crime, il est encore dangereux. » Vous devriez avoir cette phrase à l'esprit car le système que vous nous proposez, qui a toutes les apparences d'un bon système, est pervers et pernicieux.

Puisque l'article 28 parle de « majorité », je terminerai -sans indisposer, je l'espère, nos collègues - sur une citation de René Guénon : « L'avis de la majorité ne peut qu'être l'expression de l'incompétence. » (Rires)

La pensée profonde de la droite, qui vous habite, messieurs les ministres, est la suivante : « La volonté, la décision, l'entreprise sortent du petit nombre ; l'assentiment, l'acceptation, de la majorité. C'est aux minorités qu'appartiennent la vertu, l'audace, la puissance et la conception. » C'est une phrase de Charles Maurras.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Il est difficile d'intervenir après M. Brard.

M. le président. N'intervenez pas.

M. Maxime Gremetz. Si, monsieur le président !

M. Xavier de Roux. M. Gremetz sera majoritaire !

M. Jean-Pierre Brard. Nous sommes toujours dans la minorité, de toute façon !

M. Maxime Gremetz. Il faut des minorités et des majorités. Elles changent de temps à autre.

M. Xavier de Roux. Vous restez dans la minorité, c'est bien !

M. Maxime Gremetz. Je suis un homme de conviction. Je ne change pas tous les jours de casquette.

M. le président. Monsieur Gremetz, je vous prie de revenir à la défense des amendements.

M. Maxime Gremetz. Je suis libre de parole !

M. le président. Le règlement de l'Assemblée interdit de répondre aux interpellations.

M. Maxime Gremetz. Bien sûr, monsieur le président ! Mais dites à vos amis...

M. le président. Je n'ai pas d'« amis », monsieur Gremetz !

Et vous, monsieur de Roux, taisez-vous !

M. Jean-Pierre Brard. C'est ce que Marchais disait à Elkabach. (Rires.)

M. Maxime Gremetz. Vous copiez, monsieur le président. Attention aux droits d'auteur ! (Sourires.)

L'article 28 n'est pas extrêmement mauvais. On a vu pire ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mais si on replace cet article dans le contexte de ceux que l'on a déjà été votés, on voit bien où le bât blesse.

Quand il s'agit de responsabiliser les citoyens, les assurés sociaux, les syndicalistes, vous maniez le bâton et parlez de répression. Vous êtes moins sévère avec les médecins.

Vous « responsabilisez » en faisant payer un euro à ceux qui n'ont rien. Vous responsabilisez les gens en leur faisant payer plus cher le forfait hospitalier. Vous responsabilisez encore en augmentant la CSG, pour punir et rendre responsables les salariés, les personnes âgées, les handicapés.

Pour les médecins, c'est plus compliqué. Je résume, bien sûr. Il faut aborder cette catégorie avec plus de doigté, il faut moins les frapper. On choisit ses amis !

Vous rêvez toujours de revenir aux conventions nationales. Le Premier ministre dit : « La décentralisation ! La décentralisation passera, même si ce doit être au mois d'août. » Il est bien parti pour cela, d'ailleurs.

Les accords interprofessionnels ne se concluent pas du tout comme ailleurs. Car il existe un droit d'opposition, et non un droit de construction. Vous cherchez une majorité dans l'opposition. Pour que les organisations puissent faire jouer ce droit d'opposition, il faut qu'elles aient recueilli plus de la majorité des suffrages exprimés.

Au lieu de vous appuyer sur la majorité des personnes qui se sont exprimées pour construire et parvenir à une convention « co-élaborée » avec les diverses parties, vous faites un autre choix. C'est un recul. Il ne peut s'agir d'un accord majoritaire lorsque que l'on prend en compte le nombre d'organisations syndicales et non la majorité des suffrages exprimés dans la profession. Voilà la grande différence !

Cela paraît donc moins mauvais, dans la mesure où vous n'osez pas frapper les catégories professionnelles, mais c'est très négatif.

C'est pourquoi, nous proposons de supprimer l'article 28.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?


M. Jean-Michel Dubernard
,
rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'assurance maladie. Rejet. Il est indispensable, tout le monde en convient, de fixer un cadre à la négociation et à la signature des conventions, ne serait-ce que pour éviter les surenchères et les séances de billard à trois bandes auxquelles il nous a été donné d'assister. Ajoutons que le ministre s'est clairement exprimé sur le droit d'opposition.

Pour ce qui concerne l'arbitre, monsieur Brard, la commission proposera que ce rôle soit assuré par le président du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Rejet.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je ferai remarquer à la majorité que nous reprenons en fait, en le modifiant à la marge, le dispositif issu de la proposition de loi que notre collègue Claude Évin avait fait adopter en 2002 et à laquelle elle s'était opposée, préférant surfer sur les revendications sans contrepartie défendues par certaines catégories de médecins. L'adoption de cette proposition de loi avait du reste permis de mettre fin à bon nombre des corsetages du plan Juppé. Mais qu'en est-il à ce propos de l'avenant à la convention avec les biologistes, monsieur le ministre ? Êtes-vous réellement décidé à le signer - si oui, quand ? - et à supprimer par le fait la lettre B flottante, sachant que les dépenses de biologie ont augmenté de 10 % en 2003 ?

J'ai bien entendu votre réponse à propos de la vente de produits sucrés dans les écoles : « Vous n'avez rien fait », avez-vous dit. Mais moi, je n'ai jamais été ministre de la santé ni même ministre tout court,...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Certes ! Ni ministre de la santé ni maire de Toulouse...

M. Gérard Bapt. ...contrairement à vous, qui n'avez pas fait davantage ! Autant dire que vous portez personnellement plus de responsabilité que moi dans cette affaire.

Au demeurant, votre explication, sur le plan nutritionnel, est insuffisante et c'est ce qui explique pourquoi les nutritionnistes se mobilisent. Limiter le taux de sucre ne suffit pas dans la mesure où les additifs contenus dans ces boissons et autres n'en provoqueront pas moins une accoutumance au goût sucré, tant et si bien que ces jeunes, à peine sortis du milieu scolaire, s'empresseront d'aller acheter des produits de mêmes marques, mais dont le taux de sucre ne sera pas réduit. C'est d'abord une éducation culinaire, un apprentissage du goût qu'il faut leur apporter.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Le cassoulet est une nourriture riche !

M. Gérard Bapt. Ne vous moquez pas du cassoulet, monsieur le rapporteur . C'est après tout dans la région du cassoulet que le taux de maladies cardio-vasculaires est le plus faible !

M. Michel Piron. Belle dialectique ! C'est du sucré-salé !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. J'ai bien entendu la réponse, au demeurant très brève, de notre rapporteur, mais le fait que le rôle d'arbitre soit tenu, ainsi que nous le proposera la commission, par le président du Haut conseil ne changera rien sur le fond. Ce que je trouve vraiment choquant, c'est de se mettre à deux ministres pour ne rien répondre ! À quoi sert-il qu'ils soient là, si c'est pour faire de la figuration ? Pour ma part, je crois aux vertus du dialogue. Or, sur cette question de l'arbitre, vous ne voulez pas répondre, messieurs les ministres, et pas davantage sur l'inspiration maurassienne qui sous-tend toute la rédaction de votre projet de loi.

M. Xavier de Roux. Voilà Maurras maintenant ! On aura tout entendu !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 1672 à 1683.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 8308 de la commission est rédactionnel.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8308.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 8309 de la commission est également rédactionnel.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il est également défendu.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8309.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 1660 à 1671.

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Nous proposons de rédiger ainsi le 2° du B du I de l'article 28 :

« Dans la deuxième phrase, les mots : "quarante-cinq jours" sont remplacés par les mots : "cinquante jours" et les mots : "ou de leur incompatibilité avec le respect des objectifs de dépenses ou des risques que leur application ferait courir à la santé publique ou à un égal accès aux soins" sont remplacés par les mots : "ou pour des motifs de santé publique ou de sécurité sanitaire ou d'égal accès aux soins" ».

La disparition des mots « égal accès aux soins » de l'article 28 est tout à fait symptomatique. Référence forte et incontournable, le critère d'égal accès aux soins doit constituer un axe prioritaire de la politique conventionnelle ; il doit donc rester inscrit dans la loi comme un critère de conformité de ces conventions.

Je vais vous lire un court extrait - je vous dirai ensuite d'où il est tiré : vous comprendrez mieux les motivations de nos amendements.

« La sécurité sociale est la garantie donnée à chacun qu'en toute circonstance il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. Trouvant sa justification dans un souci élémentaire de justice sociale, elle répond à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l'incertitude du lendemain, de cette incertitude constante qui crée chez eux un sentiment d'infériorité et qui est la base réelle et profonde de la distinction des classes entre les possédants sûrs d'eux-mêmes et de leur avenir, et les travailleurs sur qui pèse à tout moment la menace de la misère. »

C'était un extrait de l'exposé des motifs de l'ordonnance créant la sécurité sociale, le 4 octobre 1945. On ne saurait mieux expliquer pourquoi nous tenons à ce que la référence à l'égal accès au soins soit maintenue dans la loi.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Ainsi que l'a montré Jacques Desallangre, votre texte fait passer à la trappe - une fois de plus ! - la notion d'égal accès aux soins. M. Bertrand continue à se référer, un peu, aux principes de 1945, mais vous pas du tout, monsieur le ministre ! Il faut dire que votre collègue est gaulliste et vous UDF...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Non !

M. Jean-Marie Le Guen. Cela n'existe plus !

M. Maxime Gremetz. Disons anciennement UDF.

M. le président. Monsieur Gremetz, l'UDF n'a rien à voir avec l'assurance maladie.

M. Maxime Gremetz. Mais les gaullistes ont beaucoup à y voir ! Et pour ce qui est de l'UDF, un certain appel de Cochin ne l'a-t-il pas qualifiée de parti de l'étranger ?

M. le président. Mais cela non plus n'a rien à voir avec l'assurance maladie !

M. Jean-Marie Le Guen. Cochin, si ! (Rires.)

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. L'hôpital tout au moins !

M. Maxime Gremetz. Ah ! Vous voyez ! Cochin ! On est en plein dedans !

M. le président. L'UDF n'est pas une assurance maladie. (Rires.)

M. Gérard Bapt. C'est une maladie !

M. Maxime Gremetz. Pourquoi avez-vous donc si peur de vous référer aux principes de 1945 ? D'abord parce que cela ne vous convient pas trop, je le sais ! Mais il y a une autre raison. La sécurité sociale ne joue plus le rôle qu'elle a joué juste après la Libération, où elle garantissait une couverture de base pour l'ensemble des médicaments. Tout un chacun avait alors, sur le plan des principes, droit à l'accès aux soins, quels que soient ses moyens. Or cela n'est plus vrai aujourd'hui. Vous remettez de plus en plus ce principe en cause en instaurant une santé à deux vitesses. Vous vous en défendez, mais c'est la réalité. En imposant le dossier médical personnel et le passage obligatoire devant le médecin traitant avant de consulter le spécialiste, vous donnez à ceux qui ont les sous la liberté d'aller voir qui ils veulent, quitte à être moins remboursés et à payer des honoraires supplémentaires. C'est donc bien qu'il y a une médecine pour les riches et une médecine pour les pauvres.

Voilà pourquoi nous attachons une grande importance à ces principes, voilà pourquoi nous tenons à ce que vous engagiez le débat là-dessus. Vous imposez aux plus faibles le paiement d'un euro supplémentaire, le forfait hospitalier, la GSG pour trouver 15,9 milliards, alors que les entreprises ont droit à 21 milliards d'exonérations de cotisations patronales. Et le ministre de l'économie entend même aller plus loin : il veut allonger les heures supplémentaires en les exonérant de cotisation ! Autrement dit, il veut creuser un trou supplémentaire ! Le déficit ? Il s'en moque totalement : il fera payer les gens de l'autre côté...

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je suis un peu choqué par l'attitude de nos ministre. Certes, M. Douste-Blazy est, si je ne me trompe, originaire des terres des Plantagenêt : il n'y a pas d'adhésion à l'égalité à espérer d'un tel héritage. Mais vous, monsieur Bertrand, qui êtes de celles de Saint-Just, vous êtes un peu relaps.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Plutôt de Condorcet !

M. Jean-Pierre Brard. Je ne parle pas d'Arras, ville de Maximilien. Mais Condorcet était également une belle figure, à laquelle je ne vous trouve guère fidèle !

« Il est plus facile de proclamer l'égalité que de la réaliser », disait Édouard Herriot. Or, pour ce qui touche à l'accès aux soins - et rester dans mon sujet -, l'égalité est, en gros, réalisée dans notre pays. C'est le résultat d'une maturation du mouvement social et de luttes qui font de la France un pays exemplaire, et qui suscite l'envie de bon nombre d'autres nations, à commencer par les plus proches, nos cousins d'outre-Manche notamment : ils ne bénéficient pas, eux, d'un système égalitaire comme le nôtre, qui garantit à chacun le droit de se soigner.

Je vous l'ai dit tout à l'heure, messieurs les ministres : si vous affichiez la réalité de vos objectifs idéologiques, notre peuple ne le supporterait pas. Vous seriez balayés par l'opinion publique. Et pourtant, avec votre projet de loi et singulièrement cet article 28, vous êtes en totale contradiction avec l'article Ier de la déclaration des droits de l'homme, la charte fondamentale du peuple français : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. » Or c'est précisément cette égalité consacrée par la déclaration des droits de l'homme et du citoyen que vous faites disparaître, une égalité qu'il est essentiel de garantir dans ce domaine fondamental de l'accès aux soin, une égalité qui doit excepter à la notion de marchandisation que vous vous apprêtez à introduire en mettant le pied à l'étrier aux compagnies privées d'assurance.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements, mais qu'il me soit permis, en réponse à M. Brard, de lui rapporter ce que disait Kierkegaard, en 1843 : « Que les gens sont absurdes ! Ils ne se servent jamais des libertés qu'ils possèdent, mais réclament celles qu'ils ne possèdent pas ; ils ont la liberté de penser, ils exigent la liberté de parole. »

M. Maxime Gremetz. Et ils veulent la liberté de manger ! C'est cela que vous n'avez pas compris !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Permettez-moi, de mon côté, d'en appeler à Voltaire : « Il est plus facile de lire des livres que de raisonner par soi-même » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Si cela continue, nous vous laissons tous les deux. (Sourires.)

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Il est bien de citer Voltaire : cela prouve que le ministre a des lettres et qu'il aurait pu être ministre de la culture - ce qu'il fut déjà. Peut-être eût-il dû le rester ! Il aurait contribué à cultiver davantage le peuple français. Mais précisément, monsieur le ministre, j'ai l'impression que vous avez beaucoup raisonné pour mettre au point ce projet de loi, et surtout faire prendre des vessies pour des lanternes au peuple français ! Car vous savez bien que, dans ce pays, vous ne pouvez pas afficher clairement l'idéologie maurassienne qui imprègne votre texte ; aussi en êtes-vous réduit à tenter de l'attifer d'oripeaux acceptables !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.


M. Jean-Marie Le Guen
.
Il est parfaitement légitime de faire figurer le principe d'égal accès aux soins à ce point du projet, où il est question de la discussion conventionnelle. Quand on voit l'importance donnée dans le passé à l'existence d'un secteur à honoraires libres et l'importance donnée aujourd'hui à la fin du tarif opposable, il est impératif de rappeler le principe de base sur lequel doit se fonder la convention.

Cette égalité est de caractère social, mais aussi de dimension territoriale. Nous avons, à l'article 1er, assigné à l'assurance maladie une obligation de résultat dans la lutte contre la désertification médicale. L'égalité territoriale a un coût, mes chers collègues. Si ce coût n'est pas rappelé dans la convention, celle-ci restera largement sans suite. Si vous renoncez à imposer des contraintes fortes pour réaliser l'égalité territoriale des soins, et du fait aussi de la liberté tarifaire, il se produira une migration générale des médecins vers les zones à fort potentiel de rémunération. Il est donc fondamental, au plan tant social que territorial, de faire figurer dans la loi la notion d'égal accès aux soins.

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 1660 à 1671.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7023.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Apparemment, l'égal accès aux soins n'émeut pas grand monde ! Notre amendement rétablit la référence pour les conventions au respect des objectifs de dépenses et aux risques que leur application ferait courir à la santé publique ou à l'égal accès aux soins, qui existait dans le code de la sécurité sociale et que l'article 28 de votre projet s'apprête à supprimer. La suppression de cette référence témoigne d'une dérive très grave, d'un recul inacceptable : si l'on donne tous les pouvoirs au proconsul de l'UNCAM, il faudrait au moins inscrire dans la loi des éléments délimitant son mandat de négociation. Ce serait la moindre des choses.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je ne peux laisser dire que nous remettons en cause l'égal accès aux soins, puisque cela figure à l'article 1er !

M. Jean-Marie Le Guen. Je vous parle des conventions !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Donnez-moi, dans l'histoire des conventions passées avec les médecins, un seul exemple de convention qui n'ait pas respecté l'égal accès aux soins ! Il n'y en a pas !

M. Jean-Marie Le Guen. Et celle qui a créé le secteur 2 ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. L'article 1er affirme clairement l'existence d'un égal accès aux soins. Je tiens à le redire solennellement.

M. Jacques Desallangre. Mais non, vous supprimez cette référence !

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Votre projet comporte d'autres affirmations de cet ordre. Si vous ne les accompagnez pas de mesures concrètes, elles en resteront au stade d'énoncés de principe.

M. Maxime Gremetz. Il y en a beaucoup !

M. Claude Évin. Notre amendement n° 7023 vise à permettre au ministre de refuser son agrément à une convention, lorsque celle-ci ne respecte pas un certain nombre de principes. Afin de pouvoir vous appuyer sur ces principes, ceux-ci doivent être inscrits dans la loi !

Plusieurs députés du groupe socialiste. Évidemment !

M. Claude Évin. Or vous êtes en train de supprimer ce qui existe aujourd'hui dans la loi, à savoir que pour accorder l'agrément à une convention, il faut tenir compte des principes liés au respect des objectifs de dépense, c'est-à-dire à la maîtrise de l'évolution des dépenses pour des raisons liées au maintien d'un système fondé sur la solidarité, comme M. Le Guen vient de l'évoquer, mais aussi des risques qu'un texte qui aurait été débattu entre les caisses de sécurité sociale et les syndicats médicaux pourrait non seulement faire courir à la santé publique mais encore à l'égal accès aux soins. Si vous retirez le membre de phrase figurant à l'article L. 162-15 du code de la sécurité sociale, le ministre chargé de la santé et de la sécurité sociale ne pourra plus faire pression sur les partenaires conventionnels, pour que ceux-ci respectent ces principes.

Certes, vous pouvez toujours nous dire que ces principes figurent à l'article 1er mais, concrètement, vous n'aurez pas les outils pour les faire respecter.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Quand le principe fondamental de la sécurité sociale, l'égal accès aux soins, sera tombé par terre, il ne faudra pas dire que c'est la faute à Voltaire ! Et surtout pas à Rousseau, qui était guidé par d'autres idéaux.

M. Jean-Pierre Brard. Ils détruisent le Contrat social !

M. Maxime Gremetz. On dira que c'est la faute à Douste !

M. Gérard Bapt. La responsabilisation repose avant tout sur les assurés, c'est ce qui ressort à la lecture de votre projet de loi. On ne peut y lire autre chose !

Le fait que les ministres, avez-vous écrit, monsieur le rapporteur, ne peuvent s'opposer à la convention en raison de l'incompatibilité de la convention à l'objectif de dépenses, diminue leur marge de manœuvre - et je suis d'accord - et responsabilise d'autant les partenaires à la convention.

Il n'est plus fait référence à la maîtrise médicalisée, pas plus qu'à l'égal aux soins ou à une dimension de santé publique. Où est la responsabilisation des partenaires de la convention ?

Vous présenterez, monsieur le rapporteur, un amendement tendant à changer la nature de l'arbitrage, en cas d'absence d'accord entre l'assurance maladie et les professionnels de santé. On nous dit que le Premier président de la Cour des comptes devra choisir un arbitre. Quand on sait qu'il a été l'auteur d'une énième réforme de sauvetage de la baleine, qui à l'époque était en train de couler, on peut avoir des doutes.

M. Jean-Pierre Brard. Donc, ce n'est pas un arbitre. Cela ne sera pas objectif.

M. Gérard Bapt. Où est la responsabilisation des partenaires conventionnels par rapport aux objectifs généraux de cette loi, même si dans l'article 1er, vous réaffirmez le principe de l'égal accès aux soins ?

La dimension de santé publique et de maîtrise médicalisée disparaît du texte lorsqu'elle concerne les professionnels de santé. En réalité, seuls les assurés sociaux sont responsabilisés, par la voie des déremboursements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7023.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 8147 et 7578, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 7558.

Mme Martine Billard. Votre intention de supprimer la référence à l'égal accès aux soins est significative et est loin d'être anodine. Il est difficile de croire en effet à un simple nettoyage de code. Si on part de ce principe, on pourrait en supprimer des pages !

Le législateur se doit d'avoir une vision plus large des choses et en élaborant la loi, il doit envisager tous les cas de figure.

Vous nous renvoyez à l'article 1er, qui pose des principes. Là, nous en sommes au dispositif conventionnel.

Mais je vous rappelle qu'à l'article 1er, il y a eu débat et nous avions déposé des amendements, y compris l'UMP, réaffirmant le principe d'égal accès aux soins, indépendamment des revenus ; ils ont tous été rejetés.

Rien n'a été vraiment précisé à ce sujet à l'article 1er - selon vous cela serait implicite. Et comme vous supprimez la référence à ce principe à l'article 28, on ne peut qu'être inquiet, y compris pour l'égal accès aux soins sur le territoire.

Vous ne faites quasiment aucune proposition pour l'assurer et lutter contre la désertification médicale. Les aides à l'installation de médecins ou d'autres professionnels de santé - sous forme d'exonérations de cotisations sociales - dans des zones où les besoins se font sentir ne sont pas à la hauteur des enjeux. Certaines régions manquent cruellement de professionnels de santé.

Par ailleurs, il faut noter aussi la difficulté qu'ont certains médecins, en période de vacances, à trouver des remplaçants et nous avons la chance, cet été, de ne pas connaître de canicule !

Ce projet de loi doit être « la » réforme de l'assurance maladie pour les années à venir, mais nous sommes nombreux désormais à en douter, et pas seulement dans les rangs de l'opposition.

M. Jean-Marie Le Guen. Le Président de la République ne doute pas !

Mme Martine Billard. On aurait au moins pu s'attendre que, sur l'égalité d'accès aux soins, en termes de revenus et de répartition territoriale, vous fassiez des propositions, des avancées. Non seulement, vous ne proposez rien, mais vous reculez. En fait, vous ne proposez que l'égalité d'accès au paiement !

M. Maxime Gremetz. Tout à fait !

Mme Martine Billard. Un euro aujourd'hui pour tout le monde ! Combien demain ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour soutenir l'amendement n° 8147.

M. Jean-Marie Le Guen. Il n'y a pas eu ces dernières années de convention qui n'ait donné lieu à recours, à tel point que certaines, du fait de ces recours, ont sombré.

Dès lors que l'on supprime le droit existant, c'est-à-dire l'égalité d'accès aux soins et le respect de la maîtrise des dépenses, on donne un signe. Sans doute, le Gouvernement veut-il, pour des raisons tactiques, éviter de rappeler à une profession qui n'aime pas cela, qu'elle se situe dans un cadre économique, qu'elle a des obligations d'ordre territorial. Mais en renonçant à poser ces principes dans la loi, nous affaiblissons durablement notre système conventionnel.

C'est pourquoi, monsieur le président, nous demandons un scrutin public sur cet amendement extrêmement important. Nous estimons que le Gouvernement prend là une responsabilité particulière.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 8147, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements. Je voudrais rappeler qu'à l'article 5, nous avons adopté un amendement de la commission qui impose la non-discrimination entre les patients.

M. Jean-Pierre Brard. Pourquoi ne pas écrire l'égalité des droits ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous, nous faisons confiance aux partenaires sociaux !

M. Jean-Pierre Brard. Tu parles !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est ce que disait M. Mattei, il y a deux ans, avec le succès que l'on sait !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Par ailleurs, il n'y a jamais eu de recours contre les conventions sur le fondement de l'égal accès aux soins.

Plus le cadre conventionnel sera simple et clair, moins il y aura de risques de recours. Faisons confiance aux partenaires sociaux (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Desallangre. C'est l'antienne !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je suis un peu surpris que vous ne leur fassiez pas confiance !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?


M. le ministre de la santé et de la protection sociale.
Pour clore le débat, je rappellerai l'article L. 1110-3 du code de la santé publique : « Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins ». Arrêtez donc de faire croire que ce projet porte atteinte à l'égalité d'accès, car c'est un mensonge.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas une réponse sérieuse !

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. Nos collègues semblent avoir oublié, en raison peut-être de la longueur des débats, l'article 1er du projet. Celui-ci dispose que « La section I du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 111-2-2 » qui prévoit notamment que : « Les régimes d'assurance maladie favorisent un accès effectif de tous les assurés sociaux aux soins, notamment par une bonne répartition de l'offre de soins sur le territoire national. Ils font bénéficier tous les assurés sociaux des progrès de la médecine ».

Cela signifie clairement...

M. Maxime Gremetz. Cela ne signifie rien du tout !

M. Richard Mallié. ...que votre amendement est redondant, et nous ne pouvons l'accepter. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen. Autant ne pas légiférer, puisqu'il y la Constitution !

M. Jacques Desallangre. Vous rayez ce qui est écrit. Il doit y avoir une raison !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Le rapporteur et le ministre se contredisent. Le rapporteur a tenu à préciser par un amendement à l'article 5 qu'il ne devait pas y avoir de discrimination dans l'accès aux soins...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Et alors ?

Mme Martine Billard. ...et le ministre nous répond maintenant que la disposition que nous proposons est superflue puisqu'elle figure déjà à un autre endroit du texte. Il en était alors de même pour l'amendement du rapporteur.

Enfin, comment osez-vous prétendre que la référence à l'égalité d'accès aux soins ne ferait que compliquer la convention ? Allons-nous supprimer la notion d'égal accès aux soins dans toutes nos lois pour simplifier radicalement notre législation ? Une telle réponse est inadmissible.

M. Maxime Gremetz. C'est l'aveu qu'il y aura une médecine à deux vitesses !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. La sémantique cache de mauvaises intentions. Le rapporteur verse dans l'incantation. Il fait confiance.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Aux partenaires sociaux !

M. Jean-Pierre Brard. Deux bénédicités, trois ave et quatre Pater pour obtenir les bonnes grâces du président du MEDEF.

M. Richard Mallié. Il y avait longtemps !

M. Jean-Pierre Brard. Or l'expérience nous enseigne qu'il ne faut pas faire confiance à de tels gens.

Par ailleurs, il a toujours été question, dans ce texte, d'égal accès aux soins. En quoi la notion de non-discrimination serait-elle préférable ? Si elle l'est, dites-nous en quoi. Si elle ne l'est pas, pourquoi supprimer la référence à l'égal accès aux soins ?

M. Richard Mallié. Cela est indiqué à l'article 1er.

M. Jean-Pierre Brard. Messieurs les ministres, répondez-nous sur les points essentiels. Nous ne pouvons pas demander à M. le Premier ministre de venir répondre à la place des deux ministres ici présents.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 8147.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 8147 :

              Nombre de votants 91

              Nombre de suffrages exprimés 91

              Majorité absolue 46

        Pour l'adoption 20

        Contre 71

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7578.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 8199, présenté par MM. Hellier et Fagniez, n'est pas défendu.

Je suis saisi d'un amendement n° 8310.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8310.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 3875 et 7839, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, nous soutenir l'amendement n° 7839.

M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement est défendu.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 3875

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Cet amendement tend à lever toute ambiguïté en exigeant la majorité absolue des suffrages.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Il s'agit d'une question de sémantique. Parlez-vous de la majorité absolue des organisations ou de la majorité absolue de ceux qui votent ? En proposant cette expression, vous ajoutez à la confusion...

M. Maxime Gremetz. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Brard. ...ou plutôt, vous cachez derrière de sympathiques adjectifs vos mauvaises intentions.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3875 et 7839.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8311.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est un amendement de cohérence avec la création des unions régionales de professionnels de santé exerçant à titre libéral, qui fera l'objet d'un amendement avant l'article 36.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8311.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 8312 tombe, compte tenu de l'adoption de l'amendement précédent.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7884.

La parole est à M. Gérard Bapt, pour le soutenir.

M. Gérard Bapt. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. Maxime Gremetz. Mais le Gouvernement ne parle jamais !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7884.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 77.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Door. Le ministre ayant répondu à la question que je lui ai posée dans mon intervention sur l'article, je retire mon amendement, mais je tiens à redire qu'à l'avenir, il faudra agir en ce sens, car la mise en œuvre de la coordination des soins exige que les règles soient ainsi définies.

M. le président. L'amendement n° 77 est retiré.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7840.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Tout d'abord, à propos de notre amendement précédent, nous aimerions que le ministre nous explique au nom de quoi une profession pourrait interdire à d'autres de passer des conventions ? Est-ce que, demain, la profession des médecins va pouvoir s'opposer à un accord conventionnel avec les chirurgiens-dentistes, par exemple ?

L'amendement n° 7840 est important pour le Gouvernement lui-même. Il est prévu de donner les clés de la négociation au syndicat majoritaire. Mais nous ne comprenons pas pourquoi, en cas de désaccord, le Gouvernement ne pourrait pas, six mois plus tard, négocier avec d'autres organisations syndicales ? Cet amendement tend à introduire plus de souplesse et à obliger l'organisation syndicale majoritaire, quelle qu'elle soit, à négocier. En effet, l'organisation syndicale majoritaire, quelque opinion qu'on en ait, peut avoir intérêt à ne pas signer de convention et à s'en remettre à une procédure d'arbitrage, ce qui est contraire à la logique conventionnelle. Le Gouvernement semble lier l'UNCAM à la négociation par un syndicat majoritaire, ce qui est très mauvais et pour l'un et pour l'autre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. S'agissant des accords conventionnels interprofessionnels, il va de soi que seuls les syndicats de la profession concernée peuvent s'y opposer. C'est pourquoi l'amendement était inutile.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas clair dans le texte !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Par ailleurs, l'accord-cadre interprofessionnel couvre, par définition, l'ensemble des professions. Dans le cas contraire, ce ne serait pas un accord-cadre interprofessionnel. C'est pourquoi votre amendement n'était pas pertinent.

Quant à l'amendement n° 7840, je comprends vos préoccupations. Mais il s'agit de donner une légitimité incontestable aux conventions. C'est pourquoi nous avons créé un droit d'opposition, qui se distingue de la non signature, car il doit se traduire par un acte positif. Autrement dit, s'opposer signifie prendre ses responsabilités. Votre amendement pourrait paradoxalement conduire les syndicats principaux à s'opposer systématiquement aux accords, car on restreindrait leurs marges de manœuvre au cours de la négociation.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas dire cela, car toutes les organisations syndicales ont dénoncé, lors du vote de la loi sur le dialogue social, l'application qui est faite désormais du principe majoritaire au sein des entreprises, des branches et pour la signature des conventions collectives. Le Gouvernement met de nouveau en œuvre un droit d'opposition. Autrement dit, les organisations qui représentent la majorité des salariés ne peuvent que s'opposer aux organisations minoritaires, ce qui interdit tout accord positif et constructif, alors que, par ailleurs, vous incitez les syndicats à faire preuve de responsabilité et à adopter une position constructive.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7840.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7801.

La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale, pour le soutenir.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je rappellerai d'abord l'esprit du III de cet article. Aujourd'hui, en l'absence de convention nationale, il revient à l'État de prendre par arrêté un règlement conventionnel minimal, après consultation de la caisse nationale d'assurance maladie, des travailleurs salariés, des organisations syndicales représentatives des professions de santé et, éventuellement, du Conseil de l'ordre pour les questions déontologiques. Ce dispositif doit être réformé car les professions de santé, sachant qu'une voie de recours existe auprès de l'État, ne sont pas incitées à jouer le jeu de la négociation avec les caisses. Pour éviter le blocage des négociations conventionnelles et l'entrée de l'État à part entière dans la négociation, nous proposons de remplacer le règlement conventionnel minimal par une procédure arbitrale.

C'est pourquoi le III de l'article 28 instaure une procédure d'arbitrage en cas d'absence d'accord ou d'opposition de la majorité de la profession à un accord se substituant au règlement conventionnel minimal. Ainsi, un arbitre est choisi conjointement par les partenaires ou, en cas de désaccord, par le Premier président de la Cour des comptes. Il devra arrêter un projet de convention dans le respect du cadre financier pluriannuel fixé par les lois de financement de la sécurité sociale.

Le Gouvernement propose, par cet amendement, d'améliorer le contenu de ces dispositions afin de favoriser l'aboutissement de négociations conventionnelles et de faire en sorte que la procédure d'arbitrage reste une solution temporaire.


Tout d'abord, sémantiquement, il précise qu'il s'agit d'un règlement arbitral. Ensuite, il est proposé que ce règlement arbitral ne puisse en aucun cas avoir le statut d'une convention, même si l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et une organisation syndicale représentative des professionnels de santé libéraux y ont adhéré, cela pour marquer le caractère palliatif et temporaire du dispositif. Enfin, les partenaires conventionnels devront également engager des négociations en vue d'élaborer une nouvelle convention dans une période de deux ans à compter de l'entrée en vigueur du règlement arbitral.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a accepté cet amendement.

M. Jean-Pierre Brard. Vos explications sont un peu succinctes, monsieur le rapporteur !

M. Maxime Gremetz. Elle l'a examiné ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Oui, et elle l'a adopté avec enthousiasme car les règlements conventionnels minimum créent toujours des situations complexes, sans issue.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. M. le ministre répond, dans la première partie de son intervention, à l'argumentation que j'avais développée dans l'amendement précédent en lui donnant acte, c'est-à-dire que rien n'était prévu en cas de blocage. En tout état de cause, je me félicite que le Gouvernement ait été interpellé par l'amendement précédent. Bien évidemment, la réponse qu'il donne n'est pas la même que celle que je proposais.

Il prévoit, en effet, l'ouverture de nouvelles négociations au plus tard dans les deux ans qui suivent l'entrée en vigueur du règlement arbitral. Il s'agit bien d'ouverture et non de conclusion. Je sais que ce débat doit intéresser peu de gens parce qu'il a un intérêt assez restreint, même s'il pose de graves problèmes - mais c'est un autre sujet. Les organisations syndicales n'auront vraisemblablement pas intérêt à conclure de conventions parce qu'elles obtiendront toujours un petit quelque chose de plus de la part de l'arbitre désigné conjointement avec le proconsul. Et la seule solution que vous proposez, c'est de recommencer exactement le même système, pour bloquer encore plus le processus. Vous imposez à l'organisation majoritaire, quelle qu'elle soit - je rappelle de ce point de vue que les organisations majoritaires peuvent changer : aujourd'hui, c'est la CSMF qui l'est sans doute, mais une autre l'était précédemment - d'ouvrir de nouvelles discussions dans les deux ans, mais pas de les conclure. Au final, vous n'aurez jamais de convention. Les syndicats seront en perpétuelle position de revendication. Sachant que la convention concerne non seulement les rémunérations, ce qui est parfaitement légitime, mais aussi tous les sujets touchant à la réorganisation, à la qualité, à l'évaluation et à la formation, vous vous préparez et nous nous préparons tous des jours assez difficiles !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Cet amendement est gravissime.

M. le président. S'il est si gravissime, vous n'avez qu'à demander un scrutin public. D'ailleurs, je le demande et le fais annoncer dans le palais.

M. Maxime Gremetz. Vous avez raison !

La feuille verte de demande de scrutin était déjà prête ! Cela dit, merci de le demander. Je n'en espérais pas moins de vous !

M. Jean-Pierre Brard. Quelle connivence !

M. le président. Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Poursuivez, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Cet amendement représente un véritable déni du code du travail.

M. Hervé Novelli. Rien que ça !

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Novelli, vous êtes pour la disparition du code du travail !

M. Hervé Novelli. Pas totalement ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Quel aveu !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je vois que vous avez une grande confiance dans le dialogue social. Vous vous placez, en effet, dans la perspective où aucune convention ne sera signée. Si vous redoutez tant le refus des syndicats qui ne sont pourtant pas particulièrement révolutionnaires, chacun en conviendra, c'est bien que le contenu des conventions ne doit pas être très bon.

Ensuite, à défaut de convention, vous prévoyez un règlement arbitral. Le code du travail prévoit qu'en l'absence de signature, on reporte la discussion et que c'est alors l'ancienne convention qui continue à s'appliquer. Mais vous, vous inventez le règlement arbitral. Cela veut bien dire qu'on veut faire reculer le dialogue social. Il n'y aura jamais d'accord. Les organisations syndicales ne signeront jamais rien, à juste raison, contesteront le règlement arbitral et recommenceront. Une chose est sûre : il n'y aura jamais d'accord négocié dans l'intérêt à la fois des médecins et des usagers de la santé. C'est très grave et c'est pourquoi, monsieur le président, je vous remercie d'avoir demandé avec moi un scrutin public.

M. le président. Je ne l'ai pas demandé avec vous, mais seul, en vertu de mes pouvoirs réglementaires.

M. Maxime Gremetz. Disons que nous l'avons demandé en même temps ! Marchons côte à côte, il fera beau ensemble !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 7801.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 7801 :

              Nombre de votants 94

              Nombre de suffrages exprimés 94

              Majorité absolue 48

        Pour l'adoption 72

        Contre 22

L'Assemblée nationale a adopté.

En conséquence, l'amendement n° 76 de M. Door est satisfait.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, la situation est tellement grave que je demande une suspension de séance. Cela permettra à mon groupe de se réunir.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 1684 à 1695.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour les défendre.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements tendent à rédiger ainsi le dernier alinéa du A du III de l'article 28 : « L'arbitre est désigné à la majorité conjointement par les conseils d'administration des trois caisses nationales d'assurance maladie et la majorité des organisations syndicales représentatives des professionnels de santé libéraux concernés. Cet arbitre est mandaté en premier lieu pour élaborer un règlement conventionnel minimal dans l'attente de la convention définitive. »

La désignation d'un arbitre dans le cadre d'une négociation conventionnelle doit faire l'objet, tout le monde est d'accord là-dessus, d'une attention particulière. Il faut que ses décisions soient légitimes, ce qui suppose que cet arbitre soit représentatif de la majorité des administrateurs des caisses nationales et de la majorité des professionnels de santé. C'est pourquoi nous proposons qu'il soit désigné démocratiquement par les conseils d'administration des caisses. Il ne nous semble pas que sa désignation entre dans le champ des compétences de l'UNCAM. C'est pourquoi nous proposons une autre rédaction, afin d'élargir la base chargée de le choisir, donc de renforcer la légitimité de ses décisions.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. C'est vraiment caricatural, monsieur le président. Ou bien le rapporteur n'a rien à dire, ou bien il veut amputer le débat.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il n'a rien à vous dire !

M. Jean-Pierre Brard. Ce qui est sûr, c'est qu'il ne veut rien entendre ! (Sourires.) Mais c'est désagréable, désobligeant et illégitime !

Le seul pouvoir dont dispose l'opposition sous la Ve République, chère au cœur de notre président, c'est le droit d'amendement. Pour l'exercer, il faut pouvoir débattre. Or vous ne le voulez pas, ce qui ne m'étonne pas.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Est-ce à moi que vous vous adressez ?

M. Jean-Pierre Brard. Précisément. J'espère même vous faire réagir.

Quant au ministre et au secrétaire d'État, ils se mettent à deux pour conjuguer leur silence.

M. le président. Monsieur Brard, permettez-moi de vous interrompre pour vous signaler que nous en sommes à 114 heures de débat.

M. Jean-Pierre Brard. Au rythme où nous avançons, nous ne sommes pas sortis de l'auberge, puisque personne ne veut nous répondre.

Ni la commission ni le Gouvernement n'ayant daigné s'expliquer, je ne pense pas que vous puissiez considérer que je leur réponds, monsieur le président.

La question qui se pose est de savoir si l'arbitre doit être choisi dans des conditions comparables au proconsul, dont on a déjà largement parlé depuis lundi, et si vous concevez l'arbitre comme un homme lige, ou pour utiliser une formule chère au général de Gaulle, monsieur le président, un « godillot ».

M. Hervé Novelli. Oh !

M. Jean-Pierre Brard. Pour qu'il ne le soit pas, il faut garantir un mode de désignation qui fasse de lui un homme légitime. Et sa légitimité résultera de l'autorité qu'il aura, qui, elle-même, découlera d'une nomination consensuelle. Alors, et alors seulement, son autorité sera telle qu'il aura, en cas de conflit, un vrai pouvoir d'arbitrage, c'est-à-dire qu'il pourra rapprocher les points de vue, susciter le débat et la confrontation et que, une fois son avis rendu, son autorité, fruit de son indépendance et de sa qualité d'arbitre, conférera à son avis force de loi.

Pour cela, encore faut-il, monsieur le ministre et monsieur le secrétaire d'État, que son mode de désignation ne soit pas un faux-semblant pour avoir quelqu'un à votre botte. Il faut que cet arbitre ait une autorité morale suffisante.

J'aimerais entendre M. le rapporteur et M. le ministre dire clairement ce qu'ils veulent.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 1684 à 1695.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8444.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. Cet amendement concerne la reconduction des accords conventionnels interprofessionnels, de l'accord-cadre et des conventions et leurs avenants, qui est prévue en l'absence d'opposition de la part de l'un au moins des signataires, ou de l'un ou plusieurs syndicats représentatifs des professions concernées. Il me semblerait utile de préciser, pour les conventions autres que l'accord-cadre et les conventions interprofessionnelles, que l'opposition d'un des signataires ne suffit pas. Sinon, cela signifierait qu'un signataire de l'accord-cadre ou de l'accord interprofessionnel pourrait bloquer la reconduction d'une convention dont il n'est pas partie prenante, comme l'a souligné notre collègue Jean-Marie Le Guen.

C'est pourquoi mon amendement propose, dans le cadre des seules conventions, de remplacer le « ou » par un « et » pour éviter que la reconduction d'une convention ne soit bloquée par une profession qui n'est pas concernée.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je rappelle que le Gouvernement cherche bien, comme vous, madame, à renforcer la légitimité des conventions nationales en prévoyant un droit d'opposition des syndicats majoritaires, afin d'éviter qu'elles ne soient signées que par des syndicats représentant une minorité de la profession concernée. Mais je ne crois pas utile de prévoir, en cas de rupture des négociations ou d'opposition, que l'arbitre soit désigné par les syndicats majoritaires.

Mme Martine Billard. Ce n'est pas ce que je propose, monsieur le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. L'arbitre sera une personnalité jouissant d'une parfaite indépendance, ce qui devrait lui permettre de proposer un projet de convention en toute neutralité. Vous prévoyez de faire désigner l'arbitre par un ou plusieurs syndicats représentant la majorité de la profession concernée.

Mme Martine Billard. Non, monsieur le ministre. Je parlais de la reconduction des conventions.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Pour nous, c'est pareil. C'est la raison pour laquelle mon avis est défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je crois qu'il y a une petite erreur. Mon amendement concerne le texte proposé pour l'article L. 162-15-2 relatif à la reconduction des conventions. En l'état, la reconduction peut être bloquée par un signataire qui ne représente pas la profession concernée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je regrette de ne pas avoir eu jusqu'à présent l'occasion d'intervenir sur l'arbitrage, abordé indirectement par notre collègue Martine Billard. Il soulève des problèmes juridiques de fond.

Depuis le début de la discussion sur l'article 28, on raisonne par analogie, en faisant des parallèles. Ainsi, on a parlé de droit du travail à propos des médecins, alors qu'ils ne sont pas salariés : c'est une profession indépendante qui négocie avec un organisme public. De même, la notion d'arbitrage renvoie à des notions de droit privé, plus qu'à du droit public. Or il y a un véritable problème à confier à une personne privée un arbitrage qui aura des conséquences majeures sur la dépense publique. En qualité de dépositaire légal des prestations maladie des Français, c'est l'assurance maladie qui défend l'intérêt des assurés. Et je ne crois pas qu'un médiateur privé puisse prendre des responsabilités dans ce domaine, surtout dans les conditions prévues par le texte.


L'assurance maladie, dans un tel cadre, devient, me semble-t-il, en quelque sorte dépendante d'un dépositaire de droit privé, ce qui est extrêmement problématique.

M. le président. La parole est à Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, le silence de notre rapporteur est tout à fait choquant, à moins qu'il ne partage le sentiment de Jean Anouilh qui écrivait : « Rien n'est vrai que ce qu'on ne dit pas », ou les propos de Max-Pol Fouchet : « Pour que demeure le secret, nous tairons jusqu'au silence ».

En effet, entre vous, monsieur le rapporteur, qui ne dites rien et vous, monsieur le ministre, qui n'argumentez pas, nous sommes en droit de nous demander à quoi nous servons.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. À rien !

M. Jean-Pierre Brard. Vous avez entendu, comme moi, les arguments de notre collègue, madame Billard. Ils ne manquaient pas de pertinence. Or, vous n'avez aucune réponse à leur opposer. Pourquoi donc, monsieur le rapporteur, refusez-vous l'amendement de Mme Billard ? Je vous connais suffisamment pour savoir que vous avez nécessairement une opinion sur le sujet. « Vous êtes un homme de qualité », comme disait Figaro. Nous aimerions connaître l'opinion qui inspire la substantifique moelle de votre pensée. Vous ne nous ferez pas croire qu'elle n'existe point.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Deux réflexions me viennent à l'esprit : La première : « la parole est d'argent et le silence est d'or ». Quant à la seconde, je n'ai pas besoin d'un livre de citations pour la retrouver. Elle est d'Albert Camus, dans Noces : « Il est des lieux où meurt l'esprit pour que naisse une vérité qui est sa négation même ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8444.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 75 et 3876, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement n° 75.

M. Jean-Pierre Door. En cas de rupture des négociations entre les caisses et les professionnels de santé, nous avons adopté le principe d'un recours à l'arbitrage. Or, si les partenaires ne peuvent s'accorder sur le choix d'un arbitre, il est prévu que ce dernier soit désigné par le premier président de la Cour des comptes. Il me semble préférable que le choix relève d'une instance médicale afin de ne pas s'inscrire dans le seul cadre comptable. C'est la raison pour laquelle l'amendement vise à substituer le président de la Haute autorité de santé au premier président de la Cour des comptes.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 3876 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 75.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ou l'UNCAM et les syndicats s'entendent sur la personnalité de l'arbitre, et ce dernier joue immédiatement son rôle, ou l'UNCAM et les syndicats sont en désaccord, et l'amendement de la commission propose que l'arbitre soit désigné par le président du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. En effet, la Haute autorité de santé doit conserver son caractère purement scientifique et non s'impliquer dans de telles négociations.

M. René Couanau. Très bien !

M. Pierre-Louis Fagniez. C'est logique !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. L'avis de la commission est donc défavorable sur l'amendement n° 75.

M. le président. Monsieur Door, retirez-vous votre amendement ?

M. Jean-Pierre Door. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 75 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3876 ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Je souhaiterais éclairer la décision que nous allons prendre.

Monsieur le rapporteur, le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie a-t-il vocation à être pérenne ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Oui.

M. Claude Évin. Cela méritait d'être précisé !

M. Le Guen m'a assuré en a parte que le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie est inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale. Il serait en effet utile de savoir, monsieur le ministre, si le Haut conseil a un véritable fondement législatif. L'amendement de la commission vise en effet à donner à son président le pouvoir de nommer un arbitre. Or, nous ne savons même pas si le Haut conseil figure dans la loi.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Si vous le voulez, il y sera.(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Claude Évin. Il n'y est donc pas !

M. Jean-Marie Le Guen. Il est dans le PLFSS de l'an dernier.

M. Claude Évin. Je n'en suis pas certain.

La question est importante, puisque la loi donnera un pouvoir au président d'un conseil dont on ignore s'il a vocation à être pérennisé !

M. Jean-Marie Le Guen. Vous rendez-vous compte du pouvoir qu'il aura, monsieur le rapporteur ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie figure dans le PLFSS de l'an dernier.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Non.

M. Claude Évin. Je ne crois pas.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Si. Nous pourrons le vérifier.

M. Gérard Bapt. Vous lui donnez un pouvoir d'arbitrage !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il s'agit de toute façon d'une structure pérenne qui a fait la preuve de son efficacité et de sa solidité. Elle a vocation à jouer, dans son propre domaine, un rôle analogue au conseil d'orientation des retraites. Ceux qui ont participé à nos débats le savent, le Haut conseil a un excellent diagnostic. Son président joue un rôle essentiel dans l'équilibre de l'institution elle-même.

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Évin. Monsieur le rapporteur, nous sommes ici pour faire la loi. Notre rôle n'est pas de porter des appréciations sur la qualité du Haut conseil, encore moins de son président. Si la représentation nationale donne au président du Haut conseil le pouvoir de nommer un arbitre, sur quelles bases législatives se fondera-t-elle ? Il serait de bonne méthode de clarifier ce point dès aujourd'hui plutôt que de prendre le risque d'aller demain au-devant de contentieux, si personne ne s'avérait capable de désigner un arbitre !

Monsieur le ministre, vous nous avez assurés que la novation du projet consistait dans la sortie du règlement conventionnel minimal. Ce dernier a interdit, selon vous, que des conventions aient jamais pu être signées. Selon moi - le débat reste ouvert - telle n'en est pas la raison principale. Les conventions étaient contestées parce que les objectifs sur lesquels elles reposaient, et qui étaient définis par les partenaires conventionnels, ne pouvaient pas être atteints. La contestation s'est alors portée sur les objectifs eux-mêmes. Peut-être le retrait du règlement conventionnel minimal du corps de la loi permettra-t-il la signature de conventions. Personne désormais ne pourra préjuger du résultat des négociations, puisque plus aucune limite ne sera fixée aux partenaires conventionnels.

Si, en raison de la disparition du règlement conventionnel minimal, un arbitre se trouve désigné afin d'établir un projet, il est nécessaire de savoir si, comme le propose le rapporteur, c'est au président du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie qu'il convient de confier la mission de désigner cet arbitre. Indépendamment de l'avis que nous pouvons avoir sur la proposition de M. le rapporteur, vérifions au moins que la procédure envisagée ne pourra pas être contestée dès sa première application.

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. Ce qui me choque, c'est que la création de la Haute autorité de santé inscrite dans le présent projet de loi ne paraisse pas impliquer la disparition du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Claude Évin. Vous voyez bien, monsieur le ministre, que les choses ne sont claires pour personne !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Effectivement !

M. Richard Mallié. Il s'agirait autrement de la création d'un énième conseil !

La suppression du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie implique qu'une nouvelle structure soit à même de désigner cet arbitre. La Haute autorité de santé me semble toute désignée.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je tiens à clarifier les termes du débat.

En premier lieu, le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie figure dans un décret d'octobre 2003. L'amendement de la commission permettra de l'inscrire dans la loi.(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Est-il besoin de l'inscrire dans la loi ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Absolument ! Je vous renvoie aux avis du Conseil d'État, monsieur Évin. Vous souhaitiez connaître ma réponse, la voilà !

En second lieu, de même que nous sommes restés attachés au COR, dont la loi portant réforme des retraites a permis de redéfinir les missions, de même nous restons attachés à l'existence du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, qui donne régulièrement d'excellents rapports et qui porte une vision d'ensemble. Il est important à mes yeux que le Haut conseil puisse continuer à exercer les missions qui sont les siennes, de façon indépendante du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Un excellent amendement de M. le rapporteur nous a conduits à supprimer toute référence à une dimension économique de la Haute autorité de santé. C'est la raison pour laquelle je ne comprends pas pourquoi on chercherait maintenant à confier une fonction d'arbitrage en matière économique et sociale à des personnes nommées en raison de leur qualité d'experts médicaux.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Évidemment !

M. Pierre-Louis Fagniez. Une telle proposition est abandonnée.

M. le président. M. Door a retiré son amendement, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Soit, mais cet amendement n'avait aucune raison d'être !

Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie - et non l'équilibre budgétaire - avait été la star du projet de loi de finances de la sécurité sociale ! C'est peut-être la raison pour laquelle on s'est contenté à l'époque de le créer par décret. En tout état de cause, une instance dont le président assumera la responsabilité de désigner un arbitre qui devra lui-même décider d'un budget de 65 milliards d'euros mériterait mieux qu'une incidente dans un texte de loi ! Il conviendrait que sa création ait un ancrage législatif.

De plus, la question se pose aujourd'hui d'autant moins que personne ne sait si le Haut conseil lui-même ou son président souhaitent assumer une telle responsabilité. Que le Haut conseil demeure une instance à vocation prospective, dans le cadre d'un dialogue entre les partenaires sociaux, c'est une chose, c'en est une autre que d'en faire l'instance qui aura à assumer le règlement arbitral, compte tenu surtout du cadre conflictuel dans lequel s'inscrira un tel rôle. Ce n'est pas une question de personne, son président est ...

M. Claude Évin. Une très grande personnalité !

M. Jean-Marie Le Guen. ...d'une très grande compétence, mais une telle proposition me paraît difficile à mettre en œuvre.

Un troisième élément est d'ordre juridique. L'actuel président est excellent, certes, mais l'importance de la personnalité dans le processus arbitral est telle que nous devons recevoir des garanties sur le mode de nomination du président du haut puisqu'il aura lui-même à choisir cette personnalité. Nous observons actuellement que la nomination du premier président de la Cour des comptes s'avère très politique. Or elle intervient au sein d'une institution qui pèse sur ceux qui la dirigent. Il n'en est malheureusement pas de même du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, qui ne bénéficie pas d'un tel poids historique. Faisons attention à la personnalité de celui qui pourrait un jour être nommé à la présidence du Haut conseil. Le Gouvernement devrait donc y réfléchir à plusieurs fois avant d'accepter la proposition de la commission en la matière.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3876.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8313, troisième rectification.

La parole est à M. le rapporteur pour le soutenir.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8313, troisième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 28, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 28, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 28

M. le président. L'amendement n° 7504, portant article additionnel après l'article 28, n'est pas défendu.


M. le président.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 29.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous abordons une question délicate, que nous avons plutôt bien traitée jusqu'à présent : la présence médicale dans les différents territoires. Cet article concerne, notamment, l'installation des médecins.

Nous devons nous garder de tout angélisme et éviter de faire preuve d'irresponsabilité en nous lançant dans des politiques d'incitation, alors même que nous savons d'ores et déjà qu'elles sont vouées à l'échec.

Les critères financiers ne sont pas déterminants pour l'installation des médecins. Ce sont beaucoup plus les lieux, les conditions de travail et l'environnement qui déterminent la décision de ces derniers.

Nous ne pouvons pas nous fonder sur un discours basé sur des incitations financières, car nous savons que celles-ci ne suffiront pas. Et dire qu'on fera le point en 2010 ou 2012 montre qu'on ne sait pas apprécier la déferlante à laquelle nous sommes confrontés.

J'ajoute que les problèmes liés à l'installation des médecins vont être aggravés par les dispositifs que vous êtes en train de décider. En effet, les remboursements seront de moins en moins importants, notamment en cas de consultation chez les spécialistes. Ceux-ci auront tendance à aller s'installer dans les zones très favorisées où ils soigneront une population à hauts revenus. Et si cela ne suffit pas à leur assurer la rémunération qu'ils attendent, ils participeront à des mouvements revendicatifs, par exemple au moment du renouvellement de la convention. Ils demanderont à la sécurité sociale de les aider dans ce mouvement.

Résultat : nous serons confrontés, dans les zones les plus favorisées, à des demandes de plus en plus nombreuses de financement par l'assurance maladie, et à des demandes de tarifs de plus en plus importants de la part de ces mêmes spécialistes ; dans les zones défavorisées, l'assurance maladie n'aura plus les moyens d'intervenir et les médecins seront beaucoup moins nombreux à s'installer dans la mesure où leurs conditions de travail seront plus difficiles et leur clientèle moins à même de leur assurer la rémunération qu'ils souhaiteraient demander.

Il est donc impensable d'en rester à ce discours sur les incitations et sur un bilan d'ici quatre ou cinq ans. Nous avons une obligation d'agir.

A l'article 1er, nous avons bien avancé puisque l'assurance maladie sera obligée d'intervenir. Elle disposera d'un outil - il y en a bien d'autres - avec les mesures sur les statuts professionnels et sur les remplacements. Avec les médecins remplaçants et intermittents, existera toute une panoplie permettant une véritable offre médicale dans les zones désertifiées.

Le Gouvernement ouvre ici d'autres possibilités, notamment des évolutions de prise en charge des prestations. Nous attendons de connaître un peu mieux ses propositions globales, sachant que nous ne saurions nous satisfaire d'un pur discours d'incitation et d'un bilan dans trois ou quatre ans.

Il faut intervenir maintenant, pas uniquement sur le plan financier, mais par une véritable action sur l'offre. C'est ce qui a été proposé à l'article 1er. Nous attendons de savoir comment le Gouvernement entend réagir à la logique qui avait alors été enclenchée.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. L'article 29 du projet de loi relatif à l'assurance maladie a pour objectif de lutter contre les disparités régionales en matière de soins, en élargissant le champs des conventions, afin d'élargir la palette des outils dont disposent les parties conventionnelles.

En effet, de trop nombreuses zones souffrent de carences, tant au niveau de l'infrastructure médicale que du personnel soignant. Et ce n'est un secret pour personne que ce sont les régions rurales et celles frappées par la crise économique, en somme celles qui requièrent un accès aux soins plus important, qui en souffrent le plus.

Ces dernières années, les disparités territoriales en matière de soins se sont accentuées, laissant apparaître très nettement sur la carte de France un axe de la surmortalité, allant de la Picardie à l'Alsace, ainsi qu'une « diagonale du vide », selon l'expression des géographes.

Cette situation ne fait qu'empirer. Et les conditions se dégradent tant pour les patients que pour le personnel médical, littéralement assailli par une forte demande.

Notons au passage que l'État s'émeut au moment où la désertification concerne les médecins généralistes, alors que depuis plus d'une décennie, dans de nombreuses régions rurales, on ne trouve plus guère de médecins spécialistes ; cela amena les généralistes à augmenter - dans l'indifférence générale - leur cadence de travail pour pallier cette raréfaction.

II est urgent d'agir en guidant l'installation des médecins, afin d'équilibrer l'offre médicale sur l'ensemble du territoire et garantir à tous un accès égal aux soins - notion qui a disparu.

Vous proposez, dans cet article, que le conventionnement des médecins définisse également les modalités d'aides à l'installation. On y lit en effet : « les caisses d'assurance maladie peuvent participer au financement des cotisations dues par les professionnels de santé au titre de leurs honoraires, (...) la convention fixe l'assiette et le niveau de cette participation et les modalités de sa modulation, notamment en fonction du lieu d'installation ou d'exercice ».

A première vue, l'idée est séduisante. Mais il convient, toutefois, de prendre du recul afin de considérer la situation dans son ensemble.

Comme nous vous l'avons déjà rappelé à plusieurs reprises, monsieur le ministre, lutter contre la disparité régionale en matière de santé sous le seul prisme du financement est loin d'être suffisant. En effet, malgré les incitations fiscales, les médecins généralistes rechignent toujours à s'installer dans les zones franches. II faut donc mener un combat global qui passe, notamment, par la réhabilitation économique de ces régions.

Cela dit, le problème de la sous-représentation des médecins - dans les régions rurales, par exemple - n'est pas seulement d'ordre économique ; il est de nature culturelle. Les médecins, notamment les plus jeunes, hésitent à s'installer dans les campagnes ou les zones frappées par la crise économique. L'isolement, la disparition croissante des services publics, la disparition progressive des emplois sont autant de raisons qui réduisent l'attractivité de ces régions.

Nous aurons l'occasion de revenir, lors de l'examen des amendements, sur la nécessité de mener un combat d'envergure et audacieux pour lutter contre les disparités sanitaires en s'appuyant, par exemple, sur les conférences régionales de santé, qui auront pour mission d'évaluer les objectifs de santé publique à mettre en oeuvre.

Cependant, cet article ne se borne pas à mettre en place des mesures inefficaces. Il menace également le système de convention.

Actuellement, afin d'inciter les médecins à adhérer la convention médicale, l'assurance maladie prend déjà en charge les deux tiers des cotisations de l'allocation supplémentaire vieillesse, ainsi qu'une partie des cotisations d'assurance maladie et vieillesse.

L'article innove seulement quant à l'assiette et au taux de prise en charge. Or cette prise en charge est motivée non pas par le principe du conventionnement, mais par des critères géographiques. Comme il est indiqué dans l'article, « les caisses d'assurance maladie participent aux financement des cotisations (...) en fonction du lieu d'installation ou d'exercice ».

M. le président. Merci, monsieur Gremetz...

M. Maxime Gremetz. Je termine, monsieur le président.

En somme, l'effort qui sera fait pour attirer des médecins conventionnés dépendra directement des sacrifices que seront prêtes à consentir les caisses d'assurance maladie.

Nous tenons à rappeler que le conventionnement n'est pas destiné à la médecine du pauvre ou des exclus. La convention médicale est le garant du pacte social qui assure à l'ensemble des assurés sociaux un accès égal aux soins.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Je voudrais souligner, à l'occasion de cet article, combien la présence des médecins est aujourd'hui un des enjeux principaux de l'aménagement du territoire.

Dans les zones rurales les plus défavorisées de notre pays, le problème le plus souvent évoqué par les populations comme par les professionnels de santé est bien celui de la présence, ou plus exactement de l'absence de médecins.

A dire vrai, nous sommes maintenant à un tournant : la présence de certaines générations de médecins, qui assuraient traditionnellement le service dans certains cantons, est sur le point de s'épuiser ; certains professionnels, plus jeunes, sont à la limite de la démotivation car ils ne tiennent plus dans les circonstances actuelles. Très rapidement, de véritables déserts médicaux risquent de se créer dans notre pays.

On a choisi, dans ce projet de loi, de recourir à l'incitation, à un niveau que nous n'avons jamais connu jusqu'à présent. La question n'était pas restée inexplorée, mais ce texte comporte des dispositifs nouveaux. Personnellement, je ne suis pas sûr qu'ils suffiront.

On a pris conscience des risques de désertification, constaté le degré de démotivation d'un grand nombre de professionnels et la difficulté à attirer les médecins sur certains territoires. Mais il est possible, dans une période intermédiaire, que les incitations aient du mal à produire leur plein effet. Pour autant, je pense qu'elles valent la peine d'être explorées.

Il me semble difficile de dire aujourd'hui avec certitude si ces mesures suffiront ou pas. Mais ouvrir un champ d'incitations très puissantes, c'est déjà, à l'égard de la profession médicale, un moyen nouveau d'intervention.

De toutes façons, il ne serait ni raisonnable ni efficace de se lancer dans un dispositif de contraintes, qui ne fonctionnerait pas. Reste qu'il faudra faire le point d'ici quelques années. Car les nécessités de l'aménagement obligeront peut-être à aller au-delà du dispositif proposé.

Par souci d'efficacité et pour accompagner l'évolution des mentalités, qui se fait à son rythme, les dispositions proposées dans le texte méritent d'être soutenues. Elles constituent une réponse aussi adaptée que possible, compte tenu à la fois des besoins et du comportement des différents acteurs.

Dans quelques années, nous verrons. Ces dispositions auront produit les effets attendus... ou non. Il y aurait alors un enjeu d'intérêt national à assurer une présence sanitaire sur tout le territoire. Nous résoudrons ces questions au moment où il faudra le faire. Aujourd'hui, profitons du projet.

M. le président. La parole est à M. Claude Évin.

M. Claude Evin. Les préoccupations que vient d'exprimer M. Mariton sont justifiées ; elles avaient été évoquées lors de l'examen de plusieurs des articles que nous avons examinés, notamment dès l'article 1er.

Si on veut s'assurer d'une équitable répartition de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire, on ne peut pas se satisfaire du dispositif préconisé aujourd'hui, qui renvoie à la négociation conventionnelle, et à elle seule, le soin d'intervenir, par des aides, notamment par la prise en charge de cotisations ou d'aides spécifiques décidées dans la convention, pour résoudre le problème que nous déplorons tous, à savoir le développement d'un certain nombre de déserts médicaux.

Nous ne pourrons trouver de réponses efficaces et pérennes que si nous adoptons une démarche permettant d'appréhender l'ensemble de l'offre de soins, et pas seulement l'offre de soins libérale et ambulatoire.

Comme le disait M. Le Guen et comme le laissait entendre M. Mariton, on pourra accorder toutes les aides que l'on veut pour inciter des médecins libéraux à venir s'installer dans les zones où la population est en train de partir, mais le problème ne sera pas règlé.


Nous n'y parviendrons que par une organisation de l'offre de soins assurant à tous les habitants, non pas nécessairement un médecin dans chaque canton, mais la garantie, quel que soit le lieu où ils résident, d'avoir accès à des soins de qualité, gradués en fonction de leurs besoins. Tel est bien l'objectif.

Si cela se traduit par l'installation d'un médecin généraliste, je ne peux qu'être satisfait. Mais notre démarche doit s'appuyer sur un principe de réalité : il faut permettre aux patients, en particulier aux personnes âgées vivant dans des cantons ruraux, un accès rapide aux soins, y compris à des services d'urgence, en liaison avec des hôpitaux locaux ou des hôpitaux généraux, voire avec le CHU lorsque leur état de santé le nécessite. Cela doit nous conduire à une organisation différente de l'offre de soins.

En ce sens, la proposition qui nous est faite peut avoir un aspect sympathique. Après tout, pourquoi pas ? Elle va un peu plus loin que ce qui avait été mis en place jusqu'à maintenant, mais elle n'est pas suffisante pour répondre à la préoccupation d'accessibilité aux soins.

Cela nécessite - mais nous y reviendrons lorsque nous aborderons les articles 36 et 37 - qu'au niveau régional, une entité assure le pilotage de l'offre de soins. Or rien n'est proposé pour que l'offre soins, même ambulatoires, intègre les schémas régionaux d'organisation sanitaire. Pourtant, il nous semble utile que l'appréciation du besoin soit inscrite dans le schéma régional d'organisation sanitaire. Nous le proposions, mais, malheureusement, nos amendements sont tombés sous le coup de l'article 40, mais nous y reviendrons pour en donner la philosophie

Ce pilotage ne devrait pas être assuré uniquement par l'URCAM, mais en liaison avec l'agence régionale d'hospitalisation, dans le cadre d'une agence régionale de santé. C'est ainsi que l'on répondra au problème de la désertification de l'offre de soins. Malheureusement, les propositions contenues dans l'article 29 sont loin de répondre à cette ambition.

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. Nous sommes ici dans l'ordre de la nécessité, mais aussi de la modestie tant le sujet est complexe. Le métier de médecin subit une transformation culturelle pour de multiples raisons, notamment l'évolution démographique - qui n'est pas suffisamment prise en compte - et la féminisation de la profession, qui change les comportements d'un métier extrêmement difficile.

Je suis l'élu d'une région où il faut parfois attendre huit à douze mois pour consulter un spécialiste et où les médecins libéraux disparaissent progressivement, sans parler de la situation en zone rurale qui devient catastrophique.

Les propositions de l'article 29 marquent un petit pas en avant, mais je ne pense pas que l'incitation, même si elle n'est pas inutile, soit de nature à résoudre ce problème.

Nous avons besoin d'une vision régionale globale de l'offre de soins, qui peut conduire à une péréquation dans le financement hospitalier. Cette péréquation, qui a malheureusement été supprimée, permettait de corriger et d'améliorer l'offre de soins. Ainsi, elle s'appliquait à la Picardie, au Nord-Pas-de-Calais et au Poitou-Charentes. Le Gouvernement a commis une grossière erreur en la supprimant. De même, les maisons de santé rencontrent des difficultés d'implantation.

Puisque le Haut conseil vient d'être pérennisé, selon une approche législative qui me paraît bizarre et probablement insuffisante, ne faudrait-il pas engager ce débat avec les professionnels de santé sur la base d'une carte de la démographie médicale, afin de connaître leurs propositions ?

Nous n'y arrivons pas à coup sûr par l'incitation. Il faut inventer d'autres méthodes pour répondre à la demande de soins. C'est une nécessité, mais cela implique une vision globale, qui aurait pu être celle de l'agence régionale de santé, si on lui avait donné les moyens dont elle avait besoin.

L'article 29 est tout à fait insuffisant et ne répond pas à ce grave problème.

M. le président. Le Gouvernement répondra aux intervenants après la présentation des amendements de suppression de l'article 29.

Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 1696 à 1707, tendant à la suppression de l'article 29.

La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, mes chers collègues, ces amendements visent à supprimer l'article 29.

Les dispositions prévues dans cet article ont pour objectif de lutter contre les disparités sanitaires. Or, comme nous l'avons déjà exposé, il apparaît clairement que la seule incitation financière est insuffisante.

En effet, il ne faut pas perdre de vue que l'incitation financière vise notamment les jeunes médecins. Or, en l'absence de politique ambitieuse de réhabilitation économique, de lutte contre le désenclavement des campagnes, toutes les tentatives seront vaines et risquent, de plus, d'entraîner leur cortège de rancœurs et de frustrations.

Ces raisons pourraient déjà à elles seules nous amener à refuser cet article dont les dispositions sont inefficaces. Mais ce n'est pas tout. En effet, la philosophie de ce texte tend à soumettre le conventionnement médical à des critères géographiques. Jamais jusqu'à présent, la prise en charge des cotisations sociales par les caisses d'assurance maladie n'a été le moyen d'inciter les médecins libéraux à se conventionner.

Cependant, par la clause présente dans cet article, le conventionnement n'apparaîtra plus motivé par des principes d'universalité et d'égalité d'accès aux soins. En effet, les régions où l'on va tenter d'attirer des médecins libéraux, sont celles qui seront frappées d'un « manque » - manque d'infrastructures ou manque de personnel médical. En tant que « victimes » elles auront donc droit de faire des efforts supplémentaires pour attirer des médecins conventionnés. Mais qu'en sera-t-il des autres régions ?

Face à la pénurie programmée du personnel médical, due à un numerus clausus inepte, le conventionnement risque de ne plus être aussi intéressant. En effet, les assurés sociaux les plus aisés préféreront payer davantage, plutôt que de supporter les jours d'attente supplémentaires liés à la pénurie de personnel.

Dès lors, les régions manquant de médecins entreront en compétition pour prendre en charge des cotisations. Et celles qui capituleront les premières verront augmenter le nombre de médecins en secteur 2.

Cette menace du système conventionnel est bien évidemment inacceptable, car elle remet en cause le principe d'universalité de la sécurité sociale, alors que déjà près de 15 % des assurés sociaux renoncent à se soigner convenablement, faute de revenus suffisants pour supporter la totalité des coûts provoqués par les dépenses de soins.

Ainsi, loin d'améliorer la santé des assurés sociaux des régions qui souffrent de carences de personnel, cet article risque de subordonner le secteur 1 à des critères géographiques. Comme il ne faut pas séparer cet article des autres, nous voyons bien comment cette réforme tend à instituer une médecine à deux vitesses.

C'est pour cette raison, que le groupe des député-e-s communistes et républicains demande le retrait de l'article 29 qui, loin de résoudre les disparités sanitaires, constitue une menace potentielle au système de conventionnement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. L'article 29 a beaucoup de sens et il ne fait pas du tout éclater le principe d'un conventionnement des professionnels de santé en secteur 1.

Au reste, l'amendement n° 3877 de la commission lèvera toute ambiguïté en précisant que la convention fixe les conditions dans lesquelles les caisses d'assurance maladie « participent » au financement des cotisations sociales des médecins et non pas « peuvent participer », comme le prévoit le projet de loi.

De même, il est faux, madame Jambu, de dire que cette prise en charge des cotisations sociales ne sera plus conditionnée que par l'installation dans un lieu géographique d'exercice. L'article 29 prévoit en effet que « la convention fixe l'assiette et le niveau de cette participation, et les modalités de sa modulation, notamment en fonction du lieu d'installation ou d'exercice ; ». L'emploi de l'adverbe « notamment » montre que ce n'est pas le seul critère de prise en charge des cotisations sociales des médecins conventionnés.

Enfin, le sénateur Descours, dans son rapport relatif à la permanence des soins, indique que « compte tenu de la pluralité des situations et des professions, une réponse unique n'est pas envisageable. En conséquence, différents instruments d'aide à l'installation doivent être développés », à l'image d'une fusée à plusieurs étages, pour que ces aides soient efficaces et attractives. C'est tout l'intérêt du dispositif conventionnel prévu par cet article.

Il ajoute que « des solutions locales, ponctuelles et adaptées apparaissent plus pertinentes qu'une réponse unique et globale. En outre, ces solutions ne doivent pas être envisagées isolément mais emboîtées les unes dans les autres, à l'image d'une fusée à plusieurs étages, chaque étage ne pouvant donner sa pleine efficacité sans les autres, pour influencer sensiblement l'installation de ces professionnels. »

D'où la nécessité de donner aux partenaires conventionnels de nouveaux outils pour favoriser une répartition de l'offre de soins libérale, plus homogène sur l'ensemble du territoire.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces amendements de suppression de l'article.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Le Gouvernement est évidemment défavorable à ces amendements de suppression.

Monsieur le président, vous avez invité le Gouvernement à profiter de l'examen de ces amendements pour exprimer sa position sur l'article ; je vais donc le faire.

Au groupe des député-e-s communistes et républicains, qui se sont exprimés par l'entremise de Mme Jambu et de M. Gremetz, je répondrai que nous sommes d'accord sur le fait que l'installation des médecins s'inscrit dans le cadre plus global de l'aménagement du territoire, mais cela ne résume pas la dimension médicale du dispositif. Nous parlons de dispositifs qui concernent l'assurance maladie. Le texte apporte des réponses spécifiques sur le développement des territoires ruraux.

Sur les rapports entre l'assurance maladie et les professionnels de santé - et je réponds par là même également aux intervenants du groupe socialiste -, je serais tenté de vous renvoyer à l'intervention de M. Mariton dont la conception est exactement celle du Gouvernement. La question ne repose pas sur la seule dimension financière, même si pour les professionnels de santé la rémunération de l'acte médical est un facteur essentiel parce que les conditions de vie sont liées aux conditions de travail.

Le Gouvernement, sur ce sujet éminemment difficile, fait des propositions et essaye d'avancer. À court terme, l'incitation nous paraît la meilleure réponse. Deux problèmes se posent : la désorganisation à brève échéance de l'offre de soins et la nécessaire concertation avec les étudiants en médecine.

Si nous changions complètement les règles du jeu, nous romprions le contrat passé avec celles et ceux qui ont fait le choix de s'engager dans la profession sur la base du système actuel. Donc nous l'assumons.


L'incitation est aujourd'hui la meilleure des solutions, mais si elle ne donne pas les résultats attendus, c'est peut-être la dernière fois que nous y recourons.

J'ai noté avec satisfaction que la méthode choisie par le Gouvernement n'est remise en cause sur aucun des bancs de cette assemblée. Au-delà des principes généraux que nous avons réaffirmés et des amendements renforçant la place de l'assurance maladie qui ont été votés au début de la discussion, les solutions sont à rechercher du côté de la convention, de l'assurance maladie et des professionnels de santé.

Pour l'instant, il ne me semble pas que nous ayons encore vraiment laissé à l'incitation le temps de faire ses preuves. En effet, si certaines mesures sont apparues dans le PLFSS de 2001, ce n'est pas avant le début de 2003 que, compte tenu de la lenteur de certains décrets d'application, l'incitation a vu le jour. Le peu de recul dont nous disposons - à peine plus d'un an - ne nous permet donc pas d'avoir une vue assez claire de la question.

En matière de démographie médicale, l'évaluation des dispositifs prévue par l'amendement du rapporteur, loin d'être renvoyée aux calendes grecques, sera très prochainement mise en place et nous éclairera. Si les résultats ne sont pas au rendez-vous, nous devrons tous prendre nos responsabilités - les pouvoirs publics aussi bien que l'assurance maladie et les professionnels de santé. Pour faire face à tous ces problèmes de disparité territoriale, et donc d'égalité dans l'accès aux soins, je demanderai aux parlementaires de suivre le Gouvernement dans la voie de l'incitation, qui semble être la meilleure à court terme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous avons, à propos des zones de désertification, avancé des solutions qui ne consistaient pas seulement en incitations, mais aussi en obligations. Aucun des partisans des mesures d'incitation ne pense réellement qu'elles suffiront. Or, nous savons qu'il est indispensable d'agir pour les zones de désertification.

Nous nous sommes, certes, donné quelques instruments, mais en renvoyant, pour le reste, à la convention, nous faisons encore peser sur le syndicalisme médical des tâches qui ne sont pas les siennes. Quoi qu'on en dise, ce n'est pas aux syndicalistes médicaux, qui ont pour fonction de défendre des conceptions générales de leur profession et les intérêts légitimes des professionnels, qu'il revient d'aborder le problème de l'organisation des soins.

Tout comme les zones désertifiées aujourd'hui, les zones de surdensité médicale, que personne n'évoque, poseront un jour problème, et il est faux de dire aux jeunes médecins que ce ne sera pas le cas. Il ne s'agit pas d'imposer un rationnement à l'installation, mais nous devons dès maintenant interpeller les jeunes médecins à cet égard. Nous avons proposé diverses mesures qui se situent, en quelque sorte, à la marge du problème, mais qui ont pour objet d'envoyer un signal.

Il conviendrait, notamment, de fermer les secteurs à honoraires libres dans les zones à haute densité médicale, où les spécialistes sont déjà trop nombreux. Sinon, demain, le syndicalisme médical demandera à l'assurance maladie une codification des actes et une absence de contrôle qui assurent aux médecins installés dans ces zones un certain niveau de revenus. On demandera donc à l'assurance maladie d'abonder indéfiniment les revenus de professionnels qui seront en trop grand nombre ! Ce problème n'est d'ailleurs guère différent de celui qui se pose aujourd'hui : un médecin généraliste installé dans une zone désertifiée a des revenus supérieurs de 50 % à 70 % à ceux d'un professionnel installé dans une zone à haute densité médicale.

Nous devons interpeller les jeunes médecins et leur tenir un langage de vérité pour les mettre en garde contre les démagogues qui leur disent qu'on ne touchera jamais aux conditions d'installation dans les zones à haute densité médicale.

M. Richard Mallié. Surtout si ce sont les socialistes qui le disent !

M. Jean-Marie Le Guen. Une régulation est inévitable, parce que les ressources de l'assurance maladie ne suivront pas. Moins le tarif de l'assurance maladie remboursera l'accès réel aux soins, plus grandes seront les difficultés. Nous avons le devoir de le dire.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Nous sommes tous d'accord sur le constat. La question est de savoir quels remèdes adopter. Cette situation ne peut pas durer, que ce soit pour les populations des régions concernées ou pour les médecins. Pour ces derniers, le problème n'est pas d'ordre financier, mais il tient à des conditions de travail épouvantables, car ils doivent parcourir chaque jour des centaines de kilomètres pour se rendre auprès de leurs malades. Quant à la population, sa sécurité sanitaire est loin d'être assurée.

En matière financière, le projet de loi propose d'augmenter les exonérations de cotisations sociales, au risque de favoriser le secteur 2 au détriment du secteur 1 - nous avons déjà exprimé des craintes à cet égard.

M. le président. Monsieur Gremetz, veuillez conclure.

M. Maxime Gremetz. Je suis persuadé - et j'observe que cette idée progresse - que, compte tenu des grandes disparités qui existent, nous serons contraints de prendre des mesures pour obliger les médecins à s'installer à tel ou tel endroit. Dans dix ans, la situation se sera encore dégradée.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 1696 à 1707.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4642 à 4653, visant à supprimer le I de l'article 29.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour soutenir ces amendements.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements nous donnent l'occasion de prolonger cette intéressante et importante discussion.

Monsieur le secrétaire d'État, comme de nombreux collègues, au-delà même des bancs de l'opposition, je ne souscris pas à votre idée selon laquelle l'aide serait le seul remède, même si vous admettez aussi qu'il faudra aller plus loin. Pourquoi attendre un hypothétique retour sur expérience ? Il faut prendre dès maintenant la mesure du problème que représente la disparité de l'accès aux soins dans notre pays, qui entraîne de véritables souffrances.

Je voudrais évoquer une expérience personnelle : lorsque votre petite-fille est malade un samedi à trois heures de l'après-midi, et faute d'un généraliste qui pourrait fort bien la soigner, est-il acceptable qu'il faille la conduire aux urgences de l'hôpital de Chauny pour qu'elle soit examinée, trois heures plus tard, par un médecin venu de Lille ? Il y a cinquante ans, quand j'étais malade, mon père appelait le médecin, et le médecin venait !

M. Jacques Godfrain. C'était avant les 35 heures ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Desallangre. Arrêtez de parler des 35 heures ! Changez donc de disque ! Il ne s'agit pas de désigner des coupables, ni de se jeter des accusations au visage, mais de réfléchir ensemble !

M. Maxime Gremetz. Sur ce sujet, le Président de la République réfléchit mieux que sa majorité !

M. Yves Censi. Ne soyez pas de mauvaise foi !

M. Jacques Desallangre. Pour lutter contre les disparités territoriales, le projet de loi propose d'offrir au personnel médical des incitations financières. Je vous livrerai, à cet égard, une autre expérience personnelle : lors d'une récente campagne électorale, j'ai rencontré, comme mes concurrents, des jeunes médecins de l'Aisne. Je leur ai naïvement demandé de quelles aides ils auraient besoin pour s'installer, et ils m'ont répondu, parfois très brutalement, qu'ils n'avaient pas besoin d'aides, puisque leurs femmes ne voulaient pas s'installer à la campagne, que cette installation serait difficile à cause de leurs enfants, et qu'ils ne s'y installeraient donc pas ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ce langage, qu'on n'a peut-être pas l'habitude d'entendre ici, est celui de la vérité. C'est celui de ce que vous appelez la France d'en bas !

L'enjeu mérite le volontarisme politique. L'État est garant de l'intérêt général : il doit donc réfléchir dès maintenant à une nouvelle organisation de la santé sur notre territoire, réaliste et ambitieuse, sans délégation facile de pouvoirs aux médecins, sur qui il devra agir.

Dans un pays de l'Union européenne très proche de nous, on demande aux jeunes médecins d'accomplir leurs premières années d'exercice dans les secteurs qu'on leur désigne. Pourquoi, quand on veut exercer cette belle profession de médecin, ne commencerait-on pas par faire un sacrifice ? Le jeu en vaut la chandelle !

M. Yves Censi. C'est une solution de type soviétique !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4642 à 4653.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 7506 n'est pas défendu.

Je suis saisi d'un amendement n° 89.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Door. Le raisonnement qui s'applique à cet amendement n° 89 vaut également pour les amendements nos 88, 90, 91, 92, 93 et 94, car ils sont tous liés.

À propos des dispositifs d'aide à l'installation des médecins dans les zones difficiles, sans doute avons-nous tous reçu les propositions de l'intersyndicale des internes en médecine générale, qui fournissent d'excellentes pistes - déjà reprises, pour la plupart, dans le PLFSS de l'an dernier et dans ce projet de loi.

Pour le moment, les futurs médecins généralistes ne souhaitent pas de mesures coercitives pour l'installation dans les zones difficiles, mais demandent la mise en œuvre effective des mesures positives d'aide à l'installation. Un nombre non négligeable d'entre eux est intéressé par l'exercice dans ces zones. Parmi les pistes proposées, on peut citer notamment les maisons de soins, l'optimisation des exercices et les mesures favorisant l'informatisation et facilitant l'installation.

Le projet du Gouvernement évoque la participation des caisses au financement des cotisations dues par les professionnels de santé. La prise en charge de ces cotisations sociales ne doit être liée qu'à la contrepartie consistant pour le médecin à percevoir des honoraires opposables. Ce dispositif doit demeurer garanti par la loi et ne doit pas pouvoir être remis en cause par les caisses.


L'aide à l'installation en zone déficitaire doit se traduire non pas par une modulation de la prise en charge, mais par une minoration de la cotisation payée par le médecin, car la même prise en charge pour tous doit être maintenue.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. J'ai bien compris l'argumentation de M. Door, mais je ne vois pas en quoi celle-ci serait contradictoire avec la rédaction actuelle de l'article 29.

Je ne reviendrai pas sur les recommandations du sénateur Charles Descours en matière de démographie médicale, mais il me semble essentiel de pouvoir définir dans la convention les dispositifs d'aides à l'installation dans les zones sous-médicalisées. Les conditions d'attribution de ces aides pourront faire l'objet d'adaptation régionale par l'URCAM, après concertation avec les professionnels de santé. Au stade des incitations, le 4° du I de cet article doit être maintenu.

Par ailleurs, c'est au 5° du I de l'article 29 qu'il est fait référence aux cotisations sociales.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Door, pour des raisons juridiques, tenant à des dispositions fiscales et surtout sociales, ce que vous proposez est, hélas, irréalisable, car ces cotisations sont porteuses de droits.

Qui plus est, pour les motifs expliqués à l'instant par le rapporteur, notre avis ne peut qu'être défavorable. Je vous demande donc de retirer cet amendement.

M. le président. Monsieur Door, retirez-vous votre amendement ?

M. Jean-Pierre Door. Oui, monsieur le président.

M. le président. l'amendement n° 89 est retiré.

L'amendement n° 62 rectifié n'est pas défendu.

M. Maxime Gremetz. Je le reprends, monsieur le président ! C'est un excellent amendement de M. Guillaume !

M. le président. Vous avez donc la parole, monsieur Gremetz, pour soutenir l'amendement n° 62 rectifié, que vous avez repris.

M. Maxime Gremetz. Cet amendement reprend ce que nous avons proposé. Il n'y a donc pas de raison, quand un collègue de l'autre côté de l'hémicycle fait une bonne proposition, que nous ne la défendions pas. Nous sommes très ouverts. (Sourires.) C'est l'intérêt général qui compte pour nous et non pas l'intérêt bassement matériel.

L'amendement propose que, pour l'implantation des médecins, ils soit délivré des licences en relation directe avec l'importance de la population. » En effet, afin de favoriser l'établissement des médecins en milieu rural et d'éviter la surpopulation médicale en ville, source d'inflation des actes médicaux, il convient d'adopter pour les médecins généralistes une règle similaire à celle mise en œuvre pour les pharmacies, dont l'ouverture est conditionnée par le nombre d'habitants. Cela permettra de procéder à leur meilleure répartition sur le territoire national et de favoriser les implantations en milieu rural.

C'est pourquoi, sur cet amendement, je demande un scrutin public. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 62 rectifié, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, je demande une courte suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 62 rectifié ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Le système de régulation proposé par M. Guillaume est comparable à celui qui régit la création des officines de pharmacie. Depuis plus de soixante ans, les pharmaciens déterminent eux-mêmes leurs règles d'installation. L'exercice libéral étant foncièrement différent, il est impossible de lui appliquer les mêmes règles.

De plus, l'adoption de cet amendement serait en contradiction avec l'article 29, dans lequel nous avons décidé de jouer la carte de l'incitation. Cet amendement relève également d'une logique différente de celle de l'exercice libérale de la médecine, qui sous-tend ce projet de modernisation de l'assurance maladie. Nous avons souvent répété qu'il était indispensable d'évaluer les nouveaux dispositifs mis en place ; plusieurs amendements du rapporteur vont d'ailleurs dans ce sens. Nous ne pouvons donc accepter celui-ci.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 62 rectifié.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement n° 62 rectifié :

              Nombre de votants 68

              Nombre de suffrages exprimés 61

              Majorité absolue 31

        Pour l'adoption 10

        Contre 51

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Rappels au règlement

M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Marie Le Guen. Nombreux sont ceux qui, y compris à l'extérieur de cet hémicycle, se posent des questions sur l'organisation des travaux du Parlement dans cette session tout à fait extraordinaire quant à nos méthodes de travail et quant à la surabondance des textes déposés.

M. Hervé Novelli. Et des amendements !

M. Jean-Marie Le Guen. Le groupe socialiste ne souhaite pas que le débat sur l'assurance maladie soit l'otage d'autres sujets. Depuis le début, notre groupe a travaillé sérieusement et sans précipitation, en restant au plus près de la discussion sur l'avenir du système de santé et de l'assurance maladie. Monsieur le président, vous l'avez reconnu, et tous ceux qui ont assisté à nos débats ont pu le constater.

Notre position est donc claire : nous ne voulons ni bâcler, ni bloquer ce débat. Étant donné la quantité de sujets abordés, nous ne pourrions terminer rapidement ce débat sans renoncer aux exigences de notre travail de parlementaire. Les membres du groupe socialiste sont ici pour défendre des valeurs, des conceptions et pour s'opposer au texte du Gouvernement quand ils le pensent nécessaire. Il ne s'agit pas d'autre chose, et je tenais à le rappeler clairement avant la tenue de la conférence des présidents à dix-neuf heures.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.


M. Maxime Gremetz
.
Pour tout dire, je ne vois pas l'objet de cette discussion, mais enfin bref. Puisqu'il faut réaffirmer une position, je répète que la nôtre n'a pas changé. Nous avons fait des propositions, nous ne sommes pas d'accord avec cette réforme, nous combattrons tout ce qui est nocif, nous avons un contre-projet qui se traduit par des amendements et je répète ce que je n'ai cessé de dire : nous défendrons tous nos amendements.

M. le président. Nous en avons conscience, monsieur Gremetz. Et vous défendez même des amendements que vous n'avez pas déposés. (Sourires.)

Reprise de la discussion

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8314.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Cet amendement, qui a été adopté par la commission, élargit le champ de l'article aux centres de santé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8314.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Les amendements nos 8201 rectifié, 8202 et 8203 ne sont pas défendus.

Je suis saisi d'un amendement n° 7580.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. Je sais que notre rapporteur n'aime pas les rapports, mais je propose que soit dressé, dans un délai de trois ans à compter de la publication de la loi, un bilan des dispositifs prévus par l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale. Cette évaluation ferait l'objet d'un débat au Parlement.

J'ai bien entendu ce que disait tout à l'heure M. le secrétaire d'État : compte tenu des retards dans la publication des décrets d'application de la loi de financement de la sécurité sociale de 2001, les dispositifs d'incitation ne sont en place que depuis un an. Peut-être faut-il donc donner du temps au temps avant de voir si ces dispositifs sont réellement incitatifs. Cela étant, je crois que nous devons prendre nos responsabilités et prévoir de faire le point à un moment donné pour tirer les conséquences de ce qui aura été constaté dans la pratique. Soit les dispositifs auront été réellement incitatifs, et alors nous aurons réglé la question de l'installation dans les parties de notre territoire qui sont aujourd'hui confrontées à un manque de médecins ; soit ils auront été insuffisants, et il faudra alors prévoir d'autres dispositifs, car il ne faut pas laisser cette question trop longtemps sans réponse. En effet, plus on laisse passer les années, plus il devient difficile de mettre en œuvre des solutions rapides.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Votre idée est bonne, madame Billard, mais je vous renvoie à l'amendement n° 3878, deuxième rectification, que la commission a adopté à l'initiative de Mme Fraysse.

M. Jacques Desallangre. Tout à fait ! Nous voterons d'ailleurs cet amendement.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il prévoit des évaluations régionales annuelles et une évaluation nationale adressée au Parlement dans un délai maximum de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi. Il me semble donc que votre amendement est satisfait.

M. le président. Étant donné que votre amendement est satisfait, madame Billard, ne voulez-vous pas le retirer ?

Mme Martine Billard. Si, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 7580 est retiré.

Les amendements nos 7968 et 8204 ne sont pas défendus.

Je suis saisi d'un amendement n° 3877.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Cet amendement vise à lever toute ambiguïté : il appartient bien à la convention nationale de déterminer les modalités de prise en charge par les caisses d'assurance maladie des cotisations sociales dues par les professionnels de santé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3877.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8315.

Il s'agit d'un amendement de précision déposé par la commission.

Le Gouvernement y est favorable ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Oui.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8315.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 88.

La parole est à M. Door, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement est retiré, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 88 est retiré.

L'amendement n° 7505 n'est pas défendu.

Je suis saisi de quatorze amendements pouvant être soumis à une discussion commune. Il s'agit de l'amendement n° 3878, deuxième rectification, des amendements identiques nos 1708 à 1719, et de l'amendement n° 7841.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 3878, deuxième rectification.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. C'est l'amendement auquel je faisais allusion tout à l'heure. Il prévoit des évaluations régionales annuelles suivies d'une évaluation nationale adressée au Parlement trois ans après la promulgation de la loi. La commission a adopté cet excellent amendement de Mme Fraysse. Je suggère donc au groupe communiste de retirer ses douze amendements identiques.

M. le président. Retirez-vous ces amendements, monsieur Desallangre ?

M. Jacques Desallangre. Oui, nous retirons ces amendements qui allaient dans le même sens que l'amendement adopté par la commission, auquel nous sommes favorables.

Nous pensons qu'une consultation régulière permettra de cerner les enjeux ainsi que les spécificités régionales, mais également de coordonner cette lutte avec les acteurs régionaux. Nous espérons que cette disposition permettra de déterminer de manière efficace les actions qui iront dans le sens d'une homogénéisation de l'accès aux soins. Nous nous associons également à la demande de Mme Billard de rapporter ces évaluations au Parlement, mais de manière annuelle.

Nous espérons donc que ces évaluations pèseront de tout leur poids lorsque des décisions devront être prises, afin de sauvegarder le système de la convention médicale, garant de l'universalité et de l'égalité d'accès aux soins.

M. le président. Les amendements identiques nos 1708 à 1719 sont retirés.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour soutenir l'amendement n° 7841. Mais il propose la même chose que celui de la commission, n'est-ce pas ?

M. Jean-Marie Le Guen. Oui et non. Cet amendement insiste sur la nécessité de donner des responsabilités à la conférence régionale de santé, qui avait disparu, que nous avons réintroduite dans le texte relatif à la santé publique et qui était un élément important de la démocratie sanitaire.

M. le président. Cet amendement n'est donc pas retiré ?

M. Jean-Marie Le Guen. Il n'est pas retiré parce qu'il ajoute une autre dimension.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 7841 ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur Le Guen, l'amendement n° 3878, deuxième rectification, prévoit précisément que les dispositifs d'aide à l'installation des professionnels de santé « font l'objet d'évaluations régionales annuelles et communiquées aux conférences régionales ou territoriales de santé ».

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. L'amendement de la commission me convient, monsieur le rapporteur, mais à condition qu'on ajoute la dimension de l'égalité au niveau national. En ce qui concerne le dispositif d'évaluation de base, il est meilleur que celui que j'ai retiré, mais il faut quand même que l'ensemble des évaluations régionales remontent au niveau national pour que l'on puisse vérifier si les répartitions conviennent. S'il y a un déséquilibre entre régions, comment fait-on ? Qu'il y ait un équilibre au sein des régions, c'est une chose, mais il faut veiller à ce qu'il n'y ait pas de régions défavorisées par rapport à d'autres.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous avons beaucoup débattu de cet amendement au sein de la commission. Il a fait l'objet de deux rectifications. L'amendement que j'ai sous les yeux répond non seulement à la question de M. Le Guen, mais aussi à la préoccupation de Mme Billard, puisqu'il prévoit également que les dispositifs en question feront l'objet « d'une évaluation nationale adressée au Parlement dans un délai maximum de trois ans » à compter de l'entrée en vigueur de la loi.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur le rapporteur, nous voudrions savoir qui établit les bilans régionaux. Sont-ce les URCAM, les ARH, ou bien seront-ils faits dans le cadre du processus d'élaboration des SROS ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ce sont les URCAM.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Monsieur le président, si j'ai posé la question que j'ai posée, c'est parce que nous n'avons pas sous les yeux l'amendement qu'a lu M. le rapporteur. La deuxième rectification me convient, mais cette version définitive de l'amendement ne nous a pas été distribuée.

M. le président. Afin que les choses soient claires pour tout le monde, je vais donner lecture de l'amendement n° 3878, deuxième rectification. Cet amendement est ainsi rédigé :

« Compléter le I de l'article 29 par l'alinéa suivant :

« Les dispositifs d'aide à l'installation des professionnels de santé exerçant à titre libéral prévus aux 4° et 5° du présent article font l'objet d'évaluations régionales annuelles et communiquées aux conférences régionales ou territoriales de santé concernées prévues à l'article L. 1411-12 du code de la santé publique et d'une évaluation nationale adressée au Parlement dans un délai maximum de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi n°...du... relative à l'assurance maladie. »

M. Maxime Gremetz. Et qu'est-ce qui nous garantit que c'est bien de cet amendement que nous discutons ?

M. le président. Mais je viens de le lire !

M. Maxime Gremetz. Ah, très bien. Mais ne vous énervez pas, monsieur le président !

M. le président. Je ne m'énerve pas, mais il est parfois difficile de comprendre que vous ne compreniez pas.

M. Maxime Gremetz. Mais j'ai parfaitement compris, monsieur le président, et je suis d'accord avec vous.

M. le président. Bien. Nous sommes tous d'accord ? Y compris M. Bapt ?

M. Gérard Bapt. Monsieur le président, dans l'amendement, il est bien entendu que l'évaluation nationale adressée au Parlement serait donc réalisée par l'UNCAM à partir des données des URCAM ?

M. le président. Le rapporteur va vous répondre.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La réponse est très claire : ce sont les URCAM qui doivent...

M. Gérard Bapt. Et le bilan annuel, qui le fait ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Les URCAM transmettent leurs évaluations au niveau national et le bilan national est établi par l'UNCAM.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements restant en discussion ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Quand une telle unanimité semble se dessiner dans l'hémicycle, le Gouvernement ne saurait aller à contre-courant. Je tiens à remercier...

M. le président. Attendez, vous remercierez après le vote. (Sourires.)

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je remercie Mme Billard et le groupe communiste d'aller dans ce sens. Pour ce qui est du groupe socialiste, je n'ai pas encore compris, mais il me semblait que son amendement était satisfait par celui de M. le rapporteur, auquel je suis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3878, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 7841 n'a plus d'objet.

Je suis saisi de treize amendements identiques, n° 90 et nos 4654 à 4665.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement n° 90.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement est retiré, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 90 est retiré.

La parole est à Mme Jambu, pour soutenir les amendements nos 4654 à 4665.

Mme Janine Jambu. La disposition proposée par le II de l'article 29 confirme que les CPAM fixeront la part de la participation au financement des cotisations des médecins qui décident de se conventionner.

La suppression de cette disposition est motivée par un souci de cohérence avec nos amendements précédents. C'est pour cela que je ne développerai pas outre mesure, ce que j'espère que vous apprécierez, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements pour des raisons qui ont déjà été exposées.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4654 à 4665.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8316.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Cet amendement corrige une erreur matérielle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8316.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de treize amendements identiques, n° 91 et nos 4666 à 4677.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement n° 91.

M. Jean-Pierre Door. Cet amendement est retiré, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 91 est retiré.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour soutenir les amendements nos 4666 à 4677.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements tendent à supprimer le III de l'article 29.

En effet, ce paragraphe entérine l'idée selon laquelle la prise en charge des cotisations sociales, mais également de l'allocation spécifique de vieillesse, des médecins conventionnés ne serait plus définie par un décret national.

Ces dispositions sont dramatiques pour la cohésion territoriale du système d'assurance maladie,

En effet, là où la sauvegarde d'un système de santé solidaire nécessiterait des moyens matériels et financiers réellement incitatifs, sous couvert de régionalisation, l'État se défausse une nouvelle fois de ses responsabilités sur les collectivités locales. Le revirement doit donc être total, car reporter le problème sur les seules collectivités territoriales, en les contraignant à se rendre attrayantes pour attirer des praticiens, ne saurait être efficace.

Pis encore, on voit très bien que cela signifierait aussi faire jouer la concurrence entre les communes, entre les bassins de vie.

N'oublions pas que le nombre de praticiens va inexorablement se restreindre, comme le décrit avec précision le rapport Berland de novembre 2002. En effet, nous commençons à payer le prix de la politique malthusienne en matière d'offre médicale. Pour de nombreux gouvernements - dont certains que nous avons soutenus, il faut le reconnaître -, la limitation de l'offre médicale apparaissait comme le moyen le plus efficace de lutter contre la croissance des coûts de santé. Ainsi, tout fut mis en œuvre pour diminuer le nombre d'installations, depuis le fameux numerus clausus réduisant d'année en année le nombre d'étudiants admis à poursuivre leurs études après la première année de médecine jusqu'aux diverses contraintes administratives censées réguler l'activité.


Le résultat de cette politique se fait aujourd'hui sentir. D'ici à dix ans, 75 000 médecins, en fait ceux de la génération du baby-boom, vont arrêter leur activité, alors que seuls 35 000 nouveaux arrivants seront disponibles pour les remplacer. Or, dans un tel contexte, déréguler le système du conventionnement serait, ni plus ni moins, lui asséner un véritable coup de poignard.

Nous sommes effectivement conscients de la nécessité d'attirer les praticiens dans les déserts médicaux, mais cela ne doit pas être au prix de la mort du secteur conventionné.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J'aimerais répondre au Gouvernement, qui en fait n'a pas répondu puisqu'il s'est contenté de dire qu'il était défavorable.

M. Jean-Pierre Brard. Il y a des silences qui parlent, des silences qui sont éloquents.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. On a déjà abordé ce point, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Il y a des silences éloquents...

M. le président. Poursuivez, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. ...des silences gênés, des silences...

M. Jean-Pierre Brard. Assourdissants ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. ...assourdissants.

Si j'interviens, alors que je ne l'avais pas prévu, c'est faute d'avoir obtenu une réponse de votre part, monsieur le secrétaire d'État.

Ces amendements posent, au-delà d'un problème de disparités régionales, un problème d'intérêt national et un problème national de santé. Nous voyons bien ce qui se profile derrière cela : déjà on commence à demander aux collectivités locales de contribuer à l'installation de nouveaux médecins. Là aussi, l'État se désengage, il se dessaisit de sa mission de solidarité nationale et de son obligation régalienne d'assurer à tous un égal accès à des soins de qualité. J'ai suivi, hier, avec attention l'intervention du Président de la République. Il a affirmé la nécessité d'un État fort pour éviter que la société ne se disloque.

M. Jacques Desallangre. Eh oui !

M. Maxime Gremetz. Mais un État réduit à ses missions de défense, de police et de justice reste-il un État fort ? Qu'en est-il de la santé ? Un État fort doit veiller à la cohésion nationale, appliquer les droits constitutionnels et, en particulier, assurer la solidarité nationale.

M. Jacques Desallangre. L'État doit être le garant de l'intérêt général !

M. Maxime Gremetz. Il doit également être garant de l'intérêt général et résister aux lobbies et intérêts financiers supérieurs.

M. le président. Je vous remercie, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Ces amendements sont donc fondamentaux. Si je ne me retenais pas, je demanderais un scrutin public.

M. le président. Retenez-vous, monsieur Gremetz. (Rires.)

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4666 à 4677.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de treize amendements identiques, n° 92 et nos 4678 à 4689.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement n° 92.

M. Jean-Pierre Door. Je retire cet amendement, de même que les amendements nos 93 et 94, qui seront appelés ultérieurement.

M. le président. L'amendement n° 92 est retiré.

La parole est à Mme Janine Jambu, pour soutenir les amendements nos 4678 à 4689.

Mme Janine Jambu. Par cohérence avec nos amendements précédents, nos amendements nos 4678 à 4689 visent à supprimer le IV de l'article 29. En effet, ces dispositions entérinent, une à une, les conditions qui fixaient un plafond en ce qui concerne la prise en charge des cotisations sociales des médecins conventionnés. Loin de remédier aux problèmes liés aux disparités territoriales de l'offre de soins, les mesures contenues dans l'article 29 risquent d'inciter les différentes caisses primaires d'assurance maladie à se lancer dans une course-poursuite effrénée de prise en charge des cotisations sociales.

Encore une fois, le désengagement de l'État en matière d'aménagement du territoire, sous couvert de régionalisation, accentue la concurrence entre les territoires.

Si l'échelon local est le plus adéquat pour lutter contre les disparités régionales, sans objectifs nationaux, sans directives nationales, et surtout sans moyens financiers supplémentaires, cela ne peut aboutir qu'à une concurrence accrue des territoires entre eux.

De plus, n'étant plus défini par décret national, mais soumis à des critères géographiques, le niveau de prise en charge des cotisations sociales conditionnera sérieusement le nombre de médecins conventionnés.

Alliées à une pénurie programmée de l'offre de soins, ces dispositions risquent tout simplement d'enterrer le secteur 1.

Enfin, nous tenons à rappeler que le conventionnement n'est pas la médecine du pauvre ou des exclus. La convention médicale est le garant du pacte social qui permet à l'ensemble des assurés sociaux d'avoir un accès égal aux soins. De ce fait, tout doit être mis en place pour qu'il concerne un nombre maximum d'assurés sociaux.

Ces remarques nous permettent d'affirmer que ces dispositions accroîtront à long terme les disparités régionales en matière de soins.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4678 à 4689.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8317.

Il s'agit d'un amendement de coordination, déposé par la commission.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Avis favorable. C'est un très bon amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8317.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de treize amendements identiques, n° 93 et nos 4690 à 4701.

L'amendement n° 93 a été retiré.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir les amendements nos 4690 à 4701.

M. Maxime Gremetz. Ces amendements sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4690 à 4701.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4702 à 4713.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. La suppression du VI de l'article 29 est motivée par un souci de cohérence avec nos amendements précédents. En effet, ces dispositions entérinent, une à une, les conditions qui fixaient un plafond en ce qui concerne la prise en charge des cotisations sociales des médecins conventionnés. Loin de remédier aux problèmes liés aux disparités territoriales de l'offre de soins, les mesures contenues dans l'article 29 risquent d'inciter les différentes caisses primaires d'assurance maladie à se lancer dans une course-poursuite effrénée de prise en charge des cotisations sociales.

Encore une fois, le désengagement de l'État en matière d'aménagement du territoire, sous couvert de régionalisation, accentue la concurrence entre les territoires. Cela a déjà été dit, mais il est bon de le répéter.

Si l'échelon local est le plus adéquat pour lutter contre les disparités régionales, sans objectifs nationaux, sans directives nationales, et surtout sans moyens financiers supplémentaires, cela ne peut aboutir qu'à une concurrence accrue des territoires entre eux.

De plus, n'étant plus défini par un décret national, mais soumis à des critères géographiques, le niveau de prise en charge des cotisations sociales va sérieusement conditionner le nombre de médecins conventionnés.

Alliées à une pénurie programmée de l'offre de soins, ces dispositions risquent tout simplement d'enterrer le secteur 1.

Enfin, nous tenons à rappeler que le conventionnement n'est pas la médecine du pauvre ou des exclus. Cela a déjà été précisé, cela méritait de l'être à nouveau. La convention médicale est le garant du pacte social qui permet à l'ensemble des assurés sociaux d'avoir un accès égal aux soins, dont nous vous avons déjà dit toute l'importance que nous y attachons. De ce fait, tout doit être mis en place pour qu'il concerne un nombre maximum d'assurés sociaux.

Ces dispositions permettront, en fait, d'accroître à long terme les disparités régionales déjà beaucoup trop importantes en matière de soins.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

M. Jean-Pierre Brard. Je demande la parole pour défendre l'amendement n° 4708, monsieur le président.

M. le président. Je ne peux vous donner la parole que pour répondre à la commission ou au Gouvernement.

M. Jean-Pierre Brard. Non, je désire défendre mon amendement !

M. le président. Non, c'est déjà fait, et j'ai interrogé la commission et le Gouvernement sur les douze amendements identiques. Il fallait lever la main plus tôt !

Je vous donne donc la parole pour répondre soit à la commission, soit au Gouvernement, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je vous laisse la liberté de l'interprétation du règlement. Nous n'allons pas nous engager dans une confrontation sur ce point.

M. le président. Non, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. Je constate que le Gouvernement et le rapporteur sont dans une position si difficile qu'ils ne répondent pas. Ils expédient, considérant que le silence pourrait nous faire taire. Ils se trompent, parce que nous avons la légitimité des droits que nous défendons ici et qu'ils sont en train de désintégrer, de désarticuler et d'enterrer. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Et nous, nous n'avons pas de droits ?

M. Jean-Pierre Brard. Vous savez bien qu'au sein de l'UMP, vous avez un seul droit : celui de vous taire ! (Sourires.) La preuve, vous êtes les muets du sérail depuis des jours et des jours !

M. le président. Monsieur Brard !

M. Hervé Novelli. Ne vous inquiétez pas, monsieur Brard, nous allons parler !

M. Jean Ueberschlag. En tout cas, monsieur Brard, vous n'avez pas le droit de nous insulter !

M. Jean-Pierre Brard. Si vous ne dites rien, ce n'est pas parce que vous n'avez rien à dire - ce qui ne préjuge en rien l'intérêt que pourraient avoir vos propos -, mais parce que vous avez consigne de vous taire (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), tant vous êtes convaincus que ce que vous avez à défendre n'est pas défendable !

M. Jean Ueberschlag. Vous, vous parlez pour ne rien dire !

M. Jean-Pierre Brard. Depuis 1789, notre système, se perfectionnant progressivement, s'est construit sur l'universalité des droits et des valeurs. Le président de notre assemblée est bien placé pour le savoir,...

M. le président. Je n'étais pas là ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. ...lui qui a présidé notre commission sur les signes religieux, qui nous a rassemblés où que nous siégeons sur ces bancs, tant il est vrai qu'il existe des valeurs fondamentales. Or vous abandonnez ces valeurs fondamentales reprises dans le programme du Conseil national de la Résistance !

M. Richard Mallié. Il y avait longtemps !

M. Jean-Pierre Brard. À la veille du soixantième anniversaire de la libération du pays, vous ne voulez pas qu'il soit dit que vous enterrez l'héritage construit peu à peu (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) par le mouvement social et par les générations qui se sont succédé et qui, face aux privilégiés, ont réussi à établir un rapport de forces qui, peu à peu, a fait de la satisfaction des besoins humains le but ultime de la société. Mais de cela, vous ne voulez pas entendre parler. C'est pourquoi, tout comme le rapporteur de la commission saisie au fond, la majorité choisit le silence. Quant au rapporteur pour avis, il n'est plus là, tant il a été marginalisé !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Il n'y a pas de rapporteur pour avis !

M. Jean-Pierre Brard. Cela ne vous fait pas plaisir que je vous dise la vérité, monsieur le rapporteur ! Le secrétaire d'État ne dit rien non plus.

Lors du dernier remaniement ministériel, on ne peut pas dire que tous les choix ont été pertinents, mais celui de nommer ce jeune secrétaire d'État n'était pas un des plus inconvenants pour renouveler le gouvernement et la pratique gouvernementale ! Nous attendions donc mieux de sa part !

M. le président. Monsieur Brard, je vous le rappelle, nous parlons de l'assurance maladie.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4702 à 4713.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de treize amendements identiques, n° 94 et nos 4714 à 4725.

L'amendement n° 94 a été retiré.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour soutenir les amendements nos 4714 à 4725.

M. Jacques Desallangre. Ces amendements sont défendus.

M. Maxime Gremetz. Je veux défendre le mien, monsieur le président !

M. le président. Ces amendements sont défendus, monsieur Gremetz, cela vient d'être dit.

M. Maxime Gremetz. Laissez-moi défendre l'amendement n° 4715 ! Faites-le pour moi !

M. le président. Je vous donne la parole, monsieur Gremetz, mais parce que c'est vous.

M. Gérard Bapt. Jamais vous n'avez fait cela pour moi, monsieur le président ! (Sourires.)

Il n'y a pas que M. Gremetz qui compte !

M. le président. Non, M. Gremetz n'est pas le seul à compter.

M. Maxime Gremetz. J'ai un amendement à défendre, monsieur Bapt. Si vous, vous n'en avez pas, je n'y peux rien. Il fallait en déposer un.

M. le président. Monsieur Gremetz, ne me faites pas regretter la façon dont j'applique le règlement !

M. Maxime Gremetz. J'apprécie beaucoup, monsieur le président, que vous m'autorisiez à défendre un des douze amendements déposés par notre groupe.

M. le président. Allez-y, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Cet amendement est essentiel...

M. le président. J'en déduis que vous allez me demander un scrutin public, monsieur Gremetz. J'anticipe donc votre demande et je vais l'annoncer tout de suite. (Sourires.)

Je décide que les amendements identiques, nos 4714 à 4725 seront mis aux voix par scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Poursuivez, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J'ai donc tout le temps de défendre mon amendement, monsieur le président, puisque je dispose de cinq minutes à partir de maintenant !

M. le président. Dépêchez-vous, monsieur Gremetz ! Ne me faites pas regretter d'avoir été libéral avec vous !


M. Maxime Gremetz
.
M. le secrétaire d'État, une fois de plus, ne va pas répondre - il me l'a dit -, mais je ne veux pas m'en prendre à un Picard ; je me contenterai donc d'expliquer pourquoi la question est majeure.

Je répète que j'ai entendu, hier, une remarquable intervention télévisée.

M. Jean-Pierre Brard. N'exagérons pas !

M. Maxime Gremetz. Si ! Je l'ai trouvée remarquable ! J'ai été très content car j'avais parié avec tous les journalistes que le Président annoncerait un référendum sur la Constitution européenne !

M. le président. Revenons-en à l'assurance maladie !

M. Maxime Gremetz. J'ai même pensé à vous car il a parlé de l'assurance maladie ! Le saviez-vous ? Je l'ai écouté jusqu'au bout, moi ! Je n'ai pas regardé le Tour de France à la télé ! (Sourires.)

Et qu'a-t-il dit ?

M. Pierre-Louis Fagniez. Il a dit du bien de M. Douste-Blazy !

M. Maxime Gremetz. Il a expliqué quelle est la grande différence avec toutes les anciennes réformes, de droite comme de gauche : les problèmes de la santé, les questions financières, le manque de médecin, tout cela est secondaire ; l'aspect majeur auquel vous vous attaquez, la révolution - il n'a pas employé le mot, mais il ne voulait pas dire autre chose -, c'est le changement des comportements. (Exclamations sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. La fin de l'assistanat !

M. Maxime Gremetz. Vous ne l'avez pas écouté ! Je suis obligé de vous l'apprendre !

Les gens qui ont peur de devoir parcourir des kilomètres pour consulter un médecin ou de payer plus cher pour être moins bien soignés n'apprécient pas du tout cette idée de « changement des comportements ».

M. Yves Censi. Oh !

M. Maxime Gremetz. L'article 29 pose une vraie et grande question. Nous pensons - et je veux le réaffirmer ici - qu'il faut rapprocher la santé des territoires et même l'organiser au niveau des territoires. Alors, pourquoi continuer à liquider tous les hôpitaux de proximité, comme cela se fait aujourd'hui ? Que va devenir l'hôpital de Chauny ? Et celui de Montdidier ? Vous voyez, je prends des exemples précis ! Vous constituez des mastodontes régionaux dotés de plateaux techniques superbes tout en choisissant de faire de la population picarde l'une des moins bien soignées de France.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Vous dirigez les débats avec beaucoup d'énergie et d'efficacité, monsieur le président, chacune et chacun d'entre nous en est témoin. Cependant, tout à l'heure, alors que j'avais visiblement réussi à convaincre le rapporteur et le secrétaire d'État de sortir de leur mutisme, vous n'avez pas vu qu'ils demandaient la parole. Je regrette que vous les ayez privés de l'occasion de participer à la discussion - ce qu'ils s'étaient jusqu'à présent refusés de faire - en me répondant sur l'universalité des soins dont nous héritons et sur l'idéologie maurrassienne qui imprègne leur démarche. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous organiserons un colloque sur le thème des idéologies, mon cher collègue. (Rires.)

Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements de suppression du vii de l'article 29, à l'instar des amendements de suppression des vi, v, iv, iii, ii et i, pour une simple et bonne raison : elle s'était déjà prononcée contre la suppression de l'article. M. le secrétaire d'État et moi-même nous en sommes d'ailleurs expliqués, et nous pourrions évidemment nous répéter - nous savons aussi le faire -, mais ce serait sans intérêt.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements nos 4714 à 4725.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'amendement nos 4714 à 4725 :

              Nombre de votants 79

              Nombre de suffrages exprimés 71

              Majorité absolue 36

        Pour l'adoption 12

        Contre 59

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je suis saisi d'un amendement n° 8319 de la commission, qui tend à corriger une erreur matérielle.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Et auquel le Gouvernement est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8319.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4726 à 4737.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Vous voyez, le rapporteur se contente de dire : « Nous avons rejeté la suppression du vii », comme pour le vi et tous les autres paragraphes. Quant au secrétaire d'État, il confirme, mais sans répondre davantage sur le fond.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous avons répondu en donnant notre avis sur les amendements de suppression de l'article !

M. Jean-Pierre Brard. Non ! Vous répondez sur le mode de l'épicier : « J'ai tel produit sur mon étagère, tel autre en vitrine. »

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. On fait ce qu'on peut !

M. Jean-Pierre Brard. Il est tout à votre honneur de reconnaître vos limites, monsieur le rapporteur. Vous me permettrez toutefois de penser que, dans un État comme le nôtre, porteur d'un tel héritage, il est du devoir des députés, représentants du peuple, de voir plus loin, de penser à l'avenir, même si vous y avez renoncé, vous et le secrétaire d'État.

Monsieur le secrétaire d'État, vous qui êtes jeune, avez-vous pensé à la trace que vous laisserez dans l'Histoire, avec un texte aussi important ? (Rires. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gabriel Biancheri. Et vous, monsieur Brard, quelle trace laisserez-vous ?

M. Pierre-Louis Fagniez. Le secrétaire d'État est un homme d'avenir, lui !

M. Jean-Pierre Brard. Croyez-vous que vous parviendrez, par le silence, à faire valoir vos idées inaudibles ?

M. Richard Mallié. Mais quand défendra-t-il donc son amendement ?

M. Jean-Pierre Brard. Il serait temps que vous disiez pourquoi, en digne héritier de Maurras (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Charles Cova. Je me sens visé !

M. Jean-Pierre Brard. Oui, monsieur Cova, je sais que vous en êtes aussi adepte.

Il serait temps, disais-je, que vous expliquiez pourquoi vous privilégiez l'intérêt d'une minorité et vous cassez l'héritage qui bénéficie à la majorité de notre peuple.

M. le président. La commission et le Gouvernement ont un avis défavorable.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Vous m'aviez promis, monsieur le président, que les amendements identiques seraient désormais imprimés en un seul exemplaire, comportant la liste de leurs signataires.

M. le président. Je vous remercie d'insister, monsieur Bapt. J'informerai dans un instant la conférence des présidents des nouvelles modalités de présentation des amendements identiques, mais celles-ci n'entreront en vigueur que pour les amendements qui n'ont pas encore été imprimés.

M. Maxime Gremetz. Je demande la parole !

M. le président. Je vous la donne, monsieur Gremetz, mais n'exagérez pas !

M. Maxime Gremetz. Je voulais simplement dire que j'avais été fier de la nomination d'un secrétaire d'État picard. Dommage qu'il ait pris les mauvaises habitudes de son ministre de tutelle : il ne répond pas. Sauvez l'honneur de la Picardie monsieur le secrétaire d'État ! Répondez-nous ! Les Picards n'ont jamais baissé les bras ! (Sourires.)

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Jamais ! Et ce n'est pas pour demain, vous le savez !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4726 à 4737.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4738 à 4749.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Vous aurez beau vous murer dans le silence, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, nous continuerons à batailler.

L'article 29 définit les modalités de l'aide à l'installation en région pour les professionnels de santé. Il fait notamment éclater le principe du conventionnement des professionnels de santé du secteur 1, qui entraînait la prise en charge par l'assurance maladie de leurs cotisations sociales. Ainsi, il apparaît que cette prise en charge ne sera plus conditionnée que par le lieu géographique d'exercice.

Plus qu'un simple coup de canif dans le contrat de conventionnement, il s'agit, ni plus ni moins, de remettre en cause le principe du conventionnement des professionnels de santé inscrits en secteur à honoraires et tarifs définis. C'est une atteinte considérable au principe d'universalité et de solidarité de la sécurité sociale, ces principes fondamentaux sur lesquels vous refusez toujours de vous exprimer parce que vous savez bien que votre texte les remet en cause.

Vous risquez évidemment d'encourager les professionnels de santé à sortir du secteur 1, défini par convention, qui maintient le tarif des actes médicaux à un niveau garanti permettant la prise en charge par l'assurance maladie des dépenses de santé des assurés sociaux. Vous encouragez la libéralisation tarifaire au détriment de la santé des assurés sociaux, qui sont déjà 15 %, vous le savez, à renoncer aux soins, faute de revenus suffisants pour en assumer le coût.

Dans ma bonne ville de Montreuil, par exemple, plus de 30 % des ayants droit du RMI ne bénéficient pas de la couverture maladie. Cependant, au lieu d'essayer d'améliorer le système, vous créez les conditions pour détériorer ses modalités d'application. Il faut que cela se sache car c'est tout à fait inacceptable.

L'article 29, notamment son ix, remet en cause le contrat social - notre collègue Bapt, tout à l'heure, évoquait fort légitimement Rousseau - et la prise en charge des cotisations sociales des médecins conventionnés.

M. le président. La commission et le Gouvernement ont un avis défavorable.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4738 à 4749.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 4750 à 4761.

Ces amendements sont défendus. N'est-ce pas M. Gremetz ? (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Si cela peut vous être agréable, monsieur le président ! (Sourires.)

M. le président. La commission et le Gouvernement ont un avis défavorable.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4750 à 4761.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 29, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 29, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Chers collègues, comme vous le savez, la conférence des présidents se réunit à dix-neuf heures. Je vais donc lever la séance.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinquante-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot