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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 18 OCTOBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du vendredi 17 octobre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Loi de finances pour 2004 (première partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Après l'article 4 (suite) «...»

Vote sur l'amendement n° 159 corrigé de M. Jean-Pierre Brard. - Rejet.
M. Augustin Bonrepaux.
Amendement n° 258 corrigé de M. Bonrepaux (suite) : MM. Augustin Bonrepaux, Jean-Pierre Brard, Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, Philippe Auberger, Jean-Louis Dumont, Pierre-Christophe Baguet, Didier Migaud. - Rejet.

Suspension et reprise de la séance «...»

2.  Aménagement de l'ordre du jour «...».
MM. le président, Augustin Bonrepaux.
3.  Loi de finances pour 2004 (première partie). - Reprise de la discussion d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Après l'article 4 (suite) «...»

Amendements identiques n°s 158 corrigé de M. Brard et 259 deuxième correction de M. Migaud : MM. Jean-Pierre Brard, Augustin Bonrepaux, le rapporteur général, le ministre, Xavier Bertrand. - Rejet par scrutin.
Amendement n° 352 de M. Bonrepaux : MM. Jean-Louis Idiart, le rapporteur général, le ministre, Eric Besson. - Rejet.
Amendement n° 353 de M. Bonrepaux : MM. Gérard Bapt, le rapporteur général, le ministre, Augustin Bonrepaux, Jean-Pierre Brard, Xavier Bertrand. - Rejet par scrutin.
Amendement n° 354 de M. Bonrepaux : MM. Jean-Louis Dumont, le rapporteur général, le ministre, Gérard Bapt. - Rejet.
Amendement n° 201 de M. de Courson : MM. Pierre-Christophe Baguet, le rapporteur général, le ministre, Jean-Pierre Brard, Augustin Bonrepaux. - Rejet.
Amendement n° 438 de M. Brard : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur général, le ministre, Jean-Pierre Brard. - Rejet.
Amendement n° 439 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général. - Rejet.
Amendement n° 440 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 387 de M. Bonrepaux : MM. Eric Besson, le rapporteur général, le ministre, Didier Migaud. - Rejet.
Amendement n° 125 de M. Brard : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur général, le ministre, Jean-Pierre Brard. - Rejet.
Amendement n° 93 de M. Brard : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
4.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2004

PREMIÈRE PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).
    J'informe l'Assemblée que, pour des raisons impératives, la séance sera levée à douze heures quinze.

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée avant le vote sur l'amendement n° 159 corrigé portant article additionnel après l'article 4.

Après l'article 4 (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'amendement n° 159 corrigé, présenté par MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « A la fin de la première phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, les mots : "7 400 euros et de 10 000 euros pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2003 sont remplacés par les mots : "5 000 euros. »
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je demande la parole...
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 159 corrigé.

    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je regrette que vous ne m'ayez pas donné la parole avant, car ce que je vais dire aurait peut-être inversé le vote qui vient d'avoir lieu.
    M. Jean-Louis Dumont. Eh oui !
    M. Augustin Bonrepaux. Nous refusons l'augmentation du plafond retenu pour calculer la déduction fiscale accordée aux employeurs pour l'emploi d'un salarié à domicile. Sur 2,2 millions de familles qui ont un employé à domicile, le Gouvernement et la majorité choisissent de faire un cadeau fiscal de 80 millions d'euros, inutile pour l'emploi, aux seules familles privilégiées.
    Aujourd'hui se déroule la journée mondiale du refus de la misère. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Si le Gouvernement avait été conscient de l'augmentation de la misère dans notre pays, sans doute aurait-il réfléchi alors qu'il s'apprête, avec l'appui de la majorité, à rejeter dans l'exclusion plus de 300 000 chômeurs, réalisant ainsi une économie de 150 millions d'euros.
    M. Didier Migaud. Non, c'est scandaleux !
    M. Augustin Bonrepaux. J'aurai une seule question à vous poser, monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, mes chers collègues : n'avez-vous pas honte ?
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, puis-je considérer que vous avez à nouveau présenté votre amendement n° 258 corrigé ?
    M. Augustin Bonrepaux. Non, je m'exprimais sur l'amendement n° 159 corrigé.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Comme mon collègue Augustin Bonrepaux, je suis très sensible au calendrier et au fait que nous célébrons aujourd'hui la journée mondiale de refus de la misère, d'autant que cet événement a un rapport avec notre discussion d'hier.
    Monsieur le ministre, vous avez essayé hier soir de nous culpabiliser en essayant de faire croire que nous étions contre l'emploi. Je vous ai démontré que cela ne pouvait être vrai et que nous considérions qu'il n'existait pas de « sous-emplois », de dignité inférieure à occuper certains emplois.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il a fallu que je vous le demande pour l'entendre !
    M. Jean-Pierre Brard. Non, vous l'avez entendu parce que vous avez donné une explication tout à fait perverse qui pouvait laisser penser que pour nous, les héritiers de Jacquou le Croquant, il pouvait y avoir des emplois d'une moindre dignité. Très franchement, monsieur le ministre, vous connaissant, je ne pensais pas que, pour les besoins de la cause, vous pouviez nous prêter des desseins aussi noirs quant à la conception que nous avons des emplois sans qualification.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vous ai simplement posé une question.
    M. Jean-Pierre Brard. Chacun a le droit de manger et le travail est la première des dignités, que vous refusez à des millions de personnes. Vous le savez bien, au lieu d'accorder des avantages fiscaux invraisemblables aux plus riches, vous auriez pu utiliser cet argent pour développer la consommation, ce qui aurait eu un effet mécanique sur l'emploi, y compris l'emploi des personnes non qualifiées. Vous avez fait le choix inverse.
    M. le président. Merci, monsieur Brard...
    M. Jean-Pierre Brard. Je termine, monsieur le président. Il est très important que nous commencions cette journée dans la tonalité où nous avons achevé notre discussion hier.
    D'un côté, l'augmentation de la prime pour l'emploi représentera un euro supplémentaire par mois pour chaque bénéficiaire, comme l'a excellemment démontré M. Didier Migaud. De l'autre côté, la réduction d'impôt pourra s'élever, pour un foyer fiscal pour une seule année, à 30 000 euros, et encore je ne prends que le cas cité par Le Point, et qui ne correspond pas aux personnes les plus riches qui, elles, bénéficieront de privilèges bien plus grands. D'un côté, 30 000 euros, de l'autre 1 euro.
    M. le président. Nous en venons à l'amendement n° 258 corrigé, qui était en discussion commune avec le précédent.
    Je rappelle les termes de cet amendement n° 258 corrigé, présenté par MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart, Bourguignon, Eric, Besson, Bapt et les membres du groupe socialiste :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « A la fin de la première phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, les mots : "7 400 euros et de 10 000 euros pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2003 sont remplacés par les mots : "6 900 euros. »
    Cet amendement a été présenté hier soir...
    M. Augustin Bonrepaux. Non ! Il est tout à fait différent.
    M. le président. ... et a reçu un avis défavorable du Gouvernement. Mais peut-être souhaitez-vous répondre au Gouvernement, monsieur Bonrepaux ?
    M. Augustin Bonrepaux. L'amendement n° 258 corrigé est tout à fait différent. Hier, nous remettions en cause l'augmentation de l'année dernière ; aujourd'hui, nous refusons une nouvelle augmentation, un nouveau gaspillage de crédits publics au moment où on en a tellement besoin pour les déshérités.
    M. le président. Vous êtes en train de présenter, une fois de plus, votre propre amendement.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, si vous maintenez votre position, je serai obligé de demander une suspension de séance de dix minutes pour réunir mon groupe et examiner cette question extrêmement importante.
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, ne commençons pas la séance ainsi.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est vous qui nous forcez à agir comme cela.
    M. le président. Je veux bien, puisqu'il y a eu une interruption, que vous disiez un mot sur l'amendement n° 258 corrigé, et le Gouvernement réitérera probablement son avis.
    M. Augustin Bonrepaux. On nous propose d'augmenter encore une déduction fiscale qui a déjà été relevée l'année dernière. Nous refusons le plafond de 10 000 euros qui est prévu. Nous jugeons que c'est excessif. Surtout, on ne nous a pas expliqué hier soir en quoi choisir 70 000 familles parmi les 2,2 millions qui ont des employés à domicile favorisait l'emploi, alors que 900 000 familles ne bénéficient d'aucun avantage. Nous aurions pu améliorer le dispositif par un crédit d'impôt. Le Gouvernement et la majorité choisissent d'augmenter cette déduction fiscale pour faire un cadeau aux privilègiés, sans qu'il y ait le moindre effet sur l'emploi ! C'est cela qui est révoltant.
    On en arrive à ce paradoxe où l'on va rendre non imposables des personnes qui disposent de hauts revenus, cependant que leurs employés, eux, paieront l'impôt. On marche sur la tête ! Un tel gaspillage des crédits publics est une honte, au moment où il y a dans notre pays tant de misère et où l'on va rejeter dans l'exclusion plus de 300 000 chômeurs. Nous ne pouvons pas accepter cette mesure scandaleuse. La majorité et le Gouvernement feraient bien de réfléchir avant de l'adopter.
    M. Jean-Louis Dumont Très bien !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, j'ai vérifié : hier soir, avant la fin de la séance, vous avez bien présenté l'amendement n° 258 corrigé. Il n'était donc pas nécessaire de le défendre à nouveau. Je vous ai laissé dire quelques mots pour que nous commencions la séance dans de bonnes conditions.
    La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, qui va sans doute réitérer l'avis défavorable que la commission avait donné hier.
    M. Gilles Carrez rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Exactement !
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, je suis tout à fait d'accord avec vous : il faut que nos débats s'engagent dans l'écoute et le respect mutuels. A cet égard, je regrette que l'on puisse demander à la majorité et au Gouvernement s'ils n'ont pas honte de présenter leurs propositions.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est le jour de la misère !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Si vous voulez m'interrompre, monsieur Bonrepaux, demandez l'autorisation au président.
    C'est une manière peu délicate de s'exprimer à l'endroit d'autres personnes qui ont le droit d'avoir leurs propres convictions.
    Monsieur Bonrepaux, non seulement je n'ai pas honte mais je suis fier, au plus profond de ma conscience, de ce que je fais. Comme M. Brard, je crois que pour une personne, la dignité, c'est de pouvoir se réaliser dans un travail. Or, multiplier le nombre d'employeurs en France, c'est multiplier les chances d'emplois.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous ne les multipliez pas !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Alors, je vous en prie, n'insultez pas les autres. Laissez-les au moins faire vivre leurs convictions.
    Je vous l'ai dit, dans une société moderne, il est nécessaire de favoriser la création d'emplois de services car les besoins sont nombreux.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous ne créez rien !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. On peut ainsi éviter le placement d'une personne âgée dans une résidence spécialisée, par exemple.
    En tout cas, c'est la conviction profonde du Gouvernement. Il en est fier. C'est ce qui le conduit à réitérer son rejet de votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Monsieur le président, nous avons déjà beaucoup discuté de ces différents amendements hier. Je n'y reviens pas. Je constate simplement deux choses.
    La première, c'est que, manifestement, l'appréciation de ces emplois à domicile est idéologique, comme si les emplois à domicile étaient moins dignes d'intérêt que d'autres emplois à l'extérieur du domicile des particuliers.
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas le problème !
    M. Philippe Auberger. Comme si le fait d'avoir une personne physique comme employeur était moins digne que d'être employé ou salarié d'une entreprise, d'un artisan ou d'un commerçant.
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas le problème !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce n'est pas cela qui n'est pas digne !
    M. Philippe Auberger. Seconde remarque, pour la mesure que nous avons votée l'année dernière, il avait été prévu dès le départ que l'augmentation serait progressive sur deux années. Je récuse donc le chiffre de 70 000 personnes concernées. Ce chiffre qui a été donné l'année dernière tenait compte de la situation antérieure, il était moins favorable.
    M. Augustin Bonrepaux. Cette année, ce sera moins !
    M. Philippe Auberger. Mais l'objet de l'amendement qui a été voté l'année dernière et qui va trouver son plein effet cette année est d'améliorer la solvabilité des personnes susceptibles d'employer une personne à domicile à plein temps ou plus qu'elle ne le faisait jusqu'à présent.
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vrai !
    M. Philippe Auberger. Actuellement, cela a été démontré hier, même avec un plafond relevé à 10 000 euros, on n'arrive pas à couvrir un emploi à temps plein, charges sociales comprises.
    Il reste qu'en augmentant le montant des frais déductibles, on favorise la solvabilité d'un certain nombre de familles. Le chiffre de 70 000 était un chiffre de départ. A l'arrivée, d'ici un an ou deux, une fois que cette mesure aura été effectivement comprise par les bénéficiaires et que ceux-ci auront fait évoluer la durée de travail de la personne qui travaille à leur domicile, on s'apercevra que les bénéficiaires sont plus nombreux qu'aujourd'hui et que certaines personnes pourront proposer un emploi à temps plein à domicile, alors qu'elles n'en avaient pas les moyens auparavant. Le bénéfice est donc double : cette mesure profite à la personne qui engage quelqu'un à domicile et à celle qui est engagée et dont la durée de travail pourra être allongée.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, mais je rappelle que le débat a déjà eu lieu hier soir.
    M. Didier Migaud. Il doit se poursuivre. C'est un point important.
    M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le président, comme notre collègue Augustin Bonrepaux vient de le rappeler, ce vendredi 17 octobre est une journée dédiée à la lutte contre la misère.
    Les mesures qui nous sont proposées s'inscrivent dans un ensemble et tout au long du débat qui va nous occuper cette semaine, nous voulons dénoncer l'orientation de cette loi de finances.
    Mais en cet instant précis, en réponse à certaines réactions, je voudrais rappeler l'action de l'association ATD-Quart monde contre la misère. Deux de ses figures emblématiques, qui ont siégé au Conseil économique et social, le père Wresinski et Mme Anthonioz-de Gaulle, ont établi des rapports ou émis des avis qui ont fait autorité, non seulement dans la troisième assemblée de la République mais ici même. Tous deux sont venus, en effet, présenter devant notre assemblée les résultats de leurs travaux et les avis qui ont été votés par le Conseil économique et social.
    Et voilà qu'au moment où nous devons nous sensibiliser, si nous ne le sommes pas encore, à ce qu'est la misère, au moment où nous devons nous rassembler pour que les richesses de ce pays soient à nouveau redistribuées, notamment pour aider les personnes les plus fragiles, nous avons des discussions dignes des épiciers de l'ancien temps, chacun s'accrochant à son euro. Ne devrions-nous pas, plutôt, donner plus de souffle aux valeurs républicaines, à ces valeurs qui fondent l'égalité sociale et la solidarité dans notre société ?
    Je profite de l'occasion pour rappeler combien les travaux du Conseil économique et social nous sont utiles et nécessaires. Il est donc urgent de cesser de le mettre en cause. Nous devons au contraire nous rassembler pour influer sur la loi de finances qu'on nous propose et qui multiplie les cadeaux fiscaux.
    En ce qui concerne l'ASS, peut-être observera-t-on une inflexion. Mais, on l'a bien compris, même l'avis d'un groupe qui se situe dans la majorité, ou plutôt à la limite de la majorité, pèse peu face aux demandes réitérées de certains lobbies. Je rappelle par ailleurs qu'en ce moment, dans certaines villes, on coupe l'eau à des familles avec enfants et à des personnes handicapées.
    Voilà pourquoi nous devons veiller à ce que cette loi de finances soit équilibrée. Si vous voulez, monsieur le ministre, mesdames et messieurs de la majorité, faire des cadeaux à votre électorat, n'oubliez pas qu'une société est toujours multiple et diverse et que chaque personne a droit au respect et à l'aide. Il y va de l'honneur de cette société !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, à qui je demande d'être bref car je vais devoir suspendre la séance à dix heures du fait de la réunion de la conférence des présidents, où il représentera son président de groupe.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, nous venons de nous arranger autrement, mais peu importe.
    Je demande une suspension de séance car l'opposition est majoritaire. Avec Pierre-Christophe Baguet (Sourires), Augustin Bonrepaux, Jean-Louis Dumont, Didier Migaud,...
    M. le président. Monsieur Brard...
    M. Jean-Pierre Brard. ... et Mme Muguette Jacquaint, nous sommes majoritaires. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Philippe Auberger. M. Brard ne sait plus compter !
    M. le président. Ce n'est pas raisonnable, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous sommes donc majoritaires, mais si l'on ne veut en tenir compte, tant pis !
    M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur le président, je demande la parole car j'ai été mis en cause par M. Brard !
    M. Jean-Louis Dumont. Et gravement !
    M. Pierre-Christophe Baguet. En effet !
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur Baguet. Mais soyez bref.
    M. Pierre-Christophe Baguet. Je n'autorise pas M. Brard à me positionner, que ce soit dans la majorité ou dans l'opposition : l'UDF est dans la majorité !
    M. Michel Bouvard. Ah bon ?
    M. Augustin Bonrepaux. On ne s'en est pas rendu compte !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. L'avis de recherche lancé hier a été positif puisque nos amis sont de nouveau présents en séance ce matin. (Sourires.)
    Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre délégué au budget, la mesure que vous nous soumettez et que vous nous avez déjà proposée l'année dernière est totalement contraire à la justice. Elle est au plus parfaitement incohérente par rapport à votre discours constant sur un bon rapport coût-efficacité et à votre affirmation selon laquelle aucune mesure fiscale ne devrait pouvoir être prise sans évaluation préalable. Un certain nombre de rapports montrent déjà que votre mesure pourrait avoir un formidable effet d'aubaine.
    M. Jean-Louis Idiart. Bien sûr !
    M. Didier Migaud. Vous devriez avoir l'emploi comme priorité au lieu de privilégier les quelques dizaines de milliers de familles, monsieur Auberger...
    M. Philippe Auberger. Il ne s'agit pas de cela !
    M. Didier Migaud. ... qui bénéficeront de la mesure...
    M. Jean-Louis Idiart. C'est la réalité !
    M. Didier Migaud. ... sans conséquences sur leur capacité à embaucher du personnel ni sur le nombre d'heures travaillées. Que vous privilégiiez ces quelques dizaines de milliers de familles par rapport aux 900 000 personnes qui ne paient pas d'impôt sur le revenu et qui, pourtant, emploient un salarié à domicile, semble totalement incompréhensible, à moins de considérer que l'idéologie conduit votre action et que l'injustice est votre fil conducteur.
    M. Xavier Bertrand. Ces propos sont scandaleux !
    M. le président. Monsieur Migaud...
    M. Didier Migaud. Le débat est important, monsieur le président,...
    M. le président. Croyez bien que j'en suis conscient !
    M. Didier Migaud. ... parce qu'il porte sur l'une des dispositions les plus scandaleuses du projet de loi de finances. Permettez-nous donc d'insister !
    D'autre part, et je m'adresse là au Gouvernement et à M. Auberger, on ne peut nous accuser de ne pas vouloir favoriser l'emploi des salariés à domicile. En effet, c'est nous qui avons mis en place le dispositif, un dispositif d'incitation et non de privilège fiscal. C'est aussi nous qui avons proposé de ramener le taux de TVA de 20,6 % à 5,5 % pour les services à domicile.
    M. Jean-Louis Dumont. Excellente mesure !
    M. Didier Migaud. Nous n'avons pas de leçons à recevoir en la matière ! Nous avons, nous aussi, voulu favoriser la création d'emplois à domicile !
    M. Xavier Bertrand. Vous avez cassé le système !
    M. Didier Migaud. Nous avons, nous aussi, voulu combattre le travail au noir...
    M. Marc Laffineur. Alors, votez le projet !
    M. Didier Migaud. Mais nous faisons une différence entre un dispositif d'incitation et des privilèges fiscaux accordés à des personnes qui n'en ont pas besoin.
    M. Jean-Louis Dumont. Il y aura un effet d'aubaine !
    M. Didier Migaud. C'est la même chose avec les dispositions prévues pour la prime pour l'emploi et qui représenteront un euro par mois pour 8,5 millions de personnes !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Et 480 millions pour les contribuables !
    M. Didier Migaud. Ce chiffre d'un euro est à rapporter aux milliers d'euros de réduction offerts à quelques-uns.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président...
    M. Didier Migaud. Tout cela démontre l'injustice fiscale de vos propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Je mets aux voix...
    M. Augustin Bonrepaux. Je demande un scrutin public !
    M. le président. C'est trop tard, monsieur Bonrepaux !
    M. Augustin Bonrepaux. Dans ces conditions, nous ne voterons pas !
    M. le président. Vous auriez intérêt à voter pour votre amendement, monsieur Bonrepaux ! (Sourires.)
    Je mets aux voix l'amendement n° 258 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à neuf heures cinquante-cinq, est reprise à dix heures vingt-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.

2

AMÉNAGEMENT DE L'ORDRE DU JOUR

    M. le président. L'ordre du jour des prochaines séances de l'Assemblée a été aménagé comme suit, ce matin, en conférence des présidents.
    L'Assemblée tiendra séance lundi 20 octobre, à quinze heures et à vingt et une heures trente, pour poursuivre la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004.
    Il a été convenu que le débat relatif à l'article 41 autorisant le prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes aura lieu lundi, à partir de quinze heures, la suite de la discussion des autres articles reprenant vers dix-huit heures.
    Par ailleurs, les séances prévues demain samedi sont supprimées.
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, en ce qui nous concerne, nous n'avons nullement l'intention de faire traîner les débats, mais ce projet de budget comporte quand même des points extrêmement sensibles restant à examiner, notamment la nouvelle hausse de la déduction pour emploi à domicile, les exonérations d'impôt de solidarité sur la fortune, l'augmentation injuste de la taxe sur le gazole et, enfin, toutes les questions qui concernent les collectivités locales. Sur tous ces points, nous avons déposé des amendements, que nous défendrons avec vigueur pour démontrer l'injustice de ce projet de budget et toutes les conséquences qu'il va entraîner pour les collectivités locales. En dehors de cela, à moins qu'on nous prive de parole ou, comme tout à l'heure, de scrutin public, nous ne ferons pas traîner les débats.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. le président. Ces points ont été soulignés par M. Migaud, qui représentait le président de son groupe lors de la conférence des présidents.

3

LOI DE FINANCES POUR 2004

PREMIÈRE PARTIE
Reprise de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. Nous reprenons la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004.

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Nous poursuivons l'examen des amendements portant articles additionnels après l'article 4.

Après l'article 4 (suite)

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements n°s 158 corrigé et 259 identiques deuxième correction.
    L'amendement n° 158 corrigé est présenté par MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 259, deuxième correction, est présenté par MM. Migaud, Bonrepaux, Emmanuelli, Idiart, Bourguignon, Eric Besson, Bapt et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après article 4, insérer l'article suivant :
    « A la fin de la première phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, les mots : et de 10 000 euros pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2003, sont supprimés. »
    J'indique que, sur le vote de l'amendement n° 259 deuxième correction, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 158 corrigé.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, le sujet est connu : nous en débattons depuis hier. Nous faisons de la pédagogie politique car nous ne voulons pas que vous laissiez passer dans l'opinion le message que les dispositions que vous prenez sont faites pour favoriser l'emploi et le travail - alors que vous devriez faire des efforts et favoriser le travail qualifié.
    Dans le cas particulier, ce n'est pas du tout ce qui est proposé. Il ne s'agit pas de faire sortir le travail au noir de sa situation, cela a déjà été fait. Il s'agit de favoriser l'appétit insatiable des favorisés. Il s'agit de faire financer par les deniers publics les emplois de domestique des privilégiés de la fortune. Je l'ai démontré hier soir.
    Dans l'hypothèse - la plus fréquente - où ces emplois sont rémunérés au SMIC, avec la réduction d'impôt que vous offrez, une famille de bourgeois ou d'aristocrates décatis ayant deux emplois à domicile à temps plein...
    M. Michel Bouvard. Les aristocrates n'ont pas besoin d'être décatis pour avoir des employés à domicile !
    M. Jean-Pierre Brard. Pensez aux archiduchesses chères au coeur de M. Gantier, et dont certaines font partie de ses électrices. Parce que ces gens-là, monsieur Bouvard, ne s'abstiennent jamais : ils savent que la défense des privilèges passe par les urnes. Hélas ! les gens qui auraient besoin de changer l'ordre des choses ne le comprennent pas toujours d'une façon aiguë...
    Mais revenons à notre propos : vous allez faire financer, via les réductions d'impôt, par les autres contribuables, en particuliers tous ceux qui sont assujettis à la TVA, y compris les RMIstes et les smicards, la domesticité des privilégiés de la fortune ! Il fallait que cela fût dit, monsieur le ministre. Cela fait partie de la pédagogie politique à laquelle nous nous devons de satisfaire.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est le xixe siècle, ça !
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour soutenir l'amendement n° 259 deuxième correction.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement vise à éviter que l'injustice de la baisse des 3 % de l'impôt sur le revenu soit encore aggravée par la hausse du plafond des dépenses prises en compte au titre de la réduction d'impôt pour emplois à domicile, qui retrouve à peu près le niveau atteint en 1993 sous le gouvernement Balladur, avec le ministre du budget M. Sarkozy. Dès 1997, ce plafond avait été abaissé, sans que la mesure s'accompagne d'une réduction du nombre d'emplois à domicile. A contrario l'année dernière, vous l'aviez déjà relevé et vous ne pouvez pas démontrer qu'il en aurait résulté une augmentation du nombre de ces emplois.
    Nous ne comprenons pas pourquoi, parmi celles qui peuvent se payer un emploi à domicile, vous ciblez les 70 000 qui ont les plus hauts revenus ; il y en a peut-être moins que 70 000, d'ailleurs, parce que, au fur et à mesure que vous élevez le niveau de ce plafond, le nombre de foyers qui peuvent bénéficier au maximum de cette réduction diminue. C'est une injustice. Et vous ne pouvez même pas prétendre que cela conforte l'emploi. Vous vous moquez totalement des deux millions d'emplois à domicile qui existent dans tous le pays, puisque vous vous préoccupez uniquement de ces 70 000 emplois dans les familles privilégiées.
    Ce nouveau plafond revient à faire prendre en charge par le budget de l'Etat jusqu'à 35 % de la rémunération - salaire et cotisations. Et cet avantage vient s'ajouter aux autres aides, en particulier l'AGED ou certaines aides municipales.
    Certaines familles deviennent grâce à lui non imposables. Par exemple, grâce au cumul de la baisse de 3 % de l'impôt sur le revenu et de cette réduction nouvelle pour emploi à domicile, un célibataire ayant jusqu'à 26 000 euros de revenus et un couple marié ayant jusqu'à 39 000 euros de revenus ne paieront plus d'impôt. C'est une autre injustice de cette nouvelle augmentation que nous combattons.
    Au moment où notre pays se trouve devant de grandes difficultés, nous pensons que les crédits publics devraient être utilisés avec un peu plus d'efficacité et servir à favoriser l'emploi ou à réduire la pauvreté. Au lieu de quoi, vous aggravez la situation. Vous allez rejeter 300 000 chômeurs dans l'exclusion. D'un côté, vous accroissez les privilèges et, de l'autre, vous accroissez l'exclusion.
    M. Xavier de Roux. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nos collègues ont évoqué ces questions depuis plus d'une heure. Il est légitime, en deux ou trois minutes, de rappeler de quoi il s'agit.
    Les emplois familiaux, les emplois à domicile sont de vrais emplois qui permettent à des personnes âgées...
    M. Augustin Bonrepaux. Les autres ne sont pas de vrais emplois ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Monsieur Bonrepaux, je vous ai écouté. Je vous demande de faire de même.
    Ces emplois, qui se multiplient, assurent de réels services : maintien à domicile de personnes âgées, soins aux malades ; garde d'enfants ; soins aux handicapés. M. Lambert a eu raison d'insister sur ce point : ils sont tout à fait dignes et sont utiles à la société.
    Leur singularité tient au fait que l'employeur est une personne individuelle. Pendant très longtemps, ils n'avaient pas de statut. Au même moment, des entrepreneurs individuels assujettis aux BIC, BNC ou aux bénéfices agricoles pouvaient déduire les charges afférentes à l'emploi de certains de leurs salariés.
    On est là au coeur de la question du traitement fiscal de l'employeur individuel, et plus précisément de la famille. Cette réflexion a débuté avec Mme Aubry, il faut le rapppeler. C'est elle qui, au début des années 1990, a estimé que ce type d'emploi méritait l'intérêt de la collectivité,...
    M. Jean-Louis Idiart. En effet.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... que c'étaient de vrais emplois et qu'il convenait de les développer. Elle a donc mis en place un avantage fiscal, l'idée étant de prendre en charge grosso modo la moitié du coût de l'emploi. En 1993, le dispositif était en place. Le ministre de l'époque, Nicolas Sarkozy, parce qu'on s'était rendu compte que c'était une politique très efficace en termes de création d'emploi,...
    M. Didier Migaud. Pas du tout !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... souhaita doubler l'avantage fiscal, qui passa de 45 000 à 90 000 francs.
    En 1997, au moment du changement de majorité, la philosophie générale du système ne fut pas remise en cause. L'intérêt de ce type d'emplois avait été confirmé par des études nombreuses prouvant que cet avantage fiscal avait eu un véritable effet sur l'emploi - quantitatif, mais aussi qualitatif dans la mesure où beaucoup de ces emplois étaient au noir.
    M. Eric Woerth. Bien sûr !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ces emplois ont ainsi été officialisés, ce qui a d'ailleurs procuré de nouvelles rentrées à la sécurité sociale.
    Nos collègues, une fois majoritaires, se sont bien gardés de supprimer le dispositif.
    M. Jean-Louis Idiart. Bien entendu.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. A l'époque, nous n'avons pas entendu de considérations aussi idéologiques que celles que nous avons entendues cette nuit et ce matin. En revanche, ils ont divisé par deux l'avantage fiscal et on est repassé de 90 000 à 45 000 francs.
    A l'automne 2002, au moment de la discussion de la loi de finances 2003, le Gouvernement a proposé de remonter l'avantage de manière très raisonnable ; l'idée était que la moitié du coût de ces emplois serait déductible ce qui n'est pas exorbitant. Il s'agissait de faire passer le plafond à 10 000 euros, soit 66 000 francs, montant intermédiaire entre les 45 000 francs de Jospin et les 90 000 de Sarkozy.
    Mais nous n'avons pas voulu que cet avantage s'applique dès les revenus 2002, pour éviter tout effet d'aubaine. La décision d'embaucher ayant déjà été prise en 2002, il n'y a pas de raison de revenir dessus. Pierre Méhaignerie et moi-même avons donc souhaité proportionner l'avantage fiscal, et ne passer à 10 000 euros qu'au titre des revenus 2003, pour inciter les particuliers à embaucher en 2003.
    M. Hervé Mariton. Très bien !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ainsi, nos collègues socialistes et communistes ne discutent pas sur une novation du projet de loi de finances pour 2004, mais d'une mesure qui a été votée l'année dernière.
    Toutes les études dont nous disposons prouvent l'efficacité de ce dispositif.
    M. Didier Migaud. Ce n'est pas vrai du tout !
    M. le président. Monsieur Migaud, vous allez avoir la parole !
    M. Didier Migaud. C'est un mensonge !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Monsieur Migaud, à aucun moment, je n'ai employé - et je n'emploierai - le mot « mensonge ».
    Comme l'a excellemment dit tout à l'heure Philippe Auberger, vous avez une approche idéologique de la question qui ne vous permet pas de voir la réalité des chiffres.
    M. Didier Migaud. Pas du tout !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ces chiffres, je peux vous les donner.
    M. Didier Migaud. Vous n'avez pas expliqué pourquoi nous sommes à l'origine de ce dispositif !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous en avons sur de longues périodes...
    M. le président. Conservons nos bonnes dispositions !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Entre 1993 et 1997, 100 000 emplois qui ont été créés grâce à ce dispositif. Et on peut légitimement penser que, équilibré sur 10 000 euros, il aura un effet du même ordre.
    Vous voyez, il n'y a aucune raison de passionner cette question à l'excès. Certes, elle est fondamentale pour la politique de l'emploi, dans la mesure où il y a là un gisement d'emplois tout à fait extraordinaire. En maintenant ce plafond à 10 000 euros, nous ne faisons donc que nous inscrire dans une politique initiée en 1992 et qui, jusqu'à présent, a connu un réel succès. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand.
    M. Xavier Bertrand. M. Brard a parlé tout à l'heure de « pédagogie politique ». J'avais cru entendre « démagogie politique ».
    M. Jean-Pierre Brard. Il faut changer votre appareil, cher collègue. Mettez votre prothèse !
    M. Xavier Bertrand. Peut-être mon ouïe m'a-t-elle trahi ? Reste que la façon dont les groupes socialiste et communiste abordent ce débat est profondément réductrice : ils ne parlent que des familles qui vont bénéficier de cette réduction d'impôts. A aucun moment ils n'ont parlé de celles dont un des membres retrouvera un emploi grâce à ce dispositif ou qui, ayant déjà cet emploi, verra son revenu augmenter.
    Si vous connaissiez ce secteur d'activité, vous sauriez que certaines conventions collectives ont été revues depuis le vote intervenu l'an dernier. On y a prévu, entre autres améliorations, de réévaluer les salaires conventionnels. Il faut le savoir.
    Vous faites complètement abstraction de ce que recouvrait cette démarche. Il ne s'agit pas d'une simple réduction d'impôts. Il en va aussi de la place des femmes dans la société et du choix que font certaines de s'investir professionnellement et de faire garder leurs enfants.
    M. Philippe Auberger. Très juste !
    M. Xavier Bertrand. Or à aucun moment vous n'en avez parlé.
    Les emplois à domicile ont toujours existé, sans qu'il faille remonter aussi loin que l'a fait M. Brard de façon un peu irrespectueuse, si ce n'est vis-à-vis de ses collègues de la majorité, du moins vis-à-vis des personnes et des emplois concernés. Et ils ont toujours existé sous une forme clandestine. Aujourd'hui, que ces salariés puissent travailler dans un cadre légal...
    M. Philippe Auberger. Oui, il faut les protéger ! Pensez aux accidents du travail !
    M. Xavier Bertrand. ... et, surtout, que la protection sociale leur soit garantie, n'est pas neutre.
    Autre point, qui peut vous gêner : ce dispositif permettra aux familles de proposer davantage d'heures à ces personnes. Donner plus ou moins de temps, plus ou moins d'argent : un tel débat vous échappe. Et vous n'êtes certainement pas qualifiés pour le mener devant les Français et les personnes concernées.
    Mais il y a un dernier point : j'ai été choqué par la tonalité de ces débats. Vous voulez introduire une notion qui vous est assez coutumière, mais qui remet en cause un certain nombre de règles décidées : la rétroactivité. Cet amendement, s'il était voté, changerait complètement les règles du jeu. Vis-à-vis des familles qui vont bénéficier de cette réduction d'impôts comme de ceux qui occuperont les emplois créés, ce serait dangereux et particulièrement inique. Voilà pourquoi je suis contre ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je crois que notre collègue Xavier Bertrand est excusable parce qu'il n'était pas là hier soir,...
    M. Xavier Bertrand. Vraiment...
    M. Augustin Bonrepaux. ... quand nous avons proposé un crédit d'impôt qui avait pour objet de faire bénéficier l'ensemble des familles d'une mesure leur permettant de prendre en charge un emploi à domicile. C'est en suivant l'avis du Conseil des impôts que nous avons opté pour cette formule, qui est indéniablement efficace.
    La réussite du dispositif prouve que Martine Aubry a eu raison de l'instituer. Mais elle l'a institué à un niveau très modeste et elle a réussi à créer de très nombreux emplois, puisque 2,2 millions de familles ont recours à un emploi à domicile.
    Nous ne contestons donc pas l'intérêt de cette mesure. Ce que nous contestons, c'est que seulement 1,3 million de familles puissent bénéficier de la réduction d'impôt sur les salaires qu'elles paient, pendant que 900 000 familles ne peuvent pas en bénéficier.
    M. Jean-Louis Idiart. Eh oui !
    M. Augustin Bonrepaux. Pour en revenir à nos amendements, nous n'avons toujours pas de réponse à la question que nous avons posée dès le commencement du débat : pourquoi ciblez-vous vos mesures sur 70 000 familles seulement, ce qui en fait des privilèges fiscaux ? Je n'avance pas ce chiffre à la légère, c'est celui qui nous a été fourni l'année dernière par le rapporteur général. Cette année, il nous donne moins d'informations dans son rapport.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Parce qu'il n'y a rien dans la loi de finances à ce sujet.
    M. Augustin Bonrepaux. Il évoque simplement des études qui ont été faites, mais ne nous prouve pas que l'augmentation de la réduction d'impôt décidée l'an dernier a permis de créer des emplois. Cela ne l'empêche pas d'invoquer ce motif pour soutenir qu'il faut continuer de l'appliquer en 2004. Tout cela montre qu'il s'agit bien d'un cadeau fiscal.
    M. Jean-Louis Idiart. Exactement !
    M. Augustin Bonrepaux. De plus, l'année dernière, le rapporteur général se vantait d'avoir supprimé l'effet d'aubaine. C'est vrai, mais parce que nous l'avions dénoncé. Cette année, il considère qu'il est tout à fait normal que le relèvement du plafond se traduise par un effet d'aubaine. De fait, une famille qui emploie déjà un salarié à domicile verra son avantage fiscal encore accru sans qu'elle ait fait quoi que ce soit qui le justifie. Au moment où les problèmes sociaux s'accumulent et où vous faites des économies sur le dos des chômeurs en fin de droits, c'est cela que vous appelez de la justice fiscale ?... C'est déplorable !
    M. Gérard Bapt. Ce n'est pas digne !
    M. Augustin Bonrepaux. Nous sommes scandalisés, nous sommes révoltés par l'utilisation que vous faites de l'argent public ! Je le maintiens : c'est un gaspillage des crédits. Car, en réalité, vous n'avez aucun argument à faire valoir. Pourquoi cibler la nouvelle réduction d'impôt sur 70 000 familles ?
    M. Xavier de Roux. Ce sont celles qui paient le plus d'impôts !
    M. Augustin Bonrepaux. Pourquoi laisser de côté les 2,2 millions de familles qui emploient un salarié à domicile, et notamment les 900 000 familles non imposables qui, elles, n'ont droit à rien ? (« Encore ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Jacques Descamps. Cela fait deux jours que vous dites la même chose !
    M. Augustin Bonrepaux. Ces emplois-là sont peut-être moins rémunérés...
    M. Xavier Bertrand. C'est seulement maintenant que vous en parlez ?...
    M. Augustin Bonrepaux. ... mais, justement, ne conviendrait-il pas d'aider les familles à mieux les rémunérer et à y recourir davantage, puisqu'il s'agit d'emplois familiaux ?
    M. Jean-Jacques Descamps. On a compris !
    M. Augustin Bonrepaux. Les femmes de ménage n'ont pas des revenus très élevés, mais n'ont-elles pas le droit, elles aussi, de laisser leurs enfants en garde ? N'ont-elles pas le droit, elles aussi, de connaître des moments de liberté ? La liberté serait-elle uniquement faite pour les privilégiés ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est cela que nous dénonçons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Xavier de Roux. C'est un privilège de payer des impôts !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Un de nos collègues de droite a dit que nous parlons de la même chose depuis deux jours. Au risque de le décevoir, je lui annonce que cela risque de durer encore, parce que tant qu'il y a de l'injustice, il n'y a aucune raison que cesse le combat contre l'injustice. Et vous êtes là, messieurs, pour promouvoir les injustices.
    M. Jean-Jacques Descamps. Et la démocratie ?
    M. Jean-Pierre Brard. La démocratie, c'est précisément la libre confrontation des idées. Alors, si vous croyez nous obliger à nous taire, vous vous trompez !
    M. Xavier de Roux. Nous parlons des impôts, revenez au sujet !
    M. Jean-Pierre Brard. Le premier dispositif avait sa légitimité dans la mesure où il s'agissait de faire sortir du travail illégal et de la clandestinité un grand nombre d'emplois. En outre, le rapporteur général l'a rappelé, il a sans aucun doute permis d'accroître le produit des cotisations sociales.
    M. Jean-Louis Dumont. Bien sûr !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce qui vous gêne, on le sent bien, c'est que nous braquions les projecteurs sur l'une des mesures les plus injustes et les plus socialement symboliques de votre projet de loi. Vous êtes comme Tartuffe : lorsque le sein est découvert, il faut le couvrir tout de suite !
    M. Xavier de Roux. Pas d'exhibition, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Pour l'exhibitionnisme, vous êtes sûrement plus fort que moi !
    Vous avez supprimé sans pitié 300 000 emplois-jeunes, qui constituaient pourtant un véritable sas d'entrée dans la vie. Mais dès qu'il s'agit de beurrer la tartine des privilégiés, on vous prend illico les doigts dans la motte de beurre, parce que c'est à pleines mains que vous l'étalez ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Philippe Auberger. On préfère la confiture !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous financez la domesticité des privilégiés.
    M. Xavier de Roux. Le mot est lâché !
    M. Jean-Pierre Brard. Mais vous ne voulez pas l'entendre. Vous nous dites que nous avons une approche idéologique. Pas du tout ! C'est la vôtre qui l'est. Dans ce siècle et au précédent, où l'aristocratie de la fortune a remplacé l'aristocratie de la particule, vous êtes évidemment toujours du même côté. Vous favorisez l'amassement des fortunes, qui sont thésaurisées, alors que nous défendons une logique exactement opposée. Nous sommes pour la bonne rémunération et pour la qualification du travail, parce que cela alimente la consommation et que cela crée de nouveau du travail, dans un cercle vertueux.
    Xavier Bertrand se dit choqué. On se demande par quoi, si ce n'est par le dévoilement de ses turpitudes !
    M. Xavier Bertrand. Les vôtres me suffisent !
    M. Jean-Pierre Brard. C'est une sorte de Stakhanov, Xavier Bertrand, un Stakhanov de la défense des privilégiés !
    M. Xavier de Roux. Vous vous y connaissez, en stakhanovisme ! Vous êtes un homme du passé !
    M. Jean-Pierre Brard. Je pense que si les gens dont il est l'obligé étaient reconnaissants, ils lui enverraient des peits mots, et si, comme autrefois, ils mettaient au dos de l'enveloppe le nom de l'expéditeur, on verrait arriver à la poste des courriers signés Seillière, Kessler, Mulliez, Arnault...
    M. le président. Allons, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Et ils pourraient écrire à Xavier Bertrand : « Vous avez bien travaillé pour nous, vous avez droit à notre reconnaissance éternelle. »
    M. le président. Il faut conclure.
    M. Jean-Pierre Brard. M. Bertrand nous dit que nous nous intéressons seulement aux familles bénéficiaires et que nous nous désintéressons de ceux qui rendent le service. Pas du tout ! Nous, nous nous intéressons aux deux.
    M. Xavier Bertrand. Grande nouveauté !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce que vous n'acceptez pas, c'est que nous ayons dévoilé que, de nouveau, vous faites payer par l'impôt des emplois que vous dites de service, mais qui sont réservés au service des riches.
    M. le président. Merci, monsieur Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Encore deux phrases, monsieur le président.
    Vous seriez plus convaincants si vous reconnaissiez que les riches du 16e et du 17e arrondissement, ou de Rueil-Malmaison, vont être les principaux bénéficiaires de cette mesure que vous faites payer par les plus pauvres. Mais cela vous gêne, et vous ne voulez pas qu'on le dise devant les gens qui sont dans les tribunes ou derrière les écrans de télévision.
    Vous voici démasqués, et donc mal à l'aise !
    M. Xavier de Roux. Nous ne portons pas de masques !
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques n°s 158 corrigé et 259 deuxième correction.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   38
Nombre de suffrages exprimés   38
Majorité absolue   20
Pour l'adoption   13
Contre   25

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 352, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Après la première phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
    « Ce plafond est limité à 6 900 euros pour les contribuables dont le revenu au sens de l'article 197 du code général des impôts excède 47 932 euros ».
    La parole est à M. Jean-Louis Idiart, pour défendre cet amendement, dont j'observe d'ailleurs qu'il procède de la même logique que les deux suivants, n°s 353 et 354, que nous verrons ensuite.
    M. Xavier de Roux. On pourrait peut-être s'en passer !
    M. le président. Laissez-moi présider, monsieur de Roux.
    M. Jean-Louis Idiart. Monsieur le président, nous nous plaçons sous votre protection face aux déclarations de M. de Roux. Mais on peut comprendre qu'il en ait assez d'entendre parler de ce sujet, car c'est un moment difficile pour lui et pour la majorité.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Vous êtes contre l'emploi, je le confirme.
    M. Jean-Louis Idiart. Au contraire, monsieur le ministre, les mesures qu'avait prises initialement Martine Aubry étaient destinées à créer de l'emploi et à blanchir certaines vilaines pratiques de travail au noir ; elles reposaient sur une démarche dynamique en faveur d'un nouveau secteur d'activité et représentaient en même temps une libération pour ces salariés. Mais vous alliez trouver en elles une magnifique opportunité, quelques années plus tard, avec le dispositif mis en place par M. Sarkozy, qui tenait là de quoi l'intéresser. A l'époque, en effet, il éprouvait de grandes difficultés à faire passer cette idée assez curieuse et très inégalitaire qu'était la suppression du taux marginal de l'impôt sur le revenu. Souvenez-vous de l'entretien qu'il avait eu avec quelques députés : faute de pouvoir faire adopter cette mesure, il convint avec eux d'augmenter à due concurrence la réduction d'impôt au titre de l'emploi à domicile, ce qui procurait finalement le même avantage aux gros contribuables. Ainsi, vous avez travesti une mesure qui traduisait à l'origine un effort substantiel de l'Etat en faveur d'une plus grande justice et, lorsque nous sommes revenus aux responsabilités, nous avons dû apporter un correctif.
    Aujourd'hui, vous récidivez. Ce que nous ne comprenons pas, c'est qu'au moment où l'Etat a de sérieuses difficultés et où le Gouvernement tente de faire des efforts en matière budgétaire, en appelant notamment à réduire les dépenses, vous aggraviez le coût fiscal de ce dispositif. Pourquoi ne pas mettre ces moyens financiers à la disposition du plus grand nombre ? Pourquoi, dans ce pays, 900 000 foyers doivent-ils être privés de cet avantage ?
    Je serais très curieux de connaître, territoire par territoire, l'effet des mesures que vous proposez. Nous allons faire ce travail dans nos circonscriptions. Nous allons rechercher combien de familles bénéficieront du relèvement du plafond et présenter, en regard, le nombre de familles en difficulté, ainsi que la liste des services publics ou des associations s'occupant d'aide à domicile qui sont en difficulté financière, pour voir si ce n'est pas plutôt de ce côté-là qu'il faudrait faire porter l'effort.
    Dans ce projet de budget, vous continuez à vous égarer sur le mauvais chemin. Aussi les amendements que nous avons déposés ont-ils pour objet de limiter l'avantage fiscal que vous voulez octroyer aux contribuables les plus aisés. Nous pourrions ainsi opter pour une autre méthode qui nous permettrait de ne plus réserver ce dispositif aux 70 000 familles que vous voulez privilégier, mais de l'étendre aux 900 000 familles qui, jusqu'à présent, n'ont droit à rien. Cela aussi, il faut l'expliquer sur le terrain et nous allons nous y employer.
    Vous nous faites en permanence le procès de ne pas vouloir créer d'emplois. Mais c'est nous qui sommes à l'origine de la mesure. Vos reproches n'ont donc aucun fondement.
    Nous sommes aussi pour le blanchiment du travail au noir. C'est pour cela que nous avons fait voter la réduction du taux de TVA sur les travaux des particuliers dans leur logement. Je n'en dirais pas autant de la réduction de TVA pour laquelle vous faites semblant de vous battre à Bruxelles. Est-ce vraiment pour blanchir du travail au noir ? Est-ce vraiment pour créer des emplois ? N'est-ce pas plutôt pour reconstituer les marges de quelques-uns ? Car, finalement, c'est à cela que vous aboutirez.
    M. Xavier Bertrand. Et la hausse des salaires, c'est une vue de l'esprit ?
    M. Jean-Louis Idiart. Votre méthode n'est pas la bonne. Si nous insistons aussi fortement, c'est pour que vous la corrigiez, car elle aura des conséquences très graves sur l'ensemble du territoire. Voilà les raisons pour lesquelles nous invitons l'Assemblée à voter l'amendement n° 352. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

    M. le président. J'indique d'ores et déjà à l'Assemblée que, sur le vote de l'amendement n° 353, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 352 ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable pour des raisons qui tiennent à notre souci de développer l'emploi.
    M. Jean-Jacques Descamps. Très bien !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Si on limitait l'avantage fiscal pour les employeurs qui ont la plus grande capacité à offrir des emplois à plein temps, et a fortiori si on les en excluait, ce serait une absurdité du point de vue de la politique de l'emploi. Vous avez argumenté uniquement en termes d'égalité, monsieur Idiart, sans du tout vous poser la question de l'emploi.
    M. Jean-Louis Idiart. J'ai commencé par cela !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Or c'est une question essentielle, car il s'agit de vrais emplois, je le répète.
    Pour nous l'exemple d'un contribuable fortuné qui paie l'impôt de solidarité sur la fortune. On peut supposer qu'il fait appel à plusieurs emplois familiaux, chacun étant chargé d'une tâche différente, par exemple prendre soin d'une grand-mère handicapée que l'on veut garder à la maison, s'occuper des jeunes enfants, etc. Eh bien, ce contribuable ne bénéficiera d'un avantage fiscal que pour un seul emploi et à hauteur de la moitié de son coût. Il faut bien voir de quoi l'on parle. La réduction d'impôt est limitée à la moitié du coût d'un emploi.
    M. Jean-Jacques Descamps. Ils ne comprennent rien !
    M. Jean-Louis Idiart. C'est parce qu'on n'est pas de droite !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Notre souci, c'est avant tout d'aider l'ensemble des familles à développer les emplois familiaux, parce qu'ils répondent à de vrais besoins...
    Mme Muguette Jacquaint. Pour qui ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... et aussi parce qu'ils donnent une véritable dignité et de vraies satisfactions à ceux qui les exercent.
    Avis défavorable de la commission sur l'amendement n° 352.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. On ne peut pas laisser le rapporteur général dire que M. Idiart se préoccupe uniquement de l'égalité - même si l'égalité devant l'impôt, ce n'est pas rien ! - et se désintéresse de l'emploi.
    La question qui se pose à nous dans cet hémicycle, c'est à la fois celle de l'égalité et celle de l'efficacité des mesures prises, cet éternel mélange entre justice sociale et fiscale et efficacité économique.
    Votre raisonnement, monsieur le rapporteur général, serait plus crédible et plus acceptable par nous si, dans la même loi de finances, du fait des conséquences de la politique économique et fiscale que vous appliquez, vous n'étiez pas obligé de rogner considérablement sur le budget de l'emploi, par exemple, en réduisant une nouvelle fois les crédits d'insertion et le nombre de contrats aidés. Votre politique sociale et fiscale est à sens unique et joue à contre-emploi avec, dans peu de domaines - dont celui évoqué à juste titre par Jean-Louis Idiart -, beaucoup d'argent, au contraire, pour très peu d'emplois créés.
    Nous sommes au coeur du sujet parce que - nous vous l'avons dit dès le débat de politique générale et répété depuis un an - vous avez renoncé à toute pédagogie de l'impôt.
    M. Xavier Bertrand. Nous ne sommes plus dans la discussion générale ! Parlez des amendements !
    M. Eric Besson. Vous n'avez plus aucune épine dorsale en la matière. Vous avez renoncé à tout discours républicain. Vous ne cessez d'assimiler l'impôt à un prélèvement indu - certains même ont dû prononcer le mot « racket » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) - et vous n'évoquez plus que les allégements de ce que vous appelez des charges.
    M. Marc Le Fur. La République est menacée !
    M. Jean-Pierre Brard. Oui !
    M. Eric Besson. La République est en effet menacée lorsque le Gouvernement renonce à certains de ses fondements. L'idée que, dans une république, chacun contribue aux charges collectives à proportion de ses facultés fait partie du socle républicain.
    Mme Muguette Jacquaint. Très bien !
    M. Hervé Mariton. C'est vrai.
    M. Eric Besson. Or, depuis dix-huit mois, le Gouvernement a totalement renoncé à cette pédagogie. C'est d'ailleurs pourquoi il est dans l'impasse. Il veut à la fois réduire la fracture sociale - notion si souvent invoquée il y a quelques années et malheureusement oubliée - ...
    M. Marc Le Fur. Pendant cinq ans !
    M. Eric Besson. ... en augmentant les dépenses, et surtout ne plus parler d'impôts. De même, vous ne parlez plus de cotisations sociales, mais exclusivement de charges, sans dire comment vous pourriez en permanence baisser ce que vous appelez des charges et que nous appelons des cotisations, tout en étendant la couverture sociale.
    Vous êtes dans une impasse financière mais, plus grave encore, dans une impasse intellectuelle, dont le débat que nous avons aujourd'hui est la manifestation la plus évidente. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 352.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste ont présenté l'amendement n° 353 ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Après la première phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
    « Ce plafond est limité à 6 900 euros pour les contribuables redevables de l'imposition visée aux articles 885 A à 885 Z au titre de l'année d'imposition. »
    M. Idiart a déjà présenté l'amendement n° 353, mais M. Bapt va compléter son intervention.
    M. Jean-Louis Dumont. Ne le provoquez pas, monsieur le président, sinon, il va recommencer !
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur Bapt.
    M. Gérard Bapt. Cet amendement est à l'évidence dans l'esprit ce que vient de défendre mon collègue Eric Besson.
    Constatant que votre mesure de relèvement du plafond des dépenses éligibles ne profitera au plus qu'à 70 000 ménages pourvoyeurs d'emploi, qui figurent bien entendu parmi les plus aisés, nous vous proposons, monsieur le ministre, mes chers collègues, d'exclure du bénéfice de cette hausse du plafond de dépenses prises en compte les ménages redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est vrai !
    M. Gérard Bapt. Sans doute, les 70 000 ménages bénéficiaires de cette mesure concernant l'emploi à domicile ne sont pas tous éligibles à l'impôt sur la fortune, mais j'imagine que c'est le cas d'une proportion notable d'entre eux.
    Vous donneriez, en votant cet amendement, un signe plus encourageant qu'en refusant de répondre au souhait de votre propre majorité de faire évoluer les tranches du barème de l'impôt sur la fortune en fonction de l'inflation. Ce refus n'est qu'un effet d'affichage : une telle mesure ferait en effet apparaître d'une manière symboliquement plus marquée une politique menée au seul profit des ménages les plus aisés. Mais nous sommes en pleine mystification, puisque, dans le même temps, par le relèvement du plafond des dépenses pour l'emploi à domicile, vous servez les mêmes intérêts, en allant même sans doute beaucoup plus loin.
    On retrouve d'ailleurs le même type de mystification en ce qui concerne la transformation pour 600 000 personnes et, à terme, pour 2,5 millions de nos compatriotes, de l'ASS en RMI, qui lui-même sera transféré vers les départements avec le RMA : double mystification.
    La même logique sous-tendait la discussion de la loi pour l'initiative économique. Il n'est pas de meilleure image de votre politique que ce texte qui a pu procurer quelque 500 millions de bénéfice sur l'impôt sur la fortune à ceux qui en sont redevables, au titre de la création d'entreprise ou du développement d'activité, alors que, dans le même temps, on transformait en avance remboursable une prime modeste - entre 30 et 50 000 francs - destinée aux allocataires sociaux de l'ASS ou du RMI qui voulaient se sortir de leur situation en fondant une entreprise et éventuellement en créant des emplois ? Vous avez transformé une prime en avance remboursable : quelle mystification !
    Enfin, vous allez renforcer encore les avantages pour les ménages plus aisés à travers une mesure qui n'incitera évidemment pas ces ménages, qui dépassent le plafond actuel des dépenses éligibles et sont redevables de l'impôt sur la fortune, à créer des emplois supplémentaires. Ils n'en ont pas besoin pour employer du personnel de maison.
    La transformation de cette mesure en crédit d'impôt, au contraire, aurait été génératrice d'emplois. Au moins, moralisez-la un minimum en acceptant cet amendement !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Je suis tout de même surpris que nous n'ayons aucune explication de la commission ni du Gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Si vous en voulez, vous en aurez !
    M. Jean-Jacques Descamps. Depuis le temps qu'on en parle !
    M. Xavier de Roux. Le disque est rayé !
    M. Augustin Bonrepaux. ... sur des questions aussi importantes. Monsieur le ministre, vous prétendez qu'il s'agit d'une mesure en faveur de l'emploi. Si c'était le cas, nous voudrions bien y souscrire. Mais sur les 2,2 millions de familles qui emploient une personne à domicile, 900 000 familles - les plus modestes - ne bénéficient pas de la réduction. Or, justement, parce que ce sont les plus modestes, si elles emploient quelqu'un à domicile, c'est qu'elles en ont réellement besoin ! Mais vous ne faites rien pour elles ! Nous vous avons proposé de transformer la déduction fiscale en crédit d'impôt, qui serait un encouragement à accroître le recours à l'emploi à domicile. Mais vous restez muets, quand vous ne répondez pas non à toutes nos propositions dès lors qu'il s'agit des plus modestes.
    M. Xavier de Roux. Arrêtez !
    M. Augustin Bonrepaux. Nous ne comprenons pas que vous puissiez réserver à 70 000 familles le bénéfice de la déduction fiscale...
    M. Philippe Auberger. C'est toujours mieux que les 200 familles !
    M. Augustin Bonrepaux. ... et prétendre que cela va créer des emplois ! Mais les emplois existent déjà ! Quel effet d'aubaine ! Ces familles pourront déduire davantage l'année prochaine ! Où sont les créations d'emplois ? Où est la sécurité de l'emploi ? D'un côté, 70 000 familles bénéficient de la mesure,...
    Mme Muguette Jacquaint. Et les autres ?
    M. Augustin Bonrepaux. ... et pour les autres, il n'y a rien ! Et on prétend que c'est pour que les femmes soient libres ! Il n'y a donc de liberté que pour les plus riches ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Eric Woerth. C'est ridicule !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est pourquoi cet amendement est extrêmement important. Il tend à éviter qu'au bénéfice exorbitant lié à une baisse d'impôt excessive sur les tranches les plus élevées, - c'est-à-dire concernant les familles les plus riches de notre pays - ne vienne s'ajouter une déduction fiscale pour emploi à domicile. Les familles qui acquittent l'impôt sur la fortune ne sont pas les plus pauvres ! Vous leur avez déjà permis une économie de 500 millions d'euros sur cet impôt. Ont-elles besoin d'un avantage supplémentaire ? C'est tout cela que nous dénonçons !
    M. Eric Woerth. Minable !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est une injustice ! C'est une mesure idéologique, libérale, je dirai même ultra-libérale !
    M. Xavier de Roux. C'est vous qui parlez d'idéologie ?
    M. Augustin Bonrepaux. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement sur lequel nous avons demandé un scrutin public.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, à qui je demande d'être bref parce qu'on s'est déjà beaucoup exprimé sur ce sujet.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous savez, monsieur le président, il est des silences qui parlent fort. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    M. Jean-Jacques Descamps. Ce que vous dites est scandaleux ! Cela fait trois nuits que l'on passe à répéter la même chose !
    Mme Muguette Jacquaint. Et alors ?
    M. le président. Mes chers collègues !
    M. Jean-Pierre Brard. Si vous êtes fatigués, vous n'êtes pas obligés d'être député ! Vous pouvez laisser votre emploi à quelqu'un d'autre !
    M. le rapporteur général et M. le ministre ont parfaitement compris que si la parole est d'argent, le silence est d'or ! Et qu'à parler ils ne pourraient qu'aggraver leur cas !
    M. Xavier de Roux. Ah ! Taxez le silence !
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur de Roux, vous seriez prêt à taxer tout ce qui appartient aux autres, notamment les plus modestes.
    M. Gérard Bapt. La droite taxe les retraités !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous, nous proposons de taxer les plus riches. C'est une question d'équité.
    Monsieur le président, ce que nous disons dans cet excellent amendement, c'est que les redevables de l'impôt sur la fortune ne manquent pas d'étoffe et n'ont nullement besoin d'un avantage supplémentaire. En revanche, ils sont plus enclins à la fraude.
    M. Xavier de Roux. Oh !
    M. Jean-Pierre Brard. Donc, plutôt que de leur donner de l'argent, développons les contrôles fiscaux pour leur faire rendre gorge et les empêcher de tricher. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française) Mais vous ne voulez pas traiter ainsi vos affidés.
    M. Xavier de Roux. On dirait du Zola !
    M. Eric Woerth. Que de haine !
    M. Gérard Bapt. La lutte contre la misère, ce n'est pas Zola, c'est l'actualité. C'est la journée mondiale du refus de la misère, aujourd'hui !
    M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand.
    M. Xavier Bertrand. Mes chers collègues, si nous taxions l'idéologie et la démagogie, nous ne manquerions pas de recettes nouvelles depuis quelques jours. Surtout ce matin ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Monsieur Bertrand ! Je vous en prie !
    M. Xavier Bertrand. Par ailleurs, M. Bonrepaux s'est un peu laissé emporter par sa fougue. S'il met en avant la sécurité de l'emploi, il ne faut certainement pas adopter les amendements présentés.
    A aucun moment, vous n'avez parlé de la logique qui sous-tend la mesure du Gouvernement : pouvoir augmenter les salaires et donc les revenus des personnes concernées. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Gérard Bapt. Vous n'y croyez pas !
    M. Xavier Bertrand. Non seulement j'y crois, mais vous le sauriez également si vous connaissiez ce secteur.
    Enfin, l'argumentation de M. Bapt aurait été plus légitime si une telle disposition avait été présentée au moment où la vignette automobile a été supprimée.
    M. Jean-Louis Idiart. Quel est le rapport ?
    M. Augustin Bonrepaux. C'est une très bonne mesure !

    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais maintenant mettre aux voix l'amendement n° 353.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   45
Nombre de suffrages exprimés   45
Majorité absolue   23
Pour l'adoption   15
Contre   30

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste ont présenté l'amendement n° 354, ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Après la première phrase du troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée : "Ce plafond est limité à 6 900 euros pour les contribuables dont le revenu au sens du V de l'article 1417 excède le montant mentionné au cinquième alinéa du a du 5 de l'article 158.. »
    La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir cet amendement, qui s'inscrit, me semble-t-il, dans la même logique que les précédents.
    M. Jean-Louis Dumont. Certes, monsieur le président, mais permettez-moi une remarque. Nous avons une discussion de fond, qui concerne l'équité fiscale, la place de chacun dans un Etat républicain et le droit au travail.

    Or, la majorité semble se focaliser sur quelques cas et défendre, comme si c'était une citadelle assiégée, un groupe de quelques dizaines de milliers de familles. Elle n'essaie pas de voir si cette mesure, étendue et mieux encadrée, ne permettrait pas de donner une autre dynamique et, peut-être, de retrouver quelques-unes des vraies valeurs de la société.
    Oui, il y a, dans ce pays, de la misère. Ce matin, plusieurs intervenants ont rappelé que nous étions le 17 octobre, journée consacrée à la lutte contre la misère dans le monde entier, mais aussi dans notre pays, dans les rues de nos communes, dans certains quartiers où les gens n'ont pas les ressources minimales pour vivre. Et on mégote sur quelques euros que l'on prendrait à des couples, à des ménages qui travaillent ! Cela revient à creuser davantage les fossés séparant différentes couches de la société.
    Cet amendement n° 354 limite à 6 900 euros le plafond des dépenses prises en compte au titre de la réduction d'impôt pour celles et ceux qui bénéficient d'un revenu fiscal supérieur à 113 900 euros, c'est-à-dire pour qui les abattements sont plafonnés. Cette proposition, qui tient compte de la situation fiscale, vise à fournir au budget de l'Etat d'autres ressources afin de pouvoir venir en aide aux familles.
    Chers collègues, je voudrais vous donner quelques exemples. Le premier concerne les crèches. Tous les ministres de la famille successifs nous rappellent régulièrement les efforts consentis par les gouvernements en matière d'investissements, mais on ne se préoccupe jamais du fonctionnement. Ainsi, la Caisse nationale d'allocations familiales vient d'imposer des conventions tripartites dans chaque établissement qui exigent l'intervention d'une collectivité locale. Lorsque la collectivité locale n'intervient pas, les familles les plus pauvres, souvent des familles monoparentales en cours d'insertion ou de réinsertion, voient augmenter le prix de la journée de garde - c'est le cas dans la crèche gérée par une association que je préside - tandis que les familles qui ont les ressources les plus importantes voient le prix de journée diminuer.
    Voilà à quoi nous assistons sur le terrain, lorsque, dans cet hémicycle, et ailleurs, on ne prend pas la précaution de s'écouter, ni surtout celle de remédier aux effets de seuil. Vous ne voyez, dans cet avantage fiscal, que la promesse d'emploi. Or, lorsque cette mesure en faveur des emplois dans les familles a été prise, elle a simplement permis de régulariser la situation,...
    M. Eric Woerth. Ce n'est pas déjà si mal !
    M. Jean-Louis Dumont. ... - c'était, en effet, une bonne mesure - et de sortir des emplois de la clandestinité.

    Tout le monde y a gagné : le salarié qui, enfin, obtenait un statut,...
    M. le président. Monsieur Dumont...
    M. Jean-Louis Dumont. ... l'employeur, qui se trouvait dans la légalité, et l'Etat, dont les ressources augmentaient. Aujourd'hui, ce n'est plus du tout le cas, puisque, pour pouvoir bénéficier d'un certain nombre d'avantages, on déclare, souvent, un nombre d'heures inférieur à celui des heures travaillées. C'est sur ce problème qu'il faudrait nous pencher et cela devrait nous inciter à élargir cette mesure.
    M. le président. Monsieur Dumont !
    M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le président, dès que je prends la parole, vous vous énervez et vous voulez me la retirer ! Je ne comprends pas !
    M. le président. Je suis très calme, monsieur Dumont. Je vous demande simplement de conclure.
    M. Jean-Louis Dumont. Votre chronomètre n'indique pas la même chose que le mien.
    M. le président. Monsieur Dumont, vous n'avez pas de chronomètre. Moi, j'en ai un !
    M. Jean-Louis Dumont. Vous en avez de trop ! (Sourires.)
    En conclusion, monsieur le président, j'appelle nos collègues à entendre les voix qui s'expriment, sur ces bancs en faveur de mesures d'équité fiscale et à examiner notamment d'une façon fort attentive l'amendement n° 354 afin que nous le votions tous ensemble.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je serai beaucoup plus bref que notre collègue Dumont. La commission a rejeté cet amendement, tout comme la majorité, car celle-ci n'a aucun complexe (« Ça, c'est vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) à propos d'une disposition qui favorisera l'emploi et les familles.
    Mme Muguette Jacquaint. Quelles familles ?
    M. Augustin Bonrepaux. Leurs familles !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. On ne peut qu'être fier de mesures qui se situent au confluent de la création d'emplois et de l'épanouissement de nos familles ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt
    M. Gérard Bapt. Monsieur le président, je suis scandalisé par la manière avec laquelle le rapporteur général et la majorité revendiquent cette mesure. M. Carrez dit en être fier. Sur le plan économique, la majorité est, nous le savons, totalement inspirée par Friedman,...
    M. Xavier de Roux. Qu'il est savant !
    M. Gérard Bapt. ... ce qui est actuellement à contre-emploi puisque cela la conduit à mener une politique de l'offre là où il faudrait une politique de la demande, politique qui pourrait passer notamment par la mesure de justice fiscale que vient de présenter M. Dumont.
    Dans la fierté exprimée par M. le rapporteur général, je vois, pour ma part, beaucoup d'arrogance parce que, au fond, vous êtes adeptes de la philosophie de Guizot : enrichissez-vous et le reste viendra !
    M. Xavier de Roux. On ne quitte pas le xixe siècle !
    M. Gérard Bapt. Nous devons engager la lutte contre la pauvreté. D'ailleurs ce thème fait la une du journal La Croix d'aujourd'hui. Or la justice, la préparation de l'avenir et la vie des familles ne viennent pas de l'enrichissement des plus riches. C'est vrai chez nous comme partout dans le monde et cela a toujours été ainsi. J'ai noté l'arrivée dans les tribunes de cette assemblée d'une délégation canadienne inuit. Demandez-leur, à la fin de la séance, s'il n'a pas fallu qu'ils se battent pour la renaissance de leurs droits et pour plus de justice face au rouleau compresseur de la société industrielle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Eric Woerth. Quel rapport ?
    M. Gérard Bapt. J'en profite pour saluer cette délégation.
    Je crains fort que l'arrogance de la majorité ne réserve à notre pays des jours très sombres car à la résignation peut succéder la colère.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 354.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. de Courson a présenté un amendement, n° 201, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le d du 1 de l'article 200 du code général des impôts, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « bis) D'associations de défense des contribuables. »
    « II. - La perte de recettes est compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour défendre cet amendement.
    M. Pierre-Christophe Baguet. L'article 200 du code général des impôts précise assez clairement les critères de déductibilité des dons et des versements effectués par nos concitoyens aux associations d'intérêt général. Il semble toutefois que cela ne suffise pas à l'administration et qu'elle ait besoin de plus de précisions, concernant notamment certaines associations, comme celles, non subventionnées, de défense des contribuables.
    Mme Muguette Jacquaint. Pourquoi seulement elles ?
    M. Pierre-Christophe Baguet. Parce qu'il a déjà été établi une liste, que je propose de compléter.
    Afin de donner tout son sens à l'article XIV de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen - chère à notre collègue Charles de Courson - ...
    M. Jean-Pierre Brard. Ah ! Ça !
    M. Pierre-Christophe Baguet. ... article selon lequel « les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée », il est nécessaire de permettre la déductibilité des dons et versements effectués par les contribuables domiciliés en France, au sens de l'article 4 B, au profit des associations de défense des contribuables qui ne bénéficient, je le répète, d'aucune subvention publique et dont personne ici ne peut contester l'intérêt général.
    M. Gérard Bapt. C'est M. Miguet que vous voulez subventionner !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement. Ma réponse vaudra également pour les amendements qui suivent. Les associations qui bénéficient d'une aide fiscale par le biais d'une déduction du revenu imposable sont définies de façon très extensive par le code des impôts : il s'agit des associations ou organismes d'intérêt général, les fondations ou associations reconnues d'utilité publique qui oeuvrent dans les domaines philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou qui concourent à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises. J'ajoute que, dans le cadre de la loi « mécénat » que nous avons récemment votée, le dispositif fiscal a été amélioré.
    Pour toutes ces raisons, la commission a estimé qu'il n'y avait pas lieu de retenir cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je suis contre l'amendement car c'est une fausse bonne idée. La commission a bien fait raison de le rejeter mais pas pour les raisons qui viennent d'être exposées par le rapporteur général. En effet, les associations concernées sont tout sauf philanthropiques. D'ailleurs, il serait judicieux de proposer la création d'une commission d'enquête chargée d'examiner les financements qui permettent à ces associations, qui mènent grand train, d'exister.
    M. Gérard Bapt. Très bien !
    M. Jean-Pierre Brard. Qui sont en réalité ces associations de défense des contribuables ? Je vous conseille vivement de lire leur prose. Vous y reconnaîtrez le discours des ligues des années trente, en particulier de 1934.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Tout à fait.
    M. Jean-Pierre Brard. Ces gens se disent apolitiques. Or l'on sait que « apolitique » signifie souvant « apolitique de droite » ! L'une des responsables est d'ailleurs Mme Taffin, tout à fait apolitique puisqu'elle a été la mairesse du 2e arrondissement de Paris et est membre du CNI, ce petit pont entre le RPR et le Front national ! Nous voyons donc que ce sont des apolitiques très profilés ! Leurs discours sont d'ailleurs anti-Etat républicain, anti-services publics, anti-solidarité, Cela ne m'étonne pas que M. de Courson propose des avantages fiscaux pour de telles associations. On reconnaît bien là sa filiation idéologique !
    M. Pierre Hériaud. Allons !
    M. Jean-Pierre Brard. Notre collègue Pierre-Christophe Baguet étant un collègue d'habitude bien inspiré, je suis prêt à parier que M. de Courson lui avait caché l'identité de ceux qui étaient derrière ces faux nez que sont ces associations de défense des contribuables.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait.
    M. Jean-Pierre Brard C'est donc oeuvrer pour la salubrité publique et faire preuve d'esprit républicain que de rejeter cet amendement.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Tout à fait.
    M. le président. On va voir si M. Baguet a perçu cette dimension.
    M. Gérard Bapt. On va voir s'il a du nez ! (Sourires.)
    M. Pierre-Christophe Baguet. Cela devient une habitude chez Jean-Pierre Brard d'essayer de me faire passer pour un ignorant, se trouvant là par hasard,...
    M. Jean-Pierre Brard. Pas du tout ! Pour quelqu'un d'honnête et de bonne foi.
    M. Pierre-Christophe Baguet. ... chargé de défendre les amendements que Charles-Amédée de Courson n'aurait pas toujours le courage de soutenir. Si celui-ci n'est pas là ce matin, c'est parce qu'il est retenu par le conseil général.
    M. Gérard Bapt. Il cumule !
    M. Pierre-Christophe Baguet. C'est quelqu'un de courageux, qui assume toujours ce qu'il écrit et ce qu'il dit...
    M. Jean-Jacques Descamps et M. Marc Laffineur. C'est vrai.
    M. Pierre-Christophe Baguet. ... et auquel je tiens à rendre hommage.
    M. Jean-Louis Idiart. Il respecte toujours les limites de vitesse.
    M. Pierre-Christophe Baguet. Même si les associations dont il est question nous dérangent un peu, nous harcèlent, nous font des remarques qui ne sont pas toujours agréables sur les méthodes employées,...
    M. Jean-Pierre Brard. Pendant les émeutes du 6 février 1934, les membres des ligues coupaient les jarrets des chevaux.
    M. Pierre-Christophe Baguet. ... elles contribuent par leur action à une plus grande transparence dans le fonctionnement de nos administration, et peuvent, par là même, contribuer à rapprocher de nos institutions certains de nos concitoyens très critiques, et parfois même trop critiques par rapport aux services publics. Elles jouent un vrai rôle démocratique et, en ce sens, relèvent de l'intérêt général. Elles mériteraient donc d'être soutenues.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. A toutes les raisons qui ont été évoquées, j'en ajouterai une autre : les motivations de telles associations me paraissent contraires à l'esprit de citoyenneté. Celui-ci ne consiste pas à demander toujours plus, mais à participer au fonctionnement de notre pays, à la vie de celui-ci, à la solidarité. Axer l'action d'une association uniquement sur la réduction de la fiscalité, sans considération pour les conséquences de celle-ci pour les plus défavorisés, est contraire à l'esprit civique. Pensez à tous ceux qui luttent aujourd'hui contre la misère. Comment fera l'Etat, de la responsabilité duquel ressortit la solidarité nationale, si, avec de tels raisonnements, on invite les citoyens à refuser l'impôt, qui est la première forme de la citoyenneté ?
    Encore faudrait-il que l'impôt soit beaucoup plus juste. C'est ce à quoi nous nous employons depuis le début de ce débat sur le budget, en proposant que la fiscalité soit plus légère pour les plus modestes et, en contrepartie, bien sûr, plus lourde pour les plus aisés. Il faut que la nation dispose des moyens pour assurer la solidarité.
    Les associations visées dans l'amendement de M. de Courson sont dangereuses pour l'esprit citoyen. C'est pourquoi nous voterons contre l'amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 201.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Jean-Pierre Brard. L'UDF est de plus en plus isolée...
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 438, ainsi libellé :
        « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le d du 1 de l'article 200 du code général des impôts est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « bis) D'associations de défense de la dignité de la femme ».
    « II. - Les taux du barème de l'impôt sur la fortune sont relevés à due concurrence. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir cet amendement.
    Mme Muguette Jacquaint. Je me félicite du vote qui vient d'être émis sur l'amendement de M. de Courson. Aux termes de l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. » On en est encore loin ! Et quand on voit que tous les amendements que nous avons proposés jusqu'à maintenant ont été refusés par le Gouvernement, je dis à cette Assemblée qu'on est loin d'avoir établi l'égalité.
    A travers l'amendement n° 438, nous souhaitons donner tout son sens à cet article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. A cet effet, il nous paraît justifié de permettre la déductibilité des dons et des versements effectués par les contribuables domiciliés en France, au sens de l'article 4 B au profit des associations de défense de la dignité de la femme.
    En effet, sans être une constitutionaliste avertie, il m'apparaît que l'on doit interpréter le terme « homme » comme impliquant également les femmes. Nous avons une société sexuée et les femmes ont démontré, depuis des décennies, qu'elles entendaient y prendre toute leur place.
    Notre amendement est inspiré par l'initiative prise par notre président Jean-Louis Debré - dont je me félicite - d'accueillir un calicot au fronton de l'Assemblée nationale pour les cérémonies du 14 juillet, afin d'honorer le combat des femmes et notamment - mais pas seulement - celui de l'association « ni Putes, ni Soumises ». Il nous semble légitime d'autoriser la déductibilité des dons et des versements effectués au profit d'associations dont le combat est juste et démocratique.
    Comme l'écrivait M. Debré - auquel je fais une nouvelle fois référence - l'Assemblée nationale devrait constituer l'étape ultime de cette marche. Qui mieux qu'elle, en effet, incarne les valeurs de la République, libératrice et protectrice, auxquelles les femmes souhaitent rendre hommage et dont les députés sont les garants ? J'espère qu'aucune voix ne s'opposera, monsieur le ministre, à ce que soit donnée la garantie que je réclame.
    La dignité et la liberté des femmes sont aujourd'hui menacées par des comportements parfois violents, pouvant aller, comme on l'a vu récemment, jusquau viol et à l'homicide. Mais, plus généralement, une forme de pression permanente est exercée sur les femmes, leur imposant des comportements, des attitudes, des tenues vestimentaires. Il serait bon que la représentation nationale donne un signal à ce sujet. Le donner sous la forme d'un avantage fiscal aurait le mérite d'être concret et d'encourager les associations - nombreuses aujourd'hui et je m'en félicite - qui font un travail courageux et difficile, pour faire reconnaître le rôle et l'importance des femmes dans ce pays, renforcer leurs droits et défendre leur dignité.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mme Jacquaint a lié la défense de la dignité de la femme à la Déclaration des droits de l'homme. Je me permets de lui rappeler qu'à l'époque où cette dernière a été rédigée, les femmes ne votaient pas. La belle Olympe de Gouges a terminé sa vie sur l'échafaud...
    Mme Muguette Jacquaint. Oui, et pourquoi ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... parce qu'elle revendiquait le droit de vote pour les femmes. C'est le général de Gaulle qui le leur a accordé. Vous avez tout à fait raison, madame Jacquaint, de rendre hommage à Jean-Louis Debré, parce qu'il s'inscrit dans cette lignée.
    M. Jean-Pierre Brard. C'est un féministe !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Votre amendement, par contre, a reçu un avis défavorable...
    Mme Muguette Jacquaint. Ah !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... parce qu'il est totalement inutile. Toutes les associations à caractère philanthropique - et quelle est l'oeuvre plus philanthropique que celle qui consiste à plaider la dignité et l'égalité des femmes ? -...
    Mme Muguette Jacquaint. Alors pourquoi refusez-vous l'amendement ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... bénéficient déjà d'une aide fiscale.
    Mme Muguette Jacquaint. Ce serait plus facile en l'inscrivant dans la loi !
    M. Philippe Auberger. C'est inutile.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, vous aurez remarqué que, depuis le début de la séance, je n'ai pas abusé de la parole.
    M. Jean-Pierre Brard et M. Jean-Louis Idiart. C'est vrai !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Mais, compte tenu du souhait exprimé par Mme Jacquaint et de la passion, légitime, avec laquelle elle a défendu sa cause, je tiens à lui dire que le législateur, dans sa sagesse, a, jusqu'à présent, privilégié la méthode qui consiste à énumérer limitativement des objets qui lui ont paru particulièrement importants pour justifier le recours à la dépense fiscale afin d'inciter à la générosisté du public, sans opérer de discrimination au bénéfice de telle ou telle catégorie. Il en est ainsi de la philanthropie, de l'éducation, de l'aide sociale, familiale ou humanitaire, du développement du sport, de la culture, de la protection du patrimoine artistique ou de l'environnement naturel. Il est en effet peut-être plus raisonnable d'en rester à des principes généraux...
    Mme Muguette Jacquaint. Il s'agit du droit des femmes.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... plutôt que de choisir des associations en fonction de leur objet propre. Cela reviendrait à établir un inventaire - et Dieu sait si l'objet que vous avez retenu dans votre amendement est parmi les plus nobles - qui risquerait d'introduire des limites. Ce qui me conduit à vous suggérer de retirer votre amendement.
    Mme Muguette Jacquaint. Non, à moins que vous ne vous engagiez.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. A défaut, comme l'a fait le rapporteur général, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je serai bref, monsieur le président. Je voudrais simplement réagir à ce que le rapporteur général et le ministre ont dit. Il arrive à l'administration de faire une interprétation limitée des textes. Si, monsieur le ministre, vous dites qu'en fin de compte ce que vous venez d'exprimer signifie que les dons en faveur des associations qui défendent les droits des femmes doivent être pris en compte, nous pourrions alors retirer notre amendement.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait.
    M. Jean-Pierre Brard. Certes, ni le Journal officiel ni nos discussions n'ont valeur de loi mais ce serait une indication intéressante et qui figurerait sur les tablettes de notre assemblée.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. M. Brard m'incite à faire une chose que, il le sait bien, je ne ferai pas, pour des raisons de droit fiscal. Il m'incite, en quelque sorte, à délivrer des autorisations de réduction d'impôt pour telle ou telle catégorie d'associations. Je me suis précisément fondé à l'instant et avec prudence sur des principes généraux. Vous vous doutez bien que, quel que soit encore une fois l'intérêt majeur du combat que vous voulez promouvoir, en aucune façon je ne me lancerai dans une distinction entre telle ou telle association. Ce serait, du point de vue du droit fiscal, très imprudent de ma part.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 438.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 439, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le d du 1 de l'article 200 du code général des impôts est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « bis) D'associations de lutte contre l'homophobie. »
    « II. - Les taux du barème de l'impôt sur la fortune sont relevés à due concurrence. »
    Cet amendement est, dans l'esprit, de même nature que le précédent, monsieur Brard...
    M. Jean-Pierre Brard. Dans l'esprit, en effet, non dans l'objet, monsieur le président.
    Je souhaitais faire remarquer que, sur l'amendement précédent - détail intéressant - le clivage ne s'est pas opéré entre hommes et femmes, mais bien entre gauche et droite,...
    Mme Muguette Jacquaint. Absolument.
    M. Jean-Pierre Brard. ... puisque Mme Aurillac, arrivée à l'instant, a joué contre son camp. Vous n'avez pas défendu les organisations féministes, madame. Pourtant, même dans la belle société, il y a des féministes !
    Mme Muguette Jacquaint. Et des victimes !
    M. Jean-Pierre Brard. Et des victimes, effectivement.
    M. le président. Monsieur Brard, je vous prie d'en revenir à l'amendement n° 439.
    M. Jean-Pierre Brard. Bien, monsieur le président.
    Sans revenir à l'amendement déposé par M. de Courson, l'on peut remarquer que les évolutions sociétales sont parfois longues - c'est du reste tout à fait normal, dans la mesure où il faut du temps pour que les esprits évoluent. Il y a toujours un certain retard entre la conscience que l'on a de la réalité et la réalité elle-même. Je vois que mon propos intéresse M. Xavier Bertrand que je suis en train d'initier aux mystères de la dialectique et du matérialisme historique. (Sourires.)
    M. le président. Sur un tel sujet, ce n'est pas très facile !
    M. Xavier Bertrand. Il a du talent, monsieur le président !
    M. Michel Bouvard. Ne le relancez pas, monsieur le président !
    M. le président. Vous avez raison. J'ai commis une erreur... (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Du tout, monsieur le président, ce sont des outils conceptuels tout à fait nécessaires en ce qu'ils permettent de comprendre le réel...
    M. le président. Certes !
    M. Jean-Pierre Brard. ... pour peu évidemment que l'on ne fasse pas de la dialectique un catéchisme, mais simplement une méthode pour la réflexion - après que Hegel fut revisité par Marx et Engels, évidemment ! (Sourires.)
    M. Xavier Bertrand. CQFD !
    M. Jean-Pierre Brard. J'en viens à mon amendement n° 439. Il est, disais-je, des évolutions de société qui prennent du temps. Chacun a en mémoire l'horrible attentat qui s'est produit l'année dernière. Et puisque notre société tarde à réagir, il faut aider les associations qui, précisément, luttent pour rattraper ces retards. Il est à noter que ceux-ci n'habitent pas seulement l'esprit d'une partie de nos concitoyens ; ici même, ils existent. On l'a vu hier à propos des amendements fiscaux visant les personnes pacsées.
    Dans le cas qui nous occupe maintenant, il ne s'agit pas de se référer à l'article XIV de la Déclaration des droits de l'homme, comme l'a fait notre collègue de Courson, mais à l'article Ier : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. » Partant de là, il nous semble judicieux de permettre la déductibilité des dons et versements effectués au profit des associations de lutte contre l'homophobie, afin que certains esprits dérangés ne se sentent pas encouragés à commettre des actes répréhensibles.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable. Un cinquième des associations bénéficie de ces aides et la notion de philanthropie est suffisamment large.
    M. le président. M. le ministre est déjà intervenu de manière générale sur ce thème.
    Je mets aux voix l'amendement n° 439.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 440, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le d du 1 de l'article 200 du code général des impôts est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « bis) D'associations de lutte contre la violence routière. »
    « II. - Les taux du barème de l'impôt sur la fortune sont relevés à due concurrence. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Ainsi que vous le savez, le Gouvernement et le Président de la République ont fait de la lutte contre la violence routière un cheval de bataille, tout à fait légitime, du reste, et qui fait consensus dans notre société. Certainement faut-il soutenir mieux encore les associations déterminées à combattre ce fléau qui se traduit par des milliers de victimes - plus de 7 000 morts par an - et qui appelle une répression juste et ferme. Mais quand bien même il faut réprimer, la pédagogie n'en a pas moins des vertus tout à fait précieuses, qui permettent de limiter le recours à la répression en poussant à la libre adhésion des citoyens.
    J'entends déjà par avance l'argument du rapporteur général et du ministre qui s'opposent à l'idée de décliner un catalogue de la Samaritaine. Reste que, dans ce cas particulier, je crois important d'appuyer les efforts du Gouvernement ; pour une fois, il pourrait y avoir consensus.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable. Il n'y a pas lieu de spécifier telle ou telle association. La définition actuelle est suffisamment large.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Avis également défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 440.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 387, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 200 quater du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1° La dernière phrase du premier alinéa du I est supprimée.
    « 2° Le deuxième alinéa du I est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
    « Ouvrent également droit au crédit d'impôt sur le revenu :
    « - les dépenses liées à l'acquisition de matériaux d'isolation thermique et d'appareils de régulation de chauffage définis par arrêté du ministre chargé du budget.
    « - le coût des équipements de production d'énergie utilisant une source d'énergie renouvelable intégrés à un logement situé en France acquis neuf ou en l'état futur d'achèvement entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2005 et que le contribuable affecte, dès son achèvement ou son acquisition si elle est postérieure, à son habitation principale.
    « - le coût des mêmes équipements intégrés dans un logement que le contribuable fait construire et qui a fait l'objet, entre les mêmes dates, de la déclaration d'ouverture de chantier prévue à l'article R. 421-40 du code de l'urbanisme. Il en est de même des dépenses payées entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2005 au titre de l'acquisition des mêmes équipements fournis dans le cadre de travaux d'installation réalisés dans l'habitation principale du contribuable.
    « - le coût des dépenses payées avant le 31 décembre 2010 pour la réalisation de travaux prescrits aux propriétaires d'habitation au titre du IV de l'article L. 515-16 du code de l'environnement lorsque ces travaux sont afférents à la résidence principale du contribuable ».
    « 3° Le troisième alinéa du 2 est ainsi rédigé :
    « Pour les dépenses visées au premier alinéa du 1 et payées à compter du 1er novembre 2003, le crédit d'impôt est égal à 15 % du montant des équipements, matériaux et appareils figurant sur la facture de l'entreprise ayant réalisé les travaux. »
    « 4° Après le troisième alinéa du 2 est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Pour les dépenses visées au deuxième alinéa du 1 et payées à compter du 1er novembre 2003, le crédit d'impôt est égal à 20 % du montant des équipements, matériaux et appareils figurant sur la facture de l'entreprise ayant réalisé les travaux ou, le cas échéant, pour les équipementss de production d'énergie utilisant une source renouvelable, du coût de ces équipements figurant sur une attestation fournie par le vendeur du logement. »
    « II. - Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
    « III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. Cet amendement pourrait être adopté à l'unanimité dans la mesure où le débat en cours sur l'énergie, qui trouvera son aboutissement dans cet hémicycle le mois prochain, a bien montré quelles doivent être nos préoccupations collectives. Notre amendement n° 387 répond notamment à plusieurs d'entre elles : économiser l'énergie, respecter l'environnement, améliorer le cadre de vie, favoriser la diversification des sources d'énergie avec notamment le recours aux énergies dites renouvelables. L'objectif est tout à la fois d'améliorer le cadre de vie de nos concitoyens et de mettre en avant plusieurs mesures d'économies d'énergie, autant de propositions autour desquelles nous pourrions tous nous retrouver.
    M. le président. Quels est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement. D'importants efforts ont été réalisés, qui ont permis d'atteindre un point d'équilibre. De surcroît, nous aborderons dans quelques heures la question de la prorogation pour 2004 - prélude à la pérennisation que j'espère pour bientôt - de la TVA à taux réduit pour les travaux dans le logement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Vous proposez, si je comprends bien, un crédit d'impôt non restituable ; autrement dit, vous souhaitez augmenter l'avantage fiscal en faveur des contribuables imposables au détriment des contribuables non imposables. Compte tenu de ce que j'ai entendu depuis ce matin, il y a certainement là une subtilité que vous aurez à coeur de m'expliquer.
    M. Eric Besson. Nous vous revaudrons cet argument, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Ainsi l'a déjà dit le rapporteur général, le Gouvernement a prévu à l'article 61, que nous examinerons en deuxième partie, d'étendre les crédits d'impôts aux travaux d'installations d'équipements spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées. Cette mesure, contrairement à celle que vous proposez, aura le mérite de s'appliquer à tous les contribuables, qu'ils soient imposables ou non.
    Votre proposition soulève cependant une vraie question qui tient à la cohérence d'ensemble du dispositif de l'article 200 quater. Il va nous falloir y réfléchir.
    Pour l'ensemble de ces motifs, je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement dans la mesure où nous en reparlerons en seconde partie. A défaut, je demanderai son rejet.
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Nous ne pouvons pas retirer cet amendement. On ne peut s'en tenir à un discours posant comme priorité le respect et la préservation de l'environnement, la protection de la santé sans jamais formuler aucune proposition allant dans ce sens. C'est, du reste, une des caractéristiques de ce gouvernement : on annonce mais on en reste à l'affichage... Sans doute est-ce pour cela que les crédits de communication du Premier ministre augmenteront, je le répète, de 3,52 %. Je trouve cela particulièrement choquant.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Et vous allez le répéter toutes les demi-heures ?
    M. Didier Migaud. Oui, parce que vous ne nous répondez pas. Quelle est la raison de cette augmentation ?
    Pourquoi, alors même que le Gouvernement impose des sacrifices sur des budgets comme l'emploi, le logement, les transports, tout en réclamant des efforts supplémentaires, le Premier ministre se reconnaît-il le droit d'augmenter ses crédits de communication de 3,52 % ?
    M. Eric Besson. C'est inversement proportionnel aux sondages !
    M. Didier Migaud. Je comprends qu'il ait besoin de crédits de propagande compte tenu de sa chute de popularité. Reste qu'il est choquant de voir que l'ensemble des contribuables se retrouveront à devoir payer les frais de propagande du Premier ministre !
    Je voudrais maintenant répondre, monsieur le ministre, au reproche que vous venez de nous faire.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. A la remarque !
    M. Didier Migaud. Soit. Vous nous avez fait remarquer que nous proposions une mesure de réduction fiscale. Nous ne sommes pas sectaires : nous pensons effectivement que l'outil fiscal peut, de temps en temps, être utilisé de façon pertinente. Je vous ferai toutefois observer qu'il s'agit non d'une réduction d'impôt, mais d'un crédit d'impôt.
    M. Jean-Louis Idiart. Ce n'est pas pareil !
    M. Didier Migaud. En effet. Cela veut dire que notre mesure s'appliquera à ceux qui paient un impôt sur le revenu comme aux non imposables. Je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement reste sourd à l'engagement pris par le Président de la République de favoriser la protection de l'environnement. Nous vous donnons une possibilité concrète de le respecter. Je n'ai pas encore compris la raison de votre refus.
    Vous nous dites, monsieur le rapporteur général, que nous sommes arrivés à un point d'équilibre. Qui vous permet de dire cela ? Sur la base de quelles études ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Moi, sur la base des études que j'ai analysées !
    M. Didier Migaud. Cela ne suffit pas, monsieur le rapporteur général. Vous n'êtes pas compétent en tout. Vous ne pouvez pas avoir la vérité révélée dans tous les domaines, y compris les plus techniques. Qu'est-ce qui vous permet de dire que nous sommes arrivés à un point d'équilibre ? Qu'est-ce qui vous permet de dire que nous ne pouvons pas progresser ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Qu'est-ce qui vous permet de dire l'inverse ?
    M. Didier Migaud. Nous croyons aux vertus de l'incitation, monsieur le rapporteur général. Nous ne vous proposons pas un privilège, mais un dispositif capable d'inciter à l'utilisation de matériaux considérés comme plus propres. Notre amendement, Eric Besson a eu raison de le dire, ne s'inscrit pas dans une démarche politicienne. Nous pensions honnêtement que vous pouviez le reprendre par le fait qu'il correspond à votre discours. Si vous ne voulez pas apparaître trop sectaire, sachez de temps en temps, parmi les amendements de l'opposition, prendre en considération ce que nous pouvons vous proposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'ai peur de ne pas avoir sous les yeux la même rédaction que vous, monsieur Migaud. Le II de votre amendement ne précise-t-il pas : « Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû ». C'est en totale contradiction avec ce que vous venez de dire.
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Je répète qu'il s'agit d'un crédit d'impôt. Si M. le ministre trouve notre formule ambiguë, nous sommes tout à fait ouverts à une proposition de correction de notre II pour enlever toute ambiguïté.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Ce n'est pas recevable !
    M. Didier Migaud. Nous avons la conviction, nous le répétons sans cesse, que tout Français paie un impôt et nous trouvons scandaleux le discours selon lequel seul un Français sur deux paierait l'impôt. Ce n'est pas vrai. C'est oublier la CSG et tout ce qui relève de la fiscalité indirecte.
    M. Eric Woerth. Nous parlons de l'impôt sur le revenu !
    M. Didier Migaud. Il y a suffisamment d'impôts payés par l'ensemble des Français pour que nous puissions trouver une formule. Nous sommes par avance d'accord, monsieur le ministre, à toute proposition de rectification de votre part.
    M. Eric Besson. On corrige et on vote !
    M. le président. M. le ministre ne présentant pas de sous-amendement, je mets aux voix l'amendement n° 387.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 125, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Après l'article 200 quinquies du code général des impôts, il est inséré un article 200 quinquies A ainsi rédigé :
    « Art. 200 quinquies A. - I. - Les contribuables résidant en France qui, entre le 1er novembre 2003 et le 31 décembre 2004 acquièrent des équipements électroménagers de classe A, peuvent bénéficier à ce titre d'un crédit d'impôt.
    « Ce crédit d'impôt égal au plus à 15 % du montant des dépenses est accordé sur présentation des factures. »
    « II. - Pour un même contribuable, le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt ne peut excéder au cours de la période définie au premier alinéa du I la somme de 200 EUR. »
    « Le crédit d'impôt est imputé sur le montant de l'impôt dû au titre de l'impôt sur le revenu de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été payées, après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200, de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué.
    « III. - La liste des équipements pouvant bénéficier de ce crédit d'impôt est fixée par arrêté. »
    « IV. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée par le relèvement à due concurrence du taux de l'impôt sur les sociétés. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'heure où tout le monde disserte sur le développement durable, où l'actuel gouvernement compte une ministre de l'écologie et du développement durable et une secrétaire d'Etat au développement durable, il convient de tout faire pour familiariser nos compatriotes avec une utilisation rationnelle de l'énergie. Car si l'industrie est une grosse consommatrice d'énergie, le secteur domestique n'est pas en reste. Quand l'industrie consomme deux kilowatts, les ménages en consomment un.
    La notion d'économie d'énergie, née de la crise du début des années 70 et des hausses considérables du prix des produits pétroliers qui s'en étaient suivies, prend chaque jour un peu plus de valeur. Mais, au-delà des péripéties économiques, c'est à une conception respectueuse de la planète que l'humanité doit tendre ; mais tout cela, disons-le en passant, n'est pas le premier souci des pays capitalistes - je sais bien que ce mot vous fait toujours frémir -, à voir la façon dont ils pillent les richesses du monde et spolient les nations qui les détiennent.
    L'enjeu énergétique est de taille en termes d'environnement - émissions de gaz carbonique, ou production de déchets nucléaires -,...
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et Tchernobyl ?
    Mme Muguette Jacquaint. ... en termes de ressources économiques - amenuisement des réserves de combustibles fossiles -, comme en termes d'économies domestiques. N'oublions pas que les factures EDF-GDF représentent une part non négligeable des dépenses familiales.
    Au sein de cette consommation domestique d'énergie, l'électroménager prend au fil des ans - et c'est heureux, car la machine à laver, entre autres, et plus généralement le progrès technologique allègent considérablement les tâches ménagères - une part de plus en plus importante.
    En 1992, la Commission européenne a adopté une réglementation sur l'étiquetage des appareils électroménagers : réfrigérateurs, congélateurs, machines à laver, lave-vaisselle... je vous fais grâce de la liste. La plupart portent dorénavant une étiquette décrivant leur performance énergétique par le biais d'un double code de lettres et de couleurs, allant de A à G et du vert au rouge. Ainsi, les appareils de meilleur rendement sont étiquetés A et vert, et les plus mauvais G et rouge.
    Il faut bien évidemment encourager les consommateurs à privilégier les appareils de classe A. C'est une affaire de communication, mais pour une part seulement : les appareils de classe A sont généralement beaucoup plus chers que les autres par le fait qu'ils mettent en oeuvre des procédés technologiques plus sophistiqués que les appareils d'ancienne génération, et cette différence de prix s'avère le plus souvent dissuasive pour les ménages à faibles ressources. Dans ma ville et même dans mon département, la moitié de la population n'est pas imposée sur le revenu : imaginez quelles peuvent être les possibilités de choisir des appareils au vu de l'étiquetage, quand bien même on aimerait - évidemment - prendre le plus performant.
    Aussi notre amendement n° 125 se propose-t-il de venir en aide aux familles modestes exposées à une surconsommation d'énergie, en prévoyant, par le biais d'un article additionnel, d'accorder un crédit d'impôt à celles qui font l'effort de s'équiper avec du matériel de classe A. Le financement de cette mesure serait assuré par un relèvement de l'impôt sur les sociétés. Ce serait là une mesure de justice qui irait dans le sens d'une préoccupation unanimement partagée de préservation de l'environnement.
    M. le président. Quel est l'avis de la Commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je remercie Mme Jacquaint de son cours d'électroménager qui m'a vivement intéressé.
    M. Jean-Louis Idiart. Oh ! Franchement !
    M. Patrice Martin-Lalande. On dirait du Brard !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Elle me pardonnera de lui répondre en termes de fiscalité, ce qui sera certes moins intéressant : le crédit d'impôt n'est pas du tout adapté pour promouvoir l'électroménager. Avis défavorable.
    Mme Muguette Jacquaint. L'électroménager n'est pas uniquement une affaire de femmes !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je n'ai pas dit le contraire !
    Mme Muguette Jacquaint. Cela transpirait tellement de vos propos !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. J'entends bien ce que dit le rapporteur général. Mais rappelez-vous ce que nous avons fait pour lancer le GPL et favoriser le changement des dispositifs techniques sur les réservoirs ; après tout, on pourrait très bien raisonner par analogie.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais l'électroménager est un domaine trop précis !
    M. Jean-Pierre Brard. Par ailleurs, j'appelle votre attention, monsieur le ministre et monsieur le rapporteur général, sur le fait le Président de la République a décidé de modifier la Constitution...
    M. Didier Migaud. Seulement proposé. C'est quand même nous qui votons !
    M. Jean-Pierre Brard. En effet, pardonnez-moi.
    A Johannesburg, le Président de la République a fait un discours fort remarqué. Et si j'en crois quelques indiscrétions, il souhaite avec enthousiasme et conviction que la nation tout entière s'engage dans la voie qu'il a ouverte. S'abriter derrière une difficulté de technique fiscale est un peu facile : where is a will is a way, disent les Anglais. On pourrait du reste le décliner en français : ce serait encore plus sympathique.
    S'il y a volonté politique, ce serait un signe fort.
    M. Didier Migaud. Mais il n'y a que des discours !
    M. Jean-Pierre Brard. Comme pour les lombrics, on voit tout de suite qu'il manque le muscle ! (Sourires.) Parfois il manque le concept, ce qui est encore plus grave !
    J'attire l'attention de l'Assemblée sur le problème pour qu'elle ne soit pas en retrait de la volonté du Président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 125.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. J'avais prévenu l'Assemblée que je serais obligé de lever la séance à douze heures quinze. Cela vous laisse le temps, monsieur Brard, de présenter un autre amendement.
    M. Jean-Pierre Brard. Ce sera un peu juste !
    M. le président. Si vous le voulez, vous le pouvez ! (Sourires.)
    MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 93, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Aprés l'article 200 sexies du code général des impôts, il est inséré un article 200 septies ainsi rédigé :
    « Art. 200 septies. - Les réductions d'impôt visées aux articles 144 à 200 quinquies ne pourront produire une réduction du montant de la cotisation excédant 7 500 euros. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    M. le président. Peut-être pourriez-vous présenter en même temps les amendements n°s 94 et 92 ?
    Mme Muguette Jacquaint. Non, monsieur le président, ils n'ont pas la même logique.
    Après avoir dénoncé, en 2002, l'extrême complexité de la législation fiscale et l'illisibilité du code général des impôts, l'insoupçonnable Conseil des impôts vient de remettre son vingt et unième rapport au Président de la République. Ce rapport, intitulé « La fiscalité dérogatoire, pour un réexamen des dépenses fiscales », est l'occasion de passer en revue les « dispositifs dérogatoires », encore appelés « subventions fiscales » et plus connus sous le nom de « niches fiscales ».
    Ainsi, 418 niches sont recensées depuis la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile - nous avons eu sur ce point un vaste débat - jusqu'au crédit d'impôt-recherche, en passant par l'exonération de TIPP pour les carburéacteurs utilisés à bord des aéronefs.
    Que constate le Conseil des impôts ? Il observe que les niches « ne bénéficient qu'aux contribuables les mieux informés ». Lesdits contribuables, il est vrai, savent s'informer sur tout ce à quoi ils ont droit !
    Ce constat mérite d'être mis en relation avec l'article XIII de la Déclaration des droits de l'homme du 26 août 1789. « Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration », l'indispensable contribution commune « doit être également répartie entre les citoyens, en raison de leurs facultés ».
    Sur les niches, comme sur bien d'autres sujets, le principe républicain de progressivité de l'impôt est floué. D'une façon générale, les citoyens sont inégaux devant l'impôt, nous l'avons rappelé ce matin. Les stratégies d'optimisation fiscale encouragées par le législateur sont réservées à ceux qui ont le capital culturel suffisant pour connaître les subtilités du CGI ou à ceux qui ont un capital économique suffisant pour s'offrir les services de ceux qui ont décidé de mettre leurs connaissances au service de l'injustice fiscale.
    La fiscalité dérogatoire peut certainement se justifier dans la mesure où elle permet d'octroyer à certains contribuables des droits qui viennent en contrepartie de devoirs. Mais lorsqu'elle aboutit à une compétition qui porte atteinte au débat démocratique, une compétition pour accorder des privilèges sur-mesure à une poignée de contribuables, cette fiscalité dérogatoire nuit gravement à la cohésion sociale et à la pérennité de notre pacte républicain. Elle nuit à la justice, elle aggrave les inégalités.
    Voilà ce que nous voulions faire ressortir par cet amendement dont je suis certaine, puisque tout le monde ici, je pense, est pour l'équité, qu'il sera adopté.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable. J'ai déjà indiqué que le plafonnement global soit des déductions de revenus imposables, soit des réductions d'impôt était une piste intéressante qui serait examinée dans le cadre de la commission de réforme de l'impôt dont nous avons adopté hier le principe.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 93.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

4

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004, n° 1093 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110).
    A vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à douze heures quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 1re séance
du vendredi 17 octobre 2003
SCRUTIN (n° 328)


sur les amendements n° 158 corrigé de M. Brard et n° 259 (2e correction) de M. Migaud après l'article 4 du projet de loi de finances pour 2004 (plafond des dépenses éligibles pour l'emploi d'un salarié à domicile).

Nombre de votants

38


Nombre de suffrages exprimés

38


Majorité absolue

20


Pour l'adoption

13


Contre

25

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 9 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 329)


sur l'amendement n° 353 de M. Bonrepaux après l'article 4 du projet de loi de finances pour 2004 (remise en cause de la réduction d'impôt pour l'emploi d'une personne à domicile en ce qui concerne les redevables de l'ISF).

Nombre de votants

45


Nombre de suffrages exprimés

45


Majorité absolue

23


Pour l'adoption

15


Contre

30

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 28 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 11 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).