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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 18 OCTOBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du vendredi 17 octobre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

1.  Loi de finances pour 2004 (première partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

Rappel au règlement «...»

MM. Didier Migaud, le président, Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire ; Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances ; Marc Laffineur.

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Après l'article 4 (suite) «...»

Amendement n° 94 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 92 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 447, 445 et 446 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejets.
Amendement n° 448 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 124 et 147 corrigé de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejets.
Amendement n° 100 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 95 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre, Michel Bouvard, Didier Migaud. - Retrait.
Amendement n° 96 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 200 de M. de Courson : MM. Pierre-Christophe Baguet, le rapporteur général, le ministre, Didier Migaud, Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Eric Besson, Marc Laffineur. - Retrait.

Article 5 «...»

MM. Didier Migaud, Jean-Pierre Brard.
Amendements de suppression n°s 126 de M. Brard et 231 de M. Bonrepaux : MM. Jean-Pierre Brard, Eric Besson, le rapporteur général, le ministre, Jean-Yves Chamard, Didier Migaud. - Rejet.
Amendement n° 278 de M. de Courson : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 197 de M. Artigues : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 199 et 198 de M. Artigues. - Rejets.
Amendement n° 30 de la commission des finances : MM. le rapporteur général, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 30 modifié, le gage étant levé.
Amendement n° 279 de M. de Courson : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 31 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 389 de M. Carrez. - Adoption.
Amendement n° 32 rectifié de la commission : MM. le rapporteur général, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 32 rectifié et modifié.
Amendement n° 33 de la commission : M. le rapporteur général. - Adoption.
Amendement n° 34 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 35 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 36 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 37, deuxième rectification, de la commission. - Adoption.
Amendement n° 38 rectifié de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article 5 modifié.

Après l'article 5 «...»

Amendement n° 39 rectifié de la commission : MM. le rapporteur général, le ministre. - Adoption.

Article 6 «...»

M. Jean-Pierre Brard.
Amendement n° 482 de M. Garrigue : MM. le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 308 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 307 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard. - Retrait.
Amendement n° 320 rectifié de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 232 de M. Bonrepaux : MM. Augustin Bonrepaux, le rapporteur général, le ministre, Jean-Yves Chamard. - Rejet.
Amendement n° 319 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 390 de M. Carrez : MM. le rapporteur général, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 41 de la commission : MM. le rapporteur général, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 391 rectifié de M. Carrez. - Adoption.
Amendement n° 392 de M. Carrez. - Adoption.
Adoption de l'article 6 modifié.

Après l'article 6 «...»

Amendement n° 274 de M. de Courson : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 165 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 166 de M. Brard : M. Jean-Pierre Brard. - Rejet.
Amendement n° 169 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 168 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général. - Rejet.
Amendement n° 413 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur général. - Adoption.
Amendement n° 329 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général. - Rejet.
Amendement n° 330 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général. - Rejet.
Amendement n° 331 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, Eric Besson, le président de la commission, Augustin Bonrepaux, Didier Migaud. - Rejet.
Amendement n° 107 de M. Brard : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur général, Jean-Pierre Brard. - Rejet.
Amendement n° 393 de M. Carrez : M. le rapporteur général. - Adoption.
Amendement n° 167 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre, Eric Besson, le président de la commission. - Rejet.
Amendement n° 191 de M. de Courson : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 285 de M. Brard : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur général, le ministre, Eric Besson. - Rejet.
Amendement n° 286 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2004

PREMIÈRE PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).

Rappel au règlement

    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour un rappel au règlement.
    M. Didier Migaud. Monsieur le président, mon rappel au règlement concerne l'organisation de nos travaux.
    A la suite de réunions qui se sont tenues ce matin, le groupe socialiste, comme, me semble-t-il, l'ensemble de l'opposition, souhaite que nous ayons un vrai débat et qu'il ne soit entravé par aucune obstruction. Nous en arrivons pour l'instant à l'examen des articles additionnels après l'article 4. Il nous reste encore à discuter des plus-values immobilières, de la TVA, de la TIPP, de la redevance, de la question de la privatisation de France 2, de l'ISF, du FOREC, de l'ASS, des collectivités locales, bref, de beaucoup de sujets importants.
    Nous voulons d'ores et déjà prévenir la présidence et le Gouvernement, par courtoisie...
    M. Jean-Louis Dumont. Ça, c'est la classe !
    M. Didier Migaud. ... que nous souhaitons que les ministres chargés de certains dossiers puissent être présents. Nous en faisons une question de principe : c'est d'ailleurs l'usage dans notre assemblée à l'occasion de la discussion budgétaire.
    Ainsi, nous souhaitons la présence de M. Aillagon, ministre de la culture, lorsque nous débattrons de la question de la redevance et de l'amendement de notre collègue Michel Bouvard sur la privatisation de France 2.
    Nous souhaitons également la présence de M. Fillon pour le débat sur l'ASS. Nous sommes de ceux qui ont soulevé cette question, et j'ai cru comprendre que d'autres groupes la soulevaient également. Nous faisons, bien sûr, pleinement confiance au ministre du budget, mais M. Fillon, qui est plus particulièrement chargé de ce dossier, doit être présent.
    Nous souhaitons également que le Premier ministre puisse être présent, puisque de nombreux articles concernent la décentralisation et les collectivités locales, qui sont un des domaines où il excelle habituellement.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Et le Président de la République ?
    M. Didier Migaud. Non, car il n'a pas le droit de venir ici.
    A défaut - car nous pourrions comprendre que l'agenda du Premier ministre l'empêche d'assister à nos travaux -, la présence de M. Devedjian, chargé des collectivités locales, nous paraît indispensable.
    Nous vous informons donc dès maintenant, monsieur le président, en vue de l'organisation de nos travaux, que nous insisterons pour que ces ministres soient bien présents, car on ne peut pas aborder ces sujets sans entendre les ministres concernés.
    Voilà ce que je tenais à exprimer, au nom de mon groupe, au début de cette séance, puisque nous avons pour principe la courtoisie dans nos débats et le respect de la majorité,...
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Faible !
    M. Didier Migaud. ... en espérant la réciproque.
    M. Jean-Louis Dumont. Ça, c'est la classe !
    M. le président. Monsieur Migaud, vous le savez, la Conférence des présidents a déterminé les conditions dans lesquelles ce débat va se dérouler.
    La parole est à M. le ministre délégué au budget, qui répondra sans doute à votre interpellation faite au Gouvernement.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je suis, comme Didier Migaud, attaché à la courtoisie, et j'espère que je n'y manquerai pas dans la réponse que je vais lui faire.
    Je reconnais ma condition très subalterne dans le Gouvernement, mais je me crois mandaté, monsieur le député, pour répondre sur tous les sujets qui relèvent de cette première partie.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et excellemment !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je n'aurai pas, l'audace de parler des usages de l'Assemblée nationale. Néanmoins, puisque cette discussion budgétaire est la douzième à laquelle je participe, même s'il est vrai que sept se sont déroulées pour moi dans une autre assemblée, il me semble qu'il n'est pas d'usage, sauf exception, quand le ministre du budget lui-même le demande à ses collègues, que d'autres membres du Gouvernement viennent participer à la discussion.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Jamais ! Nous, nous ne l'avons jamais demandé.
    M. Didier Migaud. Pas vrai !
    M. Jean-Louis Idiart. Gayssot est venu à quatre heures du matin !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Migaud, vous avez tout à l'heure parlé de courtoisie. Je vous assure que je considérerais comme de la courtoisie que vous m'écoutiez - et M. Idiart également.
    M. Jean-Louis Idiart. Je répondais à M. Carrez.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Un membre du Gouvernement, au banc du Gouvernement, engage le Gouvernement. En conséquence, il reviendra à mes collègues, en fonction de leur disponibilité, d'enrichir encore nos travaux, s'ils peuvent se libérer. En tout état de cause, monsieur le député, j'essaierai de faire face. Je vous sens en forme. Je le suis aussi. (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. En tant que président de la commission des finances - et le rapporteur général partage mon avis -, je suis profondément déçu par ce débat. Nous avons toujours fait preuve de beaucoup de courtoisie, nous avons fait tous les efforts pour que ce débat soit prolongé au maximum, nous écoutons beaucoup, et nous pensions qu'il était possible de concentrer la discussion sur trois ou quatre débats.
    Nous avons examiné à peine cent amendements, et qui comptent parmi ceux qui n'étaient pas les plus prioritaires. Demander à trois ministres de venir est vraiment contraire à tous les usages, comme vient de le dire Gilles Carrez. On peut, parfois, demander à un ministre de venir, mais je n'ai jamais vu, au cours des cinq années que j'ai passées dans l'opposition, demander à trois ministres de participer en même temps au débat budgétaire.
    Ce ne serait plus un débat budgétaire. Il est tout de même de la compétence et de la responsabilité du ministre du budget de représenter le Gouvernement dans le cadre de ce débat. Quant à nous, nous disposons également de quelques informations.
    Je fais donc part, avec beaucoup de courtoisie, de ma profonde déception face aux positions de M. Migaud.
    M. Jean-Louis Idiart. Ce sont celles du groupe socialiste !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Mais c'est M. Migaud qui les a exprimées !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Je ne comprends pas la réaction du président de la commission des finances. Je lui fais observer que seuls cent des cinq cents amendements déposés sur ce texte émanent du groupe socialiste et que nous n'avons demandé aucune suspension de séance depuis le début de la discussion, ce qui, si l'on se réfère aux débats budgétaires antérieurs, y compris ceux auxquels Pierre Méhaignerie participait en tant que porte-parole de l'opposition, est assez rare. Nous débattons donc dans un esprit tout à fait constructif.
    Par ailleurs, je m'étonne que le président de la commission estime que les questions que nous avons abordées jusqu'à présent n'étaient pas essentielles.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. J'ai dit que beaucoup de questions essentielles étaient à venir !
    M. Didier Migaud. Nous avons tout de même débattu des prélèvements obligatoires, de l'impôt sur le revenu et de la prime pour l'emploi, excusez du peu. Il est vrai, et c'est la richesse de ce projet de loi dont le contenu est dense, qu'il nous reste encore à aborder les plus-values immobilières, la TVA, la TIPP, la redevance, l'ISF, l'ASS, les collectivités locales, le FOREC, qui sont des sujets effectivement importants.
    J'ai suffisamment de respect pour Alain Lambert pour ne pas douter de ses compétences de généraliste sur chacun de ces sujets, mais il est de tradition, dans cette assemblée - tous les débats budgétaires précédents le prouvent - que, de temps en temps, les ministres chargés d'un secteur particulier viennent expliquer leurs positions et les raisons de leurs propositions. La redevance, les collectivités locales ou le FOREC sont des sujets suffisamment importants - vous l'avez dit vous-même - pour que l'on puisse interroger les ministres chargés de ces questions.
    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Jean-Pierre Brard. Ah ! M. Laffineur va enrichir le débat !
    M. Marc Laffineur. Monsieur le président, depuis mardi, nos débats se déroulent dans une atmosphère sereine. Je ne crois pas que l'on puisse dire que l'opposition n'a pas eu la parole et, chaque fois, le ministre et les représentants de la commission lui ont répondu, et la majorité a été fort silencieuse pour les laisser débattre. On peut se demander s'il n'y a pas là une volonté manifeste d'obstruction. Je ne le pense pas, mais on a connu des époques où les rapports de force étaient inversés et où l'on ne voyait jamais de débat comme celui-ci. Peut-être devrions-nous essayer d'avancer, de faire confiance au ministre du budget qui pourra répondre - car il en a et la capacité et le pouvoir - sur tous les débats importants. Nous avons encore assez de travail devant nous pour ne pas faire traîner ces débats pendant des heures.

Discussion des articles (suite)

    M. le président Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 et s'est arrêtée à l'amendement n° 94 portant article additionnel après l'article 4.

Après l'article 4

    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 94, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 200 sexies du code général des impôts, il est inséré un article 200 septies ainsi rédigé :
    « Art. 200 septies. - Les réductions d'impôt visées aux articles 144 à 200 quinquies ne pourront produire une réduction du montant de la cotisation excédant 5 500 euros. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, j'ai bien entendu ce que vous disiez sur l'enrichissement de nos débats. Je constate que, avec votre projet de loi de finances, vous enrichissez surtout les riches. J'en citerai quelques exemples : MM. François Pinault, Jean-Louis Dumas, qui est moins connu, Serge Dassault, Paul-Louis Halley, Thierry Peugeot et d'autres.
    Le Conseil des impôts, dans son récent rapport sur la fiscalité dérogatoire, a mis en évidence le coût des 418 niches fiscales qui constituent un invraisemblable enchevêtrement de mesures disparates : il s'élève à 50 milliards d'euros. Vous cherchez de l'argent : 50 milliards d'euros, ce n'est pas loin du déficit qui est d'environ 55 milliards d'euros. C'est en tout cas plus que le produit de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, lequel s'élevait à 45,6 milliards en 2002, chiffre mentionné à l'annexe IV du rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution.
    Certes, toutes les niches ne peuvent pas être mises sur le même plan, mais cela représente plus du cinquième des recettes fiscales de l'Etat, et curieusement plus de 3 % du PIB, c'est-à-dire que, du point de vue des volumes, pour reprendre une formule qui est chère aux jargonneurs, on n'est pas loin du taux du déficit. Les niches creusées dans les recettes du seul impôt sur le revenu amputent celui-ci des deux tiers, soit le double des allègements promis pour le quinquennat.
    Or les chiffres que je viens d'indiquer ne recouvrent que les 234 niches faisant l'objet d'une estimation. Pour les 184 autres niches recensées, le Conseil des impôts juge que « l'absence de chiffrage traduit l'incapacité des administrations de procéder à des estimations, faute de données suffisantes ». L'administration des finances a pris l'habitude de rayer les dépenses fiscales de ses listes en vue d'alléger l'annexe budgétaire qui les recense, sans pour autant les supprimer de la législation. Vingt dispositifs sont ainsi entrés en 1998 dans une sorte de clandestinité. Entre 1997 et 2003, le nombre des mesures dérogatoires s'est réellement accru de soixante, mais la liste des mesures recensées s'est allongée de quatorze seulement. Comment expliquer qu'on ait ajouté soixante mesures et que la liste n'en reprenne que quatorze ?
    Enfin, je mets au défi quiconque ici de démontrer le bien-fondé de l'intégralité de ces 418 mesures dérogatoires. Quelle justification à l'article 217 quaterdecies du code général des impôts qui autorise un amortissement exceptionnel égal à 25 % du montant des sommes versées pour la souscription en capital des sociétés d'investissement régional et qui n'avait qu'un seul bénéficiaire en 2001 ? Il y a donc une niche pour un bénéficiaire. Trois dispositifs n'avaient d'ailleurs aucun bénéficiaire. Pour sept autres, le nombre est incertain.
    Nous souhaitons en finir avec ce régime ubuesque où la dérogation devient la règle, en tout cas pour les plus informés et les plus fortunés qui, bien souvent, sont les mêmes - et ce n'est pas un hasard. Cela appelle un grand débat au sein de cet hémicycle. Dans l'attente de ce débat, l'adoption de cet amendement constituerait un signal fort pour tous ceux qui n'ont pas les moyens de s'offrir des stratégies d'optimisation fiscale sur mesure, pour tous ceux qui comprennent très bien que ce qui importe, ce n'est pas le moins d'impôt, mais le mieux d'impôt au sens d'une meilleure répartition de l'effort contributif, dans l'esprit de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement. Je renouvelle la réponse que je faisais ce matin. L'idée de plafonner certaines réductions à l'intérieur d'un montant global est intéressante. Elle va être étudiée dans le cadre de la commission dont nous avons décidé la création hier.
    Il est évident qu'il faut toiletter l'impôt sur le revenu. Compte tenu des remarquables connaissances que M. Brard a des différents mécanismes fiscaux, nous ne verrions que des avantages à ce qu'il accepte - et nous savons que c'est un bourreau de travail - de consacrer du temps à la réflexion dans le cadre de cette commission, qui commencera rapidement ses travaux.
    Dès l'article 14, nous aurons l'occasion d'examiner un amendement qui supprime des niches dans lesquelles il n'y a que quelques locataires.
    J'émets donc un avis défavorable.
    M. Jean-Claude Lefort. Vous ne touchez pas aux gros !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il y en a peu !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. En attendant de découvrir les chiens de luxe qui habitent ces niches... (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) J'entends des protestations, monsieur le président : mes collègues doivent donc connaître mieux que moi ces locataires. (Sourires.)
    On ne peut être que d'accord : il faut que nous travaillions ensemble pour introduire de la transparence et nettoyer un peu ces niches, même si, de fait, vous en aggravez certaines, comme on l'a vu ce matin - passer de 7 400 à 10 000 euros, c'est en effet aggraver une niche de luxe.
    Mais vous savez monsieur le président, moi, je me disais que pour éclairer nos concitoyens, il serait bon que nous mettions sur la table les résultats de ces niches qui s'accumulent les unes aux autres. Même si certaines d'entre elles sont légitimes - je pense au financement des partis politiques ou à celui des associations d'utilité publique -, quand on fait le total, on s'aperçoit qu'il y a des gens qui ne paient plus beaucoup d'impôts. C'est un problème.
    Je vais vous faire une confidence, monsieur le ministre. Vous savez combien d'impôt il me reste à payer cette année ? Moins de 900 euros ! Vous croyez que c'est normal ? Moi, je lance un défi à nos collègues de droite. Mettons notre feuille d'impôt sur le revenu sur la table et remettons-la aux journalistes.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais dites-moi, vos contributions au parti communiste sont déductibles, non ?
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne contribue pas au PC.     Alors, chiche, monsieur Mariton ?
    M. Hervé Mariton. D'accord !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous voyez, monsieur le président, j'ai trouvé tout de suite un écho à ma proposition de mettre la feuille qui nous a été envoyée par la direction générale des impôts sur la table.
    M. Jean-Claude Lefort. Tous !
    M. Jean-Pierre Brard. Comment nos concitoyens pourraient-ils comprendre qu'en cumulant les déductions,...
    M. Hervé Mariton. Ils seront choqués de savoir que vous ne payez que 900 euros !
    M. Jean-Pierre Brard. Eh oui ! Mais moi je suis capable d'expliquer pourquoi. Parce que je n'ai jamais fait de la politique pour de l'argent, et si j'ai quitté le PC, ce n'est pas pour des affaires d'argent. Et je donne beaucoup d'argent à l'extérieur. Mais ce n'est pas une raison pour ne payer que 900 euros d'impôt. Il y a un problème !
    M. Hervé Mariton. Faites un don !
    M. Jean-Pierre Brard. Le système fiscal, que vous aggravez, est pervers. Plus les gens sont riches - ce qui n'est pas mon cas -, moins ils paient. Alors, vous imaginez, si moi je paie moins de 900 euros, Mme Bettencourt que doit-il lui rester à payer ? Et vous lui donnez encore des sous, via les domestiques que vous lui financez, par exemple. M. Mariton a dit chiche. Eh bien, je propose que nous mettions nos feuilles d'impôt, les uns et les autres, sur la table.
    M. le président. En attendant, je mets aux voix l'amendement n° 94.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 92, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 200 sexies du code général des impôts, il est inséré un article 200 septies ainsi rédigé :
    « Art. 200 septies. - Les réductions d'impôt visées aux articles 144 à 200 quinquies ne pourront produire une réduction du montant de la cotisation excédant 4 500 euros. »
    Il s'agit d'un amendement de repli, n'est-ce pas monsieur Brard ?
    M. Jean-Pierre Brard. On peut dire que c'est un amendement de repli, mais dans les plis, parfois, il se cache des miettes qui peuvent rapporter beaucoup !
    M. le président. Et de temps en temps, quand on est dans les plis, on est dans de beaux draps !
    M. Jean-Pierre Brard. Oui ; d'ailleurs, un de nos collègues qui était à la tribune l'autre jour est un spécialiste du fil. Il savait de quoi il parlait. Comme il n'est pas là aujourd'hui, je ne veux pas faire référence à ses activités professionnelles, mais on peut penser que, dans son cas, les draps dont vous parlez, monsieur le président, étaient en fil d'or...
    Cet amendement n° 92 est donc un amendement de repli, mais je crains bien qu'il soit destiné à subir le même sort que celui que le rapporteur général a réservé au précédent.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le même que précédemment.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 266 n'est pas défendu.
    Je suis saisi de trois amendements, n°s 447, 445 et 446, pouvant faire l'objet d'une présentation commune, du moins si vous êtes d'accord, monsieur Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Bien volontiers, monsieur le président.
    M. le président. Ces trois amendements sont présentés par MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    L'amendement n° 447 est ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Le premier alinéa du 6 de l'article 200 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
    « Sauf option du bénéficiaire pour l'imposition à l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires, l'avantage mentionné au I de l'article 163 bis C est imposé au taux de 45 % à concurrence de la fraction annuelle qui n'excède pas 152 500 euros et de 54 % au-delà. »
    L'amendement n° 445 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Dans le premier alinéa du 6 de l'article 200 A du code général des impôts, le nombre : "152 500 est remplacé par le nombre : "125 000. »
    L'amendement n° 446 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Dans le premier alinéa du 6 de l'article 200 A du code général des impôts, le nombre : "152 500 est remplacé par le nombre : "140 000. »
    Vous avez la parole, monsieur Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Ces trois amendements peuvent, en effet, être défendus ensemble, monsieur le président. Je reconnais bien là votre perspicacité et votre grande maîtrise du débat parlementaire et budgétaire. Ces amendements tendent à mettre la fiscalité française des stock-options au diapason de nos voisins, notamment allemands. Et comme vous faites toujours référence à l'étranger, nous allons voir si vous acceptez, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, les conséquences qu'il faudrait normalement tirer de ces comparaisons avec l'étranger.
    En effet, les taux actuels constituent un formidable cadeau aux contribuables imposés dans les tranches supérieures de l'impôt sur le revenu. A coût égal pour l'entreprise, il est fiscalement plus avantageux de percevoir des stock-options qu'un salaire, sauf bien sûr si la bourse s'effondre. Le marché de l'emploi des cadres sort d'une très bonne période, durant laquelle les embauches sont allées de pair avec la distribution de stock-options. L'attrait pour les stock-options, qui restent le plus souvent réservé à une élite, s'explique non seulement par l'envolée boursière de la décennie écoulée, mais également par l'avantage fiscal qu'elles procurent en comparaison avec le versement d'un salaire.
    De ce point de vue, la fiscalité française des stock-options est moins lourde que celle en vigueur, par exemple, aux Pays-Bas et en Allemagne. Ainsi, à coût égal pour l'entreprise, les options permettraient au salarié qui a les moyens de se les offrir de toucher une somme de 25 % supérieure à un salaire après impôt. Or, qu'apprenons-nous dans le journal Libération sur la manière dont se déroulent les auditions conduites par la commission des lois de notre assemblée, chargée de donner son avis sur la rémunération des chefs d'entreprises ? Je cite : « Depuis la rentrée, l'émotion semble retombée. Lors de l'audition de Claude Bébéar, la semaine dernière, les députés, venus en petit comité, sont restés très mesurés. Ils se sont contentés d'interroger poliment le fondateur d'Axa sur les propositions faites par ce dernier dans son ouvrage sur le gouvernement d'entreprise. Celui qu'on présente comme le parrain des affaires en France a ainsi pu proclamer sans contradicteur que la "transparence suffirait pour éviter les excès commis par les patrons. Il y avait pourtant des questions embêtantes à poser à M. Bébéar : ainsi, comment peut-il justifier l'octroi d'un million de stock-options à son ami Jean-René Fourtou lors de l'arrivée de ce dernier à Vivendi Universal ? » On avait cru comprendre, d'ailleurs, que cette entreprise avait quelques difficultés financières, mais ce n'est pas le cas de son nouveau PDG, qui a commencé par se servir et manger la tête dans l'auge. « Ces options, poursuit l'article, attribuées à un cours très bas auraient pu rapporter plus de 5 millions d'euros à M. Fourtou s'il les avait exercés au cours d'hier. »
    Ces informations consternantes, sont parues mercredi dernier, jour de l'audition de Jean-Marie Messier, lequel, comme vous le savez, a hypothéqué sa maison puisqu'il a absolument besoin d'avoir un toit. Or, il n'a pas la certitude d'être indemnisé comme il le souhaite...
    M. Michel Bouvard. Il n'est pas comme Bernard Tapie, qui a encore son hôtel particulier.
    M. Jean-Pierre Brard. Oh, vous savez, monsieur Bouvard, moi, je m'honore d'être l'un des rares députés à n'avoir jamais salué ce personnage peu fréquentable.
    M. Michel Bouvard. Je le sais !
    M. Jean-Pierre Brard. Et ne ne vois pas où est la différence essentielle avec M. Messier, dès lors que...
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. On ne va quand même pas passer son temps à citer des personnes.
    M. Jean-Claude Lefort. La parole est libre !
    M. Jean-Pierre Brard. Comment, monsieur le ministre ! Quand les voyous ont un nom, je ne vois pas pourquoi on ne les nommerait pas très clairement. C'est comme ça.
    M. le président. Accélérons, s'il vous plaît. Achevez votre démonstration, monsieur Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Ah ça, oui, c'est une démonstration. Parce qu'il y a des pratiques qui parlent.
    M. Eric Woerth. Il n'y a pas que les pratiques qui parlent.
    M. Jean-Pierre Brard. Et comment voulez-vous que l'on réconcilie les citoyens avec la politique si l'on ne moralise pas ? Le rôle du législateur, c'est de décider des règles qui garantissent la transparence, la morale et la contribution - j'en reviens à la Déclaration des droits de l'homme de 1789 - « de chacun à proportion de ses facultés ». Et tant que nous ne le ferons pas - et vous refusez de le faire - il ne faut pas s'attendre à ce que les citoyens redonnent leur confiance au personnel politique de notre pays.
    En tout cas, monsieur le président, monsieur le ministre, vous aurez compris que ces amendements visent à mettre un terme au laxisme actuel de notre législation.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission ne les a pas examinés. Mais puisque Jean-Pierre Brard parle du « laxisme » de la législation en matière de stock-options, je voudrais lui rappeler que celle-ci a été modifiée, en 1999, à l'initiative du ministre Dominique Strauss-Kahn, puis définitivement stabilisée dans le cadre de la loi relative aux nouvelles régulations économiques, promulguée en mai 2001. Or, nous, nous sommes avant tout pragmatiques. Nous ne sommes jamais animés d'un esprit sectaire. Et lorsque nous estimons qu'une législation est positive et équilibrée, nous ne la modifions pas pour le plaisir de la modifier. Je le dis en particulier à Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Mais je n'ai rien dit !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et en l'occurrence, le point d'équilibre qui a été atteint sous la précédente législature en matière de fiscalité des stock-options nous paraît satisfaisant.
    De plus, je rappelle à Jean-Pierre Brard que, pendant cinq ans, il a fait partie de la précédente majorité : s'il n'était pas satisfait des évolutions en matière de fiscalité des stock-options, il n'avait qu'à le faire valoir auprès de M. Jospin. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait à l'époque, et pourquoi demande-t-il aujourd'hui que l'on modifie cette fiscalité ?
    M. Jean-Claude Lefort. Mais il l'a fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Celle-ci nous paraît adaptée. J'émets donc un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je tiens à préciser deux points.
    M. Gilles Carrez a parlé d'esprit sectaire. Il se trouve qu'avec d'autres collègues, j'ai travaillé sur les sectes. Qu'est-ce qu'une secte ? C'est un groupe...
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'ai dit que je n'avais pas l'esprit sectaire.
    M. Jean-Pierre Brard. Ah, vous n'êtes pas dans une secte : vous me rassurez. Mais les gens dont on parle, d'une certaine manière, ils ont l'esprit sectaire, dans la mesure où ils sont à la tête de groupes qui sont coupés de la société puisqu'ils en vivent, ils pompent sa substance.
    Les groupes sectaires constituent aussi des réseaux de drainage de l'argent. Et vous voyez bien que même s'ils soignent leur image, les personnages que j'ai évoqués s'inscrivent tout à fait dans cette démarche.
    En ce qui concerne l'adoption, sous la précédente législature, des dispositions législatives que je propose de modifier, je vous rappelle, monsieur le rapporteur général, et le Journal officiel en fait foi, que nous étions déjà contre les stock-options, à l'époque. Mais nous ne voulions évidemment pas que le gouvernement de Lionel Jospin tombe, parce que même si, dans une politique, il y a une mesure avec laquelle vous n'êtes pas d'accord, cela ne change rien au fait que, globalement, vous soutenez la politique mise en oeuvre. Par exemple, nous avons soutenu les 35 heures, et nous en sommes fiers, nous avons soutenu la mise en place des emplois-jeunes, nous avons soutenu l'instauration du PACS, etc.
    M. Michel Bouvard. En effet : etc. !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous savez, quand on est minoritaire au sein d'une majorité, il y a parfois des moments complexes à gérer. Demandez à François Bayrou,...
    M. Jean-Claude Lefort. Il n'est d'ailleurs pas là !
    M. Jean-Pierre Brard. ... qui vous fait endurer des misères en ce moment !
    M. Didier Migaud. Oh, ça ne va pas très loin !
    M. Jean-Pierre Brard. Non, en effet, ça ne va pas très loin. Nous, nous débattions plus. Quoi qu'il en soit, à un moment donné, le rapport des forces est établi par le suffrage universel. C'est cela, la démocratie.
    M. Marc Laffineur. Très juste !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous avions au départ conclu un pacte avec Lionel Jospin dans le cadre de la majorité plurielle, devant les électeurs, et c'est l'honneur de la vie politique que d'être fidèle à ses engagements.
    Pour en revenir aux stock-options, nous étions contre. Et la vie nous a donné raison. Voyez par exemple les dispositions qui sont prises aujourd'hui aux Etats-Unis pour les plafonner. Vous ne pouvez pas aujourd'hui nous jeter à la figure les stock-options d'hier, puisque nous les avions déjà condamnées, monsieur le rapporteur général.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 447.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 445.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 446.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 448, ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « Le dernier alinéa du 6 de l'article 200 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
    « Ces taux sont réduits respectivement à 19,14 % et 28,26 % lorsque les titres acquis revêtent la forme nominative et demeurent indisponibles, suivant des modalités fixées par décret, pendant un délai au moins égal à deux ans à compter de la date d'achèvement de la période mentionnée au I de l'article 163 bis C. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. J'ai cru comprendre que le président de la commission des finances, approuvé en cela par le ministre, souhaitait que le débat gagne un peu en rapidité. Aussi bien ne vais-je pas m'étendre longuement sur cet amendement, dont l'inspiration est la même que les précédents. Je pense d'ailleurs que vous devriez nous encourager dans cette direction en étant plus attentifs à nos amendements (Sourires), comme le disait Didier Migaud en fin de matinée. Car, pour l'instant, vous les rejetez tous, démontrant ainsi le peu de sens du dialogue que vous avez avec l'opposition.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Même avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 448.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 124 et 147 corrigé, pouvant faire l'objet d'une présentation commune.
    Ces deux amendements sont présentés par MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    L'amendement n° 124 est ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « L'article 242 quater du code général des impôts est abrogé. »
    L'amendement n° 147 corrigé est ainsi libellé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « L'article 242 quater du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le taux d'impôt prévu au premier alinéa du II de l'article 158 bis est fixé à 5 % pour les crédits d'impôts utilisés à compter du 1er janvier 2003 par une personne morale non résidente, dans le cadre d'une convention fiscale prévue par l'alinéa précédent. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Il s'agit maintenant de l'avoir fiscal. Vieux sujet ! Si mes souvenirs sont bons, c'est feu Jacques Chaban-Delmas qui l'institua.
    La France fait parfois preuve en matière fiscale d'une générosité tout à fait injustifiée, surtout dans le contexte actuel des finances publiques, au moment où la norme de croissance zéro en volume des dépenses publiques, bref, la rigueur, est devenue le leitmotiv du Gouvernement.
    L'amendement n° 124, s'il était adopté, assurerait un gain net en termes de recettes puisqu'il s'agit, en quelque sorte, de mettre un terme à une redistribution tout à fait injustifiée de l'avoir fiscal au bénéfice des non-résidents. Au passage, je note que le gouvernement français n'a jamais demandé la réciprocité de cette mesure. Non que je pleure sur le sort de ceux qui font des investissements à l'étranger et qui résident sur notre territoire, mais, vous qui défendez les privilégiés, vous pourriez tout de même, monsieur le ministre, être plus sensible au sort des privilégiés français qui ne bénéficient pas de la réciprocité de cette mesure.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Encore faut-il qu'il y ait un avoir fiscal à l'extérieur !
    M. Jean-Pierre Brard. Le dialogue international, ou bilatéral, ça existe ! Au lieu de vous incliner devant la concurrence, vous devriez essayer d'obtenir des avantages équivalents.
    Cet avantage est une spécificité du droit fiscal de notre pays, qui n'a pas vraiment sa raison d'être. Sa suppression est d'autant plus justifiée que le poids de la restitution tend, au fil des ans, à représenter une part croissante du coût budgétaire de l'avoir fiscal attaché aux dividendes des sociétés.
    S'il faut prévoir une négociation avec les pays auxquels nous sommes liés par une convention fiscale, il y a d'autres Etats avec lesquels, comme vous le savez, nous n'avons pas de conventions fiscales - ce que j'ai d'ailleurs eu l'occasion de vérifier quand j'ai travaillé sur l'évasion et la fraude fiscales - et, systématiquement, l'avoir fiscal est reversé à des possédants qui, pour certains d'entre eux, ont délocalisé, c'est-à-dire qu'ils sont partis, par exemple, dans les paradis fiscaux.
    A cet égard, je me permets une parenthèse. On entend souvent le raisonnement selon lequel le taux marginal de l'impôt sur le revenu serait si élevé en France qu'il constituerait un véritable épouvantail, provoquant la fuite d'un certain nombre de rapaces désireux de garder leur liberté de penser - et surtout celle de leur coffre-fort - et que vous qualifiez poétiquement de « cerveaux ». Les député-e-s de notre groupe n'ont bien évidemment pas une vision du monde aussi réductrice, aussi « économiciste » que la vôtre. Nous ne pensons pas que l'attractivité d'un pays se résume à des questions fiscales. La qualité des services publics et des infrastructures, la qualité du système éducatif, le dynamisme du marché intérieur sont tout aussi importants, si ce n'est plus. Demandez donc aux entrepreneurs étrangers qui décident chaque année d'investir en France, de parier sur la France. Notre pays figure d'ailleurs dans les tout premiers rangs mondiaux en termes d'investissements étrangers directs, démentant ainsi cette espèce de contre-propagande que vous développez contre notre pays.
    Ainsi, monsieur le ministre, mes chers collègues de la majorité, votre vision réductrice du monde vous porte à croire que l'alpha et l'oméga de toute décision humaine réside dans le niveau du taux marginal d'imposition sur le revenu. On ne parviendra sans doute pas de sitôt à dissiper cette illusion, puisque vous travaillez à l'entretenir.
    A supposer que l'on partage cette vision du monde, on serait peut-être porté à examiner le problème de manière inversée. En effet, n'est-ce pas plutôt l'existence de paradis fiscaux, c'est-à-dire de territoires où le mot « progressivité » est banni de la législation fiscale - quand elle existe - qui explique la fuite de ces fameux « cerveaux » que vous évoquez ? La question mérite d'être posée.
    Certes, vous évoquerez la sacro-sainte souveraineté de micro-Etats comme les Bahamas, le Liechtenstein et, dans une moindre mesure, Monaco, qui sont libres de déterminer leur politique fiscale. Soit, mais il semble que les choix souverains de ces Etats ne soient pas sans incidence sur votre politique prétendument souveraine, qui se traduit par le choix du moins-disant fiscal.
    Quoi qu'il en soit, les possédants qui sont partis loin de nos cieux sont légalement devenus des non-résidents. Mais ces gens qui, comme le disait Anatole France, sont partis « en emportant un morceau de la patrie à la semelle de leurs souliers », à notre corps défendant, non seulement ont violé l'intérêt national, mais en plus se voient accorder une prime. Il se pose là une question d'éthique, et je suis sûr que si notre collègue de Courson était là, il y serait sensible, puisqu'en fin de compte, ce sont les héritiers des « Coblençards » que je dénonce là : il est absolument légitime de leur retirer la possibilité de toucher l'avoir fiscal alors qu'ils sont partis, qu'ils sont non-résidents et qu'ils ne contribuent pas à la richesse du pays.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 124 et 147 corrigé ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. L'un des problèmes du régime de l'avoir fiscal tel qu'il est pratiqué en France tient au fait qu'il est versé à des non-résidents - particuliers ou personnes morales - qui détiennent les actions de sociétés françaises.
    Jean-Pierre Brard s'intéresse à ce sujet depuis longtemps, et il a raison. Il est vrai également que des améliorations ont été apportées au cours des dernières années, puisque le montant de l'avoir fiscal restitué aux personnes morales étrangères a été progressivement réduit et qu'il est aujourd'hui limité à 10 %. En revanche, pour les particuliers, lorsque des conventions fiscales ont été signées avec des Etats, les ressortissants français ou les non-résidents des pays intéressés sont traités de la même manière. Ce qui fait qu'aujourd'hui, nous versons chaque année à l'étranger plus d'un milliard d'euros sous forme d'avoir fiscal.
    Poursuivant un certain nombre de réformes qui ont été engagées cette année mais allant cette fois-ci au bout des choses, le Gouvernement proposera, lors de l'examen de la seconde partie de la loi des finances, le 14 novembre prochain - je vous donne donc rendez-vous ce jour-là, monsieur Brard - une refonte profonde du régime de l'avoir fiscal, qui, je le pense, vous donnera satisfaction.
    En attendant, bien qu'il n'y ait pas de divergence de fond, je ne peux donner qu'un avis défavorable à ces amendements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. M. Brard peut retirer ses amendements car la réforme que nous allons engager ne pourra que le satisfaire. S'il ne le fait pas, j'émettrai un avis défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne veux pas passer pour un extrémiste, mais je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous disiez en deux phrases en quoi consistera cette réforme et dans quel sens elle ira. Cela concerne tout de même un milliard d'euros. Si l'on enlevait cette somme à ceux qui ne l'ont pas méritée et qu'on la consacre au co-développement, imaginez le levier fantastique que cela représenterait.
    Certes, nous avons signé des conventions fiscales avec des pays. C'est une réalité que nous ne pouvons pas ignorer. Le droit international, ça existe ! Mais avez-vous la volonté de renégocier ces conventions ?
    Par ailleurs, pour ce qui est des pays avec lesquels nous n'avons pas de convention fiscale, c'est notre droit discrétionnaire que de mettre un terme à une disposition qui, de toute façon, n'est moralement pas légitime et légalement pas obligatoire.
    Je serai prêt à retirer mes amendements, si je sens que vous allez dans le bon sens.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, nous allons discuter de la suppression de l'avoir fiscal lors de l'examen de la seconde partie de la loi de finances. Vous connaissez le projet du Gouvernement puisque vous êtes membre de la commission des finances, et personne ne peut vous accuser de ne pas vous intéresser au projet de loi de finances. A cette occasion, vous obtiendrez satisfaction.
    Tout à l'heure, vous nous avez quasiment soupçonnés - mais je sais que c'est une forme d'humour que vous pratiquez - de ne pas être vigilants sur les intérêts des Français qui pourraient détenir des titres à l'extérieur. Cependant, je voudrais vous faire remarquer, d'une part, qu'il y a, comme vous le savez certainement, des pays avec lesquels nous avons passé des conventions fiscales et, d'autre part, qu'il doit exister dans les pays considérés un régime d'avoir fiscal, ce qui est de plus en plus rare - les pays appliquant un tel régime sont en voie de disparition totale.
    Nous sommes en train de résoudre tous les problèmes qui se posent ; or vous faites comme si nous n'agissons pas. Nous agissons. Grand diable, aidez-nous à agir ! Nous vous donnons rendez-vous lors de l'examen de la seconde partie de la loi de finances, et vous verrez que nous proposerons des solutions pour résoudre les problèmes que vous évoquez.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne suis pas sûr, monsieur le ministre, que faire appel au diable soit une incitation très positive, à moins que vous ne me preniez pour Lucifer, ce qui n'est guère rassurant pour ce qui est du divin ! (Sourires.)
    Nous connaissons certaines de vos options, mais je voulais que vous les énonciez pour que tout le monde, y compris les médias, le sache,...
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Les médias les connaissent !
    M. Jean-Pierre Brard. ... et pour vous inciter à être encore plus zélé dans le combat que vous menez contre des pratiques immorales qui nuisent aux ressources du pays. Je vous incite, monsieur le Premier ministre... vous ne l'êtes pas encore, mais cela viendra certainement.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. La place n'est pas enviable !
    M. Jean-Pierre Brard. Votre modestie vous honore.
    M. Michel Bouvard. Ce ne serait pas un mauvais choix !
    M. Jean-Pierre Brard. Toutefois, malgré l'estime que l'on peut avoir pour vous, je ne souhaiterais pas, pour notre pays, que vous lui imposiez, comme Premier ministre, les purges auxquelles vous le soumettez comme ministre du budget.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Ce serait pire !
    M. Jean-Pierre Brard. Cela sonne comme une critique implicite du Premier ministre actuel.
    M. Jean-Claude Lefort. Une critique très sévère !
    M. Philippe Auberger. On s'égare !
    M. Jean-Pierre Brard. On ne s'égare pas, monsieur Auberger. Ecoutez bien ce que je vais dire.
    M. Michel Bouvard. L'enfer est pavé de bonnes intentions !
    M. Jean-Pierre Brard. Lorsque j'ai travaillé sur la fraude, j'ai découvert que des sociétés nationales de grand renom déterraient des comptes dans les paradis fiscaux. Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous y mettiez bon ordre. Cela nous éviterait de dévoiler les noms de ces grandes sociétés nationales et leur donnerait un répit pour se mettre en conformité avec l'éthique républicaine en rapatriant sur le territoire national les comptes qu'elles possèdent dans ces paradis fiscaux.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 124.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 147 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 100, ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « L'article 5 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002) est abrogé. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Ce dernier amendement de repli propose de modifier l'article 150-0 A du code général des impôts. Il vise à soumettre les gains nets des cessions à titre onéreux de valeurs immobilières à l'impôt progressif sur le revenu lorsque le montant de ces cessions dépasse, pour une année donnée, 7 650 euros par foyer fiscal. Actuellement, rappelons-le, ces revenus ne sont soumis à l'impôt sur le revenu que si, et seulement si, ils excèdent 15 000 euros.
    Monsieur le ministre, vous parlez tout le temps du travail. Il ne suffit pas d'en parler, il faut lui donner toute sa place, en particulier, en ce qui concerne celui des gens qui sont rémunérés le plus modestement malgré l'importance de l'effort qu'ils accomplissent. Or vous êtes intrai-table à leur égard.
    Mes chers collègues de droite - chers dans tous les sens du terme, parce que vous coûtez très cher au pays, en particulier aux plus modestes de nos concitoyens -, si l'on observe cet amendement indépendamment de l'exposé sommaire qui l'accompagne, son objet, que je viens de rappeler, ne saute pas aux yeux. Pourtant, si l'on y regarde de plus près, tout est clair. Nous avons ciblé un article bien précis de la loi de finances 2003, soit l'article 5.
    C'est en effet l'article 5 qui a modifié dans un sens très favorable le dispositif de l'article 150-0-A, qui était réservé jusqu'alors aux gains modestes réalisés par les petits porteurs. La loi de finances de 2003 fut, si l'on excepte les deux collectifs de 2002, la première expression de vos choix budgétaires, qui marquaient, non une évolution, mais une rupture. Déjà, avec l'article 5 - article 4 du projet en première lecture -, vous accordiez un cadeau aux nantis et encouragiez, certainement involontairement, à la spéculation au détriment des investissements productifs.
    Il est beaucoup plus parlant de demander la suppression d'une loi, qui, une fois promulguée, est datée, située et, de ce fait, associée à une équipe gouvernementale, que de réclamer la modification d'un article du code général des impôts, code qui n'est ni de droite ni de gauche, mais qui est le reflet de l'état du droit à un moment donné.
    Par la loi n° 2002-1575 du 30 décembre 2002 vous avez clairement affiché le caractère purement rhétorique et démagogique de la thématique de la France d'en bas !
    Les cadeaux fiscaux les plus divers se sont multipliés et sont appelés, semble-t-il, à encore se multiplier. Je me permets de citer pêle-mêle les baisses successives des taux du barème de l'IRPP, l'augmentation de la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, le nouveau régime de taxation des plus-values immobilières, la réduction du droit pour les donations en pleine propriété, la revalorisation du barème de l'ISF en lieu et place d'un élargissement de son assiette. La liste est longue. Ces rappels ne sont pas exhaustifs, mais sachez qu'ils parlent aux 10 millions de Françaises et de Français qui vivent, voire survivent avec le SMIC et les minima sociaux.
    Le rappel de cette loi du 30 décembre 2002 a enfin le mérite de permettre de dresser un constat que je trouve accablant : ceux qui, aujourd'hui, au sein de la majorité, à la suite du rapport du Conseil des impôts sur la fiscalité dérogatoire, partent en chasse contre les niches fiscales, sont les mêmes que ceux qui, l'année dernière, en votant l'article 5 de la loi de finances, pérennisaient le régime juridique applicable à l'une des niches les plus injustifiées.
    Tous ces développements, vous l'aurez compris, suffisent amplement à justifier cet amendement. De l'attitude que vous adopterez à son égard, vous serez jugés sur la manière dont vous faites ce que vous dites.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, pour des raisons que j'ai exposées hier soir.
    M. Brard se trompe de cible, car ce sont les petits porteurs et même les tout petits porteurs qui seraient les plus défavorisés par l'adoptation d'un tel amendement.
    Le plafond est fixé à un niveau très raisonnable : 15 000 euros. Il concerne, non des plus-values, mais des gains nets - le montant de la cession moins les frais - sur une année. Si ce plafond était abaissé, ce serait d'abord les titulaires des tout petits portefeuilles qui seraient touchés.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Evidemment, il y a des petits porteurs et des gros porteurs. Toutefois, je pense que vous avez compris la logique qui est la nôtre depuis le début de ce débat : il s'agit de taxer davantage les gros porteurs que les petits. Cela ne signifie pas pour autant qu'il faut exonérer les petits.
    Ce qu'il convient de priviléger, monsieur le ministre - et il me semblait que, au moins sur le plan de la rhétorique, vous étiez d'accord avec moi -, ce sont les revenus du travail d'abord et non les revenus d'une autre nature.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 100.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 95, ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Il est institué du 1er octobre 2003 au 31 décembre 2004 un crédit d'impôt au bénéfice des contribuables ayant obtenu le permis transport de marchandises ou le permis transport en commun de voyageurs ; ce crédit d'impôt ne peut excéder 50 % du coût correspondant, dans la limite de 762,25 euros.
    « II. - Les trois plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu sont relevées à due concurrence. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Depuis de nombreuses années, les députés de notre groupe se prononcent pour un rééquilibrage de la politique des transports en faveur du rail.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Jean-Pierre Brard. J'entends un de mes collègues de droite dire « très bien ! ». J'imagine donc que je vais avoir des appuis. (Sourires.)
    Il est inadmissible que notre pays soit traversé de part en part par une cohorte de poids lourds en transit, au prix de nuisances importantes et du risque réel, à brève échéance, d'une saturation totale des principaux axes autoroutiers.
    M. Robert Pandraud. Le rapporteur général n'est pas d'accord pour ce qui concerne l'A 90 !
    M. Jean-Pierre Brard. Votre gouvernement, si prompt à déployer les arsenaux les plus sophistiqués dès lors qu'il s'agit de sécurité, apparaît singulièrement aphone concernant ce problème. Mais force est de reconnaître, malgré tout, qu'il a su faire surgir l'arme de la répression pour tout ce qui concerne la conduite automobile. Les intentions ont pu sembler louables, légitimes au regard du drame national tout à fait réel que représentent les accidents de la route, mais le dispositif retenu s'inscrit principalement dans le cadre de votre politique répressive, engagée notamment par M. Sarkozy à l'occasion de l'élaboration de sa loi sur la sécurité intérieure, plutôt que dans celui d'une véritable pédagogie de la conduite automobile.
    M. Hervé Mariton. Vous vous égarez !
    M. Jean-Pierre Brard. Pour nous, ce n'est pas fromage ou dessert ! C'est la pédagogie et la répression. Mais la répression sans la pédagogie, cela risque de tourner court !
    Il reste que les conditions d'obtention du permis de conduire ont été singulièrement aggravées. A défaut de bénéficier d'un meilleur enseignement, les candidats au permis de conduire se voient opposer le mur, désormais infiniment plus hermétique ou plus haut, de l'examen. Il en résulte un accroissement sensible des frais à engager pour obtenir ce permis.
    En conséquence, l'article que nous proposons d'ajouter après l'article 4 ne nous en semble que plus opportun.
    Comme nous l'avons indiqué en préambule, nous désapprouvons la politique du tout routier que mènent les gouvernements depuis plusieurs décennies et que vous voulez poursuivre, puisque vous exonérez les transporteurs routiers de l'augmentation du prix du gazole. Ce n'est pas, nous semble-t-il, une raison pour pénaliser les jeunes, qui, faute de mieux, s'orientent vers l'apprentissage de la conduite des poids lourds pour tenter de trouver une activité professionnelle. Le raisonnement, bien que légèrement différent, vaut pour ceux qui aspirent à conduire des véhicules de transport en commun.
    M. Hervé Mariton. Vous pouvez nous développer le raisonnement !
    M. Jean-Pierre Brard. Oui, pour essayer de vous convaincre.
    Le prix d'un permis de conduire est une charge lourde à supporter. Notre système d'apprentissage de la conduite ne permet guère d'envisager d'en réduire le coût. Je tiens cependant à appeler votre attention au passage sur le fait que les mécaniciens de la SNCF n'ont pas à payer - ce qui est légitime - l'apprentissage de la conduite d'une locomotive ou d'un TGV. Vous admettrez volontiers qu'il ne s'agit pas pour autant d'une formation moins exigeante que celle de la conduite automobile.
    C'est la raison pour laquelle il nous semble juste d'accorder un crédit d'impôt à ceux qui investissent dans l'apprentissage de la conduite d'un poids lourds ou d'un véhicule de transport en commun à des fins professionnelles.
    Une telle disposition nous semble relever non seulemenrt de l'équité mais également de l'efficacité économique. Vous n'ignorez pas les difficultés de recrutement que connaissent les professions du transport.
    Par ailleurs, il n'est pas inutile de rappeler que le service militaire permettait à de nombreux jeunes d'obtenir gratuitement leur permis de conduire poids lourds ou transports en commun. Cette facilité a disparu aujourd'hui pour les raisons que l'on sait. Et si, effectivement, on peut juger que le service national, dans la conception qui prévalait antérieurement, était devenu obsolète, la création d'un service civil moderne pourrait, de ce point de vue, s'avérer judicieux. Mais c'est un autre débat que nous ne vous proposons pas d'ouvrir aujourd'hui.
    En tout état de cause, nous vous proposons d'adopter notre amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement que l'on voit revenir chaque année, non pour des raisons de fond - je partage le souci de Jean-Pierre Brard de favoriser l'obtention du permis de conduire -, mais tout simplement parce que le crédit d'impôt n'est pas le vecteur approprié.
    Il est vrai que le service militaire permettait à de nombreux jeunes d'obtenir leur permis. Moi-même, en tant qu'officier du train des équipages, j'ai, durant ma période sous les drapeaux, fait passer de nombreux permis de conduire, et je considère que c'était une excellente chose. Toutefois, aujourd'hui, différents dispositifs d'insertion ou de formation professionnelle ont pris le relais, et ils fonctionnent bien, et le crédit d'impôt n'est absolument pas l'instrument approprié.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. L'idée de permettre à des jeunes d'obtenir le permis de conduire est intéressante. Toutefois, il s'agit d'un problème pour lequel il existe déjà une solution. En effet, de nombreux départements proposent, au titre de la politique d'insertion, la préparation au permis poids lourds. Du reste, des fonds sont mobilisés à cet effet dans les programmes TRACE, et les préfets utilisent aussi très souvent les crédits du fonds social européen.
    M. Eric Besson. Pas assez !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Bref, les dispositions actuellement en vigueur répondent déjà largement à votre souhait, monsieur Brard, et la création d'un crédit d'impôt me paraît inutile. Aussi, je me permets de vous proposer de retirer votre amendement. A défaut, j'en demanderai le rejet.
    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Sur le fond, tout le monde peut être d'accord avec Jean-Pierre Brard.
    Il est vrai, monsieur le ministre, que, en cette matière, il existe des moyens de financement ; je vous en donne bien volontiers acte. Toutefois, étant donné la faible consommation que fait la France des crédits du fonds social européen, il reste encore des marges importantes de financement, tant pour ce type d'opération que pour des opérations en faveur des chômeurs du reste.
    Il n'en demeure pas moins que les différentes structures de formation qui existent dans notre pays rencontrent parfois quelques difficultés pour monter les dossiers. Aussi, je suggère que cette question fasse l'objet de discussions avec le ministre du travail lors de l'examen du budget de la formation professionnelle.
    Le problème que nous évoquons est apparu avec, entre autres, la suppression du service national, puisque, comme l'a rappelé Gilles Carrez, nombre de jeunes obtenaient leur permis poids lourds à cette occasion.
    Il n'en reste pas moins que je pense que nous avons intérêt à ce qu'il y ait une mobilisation nationale sur le sujet. En effet, tout en étant, à l'instar de Jean-Pierre Brard, favorable au renforcement du transport ferroviaire, je souhaite, comme les autres membres de mon groupe, que nous gardions un transport routier puissant. Si nous n'y parvenons pas, nous déplorerons des délocalisations d'entreprises au bénéfice des pays d'Europe centrale qui pratiquent le dumping social et écologique. Je le crains d'autant plus que, dans le territoire où je suis l'élu, je vois passer sur les routes beaucoup d'Erika sur roues !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Le même amendement est déposé depuis plusieurs années par notre collègue Jean-Pierre Brard.
    J'ai reconnu, lorsque j'étais rapporteur général, qu'il s'agissait d'un vrai sujet, mais que la réponse proposée par notre collègue n'était peut-être pas la plus adaptée, et qu'il fallait donc travailler la question.
    Cela dit, monsieur le ministre, votre réponse ne me paraît pas plus satisfaisante car il y a de moins en moins de crédits affectés aux dispositifs que vous avez évoqués.
    M. Michel Bouvard. Comme pour le FSE !
    M. Didier Migaud. Le programme TRACE, par exemple, fait partie de ces politiques publiques qui sont, malheureusement, remises en cause aujourd'hui par le ministère des affaires sociales.
    Passer le permis poids lourds est hors de prix, alors que nombre de jeunes qui connaissent des situations difficiles pourraient, munis de ce permis, avoir l'espoir de trouver un emploi. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    L'accès à tous ces dispositifs reste très difficile.
    Je ne suis pas sûr que le crédit d'impôt soit la réponse la plus adaptée. Nous nous étions engagés à apporter la meilleure solution au problème posé par Jean-Pierre Brard qui est, tout le monde en convient, réel. Malheureusement, la solution préconisée n'est pas au niveau du problème lui-même. Je souhaite donc que le rapporteur général et le ministre continuent de travailler sur le sujet et qu'à l'occasion du collectif budgétaire soit résolu ce problème récurrent.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, j'ai au moins la satisfaction intellectuelle de trouver de l'écho dans cet hémicycle, ce qui n'est pas toujours le cas.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ce n'est jamais le cas !
    M. Jean-Pierre Brard. Je n'ai pas dit « jamais », mais « pas toujours ». Il faut toujours être modéré et éviter d'être sectaire. (Sourires.)
    Il faut cependant reconnaître que, ainsi que l'a relevé Michel Bouvard, il n'y a pas eu beaucoup de nos collègues pour faire écho à ma question. Il est vrai que, lorsqu'il est question d'écologie, Michel Bouvard et moi-même nous sommes souvent retrouvés : contre la majorité de l'époque, dont je faisais partie, il m'est arrivé de voter ses amendements concernant notamment la TVA sur le bois de chauffage, qui favorisent l'utilisation de sources d'énergie permettant de valoriser la forêt. Certains sujets peuvent donc être « transpartisans » et jeter des passerelles d'un bout à l'autre de cet hémicycle.
    Cela dit, nous verrons ce qu'il adviendra au moment du vote. Il ne suffit pas de dire que, sur le fond, tout le monde est d'accord. N'étant pas sous-marinier, je voudrais bien qu'à la surface, on le soit aussi. (Sourires.)
    M. Philippe Auberger. Dommage que vous ne restiez pas au fond !
    M. Jean-Pierre Brard. Quant à vous, monsieur Auberger, à Joigny, vous faites plutôt dans les vignes du Seigneur. (Sourires.)
    M. le président. Monsieur Brard, poursuivez activement votre plongée périscopique ! (Rires.)
    M. Michel Bouvard. Sortez le schnorchel !
    M. Jean-Pierre Brard. Je vais remonter à la surface, monsieur le président.
    M. Bouvard a parlé d'Erika sur roues et sur routes. C'est un vrai problème. Comment éviter les délocalisations et les accidents gravissimes ? Si nous avons su prendre des mesures concernant les navires, pourquoi ne pourrions-nous pas prendre des mesures équivalentes pour les camions, empêchant ainsi, de fait, le dumping social et commercial ? Ce ne serait pas très difficile : il suffirait d'avoir la volonté politique d'affirmer son indépendance vis-à-vis des lobbies routiers - et Dieu sait s'ils sont nombreux, actifs et insistants -, dont la position de nos collègues se fait parfois trop l'écho.
    Je souhaite donc que mon amendement soit voté mais, s'il ne l'était pas, monsieur le ministre, vous pourriez faire un geste. En effet, la continuité de l'Etat, cela existe : les gouvernements changent, mais l'Etat et ses administrations demeurent. Et, comme l'a souligné Didier Migaud, les services de l'Etat sont chargés de travailler sur le sujet depuis trois ans au moins. Or celui-ci ne me semble pas très difficile. Il serait donc invraisemblable que ces travaux n'aient pas déjà produit des résultats connus dans les couloirs de Bercy.
    Monsieur le ministre, si vous faisiez un geste en vous engageant, par exemple, à traiter le problème dans le cadre du collectif, je serais prêt à retirer mon amendement, car alors votre volonté et la mienne seraient convergentes.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Brard, je m'applique à tenir les engagements que je prends mais je ne veux pas les solenniser plus qu'il ne le faut. Par ailleurs, je dois vous dire franchement que la longueur de nos travaux ne m'incite pas à faire preuve d'une écoute excessive.
    Cela dit, la préoccupation que vous avez exprimée est partagée sur l'ensemble de ces bancs. Je vais m'appliquer à essayer d'apporter des solutions, mais je ne veux pas fixer comme terme la discussion du collectif, n'étant pas certain de pouvoir tenir parole. Néanmoins, mon engagement est pris de travailler sur le sujet et de vous dire, éventuellement lors de la discussion du collectif, si nous avons progressé.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je sais ce que vaut un engagement de Normand - il ne faut pas confondre les Normands et les Gascons -, et je retire donc l'amendement. (Sourires.)
    M. le président. L'amendement n° 95 est retiré.
    MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 96, ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Il est institué du 1er octobre 2003 au 31 décembre 2004 un crédit d'impôt au bénéfice des contribuables ayant eu recours dans l'année de référence aux prestations d'une entreprise de déménagement. Ce crédit d'impôt ne peut excéder 50 % du coût correspondant dans la limite de 762,25 euros, il ne peut se cumuler avec le bénéfice au titre de la déclaration aux frais réels tels que définis au 3° de l'article 83 du code général des impôts.
    « II. - Les trois plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu sont relevées à due concurrence. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Cet amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 96.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. de Courson a présenté un amendement, n° 200, ainsi rédigé :
    « Après l'article 4, insérer l'article suivant :
    « I. - Il est institué, au choix de l'intéressé, une réduction d'impôt de 27 439 euros au titre de la seule année 2004 ou de 5 487 euros qui s'imputent sur la cotisation, due au titre de l'impôt sur le revenu annuellement, à compter de 2004, au bénéfice de toute personne mineure de moins de vingt et un ans au moment où l'arrestation est intervenue, à l'exception de celles visées par le décret n° 2000-357 du 13 juillet 2000, ou dont la mère ou le père, durant l'Occupation, a été déporté à partir de la France, a été fusillé ou massacré pour faits de résistance ou pris en otages et a trouvé la mort lors de son arrestation, de sa détention, de son transfert ou de sa déportation.
    « Si le montant de la réduction dépasse le montant de l'impôt dû, il n'est pas procédé à restitution.
    « Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application des dispositions ci-dessus.
    « II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.
    M. Pierre-Christophe Baguet. Le 13 juillet 2000, le Premier ministre Lionel Jospin avait décidé par décret d'indemniser les orphelins juifs de parents décédés ou déportés dans les camps de concentration. Sans qu'il soit bien entendu question de remettre en cause cette décision légitime, son caractère restrictif avait suscité une réelle émotion parmi toutes les familles également frappées par ces drames mais exclues de la mesure, et parmi toutes les associations d'anciens combattants attachées à la solidarité née de ces moments bien cruels partagés.
    Au nom d'une légitime équité et face à tant de détresse, nous avions à l'époque, avec mon collègue Charles de Courson, posé, au nom du groupe UDF, une question d'actualité au secrétaire d'Etat aux combattants, M. Hamlaoui Mékachéra.
    Dans sa réponse, le secrétaire d'Etat avait reconnu l'aspect inéquitable de la mesure et manifesté son souci d'y remédier. Mais en l'absence de réaction concrète, nous avions par la suite déposé un amendement au projet de loi de finances pour 2003 afin de solliciter la rédaction d'un rapport sur une extension du dispositif. M. Mékachéra a alors désigné l'ancien ministre Philippe Dechartre pour étudier et les possibilités et les coûts d'une telle ouverture.
    L'amendement n° 200 a pour objet de déterminer le périmètre des futurs bénéficiaires de la mesure. Son adoption ne serait que pure justice.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement dans la mesure où le crédit d'impôt ne paraît pas être le bon instrument. Cela dit M. Charles de Courson nous avait indiqué qu'il s'agissait d'un amendement d'appel visant à obtenir des précisions sur les suites qui seront données au travail conduit par M. Philippe Dechartre.
    Je laisse la parole à M. le ministre.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Parce que la question est très complexe, le secrétaire d'Etat aux anciens combattants avait demandé à Philippe Dechartre, ancien résistant, ancien ministre du général de Gaulle et personnalité reconnue par l'ensemble du monde combattant et des personnes victimes, un rapport pour dresser l'état des lieux de l'indemnisation des uns et des autres après les mesures de réparation de l'immédiat après-guerre et du décret du 13 juillet 2000.
    Au vu de ce rapport, le Premier ministre a décidé, le 2 septembre, d'accorder aux orphelins de déportés victimes des persécutions nazies, de fusillés et de massacrés, une indemnisation identique à celle résultant du décret du 13 juillet 2000 pour les orphelins des persécutions antisémites. Conformément à l'article 15 de la loi de finances pour 2003, cette décision a été officiellement communiquée aux présidents des deux assemblées.
    Cela étant, la mise en oeuvre de cette décision importante nécessite que les notions de « fusillés » et de « massacrés » soient définies avec précision car il ne faudrait pas qu'un nouveau sentiment d'injustice naisse chez les déportés à la suite de la publication du nouveau décret. C'est ce à quoi, à la demande du Premier ministre, le secrétaire d'Etat aux anciens combattants s'emploie avec diligence, afin que l'ensemble des orphelins de la déportation soient traités à parité.
    Au contraire de cette logique, qui permettra que les orphelins de la déportation soient enfin traités à parité, la mise en place d'une indemnisation par la voie fiscale serait source d'injustice puisque, consentie sous la forme d'une réduction d'impôt, comme cela est proposé, elle ne bénéficierait de fait qu'aux seuls orphelins imposables.
    M. Michel Bouvard. Exact !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Comme vous pouvez le constater, le Gouvernement a tenu son engagement de faire étudier le sujet au fond. Mais, la question étant extraordinairement délicate, il faudra faire en sorte qu'elle soit tranchée une fois pour toutes. A cet égard, la définition des deux notions que j'ai évoquées est capitale. Elle donne lieu à des concertations pour éviter les difficultés de l'application.
    Je pense, monsieur Baguet, que nous serons assez prochainement en mesure de vous informer sur la suite définitive qui pourrait être donnée à ce dossier.
    Sous le bénéfice de ces observations, je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement, ce qui m'évitera d'en demander le rejet.
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Ce sujet important a fait l'objet d'engagements d'un certain nombre de responsables.
    A la suite de la décision prise par le précédent Premier ministre, nous avons été un certain nombre, y compris dans l'ancienne majorité, à souhaiter que le dispositif soit étendu. Cette extension fut mise à l'étude.
    Des engagements précis ont été pris par l'actuel Président de la République et par le Premier ministre. Une personne a été nommée et un rapport rédigé. On nous explique maintenant, après dix-huit mois, qu'il faut mettre une commission en place.
    Je ne doute pas, monsieur le ministre, de votre sincérité et le sujet est suffisamment grave pour que nous ne fassions pas de polémique. Il demeure que des engagements précis avaient été pris pour l'application rapide d'un nouveau dispositif. Or je constate que dix-huit mois sont déjà passés.
    Je veux bien croire qu'une commission soit encore nécessaire. Mais lui donnera-t-on un délai ? Quand la décision pourra-t-elle être prise ?
    On finit par douter. A force de demander des rapports et de créer des commissions, on arrivera à des échéances et, comme par hasard, l'année d'avant, on prendra la décision et on procédera aux inscriptions budgétaires nécessaires. Cela nous paraît être une mauvaise méthode.
    Nous approuvons l'initiative de notre collègue de l'UDF.
    Je ne veux pas polémiquer, mais je repose la question : quand une décision pourra-t-elle être prise et une inscription budgétaire sera-t-elle faite ?
    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Lorsque la mesure d'indemnisation des enfants des déportés de la Shoah avait été décidée par le gouvernement précédent, j'avais à plusieurs reprises dit à la tribune de notre assemblée toute l'émotion que suscitait chez les députés du mouvement gaulliste le fait que l'on partage en deux camps les victimes de la barbarie.
    Nous sommes restés sans réponse pendant un certain temps. Je me souviens même de l'embarras de Florence Parly, pendant une discussion budgétaire. Avec beaucoup de sincérité, elle est venue me dire à l'issue de la séance qu'elle n'était pas autorisée à donner de réponse, mais qu'elle s'engageait à faire en sorte que soit examinée la question.
    Il faut avoir l'honnêteté de dire que la décision n'a été prise et formalisée qu'avec l'arrivée du nouveau gouvernement. Je ne dis pas qu'on ne s'y était pas intéressé auparavant, mais nous avons tenté de régler le problème des orphelins de déportés pour faits de résistance ou pour d'autres raisons car, en dehors de la Shoah, les déportés ont été nombreux, y compris les homosexuels particulièrement persécutés par le nazisme, ainsi que les Tziganes et tant d'autres qui ne trouvaient pas grâce aux yeux du régime nazi.
    Monsieur le ministre, le temps passe.
    L'amendement ne convient pas car c'est une reconnaissance qu'attendent ceux dont les parents ont été victimes de ces actes de barbarie, ni plus, ni moins. Evidemment, il faut que cette reconnaissance soit matérialisée. Il n'est pas pensable que l'on fasse une différence entre ceux qui sont imposables et ceux qui ne le sont pas.
    La commission concernée doit rendre son rapport rapidement. Ce travail était légitime, mais le dénouement doit être proche si l'on veut éviter que ne s'accentue l'incompréhension que laisse le sentiment d'un désintérêt de la République pour ce qui a profondément marqué toute une génération. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je m'associe aux propos de Didier Migaud et de Michel Bouvard. Certes, il existe, cela ne fait aucun doute, une spécificité de la déportation des familles juives avec l'organisation de la Shoah à la suite de la conférence de Wannsee. Mais nous avons un devoir d'équité entre toutes les victimes de la barbarie nazie.
    Je ne voudrais pas être trival, mais ceux qui étaient alors des enfants sont devenus des personnes âgées. Le délai à l'issue duquel nous entendons rendre hommage aux familles n'est donc pas sans importance.
    Les personnes concernées, qui étaient des enfants à l'époque, attendent une reconnaissance, même si elle doit se traduire d'une façon matérielle.
    Monsieur le ministre, nous avons besoin que vous nous disiez dans quel délai vous exigez de vos services qu'une réponse soit donnée pour que l'on s'achemine vers une conclusion rapide. Cela ne me semble pas trop difficile puisque, à l'évidence, la même volonté est partagée au-delà des obédiences partisanes.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Sincèrement, n'ajoutons pas le soupçon à l'indicible : l'attitude du Gouvernement n'est en rien dilatoire.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il a simplement la volonté de prendre une disposition ne donnant plus lieu à discussion : il faut obtenir un consensus sur la notion de fusillé et - celle-ci prête peut-être davantage à débat - la notion de massacré, et acter ce consensus, le rendre définitif. C'est capital pour assurer la reconnaissance et la paix morale dont chacun a besoin. Nous y travaillons, croyez-moi, et nous sommes confiants quant à la possibilité d'obtenir ce consensus dans une proche délai, mais vous donner aujourd'hui un calendrier précis ne serait pas responsable de ma part. Je vous demande donc de me faire confiance.
    M. Robert Pandraud. Très bien !
    M. Michel Bouvard. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre !
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. Comme l'a dit Didier Migaud - et le ton qui règne dans l'hémicycle en témoigne -, nul ne cherche à polémiquer sur le sujet et, pour reprendre votre formule, monsieur le ministre, personne ne souhaite ajouter « le soupçon à l'indicible », il n'en est pas question.
    Nous connaissons tous l'origine du dossier. M. Bouvard a rappelé la position du précédent gouvernement : il s'agissait de traiter ce que nous estimions collectivement être une dette morale de la France et de l'Etat à l'égard d'une spécificité qui avait été l'extermination des juifs et des tsiganes durant la Seconde Guerre mondiale.
    M. Michel Bouvard. « Dette morale de la France » n'est peut-être pas une expression appropriée dans ce cas.
    M. Eric Besson. Nous étions également tous d'accord pour constater que la distinction de fait entre orphelins et enfants de déportés n'était probablement pas la meilleure solution, et nous étions nombreux, Didier Migaud l'a rappelé, à demander l'extension dont il est question.
    Le Gouvernement - à cet égard, nous lui rendons hommage - a décidé d'étendre le dispositif et l'a annoncé très tôt, au point, sachez-le, monsieur le ministre, que, dans ma circonscription, nombre d'enfants de déportés pensent que la mesure est prise, qu'elle est actée et que le décret a été publié ! Concrètement, en effet, elle est relativement simple : il s'agit d'étendre le dispositif existant aux orphelins de déportés non juifs.
    Il n'est pas question de soupçon, monsieur le ministre, mais vous affirmez que nous devons nous entendre sur la définition de ce qu'est un fusillé ou un massacré. Je ne me permettrai pas de faire de l'humour noir sur un sujet aussi grave mais admettez qu'il est relativement simple de définir ce que fut un fusillé durant la Seconde Guerre mondiale, et je ne pense pas qu'il faille attendre les conclusions des longs travaux d'une commission pour le faire.
    M. Robert Pandraud. C'est moins évident pour les massacrés, comme ceux d'Oradour-sur-Glane.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait.
    M. Eric Besson. Personne ne met en cause votre sincérité, monsieur le ministre, mais, puisque vous prenez des engagements devant l'Assemblée nationale, allez jusqu'au bout de votre démarche. Par-delà l'hémicycle, c'est ce qu'attendent les orphelins des déportés non juifs, auprès desquels vous avez pris des engagements. Promettez-nous que, dans un délai extrêmement bref, vous apporterez une réponse complète à une question que vous avez commencé à traiter.
    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Le sujet est suffisamment grave - nous en sommes tous d'accord -...
    M. Michel Bouvard. Heureusement !
    M. Marc Laffineur. ... pour faire en sorte que, comme le ministre l'a fort bien dit, nous parvenions à un véritable consensus.
    M. Didier Migaud. Le consensus existe.
    M. Eric Besson. C'est évident.
    M. Marc Laffineur. Un consensus n'est jamais très facile à obtenir.
    M. Didier Migaud. Qui est contre, en l'occurrence ?
    M. Marc Laffineur. Il est difficile de délimiter le champ des bénéficaires. Le ministre a totalement raison. Il a évidemment la volonté d'aboutir le plus vite possible mais il lui est encore impossible de s'engager sur un délai très bref. Il faut agir le plus rapidement possible, sans aucun doute, mais être sûr que tout le monde soit d'accord, pour ne pas avoir à y revenir. Nous pouvons faire confiance au ministre et au Gouvernement pour régler cette question de la meilleure façon, parce que c'est l'intérêt de la nation tout entière et non pas d'un parti politique.
    M. Michel Bouvard. Bien sûr !
    M. Eric Besson. Mais ils sont déjà reconnus orphelins de déportés ! Cette reconnaissance officielle leur est acquise !
    M. Marc Laffineur. Bien sûr, mais il faut tout de même déterminer avec précision quels seront les bénéficiaires, la difficulté étant de n'oublier personne.
    M. Eric Besson. Il s'agit uniquement des orphelins de déportés ! Ce n'est pourtant pas compliqué !
    M. Marc Laffineur. Je suis certain que tout cela aboutira le plus rapidement possible et que la commission définira exactement l'ensemble des personnes reconnues.
    M. le président. Monsieur Baguet, retirez-vous l'amendement n° 200 ?
    M. Pierre-Christophe Baguet. Si cet amendement a été rédigé de la sorte, c'était aussi pour répondre à un problème technique posé par l'article 40 mais, à mon avis, cette difficulté peut se régler au fil de la navette.
    Pour en revenir au fond du sujet - c'est évidemment le plus important -, je suis sensible à la volonté, que le Gouvernement vient de réaffirmer par votre intermédiaire, monsieur le ministre, de régler rapidement ce dossier.
    Je suis également conscient qu'il ne faudrait pas avoir à revenir sur ce douloureux sujet et, en tout cas, laisser réapparaître la moindre iniquité. Le projet de loi de finances sera prochainement examiné au Sénat. Cela laisse un peu de temps à M. Mekachera pour demander à la commission d'accélérer ses travaux, afin que vous puissiez apporter des éléments de réponse.
    Dans ces conditions, monsieur le ministre, j'accepte de retirer l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 200 est retiré.

Article 5

    M. le président. « Art. 5. - I. - Dans le code général des impôts, les articles 150 U, 150 V et 150 VA sont remplacés par les articles 150 U à 150 VH ainsi rédigés :
    « Art. 150 U. - I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH.
    « Ces dispositions s'appliquent, sous réserve de celles prévues au 3° du I de l'article 35, aux plus-values réalisées lors de la cession d'un terrain divisé en lots destinés à être construits.
    « II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens :
    « 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession ;
    « 2° Qui constituent l'habitation en France des personnes physiques, non résidentes en France, ressortissantes d'un Etat membre de la Communauté européenne, dans la limite d'une résidence par contribuable et à condition que le cédant ait été fiscalement domicilié en France de manière continue pendant au moins deux ans, à un moment quelconque antérieurement à la cession ;
    « 3° Qui constituent les dépendances immédiates et nécessaires des biens mentionnés aux 1° et 2°, à la condition que leur cession intervienne simultanément avec celle desdits immeubles ;
    « 4° Pour lesquels une déclaration d'utilité publique a été prononcée en vue d'une expropriation, à condition qu'il soit procédé au remploi de l'intégralité de l'indemnité par l'acquisition, la construction, la reconstruction ou l'agrandissement d'un ou de plusieurs immeubles dans un délai de douze mois à compter de la date de perception de l'indemnité ;
    « 5° Qui sont échangés dans le cadre d'opérations de remembrements mentionnées à l'article 1055, d'opérations effectuées conformément aux articles L. 122-1, L. 123-1, L. 123-24 et L. 124-1 du code rural, ainsi qu'aux soultes versées en application de l'article L. 123-4 du code rural. En cas de vente de biens reçus à cette occasion, la plus-value est calculée à partir de la date et du prix d'acquisition du bien originel ou de la partie constitutive la plus ancienne dans les cas de vente de lots remembrés ;
    « 6° Dont le prix de cession est inférieur ou égal à 15 000 euros. Le seuil de 15 000 euros s'apprécie en tenant compte de la valeur en pleine propriété de l'immeuble ou de la partie d'immeuble.
    « Art. 150 UA. - I. - Sous réserve des dispositions de l'article 150 V bis et de celles qui sont propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux de biens meubles ou de droits relatifs à ces biens, par des personnes physiques, domiciliées en France au sens de l'article 4 B, ou des sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 quinquies dont le siège est situé en France, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH.
    « Ces dispositions s'appliquent également, sous réserve des dispositions de l'article 150 octies, aux plus-values réalisées lors d'opérations de toute nature portant sur des marchandises et qui ne se matérialisent pas par la livraison effective ou la levée des biens ou des droits.
    « II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas :
    « 1° Sous réserve des dispositions de l'article 150 V sexies, aux meubles meublants, aux appareils ménagers et aux voitures automobiles qui ne constituent pas des objets d'art, de collection ou d'antiquité ;
    « 2° Aux meubles dont le prix de cession est inférieur ou égal à 5 000 euros.
    « Art. 150 UB. - I. - Les gains nets retirés de cessions à titre onéreux de droits sociaux de sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits portant sur ces biens, sont soumis exclusivement au régime d'imposition prévu à l'article 150 U. Pour l'application de cette disposition, ne sont pas pris en considération les immeubles affectés par la société à sa propre exploitation industrielle, commerciale, agricole ou à l'exercice d'une profession non commerciale.
    « II. - Les dispositions du I ne sont pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values réalisées dans le cadre d'une opération de fusion, de scission ou d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés. Cette exception n'est pas applicable aux échanges avec soulte lorsque le montant de la soulte reçue par le contribuable excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus.
    « III. - Lorsque les titres reçus dans les cas prévus au II de l'article 92 B dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2000, aux troisième et cinquième alinéas de l'article 150 A bis en vigueur avant la date de promulgation de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-             du          décembre 2003) ou au I ter de l'article 160 dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2000 font l'objet d'une nouvelle opération d'échange dans les conditions définies au II, l'imposition de la plus-value antérieurement reportée est reportée de plein droit au moment où s'opérera la cession, le rachat, le remboursement ou l'annulation des nouveaux titres reçus.
    « Art. 150 V. - La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UB est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant.
    « Art. 150 VA. - I. - Le prix de cession à retenir est le prix réel tel qu'il est stipulé dans l'acte. Lorsqu'une dissimulation de prix est établie, le prix porté dans l'acte doit être majoré du montant de cette dissimulation.
    « Lorsqu'un bien est cédé contre une rente viagère, le prix de cession retenu pour ce bien est la valeur en capital de la rente, à l'exclusion des intérêts.
    « II. - Le prix de cession est majoré de toutes les charges et indemnités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 683. Les indemnités d'assurance consécutives à un sinistre partiel ou total d'un immeuble ne sont pas prises en compte.
    « III. - Le prix de cession est réduit sur justificatifs du montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée et des frais, définis par décret, supportés par le vendeur à l'occasion de cette cession.
    « Art. 150 VB. - I. - Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il a été stipulé dans l'acte. Lorsqu'une dissimulation du prix est établie, le prix porté dans l'acte doit être majoré du montant de cette dissimulation. En cas d'acquisition à titre gratuit, le prix d'acquisition s'entend de la valeur vénale au jour du transfert diminuée, le cas échéant, de l'abattement prévu à l'article 764 bis.
    « Lorsqu'un bien a été acquis moyennant le paiement d'une rente viagère, le prix d'acquisition retenu pour ce bien est la valeur en capital de la rente, à l'exclusion des intérêts.
    « En cas de vente ultérieure de titres reçus à l'occasion d'une opération mentionnée à l'article 150-0 B, au quatrième alinéa de l'article 150 A bis en vigueur avant la date de promulgation de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-             du          décembre 2003) ou au II de l'article 150 UB, la plus-value imposable en application du I de l'article 150 UB est calculée par référence, le cas échéant, au prix ou à la valeur d'acquisition des titres échangés, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange.
    « II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatif, majoré :
    « 1° De toutes les charges et indemnités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 683 ;
    « 2° Des frais afférents à l'acquisition à titre gratuit définis par décret ;
    3° Des frais afférents à l'acquisition à titre onéreux définis par décret, que le cédant peut fixer forfaitairement à 7,5 % du prix d'acquisition dans le cas des immeubles ;
    4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement, de rénovation ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives. Lorsque le contribuable, qui cède un bien plus de cinq ans après son acquisition, n'est pas en état d'apporter la justification de ces dépenses, une majoration égale à 15 % du prix d'acquisition est pratiquée ;
    « 5° Des frais de voirie, réseaux et distribution imposés par les collectivités locales ou leurs groupements dans le cadre du plan d'occupation des sols ou du plan local d'urbanisme, en ce qui concerne les terrains à bâtir ;
    « 6° Des frais acquittés pour la restauration et la remise en état des biens meubles.
    « Art. 150 VC. - I. - La plus-value brute réalisée sur les biens ou droits mentionnés aux articles 150 U et 150 UB est réduite d'un abattement de 10 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième.
    « La plus-value brute réalisée sur les biens ou droits mentionnés à l'article 150 UA est réduite d'un abattement de 10 % pour chaque année de détention au-delà de la deuxième.
    « II. - La plus-value brute réalisée lors de la cession d'un cheval de course ou de sport est réduite d'un abattement supplémentaire de 15 % par année de détention comprise entre la date d'acquisition du cheval et la fin de sa septième année. Toute année commencée compte pour une année pleine.
    « Art. 150 VD. - I. - La moins-value brute réalisée sur les biens ou droits désignés aux articles 150 U à 150 UB n'est pas prise en compte.
    « II. - En cas de vente d'un immeuble acquis par fractions successives constatée par le même acte soumis à publication ou à enregistrement et entre les mêmes parties, la ou les moins-values brutes, réduites de 10 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième, s'imputent sur la ou les plus-values brutes corrigées le cas échéant de l'abattement prévu au I de l'article 150 VC.
    « Art. 150 VE. - Un abattement fixe de 1 000 EUR est opéré sur la plus-value brute, corrigée le cas échéant des abattements prévus à l'article 150 VC et des moins-values mentionnées au II de l'article 150 VD, réalisée lors de la cession des biens mentionnés aux articles 150 U et 150 UB.
    « Art. 150 VF. - I. - L'impôt sur le revenu correspondant à la plus-value réalisée sur les biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UB est versé par la personne physique, la société ou le groupement qui cède le bien ou le droit.
    « II. - En cas de cession d'un bien ou d'un droit mentionné aux articles 150 U et 150 UB par une société ou un groupement qui relève des articles 8 à 8 ter, l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value est dû au prorata des droits sociaux détenus par les associés soumis à cet impôt présents à la date de la cession de l'immeuble. L'impôt acquitté par la société ou le groupement est libératoire de l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value due par ces associés.
    « Art. 150 VG. - I. - Une déclaration, conforme à un modèle établi par l'administration, retrace les éléments servant à la liquidation de l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value ainsi que, le cas échéant, les éléments servant à la liquidation de l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value en report d'imposition et détermine le montant total de l'impôt dû au titre de la cession réalisée.
    « Elle est déposée :
    « 1° Pour les cessions des biens mentionnés à l'article 150 U constatées par un acte, à l'appui de la réquisition de publier ou de la présentation à l'enregistrement. Cette déclaration est remise sous peine de refus du dépôt ou de la formalité de l'enregistrement ;
    « 2° Pour les cessions des biens mentionnés aux articles 150 UA et 150 UB constatées par un acte soumis obligatoirement à l'enregistrement, lors de l'accomplissement de cette formalité à la recette des impôts dans le ressort de laquelle le notaire rédacteur de l'acte réside ou, dans les autres cas, à la recette des impôts du domicile de l'une des parties contractantes, lors de l'enregistrement. Cette déclaration est remise sous peine de refus de la formalité de l'enregistrement ;
    « 3° Dans les autres cas, à la recette des impôts dont relève le domicile du vendeur dans un délai d'un mois à compter de la cession.
    « II. - Par dérogation au I, la déclaration est déposée :
    « 1° Pour les actes passés en la forme administrative qui constatent une mutation immobilière amiable ou forcée de biens au profit de l'Etat, des établissements publics nationaux, des groupements d'intérêt public, ou d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public local désigné à l'article L. 1311-5 du code général des collectivités territoriales, à la collectivité publique cessionnaire préalablement à la réquisition de publier ou à la présentation à l'enregistrement. L'absence de déclaration à l'appui de la réquisition de publier ou de la présentation à l'enregistrement n'entraîne pas le refus du dépôt ou de la formalité ;
    « 2° Pour les cessions constatées par une ordonnance judiciaire, à la recette des impôts dont relève le domicile du vendeur dans un délai d'un mois à compter de la date du versement du prix de cession. L'absence de déclaration à l'appui de la réquisition de publier ou de la présentation à l'enregistrement n'entraîne pas le refus du dépôt ou de la formalité ;
    « 3° Pour les cessions des biens mentionnés à l'article 150 U constatées par un acte notarié, à la recette des impôts dont relève le domicile du vendeur dans un délai de deux mois à compter de la date de l'acte, lorsque l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value ne peut être intégralement acquitté en raison de créances primant le privilège du Trésor ou lorsque la cession est constatée au profit de'une collectivité mentionnée au 1°. L'absence de déclaration à l'appui de la réquisition de publier ou de la présentation à l'enregistrement n'entraîne pas le refus du dépôt ou de la formalité.
    « III. - Lorsque la plus-value est exonérée en application du II des articles 150 U et 150 UA ou par l'application de l'abattement prévu au I de l'article 150 VC ou lorsque la cession ne donne pas lieu à une imposition, aucune déclaration ne doit être déposée sauf dans le cas où l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value en report d'imposition est dû. L'acte de cession soumis à la formalité fusionnée ou présenté à l'enregistrement précise, sous peine de refus de dépôt ou de la formalité d'enregistrement, la nature et le fondement de cette exonération ou de cette absence de taxation.
    « Lorsque la plus-value est exonérée au titre d'une cession mentionnée au 1° du II, le contribuable cédant communique à la collectivité publique cessionnaire la nature et le fondement de cette exonération afin qu'il en soit fait mention dans l'acte passé en la forme administrative. L'absence de mention de l'exonération portée sur l'acte ne constitue pas un motif de refus de dépôt.
    « Lorsque la déclaration n'est pas déposée sur le fondement du 3° du II à l'appui de la réquisition de publier ou de la présentation à l'enregistrement, l'acte de cession précise, sous peine de refus de dépôt ou de la formalité d'enregistrement, que l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value ne peut être intégralement acquitté ou que la cession est constatée au profit d'une collectivité mentionnée au 1° du II et mentionne le lieu où le notaire rédacteur de l'acte dépose la déclaration.
    « Art. 150 VH. - I. - L'impôt sur le revenu afférent à la plus-value réalisée sur les biens mentionnés aux articles 150 U à 150 UB est versé lors du dépôt de la déclaration prévue à l'article 150 VG.
    « Il est fait application, le cas échéant, des règles d'exigibilité et de recouvrement prévues au titre IV du livre des procédures fiscales pour les impôts recouvrés par les comptables de la direction générale des impôts.
    « II. - L'impôt sur le revenu afférent à la plus-value est payé avant l'exécution de l'enregistrement ou de la formalité fusionnée. A défaut de paiement préalable, le dépôt ou la formalité est refusé sauf pour les cessions mentionnées au II de l'article 150 VG. Le dépôt ou la formalité est également refusé s'il existe une discordance entre le montant de l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value figurant sur la déclaration prévue à l'article 150 VG et le montant effectivement versé lors de la réquisition ou de la présentation à l'enregistrement.
    « Sauf dispositions contraires, il est fait application des règles d'exigibilité et de recouvrement prévues aux articles 1701 à 1704, aux 1°, 2°, 3° et 4° de l'article 1705 et aux articles 1706 et 1711.
    « III. - Par dérogation au II, l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value est payé :
    « 1° Pour les cessions mentionnées au 1° du II de l'article 150 VG, au bénéfice de la recette des impôts, par le comptable public assignataire, sur le prix dû au vendeur, au vu de la déclaration mentionnée au 1°  du II de l'article 150 VG transmise par la collectivité publique ;
    « 2° Pour les cessions mentionnées au 3° du II de l'article 150 VG, par le vendeur ou, dans le cas des cessions à une collectivité mentionnée au 1° du II de l'article 150 VG, par le notaire, à la recette des impôts où la déclaration a été déposée. »
    « II. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
    « A. - L'article 72 E est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa, les mots : "au 5° de l'article 150 D sont remplacés par les mots : "au 5° du II de l'article 150 U ;
    « 2° Le second alinéa est supprimé.
    « B. - L'article 75-0 A est ainsi modifié :
    « 1° Le premier alinéa du 1 est ainsi rédigé :
    « Lorsqu'un exploitant réalise un bénéfice supérieur à 15 250 euros et excédant une fois et demie la moyenne des résultats des trois années précédentes, la fraction de ce bénéfice qui dépasse 15 250 euros, ou cette moyenne si elle est supérieure, peut, sur option expresse de l'exploitant, être imposée selon les modalités suivantes : cette fraction ou cette moyenne est divisée par cinq ; le résultat est ajouté au revenu global net ; l'impôt est égal à cinq fois la cotisation supplémentaire ainsi obtenue. » ;
    « 2° Les trois premiers alinéas du 2 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
    « Pour la détermination des bénéfices de l'année considérée et des trois années antérieures, il n'est pas tenu compte des bénéfices soumis à un taux proportionnel. »
    « C. - Au 6° de l'article 112 et au premier alinéa du 1 du I de l'article 150-0 A, la référence : "150 A bis est remplacée par la référence : "150 UB.
    « D. - Au 6 du I de l'article 150-0 C, la référence : "du quatrième alinéa de l'article 150 A bis ou dans les conditions prévues est remplacée par la référence : "prévues au II de l'article 150 UB et.
    « E. - Au 9 de l'article 150-0 D, après les mots : "à l'article 150-0 B sont insérés les mots : ", au quatrième alinéa de l'article 150 A bis en vigueur avant la publication de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-             du  décembre 2003) et au II de l'article 150 UB.
    « F. - Au deuxième alinéa du I de l'article 150 V bis, les mots : "lorsque leur montant excède 3 050 euros ; dans le cas où ce montant est compris entre 3 050 euros et 4 600 euros, la base d'imposition est réduite d'un montant égal à la différence entre 4 600 euros et ledit montant. sont remplacés par les mots : "lorsque leur montant excède 5 000 euros..
    « G. - A l'article 150 V sexies, les mots : "défini aux articles 150 A à 150 T sont remplacés par les mots : "défini à l'article 150 UA.
    « H. - L'article 151 quater est ainsi modifié :
    « 1° Aux premier et deuxième alinéas, la référence : "150 A est remplacée par la référence : "150 U ;
    « 2° Au deuxième alinéa, les mots : ", conformément aux articles 150 J à 150 R sont supprimés ;
    « 3° Les troisième et quatrième alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le montant à ajouter aux revenus des plus-values est revalorisé suivant la même formule d'indexation que le loyer lui-même. »
    « I. - Au premier alinéa de l'article 151 sexies, les références : "articles 150 A à 150 S sont remplacées par les références : "articles 150 U à 150 VH.
    « J. - Le V de l'article 151 septies est ainsi modifié :
    « 1° Les cinquième, sixième et septième alinéas sont remplacés par un cinquième alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsque les conditions mentionnées aux I, II, III, IV ou au deuxième alinéa du présent V ne sont pas remplies, il est fait application du régime des plus-values professionnelles prévu aux articles 39 duodecies à 39 quindecies et 93 quater. » ;
    « 2° Au sixième alinéa nouveau, les références : "articles 150 A à 150 S sont remplacées par les références : "articles 150 U à 150 VH.
    « K. - Au II de l'article 150 quinquies, la référence : "d, est supprimée.
    « L. - Dans le 1° bis du I de l'article 156, les mots : "huitième alinéa du V sont remplacés par les mots : "sixième alinéa du V.
    « M. - A la seconde phrase du premier alinéa de l'article 161 et au V de l'article 238 septies A, après les mots : "à l'article 150-0 B, sont insérés les mots : "au quatrième alinéa de l'article 150 A bis en vigueur avant la date de promulgation de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-             du  décembre 2003) ou au II de l'article 150 UB,.
    « N. - Au e du I de l'article 164 B, les mots : "à l'article 150 A sont remplacés par les mots : "aux articles 150 U à 150 UB.
    « O. - Il est ajouté, après l'article 200 A, un article 200 B ainsi rédigé :
    « Art. 200 B. - Les plus-values réalisées dans les conditons prévues aux articles 150 U à 150 UB sont imposées au taux forfaitaire de 16 %. »
    « P. - Il est ajouté, après l'article 238 octies A, un article 238 octies B ainsi rédigé :
    « Art. 238 octies B. - En cas de transmission ou de rachat des droits d'un associé imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles, ou relevant de l'impôt sur les sociétés, dans une société qui relève des articles 8 à 8 ter et qui exerce une activité immobilière, la plus-value professionnelle provenant de la cession d'un bien mentionné aux articles 150 U et 150 UB intervenue entre la fin de la dernière période d'imposition et la date de cet événement, est imposée au nom de cet associé. »
    « Q. - L'article 238 terdecies est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les articles 238 nonies à 238 duodecies ne s'appliquent pas aux plus-values imposées conformément à l'article 150 U. »
    « R. - Le I de l'article 244 bis A est ainsi modifié :
    « 1° Il est ajouté, après le premier alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
    « Par dérogation au premier alinéa, les personnes physiques et associés personnes physiques de sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, résidents d'un Etat membre de la Communauté européenne, sont soumis à un prélèvement de 16 %. » ;
    « 2° Au troisième alinéa nouveau, les références : "articles 150 A à 150 Q sont remplacées par les références : "articles 150 V à 150 VE.
    « S. - Au deuxième alinéa de l'article 244 bis B, les mots : "troisième alinéa du I de l'article 244 bis A sont remplacés par les mots : "quatrième alinéa du I de l'article 244 bis A.
    « T. - Au deuxième alinéa du 1 de l'article 1727 A, après les mots : "en matière d'impôt sur le revenu sont ajoutés les mots : "et à l'exception de l'impôt afférent aux plus-values réalisées sur les biens mentionnés aux articles 150 U à 150 UB.
    « U. - Les articles 150 A à 150 T sont abrogés. L'article 150 A bis demeure toutefois applicable aux plus-values en report d'imposition au 1er janvier 2004.
    « III. - Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
    « A. - Le deuxième alinéa de l'article L. 16 est complété par les mots suivants : "et des plus-values telles qu'elles sont définies aux articles 150 U à 150 VH du même code ;
    « B. - Au 1° de l'article L. 66, la référence : "150 S est remplacée par la référence : "150 VG.
    « C. - Avant le dernier alinéa de l'article L. 73, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
    « Les plus-values réalisées par les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes de justifications mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 16. »
    « IV. - L'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
    « 1° Au d du I, les références : "articles 150 A et 150 A bis sont remplacées par les références : "articles 150 U à 150 UB ;
    « 2° L'avant-dernier alinéa du III est supprimé.
    « V. - L'imposition des plus-values reportées en application des dispositions du II de l'article 92 B dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2000, de l'article 150-0 C, de l'article 150 A bis dans sa rédaction en vigueur avant la promulgation de la présente loi de finances, du I ter de l'article 160 dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2000, intervient lors de la cession, du rachat, du remboursement ou de l'annulation des titres reçus en échange. Ces plus-values sont imposées selon les modalités prévues pour l'imposition de la cession des titres mettant fin à ce report.
    « VI. - A l'article 6 de la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992, la référence : ", 150 A bis est supprimée.
    « VII. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article et notamment les obligations déclaratives incombant aux contribuables et aux intermédiaires.
    « VIII. - Les dispositions prévues aux I à VII s'appliquent pour l'imposition des plus-values réalisées lors des cessions à titre onéreux intervenues à compter du 1er janvier 2004. »
    La parole est à M. Didier Migaud, premier orateur inscrit sur l'article.
    M. Didier Migaud. L'article est important. Nous voulons une fois de plus exprimer, monsieur le ministre, notre désaccord avec vos réformes.
    La réforme des plus-values immobilières des particuliers que vous proposez là est contradictoire avec votre discours affiché de revalorisation du travail mais, il faut le reconnaître, tout à fait cohérente avec votre objectif non assumé de privilégier davantage les plus aisés de nos concitoyens.
    Cette réforme est contradictoire avec l'objectif affiché de revalorisation du travail car elle va alléger de façon très significative l'imposition de contribuables, qu'ils travaillent ou non. Elle profitera d'ailleurs beaucoup plus aux personnes qui n'exercent plus d'activité professionnelle puisque le patrimoine immobilier, on le sait, augmente avec l'âge. En outre, cette réforme ne s'applique pas à la résidence principale, qui est exonérée.
    Cette réforme, par contre, est en totale cohérence avec votre souci de diminuer l'imposition des contribuables les plus aisés, quel que soit le type de revenu concerné. En effet, son principe consiste à transformer une imposition progressive, calée sur le barème de l'impôt sur le revenu, en une imposition forfaitaire, donc plutôt injuste. Vous allez ainsi réduire encore le poids des prélèvements progressifs dans les prélèvements obligatoires alors que la France est déjà un des pays où il est le plus faible. Comme l'écrit d'ailleurs avec sincérité Gilles Carrez dans son rapport, « cette réforme [...] conduit à élargir l'assiette de cet impôt et réduire le taux d'imposition ».
    Mais il ne dit pas, ce qui est pourtant la réalité, que l'extension de l'assiette s'opérera au détriment des plus modestes et la réduction des taux au bénéfice des plus aisés. Actuellement, en effet, comme le barème de l'impôt sur le revenu s'applique, les contribuables modestes qui sont imposés sur la première tranche sont assujettis au taux de 7,05 % ; demain, ils seront imposés à hauteur de 16 % - auxquels il faudra ajouter les 10 %. En revanche, les plus aisés, qui sont actuellement imposés sur ces plus-values à partir de 19,74 % et jusqu'à 49,58 %, ne le seront plus qu'au taux de 16 % - dans les deux cas, il faut évidemment ajouter les 10 % de prélèvements sociaux. On voit donc bien que la réduction de taux ne profite qu'à partir d'un certain niveau de revenu et qu'a contrario, pour les contribuables les plus modestes, il s'agira d'une augmentation du taux d'imposition.
    Pire encore, l'extension de l'assiette évoquée par Gilles Carrez se fera au détriment des plus modestes puisque de nombreuses exonérations sont supprimées, notamment celle dont bénéficient les personnes âgées titulaires du minimum vieillesse et non imposables. A l'inverse, l'exonération liée au montant de la cession, actuellement fixée à 4 600 euros pour toutes les cessions réalisées sur une année, est désormais portée à 15 000 euros pour chaque cession. Quelqu'un qui réalise dix cessions dans l'année - c'est possible - bénéficiera ainsi d'une exonération de 150 000 euros.
    Cette réforme nous paraît donc injuste. Elle se traduit, sous le prétexte d'une simplification administrative, par un allégement de l'imposition des contribuables les plus aisés.
    Il faut également signaler que les non-résidents ressortissants de l'Union européenne, actuellement imposés à hauteur de 33 %, ne le seront plus qu'à hauteur de 16 %. Ce cadeau fiscal est sans contrepartie, malgré son coût. Nous souhaiterions que vous puissiez nous répondre sur ce point, monsieur le ministre.
    Je citais hier un hebdomadaire qui se réjouissait des bonnes surprises de la réforme fiscale. L'exonération des plus-values après quinze ans provoque aussi une certaine réjouissance : « C'est plutôt une bonne nouvelle pour ceux qui détiennent un patrimoine immobilier et foncier. » Suivent des observations qui montrent que le régime sera nettement plus favorable aux plus aisés.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. L'article 5 prévoit la réforme, à compter du 1er janvier 2004, du régime d'imposition des plus-values immobilières des particuliers. Il s'agit encore d'une mesure qui illustre l'ampleur de cette sorte de contre-révolution idéologique lancée contre le principe républicain de progressivité de l'impôt sur le revenu.
    Cette « révolution blanche » passe notamment par la promotion de la CSG, impôt proportionnel, au détriment de l'IRPP. Avec la réforme de la fiscalité des plus-values immobilières, il ne s'agit de rien d'autre que de remplacer la progressivité de l'imposition par une imposition proportionnelle. Vous êtes les infatigables promoteurs de cet impôt proportionnel, c'est-à-dire d'un système basé sur l'injustice fiscale, tandis que, pour notre part, nous défendons l'impôt progressif sur le revenu, comme j'ai déjà eu l'occasion à moult reprises de le dire.
    En toute rigueur, il me faut bien avouer que le système actuel d'imposition des plus-values immobilières - celui que vous voulez réformer - n'était déjà pas fameux. En effet, afin d'atténuer la progressivité de l'impôt, les plus-values à long terme - au-delà de deux ans - sont soumises à l'IRPP selon le système du quotient. En quoi consiste ce système, fort compliqué au demeurant ? Il s'agit, dans un premier temps, de diviser par cinq le total net des plus-values imposables bénéficiant dudit système. Puis, dans un second temps, on additionne ce résultat au revenu net. Ensuite, dans un troisième temps, sont calculés les droits simples correspondant à ce cinquième de plus-value - je ne sais pas si vous me suivez. Enfin, dans un dernier temps, le chiffre est multiplié par cinq pour obtenir le montant des droits simples dus au titre de la plus-value. Dans ces moments-là, on regrette évidemment l'absence de notre collègue Charles-Amédée de Courson, qui aurait déjà le résultat de l'opération. (Sourires.)
    C'est très technique et relativement abstrait, j'en conviens. Cependant, le résultat - pour le contribuable, c'est ce qui compte - est très clair. En cessant d'additionner le montant des plus-values au revenu global net, beaucoup de contribuables échapperont au taux marginal : la progressivité de l'IRPP sera fortement atténuée.
    Mais vous allez plus loin en réécrivant des pans entiers du code général des impôts.
    J'ai relevé un article paru le mercredi 8 octobre dernier dans Les Echos - un journal qui ne traite pas de ces sujets à la légère et trouve toujours de l'écho auprès des privilégiés. Sous un titre lapidaire - « Plus-values immobilières : les règles changent » -, les deux auteurs, les avocats James Vaudoyer et Patrick Tardivy, résument vos choix d'une manière très éclairante : « Actuellement, le taux d'imposition peut atteindre au maximum environ 56 % CSG-CRDS incluses. Dès 2004, les plus-values seront taxées au taux forfaitaire de 16 % plus CSG-CRDS de 10 %, soit un total de 26 %. L'avantage est évident pour les contribuables imposés à des taux élevés. »
    Si le dispositif est d'une technicité extrême, il n'en reste pas moins que le résultat est clair. Vous qui, sans vergogne, vous vantez de vouloir revaloriser le travail - on ne sait d'ailleurs pas par qui il aurait été dévalorisé -, vous aurez du mal à masquer le fait que le taux d'imposition sur les plus-values immobilières, qui sont tout sauf des revenus du travail, sera très sensiblement réduit. Vous prétendez simplifier mais, en fait, vous ne faites rien d'autre qu'alléger la charge de l'impôt, une fois encore, pour les contribuables aisés, car ce ne sont pas les 10 millions de personnes smicardes ou bénéficiaires des minima sociaux qui tireront profit de ce nouvel excès de zèle du Gouvernement, épaulé par des techniciens très branchés sur le travail de lobbying.
    Par construction, le nouveau système pénalisera tous les contribuables dont le taux effectif d'imposition se trouvait en deçà du taux proportionnel et, à l'inverse, avantagera les plus fortunés, imposés au-delà du taux proportionnel. Ce n'est plus seulement un « amortisseur de progressivité » qui est offert par le Gouvernement aux contribuables du haut du barème, c'est une nouvelle niche qui substitue à l'imposition progressive une imposition proportionnelle ou forfaitaire.
    Comme si la baisse générale de 3 % du barème de l'impôt sur le revenu ne suffisait pas - 10 % depuis le début de la législature -, l'objectif de Bercy est bien d'offrir des portes de sortie aux 200 000 foyers fiscaux - soit moins de 1 % - concernés par les dernières tranches du barème.
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 126 et 231.
    L'amendement n° 126 est présenté par MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 231 est présenté par MM. Bonrepaux, Migaud, Bourguignon, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 5. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 126.
    M. Jean-Pierre Brard. Je viens d'énoncer ce qu'il convient de penser de l'article 5, habillage, sous un vocable trompeur, de mesures régressives et cadeaux aux nantis. Il nous est présenté comme une simplification, ce qui est pour le moins étrange pour un dispositif occupant huit pages du projet de loi de finances !
    Il s'agit bien entendu non pas d'une entreprise de simplification, mais d'un embrouillamini destiné à empêcher de comprendre ce qui est derrière véritablement. Bien évidemment, la simplification n'est pas la caractéristique de cet article. Ce qui apparaît clairement, c'est que ce sont de nouveau les hautes tranches du barème de l'impôt sur le revenu qui profiteront de ce nouveau dispositif.
    Dans un premier temps, le nouveau mécanisme d'établissement et de perception de l'imposition via les notaires va procurer un surplus de recettes à l'Etat évalué à 240 millions d'euros pour l'exercice 2004. Mais il ne s'agira que d'un effet d'optique, car au fil des mois et des années, le manque à gagner sur le produit de l'impôt sur le revenu affectera les finances de l'Etat. C'est pourquoi nous vous proposons d'adopter cet amendement de suppression.
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson, pour soutenir l'amendement n° 231.
    M. Eric Besson. Didier Migaud a excellemment expliqué tout à l'heure, en intervenant sur l'article, pourquoi le groupe socialiste propose, lui aussi, de supprimer cet article qui allégera significativement la taxation des plus-values immobilières pour les plus gros contribuables. Derrière ces dispositions, il y a toujours le débat sur la progressivité de l'impôt. Il faudra, monsieur le ministre, que, à un moment ou à un autre dans cette discussion budgétaire, vous nous expliquiez les principes philosophiques qui sous-tendent votre action en matière fiscale.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je n'attends que cela ! Cela me permettra de connaître les vôtres !
    M. Eric Besson. Les nôtres, nous n'avons essayé de vous les expliquer ce matin. Ils sont républicains. Chacun doit contribuer à proportion de ses revenus et de son patrimoine. Mais vous nous soupçonnez toujours, monsieur le ministre ! L'année dernière, un député de la majorité nous disait - c'était très bucolique - qu'un socialiste pensait de la façon suivante : « Les gentianes de mon voisin sont toujours plus belles que les miennes ». Nous serions toujours des partageux.
    M. Jean-Pierre Brard. Des envieux !
    M. Eric Besson. Nous n'avons rien contre la création de richesses, et moi je n'ai rien contre les gentianes de mon voisin.
    M. Michel Bouvard. Chez moi, on ne parle pas de gentiane ; on dit que l'herbe est plus verte chez le voisin !
    M. Jean-Louis Dumont. Qu'avez-vous contre les gentianes ?
    M. Eric Besson. Simplement, une fois que la création de richesses est réalisée ; se pose le problème de la redistribution et de la réduction des inégalités. Or ce budget, monsieur le ministre, fait de la redistribution à rebours, à l'envers, puisqu'il prend au plus grand nombre pour donner à quelques-uns. Je souhaite donc que vous nous disiez quelle est la philosophie qui sous-tend votre action. D'avance, je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission des finances a rejeté ces deux amendements de suppression et je souhaiterais sinon les persuader, du moins expliquer à nos collègues de gauche l'excellence de cette réforme qui a pour but de substituer un taux unique forfaitaire de 16 % à une imposition qui se faisait dans le cadre de l'impôt sur le revenu.
    Tout d'abord, ce taux forfaitaire est au niveau de la moyenne des taux européens - les différents pays membres de l'Union européenne assujettissent ce type de plus-values à un taux unique depuis déjà fort longtemps. Nous réalisons donc là tout simplement un travail d'harmonisation fiscale sur la base d'un taux tout à fait raisonnable.
    Ensuite, et cela nos collègues ne l'ont pas évoqué, le délai au terme duquel la plus-value immobilière est totalement exonérée est très sensiblement réduit. En effet, dans le régime actuel, l'exonération intervient au terme d'un délai de vingt-deux ans, alors qu'avec le régime qui vous est proposé elle aura lieu au terme d'un délai de quinze ans.
    Il est vrai que, dans le cadre de la mise en place de ce taux forfaitaire bas, on aura un élargissement de l'assiette. La question est de savoir si cet élargissement se fera au détriment des contribuables les moins aisés. Ce sera exactement le contraire. Pourquoi ? Tout d'abord, la seule exonération maintenue est celle sur la résidence principale. Ensuite, le plafond en deçà duquel il y a franchise totale, donc non-paiement de la plus-value, est remonté de 4 600 à 15 000 euros. De surcroît, au lieu d'une franchise annuelle, comme c'était le cas jusqu'à présent, il y aura une franchise pour chaque opération. Les contribuables modestes ne seront donc absolument pas désavantagés, sauf à partir du postulat qu'ils pourraient réaliser d'énormes plus-values sur d'autres biens que leur résidence principale. Mais, je le répète, il s'agirait de contribuables qui sont dans la tranche à 7 % ou 14 % du barème, donc en dessous des 16 %, et qui vendraient des biens qui ne seraient pas leur résidence principale dans un cadre plutôt spéculatif, puisque en deçà d'un délai de quinze ans.
    M. Didier Migaud. On a bien compris !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Honnêtement, on voit bien que ce ne sont en aucun cas des contribuables modestes. Or, cette réforme est faite pour ces derniers. En revanche, cette réforme n'est pas faite pour des contribuables aisés qui se livreraient à de multiples opérations immobilières à l'intérieur du délai de quinze ans, opérations dont je ne dirais pas qu'elles seraient spéculatives, mais qui seraient répétitives. Il s'agirait de contribuables au patrimoine immobilier important, ayant pour objectif de dégager des plus-values dans un délai inférieur à quinze ans.
    Cette réforme va beaucoup simplifier la vie des Français, puisqu'ils n'auront plus à faire état de ces plus-values dans leur déclaration de revenu. Elles seront acquittées par les notaires dans le cadre de la cession et du paiement des droits d'enregistrement et, je le répète, elles ne concerneront en aucun cas la résidence principale. C'est donc une réforme de bonne qualité, parfaitement juste, et il faut vraiment avoir un esprit de système pour prétendre, comme vous le faites depuis hier, que chacune des mesures fiscales de ce projet de loi traduirait une volonté de détruire la progressivité de l'impôt. Sauf à être animé d'une volonté exacerbée de prouver ce qui est absolument indémontrable, on ne peut affirmer que cette réforme se fera au détriment des contribuables modestes.
    Cela dit, c'est vrai, cette réforme va rapporter, en 2004, 240 millions d'euros de plus à l'Etat. Là, il y a une petite malice, mais après tout tant mieux ! Cela tient au fait que l'on passe d'un système à un autre. En effet, les plus-values immobilières réalisées en 2003 seront intégrées dans les revenus de 2003 qui seront déclarés en 2004 et leur imposition interviendra donc en 2004. Mais les plus-values immobilières qui seront réalisées en 2004 seront déclarées par les notaires au moment où elles seront faites. Autrement dit, il y aura une sorte de coup d'accordéon et l'Etat bénéficiera de deux fois la recette en 2004, ce qui est une très bonne chose. En régime de croisière - Jean-Pierre Brard l'a reconnu -, l'Etat ne fera aucun bénéfice avec cette réforme. Celle-ci se fera à recettes constantes. C'est donc, à tous égards, une excellente réforme qui, en aucun cas, ne défavorise les ménages modestes. Ces amendements de suppression ont donc été rejetés par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Qu'il est difficile de réformer et de simplifier dans ce pays ! Chaque fois que l'on veut simplifier, on trouve sur son chemin des personnes...
    M. Jean-Pierre Brard. Des complicateurs !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... qui cherchent à s'y opposer. Eh bien, mesdames, messieurs les députés, grâce à votre majorité, voilà un imprimé de quatre pages dont les Français vont être enfin délivrés !
    M. Jean-Yves Chamard. Bravo !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Supprimer des imprimés, c'est déjà un signal.
    M. Michel Bouvard. C'est des économies, en plus !
    M. Jean-Louis Idiart. Ce n'est pas bon pour l'industrie du papier !
    M. Jean-Pierre Brard. C'est écologique !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est une façon d'alléger le harcèlement administratif dont souffrent nos compatriotes. Ce sont 270 000 déclarations de ce type qui étaient remplies par les Français. Cet imprimé de quatre pages comporte huit pages de notice explicative que devaient lire soigneusement les pauvres contribuables pour faire cette déclaration. Naturellement, ne pouvant pas remplir celle-ci eux-mêmes, ils devaient aller voir un professionnel pour ce faire. Voilà ce que certains de vos collègues souhaitent conserver.
    J'ajoute que, sur ces 270 000 déclarations, seulement 100 000 donnaient lieu à la perception d'un impôt. Cela montre que la simplification est incontestable. Serait-elle à l'origine d'injustices ? A ce propos, je voudrais dire à Didier Migaud que si, ce qu'à Dieu ne plaise, une alternance survenait...
    M. Philippe Auberger. Le plus tard possible !
    M. Jean-Yves Chamard. Au xxiie siècle !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... - malheureusement ce sera le cas un jour que nous souhaitons le plus éloigné possible -, la gauche ne rétablira pas le système actuel. Je vous en fais le pronostic. Vous conserverez le système que vous n'allez pas voter et que, je l'espère, la majorité va voter...
    M. Jean-Yves Chamard. Oui !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... précisément parce qu'il est d'une simplicité totale. D'ailleurs, il est d'une simplicité comparable au régime applicable aux plus-values sur les valeurs mobilières.
    M. Philippe Auberger. Oui !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Cette réforme serait-elle tournée vers les riches, puisque c'est la mode depuis deux jours - on n'entend plus parler que de cela ?
    M. Jean-Louis Idiart. Heureux les pauvres !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le montant moyen des plus-values immobilières en 2001 aura été de 10 700 euros. Ce sont des riches qui seront surpris d'apprendre qu'ils le sont ! Et, comme le disait Gilles Carrez, cela ne concerne pas l'habitation principale puisqu'elle est exonérée. La médiane, c'est-à-dire le montant qui sépare l'échantillon en deux pour enlever les extrêmes, est de 4 700 euros. Voilà les riches dont vous parlez !
    M. Michel Bouvard. C'est du fantasme !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'ajouterai que sur les 270 000 contribuables concernés, seuls cinq ont déclaré une plus-value d'un montant supérieur à 1 million d'euros. Comme l'a fort bien dit le rapporteur général, cette réforme ne crée aucune injustice. Elle sera d'ailleurs peu favorable aux habitués des plus-values immobilières. Mesdames, messieurs les députés, il y a donc lieu de se réjouir que notre fiscalité se simplifie sans coût pour l'Etat et en toute justice pour nos concitoyens. Ce sera sans doute l'une des meilleures réformes que nous vous proposerons. (Applaudissements sur les bancs groupe de l'Union pour un mouvement populaire).
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Chamard.
    M. Jean-Yves Chamard. Je rappelle que lorsque nos collègues socialistes étaient au pouvoir, ils n'ont jamais supprimé la fiscalité forfaitaire sur les plus-values mobilières. Or l'immobilier est d'avantage taxé que le mobilier. C'est d'ailleurs l'une des raisons de la pénurie de logements privés mis en location, en région parisienne notamment. Au-delà de la simplicification évidente qui en découle, le fait de traiter désormais les plus-values immobilières comme les plus-values mobilières - avec l'accord de nos collègues socialistes puisqu'ils n'ont pas changé le système pour ces dernières  - est de nature à justifier le rejet de ces amendements.
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. J'ai été attentif aux réponses du rapporteur général et du ministre. Quant il s'agira de simplifier, nous vous suivrons, mais là il ne s'agit pas seulement de cela. Nous avons aussi, sous la majorité précédente, supprimé des formulaires. Vous le savez très bien, monsieur le ministre, puisque vous étiez président de la commission des finances du Sénat. Vous avez vous-même, en certaines circonstances, approuvé les propositions de simplification des ministres précédents. Donc, ne nous faites pas passer pour ce que nous ne sommes pas ! Nous sommes tout à fait favorables à la réforme quand elle nous paraît juste.
    Je remercie d'une certaine façon le rapporteur général, qui n'a pas du tout invalidé mon raisonnement. D'ailleurs, il nous proposera lui-même un amendement pour améliorer le système. Cela montre bien que le problème posé n'est pas si théorique que cela. S'il nous a dit que les petits contribuables ne seraient pas pénalisés par cette réforme, il s'est bien gardé de parler des contribuables les plus aisés. Là il est resté extrêmement prudent, parce que le nouveau régime leur sera favorable.
    Pour notre part, monsieur le ministre, dans l'hypothèse d'une alternance que vous avez presque appelée de vos souhaits - il est en effet républicain d'appeler à l'alternance, et je vous en remercie - nous conserverions vos projets de simplification, dont une ou deux formules nous apparaissent fort intéressantes. En revanche, quelques retouches semblent nécessaires et je crois que nous maintiendrions le barème de l'impôt sur le revenu pour les plus-values immobilières ; à court terme notamment entre un et cinq ans.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 126 et 231.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. de Courson a présenté un amendement, n° 278, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le premier alinéa du II du texte proposé pour l'article 150 U du code général des impôts :
    « Les dispositions du I ne s'appliquent ni aux peuplements forestiers, ni aux immeubles, parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : »
    La parole est à M. Gilbert Gantier, pour soutenir cet amendement.
    M. Gilbert Gantier. Nous n'avons pas voté les amendements de suppression, car nous sommes convaincus des aspects positifs de l'article 5. Néanmoins, mon collègue Charles de Courson a présenté cet amendement, qui a un caractère écologique manifeste et qui, je l'espère, sera, avec l'accord du Gouvernement, adopté par l'Assemblée.
    L'article 5 de ce projet de loi de finances supprime la règle selon laquelle le régime d'imposition des plus-values ne s'applique pas aux peuplements forestiers. Or, cette suppression paraît à M. de Courson - et je crois qu'il a raison - tout à fait regrettable. Elle conduit à imposer deux fois le revenu tiré de la production forestière à un même impôt : l'impôt sur le revenu. En effet, l'accroissement du peuplement forestier est la production de la sylviculture, dont la récolte constitue le revenu du sylviculteur. Ce revenu est annuellement déclaré par le contribuable, au titre de l'impôt sur le revenu, comme revenu agricole dans les conditions prévues à l'article 76 du code général des impôts. A ce titre, il est également, chaque année, assujetti aux prélèvements sociaux.
    Or, la plus-value du peuplement forestier résulte de même de l'accroissement des arbres. C'est comme si l'on proposait, en plus de l'imposition des productions de céréales comme revenu agricole, de faire déclarer comme plus-value imposable par les agriculteurs l'accroissement de valeur du blé sur pied entre la date des semis et la veille de la moisson. La seule différence entre ces deux cas de figure est le pas de temps : la production forestière doit rester attachée au sol pendant 20 à 150 ans, selon les espèces, avant de pouvoir être récoltée, ce qui en fait un « immeuble » particulier, mais n'en supprime pas pour autant le caractère de récolte agricole sur pied déjà imposée comme production agricole.
    Enfin, l'application de l'article 5 tel que proposé dans le projet de loi de finances serait à l'origine de coupes anticipées par les propriétaires avant la vente des parcelles, ce qui serait en contradiction totale avec les principes de gestion durable des forêts à la base même de notre politique forestière.
    Pour toutes ces raisons, cet amendement, qui a pour objet d'exclure les peuplements forestiers du régime d'imposition des plus-values immobilières des particuliers, vise à rétablir la situation fiscale actuelle de ces peuplements forestiers.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet appel de la forêt ? (Sourires.)
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement. En effet, si les peuplements forestiers font partie de l'exploitation agricole, le régime qui s'applique est celui des plus-values professionnelles. Or celles-ci ont été quasiment supprimées par la loi Dutreil qui prévoit un relèvement du seuil du chiffre d'affaires tel que presque 90 % des exploitations agricoles en sont exonérés.
    L'amendement de M. de Courson ne peut donc viser que le patrimoine privé. Certes, ni Gilbert Gantier ni moi-même n'avons de peuplements forestiers dans nos circonscriptions.
    M. Michel Bouvard. Mais M. Gantier a peut être des propriétaires forestiers dans la sienne !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais nous savons que pour qu'un peuplement forestier puisse générer une plus-value, il faut que les arbres aient grandi. Par ailleurs, nous venons de voir que la plus value est exonérée au bout de quinze ans. Or, en dehors des plantations d'eucalyptus, qui peuvent pousser dans un délai inférieur à quinze ans, mais dont il y a peu sous nos latitudes, même si le climat se réchauffe, je ne vois pas à quel type de peuplements forestiers notre collègue de Courson peut faire référence.
    M. Michel Bouvard. C'est mal connaître la forêt que de déposer un tel amendement !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Connaissant Charles de Courson et son goût de la précision, je vais vous livrer quelques informations qu'il lira dans le compte rendu de nos débats. La force de la réforme que le Gouvernement vous propose tient au fait qu'elle fixe de grands principes simples, applicables à tous et permettant de tenir compte de la situation particulière des différentes activités, notamment des sylvicuteurs.
    Comme l'a dit le rapporteur général, les bois et forêts ont vocation à rester durablement dans le patrimoine de leurs détenteurs. L'abattement pour durée de détention permettra donc une exonération définitive des plus-values au bout de quinze ans, ce qui, vous en conviendrez avec moi, rendra l'imposition des peuplements forestiers très marginale. Certes, ce ne serait pas le cas si ces biens reçus par succession étaient cédés rapidement, mais cette hypothèse : la cession ou l'apport réalisés proches de la date d'entrée dans le patrimoine du cédant dégage rarement une plus-value. En outre, je vous rappelle que notre projet prévoit une avancée importante en prenant en compte, ce qui n'était pas le cas jusqu'alors, les droits de mutation à titre gratuit dans le calcul de la plus-value.
    Autant de mesures qui répondent aux préoccupations émises par Charles de Courson et qui évitent de multiplier des dispositions particulières qui sont toujours complexes à gérer. C'est ce qui me conduit à suggérer le retrait de cet amendement. A défaut, je serais obligé de demander à l'Assemblée de le rejeter.
    M. le président. Monsieur Gantier, retirez-vous l'amendement n° 278 ?
    M. Gilbert Gantier. Oui, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 278 est retiré.
    M. Artigues a présenté un amendement, n° 197, ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le II du texte proposé pour l'article 150 U du code général des impôts par l'alinéa suivant :
    « 7° Lorsqu'il s'agit de la première cession d'un logement lorsque le cédant ou son conjoint n'est pas propriétaire de sa résidence principale, directement ou par personne interposée, et que celle-ci est motivée par l'un des événements dont la liste est fixée par un décret en Conseil d'Etat et concernant la situation professionnelle, familiale ou professionnelle du contribuable. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Gilbert Gantier, pour soutenir cet amendement.
    M. Gilbert Gantier. Les mécanismes d'exonération des plus-values immobilières qui existaient avant la réforme qui nous est proposée prévoyaient un cas exceptionnel d'exonération pour les cessions d'immeubles qui ne constituent pas la résidence principale.
    L'article 150 C du code général des impôts stipulait en effet que la plus-value issue de la cession d'un logement lorsque le cédant ou son conjoint n'est pas propriétaire de sa résidence principale pouvait être exonérée d'imposition si elle était motivée par des événements concernant la situation personnelle, familiale ou professionnelle du contribuable, dont la liste était fixée par décret.
    Ces événements constituent, selon l'article 74 B bis du code général des impôts, des situations tout à fait exceptionnelles, telles que le décès d'un époux, un déménagement justifié par un changement d'activité, un changement de résidence du fait de la cessation forcée d'activité, etc., et qui justifient pleinement l'exonération de l'imposition de la plus-value. Un tel dispositif représentait d'ailleurs une forte incitation à l'accession à la propriété puisqu'il encourageait les redevables à acquérir une résidence principale. En effet, ils pouvaient se dire : s'il se produit un événement quelconque, je ne serai pas frappé par l'imposition de la plus-value.
    Voilà pourquoi notre collègue Artigues propose de réintégrer cette possibilité dans le nouveau dispositif.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il est inopportun de réintroduire, à titre temporaire - dans les deux amendements suivants - ou à titre permanent - dans cet amendement - l'exonération dont bénéficie la première cession d'une résidence secondaire d'un contribuable locataire de sa résidence principale.
    Cette exonération avait, à l'origine, pour objet de permettre au contribuable d'être exonéré de plus-values lors de la cession d'une résidence qui était autrefois sa résidence principale mais qu'il a mise en location dans l'attente de disposer de l'épargne suffisante pour acheter une nouvelle résidence principale, en général plus grande. Mais aujourd'hui, un nombre croissant de contribuables en zone urbaine, en particulier à Paris, font le choix d'être locataires de leur résidence principale, compte tenu du prix dissuasif de l'immobilier. Ces locataires de leur résidence principale ont souvent une résidence secondaire en province. C'est une véritable résidence secondaire, qu'il n'y a pas lieu de faire bénéficier de l'exonération de résidence principale dont il a été question tout à l'heure.
    Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 197.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Artigues a présenté deux autres amendements, n°s 199 et 198.
    L'amendement n° 199 est ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le II du texte proposé pour l'article 150 U du code général des impôts par l'alinéa suivant :
    « Le II de l'article 150 C demeure applicable jusqu'au 1er janvier 2005. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    L'amendement n° 198 est ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le II du texte proposé pour l'article 150 U du code général des impôts par l'alinéa suivant :
    « Toutefois, les personnes pouvant apporter la preuve que les conditions d'application du II de l'article 150 C sont réunies et qui n'ont pas encore réalisé la cession de leur immeuble peuvent bénéficier de l'exonération s'ils réalisent la cession avant le 30 juin 2004. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    Il s'agit de deux amendements de repli. L'argumentation est la même que précemment et l'avis de la commission et du Gouvernement est évidemment défavorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 199.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 198.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, a présenté un amendement, n° 30, ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le texte proposé pour l'article 150 U du code général des impôts par le paragraphe suivant :
    « III. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux plus-values réalisées par les titulaires de pension vieillesse qui, au titre de l'avant-dernière année précédant celle de la cession, ne sont pas passibles de l'impôt de solidarité sur la fortune et dont le revenu fiscal de référence n'excède par la limite prévue au I de l'article 1417, appréciés au titre de cette année. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la création, au profit de l'Etat, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a étudié l'article 5 à la loupe, avec le souci de s'assurer qu'il n'y avait pas de risque de transfert de fiscalité au détriment de contribuables à l'évidence modestes. J'ai été heureux de constater tout à l'heure que Didier Migaud, dans son analyse de l'article, avait évoqué qu'un cas de figure pouvait poser problème : celui des retraités non assujettis à l'impôt sur le revenu.
    Nous connaissons tous des retraités aux revenus très faibles qui peuvent disposer d'un patrimoine dont ils ont hérité. En remontant à nos parents ou arrière-grands-parents, la plupart d'entre nous sommes issus de familles qui vivaient à la campagne. Des terrains ont pu rester dans le patrimoine familial. La vente de ces biens peut constituer un appoint pour des retraités qui ne sont pas assujettis à l'impôt sur le revenu.
    Nous avons donc souhaité, monsieur le ministre, pour bien montrer que cet article 5 n'était destiné en aucun cas à handicaper les contribuables modestes, traiter clairement ce cas de figure et vous demander l'exonération.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le rapporteur général, je comprends votre préoccupation qui est louable. Je remarque cependant que le dispositif que le Gouvernement propose couvre les principales situations que vous évoquiez. Les retraités qui cèdent des immeubles les détiennent en général depuis une période assez longue. Ils ont donc vocation à bénéficier pleinement de l'exonération prévue après quinze ans de détention - et non plus vingt-deux ans, puisque le dispositif a été amélioré sur ce point. Par ailleurs, plusieurs mesures permettent d'atténuer l'imposition lorsque le bien est entré récemment dans le patrimoine du cédant : par exemple, prise en compte des droits de mutation à titre gratuit lors de la revente d'un bien reçu par héritage.
    La force de la réforme, comme je l'ai dit tout à l'heure à M. Gantier, est de fixer quelques grands principes simples, applicables à tous. La situation des titulaires de pensions de vieillesse est aussi prise en compte - indirectement, certes - au travers du dispositif qui vous est proposé. Enfin, votre amendement conduit à introduire une condition de personnalisation, ce qui contredit en quelque sorte l'objectif de simplification qui est attaché à cette réforme.
    Cela étant, monsieur le rapporteur général, votre proposition est inspirée par une préoccupation qui vise à maintenir une situation d'exonération au seul bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin. En ce sens, les critères que vous proposez semblent bien adaptés. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. Et si l'Assemblée adoptait cet amendement, je lèverais le gage.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je rappelle que le gage est levé.
    M. de Courson a présenté un amendement, n° 279, ainsi rédigé :
    « Compléter le I du texte proposé pour l'article 150 UB du code général des impôts par la phrase suivante :
    « Lorsque ces sociétés ou groupements possédent des bois et forêts, l'exonération d'imposition de la plus-value des peuplements forestiers, prévue au II de l'article 150 U, s'applique pour la fraction de la valeur des droits sociaux correspondant aux peuplements forestiers. »
    La parole est à M. Gilbert Gantier, pour défendre cet amendement.
    M. Gilbert Gantier. Il s'agit d'un amendement de repli qui concerne les sociétés ou groupements possédant des bois et des forêts pour lesquels est demandée l'exonération, dans les conditions prévues par le régime Monichon, c'est-à-dire l'exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit.
    M. le président. La commission et le Gouvernement émettent un avis défavorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 279.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, a présenté un amendement, n° 31, ainsi rédigé :
    « Dans le 5° du II du texte proposé pour l'article 150 VB du code général des impôts, substituer au mot : "locales, le mot : "territoriales. »
    Amendement rédactionnel.
    La commission et le Gouvernement émettent un avis favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 31.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Carrez a présenté un amendement, n° 389, ainsi rédigé :
    « Dans le 1° du B du II de l'article 5, substituer aux mots : "cette fraction ou cette moyenne est divisée, les mots : "cette fraction est divisée. »
    Autre amendement rédactionnel.
    Le Gouvernement émet un avis favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 389.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, et M. Marleix ont présenté un amendement, n° 32 rectifié, ainsi libellé :
    « I. - Après le I du II de l'article 5, insérer le paragraphe suivant :
    « I bis. - Le II de l'article 151 septies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Pour les plus-values réalisées à la suite d'une expropriation la condition que l'activité agricole ait été exercée pendant au moins cinq ans n'est pas requise. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par une majoration de la taxe sur les véhicules de société mentionnée à l'article 1010 du même code. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de réparer une petite injustice du dispositif légal qui n'avait pas été corrigée lors de l'examen de la loi pour l'initiative économique. Il vise à supprimer la condition relative à l'exercice agricole pendant au moins cinq ans pour bénéficier de l'exonération de la plus-value de cession d'un bien professionnel qui fait l'objet d'une procédure d'expropriation. Cette exonération semble en effet tout à fait légitime.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Favorable, et je lève le gage.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32 rectifié, compte tenu de la suppression du gage.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
    M. le président. Les amendements n°s 33, 34, 35, 36, 37, deuxième rectification, et 38 rectifié, présentés par M. Carrez, rapporteur général, sont soit rédactionnels, soit de coordination. Ils ont tous recueilli un avis favorable du Gouvernement.
    L'amendement n° 33 est ainsi rédigé :
    « Au début du 2° du J du II de l'article 5, substituer aux mots : "sixième alinéa nouveau les mots : "dernier alinéa. »
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 34 est ainsi rédigé :
    « Après le M du II de l'article 5, insérer le paragraphe suivant :
    « M bis. - Dans le premier alinéa du I de l'article 163 bis C, la référence : "150 A bis est remplacée par la référence : "150 UB. »
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 35, ainsi rédigé :
    « Au début du 2° du R du II de l'article 5, substituer aux mots : "troisième alinéa nouveau, les mots : "deuxième alinéa. »
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 36 est ainsi rédigé :
    « Après le S du II de l'article 5, insérer les deux paragraphes suivants :
    « S bis. - L'article 1600-0 C est ainsi modifié :
    « 1° Dans le d du I, les références : "150 A et 150 A bis sont remplacées par les références : "150 U à 150 UB ;
    « 2° le dernier alinéa du III est supprimé.
    « S ter. - Dans le 4° de l'article 1705, les mots : "par les secrétaires des administrations centrales et municipales, pour les actes de ces administrations sont remplacés par les mots : "par les comptables publics assignataires, pour les actes passés en la forme administrative. »
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 37 deuxième rectification est ainsi libellé :
    « I. - Rédiger ainsi le U du II de l'article 5 :
    « U. - L'article 150 A et les articles 150 A ter à 150 T sont abrogés.
    « II. - En conséquence, après le U du II de cet article, insérer le paragraphe suivant :
    « II. bis. Les dispositions prévues par l'article 150 A bis s'appliquent aux plus-values en report d'imposition à la date du 1er janvier 2004. »
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 38 rectifié est ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du V de l'article 5, après les mots : "article 160, insérer les mots : "du code général des impôts. »
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 5

    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, a présenté un amendement, n° 39 rectifié, ainsi rédigé :
    « Après l'article 5, insérer l'article suivant :
    « Dans les 1°, 1° bis, 6°, 7°, 8° et 9° du III bis de l'article 125 A du code général des impôts, le taux : "15 % est remplacé par le taux : "16 %. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission des finances propose de faire passer de 15 à 16 % la taxation forfaitaire des revenus de valeurs mobilières.
    L'article 5, déjà, aboutit à assujettir les plus-values immobilières sur la base d'un taux unique forfaitaire, en l'occurrence de 16 %. Par ailleurs, comme l'a fait remarquer il y a un instant notre collègue Jean-Yves Chamard, les plus-values mobilières sont assujetties à ce même taux de 16 %. Il serait donc paradoxal de conserver un taux de 15 % pour les revenus de valeurs mobilières. D'autant qu'il s'agit en l'occurrence d'obligations, les actions faisant l'objet d'un régime spécifique, qui est celui de l'avoir fiscal. Et dans un souci de bonne orientation de l'épargne, il paraît préférable de privilégier, parmi les valeurs mobilières, les actions. A tous égards, cette mesure nous paraît opportune.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Favorable. L'accord du Gouvernement - et M. le rapporteur général ne s'en étonnera pas, parce que nous en avons parlé ensemble - tient au fait qu'il ne pénalise pas l'épargne investie en actions, contrairement à ce que j'ai pu lire dans certaines revues. La politique du Gouvernement vise en effet à privilégier l'épargne investie dans les fonds propres des entreprises, pour favoriser la croissance et l'emploi.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)

Article 6

    M. le président. « Art. 6. - I. - A. - Après l'article 44 sexies du code général des impôts, sont insérés les articles 44 sexies-0 A et 44 sexies A ainsi rédigés :
    « Art. 44 sexies-0 A. - Une entreprise est qualifiée de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement lorsque, à la clôture de l'exercice, elle remplit simultanément les conditions suivantes :
    « a) Elle est une petite ou moyenne entreprise, c'est-à-dire employant moins de 250 personnes, et qui a soit réalisé un chiffre d'affaires inférieur à 40 millions d'euros au cours de l'exercice, ramené ou porté, le cas échéant, à douze mois, soit un total du bilan inférieur à 27 millions d'euros. L'effectif de l'entreprise est apprécié par référence au nombre moyen de salariés employés au cours de cet exercice ;
    « b) Elle est créée depuis moins de huit ans ;
    « c) Elle a réalisé des dépenses de recherche, définies aux a à g du II de l'article 244 quater B, représentant au moins 15 % des charges totales engagées par l'entreprise au titre de cet exercice, à l'exclusion des charges engagées auprès d'autres jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement ;
    « d) Son capital est entièrement libéré et détenu de manière continue à 75 % au moins :
    « - par des personnes physiques ;
    « - ou par une société répondant aux conditions du a et dont le capital est détenu pour 75 % au moins par des personnes physiques ;
    « - ou par des sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des sociétés de développement régional, des sociétés financières d'innovation ou des sociétés unipersonnelles d'investissement à risque à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens des deuxième à quatrième alinéas du 12 de l'article 39 entre la société en cause et ces dernières sociétés ou des fonds ;
    « e) Elle n'est pas créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou d'une reprise de telles activités au sens du III de l'article 44 sexies.
    « Art. 44 sexies A. - I. - 1. Les entreprises répondant aux conditions fixées à l'article 44 sexies-0 A sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés au titre des trois premiers exercices ou périodes d'imposition bénéficiaires, cette période d'exonération totale des bénéfices réalisés ne pouvant excéder trente-six mois.
    « Les bénéfices réalisés au titre des deux exercices ou périodes d'imposition bénéficiaires suivant cette période d'exonération ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés que pour la moitié de leur montant.
    « 2. Le bénéfice de l'exonération est réservé aux entreprises qui réunissent les conditions fixées au 1 au cours de chaque exercice ou période d'imposition au titre duquel ou de laquelle l'exonération est susceptible de s'appliquer.
    « 3. Si à la clôture d'un exercice ou d'une période d'imposition l'entreprise ne satisfait plus à l'une des conditions requises pour bénéficier du statut de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement, elle perd définitivement le bénéfice de l'exonération prévue au 1. Toutefois, le bénéfice réalisé au cours de cet exercice ou période d'imposition et de l'exercice ou période d'imposition suivant n'est soumis à l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés que pour la moitié de son montant.
    « 4. La durée totale d'application de l'abattement de 50 % prévu au 1 et au 3 ne peut en aucun cas excéder vingt-quatre mois.
    « II. - Le bénéfice exonéré au titre d'un exercice ou d'une période d'imposition est celui déclaré selon les modalités prévues aux articles 50-0, 53 A, 96 à 100, 102 ter et 103, diminué des produits bruts ci-après qui restent imposables dans les conditions de droit commun :
    « a) Les produits des actions ou parts de société, et les résultats de sociétés ou organismes soumis au régime prévu à l'article 8 ;
    « b) Les produits correspondant aux subventions, libéralités et abandons de créances ;
    « c) Les produits de créances et d'opérations financières pour le montant qui excède celui des frais financiers engagés au cours du même exercice ou de la période d'imposition.
    « III. - Lorsqu'elle répond aux conditions requises pour bénéficier des dispositions de l'un des régimes prévus aux articles 44 sexies, 44 octies, 44 decies, 244 quater E ou du régime prévu au présent article, la jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement peut opter pour ce dernier régime jusqu'au 30 septembre 2004 si elle est déjà créée au 1er janvier 2004, dans les neuf mois suivant celui de son début d'activité si elle se crée après cette dernière date, ou dans les neuf premiers mois de l'exercice ou de la période au titre duquel ou de laquelle l'option est exercée. L'option est irrévocable dès lors qu'à la clôture de l'exercice ou de la période au titre duquel ou de laquelle elle a été exercée les conditions fixées à l'article 44 sexies-0 A sont remplies.
    « IV. - L'exonération prévue au I s'applique dans les limites prévues par le règlement (CE) n° 69/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis. »
    « B. - Au troisième alinéa du 1 de l'article 170 du code général des impôts, après les mots : "en application des articles 44 sexies, sont insérés les mots : "44 sexies A,.
    « C. - Au premier alinéa du I de l'article 220 quinquies du code général des impôts, après les mots : "en application des articles 44 sexies, sont insérés les mots : "44 sexies A,.
    « D. - Après l'article 223 nonies du code général des impôts, il est inséré un article 223 nonies A ainsi rédigé :
    « Art. 223 nonies A. - I. - 1° Les entreprises répondant aux conditions fixées à l'article 44 sexies-0 A sont exonérées de l'imposition forfaitaire annuelle prévue à l'article 223 septies.
    « 2° Si au cours d'une année l'entreprise ne satisfait plus à l'une des conditions requises pour bénéficier du statut de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement et fixées par l'article 44 sexies-0 A, elle perd définitivement le bénéfice de l'exonération prévue au 1.
    « II. - L'exonération prévue au I s'applique dans les limites prévues par le règlement (CE) n° 69/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis. »
    « E. - Au premier alinéa du II de l'article 244 quater E du code général des impôts, après les mots : "des régimes prévus aux articles 44 sexies, sont insérés les mots : "44 sexies A,.
    « F. - Au b du 1° du IV de l'article 1417 du code général des impôts, après les mots : "en application des articles 44 sexies, sont insérés les mots : "44 sexies A,.
    « G. - Les dispositions du présent I s'appliquent aux résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2004 par les jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement créées à cette date ou qui se créent entre cette date et le 31 décembre 2013.
    « II. - A. - Après l'article 1383 C du code général des impôts, il est créé un article 1383 D ainsi rédigé :
    « Art. 1383 D. - I. - Les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent, par une délibération de portée générale prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties pour une durée de sept ans les immeubles appartenant à une entreprise existante au 1er janvier 2004 ou créée entre cette date et le 31 décembre 2013, répondant au cours de la période de référence mentionnée à l'article 1467 A aux conditions fixées par les a, c, d et e de l'article 44 sexies-0 A et dans lesquels elle exerce son activité au 1er janvier de l'année d'imposition. Lorsque l'immeuble appartient à une entreprise existante au 1er janvier 2004, celle-ci doit avoir été créée depuis moins de huit ans au 1er janvier de l'année d'imposition.
    « L'exonération porte sur la totalité de la part revenant à chaque collectivité ou établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre. Elle s'applique dans les limites prévues par le règlement (CE) n° 69/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis. Elle cesse définitivement de s'appliquer à compter de l'année qui suit le septième anniversaire de la création de l'entreprise ou, si elle est antérieure, de la deuxième année qui suit la période mentionnée au premier alinéa pendant laquelle l'entreprise ne remplit plus l'une des conditions fixées par les a, c, d et e de l'article 44 sexies-0 A.
    « Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l'une des exonérations prévues aux articles 1383 A, 1383 B, 1383 C ou celles prévues au présent article sont remplies, le contribuable doit opter pour l'un ou l'autre de ces régimes avant le 1er janvier de l'année au titre de laquelle l'exonération prend effet. L'option est irrévocable et vaut pour l'ensemble des collectivités.
    « II. - Pour les immeubles susceptibles d'être exonérés en application du I, une déclaration doit être souscrite avant le 1er janvier de la première année à compter de laquelle le redevable peut, au titre d'un immeuble concerné, bénéficier de l'exonération. Cette déclaration comporte tous les éléments d'identification du ou des immeubles exonérés. »
    « B. - 1° Pour l'application des dispositions de l'article 1383 D du code général des impôts au titre de 2004, les délibérations des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre doivent intervenir avant le 31 janvier 2004.
    « 2° Pour les immeubles susceptibles d'être exonérés dès le 1er janvier 2004 en application du I de l'article 1383 D du code général des impôts, la déclaration prévue au II de de l'article 1383 D doit être souscrite au plus tard avant le 15 février 2004.
    « III. - A. - Après l'article 1466 C du code général des impôts, il est créé un article 1466 D ainsi rédigé :
    « Art. 1466 D. - Les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, exonérer de taxe professionnelle pour une durée de sept ans, les entreprises existantes au 1er janvier 2004 ou créées entre cette date et le 31 décembre 2013, et répondant au cours de la période de référence mentionnée à l'article 1467 A, aux conditions fixées par les a, c, d et e de l'article 44 sexies-0 A. Lorsque l'entreprise a été créée antérieurement au 1er janvier 2004, elle doit l'avoir été depuis moins de huit ans au 1er janvier de l'année d'imposition.
    « L'exonération porte sur la totalité de la part revenant à chaque collectivité ou établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre. Elle s'applique dans les limites prévues par le règlement (CE) n° 69/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis. Elle cesse définitivement de s'appliquer à compter de l'année qui suit le septième anniversaire de la création de l'entreprise ou, si elle est antérieure, de la deuxième année qui suit la période mentionnée au premier alinéa pendant laquelle l'entreprise ne remplit plus l'une des conditions fixées par les a, c, d et e de l'article 44 sexies-0 A.
    « Pour bénéficier de l'exonération, les contribuables doivent en faire la demande dans les délais prévus à l'article 1477. Cette demande doit être adressée, pour chaque établissement exonéré, au service des impôts dont relève l'établissement. Les contribuables déclarent, chaque année, dans les conditions prévues à l'article 1477, les éléments entrant dans le champ d'application de l'exonération.
    « Lorsqu'un établissement remplit les conditions requises pour bénéficier de l'une des exonérations prévues aux articles 1464 A, 1464 B, 1464 D, 1465, 1465 A, 1465 B, 1466 A, 1466 B et 1466 C et celles du présent article, le contribuable doit préciser le régime sous lequel il entend se placer. Ce choix, qui est irrévocable et vaut pour l'ensemble des collectivités, doit être exercé dans le délai prévu pour le dépôt, selon le cas, de la déclaration annuelle ou de la déclaration provisoire de la taxe professionnelle visées à l'article 1477. »
    « B. - 1° Pour l'application des dispositions de l'article 1466 D du code général des impôts au titre de 2004, les délibérations des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre doivent intervenir avant le 31 janvier 2004.
    « 2° Pour bénéficier dès 2004 de l'exonération de taxe professionnelle prévue à l'article 1466 D du code général des impôts, les contribuables doivent en faire la demande au plus tard le 15 février 2004.
    « IV. - A. - Le III de l'article 150-0 A du code général des impôts est complété par un 7 ainsi rédigé :
    « 7. Sur option expresse, au cessions de parts ou actions de sociétés qui bénéficient du statut de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement défini à l'article 44 sexies-0 A si :
    « 1° Les parts ou actions cédées ont été souscrites à compter du 1er janvier 2004 ;
    « 2° Le cédant a conservé les titres cédés, depuis leur libération, pendant une période d'au moins trois ans au cours de laquelle la société a effectivement bénéficié du statut mentionné au premier alinéa ;
    « 3° Le cédant, son conjoint et leurs ascendants et descendants n'ont pas détenu ensemble, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices de la société depuis la souscription des titres cédés.
    « Cette option peut également être exercée lorsque la cession intervient dans les cinq ans qui suivent la fin du régime mentionné au premier alinéa, toutes autres conditions étant remplies. »
    « B. - Le troisième alinéa du I de l'article 170 du même code est complété par les mots suivants : "et les plus-values exonérées en application du 7 du III de l'article 150-0 A dont l'assiette est calculée conformément aux dispositions de l'article 150-0 D.
    « C. - Au quatrième alinéa du IV de l'article 199 terdecies-0 A du même code, après les mots : "163 octodecies A, sont insérés les mots : "ou opte pour l'exonération mentionnée au 7 du III de l'article 150-0 A, et après les mots : "au titre de l'année de déduction, sont insérés les mots : "ou de l'option.
    « D. - Le 1° du IV de l'article 1417 du même code est complété par un d ainsi rédigé :
    « d) Du montant des plus-values exonérées en application du 7 du III de l'article 150-0 A. »
    « E. - L'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
    « 1° Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
    « II bis. - Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont également assujetties à la contribution mentionnée au I à raison des plus-values exonérées d'impôt sur le revenu en application du 7 du III de l'article 150-0 A du code précité. »
    « 2° Après la première phrase du premier alinéa du III, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
    « Il en est de même pour la contribution mentionnée au II bis dont l'assiette est calculée conformément aux dispositions de l'article 150-0 D du code général des impôts. »
    « F. - Le III de l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est complété par un 4° ainsi rédigé :
    « Les plus-values exonérées d'impôt sur le revenu en application du 7 du III de l'article 150-0 A du code général des impôts au titre des années visées au I. »
    « G. - Un décret fixe les modalités d'application du présent IV, et notamment les obligations incombant aux contribuables et aux sociétés concernées.
    « V. - L'article L. 80 B du livre des procédures fiscales est complété par un 4° ainsi rédigé :
    « Lorsque l'administration n'a pas répondu dans un délai de six mois à un contribuable de bonne foi qui a demandé, à partir d'une présentation écrite précise et complète de la situation de fait, si son entreprise constitue une jeune entreprise innovante au sens de l'article 44 sexies-0 A. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard, inscrit sur l'article.
    M. Jean-Pierre Brard. C'est avec la plus grande prudence que les députés du groupe communiste et républicain ont abordé l'examen de l'article 6. On connaît en effet la propension de votre gouvernement à mener une politique basée sur l'incitation négative sans certitude de contrepartie. Cette politique passe par un désengagement massif de l'Etat au profit du privé.
    En faveur de l'emploi, de l'aménagement du territoire et maintenant de la recherche, ce type de politique se résume à une constellation de mesures d'exonération fiscales et/ou sociales. En 2004, le poste des baisses de charges sociales devrait représenter entre 17 et 18 milliards d'euros.
    Les contreparties en sont incertaines, dans la mesure où vos politiques incitatives sont empruntes d'une confiance aveugle dans les possibilités du privé à faire tout ce que l'Etat, pour tout ou partie, ne souhaite plus assumer. Une fois que la condition est remplie pour entrer dans le dispositif, peu importe que les objectifs du dispositif soient atteints. Peu importe que les emplois créés soient précaires ou non. Peu importe les effets d'aubaine avérés ou encore la présence de chasseurs de prime. Notre avis est aussi très mitigé en ce qui concerne vos politiques d'allègement de charges sur les bas salaires, vos choix en matière de politique de la ville, notamment les dispositifs ZFU et ZRU ; l'expérience a montré que tous ces dispositifs n'avaient pas permis de réduire le chômage, mais plutôt de faire pression sur les salaires.
    A l'article 6, et afin de soutenir la recherche et le développement, vous nous proposez, pour toute politique, la création du statut de « jeunes entreprises innovantes ». Cet effort en matière de recherche repose sur vos recettes habituelles. On y retrouve, notamment, les archi-classiques exonérations d'impôts sur les bénéfices, mais aussi la possibilité offerte aux collectivités territoriales d'ajouter d'autres exonérations au titre de la fiscalité locale, qui, par un effet de vases communicants, débouche sur l'augmentation des taux.
    Pour en bénéficier, des conditions sont requises : un seuil non seulement en termes d'effectifs et un autre en termes de chiffre d'affaires, mais aussi et surtout un seuil en termes de dépenses de recherche.
    Il faudra bien évidemment attendre de voir pour juger, notamment de l'impact de ce dispositif en termes de soutien à la recherche. Toutefois, il faut apprécier le contexte politique dans lequel il s'inscrit : une année 2003, marquée par une politique gouvernementale en matière de recherche, qui - c'est le moins qu'on puisse dire - n'a pas été positive.
    La ministre Claudie Haigneré, depuis son entrée en fonction, n'a cessé de répéter que la recherche était une « priorité nationale ». Mais il est cruel de confronter son affirmation à la réalité des faits et de comparer l'effort de recherche dans notre pays et aux Etats-Unis - que vous évoquez si souvent. En mai dernier, Bercy a mis « en réserve » 314 millions d'euros de crédits de recherche 2002, que l'Etat n'avait pas versés aux organismes. Pour l'année 2003, le Gouvernement a supprimé 150 postes permanents dans les organismes publics, dont 137 au CNRS. N'ont été ou ne seront ouverts aux concours que 357 postes contre 580 l'année précédente. Les crédits de fonctionnement - hors salaires - des établissement publics scientifiques et techniques comme le CNRS, l'INSERM ou l'INRA ont ainsi été réduits d'environ 30 % si l'on cumule la baisse du budget initial 2003 par rapport à celui de 2002 et les annulations de crédits décidées en mars dernier.
    L'expatriation des jeunes chercheurs, contrairement aux dires du Gouvernement, ne s'explique pas seulement par les rigidités du statut de fonctionnaire et la faiblesse des rémunérations : de nombreux témoignages dans la presse font état de conditions de travail dégradées et de l'impossibilité de mener à leur terme les programmes de recherche ou d'assister à des rencontres internationales, de matériels non opérationnels et j'en passe. Du reste, la révision de la loi relative à l'archéologie préventive témoigne à sa manière du mépris affiché à l'égard de la culture et de la science, a fortiori lorsqu'elles semblent dénuées de toute rentabilité économique à court terme.
    Pourtant, aux dires de certains experts, la moitié de la croissance économique d'une nation dépend désormais de son potentiel de recherche et d'innovation.
    Pour consacrer 3 % du PIB à la recherche en 2010, conformément aux engagements pris au sommet européen de Lisbonne en mars 2000, la France devrait augmenter ses dépenses de recherche de 80 % par rapport à leur niveau actuel. Elle n'en a clairement pas pris le chemin. Si le Gouvernement annonce un budget en hausse pour 2004, la plus grande prudence reste de mise : l'expérience montre, qui plus est, que crédits votés ne signifie pas crédits versés.
    L'adoption de l'article 6 reviendrait, monsieur le ministre, à vous donner un chèque en blanc. Mais est-il besoin de vous rappeler que la confiance se mérite ? Encore faut-il - condition essentielle - mettre en conformité ses paroles et ses actes ! Vos dissertations sur le caractère prioritaire de la recherche masquent, bien péniblement, l'inexistence d'une politique volontariste. L'effort public, l'effort de la collectivité mérite plus, beaucoup plus que ce dispositif de jeunes entreprises innovantes.
    M. le président. M. Garrigue a présenté un amendement, n° 482, ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le premier alinéa du d) du texte proposé pour l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts par les mots : ", le pourcentage de 75 % étant ramené à 50 % lorsque l'entreprise a été détenue depuis son origine à plus de 80 % par une personne morale.
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « Les pertes de recettes pour le budget de l'Etat sont compensées à due concurrence pour la création d'une taxe additionnelle à la taxe spéciale sur les conventions d'assurance. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Notre collège Garrigue m'a demandé de dire un mot de son amendement, mais j'aimerais au préalable répondre brièvement à l'intervention de notre collègue Jean-Pierre Brard. L'article 6 concernant les jeunes entreprises innovantes est particulièrement intéressant. Certes, chacun peut, tout comme M. Brard, avoir une position de principe sur les exonérations de charges, d'impôt sur les bénéfices ou d'impôts locaux. Mais je vais vous prendre, cher collègue Brard, par les sentiments.
    M. Jean-Louis Idiart. Ce serait trop beau !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ces jeunes entreprises innovantes relèvent typiquement de la catégorie d'entreprises que nous devrions pouvoir accueillir au sein de l'association des collectivités territoriales de l'Est parisien que nous avons créée ensemble.
    M. Jean-Pierre Brard. Banco !
    M. Jean-Louis Idiart. Pas de débat local !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et j'espère que, si le cas se présente, la ville de Montreuil leur accordera une exonération temporaire de taxe professionnelle.
    M. Jean-Pierre Brard. On verra ! Je ne dispose pas de l'argent des autres !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'en viens à l'amendement n° 482. Notre collègue Daniel Garrigue soulève un problème bien réel, mais je rendrai un avis défavorable car la rédaction qu'il propose n'est pas satisfaisante. Un certain nombre d'entreprises peuvent naître par la pratique dite de l'essaimage, qui leur permet de bénéficier à leur naissance et durant leur prime jeunesse de l'assistance d'une grande entreprise. Or l'essaimage veut que la grande entreprise se désengage après avoir porté la jeune sur les fonts baptismaux. L'amendement de notre collègue pose à cet égard une vraie question : il faudrait pouvoir trouver une solution pour ouvrir la possibilité d'accueillir, sous ce statut de jeunes entreprises innovantes, des entreprises issues de l'essaimage. Malheureusement, la rédaction de son amendement n'est pas satisfaisante, disais-je, dans la mesure où l'entreprise mère continuerait de détenir 50 % des parts, ce qui est totalement contraire à la philosophie du dispositif, aux termes duquel 75 % du capital au moins doit être détenu par des personnes physiques.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Jean-Pierre Brard a parlé de l'effort de recherche en France. Je lui rappelle que notre pays, avec 0,93 % du produit intérieur brut, est le premier des grands pays de l'OCDE pour son effort public de recherche. Cela dit, nous devons effectivement stimuler l'effort privé de recherche. C'est d'ailleurs un des objectifs de l'article 6 consacré aux jeunes entreprises innovantes.
    M. le rapporteur général juge que l'amendement n° 482 n'est pas arrivé à son état ultime de perfection. Le seuil de détention du capital à 75 % répond à la définition communautaire de la PME et le régime de faveur vise des entreprises réellement nouvelles. Il n'a pas, en tout cas dans son principe initial, vocation à bénéficier aux entreprises créées dans le cadre de l'essaimage. Il y a donc, au moins dans le principe, une différence sur laquelle je vous invite à méditer afin que vous puissiez y revenir dans le cadre d'une lecture ultérieure ou de l'examen d'un autre texte.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je retire l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 482 est retiré.

    MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 308, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi la deuxième phrase du 3 du I du texte proposé pour l'article 44 sexies A du code général des impôts :
    « Dans le cas où l'entreprise ne bénéficie plus du statut de jeune entreprise en raison du dépassement du plafond d'effectif prévu au a de l'article 44 sexies-0 A, le bénéfice réalisé au cours de cet exercice ou période d'imposition et de l'exercice ou période d'imposition suivant n'est soumis à l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés que pour la moitié de son montant. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous venez de nous inviter à la méditation, monsieur le ministre. Il y a de quoi, en effet ! Les entreprises privées considèrent que la recherche ne les concerne que peu et attendent tout de l'Etat...
    M. Patrice Martin-Lalande. Méditer ne signifie pas médire !
    M. Jean-Pierre Brard. J'ai bien dit « méditer ». Médire serait négatif. En tout état de cause, il y a matière à critiquer le comportement très caractéristique du patronat français, qui attend tout du public !
    M. Patrice Martin-Lalande. C'est bien cela : notre collègue médit du patronat français !
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne médis pas, je constate. Regardez Alcatel ! Vous savez bien comment c'est, chez nous : on privatise les bénéfices et on nationalise les déficits ! Et c'est vous qui vous en chargez.
    M. Philippe Auberger. Non, c'est vous qui avez commencé en 1981 !
    M. Jean-Pierre Brard. Pour la recherche, c'est pareil : comme vous vous obstinez à faire des cadeaux sans contrepartie aux entreprises, vous n'incitez évidemment pas à grand-chose. C'est là qu'est le problème, c'est cela qui nuit à notre pays.
    Pour en venir à l'amendement n° 308,...
    M. le président. Vous pourriez présenter en même temps votre amendement de repli n° 307.
    M. Jean-Pierre Brard. Si vous y tenez, monsieur le président, je veux bien allez jusqu'à l'article 41, pendant qu'on y est ! (Sourires.) Mais je préfère faire oeuvre pédagogique !
    M. Jean-Pierre Brard. La première phrase du 3 du I de l'article 44 sexies A prévoit que si l'une des conditions requises pour bénéficier du statut que vous proposez n'est plus satisfaite, le bénéfice de l'exonération d'impôt sur le revenu ou sur les sociétés est perdu. La deuxième phrase dispose que, par exception à cette règle, le bénéfice réalisé est soumis à imposition pour la moitié de son montant au cours de l'exercice qui a vu la perte de la qualité du statut que vous offrez, et de même au cours de l'exercice suivant.
    Cette rédaction, malgré son étrangeté, est très claire sur un point : les conditions requises pour se voir qualifier de jeune entreprise innovante sont cumulatives et alternatives. Autrement dit, si l'une des conditions est remplie, mais que l'autre ne l'est pas, ou plutôt ne l'est plus, l'entreprise n'en perd pas moins sa qualité de jeune entreprise innovante.
    Nous n'allons pas mener une bataille sur ce sujet, même si d'un point de vie juridique et économique, il y aurait beaucoup à dire. Reste que toutes les conditions à remplir pour être qualifiée de jeune entreprise innovante semblent, à vos yeux, avoir la même importance. Ainsi, ne pas en remplir une ne serait pas plus significatif que ne pas en remplir une autre.
    Aussi proposons-nous de réserver le bénéfice des dispos itions d'exception prévues par la deuxième phrase de l'alinéa 3 de l'article 44 sexies A aux seules entreprises qui ont perdu leur qualité de jeune entreprise innovante en raison du non-respect de la condition du nombre maximum d'employés. En effet, pourquoi devrait-on pénaliser une entreprise qui a dépassé le seuil de 250 salariés ? Si elle l'a dépassé, cela signifie qu'elle emploie des salariés et qu'elle mérite, à ce titre, d'être encouragée : cela prouve que la politique d'exonération porte ses fruits. Pour une fois, monsieur le ministre, vous devriez entrer dans ma logique... En revanche, si l'entreprise perd sa qualité de jeune entreprise innovante par le fait qu'elle ne respecte plus la condition d'un minimum de 15 % de dépenses de recherche, c'est bien qu'elle n'a pas rempli son contrat avec la collectivité. Il n'y a donc aucune raison de continuer à lui accorder ces exonérations substantielles.
    En résumé, si cela marche tellement bien que cela se traduit par un développement de l'emploi au-delà de 250 salariés, il ne faut pas pénaliser l'entreprise. En revanche, si l'entreprise ne consent pas l'effort de recherche auquel elle s'est engagée, il n'y a pas de raison de continuer à l'aider. Cela me semble assez clair pour emporter votre adhésion.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable. La restriction apportée par cet amendement remettrait en cause l'intérêt du dispositif.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 308.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 307, ainsi rédigé :
    « Dans la dernière phrase du 3 du I du texte proposé pour l'article 44 sexties A du code général des impôts, supprimer les mots : "et de l'exercice ou période d'imposition suivant. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard. C'est un amendement de repli, n'est-ce pas ?
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, je suis très sensible à cet appel du pied, mais les arguments du rapporteur général et du ministre sont, je l'avoue, un peu courts pour m'inciter à me replier. Cela dit, je veux bien faire un geste de bonne volonté et j'attends la réciproque pour les prochains amendements. Je m'abstiens donc de défendre cet amendement.
    M. le président. L'amendement n° 307 est retiré.
    MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 320 rectifié, ainsi rédigé :
    « Supprimer le II de l'article 6. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Le présent amendement me permettra de fournir des éléments complémentaires pour illustrer le caractère insuffisamment adapté à la réalité des inégalités territoriales du dispositif « jeunes entreprises innovantes », en particulier les II et III de l'article 6 du présent projet.
    Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour deviner que les délibérations accordant des exonérations fiscales seront étroitement liées au niveau des bases imposables. Plus les bases imposables - je veux parler essentiellement des valeurs locatives - seront importantes, plus la faculté de décider d'exonérations, donc de consentir à se priver de recettes fiscales, sera réelle.
    Chacun connaît la distinction entre droits réels et droits formels. Votre politique, monsieur le ministre, s'inscrit dans une logique qui se contente d'octroyer des droits dont la jouissance est conditionnée à la plus ou moins grande richesse, en termes économiques, des personnes physiques ou des personnes morales. Pour une collectivité pauvre, en termes de bases imposables, exonérer les entreprises reviendrait mécaniquement à devoir augmenter la pression fiscale sur les particuliers. Or ces collectivités pauvres en termes de bases imposables ont souvent une population elle-même plus pauvre qu'ailleurs. Je ne parle pas de Neuilly, évidemment ! Elles se retrouvent de ce fait contraintes de fixer des taux élevés.
    En Ile-de-France - 28 % du PIB - les revenus médians déclarés atteignent 17 100 euros par unité de consommation. Dans le Nord - Pas-de-Calais - 5 % du PIB - ils ne se montent qu'à 12 000 euros par unité de consommation. Je suppose que vous confirmez mes chiffres, monsieur le président. On mesure l'inégalité en matière de capacités des ménages à participer à l'effort contributif !
    Dès lors, oserez-vous nous faire croire que la commune de Stains, en Seine-Saint-Denis, si elle décidait d'exonérations pour attirer des jeunes entreprises innovantes, pourrait se passer de ses maigres et d'autant plus précieuses recettes fiscales ? Croyez-vous qu'elle pourrait compenser les exonérations accordées aux entreprises par une ponction supplémentaire sur des administrés aux facultés contributives pour le moins dérisoires ? Pour notre part, nous ne le croyons pas.
    Pour cette raison, et pour bien d'autres encore que je veux vous épargner aujourd'hui, nous jugeons inacceptables les II et III tels que proposés par le présent article 6.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable, dans la mesure où l'exonération d'impôts locaux est facultative. La collectivité locale a toute liberté de la décider ou non. Certes, me direz-vous, les collectivités les plus riches prendront plus facilement une décision d'exonération que les collectivités les plus pauvres. Ce à quoi je réponds - nous le verrons plus loin dans l'examen du projet de loi de finances - que nous allons engager, avec la réforme des dotations de l'Etat, un véritable effort de péréquation entre les collectivités locales. Cela me paraît répondre aux interrogations de M. Brard.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Avis également défavorable. Il va effectivement falloir nous habituer à éviter de décider des exonérations d'impôts locaux. Nous avons érigé en principe constitutionnel le fait que les collectivités locales doivent désormais disposer de manière déterminante de ressources fiscales propres afin qu'elles puissent librement s'administrer. Dès lors, ce principe nous interdit de procéder par voie d'exonérations d'impôts locaux, même si celles-ci sont compensées par l'Etat, sous peine de prendre le risque de dégrader le niveau de ressources des collectivités locales.
    M. Philippe Auberger. Bien sûr !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il nous faudra renoncer à ces exonérations d'impôts locaux qui étaient sinon familières, en tout cas fréquemment utilisées.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 320.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Bonrepaux, Migaud, Bourguignon, Emmanuelli, Idiart et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 232, ainsi rédigé :
    « Supprimer les III et IV de l'article 6. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. La réponse de M. le ministre est édifiante :...
    M. Jean-Pierre Brard. Au sens biblique du terme !
    M. Augustin Bonrepaux. ... il n'y aura plus de politique d'aménagement du territoire. Dorénavant, les collectivités locales qui voudront alléger les charges d'une entreprise en zone rurale se verront opposer la Constitution ! Et nous verrons à l'article 40, avec le transfert de charges sur les collectivités locales, à quel point l'autonomie fiscale de ces dernières sera réduite. Il y a de quoi être inquiet, mes chers collègues !
    Ce qui nous est proposé dans l'article 6, nous le retrouvons dans la loi de développement des territoires ruraux. « Nous allons encourager l'installation des médecins en zone rurale », nous dit-on et tout le monde applaudit. Mais comment ? En autorisant les collectivités locales à subventionner leur installation ! Est-ce cela, l'aménagement du territoire ? Les collectivités locales riches pourront le faire et les autres pas. « Nous allons aider à l'installation de vétérinaires en zone rurale. » En autorisant les collectivités locales à réduire la taxe professionnelle... mais le Gouvernement vient de nous dire qu'il ne pourra plus compenser ! Est-ce cela, la nouvelle politique d'aménagement du territoire ? Et l'on nous parle de péréquation... Nous verrons, à la fin de la discussion de ce projet de loi, ce que donneront tous ces amendements qui chamboulent totalement les dotations et l'actuelle péréquation : si progrès il y a, ils seront insignifiants pour les collectivités locales, en particulier pour les communes et les communautés de communes.
    Nous sommes opposés à cette mesure, parce que c'est une hypocrisie. On prétend aider à la création de jeunes entreprises, mais tout repose sur la possibilité laissée aux collectivités locales d'exonérer de taxe professionnelle.
    Il y a deux sortes de collectivités locales : celles qui pourront le faire et celles qui n'en auront pas les moyens. Une fois de plus, au lieu de répartir les activités sur l'ensemble du territoire, vous allez les concentrer autour des communes les plus riches.
    Il y a du nouveau en matière d'aménagement du territoire : il n'y a plus d'aménagement du territoire !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable. N'entrons pas dans le débat sur l'aménagement du territoire. L'effort de solidarité entre les collectivités territoriales, qu'il faut conduire au nom de l'aménagement du territoire, doit passer plutôt par les dotations que par les exonérations et les dégrèvements.
    M. Augustin Bonrepaux. Il n'y a plus de crédits ! Comment allez-vous faire ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Les exonérations et les dégrèvements sont, comme la partie immergée de l'iceberg, invisibles mais ils sont contre-productifs. En outre, ils incitent à l'irresponsabilité les responsables locaux.
    M. Didier Migaud. Oh !
    M. Augustin Bonrepaux. L'irresponsabilité est plutôt du côté du Gouvernement !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il vaut donc mieux, monsieur Bonrepaux, et nous aurons le loisir d'en discuter dans quelques heures, essayer de bien distinguer dans les dotations de l'Etat, ce qui relève de la garantie et ce qui doit relever de la péréquation. Et nous aurons toute l'année 2004 pour réfléchir, ensemble, à des critères de péréquation plus performants et plus ambitieux.
    M. Augustin Bonrepaux. Pas besoin d'attendre, on devine le résultat !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Chamard.
    M. Jean-Yves Chamard. Monsieur Bonrepaux, on peut continuer à créer des exonérations, mais en en supprimant d'autres, puisqu'on raisonne à masse constante. Voilà qui nous contraindra à la responsabilité. Ou alors, mais c'est beaucoup plus compliqué, il faut créer une recette propre à la collectivité, avec sans doute la possibilité pour celle-ci d'en moduler le taux. Mais c'est un autre problème.
    En tout cas, ne croyez pas que ce qu'a dit le ministre nous interdit désormais de mener une politique d'aménagement du territoire. Bien sûr que non !
    Comme M. le rapporteur, je suis hostile à votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Quand on parle de ces matières, il faudrait avoir lu la loi de finances, qui explique clairement que, pour les communes les plus pauvres, la progression sera égale à l'inflation, 1,5 %. Est-ce vraiment de la péréquation ? En y regardant de plus près, on s'aperçoit que ce que l'on donne d'une main, on l'avait déjà pris dans la poche de l'intéressé et que, de l'autre main, on lui reprend encore plus ! Lisez-le : c'est dans la loi de finances !
    En l'occurrence, le Gouvernement est plus objectif que le rapporteur général quand il explique que, si la dotation augmente de 1,5 % pour les communes les plus pauvres, c'est parce que, l'année dernière, on a oublié de leur donner ce qui leur revenait au titre de la revalorisation de la DGF. Et comme il restait quelques fonds de tiroirs, on les leur donne aussi, ce qui fait peu ou prou 1,5 %. Mais ce qu'on oublie de dire, c'est que, à l'article suivant, on reprend 3,47 % au titre de la compensation !
    Alors, quand on nous dit : « Vous verrez la compensation en 2004 ! », moi, je n'ai pas besoin d'attendre : il me suffit de voir ce que l'on nous propose de voter pour en imaginer les graves conséquences au cours de l'année 2004.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 232.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 319, ainsi rédigé :
    « Supprimer le III de l'article 6. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Les paragraphes II et III de l'article 6 nous confortent dans notre conviction que votre politique de décentralisation n'est pas de nature à corriger les inégalités territoriales et à mettre en place un système de péréquation digne de ce nom, comme l'a fort bien dit notre collègue Augustin Bonrepaux.
    En effet, dans le cadre du dispositif « jeunes entreprises innovantes », vous proposez deux nouveaux articles du code général des impôts qui donnent la faculté - ce n'est qu'une faculté - aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics d'accorder des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe professionnelle. Il s'agit d'exonérations qui peuvent être accordées pour une durée de sept ans, soit beaucoup plus que les trois ans d'exonération d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les bénéfices éventuellement accordés par l'Etat.
    Peut-être me trompé-je et, dans ce cas, je vous prie par avance de m'en excuser et de me le démontrer, mais il semble qu'aucune compensation financière n'est à la charge de l'Etat dans le cas où les collectivités et leurs établissements publics décideraient, par délibération, d'accorder des exonérations aux jeunes entreprises innovantes. Toutefois, je ne pense pas avancer une inexactitude car, d'un strict point de vue juridique, l'exonération de taxes locales est une faculté des collectivités locales, elle n'est pas une charge transférée par l'Etat.
    Dès lors, si des compensations financières accompagnent nécessairement les décisions de transfert de charges prises par l'Etat central, et par lui seul, il est logique que, dans le cas où ce sont les collectivités locales qui décideraient d'exonérations - sous-entendu, elles n'y seraient par contrainte par l'Etat -, l'Etat ne soit pas tenu de compenser.
    Cette logique juridique est peut-être très séduisante, cependant elle se heurte à la réalité des inégalités territoriales de notre pays. Et je ne peux qu'adhérer à ce que disait Augustin Bonrepaux sur la disparition de toute politique d'aménagement du territoire.
    En 2000, huit régions concentrent les deux tiers du produit intérieur brut national. L'Ile-de-france demeure à la première place en produisant 28 % de la valeur ajoutée nationale, avec un PIB par habitant de 235 792 francs. Le Limousin, c'est 1 % du PIB, avec un PIB par habitant de 123 708 francs. La Franche-Comté, c'est 15 % du PIB, le Nord-Pas-de-Calais, 5 % du PIB, mais seulement 124 515 francs par habitant. Cela renseigne d'ailleurs sur les inégalités énormes, monsieur le président, que connaît votre région. Comte tenu de la faible moyenne et de l'existence de quelques grandes fortunes, on imagine que certains doivent être sous la ligne de flottaison !
    Ces chiffres, monsieur le ministre, ne tiennent pas compte des inégalités intra-régionales. Les Hauts-de-Seine ont le PIB de la Grèce ! Et dans ce département, je ne comparerai pas la ville de Neuilly, chère à notre ministre de l'intérieur, et celle de Bagneux, chère à Mme Jambu !
    Votre dispositif va aggraver ces inégalités ! Il est à l'image de vos choix en termes de décentralisation, des choix qui porteront encore plus gravement atteinte à une grande conquête républicaine déjà menacée, c'est-à-dire la possibilité de jouir de droits comparables, indépendamment de l'endroit où l'on vit.
    Pour la suite du débat, il serait très important, monsieur le ministre - cela ne relève pas de la compétence du rapporteur général - que vous nous disiez ce qu'il en est de cette prétendue politique ambitieuse d'aménagement du territoire que, selon toute apparence, vous vous apprêtez plutôt à démanteler, mettant ainsi en cause l'unité du territoire national.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Même avis que précédemment, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 319.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Carrez a présenté un amendement, n° 390, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 1466 D du code général des impôts, supprimer la référence : "1464 A,. »
    La parole est à M. Gilles Carrez.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Amendement de précision.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 390.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, a présenté un amendement, n° 41, ainsi rédigé :
    « Dans l'avant-dernier alinéa (3°) du A du IV de l'article 6, après les mots : "bénéfices de la société, insérer les mots : "et des droits de vote. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il s'agit de faire coïncider le pourcentage des droits de vote avec celui des droits financiers.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Carrez a présenté un amendement, n° 391 rectifié, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le premier alinéa du 2° du E du IV de l'article 6 :
    « 2° Le premier alinéa du III est complété par la phrase suivante : »
    Amendement rédactionnel. Avis favorable du Gouvernement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 391 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Carrez a présenté un amendement, n° 392, ainsi libellé :
    « Après le E du IV de l'article 6, insérer les deux alinéas suivants :
    « E bis. - Après le II de l'article 1600-0 C du code général des impôts, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
    « II bis. - Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B sont également assujetties à la contribution mentionnée au I à raison des plus-values exonérées d'impôt sur le revenu en application du 7 du III de l'article 150-0 A. »
    Amendement de coordination.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 392.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 6

    M. le président. M. de Courson a présenté un amendement, n° 274, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « I. - Le deuxième alinéa du I de l'article 202 ter du code général des impôts est ainsi rédigé :
    « Toutefois en l'absence de création d'une personne morale nouvelle, les bénéfices en sursis d'imposition, les produits latents afférents aux stocks à rotation lente de produits de l'exploitation et les plus-values latentes incluses dans l'actif social ne font pas l'objet d'une imposition immédiate à la double condition qu'aucune modification ne soit apportée aux écritures comptables et que l'imposition desdits bénéfices, produits et plus-values demeure possible sous le nouveau régime fiscal applicable à la société ou à l'organisme concerné. »
    « II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Gilbert Gantier, pour soutenir cet amendement.
    M. Gilbert Gantier. L'amendement de M. de Courson concerne le régime fiscal des stocks à rotation lente. Quand on crée une personne morale nouvelle, les bénéfices devraient être en sursis d'imposition. Ils le sont dans un certain nombre de cas, mais pas pour les produits à rotation lente par exemple le champagne.
    M. Philippe Auberger. C'est un amendement à votation lente ! Voilà dix ans qu'il revient régulièrement ! (Rires.)
    M. Gilbert Gantier. L'amendement propose donc de surseoir à l'imposition des produits à rotation lente sur les stocks de produits d'exploitation lorsqu'il y a transformation ou changement de régime fiscal d'une société et qu'il n'y a pas création d'une personne morale nouvelle.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Philippe Auberger dit que c'est un amendement à votation lente ; j'allais dire que c'était notre Arlésienne !
    Le Gouvernement devrait, je crois, nous apporter du nouveau sur cette question. (« Ah ! » sur divers bancs.)
    M. Philippe Auberger. C'est pétillant comme le champagne !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Dans l'immédiat, la commission a donné un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il y a des votations lentes qui peuvent parfois aboutir. C'est vrai que le Gouvernement partage, comme tous ceux qui ont eu à se préoccuper de ce sujet, le souci d'assurer autant que possible la neutralité de la transformation des entreprises, ce que le dispositif actuel ne permet pas, j'en conviens, dès lors qu'il ne neutralise pas précisément l'imposition des profits latents qui sont sur les stocks.
    Comme vous l'imaginiez, l'amendement n'est pas, en l'état, acceptable et va nécessiter des aménagements complémentaires mais, si vous le retirez, je m'engage (« Ah ! » sur divers bancs) à vous présenter un texte qui répondra à ses objectifs dans le cadre de la prochaine loi de finances rectificative.
    M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !
    M. Jean-Pierre Brard. C'est du chantage !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. C'est une percée conceptuelle !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Dans ces conditions, je propose à Gilbert Gantier de bien vouloir retirer l'amendement et, s'il a confiance dans le Gouvernement, il trouvera une solution à l'occasion du collectif.
    M. le président. La parole est à M. Gilbert Gantier.
    M. Gilbert Gantier. Dans ces conditions, je ne vois pas comment je pourrais m'obstiner. Je retire donc l'amendement de notre collègue Charles de Courson.
    M. le président. L'amendement n° 274 de M. de Courson est retiré.
    MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 165, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « L'article 9 quinquies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les dispositions du présent article ne peuvent conduire à réduire de plus de 20 % l'impôt qui serait normalement dû par les sociétés françaises si elles ne bénéficiaient pas de l'agrément. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Notre amendement vise à réduire, ou plus précisément à plafonner, l'avantage fiscal tiré de l'autorisation de consolider au niveau mondial les résultats des exploitations directes et indirectes, situées en France ou à l'étranger, des sociétés françaises.
    C'est le mécanisme connu sous le nom de « bénéfice mondial consolidé ». Certes, le nombre de sociétés françaises directement concernées par l'article 209 quinquies du code général des impôts peut sembler faible - elles ne sont, en effet, qu'une douzaine de privilégiées à bénéficier, sur agrément du ministère des finances, de ce régime équivalent à celui de l'intégration fiscale à l'échelle mondiale. Mais le coût annuel pour l'Etat - donc, pour le contribuable - n'est pas mince, puisqu'il est de l'ordre de 400 millions d'euros.
    Pour le fleuron des sociétés hexagonales, il s'agit tout simplement d'additionner les bénéfices réalisés dans le monde entier, de les amputer des pertes réelles ou supposées, de calculer l'impôt théorique au taux français et d'en soustraire les impôts déjà payés dans chaque pays par les filiales étrangères. On voit bien tous le bénéfice que peuvent retirer de ce dispositif les multinationales concernées.
    C'est pourquoi nous proposons de limiter cet avantage à 20 % de l'impôt qui serait normalement dû. Cela se justifie d'autant plus qu'il faut y ajouter l'avantage que les sociétés ou les groupes en question s'accordent eux-mêmes en ouvrant des comptes dans les paradis fiscaux.
    Je pense, monsieur le ministre, qu'il ne serait pas trop difficile pour l'Etat, quand il détient une part du capital, d'examiner de beaucoup plus près les pratiques de ces sociétés qui participent, en fin de compte, à la fraude ou à la fraude légale - c'est-à-dire à l'évasion fiscale à l'échelle planétaire - qui permettent aux paradis fiscaux de se pérenniser.
    Je terminerai, monsieur le ministre, en soulignant que, parmi ces grandes sociétés, il en est certaines dont l'Etat est directement actionnaire, et d'autres dans lesquelles est présent un organisme d'Etat très important et très particulier, la Caisse des dépôts, qui détient quelques positions partout. Grâce à la Caisse des dépôts, qui ne saurait avoir de secrets pour vous - si, d'ailleurs, elle voulait en garder, vous disposeriez toujours de l'épreuve du confessionnal, puisque vous avez autorité sur elle -, il vous est facile de savoir la vérité, si vous avez la volonté politique de l'obtenir.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. En réponse à des questions précises et, surtout, pertinentes, le silence est éloquent !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. C'est un amendement qu'on examine depuis des années !
    M. Jean-Pierre Brard. Cela ne vous dispense pas de répondre à la question.
    Mais je vois que le ministre est subitement inspiré, touché par la grâce !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, nous avançons bien dans le débat, et afin d'éviter que M. Brard pense que je ne respecte pas le soin qu'il apporte lui-même à rendre le débat plus fluide et plus rapide, je vais lui donner la réponse technique dont je dispose.
    Votre amendement propose, au fond, que l'impôt sur les sociétés payé en France soit au moins égal à 80 % de celui qui aurait été payé en l'absence d'agrément. Le Gouvernement ne peut pas être favorable à votre proposition, car le régime du bénéfice consolidé ne fait, en réalité, que placer les groupes agréés dans une situation comparable à celle de leurs principaux concurrents étrangers. De tels régimes existent, en effet, dans la législation de la plupart des pays développés.
    Ce régime n'est pas réservé aux grands groupes et peut être appliqué à d'autres de taille moyenne et moins connus - c'est le cas d'une société agréée sur quatre.
    La mesure que vous proposez n'aurait certainement pas pour effet de diminuer globalement le coût budgétaire du régime. En effet, les impôts étrangers dont l'imputation serait ainsi plafonnée deviendraient logiquement reportables sur les exercices suivants. En fait, cette mesure ferait, à mon sens, perdre toute cohérence au régime ; elle n'a d'ailleurs pas d'équivalent à l'étranger dans des régimes comparables. Si elle était adoptée, elle risquerait donc d'entraîner une désaffection pour le régime du bénéfice consolidé, pourtant bien nécessaire.
    Pour toutes ces raisons, je vous demande, monsieur Brard, de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, j'invite l'Assemblée à le rejeter.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, vous avez dit vous-même que vous me faisiez une réponse technique. Or vous êtes trop éclairé pour ne pas saisir la différence entre le technique et le politique. C'est pourquoi je pense que votre réponse est pour vous une manière de rester sur votre quant-à-soi.
    Vous savez bien que nombre de ces groupes trichent tout à fait légalement - c'est ce que l'on appelle l'évasion fiscale - en ouvrant des comptes ici ou là, si possible dans des pays où l'Etat français ne peut pas exercer sa curiosité, aux Pays-Bas, par exemple. Car vous savez comme moi que si votre administration veut contrôler un groupe français qui y a une filiale, la coopération entre les Etats vous permet de demander à l'administration néerlandaise de vous aider à satisfaire votre curiosité. Mais savez-vous comment elle procède ? Elle annonce au responsable de l'entreprise basée aux Pays-Bas que le gouvernement français veut qu'elle la contrôle et lui demande s'il en est d'accord. Vous imaginez la réponse de la personne ainsi aimablement sollicitée pour ouvrir ses livres de comptes... Faute de volonté politique - volonté qui aurait pu entraîner une réponse politique claire de votre part - , il ne peut pas y avoir de transparence. C'est ainsi que des contributions échappent au Trésor français.
    Vous n'avez d'ailleurs pas répondu à une question portant sur les paradis fiscaux et sur la façon dont le Gouvernement pouvait mettre de l'ordre dans les grands groupes nationaux, soit parce qu'il en est actionnaire, soit parce que, via la Caisse des dépôts, il y a des positions en capital. La morale devrait concerner aussi ces groupes.
    En ce qui concerne la fluidité du débat, vous avez constaté que nous en avons accéléré le rythme. Nous nous sommes fixé un objectif, celui de rendre le débat transparent pour l'opinion et de prendre le temps nécessaire à l'exercice de notre « droit à pédagogie politique », si j'ose dire. C'est ce que nous faisons depuis mardi. A l'évidence, il faut poursuivre le débat, sans lasser personne, ni vous, monsieur le ministre - mais c'est bien connu, vous êtes infatigable, inusable, insubmersible, tout comme le rapporteur général - ni l'opinion.
    Nous irons donc au rythme qui a été prévu, en donnant les coups d'accélérateur nécessaires.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Vous êtes maître du temps ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Compte tenu du respect que le président de l'Assemblée nationale témoigne pour les droits de l'opposition, celle-ci a une certaine faculté à être maîtresse du temps.
    M. le président. Après cette digression philosophique sur le temps, je mets aux voix l'amendement n° 165.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 166, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « L'article 209 quinquies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les dispositions du présent article ne peuvent conduire à réduire de plus de 15 % l'impôt qui serait normalement dû par les sociétés françaises si elles ne bénéficiaient pas de l'agrément. »
    Monsieur Brard, vous avez justement la possibilité d'accélérer avec cet amendement de repli.
    Même argumentation ?
    M. Jean-Pierre Brard. Tout à fait.
    M. le président. Même avis de la commission et du Gouvernement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 166.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 169, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Toutefois, les bénéfices distribués sont assujettis au taux de 40 %. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, la faiblesse et la chute actuelle des investissements des entreprises sont une des raisons de la récession économique à laquelle notre pays est confronté. Il faut donc inciter les entreprises à investir. C'est pourquoi nous proposons de favoriser fiscalement les bénéfices, pour qu'ils soient réinvestis. Vous voyez que nous réfléchissons à la logique économique. Nous sommes convaincus que la redistribution des bénéfices ne doit pas être l'objectif prioritaire des entrepreneurs qui seront ainsi incités à faire progresser l'efficacité et la compétitivité de leurs entreprises par des investissements en matériels, en technologie nouvelle, en main-d'oeuvre qualifiée et dans le domaine de la recherche. C'est pourquoi nous proposons d'assujettir les bénéfices distribués à un taux majoré de 40 % au titre de l'impôt sur les sociétés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable, pour la simple raison que le taux de l'impôt sur les sociétés est aujourd'hui, en France, l'un des plus élevés des pays européens : 36 %. Dans les autres pays, il est sensiblement inférieur. Je ne veux pas comparer avec l'Irlande, où il est maintenant à 15 %, mais, en Allemagne, il est inférieur à 30 % et même, pour certaines catégories d'entreprises, à 25 %. En Grande-Bretagne, il est très inférieur. L'amendement de notre collègue Jean-Pierre Brard ne prend pas en compte le fait que les résultats distribués ont déjà subi un impôt sur les sociétés à un taux élevé. On ne peut donc pas les pénaliser davantage encore.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 169.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 168, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Toutefois, les bénéfices distribués sont assujettis au taux de 36 %. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. L'inspiration de cet amendement est de même nature. Nous ne voulons pas pénaliser, mais inciter. Vous le savez, un entrepreneur se détermine par les choix de son entreprise, par sa logique industrielle. Quant à l'utilisation de l'argent, cela dépend de ce que cela lui coûte. Or, en privilégiant les bénéfices réinvestis, nous ne pénalisons pas l'entreprise : au contraire, nous la poussons à utiliser ses bénéfices non pas pour les distribuer à ses actionnaires, mais pour les réinvestir dans l'entreprise, en restant dans une logique industrielle et non pas financière.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 168.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 413, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le quatrième alinéa du I de l'article 220 quinquies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Par exception aux dispositions du quatrième alinéa, les entreprises ayant fait l'objet d'un jugement prononçant leur mise en redressement ou liquidation judiciaire peuvent demander le remboursement de leur créance non utilisée à compter de la date de ce jugement. Ce remboursement est effectué sous déduction d'un intérêt appliqué à la créance restant à imputer. Cet intérêt, dont le taux est celui de l'intérêt légal applicable le mois suivant la demande de l'entreprise, est calculé à compter du premier jour du mois suivant cette demande jusqu'au terme des cinq années suivant celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option a été exercée. »
    « II. - Les dispositions du I s'appliquent aux créances nées à compter du 1er janvier 2004 et à celles existant à cette date. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. A l'heure actuelle, lorsqu'une entreprise a opté pour le régime du report en arrière des déficits, la mise en oeuvre d'une procédure collective à son encontre ne lui permet pas d'obtenir le remboursement anticipé de la créance sur le Trésor qui est née de cette option.
    L'amendement, qui est le fruit d'un échange avec votre commission des finances, propose de ne pas attendre l'échéance des cinq années et de permettre le remboursement anticipé de la créance sur le Trésor dès l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, de manière à faciliter la poursuite de l'activité et à permettre à l'entreprise de désintéresser plus rapidement les créanciers.
    Cela s'inscrit dans une politique claire qui consiste à mettre notre fiscalité au service des entreprises pour les aider à assurer leur pérennité et, surtout, pour préserver l'emploi. C'est le sens de l'amendement que le Gouvernement vous soumet.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission est tout à fait favorable à cet amendement, qui prolonge une proposition qu'avait formulée notre collègue Charles de Courson lors du débat sur le projet de loi pour l'initiative économique. Charles de Courson nous avait alors expliqué que des salariés - il avait pris l'exemple de Moulinex - pouvaient être pénalisés dans la mesure où, pour imputer sur les plus-values les moins-values subies sur les actions qu'ils détenaient, ils devaient attendre le jugement définitif. Cette attente les pénalisait. Nous avions étudié avec le Gouvernement la possibilité de remonter le plus en amont possible pour imputer les moins-values sur les plus-values, aussi près que possible du nous étions arrêtés à une décision qui suivait de près le dépôt de bilan.
    Je voulais profiter de cet excellent amendement pour poser une question à M. le ministre. A l'évidence, notre souci est de faire en sorte que les entreprises en difficulté puissent s'en sortir. Dès lors qu'elles ont choisi le report en arrière des déficits, il faut que les créances sur l'Etat puissent être rapidement recouvrées. Or, comme vous l'avez dit, elles le sont trop tardivement. Ne pourrait-on pas remonter plus en amont, voire à la date du dépôt de bilan ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous allons examiner cette question au cours de la navette. Nous n'en sommes qu'à la première lecture. Nous aurons donc la possibilité d'approfondir les choses. Je ne voudrais pas improviser en séance.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 413.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 329, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 223 U du code général des impôts, il est inséré un article 223 V ainsi rédigé :
    « Art. 223 V. - Le bénéfice des dispositions des articles 223 A à U est plafonné à quatre millions d'euros. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Le régime d'intégration fiscale visé à l'article 223 du code général des impôts autorise les sociétés mères à déduire de leurs bénéfices les déficits qu'elles organisent sur les comptes de leurs filiales. Ce dispositif est aujourd'hui largement mobilisé par les grands groupes. Il permet à quelque 5 000 très grosses sociétés de voir leur impôt sur les sociétés réduit d'environ 40 %. Cette disposition favorise les grands groupes industriels dans leurs opérations spéculatives par rapport aux PME-PMI et a fortiori par rapport aux exploitants individuels qui, eux, restent pleinement soumis à l'impôt.
    Il est donc nécessaire de pénaliser par la fiscalité les stratégies spéculatives et de délocalisation de ces grands groupes, en plafonnant à 4 millions d'euros le bénéfice du régime d'intégration fiscale.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable. Ces réductions sont parfaitement encadrées et définies par la loi, ce ne sont pas des opérations spéculatives.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 329.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 14 n'est pas défendu.
    MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 330, ainsi rédigé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Au début du dernier alinéa du I de l'article 235 ter ZA du code général des impôts, sont insérés les mots : "Pour les personnes morales ayant réalisé un chiffre d'affaires de moins de 10 millions d'euros,. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Cet amendement vise à limiter le bénéfice de la réduction de la contribution sur l'impôt sur les sociétés aux entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 10 millions d'euros. En effet, cette réduction est acceptable pour les petites et moyennes entreprises. Elle est substantielle, puisque la contribution qui est fixée à 10 % de l'impôt sur les sociétés, calculée sur les résultats imposables, est ramenée à 3 % pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée à compter du 1er janvier 2002. Il est normal que les entreprises importantes acquittent cette contribution sur l'impôt sur les sociétés au taux normal.
    Rappelons à cet égard que le taux moyen d'impôt sur les bénéfices des sociétés appliqué dans l'Union européenne est passé d'environ 45 % en 1985 à guère plus de 30 % en 2002. Ce dumping fiscal est injuste et dangereux, et nous proposons que cette tendance soit combattue par l'adoption de cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez. Même avis. C'est toujours le même problème.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 330.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des deputé-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 331, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Le dernier alinéa du I de l'article 235 ter ZA du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Le bénéfice de ces mesures est strictement réservé aux entreprises ayant conclu un accord sur la réduction du temps de travail ou créatrices nettes d'emplois. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Comme vous pouvez le constater, je fais des efforts pour accélérer le rythme, mais je ne suis pas payé en retour par une grande attention portée à mes amendements.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Vous avez notre considération.
    M. Jean-Pierre Brard. La considération, j'y suis très sensible. Mais je n'attendais pas que de la considération : j'attendais de la prise en compte.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Vous aurez tout à l'heure des informations particulières.
    M. Jean-Pierre Brard. Bon ! Doit persévérer. (Sourires.)
    Monsieur le ministre, la polémique sur la réduction du temps de travail à 35 heures, suscitée par les ultra-libéraux qui viennent d'être poussés à rentrer dans le rang par le Président de la République, s'est largement dégonflée. Et le caractère très excessif et infondé des attaques est clairement apparu. M. de Robien a déclaré très justement que la réduction du temps de travail va dans le sens de l'histoire. Le Président de la République a eu tout à fait raison d'exprimer son mécontentement, son courroux, dirai-je, au sujet de l'initiative des députés soi-disant réformateurs de la majorité.
    M. Eric Besson. Encouragés par le Gouvernement !
    M. Jean-Pierre Brard. Bien sûr, le Premier ministre ne s'est pas vanté d'avoir poussé au crime ces « réformateurs », qui s'appellent ainsi par antiphrase parce que, en réalité, comme aurait dit Daumier au XIXe siècle, ce sont les plus réactionnaires, ce ne sont pas les plus réformateurs.
    M. Didier Migaud. C'est vrai !
    M. Jean-Pierre Brard. Dans ces conditions, chacun comprendra que l'existence d'un accord de réduction du temps de travail dans une entreprise est un critère tout à fait pertinent pour ouvrir droit à certains avantages fiscaux bénéficiant aux entreprises.
    Tel est le sens de l'amendement qui vise à conditionner à l'existence d'un tel accord le bénéfice de la réduction à 3 % de la contribution à l'impôt sur les sociétés. Permettez-moi de faire de nouveau référence au Président de la République dans ses conversations d'avant-hier avec les députés de l'UMP,...
    M. Michel Bouvard. Décidément ! Cela devient une habitude.
    M. Jean-Pierre Brard. ... où il a encouragé ceux de nos collègues qui, spontanément, n'étaient pas venus à la raison à retrouver la voie du dialogue social. Dans la mesure où l'amendement conditionne l'attribution d'un avantage fiscal à la conclusion d'un accord, il pousse au dialogue social et je pense, monsieur le ministre, que vous ne pouvez pas être en dissonance avec la pensée présidentielle. (Sourires.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. Didier Migaud. Pourquoi ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. Jean-Pierre Brard. Mais pourquoi ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a repoussé l'amendement parce qu'elle estime que les dispositions fiscales n'ont pas à être liées à des dispositions concernant le temps de travail.
    M. Didier Migaud. Et pourtant...
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. J'ai bien entendu que la commission a dit cela. Mais, au sein de la commission, se trouvent des réformateurs qui ont un ascendant certain et qui ont provoqué un vote majoritaire. Depuis, la parole présidentielle s'est exprimée. Vous qui marchez au sifflet et qui êtes fort disciplinés, puisque vous avez récupéré le centralisme démocratique que vous avez racheté au clou (Rires), soyez au moins fidèles à la quintessence de la pensée présidentielle.
    M. Michel Bouvard. Jean-Pierre Brard en exégète de Jacques Chirac !
    M. Jean-Pierre Brard. Admettez, monsieur le rapporteur général, que, entre le moment où la commission a délibéré d'une façon extrémiste et aujourd'hui, un événement important s'est produit : le Président de la République s'est exprimé.
    M. Michel Bouvard. Et il s'est bien exprimé !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je ne vois pas quelles conséquences en tirer pour l'amendement !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Moi non plus !
    M. Michel Bouvard. Avançons !
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. Il est vrai que les questions que pose à juste titre M. Brard auraient mérité davantage d'explications.
    M. Didier Migaud. Nous sommes en plein dans le sujet !
    M. Eric Besson. Derrière son amendement perce un vrai sujet de discussion : oui ou non, les allégements ou les exonérations sans contrepartie d'emploi sont-ils efficaces ? Il est clair que non. Ainsi, ce que vous avez appelé les « contrats jeunes en entreprises »...
    M. Michel Bouvard. Ils marchent très bien ! Nous vous le démontrerons.
    M. Didier Migaud. On attend la démonstration !
    M. Eric Besson. Vous démontrerez surtout que ce sont des contrats jeunes sans formation et qu'ils offrent, pour l'essentiel, des effets d'aubaine, parce qu'ils sont des requalifications de contrats existants en contrats jeunes en entreprises.
    M. Michel Bouvard. Nos jeunes sont formés dans les entreprises, chez les artisans. Cela marche très bien. Vos emplois jeunes avaient le bac plus cinq ! Là, ce sont des gens qui n'ont pas de formation !
    M. Marc Le Fur. C'est un vrai succès !
    M. Eric Besson. Jean-Pierre Brard a été exceptionnellement bon et généreux en faisant peser l'essentiel de la responsabilité de la polémique, que le Président de la République a jugée à juste titre imbécile, sur les seuls M. Novelli et réformateurs. En effet, monsieur le ministre, vous êtes à l'origine de cette mauvaise polémique, car vous êtes le premier à avoir dit que les 35 heures avaient coûté 15 milliards,...
    M. Michel Bouvard. On ne peut pas dire que c'est gratuit !
    M. Eric Besson. ... avant que M. Mer ne dise 10 milliards et le rapporteur général 7 ou 8 milliards...
    M. Didier Migaud. M. Mer a dit 20 milliards !
    M. Eric Besson. Mme Fontaine a dit joliment, lors d'une émission de télévision, qu'elle ne donnerait pas de chiffres, mais qu'elle était d'accord...
    M. Didier Migaud. Avec tout le monde !
    M. Eric Besson. ... avec tous les chiffres qui avaient été cités.
    M. Michel Bouvard. Elle est très consensuelle !
    M. Eric Besson. Voilà qui en dit long sur la cohérence de la pensée gouvernementale sur ces exonérations liées à l'aménagement du temps de travail. C'est une mauvaise polémique, ouverte par vous-même, monsieur le ministre. C'est si vrai que nous avons dit « chiche » à la commission d'enquête dont le projet était pourtant né dans vos rangs. Nous regrettons que la majorité, probablement sur l'incitation du Gouvernement, n'ait pas donné suite, parce qu'il faudra bien qu'un jour la vérité éclate sur les coûts comparés des allègements Aubry et des allègements Juppé, Balladur ou Fillon. Je profite de l'amendement, fort justifié, de M. Brard, pour demander à tous de ne pas avoir peur d'aller jusqu'au bout de cette mauvaise polémique née de par votre fait, monsieur le ministre, il y a quelques semaines. Aujourd'hui, anesthésiés par le Président de la République, qui a qualifié la polémique d'imbécile, les Français ont le droit de connaître la vérité. Nous voulons comparer les coûts respectifs de ces différents allègements.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Didier Migaud. Nous n'avons pas peur du débat !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Moi non plus. Mais il faudra connaître la vérité financière, et je suis en phase avec ce qu'a dit le ministre des finances. Président du conseil d'administration d'un hôpital et maire, je peux mesurer les conséquences financières des 35 heures, qui rendent impossible de mener bien d'autres actions qui seraient plus utiles pour le pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Marc Le Fur. Très bien !
    M. Didier Migaud. Dans ce cas, acceptez la commission d'enquête !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Si le bilan était aussi positif que vous le dites, la France serait, comme vous le promettiez, à la tête du combat pour la réduction de la durée du travail et toute l'Europe suivrait. Je constate que, à ce jour, aucun des quatorze pays de l'Union européenne ne nous a suivis dans cette voie absurde. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. Je connais l'honnêteté intellectuelle du président de la commission des finances, et aussi son opposition à cette mesure - il ne l'a jamais masquée. Mais notre débat ne porte pas seulement sur l'efficacité des 35 heures - nous acceptons d'en discuter. Le ministre du budget avait suggéré un débat très précis sur le coût des allègements pour les finances publiques. Des chiffres très importants ont été jetés en pâture au public. Ils sont faux, nous voulons le démontrer. Puisque vous êtes si déterminé, monsieur le président de la commission des finances, usez de votre autorité, qui n'est pas mince...
    M. Didier Migaud. Faites-le !
    M. Eric Besson. ... pour que, enfin, nous puissions obtenir toute la clarté sur le sujet et qu'une commission d'enquête - pas une simple mission d'information, dont chacun a bien compris qu'elle a essentiellement pour objet d'enterrer le débat - nous permette d'aller jusqu'au bout.
    Monsieur Méhaignerie, nous ne mettons pas en cause votre sincérité sur le sujet, mais allez au bout...
    M. Didier Migaud. Oui, ne soyez pas centriste !
    M. Eric Besson. ... et donnez-nous la possibilité, avec une vraie commission d'enquête, d'évaluer les 35 heures.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Je voudrais apporter, d'un mot, un petit témoignage. Puisque M. Méhaignerie fait toujours état de son expérience,...
    M. Michel Bouvard. Qui est grande !
    M. Augustin Bonrepaux. ... qu'il me soit permis de faire état de la mienne !
    M. Michel Bouvard. Qui est grande aussi.
    M. Augustin Bonrepaux. Je suis moi-même président d'un conseil général et président du conseil d'administration d'un hôpital. Or je n'ai pas remarqué tous les inconvénients dont parle M. Méhaignerie. Je lui fais remarquer que l'augmentation des impôts dans l'Ariège est inférieure à ce qu'elle est dans l'Ille-et-Vilaine. J'ai les chiffres : plus 9,9 % chez lui, contre plus 6 % en moyenne dans l'Ariège. Ce qui est vrai, par contre, c'est que nous avons créé des emplois, lesquels contribuent - ce n'est pas insignifiant - à la fois au financement de l'Etat et de la sécurité sociale, ainsi qu'à la réduction du chômage. Je comprends que vous cherchiez des prétextes pour justifier votre mauvaise politique, mais n'allez pas les chercher dans une mesure qui a eu des effets positifs, lesquels n'ont d'ailleurs pas tous été mesurés !
    Il m'arrive souvent d'entendre certains comités de tourisme se féliciter des 35 heures, à cause de l'étalement de la saison touristique qu'elles ont permis. Et ce n'est pas toujours dans des départements dirigés par la gauche : j'ai entendu cela dans le Var, dans les Alpes-Maritimes.
    M. Marc Laffineur. Prônez donc les 28 heures !
    M. Augustin Bonrepaux. Quand on aura fait le bilan complet des 35 heures, vous devrez certainement tenir un autre discours !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud. Mais essayez, chers collègues, autant que faire se peut, de vous limiter à un orateur par groupe.
    M. Didier Migaud. Oh, ce sera très rapide, monsieur le président. Puisque le président de la commission des finances s'est exprimé sur les 35 heures et qu'il a donné son point de vue sur la commission d'enquête, je lui pose une question précise : soutiendrez-vous avec nous, monsieur le président de la commission, dès mardi prochain, une proposition de création d'une commission d'enquête à l'Assemblée nationale sur le coût des 35 heures ? Oui, ou non ?
    M. Lucien Guichon. Mais on ne parle plus de l'amendement !
    M. Michel Bouvard. C'était quoi déjà, l'amendement ?
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne pensais pas, monsieur le président, déclencher avec mon amendement une confrontation aussi intéressante. J'ai été étonné de l'ire subite du président de la commission des finances. Nous n'avons pas reconnu l'homme placide et paisible que nous connaissons habituellement. C'est à croire qu'il a été choqué par la remarque du Président de la République avant-hier. Très habilement, il n'a pas souligné son désaccord avec le Président de la République mais son accord avec le ministre, lequel est pourtant censé partager le point de vue du Président de la République, même si, dans son propos de mardi, il avait dit le contraire ! (Sourires.)
    En fait, nous sommes à fronts renversés. Nous avons voté pour le Président de la République au mois de mai 2002.
    M. Marc Laffineur. Vous avez bien fait !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous l'avons soutenu dans ses positions sur l'Irak, à la différence du fan club de M. Madelin qui a été « anschlussé » dans le cadre de l'UMP. Le Président de la République condamne le pacte de stabilité européen et dit, avec d'autres, que c'est une idiotie. Pourtant, on a entendu des propos tout à fait contradictoires à ce sujet. Quant aux 35 heures, je ne reviendrai pas sur les déclarations du Président. Je pense qu'il a peut-être plus de sens politique que certains d'entre vous,...
    M. Didier Migaud. Sûrement !
    M. Jean-Pierre Brard. ... ou qu'en tout cas, il est doué d'un plus grand sens de la prudence et mesure mieux ce que le peuple français est capable de supporter face aux excès de certains extrémistes de l'UMP.
    Il faut apaiser le débat.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il l'est !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous allons y contribuer, vous allez voir. Il faut apaiser et il faut objectiver. A partir du moment où l'on est dans l'objectif, on n'est plus dans la passion, monsieur le ministre. Car les passions débordent, parfois. Oh, je sais que dans le bocage, on est gens raisonnables, n'est-ce-pas ? Mais si on veut objectiver, monsieur le ministre, créons la commission d'enquête qu'il est proposé de mettre sur pied.
    M. Didier Migaud. Oui ou non, êtes-vous d'accord pour la créer ?
    M. Jean-Pierre Brard. Vous savez, une commission d'enquête, chacun en a ici l'expérience, c'est comme les rayons X : elle permet de bien voir ce qu'il y a et ce qu'il n'y a pas. De cette manière, le débat serait clos et je pense que nous serions fidèles à l'inspiration présidentielle, qui souhaite aussi calmer les ardeurs au sein de l'UMP. Et c'est très important, parce qu'on ne peut pas considérer que les propos déraisonnables qui ont été tenus sur les 35 heures par nombre d'entre vous, mes chers collègues, n'aient été inspirés que par des soucis politiciens. C'est plutôt, à mon avis, parce que vous étiez dans l'erreur, par déficit d'information et de connaissance du réel. Faisons cette commission d'enquête, et à ce moment-là nous aurons les vrais chiffres, qui sont sûrement très proches de ceux rapportés cette semaine par Martine Aubry dans son interview au Parisien.
    M. Didier Migaud. Tout à fait ! Alors, commission d'enquête ou pas ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Puisque M. Besson s'est tourné vers moi, je vais lui répondre. Je ne sais pas s'il a, lui, la possibilité, avant une interview, d'imposer leurs questions aux journalistes, mais pour ma part, je n'y suis jamais parvenu. Et en l'occurrence, lorsque j'ai été amené à m'exprimer sur le coût des 35 heures, c'était en réponse à la question qu'un journaliste m'a posée lors d'une émission télévisée - qu'il vous est d'ailleurs possible de visionner si vous souhaitez vérifier. Je n'ai en aucune façon souhaité traiter de ce sujet. J'ai simplement répondu à une question.
    M. Eric Besson. C'est une faible circonstance atténuante, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Ce n'est pas une circonstance atténuante, c'est une circonstance...
    M. Jean-Louis Idiart. Aggravante !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... factuelle.
    Et je vais vous dire les raisons pour lesquelles je chiffre le coût des 35 heures comme je l'ai fait. Je me fonde sur vos chiffres, figurez-vous, même si je conçois bien que cela vous gêne. Pour résumer, parce que l'heure n'est plus à parler de ces sujets, je trouve 8 milliards au titre des recettes des cotisations sociales, du fait des mécanismes dits « Aubry I » et « Aubry II » ; je trouve 2 milliards au titre des coûts de fonctionnement de la fonction publique, dont près de 1,9 milliard pour les seuls hôpitaux ; et puis je m'en vais consulter les comptes du programme de stabilité déposé par le précédent gouvernement, celui que vous souteniez, auprès des autorités européennes en 2001, et qui, lui, chiffrait les sommes à débourser pour compenser le surcoût imposé aux entreprises entre 2003 et 2005 à 7 milliards d'euros. Au total, 8 plus 2, plus 7, cela fait 17 milliards. Dans ma grande bonté, je n'avais parlé que de 15 milliards. Vous voyez comme j'ai été gentil. Je suis bien mal récompensé aujourd'hui.
    M. Jean-Pierre Brard. Mal récompensé par le Président de la République ! Quelle ingratitude !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Avant de demander la parole, monsieur Besson, laissez-moi vous parler d'un exercice clos, celui de l'année 2002. Cet exercice 2002, pour nos comptes publics, a abouti à un déficit légèrement supérieur à 3 % du PIB. Eh bien, ce n'est pas abuser que de dire que s'il n'y avait pas eu le coût des 35 heures, nous n'aurions pas dépassé le seuil des 3 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Didier Migaud. Ce n'est pas vrai !
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. Monsieur le président, le sujet est tout de même trop grave pour qu'il puisse être traité de cette façon-là. Si on vous entend bien, monsieur le ministre - et c'est très intéressant parce que c'est la première fois que vous vous efforcez de détailler les chiffres que vous aviez annoncés publiquement -,...
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le détail est dans Le Parisien.
    M. Eric Besson. ... vous faites entrer en ligne de compte à la fois le coût passé et le coût futur de la mesure.
    Vous nous annoncez les coûts éventuels pour les trois prochaines années. Et vous expliquez le déficit actuel par le coût de ces trois prochaines années ! C'est une première chose.
    Deuxièmement que nous dites-vous des cotisations sociales apportées par les créations d'emplois ? En quoi ont-elles, ou pas, diminué les coûts de la protection sociale ? Vos services ont-ils procédé à des estimations chiffrées ? Nous avons, nous, nos chiffres.
    Mais, de toute façon, encore une fois, pour sortir de l'ambiguïté sur un sujet qui est trop important - je pense aux 35 heures elles-mêmes mais aussi, de façon plus globale, au coût et à l'efficacité comparée des allégements -, pouvez-vous, monsieur le président de la commission des finances, répondre à la question que Didier Migaud et moi-même nous vous posons de façon très précise : étant donné ce qu'ont été vos déclarations il y a un instant, êtes-vous prêt, oui ou non, à soutenir notre demande de création d'une commission d'enquête ?
    M. Didier Migaud. La question est claire, la réponse doit l'être aussi !
    M. Eric Besson. J'espère, monsieur le président, que vous allez dire « oui ». Cela simplifierait beaucoup la tâche.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission, après quoi nous passerons au vote.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Oui, je suis prêt à la transparence financière,...
    M. Didier Migaud. A la création d'une commission d'enquête ?
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... à la clarification des comptes. Que ce soit par une voie ou par une autre, je ne suis pas le seul à en décider.
    M. Didier Migaud. Nous aiderez-vous à obtenir la création d'une commission d'enquête ?
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Mais la transparence financière, la clarification des comptes et la comparaison européenne doivent faire partie du débat démocratique des prochains mois.
    M. Didier Migaud. Nous aiderez-vous à obtenir la création d'une commission d'enquête ?
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 331.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 107, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Le deuxième alinéa du I de l'article 235 ter ZC est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Toutefois, cette fraction est égale à 5,5 % pour les exercices clos à compter du 1er janvier 2003. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Très intéressant, ce débat sur les 35 heures, monsieur le ministre.
    M. Didier Migaud. Et éclairant !
    Mme Muguette Jacquaint. Eclairant, en effet. Et je pense moi aussi qu'il faut vraiment créer une commission d'enquête. Parce qu'il se dit tout et n'importe quoi.
    Mais ce qui se dit principalement, c'est quand même, d'une manière générale, que les Français ne veulent plus travailler.
    M. Didier Migaud. Ils veulent travailler !
    Mme Muguette Jacquaint. Nous pourrions avoir un long débat sur ce sujet. Mais alors même qu'ils veulent travailler, vous trouvez des formes d'emploi qui vont réduire encore le nombre d'heures de travail, puisque vous inventez un RMA à vingt heures ! Quand même ! Il y a là des contradictions qu'il nous semble nécessaires de souligner.
    M. Didier Migaud. Et le chômage augmente !
    Mme Muguette Jacquaint. Notre amendement n° 107 entend relever le niveau de la contribution sociale à laquelle sont assujettis les redevables de l'impôt sur les sociétés. Grande question ! L'article 235 ter ZC du code général des impôts dispose que : « Les redevables de l'impôt sur les sociétés sont assujettis à une contribution sociale égale à une fraction de cet impôt calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés au I de l'article 219 et diminué d'un abattement qui ne peut excéder 763 000 euros par période de douze mois. Lorsqu'un exercice ou une période d'imposition est inférieur ou supérieur à douze mois, l'abattement est ajusté à due proportion. La fraction mentionnée au premier alinéa est égale à 3,3 % pour les exercices clos à compter du 1er janvier 2000. »
    Il n'est pas besoin de revenir - puisque les ministres l'évoquent tous les jours dans leurs déclarations à la presse - sur la situation calamiteuse des finances publiques et sur l'ampleur du déficit budgétaire prévu pour l'exercice. Il apparaît donc tout à fait opportun de dégager des recettes supplémentaires - des recettes qui ne soient pas toujours prises sur les mêmes, sur ceux dont les revenus sont déjà, malheureusement, assez minces et se réduisent comme peau de chagrin tous les jours -, notamment pour préserver et améliorer le niveau et la qualité des services publics dans notre pays. Voilà les raisons de notre amendement. Je crois qu'il propose un moyen judicieux d'obtenir des recettes plus importantes, de manière à répondre aux besoins des populations de notre pays.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable pour les raisons que j'ai évoquées tout à l'heure. Le taux de l'impôt sur les sociétés en France est actuellement l'un des plus élevés d'Europe, sinon le plus élevé. Si nous voulons éviter des délocalisations qui seraient néfastes à l'emploi dans notre pays, il faut être très vigilant et ne pas augmenter ce taux.
    Mme Muguette Jacquaint. Eviter les délocalisations ? Tu parles !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    Mme Muguette Jacquaint. Le coût du travail est trop cher, c'est ça que vous voulez dire ?
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je pense qu'il faut arrêter de répéter tout le temps les mêmes choses sans les démontrer.
    D'abord, vous le savez bien, c'est la totalité des prélèvements qui compte.
    Ensuite, comment allez-vous faire croire que nos entreprises sont en difficulté ou que l'économie nationale est en difficulté alors que nous sommes le quatrième exportateur mondial ?
    M. Didier Migaud. Le deuxième pays d'accueil des investissements étrangers !
    M. Jean-Pierre Brard. Deuxième pays d'accueil, après la Chine, des investissements étrangers. Cela, ce sont des faits.
    M. Didier Migaud. Et Paris est la deuxième place financière d'Europe derrière Londres !
    M. Jean-Pierre Brard. Le Monde du 8 octobre dernier a publié un article de Dominique de Villepin - j'en parle parce qu'il faut faire référence à ceux qui, parmi vous, ont la fibre patriotique. J'espère que vous l'avez lu, mais je n'en suis pas sûr, parce que j'ai remarqué que vous n'aviez pas lu le projet « Alternance 2002 », et je me demande si vous ne passez pas parfois, chers collègues de l'UMP, à côté des textes essentiels qui devraient pourtant vous guider dans votre réflexion. Cela vous éviterait parfois des dérapages qui vous valent des critiques légitimes de la part de votre inspirateur.
    M. Didier Migaud. Ils sont amorphes !
    M. Jean-Pierre Brard. Dominique de Villepin vous dit en substance : Cessez de vous tirer des balles dans le pied.
    M. Didier Migaud. Bien sûr !
    M. Jean-Pierre Brard. Protégez l'image de la France et arrêtez de critiquer d'une façon illégitime, et d'essayer de démoraliser le peuple français pour atteindre vos objectifs mesquins.
    M. Marc Laffineur. Vous ne démoralisez pas les chefs d'entreprise, vous ?
    M. Didier Migaud. Le Président de la République y a contribué, malheureusement !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce sont là les contradictions internes qui alimentent les rapports dialectiques.
    Pour en revenir à Dominique de Villepin, non seulement son article est fort bien écrit, dans un français châtié, mais les idées qui y sont développées sont tout à fait intéressantes. Je vous invite, vous qui êtes bien placés auprès du Gouvernement, mes chers collègues, à demander à M. Lambert qu'il demande à M. de Villepin de lui donner quelques photocopies. Et peut-être pourriez-vous mettre à profit une des coupures auxquelles nous sommes habitués le soir pour obtenir, dans l'immeuble d'à côté, un entretien particulier afin que M. de Villepin vous convainque de la justesse de ses opinions et de la dangerosité d'une critique systématique de ce qui se fait dans notre pays.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Puisque Jean-Pierre Brard se plaint de ne pas avoir d'éléments précis, j'ai sous les yeux le tableau comparatif des taux moyens effectifs d'imposition dans les pays européens. Il s'agit de la moyenne de tous les impôts qui figurent dans le compte d'exploitation de l'entreprise. En 2002, ce taux moyen était, en France, de 34,7 % ; en Belgique, de 34,5 % ; en Grande-Bretagne, de 28,3 % ; en Italie, de 27,6 % ; aux Pays-Bas, de 31 % ; en Espagne, de 31 % ; en Irlande - dont je parlais tout à l'heure -, de 10,5 % ; et en Suède, de 22,9 %. Il est vrai que les différences ne sont pas toujours très importantes, mais nous sommes bien dans la partie haute de ce tableau. Nous devons donc être très vigilants.
    Quant à l'argument selon lequel beaucoup de capitaux affluent en France, il faut y regarder de plus près. On constate en effet qu'ils visent en fait à prendre le contrôle d'un certain nombre d'entreprises françaises. Et une fois ce contrôle acquis, cela se passe très mal pour l'emploi. Il faut donc manier ces statistiques avec beaucoup de précaution.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Carrez a présenté un amendement, n° 393, ainsi rédigé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « I. - Au début de la première phrase du premier alinéa du 4 de l'article 238 bis du code général des impôts, les mots : "La déduction mentionnée au 1 peut être effectuée, dans la limite prévue au premier alinéa du 2, pour sont remplacés par les mots : "Ouvrent également droit, et dans les mêmes conditions, à la réduction d'impôt prévue au 1,.
    « II. - Les dispositions du I s'appliquent aux versements effectués au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2003. »
    La parole est à M. Gilles Carrez.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 393.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 167, ainsi rédigé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 242 bis du code général des impôts est rétabli dans le texte suivant :
    « Art. 242 bis. - Sans préjudice des dispositions des articles 57 et 238 A, les charges de toute nature payées ou dues par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France et qui y sont soumises à un régime fiscal privilégié ne sont admises comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt que si elles ont été mentionnées d'une manière détaillée, précise et exacte dans le cadre d'une déclaration spécifique remise à l'administration fiscale, en même temps que la déclaration de leurs résultats et que si celle-ci n'en a pas rejeté le bien-fondé dans un délai de six mois. »
    « II. - Les dispositions du I s'appliquent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2004. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Cet amendement vise à renforcer la transparence indispensable en matière de déduction des charges pour l'établissement de l'impôt et à donner au fisc les moyens d'éviter l'évasion fiscale. Et, de ce point de vue, monsieur le ministre, on ne dira jamais assez la qualité des fonctionnaires de votre ministère et leur sens de l'Etat et du service public. Toutefois, il dépend de la volonté politique de leur donner les marges pour être plus opérationnels et plus efficaces, parce que, à leur grand dam, il leur arrive souvent de ne pas pouvoir aller jusqu'au bout de leur zèle républicain pour remplir les caisses de l'Etat, parce que vous les bridez dans la libération de leur énergie. (Sourires.)
    Cet amendement prévoit que les charges versées par des entreprises implantées dans des paradis fiscaux ou bénéficiant de régimes fiscaux privilégiés ne seront dorénavant déductibles que si leur montant a été communiqué à l'administration fiscale, dans le cadre d'une présentation détaillée, versement par versement, sous une forme similaire à celle des mentions expresses, au moment de la déclaration des bénéfices de la société - ou de la déclaration de revenus, pour les sociétés transparentes -, et que si l'administration n'en a pas rejeté le principe dans un délai de six mois, sans préjudice d'une éventuelle remise en cause de la déductibilité en cas de renseignements erronés ou inexacts.
    Evidemment, nous ne sommes pas naïfs au point de penser que ceux qui volent l'Etat français sont prêts à devenir honnêtes du jour au lendemain. En revanche, l'adoption d'un tel amendement présenterait l'intérêt d'accroître les capacités de l'administration pour pénaliser ceux qui auraient triché.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable, dans la mesure où les dépenses auxquelles fait allusion M. Brard sont très précisément définies par le code général des impôts et, de ce fait, parfaitement contrôlées par l'administration. Les risques de dérapages sont inexistants.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vais confirmer les propos du rapporteur général pour que ne subsiste aucune ambiguïté : le Gouvernement est attaché à lutter contre les paradis fiscaux.
    Comme vous le savez certainement, monsieur Brard, puisque vous n'ignorez rien de ces sujets, le droit de déduire les commissions, courtages et autres rémunérations versés à tiers, établis ou non dans des paradis fiscaux, est d'ores et déjà subordonné à l'obligation de les mentionner sur une déclaration spéciale.
    Les services de vérification de la direction générale des impôts - vous avez salué la qualité de leur travail et je le fais à mon tour - sont depuis longtemps mobilisés pour contrôler ces versements à destination des paradis fiscaux. Ils sont dotés, comme vient de l'indiquer le rapporteur général, des outils nécessaires à l'exercice de ce contrôle, notamment au travers de l'article 238 A du code général des impôts.
    J'observe que le principe de la non-déductibilité qui est posé par votre amendement serait, hélas ! très facilement contourné en ayant recours à un établissement financier ou à une société installée dans un pays tiers, qui procéderait, pour le compte des entreprises françaises, aux reversements litigieux dans les paradis fiscaux.
    L'instrument que vous proposez d'ajouter à celui qui existe déjà n'apporterait rien de plus, car ce dernier est suffisamment performant pour que nos services puissent lutter contre les paradis fiscaux.
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. Je souhaite revenir un instant sur la remarque du rapporteur général relative aux investissements étrangers en France.
    J'aimerais beaucoup, monsieur Carrez, que vous nous donniez davantage de précisions sur ce que vous nous avez dit. Si j'ai bien compris, selon vous, l'essentiel des investissements étrangers en France seraient inquiétants.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pas l'essentiel : une partie significative.
    M. Eric Besson. Soit.
    J'ai l'impression que rien n'est jamais bon pour l'économie française : quand l'euro est faible, c'est une mauvaise nouvelle, mais quand il est fort, c'en est également une ; quand les étrangers n'investissent pas dans notre pays, c'est la preuve de la non-compétitivité de celui-ci, mais quand ils y investissent - et la France est au deuxième rang mondial en la matière -, c'est une mauvaise nouvelle car nos entreprises passent sous contrôle étranger et des emplois sont détruits. Quand aurons-nous de bonnes nouvelles pour l'économie française ?
    En tout état de cause, au-delà de la boutade, j'aimerais beaucoup, monsieur le rapporteur général, que vous nous indiquiez, soit maintenant, soit plus tard dans la discussion, sur quelles études vous vous êtes appuyé pour dire que les investissements étrangers en France pouvaient être considérés, pour une bonne partie d'entre eux, comme étant plutôt inquiétants que rassurants et comme étant plutôt destructeurs que créateur d'emplois.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Les études en la matière sont assez contradictoires et elles mériteraient d'être analysées plus en profondeur.
    Il est vrai que la France est le deuxième pays au monde pour les investissements étrangers. Cela dit, j'ai pu constater que les tableaux de l'Agence pour les investissements internationaux, l'AFII, mentionnaient les créations d'emplois dus à des investissements étrangers, les extensions,...
    M. Michel Bouvard. Tout mélangé !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... mais jamais les suppressions d'emplois résultant du désengagement d'investisseurs étrangers. Ainsi, pour mon département, si la création de plus de 400 emplois - sur trois ans, il est vrai - par la société Visteon était signalée, il n'y avait rien sur la suppression de 1 000 emplois par Mitsubishi téléphones portables ou sur celle d'emplois par la société Kenwood et d'autres compagnies.
    Une étude complémentaire beaucoup plus fouillée s'avère donc nécessaire.
    Vous avez raison de souligner que nos coûts sont compétitifs. Toutefois, la rigidité excessive des règlements en France et leur multiplicité sont un facteur de difficultés. J'ai cité le cas de l'entreprise Nestlé qui, devant investir en Europe, a choisi la Suisse, pays où le coût horaire du travail est très élévé,...
    M. Michel Bouvard. C'est normal qu'elle ait choisi la Suisse, c'est une société suisse !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... plutôt que la France ou l'Allemagne, pays où les rigidités réglementaires empêchent toute capacité d'adaptation rapide. Or cette société peut être amenée à procéder à des adaptations rapides, exigeant parfois la fermeture d'unités.
    Il s'agit d'un vrai problème. Toutefois, pour éviter de poser un faux diagnostic et, donc, de proposer de mauvais remèdes, nous avons tout intérêt à approfondir la question en détail.
    M. Eric Besson. J'en suis d'accord.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 167.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. de Courson a présenté un amendement, n° 191, ainsi rédigé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans le b de l'article 787 C du code général des impôts, après les mots : "de conserver l'ensemble des biens affectés à l'exploitation de l'entreprise, sont insérés les mots : "ou en cas de cession d'éléments affectés à l'exploitation de l'entreprise d'utiliser les sommes en réemploi des éléments cédés, et les mots : "6 ans sont remplacés par les mots : "5 ans.
    « II. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Gilbert Gantier, pour soutenir cet amendement.
    M. Gilbert Gantier. Cet amendement d'ordre technique est extrêmement intéressant.
    L'article 787-C du code général des impôts prévoit qu'une entreprise qui a bénéficié d'un avantage fiscal ne peut pas céder une partie de ses actifs d'exploitation pendant une durée de six ans, ce qui semble parfaitement normal. Toutefois, il y a là une rigidité qui peut être préjudiciable à son bon fonctionnement.
    Aussi, pour éviter cette rigidité, M. de Courson propose de maintenir l'interdiction de céder une partie du capital, mais introduit une obligation de réemploi en cas de cession d'un élément de l'actif pendant un delai de cinq ans. Il est évident que, si un procédé de fabrication devient obsolète, on doit pouvoir le remplacer par un autre. C'est tout à fait logique et c'est la raison pour laquelle j'estime que l'amendement de M. de Courson est tout à fait justifié.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement ; elle pensait d'ailleurs que Charles de Courson l'avait retiré.
    Cet amendement concerne ce que, dans le jargon, on appelle le pacte Migaud-Gattaz.
    M. Eric Besson. Vous nous avez déjà fait ce coup ! N'en abusez pas !
    M. Patrice Martin-Lalande. Il faut assumer !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ce pacte, qui a été mis en place en 1999 ou en 2000 pour faciliter les successions d'entreprises, a figé pour une durée de six ans l'actif du bilan des entreprises concernées en contrepartie de l'avantage fiscal accordé.
    Il n'y a pas lieu de réduire cette durée, parce que le but de ce dispositif est de conserver une stabilité de l'actionnariat de l'entreprise. En revanche, vous avez raison, monsieur Gantier, de souligner la nécessité de faire vivre l'actif de l'entreprise. Aussi, je tiens à vous indiquer que cette question est résolue par une instruction fiscale : certains éléments de l'actif peuvent être cédés au cours de la durée de six ans, mais les actionnaires, eux, restent liés par cette durée.
    M. le président. La parole est à M. Gilbert Gantier.
    M. Gilbert Gantier. L'explication de M. le rapporteur général me satisfait pleinement. Je tenais surtout à éviter une rigidité préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise. Si une instruction fiscale permet de procéder au remploi d'une partie du capital, de telle sorte qu'on puisse, pour reprendre l'exemple que j'ai déjà donné, remplacer un procédé obsolète par un procédé plus moderne, l'amendement n'a plus de raison d'être, et je pense que je peux le retirer.
    M. le président. L'amendement n° 191 est retiré.
    MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 285, ainsi rédigé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Les sociétés dont le dernier exercice clos est bénéficiaire et qui procèdent à des licenciements au motif visé à l'article 321-1 du code du travail sont assujetties à un taux exceptionnel de l'impôt sur les sociétés, porté à 50 % pour une durée de trois ans. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le ministre, votre gouvernement - en particulier avec la loi Fillon - n'a pas tardé à vider de tout son contenu la loi de modernisation sociale, qui concernait les licenciements économiques. Je rappelle que, lors de la discussion de ce texte, nous avions proposé des mesures pour que l'on puisse s'opposer aux licenciements boursiers, car tout démontre que c'est souvent la vraie nature des licenciements.
    Alors, au moment où - personne ne peut le nier - les plans de licenciements dégringolent comme les feuilles mortes en automne, il faudrait prendre des mesures pour permettre la négociation, ce qui irait, d'ailleurs, dans le sens de ce que ne cesse de dire le Gouvernement. Encore faut-il avoir la volonté de négocier avec le souci de l'intérêt du développement industriel et de l'emploi, ce qui n'est pas la préoccupation actuelle du Gouvernement, qui ouvre, au contraire, de nouvelles possibilités de déroger aux principes du travail, dans un sens défavorable aux salariés, et dans un domaine où le chantage patronal - même si le terme vous déplaît - est monnaie courante. Et - ce qui est particulièrement grave - cela accroît encore les inégalités et l'arbitraire sur le terrain, et porte un coup à l'ordre public social et au rôle central des négociations dans les relations sociales.
    M. le Premier ministre ne s'est pas arrêté là, c'est-à-dire à la loi Fillon, et semble même provoquer des épidémies de licenciements. Aussi, pour les arrêter, on a nommé un « Monsieur Licenciements ». Le MEDEF s'était d'ailleurs ému du risque d'interventionnisme qui pouvait en découler. Mais M. le baron Seillière peut être rassuré : le nombre des licenciements économiques continue de s'envoler et les moyens de ce « Monsieur Licenciements » sont ridicules, puisque, après plusieurs mois de démarches laborieuses, il n'a pour l'épauler dans sa tâche que trois fonctionnaires et une secrétaire.
    L'amendement que nous vous proposons prévoit une majoration de l'impôt sur les sociétés applicable aux entreprises ayant procédé à des licenciements pour motif économique au cours d'un exercice bénéficiaire. Cette proposition est par ailleurs confortée par le rapport du Conseil d'analyse économique placé auprès du Premier ministre, qui a été publié le 9 octobre dernier et dont les auteurs estiment qu'« il faut responsabiliser les entreprises et les obliger à payer le coût social que leurs décisions de licenciement imposent à la collectivité ».
    Par cet amendement, le groupe communiste et républicain entend lutter plus efficacement contre la multiplication des licenciements économiques abusifs et destinés à augmenter la valeur boursière des entreprises. Les licenciements chez Metaleurop en sont un exemple, mais ce n'est pas le seul. Nous voulons combattre ces licenciements économiques abusifs, qui sont préjudiciables au développement économique de notre pays et à sa croissance.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable.
    Madame Jacquaint, il ne faut pas que la défiance envers les entreprises et la volonté de les réprimer deviennent un réflexe. On peut aussi leur faire confiance. Souvenons-nous du grand débat qu'avait suscité, il y a quelques années, l'amendement dit « amendement Michelin ». A cette époque, l'entreprise Michelin avait pris la décision de licencier alors qu'elle faisait des bénéfices. Or, que constate-t-on quelques années plus tard ? Comme elle le fait depuis sa création, cette entreprise a investi ses bénéfices dans la recherche et l'innovation, ce qui lui a permis de créer plusieurs milliers d'emplois au cours de ces dernières années. C'est actuellement l'une des entreprises les plus performantes sur l'ensemble des marchés mondiaux.
    M. Michel Bouvard. C'est vrai !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Une entreprise a besoin de faire des bénéfices pour innover, promouvoir la recherche et investir. Car les recherches d'aujourd'hui font les investissements de demain et les emplois d'après-demain, il ne faut pas l'oublier, madame Jacquaint.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Eric Besson.
    M. Eric Besson. J'ignore si la question qui a été posée à juste titre par notre collègue communiste appelle ce type de réponse, mais elle a le mérite de susciter un débat.
    Pensez-vous, oui ou non, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, qu'il faille tenir compte de ce qu'on pourrait appeler le comportement d'emploi de l'employeur ? Ou faut-il renvoyer, comme c'est régulièrement le cas, sur la collectivité - Etat ou organismes de protection sociale -, la responsabilité de traiter les conséquences malheureuses de la gestion des entreprises ?
    Vous dites, monsieur le rapporteur général, que notre collègue communiste a tort de poser la question en ne songeant qu'à sanctionner les entreprises. Je voudrais tout de même vous rappeler que l'expression « patrons voyous » n'a pas été inventée par la gauche. Elle a été popularisée dans le débat public par des dirigeants qui sont au sommet de l'Etat !
    Je vous indiquais tout à l'heure, monsieur le ministre, que nous ne comprenons pas toujours quelle est votre politique fiscale, quelle est votre conception de l'impôt en France, pour aujourd'hui et pour les années qui viennent. Eh bien, il en va de même pour ce qui est du traitement par le Gouvernement de la loi de modernisation sociale. Lorsque cette loi a été votée, dans un contexte que tout le monde a encore à l'esprit, la droite a prétendu qu'elle allait empêcher de créer et de développer des entreprises en France. Si bien que le ministre Fillon...
    M. Michel Bouvard. Excellent ministre !
    M. Eric Besson. ... a choisi de suspendre l'application de certains des articles de ce texte pendant une période de dix-huit mois, commettant au passage une erreur fondamentale.
    M. Michel Bouvard. Non !
    M. Eric Besson. Si, parce que, en ouvrant cette « fenêtre » de dix-huit mois, il a incité de fait à multiplier les plans sociaux. Ne nous leurrons pas, sachant ce qui se passerait au terme de ces dix-huit mois, les chefs d'entreprise qui pouvaient envisager d'éventuelles restructurations et des plans sociaux - je ne me place pas d'un point de vue moral - avaient un intérêt objectif à anticiper. Les vannes des plans sociaux ont bien été ouvertes : on le voit aujourd'hui.
    Il ne faut donc pas accuser notre collègue communiste de faire preuve d'archaïsme en la matière !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'ai parlé de suspicion quelque peu systématique !
    M. Eric Besson. Je n'ai pas votre sens inné de la nuance, monsieur le rapporteur général.
    Aujourd'hui, le Premier ministre parle d'un droit au reclassement, ajoutant que, prochainement, serait présentée une loi pour l'emploi. Imaginez ce qui se serait passé, si, sous la législature précédente, nous avions proposé une loi sur l'emploi : on nous aurait accusés de ne rien comprendre aux mécanismes de l'économie et de l'emploi ! Comme si une loi pouvait régler le problème de l'emploi. En tout cas, c'est un Premier ministre libéral qui le dit.
    Il ajoute que les salariés victimes de plans sociaux devraient bénéficier d'un droit au reclassement, oubliant au passage que le droit au travail, figurant dans le Préambule de notre Constitution, appartient déjà à notre bloc constitutionnel. Mais il va plus loin, suggérant de nous acheminer vers un droit au reclassement.
    Le Premier ministre met donc tous ces éléments sur la table.
    Notre collègue communiste vous a interrogé, à juste titre, monsieur le ministre, sur les suites que vous comptez donner à la situation actuelle, où le nombre des plans sociaux augmente en France. Vous pourrez bien sûr répondre que, sur le plan technique, cela ne concerne pas l'impôt sur les sociétés. Mais nous aimerions vous entendre sur la philosophie du Gouvernement en ce domaine.
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le ministre, j'ai bien entendu votre réponse.
    Nous n'avons pas été les premiers à parler des « patrons voyous », expression que vous ne m'avez jamais entendue prononcer.
    Durant la dernière période, nous avons assisté à une multiplication des plans sociaux.
    Prenons un exemple d'actualité : le groupe Alstom. On ne peut soupçonner son ancien PDG, M. Suard, d'être communiste.
    M. Jean-Louis Idiart. Il n'y a pas de risque !
    M. Patrice Martin-Lalande. Certains cachent bien leur jeu !
    Mme Muguette Jacquaint. Comment le groupe Alstom, fleuron en matière d'énergie et de transports, a-t-il pu frôler la faillite totale ?
    Alors que j'étais déjà députée, M. Suard ne voulait pas entendre les élus locaux, dont j'étais, qui annonçaient que la stratégie d'Alstom conduisait directement le groupe dans le mur.
    Que dit M. Suard aujourd'hui ? Que la stratégie qui a été celle du groupe Alstom pendant des années conduisait à tout faire pour augmenter les produits financiers, abandonnant tout ce qui était recherche, formation, développement de l'activité.
    Dans ces conditions, monsieur le ministre, vous ne pouvez me reprocher de tenir certains propos alors que certains patrons eux-mêmes, responsables, qu'on le veuille ou non, de la situation, font leur autocritique. Le drame est qu'ils ne feront pas les frais de cette situation : ceux qui en pâtiront seront, dans leur grande majorité, les salariés. En fait, c'est l'avenir de ce fleuron qu'est le groupe Alstom qui en sera affecté.
    Quand ces messieurs les patrons ont fait des erreurs de gestion, on devrait réussir à les leur faire payer.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 285.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Liberti, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 286, ainsi rédigé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Les sociétés dont le dernier exercice clos est bénéficiaire et qui procèdent à des licenciements au motif visé à l'article 321-1 du code du travail sont tenues de rembourser le montant des allègements, exonérations de charges sociales ou aides publiques de toute nature perçus au cours des cinq exercices précédant lesdits licenciements. »
    Cet amendement procède du même esprit que le précédent. N'est-ce pas, monsieur Brard ?
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, quand l'esprit est là, on a déjà fait une grande partie du chemin. Mais à nous, qui sommes matérialistes, l'esprit ne saurait suffire, même si nous en sommes largement inspirés. (Sourires.)
    Monsieur le ministre, la France est entrée dans une période très préoccupante du point de vue économique et social. Les événements internationaux ont certainement une incidence, mais il serait insuffisant de s'arrêter à cette analyse, l'international devenant souvent un prétexte. Il convient aussi de s'intéresser aux conséquences de la politique de l'actuel gouvernement, qui a les yeux fixés sur les rives outre-Atlantique, espérant qu'enfin le soleil ne se lève plus à l'est, mais à l'ouest.
    L'attaque en règle contre les lois relatives à la réduction du temps de travail offre à cet égard une parfaite illustration. Jamais acceptée par le MEDEF, combattue par la droite, cette avancée sociale est la cible actuelle de la majorité, qui veut lui faire supporter tous les maux de notre société et mieux masquer les effets dramatiques de sa politique en direction des salariés, des chômeurs et des précaires au profit des nantis.
    Ainsi la récession, le déficit budgétaire, l'asphyxie des hôpitaux, les conséquences de la canicule de l'été 2003, l'augmentation du chômage : tout cela, c'est la faute aux 35 heures, tout comme l'augmentation de la fiscalité locale, que vous avez évoquée avant-hier.
    Mme Muguette Jacquaint. Ils ont parlé du « cataclysme » des 35 heures !
    M. Jean-Louis Idiart. Elles ont sans doute aussi provoqué le retour d'un gouvernement de droite ! (Rires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous laisse, monsieur le ministre, le soin d'apprécier si vous devez effectivement votre retour aux 35 heures.
    Peut-être le devez-vous plutôt à la baisse des impôts.
    Vous savez bien qu'ici il y a le pluralisme. Vous ne voulez voir qu'une tête mais, ici, on discute et on discutait déjà sous la majorité plurielle. Vous avez fabriqué l'UMP et l'on verra combien de temps elle durera.
     M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il y a l'UDF !
    M. Jean-Pierre Brard. Je sais bien qu'il y a l'UDF, mais c'est une façon de parler car ses représentants brillent par leur absence !
    M. Jean-Louis Idiart. Ils ont été privatisés !
    M. Jean-Pierre Brard. J'en reviens au sujet, monsieur le président.
    On a beau chercher, personne ne s'interroge à droite sur les exonérations fiscales en tout genre, ni sur l'attitude du patronat et sur sa part de responsabilité dans la dégradation sociale de dizaines de milliers de personnes dans notre pays.
    Si les politiques de l'emploi du précédent gouvernement ont donné des droits nouveaux aux salariés, elles ont aussi donné des avantages au patronat, ce que vous passez sous silence lorsque vous vous employez à dresser un bilan, évidemment accablant selon vous. En effet, il ne faut pas oublier trop vite la multiplication des aides dont bénéficient les entreprises pour aider à la création d'emplois. Or personne ne demande qu'un examen soit fait quant à l'efficacité de ces aides.
    Le président Méhaignerie a dit qu'il fallait de la transparence, qu'il fallait connaître la vérité. C'est vrai, nous avons tous besoin de la vérité pour alimenter notre réflexion. Pour ne rien vous cacher, l'allègement des charges était, avec Martine Aubry - Dieu sait que ce fut une ministre bien ancrée à gauche -, un sujet de débat, car l'efficacité d'une telle mesure n'a jamais été au rendez-vous.
    Moi qui suis un matérialiste philosophique, je dirai que la preuve du pudding, c'est qu'on le mange. Vous devez connaître cette formule, qui n'est pas de moi mais du grand ancêtre barbu. (Sourires.)
    Pour ce qui concerne l'allègement des charges, le critère définitif devrait être son efficacité : est-ce que cela marche ou est-ce que cela ne marche pas ? Or c'est l'échec ! Cette mesure n'a jamais créé d'emplois. La preuve, c'est que la France est un des pays d'Europe occidentale qui connaissent les plus forts taux de chômage. Plus vous allégez les charges, plus le chômage augmente ! Mais vous êtes tellement conditionné idéologiquement que vous continuez à vous acharner dans cette voie, qui est une impasse.
    Plus que jamais, nous estimons nécessaire de faire la lumière sur l'utilisation des fonds publics, qu'ils soient attribués sous forme de subventions ou qu'ils se manifestent « en creux », si j'ose dire, se traduisant par des moindres recettes dans les caisses de l'Etat du fait des exonérations fiscales et des exonérations de cotisations sociales pour les entreprises.
    Il nous faut évaluer !
    Cette démarche est d'autant plus légitime qu'il s'agit de recettes correspondant au financement de quelque chose d'aussi essentiel que notre système de protection sociale.
    Si je m'en tiens aux exonérations sociales, celles-ci avoisineront les 18 milliards d'euros en 2004 et atteindront les 21 milliards d'euros dans deux ans. Depuis le gouvernement de M. Edouard Balladur qui, en 1993, a lancé la politique d'allégements sur les bas salaires, favorisant le travail non qualifié, l'idée a fait son chemin. Si le taux de cotisation employeur au niveau du SMIC est passé en dix ans de 30,2 % à 4,2 %, soit une division par sept, force est de constater que, malheureusement, la courbe du chômage n'a pas suivi la même trajectoire.
    Dès lors, notre exigence de transparence est d'autant plus fondée qu'elle s'appuie sur un constat déjà dressé par la commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner les pratiques de certains grands groupes nationaux et multinationaux industriels, de services et financiers.
    Il est donc indispensable que les aides publiques sous toutes leurs formes concourent efficacement aux priorités nationales que devraient être le recul du chômage et les créations d'emplois.
    Quoi qu'il en soit, il est certain que les sociétés qui procèdent à des licenciements pour motif économique, qualifiés par un curieux euphémisme de « plans sociaux », alors qu'elles réalisent des bénéfices, devraient être tenues, lorsque le recours à ce genre de pratique est avéré, de rembourser le montant des allégements, exonérations de charges sociales ou aides publiques de toutes natures dont elles ont auparavant bénéficié.
    Notre rapporteur général a parlé du bon « M. François » de Clermont-Ferrand. Si ma mémoire est fidèle, celui-ci a annoncé, à deux jours d'intervalle, des bénéfices substantiels et 7 500 licenciements.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il a réembauché !
    M. Jean-Pierre Brard. Oui, mais les salariés, qui ont été blessés psychologiquement et socialement, sont, quant à eux, détruits d'une façon irrémédiable. Mais il est vrai que le bon « M. François » n'est pas le genre de personne à avoir des états d'âme.
    Mme Muguette Jacquaint. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 286.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004, n° 1093 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures dix.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT