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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 24 OCTOBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
3e séance du jeudi 23 octobre 2003


SOMMAIRE
présidence de m. marc-philippe daubresse

1.  Loi de finances pour 2004 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

FONCTION PUBLIQUE, RÉFORME DE L'ÉTAT,
SERVICES DU PREMIER MINISTRE,
BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS ET SGDN (suite)

M. Georges Tron, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la fonction publique et la réforme de l'État.
M. Georges Tron, suppléant M. Bernard Carayon, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le secrétariat général de la défense nationale et le renseignement.
M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels.
MM.
Michel Piron,
Pierre Bourguignon,
Christian Blanc,
Patrick Braouezec,
Georges Tron,
Denis Merville.
M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire.
Réponses de M. le ministre aux questions de MM. Jean-Claude Lemoine, Bernard Schreiner, Victorin Lurel, Patrick Braouezec.

SERVICES DU PREMIER MINISTRE
I. - Services généraux
État B
Titre III «...»

Amendement n° 72 rectifié de M. Migaud : MM. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial ; Henri Plagnol, secrétaire d'État à la réforme de l'État ; Georges Tron. - Rejet.
Amendements n°s 7 de la commission des finances et 11 de M. Novelli : MM. Louis Giscard d'Estaing, Georges Tron, rapporteur spécial ; le ministre, Bernard Schreiner, Claude Goasguen.

Suspension et reprise de la séance «...»

MM. Louis Giscard d'Estaing, le ministre. - Retraits des amendements n°s 7 et 11.
Amendement n° 4 de la commission des finances : MM. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial ; Denis Merville, le secrétaire d'État, Georges Tron. - Retrait.
Adoption du titre III.

Titre IV. - Adoption «...»
État C
Titres V et VI. - Adoptions «...»
III. - Conseil économique et social
État B
Titre III. - Adoption «...»
État C
Titre V. - Adoption «...»
IV. - Plan
État B
Titre III

Amendement n° 5 de la commission des finances : M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. - Cet amendement n'est pas défendu.
Adoption du titre III.

Titre IV. - Adoption «...»
État C
Titre VI. - Adoption «...»
Budget annexe des Journaux officiels
Articles 48 et 49. - Adoptions «...»
II. - Secrétariat général de la défense nationale
État B
Titre III. - Adoption «...»
État C
Titre V. - Adoption «...»

Renvoi de la suite de la discussion budgétaire à la prochaine séance.
2.  Dépôt de propositions de résolution «...».
3.  Dépôt d'un rapport «...».
4.  Dépôt de rapports en application de lois «...».
5.  Dépôt de rapports d'information «...».
6.  Dépôt d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».
7.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2004

DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).

FONCTION PUBLIQUE, RÉFORME DE L'ÉTAT,
SERVICES DU PREMIER MINISTRE,
BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS ET SGDN (suite)

    M. le président. Nous reprenons l'examen des crédits du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire, concernant la fonction publique et la réforme de l'État, ainsi que des crédits des services du Premier ministre, du budget annexe des Journaux officiels et du secrétariat général de la défense nationale.
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la fonction publique et la réforme de l'État.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la fonction publique et la réforme de l'État. Vous me permettrez, monsieur le président, avant de commencer mon propos, de remercier la présidence et mes collègues rapporteurs qui ont bien voulu « plancher » avant le dîner. J'aurais aimé être là pour les écouter, mais j'ai dû m'adonner aux joies de la kinésithérapie. (Sourires.)
    Monsieur le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire, monsieur le secrétaire d'État à la réforme de l'État, mes chers collègues, comme vous le savez, les crédits dont je suis le rapporteur pour cette discussion budgétaire sont modestes au regard des enjeux : 223 millions d'euros seulement. Ils sont affectés, pour l'essentiel, à trois postes : l'action sociale interministérielle pour 121 millions d'euros, les dotations aux écoles pour 65 millions d'euros et le fonds pour la réforme de l'État pour 20 millions d'euros.
    Par ailleurs, 7,6 millions d'euros sont affectés au fonds interministériel pour l'insertion des personnes handicapées. Vous pouvez donc constater - mais peut-être n'est-il pas utile de le rappeler dans cette enceinte - que la masse de ces crédits est minime par rapport à ce que représente la fonction publique dans notre pays.
    Au total, messieurs les ministres, ce budget augmente de 5,6 % et, même si un bon budget - j'insiste sur ce point - n'est pas nécessairement un budget qui augmente, il s'agit là d'un bon budget.
    Concernant l'action sociale interministérielle, j'ai un satisfecit à vous décerner et une question à vous poser, à laquelle, je crois, il a été répondu cet après-midi.
    Le satisfecit concerne les 300 000 euros qui sont prévus pour financer la mise en place du titre emploi-service. Il s'agit d'une nouvelle prestation créée à titre expérimental, pour une durée de deux ans, dans les régions Auvergne et Franche-Comté. Cette prestation d'aide à domicile vise à alléger les contraintes personnelles ou familiales des agents de l'État qui rencontrent des difficultés momentanées ou qui sont confrontés à des sujétions professionnelles. Cette innovation, certes encore embryonnaire, répond à l'intérêt grandissant des agents pour des prestations de nature individuelle. Je me permets d'ailleurs de vous renvoyer, sur ce point, au rapport que j'avais rédigé l'année dernière et qui constatait déjà un engouement croissant des fonctionnaires pour ce type de prestations.
    La réflexion ainsi ouverte par cette initiative doit maintenant s'intégrer dans une nouvelle organisation déconcentrée de l'action sociale, qui pourrait offrir aux échelons locaux plus d'autonomie et de souplesse, pour développer, dans un cadre expérimental, des initiatives nouvelles susceptibles, après évaluation, d'être mutualisées à l'échelon national.
    Ma question est liée au fait que l'augmentation des crédits affectés à ce poste s'explique en grande partie par le quintuplement des crédits d'investissement, alors-même que le taux de consommation sur ce chapitre reste faible. Pourriez-vous, monsieur le ministre, me répondre sur ce point ?
    Je souhaiterais également vous faire part d'une inquiétude. L'engagement de l'État employeur, en 2004, reste absolument indispensable pour mener à bien le grand chantier du Président de la République tendant à la mise en oeuvre d'une réelle politique d'insertion en faveur des personnes handicapées. Ainsi, dans le projet de loi de finances pour 2004, au total, les crédits demandés au titre du FIIPH s'élèvent à 7,64 millions d'euros contre 6,86 millions d'euros en 2003.
    On doit néanmoins regretter que les crédits du FIIPH aient fait l'objet de gels et d'annulations en 2003 - près de 20 % de la dotation initiale ! -, alors que les demandes émanant des ministères étaient déjà supérieures aux crédits votés par le Parlement. Il faut espérer que cela ne se produira pas l'an prochain, sans quoi l'augmentation affichée dans le projet de loi de finances restera lettre morte. Ces crédits vont-ils être dégelés ? Avez-vous reçu des assurances sur ce point de la part de Bercy ? Encore une fois, je n'étais pas là cet après-midi, mais je crois savoir, monsieur le ministre de la fonction publique, que vous avez répondu positivement à cette question, ce dont je ne peux, bien entendu, que me réjouir.
    Les crédits consacrés au fonds pour la réforme de l'État augmentent significativement pour atteindre 20 millions d'euros, ce qui est très positif, même si la réforme de l'État est, bien sûr, et j'y reviendrai, plus une question de volonté politique que de moyens budgétaires.
    Enfin, les dotations aux écoles augmentent de 3,61 % pour atteindre 65,5 millions d'euros. Nous y reviendrons également.
    Le dernier point que je souhaiterais aborder, s'agissant des crédits de ce budget, concerne la mise en oeuvre de la LOLF. J'ai déjà eu l'occasion, monsieur le ministre, de le souligner en commission : les crédits dont vous avez la charge seraient intégrés à un programme dénommé « action du Gouvernement », dont le champ nous semble particulièrement vaste et dépouvu d'une réelle cohérence interne, puisqu'il réunit aussi bien les crédits de la fonction publique que ceux de la communication gouvernementale, ou encore du Conseil d'orientation des retraites ou du Commissariat général du Plan. Est-ce définitif ? Ne pensez-vous pas qu'une meilleure lisibilité supposerait d'autres regroupements ?
    Après avoir présenté succinctement et brièvement les crédits de votre budget, bien modestes si on les compare à la mission dont vous avez la charge, messieurs les ministres, je souhaiterais entrer dans le vif du sujet, c'est-à-dire aborder le thème même de la réforme de l'État.
    La réforme de l'État est clairement engagée grâce aux stratégies ministérielles mises en place par le Premier ministre, mais la conviction de votre rapporteur, qui est celle, je crois, de la majorité de la commission des finances, est qu'elle ne sera jamais menée à bien sans une réforme de la fonction publique.
    Et je me permettrais, monsieur le ministre, de redire ici en quelques mots les convictions que j'ai explicitées l'autre jour devant la commission des finances. Je développe dans le rapport l'idée de fond suivante : il faut dorénavant que nous ayons le courage d'aborder le problème de la fonction publique et de son fonctionnement si nous voulons réformer effectivement l'État.
    Il est inutile à ce sujet de revenir trop longuement sur les enjeux budgétaires, mais je souhaitais cependant en rappeler quelques données.
    Les dépenses de la fonction publique représentent une part grandissante du budget de l'État, puisqu'elles sont passées de 40,1 % en 1991 à 42,5 % en 1999, 43,6 % en 2001 et 44 % en 2002, soit près de 8 % du PIB.
    M. Strauss-Kahn avait d'ailleurs reconnu à cette tribune même, lors de la présentation du budget pour 2000, si je me souviens bien, que la France était confrontée à ce problème de l'augmentation croissante des dépenses publiques, et au demeurant de la charge de la dette dans le budget général, ce qui bien entendu laisse au Gouvernement des marges de manoeuvre diminuées d'autant. Ce n'est donc pas un objet de polémique ou de controverse mais la simple vérité des chiffres : les dépenses de la fonction publique dans le budget général de l'État sont en augmentation constante.
    Les dépenses de personnels ont absorbé plus de la moitié de la progression du budget de l'État dans les dix dernières années, et près de la totalité de cette augmentation sur les exercices 1998 à 2000. Ainsi les dépenses induites par la fonction publique de l'État sont-elles estimées en 2002 à 118,3 milliards d'euros, soit une progression de 3,9 % en un an.
    Ce sont d'abord les pensions des fonctionnaires qui coûtent de plus en plus cher à l'État. Le diagnostic est connu et il est inutile de revenir longuement sur ce sujet, d'autant que la réforme d'envergure que vous avez portée, monsieur le ministre, avec votre collègue François Fillon, devant le Parlement il y a quelques mois, répond pour l'essentiel aux difficultés liées à cette réalité.
    Rappelons toutefois, mes chers collègues, que la progression des crédits pour les pensions sera encore de 5,3 % par rapport au budget 2003, et qu'ils devraient atteindre 33,84 milliards d'euros cette année ! Ainsi le taux de contribution implicite de l'État versé pour le régime des pensions des fonctionnaires civils continue-t-il de progresser avec constance : il était de 39,5 % en 2001, il sera de 48,1 % en 2004 !
    Une « révolution culturelle » - tel est le titre du chapitre consacré à ce sujet dans mon rapport - est donc nécessaire aujourd'hui pour passer d'une approche quantitative à une approche qualitative de la fonction publique. L'idée de base de ce rapport est la suivante : une nouvelle approche de la fonction publique doit privilégier les critères de qualité et le « mieux-être » des fonctionnaires, la seule approche quantitative se traduisant par une augmentation perpétuelle des dépenses en termes budgétaires. Mettre fin à l'idéologie du toujours plus - je rappelle qu'en 2002 et en 2001 plus de 30 000 emplois budgétaires supplémentaires ont été créés -, voilà véritablement l'objectif que nous devons viser.
    L'amélioration des services publics peut être réalisée sans augmentation des effectifs : la politique de Gouvernement nous en offre de multiples exemples.
    Prenons la lutte contre l'insécurité menée par Nicolas Sarkozy. Bien que les effectifs prévus par la loi d'orientation pour la sécurité intérieure ne soient pas encore disponibles, les chiffres de la délinquance sont en baisse. C'est la démonstration qu'il n'existe pas de corrélation évidente entre l'augmentation des effectifs et les résultats d'une politique, pour peu qu'une véritable volonté soit mise en oeuvre.
    Autre exemple que je ne développerai pas : la sécurité routière. Même si le phénomène est sans doute lié à la « peur du gendarme », il est incontestable que la politique différente menée par M. Gilles de Robien à la demande du Président de la République aboutit à des chiffres très probants. Là encore, c'est un volonté politique qui s'exprime, et les chiffres montrent que la réussite ne passe pas nécessairement par l'augmentation du nombre de fonctionnaires.
    Autre façon d'éviter cette augmentation, la réforme structurelle. A Bercy, le non-renouvellement de plus de 2 000 départs provient ainsi de réorganisations internes diverses - fusions de directions, suppressions de doublons -, de rationalisations des structures - regroupement de recettes des finances ou des douanes - et de simplifications administratives. C'est la preuve qu'il est possible d'agir. D'ailleurs, monsieur le ministre, je crois savoir que, dans le ministère dont vous avez la charge, ce sont près de 1 200 emplois qui ont été « économisés budgétairement », entre guillemets, grâce à la réorganisation du service de distribution des prestations familiales. Donc, je le répète, c'est une question de volonté politique et de réforme administrative.
    La franchise me conduit cependant à constater que certains ministères, à l'inverse, voient leurs moyens augmenter depuis de très nombreuses années sans que les résultats soient au rendez-vous. Disant cela, je ne m'appuie pas sur mes propres appréciations, qui pèseraient bien peu dans ce débat, mais sur celles de différentes instances d'évaluation, à commencer par le Haut conseil de l'évaluation de l'école.
    L'éducation nationale est en effet un exemple typique. Tout le monde sait que la démographie scolaire est en baisse depuis une dizaine d'années, et malgré cela, l'augmentation du nombre des enseignants est apparue comme la réponse plus probante aux dysfonctionnements du service public de l'éducation nationale, mis en exergue par tous les dispositifs d'évaluation.
    Songez, mes chers collègues, que, si le nombre d'enseignants par élève était resté le même en 2002 qu'en 1997, année qui ne semble pas caratérisée par la pénurie, la différence se serait chiffrée à 40 000 emplois ! Ces chiffres ne renvoient pas à la Saint-Glinglin, mais concernent une période de cinq ans ! C'est vous dire si de véritables marges de manoeuvre sont susceptibles d'être dégagées.
    Le Gouvernement peut d'ailleurs légitimement se féliciter d'être le premier depuis trente ans - et je vous en rends hommage, messieurs les ministres - à présenter deux budgets successifs en diminution nette d'emplois budgétaires. Est-ce suffisant ? Les chiffres restent modestes, certes : 700 emplois en 2003, 4 568 en 2004. Comparé aux 2,225 millions d'emplois inscrits dans le projet de loi de finances, ce chiffre ne paraît pas extraordinairement élevé. Mais je pars de l'idée selon laquelle c'est une inflexion politique qui mérite d'être soulignée.
    L'augmentation des effectifs ne peut être l'alpha et l'oméga d'une politique, pas plus que le volume d'une éventuelle diminution. Il s'agit avant tout de quantifier les besoins mis au service d'une politique, de manière à déterminer si, oui ou non, celle-ci est bien orientée. C'est la raison pour laquelle, je le répète, on ne peut que se féliciter, messieurs les ministres, de constater que vous allez dans la bonne direction.
    Seule une politique ambitieuse en matière d'adaptation des effectifs de la fonction publique par rapport aux objectifs fixés permettra de dégager des marges de manoeuvre qui donneront les moyens de mener une politique salariale plus généreuse. C'est la seconde idée fondamentale développée dans cette partie du rapport.
    Je tiens cependant à souligner que la réduction des effectifs de la fonction publique n'a pas pour seul objectif de contribuer à la diminution des déficits publics. Il est tout aussi important de faire comprendre aux fonctionnaires que les marges de manoeuvre ainsi dégagées seront également affectés à des augmentations de salaires. Cela devrait accroitre la motivation desdits fonctionnaires et l'attractivité de la fonction publique, dont j'ai déjà traité l'année dernière dans mon rapport et que mon collègue Bernard Derosier a reprise cette année dans le sien. Certes elle ne tient pas seulement à la question salariale, mais cela constitue tout de même un élément de réponse.
    La seconde idée que je développe dans ce rapport est donc que la diminution des effectifs doit aussi profiter aux fonctionnaires.
    Avoir une vision qualitative de la fonction publique implique que l'on y modernise la gestion des ressources humaines. Je sais que cela vous tient particulièrement à coeur, monsieur le ministre. C'est même l'un des axes forts de votre politique. Je suis en effet informé des multiples négociations que vous menez depuis de nombreuses semaines à ce sujet. Cette modernisation va nécesiter des interventions diverses, et je ne peux que me réjouir, en constatant - notamment après vous avoir entendu hier - que vous allez, là encore, dans la bonne direction.
    Elle passe d'abord par un renforcement du lien entre la notation et la rémunération. Je dois reconnaître, pour être honnête, que le gouvernement précédent, auquel il faut rendre hommage à cet égard, avait initié cette réforme. J'avais même dit à cette tribune, à l'un de vos prédécesseurs, Michel Sapin, que, selon nous, il s'agissait d'une réforme courageuse qui allait dans la bonne direction. Je pense d'ailleurs que, comme cela se passe dans les pays qui nous entourent, nous pourrions être tous d'accord, au-delà des sensibilités politiques qui nous divisent sur ces bancs, sur quelques orientations générales en matière de fonction publique et de réforme de l'État.
    J'estime, en tout cas, que cette modification des règles de la notation, à condition qu'elle soit corrélée avec les questions de rémunération, est un moyen d'aller dans la bonne direction, parce qu'elle éviterait tout arbitraire. D'ailleurs je viens de rappeler que l'une des dernières décisions du précédent gouvernement a été de réformer le régime de notation des fonctionnaires, dont les insuffisances criantes étaient bien connues. Cette modernisation du système de notation doit désormais entrer en pratique à tous les niveaux de l'administration. Il faut revenir sur plusieurs décennies de mauvaise pratique.
    Cela ne sera pas facile, messieurs les ministres, vous le savez, mais, en tout cas, je livre à votre réflexion la suggestion de lier le versement des primes et la réforme de la notation, afin de mieux valoriser le travail des plus méritants des agents et d'imposer ainsi les notions de résultat et d'objectif que vous avez développées hier et qui sont incluses dans la LOLF.
    Ainsi, le projet du garde des sceaux, Dominique Perben, prévoit de moduler une partie de la revalorisation indemnitaire des magistrats inscrite au projet de loi de finances pour 2003 en fonction de leurs résultats. De son côté, Nicolas Sarkozy a annoncé que 25 millions d'euros étaient prévus dans son budget pour financer les primes au mérite pour les policiers et pour les gendarmes. Il a indiqué : « Elles ne seront pas individuelles, mais iront aux services qui auront rempli les objectifs fixés en début d'année. [...] Ceux qui en font davantage et mieux bénéficieront, eux, d'une affectation plus rapide dans les régions où ils souhaitent aller, ainsi que de promotions internes. »
    Voilà une politique de la fonction publique qui, me semble-t-il, est bien équilibrée. Elle assure des améliorations de rémunération en fonction des services effectués, et le lien établi entre efficacité et avancement est de nature à permettre à tous les agents d'avoir des carrières plus attractives. Nous avons là les deux piliers essentiels pour fonder une véritable gestion des ressources humaines dans la fonction publique. Il me semble absolument nécessaire, messieurs les ministres, de généraliser ce type de système.
    En ce qui concerne la gestion des ressources humaines, l'idée fondamentale que je souhaite défendre est que mieux gérer les fonctionnaires c'est non seulement mieux servir les usagers, mais aussi offrir des carrières plus valorisantes en termes d'attractivité, en termes d'avancement. A cet égard, l'excellent rapport Vallemont, que vous connaissez, doit être suivi. Certaines de ses conclusions ont d'ailleurs été reprises par M. Derosier, qui a également cité le rapport Cieutat.
    Il faut, en particulier, favoriser la mobilité, car elle constitue, à n'en pas douter, un instrument puissant d'enrichissement professionnel par l'acquisition de nouvelles compétences et de nouvelles expériences, par la confrontation avec d'autres milieux professionnels, avec d'autres cultures professionnelles. A ce titre elle peut jouer le rôle d'un levier efficace pour favoriser l'adaptation des agents aux changements continus de leur environnement professionnel dans un système de fonction publique de carrière, où ces derniers sont recrutés a priori pour effectuer l'ensemble de leur parcours professionnel au sein du secteur public.
    Je suis très attaché à l'idée selon laquelle cette mobilité doit pouvoir être effectuée non seulement au sein même de la fonction publique, mais aussi entre les différentes fonction publique, voire vers le secteur privé. En effet tout cloisonnement excessif est source d'appauvrissement pour l'un comme pour l'autre. Aussi est-il nécessaire, selon nous, d'assouplir les textes encadrant les départs de fonctionnaires vers les activités privées, comme l'a proposé M. Berger.
    La rigueur de la notion de prise illégale d'intérêt nous paraît aujourd'hui susceptible d'être revue dans ce cadre. Il faudrait en particulier envisager de raccourcir le délai pendant lequel un fonctionnaire ne peut travailler dans une entreprise avec laquelle il a été en contact. Actuellement fixé à cinq ans il pourrait être ramené à deux ans, durée généralement retenue dans les pays qui nous entourent.
    Le dernier sujet que je souhaite aborder à propos de l'attractivité de la fonction publique concerne les hauts fonctionnaires. Il s'agit d'un défi important pour l'État, qu'il est indispensable de relever, faute de quoi nous n'aurons pas un encadrement ayant les compétences indispensables à la bonne marche de nos administrations.
    Le Gouvernement a annoncé hier par votre bouche, monsieur le ministre, une réforme de l'ENA et de la haute fonction publique, ce dont je me félicite.
    M. André Schneider. Excellente réforme !
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Absolument, mon cher collègue, et vous avez d'ailleurs posé hier une question à M. le ministre à ce sujet.
    M. André Schneider. Tout à fait !
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Nous en reparlerons dans le cours du débat et je pourrai alors m'exprimer sur cette réforme qui prévoit notamment la fixation de contrats d'objectifs aux cadres dirigeants et l'instauration d'un lien entre mérite et primes.
    La volonté de lancer également un programme de fusion des corps de fonctionnaires sur des métiers communs est particulièrement intéressante. Nous sommes d'ailleurs tous intéressés aux développements que vous pourriez faire, messieurs les ministres, sur ce sujet. En effet, selon nous, la notion de métier dans la fonction publique mérite une véritable approche dans la mesure où, comme le disait très justement le rapport Pochard, cela favoriserait une réorganisation de l'administration. Je vous rappelle que, selon cette proposition, on pourrait ramener les 1 200 corps existants en une cinquantaine de cadres de fonctions seulement, à partir de l'identification des grandes filières professionnelles nécessaires aux missions civiles de l'État.
    Messieurs les ministres, nous sommes à la croisée des chemins. Certes, il revient au rapporteur d'indiquer que les crédits qui vous concernent ont été adoptés par la commission, mais il me paraît plus important de souligner la nécessité, pour le Gouvernement dans son ensemble, de vouloir la réforme de l'État, sans occulter aucun de ses aspects. Or il n'y aura ni réforme de l'État, ni amélioration de nos comptes publics, ni réponse à la crise que connaît la fonction publique si l'on n'a pas le courage - vous nous avez donné hier quelques preuves que vous l'aviez - de prendre le problème à bras-le-corps avec la volonté d'apporter des réponses appropriées. Cela signifie qu'il faudra passer par-dessus tous les barrages idéologiques, même s'ils paraissent infranchissables. Sachez en tout cas que, avec la majorité de la commission des finances, nous serons à vos côtés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Tron, il vous appartient maintenant de suppléer M. Bernard Carayon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le secrétariat général de la défense nationale et le renseignement.
    M. Georges Tron, suppléant, M. Bernard Carayon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le secrétariat général de la défense nationale et le renseignement. Effectivement, monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Bernard Carayon qui devait présenter ce rapport. Ne pouvant être présent ce soir, il m'a demandé de le remplacer, ce que je fais bien volontiers.
    Le rapport de M. Carayon porte à la fois sur les crédits du SGDN et sur ceux des services de renseignement du ministère de la défense. La présentation de ce soir ne comportera cependant que les remarques sur le budget du SGDN, celles concernant le renseignement devant être formulées lors de l'examen du budget du ministère de la défense.
    Le projet de budget du SGDN pour 2004 s'élève à 50,1 millions d'euros, contre 48,3 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2003, soit une progression apparente de ses dotations de 3,8 %. Cette augmentation correspond à une hausse des dépenses ordinaires, justifiée, pour l'essentiel, par des mesures d'ajustement, des transferts d'emplois, ainsi que par la création de deux emplois budgétaires et des mesures nouvelles concernant les systèmes d'information sécurisés.
    Les grands axes de travail du SGDN se concentrent sur trois priorités : la sécurisation des systèmes d'information de l'administration et des services publics, la surveillance et le contrôle des exportations des matériels de guerre, la prévention des crises et l'élévation du niveau de sécurité de la population sur le territoire national.
    La mission de sécurisation des systèmes d'information de l'administration et des services publics relève de la direction centrale de la sécurité des systèmes d'information, la DCSSI. Le développement de la société de l'information s'accompagne en effet d'un accroissement tangible des menaces contre lesquelles les États sont le plus souvent désarmés, alors que les parades sont entre les mains d'acteurs privés. La France s'est dotée de plusieurs outils pour répondre à cet enjeu, en particulier par la constitution de plans de prévention et de réaction à une attaque cyberterroriste, et par la mise en place d'un organe opérationnel de veille, d'alerte et de réponse, le CERTA, au sein de la DCSSI.
    Il convient tout particulièrement d'insister sur l'utilité de la fonction d'audit de la DCSSI. La cellule qui en est chargée est composée de six personnes, recrutées parmi les meilleurs spécialistes informatiques. Cependant ce chiffre est dérisoire au regard de la tâche qui incombe à cette cellule, compétente pour l'ensemble des systèmes d'information de l'État. La fonction d'audit n'est cependant mise en oeuvre que sur la demande d'un service de l'État. Compte tenu de la charge de travail de l'équipe, un délai d'attente de six mois avant la prise en compte effective d'une demande peut s'écouler.
    En outre, un audit, même de « premier niveau », c'est-à-dire portant sur l'architecture générale d'un système d'information, peut durer plusieurs mois. Au total, certains ministères attendent un audit durant deux ans. Il est aujourd'hui impératif, pour la sécurité des systèmes d'information de l'État, que cette équipe soit étoffée. De plus, l'audit étant subordonnée à une demande d'un service de l'État, de nombreux services ne font l'objet d'aucune évaluation de la DCSSI. Il est donc impératif de tester leurs systèmes d'information en donnant à la direction la possibilité juridique et les moyens matériels d'en détecter les failles.
    Plus généralement, tous les ministères doivent prendre conscience des risques de cyberterrorisme et de la nécessité de protéger les informations personnelles des citoyens contenues sur les différents serveurs. Par une lettre du 4 avril 2003, le directeur de cabinet du Premier ministre a d'ailleurs appelé l'attention des directeurs de cabinet de tous les ministres sur cet enjeu. Cette démarche s'inscrit dans la logique qui sous-tendait la proposition que Bernard Carayon, avait formulé dans son rapport adressé au Premier ministre sur l'intelligence économique, laquelle tendait à mettre en place une mission interministérielle d'expertise technique et industrielle des systèmes d'information des administrations publiques dont le SGDN assurerait l'exécution.
    A cet égard, Bernard Carayon souligne que la sécurité des systèmes d'information doit être une priorité pour l'État.
    Par ailleurs, le développement de nouveaux équipements de sécurité adaptés aux technologies déployées doit bénéficier, très vite, d'une haute priorité, afin de permettre la mise en place de réseaux fixes et mobiles, de messageries, et de dispositifs de protections adaptés aux risques et aux menaces. Cet objectif majeur ne saurait être atteint sans une mobilisation forte des acteurs concernés, appuyée tant sur le développement d'un réseau d'industriels de confiance, à même de répondre aux besoins de l'État, que sur la mise en place des moyens humains et financiers appropriés.
    Cette politique devrait aussi favoriser l'acquisition des modules de base pour la sécurité, en particulier dans le domaine de la certification, socle indispensable à l'expansion de l'administration électronique. Dans son rapport sur l'intelligence économique que je viens de citer, Bernard Carayon avait d'ailleurs proposé la création d'un fonds à capitaux mixtes, appuyé sur la Caisse des dépôts et consignations, et qui aurait vocation à devenir l'embryon d'un fonds européen appuyant les programmes communautaires.
    S'agissant de la sécurité des systèmes d'information, votre rapporteur a constaté que les services de l'État et ses établissements publics utilisaient, y compris pour des fonctions sensibles, des solutions informatiques étrangères, aussi bien pour l'audit, la fourniture de solutions ou leur soutien. Ils ne présentent donc pas, c'est le moins que l'on puisse dire, toutes les garanties de sécurité.
    Les ministères opèrent leurs choix sans contrôle, sans coordination, sans doctrine ou assistance. L'analyse technique devrait donc, à l'avenir, être doublée d'une expertise industrielle tenant aux marchés et à ses acteurs. Il conviendrait aussi que la DCSSI soit systématiquement consultée lors des achats majeurs effectués par les administrations publiques.
    En ce qui concerne la prévention des crises et l'élévation du niveau de sécurité de la population sur le territoire national, la direction de protection et de la sécurité de l'État assure la veille opérationnelle dans ses domaines de compétence et anime les travaux interministériels relatifs aux équipements et aux moyens de lutte contre le terrorisme nucléaire, radiologique, biologique et chimique, ainsi que ceux relatifs à la prévention et au traitement d'attaques informatiques majeures sur les infrastructures vitales.
    De manière générale, si le réseau des hauts fonctionnaires de défense, en poste dans les ministères, est animé par le SGDN, le rapporteur déplore vivement qu'ils n'occupent pas, depuis l'origine, une place déterminante dans les équipes de direction des ministères. Cet état de fait traduit le défaut de sensibilité de l'État aux questions de sécurité.
    Le SGDN exerce aussi la responsabilité du suivi de la réglementation sur les établissements à régime restrictif, civils et militaires, en application de l'instruction interministérielle 486 de 1993.
    Cependant, la liste de ces établissements n'est réactualisée qu'épisodiquement. Leur nombre, probablement excessif, et leur choix, parfois obsolète, doivent provoquer une réflexion sur cette liste.
    C'est pourquoi Bernard Carayon propose que l'on modernise cette instruction interministérielle afin, notamment, d'assurer une actualisation annuelle des établissements à régime restrictif.
    Par ailleurs, il convient d'appeler votre attention, monsieur le ministre, sur les investissements étrangers dans les entreprises en rapport avec la défense nationale. En effet, l'article L. 151-3 du code monétaire et financier permet, depuis 1996, au ministre chargé de l'économie de s'opposer à de tels investissements, s'il constate qu'ils sont de nature à mettre en cause, notamment, l'ordre public ou la sécurité publique.
    Ce dispositif a connu deux applications, en 1998 et 2000. Il a été modifié récemment, avec l'appui de Bernard Carayon, par l'article 78 de la loi du 1er août 2003 sur la sécurité financière, laquelle a ajouté le motif de la défense nationale à la liste des critères autorisant le ministre de l'économie à soumettre un investissement étranger à autorisation préalable.
    De plus, le SGDN a été chargé par le Premier ministre, le 16 juillet 2003, de conduire une réflexion interministérielle sur les prises de contrôle par des capitaux étrangers d'entreprises françaises liées à la défense ou à la sécurité nationales, susceptibles de menacer notre autonomie technologique dans certains secteurs stratégiques.
    Le comité interministériel du renseignement, le CIR, est chargé d'assurer la coordination du renseignement, mais il est indispensable que celle-ci fasse l'objet d'une impulsion politique. C'est pourquoi il est proposé d'instituer un conseil national du renseignement, placé, à l'image du conseil de sécurité intérieure, sous l'autorité du Président de la République.
    L'IHEDN, qui est placé sous la tutelle du SGDN, doit s'internationnaliser en renforçant ses liens avec les instituts étrangers. Il convient aussi qu'il développe les sessions internationales, accroîsse le nombre de ses intervenants étrangers et accueille davantage d'auditeurs d'autres nationalités. Une telle ouverture serait évidemment source de coûts supplémentaires. C'est pourquoi le rapporteur propose qu'une fondation soit mise en place afin de drainer des financements destinés à assurer ce développement opportun.
    Cela étant, Bernard Carayon vous invite, mes chers collègues, à adopter, à l'instar de la commission des finances, le budget du SGDN pour 2004. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)

    M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels.
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous prie d'abord d'excuser mon absence en fin d'après-midi, mais j'étais encore à Lyon où l'on fêtait les vingt ans de la politique de la ville. Pour les maires de banlieue, il s'agit d'un anniversaire important qui nous a permis de participer, hier et aujourd'hui, à un colloque fort intéressant.
    Le budget des services du Premier ministre sur lesquels je présente ce rapport est retracé dans cinq fascicules distincts dont le seul point commun est de bénéficier de crédits relevant de l'autorité du Premier ministre : le Conseil économique et social, le budget annexe des Journaux officiels, les services généraux du Premier ministre, les comptes spéciaux du Trésor et le Plan.
    L'essentiel étant consigné dans le rapport, je serai bref sur l'analyse des crédits, avant d'évoquer plus longuement la question du Plan et de ses nouvelles orientations.
    Globalement, les crédits inscrits s'élèvent à près de 1,4 milliard d'euros et les effectifs concernés sont de 3 561 personnes.
    Les crédits demandés pour le Conseil économique et social atteignent 32,63 milliards d'euros, soit une augmentation de 1,4 % par rapport à la loi de finances pour 2003. Si je souscris à bon nombre d'analyses du Conseil économique et social, je relève de nouveau que la question de sa composition qui fait, de temps à autre, l'objet de proposition de loi organique, demeure particulièrement délicate lorsqu'il s'agit de préciser les choses. Je rappelle que cette composition est restée identique pendant vingt-cinq ans, jusqu'en 1984 et que, depuis - soit près de vingt ans après -, elle n'a toujours pas été modifiée.
    Les actions de communication du Conseil restent au coeur de son programme. Un service de communication et de la presse a d'ailleurs été créé en 2001, qui devrait contribuer à lui assurer une meilleure lisibilité.
    La principale difficulté rencontrée par cette institution concerne son insertion dans la nouvelle nomenclature budgétaire. A l'évidence, le Conseil ne peut être assimilé à une quelconque administration de l'Etat, mais il n'est pas non plus une assemblée parlementaire, et ne peut dès lors faire partie des pouvoirs publics, tant dans la nomenclature actuelle que dans celle retenue par la loi organique du 1er août 2001 dont vous connaissez sans doute tous les détails.
    Estimé à 169,07 millions d'euros, le projet de budget annexe des Journaux officiels est en diminution de 13,6 % par rapport à 2003, ce qui n'a pas non plus échappé, mes chers collègues, à votre vigilante attention. L'explication tient non seulement à la chute du produit des ventes et des prestations, mais aussi au développement des consultations en ligne. Cette évolution du budget annexe semble toutefois s'effectuer au détriment des activités traditionnelles. J'insiste sur le fait qu'il n'est pas normal que le Journal officiel des débats parlementaires parvienne à ses destinataires avec parfois plus de vingt jours de retard.
    Je note que, si l'exercice de ce budget devrait, cette année encore, dégager un excédent d'exploitation, il est néanmoins beaucoup moins important que par le passé, soit 3,9 millions d'euros contre 26,92 millions d'euros en 2002. Le reversement au budget général qui devrait s'élever à 0,16 million d'euros sera très nettement inférieur à celui prévu l'an passé, qui était de 25,14 millions d'euros.
    L'avenir de ce budget annexe dépend également du statut des Journaux officiels. Mais ce futur statut dépend lui-même de l'évolution du statut juridique de la société chargée de la fabrication des publications. Malheureusement, le sort de la SACI-JO, liée à la direction par une convention, n'est toujours pas réglé.
    Le budget des services généraux du Premier ministre représente à lui seul près de 90 % de l'ensemble des cinq fascicules budgétaires. Les crédits demandés pour 2004 s'élèvent à 1,15 milliard d'euros, soit une hausse de 0,86 %.
    Un effort de présentation des crédits a été fait au travers du regroupement par agrégat. Mais, là encore, il ne saurait constituer une bonne base pour la mise en oeuvre de la loi organique.
    Quant au regroupement du chapitre des dépenses de personnel, il rend la répartition des charges et des emplois particulièrement illisible.
    L'activité de la Documentation française est affectée, comme celle des Journaux officiels, par le développement des consultations en ligne. Une hausse de 11 % du nombre de visites sur le portail « service-public.fr » est même encore envisagée pour l'an prochain. La direction compte sur ses réorganisations internes, ses recentrages éditoriaux et ses diffusions auprès d'un public plus large pour améliorer ses résultats et son chiffre d'affaires.
    Le Médiateur de la République bénéficierait d'une dotation de 7,77 millions d'euros, montant encore supérieur à celui de l'année antérieure, alors que ne sont pas intégrés les crédits inscrits au budget de 2003, à titre non reconductible, et les crédits d'équipement, 230 000 euros, des délégués intervenant dans les zones urbaines sensibles. S'agissant de l'insertion de l'institution dans la nouvelle nomenclature budgétaire, il est clair qu'un rattachement au Premier ministre est indispensable - j'attire votre attention sur ce point - et que son indépendance doit être, en tout état de cause, préservée.
    Les centres interministériels de renseignements administratifs bénéficieraient d'une enveloppe de 2,26 millions d'euros, montant quasiment stable par rapport à celui de cette année. Je tiens à faire remarquer que ces centres, vitrines de l'administration, ont fait d'importants efforts de productivité, d'ailleurs retracés dans la documentation budgétaire, et qu'ils ont toute leur place auprès du Premier ministre. Nous aurons l'occasion d'en reparler.
    Concernant le chapitre consacré à l'indemnisation des enfants de parents déportés et des victimes des spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation, il serait doté, en 2004, de 74,04 millions d'euros contre 64,04 millions d'euros en 2003. Sur les montants de crédits envisagés au titre de l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie, le projet de loi de finances ne tient pas compte de l'extension envisagée des catégories de bénéficiaires.
    Au sein des crédits des services généraux du Premier ministre, il convient de relever la stabilité des crédits consacrés aux fonds spéciaux - 36,47 millions d'euros -, désormais exclusivement consacrés à la sécurité extérieure et intérieure de l'État, à la suite de la réforme opérée à l'initiative du précédent gouvernement. Pour contrôler l'utilisation des fonds spéciaux, une nouvelle commission de contrôle a été créée, à dominante politique et parlementaire, afin d'établir un rapport ainsi qu'un procès-verbal constatant que les dépenses sont couvertes par des pièces justificatives pour un montant égal, destiné in fine à la Cour des comptes. Cette nouvelle commission s'est mise en place au printemps dernier et fonctionne de façon tout à fait satisfaisante.
    Voilà, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les principales remarques que je tenais à faire sur les services du Premier ministre avant de traiter la question du Plan qui, pour le moins, pose quelques interrogations sur la manière dont ce gouvernement conduit sa politique.
    Après la baisse de 7 % votée l'an dernier, les crédits demandés pour le Plan avec 24,81 millions d'euros subissent à nouveau une diminution de 5,02 %. Pourtant, ce projet de budget, adopté par la commission des finances, contrairement à l'avis du rapporteur spécial, n'a aucun sens. En effet, cette nouvelle baisse - importante - intervient alors même que le projet de loi de finances ne tient pas compte des orientations données par le Premier ministre au nouveau commissaire du Plan et ne tient pas compte du recentrage des activités du commissariat sur la prospective décrit récemment par M. Alain Etchegoyen. Permettez-moi, dans ces conditions, de m'en étonner comme je m'étonne que le projet de budget du Plan ait été déposé sans prendre en compte les orientations de la mission d'évaluation et de contrôle pour une réforme des organismes de prospective.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Merci !
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. C'était notre travail commun.
    Convenons qu'au cours des dernières années, et notamment depuis l'abandon du processus d'élaboration des lois de Plan, le rôle du Commissariat général du Plan a été considérablement réduit. Il a même été quasiment anéanti par l'actuel gouvernement : aucune commande d'études ne lui a été adressée. Veut-on, en toute bonne logique, que l'évolution des missions du Commissariat conduise à de nouvelles réductions de crédits si jamais on lui retirait toute compétence en matière d'évaluation ?
    Mais alors, il est curieux que certains veuillent aller encore plus loin en proposant de réduire encore les moyens du Commissariat sur d'autres lignes budgétaires, notamment son poste de rémunérations, alors même que chacun sait que l'évaluation au Plan faisait largement appel jusqu'ici à des experts extérieurs ou aux corps de contrôle, ce dont je me félicite.
    Où est la logique dans ces prises de décisions ?
    Le discours prononcé par M. le Premier ministre à l'occasion de l'inauguration des salles du Commissariat du Plan, le 13 octobre dernier, laisse perplexe.
    En confirmant le Plan comme structure, M. le Premier ministre a décidé du recentrage de l'institution sur la prospective. Il rappelait « ce qui constitue, depuis 1946, l'essence de sa mission : penser l'avenir, par une approche associant l'ensemble des acteurs politiques, économiques et sociaux, universitaires, syndicalistes, chefs d'entreprise et aussi, naturellement, hauts fonctionnaires ». Dont acte.
    Dans le même temps - et j'en suis heureux -, il a souligné que « le Plan a un rôle spécifique d'impulsion parce qu'il a une culture et une vocation pluridisciplinaire et parce qu'il est l'héritier d'une tradition d'expertise partagée par la concertation sociale ».
    Mais alors, pourquoi avoir laissé l'institution en déshérence durant un an pour, aujourd'hui, reconfirmer sa mission essentielle ? Pourquoi ne pas avoir associé les partenaires sociaux à la définition de la fonction et du programme de l'institution ? Pourquoi les propositions du Commissaire ne font-elles pas la part belle à la concertation ? Pourquoi constatons-nous aujourd'hui cette volonté de casser l'outil du Plan dans ce qui est sa force ? Où est la logistique dans tout cela ?
    Les choix opérés, qui ne s'insèrent nullement dans une rediffusion claire et coordonnée de tous les organismes d'évaluation et de prospective, sont fort contestables.
    En ce qui concerne l'évaluation, elle n'est toujours pas traitée. Et il ne m'apparaît pas raisonnable de séparer évaluation et prospective. Une telle distinction ne peut que conduire à des dérives, voire à des erreurs d'analyse.
    L'autonomisation de l'évaluation ne me paraît possible que s'il y a garantie d'indépendance - ce qu'apportait le Plan, quels que soient les gouvernements - et non transfert vers un autre département ministériel, qui plus est, celui de la réforme de l'État : l'évaluation concerne la pertinence des politiques publiques, pas la pertinences des administrations.
    Ce débat budgétaire doit être l'occasion pour le Gouvernement - qui a commencé, avant que je n'arrive, heureusement - de clarifier les intentions du Gouvernement à l'égard du Plan.
    Voilà, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les réflexions que je souhaitais vous faire partager.
    Je dois vous rappeler que, contrairement à l'avis de votre rapporteur - vous l'avez bien compris -, la commission des finances a adopté les crédits des services généraux, du Conseil économique et social, des Journaux officiels et du Plan.
    M. le président. Dans la discussion, la parole est à M. Michel Piron.
    J'ai laissé les rapporteurs dépasser leur temps de parole mais j'invite désormais les orateurs à respecter le leur.
    M. Michel Piron. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, la masse des dépenses liées à la fonction publique représente une proportion croissante dans le budget de l'État. On l'a rappelé tout à l'heure : de 40 % en 1991 et 42,5 % en 1999, elle est passée à 44 % aujourd'hui, soit 8 % du PIB. Or, dans cette masse, les dépenses de personnel ont absorbé plus de la moitié de la progression du budget de l'État au cours des dernières années. N'est-ce pas beaucoup ?
    Les dépenses générées par la fonction publique de l'État ont été estimées pour 2002 à 118,3 milliards d'euros, soit une progression de 3,9 % en un an. Cette hausse s'explique à la fois par la progression des charges de pension et par l'augmentation continue du nombre de fonctionnaires. Rappelons que la progression des crédits de pension sera encore de 5,3 % par rapport au budget 2003 et qu'il devra atteindre 33,84 milliards d'euros l'année prochaine. Rappelons également qu'en 2001 et 2002 ce sont plus de 30 000 emplois budgétaires supplémentaires qui ont été créés. On ne saurait donc trop souligner le fait qu'en 2004, comme en 2003, il y aura une diminution nette d'emplois budgétaires : 700 emplois sont suprrimés en 2003 et 4 568 le seront en 2004.
    Pourquoi un tel choix ? Parce qu'il s'agit clairement de s'interroger sur l'efficacité de l'action publique, en cessant de confondre la fin et les moyens, en considérant comme premières les attentes des usagers, en redéfinissant des objectifs concertés avec les personnels concernés. Ainsi, le projet de budget pour 2004 obéit à deux principes : l'intensification de l'effort du Gouvernement en faveur de la réforme de la fonction publique après celle des retraites ; l'application au budget du ministère de la fonction publique des principes de la réforme que ce ministère défend pour l'ensemble des aministrations publiques.
    A ce sujet, deux exemples peuvent être cités : le ministère de la fonction publique étudie le transfert à la CNAF - Caisse nationale d'allocations familiales - de la gestion de ses prestations familiales, qui mobilise actuellement quelque 1 200 personnes.
    La structure du budget de l'éducation nationale se trouve, quant à elle, dans une situation passablement figée : le budget 2003 affiche 723 600 enseignants titulaires et 183 480 personnels ouvrier, technicien, administratif et de direction, soit un taux de un pour quatre. Ramener simplement ce taux à un pour cinq représenterait 40 000 emplois de moins.
    Dans un contexte de nombreux départs à la retraite au cours des prochaines années, la fonction publique se trouve donc placée devant un double défi et peut-être une opportunité.
    Le premier défi est financier pour assurer les futures pensions. A cet égard, le Gouvernement a mené à bien l'importante réforme des retraites contenue dans la loi du 21 août 2003. D'ici à 2008, la réforme concernera essentiellement les fonctionnaires qui verront leur durée de cotisation s'aligner sur celle du secteur privé - 160 trimestres. Un régime de décote/surcote analogue à celui existant dans le régime général sera progressivement mis en place et un régime complémentaire est prévu dans la loi afin de prendre en compte les primes dans le calcul des pensions.
    Le second défi est d'assurer des recrutements de qualité et de maintenir l'attractivité de la fonction publique.
    L'opportunité, enfin, est celle de ne pas remplacer tous les fonctionnaires partant à la retraite.
    La réforme de l'État constitue plus que jamais un chantier prioritaire, articulé notamment autour de trois axes : la modernisation des trois fonctions publiques, qui passe par une meilleure gestion des ressources humaines, quand il y en a une ; l'introduction d'une véritable culture de l'efficience, sinon de la performance ; la prise en considération pour l'approche salariale des réalités économiques.
    Un tel chantier exige au moins d'inscrire la réforme dans une réflexion qui ne soit pas seulement fondée sur une approche quantitative mais qualitative - l'augmentation des effectifs ne garantissant ni une meilleure qualité ni une plus grande efficacité du service rendu - ; de réformer avec et pour les fonctionnaires comme pour les usagers.
    S'agissant de la mise en oeuvre de la réforme de l'État et de la modernisation de la fonction publique, un préalable semble s'imposer, celui de renforcer l'attractivité de la fonction publique.
    La perspective de mise en cohérence de l'approche salariale avec les réalités économiques doit être l'occasion de repenser la politique salariale de la fonction publique en introduisant de nouveau concepts qui, pratiqués ailleurs, définissent des « objectifs » et prennent en comptent des « résultats ».
    A cet égard, la première réunion, le 14 octobre dernier, du collège des employeurs des trois fonctions publiques a constaté la difficulté de trouver des marges de manoeuvre pour l'année 2003. La nécessité n'est pas moindre de développer - ou créer - une véritable politique de gestion des ressources humaines.
    L'amélioration des services et la réduction du niveau des dépenses publiques ne sont nullement contradictoires si l'on accepte l'idée que la gestion de l'État ne peut s'exonérer du souci d'efficacité.
    Comme le soulignait le rapport de M. Georges Tron, « mieux gérer les fonctionnaires, c'est non seulement mieux servir les usagers, mais c'est aussi offrir aux agents de l'État des carrières plus valorisantes et renforcer l'attractivité de la fonction publique ».
    Faut-il évoquer la nécessité de former les fonctionnaires et de développer leur polyvalence, de bâtir des parcours professionnels inédits, de permettre l'évaluation des agents, de former aux eixgences de la qualité et de motiver les personnels en valorisant métier, compétence et prise de responsabilités ?
    Le rapport de M. Vallemont remis au ministre de la fonction publique en 1999 avait dégagé six grands principes d'action : une gestion de proximité, la professionnalisation des recrutements, l'évaluation des agents, la mobilité interne et externe, la formation continue et la transparence des règles et des critères de gestion.
    Force est de constater que le statut et la gestion paritaire sont encore souvent évoqués comme constituant des facteurs de blocage, et que pour beaucoup de cadres, la gestion des personnels demeure une fonction exclusivement administrative, qui ne les concerne guère. A cet égard, une réflexion sur le statut de la fonction publique ainsi que que sur la diversité des primes selon les ministères pourrait constituer un point de départ intéressant pour le développement d'une vraie gestion des ressources humaines, fondée sur une approche plus personnalisée.
    Le ministère de la fonction publique a annoncé, le 15 octobre dernier, l'ouverture prochaine de discussions avec les syndicats sur la rémunération au mérite, individuelle pour les cadres supérieurs et collective par service pour les autres fonctionnaires. La réflexion pourrait s'orienter vers des contrats de performances de services publics. Notons que des aménagements intégrant le mérite sont déjà en cours d'introduction dans les ministères de l'intérieur, et de l'économie et des finances. Il y a été fait allusion très clairement tout à l'heure.
    Quant à l'outil, signalons la mise en place des stratégies ministérielles de réforme - les SMR. Suite à la circulaire du 3 juin 1998, il est vrai, quelques ministres avaient élaboré, sur la période 1999-2002, des programmes pluriannuels de modernisation - ou PPM -, qui sont aujourd'hui arrivés à échéance. Une étude d'évaluation du dispositif, réalisée de septembre à novembre 2002, indiquait, parmi ses principales conclusions, que la capacité de coordination au niveau interministériel est tout à fait essentielle pour la réussite de la réforme de l'État et sa modernisation. Les stratégies ministérielles de réforme devraient donc se concentrer, pour leur premier exercice, sur trois grandes priorités : réexamen systématique des missions et structures et prise en compte des conséquences de la décentralisation et de la mise en oeuvre de la LOLF, développement des démarches qualité, évolution des modes de gestion des ressources humaines. Elles se distinguent des programmes pluriannuels de modernisation, notamment par le fait qu'elles seront présentées au Parlement avant la fin de l'année 2003.
    Ces stratégies doivent constituer un cadre renouvelé au sein duquel chaque ministre pourra progressivement identifier l'ensemble des réformes qui seront engagées par son département ministériel. Elles feront, en effet, l'objet d'un suivi et d'une actualisation.
    A l'heure où la décentralisation s'affirme comme le pari des responsabilités partagées, ce qui est peut-être la forme la plus exigeante de la solidarité, qui pourrait imaginer que l'État ne doive s'interroger sur son propre fonctionnement dans la relation renouvelée et déconcentrée qu'il devra entretenir avec les collectivités territoriales comme avec l'ensemble de nos concitoyens ?
    Si l'honneur du service public est de servir tous les publics, entre un néo-provincialisme à tendance centrifuge et un archéo-parisianisme à propension centripète (Sourires), n'y a-t-il pas place dans ce pays pour une gouvernance revue et améliorée, en d'autres termes pour une réforme de l'État ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Bourguignon.
    M. Pierre Bourguignon. J'interviendrai, au nom du groupe socialiste, sur la partie du budget consacrée à la fonction publique. Comme l'a fort bien souligné Bernard Derosier, rapporteur pour avis des crédits de la fonction publique et de la réforme de l'État, les fonctionnaires sont aujourd'hui inquiets.
    Cette inquiétude n'est sans doute pas directement liée aux lignes budgétaires qui sont censées nous préoccuper aujourd'hui. Les crédits du ministère chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État sont en effet une partie infime des moyens consacrés aux fonctionnaires par l'État, puisqu'ils se limitent à un agrégat sur le budget des services généraux du Premier ministre consacré à l'action sociale interministérielle et à la formation.
    Néanmoins, l'analyse de ces lignes fait déjà apparaître les premières difficultés. Après une baisse de 2,12 % en 2003, la progression de ces crédits serait de 4,37 %, atteignant 223,6 millions d'euros, compte tenu de diverses modifications de périmètre en 2004. Mais, signe de l'approche idéologique qui est la vôtre, monsieur le ministre, vous vous êtes senti tenu de rappeler que cette hausse n'était qu'optique, car la comparaison devait être menée avec les 266 millions réellement gérés en 2003.
    Concernant la très grande majorité des budgets, le Gouvernement tente d'expliquer qu'un bon budget n'est pas forcément un budget qui augmente.
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est très vrai !
    M. Pierre Bourguignon. C'est sans doute possible en théorie, même s'il est tout aussi vrai qu'un budget dont tous les postes s'affichent à la baisse est très clairement un mauvais budget. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Mais non !
    M. Christian Vanneste. Perversion !
    M. Pierre Bourguignon. Concernant les fonctionnaires, qui font l'objet de votre part d'une véritable stigmatisation, vous en êtes à expliquer à votre majorité qu'il ne faut pas qu'elle prenne ombrage d'une petite hausse !
    Sur ces 223 millions, 117,3 seraient consacrés à l'action sociale interministérielle, soit une baisse de 0,59 % en valeur, donc de plus de 2 % en volume. Vous prétendez, au grand dam des partenaires sociaux, compenser cette baisse par un prélèvement sur les fonds de roulement de la mutuelle de la fonction publique, poursuivant au sein de ce budget l'intense sollicitation des recettes non fiscales observée en première partie, notamment avec la ponction de 300 millions d'euros sur le fonds de garantie des assurances dommage obligatoires qui vient d'être mis en place, ou les diverses ponctions sur les comités professionnels. Je rappellerai que les crédits en question doivent pourtant permettre de financer les aides et prêts à l'installation, l'aide ménagère à domicile, les chèques vacances ou les prestations crèches !
    J'ajoute, comme le soulignent les syndicats de la fonction publique, qu'aucune réflexion ne semble menée pour assurer un rajeunissement des prestations concernées et une meilleure adaptation de celles-ci aux conditions de vie actuelles des agents.
    Voilà qui m'amène à la question de l'attractivité de la fonction publique et, avant tout, à la question des rémunérations. En effet, comme vous l'avez vous-même fait lors de votre audition devant la commission, messieurs les ministres, le budget de la fonction publique est l'occasion d'avancer une réflexion générale sur la politique menée concernant les fonctionnaires. Et la question des rémunérations est sans doute aujourd'hui la question principale qui les préoccupe.
    Vous n'avez pas encore officialisé votre position concernant la revalorisation des rémunérations, mais il semble de plus en plus clair que 2003 ne verra aucune progression du pouvoir d'achat. Ainsi, ce sont près de 4 % de perte de pouvoir d'achat qui auront été cumulés depuis l'année 2000, essentiellement sur les deux dernières années. Difficile pour les actifs, cette situation devient encore plus inquiétante pour les retraités de la fonction publique. En effet, compte tenu des nouvelles règles d'indexation des retraites de la fonction publique que vous avez mises en place dans le cadre de la loi de réforme des retraites cet été, les pensions ne progresseront plus à l'avenir qu'au rythme de l'inflation. Si, à la veille de la mise en oeuvre effective de cette réforme, aucune revalorisation générale des rémunérations n'était accordée, les retraités perdraient définitivement ces quatre points de pouvoir d'achat.
    Aujourd'hui, par euphémisme, vous évoquez « la mise en cohérence de l'approche salariale avec les réalités économiques ». Vous nous indiquez également que « la première réunion du collège des employeurs des trois fonctions publiques a conclu à la difficulté de trouver des marges de manoeuvre pour l'année 2003 ». Et c'est une fois posé ce cadre que vous appelez l'ensemble des partenaires à « repenser l'approche de la politique salariale et des rémunérations, au-delà - où vouliez-vous dire en deçà  ? - de la seule variation de la valeur du point ».
    Pour ceux qui doutaient encore de votre volonté de faire diversion par votre proposition de mise en place d'une rémunération au mérite, je pense que les choses sont aujourd'hui plus claires.
    En effet, il est de plus en plus évident que la fonction publique n'est pour vous qu'une variable d'ajustement...
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Mais non !
    M. Pierre Bourguignon. ... face aux difficultés budgétaires que vous avez vous-même suscitées.
    A titre d'anecdote, je rappellerai que le débat sur le « non-remplacement » d'un fonctionnaire sur deux, ou sur trois, ou cinq - dans vos moments de bonté ! - n'est pas né chez les journalistes, comme vous tenez parfois à le laisser penser par des déclarations plus rassurantes. Non, c'est bien lors de la campagne présidentielle, lorsque l'opinion commençait à s'inquiéter de la multiplication des promesses, notamment fiscales, du candidat Jacques Chirac, que certains à droite ont commencé à considérer que ces non-remplacements représentaient un moyen aisé de laisser penser à la possibilité d'un « bouclage » financier.
    Pour 2004, la diminution nette d'emplois serait de 4 568 postes, après une suppression de 701 emplois en 2003.
    M. Jean-Marie Geveaux. Et on peut faire mieux !
    M. Pierre Bourguignon. Le taux de non-renouvellement serait ainsi proche de 20 %, soit un sur cinq. Encore une fois, ces suppressions interviennent sans qu'aucun cadre clair n'ait été défini, ni aucun dialogue social approfondi mené, pour déterminer quel doit être, à terme, le périmètre souhaitable de la fonction publique, en liaison avec un projet clair en matière d'action de l'État et de service public. Vous ne nous proposez aucune vision claire en réponse à ces questions.
    L'évocation rituelle de la loi organique relative aux lois de finances, que nous avons su mener à son terme et faire adopter sous la précédente législature, et du principe selon lequel l'État - en matière budgétaire mais plus largement dans l'ensemble de son action - doit passer d'une culture de moyens à une culture de résultat ne saurait vous dispenser d'un réel effort pour appliquer cette nouvelle constitution budgétaire.
    Tel est l'essentiel des remarques que je voulais formuler, même si les sujets d'inquiétude ne manquent pas, qu'il s'agisse de l'attractivité de la fonction publique, que j'ai déjà évoquée, des effectifs, ou de la décentralisation et de son corollaire, la déconcentration. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Christian Blanc.
    M. Christian Blanc. Messieurs les ministres, votre volonté de moderniser l'administration, nous l'avons compris, est réelle et nous pensons que vous allez dans la bonne direction. Le groupe UDF et apparentés votera ce projet de budget.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ah !
    M. Patrick Braouezec. Une bonne nouvelle pour vous !
    M. Christian Blanc. Je soulignerai, en son nom, quelques aspects de vos propositions qui nous paraissent positifs.
    Cependant, nous estimons que deux décisions fondamentales devront être prises rapidement pour vous permettre de doter la France d'une administration performante.
    D'abord quelle sera l'architecture de la décision publique ? Vous avez parlé d'État stratège. J'y ai été particulièrement sensible puisque je présidais, il y a fort longtemps, la commission du Plan qui a mis en avant ce concept. Dans notre esprit, cela signifiait qu'aucun acte de gestion ou d'administration ne devait remonter à Paris, que l'État assurait des fonctions régaliennes, des missions stratégiques et, bien sûr, des fonctions de péréquation.
    Le deuxième niveau est celui des régions. Mais avec quelle décentralisation ? Y a-t-il déconcentration de tous les actes administratifs de l'État ?
    Le troisième niveau, qui est de proximité, est probablement le plus important. Mais sera-t-il celui du département, de l'agglomération, du pays ? Il faudra choisir, ce n'est pas facile. Nous avons chacun notre idée. Pour notre part, nous estimons que le département n'est pas un échelon pertinent.
    M. Jean-Marie Geveaux. Il faudrait dire pourquoi !
    M. Étienne Blanc. Nous nous en expliquerons !
    Avoir trois niveaux aux compétences précises permettrait d'exercer un véritable contrôle démocratique et probablement de revitaliser la vie démocratique et politique.
    Deuxième question, quelles missions pour un État moderne ? Certaines, héritées de l'histoire, sont devenues obsolètes. Il faudra avoir le courage de les identifier. En revanche, des missions nouvelles dont on parle peu nécessitent l'intervention de l'État.
    La réponse à ces deux questions permettra d'ordonner les responsabilités, le fonctionnement et le calendrier.
    Vous posez comme principe d'action, messieurs les ministres, que pour moderniser il faut d'abord former et responsabiliser le management. Nous en sommes d'accord.
    Permettez-moi une pointe d'humour. Choisir l'ENA, a priori, ce n'est pas espérer devenir ministre, ou Premier ministre, voire mieux encore, après avoir passé plusieurs années au sein de cabinets ministériels, loin de la vie administrative, et plus largement loin de la vraie vie. Mais on comprend que beaucoup de jeunes qui entrent à l'ENA puissent penser cela car, depuis vingt ans, la moitié des ministres, dans les gouvernements de droite comme dans ceux de gauche, viennent de l'ENA.
    Vous proposez, messieurs les ministres - et vous avez, de notre point de vue, là encore raison - que l'on dissocie quelque peu la politique et l'administration.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Naturellement !
    M. Christian Blanc. Vous proposez notamment qu'on ne prenne pas en compte l'ancienneté dans le cursus d'un fonctionnaire dès l'instant où il exerce une activité politique.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. A 100 % !
    M. Christian Blanc. Fort bien, mais c'est insuffisant au regard de ce qui se fait en Europe. Il est très bien de s'éloigner de la culture française, mais voyez, par exemple, en Grande-Bretagne, qui est une grande démocratie : un fonctionnaire qui y devient parlementaire démissionne de son emploi. Tous les pays européens ont peu ou prou réglé cette question, et de façon beaucoup plus nette que nous ne tentons de le faire.
    Chers collègues, depuis trente ans, 30 à 40 % des députés sont issus de la fonction publique. Nous sommes une exception en Europe.
    Pourquoi pas ? me direz-vous. Les fonctionnaires sont des gens intelligents, proches de la vie publique et du service public, et l'on ne voit pas pourquoi ils seraient moins aptes que d'autres à exercer de telles fonctions. Et je vous suivrai, à ceci près que la culture administrative, celle que l'on apprend normalement à l'ENA, est une culture hexagonale - le service public, c'est la France ! C'est une culture d'uniformité et du temps long. Ce n'est pas une culture de la comparaison, et enfin elle connaît mal, voire pas du tout, l'entreprise. Or, il peut s'avérer utile que la représentation nationale ait une culture un peu moins administrative dans un monde très ouvert, où les phénomènes économiques jouent un rôle considérable. Par conséquent, messieurs les ministres, peut-être pourriez-vous - pas cette fois-ci, mais la prochaine - faire un plus grand effort et aller plus loin encore sur cette question de la frontière entre l'administration et la vie politique. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Choisir l'ENA pour des jeunes, c'est choisir le service public, l'intérêt général, l'administration, et choisir d'être un cadre de direction du service public, un manager de l'intérêt public, capable d'adaptation permanente. Voilà ce que doit contenir la formation des jeunes qui sont à l'ENA. Même si on leur dispense toutes les informations que vous avez prévues quant à l'ouverture sur l'entreprise et sur l'Europe, leur fonction principale sera bien d'administrer, de « manager » le service public.
    Pour ce qui est de responsabiliser le management, les objectifs sont bons. Restera à créer des directions des ressources humaines décentralisées et à revaloriser les niveaux de rémunération, pour conserver les compétences au sein du service public. Aujourd'hui, la compétence est rare. Le service public comporte énormément de compétences. Attendez-vous, dans les prochaines années, à ce que le secteur de l'entreprise détourne de l'administration ses plus grands talents. Il faut anticiper.
    Il convient aussi, nous le savons tous, de traiter une fonction publique devenue obèse.
    En 1947, il avait 1,2 million de fonctionnaires. En 2001, 4,7 millions.
    M. Patrick Braouezec. Il y a de nouveaux métiers !
    M. Christian Blanc. Bien sûr, mais d'autres ont été abandonnés !
    Au cours des dix dernières années, 400 000 fonctionnaires ont été recrutés, ce qui n'a pas d'équivalent en Europe. Quelle est la raison d'une telle situation ? Vraisemblablement, un manque de gestion et un cloisonnement des corps. Nous ne pouvons pas faire l'impasse sur cette maladie. Ce n'est pas par une seule approche budgétaire que l'on peut traiter une telle situation anormale et exceptionnelle. Remplacer un fonctionnaire sur deux qui part à la retraite peut avoir un résultat budgétaire, mais ce n'est certainement pas un objectif. On ne peut réformer profondément que dans le cadre d'une ambition, d'un projet, d'une fierté partagée entre les Français et les fonctionnaires. C'est en proposant aux Français et donc aux fonctionnaires d'entrer dans le xxie siècle, celui du savoir, des technologies et du service de proximité, que l'on pourra profondément adapter le service public, retrouver cette administration qui a été la fierté de notre pays, ce qui n'est plus le cas. Il y a vingt ans, on disait que l'administration française était la meilleure du monde avec le Foreign Office. Ce sont des observations que l'on n'entend plus jamais sur la scène internationale.
    M. Patrick Braouezec. Ce n'est pas la performance qui a changé, c'est l'idéologie.
    M. Pierre Hellier. L'idéologie, vous connaissez !
    M. Christian Blanc. Tout change effectivement !
    Je terminerai par une information peu connue. L'un des quatre instituts mondiaux de benchmarking, situé à Lausanne, fait des comparaisons avec 500 paramètres. Sur les quarante-neuf pays les plus développés, la France est au vingt-cinquième rang en performance globale. Pour le chapitre « Efficacité du gouvernement et de l'administration », elle était vingt-cinquième en 1997, vingt-septième en 2000, trente-quatrième en 2002. Comme vous le constatez, notre situation n'est pas bonne, et elle ne s'améliore pas. Or l'efficacité de l'administration est un facteur compétitif dans le fantastique affrontement économique et social qui pèse aujourd'hui sur la France.
    Messieurs les ministres, vous mettez en place les prémices d'une action profonde. Le temps presse. Nous vous accompagnerons dans votre action et votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. Monsieur Blanc, c'est un fonctionnaire qui vous parle, mais mon ENA, c'était l'école normale d'Auteuil, et j'ai exercé le métier d'instituteur durant vingt ans dans la bonne ville de Saint-Denis.
    Messieurs les ministres, le budget du ministère de la fonction publique connaîtra en 2004 une augmentation de 4,37 %, passant de 214 millions d'euros à un peu plus de 223 millions d'euros. Il n'est cependant pas question de se réjouir trop vite de cette augmentation.
    Baisse des effectifs, non-remplacement des départs à la retraite, non-renouvellement des emplois jeunes, rémunérations non revalorisées, culture du résultat inapplicable dans certains ministères, égalité professionnelle entre les femmes et les hommes loin d'être atteinte, système des retraites inéquitable, cette liste à la Prévert, non exhaustive, des problèmes est malheureusement longue.
    Pourtant, votre projet de budget n'en résout aucun. La réforme de l'État est certes nécessaire, personne n'en doute. Encore faut-il ne pas essayer de plaquer un modèle libéral sur l'ensemble des ministères et des fonctionnaires qui y travaillent. Votre empressement à remettre en cause nos services publics, pourtant toujours performants, ne vous en déplaise, monsieur Blanc, est très préoccupant. Il est donc nécessaire de pointer les problèmes rencontrés dans la fonction publique, qui ne sont malheureusement pas réglés dans le projet de budget pour 2004.
    Commençons par les rémunérations. Plusieurs questions se posent à leur sujet.
    Les fonctionnaires s'interrogent sur la stagnation de leur rémunération. Leur inquiétude est légitime, car le Gouvernement s'accorde pour dire qu'il n'y a pas de marge budgétaire pour une hausse des salaires, ce qui est confirmé par Gilles Carrez : « Une éventuelle augmentation salariale pourrait constituer une menace sérieuse pour l'équilibre budgétaire en exécution. Cela pourrait conduire le Gouvernement à pratiquer, le cas échéant, une régulation budgétaire plus intense encore qu'en 2003, renforçant les contraintes exercées sur le fonctionnement courant des administrations. »
    Or les fonctionnaires vont supporter une baisse de 1,5 % de leur pouvoir d'achat pour 2003. Alors que la hausse de leurs salaires n'est que de 0,5 %, l'inflation est estimée à 2 %. Rendez-vous est fixé au 15 novembre afin que vous présentiez aux syndicats vos propositions en la matière. Nous souhaiterions dès maintenant connaître vos intentions face à cette perte de pouvoir d'achat pour des centaines de milliers de citoyens.
    Le salaire au mérite est également l'une de vos préoccupations. Vous avez d'ailleurs présenté une communication sur ce sujet en conseil des ministres dès hier. Il ne concernerait, dans un premier temps, que les hauts fonctionnaires, mais aussi les fonctionnaires des ministères de la justice, de l'intérieur et des finances. J'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet, pour le moins controversé, en vous posant une question tout à l'heure.
    Qu'en est-il par ailleurs de l'inégalité des salaires entre les femmes et les hommes ? Selon l'INSEE, l'écart des salaires entre hommes et femmes reste malheureusement stable. En 2001, les salaires masculins sont en moyenne supérieurs de 16,5 % aux salaires féminins, contre 16,4 % en 2000 et 16,6 % en 1999. A ce titre, alors qu'il n'est déjà pas prévu dans ce budget d'augmentation des salaires des fonctionnaires, le pire est donc à craindre quant à une éventuelle, voire improbable revalorisation de la rémunération des femmes fonctionnaires.
    Il convient également d'évoquer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique et plus précisément dans la haute fonction publique. Les femmes représentent 45 % de la population active, 57 % de l'ensemble des fonctions publiques, 49 % des agents de l'État. Pourtant, elles restent largement sous-représentées dans les fonctions d'encadrement. En effet, au 31 décembre 2000, elles occupaient 12 % des emplois supérieurs de la fonction publique d'État. Un an plus tard, au 31 décembre 2001, elles en occupaient 12,5 %, soit 0,5 % de plus sur un an. A ce rythme, il faudra soixante-quinze ans pour atteindre la parité... Quant l'État montrera-t-il l'exemple en contribuant de façon décisive à l'accélération du mouvement historique en faveur de l'égalité des femmes et des hommes, et ce à tous les échelons de la fonction publique ?
    La question de la baisse des effectifs mérite elle aussi d'être posée. Elle est mise en relation avec le problème de la redéfinition des missions. Vous avez vous-même affirmé, dans le journal La Croix du 10 octobre dernier, monsieur le ministre, que le débat ne portait pas sur le nombre de fonctionnaires, ce qui était une conséquence, qu'il s'agissait d'abord d'analyser la pertinence des missions. Le seul problème, c'est que vous prévoyez bien de réduire le nombre de fonctionnaires, mais sans pour autant repenser leurs missions. En effet, aucune réflexion n'est menée en ce sens. Nous avons un cas exemplaire avec la suppression des postes des 25 600 personnes qui assuraient des fonctions d'encadrement dans les établissements scolaires. Leurs missions étaient claires. Elles ont été remplacées par 16 000 assistants d'éducation dont les missions sont très vagues et n'ont donné lieu à aucune réflexion. Où est l'analyse de la pertinence des missions ?
    Il est prévu de supprimer 4 561 emplois budgétaires en 2004. La ligne du Gouvernement est claire : tous les ministères devront faire des efforts et des économies sur leurs dépenses de fonctionnement, y compris s'agissant des ressources humaines. Pourtant, nous sommes en période de croissance du chômage, ce n'est donc pas en supprimant des postes dans la fonction publique que sera résolue la question préoccupante de l'accès à l'emploi. Ce serait plutôt en assurant une augmentation des salaires, en réduisant la précarité du travail et en donnant des garanties sociales nouvelles contre les licenciements que seront apportées des réponses appropriées.
    Ainsi, le Gouvernement veut faire mieux avec beaucoup moins.
    La raison invoquée à ces choix socialement inacceptables, ce sont des rentrées fiscales en net recul. Cet argument est utilisé pour permettre à l'État de ne pas remplacer les quelque 10 000 départs à la retraite prévus en 2004, et l'évolution démographique de la fonction publique ne laisse pas présager un changement de cap. Selon l'Observatoire de l'emploi public, environ 120 000 titulaires quitteront leur fonction au cours de l'année 2010 ; ils n'étaient que 80 000 en 2002. Si la même tendance est maintenue, c'est un véritable démantèlement de la fonction publique que vous nous proposez.
    Ainsi, c'est la question de l'attractivité de la fonction publique qui est en jeu mais c'est aussi la situation de l'emploi qui est sérieusement remise en cause par le Gouvernement. Il fait le choix de la chaise vide en pensant qu'ainsi les agents de l'État travailleront davantage.
    Une fois de plus, ce projet de loi de finances montre que l'emploi cesse d'être une priorité pour le Gouvernement dans le cadre de la fonction publique. Il semble même devenir un boulet que le Gouvernement préfère à terme offrir au secteur privé.
    Dès lors, des tensions sociales risquent de croître et des secteurs de la fonction publique vont rencontrer des difficultés de recrutement, en particulier dans les professions les plus qualifiées. A cet égard, Christian Blanc avait raison. Au palmarès des futurs besoins du secteur tertiaire figurent les métiers d'encadrement, les professions de santé et les métiers liés aux services aux particuliers. Ces secteurs font l'objet d'une rigueur budgétaire de votre part alors que les besoins sont de plus en plus importants. Là aussi, cette décision traduit un mépris absolu du travail des agents et des besoins de l'ensemble des utilisateurs.
    Pourtant, monsieur le ministre, servir l'intérêt général dans une administration ou un service public est un mérite, au sens noble du terme, pour la plupart des agents de l'État. Aussi permettez-moi de marquer mon désaccord envers cette politique de réduction des effectifs qui obéit à la seule logique de la rentabilité, de la réduction des coûts, de l'amélioration des gains de productivité. Elle ne peut que nuire à la qualité des prestations offertes aujourd'hui par nos services publics, et plus généralement à l'équilibre social de notre pays. Je ne dis pas qu'il n'y a rien à changer, je pense simplement qu'une logique libérale de gestion de l'administration telle que vous l'appliquez aujourd'hui revient à remettre en cause le service public et, au-delà, tout le fonctionnement de notre démocratie.
    Avec l'adoption de la loi portant réforme des retraites, les fonctionnaires vont nécessairement subir une dégradation de leur pension...
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. C'est le contraire !
    M. Patrick Braouezec. ... puisque l'allongement de la durée de cotisation réduit le rendement de chaque annuité. Ce rendement, s'il est encore de 2 % en 2003, tombera à 1,786 % en 2020. Par ailleurs, les fonctionnaires seront également pénalisés par une décote de 3 %, puis de 5 %, par annuité manquante de cotisation. Dans la majorité des cas, les fonctionnaires, et surtout les femmes, n'atteignent pas les trente-sept annuités et demie de cotisation. Votre réforme ne va évidemment pas améliorer leur situation. Leurs salaires sont déjà sous-évalués en cours de carrière et augmentent dans de très faibles proportions. Qu'en sera-t-il de leurs pensions de retraites ? En tout cas, cela ne va pas entraîner une hausse de leur pouvoir d'achat.
    Enfin, je souhaitais aborder la question du service minimum. Cette épineuse question a été relancée par notre collègue Christian Blanc, même s'il n'en a pas parlé tout à l'heure, dont nous allons examiner une proposition de loi sur ce sujet en décembre dans le cadre d'une niche parlementaire de l'UMP.
    Nous ne pouvons qu'exprimer nos plus grandes réserves et notre désaccord à cet égard. Des éclaircissements s'imposent dès à présent sur la position du Gouvernement à ce sujet et notamment en matière de garantie du droit de grève pour les fonctionnaires, car instaurer un service mimimum revient nécessairement à restreindre le droit de grève. Pourtant, dans la fonction publique, un préavis de grève doit être déposé cinq jours francs avant le début de la cessation du travail. Ce délai de cinq jours est à juste titre instauré pour permettre d'engager le dialogue ainsi que des négociations. Plutôt qu'une restriction du droit de grève, pourquoi ne pas envisager la mise en place de dispositifs de prévention des conflits sociaux au sein des différentes fonctions publiques ? L'objectif à atteindre n'est pas de durcir les conflits - c'est ce qui va se produire si on impose un service minimum - mais bien de les réguler.

    En conclusion, je souhaite revenir sur la place primordiale du service public dans notre société. Cette question s'intègre évidemment dans la question plus large de la réforme de l'Etat mais aussi de la décentralisation.
    La réforme de l'Etat se traduit, selon vous, par moins d'Etat, donc moins de service public. La décentralisation telle que le Premier ministre tente de l'imposer s'inscrit tout à fait dans cette voie.
    Quelle place pour le service public dans cette décentralisation ? Hélas !, les disparités, les inégalités qui s'aggravent entre départements et entre régions laissent augurer le pire. Les prestations offertes par les services publics varieront nécessairement d'un département à l'autre, d'une région à l'autre.
    Le désengagement de l'Etat dans nombre de domaines au profit des collectivités territoriales entraînera, et entraîne déjà d'ailleurs, une forte hausse de la pression fiscale locale. Pour autant, la qualité et surtout la présence des services publics dans certaines communes ne sont pas assurées.
    Monsieur le ministre, la fonction publique ne se gère pas comme une entreprise. Les termes récurrents que l'on emploie à son propos depuis dix-huit mois font pourtant craindre le pire : « recherche de la performance », « gains de productivité », « mérite », etc.
    Les missions de l'Etat relèvent d'un ensemble de personnes qui concourent à la satisfaction de l'intérêt général. Malheureusement, aujourd'hui, avec ce budget, c'est la finalité des missions de service public et de la fonction publique qui est remise en cause.
    M. André Chassaigne. Tout à fait !
    M. le président. La parole est à M. Georges Tron.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Messieurs les ministres, je ne voudrais pas reprendre la parole longuement, et mon propos sera très ciblé. Je me suis exprimé tout à l'heure en tant que rapporteur de la commission des finances. Je voudrais maintenant vous faire part de deux ou trois observations, liées non pas directement à ce budget, mais à la réforme de l'État dans son ensemble.
    Cette réforme de l'État, pour nous si indispensable, et en quelque sorte clé de toutes les autres réformes, y compris la réforme fiscale, ne peut se confondre avec une simple réforme de fonctionnement visant à réduire nos déficits publics. Elle suppose une réflexion beaucoup plus large, avec deux objectifs : rendre le meilleur service à l'usager, ce qui suppose bien entendu de n'exclure aucune des grandes interrogations des usagers, et celle du service minimum ou du service garanti en est une, et savoir comment et avec quels moyens on peut valoriser les carrières des fonctionnaires et rendre la fonction publique plus attractive.
    Monsieur Braouezec, on n'a pas sur vos bancs une conception haute et valorisante de la fonction publique et, sur les autres bancs, une conception dégradante ou humiliante. Nous avons le respect des individus et des fonctionnaires, et je voulais le dire avec force en commençant non propos.
    Je le dis avec d'autant plus de force, monsieur le ministre, que j'ai expliqué tout à l'heure pourquoi je considérais que la réforme de l'État supposait du courage, et vous en avez. J'ai indiqué pourquoi nous approuvions la totalité des mesures que vous avez annoncées hier et qui s'inscrivent dans un panorama beaucoup plus vaste. Je n'y reviens pas parce que, en cinq minutes, je n'ai pas le temps.
    Cela dit, il peut arriver à un membre de la majorité de regretter de temps en temps une certaine forme de pusillanimité de la part du Gouvernement qu'il soutient sans aucune hésitation. Et j'aurai quelques scrupules, après que mon collègue Pierre Bourguignon eut évoqué si souvent la MEC tout à l'heure, de ne pas dire ici, de façon un petit peu officielle, combien j'aurais souhaité que le Gouvernement accorde un petit peu plus de considération au travail fourni par la commission des finances et par la MEC en particulier, non pas que nous considérions que tout travail de la commission des finances mérite considération, ce qui serait prétentieux, mais parce que nous avons mené une véritable réflexion sur une question de fond, qui concerne également la réforme de l'État : comment réorganiser nos outils de prévision et d'évaluation de telle sorte que l'État fonctionne mieux ?

    Cela peut paraître secondaire en termes de finances publiques, puisque les crédits dont il s'agissait étaient de l'ordre de 800 ou 900 millions d'euros. En toute hypothèse, ramenés à la masse globale des crédits de l'État, ce n'était pas une question d'économies.
    En revanche, à l'issue du travail effectué par la MEC, deux thèmes principaux avaient été développés, que je voudrais succinctement rappeler. Nous avons considéré qu'il était indispensable pour un pays comme le nôtre d'avoir un véritable outil de prévision qui adapte des réflexions et des pensées au niveau national, au niveau international et, bien entendu, au niveau décentralisé, au niveau des collectivités territoriales. C'est la raison pour laquelle nous avions imaginé un outil assez réduit, comportant peu de membres, s'adossant sur différents groupes, biodégradables, ou périssables. Ce travail, cette réflexion aurait permis d'avoir une vision globale de notre pays et de savoir dans quelle direction il avançait. Nous avions pensé, c'était tout aussi important, que le mode d'alimentation de ce groupe de réflexion devait lui permettre de s'adosser, non pas simplement sur les petits groupes de prospective infra-ministériels, mais également sur l'ensemble des universités et du monde de la pensée universitaire qui, en France, est sous-utilisé. Nous avions pensé également que l'on pouvait concevoir un système de think tank à la française, avec notamment des fondations permettant d'alimenter cette réflexion commune.
    Cet aspect nous paraissait intelligent dans la mesure où il mêlait la prospective nationale et la prospective territoriale. La conviction qui nous habitait - et qui m'habite donc -, c'est qu'une vision de la France ne peut être précise si elle ne mêle pas justement la conception nationale et la conception territoriale.
    D'autre part, nous avions pensé qu'il fallait que la France se dote enfin d'un outil d'évaluation performant. Monsieur le ministre, je vous entends si souvent, et avec le plus grand plaisir, employer le mot « évaluation » à propos de vos projets de réforme, que vous ne pouvez pas me démentir. Je sais que, au fond, vous pensez exactement comme moi. En France la notion d'évaluation publique...

    M. Patrick Braouezec. En un mot ou avec « d » apostrophe ?
    M. Georges Tron. ... n'est guère usitée, car ce n'est pas dans notre culture. Cette réflexion n'a rien de polémique, car, quel que soit le gouvernement en place, nous refusons la véracité des chiffres, nous refusons de voir les choses telles qu'elles sont. M. Braouezec nous a parlé tout à l'heure des salaires. Lorsqu'il évoque les négociations salariales, il oublie de nous préciser  - ce qui ne relève pas de l'évaluation, mais de la sincérité - que, dans la rémunération des fonctionnaires, on ne doit pas tenir simplement compte de l'évolution du point d'indice, mais aussi du GVT et des mesures catégorielles.
    M. Patrick Braouezec. Qui ne sont pas pris en compte dans les retraites !
    M. Georges Tron. Avec de telles considérations, le débat s'établit sur des bases radicalement différentes et les négociations salariales que va engager le Gouvernement ne s'ouvrent pas sous les mêmes auspices et n'offrent pas les mêmes perspectives. Je le répète, ce n'est pas de l'évaluation, c'est simplement de la sincérité.
    Je voudrais en effet, pour terminer, plaider pour la sincérité. Pour être sincère, monsieur Braouezec, il faut des outils d'évaluation. C'est la raison pour laquelle nous avions pensé qu'on pouvait se doter d'un outil d'évaluation équidistant de l'exécutif et du législatif, et qui permettrait à notre pays de savoir quelle est la valeur des politiques publiques qu'il mène.
    La commission s'est livrée à un véritable travail de réflexion. Elle s'est réunie pendant six mois, a auditionné des personnalités exceptionnelles, qui lui ont expliqué comment cela devrait fonctionner. Réformer l'État, c'est, bien entendu, modifier les règles de la fonction publique. Mais c'est aussi avoir le courage de penser la France de demain sous tous ses aspects et de savoir exactement où nous en sommes dans le cadre des politiques publiques. Voilà pourquoi il me paraît important de faire aussi bien de la prospective que de l'évaluation. Je me permettrai de rappeler, modestement, que la commission des finances a remis, sur ce sujet, un bon rapport. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Denis Merville, dernier orateur inscrit.

    M. Denis Merville. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner les crédits consacrés en 2004 à l'aménagement du territoire, à la fonction publique et à la réforme de l'État.
    Nous le savons, le budget de cette année s'inscrit dans un contexte difficile. Pourtant, nos obligations sont nombreuses. Il nous faut à la fois répondre aux besoins et aux attentes des Français, réduire le poids des impôts et des charges, valoriser le travail en favorisant notamment l'innovation. Les dérapages incessants des dépenses publiques - où déficit et dettes se cumulent - nous imposent d'agir. Pour cela, nous n'avons plus le choix : nous devons réformer et décentraliser.
    Le Gouvernement s'est engagé dans une nouvelle étape de la décentralisation. Il a raison, car, pour être efficace dans l'exercice de ses missions régaliennes, l'État ne peut s'occuper de tout. Cette réforme doit donner davantage de responsabilités aux collectivités territoriales, pour rendre un meilleur service à nos concitoyens. Mais, pour être synonyme d'efficacité, la décentralisation exige une réforme de l'État. Tout nous l'impose, jusqu'à l'Union européenne qui est là, qui avance, qui va s'élargir et au sein de laquelle nous ne maintiendrons notre place qu'en étant compétitifs.
    Or, malgré la bonne volonté du Gouvernement - que nous avons encore constatée aujourd'hui -, cette réforme ne me paraît pas aller assez vite. Au printemps, à l'occasion du débat sur la maîtrise des dépenses publiques et l'amélioration des performances de l'État, nous vous avions signalé quelques pistes. Maintenant, les réformes doivent suivre.
    L'an passé, déjà, à l'occasion de l'examen de ce budget, j'avais évoqué, par exemple, quelques-uns des acteurs qui interviennent dans l'aménagement du territoire. Monsieur le ministre, j'ai eu, tout à l'heure, l'occasion de souligner combien la démarche engagée était satisfaisante, puisque vous avez répondu à notre demande de simplifier et de regrouper ces organismes. L'exemple que vous avez donné doit être suivi. Certes, il reste des progrès à faire : il suffit de songer aux nombreux organismes consultatifs trop centralisés qui oeuvrent dans des domaines relevant du Plan et de l'aménagement du territoire et qui produisent études et rapports en quantité. Ne pourrait-on réduire leur nombre ? Ne pourrait-on simplifier certaines procédures ? Ne pourrait-on pas limiter le nombre des commissions qui opèrent sur le terrain ?
    J'ai évoqué, cet après-midi, les mesures qui ont été prises à propos de la DATAR. Mais je crois qu'il faut aller plus loin. En effet, l'action décentralisée - que souhaitent le Gouvernement et le Premier ministre - exige que l'on fasse confiance aux acteurs locaux et au tissu associatif. Cette dynamique est forte aussi dans le domaine économique. On nous parle beaucoup de zonage, de règles, d'aides très nombreuses. Cela intéresse-t-il les entreprises ? Je n'en suis pas certain.

    Dernièrement, dans mon département, se déroulait une réunion au cours de laquelle le sous-préfet et de nombreux fonctionnaires ont parlé très longuement. A la fin, quelques chefs d'entreprise se sont levés et ont expliqué ce qu'ils souhaitaient : moins d'impôts, moins de charges et des procédures plus simples. Monsieur le ministre, on reproche parfois aux politiques d'avoir perdu le contact avec le terrain. A la rentrée, certains leur ont proposé de s'immerger trente-six heures dans une famille pour voir la réalité de plus près. Ce n'est pas vous, monsieur le ministre, qui avez été maire d'une petite ville et président de l'Association des maires de France, qui me contredirez : les hommes et les femmes politiques qui ont l'expérience d'un mandat local connaissent bien la réalité. Je me demande parfois si cette expérience télévisuelle ne serait pas plus utile à certains hauts fonctionnaires. (Sourires.) Ils y découvriraient ainsi la richesse du tissu local et verraient combien les procédures et réglementations édictées dans certains bureaux parisiens sont lourdes, quand elles ne sont pas inapplicables sur le terrain. J'insiste : je suis persuadé que la recherche d'équilibre entre les villes et les campagnes est une voie possible pour un aménagement harmonieux du territoire. Donner à tous une chance, tirer le meilleur parti de chacun, de ses avantages, de ses faiblesses, c'est bien. Mais force est de constater que l'intercommunalité n'est pas toujours le lieu d'expression de cet équilibre. Parfois, nous voyons le choc du pot de terre contre le pot de fer. Il ne faudrait pas que, comme les super et hypermarchés ont étouffé le petit commerce, demain, ce soient les grosses agglomérations qui étouffent le tissu local et « déménagent » notre territoire. Ces intercommunalités grossissent, certains de mes collègues l'ont dit avant moi. De nombreux moyens leur sont nécessaires, mais ces choix pèseront et pèsent déjà sur la fiscalité locale. Aussi est-il important d'éviter qu'il y ait un troisième et un quatrième échelons dans nos collectivités territoriales.
    Monsieur le ministre, vous le savez : je crois que la décentralisation doit s'accompagner d'une réforme de la fonction publique territoriale. Vous nous avez répondu sur ce point. Je n'y reviendrai pas.
    Enfin, la commission des finances, et notamment notre rapporteur, s'est interrogé sur l'efficacité réelle des CIRA. Nous avons à ce sujet approuvé un amendement de suppression de crédits. Monsieur le secrétaire d'État, vous nous avez apporté tout à l'heure des informations qui montrent votre volonté de réformer ce service, de faire qu'il soit plus efficace, qu'il réponde davantage aux besoins des administrés. On ne peut que vous en féliciter. Votre voeu aura été exaucé avant qu'il ne soit examiné par notre assemblée.
    Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, encore une fois, je vous engage à poursuivre ces réformes, qui vont dans le sens de l'intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais d'abord saluer la qualité du rapport de Georges Tron. Je connais sa motivation et sa compétence en matière d'analyse de la fonction publique et partage les analyses qu'il a formulées. Il s'est interrogé sur la faiblesse du taux de consommation de l'article 57-06. Cela s'explique tout simplement par le fait que des crédits ont été mis en réserve et qu'aujourd'hui les crédits disponibles ont été consommés à 90 %. Peut-être devrions-nous améliorer encore la présentation des chiffres et, avant l'examen de la loi de finances, indiquer très clairement les crédits qui ont été gelés et le taux de consommation des crédits disponibles.
    Nous partageons, entre autres points de cette remarquable intervention, l'idée de révolution culturelle. Nous devons changer totalement d'état d'esprit vis-à-vis de la fonction publique, en faisant confiance aux fonctionnaires, en les responsabilisant et en mettant l'usager au coeur de l'objectif de l'action publique.
    A propos de la modernisation de la GRH, il est exact qu'aucun système ne peut fonctionner sans prise en considération des ressources humaines. La GRH doit avoir la capacité d'en explorer, d'en utiliser la potentialité et le talent. Nous devons donc faire confiance aux hommes et aux femmes de la fonction publique, qui, souvent, se sentent épuisés face à la neutralisation, à l'impossibilité de faire preuve d'imagination, à l'obligation d'être uniformes, de respecter des circulaires, alors que, s'ils pouvaient faire preuve d'un peu de pertinence ou d'intelligence, ils auraient la capacité d'améliorer considérablement l'efficacité de l'action publique.

    Vous avez évoqué, monsieur Tron, la relation entre la notation et la rémunération. Certes, il faudrait faire en sorte qu'on ne mette plus vingt à tout le monde. Il faut distinguer la notation relative et la notation absolue. Les responsables de l'encadrement doivent pouvoir dire pourquoi une note augmente d'une année sur l'autre ; il faut pouvoir formuler une appréciation positive ou une appréciation négative, et ne plus avoir d'augmentation systématique à l'ancienneté. On me dit que certaines notes dépassent vingt sur vingt. Nous sommes là dans un monde ubuesque.
    D'autre part - et nous l'avons dit très clairement - , nous devons faire en sorte qu'il puisse y avoir accélération ou ralentissement des carrières en fonction de la performance, de la motivation et de la responsabilisation.
    Nous partageons également votre point de vue sur la mobilité, qui doit être géographique, fonctionnelle, au sein de la fonction publique de niveau central, de niveau local, entre les trois fonctions publiques et avec le secteur privé.
    Nous partagons votre analyse sur les conclusions du rapport Berger, et nous souhaitons prendre en considération la mesure qui consisterait à ramener de cinq ans à deux ans le délai pendant lequel un fonctionnaire ne peut travailler dans une entreprise privée avec laquelle il a été en relation dans le cadre de ses anciennes fonctions, avec une inversion de l'aspect pénal.

    Enfin, en ce qui concerne la haute fonction publique, vous êtes d'accord avec notre réflexion sur la fusion des corps, visant à élargir l'espace de choix et de liberté. Nous sommes ravis de pouvoir, avec vous à nos côtés, contribuer à cette réforme de la fonction publique, qui est un préalable nécessaire pour engager la réforme de l'État. La réforme de l'État ne se fera pas sans la motivation des acteurs, sans que le fonctionnaire en soit lui-même un acteur.
    Monsieur Michel Piron, j'ai apprécié la pertinence de votre analyse sur l'intérêt que nous avons apporté à moderniser la gestion des ressources humaines, trop souvent absente dans la fonction publique. Je suis souvent malheureux de voir que nous sommes en retard par rapport au secteur privé que certains vilipendent. On ne prend pas assez en considération la dimension humaine du fonctionnaire dans sa mobilité, on ne tient pas assez compte de sa famille. Par une mécanique habituelle, qui n'est donc pas remise en cause dans certaines administrations, les fiches de paie sont envoyées avec deux ou trois mois de retard, même si le virement est fait mensuellement : cela trahit, à l'évidence, un manque de considération vis-à-vis de l'employé.
    La culture de l'efficacité est obligatoire : je le dis d'ailleurs à ceux qui veulent être, à nos côtés, les vrais défenseurs du service public. Défendre le service public, c'est lui donner tous les moyens d'être efficace. Car, sans qualité du service public, c'est le service public lui-même que nos concitoyens remettent en cause. La preuve en est que, à leur corps défendant, certains - et j'en connais beaucoup - mettent leurs enfants dans telles écoles plutôt que dans telles autres, parce qu'ils ont tout simplement envie que l'enseignement soit à la hauteur des ambitions qu'ils nourrissent pour eux. Et c'est ce qui se produit aussi pour certains hôpitaux et pour d'autres services publics encore. On voit donc bien qu'il faut que nous puissions retrouver la fierté du service public par la qualité du service rendu.

    Pour ce qui est de la réalité économique, vous avez mille fois raison : on ne peut pas imaginer un seul instant vouloir défendre des intérêts catégoriels sans tenir compte de l'intérêt général, et il ne pourrait pas y avoir un service public en bonne santé dans une économie générale qui ne le serait pas. Les deux vont de pair : une économie privée performante a besoin d'un service public performant
    Pierre Bourguignon nous a fait part de l'inquiétude des fonctionnaires. Depuis plusieurs années, en effet, ils sentent bien la fragilisation du secteur public, sous l'effet d'une sorte d'inflation des dépenses qui nourrit un déficit et fait augmenter la dette. Le bon sens populaire sait bien qu'on ne peut pas vivre éternellement de déficits, et qu'il faudra bien sortir d'une approche quantitative pour adopter une approche qualitative. Vouloir toujours de plus en plus de moyens, c'est, paradoxalement, reconnaître l'incapacité du service public à relever un certain nombre de défis de société.
    Je le dis ici avec une extrême gravité : si on laisse sans réagir l'opinion croire que le service public doit être le lieu où la responsabilisation individuelle recule, nous ne trouverons jamais de solution. L'explosion des contentieux dans les tribunaux tient tout simplement à l'incapacité de nos concitoyens à régler leurs litiges par la médiation de proximité. La crise des services d'urgence dans les hôpitaux tient à un recul des solidarités familiales et générationnelles. Sans une responsabilisation des parents, on pourra toujours augmenter le nombre d'enseignants : ils ne suffiront pas à éduquer, à élever et, tout à la fois, à inculquer un savoir.
    Vous voyez bien qu'il s'agit là d'un problème de société. Se contenter de demander toujours plus de services publics, sans réfléchir aux drames de notre société et en attendant des services publics qu'ils y répondent, c'est tronquer le débat et s'interdire de régler les véritables problèmes.
    A contrario, comment le service public peut-il accompagner ce souci de responsabilisation et rendre aux habitants de notre pays leur sens de la responsabilité collective et individuelle ? C'est ce qui renforcerait le pacte républicain auquel nous sommes tous attachés.

    Christian Blanc, vous avez, d'une façon tout à fait remarquée, posé les questions fondamentales, en évoquant notamment l'architecture de la décision publique.
    Les services publics ne relèvent pas, aujourd'hui, d'une pensée de droite ou de gauche. Dans une économie mondiale de service, les questions qui se posent à nos services publics sont les suivantes : sont-ils lents ou rapides, adaptés ou inadaptés, efficaces ou inefficaces ? Nous voyons bien que nous avons à relever le défi de la réduction du délai entre la prise de décision politique et sa mise en oeuvre, et qu'il nous faut anticiper. L'inquiétude que vous évoquiez tient au fait que l'avenir est illisible et le quotidien inconfortable. Tant que le confort du quotidien n'est pas assuré, nos concitoyens ne peuvent pas imaginer de se projeter dans l'avenir. La responsabilité du politique, c'est de pouvoir répondre, avec le service public, à la seule question de fond : sommes-nous capables d'écrire un avenir dans lequel nous avons envie de vivre, ou allons-nous subir un avenir écrit par les autres ? De cette capacité du politique à modifier le cours de l'avenir, dépendra l'avenir de notre démocratie. Sinon, l'impuissance du politique précèdera l'inutilité du politique et ouvrira les portes aux extrémismes et au populisme.
    Le service public doit aider à la prise de décision politique, par l'anticipation, par l'ingénierie, par la capacité de préciser les défis. D'où « l'État stratège ». Mais l'État stratège doit également faire confiance aux élus d e terrain et à l'administration locale.
    A cet égard, je partage totalement le point de vue selon lequel le contrat de confiance doit être fondé sur un contrat d'objectifs soumis à une évaluation. Actuellement, nous vivons dans un système qui repose sur la méfiance. L'administration centrale se méfie de l'administration locale, parce qu'elle l'estime moins capable qu'elle de gérer convenablement des crédits. C'est pourquoi il nous faut établir des contrats d'objectifs et juger les hommes sur leurs qualités : soit ils obtiennent les résultats que nous attendons d'eux, et ils sont récompensés, soit ils ne les obtiennent pas, et ils sont sanctionnés. En tout cas, c'est un élément déterminant, nous ne pouvons pas multiplier les centres de décision, car cela neutralise l'action et favorise l'éparpillement des responsabilités.

    Si nous ne changeons rien, nous nous dirigerons vers un système où chacun ouvrira systématiquement son parapluie, recherchera toujours le plus petit dénominateur commun et prendra aussi peu de risques que possible. Or, nous vivons dans un monde où les technologies nous apportent sans cesse des données nouvelles, où il faut relever les défis de plus en plus rapidement et où la prise de risques et de responsabilités sera un élément déterminant pour l'efficacité d'une entreprise, d'une administration, et pour la gestion d'un territoire.
    Et si nous laissons cette chaîne de commandement telle qu'elle est, c'est au contraire l'allongement de la prise de décision et la réduction de la prise de risque assurés. Autrement dit, c'est l'immobilisme au moment où notre société exige de nous la mobilité, la réactivité et la rapidité. Sur la formation au management, c'est précisément là que se trouve la clé de la réussite. Si nous vivons dans une chaîne où personne ne souhaite prendre ses responsabilités parce que sa carrière en dépend, notre système va périr. Nous avons besoin, aujourd'hui - et nous commençons par le haut -, de responsabiliser la haute fonction publique, demain, de responsabiliser les collaborateurs et l'encadrement intermédiaire pour faire prendre conscience aux uns et aux autres que la meilleure considération que l'on puisse apporter aux fonctionnaires, c'est de leur permettre d'exprimer leurs talents et leurs compétences dans l'exercice d'un service pour lequel ils doivent répondre, un, à l'exigence de donner satisfaction à l'usager, deux, à leur demande d'épanouissement, trois, à la nécessité que le service rendu soit efficace.
    Et nous souhaitons faire en sorte, en effet, que l'Ecole nationale d'administration ne soit pas une école de pouvoir, ou de conquête du pouvoir, mais une école qui donne tous les éléments de formation qu'il faut avoir reçus pour être un bon manager. C'est la raison pour laquelle nous y introduisons une séquence qui donne tous les éléments de la gestion des ressources humaines, de la mise en place de notions telles que le contrat d'objectifs ou le contrat de résultats. C'est ainsi que nous dissocions la vie administrative de la vie politique. Sommes-nous allés assez loin ? En tout cas, nous avons ouvert une porte, et le débat parlementaire permettra de creuser encore cette piste. Il faut que, au nom de l'égalité du citoyen, nous fassions en sorte que le fait d'être fonctionnaire ou de ne pas l'être n'ait pas de conséquences sur le choix que vous pouvez faire de vous impliquer dans la vie politique. Aujourd'hui, un fonctionnaire qui quitte totalement son administration a un déroulement de carrière identique à celui d'un fonctionnaire qui se consacre entièrement à son administration. Cela me paraît totalement injuste. Et en tout cas, cela ne me paraît pas correspondre à ce qu'exige une démocratie saine.
    Enfin, sur le service minimum, je voudrais dire à M. Braouezec, puisqu'il citait Christian Blanc, qu'il ne doit pas y avoir, dans un système démocratique, de question taboue.
    M. Georges Tron. Absolument !

    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Nous prenons l'habitude de jouer petit bras quand nous sommes politiques. Et je n'ai cessé d'entendre, depuis le début de ma carrière politique : « Surtout, tu ne devrais pas poser ce genre de questions. » Eh bien, je me réfère à mon instituteur, qui disait qu'une question bien posée est dëjà un problème à moitié réglé.
    M. Patrick Braouezec. C'est ce que je disais moi-même quand j'étais instituteur !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Que demande Christian Blanc ? Il demande que l'on réfléchisse à l'équilibre entre le droit de grève, que personne n'entend remettre en cause, et le droit de l'usager, qui ne peut pas non plus être méprisé. Entre ces deux exigences, nous devons trouver un juste compromis, et je trouve que le débat parlementaire permettra d'enrichir la réflexion des uns et des autres.
    M. André Schneider. Très bien !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Je voudrais dire à M. Braouezec que je salue son origine enseignante. Je trouve d'ailleurs qu'il en a gardé toutes les qualités de pédagogie. Et je souhaite qu'il ne sanctionne pas...
    M. Patrick Braouezec. J'ai eu de meilleurs élèves !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Je n'ai pas la prétention d'être à vos yeux un bon élève...
    M. Patrick Braouezec. Non, non. Je ne parle pas de vous, monsieur le ministre ! Je pensais à ceux qui sont assis là-bas, sur les bancs de la majorité.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. ... mais j'essaierai de faire en sorte de m'améliorer à votre école !
    M. Jean-Luc Warsmann. C'est sûr qu'avec quatre députés de l'opposition dans l'hémicycle, il est impossible qu'il y ait beaucoup de bons élèves présents ici - bons au sens de M. Braouezec, bien sûr !
    M. Patrick Braouezec. Vous n'allez tout de même pas en faire grief à ceux qui sont présents !
    M. Jean-Luc Warsmann. Pas du tout ! Je note seulement que si vous n'êtes que quatre ce soir, c'est que les députés de l'opposition ne doivent pas être trop inquiets pour la fonction publique.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme et de l'aménagement du territoire. Si vous permettez, on va mettre fin à la récréation !
    Vous avez posé des questions intéressantes sur l'égalité hommes-femmes et sur l'accessibilité de la haute fonction publique. A ce sujet, un des soucis que nous avons paradoxalement, c'est que dans certaines administrations il y a un taux de féminisation trop élevé. Le débat a été posé en ce qui concerne l'école : aujourd'hui il y a une féminisation très importante, ce qui fait qu'un certain nombre d'enfants sont en contact avec beaucoup de femmes, et certains pédopsychiatres nous disent qu'il serait bon que l'école ait une dimension plus masculine. Dans la justice, c'est la même chose.
    Cela dit, la question de l'accès des femmes à certains métiers se pose, mais il faut leur permettre de pouvoir accéder à des fonctions de responsabilité. Vous avez développé un certain nombre de points, sur lesquels je reviendrai.
    Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce que je souhaitais dire, en vous remerciant de la qualité de vos propositions, qui nous permettent d'enrichir nos réflexions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Nous en arrivons aux questions. Nous commençons par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.
    M. Jean-Claude Lemoine. Monsieur le ministre, hier, lors du conseil national d'aménagement et de dé veloppement du territoire, nous avons longuement débattu du projet de loi relatif aux responsabilités locales. Sur ce sujet, je me suis permis d'insister sur l'importance des rapports ressources humaines de ce dossier.
    J'ai l'exemple dans mon département, et ce n'est sûrement pas un cas unique, des bonnes relations entre les fonctionnaires d'État et les fonctionnaires territoriaux. Il convient que la deuxième phase de décentralisation, que le Gouvernement mène actuellement, préserve cette situation, et renforce même la souplesse nécessaire dans le passage d'une fonction publique à l'autre. J'aimerais, monsieur le ministre, avoir sur ce point quelques précisions, et savoir ce que vous prévoyez de faire en la matière.
    Dans le même ordre d'idées, nous avons aussi évoqué hier la question de l'accès au service public, et, plus globalement, des services au public. Ce sujet lie aussi des préoccupations d'aménagement du territoire à des solutions qui touchent souvent plus à la fonction publique et à la réforme de l'État. En tant que ministre chargé de ces trois domaines, quelles sont les orientations envisagées et qu'avez-vous prévu, notamment, dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux ? J'ai bien compris que vous insistiez, dans ce domaine, sur la distinction nécessaire entre le guichet d'accueil et le pôle d'intelligence administrative, l'ensemble devant participer à l'accès à un service de qualité pour tous.
    Je voudrais souligner que mon département, la Manche, a engagé depuis plusieurs années déjà des démarches dans ce sens, en créant des visioguichets, et je voudrais vous féliciter pour l'engagement que le Gouvernement prend en faveur d'une réforme de l'État passant par l'administration électronique.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, nous entendons effectivement faciliter la mobilité entre la fonction publique territoriale et la fonction publique d'État. C'est la raison pour laquelle, dans la réforme de l'ENA que nous avons proposée, nous souhaitons que soient examinés par le directeur de l'école et le président du Centre national de la fonction publique territoriale quels sont les moyens de mettre en place un tronc commun de formation entre les administrateurs territoriaux et les fonctionnaires de l'État. Car l'articulation contractuelle entre l'État et les collectivités locales sera renforcée, et nous avons besoin d'avoir une culture partagée, une culture commune. Ce tronc commun est donc important, de façon à faciliter la mobilité.
    Deuxièmement, on voit bien que l'exigence de la génération nouvelle, celle de nos enfants, c'est de ne pas subir leur carrière mais de pouvoir respirer, dans un autre métier, dans une autre fonction, dans un autre territoire. Élargir la palette, faciliter la respiration entre les trois fonctions publiques, d'une part, et entre le secteur privé et le secteur public, d'autre part, c'est une exigence de la gestion du temps de nos jeunes générations.
    Vous évoquez la question du rapport entre le développement des territoires et l'organisation du service public. Nous sommes en train de conduire des expériences dans quatre départements, qui prennent en considération l'adéquation entre le service au public et les besoins des usagers. Qu'attendent nos usagers ? D'abord, une simplification de la démarche : où puis-je déposer, le plus près possible de chez moi, le dossier pour lequel j'ai besoin d'avoir une réponse assez rapide ? Nous sentons bien, de ce point de vue, que l'administration électronique est une piste à creuser. Henri Plagnol s'y investit beaucoup. D'ailleurs, il a livré des chiffres très étonnants, qui n'étaient pas forcément perçus par l'opinion. Nous sommes aujourd'hui, l'un des pays les mieux équipés au monde en administration électronique, où cet équipement est utilisé par les usagers, alors qu'il y a quelques années, nous étions très en retard. Je profite donc de l'occasion pour saluer toute son équipe et tout le travail qu'il fait en la matière. Il y a une accélération de l'usage des nouvelles technologies au sein de nos propres populations.
    Mais il faut éviter de tenir ce raisonnement faux selon lequel la simplification de la démarche signifie la simplification du traitement. La vérité est que la complexité fera de plus en plus partie du système, aussi bien du point de vue juridique que technique. Il faut concilier les exigences d'un délai rapide de réponse, d'une sécurisation juridique maximale de cette réponse, d'une fiabilité technique maximale du traitement du dossier et de la traçabilité même de celui-ci. Ce qui est insupportable à l'usager, c'est le sentiment que l'administration lui impose ses procédures, qu'il dépose un dossier sans savoir où il va, ou encore qu'il se fait balader d'un bureau à l'autre. La réorganisation du service au public, elle passe donc par un guichet de proximité, où chacun peut accéder à la chaîne de traitement de son dossier, quitte à ce qu'il y ait ensuite une réorganisation des pôles d'intelligence administrative qui ne sont pas forcément à proximité, mais qui permettent de concentrer une masse critique de juristes, ou d'urbanistes, permettant d'analyser le dossier et d'apporter des réponses. C'est ce schéma-là qui répond à deux objectifs politiques extrêmement républicains : un, l'égal accès de tous au service public par le guichet de proximité ; et deux, l'égale puissance administrative de traitement sur l'ensemble du territoire. Aujourd'hui, l'injustice entre le milieu rural et le milieu urbain, c'est quoi ? Ce n'est pas la qualité des élus, car ils sont tous de qualité identique. C'est tout simplement la différence de puissance administrative mise à la disposition d'un territoire.
    Voilà pourquoi les nouvelles technologies permettent, dans une économie de service, de distribuer de l'intelligence dans l'ensemble des territoires, à condition, bien sûr, qu'il y ait une émission de cette intelligence, laquelle passe par la réorganisation en pôles d'intelligence administrative qui, pour la première fois, nous permettra de dissocier la carte administrative de la carte politique. C'est un enjeu fondamental pour l'égalité des chances territoriales.
    M. Jean-Claude Lemoine. Merci, monsieur le ministre.
    M. le président. La parole est à M. Bernard Schreiner.
    M. Bernard Schreiner. Monsieur le ministre, vous avez courageusement lancé le débat sur la rémunération des fonctionnaires au mérite. La fonction publique ne peut rester immobile et doit s'adapter à son époque. La fierté des fonctionnaires, ce doit être de servir. Ils doivent le faire avec efficacité et avec conscience professionnelle. Il est donc naturel de récompenser le mérite, notion républicaine par excellence. Le statut des fonctionnaires fait de la manière de servir un des éléments de la notation. Il est dès lors indispensable de donner une application concrète de ce dispositif trop souvent contourné par des pratiques discutables.
    Pouvez-vous nous préciser aujourd'hui, monsieur le ministre, quelles sont vos intentions et quel pourrait être votre calendrier pour mener à bien ce chantier de modernisation indispensable à la compétitivité de notre pays ?
    M. André Schneider. Très bien ! Excellente question !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la réforme publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Merci, monsieur Bernard Schreiner, de poser cette question. En réalité, plus qu'un calendrier, ce qui est important, c'est de créer un mouvement, et un mouvement irréversible. Je ne crois pas du tout au « grand soir » de la réforme, mais tout simplement à la mécanique du mouvement que l'on enclenche. C'est Saint-Exupéry qui disait : « Dans la vie, il n'y a pas de solutions. Il y a des forces en marche : il faut les créer, et les solutions suivent. » Nous avons besoin de susciter, par l'encadrement supérieur, par la haute fonction publique, une capacité de contractualisation sur des objectifs donnés et d'évaluation des résultats, en nous appuyant ensuite sur l'encadrement intermédiaire. C'est un enjeu fondamental que de nous appuyer sur nos cadres pour distinguer le mérite et la performance.
    L'intéressement individuel aux évaluations et aux résultats est parfaitement possible au niveau d'encadrement de la haute fonction publique. A contrario, jamais - jamais ! - nous n'avons dit que nous allions rémunérer le pompier au nombre de feux éteints ou l'infirmière au nombre de piqûres. Ça, c'est de la caricature. En revanche, tous les fonctionnaires d'un même service sont très intéressés par la performance de leur service et par le juste retour de l'implication qu'ils ont consentie pour obtenir cette performance. J'évoque souvent le cas de ce service de la direction départementale de l'équipement dont le personnel, très fier, me montrait qu'en dématérialisant les procédures d'appel d'offres, il avait économisé des kilos de papier, fait gagner beaucoup de temps et dégagé - je vois encore le chiffre sur le tableau - 300 000 euros d'économies au bénéfice de leur administration. Spontanément, je leur ai demandé si leur administration leur en avait fait un juste retour, par exemple pour l'acquisition de matériel, d'ordinateurs, ou pour l'amélioration des conditions de travail. Ils m'ont répondu : zéro ! Comment imaginer un seul instant qu'on puisse mobiliser des agents pour qu'ils s'impliquent dans la modernisation de leur service alors qu'à l'évidence ils n'ont aucun retour de leur investissement ? Autre exemple, on m'a signalé que dans un service dépendant du ministère de l'économie et des finances, on avait conçu une simplification extrêmement pertinente de sept formulaires en deux formulaires, et où les fonctionnaires disaient spontanément : « On ne va pas le dire, parce que si on le dit, on va réduire nos effectifs. »
    On s'aperçoit donc que si la culture de l'usager n'est pas au coeur des préoccupations de chacun, c'est tout simplement parce que servir l'usager et apporter un peu plus d'efficience n'entraîne pas un juste retour de reconnaissance et de considération à l'égard des agents qui ont été à la hauteur de l'exigence d'efficacité. Nous devons comprendre que l'évolution d'un système - et c'est vrai dans une famille, dans une association, dans une entreprise, et a fortiori dans une administration - ne peut se concevoir que s'il y a de la responsabilisation, qui d'ailleurs est une marque de la dignité que l'on reconnaît à quelqu'un, et de la confiance qu'on lui témoigne. Vous voyez bien la différence entre cette philosophie et celle qui conduit à penser que l'individu n'est pas responsable et que c'est le système qui est important. Il y a ceux qui croient aux systèmes et ceux qui croient aux hommes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    M. le président. Nous en venons au groupe socialiste.
    La parole est à M. Victorin Lurel.
    M. Victorin Lurel. Je souhaiterais appeler votre attention, monsieur le ministre, sur la fonction publique outre-mer. Mais, auparavant, vous me permettrez une touche personnelle. Je n'ai pas été fonctionnaire, je le suis devenu. Je le suis resté très peu de temps. Mais en écoutant certains collègues, j'ai le sentiment tenace qu'on veut inoculer un certain malaise ou une certaine mauvaise conscience à la fonction publique. On parle de fierté. Mais précisément, il faudrait leur garder leur fierté. Ce sont des travailleurs qui servent honnêtement et utilement leur pays. Très sincèrement, j'ai l'impression, depuis quelque temps, qu'on cherche à leur donner mauvaise conscience. J'espère que tout à l'heure vous m'ôterez ce doute.
    Pour ce qui concerne l'outre-mer, notre éminent et distingué collègue Marc Laffineur a produit un rapport d'information au nom de la commission des finances sur la fonction publique d'État et la fonction publique locale outre-mer. En fait, il y est peu question de la fonction publique d'État, mais plutôt de la fonction publique territoriale. Celle-ci, pour des raisons historiques, qui étaient légitimes et qui le restent encore largement, bénéficie de certains régimes particuliers, notamment pour ce qui a trait à la rémunération, au régime indemnitaire, aux remboursements de frais, à la retraite et aux congés bonifiés. Notre estimé collègue estime que les effectifs sont pléthoriques, inefficaces, que ces régions sur-administrées seraient paradoxalement sous-encadrées. A son sens, la République est trop généreuse avec ses fonctionnaires lointains qui constitueraient une « priviligentsia » éhontée, une « nomenklatura » dorée sous les tropiques. Il faut y mettre le holà ! Il propose donc la suppression de tous ces régimes, en gratifiant au passage ces fonctionnaires - et c'est là que nous rejoignons ce que je disais au début - d'une vision culpabilisante, stigmatisante, voire méprisante.
    Ce ballon d'essai a pour objet, à notre sens, de préparer les esprits et d'engager, au nom d'une curieuse conception de l'unicité de la fonction, en ignorant les contextes historiques, géographiques et sociologiques, en refusant d'évaluer les effets et la diffusion de ces régimes dans la dynamique intersectorielle de l'économie, une véritable offensive contre la fonction publique.
    M. le président. Posez votre question, monsieur Lurel.
    M. Victorin Lurel. La question arrive, monsieur le président.
    M. le président. Vous avez dépassé votre temps. Posez donc votre question.
    M. Victorin Lurel. Je la pose.
    Cette offensive, on l'a vue ici-même, lors de la discussion de la première partie de la loi de finances où l'amendement présenté par MM. Méhaignerie et Carrez relatif à la suppression du remboursement de la TVA non perçue récupérable a été adopté, avec l'accord du Gouvernement.
    Monsieur le ministre, et voilà la question, dites la considération que vous portez - et que votre gouvernement porte - aux fonctionnaires de l'outre-mer, et, plus généralement, à la fonction publique. Dites-leur qu'ils ne sont pas des privilégiés et qu'ils servent efficacement leur pays. Rassurez-nous !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, permettez-moi de répondre avec mes deux casquettes : celle d'ancien président de l'Association des maires de France et celle de ministre actuel de la fonction publique.
    J'ai eu le plaisir de participer à des associations de maires dans votre beau département de la Guadeloupe, mais aussi dans l'ensemble des départements et territoires d'outre-mer. Je puis vous dire à quel point l'apport de la fonction publique est essentiel pour leur développement économique.
    Le rapport d'information du député Marc Laffineur ne répond pas à une demande du Gouvernement, mais de la commission des finances. Il analyse les dispositifs dont bénéficient les fonctionnaires d'outre-mer. La limite de ce rapport, comme le reconnaît d'ailleurs lui-même M. Laffineur, tient au fait qu'il ne contient aucune étude des répercussions de ces dispositifs sur les économies locales,...
    M. Victorin Lurel. Aucune, en effet !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. ... diagnostic qui doit nécessairement être effectué pour que l'on puisse aborder la question des surrémunérations en toute connaissance de cause. Il y a un débat, y compris parmi vous, les maires, puisque vous reconnaissez vous-mêmes souvent que vous avez une faible capacité d'encadrement en raison de cette surrémunération, et que vous recourez aux contractuels, voire aux emplois aidés. C'est un débat, que nous connaissons, sur la qualité de l'encadrement administratif, qui échappe quelquefois aux moyens budgétaires qui sont les vôtres.
    Nous sentons bien, au regard des difficultés que peuvent engendrer certains des dispositifs existants, que nous devrons bien un jour, dans le cadre de la réforme de l'État, nous poser la question de l'adéquation des dispositifs au développement économique auquel l'ensemble des élus, quelle que soit leur philosophie, souhaitent réfléchir. Nous avons souvent indiqué que la place des départements d'outre-mer dans les quatre océans devait être un facteur de développement également pour les territoires périphériques qui ne sont pas français car nous savons qu'il existe des déséquilibres, des ruptures et des concurrences par rapport à ceux-ci.
    Toute réforme devra prendre en compte ces deux aspects : le développement économique et la recherche d'une plus grande cohésion sociale. Vous êtes dans une situation différente de celle de la métropole : alors que celle-ci est aujourd'hui frappée de vieillissement, vous connaissez une forte augmentation de votre démographie, et vous êtes obligés de développer l'activité, de créer de l'emploi, d'assurer un développement économique au sein duquel la fonction publique doit apporter toute sa contribution.
    Les éléments actuels de la constitution de la fonction publique sont-ils un frein ou un atout pour le développement économique, vous interrogez-vous ? Si nous devons les faire évoluer, ce ne pourra être que de façon progressive, globale et cohérente, dans la perspective de développer vos taux de croissance économique. Je ne doute pas un seul instant que c'est l'état d'esprit de ma collègue Brigitte Girardin qui aurait pu être utilement interrogée sur ce sujet au cours de la discussion budgétaire concernant son département ministériel. Vous savez mieux que quiconque à quel point le Président de la République, le Premier ministre et Mme Brigitte Girardin sont extrêmement attentifs dans les débats auxquels ils participent au sein de l'Europe à ce que les départements d'outre-mer soient considérés comme une richesse pour la métropole et pour l'Europe. Les régions ultrapériphériques - encore que ce terme me paraisse inadéquat - sont en réalité au centre de zones de développement qui représentent un atout déterminant pour la politique et le rayonnement mondial de la France.
    M. le président. Nous en venons à une question du groupe des député-e-s communistes et républicains. La parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. Monsieur le ministre, la mise en place, dès 2004, d'un système de rémunération ayant pour objectif de promouvoir la valeur de chaque agent afin d'introduire partout le principe du salaire au mérite suscite de nombreuses questions.
    D'abord, cette proposition intervient dans le cadre de la réforme de l'État et de sa modernisation. Qui parle de réforme ne peut, dans le même temps, parler de restriction budgétaire sans se retrouver dans une démarche paradoxale. En effet, comment concilier restriction budgétaire et développement d'une politique d'intéressement ?
    Ensuite, à y regarder de près, il est difficile de trouver dans le projet de loi de finances une information chiffrée sur la mise en place du salaire au mérite.
    Enfin, cet intéressement va-t-il, une fois de plus, concerner les hauts fonctionnaires, qui bénéficient déjà de primes spéciales, ou l'ensemble des agents de l'État ?
    A ces questions, s'ajoute le fait qu'aucune indication n'est donnée sur la relation qui sera établie entre la rémunération et le résultat. S'agira-t-il de primes dues à la fonction ou à la personne ? Nous sommes dans le flou le plus total.
    Du fait de cette opacité, il faut redouter la mise en place d'un système fonctionnant sur l'arbitraire, que peu de gens pourront décoder, et qui pourrait varier d'un ministère à l'autre, mais aussi à l'intérieur d'un même ministère, et même de fonction à fonction. Le salaire au mérite est la traduction de la mise en place systématique de l'individualisation des rémunérations. Or individualiser, n'est-ce pas introduire de la différence au sein d'un groupe, pour ensuite diviser et mieux imposer de nouvelles règles et réduire encore plus les compétences du service public ? L'introduction du salaire au mérite est une décision idéologique, qui marque le choix minimaliste fait par le Gouvernement. Qui va, qui peut quantifier la qualité du mérite ? Quels seront les critères retenus ? Est-ce une réforme démocratique que d'introduire de la concurrence à l'intérieur des services de la fonction publique ? N'est-ce pas, une fois encore, faire le choix d'un libéralisme débridé au détriment des agents de l'État, mais aussi de la qualité du service public dû aux utilisateurs ? N'est-ce pas une occasion de dérouler ensuite le tapis rouge au privé ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, je suis ravi de votre question car, en arrivant au ministère de la fonction publique, je défendais le principe de l'unité de la fonction publique.
    M. Patrick Braouezec. C'est un bon principe !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme d'État et de l'aménagement du territoire. Puis, épluchant les dossiers qui me parvenaient, j'ai découvert assez rapidement qu'en fait d'unité de la fonction publique, les situations pouvaient être extrêmement différentes d'un ministère à un autre, qu'il y avait des primes pouvant atteindre 40 % du salaire pour les aides-soignantes de catégorie C, des primes au ministère de l'économie et des finances et aucune dans d'autres ministères. J'ai alors posé la question - je peux vous le confesser maintenant - aux organisations syndicales : croyez-vous comme moi à l'unité de la fonction publique, ou voulez-vous quatre fonctions publiques ?
    Vous craignez l'opacité ? Eh bien, je peux vous dire qu'actuellement l'opacité est totale. Il est impossible de savoir exactement ce qui se passe. Il y a un rideau de fumée permanent.
    M. Patrick Braouezec. Introduisez de la transparence alors !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Au nom de quel arbitraire avons-nous laisser, depuis quinze ou vingt ans, se différencier certaines administrations par rapport à d'autres, au point d'ailleurs que, au nom de l'égalité de la fonction publique, on parlait d'administrations nobles et d'administrations moins nobles, d'une fonction publique territoriale faible et d'une fonction publique d'État noble ! Nous sommes là dans le paradoxe le plus total et l'hypocrisie la plus complète.
    M. Victorin Lurel. Exact.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. On affiche un principe et on s'empresse de ne pas l'appliquer.
    M. Patrick Braouezec. C'est un peu vrai.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Avec la complicité en plus des uns et des autres, parce qu'on fait tout pour empêcher la transparence, qui permettrait d'établir la vérité.
    M. Patrick Braouezec. N'en rajoutons pas alors.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. C'est la raison pour laquelle, avec les organisations syndicales, j'ai très clairement demandé à connaître les effectifs et les affectations des agents de chaque ministère, y compris d'ailleurs pour les fonctionnaires qui sont détachés pour assurer des activités syndicales ou mutualistes. Qu'on sache enfin ! Pourquoi avons-nous peur de la vérité dans ce pays ? Je crois que plus on rendra les choses transparentes, plus on rapprochera le citoyen du politique et plus le politique assumera ses choix. Nous n'avons pas à rougir. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Enfin, vous avez parlé de « tapis rouge ». Je suis ravi de cette image car, en réalité, mon plus illustre prédécesseur, le défenseur du statut de la fonction publique en 1946, j'ai nommé Maurice Thorez, secrétaire général du Parti communiste,...
    M. Patrick Braouezec. C'est bien pour ça que j'ai parlé de « tapis rouge » !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. ... avait, à l'époque très clairement indiqué que ce statut impliquait certes des droits et des obligations mais également l'introduction de la notion de mérite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Georges Tron. Monsieur Braouzec, vous voyez, on a les mêmes références ! (Sourires.)
    M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.

SERVICES DU PREMIER MINISTRE
I. - Services généraux

    M. le président. J'appelle des crédits inscrits à la ligne « Services du Premier ministre » : « I. - Services généraux ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)

    « Titre III : 16 475 140 euros ;
    « Titre IV : moins 14 273 406 euros. »

ÉTAT C
Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 29 400 000 euros ;
« Crédits de paiement : 11 421 000 euros. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : " 29 400 000 ;
« Crédits de paiement : " 11 421 000 .
    MM. Migaud, Bourguignon, Bonrepaux, Idiart et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 72 rectifié, ainsi rédigé :
    « Sur le titre III de l'état B concernant les services du Premier ministre : I. - Services généraux, minorer les crédits de 336 000 euros. »
    La parole est à M. Pierre Bourguignon.
    M. Pierre Bourguignon. Cet amendement vise à minorer, symboliquement les crédits des services généraux du Premier ministre de 336 000 euros. Il s'agit d'un amendement d'humeur, car les dépenses de personnel et les effectifs des services généraux augmentent de nouveau alors que l'enveloppe des crédits avait déjà augmenté de 3,52 % en 2003. Or la façon dont le Gouvernement a mobilisé les moyens de communication pour tenter de convaincre l'opinion publique de la prétendue justesse de ses choix budgétaires, notamment à propos de la progression de la prime pour l'emploi, est particulièrement choquante.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?...
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial pour les services généraux, le conseil économique et social, le plan et le budget annexe des Journaux officiels. L'amendement n'a pas été examiné par la commission des finances.
    M. Patrick Braouezec. Seriez-vous schizophrène ? (Sourires.)
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. A titre personnel, je ferai simplement remarquer qu'il ne faut pas confondre information et propagande et que les crédits de personnel destinés au service d'information du Gouvernement me semblent augmenter de façon inconsidérée.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à la réforme de l'État, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 72 rectifié.
    M. Henri Plagnol, secrétaire d'État à la réforme de l'État. C'est un procédé classique, que nous avons tous utilisé dans l'opposition, que d'assimiler la mission d'information du Gouvernement à de la propagande. Mais je ne peux pas laisser M. Bourguignon prétendre que les crédits du service d'information du Gouvernement sont en hausse. Ils sont rigoureusement stables pour ce qui concerne leur montant global et ceux affectés aux actions d'information sont même en baisse puisqu'ils passent de 6,37 millions à 6,27 millions d'euros.
    De plus, je suis au regret de vous rappeler que ces crédits d'information avaient explosé sous le gouvernement précédent, puisque, pour la seule année 1998-1999, ils avaient augmenté de 30 %.
    Nous ne partageons donc pas du tout votre appréciation et nous sommes défavorables à l'amendement.
    M. le président. La parole est à M. Georges Tron.
    M. Georges Tron. Je comptais interroger le Gouvernement pour connaître la réalité des chiffres dans la période précédente ! Maintenant que je les connais, j'ai simplement envie de mettre en exergue le fait que, conformément d'ailleurs à ce que le groupe socialiste et mon excellent collègue Pierre Bourguignon ont souhaité, notamment durant le débat sur les retraites, il est tout à fait indispensable d'avoir une information qui soit à la hauteur de l'ampleur des lois que nous votons. Comme il me semble que, depuis un an, les lois qui ont été adoptées sont particulièrement importantes, sans compter celles qui sont en préparation, je suis certain que M. Bourguignon sera d'accord pour que nous puissions en informer les Français. (Sourires.)
    Ma seule surprise, finalement, c'est qu'en cinq ans il y ait eu aussi peu de lois importantes et autant de crédits dépensés ! Nous proposons de faire l'inverse, et de mettre l'information au service des lois que nous votons. C'est pourquoi nous sommes contre cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 72 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 7 et 11, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 7, présenté par M. Tron, rapporteur spécial, et M. Giscard d'Estaing, est ainsi rédigé :
    « Sur le titre III de l'état B, concernant les Services du Premier ministre : I. - Services généraux, réduire les crédits de 2 500 000 euros. »
    L'amendement n° 11, présenté par MM. Novelli, Tron et Giscard d'Estaing, est ainsi rédigé :
    « Sur le titre III de l'état B, concernant les Services du Premier ministre : I. - Services généraux, minorer les crédits de 1 106 321 euros. »
    La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, pour soutenir l'amendement n° 7.
    M. Louis Giscard d'Estaing. Messieurs les ministres, mes chers collègues, cet amendement, qui a été adopté par la commission des finances, concerne les crédits de l'Ecole nationale d'administration. Je voudrais me situer sur le plan quantitatif et rappeler l'historique de ce débat.
    Quantitativement, le budget pour 2003 prévoyait 30,9 millions d'euros de crédits pour l'Ecole nationale d'administration. Dans le projet de loi de finances 2004, on nous propose une augmentation de 1,1 million d'euros, soit 4 %, portant les crédits affectés à l'Ecole nationale d'administration à 32 millions d'euros.
    L'amendement que je vous présente vise à ne pas donner suite à cette hypothèse de hausse des crédits de fonctionnement de l'ENA de 4 %, et à générer, au contraire, une économie équivalente de l'ordre de 4 % par rapport au budget 2003, grâce à la réduction de la taille des promotions, ramenant celles-ci de 120 à 100 élèves, soit une baisse de 16 %, et à la rationalisation du fonctionnement des établissements de Paris et Strasbourg.
    Quant au contexte, permettez-moi de rappeler quelques-unes des interventions que cette question avait suscitées il y a un an ici même.
    Notre collègue Valérie Pecresse avait déclaré : « La réforme de l'ENA doit s'engager. Je sais, monsieur le ministre, que vous y êtes personnellement favorable. Répondez à nos attentes, soyez audacieux. »
    Notre collègue Jean-Jacques Descamps avait dit : « Je soutiens avec beaucoup de fermeté l'amendement [...]. Cela devrait la conduire à réfléchir à son avenir, au nombre de ses étudiants et lui donner le temps de se poser les questions qu'il faut ».
    Notre collègue François Sauvadet avait considéré que ce débat faisait honneur au Parlement. Il avait déclaré, en substance, que les élections du printemps 2002 avaient renvoyé une image très douloureuse des attentes de nos concitoyens, que les Français attendaient que le pays bouge et qu'il ne fallait pas leur donner une nouvelle fois le sentiment qu'en dépit de l'alternance, les choses ne changaient pas. »
    Le rapporteur général, Gilles Carrez, avait indiqué que la commission des finances avait adopté l'amendement que je présentais dans le projet de budget pour 2003, car la commission avait pour ambition d'économiser l'argent public partout où cela semblait possible. Il avait précisé : « Nous ne pouvons espérer une baisse des impôts si nous ne maîtrisons pas les dépenses publiques. Or, la plus petite économie relève du chemin de croix ». Il concluait que l'économie réalisable en l'espèce convergeait avec le besoin de réformer l'institution.
    En réponse, monsieur le ministre, vous nous aviez invités ainsi que des entreprises à nous joindre à vous pour vérifier si le projet d'établissement de l'école, que vous souhaitiez voir adopté au plus tard au début de 2003, était bien conforme aux objectifs que vous aviez fixés à l'administration de l'école. Et vous aviez conclu : « C'est là un contrat moral que je prends devant vous. J'ai apprécié la qualité de ce débat, la pertinence de vos observations, les utiles exigences que vous avez formulées ». En fonction de quoi, vous m'aviez demandé de bien vouloir retirer l'amendement et d'accepter le contrat de confiance que vous me proposiez.
    J'avais pris acte de cet engagement, estimant que ce débat était parfaitement fondé et utile, qu'il honorait notre assemblée et qu'il appartenait au Gouvernement de fixer des objectifs qualitatifs et quantitatifs à l'école : meilleure adéquation aux besoins de l'entreprise, meilleure formation aux exigences européennes. Rendez-vous était pris pour la prochaine discussion budgétaire et j'avais conclu : « Nous y serons. En attendant, je retire mon amendement ». Nous y sommes et nous allons pouvoir à nouveau discuter de la question.
    Quels sont les points qui étaient au coeur de cette réflexion sur l'ENA et qui ont motivé la proposition de réduction d'environ 4 % des crédits au travers de cet amendement ?
    D'abord, l'évaluation des besoins futurs d'encadrement de la haute fonction publique, notamment au regard de la pyramide des âges. Les promotions d'après-guerre de l'ENA étaient moitié moins nombreuses qu'actuellement et elles arrivent à l'âge de la retraite, de telle sorte que à l'heure actuelle un énarque qui part à la retraite est remplacé par deux énarques ? Ensuite, la future décentralisation réduit les perspectives en matière de besoins pour les administrations centrales. Enfin, les opportunités de promotion interne dans les filières de la fonction publique doivent être, comme vous l'avez souligné avec beaucoup d'insistance, monsieur le ministre, facilitées pour augmenter l'attractivité des carrières dans la fonction publique.
    Tous ces arguments plaident en faveur de la réduction de la taille des promotions au profit, d'ailleurs, des anciens élèves de l'ENA eux-mêmes ou des futurs anciens élèves de cette école, qui devront trouver des débouchés correspondant à la qualité de la formation reçue et à leurs propres aspirations de carrière. La réduction de la taille des promotions aurait, en outre, pour conséquence, même si comme Christian Blanc l'a dit excellement, ce n'est pas l'objectif premier, la réalisation d'économies budgétaires.
    J'en viens à la rationalisation des sites de cette école. Deux sites ont été maintenus à Paris alors que l'implantation à Strasbourg était entamée. Comme souvent, l'État n'est pas allé au bout du raisonnement en ne fermant pas l'un des sites parisiens. Les coûts de déplacement des enseignants à Strasbourg entraînent des dépenses supplémentaires. A cet égard, je me réjouis, monsieur le ministre, et avec moi tous les élus alsaciens, de l'annonce que vous avez faite hier de la délocalisation de la scolarité à Strasbourg. Le rapporteur du budget de l'aménagement du territoire que je suis, qui a déjà souligné dans son rapport pour 2004 que soixante-dix emplois ont déjà ainsi été transférés à Strasbourg, ne peut qu'approuver une telle décision dont la symbolique est très forte et réjouit tous les partisans d'une politique de l'aménagement du territoire et d'une mise en oeuvre de la décentralisation génératrice des synergies que vous avez vous-même, monsieur le ministre, évoquées hier devant nous dans votre réponse aux questions d'actualité sur la réforme de l'ENA que vous veniez de présenter.
    Réduction de la taille des promotions, d'une part, transfert de la scolarité à Strasbourg, d'autre part, voilà deux facteurs objectifs de présenter à la représentation nationale, ce soir, un budget qui intègre de telles économies et qui nous permette d'assumer pleinement le rôle que confie la Constitution à cette Assemblée et pour laquelle les électeurs nous confient par leur vote une mission républicaine et démocratique essentielle : le contrôle de la dépense publique. Or le document budgétaire qui nous a été transmis avant l'annonce de la réforme de l'ENA dont vous venez de nous faire part fait apparaître une augmentation d'un peu plus de 1 million d'euros des crédits de cette école, ce qui porte la dotation globale à 209 millions de francs. Encore ne s'agit-il que de crédits de fonctionnement et non de crédits d'investissement.
    Monsieur le ministre, l'élément nouveau que constitue la réforme de l'ENA que vous avez annoncée hier devrait nous permettre de concrétiser l'attente de nos concitoyens, à savoir l'optimisation de la dépense publique, qui est l'une des clefs de la réforme de l'État.
    Je vous propose donc, mes chers collègues, d'envoyer, par l'adoption de cet amendement, un message très clair et très fort. La réforme de la scolarité de l'ENA, la réduction de la taille de ses promotions, son transfert à Strasbourg s'accompagnant de la fermeture d'un des deux sites parisiens, tous ces éléments devraient aboutir à une économie, certes, modeste, mais hautement symbolique. Ainsi pourrons-nous dire : « Oui, nous avons agi pour le bien public, pour le bien du service public et pour celui de nos concitoyens. » Or n'est-ce pas là la raison pour laquelle nous sommes rassemblés ici ce soir ?
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Georges Tron, rapporteur spécial, pour la fonction publique et la réforme de l'État. Monsieur le président, seule l'amitié profonde et personnelle que j'ai pour mon ami Louis Giscard d'Estaing me conduit à ne pas m'offusquer du fait que, dans les citations qu'il vient de faire, ne figurait pas en dernier lieu un extrait de mon intervention, l'année dernière, à cette même place de rapporteur. Peut-être est-ce parce que, à l'époque, je m'étais prononcé contre son amendement et que je lui avais demandé, moi aussi, de le retirer. Mais je suis certain qu'il aurait donné d'autant plus de poids au fait que je me suis associé à cet amendement cette fois-ci s'il m'avait cité. Sans doute a-t-il voulu, par cette omission, donc préserver notre relation d'amitié !
    Plus sérieusement, monsieur le président, la commission des finances a effectivement voté l'amendement n° 7, il y a une semaine. En effet, comme l'a très justement rappelé Louis Giscard d'Estaing, nous nous souvenions tous des propos que vous aviez tenus et, la réforme de l'ENA s'inscrivant directement dans le cadre de la réforme de l'État, nous avons considéré que l'on ne pouvait pas mettre de côté tout ce qui a trait au système de formation de nos hauts fonctionnaires.
    Cependant, depuis lors, un évènement est intervenu, que vous avez évoqué et que Louis Giscard d'Estaing a rappelé : la réforme importante qui concerne notamment le recrutement pour toute la haute fonction publique, et en particulier l'ENA.
    M. Alain Ferry. Très bien !
    M. André Schneider. Il faut lui donner les moyens de fonctionner !
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. En tant que rapporteur spécial de la commission des finances, je vais vous reposer, après Louis Giscard d'Estaing, la question qui intéresse tout le monde : comment justifier l'augmentation de l'ordre de 3,6 % des crédits de l'École nationale d'administration, d'autant qu'il s'agit de fonctionnment et non pas d'investissement et que la réforme entrera en application dans les prochaines années ?
    Quoi qu'il en soit, je le répète, la commission des finances a voté l'amendement n° 7 et s'y est associée.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député Louis Giscard d'Estaing, je vous ai très clairement indiqué, y compris dans un courrier que je vous ai fait parvenir en réponse à votre demande, que vous aviez eu un bon réflexe, puisque vous ne connaissiez pas, alors, la teneur de la réforme, dont nous avons fait communication au conseil des ministres ultérieurement. Cependant, si nous partageons vos objectifs, nous ne partageons pas votre conclusion. Je vais tenter de vous expliquer les raisons pour lesquelles nous arrivons à des conclusions différentes, mais je comprends tout à fait votre réaction spontanée et justifiée de pointer une augmentation budgétaire apparement contraire aux principes que nous avions fixés l'année dernière : calibrage des promotions, régionalisation des outils et localisation à Strasbourg.
    Sans revenir sur la réforme, car vous la connaissez, je répondrai à trois questions que m'a posées le rapporteur spécial de la commission des finances : pourquoi cette augmentation ? pourquoi porte-t-elle sur des crédits de fonctionnement et non pas d'investissement ? quel est le calibrage des promotions ?
    Pourquoi le budget de l'ENA augmente-t-il ? Nous demandons, cette année, 32 006 777 euros, soit une augmentation de la dotation de 1 106 321 euros. Pardonnez-moi d'être un peu technique, mais c'est une manière de rendre hommage à votre volonté de maîtriser la dépense publique. M. le directeur Antoine Durrleman, qui est chargé de mener à bien l'application de la réforme, sera honoré de constater votre curiosité, comme ce fut le cas pour l'association ETD -  Entreprises, territoires et développement -, et vous recevra avec plaisir pour vous donner tous les éléments d'information susceptibles de satisfaire votre curiosité.
    En mesure nouvelle ; nous avons obtenu une augmentation de 1 586 500 euros rebaser le fonds de roulement ; j'y reviendrai. Nous avons prévu 213 501 euros de travaux pour répondre aux demandes de mise en sécurité du site de Strasbourg émises localement par la commission de sécurité. Vous vous êtes étonné, à juste titre, de ne pas trouver ces sommes, dans le bleu, parmi les crédits d'investissement. C'est tout simplement parce que, entre autres crédits demandés pour l'ENA, figurent 231 501 euros destinés à la sécurisation du site de Strasbourg - installation d'une alarme incendie et d'un système de désenfumage du bâtiment Sainte-Marguerite. Or la subvention versée à l'ENA par l'État est une subvention globale sur crédits de fonctionnement accordée à un établissement public administratif doté de l'autonomie juridique et financière. Bien évidemment, nous votons une subvention globale que le conseil d'administration de l'ENA, par la suite, ventile en crédits d'investissement et en crédits de fonctionnement.
    Par conséquent, votre réflexe est juste mais votre analyse est fausse. En effet, la subvention étant globale, la partie investissement se retrouve dans le budget de l'école et non pas dans celui de l'État. Avec cette traçabilité, je vous invite à reconnaître que les 231 501 euros sont justifiés.
    Ensuite, j'ai demandé 152 530 euros pour la revalorisation du point d'indice en 2004. Cette mesure s'impose car seule une partie de l'augmentation du point de la fonction publique avait été prise en compte dans le projet de loi de finances pour 2003. Ont également été demandés : 42 141 euros pour la création d'emplois de secrétaires administratifs de classe exceptionnelle, pour intégrer les personnels mis à disposition par France Télécom au bénéfice de l'agence comptable ; 14 122 euros pour la transformation d'emplois liés aux besoins de service et au repyramidage ; 6 593 euros pour la rectification d'une erreur matérielle dans l'inscription budgétaire d'un emploi de direction.
    En économies, vous sont proposés : 852 103 euros d'économies pour l'ajustement à la situation réelle des effectifs, je vous en parlerai ; 33 255 euros d'économies pour l'ajustement au nombre de postes offerts au concours ; 23 708 euros d'économies pour la transformation d'emplois au titre du plan Sapin.
    Soit un solde de 1 106 321 euros. Et bien évidemment, le fonds de roulement est en cours de rééquilibrage.
    Pourquoi un rebasage ? Le précédent gouvernement avait minoré artificiellement de 2,3 millions la base budgétaire de l'ENA. Le 1er janvier 2002, lorsque l'ENA a fusionné avec l'IIAP, l'Institut international d'administration publique, la base budgétaire du nouvel établissement a été abattue de 2,3 millions par rapport à ses besoins. Il disposait en effet d'un fonds de roulement important - 10,3 millions - et, plutôt que de l'utiliser à des travaux d'entretien, il a été décidé de le recycler pour financer l'exploitation courante. Cette minoration a été compensée par reprise sur le fonds de roulement du nouvel établissement, à hauteur de 4,6 millions, sur les exercices 2002 et 2003.
    Il est impossible d'adopter votre amendement, car l'ENA est déjà en situation de rupture de trésorerie : nous sommes en dessous des cinquante jours de fonds de roulement nécessaires pour payer les fournisseurs, norme en usage dans cet établissement.
    M. André Schneider. L'école ne peut plus fonctionner normalement !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Le rebasage est donc un élément important, et j'insiste sur le fait que nous avons accompli un réel effort. Alors que nous aurions dû demander 2,3 millions d'euros pour compenser la chute du fonds de roulement, nous nous sommes contentés d'un rebasage à hauteur de 1,6 million, avec une demande d'augmentation de crédits de 1,1 million.
    Voilà toutes les explications, et les pièces comptables concernées sont bien sûr à votre disposition pour vérification.
    L'effectif des promotions de l'ENA est également une question très importante. Pardonnez-moi, mais j'ai du mal à adhérer spontanément à votre argument selon lequel on voudrait remplacer un ancien énarque par deux énarques. Cela signifierait que, dans le secteur privé, les métiers ayant changé, on remplacerait un ancien élève d'école supérieure de commerce par deux élèves d'école supérieure de commerce. Ce serait une erreur. Avant 1962, il existait certes une administration d'outre-mer, qui a disparu depuis lors, mais, d'un autre côté, des besoins nouveaux sont apparus, et, à l'évidence, l'élévation de la qualification nécessaire dans l'administration crée un besoin de cadres supérieurs. Vouloir comparer, à cinquante ans d'écart, une promotion avec une autre, c'est oublier que le périmètre des compétences nécessaires a évolué. Je comprends le raccourci arithmétique, mais il ne me semble pas pertinent.
    Par contre, il me paraît important d'examiner l'effectif des promotions actuelles. Elles ont été, jusqu'en 2002, de 120 élèves par an, soit 60 pour le concours étudiant, 48 pour le concours fonctionnaire et 12 pour le troisième concours.
    La suppression du service national a eu pour effet un gonflement artificiel de la promotion en cours de scolarité. Elle s'est en effet traduite par le retour à l'école de 22 élèves qui avaient réussi antérieurement les concours et venaient d'achever leur service national. Compte tenu de l'absence de nouveaux départs sous les drapeaux, tous les lauréats du concours 2001, en revanche, sont entrés à l'école en 2002. Il en est résulté une promotion de 142 élèves : 120 du concours de 2002 plus 22 du concours précédent, de retour du service national.
    L'effectif de la promotion en cours de recrutement sera en baisse sensible puisqu'il a été fixé à 100 élèves, soit une chute de 35 % par rapport à la promotion 2002-2004 et une baisse de 20 % par rapport à la promotion 2003-2005, alors même que le nombre de candidats est en très forte augmentation : plus 22 % en un an.
    De plus, attention aux chiffres, car l'école n'accueille pas que les énarques : elle forme aussi 150 élèves étrangers par an, en trois cycles, ainsi que des stagiaires qui sont des officiers intégrés dans la fonction publique civile et des administrateurs civils promus au tour extérieur. Au total, en 2002, l'école a ainsi formé 397 élèves français et 309 élèves étrangers, sans compter les 600 stagiaires français et les 800 stagiaires étrangers de la formation continue.
    Enfin, la triple implantation entraîne-t-elle un surcoût et quelles sont les mesures d'économies engagées par l'école ?
    L'implantation de l'école sur trois sites génère des surcoûts liés notamment au doublement voire au triplement de certaines fonctions transversales - moyens généraux, informatique, documentation, sans oublier les déplacements nombreux, que l'on a pu chiffrer à 1 000 allers-retours par an entre Paris et Strasbourg. L'ENA a mis en place un système de visioconférences, avec un retour d'investissement sur un an seulement, qui a permis, en année pleine, d'accomplir une économie de 300 allers-retours, soit près de 100 000 euros ; l'école souhaite développer cette pratique des visioconférences.
    Si nous avons demandé cette somme de 1,1 million supplémentaires, ce n'est donc pas du tout en raison d'une augmentation de l'effectif de la promotion, mais pour effectuer un rebasage, pour mettre à l'étiage le besoin de fonctionnement de l'école. Nous avons bien mis en place la formidable réforme que nous vous avions proposée et qui correspond à votre exigence, monsieur le député. Elle consiste, d'une part, à recalibrer les promotions à 100 élèves, d'autre part, à rationaliser les coûts de fonctionnement, en transférant à Strasbourg une partie importante de l'activité de l'ENA, de façon à développer sa vocation européenne et son enracinement territorial, pour lequel nous souhaitons mettre en place un contrat de mutation.
    M. Alain Ferry. Très bien !
    M. André Schneider. Ça, c'est de la décentralisation !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. J'espère que la scolarité 2005 pourra être effectuée à Strasbourg.
    M. André Schneider. Très bien !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. En tous cas, les élus de cette ville, Mme Keller et M. Grossmann, nous ont donné les deux garanties nécessaires pour assurer la faisabilité de l'opération : la constructibilité du terrain annexe au bâtiment de l'école et la possibilité de loger les enseignants et les étudiants, même mariés, puisqu'il nous a été proposé d'acquérir un bâtiment dans lequel pourraient être aménagés des appartements.
    M. André Schneider. Ils seront très contents ! Strasbourg est une ville accueillante !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Enfin, nous reprenons une idée chère au Président de la République : développer, dans le cadre des traités de Paris, une association franco-allemande permettant de financer un très important rayonnement international de l'Ecole nationale d'administration.
    Nous sommes tout à fait disposés à jouer cartes sur table, dans l'esprit qui a été le vôtre à propos d'ETD, lorsque vous vous êtes rendu sur place pour vérifier.
    Il nous semble souhaitable de mettre en place un partenariat autour du directeur de l'ENA, M. Durrleman, qui est en train de consulter les organismes paritaires, pour voir comment cette mutation se déroule.
    Quant aux élus alsaciens, que je tiens à remercier pour leur soutien, leur motivation et leur détermination, ils sont en train de rendre possible ce qui paraissait difficile et de nous offrir les meilleures conditions d'accueil pour une école nationale chargée de la formation d'une élite administrative reconnue sur le plan international. La localisation de cette école à Strasbourg lui donnera évidemment un rayonnement européen et international, ainsi qu'une implication forte sur le plan territorial, au moment où nous lançons une nouvelle politique de formation continue.
    Dans un souci de rationalisation de ce transfert, nous avons demandé qu'une réflexion soit menée, autour du directeur, sur la faisabilité de la réalisation d'un site parisien unique, le maintien de trois sites étant une hypothèse exclue dans une approche rationalisée. Nous sommes actuellement en train de lancer les expertises.
    Je souhaite donc que vous ne brisiez pas ce formidable élan.
    M. Alain Ferry, M. André Schneider et M. Bernard Schreiner. Très bien !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Je vous rappelle, en outre, que, dans la concurrence universitaire internationale, certaines universités américaines souhaitent s'appuyer sur leurs homologues françaises pour créer des formations délivrant des masters d'administration publique. L'ENA a toutes les qualités requises pour relever ce défi en matière d'expertise, de recherche et de formation. Cette future école de fonctionnaires internationaux donnera à la France le rayonnement qu'elle mérite et nous permettra de conjuguer la fierté des Alsaciens et celle de notre pays. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Alain Ferry. Très bien !
    M. André Schneider. Enfin un ministre qui aime l'Alsace !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Je pense avoir répondu à vos questions, monsieur Giscard d'Estaing. Elles étaient pertinentes car elles procédaient d'un réflexe salutaire, l'augmentation des crédits ayant été annoncée avant la réforme.
    Je souhaite maintenant que la politique de retrait des amendements que je prône soit vécue non pas comme une stérilisation mais comme une fécondation. (Exclamations.)
    M. Michel Piron. Quelle saillie ! (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. Bernard Schreiner.
    M. Bernard Schreiner. En tant que député alsacien,...
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Ah bon ?
    M. Bernard Schreiner. ... je suis fier de mes origines. Je ne reviendrai pas sur les arguments techniques qui ont été énoncés, mais ni moi ni mes collègues...
    M. André Schneider. Venus en force !
    M. Bernard Schreiner. ... ne pouvons approuver l'amendement déposé par la commission des finances qu'a défendu par M. Giscard d'Estaing. Pour ma part, je souscris entièrement aux arguments techniques et politiques de M. le ministre.
    Adopter cet amendement serait politiquement négatif et dangereux pour le rayonnement de Strasbourg.
    M. André Schneider. Et aussi pour la décentralisation !
    M. Bernard Schreiner. Mes chers collègues, nous sommes constamment obligés de nous battre pour que le Parlement européen demeure à Strasbourg car certains députés des pays voisins font du lobbying en faveur de son transfert dans une autre capitale européenne. Par ailleurs, je rappelle que Strasbourg reste tout de même le siège du Conseil de l'Europe, plus ancienne institution européenne, mais également de la Cour européenne des droits de l'homme et des pouvoirs locaux.
    Or la réforme que vous engagez, monsieur le ministre, et je voudrais vous en remercier, a deux objectifs : d'une part, favoriser la décentralisation, en transférant l'ENA de Paris vers la province - je sais, pour avoir discuté avec certains élèves, qu'ils se sentent tout à fait à l'aise à Strasbourg -, et, d'autre part, donner à cette école une vocation européenne en formant aux questions de l'Europe les futurs étudiants non seulement de la fonction publique d'État mais aussi de la fonction publique territoriale, car les collectivités territoriales sont confrontées, elles aussi, au droit et aux échanges européens.
    Aussi supprimer ces crédits porterait-il un coup très dur à Strasbourg, Strasbourg qui se bat, Strasbourg dont le maire et le président de la communauté urbaine vous ont assuré de leur engagement. Alors, mes chers collègues, je vous demanderai, comme M. le ministre, de ne pas adopter cet amendement. Vous aurez travaillé pour le rayonnement de Strasbourg et dans l'intérêt de notre pays ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. André Schneider. Ils vont le retirer !
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Monsieur le président, le député de Paris que je suis est tout à fait d'accord avec celui de Strasbourg pour que l'ENA ait son siège dans cette ville. Il y a donc, sur cette question, une certaine unanimité.
    M. Alain Ferry et M. Bernard Schreiner. Très bien !
    M. André Schneider. Vous serez fait citoyen d'honneur !
    M. Claude Goasguen. Mais, puisque vous nous avez demandé de féconder, monsieur le ministre, nous aurons besoin de cinq minutes pour inséminer. (Rires.) Je vous demande par conséquent une suspension de séance, monsieur le président.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue le vendredi 24 octobre 2003 à zéro heure trente, est reprise à zéro heure trente-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.
    La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing.
    M. Louis Giscard d'Estaing. Ce débat nous a permis de faire, une fois encore, un point sur la situation de l'ENA, son évolution et les perspectives qui s'ouvrent à elle.
    Je me réjouis à nouveau que vous ayez annoncé hier, monsieur le ministre, la délocalisation future de l'école, dans un délai que nous souhaitons aussi proche que possible. Je pense d'ailleurs que tous les élus alsaciens la souhaitent dès 2004...
    M. Alain Ferry et M. André Schneider. Certainement !
    M. Louis Giscard d'Estaing. ... même si nous envisageons d'attendre 2005. Quoi qu'il en soit, nous serons évidemment présents au rendez-vous de cette importante délocalisation.
    Monsieur le ministre, vous avez avancé plusieurs arguments dont certains incitent à la réflexion. Ainsi de l'impact de la fin du service national. Il m'avait, certes, semblé que dans beaucoup d'autres écoles le phénomène avait connu des répercussions plus rapides. Mais si les promotions actuelles de l'ENA sont riches de nombreux officiers de réserve, nous ne pouvons que nous en réjouir, à l'heure où notre assemblée célèbre les réservistes ! (Sourires.)
    Vous avez également évoqué le problème de la rationalisation des sites de l'école. Elle en compte trois, dont deux à Paris. Il faudra bien sûr se prononcer le plus rapidement possible sur l'avenir de ces immeubles qui contribuent, certes, au patrimoine architectural parisien, mais pourraient aussi servir plus utilement l'État. Vous savez en particulier qu'un des organismes du ministère de l'aménagement du territoire verse à une société privée un loyer de 1,3 million d'euros pour ses locaux. L'un de ces bâtiments pourraît donc trouver de l'usage.
    Quant aux arguments financiers que vous avez développés, monsieur le ministre, ils représentent notre seule raison de regretter cet amendement. Nous sommes en effet passés près de la catastrophe, comme le prouve l'état du fonds de roulement de l'école. Nous ne pouvons pas prendre le risque de la mettre en péril et, surtout, à travers elle, ses fournisseurs, qui ne compendraient pas que la représentation nationale ait pu agir de la sorte.
    Monsieur le ministre, les perspectives que vous offrez pour cette école et notre responsabilité d'élu me conduisent à retirer l'amendement. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire. Je voudrais remercier le rapporteur de la commission des finances et le député Louis Giscard d'Estaing, dont je salue l'attitude. Je trouve très enrichissant cette exigence manifestée par les parlementaires à l'égard des budgets présentés par les ministres. Elle correspond totalement à l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances, et nous devons développer ce type de contrôle.
    Après avoir promis, l'année dernière, d'apporter les éléments de réponse à vos préoccupations concernant la réforme de l'ENA, je confesse que nous aurions probablement dû améliorer la collaboration entre parlementaires et entreprises au sein de la commission présidée par Yves-Thibault de Silguy.
    Le directeur de l'école a mandat pour envisager la réalisation d'un site parisien afin d'équilibrer les comptes - il a d'ailleurs pris contact avec les élus strasbourgeois pour en examiner la faisabilité.
    Je suis tout à fait prêt à mettre en place un partenariat permanent avec la représentation parlementaire pour accompagner la réforme. Si vous le souhaitez, nous pourrions vous recevoir au siège de l'école afin de vous transmettre tous les éléments d'appréciation sur le recalibrage des promotions et la réalité des aspects financiers. C'est en effet l'opacité et le manque d'information qui provoquent la suspicion, une réaction normale devant des chiffres non justifiés.
    Je vous remercie de la confiance que vous nous témoignez en soutenant une réforme que nous estimions déjà nécessaire l'année dernière, mais dont il restait à déterminer les objectifs. Comme vous, nous souhaitons la réussir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. L'amendement n° 7 est retiré, de même que l'amendement n° 11.
    M. le président. M. Bourguignon, rapporteur spécial, M. Goulard et M. Merville ont présenté un amendement, n° 4, ainsi rédigé :
    « Sur le titre III de l'état B, concernant les services du premier ministre : I. - Services généraux, réduire les crédits de 2 260 000 euros. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. Monsieur le président, cet amendement ayant été adopté contre l'avis du rapporteur, je préférerais que son auteur initial, Denis Merville, puisse le présenter avant que j'en fasse le commentaire.
    M. le président. La parole est à M. Denis Merville.
    M. Denis Merville. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, après l'ENA, viennent les CIRA, sans doute moins prestigieux... Les centres interministériels de renseignement administratif sont certainement issus d'une heureuse initiative. Il s'agissait d'informer les administrés, qui sont au coeur du service public, sur leurs droits et sur les démarches qu'ils doivent accomplir. Mais depuis leur création, il y a une trentaine d'année, les textes se sont multipliés, les choses se sont souvent complexifiées. Les besoins existent toujours, et en dépit des efforts des agents des CIRA, les usagers ne sont pas contents, et le disent.
    Depuis trente ans, les moyens d'information ont eux aussi changé avec l'apparition des nouvelles technologies. Nous souhaitons donc que ces services soient adaptés aux besoins et aux moyens actuels, et c'est le sens de l'amendement que François Goulard et moi avons présenté devant la commission.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. La commission a adopté l'amendement, mais à l'évidence, elle l'a fait dans la précipitation. Il s'agit de supprimer de façon aveugle les moyens de fonctionnement des centres interministériels de renseignement administratif. Or ces derniers sont justement en pleine phase de modernisation. L'adoption de l'amendement conduirait à bloquer la mise en place d'un centre d'appels téléphoniques généraliste, voire à la suppression des centres. Ils sont pourtant indispensables pour améliorer les relations entre les citoyens et l'administration.
    Je le rappelle, ces centres ont reçu plus de deux millions d'appels téléphoniques en 2002, soit 36,5 % de plus qu'en 2001 et 50 % de plus qu'en 2000. A l'évidence, et contrairement à ce qu'affirment M. Merville et ses collègues, les prestations fournies sont recherchées par les usagers. Les centres ont besoin d'être améliorés et modernisés, mais s'en priver n'irait pas dans le bon sens.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'État à la réforme de l'État. Monsieur Merville, vous l'avez vous-même laissé entendre, la finalité de cet amendement est d'attirer l'attention du Gouvrnement sur la nécessité de moderniser le renseignement administratif.
    Les centres interministériels de renseignement administratif, créés il y a une trentaine d'années, sont trop souvent méconnus. Ils fournissent des renseignements de « deuxième niveau », pour employer le langage des spécialistes, qui visent à répondre à des questions très ciblées requerrant une certaine expertise. Mais leur cadre régional fait que la très grande majorité des Français les connaissent mal, voire ignorent leur existence.
    Vous le savez, les CIRA ont engagé sous l'impulsion du Gouvernement un travail de modernisation. Ils achèvent cette année une première phase avec une mise en réseau des centres s'appuyant justement sur les nouvelles technologies. Nous sommes surtout à la veille d'une réforme, que je crois majeure, destinée à mieux orienter et mieux renseigner nos concitoyens, trop souvent victimes de la complexité des droits et des démarches, et souvent perdus dans ce qu'ils ressentent comme un labyrinthe administratif.
    Je vais, en effet, avec Jean-Paul Delevoye, à la demande du Premier ministre, inaugurer dans une quinzaine de jours un centre d'appels téléphoniques intégré. Sa base de données numérisée, qui rendra accessibles toutes les données sur le service public, se fonde d'une part sur le site service-public.fr et d'autre part sur les fiches questions-réponses excellemment rédigées par les CIRA, dont personne ne conteste l'expertise.
    Ce centre d'appels téléphoniques va être expérimenté dans la région Rhône-Alpes. Il couvrira 10 % du territoire. Grâce à un numéro unique, facile à mémoriser, les usagers pourront, en moins de trois minutes, être orientés et sécurisés dans toutes leurs démarches. Je crois qu'il n'est pas exagéré de parler à ce sujet d'un véritable « big bang » du renseignement administratif.
    Cette réforme a pu s'accomplir sans la moindre mise en cause des agents, avec un dialogue social remarquablement conduit et grâce à la collaboration pleine et entière des CIRA. Je crois, monsieur le député que cette modernisation répondra à vos attentes. Le Gouvernement vous serait donc reconnaissant de retirer votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. Georges Tron.
    M. Georges Tron, rapporteur spécial. Notre collègue Denis Merville va sans doute retirer l'amendement. Je serai donc bref. Je voulais simplement remarquer que l'augmentation des crédits est égale à epsilon.
    Je pense également que l'information des citoyens est quelque chose d'important. C'est pourquoi je me tourne vers mon ami Pierre Bourguignon, qui proposait tout à l'heure de réduire les crédits du SIG. Nous avons dû le convaincre qu'il s'agissait d'une mauvaise idée, puisqu'il défend ces autres pourvoyeurs d'information que sont les CIRA. (Sourires.).
    M. le président. La parole est à M. Denis Merville.
    M. Denis Merville. Il n'était pas du tout dans notre intention de priver nos administrés d'information. Hélas !, vu la complexité des textes, ils en ont besoin, au contraire.
    En commission des finances, le rapporteur ne nous avait pas informé de la réforme engagée par les CIRA, alors que l'objectif de l'amendement était justement d'obtenir des précisions à ce sujet. C'est un peu comme l'amendement précédent ; Louis Giscard d'Estaing ignorait la réforme de l'ENA - à moins qu'il n'y ait contribué.
    Vous nous avez montré, monsieur le secrétaire d'État, que les CIRA se réformaient afin de mieux répondre aux besoins des administrés. Dans ces conditions, je suis bien entendu d'accord pour retirer cet amendement tout en insistant pour que cette réforme soit suivie d'effet, et que l'on veille à ce qu'elle réponde bien à la demande des administrés.
    M. le président. L'amendement n° 4 est retiré.
    M. le président. Je mets aux voix le titre III.
    (Le titre III est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix la réduction de crédits du titre IV.
    (La réduction de crédits est adoptée.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix le titre VI.
    (Le titre VI est adopté.)

III. - Conseil économique et social

    M. le président. J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Services du Premier ministre : III. - Conseil économique et social ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)

Titre III : 591 862 euros. »

ÉTAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 900 000 euros ;
« Crédits de paiement : 900 000 euros. »
    Je mets aux voix le titre III.
    (Le titre III est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

IV. - Plan

    M. le président. J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Services du Premier ministre : IV. - Plan ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : moins 764 321 euros ;
« Titre IV :                         . »

ÉTAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 908 000 euros ;
« Crédits de paiement : 454 000 euros. »
    M. Bourguignon, rapporteur spécial, et M. Novelli ont présenté un amendement, n° 5, ainsi rédigé :
    « Sur le titre III de l'état B, concernant les services du Premier ministre : IV. - Plan, réduire les crédits de 2 000 000 euros. »
    Cet amendement est-il défendu ? (« Non ! Non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Monsieur le rapporteur spécial, il s'agit d'un amendement de la commission. Est-il défendu ?
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. Il aurait fallu que l'auteur de l'amendement le défende lui-même, mais il est absent. En effet, lors du débat en commission, je m'étais opposé à cet amendement qui avait néanmoins été adopté.
    M. le président. C'est la raison pour laquelle je demande si l'amendement est défendu.
    M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial. Je ne le défends pas, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 5 n'est donc pas défendu.
    L'amendement n° 53, deuxième correction, de M. Hervé Novelli n'est pas défendu non plus.
    Je mets aux voix la réduction de crédits du titre III.
    (La réduction de crédits est adoptée.)
    Je mets aux voix le titre IV.
    (Le titre IV est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS

    M. le président. J'appelle les crédits du budget annexe des Journaux officiels :
    « Crédits ouverts à l'article 48 au titre des services votés : 162 378 448 euros ;
    « Crédits ouverts à l'article 49 au titre des mesures nouvelles :
    « Autorisations de programme inscrites au paragraphe I : 21 000 000 euros ;
    « Crédits inscrits au paragraphe II : 6 696 552 euros. »
    Je mets aux voix les crédits ouverts à l'article 48 au titre des services votés.
    (Ces crédits sont adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix les crédits ouverts à l'article 49 au titre des mesures nouvelles.
    (Ces crédits sont adoptés.)

II. - Secrétariat général de la défense nationale

    M. le président. J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne « Services du Premier ministre : II. - Secrétariat général de la défense nationale ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)


    « Titre III : 1 907 928 euros. »

ÉTAT C

Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 17 972 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 9 870 000 euros. »
    Je mets aux voix le titre III.
    (Le titre III est adopté).
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)
    M. le président. Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire, concernant la fonction publique et la réforme de l'État, ainsi que de ceux des services du Premier ministre, du budget annexe des journaux officiels et du SGDN.
    La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

2

DÉPÔTS DE PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 23 octobre 2003, de M. Marc Laffineur, rapporteur de la délégation pour l'Union européenne, une proposition de résolution sur la proposition de règlement du Conseil relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (COM [2002] 711 final/E 2176), déposée en application de l'article 151-1 du règlement.
    Cette proposition de résolution (n° 1159) est renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 23 octobre 2003, de M. Daniel Garrigue, rapporteur de la délégation pour l'Union européenne, une proposition de résolution sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (COM [2003] 397 final/E 2365), déposée en application de l'article 151-1 du règlement.
    Cette proposition de résolution (n° 1161) est renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

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DÉPÔT D'UN RAPPORT

    M. le président. J'ai reçu, le 23 octobre 2003, de M. Thierry Mariani, un rapport, n° 1164, fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France.

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DÉPÔT DE RAPPORTS
EN APPLICATION DE LOIS

    M. le président. J'ai reçu, le 23 octobre 2003, en application de l'article 32 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité modifiée par la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie, le rapport annuel d'activité de la commission de régulation de l'énergie, transmis par le président de cette commission.
    J'ai reçu, le 22 octobre 2003, de Mme la présidente du Conseil national des activités physiques et sportives, en application de l'article 33 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, un rapport sur le développement des activités physiques et sportives en 2002.

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DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 23 octobre 2003, de M. Marc Laffineur, un rapport d'information, n° 1158, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur la réforme du régime des concentrations entre entreprises.
    J'ai reçu, le 23 octobre 2003, de M. Daniel Garrigue, un rapport d'information, n° 1160, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (COM [2003] 397 final/E 2365).
    J'ai reçu, le 23 octobre 2003, de M. Pierre Lequiller et plusieurs de ses collègues, un rapport d'information, n° 1162, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur des textes soumis à l'Assemblée nationale, en application de l'article 88-4 de la Constitution, du 25 septembre au 15 octobre 2003 (n°s E 2381 à E 2383, E 2386 à E 2390, E 2392, E 2393, E 2396 et E 2400) et sur les textes n°s E 144, E 1775, E 2024, E 2110, E 2207, E 2262, E 2263, E 2318, E 2319, E 2322, E 2324, E 2335, E 2355, E 2359, E 2373 et E 2379.

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DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 23 octobre 2003, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom.
    Ce projet de loi, n° 1163, est renvoyé à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.

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ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Aujourd'hui, à neuf heures trente, première séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004, n° 1093 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110) ;
    Culture :
    M. Olivier Dassault, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 11 du rapport n° 1110) ;
    Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure pour avis, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome VI de l'avis n° 1111) ;
    Ecologie et développement durable :
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 13 du rapport n° 1110) ;
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome IV de l'avis n° 1112) ;
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires étrangères (tome V de l'avis n° 1113) ;
    Equipement et transports ; article 77 ; budget annexe de l'aviation civile ; article 53 :
    Equipement et transports terrestres :
    M. Hervé Mariton, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 20 du rapport n° 1110) ;
    M. François-Michel Gonnot, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XIII de l'avis n° 1112) ;
    Mer :
    M. François Liberti, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 22 du rapport n° 1110) ;
    M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome X de l'avis n° 1112) ;
    Transports aériens :
    M. Charles de Courson, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 24 du rapport n° 1110) ;
    Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XII de l'avis n° 1112).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    A vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée, le vendredi 24 octobre 2003, à zéro heure cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
CONVOCATION
DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

    La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 28 octobre 2003, à 10 heures, dans les salons de la présidence.