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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 19 DÉCEMBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du jeudi 18 décembre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN

1.  Contrôles frontaliers. - Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».
Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes.
M. Louis Guédon, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

MM.
François Loncle,
Renaud Donnedieu de Vabres,
Maxime Gremetz.
Clôture de la discussion générale.

Article unique. - Adoption. «...»

2.  Accord France-organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires. - Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».

Article unique. - Adoption. «...»

3.  Accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale internationale. - Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».

Articles 1er et 2. - Adoption. «...»

Adoption de l'ensemble du projet de loi.
4.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures.)

1

CONTRÔLES FRONTALIERS

Discussion, selon la procédure
d'examen simplifiée,
d'un projet de loi adopté par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation du traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays (n°s 1246, 1292).
    Je rappelle que ce texte fait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée, dans les conditions prévues à l'article 106 du règlement.
    La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
    Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le traité que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui a pour objet de compléter les textes antérieurs qui encadrent juridiquement le nouveau point de passage frontalier constitué par le tunnel sous la Manche. En effet, la création de la liaison fixe transmanche a initialement entraîné la signature, le 25 novembre 1991, du protocole de Sangatte relatif aux contrôles frontaliers, qui prévoyait que ceux-ci seraient exercés dans deux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés, à Fretin et à Folkestone.
    La montée en puissance de l'immigration irrégulière enregistrée au cours de ces dernières années par la France et la Grande-Bretagne a conduit les deux Etats à convenir de dispositions communes pour mettre fin au phénomène. Dans ce but, l'accord initial a été complété par le protocole additionnel du 29 mai 2000, prévoyant la création de six nouveaux bureaux de contrôle binationaux dans les gares de Waterloo, Saint-Pancras, Ashford, gare du Nord, Calais, Lille-Europe.
    Néanmoins, l'afflux d'immigrés tentant de franchir illégalement la frontière pour bénéficier de la législation du travail britannique, en dépit de son récent durcissement qui conduit au rapatriement de 1 500 étrangers déboutés par mois, ne s'est pas tari après la fermeture du centre d'accueil de Sangatte et a désormais tendance à se répartir entre les différents ports assurant une liaison avec la Grande-Bretagne.
    Afin de résoudre ce nouveau problème, les deux pays ont signé le 4 février 2003, lors du sommet franco-britannique, le traité du Touquet. Ce traité constitue le fondement juridique sur lequel reposera la mise en place de structures communes de contrôle frontalier autorisant un meilleur contrôle des personnes, des véhicules et du fret. Il a pour objectif de lutter contre l'immigration irrégulière à destination ou en provenance de Grande-Bretagne.
    La mise en place de bureaux de contrôle nationaux juxtaposés dans les ports de la Manche et de la mer du Nord des deux Etats est donc apparue nécessaire, le dispositif étant inspiré de celui qui existait avec les pays limitrophes de l'Hexagone avant l'entrée en vigueur de l'accord de Schengen. Il ne subsiste aujourd'hui de tels bureaux qu'avec la Suisse et la principauté d'Andorre. Désormais, les agents de l'Etat d'arrivée sont autorisés à exercer des contrôles migratoires dans des bureaux de contrôle juxtaposés et à retenir pour interrogatoire pour une durée de vingt-quatre heures renouvelable une fois les personnes suspectées d'enfreindre la législation sur l'immigration. Ce délai sera principalement utilisé pour enquêter sur les officines de fourniture de faux documents.
    L'entrée en vigueur du traité permettra la mise en place du côté français d'un bureau de contrôles nationaux juxtaposés à Calais, qui sera suivi ultérieurement de la mise en place de deux autres bureaux, à Boulogne et à Dunkerque. Ce traité illustre l'excellente coopération entre les deux pays dans ce domaine sensible de l'immigration et de la lutte contre les filières clandestines. La France, frontière extérieure de l'Union européenne, dans la mesure où la Grande-Bretagne ne participe pas aux accords de Schengen, assume ainsi ses obligations envers ses autres partenaires européens.
    Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, les principales observations qu'appelle le traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
    M. le président. La parole est à M. Louis Guédon, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
    M. Louis Guédon, rapporteur de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le traité que je vous présente aujourd'hui concerne la lutte contre l'immigration clandestine à destination du Royaume-Uni par la voie maritime, de même que le protocole de Sangatte, adopté par notre assemblée en 2000, concernait la voie ferroviaire, c'est-à-dire le lien fixe transmanche.
    Le Royaume-Uni fait face depuis environ cinq ans à une augmentation considérable de l'immigration clandestine, qui prend souvent la forme de demandes d'asile adressées aux autorités britanniques. C'est le pays de l'Union européenne qui reçoit le plus grand nombre de demandes d'asile. Leur nombre est passé de 45 000 environ en 1998 à plus de 70 000 en 2001, pour atteindre 84 000 en 2002.
    L'immigration clandestine était évaluée en 2000 à 180 000 personnes par an, et les principales nationalités représentées étaient les Afghans, les Iraniens, les Kurdes de Turquie, les Albanais du Kosovo, les Chinois et les Sri Lankais.
    L'attractivité du territoire britannique a, chacun le sait, des conséquences pour la région côtière française, qui est devenue depuis plusieurs années un lieu de transit important.
    Après une période de pic pendant les années 2000 à 2002, le flux de personnes cherchant à gagner le Royaume-Uni a baissé sensiblement en 2003. Le nombre des interpellations effectuées dans les ports concernés, principalement à Calais, qui était de plus de 84 000 en 2002, s'est limité à 14 132 en 2003.
    Il demeure néanmoins élevé. C'est pourquoi les autorités britanniques souhaitent poursuivre une politique ferme de dissuasion. Ainsi, les Britanniques ont demandé la fermeture du centre d'accueil installé par la Croix-Rouge à Sangatte, ce qui a été fait le 15 décembre 2002. Les autorités britanniques considèrent aujourd'hui que les mesures prises - durcissement de leur législation nationale, coopération accrue des autorités, fermeture du centre de Sangatte et installation de systèmes de détection dans les ports - ont contribué à dissuader une partie des immigrants potentiels. A ces mesures, il convient d'ajouter la recherche et l'interpellation de passeurs en nombre important par les autorités françaises.
    Le flux des passagers entre la France et le Royaume-Uni s'est élevé, en 2002, à 15 millions de personnes, avec un pic, en août, à 59 500 passagers par jour.
    L'importance du trafic de passagers, en particulier dans le port de Calais, fait qu'il est aujourd'hui impossible de mener à bien des contrôles de police à 100 %, faute de pouvoir mobiliser en permanence des personnels en nombre suffisant. Pourtant, la convention de Schengen impose un contrôle exhaustif des personnes franchissant une frontière extérieure de l'espace Schengen, notamment pour prononcer un refus d'entrée à l'encontre des personnes faisant l'objet d'un signalement ou pour interpeller les personnes recherchées. C'est pourquoi la commission de contrôle Schengen a estimé, en 2002, que la France ne remplissait pas ses obligations.
    Dans ce contexte, le traité du Touquet, signé le 4 février 2003, instaure un nouveau dispositif de contrôle. L'exercice de contrôles frontaliers d'entrée sur le territoire britannique aura lieu avant même l'embarquement sur les navires à destination du Royaume-Uni par les agents britanniques eux-mêmes, qui seront donc autorisés à procéder à ces contrôles sur le sol français.
    A cette fin, le traité prévoit la création dans les zones de contrôle des ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord, de bureaux à contrôles nationaux juxtaposés, les BCNJ, tels que ceux mis en place dans les années 1960 sur les différentes frontières françaises,qui permettent d'effectuer les contrôles policiers desdeux pays frontaliers sur une même aire d'arrêt pour lesvéhicules.
    Du côté français, deux bureaux seront ainsi créés. Le premier sera mis en service à Calais, où existent déjà des pré-contrôles depuis la signature, en août 2002, d'un accord entre les ministres de l'intérieur des deux pays. Le second bureau sera installé à Dunkerque. Le trafic moindre de passagers dans les autres ports ne justifie pas, selon les Britanniques, la création d'autres bureaux. Du côté britannique, il est prévu la création d'un BCNJ à Douvres.
    Les contrôles effectués par ces BCNJ porteront tout à la fois sur les personnes, les véhicules et le fret.
    Le traité s'accompagne de trois arrangements administratifs signés en novembre dernier entre les autorités des deux pays. Le troisième prévoit la mise à disposition par le Royaume-Uni de matériels hautement performants pour la détection de personnes à l'intérieur des véhicules. Sept ports de la Manche et de la mer du Nord en seront équipés : Cherbourg, Caen-Ouistreham, Calais, Dieppe, Dunkerque, Roscoff et Saint-Malo. Ces matériels seront utilisés par les compagnies de transport, et les autorités estiment que leur efficacité permet d'éviter d'ouvrir des bureaux dans les autres ports.
    A Calais, ces matériels, déjà utilisés depuis deux ans, ont montré leur efficacité et leur supériorité sur les contrôles humains : 6 300 voyageurs clandestins y ont été interpellés entre janvier et octobre 2003. Il semble que la fiabilité de ce dispositif a contribué à dissuader les immigrants, car le nombre de clandestins interpellés est tombé de 100 par jour en 2002 à 100 par mois en 2003.
    Parallèlement à ces nouveaux équipements, la mise en oeuvre du présent traité se traduira par un renfort d'effectifs nécessaire pour permettre aux BCNJ de fonctionner vingt-quatre heures sur vingt-quatre. L'ouverture de celui de Douvres entraînera la mise à disposition de trente-deux fonctionnaires et, à Dunkerque, vingt-deux agents supplémentaires sont prévus.
    C'est le ministère britannique de l'intérieur qui fournit les personnels les plus nombreux : l'arrivée d'une centaine de fonctionnaires est prévue pour consolider les effectifs du BCNJ de Calais.
    L'ensemble de ces renforts permettra d'assurer une efficacité accrue dans le contrôle des personnes, mais il faut compter avec son corollaire : une inflation des interpellations et des procédures de réadmission, de déferrement et de reconduite à la frontière. C'est pourquoi il faut veiller à ce que les personnels soient affectés en nombre suffisant pour accomplir l'ensemble des tâches dévolues au service de la police aux frontières.
    Enfin, le traité clarifie le traitement des demandes d'asile entre les deux pays, en adoptant un système semblable à celui retenu pour les contrôles dans les gares ferroviaires. Si une personne émet une demande d'asile au cours d'un contrôle effectué en France par les agents britanniques avant le départ du navire, la demande sera examinée par les services français compétents. En revanche, si la demande est présentée après le départ du navire, ce sont les services britanniques qui s'en saisiront.
    Les services de la police aux frontières du Pas-de-Calais ont observé au cours de cette année une baisse importante, de 83 %, du flux de migrants dans le département, avec 95 000 interpellations au 1er décembre 2002 contre 16 000 seulement au 1er décembre 2003.
    Certes, cette baisse s'accompagne de déplacements des migrants vers d'autres ports d'ancrage : Le Havre, Dieppe, Saint-Omer, Zeebrugge. De nombreux migrants font également l'objet d'interpellations sur les liaisons autoroutières. Cependant, Calais étant de loin le premier port en nombre de passagers, la baisse des clandestins dans ses alentours signifie aussi une baisse globale, ce que corroborent les statistiques globales concernant le territoire français : les procédures engagées à l'encontre d'immigrants clandestins connaissent une tendance à la baisse de 7 % en 2003 par rapport à 2002, soit 42 000 sur onze mois en 2003, contre 45 000 en 2002. Et le quart d'entre elles concerne justement le département du Pas-de-Calais.
    On soulignera la diminution du nombre des interpellations d'Irakiens, 5 000 au lieu de 33 000 en 2001, et d'Afghans, 1 143 au lieu de 43 000. Des immigrants d'autres nationalités sont cependant davantage représentés : plus 728 % pour les Soudanais, plus 652 % pour les Vietnamiens et plus 792 % pour les Palestiniens. Les Indiens et les Chinois sont également plus nombreux.
    En conclusion, le traité devrait permettre à la France, dont la façade ouest constitue une frontière extérieure de l'espace Schengen, de mieux contrôler cette frontière et ainsi de mieux assumer ses obligations envers ses partenaires européens. L'objectif est d'assurer un contrôle à 100 % des personnes à l'entrée de l'espace Schengen, ce qui impose un renforcement des effectifs. La présence de nombreux policiers britanniques dans les bureaux à contrôles nationaux juxtaposés améliorera par ailleurs l'efficacité des contrôles à la sortie de l'espace Schengen. Le traité devrait donc jouer un rôle dissuasif et faire baisser durablement la pression migratoire dans le Pas-de-Calais à destination du Royaume-Uni.

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. François Loncle.
    M. François Loncle. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je m'exprime au nom du groupe socialiste, et en particulier au nom de Guy Lengagne, député-maire de Boulogne-sur-Mer, et de mes collègues du Nord-Pas-de-Calais.
    Nous avons approuvé, en commission des affaires étrangères, les conclusions du rapport de notre collègue Louis Guédon sur ce traité qui complète une série de dispositifs mis en place depuis plus de dix ans et procédant des accords de Schengen - lesquels avaient fait l'objet d'un projet de loi de ratification dont j'avais eu l'honneur d'être le rapporteur devant l'Assemblée.
    En 1991, année de la signature des accords de Schengen, la réalisation de la liaison fixe transmanche a conduit à la signature du protocole de Sangatte. Toutefois, les problèmes créés par le passage d'immigrants irréguliers entre le continent et la Grande-Bretagne ont conduit à la signature d'un protocole additionnel le 20 mai 2000 et, aujourd'hui, à celle de cet accord complémentaire, dit traité du Touquet.
    On peut imaginer - nous le craignons - que ce traité, en raison de ce que vient d'expliquer notre rapporteur, puisse être plus avantageux pour la Grande-Bretagne que pour le France. Nous savons en effet que les pratiques, l'histoire et la culture britanniques, ainsi que la conception de l'asile de la Grande-Bretagne - conception qui est contestable, même si nous devons la respecter - sont autant d'éléments qui constituent une sorte d'appel adressé à tous ceux qui, pour des raisons diverses, désirent se rendre dans ce pays. Or s'ils sont bloqués dans le nôtre, ils auront tendance à y rester, et il sera plus difficile de les identifier et de les reconduire aux frontières. Toutefois, tous les dispositifs prévus dans le traité du Touquet vont dans le bon sens.
    Je formulerai simplement trois souhaits.
    D'abord, cela vient d'être dit, il convient de lutter en priorité contre les passeurs, contre les filières, en en faisant davantage une cible privilégiée que les malheureux qui tentent de venir chez nous pour fuir leur pays souvent marqué par l'insécurité, la guerre et des drames humains.
    Ensuite, il faut opérer une harmonisation beaucoup plus poussée de l'exercice du droit d'asile dans l'Union européenne. Cela s'impose d'autant plus que l'élargissement de l'Europe va repousser les frontières extérieures de l'espace européen. Nous devrons nous atteler à cette tâche, et cela vaut aussi pour les pays qui sont encore réticents à une telle harmonisation.
    Enfin, j'exprimerai un dernier souhait. Certains considéreront qu'il est vain, mais, pour ma part, je ne désespère jamais de nos amis britanniques. Ainsi, alors que, il y a deux ou trois ans, ils étaient hostiles à une constitution européenne, ils l'ont pourtant élaborée avec nous lors de la récente convention et l'ont approuvée, au point de s'unir à nous lors du sommet de Bruxelles, qui a malheureusement échoué. Je dis cela parce qu'il me paraît indispensable, s'agissant du sujet qui nous occupe ce matin, que nos amis britanniques rejoignent l'espace Schengen, et le plus tôt sera le mieux.
    Etant donné les dispositifs que met en oeuvre le traité du Touquet, nous approuverons le projet de loi tendant à sa ratification.
    M. le président. La parole est à M. Renaud Donnedieu de Vabres.
    M. Renaud Donnedieu de Vabres. Monsieur président, madame la ministre, mes chers collègues, l'approbation du traité du Touquet représente, pour le président du groupe d'amitié France - Grande-Bretagne que je suis, et ce à quelques jours d'une nouvelle année qui marquera le centenaire de l'Entente cordiale, une grande satisfaction en ce sens qu'il constitue une étape supplémentaire dans le renforcement de la coopération franco-britannique dans le domaine de la lutte contre l'immigration clandestine.
    Malgré de multiples modifications de la législation relative à l'immigration et au droit d'asile, le Royaume-Uni continue de focaliser un grand nombre de demandes d'asile, ce qui n'est pas sans conséquences sur les flux humains et l'immigration clandestine transitant par notre territoire.
    Si la fermeture du centre de Sangatte, considéré par les Britanniques comme un réservoir d'immigrants clandestins, a pu atténuer le problème, celui-ci n'en demeure pas moins. Et c'est justement pour éviter que cette pression ne réapparaisse dans le Calaisis ou qu'elle ne se déplace vers les ports de la Manche et de la mer du Nord que le traité qui nous est soumis apporte des solutions concrètes.
    L'avancée majeure du traité du Touquet réside dans la mise en place de bureaux à contrôle nationaux juxtaposés - BCNJ - dans l'ensemble des ports de la Manche et de la mer du Nord, limitée dans un premier temps aux seuls ports de Douvres et de Calais.
    Ces BCNJ doivent permettre une véritable organisation coordonnée des contrôles entre le pays de départ et celui d'arrivée, et ce sur le territoire du premier, ce qui suppose la mise en place de structures communes et dédiées dans les deux Etats.
    Pour la France, comme pour le Royaume-Uni, il s'agit donc, avant tout et ensemble, de renforcer le dispositif dissuasif de lutte contre l'immigration irrégulière à destination de la Grande-Bretagne. Le traité du Touquet constitue le fondement juridique nécessaire aux contrôles des personnes, des véhicules et du fret par les services d'immigration britanniques dans les ports d'embarquement à destination des îles britanniques.
    Parallèlement, ce traité facilitera l'action des fonctionnaires français de la police aux frontières lors des embarquements à Douvres à destination de la France. Dès lors, il leur sera permis de refuser l'admission de personnes n'ayant aucun titre pour séjourner sur notre territoire, ou ne remplissant pas les conditions requises prévues à l'article 5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
    Enfin, il s'agit aussi d'une avancée en matière de simplification des procédures administratives en ce sens que le dispositif proposé permettra d'accélérer et d'améliorer les contrôles par un partage des tâches entre agents de deux pays.
    S'il est clair que le traité du Touquet constitue avant tout un accord essentiellement technique, il n'en reste pas moins un symbole supplémentaire d'une volonté commune de la France et du Royaume-Uni de mieux coopérer dans leur lutte contre l'immigration clandestine. Il s'agit là d'une avancée entre les deux nations. Cela peut également constituer les préludes à une politique européenne de l'asile et de l'immigration plus intégrée et fondée sur une harmonisation plus grande des législations.
    A ceux qui craignent une déstabilisation due à l'arrivée massive de flux migratoires, je rappelle que le renforcement des contrôles aux frontières extérieures de l'Europe dans le cadre des accords de Schengen est une réalité. Certes, les dix nouveaux pays membres ne feront pas immédiatement totalement partie de l'espace Schengen, mais ils bénéficieront d'une aide financière spécifique pour mettre en place des dispositifs de contrôle.
    A l'aube de cette année de commémoration de l'Entente cordiale, on peut imaginer qu'un jour la protection de l'espace maritime de la Manche et de la mer du Nord soit effectuée par une flotille de garde-côtes battant pavillon franco-britannique, ce qui ne pourra que renforcer l'efficacité du dispositif.
    Je terminerai par un trait d'humour, qui s'adressera surtout au président de cette séance. En effet, ce traité ne permet pas de trancher définitivement le problème majeur posé par les fonctionnaires britanniques porteurs d'un turban qui auront à travailler sur le sol français. (Sourires.) Il s'agit là d'une coutume britannique, mais elle est contraire à la loi française telle qu'elle a été rappelée hier par le Président de la République. Toutefois, je ne doute pas que la coopération franco-britannique permettra de résoudre ce problème. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, dernier orateur inscrit.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'Union européenne accroît aujourd'hui ses domaines d'intervention. Pas à pas, elle élargit le champ de la coopération entre Etats membres. A ses débuts, l'Europe avait une finalité économique ; aujourd'hui, elle commence à s'intéresser à des sujets sensibles, comme l'atteste celui que nous examinons ce matin.
    Le présent projet de loi pose de manière évidente le problème de l'articulation entre la libre circulation des personnes et l'immigration clandestine, l'efficacité des contrôle Schengen n'étant pas garantie.
    Le traité du Touquet, même s'il se présente comme un projet bilatéral, est un premier pas vers une politique d'union dans un contexte où les Etats membres avancent en ordre dispersé sur des questions d'asile et d'immigration.
    Ce texte a pour objectif « de faciliter l'exercice des contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord situés sur le territoire de l'autre partie ». Etre pour ou contre ces renforcements policiers n'est pas la question que nous devons nous poser aujourd'hui. Cette volonté de contrôle et de gestion de l'immigration n'est que la continuité de réformes engagées depuis le début des années 90. En fait, la position qu'il nous est demandé de prendre n'est pas une position générale sur l'immigration et le droit d'asile, même s'il y aurait beaucoup à dire sur les conditions d'expulsion des migrants.
    L'esprit de ce texte est de permettre une amélioration de la coopération franco-britannique en prévoyant des contrôles mixtes dans les ports de la Manche et de la mer du Nord, car le renforcement par étapes des contrôles aux frontières, accompagné d'un durcissement des dispositions de la loi britannique - dispositions au demeurant non appliquées -, n'a pas suffi à tarir le flux des demandeurs d'asile, qui en majorité empruntent la voie maritime. La possibilité de permettre aux agents britanniques d'intervenir sur le territoire français dans une zone limitée, et réciproquement, devrait multiplier les occasions de collaboration et favoriser une meilleure compréhension mutuelle.
    Au-delà du débat de fond sur l'immigration et l'asile, cet accord pose un problème budgétaire. Et c'est sur ce point que je veux appeler l'attention. En effet, aujourd'hui, le Gouvernement accorde beaucoup moins de crédits et en gèle dans de nombreux domaines - ce qui, dans le domaine social, est une catastrophe ! De surcroît, il doit faire face à des exigences européennes qui ne sont en aucun cas favorables aux Français. Nos voisins allemands se trouvent d'ailleurs dans la même situation. Le président du groupe des député-e-s communistes et républicains, Alain Bocquet, a déjà eu l'occasion d'interpeller M. le Premier ministre sur ce sujet dans une lettre qu'il lui a adressée le 29 octobre dernier, et à laquelle celui-ci a répondu que la question était en cours d'examen.
    Ainsi, le renforcement de la sûreté portuaire de Calais par la création de bureaux de contrôles nationaux juxtaposés va obliger la chambre de commerce et d'industrie à investir 6 millions d'euros, investissement qui s'élèvera à 30 millions d'euros dans quelques années.
    Cette évolution n'est pas sans soulever des interrogations qui portent notamment sur la participation de l'Etat à l'effort financier supporté par le concessionnaire et sur l'extension à l'ensemble des ports de prescriptions qui paraissent n'être jusqu'à présent imposées qu'à Calais.
    La chambre de commerce et d'industrie de Calais, qui a confirmé sa volonté de contribuer au « respect des engagements pris par l'Etat français, dans le cadre du traité du Touquet », a exprimé dans une délibération du 29 septembre 2003 le souhait légitime « d'être accompagnée par un effort identique de la part de l'Etat dans ses missions régaliennes de maintien de l'ordre ». Cette demande est soutenue par M. Jacky Hénin, maire de Calais, et par l'ensemble des autorités locales, économiques et institutionnelles, attachées à cette affaire. Tous sollicitent une contribution des pouvoirs publics au financement des aménagements rendus nécessaires. Cette contribution paraît d'autant plus indispensable que la période est marquée à la fois par une conjoncture difficile, qui conduit au fléchissement des résultats d'exploitation du site, et par une dynamique très forte prévoyant d'investir pour relancer et améliorer l'attractivité des équipements et des services offerts. Au total, ce sont 59 millions d'euros en 2004 et 38 millions en 2005 qui seront engagés pour réaliser les divers travaux qui découlent fort logiquement de ce traité.
    De ce fait, je vous demande, madame la ministre, comme M. Bocquet et M. Hénin, maire de Calais, l'ont demandé au Premier ministre, de tenir compte de l'ensemble de ces éléments. Compte tenu de la situation actuelle, il nous semble indispensable d'envisager favorablement la demande d'un soutien budgétaire national aux démarches en cours. Cela nous semble d'autant plus légitime que Calais attend toujours les 15,6 millions d'euros de crédits dérogatoires promis par l'Etat à la suite de la disparition le 1er juillet 1999 du duty free. Ces crédits sont indispensables à la concrétisation des projets de développement de Calais. C'est vrai pour la ville, et c'est vrai aussi pour la chambre de commerce et d'industrie.
    Tels sont les points pour lesquels je voulais appeler votre attention, madame la ministre, au nom de mes amis du Nord et du Pas-de-Calais. Cela dit, nous sommes favorables au projet de loi que vous nous présentez.
    M. le président. La discussion générale est close.
    J'appelle maintenant l'article unique du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article unique

    M. le président. « Article unique. - Est autorisée l'approbation du traité entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la mise en oeuvre de contrôles frontaliers dans les ports maritimes de la Manche et de la mer du Nord des deux pays, signé au Touquet le 4 février 2003, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
    Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
    (L'article unique du projet de loi est adopté.)

2

ACCORD FRANCE - ORGANISATION
DU TRAITÉ D'INTERDICTION
COMPLÈTE DES ESSAIS NUCLÉAIRES

Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée,
d'un projet de loi adopté par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et la commission préparatoire de l'organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires sur la conduite des activités relatives aux installations de surveillance internationale, y compris les activités postérieures à la certification (ensemble une annexe) (n°s 1283, 1291).
    Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.
    Conformément à l'article 107 du règlement, je mettrai directement aux voix l'article unique du projet de loi.

Article unique

    M. le président. « Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et la commission préparatoire de l'organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires sur la conduite des activités relatives aux installations de surveillance internationale, y compris les activités postérieures à la certification (ensemble une annexe), fait à Vienne le 13 juillet 2001. »
    Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
    (L'article unique du projet de loi est adopté.)

3

ACCORD SUR LES PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS
DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE

Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée,
d'un projet de loi adopté par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale internationale (n°s 1284, 1290).
    Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.
    Conformément à l'article 107 du règlement, je mettrai directement aux voix les articles du projet de loi.

Articles 1er et 2

    M. le président. Les articles 1er et 2 ne font l'objet d'aucun amendement.
    J'en donne lecture :
    « Art. 1er. - Est autorisée l'approbation de l'accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale internationale, fait à New York le 9 septembre 2002, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
    Je mets aux voix l'article 1er.
    (L'article 1er est adopté.)
    « Art. 2. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée ayant statué au fond, est validé le décret du 26 avril 1947 relatif à l'exécution de la convention sur les privilèges et immunités des Nations unies en tant que sa légalité serait contestée par le moyen tiré de ce que la ratification de ladite convention devait être autorisée par la loi. » - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

    M. le président. Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
    (L'ensemble du projet de loi est adopté.)

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ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2003 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général (rapport n° 1318) ;
    Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 1317, relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance.
    A vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Eventuellement, navettes diverses.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à neuf heures quarante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT