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sDeuxième séance du mardi 6 avril 2004

186e séance de la session ordinaire 2003-2004


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PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE ÉTRANGÈRE

M. le président. Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de la Chambre des Communes du Royaume-Uni, que j'ai invitée à Paris dans le cadre de la commémoration du centenaire de l'Entente cordiale. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent longuement.)

Permettez-moi d'exprimer à cette délégation, conduite par Mme Joyce Quin, présidente du groupe d'amitié Royaume-Uni-France, l'attachement que nous portons tous, dans cet hémicycle, à cette Entente qui fonde, depuis 1904, des relations exemplaires entre la Grande-Bretagne et la France.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que M. le président du Sénat et moi-même serons heureux et honorés de recevoir au Sénat, à dix-sept heures, la Reine Elizabeth II et le Prince Philip, Duc d'Edimbourg, à l'occasion de leur visite d'Etat en France. Mes chers collègues, vous y êtes tous conviés. (Applaudissements.)

2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe Union pour la démocratie française.

FINANCES PUBLIQUES

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le groupe Union pour la démocratie française n'a cessé depuis deux ans de mettre en garde le Gouvernement quant à la situation dramatique des finances publiques de notre pays (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.), du fait notamment de la mauvaise gestion de la majorité précédente. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Roman. Les Français vous ont dit ce qu'ils en pensaient !

M. le président. Laissez s'exprimer monsieur de Courson, s'il vous plaît !

M. Charles de Courson. Depuis 2002, le déficit budgétaire s'est aggravé au point d'atteindre 4,1 % de la richesse nationale en 2003. A la fin du mois, la dette publique dépassera les 1 000 milliards d'euros, soit 43 500 euros par famille. Nous sommes désormais le mauvais élève de la classe européenne.

M. Marcel Dehoux. Eh oui, « désormais » !

M. Charles de Courson. Or un déficit élevé se paye toujours à terme par un taux de chômage élevé, frappant notamment les salariés les plus modestes.

Lors de la présentation du budget 2004, le Gouvernement...

M. Bernard Roman. Quel gouvernement ?

M. Charles de Courson. ...a pris l'engagement de faire baisser ce déficit à 3,6 % de la richesse nationale et de le ramener sous la barre des 3 % en 2005.

Jeudi dernier, le Président de la République a qualifié nos déficits d'« inacceptables » ; vous avez vous-même, monsieur le ministre d'Etat, à l'occasion d'une réunion informelle des ministres des finances européens qui s'est tenue à Dublin, rappelé votre volonté de respecter ces engagements. Le respect de la parole donnée à nos partenaires européens comme à nos concitoyens est en effet une condition sine qua non du retour de la confiance, qui fait aujourd'hui cruellement défaut.

Toutefois - et le groupe UDF l'avait souligné lors du débat budgétaire - ces objectifs apparaissent extrêmement difficiles à atteindre. À ce propos, un quotidien national s'est fait l'écho hier d'une note interne au ministère du budget, qui prévoit un déficit supérieur à 4 % en 2004 et en 2005, en totale contradiction avec nos engagements.

M. Richard Mallié. La question !

M. le président. Monsieur de Courson !

M. Charles de Courson. Ma question est simple, monsieur le ministre d'Etat : le Gouvernement confirme-t-il les informations parues dans la presse sur les prévisions de déficit pour 2004 et 2005 ; si oui, quelles mesures compte-t-il prendre pour réduire les déficits et la dette qui seront supportés par nos enfants et nos petits-enfants, et qui pénalisent dès aujourd'hui les plus modestes de nos compatriotes ?

Plusieurs députés du groupe socialiste. Aucune !

M. le président. La parole est à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, je veux d'abord vous faire remarquer qu'il ne s'agit pas seulement de nos partenaires européens : il s'agit des Français et de leur argent. En tant que ministre en charge des finances, et comme tous ceux qui ont exercé cette responsabilité, je suis d'abord le gardien du fruit du travail des Français, et donc de leur argent.

Que les choses soient très claires, monsieur de Courson : il n'est pas question de laisser filer les déficits. Qu'on ne compte pas sur moi pour mener une politique qui ne conduirait le pays qu'au désastre financier.

Un député du groupe socialiste. C'est fait !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Des engagements ont été pris : nous les tiendrons, en agissant dans quatre directions.

La première est celle d'une évaluation systématique de nos dépenses. Il y a deux catégories de dépenses : il y a celles qui préparent l'avenir, qui soutiennent l'activité et la consommation. Celles-là doivent être encouragées. Et puis il y a celles dont l'utilité est moindre.

M. Bernard Roman. Lesquelles ?

Un député du groupe des député-e-s communistes et républicains. Dites lesquelles !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il faudra les réduire sans tabou. Et je le dis devant la représentation nationale : que personne ne doute de ma détermination à assumer mes responsabilités en la matière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Deuxièmement, comme l'a indiqué le Premier ministre, (« Lequel ? » sur les bancs du groupe socialiste) des actifs seront vendus, pour rembourser la dette de la France et recapitaliser l'industrie française. L'économie de la France ne peut pas reposer uniquement sur les services, l'activité bancaire ou les assurances : l'industrie doit être soutenue. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Des mots !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Troisièmement, comme l'ont indiqué le Premier ministre et le Président de la République, il faut juguler l'hémorragie de l'assurance-maladie, qui perd un milliard d'euros par mois. Ceux qui disent qu'on a le temps sont ceux qui sont prêts à payer ce temps avec l'argent des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Quatrièmement, il faut poser les bases d'une politique européenne de soutien à l'activité, avec une lecture enfin pragmatique du pacte de stabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est cela, une politique juste et efficace. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

REFORME DU STATUT D'EDF-GDF

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Jacques Brunhes. Monsieur le Premier ministre, les salariés d'EDF-GDF manifesteront jeudi pour le retrait pur et simple du projet de loi qui porte ouverture du capital de leurs entreprises et leur transformation en sociétés anonymes. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Ils sont confortés dans leur action par le verdict sans précédent des urnes, qui a sanctionné votre politique ultralibérale de marchandisation des services publics, inspirée directement par le Medef. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Proriol. Ça n'a rien à voir !

M. Jacques Brunhes. Or, monsieur le Premier ministre, vous avez hier, avec une obstination et un entêtement coupables, annoncé que vous entendiez poursuivre la privatisation de nos entreprises publiques. Vous avez ainsi fait montre d'un réel mépris pour le vote des Français, et confirmé votre refus du dialogue social.

Le statut public n'est un frein ni à la concurrence, ni au développement de l'entreprise publique à l'étranger : l'expérience d'EDF-GDF en témoigne. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Le prix hors taxe de l'électricité française est aujourd'hui le plus bas d'Europe. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Le secteur énergétique correspond à un service public essentiel, au regard tant des impératifs d'égal accès et de développement durable que de celui de péréquation géographique qu'il suppose. On a bien vu à quelles impasses a conduit la libéralisation du secteur énergétique aux Etats-Unis, en Italie, en Grande-Bretagne. Outre qu'elle serait lourde de conséquences pour les personnels et les usagers, la privatisation de ce secteur remettrait en question l'indépendance de la France en matière énergétique. Rien ne la justifie, hormis le bénéfice qu'en escomptent le capital et les intérêts privés.

Monsieur le Premier ministre, il s'agit du premier grand dossier de votre gouvernement.

M. le président. Monsieur Bruhnes, vous avez une question à poser.

M. Jacques Brunhes. Le sort que vous lui réserverez sera significatif et donc particulièrement observé. Les syndicats et les citoyens vous demandent le retrait pur et simple de votre projet (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), la remise à plat du dossier et la réouverture du débat sur la politique énergétique. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Monsieur Brunhes !

M. Jacques Brunhes. Y êtes-vous prêt ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Lucien Degauchy. Voyou ! Tu vas tomber sur un os !

M. le président. Taisez-vous, Monsieur Degauchy !

La parole est à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Mesdames et messieurs les députés, un tel sujet ne supporte pas la polémique (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)...

Un député du groupe des député-e-s communistes et républicains. C'est trop facile !

M. Henri Emmanuelli. C'est la meilleure !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ...s'agissant d'une grande entreprise française et de l'emploi de 140 000 personnes, à qui nous devons donner l'image d'une classe politique décidée à agir dans le seul souci de l'intérêt général et de l'intérêt de l'entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Hollande. De quoi parlez-vous ? Il ne s'agit pas de la classe politique !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La situation est la suivante : le marché de l'énergie est ouvert à la concurrence à hauteur de 30 %, depuis qu'en février 2000 le gouvernement de Lionel Jospin (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), soutenu par le parti communiste (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et qui comptait des ministres communistes (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), a transposé la directive européenne libéralisant le marché de l'énergie en France. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et c'est vous, monsieur Brunhes, après avoir décidé cela, qui venez nous poser cette question !

M. François Hollande. Cela n'a rien à voir !

M. le président. Monsieur Hollande !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Au 1er juillet 2004, le marché de l'énergie sera ouvert à la concurrence à hauteur de 70 %. Et vous qui avez ouvert ce secteur à la concurrence, vous n'en avez tiré aucune conséquence. (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Bernard Roman. Mensonges !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je vais prendre deux engagements. Le premier est très important : le statut des agents d'EDF et de GDF ne sera pas modifié.

M. Bernard Roman. Quel menteur !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Et vos vociférations n'y changeront rien. Je le répète aux agents d'EDF et de GDF : leur statut ne sera pas modifié.

Je prends un deuxième engagement, dans la foulée de ce qu'a dit le Premier ministre : EDF et GDF ne seront pas privatisés. En revanche nous devrons adapter le statut de ces grandes entreprises...

M. Bernard Roman. Voyou ! (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Christian Bataille. C'est un premier pas vers la privatisation !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ...pour leur donner les moyens du développement dont elles ont besoin. Ouvrir le secteur de l'énergie à la concurrence sans donner à EDF et à GDF les moyens d'agir était irresponsable. Nous agirons donc à l'opposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

LUTTE CONTRE LA CONTREFAÇON

M. le président. La parole est à M. Yves Nicolin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Yves Nicolin. Ma question s'adresse à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Roman. C'est un one man show !

M. Yves Nicolin. Monsieur le ministre d'Etat, vous nous avez dit il y a un instant vouloir soutenir l'industrie. Or le sujet que je veux aborder la concerne directement.

La contrefaçon a en effet des conséquences de plus en plus dramatiques pour l'emploi dans nos régions. Notre économie est depuis plusieurs années confrontée à ce cancer...

Un député du groupe socialiste. Et aujourd'hui nous avons une contrefaçon de gouvernement !

M. Yves Nicolin. ...qui accélère la désindustrialisation et les délocalisations.

M. Maxime Gremetz. C'est vous qui acceptez les délocalisations !

M. Yves Nicolin. La lutte engagée contre ce fléau n'a malheureusement pas suffi jusqu'à présent à l'endiguer. Tous ces produits fabriqués, importés, vendus illégalement sont autant de manque à gagner pour nos entreprises, et autant d'emplois perdus.

Plus grave encore, une nouvelle forme de contrefaçon semble se développer, celle des matières premières, des tissus importés frauduleusement, ce qui anéantit nos efforts nationaux tant en matière de recherche et de développement que dans le domaine de la création artistique ou de l'invention de modèles.


De plus en plus de secteurs sont aujourd'hui touchés par ce phénomène : le textile et l'habillement, bien sûr, mais aussi la bijouterie, l'horlogerie, les industries de la musique et du cinéma,...

M. le président. Monsieur Nicolin, je n'ai pas encore entendu votre question.

M. Yves Nicolin. ...le jouet, les pneus. Bref, toute notre économie semble aujourd'hui touchée.

Monsieur le ministre d'Etat, pouvez-vous nous dire quels secteurs sont les plus touchés aujourd'hui et, surtout, combien d'emplois pourraient être sauvés par une lutte efficace et impitoyable ?

Pouvez-vous nous indiquer enfin quelles actions vous souhaitez engager pour renforcer la lutte contre la contrefaçon et, ainsi, protéger des centaines de milliers d'emplois ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La contrefaçon...

M. François Hollande..C'est vous qui êtes une contrefaçon !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ...détruit 30 000 emplois par an en France et 200 000 emplois en Europe.

Elle touche tous les secteurs et, contrairement à ce que l'on dit, pas seulement le luxe : le jouet, la téléphonie mobile, la chaussure, le textile et même les médicaments. Qu'allons-nous faire pour y remédier ?

Il faut maintenant que la Douane ait comme première responsabilité de défendre l'emploi des Français. Sous quinze jours, seront réunis à Bercy les représentants de l'ensemble des industries victimes de la contrefaçon. Et sous deux mois, nous aurons fait adopter par la Douane de nouvelles mesures prioritaires pour renforcer notre action dans la lutte contre la contrefaçon.

Mais il faut dire aux Français que, chaque fois que l'un de nos compatriotes achète un produit contrefait, il détruit l'emploi prévu pour l'un de ses enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Nous ne réussirons pas seuls, le Gouvernement d'un côté, les Français de l'autre. C'est une mobilisation nationale que nous avons décidé d'engager contre la contrefaçon.

M. Maxime Gremetz. Révisez la loi !

M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Nicolin, j'espère que vous vous associerez à l'action du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

SITUATION DES FINANCES PUBLIQUES

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, la France est en état de dépôt de bilan. (« La faute à qui ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

En deux ans, les déficits publics ont été multipliés par trois, celui de la sécurité sociale par cinq. L'endettement dépasse désormais le plafond record de 1 000 milliards d'euros. S'il n'y avait pas la monnaie unique, votre gouvernement aurait déjà dû dévaluer plusieurs fois. (« C'est votre bilan ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le Premier ministre, je vous le demande, épargnez-nous votre sempiternel refrain de l'héritage. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce qui est en cause, c'est votre gestion -que vous aviez qualifiée de bon père de famille-, incapable de fédérer les énergies et de stimuler la croissance.

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et les 35 heures !

M. Jean-Marc Ayrault. Sauf expansion miraculeuse, vous ne serez pas en mesure de tenir les objectifs de la loi de finances et les engagements pris devant nos partenaires européens.

Ne voyez dans ce propos aucune caricature. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les données que j'évoque émanent de la direction du budget. (Même mouvement.) Et comme l'a avoué votre ministre des finances, M. Sarkozy, Jacques Chirac vous a placé dans l'obligation de résoudre la quadrature du cercle. Vous devez concilier l'inconciliable : baisser les impôts, distribuer les aides clientélistes (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), financer de nouvelles promesses sociales, tout en réduisant les déficits et sans casser la croissance. L'équation est insoluble, tout simplement parce qu'elle est fondée sur le mensonge ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. -Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Aujourd'hui, monsieur le Premier ministre, l'intérêt national vous commande de répondre sans détour à quatre questions. Et si je vous les pose, c'est parce que les leçons de l'ancien ministre du budget d'Edouard Balladur ne sont pas de nature à nous rassurer.

M. Yves Fromion. Provocateur !

M. Jean-Marc Ayrault. Les quatre questions sont les suivantes.

Allez-vous confirmer le programme d'annulations de crédits préparé avant les élections, qui n'est rien d'autre qu'un plan d'austérité ?

Dans quels domaines allez-vous faire ces économies dont vous parlez, et, surtout, qui paiera la note ?

A quel niveau de déficit allez-vous renoncer aux baisses d'impôt, que M. Mer lui-même jugeait inefficaces ?

Enfin, les députés socialistes vous le demandent solennellement, comme l'a fait hier François Hollande, êtes-vous prêt à un audit impartial des finances publiques, sous le contrôle du Parlement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), qui permettra enfin d'établir la vérité des comptes ? Cette vérité-là, monsieur le Premier ministre, est la première condition d'un retour de la confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, un tel manque de courage est affligeant ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Manque de courage pour regarder en face le problème des déficits de la France. Dès qu'on parle de mesures permettant de revenir à l'équilibre, vous parlez d'austérité ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous êtes incapables d'assumer la politique que vous voulez défendre. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous avez été, pendant la campagne électorale, caricaturaux ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous êtes aujourd'hui sans courage ! Vous n'êtes pas, monsieur Ayrault, innocents des déficits de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous n'êtes pas innocents des dettes et des factures. Tous les jours, arrivent à Matignon et à Bercy des factures qui portent la signature socialiste ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Quand nous versons une prime de Noël pour les demandeurs d'emploi, il faut en payer deux que vous avez accordées sans les financer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Et il faut donc payer en une fois trois primes de Noël.

Quand je regarde la situation qui résulte de vos décisions, quand je vois La Poste en difficulté, quand je vois RFF endetté, quand je vois France Télécom par nous sauvé, je constate combien votre gestion a été désastreuse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Alors, les leçons de morale appellent un peu de modestie !

Nous avons, avec l'ensemble de la représentation nationale, vraiment tenu la dépense en 2003.

Vous vous souvenez du chiffre : 273,8 milliards d'euros de dépenses.

M. Didier Migaud. Bravo !

M. le Premier ministre. Et malgré toutes vos demandes, malgré toutes vos critiques, la dépense a été tenue. Elle a été absolument respectée telle que le Parlement l'avait autorisée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Didier Migaud. Bravo !

M. le Premier ministre. Nous continuerons cette politique. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vos cris ne m'impressionnent pas, messieurs ! J'ai à faire face à vos erreurs, et ce ne sont pas vos vociférations qui me feront changer de cap ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Nous avons été capables de tenir la dépense en faisant les efforts nécessaires, qui ne sont pas ceux du groupe socialiste, mais ceux des Françaises et des Français.

Un député du groupe socialiste. Pitoyable !

M. le Premier ministre. Dès lors que la dépense est maîtrisée, les recettes pour combler notre déficit viendront du retour de la croissance. Vous êtes responsables de la rupture de la croissance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) 4 % en 2000, 1 % en 2001. Le résultat de la politique socialiste, c'est l'effondrement de la croissance ! (Mêmes mouvements.) Vous voulez la vérité, la voilà !

Des dépenses maîtrisées d'un côté, le retour de la croissance de l'autre, c'est de cette façon que nous limiterons nos déficits budgétaires. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Ce retour à la croissance est fondé sur deux éléments que vous n'avez jamais voulu utiliser : d'une part, l'augmentation du SMIC - que vous avez refusée - avec  3,7 % au 1er juillet, ce qui permettra à la croissance par la consommation de repartir ; d'autre part, la réforme de la taxe professionnelle, mesure incitative à l'investissement.

Cette politique est cohérente. Vous, vous avez cassé le moteur de la croissance dans ce pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations et sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous pouvez en sourire. Vous pouvez vous montrer satisfaits des difficultés des Français. Mais nous y répondrons avec courage, avec lucidité et sans faiblesse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, dont de nombreux membres se lèvent. - Huées sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Nos collègues britanniques ont pu voir combien notre Parlement est turbulent !

EMPLOI ET COHÉSION SOCIALE

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Dubernard pour le groupe de l'UMP.

M. Jean-Michel Dubernard. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

Le Président de la République...

M. Maxime Gremetz. Qui c'est ?

M. Jean-Michel Dubernard. ...a fait de l'emploi une priorité pour 2004. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Les attentes des Françaises et des Français dans ce domaine sont grandes car, nous le savons tous, l'emploi conditionne l'harmonie et le bon fonctionnement de notre société.

Le 5 janvier dernier, notre Premier ministre a annoncé une loi de mobilisation pour l'emploi afin de consolider et d'amplifier le redémarrage économique qui doit se traduire par un recul durable du chômage, que nous souhaitons tous sur ces bancs.

M. Jérôme Lambert. Oui, mais ce n'est plus le même Premier ministre !

M. Jean-Michel Dubernard. L'un des objectifs affichés du Gouvernement est de veiller tout particulièrement à nos concitoyens en situation de fragilité pour leur donner, au mieux, les moyens d'un retour ou de leur maintien dans le monde du travail.

M. Maxime Gremetz. Le RMA !

M. Jean-Michel Dubernard. Monsieur le ministre, vous qui avez en charge la cohésion sociale, pouvez-vous nous dire le sens de l'action que vous allez conduire...

M. Maxime Gremetz. Ah !

M. Jean-Michel Dubernard. ...et les objectifs que vous vous fixez pour faire vivre cette cohésion sociale tellement importante pour notre société ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Monsieur le président de la commission des affaires sociales, lorsqu'un pays en est à ce point qu'une crise du logement - qui date - devient une crise de société ; lorsque le taux de chômage ne tient plus compte de la plus grande partie des RMIstes ; lorsque la crise de l'école est si aiguë, notamment pour les élèves les plus fragiles ; lorsqu'il existe de tels écarts entre les territoires ; lorsque toutes les crises se conjuguent, logement, emploi, inactivité, précarité, et que tous les dysfonctionnements se cumulent sur les mêmes familles et dans les mêmes quartiers,...

M. Albert Facon. Pas dans les Hauts-de-Seine !

M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. ...lorsque l'on en vient à être tenu, à juste titre, à faire voter une loi sur la laïcité, mesdames et messieurs les députés, c'est que nous sommes face à un risque majeur de désintégration républicaine.

C'est pourquoi le Premier ministre a souhaité que les frontières entre l'emploi, les politiques sociales et le logement soient effacées.

Aujourd'hui, il n'est plus temps de commenter avec habilité les dysfonctionnements de notre pays. Il n'est plus temps non plus d'invoquer les héritages successifs ou les responsabilités des autres ! (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Il s'agit, aujourd'hui, d'inscrire noir sur blanc les dix plus graves dysfonctionnements de la société française dans tous ces domaines et d'élaborer un plan national de la cohésion sociale qui fera appel à tous les partenaires : régions, départements, villes, partenaires sociaux, organismes HLM, caisses d'allocations familiales, et évidemment l'Etat avec au premier plan le service national pour l'emploi.


Dans les dix semaines qui viennent, je présenterai à l'arbitrage du Premier ministre...

Plusieurs députés du groupe socialiste. Lequel ?

M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. ...un programme national qui aura bénéficié d'un travail approfondi réalisé en collaboration avec la ministre de la famille, le ministre de la justice, et le ministre des finances, dont chacun connaît le grand talent. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Ce programme sera soumis aux forces vives de la nation, au premier rang desquelles figurent les groupes parlementaires et la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. le président. Monsieur le ministre...

M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Aujourd'hui, j'ai la conviction que l'intégration était en panne, que la désintégration nous guettait. Mais j'ai confiance en notre capacité à relever collectivement ce défi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur queques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Henri Emmanuelli. Il fait du vent !

M. Christian Paul. Il ne dit rien, mais il le dit bien !

LUTTE CONTRE LE TERRORISME

M. le président. La parole est à M. Pascal Clément, pour le groupe de l'UMP.

M. Pascal Clément. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Lundi dernier, les services de police français ont interpellé et placé en garde à vue treize personnes soupçonnées d'avoir préparé les attentats de Casablanca, qui, le 16 mai 2003, ont causé la mort de quarante-cinq personnes, dont trois Français. Ces interpellations sont le résultat d'un travail minutieux accompli par la Direction de la surveillance du territoire, agissant sur commission rogatoire de juges d'instruction antiterroristes. Permettez-moi d'adresser mes félicitations à ces services dont l'efficacité ne se dément pas. Ces résultats sont la preuve de leur activité incessante.

Mais ils mettent aussi en lumière l'existence de réseaux, de cellules dont l'activité, sur notre territoire, inquiète les Français. L'un des moyens de rassurer nos concitoyens est de les tenir informés de l'état de la lutte antiterroriste. S'il est trop tôt pour vous demander des détails sur l'implication des individus interpellés lundi dans les attentats de Casablanca, pouvez-vous nous faire part aujourd'hui des informations dont vous disposez sur leurs parcours personnels ?

D'une manière plus générale, quelle stratégie avez-vous adoptée pour lutter contre cette criminalité particulièrement odieuse et angoissante ? Quelle place y tient la prévention ?

Enfin, compte tenu du caractère transfrontalier de ces activités criminelles, je souhaiterais connaître les initiatives que vous prendrez pour renforcer la coopération pénale internationale dans ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous l'avez dit, monsieur le président Clément, tous les services sont mobilisés pour prévenir les menaces potentielles. Deux opérations d'envergure ont eu lieu au cours des derniers jours. Vendredi, nous avons interpellé plusieurs responsables de l'ETA et découvert un important atelier de fabrication d'armes clandestines. Hier, en région parisienne, ont été appréhendés quinze individus proches du Groupe islamique combattant marocain, dont certains sont aguerris par des séjours prolongés dans les camps de Al-Qaida en Afghanistan.

Ces succès ne sont qu'une étape. La voie est longue, difficile. Elle exige l'engagement de chacun, qui sera la meilleure des préventions. Les citoyens doivent être vigilants, tout en évitant les amalgames qui font le jeu des extrémistes. Tous les services de l'État doivent poursuivre leurs efforts, notamment de coordination. Tous les pays européens doivent également s'engager dans cette lutte, tant les vingt-cinq membres de l'Union européenne − et le dernier Conseil européen a nommé un coordonnateur − que les cinq pays les plus concernés, qui partagent informations et renseignements : ainsi, nous entretenons des liens très étroits de coopération dans la lutte antiterroriste avec l'Espagne, que vous avez citée.

Soyons clairs. Il ne peut y avoir de compromis avec le terrorisme, nous ne pouvons à aucun moment faire preuve de faiblesse. Nous avons, tous ensemble, un devoir de mobilisation et de résultat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

DÉCENTRALISATION

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Balligand. Avant de poser ma question, je voudrais rappeler à M. le Premier ministre que notre collègue Jean-Marc Ayrault, président de notre groupe, a posé une question simple. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il vous a demandé si vous acceptiez le principe de l'audit des finances pour l'exercice des deux dernières années.

Vous pourriez au moins avoir l'amabilité de répondre à la question du président d'un groupe parlementaire : oui ou non, acceptez-vous cet audit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. − Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Fourgous. Parlez-nous plutôt des 35 heures !

M. Jean-Pierre Balligand. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Parmi les dossiers dont vous héritez en arrivant place Beauvau, monsieur le ministre, il en est un qui intéresse particulièrement les Français, comme ils l'ont montré par leur participation et par leur vote aux scrutins des 21 et 28 mars derniers : c'est celui de la décentralisation. Je parle bien de décentralisation et non pas de la pseudo-réforme lancée en grande pompe par M. Raffarin, qui a réussi à mécontenter les collectivités comme les administrations, les citoyens comme les élus, et jusqu'au cœur même de votre majorité parlementaire et de votre minorité territoriale.

L'inquiétude est réelle devant l'insécurité financière flagrante que vous vous apprêtiez à organiser : des transferts de compétences massifs sans financement adapté, qui ne sont en fait que des transferts de charges et des hausses d'impôt pour cette France d'en bas qui vous est si chère. La preuve en est que vous n'avez pas voulu que le Parlement examine au préalable la loi organique qui définit l'autonomie financière des collectivités, alors que le bon sens exige que l'on sache de combien l'on dispose avant de le dépenser − mais ce bon sens semble collectivement vous faire défaut. (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Claude Goasguen. C'est incroyable !

M. Jean-Pierre Balligand. Le risque d'une rupture d'égalité entre les citoyens existe donc...

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Voyous !

M. Jean-Pierre Balligand. ...de même que le spectre d'une explosion des impôts locaux. L'idée que l'usager pourrait se substituer au contribuable a même été caressée par des députés UMP, qui ont tenté d'instaurer des péages sur les voies express et dans nos villes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Voyous !

M. le président. Monsieur Balligand, posez votre question !

M. Jean-Pierre Balligand. Je finis, monsieur le président.

Répondant aux demandes réitérées de plusieurs dirigeants socialistes, dont le président de notre groupe, le Premier ministre a finalement annoncé in extremis le report du vote solennel du projet de loi de décentralisation, qui devait avoir lieu demain. Dont acte. Mais que signifie ce revirement ? S'agit-il d'un simple report technique ou d'un retrait politique ?

Mes questions sont claires et précises. Quel délai le Gouvernement se donne-t-il et accorde-t-il à la représentation nationale pour un nouvel examen de ce texte et, avant tout, pour l'examen du cadre financier des transferts de compétences ?

M. le président. Merci, monsieur Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. Quel type de concertation, avec quelles instances et quelle marge de manœuvre, allez-vous mettre en place ? (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Merci...

M. Jean-Pierre Balligand. Vous engagez-vous solennellement à revenir sur le transfert de personnels techniques, ouvriers et de service de l'éducation nationale, qui mécontente tout le monde...

M. le président. Monsieur Balligand, ne m'obligez pas à vous couper la parole !

M. Jean-Pierre Balligand. ...et ne peut pas être maintenu sans provocation de votre part ?

En d'autres termes...

M. le président. Non, monsieur Balligand, c'est fini !

Plusieurs députés du groupe socialiste. Il a coupé le micro !

M. le président. Mes chers collègues, j'ai entendu, lancé de chaque côté de l'hémicycle, le mot « voyou ». C'est inadmissible. Je préfère que vous ne l'employiez ni d'un côté ni de l'autre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, notre volonté est intacte. Nous sommes tous ici les garants de la décentralisation, qui est indispensable pour moderniser notre pays, pour répondre aux aspirations démocratiques des élus...

Un député du groupe socialiste. Vous ne les connaissez pas !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ...pour affirmer le rôle de l'État.

Une première étape a été franchie. Après les assises conduites par Patrick Devedjian, après un travail parlementaire considérable dans les deux assemblées, nous avons désormais un socle sur lequel avancer. Il s'agit bien d'un travail commun, car je rappelle que un tiers des quelque 1 500 amendements déposés par tous les groupes de cette assemblée a été adopté.

Nous avons maintenant un nouveau rendez-vous, celui des garanties financières. Je m'engage à ce que le principe de compensation financière soit intégralement respecté. C'est bien, pour moi, un préalable. C'est l'objet même de la loi organique, qui permettra le strict respect de la Constitution.

Aujourd'hui, nous sommes dans le temps de l'évaluation et de la concertation. Il nous faut prendre en compte le message des Français et engager, comme le souhaite le Premier ministre, un large débat avec les associations d'élus, avec les groupes et les commissions. L'importance de ce débat nous engage à rechercher d'abord le maximum d'adhésion sur ce sujet si important.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Oui, il n'y a pas le feu !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous avons été capables de le faire pour d'autres débats. Faisons-le aussi pour reconstruire nos institutions locales...

M. René Couanau. Calmement !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ...avec le souci de l'efficacité publique, de l'intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

ENTENTE CORDIALE

M. le président. La parole est à M. Pierre Lequiller, pour le groupe de l'UMP.

M. Pierre Lequiller. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse au ministre des affaires étrangères, M. Michel Barnier.

La commémoration du centenaire de l'Entente cordiale intervient en pleine actualité de relance des relations franco-britanniques dans le cadre européen, et nous nous en réjouissons.

Après Saint-Malo, après Le Touquet, l'accord, au Conseil européen du 12 décembre 2003, sur un centre de planification militaire autonome au sein de l'Union, doit beaucoup à la coopération entre la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne. Mais si l'entente franco-allemande est une condition nécessaire des progrès de l'Europe − et, depuis 2002 notamment, on mesure des avancées déterminantes −, elle n'est pas, loin de là, une condition suffisante.

Paradoxalement, malgré notre différence à propos de l'Irak, la coopération avec la Grande-Bretagne en matière de défense n'a jamais été aussi intense : projet de porte-avions commun, participation des deux pays aux programmes européens, tel que A400M, Meteor, hélicoptère NH90, Galileo. La défense commune pour laquelle vous avez tant œuvré, monsieur le ministre, au sein de la Convention, est évidemment un préalable à une Europe politique.

Monsieur le ministre, quelles sont les initiatives que vous envisagez pour le renforcement des relations franco-britanniques au sein de l'Europe à un moment où elles sont essentielles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Lequiller, j'ai entendu hier soir Sa Majesté la Reine d'Angleterre... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Henri Emmanuelli. Mme la reine d'Angleterre !

M. le ministre des affaires étrangères. ...déclarer dans notre langue : Vive la différence et vive l'Entente cordiale !

Certes, il y a des différences.

M. François Hollande. De chapeaux ! (Sourires.)

M. le ministre des affaires étrangères. Mais il y a aussi des ressemblances, et les raisons de célébrer l'Entente cordiale sont nombreuses. Encore faut-il que le Royaume-Uni et la France ne se contentent pas de la célébrer, mais la consolident. En effet, nos pays se ressemblent, ils connaissent les mêmes problèmes et doivent relever les mêmes défis à l'intérieur − croissance, compétitivité, chômage. Tout cela justifie les entretiens que Tony Blair et Jean-Pierre Raffarin ont eus et auront encore.

Vous l'avez dit, il n'y aura jamais de politique étrangère et de politique de défense commune, c'est-à-dire que l'Union n'aura jamais de dimension politique, si le Royaume-Uni et la France − avec l'Allemagne et avec d'autres − ne la veulent pas et ne la construisent pas.

Enfin, le monde qui nous entoure connaît tant de drames et de tragédies, en Irak, en Afghanistan, avec la lutte contre le terrorisme, il doit relever de si nombreux défis, au premier rang desquels je place le lien transatlantique, que nous avons, je le répète, bien des raisons de travailler ensemble, de rapprocher nos points de vue et de consolider cette Entente cordiale.


Je crois, comme le Président de la République l'a indiqué hier soir, que nous devons donner, avec les autres membres du Gouvernement, une dimension un peu plus citoyenne à cette entente cordiale, à travers des programmes qui intéressent les gens dans leur vie quotidienne, comme la recherche, la lutte contre le cancer, les jumelages.

En conclusion, vous me permettrez, en hommage à la Reine qui s'exprimait hier dans notre langue, de déclarer exceptionnellement en anglais : Let us celebrate the difference and long life to the Entente cordiale ! (Applaudissements et sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

DÉLINQUANCE DES MINEURS

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pecresse, pour le groupe de l'UMP.

Mme Valérie Pecresse. Monsieur le garde des sceaux, ministre de la justice, permettez-moi d'associer à ma question le député maire de Versailles, mon collègue Etienne Pinte.

Il s'appelait Dominique Rissel, il avait quarante-sept ans, une femme, deux enfants. Il gérait une supérette dans le quartier tranquille de Porchefontaine à Versailles. Il a été tué en plein jour, de sang-froid, à bout portant, alors qu'il s'apprêtait à déposer sa recette à la banque. Une vie humaine, pour 5 000 euros ! Ce fut un choc pour chacun d'entre nous.

Grâce à l'efficacité du SRPJ de Versailles, que je tiens ici à saluer, ses agresseurs ont été arrêtés quelques jours plus tard. Son meurtrier présumé a seize ans. Il est fiché par les services de police depuis l'âge de dix ans. Il a fait l'objet de cinq procédures pénales pour vols avec violence. A l'évidence, l'autorité judiciaire n'a pas pu freiner son escalade vers toujours plus de violence. Et ce cas n'est pas isolé.

Monsieur le Garde des Sceaux, je sais, en tant que rapporteure de la protection judiciaire de la jeunesse depuis deux ans, que vous avez fait de ce domaine une priorité de votre action.

M. Maxime Gremetz. Il n'a rien fait !

Mme Valérie Pecresse. Ma question, qui s'adresse à vous mais que j'aurais pu tout aussi bien poser au ministre chargé de la cohésion sociale, au ministre de l'éducation nationale ou au ministre de la famille, est simple : qu'allez-vous faire pour empêcher ces adolescents totalement déstructurés, qui ont perdu le sens du bien et du mal, de plonger dans la grande délinquance et de commettre l'irréparable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, je partage l'émotion que vous avez exprimée devant ce crime odieux. Je félicite à mon tour la police d'avoir procédé à cette arrestation. J'attends, comme tout le monde ici, que la justice passe, et qu'elle passe avec sévérité.

Nous avons, dès septembre 2002, mis en place un certain nombre de dispositifs juridiques nouveaux, que certains ont d'ailleurs refusés.

M. Julien Dray. Eh oui !

M. le garde des sceaux. Ces outils avaient pour but de nous permettre de lutter plus efficacement contre la délinquance des mineurs.

M. Julien Dray. Apparemment, ça ne marche pas !

M. le garde des sceaux. Cette délinquance est en effet de plus en plus violente et porte malheureusement de plus en plus souvent atteinte aux personnes.

La loi de septembre 2002 a permis d'agir dans plusieurs directions :

Premièrement, nous avons simplifié les conditions de détention provisoire des mineurs, lorsque celle-ci est nécessaire bien entendu.

Deuxièmement, nous avons mis en place de nouvelles sanctions, dites éducatives, en particulier des mesures de confiscation ou d'interdiction de se rendre dans certains lieux.

Troisièmement, nous avons élaboré ensemble un système de jugement plus rapide, la comparution à délai rapproché, car la rapidité est un élément indispensable de l'efficacité pédagogique de la sanction.

Mais votre question, madame la députée, soulève deux autres interrogations : d'une part, comment mieux traiter la récidive ; d'autre part, comment améliorer la prévention ?

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Eh oui !

M. le garde des sceaux. S'agissant de la récidive, une mission parlementaire se penche actuellement sur le sujet. J'y travaille également avec mes services, en liaison avec M. le ministre de l'intérieur. Il nous faut parvenir à élaborer un système mieux gradué, plus efficace.

S'agissant de la protection de la jeunesse et de la prévention...

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il n'y a pas d'argent !

M. le garde des sceaux. ... nous disposons, grâce à la loi d'orientation et de programmation pour la justice, de moyens supplémentaires.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Tu parles !

M. le garde des sceaux. Mais vous le savez, madame la députée, puisque vous êtes rapporteure de ce budget.

Nous avons également créé les centres éducatifs fermés qui constituent un dispositif indispensable pour traiter cette catégorie de mineurs excessivement dangereux.

M. Guy Geoffroy. Très bien !

M. le garde des sceaux. En outre, je vais mettre en place des établissements pénitentiaires pour mineurs à fort contenu éducatif. Cela n'a jamais été fait en France, alors que cela existe dans un certain nombre de pays européens.

Enfin, je développe différentes initiatives, en particulier avec le ministère de l'éducation.

M. le président. Merci, monsieur le ministre.

M. le garde des sceaux. C'est important, monsieur le président.

M. le président. Oui, je sais bien.

M. le garde des sceaux. J'aurai ainsi l'occasion dans quelques jours de présider, avec François Fillon, à la mise en place d'une convention qui permettra aux éducateurs, dans le cadre du TGI de Paris, et aux magistrats de mieux travailler ensemble pour lutter contre ce type de dérives. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, depuis deux ans, le déficit de l'assurance maladie est de retour. alors que les comptes étaient équilibrés jusqu'en 2001 (protestations sur les bancs du groupe de l'union pour un mouvement populaire), le déficit s'est élevé à 5 milliards d'euros en 2002, 10 milliards d'euros en 2003, et il atteindra sans doute 15 milliards d'euros cette année. La dette sociale accumulée depuis deux ans atteint plus de 32 milliards d'euros, trois fois le plan Juppé.

M. Julien Dray. Quelle honte !

M. Jean-Marie Le Guen. Pour 2005, les prévisions de déficit oscillent entre 17 à 20 milliards d'euros, ce qui représente deux points de CSG.

Dans le même temps, le malaise des acteurs de la santé persiste et la qualité de notre système de soins se dégrade, notamment en termes d'égalité d'accès aux soins pour nombre de nos concitoyens. Notre système d'assurance maladie est désormais en très grand péril.

Cette situation n'était pourtant pas fatale. Depuis deux ans, vous avez démantelé, par démagogie, toute forme de régulation des dépenses de santé et vous avez laissé s'affaiblir les recettes en menant une politique économique qui a sacrifié l'emploi.

La gravité de la situation est connue depuis plusieurs mois. Or, de rapport en report, vous n'avez cessé de différer l'obligation d'un changement de cap.

M. Yves Fromion. Et les retraites ?

M. Jean-Marie Le Guen. Hier, le Premier ministre a annoncé une réforme avant l'été. Mais de quelle réforme s'agira-t-il ? Quel sera son champ ?

M. Yves Fromion. Donneur de leçons !

M. Jean-Marie Le Guen. S'agira-t-il d'une nouvelle dérobade ? Vous contenterez-vous d'indiquer qui va faire quoi ? Ou bien alors, traiterez-vous enfin cette grave question en abordant, comme le préconise le rapport du Haut conseil de l'assurance maladie, l'ensemble du problème, à savoir la réforme de notre système de santé, sa gouvernance et les besoins de financement pour sauvegarder la protection sociale de nos concitoyens ?

M. le président. Merci, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous devez enfin prendre vos responsabilités.

Pour notre part, nous prendrons les nôtres : nous présenterons aux Français nos propositions pour sauver leur assurance maladie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur Le Guen, en matière d'assurance maladie, il faut, je crois, respecter trois principes.

Premièrement, le principe de vérité. Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie que vous avez évoqué a très clairement souligné, ...

M. François Hollande. La gravité de la situation !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...au-delà de tout clivage partisan, que si rien n'est fait, chaque Français devra de plus en plus assumer seul ses dépenses chez le médecin, le chirurgien, le dentiste, à l'hôpital et chez le pharmacien. Cela est inacceptable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Deuxièmement, le principe de courage.

M. Jacques Desallangre. Et après ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Si on ne fait rien, les injustices vont s'aggraver.

M. François Hollande. Vous n'avez rien fait !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. M. Bocquet l'a rappelé hier : certains indicateurs de santé sont bien pires pour les chômeurs de longue durée, en particulier dans les maladies cardiovasculaires, que dans la population active.

M. Jacques Desallangre. Qu'est-ce qu'on fait alors ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ne rien faire, c'est creuser les injustices. C'est, pour nous, impossible.

M. Henri Emmanuelli. Et la réforme de la CMU alors ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Troisièmement, le principe de dialogue. Je vais dès aujourd'hui demander à rencontrer les différents partenaires sociaux, pour que nous puissions ensemble dessiner les contours de la sauvegarde de notre système de santé et d'assurance maladie.

M. François Hollande. Dans combien de temps ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Enfin, vous savez très bien, monsieur le député, parce que vous connaissez ce sujet, que l'augmentation des dépenses d'assurance maladie est supérieure à l'augmentation de la croissance de la richesse nationale depuis plus de quinze ans, entre 1 et 2 points par an. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

C'est vrai aujourd'hui. C'était vrai hier. Sinon, pourquoi, entre 1999 et 2002, alors que la croissance était la plus élevée, le trou de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés a-t-il augmenté de 10 milliards d'euros ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

EMPLOI DES JEUNES

M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger, pour le groupe de l'UMP.

M. Philippe Auberger. Monsieur le secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes, la France connaît malheureusement un fort taux de chômage chez les jeunes, notamment chez ceux qui sont peu ou pas qualifiés du tout. Pourtant, les entreprises sont confrontées, dans certains secteurs économiques, à une pénurie de personnels, notamment de personnels qualifiés, et les offres d'emplois de l'ANPE et des agences d'intérim sont très nombreuses à ne pas être pourvues, notamment dans les domaines du bâtiment, de la logistique ou de l'informatique. La situation est paradoxale.

La formation professionnelle mériterait d'être revalorisée. Elle pourrait à n'en pas douter être une des réponses efficaces pour permettre aux jeunes de trouver un emploi.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous indiquer quelles sont vos intentions pour développer l'emploi des jeunes, mieux assurer leur insertion dans le monde du travail, par exemple par le biais d'un soutien à la formation professionnelle, tout en apportant une réponse aux entreprises qui cherchent du personnel qualifié ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est M. le secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes, avec tous nos vœux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le député, vous avez raison de souligner, d'une part, le retard de notre pays depuis deux décennies déjà en matière d'emploi des jeunes - nous avons le taux le moins bon d'Europe en la matière -,...

M. Albert Facon. Et les emplois jeunes ?

M. le secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes. ...d'autre part, le fait que des secteurs particuliers, au premier rang desquels le bâtiment, ne trouvent pas de main-d'œuvre. C'est en effet paradoxal.

Dans ce contexte, je définirai trois axes de travail.

D'abord, il faut rapidement mobiliser - c'était l'objectif du plan 100 000 emplois lancé par François Fillon - tous les acteurs du service public pour l'emploi dans les régions pour réorienter les chômeurs, et notamment les jeunes, vers les secteurs qui souffrent d'une pénurie de main-d'œuvre.

Ensuite, nous devons renforcer la formation. A ce propos, nous attendons impatiemment, avec Jean-Louis Borloo, le contrat de professionnalisation que les partenaires sociaux ont mis au point et que votre assemblée doit voter dans quelques jours. Il sera, à n'en pas douter, la pierre angulaire de la mise en œuvre du droit à la formation tout au long de la vie.

M. Jean-Pierre Soisson. Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à la formation professionnelle des jeunes. Enfin, il faut faire en sorte que l'embauche soit prioritairement orientée vers les jeunes. Le contrat jeune en entreprise - 140 000 contrats sont signés à ce jour et près de 100 000 contrats sont en instance de signature - doit permettre aux jeunes de mettre le pied à l'étrier avec un vrai contrat, un contrat à durée indéterminée.

M. Jérôme Lambert. Et les vieux à la retraite !

M. le secrétaire d'Etat à la formation professionnelle des jeunes. Je rappelle que ce dispositif fait l'objet, dans deux secteurs qui souffrent justement d'une pénurie de main-d'œuvre, le bâtiment et le commerce et la distribution, d'une convention spécifique d'accompagnement. Cette convention repose sur une idée simple : l'exonération de charges doit s'accompagner de modalités de tutorat pour que l'emploi créé permette au jeune d'acquérir une qualification.

M. le Premier ministre l'a souligné hier, nous allons redoubler d'énergie sur cette question de l'emploi des jeunes. Nous allons notamment avec Jean-Louis Borloo, dans la loi à venir sur l'emploi et de cohésion sociale, ouvrir un grand chantier pour donner une nouvelle chance aux 60 000 jeunes qui sortent chaque année sans qualification de notre système éducatif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Henri Emmanuelli. Avec ça, on est sauvé.

RECHERCHE

M. le président. La parole est à M. Pierre-André Périssol, pour le groupe de l'UMP.

M. Pierre-André Périssol. Monsieur le ministre délégué à la recherche, la recherche est pour un pays ce qui lui permettra de disposer, demain, d'une économie innovante et pas seulement reproductive. C'est une des conditions de sa créativité, de son indépendance et donc de son avenir.

Nous avons donc été très heureux d'entendre le Président de la République demander au Gouvernement de renouer le dialogue avec les chercheurs. Nous souhaitons qu'une solution constructive et durable soit trouvée, qui permette non seulement de dénouer la crise actuelle, mais également de réunir les conditions pour que la recherche française, à laquelle nous rendons hommage, garde son rang dans le monde.

Il faut certes résoudre à court terme le problème du nombre de postes, mais également régler celui du statut de ces postes. Ceux-ci doivent offrir des perspectives convenables à nos jeunes chercheurs tout en satisfaisant aux conditions d'une recherche féconde. Cette question renvoie à l'organisation et aux structures de nos grands organismes de recherche.

Plus largement, il faut réfléchir à la place de la recherche dans nos universités et dans le privé. C'est tout l'enjeu de l'effort que la nation entend consacrer à la recherche et nous nous félicitons de l'engagement du Président de la République et du Premier ministre d'y consacrer 3 % du PIB.

L'effort dans la recherche bénéficie d'un large soutien populaire. Ce soutien populaire, vous le mobiliserez d'autant plus, monsieur le ministre délégué, que vous saurez fixer des objectifs clairs qui concrétiseront la grande ambition qu'est la nôtre pour la recherche.

Monsieur le ministre délégué, pouvez-vous nous dire où vous en êtes aujourd'hui dans vos contacts avec les chercheurs et quelles sont vos intentions en matière de recherche ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la recherche.


M. François d'Aubert,
ministre délégué à la recherche. Monsieur le député, la recherche est fondamentale pour l'avenir de notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Tout le monde en est convaincu sur tous ces bancs. Elle est, en effet, le socle du développement économique et social. De plus, un pays n'est grand que s'il a une grande recherche (« Oui ! » sur les mêmes bancs), une recherche adaptée, une recherche moderne, une recherche performante. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Or la recherche française est performante et nous pouvons en être fiers. (Rires sur les mêmes bancs.) Ne riez pas, messieurs ! La recherche est quelque chose de sérieux ! La recherche française a des lettres de noblesse dont nous devons tenir compte.

Depuis quelques mois, mais le malaise est plus ancien (« Oui, il a deux ans ! » sur les bancs du groupe socialiste), il y a une inquiétude dans les laboratoires, chez les chercheurs, dans les établissements de recherche, dans l'université. Pour lever cette inquiétude et répondre aux demandes précises de la communauté scientifique, des chercheurs, des laboratoires, nous avons engagé, avec M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, ...

M. Albert Facon. Et Ferry ? Il est parti !

M. le ministre délégué à la recherche. ...une très large concertation avec des représentants de la communauté scientifique. Je pense que nous allons très rapidement aboutir à des solutions positives et durables en termes de moyens humains, de chercheurs, de chercheurs statutaires, de rénovation de la recherche, d'assouplissement dans l'emploi scientifique. En effet, nous devons non seulement répondre à des besoins de court terme dans les laboratoires, mais aussi donner une visibilité, une perspective à notre politique de recherche.

C'est pourquoi M. le Premier ministre a annoncé hier la préparation, dans la concertation, d'une grande loi de programmation financière et stratégique sur la recherche et son développement. Cela montre bien concrètement à l'Europe et au-delà que la recherche est, en France, au cœur des préoccupations non seulement des pouvoirs publics, mais aussi de la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Un député du groupe socialiste. Quel changement !

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

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ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 1335, portant transposition de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau :

M. André Flajolet, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (rapport n° 1466).

La séance est levée.

(La séance est levée à seize heures cinq.)

    Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

    jean pinchot