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Deuxième séance du jeudi 28 octobre 2004

35e séance de la session ordinaire 2004-2005


PRÉSIDENCE DE MME PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2005

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 (nos 1830, 1876).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée après l'adoption de l'article 9.

Nous reprenons en commençant par les articles relatifs à la branche famille, avec les amendements portant articles additionnels avant l'article 24.

Avant l'article 24

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 17, 89 et 133

La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les dispositions relatives à la famille, pour soutenir l'amendement n° 17.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille. La commission, sur proposition de M. Tian et de Mme Pavy, a retenu cet amendement, qui tend à allonger le congé de maternité post-natal en cas de naissance prématurée. Pour ma part, j'avais proposé, l'année dernière, que cette possibilité soit accordée à toutes les femmes, ce que d'ailleurs recommandaient le Parlement européen et le Haut conseil à la population. Notre proposition ne va pas aussi loin mais pourrait peut-être être l'ébauche d'une réflexion plus poussée.

Chaque année, en France, près de 45 000 naissances prématurées surviennent, nécessitant l'hospitalisation de l'enfant pour suppléer à l'inachèvement de son développement intra-utérin. Durant cette période d'hospitalisation, la présence de la mère est requise pour des raisons évidentes, tant psychologiques que médicales, en particulier pour la technique de peau à peau. Cette période, qui couvre les semaines de grossesse non menées à terme, correspond généralement à la durée d'un congé de maternité. Or ce congé de maternité se trouve épuisé lorsque l'enfant sort de l'hôpital, obligeant la mère à s'en séparer immédiatement, à un stade de développement équivalant à une naissance à terme et nécessitant donc sa présence. Le présent amendement entend réparer cette anomalie en augmentant la durée du congé de maternité corrélativement à la prématurité du bébé.

La commission pour la branche famille avait adopté un amendement allongeant également le congé de paternité en cas de naissance prématurée. Celui-ci a été rejeté lors de l'examen des recettes et de l'équilibre général. Je ne vois pas pourquoi l'un a été retenu et pas l'autre. Ce congé de paternité, adopté sous le gouvernement de Lionel Jospin, était une très bonne disposition, que les pères se sont aussitôt appropriée.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertho Audifax, pour soutenir les amendements nos 89 et 133.

M. Bertho Audifax. Mme Pavy et M. Tian m'ont demandé de défendre leurs amendements. Celui que vient de présenter Mme Clergeau est identique et nous le soutenons totalement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de la famille et de l'enfance, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces trois amendements.

Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance. L'arrivée prématurée d'un enfant est un événement de nature à fragiliser les familles. Durant cette période, les mères doivent être plus présentes auprès de leur enfant. Il est donc légitime d'en tenir compte en modulant, le cas échéant, la durée de leur congé de maternité.

Comme vous le savez, le Sénat a débattu de cette question à l'occasion du projet de loi sur l'égalité des droits et des chances des handicapés. Il a adopté une disposition similaire à celle que vous proposez, complétant le projet de loi par un article 1er septies. Dès lors, les amendements que vous proposez pourraient être source de confusion. C'est pourquoi je souhaiterais que vous les retiriez.

Le Gouvernement souhaite privilégier une réflexion plus globale dans le cadre des travaux préparatoires à la Conférence de la famille de 2005. Un groupe de réflexion se penchera notamment sur les congés parentaux, tandis que les naissances prématurées feront l'objet d'une réflexion spécifique. Dans les mois qui viennent, nous affinerons cette analyse pour adapter, le cas échéant, des dispositions relatives au congé de maternité. C'est pourquoi, d'ailleurs, je serai favorable à l'amendement n° 173 de Mme Pavy qui, au rapport annexé à l'article 1er, propose cette démarche.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Madame la ministre, il me paraît important qu'il soit pris acte de notre volonté. C'est pourquoi je préfère maintenir cet amendement, dussions-nous y revenir l'année prochaine. Si j'en juge par le parcours de l'allocation de présence parentale pour les enfants malades - adoptée en 2000, revue en 2001 et travaillée avec les différentes associations de parents -, une telle disposition nécessite un long travail en amont et une concertation étroite avec les différentes associations avant d'aboutir. En outre, s'agissant de cette dernière prestation, le comité de suivi ne s'est pas réuni régulièrement depuis trois ans, nous obligeant aujourd'hui à chercher comment la faire évoluer. C'est pourquoi je pense que nous avons intérêt à maintenir notre amendement, quitte à en rediscuter plus tard pour le faire évoluer.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertho Audifax.

M. Bertho Audifax. Compte tenu des déclarations de Mme la ministre et de la prise en compte de cette demande à l'article 1er, je retire les amendements n°s 89 et 133. (Murmures.)

Mme la présidente. Les amendements n°s 89 et 133 sont retirés.

Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement est adopté.)

Article 24

Mme la présidente. L'article 24 ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 24 est adopté.)

Article 25

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 25.

La parole est M. Pierre-Christophe Baguet, premier intervenant.

M. Pierre-Christophe Baguet. L'article 25 a pour objet de réformer le mode de financement de l'Union nationale des associations familiales. Alors que la Cour des comptes est en train de procéder à l'examen de son fonctionnement, ainsi que de celui des URAF, je me demande si cette réforme est aujourd'hui opportune, même si nous l'appelons de nos vœux.

Le fonctionnement de l'UNAF n'a en effet été révisé qu'à deux reprises depuis 1945. C'est peu. Il faudrait y introduire davantage de démocratie, en veillant notamment à ce que la représentation des familles - directement concernées - soit la meilleure possible. Je me demandais, madame la ministre, si nous ne tenions pas là l'occasion de faire d'une pierre deux coups en travaillant - pour une fois - avec l'une des institutions de notre pays. Souvent, la Cour des comptes remet des rapports très intéressants qui restent lettre morte. Au mieux en avons-nous un compte rendu un ou deux ans plus tard. Aujourd'hui, nous sommes vraiment sur le même tempo : la Cour des comptes travaille de son côté, nous du nôtre. Nous sommes maîtres du calendrier. Pourquoi ne pas attendre, pour prendre notre décision, la remise des conclusions de la Cour des comptes ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Madame la présidente, ma collègue Muguette Jacquaint, qui suit plus particulièrement les questions relatives à la famille, est empêchée cet après-midi et m'a demandé d'intervenir à sa place.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne comporte aucune mesure significative pour la politique familiale : la prime d'adoption est doublée mais ne concernera qu'un nombre infime de familles ; le financement de l'UNAF est modernisé ; la prise en charge par la CNAF des majorations de pension pour enfants est reconduite dans les mêmes conditions que l'année dernière ; le taux de revalorisation des prestations familiales n'est fixé qu'à 1,5 % pour 2005, conformément à la règle d'évolution prévue par la loi.

À l'occasion de ce débat, je souhaite revenir sur certains événements préoccupants s'agissant de la PAJE. Afin d'informer les parents et futurs parents sur la mise en œuvre de cette mesure, le ministère délégué à la famille a lancé une campagne de communication diffusée du 17 au 28 janvier 2004 sur de nombreuses radios. Celle-ci appelle de notre part des observations. Officiellement, cette nouvelle mesure s'adresse aux mères et aux pères, mais la campagne de communication a cristallisé la conception rétrograde du Gouvernement.

M. Bernard Perrut, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général. Allons donc !

Mme Jacqueline Fraysse. Écoutez la suite, mon cher collègue !

L'annonce radio mettait en scène une femme et sa fille enceinte. Celle-ci rassurait sa mère sur les démarches à entreprendre pour toutes les allocations, lui indiquant pouvoir bénéficier d'une « allocation de base avec, en plus, un complément si j'arrête de travailler ou si je fais garder mon bébé par une nourrice ».


Cet extrait de conversation entre femmes exclut complètement les pères du choix du mode de garde et passe sous silence la possibilité qu'ils ont, s'ils le souhaitent, d'interrompre momentanément leur carrière pour s'occuper de leur bébé. Non seulement cette campagne de communication rejette toute implication des pères dans l'éducation des enfants - cette conception recule de nos jours mais, comme on le voit, il y a encore à faire, y compris dans les documents officiels -, mais en plus elle donne l'image d'une femme peu susceptible de s'impliquer dans sa vie professionnelle.

Ce n'est pas notre conception, nous l'avons déjà dit. Nous considérons que le complément de libre choix d'activité est une assignation domestique, en particulier pour les femmes qui occupent des emplois peu attractifs et peu rémunérés.

L'idée d'un salaire maternel fait d'ailleurs son chemin puisqu'un député UMP envisage de déposer très prochainement une proposition de loi sur ce sujet et qu'un groupe de travail est en train de se constituer.

Nous pensons vraiment que votre politique familiale est inadaptée à la réalité sociale du pays. Après avoir tenté de supprimer l'allocation de parent isolé à 40 000 femmes, instauré la PAJE qui favorise les familles aisées, augmenté la réduction d'impôt pour l'emploi de personnel de maison, favorisé les transferts d'argent entre grands-parents et petits-enfants, le Gouvernement n'aborde toujours pas ce qui fragilise le plus les familles, à savoir la pauvreté.

La France est devenue un pays de bas salaires puisque 25 % des salariés ont, du fait du temps partiel, un revenu inférieur au SMIC et que 60 % ont moins de 1 500 euros par mois. On dénombre 430 000 adolescents vivant en dessous du seuil de pauvreté, dont 180 000 dans des familles percevant les minima sociaux. Ce thème de la pauvreté chez les enfants a d'ailleurs été mis en avant par le rapport du CERC en 2003 et mériterait une attention particulière du Gouvernement.

Cette réflexion et ce constat n'ont malheureusement pas suscité votre intérêt. On a même l'impression du contraire. Les nouveaux barèmes de l'APL vont en fait se traduire par un accroissement de l'effort des ménages et des familles, en raison notamment de la non-prise en compte de l'augmentation réelle des loyers et d'un «forfait charges » inchangé.

Devant la gravité de la situation et votre immobilisme, nous demandons que le Gouvernement prenne ses responsabilités, en versant dès maintenant 300 euros à tous les ménages disposant de revenus faibles ou moyens. Cette solution n'a rien de révolutionnaire ni de pérenne mais elle permettrait aux plus démunis de souffler un peu.

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 18.

La parole est à Mme la rapporteure pour la famille, pour le soutenir.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. Il s'agit de la correction d'une erreur rédactionnelle.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 18.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 172 n'est pas défendu.

Je mets aux voix l'article 25, modifié par l'amendement n° 18.

(L'article, ainsi modifié, est adopté.)

Article 26

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Que l'on ne se méprenne pas : ce que je vais dire, madame la ministre, ne s'adresse pas à vous personnellement. J'ai, vous le savez, du respect pour vous et je sais que vous conduisez votre ministère avec beaucoup d'application. Votre écoute sur le terrain - et vous n'hésitez jamais à vous déplacer - est aussi à votre honneur.

Mais, encore une fois, je veux exprimer ici ma déception devant la politique familiale conduite année après année par les gouvernements tant de gauche que de droite.

Le rapport de Mme Marie-Françoise Clergeau comporte d'excellentes remarques mais elle a encore tendance à confondre politique familiale et politique sociale.

Je vous ai écouté toutes les deux avec beaucoup d'attention lors de la discussion générale mais, encore une fois, je crois que nous faisons fausse route. Le seul objectif qui devrait nous rassembler est celui de satisfaire le souhait de toutes les femmes de France d'avoir l'enfant supplémentaire dont elles rêvent mais qu'elles ne peuvent ou ne veulent pas avoir faute de se sentir suffisamment soutenues par un véritable et durable engagement de l'État.

La vie quotidienne des mères de famille est trop dure. On ne leur donne pas encore assez les moyens d'assurer tout à la fois leur vie de mère, leur vie professionnelle et leur vie sociale. La présentation même de ce PLFSS est symbolique puisque quatre articles seulement sur trente-cinq sont consacrés à la famille.

Pour la première fois depuis 1998, la branche famille est présentée en déficit. Aussi, je voudrais insister sur trois points.

Premièrement, il est nécessaire de revoir les critères d'obtention de la PAJE. En exigeant que les femmes aient travaillé deux ans dans les cinq dernières années au lieu de dix auparavant, on contraint les mères de famille qui souhaitent plus de trois enfants à les avoir très rapprochés. On pousse les mères à se consacrer exclusivement à l'éducation de leurs enfants en s'excluant de toute vie sociale, même pour une période brève de travail. Dans ces conditions, on ne peut plus parler d'allocation de libre choix. J'attends avec impatience le bilan, même provisoire, de la PAJE. Quand pensez-vous, madame la ministre, qu'il pourra nous être communiqué ?

Mon deuxième souhait est que soit abandonné le prélèvement de deux milliards d'euros opéré sur la branche famille au profit de la branche vieillesse. Il y a tant à faire en faveur des familles ! Je pense notamment à celles qui comptent des grands adolescents et qui manquent d'accompagnement. La suppression de la carte famille nombreuse de la SNCF est à cet égard symptomatique : c'est à l'âge où les jeunes ont plus que jamais l'envie légitime de se déplacer qu'ils en perdent le bénéfice. L'inadaptation de cette mesure les pousse à se lancer dans des déplacements en voiture, dangereux et polluants. De même, des bourses devraient être plus largement attribuées aux étudiants et à tous les jeunes qui aspirent à découvrir l'Europe et le monde, ou même, tout simplement, qui s'engagent dans des études difficiles.

Enfin, il faut revenir sur les décrets d'août, qui portent un grave préjudice aux veufs et aux veuves et, notamment, aux jeunes veuves. Il faut avoir, en la matière, une politique claire : prévoir la pérennisation des pensions de réversion accordées aux veufs et aux veuves et garantir le versement des droits acquis jusqu'au terme de la vie des intéressés.

Voilà, madame la ministre, trois mesures simples, qui seraient hautement symboliques pour la politique familiale.

M. Jean-Luc Préel. Très bien !

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos  48, 100 et  229, de suppression de l'article.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour soutenir l'amendement n° 48.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. L'amendement est retiré, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 48 est retiré.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l'amendement n° 229.

M. Jean-Luc Préel. Je regrette que M. Bur ait retiré son amendement car il était la conséquence de ce dont nous avons discuté hier, à savoir le transfert de 0,2 point de CSG entre le FSV et la CNAF.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Nous en avons discuté mais ne l'avons pas décidé !

M. Jean-Luc Préel. Votre proposition, monsieur le rapporteur pour avis, allait dans le bon sens tout en induisant, il est vrai, quelques effets pervers puisque, d'un côté, elle permettait de simplifier les tuyaux  mais que, de l'autre, elle pérennisait un prélèvement sur la branche famille.

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Absolument !

M. Jean-Luc Préel. Lorsqu'un prélèvement a été institué sur la branche famille pour financer les majorations de pensions pour enfants par le gouvernement Jospin, tout le monde, en tout cas à la caisse familiale, y était opposé. Dans notre assemblée, M. Bernard Accoyer, pour le groupe RPR, M. Goulard, pour le groupe DL, et moi-même, au nom du groupe UDF, nous étions élevés avec force contre cette mesure que M. Bernard Accoyer n'a pas hésité à qualifier de  hold-up !

Or non seulement ce prélèvement a été maintenu d'année en année mais, depuis deux ans, vous l'avez même doublé, puisqu'il est passé à 60 %.

M. Gaëtan Gorce. C'est un hold-up permanent !

M. Jean-Luc Préel. Non, c'est un double hold-up, puisqu'il a été multiplié par deux !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. On connaît le refrain, monsieur Préel ! Depuis le temps...

Mme la présidente. Poursuivez, monsieur Préel. Ne vous laissez pas distraire par vos collègues.

M. Jean-Luc Préel. M. Gorce a fait une remarque intéressante que je me suis permis de reprendre, madame la présidente.

Mme la présidente. C'est vous qui avez la parole, pas M. Gorce !

M. Jean-Luc Préel. Madame la ministre, vous vous êtes déclarée défavorable hier à l'amendement déposé par M. Bur, arguant que la CNAF était très attachée à garder ses propres fonds afin d'être en mesure de financer une réelle politique familiale et qu'elle continuait à trouver regrettable le prélèvement opéré en faveur du FSV. Les trois propositions que vient de faire M. Baguet concourraient à une bonne politique familiale. C'est pourquoi il nous paraît souhaitable de supprimer l'article 26.

Mme la présidente. J'indique d'ores et déjà que, sur le vote des amendements de suppression n°s 100 et 229, je suis saisie par le groupe Union pour la démocratie française d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 100.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à supprimer le transfert de ressources de la branche famille au fonds de solidarité vieillesse. Pour les raisons indiquées par M. Préel, le transfert du FSV à la CNAF de la charge de la majoration des pensions des retraités ayant élevé trois enfants ou plus pose un problème de fond. En effet, le fonds de solidarité vieillesse, abondé principalement par des recettes fiscales et parafiscales, a pour vocation de financer les prestations vieillesse des périodes n'ayant pas donné lieu à contribution, telles les périodes de service militaire ou de chômage. Ce transfert de charges s'opère au détriment de la politique familiale et prive la CNAF des moyens nécessaires pour répondre aux besoins des familles.

Je rappelle que les associations familiales contestent elles aussi cette disposition, et nous y restons pour notre part opposés. Nous demandons, comme nous n'avons cessé de le faire, que la branche famille conserve son excédent, lequel s'amenuise d'ailleurs dangereusement, et que celui-ci serve à répondre aux besoins qui s'expriment, par exemple à revaloriser les allocations familiales.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 100 et 229 ?

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. La commission a rejeté ces amendements. J'appelle d'ailleurs l'attention de mes collègues sur le fait que, si l'article 26 était supprimé, le prélèvement serait non plus de 60 %, mais de 100 % !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Vous souhaitez, madame Fraysse, remettre en cause le principe de la participation de la branche famille au financement de la majoration de pensions pour enfants. Je tiens à rappeler que cette mesure a été instaurée par le gouvernement Jospin au titre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, qui avait même prévu d'en porter le taux à 75 % à l'horizon 2 005. Compte tenu des capacités de financement de la branche famille, j'ai maintenu ce taux à 60 %, et il est inchangé depuis 2003.

Je fais par ailleurs remarquer à Mme Fraysse comme à M. Préel que la suppression de l'article 26 impliquerait, du fait de la rédaction de l'article L. 223-1 du code de la sécurité sociale, la prise en charge totale du financement des majorations pour enfants par la branche famille, ce qui, je pense, n'est pas vraiment votre intention. En tous les cas, ce n'est pas la mienne et c'est pourquoi je demande le retrait de ces amendements.

Je ne peux pas laisser dire que la PAJE défavorise les familles. Comme je l'ai déjà rappelé, 200 000 familles supplémentaires bénéficient du nouveau dispositif. Les familles à revenus modestes perçoivent 150 euros de plus par mois pour pouvoir faire garder leurs enfants, ce qui n'est pas neutre pour un budget fragile.

Je puis vous assurer que nous prenons en compte les différentes contributions et constats concernant les enfants pauvres. Le rapport du CERC nous a, en particulier, conduits à organiser la prochaine Conférence de la famille autour du thème des familles fragiles et, dans le prolongement du comité interministériel de lutte contre l'exclusion qui s'est tenu en juillet dernier, nous avons lancé un groupe de travail sur les familles monoparentales, car c'est au sein de celles-ci que l'on compte le plus d'enfants pauvres.

Le principe essentiel qui a inspiré la réforme des aides à l'accueil du jeune enfant était de rendre équivalent, pour chaque famille, le coût des principaux modes de garde : la crèche et l'assistante maternelle. Cela concerne aujourd'hui près de 800 000 enfants de moins de trois ans.

Le coût de ces deux modes de garde est très proche et représente en moyenne 12 % des revenus, quels qu'ils soient, d'une famille. Nous tendons vers l'égalité.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. On revient comme d'habitude sur le hold-up sur la branche famille organisé suivant un calendrier socialiste en 2001. Il a été modifié au gré des besoins par l'UMP.

Après la hausse scandaleuse de l'an passé qui avait consisté à doubler le prélèvement, on revient au calendrier initial, plus raisonnable. Le problème reste identique. On nous explique année après année que, si l'on ne fixe pas un pourcentage, on atteindra 100 % du prélèvement sur la branche famille pour financer le FSV. Ne serait-il pas plus simple de modifier le financement du fonds de solidarité vieillesse plutôt que de pénaliser la famille ?

Cela fait un peu penser au fusil à tirer dans les coins. Le fonds solidarité vieillesse finance les trente-cinq heures et c'est la famille qui trinque. Cela ne me paraît pas très logique. Si nous élevions nos enfants de cette manière, ils seraient très choqués.

La famille ne doit pas être pénalisée par des décisions prises antérieurement. C'est une question de volonté politique.

Le groupe UDF demande un scrutin public. En effet, nous voulons réaffirmer inlassablement notre totale opposition à cette mesure et attirer l'attention des gouvernements successifs sur l'injustice flagrante subie par les familles.

J'ai expliqué tout à l'heure que l'on pouvait mener de très nombreuses actions en direction de la famille. Vous en avez cité quelques-unes, madame la ministre.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Il est facile de donner des leçons ! Vous financez comment ?

M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur Bur, on peut trouver d'autres solutions. Il n'est pas nécessaire de prendre la famille en otage !

Vous avez affirmé, madame la ministre, que la PAJE bénéficiait à toutes les familles. Non ! Les familles nombreuses à naissances rapprochées sont exclues du dispositif. La PAJE est une mesure positive. Elle est généreuse, car beaucoup de nouvelles familles peuvent en profiter. Cependant, la petite fraction des familles nombreuses à naissances rapprochées est lourdement pénalisée. Une part significative des indemnités d'allocations familiales ne leur est pas versée.

Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais mettre aux voix les amendements nos 100 et 229, tendant à supprimer l'article 26.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

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Mme la présidente. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

Mme la présidente. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 38

                    Nombre de suffrages exprimés 34

                    Majorité absolue 18

        Pour l'adoption 6

        Contre 28

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'article 26.

(L'article 26 est adopté.)

Article 27

Mme la présidente. L'article 27 ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 27 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertho Audifax.

M. Bertho Audifax. Madame la présidente, au nom du groupe UMP, je demande une suspension de séance de dix minutes.

Mme la présidente. J'allais moi-même vous la proposer, car nous devons attendre le ministre concerné par les articles précédemment réservés.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures cinquante.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 10
(précédemment réservé)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l'article.

M. Jean-Luc Préel. Après un bref intermède de quarante minutes, durant lequel nous avons parlé de la famille, nous voilà revenus à l'article 10, qui traite de la fongibilité entre les diverses enveloppes de l'ONDAM. Il tend à cet effet à corriger une erreur en y incluant les établissements médico-sociaux.

Si l'article 10 va dans le bon sens, monsieur le secrétaire d'État, nous n'en restons pas moins au milieu du gué. Il subsistera bien, semble-t-il, des enveloppes différentes avec des taux d'augmentation qui varieront selon que l'ONDAM concernera l'hôpital, la médecine ambulatoire, le secteur médico-social, les handicapées ou les personnes âgées, autant de secteurs dont les modes de gestion sont très divers : ainsi, les établissements de santé dépendent des ARH alors que la médecine ambulatoire est gérée par les caisses. Il est temps, pour tous les acteurs de la santé, d'aller vers une organisation unique - si possible régionale - regroupant la prévention, l'éducation, la formation, les établissements et l'ambulatoire.

La réforme votée cet été prévoit des missions régionales et des agences régionales de santé expérimentales. L'UDF a regretté, vous le savez, que cette réforme ne se soit pas appuyée sur les ARS, dont la création aurait dû faire l'unanimité.

Vous nous avez annoncé tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'État, que les décrets relatifs aux missions régionales et aux agences régionales de santé étaient en cours de préparation. J'attends leur sortie avec le plus grand intérêt car je crains que la mise en place des ARS expérimentales ne soit pas simple. Dans la mesure où la fongibilité des enveloppes ne sera pas effective dans l'ensemble du pays, il est difficile d'imaginer tout à la fois une, deux ou trois régions dotées d'ARS expérimentales et une enveloppe nationale pour chacun des secteurs... Si la fongibilité des enveloppes est indispensable, la création des ARS l'est tout autant. Les deux doivent aller de pair si nous voulons réellement mettre en place la fongibilité.

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 224 rectifié.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le soutenir.

M. Jean-Luc Préel. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Monsieur Préel, nous sommes nombreux à approuver l'objectif d'une médicalisation de l'ONDAM. Mais votre proposition, qui revient à traiter séparément les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie a déjà été rejetée l'été dernier. Il nous faudra en rediscuter, peut-être dans le cadre de la future loi organique. Nous sommes attachés à une redéfinition afin de véritablement séparer les objectifs. Aussi la commission a-t-elle émis un avis défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Préel, la détermination du montant des différentes composantes de l'ONDAM, parmi lesquelles l'objectif des dépenses d'assurances maladie commun aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie des établissements de santé, tient compte de nombreux éléments - évolution de l'ONDAM lui-même, évolution des charges du secteur, évolution de l'activité, etc. -, dont ceux visés par votre amendement. Ajoutons que la création par la loi du Conseil de l'hospitalisation - ce point tenait particulièrement à cœur au président de la commission des affaires sociales - a précisément pour objet d'introduire davantage de transparence dans la fixation des objectifs de dépenses. M. le président Dubernard me disait tout à l'heure que l'établissement de ces objectifs présentait parfois un caractère désinvolte. Le Conseil de l'hospitalisation, qui réunira les principales administrations centrales concernées et les représentants de l'assurance maladie, comprendra également une personne qualifiée sur ce sujet. Il pourra ainsi formuler au ministre compétent des recommandations argumentées qui tiendront notamment compte de l'ensemble des paramètres mentionnés dans votre amendement. Celui-ci nous paraît donc inutile et plutôt redondant ; aussi vous demanderai-je de bien vouloir le retirer, faute de quoi je serais désolé de devoir en demander le rejet.

Mme la présidente. Monsieur Préel, maintenez-vous votre amendement ?

M. Jean-Luc Préel. Monsieur le secrétaire d'État, cela m'ennuierait de vous désoler d'avoir à demander le rejet d'un de mes amendements. Mais ne venez-vous pas de dire que, de l'avis même du président de notre commission, les enveloppes étaient fixées de manière désinvolte !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. À une certaine époque, en effet !

M. Jean-Luc Préel. Le problème auquel nous nous heurtons depuis longtemps pour la détermination de l'ONDAM tient au fait que celui-ci n'est toujours pas médicalisé. C'est pourtant une revendication déjà ancienne, et qui émane de tous les bancs de cette assemblée : il faut médicaliser l'ONDAM, afin d'éviter qu'il ne soit fixé sur la base de données économiques - généralement pifométriques, il faut bien le dire - par Bercy au mois de septembre ou d'octobre. Or c'est bien ainsi que l'ONDAM a été déterminé chaque année, sous la forme d'un taux d'augmentation prévisionnel, économique, calculé au vu des dépenses réalisées dans l'année et dépendant davantage de la volonté de Bercy que de celle de votre ministère, plus favorable à un ONDAM médicalisé. M. Coulomb vous a pourtant remis un rapport très intéressant ; je suis étonné - mais c'est, hélas, le cas de bien des rapports - que l'on n'en ait pas tenu compte en nous présentant cette année un ONDAM réellement médicalisé.

Pour vous être agréable en ce milieu d'après-midi, monsieur le secrétaire d'État, je veux bien retirer mon amendement,...

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Quelle désinvolture !

M. Pierre-Louis Fagniez. Très beau geste !

M. Jean-Luc Préel. ...mais le problème n'est pas résolu pour autant. Pouvez-vous nous promettre que nous aurons l'année prochaine un ONDAM médicalisé ?

M. Pierre-Louis Fagniez. Oui, sûrement !

Mme la présidente. L'amendement n° 224 rectifié est retiré.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je vous remercie, monsieur Préel. D'ici à l'année prochaine, nous aurons adopté une loi organique dans laquelle, au-delà des objectifs initiaux que j'ai exposés hier et que le Gouvernement compte reprendre à son compte, le débat parlementaire aura eu toute sa place. Nous avions déjà abordé ces questions cet été, lors de la discussion de la réforme de l'assurance maladie ; j'ai bien compris que la détermination de l'ONDAM selon des critères médicaux était une aspiration légitime et partagée sur de nombreux bancs. Si nous voulons être à même de respecter l'objectif de dépenses, il faut l'établir sur la base de critères médicaux : qui dit maîtrise médicalisée dit objectif médicalisé, j'en ai bien conscience. Et je suis persuadé que vous aurez à cœur d'animer la discussion au moment de l'examen de la loi organique par le Parlement.

M. Jean-Luc Préel. Je n'y manquerai pas !

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 13 de la commission.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 155.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 155.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10, modifié par l'amendement n° 13.

(L'article 10, ainsi modifié, est adopté.)

Article 11

Mme la présidente. Sur l'article 11, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. L'article 11 propose d'exonérer du ticket modérateur les consultations de prévention instaurées pour les classes de cinquième. Cette mesure est évidemment très positive - nous avions même proposé que tous les enfants scolarisés puissent bénéficier d'une visite préventive gratuite tout au long de leur scolarité - et nous ne pouvons que la saluer. Malheureusement, ainsi que je l'ai déjà remarqué lors de la discussion générale, elle n'est pas sans soulever quelques interrogations. Comment cette disposition pourra-t-elle être mise en œuvre alors que l'on compte seulement 1 346 médecins scolaires pour douze millions d'enfants scolarisés ? Qui plus est, la proportion de médecins scolaires appelés à partir à la retraite dans les sept prochaines années avoisine 80 %. Quelles mesures envisage-t-on pour surmonter cette difficulté et plus généralement remédier au problème de la baisse du nombre de médecins ? Le numerus clausus, bien qu'il ait été légèrement relevé, est loin de répondre aux besoins prévisibles des toutes prochaines années.

D'autre part, même si nous estimons que cette disposition est positive, nous nous préoccupons de savoir qui paiera cette mesure de santé publique. Sera-ce l'assurance maladie seule ? Nous souhaitons savoir aussi quelle place l'État envisage de prendre dans la politique de prévention, après que le Gouvernement a fait adopter une grande loi de santé publique et souligné la nécessité de rattraper le retard dont souffre la prévention dans notre pays.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure. La dernière Conférence de la famille avait pour thème l'adolescence. Mais la seule mesure concrète que l'on trouve à ce sujet dans le texte est l'instauration d'un examen de santé personnalisé pour les élèves de cinquième, afin de repérer au plus tôt les troubles sanitaires et sociaux susceptibles d'affecter leur développement. Certes, l'intention est bonne et l'on ne peut qu'y souscrire. Elle est toutefois un peu gâchée par le fait que - d'après Mme la ministre chargée de la famille - ce dispositif sera expérimenté dans deux régions seulement, que l'examen sera facultatif et qu'il sera réalisé en dehors de l'établissement scolaire.

Dans ces conditions, je ne pense pas que les adolescents les plus concernés, ceux qui n'ont pas l'habitude de voir régulièrement un médecin, se soumettent à cet examen, dès lors que celui-ci n'est pas obligatoire.

C'est la raison pour laquelle j'ai proposé qu'il le devienne, notamment dans les zones d'éducation prioritaire, et qu'il se déroule à l'intérieur des établissements scolaires. Ma proposition n'a pas été retenue et je le regrette.

Par ailleurs, et Mme Fraysse l'a indiqué, nous manquons cruellement d'infirmières et de médecins scolaires ; on compte en effet un médecin pour 5 600 élèves. Ne pensez-vous pas que la priorité devrait aller, comme le demandent les parents d'élèves, à l'augmentation du nombre de postes ? Cela permettrait de faire œuvre de prévention et ainsi de repérer très tôt les troubles sanitaires et sociaux des adolescents. La Conférence de la famille l'a souligné : la pauvreté croissante a une incidence directe sur la santé des adolescents. Nous ne devons donc pas négliger cet aspect ; il faut y porter la plus grande attention.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11.

(L'article 11 est adopté.)

Après l'article 11
(amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 75.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le secrétaire d'État, nous souhaitons revenir sur un certain nombre de questions qui relèvent de la politique du médicament.

Vous la savez, nous considérons que le médicament ne peut pas être la variable d'ajustement d'un politique de régulation des dépenses de santé.

Nous n'acceptons pas le discours actuel, selon lequel les médecins sont accusés de trop prescrire, ou de prescrire à tort et à travers. Nous n'acceptons pas davantage les propos selon lesquels les assurés sociaux auraient un appétit féroce et sans bornes pour les produits médicamenteux.

Prétendre que les « dérives financières » sont dues à cette surconsommation est une duperie et un mensonge. Il me semble donc nécessaire d'apporter quelques clarifications.

Pour arriver à une utilisation optimale des ressources offertes en matière de médicaments, tant du point de vue financier qu'en termes d'efficacité thérapeutique, nous voulons modifier les circuits administratifs conduisant à la mise sur le marché et à leur admission au remboursement.

Vous connaissez la procédure : lorsqu'une entreprise exploitant un médicament souhaite qu'une spécialité soit remboursable, elle dépose une demande à l'AFSSAPS. Celle-ci décide, conformément aux dispositions du code de la santé publique, une autorisation de mise sur le marché, AMM.

Ensuite, si l'entreprise souhaite que son médicament soit remboursé par l'assurance maladie, elle dépose un dossier à la commission de la transparence. Cette commission donne un avis aux ministres compétents sur le service médical rendu - le SMR - par ce médicament et sur son intérêt par rapport à la thérapeutique déjà sur le marché ; c'est l'amélioration du service médical rendu, dite ASMR. La commission propose aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale un avis favorable ou non sur son efficacité et sur son inscription sur la liste des médicaments remboursables.

Cette procédure présente l'inconvénient de laisser le choix à l'industrie pharmaceutique de demander ou non l'inscription de sa spécialité sur la liste des médicaments remboursables.

Cette procédure a comme conséquence que certains médicaments considérés comme très utiles n'ont pas été ou ne sont pas actuellement remboursés, car la demande n'en est pas faite par l'entreprise exploitante. Et la disposition Mattei de « dépôt de prix » n'est pas satisfaisante pour répondre à cette préoccupation.

La Cour des comptes elle-même a reconnu que ce dispositif était peu probant. Dès lors, certains laboratoires ayant obtenu une AMM ne déposent pas de demande en vue du remboursement par les régimes d'assurance maladie, pour être libres de fixer le prix afin d'assurer une plus grande rentabilité.

Cette démarche permet que des médicaments à service médical rendu important soient en dehors des procédures visant à autoriser le remboursement et à fixer le prix : or le médicament n'est pas une marchandise comme les autres !

Le prix est donc libre. Il est souvent trop élevé pour les personnes en difficulté ou disposant de faibles revenus : c'est la médecine à deux vitesses, à laquelle tout le monde, ici, se déclare opposé.

L'amendement proposé vise à rendre concordants la demande d'AMM et le dépôt de demande d'inscription sur la liste des médicaments remboursables. Cette procédure éviterait que des médicaments à service médical important passent à côté de l'impérieuse nécessité médicale et thérapeutique d'être éventuellement remboursés aux assurés sociaux. En effet, notre disposition prévoit qu'il appartiendra au ministre d'inscrire ce médicament sur la liste des spécialités remboursables.

Nous changeons la logique : la décision n'appartient plus au laboratoire, mais aux pouvoirs publics, qui ont en charge l'intérêt général. Ainsi, le débat n'est plus technique, il relève de choix politiques.

Si nous ne contestons pas la liberté d'entreprendre, nous pensons toutefois que, dans ce cas précis, le droit de se soigner, quels que soient les revenus, doit être prioritaire.

Tel est l'objet de notre amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Vous voulez, madame Fraysse, obliger les entreprises à procéder à la demande d'inscription sur la liste des médicaments remboursables de ceux pour lesquels elles détiennent une AMM. Vous aviez déjà posé cette question, il y a deux ans, à M. Mattei. Il vous avait alors demandé quels étaient les médicaments qui n'auraient pas fait l'objet d'une inscription au remboursement. Nous n'en connaissons aucun !

M. Jean-Marie Le Guen Si : le Xenical par exemple.

Mme Jacqueline Fraysse. Et il y en a d'autres !

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Connaissez-vous une seule entreprise qui ne voudrait pas solvabiliser ses clients en cherchant à obtenir le remboursement de son médicament ? Vous faites fausse route, madame Fraysse !

Avis défavorable.

M. Richard Mallié. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je comprends le souci qui inspire votre amendement, madame Fraysse. Il s'agit de s'assurer que seront pris en charge tous les médicaments présentant un intérêt pour la santé de nos concitoyens. Or c'est bien le cas aujourd'hui. Il n'y a pas de médicaments indispensables à la santé publique qui ne soient pas pris en charge.

M. Pierre-Louis Fagniez. Tout à fait !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous avons en France un système d'inscription qui offre un certain nombre de garanties aux entreprises, à travers une procédure négociée qui permet de concilier les principes de l'accès aux soins et de la liberté du commerce et de l'industrie.

Votre proposition pourrait avoir des effets contre- productifs, car si les entreprises se sentent liées par une inscription d'office, elles risquent de ne pas commercialiser certains produits ou de les commercialiser plus tard, car, vous le savez, on ne peut pas obliger une entreprise à déposer une autorisation d'inscription au remboursement si elle ne le souhaite pas.

Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. On touche là à un problème qui existe déjà, mais qui peut prendre de l'ampleur. De toute manière, il faudra mener une action publique dans ce domaine. Il y a un conflit potentiel entre l'Europe et les États-Unis sur le niveau de prix attendu par l'industrie pharmaceutique et ce que le peuple américain est susceptible d'accepter.

Ne pas croire qu'il y a des problèmes de cet ordre est une erreur. Ils existent déjà, et pas seulement pour le Viagra, lequel n'a pas été considéré dans le débat public comme une spécialité « qui participe au bien-être individuel et collectif », définition de la santé que donne l'OMS.

M. Richard Mallié. M. Le Guen veut se faire rembourser le Viagra dont il a besoin !

M. Édouard Landrain. On va tout savoir !

M. Jean-Marie Le Guen. Il n'a donc pas été inscrit sur la liste des médicaments et il n'y a pas eu de débat.

Je dis cela à l'intention de ceux qui veulent réunir les hautes autorités scientifiques avant de prendre des décisions. Dans ce cas, on ne les a pas consultées, alors qu'il s'agit d'un choix de société.

Il existe par ailleurs un médicament utilisé dans la lutte contre l'obésité, le Xenocal,...

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Il ne sert à rien !

M. Jean-Marie Le Guen. ...qui est remboursé dans presque tous les pays européens mais ne l'est pas en France.

Mme Martine Billard. Comme les contraceptifs oraux !

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Ce ne sont pas des médicaments !

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne prétends d'ailleurs pas qu'il était absolument nécessaire que les pouvoirs publics exigent son remboursement ; c'est une autre question.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Tout à fait !

M. Jean-Marie Le Guen. Le Xenocal est indiscutablement un traitement contre l'obésité, même si je ne crois pas à sa réelle efficacité. Mais, en tout état de cause, nous serons amenés à nous poser cette question, politique.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 75.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 76.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. Je ne comprends pas que certains médicaments considérés comme ayant un service médical rendu insuffisant ou nul figurent sur la liste des médicaments et continuent à être prescrits et remboursés. M. Mattei parlait même de médicaments dangereux. Les produits déremboursés parce que non efficaces ne devraient plus être prescrits.

M. Richard Mallié. Que faites-vous de la liberté de prescription ?

Mme Jacqueline Fraysse. Si l'on veut continuer à les vendre, ils peuvent être distribués dans les drugstores, mais ils ne devraient plus être prescrits.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Nous disposons d'organismes, la commission de la transparence, l'AFSSAPS, qui s'occupent des médicaments. L'autorisation de mise sur le marché prend en compte le problème de la sécurité. Le remboursement est une autre question qu'il ne faut pas confondre.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis que la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les questions posées par Mme Fraysse s'avèrent encore une fois pertinentes. Moi-même, j'ai soulevé un problème dans mon intervention, mais le secrétaire d'État n'a pas cru bon d'y répondre. Pourtant, il a de quoi choquer chacun d'entre nous.

Je l'expose à nouveau. Le Zyrtec, médicament souvent utilisé, a été retiré de la vente par le laboratoire pharmaceutique qui le produisait quelques mois avant de tomber dans le domaine public et de devenir « généricable ». Ce même laboratoire a mis au point une molécule quasiment similaire et l'a commercialisée sous une autre présentation, avec une nouvelle AMM. Ainsi, les médecins sont amenés à prescrire ce nouveau médicament en substitution de l'ancien, et de nouvelles habitudes commerciales vont être prises. Avouez que c'est problématique.

Ne doit-on pas réaffirmer la nécessité d'une attitude loyale : rétribution des brevets, d'un côté ; développement des génériques, de l'autre ? Les sommes en jeu ne sont en effet pas négligeables. Je n'ai pas en tête les chiffres pour le Zyrtec mais l'impact sur les dépenses de l'assurance maladie est certain.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Et pour le Xyzall !

M. Jean-Marie Le Guen. Que font les pouvoirs publics ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. D'abord, je voudrais souligner que la Cour des comptes s'est interrogée sur la composition de la commission de la transparence où siègent des représentants des industries pharmaceutiques, ce qui risque de provoquer des conflits d'intérêts.

Ensuite, s'agissant des médicaments, je note que plus aucun antihistaminique n'est pris en charge à 65 % alors même qu'il y a une augmentation continuelle des cas d'allergie. Or, quand une personne souffre d'allergie, elle doit le plus souvent prendre des antihistaminiques.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Pas obligatoirement !

Mme Martine Billard. En tout cas, cela lui évite d'avoir tout de suite recours à des corticoïdes.

De plus en plus de médicaments sont déremboursés et on assiste à une flambée des prix dont pâtissent les patients qui se livrent à l'automédication.

De plus en plus de médicaments nécessitent une ordonnance alors même qu'ils ne sont remboursés qu'à 35 % ou même plus du tout. A cela s'ajoute que les affections de longue durée ne sont plus prises en charge à 100 %. Là encore, ce sont les assurés qui devront payer.

Nous sommes face à une contradiction. Si l'ordonnance est obligatoire pour certains médicaments, on peut supposer que le service médical rendu est réel, sinon pourquoi les maintenir sur la liste des médicaments ? Et s'il est nécessaire d'avoir une prescription médicale pour se procurer certains médicaments et que les médecins les considèrent comme utiles, il serait logique que l'assurance maladie les prenne en charge.

Cette dérive me paraît inquiétante. Certes, il existe des médicaments dont l'insuffisance a été démontrée et pour lesquels des substitutions dans le même ordre de prix sont possibles. Mais, pour d'autres, le malade n'a plus que le choix de payer de sa poche. Ce dérapage aboutit à réduire le champ de l'assurance maladie et à appliquer la logique du panier de soins aux médicaments.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Ces amendements sont pour moi l'occasion de souligner qu'à travers la réforme de l'assurance maladie, le Gouvernement s'est engagé dans une évolution notable de la politique du médicament.

Rappelons nos objectifs en la matière.

Il s'agit d'abord de penser à l'intérêt bien compris des malades, qui ne rime pas forcément avec une surconsommation médicale dont on cerne désormais mieux la nocivité. Dans le même temps, nous voulons rester capables de financer les molécules innovantes pour offrir aux malades les médicaments les plus actifs. Or, aujourd'hui, le budget du médicament augmente beaucoup : plus de 6 %, cette année. D'où la nécessité de faire des choix.

Il faudra amener l'industrie pharmaceutique à revoir sa stratégie et à travailler en étroite collaboration avec le Gouvernement sur ces questions.

Il faudra éviter les dépenses inutiles pour certains médicaments de moindre intérêt.

Il faudra s'attaquer de manière résolue à la surconsommation de médicaments. Il n'est plus tolérable que nous consommions plus d'antibiotiques, d'antalgiques et de psycholeptiques que nos voisins. En la matière, le plan du Gouvernement parvient à certains résultats.

Il faudra arrêter de rembourser les médicaments dont l'efficacité est faible. Tout à l'heure, je présenterai un amendement qui vise à moins rembourser certains médicaments à utilité modérée, prescrits notamment pour les ALD et actuellement pris en charge à 100 %.

Mme Jacqueline Fraysse. Le problème n'est pas le remboursement mais la prescription !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Il faudra aller plus loin dans la clarification de notre politique du médicament.

J'ajoute que je suis de ceux qui pensent que les génériques sont encore trop chers en France.

M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. À ce titre, la fixation des TFR constitue une aubaine pour tous. Si nous pratiquions une politique de développement des génériques semblable à celle des autres pays européens, cela se traduirait pour l'assurance maladie par une économie de 2 milliards d'euros. Certes, une telle politique ne satisfera pas les laboratoires, qui veulent recevoir les bénéfices de l'innovation et continuer à gagner de l'argent sur des médicaments dont le SMR est insuffisant et sur ceux en passe d'être « génériqués ».

Monsieur le secrétaire d'État, nous pouvons avancer sur cette politique du médicament. Mais cela suppose au préalable que l'ensemble des prescripteurs, notamment le corps médical, s'engagent à prescrire des génériques. Aussi les objectifs devront-ils être clairement définis dans le cadre des conventions que nous passons avec eux.

Une fois cette question réglée, nous pourrons nous pencher sur le problème de la distribution : d'une part, pour voir comment rémunérer justement la substitution ; d'autre part, pour mettre un terme à certaines pratiques commerciales qui coûtent à l'assurance maladie entre 200 et 400 millions d'euros. Plusieurs clarifications s'imposent en ce domaine.

Mais nouspouvons, si nous en avons la volonté, économiser plusieurs milliards d'euros de dépenses dans le domaine du médicament. Le Gouvernement prend le chemin d'une telle évolution. Personnellement, j'estime que nous pourrions l'accélérer.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 76.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Des sujets importants viennent d'être évoqués mais je voulais laisser passer le vote avant d'intervenir, parce que je crois important d'aborder les questions liées au médicament dans la sérénité, afin de mieux avancer dans la réflexion et dans l'action.

J'aimerais que l'on évite les confusions, car les débats peuvent dépasser les clivages traditionnels.

Le plan médicament mis en place dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie est susceptible de représenter 2,3 milliards d'économies en 2007. Et, mesdames, messieurs les députés, je peux vous dire que je suis profondément confiant quant à sa réussite.

Mais ce plan n'est pas tout. Nous avons besoin de maîtriser l'évolution des dépenses liées au médicament, en dehors de l'action résolue que nous menons en matière de génériques. Nous ne pouvons plus accepter des hausses de 8 % par an.

Il est vrai que les Français entretiennent une relation complexe avec le médicament. Notre pays est vice-champion du monde et champion d'Europe de la consommation de médicaments. Pourtant, je n'ai pas le sentiment que nos compatriotes soient plus malades que leurs voisins.

Il s'agit de bien identifier les différents niveaux d'action. Tout d'abord, avant la mise sur le marché, nous devons savoir si le médicament est dangereux ou pas ; ensuite, la commission de la transparence doit décider s'il est utile ou pas ; enfin, le CEPS doit fixer son prix de vente.

Si nous voulons éviter les stratégies de contournement dont M. Le Guen faisait état, nous devons être très vigilants au moment de la fixation du prix lors de l'introduction du médicament et nous livrer ensuite à une gestion dynamique des prix pendant le cycle de vie du médicament. Certes, l'innovation doit être justement rémunérée, mais, sur la durée de vie du médicament, il faut voir si nous ne pouvons pas mener une politique plus dynamique.

Mme Billard a parlé des médicaments qui devenaient de simples produits de santé. Je pourrais citer dans cette catégorie le tulle gras. Nous avons, M. Douste-Blazy et moi-même, donné des instructions au CEPS pour qu'il examine de près ces problèmes. Comme je l'ai indiqué, le volet médicament de la réforme de l'assurance maladie ne résume pas toutes nos préoccupations et toutes nos ambitions en ce domaine.

Une bonne politique permet de ménager l'intérêt de l'assurance maladie tout en continuant à faire de la France un pays attractif pour les médicaments innovants. Car, comme vous, mesdames, messieurs les députés, je veux pour les Français les médicaments les plus efficaces.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 77.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. Auparavant, je souhaiterais revenir au débat précédent. Bien évidemment, je partage certaines des préoccupations exprimées. Mais si nous voulons sensibiliser les Français à l'excès de consommation, il faut prendre une mesure simple : retirer du marché les produits reconnus sans effet, qui ne sont plus des médicaments. Au moins, ceux-là ne seront plus consommés. Or vous vous contentez de les dérembourser, ce qui fait qu'ils sont encore prescrits alors qu'ils ne servent à rien et qu'ils sont payés par les braves gens, qui dépensent de l'argent inutilement.

Monsieur Bur, je comprends que les laboratoires veuillent continuer à gagner de l'argent avec des produits dont le service médical rendu est modeste. Mais nous qui sommes les garants de l'intérêt général, devons-nous cautionner cette démarche qui coûte cher à la sécurité sociale et qui attire les citoyens dans des voies erronées ? Je ne le crois pas. Il faut donc avoir le courage de prendre quelques décisions.

Monsieur Door, vous estimez que les contraceptifs oraux ne sont pas des médicaments. C'est faux, notamment pour les plus innovants, qui ne sont pas remboursés. Ces médicaments qui sont délivrés sur prescription médicale ne sont pas anodins dans la mesure où ils peuvent avoir de graves effets secondaires. J'ajoute que l'hormonothérapie, qui est un traitement préventif, fait économiser beaucoup d'argent à la sécurité sociale, même quand cette pilule contraceptive est remboursée, car elle évite les avortements et accidents de toutes sortes.

M. Richard Mallié. C'est un médicament de confort !

Mme Jacqueline Fraysse. J'essaierai, puisque vous réitérez la demande, de dresser la liste des médicaments qui ne sont pas remboursés et qui devraient l'être.

L'amendement n° 77 vient compléter nos propositions en matière de développement des médicaments remboursables et de contrôle des prix.

Il vise à modifier la procédure accélérée dite « de dépôt de prix » votée lors du PLFSS pour 2003, pour ne plus permettre à l'industrie pharmaceutique de fixer librement pendant une certaine durée le prix des molécules innovantes. Par cette disposition, le ministre voulait corriger un effet pervers du circuit, que nous avions dénoncé et qui permet à l'industrie de demander ou non l'inscription de son médicament sur la liste des médicaments remboursables.

Avec cette liberté accordée à l'industrie pharmaceutique, vous vous êtes aperçu, comme nous, que des médicaments n'ont pas fait l'objet de cette demande pour assurer une meilleure rentabilité aux laboratoires, en particulier en ce qui concerne les molécules innovantes dont l'intérêt thérapeutique pouvait apporter un plus incontestable pour la guérison de certaines maladies.

La mesure de « dépôt de prix » pouvait paraître de bon sens. Qui oserait contester qu'un médicament innovant ou rendant un service médical important puisse être mis le plus rapidement possible à la disposition des malades, surtout en médecine de ville ?

Pour corriger cette situation, vous avez donc proposé de négocier avec l'industrie que les molécules innovantes puissent bénéficier d'une procédure accélérée en vue de leur inscription sur la liste des médicaments remboursables. En contrepartie, vous avez autorisé le laboratoire à fixer librement le prix. On peut se demander où est l'économie pour l'assurance maladie, où est l'intérêt pour la santé publique,...

Mme la présidente. Madame Fraysse, veuillez conclure.

Mme Jacqueline Fraysse. ...qui passe décidément au second plan derrière l'intérêt financier.

Finalement, sous couvert de bonnes intentions, vous avez seulement satisfait la revendication essentielle des laboratoires en leur accordant la liberté des prix pour tous les médicaments nouveaux. La question du financement de la recherche ne peut pas être seule recevable. S'il s'agit de la préoccupation principale, l'État devrait s'honorer en soutenant la recherche autrement qu'en accordant la liberté de prix, dont les conséquences sont supportées uniquement par les malades et les assurés sociaux.

Mme la présidente. Madame Fraysse, je vais vous répéter ce que je vous ai déjà dit ce matin !

Mme Jacqueline Fraysse. Madame la présidente, je n'ai pas le sentiment de faire de l'obstruction.

Notre amendement vise donc à réformer cette procédure accélérée pour faire bénéficier la collectivité des molécules innovantes en faisant en sorte que le prix soit au moins négocié dans le cadre conventionnel actuel. Si la négociation venait à échouer, nous proposons qu'il revienne au ministre de fixer le prix.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Mme Fraysse a confirmé que la procédure accélérée dite de dépôt de prix, qui avait été prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale en 2003, était une procédure de bon sens. Elle permet en effet de raccourcir les délais de dépôt, et ceci est valable pour les molécules innovantes que nous connaissons.

Mais la liberté de fixation des prix n'est pas totale car un accord-cadre entre l'entreprise et le CEPS, le comité économique des produits de santé, prévoit que ce dernier peut tout à fait s'opposer au prix déposé par l'entreprise. Du reste, les représentants du CEPS que nous avons auditionnés confirment bien que, si le prix est vraiment excessif par rapport à d'autres pays européens, ils peuvent intervenir, et ils ne s'en privent pas.

La commission a donc donné un avis défavorable à l'amendement n° 77.

J'ajoute que je remercie M. Bur pour les très bonnes idées qu'il a exposées sur la politique du médicament.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Concernant la fixation du prix, j'ajoute que l'État a un pouvoir d'opposition pendant quinze jours.

S'il était adopté, l'amendement n° 77 remettrait en cause le dispositif alors qu'il fonctionne puisque sept spécialités ont déjà été inscrites selon cette procédure et qu'elles n'ont fait l'objet d'aucun dysfonctionnement.

Le Gouvernement demande donc le rejet de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je n'ai pas obtenu de réponses précises à mes questions. On nous a suggéré que le prix du nouveau médicament qui se substituait au Zyrtec serait très bas, équivalent à celui d'un générique. Cela n'est pas satisfaisant car la pratique commerciale fragilise l'industrie du générique.

Les discours que l'on entend depuis près de trois ans sur l'accès aux médicaments innovants nous interpellent. J'en veux pour preuve ce qui s'est passé pour le Vioxx. Le Gouvernement ne peut pas envoyer comme seul message des hauts fonctionnaires chargés de réaliser les arbitrages économiques autour du médicament. Je suis, comme beaucoup d'autres, disposé à analyser les conditions de la compétitivité de l'industrie et de la recherche pharmaceutiques en France. Cette étude, de même que les rapports qui ont été remis au Gouvernement, et je pense notamment au rapport Masson, n'insistent pas sur le prix. Il y a d'autres éléments structurels pour relancer la recherche sur le médicament dans notre pays. Nous ne pouvons donc pas nous contenter de dire que le prix est aujourd'hui la seule variable qui permette de développer la recherche et qui joue pour mener une politique du médicament en France. Ces propos ne sont plus tout à fait en phase avec la réalité, c'est le moins que l'on puisse dire.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Le Guen, on ne peut pas tenir des propos qui ne sont pas en phase avec la réalité des propos du Gouvernement.

Je vous ai parlé d'une nouvelle politique en matière de fixation et de gestion des prix sur la durée de vie du médicament. Cette politique sera illustrée dans les faits par la détermination et la politique du CEPS. Voilà ce que nous avons indiqué à son président, M. Renaudin.

Ne dites pas que le Vioxx pose problème aujourd'hui, car je vous rappelle qu'il a été mis sur le marché en 2001 ; ne jouons pas au jeu des dates. Voilà dix ans au moins que se pose le problème du remboursement des produits de santé.

Ne nous dites pas que nous ne faisons rien. En effet, nous avons une vraie détermination et une vraie politique en matière de médicament. Par ailleurs, la réforme de l'assurance maladie comporte un volet médicament. Enfin, il ne faut pas oublier notre action déterminée en matière d'innovation, mais aussi pour dépenser mieux en la matière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 77.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 12
(précédemment réservé)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l'article.

M. Jean-Luc Préel. L'article 12 prévoit l'affiliation des enseignants des établissements privés sous contrat au régime d'assurance maladie des fonctionnaires, affiliation qui va dans le bon sens.

Mais vous savez très bien que ce n'était pas la préoccupation principale des enseignants du privé. Ces enseignants, recrutés et rémunérés par l'État, demandent en effet l'équité en matière de retraite avec les enseignants du public. Vous savez qu'ils cotisent 4 à 5 % plus alors que leurs retraites sont inférieures de 20 %.

La réforme des retraites de 2003 était fondée, disait-on, sur l'équité entre les Français. J'avais déposé à l'époque, au nom du groupe UDF, des amendements qui tendaient à instaurer le principe : à cotisation égale, prestation égale. Hélas, ces amendements n'ont été retenus ni par le Gouvernement ni par l'UMP. Depuis, M. Censi a déposé une proposition de loi visant à corriger cette regrettable erreur de l'époque et cette non-décision. Des discussions ont été poursuivies depuis. L'avant-projet de loi comportait un article qui tendait à créer une caisse complémentaire, pour aboutir progressivement à une convergence. Mais cet article a disparu, à la demande, dit-on, du Conseil d'État.

Monsieur le secrétaire d'État, quand l'équité entre enseignants du privé et du public sera-t-elle obtenue ? Je vous remercie de bien vouloir me répondre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. À l'heure actuelle, ce sont les établissements privés qui paient l'affiliation des enseignants et documentalistes aux caisses de prévoyance, les enseignants payant la CSG.

L'article 12 prévoit de mettre fin à ce système pour aligner les enseignants et documentalistes des établissements privés sur les enseignants et documentalistes du secteur public. Mais il semble que la négociation entre les représentants des établissements d'enseignement privé et le Gouvernement portait sur l'amélioration des retraites des enseignants. Les établissements d'enseignement privé auront moins de charges puisqu'ils n'auront plus à payer l'adhésion à une institution de prévoyance. Les enseignants, quant à eux, feront une économie de 15 euros environ par an, si mes calculs sont exacts, mais leur retraite ne changera pas. L'État, lui, devra assumer une charge supplémentaire.

Au final, il y aura un gain financier pour les établissements d'enseignement privés mais une perte pour le budget de l'État, les enseignants étant un peu les dindons de la farce de la négociation puisque, comme l'a dit M. Préel, ils n'ont pas obtenu d'amélioration de leur retraite.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Préel, cet article contribue à faire converger les retraites des secteurs public et privé. Nous avons eu l'occasion d'avoir un échange sur ce sujet avec M. Lachaud dans le cadre des questions au Gouvernement. Vous savez que le groupe UMP a travaillé sur ce sujet, notamment M. Censi, et un certain nombre de membres de votre groupe se sont ralliés à cette proposition de loi.

Se posent les questions du financement, du statut et de la création du régime additionnel de retraite.

Le Gouvernement étudie actuellement quel dispositif législatif serait le plus adapté en la matière, sachant que le régime additionnel de retraite ne pouvait pas figurer dans le PLFSS. C'est en effet ce que le Conseil d'État nous a clairement indiqué, au motif que ce serait un cavalier social.

La volonté du Gouvernement en la matière n'est pas virtuelle. Nous montrons qu'aller vers une convergence constitue pour nous une priorité. En cela, nous nous plaçons dans le droit fil des lois Debré et Guermeur. Ce débat parfaitement légitime trouvera prochainement sa traduction. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Martine Billard. Et la réponse à ma question sur la charge de l'État ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 12.

(L'article 12 est adopté.)

Après l'article 12
(amendement précédemment réservé)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement, n° 157, portant article additionnel après l'article 12.

M. Jean-Marie Le Guen. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. M. Le Guen voudrait créer une conférence nationale sur les professions médicales pour « mettre en place un plan global de formation, de revalorisation ». Mais le Gouvernement n'en a pas besoin pour agir : nous avons rendu la formation médicale continue obligatoire, créé le conseil national et les conseils régionaux de formation médicale continue, qui se mettent en place et fonctionnent déjà. L'évaluation obligatoire des pratiques figure également dans la loi sur l'assurance maladie, et les conférences nationale et régionales de santé, qui réunissent, entre autres, des représentants des professionnels et des organismes de recherche existent. Quant au choc démographique qui vous préoccupe, le comité régional de démographie médicale et l'observatoire national qui ont vu le jour avec la loi sur l'assurance maladie s'en occupent déjà.

La commission vous propose donc de rejeter cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 157.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 13
(précédemment réservé)

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. L'article 13 concerne le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville, qui a pour vocation de soutenir les projets innovants. Il mériterait d'être pérennisé, alors que sa fin est programmée pour 2006.

La qualité des soins de ville aura toujours besoin d'être stimulée et aidée, d'autant que ce fonds finance l'évaluation des pratiques professionnelles des médecins libéraux, dont chacun convient aujourd'hui qu'elle est essentielle. Les débats en cours doivent être l'occasion d'expliciter la différence entre l'évaluation des pratiques et la formation médicale continue. Surtout, le FAQSV intervient pour faciliter l'installation des professionnels de santé dans des zones rurales ou urbaines en déficit démographique. Ces zones ont besoin d'être mieux définies et leurs besoins sont appelés à se développer. L'UDF plaide pour des maisons médicales cantonales regroupant l'ensemble des professionnels, afin de lutter contre l'isolement, de mettre en commun les moyens et d'apporter une bonne réponse à la nécessaire coordination entre les professionnels de santé.

Il faut donc accorder des moyens à ce fonds. Or les dépenses autorisées pour 2005 se monteront, comme ces dernières années, à 106 millions d'euros, tandis que les recettes seront limitées à 30 millions et que les ressources résiduelles ne sont plus que de 17,5 millions. Comment le fonds pourra-t-il atteindre les objectifs qui lui sont fixés ? Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour améliorer la qualité des soins de ville et financer les aides à l'installation ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le FAQSV, comme vient de le rappeler M. Préel, sert en particulier à financer les maisons médicales de garde. Et je m'en réjouis car, bien qu'elles soient très appréciées, elles ne sont pas toujours prises en charge financièrement par d'autres structures. Ainsi, le conseil général de l'Essonne, à majorité socialiste, et dont j'ai du mal à comprendre la cohérence de la politique, a retiré son soutien à la maison médicale d'Evry, provoquant ainsi sa fermeture. Le financement du FAQSV est donc une chance mais, pour être perçu comme telle, encore faudrait-il être assuré de sa pérennité, puisque le fonds soutient une structure, la maison médicale de garde, que chacun souhaiterait durable. Dans mon département, la crainte de voir ces financements supprimés a suscité une grève ; la motivation des médecins à assumer la permanence des soins n'était pas en cause, car nous avons la chance d'avoir des médecins qui acceptent cette contrainte. Cet incident nous a d'ailleurs valu votre visite, monsieur le secrétaire d'État.

Je me félicite de l'amendement n° 258 du Gouvernement qui illustre votre rapidité de réaction : il tient réellement compte des commentaires et répond aux inquiétudes des médecins, non seulement ceux de Longjumeau et de l'Essonne, mais aussi ceux des zones urbaines où les maisons médicales de garde sont déjà en place. Cet amendement, que nous allons examiner, propose à la fois le doublement des fonds affectés au FAQSV et sa prorogation, le temps de mettre en place les financements de substitution pour faire des maisons de garde la règle, car tel est notre objectif.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 14 et 158.

La parole est à M. le président de la commission, pour défendre l'amendement n° 14.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville a été créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, afin de soutenir des projets innovants en matière de qualité et de coordination des soins de ville. Les maisons médicales de garde, dont vient de parler Nathalie Kosciusko-Morizet, ont pu s'implanter grâce aux aides qu'il distribue. L'accompagnement et la mise en place de ces structures constituent un vrai problème, dont les ministres sont conscients. Ce fonds permet également de procéder à l'évaluation des pratiques professionnelles, qui repose sur les unions régionales de médecins libéraux, dont il faut saluer l'action. J'en profite, monsieur le secrétaire d'État, pour informer nos collègues de votre participation au dernier congrès national des URML à Lyon.

L'utilisation des crédits du FAQSV mérite d'être examinée de très près car, chaque année, certaines dotations ne sont pas consommées en totalité et, bien qu'il y ait des explications, les dépenses sont très variables selon les régions. Néanmoins, les crédits sont insuffisants pour mettre en place une évaluation des pratiques professionnelles satisfaisante. Sachant qu'elle coûterait approximativement 1 000 euros par praticien, et qu'en Rhône-Alpes, il y en a 11 000 à évaluer, l'opération coûterait donc 11 millions d'euros. Il faut donc trouver le financement.

C'est pourquoi le rapporteur et moi-même, avec l'approbation de la commission, avons déposé cet amendement, pour attirer votre attention. Pour nous plier aux règles, nous l'avons gagé sur une taxe additionnelle prise au hasard. Mais l'amendement n° 258 du Gouvernement répond exactement à nos préoccupations, et je laisse le rapporteur intervenir puisque nous faisons un travail d'équipe.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Il s'agit en effet d'un amendement d'appel destiné à obtenir que le FAQSV soit pérennisé. L'amendement du Gouvernement nous satisfait et je suis donc d'accord pour retirer l'amendement n° 14. Je demande également à M. Le Guen de retirer l'amendement n° 158.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour défendre l'amendement n° 158.

M. Jean-Marie Le Guen. Madame la présidente, il s'agissait également d'un amendement d'appel. Toutes les procédures du type FAQSV qui distribuent des crédits fléchés, financés sur des enveloppes fongibles, ne donnent plus satisfaction. Il y a quelques années, il fallait une initiative pour stimuler l'innovation, mais, aujourd'hui, les besoins se multiplient, avec ici les maisons de garde, là les réseaux de soins. On ne peut plus se contenter d'agir à la marge, il faut aller à l'essentiel.

Doit-on pour autant continuer, comme je le propose, à augmenter les dotations du FAQSV ? En réalité, il serait désormais souhaitable de cesser l'expérimentation par exception pour généraliser les réformes. Mais les mécanismes de financement qui sont proposés, avec un ONDAM massif d'un côté, et, de l'autre, des petits fonds ridicules, comme le FAQSV, ne sont plus adaptés. On ne peut pas s'accommoder d'un pilotage au niveau national, forcément imprécis. Il faut transférer à la région la responsabilité de certaines enveloppes. Dans ce contexte, le problème n'est pas tant la médecine de ville que l'organisation de l'État : les agences régionales de santé seront, elles, en mesure de dépasser le stade des déclarations d'intention bureaucratiques en procédant à la fusion des enveloppes, à la reconstitution des FAQSV et à l'allocation des crédits fléchés. En l'état, il faut se livrer à une gymnastique qui n'est plus crédible puisqu'elle aboutit sur le terrain, nous le savons tous, à freiner les innovations. Aujourd'hui, il ne s'agit plus de les expérimenter, il faut les généraliser.

Mme la présidente. Acceptez-vous de retirer votre amendement, monsieur Le Guen ?

M. Jean-Marie Le Guen. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Les amendements nos 14 et 158 sont retirés.

Je suis saisie d'un amendement n° 258.

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour le présenter.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je remercie M. le président Dubernard, M. le rapporteur et M. Le Guen d'avoir accepté de retirer leurs amendements. Vos appels respectifs ont été entendus par le Gouvernement.

Celui-ci vous propose d'abonder le FAQSV de 60 millions d'euros au titre de l'exercice 2005, ce qui permettra de porter la dotation disponible à un peu plus de 103 millions d'euros. Le Fonds aura donc les moyens de faire face au défi de la permanence des soins et de l'évaluation des pratiques professionnelles, sur lesquelles je reviendrai.

Autre critère important, vous l'avez dit, la visibilité, qui rime avec pérennité. Il nous a donc paru souhaitable de prolonger le FAQSV d'une année supplémentaire, jusqu'au 31 décembre 2007, sachant qu'en 2005 une mission de l'IGAS sera diligentée afin de savoir, en la matière, quelle politique nous devons mener sur le long terme.

Un mot sur vos interventions respectives. Vous souhaitez la pérennité, monsieur Préel. L'amendement qui vous est proposé, si l'Assemblée l'adopte, donnera au Gouvernement les moyens d'agir. Il offrira surtout aux acteurs de terrain davantage de visibilité pour négocier. Nathalie Kosciusko-Morizet, dont c'est l'une des préoccupations constantes, a abordé la question de la permanence des soins. Pour m'être rendu dans son département la semaine dernière, je connais sa mobilisation. J'ai pu me rendre compte que, dans l'Essonne, les acteurs avaient apporté des solutions forgées sur le terrain, mais qu'il leur fallait, pour les mettre en œuvre, une visibilité suffisante. Garantir des marges de manœuvre financières plus larges donne l'assurance que les projets ne seront pas arrêtés en cours de route, ce qui permet de travailler à la mise en place de la permanence des soins, laquelle constitue pour les parlementaires et pour l'ensemble de nos concitoyens une priorité. Les élus locaux n'y sont pas insensibles, j'ai pu le constater dans l'Essonne l'autre soir, mais aussi dans le Val-de-Marne, chez Pierre-Louis Fagniez, à l'occasion de mon premier déplacement officiel. Chaque fois, la question revient sur le tapis. Nous vous proposons donc d'abonder la dotation du FAQSV.

Je n'oublie pas, monsieur Le Guen, que, dans ce domaine, les solutions durables passent par la voie conventionnelle. L'avenant XIV, vous le savez, n'a pas été régularisé pour des raisons d'ordre juridique, et nous avons demandé aux partenaires conventionnels de trouver très rapidement des solutions.

J'ai bien conscience qu'expérimenter, c'est une chose, et que c'en est une autre de répondre à l'aspiration de tous nos concitoyens, en faisant de la permanence des soins non plus une priorité mais une réalité.

Je connais l'intérêt tout particulier que porte à la question le président Dubernard. Nous étions ensemble au congrès des unions régionales de médecins libéraux pour leur dixième anniversaire. La démarche qualité, qui est au cœur de la réforme de l'assurance maladie, ne saurait être envisagée indépendamment d'une évaluation des pratiques professionnelles. Il faudrait mal connaître les médecins pour penser qu'ils ne sont pas prêts à s'engager dans la voie des évaluations des pratiques professionnelles, les EPP. Mais il ne suffit pas que les partenaires soient partants : il faut encore procurer les moyens nécessaires à la réalisation des objectifs. Le projet de loi est explicite en la matière. Le fonds participera au financement des actions d'évaluation des pratiques professionnelles des médecins libéraux organisées par les URML, je tiens à le souligner. Ceux qui en doutent encore peuvent lire le compte rendu des travaux : les URML ont aujourd'hui un rôle essentiel à jouer dans la structuration locale de l'action en faveur de la coordination et de la qualité des soins. Les unions sont des acteurs à part entière de la réforme de l'assurance maladie. Nous avons besoin de leur engagement. Avec la dotation du fonds et son utilisation pour l'évaluation des pratiques professionnelles, les médecins libéraux ont désormais la possibilité de prouver qu'ils sont tout à fait prêts à s'engager.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, et M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 258.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 13, modifié par l'amendement n° 258.

(L'article 13, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente. Nous en venons à un amendement portant article additionnel après l'article 13.

Après l'article 13
(amendement précédemment réservé)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 159, précédemment réservé.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable. Je n'ai pas compris le sens de l'amendement, lequel prévoit que l'ONIAM « adresse chaque année, avant le 15 juillet, un rapport d'activité au Gouvernement et au Parlement. Ce rapport est rendu public. » Vous ajoutez, monsieur Le Guen, dans l'exposé sommaire, que jusqu'à présent « l'ONIAM n'a pas d'obligation égale d'informer le Parlement. »

Or la loi Kouchner du 4 mars 2002, qui a créé l'ONIAM, prévoit que « l'Office adresse au Gouvernement, au Parlement et à la Commission nationale des accidents un rapport d'activité semestriel. Ce rapport est rendu public. »

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

L'ONIAM est déjà tenu de transmettre au Parlement un rapport semestriel sur son activité, en application de l'article 1142-22-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004. Contrairement à ce qu'affirme l'exposé des motifs de votre amendement, monsieur Le Guen, ce rapport ne porte pas seulement sur les infections nosocomiales, mais il a bien trait à l'ensemble des activités de l'Office.

Le rapport relatif au premier semestre 2004 a déjà été transmis au Parlement.

Cet amendement est donc sans objet.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 159.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 14 (précédemment réservé)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l'article.

M. Jean-Luc Préel. L'article 14 a trait à la dotation de financement de l'ONIAM. Or Yves Bur, rapporteur pour avis, s'apprête à défendre un amendement de suppression de l'article.

L'ONIAM répond pourtant à un besoin réel. L'article 14 fixe le montant de la dotation à 30 millions d'euros pour 2005, contre 70 millions les années précédentes. Cette diminution, demandée par le Gouvernement, est liée au fait que le fonds de roulement est à l'heure actuelle important, voire abondant, mais en raison seulement des difficultés de démarrage que l'office a rencontrées.

Le rôle de l'ONIAM est double.

Sa première mission est de participer, en agissant aussi près du terrain que possible, au règlement à l'amiable des indemnisations au titre des accidents médicaux et des affections iatrogènes, par la prise en charge du fonctionnement des commissions régionales. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous faire le point sur le fonctionnement de ces commissions, dont le rôle est primordial pour régler au mieux ces problèmes douloureux ?

La seconde mission de l'ONIAM est d'indemniser les aléas thérapeutiques et les accidents médicaux sans faute avérée, au titre de la solidarité nationale. En effet, les remontées de demandes et les non-règlements au plan régional conduisent les patients ou leurs familles à demander à l'ONIAM d'indemniser les aléas thérapeutiques sans faute professionnelle avérée.

Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous faire le point sur le nombre des dossiers réglés et celui des dossiers en attente, ce qui nous permettra de répondre à M. le rapporteur pour avis, lorsqu'il demandera la suppression de la dotation pour l'année 2005 ?

Je vous poserai une dernière question : la mise en place de l'ONIAM a-t-elle eu une quelconque influence sur le nombre des poursuites judiciaires engagées pour faute présumée ? Chacun le sait, les patients ou les familles ont tendance à porter plainte, non seulement parce qu'elles n'ont pas eu accès à l'information qui devait être donnée par le professionnel ou l'établissement, ce qui est infiniment regrettable, mais également parce qu'elles espèrent obtenir la réparation d'un accident, ce qui n'est pas toujours injustifié.

Ces plaintes provoquent l'augmentation actuelle des primes d'assurance pour les professionnels de santé.

La prise en compte dans leur ensemble des accidents médicaux, avec et sans faute avérée, des aléas thérapeutiques et des affections iatrogènes et nosocomiales, pose de graves problèmes. Nous attendons que vous nous présentiez un bilan de la situation.

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement, n° 40, de suppression de l'article.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour le soutenir.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. L'article 14 fixe à 30 millions d'euros le montant de la dotation versée par la branche maladie à l'ONIAM.

Le fonds de roulement de l'ONIAM s'élève, fin 2003, à 136,7 millions d'euros. Or la direction du fonds estime que les indemnisations versées par l'office atteindront, à la fin de l'année 2004, la somme de 6 millions d'euros.

Le fonds de roulement continuera donc de croître pour atteindre 195 millions d'euros à la fin de l'année 2004. Pour 2005, les prévisions de dépenses sont de l'ordre de 60 millions d'euros, dont 50 millions d'euros au titre des indemnisations.

Telles sont les raisons pour lesquelles je défends cet amendement de suppression de la dotation, compte tenu de la situation financière globale de l'assurance maladie qui, elle, est déficitaire.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable.

L'amendement de M. Bur a provoqué un long débat au sein de la commission. Il est vrai que ce sujet m'intéresse particulièrement, en tant qu'ancien rapporteur à l'Assemblée de la loi About. Je connais les problèmes relatifs à la responsabilité civile professionnelle.

L'ONIAM a des fonds disponibles, il est vrai, mais les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation n'ont réellement commencé à fonctionner qu'il y a quelques mois à peine, au début de l'année 2004. Les dossiers sont en cours d'évaluation. Ils sont relativement nombreux, et nous attendons de M. le secrétaire d'État le chiffre exact. Nous ignorons le résultat financier. Il convient donc d'anticiper la montée en charge de l'ONIAM.

C'est la raison pour laquelle, monsieur Bur, je souhaite à titre personnel que vous retiriez votre amendement de suppression.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Entre la demande formulée par M. le rapporteur pour avis de la commission des finances et l'avis exprimé par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, le Gouvernement ne peut que s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée.

Je souhaite néanmoins répondre à M. Jean-Luc Préel en fournissant quelques indications. Il convient de savoir que les dotations de l'assurance maladie pour 2002, 2003 et 2004 ont chacune été de 70 millions d'euros. En période de montée en charge du dispositif, il est vrai, seule une part modeste des crédits a été consommée. Les réserves s'élèveront fin 2004 à 195 millions d'euros. C'est pourquoi, alors que le montant prévisionnel des dépenses est de 61 millions d'euros, la dotation de l'ONIAM pour 2005 sera réduite à 30 millions d'euros.

Pour 2004, deux cents indemnisations sont prévues, pour un montant total de 6 millions d'euros ; le nombre de dossiers déposés est estimé à 4 000 environ. Pour 2005, 4 500 dossiers de demande devraient être déposés. Le nombre des dossiers déposés au début de l'année 2005, joint au nombre des dossiers déposés, pour l'essentiel, en 2004 - le délai d'instruction maximal tourne autour de onze mois - devrait aboutir à la fin de l'année à quelque mille indemnisations, d'un montant moyen de 50 000 euros, soit une dépense de 50 millions d'euros.

La dotation que vous souhaitez supprimer, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, n'est pas, il est vrai, techniquement indispensable au titre de l'année 2005. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Je tiens toutefois à appeler l'attention sur un point précis. Ce qui semble aujourd'hui un fonds de roulement important pourrait très vite s'avérer insuffisant si le nombre des demandes d'indemnisation devait continuer de croître. L'incertitude est particulièrement forte quant à l'évolution de l'indemnisation des victimes d'infections nosocomiales. En maintenant un flux de dotations, même restreint, le Parlement lisserait les éventuels effets ultérieurs de ressaut dans la contribution à l'ONIAM.

Je ne demande pas aux parlementaires d'appliquer en la matière un principe de précaution et je m'en remets, je le répète, à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. J'ai bien conscience de la nécessité pour l'ONIAM de bénéficier d'un fonds de roulement mais, même en tenant compte de l'ensemble des dépenses prévisibles pour l'année 2005 - 50 millions d'euros pour les indemnisations et 10 millions d'euros pour la gestion -, la trésorerie de précaution serait de l'ordre de 135 millions d'euros. C'est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement. Il sera toujours temps, l'année prochaine, de revenir sur le sujet et de prendre les décisions qui s'imposeront alors.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 40.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 40 est supprimé.

Article 15 (précédemment réservé)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 79, visant à supprimer l'article.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise en effet à supprimer l'article 15, qui élargit le champ d'intervention du fonds national de la Caisse nationale et détermine le niveau de sa contribution.

Le fonds national de l'assurance maladie de la Caisse nationale contribue aujourd'hui, selon les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, au fonds de concours créé par l'État en vue de l'achat, du stockage et de la livraison de produits destinés à la prophylaxie ou au traitement des personnes exposées à un agent microbien, toxique, chimique ou radiologique, utilisé dans le cadre d'un acte terroriste, dénommé « Biotox ».

Cette contribution s'est élevée à 198,18 millions d'euros en 2002 et à 155,4 millions d'euros en 2003. Pour l'année 2004, elle se réduira à 62 millions d'euros.

Nous nous sommes opposés dès sa création au principe d'une telle contribution.

Premièrement, l'idée même de ce fonds d'État répond plus, à notre sens, à une bouffée délirante devant l'angoisse terroriste qu'à un véritable impératif sanitaire ou d'anticipation sanitaire. Stocker des produits sanitaires périssables ne nous semble pas aujourd'hui une priorité, même dans le monde complexe issu du 11 septembre 2001. C'est surtout un beau cadeau supplémentaire à l'industrie pharmaceutique.

Deuxièmement, cette contribution prétend faire financer par l'assurance maladie des dépenses relevant de la santé publique et donc du budget de l'État. L'article 15, loin de revenir sur de telles dispositions, en exacerbe les contradictions. En effet, alors que le fonds « Biotox » envisageait une réaction sanitaire aux menaces d'ordre terroriste, l'article 15 envisage d'élargir son champ d'intervention à l'ensemble des menaces sanitaires graves, quelle que soit leur origine. Ce fonds serait mobilisé non seulement pour des risques sanitaires liés à d'hypothétiques attentats chimiques, mais également pour des risques sanitaires bien plus sérieux : le SRAS, la grippe aviaire ou la vache folle.

Ainsi, monsieur le secrétaire d'État, non content d'élargir les missions du fonds, vous en diminuez les dotations sans donner en contrepartie l'assurance d'une compensation par les fonds publics.

Cet article vous sert en fin de compte à instruire le désengagement de l'État de certaines de ses missions de santé publique alors même que l'encre de la loi de santé publique votée l'année dernière par le Parlement n'est pas encore sèche.

Telles sont les raisons qui nous conduisent à défendre cet amendement de suppression de l'ensemble des dispositions contenues dans l'article 15 du présent projet de loi.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. À l'appui de votre amendement de suppression, vous nous dites, madame Fraysse que vous refusez de faire passer le coût de la prévention des menaces sanitaires graves sur le compte de la sécurité sociale. Selon nous, il est au contraire légitime que l'assurance maladie participe à ces actions.

Vous-même avez cité des exemples et, sans tomber dans la sinistrose, nous savons bien qu'il existe des menaces telles que la légionellose, la grippe aviaire, etc. Il est logique que l'assurance maladie participe au financement de la constitution de stocks de précaution de vaccins ou d'autres produits de santé.

Mme Jacqueline Fraysse. Qu'elle y participe est une chose... Mais vous proposez qu'elle prenne l'ensemble à sa charge !

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. La commission a donc repoussé cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 79.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 41 de la commission des finances.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Par le biais de cet amendement, je souhaite obtenir du Gouvernement davantage de précisions sur ses intentions en matière de prévention du risque sanitaire, qu'il soit d'origine terroriste ou non - je pense par exemple au SRAS. Nous proposons de supprimer le II de cet article, qui prévoit de doter le fonds « Biotox » de 62 millions d'euros alors que ce fonds dispose encore de réserves importantes, peu de moyens ayant été déployés à ce jour. Néanmoins, je peux concevoir que des moyens supplémentaires s'avèrent nécessaires. Le Gouvernement peut-il éclairer l'Assemblée sur ce point ?

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Au risque de contrarier de nouveau M. Bur, elle a repoussé cet amendement. Il existe peut-être des réserves financières, mais le principe de précaution exige que l'on puisse faire face à des dépenses imprévisibles. La commission souhaite donc le maintien de cette disposition.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable. Pour l'année 2004, monsieur Bur, le besoin d'abondement du fonds s'élève à 62 millions d'euros, en raison, notamment, de l'achat de médicaments liés à la grippe aviaire.

M. Jean-Marie Le Guen. C'est exact !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. On ne peut contester l'utilité de cette acquisition : dans l'hypothèse d'une transmission interhumaine, nous nous devons d'être parfaitement armés pour répondre à la menace que représenterait une telle épidémie pour la santé de nos concitoyens. La quasi-totalité des financements du fonds « biotox » sera consacrée à ces achats, qui s'échelonneront entre la fin de 2004 et le début de 2005. J'insiste donc sur l'utilité de ces crédits qui sont mobilisés dans le seul but de protéger nos concitoyens, et je demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Avec l'article 15, exit le distinguo entre l'État et l'assurance maladie ! La sécurité sanitaire est traditionnellement une prérogative absolue de l'État, et voilà que l'on mobilise à poches déployées le budget de l'assurance maladie. Sur le principe, j'approuve cette démarche, mais, de grâce, finissons-en avec les discours hypocrites sur la séparation entre l'État et l'assurance maladie !

Je ne sais quelle sera la réaction des ceux qui ont à gérer l'assurance maladie, mais le fait est que l'État a décidé, à juste titre - même s'il a parfois, à mon sens, manqué de détermination et de force -, de mettre en œuvre des plans de protection contre différentes menaces.

Mme Jacqueline Fraysse. Il a aussi décidé de ne pas payer !

M. Jean-Marie Le Guen. En outre, autant le FAQSV a vocation à disparaître, autant en matière de sécurité sanitaire, et plus généralement de défense civile face aux risques sanitaires - atteintes à la sécurité nationale, risques industriels, risques divers liés à la mondialisation -, les fonds d'intervention ont vocation à se développer. Nous ferions bien, d'ailleurs, d'organiser notre défense de façon encore plus volontariste.

Il y a quelques semaines, j'ai attiré l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'engager une politique de précaution face au risque que représente la grippe aviaire. Il y a là un enjeu majeur de santé publique non seulement sur le plan national, mais aussi sur le plan international, et l'on est en droit d'attendre du gouvernement de la France qu'il parle d'une voix plus forte afin que toutes les dispositions soient prises pour que cette affection ne devienne pas un fléau planétaire. Si jamais ce que nous redoutons devait se déclencher, les effets humains, économiques et géopolitiques seraient considérables. Or la communauté internationale n'est pas assez mobilisée. On doit également se poser des questions sur le rôle de l'industrie pharmaceutique : une seule chaîne de production produit le médicament permettant de lutter contre la grippe aviaire. La France est un des pays - j'espère que mon intervention y a contribué - qui se seront dotés de ces médicaments en quantité suffisante, mais il faut que la mobilisation se fasse à l'échelle de la planète.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. En commission des finances, nous avons voté l'amendement de suppression de M. Bur en fonction de considérations strictement comptables. Mais je me suis rendu compte par la suite, en préparant l'examen du projet de budget de la santé publique et après avoir rencontré les directions concernées, que cet abondement était tout à fait nécessaire, pour les raisons que M. Le Guen vient d'exposer. Je n'en voudrais donc pas au rapporteur pour avis de la commission des finances s'il retire cet amendement.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Compte tenu des explications détaillées du Gouvernement, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° 41 est retiré.

Je mets aux voix l'article 15.

(L'article 15 est adopté.)

Après l'article 15
(amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 44, troisième rectification, de la commission des finances.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à permettre aux caisses d'assurance maladie de récupérer plus facilement l'indu auprès des professionnels de santé et des établissements qui n'ont pas respecté les règles de facturation ou de tarification. Cette modification de la procédure faciliterait leur travail sur le terrain. Par ailleurs, l'amendement prévoit de tenir les mutuelles informées des procédures de récupération de l'indu auprès d'un assuré social.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Bien que la commission ait jugé intéressant d'étendre la procédure de récupération aux établissements de santé et qu'elle estime nécessaire de prendre en compte l'entrée en vigueur de la nouvelle classification des actes, elle a repoussé cet amendement. Elle s'est interrogée notamment sur les conditions de recouvrement prévues et sur l'information des mutuelles. Cependant, la rédaction ayant été améliorée, je donne à titre personnel un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 44, troisième rectification.

M. Jean-Marie Le Guen. Nous votons contre !

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 43 rectifié de la commission des finances.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Actuellement, seules les contestations d'ordre médical relatives à l'état du malade ou de la victime peuvent donner lieu à la procédure d'expertise médicale. Il est notamment fait recours à cette procédure en cas de désaccord d'ordre médical entre le médecin traitant et le médecin conseil. Il serait opportun d'étendre son champ d'application aux contestations d'ordre médical portant sur les modalités de prise en charge thérapeutique, en particulier dans le cadre des affections de longue durée. En effet, dans le droit en vigueur, l'expertise n'est possible qu'en matière diagnostique, et non en matière thérapeutique, ce qui limite singulièrement sa portée.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Favorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 43 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 45 rectifié de la commission des finances.

La parole est à le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Cet amendement reprend les propositions d'un rapport récent de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociales pour renforcer l'efficacité du contrôle des indemnités journalières par les caisses, ce poste de dépenses d'assurance maladie ayant beaucoup augmenté ces dernières années.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Elle a repoussé cet amendement. Les textes en vigueur prévoient déjà un dispositif de contre-visite, y compris par des médecins libéraux.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Nous demandons à M. Bur de bien vouloir retirer son amendement. Il s'agit, je l'ai bien compris, de renforcer les contrôles - souhait qu'il a déjà exprimé en tant que président de la commission chargée d'examiner le projet de loi sur l'assurance maladie. Le Gouvernement comprend ses motivations mais n'est pas favorable à son amendement.

S'agissant de la date à laquelle prend effet une décision de suspension des indemnités journalières, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 a d'ores et déjà prévu que ce peut être celle de l'examen d'un assuré par le médecin conseil, pour peu que celui-ci en informe directement l'assuré.

En ce qui concerne l'interruption du versement des IJ consécutive au signalement d'un médecin diligenté par l'employeur dans le cadre de la contre-visite médicale, cette même loi prévoit une transmission obligatoire de ces avis au service de contrôle médical de la caisse. Sachez, monsieur le rapporteur, que des instructions ont été données pour que les médecins conseils diligentent des contrôles lorsqu'ils reçoivent de tels avis. Le dispositif doit permettre, grâce à une meilleure communication entre médecins contrôleurs et médecins conseils, un renforcement du contrôle des arrêts de travail abusifs.

S'agissant enfin des sanctions pour envoi tardif de l'avis d'arrêt de travail, la loi sur l'assurance maladie a d'ores et déjà prévu, en son article 27, qu'elles seraient fixées par décret. Ce décret est en cours de préparation.

Je pense par ailleurs qu'il faut de la stabilité dans les règles de droit. La réforme de l'assurance maladie a été validée par le Conseil constitutionnel, le 13 août 2004. Nous ne pouvons pas remettre en cause les nouvelles règles qui viennent d'être fixées. Il y va de l'efficacité du contrôle des caisses.

Pour toutes ces raisons, il ne me semble pas souhaitable d'adopter cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Cet amendement n'est pas anodin. En effet, s'il était adopté, il n'y aurait plus de contrôle par les caisses. Celui-ci serait effectué par les médecins diligentés par les entreprises. Tout avis d'un médecin diligenté par une entreprise, contestant l'arrêt de travail et donc le paiement des indemnités journalières, serait automatiquement appliqué s'agissant du paiement des IJ par la caisse d'assurance maladie.

Jusqu'à présent, en vertu de l'accord national interprofessionnel de 1977, la conséquence de la visite d'un médecin diligenté par l'entreprise provoque l'arrêt du paiement des indemnités complémentaires payées par l'entreprise. Mais il ne provoque pas l'arrêt du paiement des IJ payées par la CNAM. Par ailleurs, l'assuré peut, dans la même journée, demander à son médecin traitant de revalider sa décision première.

Certains recours sont donc possibles. Si l'amendement de M. Bur était adopté, ils disparaîtraient. Nous serions dans une situation où les caisses d'assurance maladie délégueraient totalement le contrôle des arrêts maladie aux entreprises. Ce serait particulièrement dangereux. Les caisses doivent garder le dernier mot pour le paiement des indemnités journalières.

La suspension de journées d'indemnités en cas de retard dans la déclaration d'arrêt de travail est une mesure de bon sens. Cela dit, monsieur le secrétaire d'État, il faudrait faire attention : en cas d'accident, certaines personnes, seules notamment, peuvent avoir des difficultés pour prévenir leur employeur et la caisse d'assurance maladie dans les délais impartis.

M. Jean-Marie Le Guen. En effet.

Mme Martine Billard. Il conviendrait de prévoir une formule souple pour prévenir ce genre de situations. Il faut éviter de retirer, notamment à des personnes ayant un petit salaire, des journées d'indemnités pour un retard « de bonne foi ».

M. Jean-Marie Le Guen. Pensez aux accidents qui se produisent en vacances !

Mme Martine Billard. Par exemple. S'il y a hospitalisation, le cas ne se présentera pas. Mais il peut y avoir d'autres situations qui aboutissent à un retard non volontaire.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne reprendrai pas cet amendement, rassurez-vous. (Sourires .) Je me contenterai de remarquer que dans les explications que vient de nous donner M. le secrétaire d'État, je n'ai pas entendu à quel moment exactement il avait consulté les partenaires sociaux - vous savez, ceux qui gèrent l'assurance maladie ?

A propos des IJ, il nous a dit qu'un certain nombre de décisions avaient été prises, voire appliquées. Je n'avais pas bien compris que les partenaires sociaux avaient eu le temps de délibérer sur cette affaire.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. S'il y a un sujet sur lequel j'ai toujours plaisir à m'entretenir avec vous, monsieur Le Guen, c'est bien la concertation et le dialogue avec les partenaires sociaux. Mais je ne vais pas faire de comparaison, bien évidemment...

Je remarque simplement qu'à partir du moment où la politique concernant les arrêts de travail a été engagée par la CNAM, en 2003, nous avons clairement indiqué ce qu'il en était. Nous sommes en contact avec l'assurance maladie, dont le nouveau conseil d'administration a été installé aujourd'hui et le président, M. Régereau, élu tout à l'heure. C'est pour elle un nouveau départ, dont nous ne pouvons que nous réjouir.

Le décret dont il est question ne fera pas exception à la règle. Nous pratiquerons le dialogue. Nous le ferons au titre de la concertation obligatoire, mais sachez que nous avons toujours à cœur d'aller plus loin !

Mme la présidente. L'amendement n° 45 rectifié est retiré.

Je suis saisie d'un amendement n° 46 rectifié de la commission des finances.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. J'ai eu l'occasion, lorsque nous avons préparé le PLFSS, de visiter une caisse primaire. Les personnels nous ont fait part des difficultés qu'ils rencontrent, notamment pour gérer les indemnités journalières. C'est la raison pour laquelle je propose, à travers cet amendement, de simplifier certaines règles concernant les IJ.

Je sais que le 1°) du I de cet amendement, qui concerne les cures thermales, pose un problème à la commission des affaires sociales. Je suis prêt à le supprimer.

Quoi qu'il en soit, il apparaît que le volume de réglementation auquel les agents doivent faire face est absolument effarant, ce qui ralentit toutes les procédures, de contrôle comme de liquidation.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. L'idée qui inspire cet amendement est tout à fait intéressante puisqu'elle consiste à agir sur le poste important de dépenses que représentent les IJ.

Mais le 1° du premier paragraphe pose, en effet, problème. Il peut se trouver que des personnes, en arrêt de maladie au long cours, aient besoin d'une cure thermale. Il n'y a aucune raison de la leur interdire, surtout si le médecin conseil leur donne l'autorisation de sortir de chez elles pour s'y rendre. Ce 1°) pourrait être supprimé.

Autre problème : la prise en charge de pensions d'invalidité, qui peuvent être anciennes, notamment celles de première catégorie, associées à des indemnités journalières. Il n'y aurait pas de raison de supprimer les IJ à des personnes en invalidité de première catégorie, si elles continuent d'avoir une activité professionnelle. Certes, on pourrait peut-être retenir l'idée que l'ensemble ne devrait pas dépasser la totalité du revenu net d'activité. Mais, de toute façon, pour l'instant, la commission a repoussé l'ensemble de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Je constate, après cet échange entre M. Bur et M. Door, que les indemnités journalières en cas de cure thermale ne sont plus contestées. Cela étant, s'il peut comprendre votre démarche, monsieur Bur, le Gouvernement est réticent vis-à-vis de votre amendement.

Tout d'abord, il ne me paraît pas forcément souhaitable de durcir les règles de cumul des revenus d'une pension d'invalidité avec des revenus d'activité, à l'heure où le Parlement examine le projet de loi relatif au handicap, à l'heure où le Gouvernement et le Parlement souhaitent favoriser le sens de l'effort et du travail.

Ensuite, la suppression du cumul temporaire des indemnités journalières et d'une pension d'inaptitude ne concernerait que les bénéficiaires d'IJ qui font valoir leurs droits à une retraite pour inaptitude, et qui conservent leurs indemnités jusqu'à la liquidation de celle-ci. Il s'agit de cas très peu fréquents.

Enfin, pour éviter de créer des ruptures de droits en supprimant la possibilité de cumul, il me semblerait préférable de diminuer par décret la durée de versement possible des IJ à cette catégorie d'assurés, en la ramenant de six à deux mois. Car une rupture de droits serait terrible pour les personnes concernées.

Les paragraphes III et IV de votre amendement concernent la question du plafonnement à 100 % du salaire net du montant des indemnités versées en cas d'arrêt de travail. Vous considérez comme anormal, monsieur Bur, qu'on puisse percevoir davantage en arrêt de travail qu'en allant travailler. C'est évident, et le Gouvernement est le premier soucieux de ne pas encourager de telles situations. Mais je tiens à vous rappeler que des mesures ont d'ores et déjà été prises pour mieux articuler la part versée par les caisses et la part complémentaire de l'employeur.

D'une part, obligation est faite aux caisses, par la récente loi sur l'assurance maladie, d'informer l'employeur de la suspension des IJ.

D'autre part, la loi de financement pour 2004 a instauré une obligation de transmission au médecin conseil des conclusions de la contre-visite médicale diligentée au domicile du salarié qui perçoit le complément de l'indemnisation à la charge de l'employeur.

Il me semble difficile d'aller plus loin en subordonnant le versement des IJ à la recherche des ressources procurées par les indemnisations complémentaires, obligatoires ou souscrites par le salarié. Une telle recherche alourdirait considérablement la gestion des indemnités journalières et, par là même, augmenterait les délais de liquidation.

Très franchement, mesdames et messieurs les députés, nous nous sommes clairement engagés dans une chasse aux abus et aux fraudes en matière d'arrêts de travail. Il ne s'agit pas de faire la chasse aux arrêts de travail, mais de mettre un terme aux abus si nous voulons sauver notre système de solidarité.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Je retire mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 46 rectifié est retiré.

Je suis saisie d'un amendement n° 47 rectifié de la commission des finances.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Cet amendement est important à mes yeux. En effet, le ticket modérateur peut-être limité ou supprimé dans certains cas, en particulier pour les patients hospitalisés ou les personnes souffrant d'une affection de longue durée. En cohérence avec une politique du médicament que nous avons longuement évoquée cet après-midi et qui nous amène à réfléchir sur l'utilité de continuer à rembourser fortement des médicaments dont le SMR est faible, modéré, voire insuffisant, il serait opportun de supprimer la possibilité, pour ces médicaments remboursés à 35 %, d'être pris en charge à 100 % par l'assurance maladie dans ces cas particuliers. Pourquoi l'assurance maladie continuerait-elle à rembourser à 100 % des produits de santé dont l'efficacité, dans le cadre d'affections graves et lourdes, n'est pas jugée essentielle ?

Cela étant, il convient de donner aux mutuelles la possibilité de définir elles-mêmes leur politique de prise en charge. Jusqu'à présent, elles ne peuvent pas le faire de manière très précise puisque le seul renseignement dont elles disposent est que tel médicament, par exemple, a été remboursé à 35 %. Par cet amendement, je souhaite également donner la possibilité aux assurances complémentaires de mieux cibler leur prise en charge en leur communiquant, pour ces médicaments seulement, le code CIP. Ainsi pourront-elles déterminer le niveau de remboursement proposé et le type de contrat. D'où une responsabilisation des assurances complémentaires, qui pourront mieux gérer le risque. C'est souvent ce qu'elles souhaitaient faire au titre de l'assurance maladie obligatoire. Il me semble intéressant de leur donner cette possibilité au titre de l'assurance maladie complémentaire.

Je sais, monsieur le secrétaire d'État, qu'à la suite du rapport Babusiaux, des expérimentations sont en cours. Il s'agit de voir sous quelle forme les informations doivent être transmises aux assurances complémentaires. Mais il me semble essentiel, si nous voulons les associer à une gestion active du risque, de leur donner la possibilité d'obtenir des informations minimales mais fines sur un certain nombre de médicaments. En l'occurrence, il ne s'agit pas des médicaments les plus importants - nous ne dévoilerons donc pas de secret médical majeur - mais des médicaments remboursés à 35 %.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.

Je crois que le problème est réel. Lorsque certains médicaments sont désignés comme étant à SMR minimum et se retrouvent sur la liste de remboursement à 35 %, il est effectivement difficile d'admettre qu'ils soient pris en charge à 100 % par l'assurance maladie.

Je poserai, à titre personnel, la question au Gouvernement : quelles pourraient être les solutions techniques permettant d'unifier la prise en charge pour tous les patients, qu'ils soient en ALD ou non ?

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Et si nous raisonnions, mesdames et messieurs les députés, en termes de priorités, surtout après l'adoption de la loi portant réforme de l'assurance maladie ? Et si la priorité, c'était le respect de l'ordonnancier bi-zone ? Ce qui veut dire ne rien changer aux conditions de prise en charge des Français qui sont les plus malades, mais s'assurer que l'on rembourse bien ce qu'il est prévu de rembourser, tout simplement.

Et si, dans cet esprit-là, parce que je sais que c'était également cet été l'une de vos préoccupations, et même l'une de vos priorités, monsieur le rapporteur pour avis, nous restions dans le droit-fil d'un texte que le Parlement a adopté voilà seulement trois mois ? Je pense qu'il nous faut monter cet escalier de la réforme marche après marche. Mais il nous reste à gravir ensemble cette première marche. Nous avons publié le décret relatif au respect de l'ordonnancier bi-zone au début du mois d'octobre. C'est l'un des premiers décrets à avoir été publiés. Et d'après ce que je crois savoir, l'un des engagements des professionnels de santé sera de veiller à ce que cet ordonnancier soit respecté.

Cela passe par plusieurs choses. Cela passe évidemment par la présentation systématique du PIRES, le protocole inter-régimes d'examen spécial. Mais cela passe aussi par la définition de référentiels. Vous savez qu'en la matière, nous nous sommes fixé des objectifs ambitieux. Nous en avons aujourd'hui une centaine, et nous souhaitons qu'à la fin de l'année 2005, grâce au travail de la Haute autorité, nous puissions doubler ce chiffre. Cela permettra une meilleure prise en charge des Français, en jouant la carte de la démarche de qualité. Je comprends donc vos motivations, mais je pense que nous pouvons obtenir de meilleurs résultats en faisant respecter l'ordonnancier bi-zone.

Quant aux organismes complémentaires, après le vote de la réforme de l'assurance maladie, ils sont face à un choix. Je leur ai demandé très clairement et très fermement de répondre à la question suivante : leur priorité est-elle de répondre à la demande potentielle de leurs clients par la prise en charge de telles dépenses ou de nous aider à structurer l'offre de soins ? Je souhaite qu'ils répondent rapidement à cette question, parce que leur réponse ne sera pas sans conséquence sur l'attitude du Gouvernement concernant la définition des contrats solidaires, des contrats responsables.

Même si je comprends votre motivation, monsieur Bur, je crois que nous devons être profondément attachés à ces deux priorités : d'une part, s'assurer que soit respecté l'ordonnancier bi-zone, dans le cadre d'une démarche de qualité qui est au cœur de notre action ; d'autre part, demander aux assureurs complémentaires de nous aider à organiser l'offre de soins plutôt que d'adopter une démarche commerciale qui n'aurait pas de sens.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement vous serait reconnaissant, monsieur Bur, de bien vouloir retirer cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Je crois qu'Yves Bur a eu ce que j'oserai appeler une fausse bonne idée. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Édouard Landrain. C'est un spécialiste qui parle !

M. Jean-Luc Préel. Et la réponse de M. le secrétaire d'État va dans le sens de ce que je souhaitais dire.

Les affections de longue durée représentent, en termes économiques, 44 % des soins de ville et 66 % de l'augmentation des dépenses chaque année. Yves Bur a donc raison de souhaiter que chaque euro soit bien dépensé.

Cela signifie-t-il pour autant que les médicaments dont le service médical rendu est insuffisant ne doivent pas être pris en charge à 100 % pour les patients atteints d'affections de longue durée. Je défends au contraire l'idée que les remboursements devraient se faire en fonction de la pathologie du malade. C'est d'abord lui qu'il faut prendre en compte, et c'est en fonction de sa pathologie qu'il faut déterminer le taux de remboursement. Par définition, les affections de longue durée sont considérées comme graves. Elles doivent donc être prises en charge à 100 % par la solidarité nationale, conformément à ce que prévoient les textes actuels, et je ne pense pas que l'on puisse distinguer entre les médicaments.

Dans des débats antérieurs, j'ai d'ailleurs eu l'occasion de citer des exemples tout bêtes, tout simples, qui ne sont pas à la hauteur des enjeux financiers, mais qui sont éclairants. Pour les neuropathies éthyliques, une pathologie malheureusement assez courante dans notre pays, il est regrettable que la vitaminothérapie ne soit plus remboursée. Que les vitamines ne soient pas remboursées pour tout le monde, on peut le comprendre, mais dans certains cas elles devraient l'être. Autre exemple : le Duphalac n'a pas à être remboursé quand il est prescrit pour soulager la constipation, mais c'est un médicament indispensable pour les malades souffrant d'encéphalopathies hépatiques.

Encore une fois, ce n'est pas le médicament en tant que tel qui doit être remboursé ou non. Le remboursement doit être fonction de la pathologie. Et dans le cas des affections de longue durée, cela me paraît tout particulièrement important.

Quant aux organismes complémentaires, monsieur le secrétaire d'Etat, il est vrai que leur rôle est important dans la mise en œuvre de la réforme. Mais ils sont dans une situation assez délicate. Les mutuelles, en particulier, ont des conseils d'administration, des assemblées générales qui représentent les mutualistes.

M. Jean-Marie Le Guen. Eh oui !

M. Jean-Luc Préel. Ces derniers ont la liberté de choisir ce qu'ils veulent faire. Il me semble donc que nous devrions nous conformer au principe suivant : que les mutualistes prennent leurs responsabilités et que le Gouvernement, en fonction de leurs décisions, applique ou non les exonérations ou déductions fiscales. Mais c'est bien à eux de prendre leurs décisions, ce n'est pas à nous de les leur imposer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Cette fois, je n'adresserai pas de félicitations à M. Bur. Depuis quelques amendements, je constate qu'il se laisse entraîner dans une dérive financière.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. C'est comme ça depuis quelques semaines : depuis qu'il a quitté notre commission ! (Sourires.)

Mme Martine Billard. En effet, on peut comprendre que le rapporteur pour avis de la commission des finances adopte une telle démarche, mais quand même !

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 a introduit dans le code de la sécurité sociale une disposition selon laquelle, s'agissant des affections de longue durée, la participation de l'assuré « peut être limitée ou supprimée ». À l'occasion de l'examen de la loi portant réforme de l'assurance maladie, j'avais à plusieurs reprises, mais sans obtenir de réponse, posé la question de savoir pourquoi cette formule avait été introduite. Cet amendement nous montre à quoi elle peut servir !

Le texte de l'exposé sommaire est significatif : les médicaments qui sont « reconnus comme ayant un service médical rendu insuffisant, faible ou modéré » deviennent, un peu plus loin, des « médicaments inutiles ». C'est là que se trouve le glissement.

Je souscris, pour ma part, à ce qu'a dit M. Préel : il faut considérer le malade globalement. Cet été, nous étions à peu près tous d'accord pour estimer que le système français était trop orienté vers le curatif et qu'il fallait l'équilibrer dans le sens de la prévention. Mais il est aussi trop orienté vers une gestion qui appréhende le malade de manière morcelée. Et votre amendement illustre cette dérive, monsieur Bur,rapporteur pour avis. M. Préel l'a démontré, et des médecins le démontreraient par des exemples concrets mieux que je ne saurais le faire : il peut arriver que des affections donnent lieu à la fois à un traitement lourd et à un traitement d'accompagnement qui est indispensable à l'amélioration de la santé du malade. Parce que la réaction à une maladie dépend aussi du confort, non pas au sens courant mais au sens médical du terme. Ce n'est pas un hasard si l'on a abouti à la conclusion qu'une politique antidouleur était nécessaire, parce que juguler la douleur pouvait permettre, dans un certain nombre de cas, une amélioration bien plus rapide, alors qu'il y a quelques décennies, on considérait que cela relevait d'une politique de « confort ».

Nous devons faire attention, monsieur Bur. Et la proposition que vous nous faites présente ce danger de « saucissonner » le malade en opérant une distinction entre ce que l'on considère comme relevant de la prise en charge lourde et le reste, que l'on considère comme secondaire et qui, du coup, pourra être pris en charge par ceux qui en ont les moyens. Et d'ailleurs, vous le dites carrément dans votre exposé sommaire : « l'assuré pourra alors choisir le type de contrat qu'il entend souscrire ». Autrement dit, celui qui n'aura pas les moyens financiers de choisir le contrat lui permettant d'être pris en charge globalement continuera à souffrir des effets secondaires de sa pathologie. Là aussi, il y a un glissement.

Pour toutes ces raisons, je me félicite que M. le secrétaire d'État propose le retrait de cet amendement et qu'on en reste aux modalités actuelles de la prise en charge à 100 % des affections de longue durée.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. À l'évidence, notre collègue Yves Bur fait des propositions décapantes ! Décapantes parce qu'elles mettent au jour les contradictions et les insuffisances de la politique du Gouvernement.

S'agissant des ALD, le retour à l'ordonnancier bi-zone, innovation technologique introduite par M. Séguin lorsqu'il était ministre des affaires sociales, il y a de cela un certain temps, est une initiative intéressante, mais qui ne risque pas d'aboutir à quelque chose de très significatif. Pourquoi ? Parce que le système de la liquidation médicalisée - quel mot abominable ! - ne marchera pas. Il n'est pas fait pour marcher, il est fait pour tendre les relations entre les assurés et la Caisse nationale d'assurance maladie, et pour rien d'autre. C'est la première des choses que fait apparaître cet amendement : un doute.

Mais il introduit aussi, et fort légitimement, un deuxième doute, celui qui a trait aux ambiguïtés du Gouvernement au sujet des médicaments dont le service médical rendu est insuffisant. M. Mattei en avait fait un cheval de bataille - après d'autres ministres, je vous le concède. Qu'en reste-t-il aujourd'hui ? Où en sommes-nous ? Que pense le Gouvernement des médicaments au service médical rendu insuffisant ? A-t-il quelque chose à en dire ? Juge-t-il qu'ils peuvent être médicalement utiles, comme vient de le soutenir M. Préel ? Pense-t-il qu'ils sont généralement utiles, comme d'autres le soutiennent ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Et vous, monsieur Le Guen, qu'en pensez-vous ?

M. Jean-Marie Le Guen. Je vous pose la question, parce que c'est vous qui êtes au pouvoir, monsieur le secrétaire d'État.

Bien sûr, vous pourriez me dire : monsieur Le Guen, on connaît votre position, puisque c'est Mme Martine Aubry qui avait introduit la notion de service médical rendu.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Tout à fait !

M. Jean-Marie Le Guen. Je m'attendais à cette critique.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ce n'est pas une critique, c'est une question.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais votre gouvernement est en place depuis bientôt trois ans : on a quand même le droit de savoir quelle est sa position sur les médicaments au service médical rendu insuffisant ! Y a-t-il quelque chose qui vous gêne, dans cette affaire ? Et quoi, au juste ? Des éléments d'ordre scientifique ? D'ordre économique ? D'ordre politique ? Où est la gêne du Gouvernement ?

Le troisième aspect des choses, qui n'est pas le moindre, et qui est aussi une source de gêne, c'est ce que vient de nous rappeler M. le secrétaire d'État. En effet, comment va-t-on gérer tout cela avec le binôme assureur complémentaire-assureur obligatoire ? Cela ne marchera pas. D'ailleurs, le premier à le dire est celui qui, pourtant, avait été le plus loin dans votre démarche, à savoir le président de la Mutualité française. Aujourd'hui, il critique la mise en œuvre de la réforme de l'assurance maladie, il dénonce la situation et pense qu'il ne se passera rien, tout au contraire. Il se sent maintenant libre de ne plus participer à la gestion de l'assurance maladie. Allez lire la dépêche de l'AFP, mes chers collègues !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. De quand date-t-elle ?

M. Jean-Marie Le Guen. D'aujourd'hui, 28 octobre, à treize heures vingt-huit.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Lisez-la entièrement ! Prenons le temps de la lire !

M. Jean-Marie Le Guen. Écoutez, libre à vous de la contester et d'estimer que tout va bien.

Mme la présidente. Poursuivez, monsieur Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je disais donc qu'entre la gestion de l'assurance obligatoire et celle des organismes complémentaires, vous avez un problème. C'est évident. Et l'amendement de M. Bur met le doigt sur cette question. Il met le doigt sur le fait que votre système ne peut pas marcher. Pour des raisons d'ordre économique et d'ordre organisationnel car, tant que vous resterez dans la logique de la régulation par la partie assurance, vous serez obligés d'aller jusqu'au bout sur le petit risque comme sur le gros risque. Vous, les tenants du proconsul, vous ne pouvez pas rester au milieu du gué. Il faut franchir le Rubicon. Il faut y aller ! Dans de telles conditions, vous n'arriverez pas à assurer un pilotage à deux, surtout quand les deux partenaires sont en fait trois, ou quatre, ou cinq, ou six, ou plus encore, autant qu'il y a de compagnies d'assurance complémentaire. Ce système ne marchera pas, il n'y aura pas de pilotage sur un sujet aussi important, qui met en jeu les masses financières que nous rappelait Jean-Luc Préel au sujet des affections de longue durée.

L'amendement de M. Bur fait donc apparaître toutes les difficultés auxquelles vous êtes confrontés, du retour de l'ordonnancier bi-zone au SMR, en passant par le fonctionnement de l'UNCAM.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Je vais accéder à la demande du Gouvernement et retirer cet amendement. Mais je crois, monsieur le secrétaire d'État, qu'il faut que l'ensemble des prescripteurs prennent effectivement des engagements très clairs en ce qui concerne le respect des protocoles PIRES et la mise en œuvre de l'ordonnancier bi-zone. Car le juste soin, la juste prescription sont nécessaires. C'est cela, notre combat. Le juste soin et la juste prescription ne se traduiront pas par une moins bonne prise en charge des malades, bien au contraire.

Il est nécessaire de sortir les assurances complémentaires de leur position de payeur aveugle. C'est à cette condition, nous en sommes tous convaincus, qu'elles pourront participer à la structuration de l'offre de soins, contrairement à ce que pense M. Le Guen. Il faudra, à travers les contrats solidaires, leur donner les moyens de jouer ce rôle. L'accès au code CIP leur permettra d'agir plus efficacement sans remettre en cause la confidentialité.

Je prends date, monsieur le secrétaire d'État. Nous suivrons avec attention l'évolution des dépenses et la mise en œuvre de la politique du juste soin et de la juste prescription.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Savourez ce débat, monsieur Le Guen ! Quand les résultats de la réforme s'afficheront, mois après mois, année après année, vous aurez du mal à être « audible ». Aujourd'hui, on vous écoute encore, même si je ne suis pas certain que beaucoup de monde vous entende.

Il faut faire preuve de courage et de volonté pour aborder sereinement et sans passion la politique du médicament. Ce débat intéresse, en effet, tous les acteurs politiques quelle que soit leur sensibilité. Vous l'avez rappelé, il est vrai que la question s'est posée pour le gouvernement de Lionel Jospin et notamment pour Martine Aubry.

M. Jean-Marie Le Guen. Qui a agi !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Elle s'était engagée à agir, mais elle n'a rien fait parce que les élections présidentielles approchaient.

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n'est pas vrai !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Vous pouvez hocher la tête, vous savez que telle est la réalité. J'ai bien compris que vous aviez en tête la distinction entre petit et gros risque, déjà évoquée par M. Bapt dans la discussion générale. Vous avez toujours le mot « déremboursement » sur les lèvres parce que vous n'avez que cette solution en tête. Nous avons, quant à nous, décidé de ne pas modifier la frontière entre régime obligatoire et régime complémentaire. La question du médicament sera abordée sous un angle scientifique par la Haute Autorité, parallèlement à la démarche de qualité des soins et d'élaboration des référentiels qui, pour nous, est essentielle. Ne nous en tenons pas seulement à la comparaison entre médicaments, mais définissons la stratégie thérapeutique. C'est peut-être aussi ce qui nous différenciera.

Vous avez évoqué une dépêche dont il serait intéressant de donner lecture jusqu'au bout, monsieur Le Guen. Je vous ai proposé de profiter du temps de parole octroyé au Gouvernement, si le vôtre était épuisé, pour le faire. J'ai plaisir à vous entendre citer la Mutualité française, parce que j'ai cru comprendre que vous aviez rencontré des difficultés avec elle cet été. Vous avez retrouvé l'occasion de la citer, mais il aurait fallu le faire intégralement. M. Davant a ainsi précisé : « Les assureurs ne veulent pas réguler les dépenses de santé. À partir du moment où ils voient que le régime obligatoire ne pourra pas tout prendre en charge, ils voient des parts de marché s'offrir à eux. » Ce que déplore M. Davant, je le déplore aussi. À moins qu'ils n'aient pas compris le sens de cette réforme, la responsabilité des assureurs est de nous aider à organiser le système de soins et non de raisonner en parts de marché. Aujourd'hui, monsieur Bur, les assureurs connaissent les taux de remboursement. À eux de prendre leurs responsabilités en la matière.

Au-delà de la polémique, si nous pouvions débattre sereinement de ces sujets essentiels, cela montrerait que l'évolution des comportements concerne tout le monde dans cet hémicycle, monsieur Le Guen. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. L'amendement n° 47 rectifié est retiré.

Je suis saisie d'un amendement n° 42 rectifié de la commission des finances.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Cet été, nous avons mis en place une contribution forfaitaire par acte à la charge des assurés pour les actes réalisés par les médecins. Tous les assurés sont concernés par cette contribution. Cependant, dans un souci de précision et d'équité, il faut s'assurer que cette disposition s'applique à tous les régimes et que les régimes spéciaux n'y échappent pas. Le régime spécial de l'Assemblée appliquera d'ailleurs, comme il le fait toujours, les dispositions du régime général pour ce qui concerne le régime de base.

De plus, il faut se donner les moyens juridiques pour que la contribution forfaitaire ne soit pas prise en charge automatiquement par les mutuelles. En effet, dans la plupart des contrats de prévoyance, collective ou individuelle, la définition du complément de prestation conduirait à ce que l'organisme assureur soit tenu de rembourser la participation forfaitaire de 1 euro, sauf à conclure un avenant. La négociation contractuelle ou la procédure conventionnelle, très lourde, pourrait ne pas aboutir dès le 1er janvier. C'est pourquoi il est proposé de préciser que l'obligation pour l'organisme assureur de prendre en charge cette participation ne peut résulter que des dispositions expresses du contrat. À défaut de telles dispositions, la participation d'un euro sera réputée non couverte par le contrat. Il faut aller au bout de notre démarche de responsabilisation et nous assurer de son efficacité pour l'ensemble des assureurs complémentaires.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. La réforme de l'assurance maladie a l'ambition de responsabiliser tous les acteurs : la commission a donné un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Avis favorable.

Je remercie M. Bur de nous permettre de donner quelques précisions sur la participation forfaitaire d'un euro qui entrera en application au 1er janvier 2005.

En premier lieu, dans un souci d'équité entre tous les assurés, cette participation devra s'appliquer dans tous les régimes, selon les mêmes modalités. Nos concitoyens ne comprendraient pas que les assurés d'autres régimes que le leur n'en soient pas également redevables, en dehors des cas où le législateur a exclu le forfait : je pense notamment aux enfants, aux femmes enceintes ou aux bénéficiaires de la CMU. Il ne s'agit pas de porter atteinte à l'autonomie, à la spécificité des régimes, mais il faut indiquer très clairement que la loi s'appliquera à tous les régimes.

En second lieu, les dispositions des contrats individuels ou les dispositions des accords collectifs existant en matière de complémentaire santé ne doivent pas non plus faire obstacle à l'application effective de cette participation forfaitaire.

Voilà pourquoi le Gouvernement est favorable à l'adoption de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement est très important, puisqu'il n'y aura pas besoin de revoir les contrats d'assurance complémentaire lorsque ce forfait passera à 2, 3 ou 4 euros !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Vous êtes de mauvaise foi, monsieur Le Guen !

M. Jean-Marie Le Guen. Nous avons bien compris que c'était un avantage certain. Je vous remercie au nom des assureurs, monsieur Bur, de bien vouloir accepter cette innovation. C'est un droit de tirage permanent pour le Gouvernement, qui ne peut évidemment qu'aller dans votre sens.

Monsieur le secrétaire d'État, j'en profite pour vous répondre et pour confirmer mes propos que vous-même avez d'ailleurs repris. Je constate que le président Davant, qui ne partageait pas nos craintes cet été, commence à s'inquiéter. Il observe que « le régime obligatoire ne pourra pas tout prendre en charge » et que les assureurs « voient des parts de marché s'offrir à eux ». Cela signifie donc qu'il pense, comme moi, que votre politique aboutit à une extension du secteur non obligatoire. Il est exact que les primes des mutuelles ont augmenté et que les appels de primes se font toujours à la hausse. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Aux mutualistes qui s'en inquiètent, vous répondez que cela n'a rien à voir avec la politique du Gouvernement et qu'il n'y a pas de déremboursement. Pourquoi, dans ce cas, les primes ont-elles augmenté de plus de 25 % en deux ans ?

Mme Muguette Jacquaint. C'est clair !

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. J'espère que M. le secrétaire d'État répondra enfin à la question que je lui ai déjà posée sur la mise en place effective du forfait. Bon nombre d'actes sont, en effet, réglés par l'intermédiaire du tiers payant. Nous n'avons, jusqu'à présent, pas eu beaucoup d'éclaircissements sur les modalités du recouvrement. Lorsque l'assuré fait l'avance des frais, cela semble simple, mais que se passera-t-il dans les centres médicaux par exemple ? Je pense aussi aux accidentés du travail et aux victimes de guerre, que vous avez voulu responsabiliser en leur faisant payer le forfait. Comment les anciens déportés, qui disposent d'un carnet de soins, vont-ils acquitter ce fameux forfait ? Quels coûts de gestion faut-il envisager pour adresser aux assurés sociaux concernés une mise en demeure de payer deux fois, cinq fois, dix fois. Les frais d'envoi et de personnel seront tels qu'il sera préférable d'y renoncer, à moins que, grâce aux améliorations, si on peut les nommer ainsi, apportées par l'amendement de M. Bur, ce forfait n'atteigne dix euros dans les prochains mois !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Madame Billard, le forfait d'un euro a vocation avant tout, nous l'avons clairement indiqué et nous assumons ce choix, à provoquer la prise de confiance préalable à la responsabilisation des assurés, qui ne repose pas sur ce seul élément. Nous étudions actuellement, pour les régler rapidement, les questions techniques avec la Caisse nationale d'assurance maladie. Cette mesure entrera bien en application au 1er janvier. Je tiens à préciser qu'il s'agira d'un moindre remboursement d'un euro par l'assurance maladie et non du paiement matériel d'un euro chez le médecin.

Mme Martine Billard. Tant qu'il n'y a pas d'avances de frais !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Concernant les personnes au tiers payant intégral, nous réfléchissons avec la Caisse nationale d'assurance maladie à la possibilité de solliciter le paiement à des échéances restant à déterminer, notamment pour des raisons de facilité technique.

Madame Billard, ramenons les choses à leur juste proportion. En moyenne, le nombre de consultations annuelles chez un professionnel de santé s'établit entre sept et huit. Cette mesure, que vous nous présentez comme une charge insupportable, s'élèvera pour chaque assuré à 7 ou 8 euros, soit moins d'un euro par mois. En outre, nous envisageons de fixer un plafond pour ne pas pénaliser les Français les plus touchés par la maladie.

Monsieur Le Guen, vous êtes plus à l'aise dans l'offensive que sur la défensive ! J'ai en effet entendu l'intervention d'un Jean-Marie le Guen totalement sur la défensive ! De quoi parlons-nous ? Que certaines dépenses de santé ne soient pas prises en charge par le régime obligatoire ne date pas d'aujourd'hui ! Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie a fait état dans son rapport de chiffres très clairs selon lesquels les dépenses de santé sont prises en charge à 76 % par le régime obligatoire, à 13 % par les régimes complémentaires et à 11 % par les assurés eux-mêmes. Donc, n'allez pas nous faire croire que cette situation est nouvelle et qu'elle est due à la réforme de l'assurance maladie !

M. Jean-Marie Le Guen. C'est l'augmentation des primes qui est nouvelle !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. À quoi est-elle due, monsieur Le Guen ? Les primes des mutuelles augmentent parce que les dépenses de santé augmentent.

M. Jean-Marie Le Guen. Pas de 25 % !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Si nous parvenons, comme nous le pensons, à mettre en pratique ce fameux « dépenser mieux », il n'y aucune raison que les primes d'assurance complémentaire santé continuent d'augmenter de la sorte. Il faudra aussi en la matière mener une opération vérité auprès des Français titulaires de ces contrats.

Et je tiens à vous livrer une autre information : consultez les études publiées par la Mutualité et notamment celle, émanant de son directeur général, qui montre que les dépenses remboursées par le régime obligatoire ont vocation à augmenter, ne serait-ce que sous l'effet du poids des médicaments innovants, évidemment pris en charge. Vous gagnerez, me semble-t-il, à regagner le chemin de la concertation, avec la Mutualité comme avec tous les partenaires sociaux.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 42 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Article 16
(précédemment réservé)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l'article 16.

M. Jean-Luc Préel. Madame la présidente, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, l'article 16, relatif à l'ONDAM révisé pour 2004, précède l'article majeur du projet de loi de financement, qui fixe l'ONDAM pour 2005. Alors que l'ONDAM 2004 avait été arrêté à 129,7 milliards d'euros, il est désormais estimé à 131 milliards, soit 1,3 milliard supplémentaires et une progression de 5,2 % par rapport à 2003.

Cette augmentation est essentiellement imputable aux soins de ville, qui ont progressé de 1,49 % de plus que la prévision initiale, surtout à cause des dépenses de médicaments et de transports de malades. Les dépenses des cliniques, quant à elles, ont augmenté de 1,25 %, alors que celles des hôpitaux sont pratiquement restées dans les clous - leur enveloppe, il faut bien le reconnaître, est pratiquement fermée, ce qui explique leurs difficultés financières et les reports de charges auxquels ils doivent actuellement procéder.

L'année dernière, j'avais exprimé des doutes quant au respect de l'ONDAM : je prévoyais qu'il serait dépassé car il n'était pas médicalisé - il ne l'est d'ailleurs pas davantage cette année. Le Gouvernement avait alors expliqué que l'objectif était volontariste et qu'il serait respecté. Force est de constater que j'avais raison : l'ONDAM réalisé sera supérieur à l'ONDAM voté et le déficit de l'assurance maladie pour 2004 atteindra un montant absolument considérable, de l'ordre de 13 milliards d'euros.

Si l'on veut vraiment permettre l'égal accès de tous à des soins de qualité, comme chacun en affiche la volonté, il est nécessaire de médicaliser l'ONDAM, de partir des besoins puis de responsabiliser tous les acteurs en les associant en amont aux décisions et en aval à la gestion. Un ONDAM fixé à un taux qui n'est ni réaliste ni médicalisé ne peut être respecté et la loi de financement dans son ensemble se trouve dès lors décrédibilisée. Si, depuis l'origine des lois de financement de la sécurité sociale, l'ONDAM est systématiquement dépassé, c'est parce qu'il n'a jamais été fixé selon des critères médicaux mais uniquement en fonction des données économiques imposées par Bercy.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 16.

(L'article 16 est adopté.)

Article 17
(précédemment réservé)

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 17.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Alors que tous les indicateurs des finances de notre sécurité sociale sont dans le rouge, vous nous proposez, à l'article 17, de voter un ONDAM étriqué, complètement déconnecté de la réalité. Les collègues de votre propre majorité l'ont souligné et je tiens à mon tour à le dénoncer.

Tous ceux qui sont attachés à la sauvegarde de notre système solidaire de protection sociale ne peuvent sérieusement croire en la réalité concrète et médicale de cet ONDAM 2005. L'ONDAM 2004 a été dépassé comme prévu et l'ONDAM 2005 le sera tout autant. Véritable témoin de l'effort accompli en faveur des dépenses d'assurance maladie, cet objectif est porté à 134,9 milliards d'euros en 2005 contre 131 milliards cette année. Son taux d'augmentation n'est que de 3,2 % alors qu'il aura déjà progressé, en 2004, de plus de 5 % ! La preuve est donc faite que votre objectif de dépenses est irréaliste.

Par conséquent, le comité d'alerte que vous avez créé dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie risque d'être constamment en alerte, ce qui va l'épuiser. Il ne cessera d'exiger des économies, dans une course sans fin, puisque vous refusez de travailler à l'augmentation des recettes, ce qui mine les comptes de l'assurance maladie, pour passer à l'étape suivante : la remise en cause de notre système de soins.

Ce sentiment est renforcé si l'on rapproche l'absence de réalisme dans la détermination de l'ONDAM des déficits généralisés des caisses. Pour le régime général, le déficit était de 3,4 milliards d'euros en 2002, de 11,5 milliards en 2003 et il atteindra 14 milliards cette année ! Pour la branche maladie, vous avez pris le pouvoir avec un déficit de 6,1 milliards d'euros ; il est passé à 11,9 milliards en 2003 pour atteindre 13,2 milliards en 2004 ! Depuis votre arrivée, le déficit du régime général à donc pratiquement quintuplé et celui de la branche maladie a plus que doublé. Et pourtant, vous avez essayé et vous continuez d'essayer d'agir sur les dépenses réputées excessives. Je le répète, vous n'agissez pas sur les recettes et vous « cadenassez » les dépenses. Vous conduisez donc tout droit notre système dans l'impasse ; c'est une évidence, quoi que vous disiez.

Vous préconisez un ONDAM résolument insuffisant, après quoi vous actionnez le levier de la maîtrise des dépenses en culpabilisant patients et soignants. En d'autres termes, les assurés sociaux devront s'attendre à des contrôles tous azimuts et à des sanctions accrues, au nom du respect d'un ONDAM dont on sait déjà, au moment où il est fixé, qu'il ne tient pas compte de la réalité et ne peut être respecté.

Mme la présidente. Sur le vote de l'article 17, je suis saisie par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Mes chers collègues, le moment est venu de faire le point : il reste quatre-vingt-cinq amendements à étudier.

M. Édouard Landrain. Seulement ? (Sourires.)

Mme la présidente. Pour ma part, après quatre séances passées à vos côtés, je lèverai la séance à dix-neuf heures trente pour passer le relais, ce soir, à M. Leroy.

M. Gérard Bapt. On vous regrettera !

Mme la présidente. Tel est l'enjeu : vous déciderez vous-mêmes, par votre attitude, de l'heure à laquelle s'achèvera l'examen du projet de loi de financement.

Nous en revenons aux orateurs inscrits sur l'article 17.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Madame la présidente, nous sommes là pour débattre d'un sujet majeur.

Mme la présidente. Absolument. Je ne fais que vous informer de la situation.

M. Jean-Luc Préel. Nous sommes tous très attachés à donner à chacun de nos concitoyens l'accès à des soins de qualité. C'est pourquoi, sans être long, je souhaite appeler l'attention sur l'article 17, qui est, de mon point de vue - et, me semble-t-il, de celui des Français -, l'un des articles majeurs du texte, voire son article essentiel, puisqu'il définit l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, c'est-à-dire les sommes que la nation souhaite consacrer au financement des dépenses de maladie remboursables.

Le Gouvernement a proposé de fixer l'ONDAM pour 2005 à 134,9 milliards d'euros. Ce montant est-il réaliste et sera-t-il respecté ?

Ce montant est-il réaliste ? Certainement pas car il n'est pas déterminé, cette fois encore, à partir de critères médicaux, comme nous le demandons depuis des années et comme M. Coulomb l'a proposé dans son rapport. Mais la loi organique résoudra peut-être le problème pour l'année prochaine ; nous verrons.

Ce montant sera-t-il respecté ? Le taux de progression retenu est sans doute insuffisant. Il suffit, pour s'en rendre compte, de décliner l'ONDAM prévisionnel par enveloppes, comme l'a fait M. le secrétaire d'État. Pour les hôpitaux, ce sera très juste puisque le taux de 3,6 % est inférieur à ce que la Fédération hospitalière de France estime nécessaire pour la simple reconduction des moyens. Il reste, si l'on tient compte du secteur médico-social, environ 2,1 % pour les soins ambulatoires ; or personne ne peut croire que ce taux puisse être respecté.

Si l'ONDAM n'est pas tenu, le déficit sera bien entendu supérieur à la prévision et nous confierons aux générations futures une dette encore accrue, ce qui n'est guère acceptable.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je serai très bref car nous avons déjà dit, dans la discussion générale et dans nos interventions sur plusieurs articles, que nous jugions nous aussi irréaliste l'ONDAM proposé par le Gouvernement. Mais je voudrais insister sur les inquiétudes majeures que nous éprouvons au sujet de l'hôpital et notamment de l'hôpital public.

Le taux de 3,6 % de l'ONDAM hospitalier, particulièrement irréaliste, traduit une évaluation totalement erronée des besoins des hôpitaux. Les quelques sondages que nous avons pu effectuer auprès de telle ou telle direction de centre hospitalier le montrent : nombreux seront les établissements placés en grande difficulté.

Certains ont déjà engagé de grands plans d'économie. La directrice générale de l'AP-HP, par exemple, a opéré, depuis deux ans, des réductions drastiques, et l'on ne voit pas bien ce qui pourrait encore être gagné en matière de gestion. Par contre, étant donné la masse salariale dans les budgets des hôpitaux, ce qui est d'ores et déjà en cause, y compris à l'AP-HP, ce sont les emplois, les postes non créés ou non renouvelés.

J'insiste aussi, après M. Préel, sur le fait que le secteur hospitalier a respecté, cette année, le cadre d'évolution qui lui avait été dévolu. Et une étude d'Éco-Santé OCDE montre bien que la part des dépenses hospitalières dans le total des dépenses de santé, contrairement à celle des soins de ville, a significativement reculé depuis 1980.

L'ONDAM fixé pour les soins de ville est extrêmement minoré, très volontariste, mais peut-être moins difficile à atteindre que l'ONDAM hospitalier, dans la mesure où la prescription et le comportement peuvent influer grandement sur ce type de dépenses.

Par contre, l'avenir proche du secteur hospitalier public nous inquiète beaucoup, compte tenu de la structure de ses dépenses - et en particulier de la part de la masse salariale - ainsi que des mesures nouvelles annoncées, concernant notamment les praticiens hospitaliers.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour une explication de vote sur l'article 17, comme le permet le règlement.

Mme Jacqueline Fraysse. J'ai deux raisons fondamentales de voter contre l'article 17 : l'insuffisance de l'ONDAM général, dont j'ai déjà parlé ; l'insuffisance de l'ONDAM pour l'hôpital public, à propos duquel je partage les préoccupations de Gérard Bapt.

M. Bertrand - je regrette qu'il ne soit plus là, mais tant pis - s'est fâché et a prétendu que j'avançais des contrevérités quand je lui ai dit que les budgets hospitaliers n'augmentaient pas. Pourtant, j'aurais même pu dire qu'ils diminuent.

Je voudrais lui répondre, bien qu'il ne soit plus là, que je n'ai pas l'habitude de dire des contrevérités. Je vais donc vous expliquer pourquoi je persiste dans cette opinion.

M. Door, a clairement souligné, dans son rapport, que le niveau des dépenses réalisées en établissement devrait progresser de 4,9 % en 2004, soit, en valeur absolue, 66 milliards d'euros. Or vous prévoyez vous-même un ONDAM hospitalier en augmentation pour 2005 de 3,6 %, soit 2,376 milliards d'euros. Vous reconnaîtrez vous-même, monsieur le ministre, qu'il y a un problème !

Pour avoir une image réaliste de la véritable dotation 2005 en faveur des hôpitaux, il convient, en outre, de faire quelques soustractions. Tout d'abord, il faut retrancher les 150 millions de dépassement de l'ONDAM de 2004, selon le calcul effectué par M. Door, toujours dans son rapport. Ensuite il faut soustraire l'augmentation de l'ONDAM médico-social, soit 210 millions. Enfin, vous exigez des hôpitaux des économies de 850 millions sur trois ans, dont 150 millions dès l'an prochain, somme qu'il nous faut donc également soustraire. Nous en sommes, par conséquent, à une enveloppe de 1,8 milliard, chiffre qui correspond à votre annonce de moyens supplémentaires pour les hôpitaux et les cliniques.

Mais vous oubliez de retrancher encore les 850 millions estimés par la Fédération hospitalière de France pour les reports de charges des années 2003 et 2004. Nous parvenons donc à 950 millions d'euros, ce qui est déjà fort différent de ce qui était annoncé.

Or, à l'article 7, vous avez prévu un dispositif qui permettra des avances de fonds pour les cliniques privées, afin de leur permettre la mise en place de la T2A. Ce montant, que nous ne connaissons pas, devra être retranché de ces 950 millions. Quand on connaît les difficultés financières des petites structures privées, qui sont les plus nombreuses, on peut penser qu'il risque d'être élevé.

Il faudra encore déduire de ces chiffres l'augmentation de l'ONDAM de ces cliniques pour obtenir, enfin, l'ONDAM destiné à l'hôpital public et aux établissements privés sans but lucratif et à vocation de service public.

Cerise sur le gâteau, il faudra tenir compte aussi de l'évaluation faite par la FHF du taux de progression nécessaire à la simple reconduction des moyens des hôpitaux en 2005, compte tenu des décisions imposées en matière salariale et de l'évolution constatée des prix. La FHF évalue ce taux à 4,74 %, soit 1,1 point de plus que votre propre prévision.

À quoi vous devez ajouter encore le coût des assurances en responsabilité civile, qui s'est envolé, les cotisations de la SHAM, la principale mutuelle d'assurance des établissements, ayant augmenté de 45 % il y a deux ans, de 25 % cette année, et devant encore augmenter de 15 % l'an prochain.

Sauf à croire que les dépenses des établissements seraient en diminution l'an prochain, la croissance des moyens que vous annoncez pour l'hôpital est loin de justifier l'enthousiasme que vous manifestez et les observations brutales que M. Xavier Bertrand m'a adressées. Je ne peux vous en faire reproche, monsieur Douste-Blazy, puisque vous n'étiez pas là au moment où cet échange un peu vif a eu lieu.

Je considère que, malheureusement, mes préoccupations sont justifiées et j'éprouve les plus grandes craintes pour les services hospitaliers.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertho Audifax.

M. Bertho Audifax. De l'enthousiasme, certes, il en faut, si nous voulons, dans une situation difficile - nous le savons tous -, avec courage et ténacité, respecter, comme le souhaite le Gouvernement, les engagements qui nous permettront de sauver notre système de santé.

Le Gouvernement a fixé des objectifs courageux. Il a réussi à rétablir la confiance avec les professionnels libéraux. Ceux-ci feront des efforts et ils seront à nos côtés. Il faudra bien que l'hôpital public consente lui aussi des efforts. Je suis persuadé que bon nombre des praticiens des hôpitaux publics y sont prêts, ainsi que le personnel.

Nous croirons à ces objectifs. Si la tâche était facile, nous ne serions pas là pour tenter de remédier à l'énorme déficit de la sécurité sociale. Il faut du courage pour accomplir ces réformes.

Pour notre part, nous allons voter l'article 17 pour montrer que nous voulons réussir.

Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au scrutin, précédemment annoncé, sur l'article 17.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

........................................................................

Mme la présidente. Le scrutin est ouvert.

.......................................................................

Mme la présidente. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 42

                    Nombre de suffrages exprimés 40

                    Majorité absolue 21

        Pour l'adoption 25

        Contre 15

L'Assemblée nationale a adopté.

M. Gérard Bapt. L'écart se resserre ! Cette nuit, peut-être...

Article 18 (précédemment réservé)

Mme la présidente. Sur l'article 18, je ne suis saisie d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 18 est adopté.)

Après l'article 18
(amendement précédemment réservé)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 227, portant article additionnel après l'article 18.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le soutenir.

M. Jean-Luc Préel. Mon amendement tend à demander au Gouvernement un rapport sur un sujet dont nous avons déjà débattu lors de la discussion générale et de l'examen de l'article 12. Il s'agit de l'harmonisation des régimes de retraites des enseignants du privé et du public, selon ce principe tout simple : à cotisations égales, pensions égales. Il faut que cela soit fait le plus rapidement possible.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Je trouve un peu curieux que cet amendement soit placé après l'article 18. À l'article 12, nous avons prévu la convergence des dispositifs relatifs à l'assurance maladie. Une réflexion est en cours pour les dispositions en matière de retraites, notamment dans le cadre de la proposition de notre collègue Yves Censi. Par conséquent, demander au Gouvernement un rapport avant le 31 décembre de cette année me paraît prématuré et surtout ne répond pas au problème.

La commission a rejeté votre amendement, monsieur Préel.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Sur le fond, il y aurait bien des choses à dire et je comprends l'intention de M. Préel. M. Xavier Bertrand s'est longuement exprimé à ce sujet. Il a donné les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Je comprends le souci, ô combien louable, de M. Préel, et nous sommes nombreux à le partager. Il est exact que deux grands principes régissent la situation des maîtres contractuels de l'enseignement privé : d'une part, un principe d'assimilation - même modèle d'organisation et d'évolution de carrière, mêmes épreuves de concours, mêmes programmes d'enseignement - et, d'autre part, un principe de diversité, lequel n'est pas sans causer une certaine insécurité. Le choix que les maîtres contractuels de l'enseignement privé ont fait de travailler dans ce secteur entraîne bien souvent une moins grande sécurité de l'emploi, puisque toute nouvelle affectation est subordonnée à l'accord de la direction de l'établissement et que toute réduction des horaires de service se traduit par une diminution proportionnelle de la rémunération.

Pour ce qui est du principe d'assimilation, qui prévaut tout au long de la carrière, il s'interrompt brutalement au moment du départ à la retraite puisque les maîtres du privé ne bénéficient pas du régime de retraite des fonctionnaires.

Je m'étonne que M. Préel ait déposé cet amendement car il fut l'un des premiers cosignataires - ce qui prouve la sincérité de sa démarche - de la proposition de loi qui fournit un certain nombre de solutions, parmi lesquelles la mise en place d'un régime additionnel destiné à rapprocher les niveaux des retraites. Demander un rapport supplémentaire risquerait de retarder le processus, qui est un processus décisionnel. Pour le moment, nous sommes 277 à avoir cosigné la proposition de loi. Mobilisons toutes les énergies pour qu'elle aboutisse.

Xavier Bertrand a évoqué une autre question, celle de l'ambiguïté du statut de ces maîtres, ambiguïté qui fragilise leur situation. Il importe, je pense, de lier les solutions visant au rapprochement des retraites et celles visant à clarifier le statut. Vous y avez adhéré, monsieur Préel, en cosignant la proposition de loi.

L'article 12, que nous avons adopté il y a quelques minutes, a par ailleurs engagé ce processus de sécurisation. Je saisis l'occasion pour rendre hommage à M. Douste-Blazy comme à M. Xavier Bertrand pour leur capacité d'écoute et leur faculté de prendre des décisions rapides.

Je le répète, voter cet amendement ne ferait que retarder un processus fort bien engagé.

M. Jean-Marie Le Guen. Je ne le crois pas ! M. Préel a raison !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 227.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Avant l'article 19
(amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 160, portant article additionnel avant l'article 19.

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Le Guen. La défense de cet amendement va me permettre d'apporter un éclairage global sur le dossier de l'amiante. En effet, nous avions déposé un certain nombre d'amendements à ce propos, mais ils sont tombés sous le coup de l'article 40.

En défendant une des motions de procédure, j'ai eu l'occasion de parler de ce problème qui devrait être traité de manière exemplaire, s'agissant de la santé au travail et des conséquences pour les travailleurs des problèmes d'environnement. Nous devrions en tirer les leçons, car nous sommes tous concernés et nous devons tous assumer la responsabilité de cette grave question.

Lorsque nous évoquerons le FIVA et le FCAATA, nous aurons des commentaires à faire. Mais la première des choses à affirmer, c'est qu'il faut tout particulièrement respecter les droits sociaux de ces personnes qui, victimes d'une exposition à l'amiante, voient - pas toujours, heureusement, mais très souvent - leur espérance de vie diminuée. Nous avons un devoir de solidarité à leur égard. C'est pourquoi nous avions fait, par voie d'amendements, cinq propositions.

Il s'agissait, d'abord, de fixer un plancher à l'allocation de cessation anticipée d'activité, égal au moins au SMIC brut, et de supprimer la disposition limitant l'allocation à 85 % du salaire. C'est tout particulièrement important pour les petits salaires. Comment imaginer que ces personnes, à l'espérance de vie réduite, et qui jouiront donc moins longtemps de la retraite que d'autres, ne puissent pas bénéficier, dans des conditions dignes, d'une cessation anticipée d'activité ?

Nous demandions, en second lieu, une revalorisation à 75 % du salaire de référence du montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité. Nous réclamions, troisièmement, que le salaire de référence soit calculé sur les douze meilleurs mois de salaire de la carrière professionnelle ; quatrièmement, que soient prises en compte dans le salaire de référence les primes et indemnités qui sont des us et coutumes et font partie intégrante du salaire ; cinquièmement, enfin, que l'allocation amiante soit étendue à tous les salariés d'un établissement déjà inscrit dans les listes parues par décret, y compris à ceux d'éventuelles entreprises sous-traitantes.

J'ai déjà interpellé le ministre sur ce point : nous aimerions qu'il exprime avec force ce que doit être l'attitude, à l'égard des salariés, du bureau chargé des accidents du travail et des maladies professionnelles. Doit-il avoir une attitude mesquine ou, au contraire, considérer que les victimes doivent bénéficier de certains droits sociaux ? Cette maladie a été, pendant des années, totalement négligée et il est nécessaire de montrer aujourd'hui aujourd'hui une certaine ouverture d'esprit et de faire cesser la contestation. En effet, lorsqu'un salarié qui a été exposé à l'amiante présente un cancer de la plèvre ou du poumon, ou encore souffre d'insuffisance respiratoire, on sait pertinemment que son affection n'est pas tombée du ciel. Peut-on continuer de chicaner sur les responsabilités et le périmètre des entreprises concernées lorsqu'une personne est aujourd'hui atteinte d'asbestose ou d'un cancer de la plèvre ? Les données épidémiologiques l'établissent formellement : ces maladies sont directement liées à une exposition à l'amiante. Sans forcément l'inscrire dans la loi, j'estime que la direction du travail devrait faire preuve d'une certaine ouverture d'esprit face à ces problèmes, contrairement à ce qui se passe aujourd'hui.

Mme la présidente. Monsieur Le Guen, puis-je considérer que vous avez également défendu l'amendement n° 161 ?

M. Jean-Marie Le Guen. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. La santé au travail est un vrai sujet, qui dépasse très largement le cadre de l'exposition à l'amiante dont nous traitons ici. La mission de veille et d'alerte sanitaire relève de l'Institut national de veille sanitaire qui a été créé par M. Kouchner. L'information, quant à elle, est assurée par l'Institut national de recherche et de sécurité. S'agissant des maladies professionnelles, une réflexion est engagée dans le cadre de l'article 48 du projet de loi relatif à la simplification du droit.

Pour toutes ces raisons, la commission a repoussé les deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. S'agissant de l'amendement n° 160, je partage l'objectif de renforcer l'expertise publique dans le domaine de la santé au travail.

La mission d'évaluation du dispositif de sécurité sanitaire prévue par la loi de 1998 a remis ses conclusions au cours de l'été dernier, en pointant la nécessité d'introduire la santé au travail dans ce dispositif public et en proposant plusieurs scenarii possibles.

En tout état de cause, créer une agence ex nihilo n'est sans doute pas la solution la plus pertinente. La prise en compte du milieu de travail dans le dispositif de sécurité sanitaire nécessite une réflexion approfondie, conduite actuellement par le Gouvernement. Certains aspects de l'expertise en milieu de travail sont en effet communs à la santé, au travail et à l'environnement, comme l'a montré le rapport scientifique du plan national santé environnement.

Les modalités de l'intégration effective du milieu de travail dans le dispositif de sécurité sanitaire seront arrêtées par le Gouvernement avant la fin de l'année 2004. Elles constitueront, comme l'a annoncé M. Raffarin lors de la présentation du programme national santé environnement, l'un des thèmes prioritaires du plan santé travail, élaboré par mon collègue chargé des relations du travail, M. Borloo, et qui doit être présenté prochainement.

C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.

L'amendement n° 161 vise à faire déposer au Parlement le 31 janvier 2005 un rapport du Gouvernement faisant le bilan de l'ensemble des dispositifs d'indemnisation des victimes de l'amiante.

Monsieur Le Guen, l'information du Parlement sur l'ensemble de ces dispositifs est d'ores et déjà assurée par le dépôt annuel, prévu en loi de financement de la sécurité sociale, du rapport d'activité du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante et du rapport d'activité du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. J'ajoute qu'un rapport spécifique établissant des perspectives sur une durée de vingt ans des coûts d'indemnisation liés à l'amiante a été réalisé l'année dernière. Je ne vois pas l'utilité d'un nouveau rapport et demande donc le rejet de cet amendement.

Cela étant, je comprends votre argumentation : lorsqu'une personne est atteinte d'asbestose ou de mésothéliome, bien que ce ne soit pas prouvé, c'est dans 99 % des cas le résultat d'une exposition durable à l'amiante. C'est un sujet très important qui, selon moi, ne nécessite pas un rapport supplémentaire. Mais il n'apparaîtrait pas inutile de réunir une conférence de scientifiques afin qu'une fois pour toutes, ce lien fasse consensus et ne puisse plus être remis en cause. C'est à la fois une question de santé publique et de justice.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 160.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 161.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 19 (précédemment réservé)

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 19.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Certes, dans cet article, la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante double par rapport à 2004 : 200 millions d'euros contre 100 millions. Mais il semble que cette hausse soit largement factice si l'on se réfère à la situation des années antérieures à 2004. Le total des ressources du Fonds était en effet supérieur aux 200 millions d'euros alloués pour 2005 : 218 millions d'euros en 2002, 230 millions en 2003. Une dotation directe de l'État, qui existait avant 2004, a été supprimée. Là encore, le désengagement de l'État est perceptible. De fait, la dotation de la branche accidents du travail et maladies professionnelles constitue depuis 2004 la seule ressource de ce fonds. Or, dans le même temps, le nombre de dossiers déposés ne cesse d'augmenter.

Le montant envisagé de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante est donc notoirement insuffisant. Pis, non seulement cette contribution ne permettra pas de répondre aux besoins des bénéficiaires, mais elle ne devrait même pas permettre le rattrapage des baisses passées.

Ainsi, comme le souligne à juste titre l'Association des accidentés de la vie dans une analyse concernant ce projet de loi de financement de la sécurité sociale : « Selon le troisième rapport d'activité au Gouvernement et au Parlement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, les prévisions de dépenses sur 2005 font apparaître un besoin de financement de 300 millions d'euros, compte tenu du solde prévisionnel des dotations et des dépenses fin 2004. » Selon ces prévisions, il ne manquerait pas moins de 100 millions d'euros pour permettre au FIVA d'assumer toutes ses obligations financières.

Il apparaît donc que le montant de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, tel qu'il est fixé à l'article 19 du projet de loi à 200 millions d'euros, ne permettra sans doute pas l'indemnisation de l'ensemble des victimes dont, je le rappelle, le nombre augmente chaque jour : le rapport est très explicite sur ce point.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Comme vient de le dire Mme Jacquaint, l'augmentation de cette année n'est en réalité qu'un rattrapage puisqu'il y a eu l'an dernier une très forte diminution de la dotation.

M. le ministre propose de réunir une conférence de consensus. Pourquoi pas ? Cela étant, les décès des anciens salariés de l'amiante se multiplient. Quant aux malades, ils mènent, avec leur famille, une course contre la montre afin d'obtenir une indemnisation durant le peu de temps qu'il leur reste à vivre. Certes, les veuves et les enfants sont indemnisés. Mais, les conséquences de la manipulation de l'amiante étant connues depuis des décennies, ce serait le devoir de la nation que d'accélérer les procédures afin d'indemniser les victimes, qui connaîtraient ainsi des conditions de vie moins difficiles.

J'avais déposé un amendement, hélas tombé sous le coup de l'article 40, visant à remédier aux insuffisances de la loi du 23 décembre 1998. En effet, un certain nombre de salariés sont écartés de l'indemnisation, notamment ceux ayant manipulé ou transformé de l'amiante, activités dont on connaît aujourd'hui les méfaits. Monsieur le ministre, il aurait été juste, dès à présent, d'élargir la prise en charge à ces salariés. Il est regrettable que le Gouvernement ne reprenne pas cet amendement, car si une conférence de consensus conclut un jour à leur prise en charge, il sera malheureusement trop tard pour nombre d'entre eux.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Comme je l'ai dit, il est très surprenant de constater que l'État ne contribue plus au financement du FIVA. J'aimerais que le ministre nous donne des explications à ce sujet.

Martine Aubry avait demandé une contribution de l'État au financement du FIVA, dans la mesure où il avait exposé certains de ses salariés à l'amiante. L'État, en laissant la branche AT-MP payer pour le FIVA, n'assume pas sa responsabilité d'employeur.

Mme Muguette Jacquaint. Il se désengage !

M. Jean-Marie Le Guen. Pis encore, il ne s'applique pas à lui-même ce qu'il impose aux entreprises privées.

Par ailleurs, il porte une responsabilité morale évidente - confirmée par un arrêt du Conseil d'État au printemps dernier - pour ne pas avoir pris les mesures d'interdiction qui s'imposaient, alors que l'information médicale et scientifique sur les dangers de l'amiante existait.

L'État ne peut se défausser sur la branche AT-MP ou l'assurance maladie, car ce ne sont pas les mêmes circuits de financement. Le Gouvernement ferait mieux de remédier à la sous-déclaration des maladies professionnelles et des accidents du travail, qui pénalise l'assurance maladie, et d'assumer ses responsabilités dans le financement du FIVA.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Les dépenses du FIVA augmentent très fortement, tout le monde le sait. Plus de 700 dossiers de victimes arrivent chaque mois, contre moins de 600 en 2003.

Mme Martine Billard. Et ce n'est pas terminé !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Cela montre une montée en charge, d'ailleurs logique, du dispositif.

Par ailleurs, les arrêts rendus par le Conseil d'État en février ont des conséquences importantes sur les procédures d'indemnisation, qu'il faut donc clarifier et sécuriser. Dans ce but, le Gouvernement va inviter les partenaires sociaux à engager une réflexion sur l'organisation des voies d'indemnisation pour les victimes de l'amiante ainsi que sur les modalités de recours contre les entreprises et l'État.

Cette concertation devra également aborder la question d'une participation pérenne de l'État au financement des dépenses du FIVA, ce qui tend à répondre à vos préoccupations.

M. Jean-Marie Le Guen. Pourquoi constate-t-on un désengagement depuis deux ans ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je rappelle par ailleurs à Mme Billard que le FIVA traite en priorité les victimes gravement atteintes.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 19.

(L'article 19 est adopté.)

Article 20 (précédemment réservé)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, inscrite sur l'article 20.

Mme Jacqueline Fraysse. Le montant de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante est portée à 600 millions d'euros pour 2005, contre 500 millions en 2004. On ne peut que se réjouir d'une pareille décision. Pour autant, comme pour le FIVA, cette appréciation positive doit être nuancée, dans la mesure où l'on s'attend à une croissance encore forte des dépenses du FCAATA. Non seulement vous l'affirmez vous-même dans l'exposé des motifs du projet de loi, monsieur le ministre, mais, d'une certaine manière, l'article 20 anticipe cette évolution.

L'augmentation des besoins est donc prise en compte, mais l'est-elle suffisamment ? Au vu des montants proposés, on est en droit de s'interroger. D'autant plus qu'il est très difficile de prévoir l'évolution de l'autre source de financement du fonds, à savoir une part s'élevant à 0,31 % des droits de consommation sur le tabac. Si on peut se féliciter, sur le plan de la santé publique, de la diminution de la consommation tabagique, celle-ci aura paradoxalement comme effet négatif de grever les ressources du FCAATA. La question de la pertinence d'un tel dispositif se pose donc à nouveau, d'autant plus qu'il n'existe aucun lien entre les maladies de l'amiante et le tabac.

Le montant envisagé de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles apparaît donc notoirement insuffisant. Certes, la création à l'article suivant d'une nouvelle contribution au profit du fonds est censée améliorer son financement. Mais quelles rentrées financières en espérez-vous ? Nous ne le savons pas. Le plus grand flou subsiste en la matière.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 20.

(L'article 20 est adopté.)

Article 21 (précédemment réservé)

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 21.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 21 tend à créer une contribution nouvelle à la charge des entreprises ayant exposé leurs salariés au risque de l'amiante. Même si son montant est minimal, il s'agit, monsieur le ministre, de la seule mesure volontariste du projet de loi. Mais quelles rentrées financières en espérez-vous ? Faute d'avoir pris connaissance de la moindre estimation à ce sujet, nous nous interrogeons sur la manière dont vous envisagez cette contribution, et nous aimerions savoir si elle sera à la hauteur des enjeux et des besoins.

Un examen approfondi montre d'ailleurs que la mesure ne touchera pas nécessairement les entreprises réellement responsables, par exemple les donneurs d'ordre dans les cas de sous-traitance ou d'intérim. C'est la raison pour laquelle nous avons présenté un amendement, malheureusement rejeté par la commission, afin de substituer la notion de site à celle d'établissement. L'objectif était de permettre aux personnels sous-traitants, intérimaires ou en régie exposés à l'amiante de prétendre au droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité. Il est bien dommage pour eux que l'amendement n'ait pas été accepté.

Au détriment de ces salariés précaires, vous avantagez une fois de plus les grandes entreprises. Ainsi, pour chaque entreprise concernée, le montant de la contribution sera plafonné à 2,5 % de la masse salariale et ne pourra dépasser 2 millions d'euros par an. Nous avons présenté un autre amendement tendant à supprimer ces plafonnements.

Par ailleurs, les entreprises placées en redressement ou en liquidation judiciaire sont exonérées de la contribution. Connaissant la proportion actuelle des entreprises ayant recours à ces procédures par simple convenance, il convient de s'interroger sur l'opportunité d'une telle disposition, du moins en l'absence de contrôle sérieux du caractère non frauduleux de la mise en redressement ou en liquidation. Les salariés sont étroitement contrôlés. Il serait souhaitable, dans ce cas de figure, que les entreprises le soient un peu plus. C'est la raison pour laquelle, refusant toute exonération automatique, nous avons déposé un amendement proposant une solution alternative.

Enfin, les critères de répartition de la contribution entre les entreprises concernées sont eux-mêmes source d'interrogations.

Au final, de nombreuses incertitudes pèsent sur cette nouvelle contribution en faveur du FCAATA, dont vous semblez incapables de chiffrer le produit. Cette mesure, intéressante dans son principe, est ainsi rendue décevante, car trop timorée par rapport à des besoins qui vont en grandissant.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Anticipant un instant sur l'article 22, consacré à la branche AT-MP, ce qui me permettra d'éviter de reprendre la parole sur cet article, je rappellerai qu'il manque 100 millions d'euros pour financer la montée en charge du FIVA. Il convient donc d'ajouter cette somme à vos prévisions d'augmentation de l'ONDAM.

J'en reviens à l'article 21, dont l'objet peut paraître intéressant. Il est en effet légitime de rechercher des ressources complémentaires pour le FCAATA, non seulement auprès de la branche AT-MP, mais aussi des entreprises ayant directement exposé leurs salariés à l'amiante, peut-être pas en pleine connaissance de cause - il ne m'appartient pas d'en juger - mais en tout cas avec une conscience forte des risques encourus. Pour réduire les coûts industriels, elles ont, en quelque sorte, externalisé les risques sanitaires sur le reste de la société. Il est donc logique qu'elles soient taxées pour cette raison. C'est sans doute l'arrêt rendu cet été par le Conseil d'État qui pousse le Gouvernement à agir, compte tenu des nombreux recours qui ne manqueront pas d'être intentés.

Sur le principe, nous sommes donc très favorables à cette mesure. Je n'ai pas l'expertise requise pour juger si les entreprises concernées apportent une juste contribution, si elles sont trop ou trop peu touchées. Je veux bien croire certains de nos collègues lorsqu'ils appellent à rechercher plus loin les entreprises susceptibles d'endosser une part de responsabilité. D'autres feront sans doute valoir que le mode de calcul choisi pourrait en mettre certaines en difficulté. Le Gouvernement prend à cet égard une responsabilité importante. Il innove, certes, mais de façon assez brutale. Peut-être aurait-il dû agir plus tôt et de façon plus progressive.

Quoi qu'il en soit, nous sommes d'accord avec la politique consistant à favoriser le FCAATA et à cibler les entreprises sur lesquelles pèse une responsabilité particulière. J'aurais toutefois aimé que le Gouvernement soit plus réceptif à la remarque que j'ai formulée lors de la discussion générale et à l'article 19, à propos de la nécessité de se montrer plus souple à l'égard des travailleurs amiantés, afin qu'ils bénéficient dans de meilleures conditions de la retraite anticipée.

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 91 de M. Tian.

M. Bertho Audifax. Il est défendu, madame la présidente, de même que le suivant.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 91 et 95 ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 91.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 95.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 80.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. L'article 21, qui crée une contribution spécifique à la charge des entreprises ayant exposé leurs salariés à l'amiante, est légitime, mais nous regrettons que cette contribution soit plafonnée à 2,5 % de la masse salariale et ne puisse dépasser 2 millions d'euros par an par entreprise. Une telle disposition rompt l'égalité de traitement entre les grandes et les petites entreprises. Selon la taille de l'entreprise, le seuil de 2 millions d'euros n'aura pas les mêmes répercussions. Les petites entreprises risquent de le supporter difficilement. Plafonner sans raison les grandes entreprises, c'est, à l'inverse, un véritable cadeau.

Nous proposons donc de supprimer le plafonnement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable. Si l'on supprime le plafonnement, cette contribution risque de mettre en péril la santé financière des petites entreprises.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Même avis. De plus, la masse salariale est une référence beaucoup plus stable que les bénéfices réalisés, qui sont évoqués dans l'exposé sommaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 80.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 81.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. L'article 21 prévoit que les entreprises placées en redressement ou en liquidation judiciaire sont exonérées de la contribution.

Compte tenu de l'actuelle propension des entreprises à se mettre en redressement, voire en liquidation judiciaire, pour des raisons de convenance, une telle disposition nous interpelle, surtout en l'absence de contrôle sérieux du caractère frauduleux ou non de cette mise en redressement ou de cette liquidation. Selon nous, il n'y a pas lieu d'instaurer une automaticité de l'exonération. Il faut contrôler si les conditions de la faillite ou de la mise en liquidation sont réelles. Certains dirigeants d'entreprise, en effet, utilisent malheureusement ces procédures pour leurs intérêts.

S'il convient de donner un coup de pouce à des entreprises en réelle difficulté,...

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

Mme Jacqueline Fraysse. ...afin de préserver l'emploi, il faut limiter les possibilités de fraude en évitant tout caractère automatique de l'exonération, en aménageant des possibilités alternatives et graduées en fonction des difficultés et en permettant un contrôle des salariés et des structures de contrôle des comptes de l'entreprise.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable.

Dire, comme l'indique l'expose sommaire de l'amendement, qu'il y a un caractère « honteux » attaché à une société en banqueroute ou en faillite, c'est une allégation grave que nous réfutons. Nous souhaitons qu'il y ait le moins possible d'entreprises en faillite ou en banqueroute, mais c'est parfois une obligation, qui n'a rien de honteux.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable. Ces procédures, qui plus est, sont placées sous le contrôle du juge, et, à mon avis, cela nous permet d'avoir quelques garanties quant à leur caractère frauduleux. La justice est là aussi pour remplir sa mission.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertho Audifax.

M. Bertho Audifax. Comme M. le rapporteur, je suis choqué par les termes qui ont été utilisés dans l'exposé sommaire. Regretter que la banqueroute et la faillite n'aient plus un caractère honteux et qu'il n'y ait plus d'opprobre public sur les chefs d'entreprise qui connaissent des difficultés, ...

Mme Muguette Jacquaint. On les connaît comme vous, les chefs d'entreprise qui ont des difficultés !

M. Bertho Audifax. ...c'est comme dire que tous les politiques sont pourris. Ce n'est pas bien pour la démocratie, et je le regrette. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je voudrais très brièvement vous rassurer et vous calmer. Vous vous énervez moins quand il s'agit des salariés victimes de l'amiante (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), mais je passe.

Aujourd'hui, et vous le savez, il y a des chefs d'entreprise qui déménagent les machines la nuit. Nous ne jetons pas l'opprobre sur l'ensemble des chefs d'entreprise, et j'ai même la faiblesse de penser que, comme l'ensemble de nos concitoyens, ils sont très majoritairement honnêtes, mais il y en a qui utilisent les procédures offertes par la loi...

M. Pierre-Louis Fagniez. Il y a aussi de mauvais cardiologues !

Mme Jacqueline Fraysse. ...pour des manipulations frauduleuses. C'est pourquoi nous proposons simplement de retirer l'automaticité de l'exonération et d'instituer un contrôle.

De grâce, remettez-vous, nous n'avons pas de haine à l'égard des chefs d'entreprise ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 81.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 87 n'est pas défendu.

Je suis saisie d'un amendement n° 90 de M. Tian.

M. Bertho Audifax. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 90.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Défendez-vous également l'amendement n° 96, monsieur Audifax ?

M. Bertho Audifax. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Défavorable, parce qu'il restreint à l'excès le champ du dispositif.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 96.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 21.

(L'article 21 est adopté.)

Après l'article 21
(amendement précédemment réservé)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 263 de la commission, visant à insérer un article additionnel après l'article 21.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Cet amendement concerne la procédure d'inscription d'un établissement ou d'un port sur la liste ouvrant droit pour les salariés au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité. La loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a institué ce dispositif sans suffisamment définir la procédure applicable. Il nous semble nécessaire que l'entreprise ait connaissance de son inscription sur les listes amiante et puisse éventuellement la contester dans les délais de recours. C'est un point marginal, mais il faut impérativement que les entreprises soient prévenues du risque encouru.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. Cet amendement vient de nous parvenir. Il vise à rendre la procédure plus transparente et, surtout, à rendre obligatoire la notification d'une décision d'inscription à l'employeur.

Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 263.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous remercie de votre participation à ce débat et vous souhaite d'achever dans de bonnes conditions, ce soir, l'examen du PLFSS.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, n° 1830 :

Rapport, n° 1876 (tomes 1 à 5), de M. Bernard Perrut, M. Jean-Pierre Door, Mme Marie-Françoise Clergeau et M. Georges Colombier, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 1877, de M. Yves Bur, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot