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Première séance du mercredi 3 novembre 2004

40e séance de la session ordinaire 2004-2005


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Comme chaque premier mercredi du mois, les quatre premières questions seront réservées à des thèmes européens.

Nous commençons par une question du groupe socialiste.

UTILISATION DES CRÉDITS EUROPÉENS

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne les crédits européens du FEDER.

Monsieur le Premier ministre, les crédits du FEDER sont pratiquement épuisés pour la plupart des contrats territoriaux. Tout au long de l'année 2003, vous avez encouragé la surprogrammation sur des projets parfois mal préparés. Vous avez utilisé ces fonds pour pallier la pénurie de crédits d'État et financer des opérations décidées par le Gouvernement sans concertation avec les régions (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...

M. Michel Delebarre. Bien vu !

M. Augustin Bonrepaux. ...tant et si bien qu'il n'y a plus de crédits européens.

Quant à l'argument que vous avez brandi - la menace d'un dégagement d'office -, il était parfaitement faux : le dégagement d'office ne valait que pour les crédits 2001 qu'il fallait impérativement consommer en 2003. Néanmoins vous avez saisi ce prétexte pour utiliser tous les crédits, au détriment des territoires ruraux.

M. Michel Delebarre. Pas seulement !

M. Augustin Bonrepaux. Les projets 2004 ont pratiquement épuisé la réserve de performance. Il ne reste donc plus rien pour financer quoi que ce soit en 2005 et 2006. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le Premier ministre, allez-vous remplacer ces financements européens que vous avez détournés (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) par des crédits nationaux du fonds national d'aménagement du territoire, afin que les territoires ruraux puissent mener à bien les projets qu'ils ont élaborés et préparés pendant plusieurs années, mais qu'ils ne peuvent désormais plus financer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur Bonrepaux, n'en faisons pas un sujet de polémique (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste) : la bonne utilisation des crédits européens contribue à l'adhésion des Français à l'idée européenne. Or la meilleure façon de faire, et les Français le savent, c'est d'utiliser l'argent disponible, sans le gaspiller ni avoir à le renvoyer.

M. Maurice Leroy. Très bien !

M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Quelle situation avons-nous trouvée en 2002 ? Seulement 12 % des crédits européens avaient été consommés alors que vous auriez dû en avoir utilisé 30 %.

M. Guy Geoffroy. Eh oui !

M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. C'est grâce à la négociation que nous avons menée avec la Commission que celle-ci nous a accordé cette facilité et que nous n'avons pas eu à renvoyer de crédits.

M. Augustin Bonrepaux. C'est faux ! Vous mentez ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. De ce fait, aucun crédit n'a été annulé en 2003 et nous espérons bien qu'il en sera de même en 2004.

Par ailleurs, monsieur Bonrepaux, vous savez fort bien que les crédits européens ne peuvent venir qu'en complément de crédits d'État...

M. Augustin Bonrepaux. Il n'y en a plus !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous en prie !

M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. ...ou des collectivités locales. Or nous utilisons bien les crédits de l'Europe pour financer des projets nationaux. N'allez tout de même pas nous reprocher de ne pas utiliser la totalité des crédits européens alors que vous en étiez incapables et qu'ils étaient de ce fait perdus ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

RATIFICATION DE LA CONSTITUTION EUROPÉENNE

M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Olivier Jardé. Monsieur le Premier ministre, l'UDF aurait souhaité que la France prenne la tête des pays de l'Union pour la ratification de la Constitution européenne, et qu'elle agisse afin que le vote ait lieu partout la même semaine pour en renforcer la portée symbolique.

M. Maurice Leroy. Très bien !

M. Olivier Jardé. Certains pays ont déjà arrêté leur date de ratification : ainsi l'Espagne l'a fixée au 20 février 2005. La France n'a pas encore annoncé de date ni même choisi un mois. Nous savons seulement que le vote aura lieu en 2005.

Monsieur le Premier ministre, la représentation nationale tout comme nos concitoyens souhaiteraient savoir si vous êtes favorable à un vote simultané dans tous les pays de l'Union européenne. Une date a-t-elle déjà été envisagée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, la France aurait aimé, comme vous le souhaitez, qu'un grand débat européen soit simultanément organisé dans tous les pays de l'Union. Malheureusement, cela n'est pas possible pour deux raisons : premièrement, les procédures de ratification diffèrent d'un État à l'autre ; deuxièmement, si certains pays veulent aller vite, d'autres ont annoncé qu'ils procéderaient à la ratification seulement au cours de l'année 2006. Tel est notamment le cas du Royaume-Uni où un référendum ne sera organisé qu'après les élections nationales.

Dans ce contexte, nous sommes obligés de définir notre propre calendrier. Le chef de l'État a signé le traité le 29 octobre dernier. Il a saisi le Conseil constitutionnel le jour même. Celui-ci a désormais un mois pour formuler ses propositions quant à une éventuelle révision de la Constitution. En tout état de cause, la date du référendum annoncé par le chef de l'État dépend d'abord du calendrier de la révision constitutionnelle, pour autant que celle-ci soit nécessaire, ce qui semble aujourd'hui fortement probable.

D'ici à un mois, autrement dit début décembre, nous connaîtrons la position du Conseil constitutionnel. Dès les premiers jours de 2005, nous pourrons saisir le Parlement avant de réunir, si le chef de l'État le souhaite, le Congrès - sans doute au début du printemps - après que les deux chambres auront délibéré sur la révision constitutionnelle. Alors seulement le chef de l'État, dont c'est la responsabilité, pourra arrêter la date du référendum.

Quoi qu'il en soit, ainsi qu'il l'a clairement déclaré à Rome le week-end dernier, c'est seulement à l'issue de cette procédure qu'il fera connaître sa décision ; mais nous avons tout lieu de penser que le référendum aura lieu en 2005. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

SIGNATURE DU TRAITÉ CONSTITUTIONNEL

M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Pierre Goldberg. Monsieur le Premier ministre, le Président de la République, vous-même et le ministre des affaires étrangères venez de signer le traité constitutionnel européen. D'une certaine manière, le chef de l'État et le Gouvernement ont engagé la parole de la France alors même que le peuple souverain ne s'est pas encore prononcé.

Cette véritable mise en scène de Rome n'a-t-elle pas d'autre but que de faire admettre l'idée que les choses sont bouclées et que la consultation des peuples - quand elle aura lieu - sera vidée de sens et de portée, tant on craint déjà le verdict populaire ? Cette signature ne vise-t-elle pas à masquer ce que ce traité constitutionnel porte en lui-même : des projets de société et une conception du monde de plus en plus rejetés ? Ne cherche-t-elle pas enfin à dissimuler un échec, un formidable gâchis et la profonde déception de tous ceux et de toutes celles qui espéraient y voir l'acte de naissance d'une Europe des citoyens, d'une Europe sociale ?

Au fond, cette signature ne vise-t-elle pas à occulter le fait que ce traité constitutionnel n'est que du « super-Maastricht » aux conséquences encore plus graves ?

Que personne ne se méprenne : notre refus de ce texte s'inscrit dans une démarche constructive. Nous appelons à une construction européenne vue comme une aventure historique et humaine. Notre « non » n'entame en rien notre engagement pour une Europe des peuples, une Europe démocratique, une Europe du progrès social, une Europe de coopération et de paix. En effet tout pousse à la promotion des capacités humaines et de l'égalité des droits à une grande échelle. Tout appelle au partage des informations, des ressources et des coûts. Tout pousse à un nouveau modèle social européen garantissant tout à la fois l'égalité et un service public digne de notre époque. Tout pousse à une ambition démocratique dans l'élaboration des politiques européennes et dans l'évaluation de leurs effets. Tout appelle à une grande ambition européenne au service d'un monde de paix.

Le traité constitutionnel mérite donc d'être débattu au-delà des sphères bureaucratiques et gouvernementales. Y êtes-vous prêt, monsieur le Premier ministre ? Allez-vous fournir tous les éléments d'information sur ce traité, comme les communistes l'ont déjà fait, dans la mesure de leurs moyens ? Allez-vous ouvrir des débats médiatiques contradictoires qui permettont aux citoyens de se faire leur propre opinion et de se prononcer en toute connaissance de cause ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Franchement, monsieur Goldberg, pour que le peuple français puisse se prononcer sur ce traité constitutionnel - sans doute en 2005, comme vient de le dire le Premier ministre -, il fallait bien qu'il y ait un traité et qu'il ait été au préalable signé par ceux qui, depuis cinquante ans, signent les traités,...

M. Maxime Gremetz. Comme d'habitude, quoi !

M. le ministre des affaires étrangères. ...après deux ans de débats publics, transparents, auxquels tout un chacun a pu participer. Et c'est bien ce qu'on fait les chefs d'État à Rome, il y a quelques jours.

Maintenant, vous avez raison, le débat public peut commencer. Le moment est venu d'exposer précisément ce que contient ce traité, d'indiquer en quoi il est utile, d'expliquer objectivement les avancées qu'il contient en termes de dialogue social, de missions de service public, de droits des citoyens, de cohésion économique, sociale et territoriale. (Murmures sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Ce n'est pas un hasard, monsieur Goldberg, si la confédération européenne des syndicats - ce n'est qu'un exemple - soutient ce texte.

Le débat va donc commencer et, comme vous-même et d'autres, y compris le Premier ministre, le souhaitent, nous entendons l'organiser dans un esprit pluraliste, républicain et impartial. Nous diffuserons auprès des citoyens des brochures, et d'autres documents ; nous allons également mettre en place un site internet et un centre d'appel. Il ne s'agira pas de propagande, mais d'explication et de débat. Je suis sûr que, dans cet état d'esprit, vous aurez à cœur d'y participer. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Beaucoup de travail en perspective !

RELATIONS DE LA FRANCE ET DE L'EUROPE
AVEC LES ÉTATS-UNIS

M. le président. La parole est à M. Alain Marsaud, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Alain Marsaud. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

Si, comme nous le supposons, George Bush est réélu président des États-Unis,...

M. Gérard Charasse et M. Gérard Bapt. Hélas !

M. Alain Marsaud. ...nous avons de bonnes raisons de nous interroger sur l'avenir des relations entre l'Europe et les États-Unis, mais aussi entre notre pays et l'Amérique.

Les dernières semaines ont en effet été marquées par un déferlement d'hystérie anti-Bush, anti-parti républicain, parfois carrément anti-américaine. On a bien souvent raillé, de manière très grossière, sinon outrancière, en tout cas peu admissible, le président des États-Unis, et il est arrivé qu'une partie de la classe politique se joigne à ce concert de critiques. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.) Or il faudra bien que l'Europe, mais aussi la France, puissent parler à nouveau aux Etats-Unis (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), qu'elles tentent de jouer un rôle international auprès d'une Amérique qui, même si elle n'en est pas forcément consciente, aura besoin de l'Europe et de la France. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Charasse. Elle aurait dû y penser plus tôt !

M. Alain Marsaud. Plusieurs membres de cette assemblée ont entretenu ces derniers mois de bonnes relations tant avec l'actuelle administration qu'avec les démocrates,...

M. Maxime Gremetz. Lellouche est là !

M. Alain Marsaud. ...et ils ne peuvent aujourd'hui que s'en féliciter.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, comment envisagez-vous de conforter - je dis bien : conforter - un dialogue de confiance entre nos deux pays, et sur quelles institutions comptez-vous véritablement vous appuyer dans cette perspective ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Oui, monsieur le député, l'élection du président des États-unis pour quatre ans, en même temps que l'Union européenne atteint une forme de maturité institutionnelle (Rires et exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), est l'occasion d'évaluer et de relancer notre dialogue avec ce très grand pays, dont la France est l'allié le plus ancien et qui est notre allié le plus ancien.

M. Pierre Lellouche. C'est bien de le rappeler !

M. le ministre des affaires étrangères. Nous avons donc en effet, monsieur Marsaud, de bonnes raisons de dialoguer. Cela est d'autant plus utile que, depuis quelques années, nos visions de l'organisation du monde divergent : nous, Européens, nous, Français plaçons avant tout l'action collective et la coopération internationale, fondées sur le droit. Ce sont du reste de grandes idées qui doivent beaucoup à l'Amérique.

Toutefois ces approches différentes ne nous ont pas empêchés de travailler ensemble et de bien travailler ensemble : contre le terrorisme, pour la stabilité du Kosovo, de l'Afghanistan ou pour la sécurité en Haïti. La paix, la stabilité, demain, continueront à avoir besoin de ce dialogue entre Français et Américains, entre l'Europe et les États-unis.

M. Maxime Gremetz. Lellouche ! Le parti de l'étranger !

M. le ministre des affaires étrangères. La France y est prête, avec ses partenaires européens, notamment à propos du conflit central entre Israéliens et Palestiniens.

Oui, monsieur Marsaud, dès l'instant où nous nous respectons, le dialogue est possible ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

RELATIONS ENTRE L'ADMINISTRATION FISCALE ET LES CONTRIBUABLES

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour le groupe UMP.

M. Laurent Wauquiez. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), les impôts sont toujours en France sujets à controverse : d'une part, il y a les partisans du tout impôt, qu'il s'agisse d'impôts locaux ou nationaux ; de l'autre, les tenants d'une fiscalité plus modérée. Néanmoins une question n'est jamais posée : comment améliorer les relations entre les citoyens et l'administration fiscale ?

Quelle est aujourd'hui la situation ?

D'abord, la fiscalité est trop compliquée. Nos compatriotes ont bien du mal à s'y retrouver dans ce maquis et ils ont l'impression de s'adresser à une administration certes très compétente, mais qui ne parle pas leur langue.

Ensuite, les relations entre l'administration et le contribuable sont placées sous le sceau de la méfiance, alors que la majorité de nos concitoyens ne sont pas des fraudeurs.

Enfin, la fiscalité est un domaine où il n'y a aucune sécurité juridique, ce qui nuit à l'attractivité de notre territoire, donc à l'emploi.

Sur tous ces thèmes, vous avez, monsieur le ministre, commandé un rapport à Bruno Gibert. (« Allo ! Allo ! »sur les bancs du groupe socialiste.)

Comment garantir un minimum de sécurité juridique et de stabilité en matière d'impôt ?

Quelles mesures concrètes peut-on prendre afin de faciliter les déclarations fiscales de nos concitoyens ?

Peut-on évoluer vers une administration qui ne se contente pas de contrôler, mais qui, avant tout, conseille et respecte les contribuables de bonne foi ?

En un mot, pensez-vous que, même en matière d'impôt, le service public peut être au service du public ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. René Dosière. C'est une question difficile !

M. Christian Bataille. Allo !

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Sans entrer dans le détail des mesures que Dominique Bussereau et moi avons prises, il me semble nécessaire de préciser quatre points.

D'abord, pour rétablir la confiance entre le contribuable et l'État, il faut en finir avec les pratiques de la rétroactivité fiscale qui ont profondément déstabilisé les contribuables. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Le dernier exemple - M. Strauss-Kahn s'en souvient certainement - est celui des contrats d'assurance-vie : bien que l'État ait promis un avantage, il s'est permis, ce qui est tout à fait anormal dans un État de droit, de changer les règles du jeu, alors même que le contribuable croyait à la parole de l'État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous nous attaquons aussi à une autre injustice : pourquoi lorsque l'État a une créance, les taux d'intérêt qui doivent lui être servis par le contribuable sont-ils bien plus élevés que ceux que paye l'État lorsqu'il a une dette ? Ce n'est pas normal ! Ce n'est pas juste ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ensuite, il me semble indispensable que les contrôles fiscaux soient limités dans le temps. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Soit on trouve quelque chose et alors le contribuable malhonnête doit rendre des comptes, soit il n'y a rien et il faut le laisser reprendre une vie normale.

Nous avons donc décidé, avec Dominique Bussereau, que, dorénavant, les contrôles ne dépasseront pas neuf mois dans les moyennes et grandes entreprises et trois mois pour les commerçants et les petites entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas juste !

M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les contribuables ne sont pas présupposés coupables ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. René Dosière. Contrôlez plutôt Flosse !

M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Enfin, dernier point, nous avons fixé une règle simple qui s'appliquera à partir du 1er janvier : tout contribuable qui écrira à l'administration fiscale devra obtenir une réponse dans un délai d'un mois. Cela s'appelle de la démocratie fiscale : dans la démocratie parlementaire, elle est nécessaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

RÉFORME DU DIVORCE

M. le président. La parole est à Mme Corinne Marchal-Tarnus, pour le groupe UMP.

Mme Corinne Marchal-Tarnus. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

Si le vote de la loi est la fonction première du Parlement, il reste que le suivi de l'application de celle-ci demeure un souci permanent de ses membres. C'est en ce sens que notre assemblée a, le 12 février dernier, adopté la proposition de résolution de notre collègue Jean-Luc Warsmann, modifiant le règlement en vue d'informer l'Assemblée nationale sur la mise en application des lois.

Au cours de la session précédente, nous avons voté la réforme du divorce, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier prochain. À moins de deux mois de son application effective, pouvez-vous nous indiquer, monsieur le garde des sceaux, si l'ensemble des outils d'accompagnement nécessaires à sa mise en œuvre sont d'ores et déjà prêts. Quels sont-ils et comment vont-ils permettre de faire appliquer cette réforme rapidement et efficacement ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Vous avez raison, madame la députée, de rappeler que l'Assemblée nationale et le Sénat ont voté, dans le consensus, en mai dernier, la loi réformant le divorce. Elle n'a en effet recueilli aucune voix contre, ni à l'Assemblée ni au Sénat.

À partir du vote de cette loi très attendue, la question est de savoir, comment et à quelle date, elle sera appliquée. Je rappelle que 140 000 divorces sont prononcés chaque année et que cet événement familial douloureux est souvent mal vécu. Le but de la loi que vous avez adoptée est de pacifier le divorce et de responsabiliser les anciens époux au cours de la procédure.

Je m'étais engagé à faire publier les décrets assez longtemps avant l'entrée en vigueur du texte, afin que tous les acteurs de la justice soient informés à temps. Les décrets ont donc été publiés au début de la semaine dernière alors que la loi ne sera applicable qu'au 1er janvier. Nous disposons désormais de l'ensemble du dispositif.

Le premier décret simplifie la procédure, le second, très attendu, porte sur le versement de la prestation compensatoire sous forme de capital.

J'ai, aujourd'hui même, signé la circulaire d'application du décret concernant la prestation compensatoire et elle peut être consultée sur le site internet du ministère. Par ailleurs, nous allons, dans les tout prochains jours, diffuser un guide pratique sur la loi à l'ensemble des magistrats aux affaires familiales, et un guide explicatif aux partenaires de la justice, en particulier les avocats.

L'ensemble des conditions d'application de la loi sera réuni pour que, à la date du 1er janvier, les Françaises et les Français aient à leur disposition cette loi de modernisation et de pacification. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

VIOLENCES SCOLAIRES

M. le président. La parole est à M. Patrick Roy, pour le groupe socialiste.

M. Patrick Roy. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, d'après les chiffres de votre ministère, les actes de violence recensés dans les collèges et les lycées ont augmenté de 13 % au cours de l'année scolaire 2003-2004, avec 9 000 faits supplémentaires. Ces chiffres constituent un désaveu cinglant de votre politique irresponsable (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) de suppression des aides éducateurs et de diminution drastique de la présence des adultes à l'école. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Pour répondre à cette explosion de violence, des établissements ont dû recruter des vigiles privés, comme au lycée Augustin-Thierry de Blois. Monsieur le ministre, ce ne sont ni des policiers, ni des vigiles dont les enseignants et les élèves ont besoin, mais des 9 000 surveillants que votre gouvernement a supprimés depuis trois ans ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste.)

Pensez-vous réellement que l'école puisse travailler sereinement ? Un tel mépris, il faut bien le dire, est consternant de la part du Gouvernement. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Allez-vous enfin admettre votre erreur ?

M. Daniel Mach. Non, ce n'est pas une erreur !

M. Patrick Roy. La suppression massive de la présence des adultes à l'école, celle des aides éducateurs, c'est vous ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La suppression des surveillants, des CEC, des CES, des CPE, des assistantes sociales, c'est encore vous ! (Mêmes mouvements.)

Cette politique constitue une faute majeure.

M. Daniel Mach. Démago !

M. Patrick Roy. À la veille du débat budgétaire, comptez-vous rendre à l'école les moyens humains dont vous l'avez dangereusement privée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. La violence scolaire est un problème grave qui menace à la fois notre système scolaire et, au-delà, notre pacte républicain. Elle augmente de façon régulière depuis plusieurs années. Les chiffres pour 2003-2004 que vous venez de citer nous ramènent très exactement, à l'unité près, avec 86 000 actes recensés, à la situation de 2001-2002, année où, que je sache, les socialistes étaient au pouvoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Daniel Mach. Eh oui !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. C'est bien la preuve qu'il n'y a aucune corrélation entre la montée de la violence à l'école et la sortie du programme des emplois-jeunes, que vous aviez d'ailleurs vous-mêmes prévu pour une durée de cinq ans ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Face à cette situation, il convient de mener trois actions.

Il faut d'abord mobiliser l'ensemble des acteurs. C'est dans cet esprit que j'ai signé avec Dominique Perben une convention permettant le traitement en temps réel, par la justice, des actes de délinquance à l'intérieur de l'école, et avec Dominique de Villepin, une convention permettant de renforcer la lutte contre le racket et la toxicomanie, notamment en désignant un policier ou un gendarme référent...

M. Albert Facon. C'est honteux !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. ...afin de promouvoir, entre les deux institutions, un dialogue qui est absolument nécessaire pour lutter contre la délinquance.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Nul !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Il est ensuite indispensable de fixer des repères et, pour cela, de commencer par restaurer l'autorité des enseignants. J'ai donc décidé de réécrire une circulaire particulièrement néfaste de 2000, qui visait à encadrer de manière tout à fait excessive leurs pouvoirs en matière de discipline. Les enseignants doivent pouvoir disposer, dans un cadre légal fixé, de marges de manoeuvre pour faire face aux situations auxquelles ils sont confrontés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, monsieur le député, il faut des moyens et je tiens à vous faire remarquer que nous avons remplacé, à l'unité près, les surveillants par les assistants d'éducation.! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Roy. C'est faux !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ces derniers étaient 33 000 à la rentrée 2004 et ils seront 42 800 à la rentrée 2005. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Vos vociférations n'y changeront rien ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

La lutte contre l'insécurité est avant tout une question de morale civique, et cette question concerne la société française tout entière ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION CLANDESTINE

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, pour le groupe UMP.

M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre de l'intérieur, depuis 2002, notre majorité a décidé de ne plus subir une immigration incontrôlée mais, au contraire, de maîtriser et de choisir. Afin de mieux accueillir les étrangers qui souhaitent s'installer en toute légalité dans notre pays, le Gouvernement, soutenu par notre majorité, sous l'impulsion de votre prédécesseur, M. Nicolas Sarkozy, a renforcé les moyens de lutte contre l'immigration clandestine. Entre 1998 et 2002, le gouvernement de M. Jospin avait, pour sa part, laissé s'effondrer le taux d'exécution des expulsions d'étrangers en situation irrégulière jusqu'à 16 %, niveau historique jamais atteint auparavant. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Autrement dit, moins d'un cinquième des décisions de justice étaient exécutées.

Monsieur le ministre, aujourd'hui, les décisions d'expulsion d'étrangers en situation irrégulière sont-elles enfin mieux exécutées ?

En deuxième lieu, à la différence de l'ancienne majorité, nous avons choisi de réformer en profondeur la législation, grâce à la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration. Cette réforme majeure, pour partie directement applicable, nécessite toutefois certains textes d'application, en particulier pour rendre effectifs les pouvoirs que nous avons accordés aux maires en matière d'attestations d'accueil et de regroupement familial. Quand les décrets d'application seront-ils pris afin de leur donner la possibilité d'agir concrètement pour mieux contrôler l'immigration ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, la lutte contre l'immigration irrégulière est une nécessité absolue tant pour la sécurité nationale que pour défendre notre modèle d'intégration républicaine. Cela suppose bien évidemment que les étrangers en situation irrégulière soient reconduits à nos frontières. De ce point de vue, pour l'année 2004, nous en sommes à 12 000 reconduites, soit 60 % de plus que l'année dernière.

Cela implique aussi des moyens renforcés. Sur le plan budgétaire, nous passerons de 1 million d'euros à 33 millions d'euros pour l'année 2005. Par ailleurs, le nombre de places en centres de rétention administrative sera porté de 1 100 cette année à 1 600 l'année prochaine.

Néanmoins cela n'est pas suffisant. Il faut aussi faire preuve de fermeté dans la lutte contre les faux papiers. Beaucoup d'immigrants arrivent légalement dans notre pays mais y séjournent illégalement. Les pouvoirs du maire doivent être renforcés, ainsi que les contrôles des certificats d'hébergement. Le décret d'application nécessaire sera publié dans les tout prochains jours et les décrets d'attribution le seront, pour l'essentiel, d'ici à la fin de l'année.

Il convient également d'aller plus loin en sécurisant les documents administratifs. A cet égard nous disposerons de cartes d'identité électroniques sécurisées d'ici à la fin de l'année 2007 et, pour ce qui est des visas, nous menons un programme d'expérimentation, conjointement avec le ministre des affaires étrangères.

Par ailleurs nous devons aussi veiller au strict respect du droit d'asile, trop souvent contourné. Vous savez en effet qu'une grande majorité des demandeurs d'asile - 80 % - sont des immigrants économiques. Nous avons par conséquent raccourci les délais d'instruction. Nous l'avons fait pour l'OFPRA, en réduisant à quatre mois le temps actuel d'instruction de la commission des recours des réfugiés et, de façon globale, nous voulons faire passer la durée d'instruction à six mois, afin de permettre un meilleur contrôle de l'immigration irrégulière.

Dans le même temps, nous recherchons une meilleure coopération à l'échelon européen en matière d'asile et de contrôle aux frontières avec un grand programme sur lequel nous avançons à vingt-cinq et, de façon pilote, avec les cinq grands pays de l'Union européenne. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

HANDISPORT

M. le président. La parole est à M. Ghislain Bray, pour le groupe UMP.

M. Ghislain Bray. Monsieur le ministre des sports, lors des XIIe Jeux paralympiques, qui se sont déroulés du 17 au 28 septembre dernier, 4 000 sportifs représentaient 143 pays et 19 disciplines. La délégation française s'est brillamment illustrée en remportant 74 médailles : 18 d'or, 26 d'argent et 30 de bronze. Les médaillés paralympiques ont aussi été décorés le 25 octobre par le Président de la République.

Cependant, des différences de traitement entre athlètes valides et athlètes handicapés sont toujours à déplorer. Alors que nous nous apprêtons à voter le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, deux formes de discrimination subsistent : d'abord dans les médias, puisque les compétitions des Jeux paralympiques n'étaient retransmises que vingt-cinq minutes environ chaque jour et de minuit et demi à une heure du matin ; ensuite, pour les récompenses, puisque les primes pour une médaille d'or sont de 45 000 euros pour un sportif valide et de 6 000 euros seulement pour un sportif handicapé. Ce traitement est inacceptable car il ne fait qu'ajouter du handicap au handicap.

Monsieur le ministre, nous connaissons les combats quotidiens que vous menez dans votre ministère pour défendre au mieux les droits des sportifs handicapés. Au moment où vous préparez le dossier de candidature de Paris pour l'organisation des Jeux olympiques en 2012, pourriez-vous nous indiquer les mesures que vous comptez prendre afin de mettre fin à ces différences de traitement ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le député, je partage votre sentiment sur les différences de traitement entre sportifs olympiques et paralympiques. A cet égard vous pouvez compter sur ma détermination à garantir une égalité d'accompagnement, mais nous pouvons d'ores et déjà être fiers des résultats des uns et des autres.

Cela étant il convient toutefois de tenir compte de certaines spécificités. Ainsi, quand 10 500 athlètes olympiques combattent à Athènes pour remporter 1 000 médailles, 4 000 athlètes paralympiques luttent pour en remporter 1 500. Pour la course du 100 mètres, par exemple, pas moins de quinze médailles sont distribuées aux athlètes paralympiques alors qu'il n'y a que deux épreuves - pour les masculins et les féminines - avec trois médailles chacune pour les athlètes valides.

Pour autant, il faut aller vers plus d'égalité. C'est ce que je me suis engagé à faire, en particulier pour les primes. Instaurées par Guy Drut en 1996 pour les Jeux d'Atlanta, elles ont été doublées à mon arrivée au ministère, passant de 3 000 euros à 6 000 euros. De même, l'aide personnalisée a été portée de 300 euros à 1 000 euros, permettant l'achat de divers matériels nécessaires aux compétitions.

J'ai également demandé aux fédérations sportives de travailler avec la fédération française Handisport pour que nos athlètes bénéficient des meilleures conditions possibles de préparation, tant pour les grands rendez-vous que dans les clubs où chaque personne handicapée doit pouvoir trouver sa place. J'ai quadruplé l'aide dans le cadre du FNDS afin de rendre accessible les équipements et de faire en sorte que toutes les personnes handicapées souhaitant pratiquer un sport puissent le faire à l'horizon 2007.

En matière de couverture médiatique, beaucoup d'efforts ont déjà été accomplis mais je reconnais que beaucoup reste à faire. Alors que, en 2000, sept minutes seulement avaient été consacrées aux Jeux paralympiques chaque jour, nous en avons eu trente-trois pour ceux d'Athènes. Vous pouvez compter sur ma détermination pour continuer à travailler en ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

BILAN DE L'ACTION DE M. SARKOZY

M. le président. La parole est à M. Philippe Martin, pour le groupe socialiste.

M. Philippe Martin. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industire, au fil de vos déclarations récentes, les Français s'interrogent sur le sens qu'il convient de donner aux nombreux engagements que vous prenez à l'occasion des derniers jours de votre CDD à Bercy. (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.- Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il y a peu, vous évoquiez la vision à moyen terme de l'économie qui vous anime et le souci de marquer votre action du sceau de l'urgence. Il semblerait que l'urgence ait pris le pas sur la vision et que vous vous soyez converti à la stratégie des post-it, ces petits papillons jaunes, que, méthodiquement, vous collez sur les murs de votre bureau, probablement à l'intention de votre successeur, à moins qu'ils ne soient destinés en réalité au Premier ministre lui-même.

Ayant pu en récupérer quelques-uns, je vous en livre la teneur :

« Noël : ne pas oublier de faire baisser les prix de 2 % ». (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

« Décembre : ne pas oublier de rendre aux Français l'argent injustement prélevés sur le fioul ». (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

« Dès que possible, ne pas oublier de transférer les 17 000 bureaux de postes ruraux aux commerçants du coin ». (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

« Avant 2007 : ne pas oublier d'appliquer intégralement le rapport Camdessus ». (Protestations puis claquements de pupitres sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

« ISF : ne pas oublier... » Ah, non, ça, c'est déjà fait ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Nul !

M. Philippe Martin. Ici même, vous avez déclaré que vous ne connaissiez qu'une seule règle : faire exclusivement la politique de vos électeurs et ne pas perdre votre temps à écouter ceux qui ne pensent pas comme vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations et claquements de pupitres continus sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Voilà, vous êtes arrivé à ce que vous vouliez : vous avez semé la pagaille ! Le ministre répondra !

M. Philippe Martin. Et je ne serai sans doute pas déçu de sa réponse !

Depuis deux ans et demi, le chômage s'accroît, les délocalisations s'accélèrent, la pauvreté progresse, les inégalités se creusent du fait de votre politique. Ma question pourrait tenir elle aussi sur un post-it : vous qui avez si souvent vanté la culture du résultat, n'auriez-vous pas une fâcheuse tendance à être toujours là au moment des annonces et des grands élans, mais jamais là au moment des bilans et des grandes déceptions ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, je ne suis pas sûr d'avoir exactement saisi la question dans toute sa finesse. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Aussi ne m'en voulez pas si je m'en tiens plus à l'esprit qu'à la lettre.

D'après ce que j'ai compris, pour vous, je pars trop tôt : je ne suis pas encore parti et vous me regrettez déjà ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous ne m'avez pas apprécié comme ministre de l'intérieur ; vous avez des doutes sur moi comme ministre de l'économie, mais je vous promets que je ne vous décevrai pas comme président de l'UMP ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialist.).

Vous m'interrogez sur les résultats de mon action et je vous remercie de me donner l'occasion d'en parler.

Allez donc demander aux habitants de Sangatte si c'était facile de fermer le centre alors que les socialistes, Martine Aubry en tête, n'avaient rien fait ! (« Hou ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Allez demander à M. Tavernier, à M. Pinte et à tous les artistes qui se battaient depuis des années pour la suppression de la double peine si c'était si facile de faire voter cette mesure à l'unanimité, comme nous l'avons fait !

Allez demander à Mme Erignac et à ses enfants si ce n'était pas que justice d'amener Colonna devant les tribunaux de notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Allez demander aux salariés d'Alstom si c'était si facile de convaincre Mario Monti et d'obtenir les résultats que nous avons eus ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Alors, monsieur Martin, en trente-deux mois, on ne résout certes pas tous les problèmes de la France mais, en trente-deux mois, d'autres, comme vos amis, ont montré qu'on pouvait ne rien faire ! Croyez-moi, bilan contre bilan, nous n'avons pas à rougir, nous ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et applaudissements sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Du calme ! Venons-en à la question suivante.

DÉCENTRALISATION

M. le président. La parole est à M. Jean Proriol, pour le groupe UMP.

M. Jean Proriol. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre délégué à l'intérieur, porte sur l'engagement de l'État en faveur de la politique territoriale.

L'acte II de la décentralisation a été réalisé de façon pragmatique, avec pour socle la loi constitutionnelle du 28 mars 2003. Aujourd'hui, l'on peut dire que la démocratie territoriale, expression des nouveaux impératifs de proximité et de diversité, est en ordre de marche. Or l'association des régions de France intente actuellement un véritable procès d'intention, rompant avec sa vocation originelle d'interlocuteur régional de l'État.

M. Maxime Gremetz. Les faits !

M. Jean Proriol. Elle mène une campagne de désinformation sur les effets de la décentralisation.

Sans crainte de se contredire, elle dénonce pêle-mêle à la fois un désengagement de l'État et une recentralisation des politiques publiques.

Certes, la gauche est embarrassée de se référer aux soixante-cinq propositions du rapport Mauroy pour l'avenir de la décentralisation, remis à Lionel Jospin en octobre 2000, propositions qu'elle n'a pas jugé bon de mettre en œuvre. Elle est atteinte de frilosité décentralisatrice et tente de faire peur aux élus locaux et aux contribuables.

Derrière cette politique de communication se profile une double manœuvre de diversion : d'une part, un refus d'assumer les nouvelles compétences...

M. Maxime Gremetz. Oh !

M. Jean Proriol. ...dûment compensées à l'euro près, radioscopie à l'appui, ante et post-décentralisation ; d'autre part, une tentative de transférer sur le Gouvernement la responsabilité des futures et fortes augmentations d'impôts locaux qu'elle annonce pour tenir ses promesses électorales.

M. Maxime Gremetz. C'est vous qui augmentez tout !

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. Jean Proriol. Comment pourrait-on, par exemple, incriminer en 2005 le coût du transfert des TOS, techniciens, ouvriers, personnels de services, alors qu'il ne sera effectif qu'en 2006 ?

M. le président. Monsieur Proriol, vous avez sûrement une question à poser.

M. Jean Proriol. Ma question est la suivante : monsieur le ministre, pouvez-vous nous présenter la réalité des textes et des chiffres pour les actions menées par le Gouvernement en faveur de nos territoires ? Ne faut-il pas tuer dans l'œuf une présentation caricaturale de la décentralisation ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, dans quelques semaines les régions de France auront l'opportunité de présenter leurs grandes orientations budgétaires pour 2005. Cela ressemblera un peu à une heure de vérité.

Il faudra examiner de près deux catégories de dépenses.

Les premières seront celles correspondant aux mesures de décentralisation que nous venons d'adopter. En 2005, elles représenteront 3 % du total des dépenses, part qui augmentera un peu les années suivantes, mais toutes ces dépenses seront intégralement financées par des ressources correspondantes versées par l'État (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste), soit sous forme de subventions, soit sous forme d'impôts. Cela ne s'était jamais vu jusqu'à présent. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Les secondes seront celles correspondant aux promesses prodiguées lors des élections régionales qui, comme toutes les promesses, seront naturellement payées par ceux qui les ont faites, surtout, en l'occurrence, par leurs contribuables.

Nous verrons alors si les impôts régionaux augmentent ou non. S'ils augmentent, ce ne sera pas du fait de la décentralisation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Cela découlera des promesses électorales qui auront été engagées : les milliers d'emplois tremplins, les ordinateurs gratuits ou les livres scolaires. Ces actions sont respectables, mais chacun doit savoir qu'elles procèdent d'engagements électoraux et certainement pas de la décentralisation ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le député, une fois passé le temps de la polémique, chacun pourra reconnaître que cette décentralisation est largement inspirée des propositions présentées par Pierre Mauroy il y a quelques années, mais avec une différence puisque, désormais, lorsque le Gouvernement s'engage à transférer des compétences, il transfère aussi les ressources correspondantes à l'euro près.

M. Michel Lefait. C'est faux !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Voilà la différence avec le passé. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

MENACE TERRORISTE

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard, pour le groupe UMP.

M. Jacques Myard. Monsieur le ministre de l'intérieur, selon des sources espagnoles reprises par la presse, l'organisation Al-Qaida et M. Ben Laden...

M. Christian Bataille. « Monsieur » !

M. Jacques Myard. ...n'auraient plus de capacité opérationnelle. Cependant, selon d'autres sources, la menace terroriste demeurerait bien réelle, alors que nous voyons M. Ben Laden réapparaître sur des vidéocassettes.

Le terrorisme auquel nous sommes confrontés aujourd'hui est à l'évidence décentralisé, culturel voire franchisé et il se développe comme par osmose dans un certain nombre de milieux. Le moindre renseignement peut être vital et il est clair que, pour pouvoir lutter efficacement contre ce terrorisme, il nous faut une excellente coopération internationale et européenne.

Récemment, à Florence, dans le cadre du G5, vous avez mis sur pied avec vos partenaires italiens, espagnols, anglais et allemands des procédures d'échange d'informations, qui doivent être reprises au niveau des Vingt-cinq, à Bruxelles, dans le cadre du conseil Justice.

Ma question est simple, monsieur le ministre. Quel est, selon vous, l'état de la menace terroriste et quelles actions de coopération entendez-vous mener ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, face au terrorisme aucun pays ne peut se sentir protégé. Aussi le Gouvernement est-il tenu à une mobilisation de tous les instants sous la direction du Premier ministre.

Au plan de la sécurité intérieure, j'ai réactivé le comité interministériel de lutte antiterroriste et créé le comité du renseignement intérieur pour maximiser notre capacité de coordination et d'échange d'informations.

Au plan européen, vous l'avez dit, dans le cadre du G5 et sur une initiative française nous avons décidé d'échanger tous les renseignements, en particulier toutes les listes des djihadistes islamistes radicaux qui sont susceptibles d'être passés par des camps d'entraînement, en Afghanistan, en Irak ou encore en Tchétchénie.

Aujourd'hui, le vrai défi, dans notre pays, il faut en prendre conscience, compte tenu de l'évolution de cette menace, de cette fragmentation par rapport à un hypothétique centre général, c'est bien l'islamisme radical. Ennemi de la République, il soutient une vision d'une sphère religieuse opposée à la sphère publique. Nous devons faire en sorte, bien évidemment, qu'il se réduise et qu'il soit éliminé de notre territoire national.

Cela implique que nous soyons capables de viser deux cibles particulières.

La première, c'est une surveillance très étroite de toutes les formes de prosélytisme, au niveau des mosquées, des salles de prière. Selon les renseignements généraux, une cinquantaine de salles de prière seraient radicales ou proches de cette mouvance radicale, dont une trentaine en Île-de-France. Cela vaut également pour certains réseaux de crèches ou pour les prisons. Nous devons donc entretenir une vigilance maximale, à la fois dans une logique d'expulsion des étrangers qui sont en situation irrégulière et qui appelleraient à la violence dans notre pays, et dans une logique de fermeture - c'est ce que nous venons de faire pour deux écoles coraniques dans le Val-d'Oise - ou de poursuites judiciaires quand c'est nécessaire.

La deuxième cible, c'est la mise à jour de réseaux de financement clandestins, qu'il s'agisse de réseaux de contrefaçon, de trafics de drogue ou de commerces ethniques.

En tout état de cause, cette mobilisation doit être opérée de façon globale. Nous devons rester vigilants et éviter tout amalgame entre islamisme radical et islam. La grande majorité des musulmans de France veut en effet vivre en paix dans notre pays. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. François Baroin.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

    2

LOI DE FINANCES POUR 2005

DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (nos 1800, 1863).

TOURISME

M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du ministère délégué au tourisme.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué au tourisme, malgré la part infime qu'il représente dans le budget de l'État, nous allons, comme chaque année, consacrer une séance à l'examen du budget du tourisme, preuve de l'intérêt que l'Assemblée porte à ce secteur économique de première importance, tout particulièrement pour l'équilibre de notre balance des paiements.

Malheureusement, il ne nous sera pas possible cette année, comme nous avions pris l'habitude de le faire, de nous féliciter des bons résultats de l'année 2003 car les chiffres obtenus confirment les premières tendances, et ils sont inquiétants. Entre 2002 et 2003, le nombre de touristes étrangers est tombé de 77 à 75 millions. Les recettes du poste Voyages de la balance des paiements ont chuté de 34,5 à 32,7 milliards d'euros. Cette baisse, combinée à des dépenses plus importantes de nos compatriotes à l'étranger, a provoqué une contraction de près de deux milliards d'euros du solde du tourisme, qui constitue le premier poste excédentaire de la balance des paiements française, devant l'automobile.

Ces mauvais résultats s'expliquent en grande partie par la succession d'événements défavorables qui ont émaillé l'année 2003. Néanmoins les phénomènes conjoncturels ne sauraient dissimuler certaines tendances qui paraissent malheureusement se confirmer pour la saison 2004. Deux d'entre elles semblent particulièrement graves. Il s'agit, d'une part, de la désaffection de la clientèle européenne, qui constitue plus de 80 % de notre clientèle étrangère et, d'autre part, du taux de déplacement des Français qui est reparti à la baisse. Les séjours de nos compatriotes se font de plus en plus courts et, en grande majorité, hors du secteur marchand. Parallèlement, la part des Français séjournant à l'étranger poursuit une croissance régulière.

À l'évidence, ces évolutions ne sont pas favorables à notre économie touristique pour laquelle certains experts prévoient, sur deux ans, une perte de 5 milliards d'euros de recettes et de 50 000 emplois. S'y ajoutent l'atonie de la consommation, les problèmes plus structurels auxquels sont confrontées les agences de voyages, si bien que l'économie touristique est entrée dans ce qu'il faut bien appeler une crise, crise qui amène à s'interroger sur l'attractivité de la France comme destination touristique.

Ces quelques éléments, monsieur le ministre, font partie du constat que vous avez vous-même établi et qui a conduit le Gouvernement à réunir à deux reprises, depuis l'automne 2003, le comité interministériel du tourisme. Les décisions qu'il a prises portent malheureusement la marque de la contrainte budgétaire. Tandis que nos concurrents investissent des moyens très importants dans l'adaptation de leur offre touristique et la promotion, le budget français du tourisme stagne au niveau insignifiant qui est le sien. Même la promotion, pourtant jugée prioritaire par le comité interministériel, n'a reçu qu'une toute petite partie, même pas la moitié, des 8 millions d'euros annoncés en septembre 2003.

Les crédits inscrits à votre budget pour 2005 s'élèvent à 72,58 millions d'euros en crédits de paiement, soit 2,47 millions de plus que les crédits votés en loi de finances pour 2004. Cette progression bénéficie au titre III, dont les crédits augmentent de 14,49 % alors que les crédits d'intervention, qui constituent l'essentiel du budget, ne progressent que de 1,22 %, et que les crédits d'investissement diminuent de 10,76 %.

Vous avez, monsieur le ministre, présenté les crédits de votre ministère en incluant les 2 millions d'euros de crédits qui devraient être ouverts en loi de finances rectificative et sur lesquels vous comptez, il est vrai, pour financer les actions nouvelles que vous avez annoncées à l'issue du dernier comité interministériel. Cependant, la même somme a été annulée sur le budget en cours. Ce qui importe, ce sont les moyens sur lesquels vous pourrez réellement compter.

Pour 2005, la seule réelle augmentation de crédits concerne le fonctionnement de l'administration centrale. Il s'agit de 2 millions d'euros qui seront entièrement absorbés par la hausse du loyer que paiera la direction du tourisme pour ses nouveaux locaux. Elle doit en effet quitter à la fin de l'année ceux qu'elle occupait avec l'Agence française d'ingéniérie touristique, l'AFIT. Je ne peux que souscrire au projet qui consiste à réunir en un même lieu la direction du tourisme et les organismes qui lui sont associés, mais je me demande s'il n'aurait pas mieux valu installer cette véritable maison du tourisme dans des locaux appartenant à l'État.

Quant aux moyens d'intervention, ils sont globalement stables par rapport à 2004. La subvention à Maison de la France s'accroît de 1 million d'euros, mais on constate une baisse d'un montant équivalent sur les autres postes, laquelle frappe tout particulièrement les crédits destinés aux contrats de plan qui passent de 3,21 à 2,47 millions d'euros. Ces crédits avaient déjà été réduits dans les deux précédents budgets et un niveau aussi faible risque d'avoir à court terme des conséquences sur le fonctionnement de certaines structures dans les régions.

L'augmentation des ressources affectées à la promotion du tourisme français, qui passent de 29,3 à 30,3 millions d'euros, fait suite à l'annulation de 1 million d'euros sur le budget 2004. Il est difficile, dans de telles conditions, de parler de moyens renforcés. En septembre 2003, le Gouvernement avait annoncé 8 millions de crédits supplémentaires pour la promotion. Une dotation de 4 millions d'euros devait être inscrite en loi de finances rectificative pour 2003 et une somme identique avait été promise pour 2004. En réalité, les crédits ouverts dans le collectif pour 2003 se sont limités à 2,422 millions d'euros et ceux votés en loi de finances pour 2004 n'ont progressé que de 1,2 million d'euros, au lieu de quatre.

Le Gouvernement a certes réaffirmé l'importance de la promotion lors de la deuxième réunion du comité interministériel du tourisme, qui s'est tenu le 23 juillet dernier. La stratégie marketing de Maison de la France a été redéfinie, mais il n'a pas été fait mention d'un accroissement des moyens budgétaires. Pourtant, dans ce domaine, tout le monde s'accorde sur la nécessité d'investir dans la durée par des campagnes d'image dont l'efficacité repose sur la répétition.

Pour ce qui concerne les moyens d'investissement, les autorisations de programme sont stables et la baisse des crédits de paiement atteint 10,8 %. Cette diminution ne concerne pas les contrats de plan, dont les dotations sont portées à 8,41 millions d'euros en crédits de paiement et à 12,03 millions d'euros en autorisations de programme. Ces crédits sont pourtant insuffisants puisque, cette année, les 11,169 millions d'euros de crédits de paiement disponibles avaient été consommés à 97,76 % dès la fin du mois de juillet. La dotation de 12 millions pour l'année 2005 sera donc certainement très en deçà des besoins. Les restrictions budgétaires entraînent un retard de près de trois ans dans l'exécution des contrats de plan, ce qui est grave.

Cependant il y a pire, puisque la dotation consacrée au programme de consolidation des hébergements de tourisme social subira une diminution de 61,2 %. Mis en place pour la période 2002-2006, ce programme, financé conjointement par la DATAR et le ministère du tourisme, a permis la réhabilitation de 23 960 lits. Le ministère du tourisme y a consacré chaque année en moyenne 3,3 millions d'euros. Dans le budget 2005, il n'est plus prévu que 1 million d'euros en crédits de paiement, sans aucune dotation en autorisations de programme.

Cette situation suscite parmi les associations de tourisme une inquiétude d'autant plus grande que les subventions que leur accorde le ministère du tourisme conditionnent d'autres financements, distribués notamment par les collectivités locales ou les établissements de crédit. De nombreuses opérations risquent donc d'être compromises et certaines structures situées dans les zones de moindre attraction touristique seront menacées de fermeture. Les aides à la personne se faisant de plus en plus rares, monsieur le ministre, l'aide à la pierre apportée aux structures du tourisme social constitue le seul véritable soutien au départ en vacances des personnes aux revenus modestes.

À cet égard, les dotations budgétaires destinées à soutenir la politique d'accès aux vacances, c'est-à-dire les crédits d'investissements dont je viens de parler et les crédits d'intervention, soit 2,34 millions d'euros, sont, dans le budget pour 2005, réduites de 44 % par rapport au projet de loi de finances pour 2004. Les crédits d'intervention du chapitre 44-01, dont le montant pour 2005 est fixé à 1,34 million d'euros, sont en baisse de 18,7 % par rapport à 2004 et de 59 % par rapport à 2003.

Certes, vous êtes contraint d'opérer des choix, monsieur le ministre, mais l'action en faveur du départ en vacances des publics défavorisés repose de plus en plus sur les collectivités locales ou sur l'Agence nationale du chèque-vacances. C'est d'ailleurs grâce aux crédits mobilisés par cet organisme que pourra être expérimentée une aide au départ des seniors. Apportant des financements que le budget de l'État ne semble plus en mesure de fournir, l'ANCV constitue, en effet, un partenaire indispensable de la politique sociale d'accès aux vacances. Cette réalité devrait inciter à la plus grande prudence dans la mise en œuvre des réformes annoncées.

Je sais, monsieur le ministre, que vous souhaitez rendre le chèque-vacances accessible à davantage de travailleurs, notamment à ceux des PMI et PME. On ne peut donc pas comprendre que le Gouvernement se soit opposé à l'adoption d'un amendement au projet de loi de finances qui aurait facilité cette extension. Je compte sur votre soutien pour faire aboutir ce projet dans le groupe de travail promis par le ministre du budget.

Avant de conclure, monsieur le ministre, je veux me faire l'écho des inquiétudes exprimées par plusieurs de mes collègues de la commission des finances sur la nouvelle structure d'études et de conseil qui naîtra, en janvier prochain, de la fusion de l'AFIT avec le service d'études et d'aménagement de la montagne, le SEATM, et l'observatoire national du tourisme.


Nous souhaiterions que vous nous rassuriez sur les conditions dans lesquelles les services de ce nouvel organisme seront assurés aux collectivités publiques, puisque les crédits restent les mêmes et que les deux organismes sont regroupés. Le siège du SEATM connaît déjà des problèmes de locaux. Pouvez-vous dissiper nos interrogations sur le maintien d'un personnel suffisant, dont la pluralité des compétences ne doit pas être remise en cause ?

La commission des finances a également formulé des observations sur la présentation du tourisme dans l'architecture budgétaire proposée par le Gouvernement pour l'application de la loi organique du 1er août 2001.

M. Jean Launay. Illisible !

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial. Constatant que le ministère du tourisme correspondait à un seul programme, la commission des finances s'est interrogée sur l'opportunité de l'inscrire dans la politique d'aménagement du territoire. Elle a souhaité son rattachement à une structure axée sur la politique économique qui prendrait néanmoins en compte les préoccupations liées à l'aménagement du territoire. Certains des membres de la commission se sont même interrogés sur la nécessité de maintenir un ministère du tourisme.

En dépit de ses graves insuffisances, la commission des finances a exprimé un avis favorable à l'adoption de ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le ministre, ce projet de budget pour 2005 s'inscrit dans un contexte international difficile qui, depuis la fin de 2001, a marqué un tournant dans une évolution plutôt favorable depuis la fin des années quatre-vingts.

Les différentes crises géopolitiques mondiales, l'internationalisation et la répétition des actes terroristes, les crises économiques d'Amérique du Sud, d'Asie et d'Europe, l'émergence de pays concurrents de plus en plus nombreux freinent le développement du tourisme.

De plus, la crise économique dont nous sortons a conduit le Gouvernement à mener une politique de maîtrise des dépenses publiques salutaire, mais qui réduit inévitablement les moyens de votre ministère. Nous pouvions craindre que votre budget pour 2005 n'accuse le coup. Ce n'est pas le cas et je tiens à vous en féliciter, monsieur le ministre.

Devant les événements, nous avons besoin, plus que jamais, d'adapter et de renforcer notre économie touristique. En 2003, les Français ont été moins nombreux à partir en vacances et leur consommation touristique a baissé. Le nombre de visiteurs étrangers a diminué de 2,6 %, les recettes du poste Voyages de la balance des paiements ont baissé de 5,5 % et le solde de 14 %. Sur le plan européen, la France a perdu des parts de marchés. Les activités de l'hôtellerie, de la restauration, des résidences de tourisme et des agences de voyage ont également diminué.

Chacun peut de nouveau le constater, le tourisme ne va pas de soi !

M. Jean-Pierre Dufau. Tout à fait !

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Il doit être soutenu au plus haut niveau de l'État, à la hauteur des enjeux dont il est porteur et des défis auxquels il est confronté. Nous ne pouvons donc que nous féliciter de la nouvelle prise en considération dont bénéficie ce secteur, laquelle s'est exprimée au travers des comités interministériels de 2003 et de 2004, et des nombreuses mesures de soutien interministérielles.

Les moyens de paiement disponibles s'élèveront à 74,58 millions d'euros, ce qui constitue une augmentation significative, correspondant à la détermination affichée lors des comités interministériels.

Deux excellentes nouvelles sont à noter : le prochain regroupement, place de Catalogne, de l'ensemble des services et organismes placés sous votre autorité, en vue de favoriser synergies et économies d'échelle, et la fusion, au sein d'un nouveau GIP, dès le 1er janvier prochain, de l'AFIT, de l'ONT et du SEATM, le service d'étude et d'aménagement pour le tourisme en montagne.

Nous ne pouvons que nous réjouir du maintien de leurs missions, de leurs périmètres d'action et de leurs personnels, mais nous nous réjouissons moins en constatant que les crédits d'études et d'observation de l'administration et les moyens mis à disposition de ces trois organismes restent identiques à ceux de l'an dernier. Le futur GIP devra, à l'avenir, disposer de moyens nouveaux lui permettant de s'acquitter au mieux de son irremplaçable mission de soutien à l'organisation territoriale et d'assistance aux élus.

Nous nous félicitons que le plan Qualité France bénéficie de 1,7 million d'euros pour 2005. Sur cette somme, un million d'euros sera affecté à Maison de la France, dont les crédits augmentent de 3,5 % par rapport à la loi de finances initiale de 2004.

Au total, la dotation prévue de 30,3 millions d'euros permettra au GIE non seulement de poursuivre ses actions, mais également de mettre en œuvre le plan marketing, le plan Qualité France et un nouvel outil d'évaluation et de pilotage.

Les crédits des contrats de plan État-région seront en augmentation par rapport à la loi de finances initiale de 2004, de 2,8 % au titre IV avec 3,3 millions d'euros et, au titre VI, de 40 % en autorisations de programme avec 12,03 millions d'euros et de 5,5 % en crédits de paiements avec 8,415 millions d'euros. Il est vrai que les nombreuses régulations dont ils ont fait l'objet en 2004, et le fait que dix régions seulement ont signé des avenants de mi-parcours, dans un contexte politique nouveau issu des dernières élections régionales, rendent leur évolution à court terme bien peu lisible.

À moyen terme, leurs périmètres devraient être restreints à des projets structurants et leur durée modifiée. Quoi qu'il en soit, nous devrons rester vigilants pour garantir la présence et la substance des volets tourisme dans les futurs contrats de plan.

Sur le plan social, monsieur le ministre, nous ne pouvons que nous étonner, compte tenu de votre attachement à ce domaine, dont vous avez fait une priorité, de la baisse des moyens dont il fait l'objet...

M. Jean Launay. Quelle lucidité !

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. ...même si nous nous félicitons des dispositions que vous avez prises pour faciliter l'accès aux vacances des personnes handicapées, des personnes à revenus modestes et, aujourd'hui, des seniors. Nous nous félicitons également de l'ensemble des mesures sociales en faveur de l'emploi et en direction des travailleurs saisonniers.

Dans le cadre d'un budget limité et très plafonné, vous comptez mobiliser des disponibilités en provenance non seulement des excédents de Bourse Solidarité Vacances, mais surtout de l'ANCV, aussi bien pour l'aide à la personne qu'à la pierre. Il faudrait impérativement retrouver, en 2005, au moins les moyens alloués en 2004. Nous serons très nombreux, monsieur le ministre, dans le cadre de la prochaine loi de finances rectificative pour 2004, à vous apporter notre soutien en ce sens, du moins si vous jugez la chose souhaitable et possible.

Comme nous l'avions prévu depuis 1999, nous constatons une insuffisante mobilisation autour des chèques-vacances de la part des salariés des PME-PMI, surtout des très petites entreprises. Les modalités d'attribution restent bien trop lourdes et complexes et le revenu fiscal de référence et son plafond sont bien mal adaptés.

Les retraités, quant à eux, n'ont pas réellement accès aux chèques-vacances, ce qui est regrettable, compte tenu de leurs disponibilités et du fort potentiel de consommation qu'ils représentent. De plus, la consommation touristique liée aux chèques-vacances, faut-il le rappeler, est estimée à quatre fois le montant des chèques distribués. Ainsi, pour 2003, 841 millions d'euros de chèques émis auront généré 3,36 milliards d'euros de consommation.

C'est dire à quel point il conviendrait de réviser le texte de la loi de 1999 qui n'a porté ses fruits ni en termes d'accès aux vacances pour les revenus modestes ni auprès des acteurs du tourisme.

S'agissant du tourisme en espace rural, les multiples mesures récemment prises d'aides à l'emploi et à la formation, de soutien aux équipements touristiques et de valorisation et de promotion, ne peuvent que favoriser ce secteur. Cela est important car, avec 80 % du territoire, il dispose de grandes marges de développement.

En zone de montagne, les stations de moyenne altitude restent fragilisées. De nouvelles dispositions ont été prises non seulement en vue d'améliorer les équipements touristiques, mais également, comme pour l'ensemble des zones d'activités saisonnières, en faveur des travailleurs saisonniers qui devraient bénéficier de meilleures conditions de logement, de travail et d'employabilité.

Concernant le tourisme littoral, l'amendement relatif à la réforme des schémas de mise en valeur de la mer, adopté à l'Assemblée nationale lors de l'examen de la loi relative au développement des territoires ruraux, va dans le sens des préconisations faites par le Sénat et la mission d'information sur l'application de la loi Littoral, présidée par Léonce Deprez. S'il est voté en deuxième lecture au Sénat, il sera déterminant car il permettra, enfin, d'apporter des réponses adaptées à chaque région, dans le strict respect du texte de la loi littoral de janvier 1986.

Je demande, monsieur le ministre, que l'AFIT soit chargée du dossier non seulement pour accompagner les élus et les acteurs du tourisme mais également pour rassurer les associations de défense de l'environnement, qui en sont déjà préoccupées.

M. Jean-Pierre Dufau. L'AFIT n'existe plus !

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. D'autres mesures, qui concernent les entreprises et leurs emplois, pourraient concourir au développement de l'économie touristique.

Ce sont, pour les PME-PMI en général, l'allégement des charges sur les bas salaires, le soutien à l'emploi des jeunes en entreprise, le titre-emploi entreprises ou encore la simplification de la création, de la reprise et de la cession des entreprises.

Ce sont, pour les entreprises touristiques, l'abaissement des charges sociales pour les restaurateurs dans l'attente de la baisse de la TVA à 5,5 % pour la restauration classique, la suppression du SMIC dit hôtelier, la taxe professionnelle corrigée en fonction des semaines effectives d'activités, l'aménagement des règles du repos dominical dans les zones rurales et les avantages fiscaux concernant les locations en résidences de tourisme et pour les saisonniers.

Des réformes sont également très attendues concernant les agents de voyage, l'Agence nationale pour les chèques-vacances, le classement des stations et la taxe de séjour. Vous nous avez annoncé, monsieur le ministre, que ces réformes sont prévues dans un futur texte de loi spécifiquement consacré au tourisme. C'est pourquoi nous espérons qu'il sera présenté sans retard devant l'Assemblée nationale.

La réforme de la dotation aux communes nous préoccupe également. L'État devra mieux soutenir les communes touristiques qui déploient de considérables moyens afin de renforcer leur attrait, de fidéliser leur clientèle et de remplir ainsi leurs missions de pôles moteurs. Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour nous y aider.

Enfin, trois sujets appellent une attention particulière de la part de votre ministère, puisqu'ils constituent les fondamentaux du tourisme : l'observation, les formations et l'organisation territoriale du tourisme.

Comment pourrions-nous faire partager notre vision sur les enjeux et les problèmes de ce secteur aux activités si diverses, si nous ne sommes pas plus exigeants sur la mesure de ses retombées ? Actuellement, en effet, l'insuffisance des moyens ne nous permet pas de recourir à de nouvelles méthodes d'évaluation. Nous en restons encore trop souvent à des estimations qui sont loin de refléter les réelles retombées, notamment au niveau de l'offre. La mission d'information que le président de notre commission, Patrick Ollier, a bien voulu me confier sur le sujet, ne devrait pas manquer d'apporter des éclairages et d'émettre des propositions.

Les formations, notamment post-baccalauréat, aux différents métiers, devraient être mieux ciblées sur le tourisme et mieux adaptées aux besoins des professionnels, aux attentes des consommateurs et aux défis de la concurrence internationale, comme notre collègue Arlette Franco l'a bien montré en termes d'informations et de débouchés dans le rapport que lui a confié le Premier ministre. Il serait souhaitable qu'une concertation s'instaure en la matière entre les enseignants et les acteurs du tourisme.

M. Jean-Pierre Dufau. Très bien !

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Concernant l'organisation territoriale du tourisme, la loi de 1992 qui répartissait les compétences entre l'État et les collectivités a été largement adoptée et mise en œuvre. Cependant les lois de 1992 et 1999 sur l'intercommunalité, les lois de 1995 et 1999 sur l'aménagement du territoire et la loi dite SRU de 2000 ont créé de nouveaux périmètres territoriaux au sein desquels, il convient de le reconnaître, le tourisme a bien du mal à s'organiser et à se structurer.

Dans ce domaine également, il serait essentiel que le nouveau GIP AFIT assiste les différents acteurs, notamment les élus, confrontés à plusieurs textes de loi qui ne facilitent pas leur recherche de cohérence territoriale, alors même que la loi de décentralisation soulève d'autres interrogations sur les relations à établir entre État, régions et départements. Je me permets de vous rappeler, monsieur le ministre, l'attachement d'un grand nombre d'entre nous à ce que, en matière de tourisme, une réelle déconcentration des services de l'État accompagne la décentralisation.

En conclusion, j'ai le plaisir de vous informer, monsieur le ministre, que la commission des finances a bien voulu suivre mon avis et a adopté le projet de budget que vous nous présentez.(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Launay. Pourtant, quel réquisitoire !

M. André Chassaigne. Un excellent rapport, en effet !

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Ce n'était pas un réquisitoire.

M. Jean-Pierre Dufau. Le diagnostic est juste : le tourisme est malade !

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre, premier orateur inscrit dans la discussion.

M. Claude Leteurtre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi, en premier lieu, d'excuser mon collègue Jean Lassalle, qui devait s'exprimer aujourd'hui mais qui a été retenu en circonscription en raison du terrible accident de chasse qui a entraîné la mort de l'ourse Cannelle. Comme le Président de la République, le groupe UDF s'associe à l'émotion qu'ont manifestée depuis lundi les associations de protection de la nature, les fédérations de chasseurs et les élus politiques. Nous apportons tout notre soutien à notre ami Jean Lassalle et à l'institut patrimonial du Haut-Béarn, qui sauront trouver les moyens d'apaiser et d'éclaircir la situation, comme ils ont toujours su le faire sur le sujet depuis des années.

Le budget du tourisme n'est pas de ceux qui attirent l'attention du grand public, alors qu'il devrait au contraire figurer parmi ceux qui l'intéressent le plus. En effet, à travers notre politique touristique, c'est l'ensemble de notre patrimoine historique et culturel, de nos traditions et de nos terroirs, que nous valorisons. Nous pouvons orienter les axes de notre politique d'aménagement du territoire en accordant la priorité à certains projets porteurs. Enfin, par le tourisme, nous définissons l'image que nous donnons de notre pays et nous enseignons comment l'aimer.

Premier constat : les chiffres pour 2003 révèlent des performances assez décevantes. Pour la deuxième année consécutive, les résultats économiques du tourisme français se sont détériorés. Entre 2002 et 2003, le nombre des touristes étrangers est passé de 77 à 75 millions, ce qui a eu pour conséquence une baisse de 2 milliards d'euros des excédents « tourisme » de la balance des paiements. Passant de 15 à 13 milliards d'euros, le premier poste excédentaire des échanges français a chuté de 14,5 %. Les premières tendances de cette année 2004 confirment cette baisse progressive : chaque année, moins de touristes viennent en France.

Pour 2005, le budget du tourisme s'élève à 72,58 millions d'euros en moyens de paiement, soit 2,9 % de plus que l'an dernier. Cette hausse s'explique pour l'essentiel par l'augmentation des crédits de fonctionnement de l'administration centrale et par une progression des dépenses de personnel. En revanche, les dotations du budget, les moyens d'intervention et les autorisations de programme sont stables tandis que les dépenses en capital et les moyens d'investissement diminuent.

Alors que le tourisme est tous les ans l'une des premières sources de revenus pour la France, sinon la première, il est plus que jamais nécessaire que les pouvoirs publics se mobilisent pour renverser cette tendance. Au-delà des simples dépenses budgétaires, d'ailleurs très limitées au regard du budget global de l'État, le tourisme fait appel aux qualités humaines de ceux qui participent à la vivacité de ce secteur, à leurs capacités d'innovation et d'imagination. Celles-ci doivent être écoutées et encouragées.

Quelles sont les orientations souhaitables ?

En commission, le groupe UDF s'était félicité de la démarche interministérielle appliquée au tourisme par le Gouvernement. L'action concertée des différents ministères concernés doit permettre une action à la fois globale, en faveur de l'ensemble de la branche, et ciblée en fonction des intérêts propres à chaque secteur.

Plusieurs thématiques doivent être mises en avant.

Premièrement, il convient d'encourager la promotion de la destination France. Pour que notre pays reste une destination phare pour les touristes étrangers, il est nécessaire de s'appuyer sur la présence française à l'étranger, au-delà des actions menées auprès de nos ambassadeurs et des crédits alloués au groupement d'intérêt économique Maison de la France. Les Français souffrent souvent d'une image dégradée auprès de ceux qui se rendent dans l'hexagone. Il faut donc travailler à l'amélioration de l'idée que les étrangers ont de la France et de ses habitants.

Cela passe notamment par une politique de labellisation sur l'ensemble du territoire. Pour y concourir, il convient de poursuivre l'effort en faveur de la qualification des personnels et de l'accompagnement du caractère saisonnier de l'activité touristique. Je note d'ailleurs avec satisfaction que, notamment sous la pression des élus de la montagne et de Jean Lassalle, certaines dispositions du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux vont dans ce sens.

Deuxièmement, il faut revoir le rôle des régions. Sans ses régions et ses territoires, la France n'aurait pas le même attrait. Vous avez, monsieur le ministre, souligné la chance que représente cette mosaïque culturelle. Faites en sorte qu'elle continue à vivre et à se fortifier.

Troisièmement, il faut œuvrer au renforcement les capacités d'hébergement, sans lequel le tourisme ne peut se développer, et responsabiliser les acteurs. Il existe une véritable économie touristique en France, qui doit se construire sur une stratégie mise en œuvre par des acteurs professionnels et responsables.

Enfin, nous devons favoriser l'accès de tous les publics aux vacances. La politique touristique serait incomplète si elle ne prenait pas en compte ceux qui en sont souvent exclus, notamment les personnes handicapées.

Ces grandes lignes étant tracées, des points restent en suspens, monsieur le ministre, et il faut bien évoquer les sujets qui fâchent.

Nous avons ainsi relevé que la ligne budgétaire concernant le programme de consolidation des hébergements du tourisme social n'était plus abondée, alors qu'elle disposait en 2004 d'une dotation de 3,4 millions d'euros.

M. Jean Launay. Eh oui !

M. Claude Leteurtre. Cette mesure est d'autant plus choquante qu'elle semble contredire l'attention que les pouvoirs publics affirment porter à l'objectif d'accès aux vacances pour tous. J'aurai l'occasion d'y revenir lorsque nous en viendrons aux questions.

Cependant, je le répète, le budget du tourisme ne doit pas être jugé sur ses simples aspects financiers. Il doit susciter une dynamique d'ensemble qui saura contribuer au développement du tourisme dans notre pays et cela se mesure notamment à l'aune de la détermination des acteurs. Le groupe UDF souhaitant s'associer à cette dynamique, il votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un contexte européen et mondial de plus en plus concurrentiel, l'amélioration de la qualité et de la diversité de notre offre touristique doit constituer une priorité. Le rapport Plasait, remis au Premier ministre le 4 octobre dernier, dresse un état des lieux lucide et plaide en faveur d'une volonté politique forte pour contrecarrer la chute de la productivité du secteur touristique français par rapport à ses concurrents européens, à un moment où le tourisme ne représente plus que 5 % du PNB français alors qu'il avoisine 8,5 % en Espagne, notre pays étant, dans le même temps, rétrogradé au quatrième rang des destinations touristiques.

Aussi pouvons-nous déplorer que l'engagement financier de l'État ne soit pas à la hauteur d'une vraie politique d'amélioration de l'accueil touristique, puisqu'il se traduit, dans les documents budgétaires dont nous disposons, par une hausse d'à peine 3 %.

Comme M. Leteurte l'a souligné à juste titre, le programme de consolidation des hébergements du tourisme social est particulièrement frappé par l'atonie de votre budget : après une baisse de 9 % en 2003 et de 10 % en 2004, la ligne qui le concerne n'est tout simplement pas abondée en autorisations de programme. Au regard de l'impact économique et social des équipements de tourisme associatif dans nos départements, cet abandon, monsieur le ministre, est inacceptable.

En effet, l'aide des collectivités locales et territoriales est conditionnée à celle de l'État. Un désengagement de ce dernier remet tout le dispositif financier en cause. De plus, si les acteurs du tourisme social en sont réduits à conduire des opérations de rénovation sur fonds propres, ils n'auront d'autre choix que de recourir à l'emprunt, donc d'augmenter leur politique tarifaire, pénalisant de ce fait une clientèle aux revenus modestes.

Aucun de vos prédécesseurs au cours de ces quinze dernières années, monsieur le ministre, ne s'est engagé dans une telle voie de régression du droit aux vacances pour tous. Force est de constater que, depuis 2003, l'absence d'ambition gouvernementale en ce domaine se traduit par une stagnation du nombre de départs envisagés, alors même que 35 % de nos concitoyens ne partent toujours pas en vacances.

Qui plus est, votre choix d'ouvrir la diffusion des chèques-vacances à des opérateurs privés hypothèque gravement l'avenir de l'Agence nationale des chèques-vacances, le risque de sa privatisation ne pouvant être exclu.

À ces inquiétudes majeures sur le volet du tourisme social s'ajoutent de nombreuses interrogations sur la mise en œuvre des engagements pris dans les contrats de plan État-régions, car les crédits de paiement sont fortement déficitaires. Or vous savez bien que ces crédits sont essentiels pour de nombreux territoires qui n'attirent pas spontanément les investisseurs privés et où les fonds publics sont des catalyseurs indispensables.

De surcroît, le gel pendant trois ans de crédits européens du FEOGA destinés au tourisme vert, et ce avant même leur échéance, pénalise fortement des zones rurales qui avaient engagé de nombreux efforts de rénovation de leur patrimoine bâti afin de proposer des hébergements de qualité.

Alors que la demande reste forte en termes d'aménagement ou de création de meublés touristiques, des dossiers en cours, après acceptation initiale du plan de financement et de la répartition des clefs d'intervention entre les différents financeurs, sont actuellement remis en cause, parfois même après que les travaux ont été engagés. Pour toute réponse, vos services en région euphémisent, constatent « des tensions sur les lignes du budget de l'État affectées au tourisme en 2004 » et gardent « la plus grande prudence pour 2005 ».

Pourtant ces territoires, qui sont loin d'avoir développé tout leur potentiel touristique, peuvent, si on leur permet d'optimiser leurs atouts, jouer un rôle non négligeable pour diversifier et renouveler notre gamme touristique, contribuant aussi à la nécessaire évolution et amélioration de l'offre, sans parler de la plus-value économique propre pour les territoires qui ne sont pas les plus favorisés naturellement. Ce vecteur important qu'est le tourisme n'est malheureusement pas inclus comme il le devrait dans le cadre d'une politique globale volontariste d'aménagement du territoire.

Je ne doute pas, monsieur le ministre, de votre engagement personnel en faveur du développement touristique, mais le budget que vous nous présentez n'en porte pas la marque : il n'est à la hauteur ni des attentes ni des besoins de ce secteur économique à part entière. C'est pourquoi le groupe socialiste ne pourra le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'économie touristique est une chance de développement à saisir par la France en ce nouveau siècle. L'accord est général, je crois, sur cette idée-force.

Cela impose un double effort de mise en valeur : celle du territoire choisi pour vivre des séjours ailleurs que dans le cadre de vie quotidien ; celle du temps de vie durant ces séjours de millions de Français et d'étrangers.

Qui gère ce territoire choisi, qui assure la qualité du temps de vie sur ce territoire, sinon les communes qui se sont donné l'ambition d'accueillir des populations extérieures ?

En première ligne de l'économie touristique, il y a donc 2 280 communes qui assurent en France des capacités d'hébergement touristique et qui, pour les mettre à profit, supportent les charges liées à l'accueil de la clientèle et à l'attrait des séjours. Le rapporteur pour avis, qui est également maire de Saint-Tropez, vient de le rappeler. Des stations thermales aux stations de montagne, des stations littorales ou lacustres aux villes d'art et d'histoire et aux villes de congrès, l'économie touristique colle à la peau de notre territoire.

Le premier devoir de l'État est donc de soutenir, par une politique cohérente, la fonction économique de ces communes à vocation touristique et il s'agit désormais d'assurer cette fonction durant les quatre saisons de l'année, et non pas seulement dans les périodes de vacances, parce que les temps libres se répartissent aujourd'hui sur les douze mois de l'année. Or, en matière de séjours touristiques, les temps libres des uns génèrent le temps de travail des autres.

Fort heureusement, la loi relative aux responsabilités locales a maintenu la responsabilité de la conduite de la politique du tourisme au niveau du ministère du tourisme, donc de l'État. Il appartient donc à ce dernier de reconnaître les compétences exercées par les communes qui gèrent leur territoire en vue de l'ouvrir à une économie touristique. Il doit délivrer un agrément et stimuler leur rôle dans la croissance économique, tandis que les comités départementaux et régionaux de tourisme favorisent leur promotion au sein des différentes zones géographiques qui constituent la France.

Fort heureusement encore, la loi sur le développement rural est venue rappeler l'existence des communes touristiques qui sont répertoriées au ministère de l'intérieur et dont les 510 stations classées sont des pôles d'excellence, encore une chance pour la France.

L'occasion en a été saisie pour assurer des avantages fiscaux destinés à stimuler la rénovation des résidences dites de tourisme.

Depuis cette loi, il est désormais précisé, en F de l'article 199 decies EA du code général des impôts, que l'État doit fixer la liste des communes touristiques par décret. Il le fait à partir des communes touchant une dotation touristique intégrée dans leur DGF pour tenir compte des charges liées à leurs capacités d'accueil et à leur devoir d'animation des séjours offerts sur un territoire à rendre attractif.

C'est au ministère du tourisme, donc à vous-même, monsieur le ministre, qu'il appartiendra fort heureusement, dans le futur, d'agréer ces communes touristiques en fonction des critères de capacités d'hébergement fixés, dans les décennies passées, par le ministère de l'intérieur.

Il faudra évidemment, par souci d'équité, permettre aux communes qui ont consenti des efforts d'aménagement et de créations d'espaces et d'hébergements touristiques, d'accéder à cette liste des communes agréées, liste bloquée depuis la « réformette » de la DGF, en 1993, parce que l'on n'avait pas pris conscience de ce que l'économie touristique apporte à la France en termes de développement économique durable et d'emplois.

M. André Chassaigne. Très juste !

M. Léonce Deprez. Par ailleurs la réforme de l'organisation des forces de sécurité - police, gendarmerie, CRS - doit, désormais, tenir compte des affluences car elles sont devenues dépendantes du rôle des communes touristiques, des stations classées, et des pays d'attrait touristique qui se sont donné une vocation touristique à partir de nos villages ou de nos bourgs, à travers nos terroirs de France.

Je vous donnerai un exemple pour concrétiser ma pensée : les 30 et 31 octobre derniers, monsieur le ministre, il y avait sur la côte d'Opale, que vous connaissez bien pour l'avoir visitée, 80 000 à 150 000 personnes dans une même station balnéaire. Est-il normal que l'État ne prenne pas en considération de telles affluences en organisant les forces de sécurité à partir des principaux pôles territoriaux attirant les touristes ?

La sécurité doit désormais s'intégrer dans les données de base d'une politique territoriale cohérente. C'est un élément essentiel, parce qu'il n'y a pas de temps libre heureux et de vacances apaisées sans sécurité, pour les Français et les étrangers que nous accueillons.

Quant au travail du dimanche, indispensable dans les communes touristiques, il est nécessaire que la dérogation au droit commun pour l'autoriser soit officialisée dans les communes répertoriées touristiques au ministère de l'intérieur aujourd'hui, et agrées par le ministère du tourisme demain. Employeurs et employés de ces communes ne doivent plus voir leurs possibilités de travail conditionnées par une autorisation préfectorale.

Enfin la loi de finances 2005, comme celle de 2004, s'attache à favoriser le retour de la croissance économique, comme le Premier ministre et le ministre des finances n'ont cessé de le rappeler ici même. Or c'est bien le tourisme qui permet à la France de générer cette croissance à partir de son sol. Encore faut-il, monsieur le ministre, que vous en convainquiez vos collègues et, surtout, les administrations de tous les ministères.

En économie touristique - et je parle en connaissance de cause - la croissance provient d'abord des investissements publics réalisés sur le territoire des communes touristiques et des stations classées. Les équipements publics créés et les espaces publics aménagés attirent les investissements privés. La rentabilité des investissements de ces collectivités territoriales, il faut le dire et le faire comprendre en haut lieu, ne peut être une rentabilité directe. C'est pourquoi un régime fiscal spécial s'impose.

La création d'établissements publics à caractère industriel et commercial est à encourager si l'on veut assurer la transparence de la comptabilité publique. Mais, de grâce, qu'on encourage les élus à décider des investissements nécessaires, tout en sachant que ces investissements ne pourront être rentables directement. Pour cela, il faut stimuler les efforts d'investissement dans les communes touristiques, stations classées, villes de congrès, pays d'attrait touristique, en leur permettant de récupérer la TVA, car les équipements créés par les communes et confiés à ces EPIC ne rentrent pas dans le champ d'une économie concurrentielle. Une dérogation aux règles de la TVA, au profit des communes touristiques et stations classées et autres pôles touristiques réalisant des travaux d'équipement touristique, serait justifiée.

Bien sûr, le devoir de l'État, comme celui des régions et des départements, est de relier les pôles territoriaux d'économie touristique entre eux, et de les relier aux métropoles régionales et nationales dans une politique de développement des liaisons routières, ferroviaires, fluviales et aériennes. C'est ainsi que la politique de développement de l'économie touristique doit s'intégrer dans une politique volontariste d'aménagement du territoire. Les infrastructures doivent toujours être insérées dans les contrats de plan État région, qu'il faut sauvegarder dans ce but.

En tant que président du groupe d'études de l'Assemblée nationale sur le tourisme, j'ai tenu à résumer ces points principaux dont nous demandons au Gouvernement de faire les bases d'une véritable politique nationale de l'économie touristique.

L'essentiel est de comprendre qu'il s'agit d'une économie partenariale, réunissant les forces vives du secteur public et du secteur privé, les responsables des collectivités territoriales comme ceux des entreprises privées et des associations qui jouent un rôle d'animation. Efforts publics et efforts privés, en s'associant sur un même territoire, peuvent assurer une croissance économique et des emplois durables du sud au nord, de l'est à l'ouest de la France.

C'est pour aider le Gouvernement à rendre cohérente cette politique que nous soumettrons à votre examen, monsieur le ministre, une proposition de loi tendant à une organisation territoriale de l'économie touristique, dont le but sera de jeter les bases durables d'une nouvelle source de vie économique et sociale, car vous avez exprimé votre volonté d'agir dans ce sens.

Vous avez franchi en 2004 une nouvelle étape en provoquant l'amorce - mais l'amorce seulement - d'une politique interministérielle, qui se traduit par des réunions de comité au niveau national. Il faut aller plus loin et concrétiser cette politique sur le terrain. Vous voulez aller plus loin en 2005. Nous le savons car vous nous l'avez dit hier, et nous vous croyons. Nous vous y aiderons. Dans l'espoir de donner à la France une politique plus volontariste et plus territorialisée - comme dit M. Raffarin - visant à développer l'économie touristique, nous soutiendrons votre projet de budget pour 2005. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Le projet de budget du tourisme pour 2005 est, malheureusement, significatif des orientations générales de la politique de ce gouvernement.

Le projet de loi de finances est orienté vers un objectif unique : la résolution des soucis de fortune de vos mandants. Le projet de budget du tourisme pour l'année prochaine est, socialement, aussi discriminant que le reste de cette loi de finances.

Vous me jugez sans doute sévère, d'autant plus que vous êtes l'un des rares membres de ce gouvernement à pouvoir afficher un budget en hausse de 2,8 % par rapport à l'année dernière.

Il vous sera pourtant difficile de cacher à la représentation nationale que l'ensemble de cette hausse de 2 millions d'euros, financera, en fait, le déménagement de votre ministère. Si nous trouvons légitime que vous vous installiez dans de nouveaux locaux, ce déménagement ne doit pas cacher que les dotations pour le tourisme seront, en 2005, les mêmes qu'en 2004 ; elles seront même en baisse, si l'on prend en compte l'inflation de 2 %.

Étant donné que les dotations budgétaires pour 2004 étaient déjà historiquement basses, le diagnostic est clair : le gouvernement auquel vous appartenez abandonne de fait toute ambition politique en matière de tourisme.

Nous avons d'autant plus de raisons d'être critiques que de multiples tâtonnements et revirements ont marqué, ces derniers mois, la politique de votre gouvernement en matière de tourisme.

D'abord, et nous nous en félicitons, le Gouvernement a finalement reculé sur son projet de décentralisation des procédures de classement et d'agrément des stations touristiques.

Ensuite, et nous le regrettons vivement, il a eu l'outrecuidance de faire délibérer une seconde fois notre assemblée pour forcer la représentation nationale à rejeter un excellent amendement déposé par notre collègue Michel Bouvard au cours des débats sur la première partie de la loi de finances. Cet amendement, voté en première délibération, tenait compte de la mise en œuvre sur le terrain de la loi de 1999 et des ajustements nécessaires à une meilleure efficacité, et il visait à favoriser l'extension des chèques-vacances dans les PME. Dommage !

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait en 1999 ?

M. André Chassaigne. Cette volte-face est d'autant plus inquiétante que votre gouvernement entretient le doute sur le devenir et sur une éventuelle privatisation de l'Agence nationale des chèques-vacances. L'intervention de cette dernière est pourtant déterminante pour le départ en vacances du plus grand nombre, et ses aides à l'investissement sont précieuses au tourisme social.

Au-delà de la baisse des crédits, nous rejetons vivement les orientations politiques de votre budget.

Comme d'habitude, l'État n'honorera pas sa parole : les crédits de paiement destinés au financement des contrats de plan État-région ne représenteront que les deux tiers du montant des autorisations de programme ; l'État continue donc de se défausser sur les collectivités territoriales.

L'année dernière, la saison touristique n'avait pas été bonne. Elle ne le fut pas non plus cette année. Au-delà des contingences climatiques, le secteur touristique pâtit de la baisse du pouvoir d'achat des Français, aggravée par la politique de rigueur salariale de votre gouvernement. Plus fondamentalement, les professionnels du tourisme font les frais de votre choix de favoriser le développement du tourisme étranger de luxe au détriment du tourisme social.

Cette politique a pour première conséquence de fragiliser le secteur du tourisme, en renforçant sa dépendance à l'égard tant de la conjoncture économique internationale et de l'évolution du marché des changes, que des effets de mode ou de la situation géopolitique internationale. Surtout, vous tournez le dos aux vingt-quatre millions de Français qui n'ont pas les moyens, aujourd'hui, de partir au moins une fois dans l'année en vacances.

Cette politique de classe, vous la confirmez avec ce projet de budget : les crédits pour le développement du tourisme social sont divisés par deux, et même par trois si l'on se réfère au budget de 2003.

Les crédits en faveur du programme de consolidation des hébergements de tourisme social subissent une amputation tout aussi sévère : si 31 millions d'euros seront consacrés à la promotion de l'image de la France à l'étranger, 2 millions d'euros seulement seront alloués au tourisme social. Sans commentaires !

C'est une double faute : d'abord parce que le riche touriste ne peut être fidélisé. Il faudra donc toujours dépenser plus en campagnes de promotion ; ensuite, parce que c'est ignorer que le tourisme en France s'est développé grâce aux acquis sociaux et au droit aux vacances pour tous.

Les crédits autrefois affectés au financement des vacances de nos concitoyens les plus pauvres, vous les transférez à la promotion de l'image de la France à l'étranger. Ils seront donc dépensés en campagnes de promotion et en petits fours.

Quelle image de notre pays comptez-vous vendre aux riches Américains ? Maison de la France communiquera-t-elle sur ces enfants qui se morfondent l'été dans leur cité ou leur village, et à qui vous adressez avec ce budget un signal clair : les vacances, ce n'est pas pour vous ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le ministre, la France est belle quand elle est fraternelle. Elle donne une bonne image d'elle-même à l'étranger quand elle se conforme aux idéaux qu'elle proclame. En satisfaisant les seuls intérêts de la classe que vous défendez, vous ne pourrez que nuire à cette image. C'est pourquoi les députés communistes et républicains rejetteront avec la plus grande vigueur le budget que vous nous proposez.

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Monsieur le ministre, le projet de budget que vous nous présentez est un budget d'affichage, qui souffre de décalages très significatifs avec la réalité.

Certes, vous augmentez de 3,41 % la contribution de l'État aux actions de promotion de la France à l'étranger. Mais ce million d'euros supplémentaire n'est qu'une pâle illustration de la volonté affichée de renforcer l'attractivité de la France par une vigoureuse promotion à l'étranger. N'oublions pas non plus que ce sont les contributions des professionnels membres du GIE Maison de la France qui complètent la subvention de l'État.

Un autre affichage est la fusion de l'AFIT, du service d'études et d'aménagement touristique de la montagne et de l'observatoire national du tourisme au sein d'un unique groupement d'intérêt public. Ce n'est, en réalité, qu'une nouvelle étape vers la fin programmée de votre ministère, ce que vous appelez pudiquement « la stratégie ministérielle de réforme ». J'ose espérer que cette idée n'est pas la vôtre, qu'on vous l'a imposée en oubliant que le tourisme est toujours le premier poste excédentaire de la balance des paiements et qu'il contribuait pour 6,6 % au PIB en 2003.

Le potentiel de développement économique que représente le tourisme hexagonal implique d'améliorer la qualité des prestations offertes sur l'ensemble du territoire. Vous associez donc le plan Qualité France à la politique de structuration de l'offre conduite en partenariat avec les collectivités locales dans le cadre des contrats de plan État-régions. Mais la triste réalité, c'est qu'aucune dotation au programme de consolidation des hébergements du tourisme social n'est inscrite en autorisations de programme, et cela après une baisse de 9 % en 2004 et de 10 % en loi de finances initiale de 2003. Augustin Bonrepaux l'a déjà souligné. Tous les intervenants dans le domaine du tourisme associatif nous ont pourtant dit que l'aide de l'État déclenchait les aides des collectivités territoriales. S'il n'y a plus de plan d'aide à la rénovation de notre patrimoine, le risque de fermeture des structures est bien réel, avec des conséquences désastreuses sur l'emploi et sur l'activité locale. Et quand bien même les rénovations seraient effectuées, ce serait forcément au détriment d'une politique tarifaire attractive, donc de l'accès aux vacances pour tous. Quant aux crédits de paiement, ils tombent de 2,5 millions à un million d'euros, en contradiction avec les décisions du CIADT du 9 juillet 2001. De ce fait, nous nous posons légitimement des questions sur la mise en œuvre des préconisations des comités interministériels du tourisme des 9 septembre 2003 et 23 juillet 2004 : seront-elles suivies d'effets ?

S'agissant de l'accès aux vacances, votre budget se caractérise par la constance de la baisse des moyens consacrés à la mise en œuvre d'une politique sociale concrétisant l'accès aux vacances pour tous. Aucun document budgétaire ne permet de vérifier les moyens financiers alloués au GIP Bourse Solidarité Vacances, dont l'objet est de mobiliser les moyens d'accueil et de transport en direction des populations défavorisées dans le cadre de la lutte contre l'exclusion. D'ailleurs, vous lui fixez le même objectif qu'en 2004 : 40 000 départs.

Vous avez, monsieur le ministre, annoncé un nouvel élan à la diffusion des chèques-vacances en ouvrant celle-ci à des opérateurs privés. D'où une question, qui a déjà été soulevée : la fin de l'exclusivité de la diffusion des chèques-vacances par l'ANCV signifie-t-elle la privatisation de cette agence ?

Enfin, vous affichez un taux d'évolution de plus 6,8 %, sans réelle explication chiffrée, ce qui nous laisse dubitatifs : le bleu budgétaire ne permet, quant à lui, de constater qu'une hausse d'à peine 3 %. Vous affichez encore votre action en faveur de l'emploi et de la cohésion sociale, dont tous les ministres se prévalent, d'ailleurs, en cette période de présentation budgétaire. Mais les véritables leviers économiques et sociaux sont, au fond, négligés, voire maltraités, dans ce budget pour 2005, par des dispositions financières et organisationnelles qui me semblent restrictives. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Michel Lejeune.

M. Michel Lejeune. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget du tourisme pour 2005 nous est présenté globalement en augmentation. Compte tenu de la conjoncture économique, cela mérite d'être souligné. Vous avez su, monsieur le ministre, malgré les indispensables réductions budgétaires qui s'imposent, convaincre le Gouvernement de l'utilité de donner les moyens nécessaires à la promotion de cette activité très importante pour notre économie en raison des devises qu'elle procure au budget de la nation, du nombre d'emplois directs et indirects qu'elle génère et de l'aménagement de notre territoire qu'elle suscite et qui permet, conjointement avec d'autres activités, de maintenir en vie des zones qui, sans cela, seraient menacées de désertification.

Promouvoir notre pays par le biais de Maison de la France, à laquelle un million d'euros supplémentaires sont alloués, est une excellente décision. Beaucoup de visiteurs transitent sur notre territoire.

M. Jean-Pierre Dufau. Ils le zappent !

M. Michel Lejeune. Nous devons leur donner l'envie d'y rester le plus longtemps possible. De nouveaux visiteurs venant de pays jusqu'alors peu ouverts, comme la Chine, la Russie ou le Brésil, commencent à choisir la France comme destination. Le potentiel énorme qu'ils représentent mérite d'être exploité, comme d'ailleurs celui de nouveaux membres de l'Union européenne, qui doivent devenir des partenaires touristiques privilégiés. À ce propos, la stratégie marketing pour 2005-2010 récemment publiée est remarquable. Ses auteurs méritent de vives félicitations.

La qualité est la condition sine qua non d'un développement touristique durable : avant tout qualité de l'accueil humain, mais aussi qualité des infrastructures. À ce propos, le seul bémol que nous pourrions apporter à l'appréciation très favorable sur ce budget est la diminution des crédits destinés au programme de consolidation des hébergements de tourisme social. Certes, les disponibilités financières de l'Agence nationale des chèques-vacances pourront être mobilisées à hauteur de 2 millions d'euros. Nous en prenons bonne note. Cependant, l'ANCV participe déjà au financement de certaines rénovations sur ses crédits de fonctionnement habituels. Ces derniers et les crédits mobilisés par l'action gouvernementale, de manière très occasionnelle, devront être très clairement distingués et identifiés, même s'ils ont la même origine. Car les crédits de l'État déclenchent souvent la mobilisation d'autres crédits émanant des différentes collectivités territoriales.

M. Jean-Pierre Dufau. Eh oui !

M. Michel Lejeune. Il serait donc particulièrement souhaitable que les crédits mobilisés sur les réserves de l'ANCV soient bien identifiés comme provenant de l'État via l'établissement public industriel et commercial, afin de susciter ceux des collectivités territoriales. Il faut également que cette ligne budgétaire du titre VI, chapitre 66-03, soit clairement maintenue et abondée dans les prochains budgets. Ces crédits sont indispensables pour maintenir un accueil de qualité au profit de tous les visiteurs, de tous les vacanciers sans exception, et pour un tourisme social qui doit rapidement s'adapter à l'évolution de notre mode de vie.

M. Jean-Pierre Dufau. Il faut voir comme on les aide !

M. Michel Lejeune. Monsieur le ministre, nous soutenons votre action et nous voterons votre budget avec confiance et détermination. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, traditionnellement, le budget du tourisme fait toujours l'objet d'un examen bienveillant sur tous les bancs de l'Assemblée. Cette année, une inquiétude réelle me saisit : ce budget, dans ses moyens comme dans ses orientations, n'est pas à la hauteur des défis de la mondialisation de l'économie touristique ; il est aussi celui du moins-disant social.

C'est d'abord un budget très insuffisant, en trompe l'œil. Le contexte d'économie mondialisée aurait plutôt nécessité une politique volontariste du tourisme, ainsi qu'un véritable plan d'action pluriannuel. Le rapport de M. Bernard Plasait pose un bon diagnostic, d'ailleurs repris par le rapporteur : « En termes de recettes touristiques, la France n'est placée qu'en troisième position mondiale, derrière les États-unis et l'Espagne. Plutôt que présenter un nombre d'arrivées en hausse, il est plus réaliste et plus utile de constater la baisse des recettes. La France, avec environ 30 milliards d'euros, se situe derrière les États-unis avec 73 milliards et l'Espagne avec 33 milliards. La productivité du secteur touristique français chute par rapport à nos concurrents européens : le tourisme ne représente plus que 5 % du PNB alors que l'Espagne affiche 8,4 %, se classant en première position des États européens, reléguant la France en sixième position ». C'est un diagnostic sévère mais implacable.

Avec 72,5 millions d'euros, vos crédits affichent une hausse apparente de 2,9 %, mais compte tenu de la nouvelle répartition entre les sections du ministère de l'équipement et du changement de locaux, le budget 2005 est quasiment identique à celui de cette année. Certes, le plan Qualité France va - timidement - dans le bon sens, mais les actions nouvelles ne seront financées que sur les crédits ouverts en loi de finances rectificative. Pourquoi ? Comme l'a démontré Augustin Bonrepaux, si l'importance de la promotion a été réaffirmée lors du CIADT du 23 juillet, la stratégie marketing de Maison de la France n'a pas fait l'objet d'un renforcement adapté des moyens budgétaires.

Au-delà de la promotion, c'est une politique ambitieuse de conquête des marchés qu'il faut mettre en œuvre : création de produits touristiques attractifs, plan de formation aux métiers du tourisme. Sur ce dernier point, le rapport de Mme Arlette Franco épingle les dysfonctionnements. Il ne faut plus se borner à constater, il faut réagir et retrouver une image et une réalité de pays d'accueil aux structures modernes et au personnel bien formé et polyglotte. Il s'agit de conforter notre premier poste excédentaire de la balance des paiements, dont l'évolution m'inquiète : 11,6 milliards d'euros en 2003 contre 13,6 en 2002 ; 6,6 % du PIB en 2003 contre 7 % en 2002. Face à une concurrence internationale sans merci, il faut réagir et ne pas accepter cette dégradation régulière. Or je sens plutôt poindre un désengagement de l'État, qui, sous prétexte de décentralisation, laissera aux collectivités le soin de développer l'économie touristique des territoires.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Très bien !

M. Jean-Pierre Dufau. Je n'entre pas dans le détail, mes collègues l'ont fait avant moi.

Ce budget est aussi celui du moins-disant social. Il ne prévoit pas le moindre euro en autorisations de programme à la ligne « consolidation des hébergements du tourisme social ». Quelle provocation ! C'est bien la première fois depuis 1989, quelle qu'ait été la majorité, que cette ligne budgétaire n'est pas abondée en autorisations de programme. Ainsi, plus aucun projet de rénovation du patrimoine du secteur du tourisme associatif - villages de vacances, maisons familiales, centres d'accueil de jeunes - ne pourrait être engagé avec des fonds d'État. Cette décision risque d'être lourde de conséquences, car les crédits du plan de consolidation sont ceux qui déclenchent les cofinancements des collectivités territoriales. Leur disparition pourrait remettre en cause la globalité des plans de financement. Or les besoins de rénovation sont énormes. Déjà en 2004, les deux tiers des projets de rénovation présentés par le secteur du tourisme social et associatif ont été refusés faute de financements. Qu'on n'argue pas que les subventions de l'ANCV pour l'aide à la pierre pourraient se substituer à l'État. Ces aides s'ajoutent au plan Patrimoine. En aucun cas elles ne peuvent le remplacer.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Très juste !

M. Jean-Pierre Dufau. Sur ce thème, monsieur le ministre, qu'en est-il du projet de la Caisse des dépôts d'ouvrir le capital de VVF Vacances, en d'autres termes de privatiser l'un des fleurons du tourisme social ?


Tout cela procède d'une même volonté d'abandonner le tourisme familial. C'est, en fait, une politique libérale qui est en marche et c'est la fin de décennies de vacances pour tous alors que plus de 40 % de nos compatriotes ne partent pas en vacances. Ce qui est engagé est inacceptable !

Je n'hésite pas à dire que c'est une rupture avec la politique de solidarité mise en œuvre jusqu'à présent.

En conclusion - et ce n'est pas vous qui êtes visé, monsieur le ministre - ce budget traduit une orientation franchement libérale de la politique touristique du Gouvernement. Insuffisant et manquant d'ambition face aux défis de la mondialisation, tournant le dos au tourisme associatif et familial, il ne peut, vous l'aurez compris, avoir l'aval des députés socialistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Quelques mots dans le court temps qui m'est imparti.

Je veux, tout d'abord, pour avoir entendu certaines interrogations ici ou là, exprimer ma conviction de l'utilité d'un ministère du tourisme : il joue un rôle d'impulsion et de coordination des politiques publiques, décide les investissements sur le territoire, promeut le tourisme français à l'étranger et favorise l'accès des Français aux vacances. Comme vous, monsieur Dufau, je regrette que le taux de départs en vacances n'ait pas évolué depuis une dizaine d'années et stagne, quelles qu'aient été les majorités en place.

M. Jean-Pierre Dufau. Ce taux est même passé de 52 % à 40 % !

M. Michel Bouvard. J'évoquerai, ensuite, brièvement trois points.

Le premier concerne la réorganisation du ministère avec le regroupement au sein d'un GIP unique de l'AFIT, de l'ONT et du SEATM. Le service d'études et d'aménagement touristique de la montagne est, par sa pluridisciplinarité et ses capacités d'expertise, un outil irremplaçable à la fois pour les pouvoirs publics qui ont la charge, notamment, d'accorder des unités touristiques nouvelles pour tous les projets d'aménagement significatifs en montagne, et pour les collectivités territoriales qui ont l'habitude de lui demander d'expertiser des projets ou de prendre conseil auprès de lui pour bâtir des projets de développement, quelle que soit leur importance. Monsieur le ministre, après la mise en place du GIP, les collectivités de montagne auront-elles accès aux services du SEATM dans les mêmes conditions que dans le passé ? Nous savons, par exemple, que pour avoir accès aux services de l'AFIT, il faut être membre du GIP AFIT. Sinon, il faut payer une prestation plus importante. Cela serait contraire à la tradition concernant l'action d'une direction de votre ministère comme le SEATM.

Ma deuxième interrogation porte sur la politique de réhabilitation du patrimoine du tourisme français. Nous savons que, dans un monde de plus en plus concurrentiel - et le secteur du tourisme n'échappe pas à la globalisation - la qualité de l'accueil est au moins aussi importante que la beauté et la diversité des sites, des paysages et des monuments que la France peut offrir. Or, le patrimoine du tourisme français a vieilli.

C'est le cas, notamment, du patrimoine privé. Depuis maintenant sept ou huit ans, les collectivités territoriales et le ministère du tourisme travaillent à la réhabilitation de l'immobilier de loisirs. Or, il faut bien constater que le dispositif qui a été mis en place, connu sous l'appellation de dispositif ORIL/VRT, n'a pas décollé. Si certaines régions comme le Languedoc-Roussillon ou les Alpes ont dégagé des crédits importants pour inciter à la réhabilitation de l'hébergement privé, cette rénovation n'a pas atteint les niveaux espérés.

Nous sommes obligés de reconnaître aujourd'hui les insuffisances du dispositif ORIL/VRT et d'imaginer ensemble une politique plus attractive permettant de remettre à niveau l'ensemble du parc immobilier privé à destination du tourisme si nous voulons que la France conserve ses capacités d'accueil, qui sont la première condition pour maintenir notre place en tant que destination touristique, et offre un accueil de qualité, qui est l'autre condition pour maintenir nos parts de marché.

Après la rénovation du patrimoine privé, j'évoquerai celle de l'hébergement touristique du secteur associatif. Le budget pour 2005 ne prévoit qu'une ligne de crédits de paiement. Cela permettra de poursuivre les opérations engagées mais il apparaîtrait nécessaire, monsieur le ministre, qu'à côté des aides de l'ANCV, qui sont montées en puissance au fil des années et qu'il ne faut pas renier parce qu'elles ont leur importance - elles permettent, notamment, de contribuer à des montages astucieux à partir des crédits européens...

M. Jean-Pierre Dufau. Quels crédits européens ?

M. Michel Bouvard. ...puisque, n'étant pas considérées comme des contreparties publiques, elles permettent de bonifier les montages lorsqu'il y a des contributions du FEDER dans les zones d'objectif 2 - il serait nécessaire, disais-je, qu'une contribution puisse être apportée en autorisations de programme au titre de l'exercice 2005.

À la différence de mes collègues de l'opposition, je veux saluer l'action engagée par la Caisse des dépôts sur le patrimoine de VVF. En raison d'un défaut d'entretien au cours des dernières années, VVF, comme d'ailleurs l'ensemble du secteur associatif, a connu une dégradation progressive de son patrimoine. Le montage proposé par le Caisse des dépôts consiste à faire entrer dans le champ privé une partie de VVF pour dégager les ressources permettant de rénover les villages, qui sont les outils les plus fragiles, d'autant qu'ils sont situés dans les territoires eux-mêmes les plus fragiles. C'est une formule astucieuse. Elle permettra de mobiliser des ressources là où l'insuffisance de l'aide publique au cours des décennies passées n'a pas permis d'abonder les financements qui auraient été nécessaires.

M. Jean-Pierre Dufau. Il n'y a pas d'astuce : c'est la privatisation !

M. Michel Bouvard. Enfin - et ce sera mon dernier point, monsieur le président - j'évoquerai brièvement, à la suite de Léonce Deprez, la dotation touristique.

Nous sommes à la veille d'une importante réforme de la DGF pour les collectivités territoriales. Celle-ci a été actée il y a quelques jours lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances. Au sein de la dotation globale de fonctionnement rénovée se trouvera, bien évidemment, l'ex-dotation touristique, qui était une dotation de compensation de charges pour les communes touristiques et, notamment, pour les plus petites communes, de 500 à 2 000 habitants et de 2 000 à 10 000 habitants. C'est au sein de ces communes que cette ancienne dotation pèse le plus lourd.

M. Léonce Deprez. Exact !

M. Michel Bouvard. Or, dans la réforme prévue, la DGF sera incluse dans le potentiel financier, qui va remplacer la notion de potentiel fiscal, lequel potentiel financier déterminera l'accès à la péréquation des communes et, notamment, des communes touristiques. Or, le fait d'inclure l'ex-dotation touristique dans le calcul du potentiel financier majore artificiellement la richesse des communes touristiques, ce qui les pénalise dans l'accès à la péréquation alors qu'elles doivent continuer à investir pour que notre pays garde sa place en tant que destination touristique, notamment dans les territoires où la fréquentation est la moins importante et dans les petites et moyennes stations.

M. Léonce Deprez. Bien sûr !

M. Michel Bouvard. Je vous lance donc un appel solennel, monsieur le ministre, pour que l'ex-dotation touristique soit sortie du calcul du potentiel financier afin que les communes touristiques puissent avoir accès à la péréquation dans des conditions normales. La compensation qu'elles reçoivent pour une charge ne peut pas être considérée comme une richesse et les pénaliser pour la péréquation ! Même si ma demande relève de la compétence du ministre de l'intérieur, je tenais à vous la présenter aujourd'hui, monsieur le ministre, car c'est vous qui avez la charge de promouvoir l'ensemble de la diffusion touristique dans notre pays.

Pour ma part, je soutiendrai, bien évidemment, ce budget, qui augmente par ailleurs les crédits de promotion de la France à l'étranger dans une période de plus en plus concurrentielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Houssin, dernier orateur inscrit.

M. Jacques Houssin. Monsieur le ministre, le projet de loi de finances pour 2005 s'inscrit dans la ligne de l'action tracée par le Gouvernement dans un souci général de maîtrise des dépenses publiques et d'optimisation de l'efficacité de l'État. Je me félicite que notre gouvernement insiste, par un effort particulier, sur l'importance capitale du secteur du tourisme, notamment d'un point de vue économique. Il ne faut, en effet, pas oublier que le tourisme représente aujourd'hui environ 7 % du PIB et constitue le premier poste excédentaire de la balance des paiements avec un solde positif de 11,6 milliards d'euros.

La France dispose, en matière de tourisme, d'atouts considérables que nous nous devons de préserver et de développer. Elle est la première destination touristique au monde avec 75 millions de touristes en 2003. Des perspectives importantes s'ouvrent à elle, en particulier si l'on tient compte de l'explosion prévue du tourisme de certains pays, telles la Chine, l'Inde ou encore la Russie. Il y a là la possibilité de pérenniser ce secteur tout en le développant, particulièrement dans les filières à forte valeur ajoutée, tels le tourisme d'affaires ou le tourisme « senior ».

Les grands chantiers que vous nous présentez participent de cette dynamique qui vise à préserver et à conforter notre rang.

Ainsi, vous annoncez un renforcement des crédits alloués à Maison de la France en charge de la promotion de l'image du pays à l'étranger. La contribution de l'État au budget de cet établissement est portée, pour 2005, à 30,3 millions d'euros, soit une augmentation de 3,41 % par rapport à la dotation inscrite au budget 2 004. Il s'agit d'un point très positif tant la promotion de l'image de la France est fondamentale, en particulier dans le contexte de l'émergence de nouvelles destinations touristiques susceptibles de nous faire concurrence.

De plus, l'attribution d'une enveloppe de 1,7 million d'euros pour la mise en œuvre du plan Qualité France vient conforter votre démarche car, si nous devons porter notre image à l'étranger, nous devons également améliorer la qualité des prestations offertes sur l'ensemble du territoire en termes tant de structures d'accueil que d'hébergement.

C'est pour moi l'occasion de rappeler l'action du Gouvernement en faveur du secteur de l'hôtellerie-restauration avec la suppression du SMIC hôtelier parallèlement à une réduction des charges sociales, et ce dans la perspective d'un abaissement du taux de TVA pour la restauration classique. Il s'agit d'une préoccupation essentielle de ce secteur qui permettra d'améliorer la qualité du service rendu ainsi que les conditions de travail des personnels.

Promouvoir le tourisme passe également par des actions fortes en faveur de l'emploi. C'est ce que le Gouvernement entend mettre en œuvre en s'attachant notamment à l'amélioration des conditions de vie des travailleurs saisonniers, notamment sur le plan de l'hébergement. Le potentiel d'emploi du secteur, estimé à près de 100 000 emplois par an pour les prochaines années, implique la mise à disposition de réels moyens.

Le secteur du tourisme avait besoin d'une ligne claire et d'une politique volontariste. C'est ce que vous nous proposez aujourd'hui.

Pour autant, beaucoup reste encore à accomplir. En effet, au-delà des remarques que j'ai pu formuler, je tiens à attirer particulièrement votre attention, monsieur le ministre, sur certaines incertitudes qui pèsent encore sur le secteur.

Tout d'abord, si j'ai souligné l'intérêt majeur qu'il y a à soutenir le développement de Maison de la France, je tiens à insister sur l'importance de la question parallèle de l'accueil. En effet, toutes les actions de marketing ne changeront rien si nous ne sommes pas capables d'améliorer la qualité de notre accueil. Je pense ici à certaines structures telles que les « résidences hôtelières » qui pratiquent des services d'un niveau différent et sont moins pourvoyeuses d'emplois - les deux sont souvent liés - que l'hôtellerie classique, sans compter la concurrence déloyale pratiquée dans certains cas par la location à la nuit. Sans en appeler à la suppression de ce type d'établissements, il serait néanmoins nécessaire d'en préciser l'encadrement juridique, notamment concernant les normes de sécurité et les conditions d'ouverture qui diffèrent de celles auxquelles l'hôtellerie classique est soumise.

Sur le plan de la concurrence, ensuite, notre rang pourrait bien, dans un avenir proche, être menacé. En effet, si nous sommes encore leaders pour la fréquentation touristique, notre situation est moins nette pour les recettes puisque nous nous plaçons en troisième position derrière les États-Unis et l'Espagne.


Nous disposons donc d'une importante marge de progression, qui passe notamment par la fidélisation de clientèles touristiques plus aisées, ainsi que par l'incitation à dépenser plus, par des séjours plus longs en France.

La priorité fixée consistant à atteindre 40 millions d'euros de recettes annuelles en 2010 va dans cette direction. Pour relever le défi lancé par les nouvelles destinations - l'essor touristique de la Croatie en constitue un parfait exemple -, nous devons accentuer toujours plus nos efforts pour faire reconnaître le formidable patrimoine que nous possédons.

C'est à ce prix seulement que nous serons en mesure de capter l'afflux important de touristes prévus à l'horizon 2020. Monsieur le ministre, vous affichez nettement vos efforts en ce sens dans les lignes du budget que vous nous soumettez aujourd'hui.

Le tourisme est, vous l'avez souligné, une bataille que la France ne peut se permettre de perdre. C'est pourquoi, confiant dans la démarche du Gouvernement et dans votre ambition pour ce secteur de notre économie, c'est avec force et détermination que je voterai ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au tourisme.

M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je tiens, en premier lieu, à remercier M. le rapporteur spécial de la commission des finances, M. Augustin Bonrepaux, et M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, M. Jean-Michel Couve, pour la qualité et la pertinence de leurs travaux.

Comme ces deux éminents spécialistes des crédits du tourisme n'ont pas manqué de le remarquer, le budget de mon ministère bénéficie, cette année, d'une attention particulière de la part du Gouvernement, conformément aux engagements pris lors des comités interministériels du tourisme réunis en 2003 et en 2004.

En effet, 2 millions d'euros ont donc été affectés en loi de finances rectificative pour financer les mesures du CIT du 23 juillet dernier, comme l'a indiqué M. le Premier ministre dans sa lettre de plafond des dépenses. Ce qui porte, pour 2005, le budget total du ministère délégué au tourisme à 74,6 millions d'euros en moyens de paiement, soit une augmentation de 6,38 % - et non de 3 % comme il a été dit - par rapport au budget initial de 2004.

Ce budget reflète notre volonté de rupture. Car, contrairement à nos prédécesseurs, madame Pérol-Dumont, nous avons cessé, depuis deux ans, de pratiquer l'autocongratulation permanente pour nous pencher sur les évolutions profondes de l'industrie touristique.

« Dans les dix ans à venir, le monde du tourisme changera plus qu'au cours des dernières décennies » : cette analyse émane de Bill Gates, le président de Microsoft, un homme qui a su, c'est le moins que l'on puisse dire, anticiper les mutations économiques récentes.

Nouveaux clients, nouvelles destinations, nouveaux modes de distribution : c'est une révolution silencieuse qui est en marche. A nous de nous mettre en ordre de bataille pour défendre notre position sur le marché mondial du tourisme. Il était temps, ai-je envie de dire.

Car si la France a conservé, en 2003, sa position de premier récepteur mondial, avec 75 millions de visiteurs accueillis, notre pays doit affronter une concurrence exponentielle et exacerbée. Nous sommes ainsi passés, en vingt ans, de 50 à plus de 580 destinations identifiées, 580 pays, régions ou villes qui assurent avec vigueur une promotion de leurs infrastructures touristiques sur les marchés étrangers.

La première priorité de ce budget concerne donc la promotion de l'image touristique de la France. Pour gagner cette bataille de l'image, les équipes de Maison de la France ont mis en œuvre une nouvelle stratégie de marketing, que j'ai présentée aux adhérents le 27 septembre dernier. Nous sommes, je le rappelle, les premiers en Europe à modifier les fondamentaux de notre promotion pour nous adapter aux nouveaux modes de consommation touristique, et notamment au raccourcissement des séjours.

Je me suis fixé, à cette occasion, un objectif ambitieux : 40 milliards d'euros de recettes en 2010 contre 32 aujourd'hui. Pour l'atteindre, nous devons hiérarchiser nos priorités et concentrer nos moyens sur les segments les plus rémunérateurs, comme le tourisme d'affaires ou le tourisme culturel.

Nous devons également privilégier certaines cibles - les seniors ou les jeunes urbains - et gagner des parts de marché sur les clientèles à fort pouvoir d'achat, comme les Japonais, les Chinois, les Russes, les Américains ou les Australiens. Ce sont, naturellement, les clientèles les plus convoitées par nos principaux concurrents. Les capter, puis les fidéliser, suppose d'investir d'importants moyens en termes de communication. C'est pourquoi la contribution de l'État au budget de Maison de la France a de nouveau été augmentée. Elle est portée cette année à 30,3 millions d'euros, soit une hausse de 3,41 % par rapport à la dotation inscrite en 2004.

Mais intensifier nos actions de promotion ne suffira pas à gagner les faveurs de ces clientèles. Il nous faut pouvoir leur proposer des équipements, des prestations et des services qui correspondent à leurs exigences. Toute notre industrie touristique doit s'adapter.

La deuxième priorité de ce budget est donc de favoriser l'économie du tourisme. C'est le plan « Qualité France » : il s'agit à la fois de moderniser les structures et de favoriser la professionnalisation des acteurs. Mes services accompagnent les professionnels qui s'engagent dans ces démarches « qualité, » grâce à une labellisation des sites les plus performants, établie autour de critères nationaux.

C'est une mesure phare du CIT du 23 juillet 2004 à laquelle nous consacrons une enveloppe de 1,7 million d'euros. Nous allons d'ailleurs signer les premières conventions avec les têtes de réseaux qui s'engagent dans cette démarche, lors des deuxièmes Assises nationales du tourisme, le 1er décembre prochain.

Ces assises marquent clairement notre volonté d'être davantage à l'écoute des professionnels. Une écoute qui se traduit par des mesures en faveur de l'emploi, une innovation qui tranche singulièrement avec l'inertie qui prévalait largement jusqu'en 2002.

Lors du CIT du 23 juillet dernier, j'ai présenté plusieurs dispositions pour aider le secteur de l'hôtellerie et de la restauration où l'offre peine à rencontrer la demande. Comment peut-on accepter que 50 000 offres d'emplois restent ainsi non pourvues ?

Nous expérimenterons, en 2005, un projet de groupement d'employeurs entre trois départements littoraux et trois départements de montagne pour garantir à des saisonniers une embauche pérenne sur au moins deux saisons. C'est une première. Là encore, il y a ceux qui parlent et ceux qui agissent.

M. André Chassaigne. Vous êtes bien sévère.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. On ne peut pas dire cela !

M. le ministre délégué au tourisme. Vous avez été durs avec moi, il est donc tout à fait normal que je puisse me défendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mais, pour qu'un tel système fonctionne, encore faut-il que les candidats à l'embauche saisonnière puissent se loger.

Nous proposons, là aussi, des solutions, avec une adaptation du 1 % patronal, la création d'un bail d'une durée d'un mois reconductible, ou encore le financement de deux nouvelles « maisons des saisonniers ».

Je crois également opportun de rappeler qu'une mesure du CIT du 9 septembre 2003 a prévu l'obligation de réserver 15 % des logements aux saisonniers en contrepartie des exonérations fiscales accordées pour la rénovation des résidences de tourisme dans les stations classées et les communes touristiques. C'est une avancée significative pour les travailleurs saisonniers. Cette disposition figure dans le projet de loi sur le développement des territoires ruraux, qui doit être examiné prochainement en deuxième lecture au Sénat. Elle est donc, plus que jamais, d'actualité.

Les agences de voyages seront confrontées, au 1er avril 2005, à la fin du commissionnement par Air France. C'est donc un autre secteur professionnel que nous accompagnons. Nous allons financer un audit pour aider la profession à réorganiser ses activités, ainsi qu'une campagne de promotion en direction du grand public.

Dans un monde qui se réorganise, nos services ne peuvent rester immobiles. Au 1er janvier 2005, l'AFIT, l'ONT et le SEATM fusionneront au sein d'un groupe d'intérêt public unique. Cela permettra de créer une synergie entre les acteurs, dans la logique même de la LOLF qui vise à rationaliser les actions de l'État.

Je souhaite à ce propos dissiper une inquiétude : les missions de service public que réalise le SEATM seront entièrement maintenues au sein du nouveau GIP. Les communes de montagne accéderont donc toujours gratuitement à certaines prestations, comme l'instruction des projets d' « unité touristique nouvelle ». Il n'y a aucune ambiguïté sur ce point.

Autre bonne nouvelle : les DRT et nos services déconcentrés en région continueront d'assurer leurs missions en étroite coopération avec les CDT et les CRT.

La troisième action consiste à contribuer à l'accès aux vacances pour tous. Il est peut-être nécessaire de rappeler que cet objectif s'inscrit pleinement dans la politique de cohésion sociale, qui implique plusieurs autres départements ministériels. Le ministère délégué dispose, lui, de deux outils. L'ANCV, dont le financement public est assuré au travers de la diffusion des chèques-vacances, permet à 6 millions de personnes de partir en vacances et la « bourse solidarité vacances » propose, chaque année, aux personnes en difficulté des séjours à prix réduits : 55 000 en 2003.

Contrairement à ce qui a pu être rapporté ici ou là, je n'ai pas pour mission de privatiser l'ANCV. Notre ambition consiste avant tout à élargir la diffusion des chèques-vacances, notamment dans les entreprises de moins de 50 salariés, et à améliorer l'efficacité de l'action de l'État en matière de tourisme social.

Lors du dernier CIT, il a donc été décidé d'engager une réflexion globale pour améliorer le dispositif, tout en développant sa finalité sociale. Cette réflexion répond d'ailleurs à un véritable besoin puisque l'Assemblée s'est saisie de cette question lors de l'examen des recettes du projet de loi de finances pour 2005, au travers du revenu fiscal de référence qui conditionne l'accès aux chèques-vacances.

Le secrétaire d'État au budget a annoncé qu'un groupe de travail devrait être prochainement réuni pour apporter une réponse raisonnable à cette question. C'est naturellement un chantier que je suivrai avec une grande attention.

Autre vérité qu'il me paraît important de rétablir : la politique de consolidation des hébergements de tourisme social n'est pas abandonnée, comme tentent de le faire croire certains. Mais, dans un souci de bonne gestion et de réorganisation du pôle social, il a été convenu d'utiliser les excédents dégagés chaque année par l'ANCV - 10 millions d'euros pour le seul exercice 2003 - pour financer la politique d'aide à la pierre, conformément d'ailleurs à son objet statutaire.

Je trouve choquant que, dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques, des fonds de réserve demeurent inactifs dans les comptes des établissements relevant de l'État.

Par ailleurs, 1,34 million d'euros seront consacrés l'an prochain à des mesures de soutien à l'action des collectivités territoriales, des professionnels et des organismes caritatifs, selon quatre axes : accès au tourisme des personnes handicapées, des jeunes, des personnes en situation d'exclusion et des seniors.

L'accès aux vacances demeure donc bien une des grandes priorités du Gouvernement. Mais son financement, comme cela est souhaitable, sera rationalisé pour permettre à tous les publics d'en retirer un bénéfice optimal.

Le tourisme représente en France un gisement potentiel d'emplois exceptionnel. Une étude du Conseil d'analyse économique, qui ne vous aura sans doute pas échappé, estime que un million et demi d'emplois pourraient être créés dans le secteur de l'hôtellerie et de la restauration. Des emplois qui sont, par définition, non délocalisables. D'où l'importance cruciale d'augmenter nos budgets de promotion. Car chaque euro investi rapporte bien plus que sa valeur initiale, comme l'atteste l'étude européenne réalisée en 2002 par le bureau néerlandais du tourisme. Pour la France, le ratio est très élevé car un euro investi rapporte 600 euros en recettes diverses.

J'ajoute que le retour sur investissement est garanti car le poids de l'industrie touristique dans l'économie mondiale va demeurer prépondérant dans les prochaines décennies, en raison du boom des retraites, du développement de la société des loisirs et de l'émergence de gigantesques marchés comme l'Inde, la Russie ou la Chine.

L'attractivité de notre territoire doit donc être ardemment défendue. J'espère vous en avoir convaincus. Dans cette bataille, le ministère délégué au tourisme prendra bien sûr toute sa part.

Je viens de présenter le budget de mon ministère. Je vais maintenant répondre aux questions posées par plusieurs parlementaires.

Michel Bouvard s'est préoccupé de l'existence du service d'études et d'aménagement touristique de la montagne au sein du nouveau groupement d'intérêt public. Je rappelle que ce nouveau pôle, que l'on veut plus efficace, conservera bien entendu les attributions qu'il exerçait jusqu'à présent, notamment en ce qui concerne le service d'études et d'aménagement de la montagne. Nous envisageons même qu'un département exclusivement consacré à la montagne soit identifié à l'intérieur du nouveau pôle de l'Agence française de l'ingénierie touristique. Tous les services assurés jusqu'à présent en direction des élus continueront à l'être dans les mêmes conditions.

Michel Bouvard a évoqué également le système utilisé pour réhabiliter les opérations de l'immobilier de loisirs et les villages résidentiels de tourisme. La récupération de la TVA de 5,5 % sur les travaux de réhabilitation paraît un système dépassé et peu attractif. Il faut changer de produit. Nous menons des expériences qui nous permettront de procéder, à la fin de l'année, à des évaluations et d'ouvrir un chantier, afin de trouver un autre produit plus attrayant. En effet, il faut réhabiliter l'existant et permettre à certaines zones d'être bien équipées, si l'on veut s'organiser pour le tourisme de demain.

Beaucoup de personnes pourraient imaginer qu'en utilisant les excédents de l'Agence nationale pour les chèques-vacances, l'État se défausse.

Or l'ANCV, établissement public industriel et commercial, n'est que le prolongement de l'État. Son conseil d'administration est placé sous mon autorité. Il n'y a donc aucun mal à utiliser, dans de bonnes conditions, des excédents qui dorment dans des caisses. Quand la conjoncture est difficile, il serait presque malsain de laisser dormir de l'argent à n'en savoir que faire. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de consacrer ces sommes, qui grossissent d'année en année, à l'action sociale.

Ces excédents seront affectés dans le cadre d'une loi de finances rectificative. Nous l'avons déjà fait pour financer certaines mesures du comité interministériel ; nous le ferons pour que cette ligne budgétaire, jusqu'à présent consacrée à l'hébergement du tourisme social, soit de nouveau abondé. La discussion menée entre Nicolas Sarkozy et Dominique Bussereau me permet de dire que cette ligne sera abondée en autorisations de programme et que les crédits de paiement nous permettront de poursuivre notre action.

Comme le soulignait M. Michel Lejeune, il nous faut trouver une astuce pour que l'argent provenant d'un EPIC ait toujours la même nature et permette à l'État de lever les financements des collectivités territoriales et de l'Europe. Cette possibilité de levier doit continuer à être opérationnelle.

Je comprends l'inquiétude de certains s'agissant de la DGF et de la définition du potentiel financier. Monsieur Léonce Deprez, le financement de l'économie touristique est un vrai chantier. Jusqu'à présent nous avons financé l'économie touristique avec une DGF dans laquelle était perdue la dotation touristique. Il nous faut l'identifier et lui donner toute sa pertinence dans le financement de l'activité touristique. Mais n'oublions pas qu'il existe d'autres leviers, comme la taxe de séjour. Il nous faut avoir une vision d'ensemble des outils financiers sur lesquels nous devons agir.

Jean-Pierre Dufau, et c'est tout à fait son droit, a critiqué avec force mon budget, qu'il a qualifié de moins-disant social. Il a évoqué la baisse des résultats en 2003. Mais heureusement nous réagissons ! En moins d'un an, deux comités ministériels, des assises du tourisme, un plan « qualité France », la définition d'une stratégie de marketing : il n'y a pas eu une telle prise de conscience depuis vingt ans. Cela doit permettre de sortir de la léthargie, mais il faut du temps pour recueillir les premiers dividendes de ces actions. En tout cas, nous n'avons pas à rougir de ce que nous faisons, au contraire.

S'agissant du tourisme social, j'ajouterai qu'il n'est pas dans nos projets de privatiser l'ANCV. Malgré l'absence momentanée de crédits pour l'hébergement du tourisme social, le Gouvernement n'a pas réduit l'action sociale. Ainsi j'aurais certainement le plaisir, d'ici à la fin de l'année, de délivrer le millième label « Tourisme et Handicap » à des équipements qui répondent aux normes exigées.

Nous lançons aussi des opérations. Ainsi, avec l'UNAT, nous faisons partir en vacances plusieurs milliers de seniors. Les responsables de l'UNAT sont contents parce que nous faisons ce travail en commun. Vous n'avez pas le monopole du cœur, mesdames, messieurs de l'opposition ! Nous le faisons avec beaucoup de sincérité et d'amour, en tout cas pour ce qui me concerne. Les actions de BSV et d'ANCV montrent l'importance particulière que le Gouvernement attache à l'action sociale.

Jean Launay a évoqué la mort annoncé du ministère. Après tous les efforts de ce Gouvernement que je viens de décrire, il n'en est pas question. Au contraire, la LOLF a permis de consolider l'existence de ce ministère, en prévoyant un programme tourisme, que j'ai décliné devant vous il y a quelques instants et qui s'articule autour de trois actions. Plus que jamais, la France a conscience de l'existence de son économie touristique.

Sur le tourisme social, je vous ferai la même réponse qu'à M. Dufau : nous faisons des efforts importants. Dans ce domaine, je persiste à dire que nous n'avons pas de problème. Et je répète une fois encore, puisque vous avez également évoqué cette question, que la privatisation de l'ANCV n'est pas du tout à l'ordre du jour.

Je veux rectifier ce qu'a dit Mme Pérol-Dumont : le tourisme représente non pas 5 %, mais 6,6 % du produit intérieur brut de la France. L'engagement de l'État ne se résume pas à mon budget, il englobe les actions que je viens d'énumérer : les CIT, le plan « qualité France », la stratégie marketing, les assises nationales...

Madame la députée, vous avez évoqué un vrai problème : les crédits des contrats de plan États-régions. Il faut dire la vérité : il ne s'agit pas d'un problème du ministère du tourisme, mais d'un problème global. Pourquoi sommes-nous aujourd'hui face à cette difficulté ? On ne peut réformer les retraites, lutter contre l'endettement, respecter le pacte de stabilité et en même temps ne pas consentir les efforts nécessaires, même par des gels de crédits. Nous avons trouvé de gros problèmes, il faut les surmonter. L'État a pris des engagements, ils seront respectés. Avec les délégués régionaux du tourisme, sur le terrain, nous allons rencontrer les professionnels en difficulté. Il faut discuter avec les chefs d'entreprise, surtout les plus petits. Ils ont besoin de lisibilité afin de pouvoir s'organiser. Nous espérons ainsi progressivement pouvoir nous en sortir.

Vous avez parlé d'une dégradation de l'action sociale, surtout s'agissant des départs en vacances. Permettez-moi de vous rappeler quelques chiffres : en 2002, il y a eu 25 000 départs BSV. Il y en a eu 39 000 en 2003 et 40 000 en 2004, et l'année n'est pas encore terminée. C'est dire que le mouvement se poursuit et surtout s'amplifie.

Augustin Bonrepaux, qui connaît très bien le tourisme, a évoqué les mauvais résultats de la saison et les événements qui nous ont frappés, en dehors de la conjoncture internationale. Sur l'existence de mon ministère, je sais que vous n'exprimiez pas votre pensée, mais que vous vous faisiez l'écho de la commission que vous représentez.

Comme je l'ai déjà dit, la LOLF vient de conforter mon ministère dans une mission et des actions bien précises. Il ne va donc pas disparaître, bien au contraire. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette prise de conscience.

Jean-Michel Couve a rappelé que le tourisme ne va pas de soi. Longtemps, nous avons cru, parce que la France est belle, qu'il se développerait spontanément. Nous comprenons aujourd'hui qu'il faut réagir avec force. De nouvelles destinations touristiques apparaissent, la concurrence est farouche. Plus que jamais la France a besoin d'un ministère du tourisme.

Sur l'application de la loi Littoral, vous avez rappelé à juste titre que les nouveaux périmètres territoriaux soulèvent des difficultés. Vous avez raison de dire que beaucoup d'élus locaux auront besoin d'assistance pour appliquer le dispositif. Vous avez évoqué la possibilité de recourir à l'Agence française de l'ingénierie touristique. C'est une bonne idée et je suis tout à fait prêt à étudier cette proposition. J'ai appris qu'une mission d'observation vous avait été confiée par le président de la commission des affaires économiques. Mon ministère est prêt à travailler avec vous de façon à exploiter au mieux les résultats de cette mission.

Claude Leteurtre a évoqué la nécessité de sensibiliser les ambassadeurs au tourisme. Ce fut l'une de mes premières actions à ce ministère : j'ai fait en sorte d'être entendu lors de la conférence des ambassadeurs. Nos postes diplomatiques deviennent de plus en plus des relais avancés de notre stratégie touristique.

Les moyens de l'administration centrale n'augmentent que de façon apparente. La LOLF nous a en effet obligés à nous organiser et à mieux identifier les personnels dont la fonction était déjà attachée à l'activité touristique, ce que nous avons fait. Cela se traduit, au niveau du ministère, par une meilleure identification de dépenses qui existaient déjà, mais qui étaient comptabilisées dans d'autres départements.

L'investissement touristique ne trouve pas sa source uniquement dans le budget de mon ministère. Dieu merci, d'autres départements ministériels y participent grandement !

Léonce Deprez a évoqué la territorialisation de l'économie touristique. Je partage ce point de vue et je pense comme lui qu'il appartient à l'État de délivrer l'agrément aux communes touristiques. Nous avons plusieurs fois évoqué l'idée d'une loi qui donne une ossature à l'activité touristique. J'espère que nous y parviendrons.

Nous avons mis en place un groupe de travail sur les stations classées, dans lequel vous aurez l'occasion, monsieur Léonce Deprez, de jouer un rôle prépondérant. Cela nous permettra d'avancer.

Vous avez soulevé deux questions importantes : la sécurité des grands pôles touristiques attractifs et l'ouverture des commerces le dimanche, qui aurait dû être automatique dans les communes touristiques. Sur ces questions, nous allons engager la discussion avec les ministres concernés. Je pense comme vous que l'économie touristique ne peut trouver sa pertinence que dans le partenariat public-privé - le « PPP ». Il est indispensable que les pouvoirs publics créent les conditions favorables à l'investissement privé.

M. Chassaigne a voulu faire croire que la seule dépense extraordinaire de ce budget était le déménagement du ministère du tourisme vers son nouveau site de la place de Catalogne. Monsieur le député, outre que ce déménagement pour un bâtiment intelligent nous permettra d'être bien plus efficaces,...

M. André Chassaigne. Bien sûr ! Je ne l'ai pas contesté !

M. le ministre délégué au tourisme. ...il permettra certainement de faire aussi des économies d'échelle.

Au demeurant, le budget du tourisme ne se limite pas à cela ! Je viens d'évoquer de nombreux autres points.

Je tiens à préciser, par ailleurs, qu'il n'est aucunement question de privatiser l'ANCV. D'une manière très démagogique, vous avez opposé la promotion du tourisme et le tourisme social.

M. André Chassaigne. Ah non ! (« Si ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué au tourisme. Vous savez bien qu'il n'en est rien. Remettons les choses en place : le « tourisme de luxe » - pour reprendre votre expression - est une des nombreuses filières du tourisme français que nous nous employons à promouvoir. Il est indispensable de promouvoir la destination France, pour attirer des touristes étrangers : ils nous apportent des recettes en devises, ces recettes créent la richesse, la richesse crée des emplois - et ce sont ces emplois qui permettront demain aux salariés de partir en vacances. Je ne peux donc accepter qu'on oppose ces deux aspects du tourisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur Lejeune, je vous remercie de vos propos sur la stratégie de marketing. Ce travail très important réalisé par l'équipe de Maison de la France nous permettra, en effet, de nous organiser dans les cinq prochaines années pour conserver notre rang de première destination touristique et, plus encore, gagner des parts de marché.

J'ai déjà répondu à votre question relative au tourisme social, et j'ai bien entendu votre préoccupation. Il importe que nous puissions disposer des moyens financiers nécessaires, même s'ils doivent provenir des excédents de l'ANCV, mais le financement doit rester un financement d'État pour jouer un rôle de levier en vue de la mobilisation d'autres financements de la part de nos autres partenaires.

Je vous remercie, monsieur Houssin, d'avoir souligné la nécessité de la promotion. J'ai déjà évoqué la concurrence très rude à laquelle nous sommes confrontés. À l'heure où certains pays consacrent des moyens importants à la promotion, nous ne devons pas être en reste.

Vous avez également rappelé à juste titre que la clientèle, une fois en France, ne doit pas être déçue. Il nous faut donc soigner l'accueil, qui ne se limite pas aux aéroports et aux gares, mais concerne aussi les équipements. Les résidences hôtelières, notamment, méritent un encadrement juridique beaucoup plus précis. Des critères doivent être inventés à cet égard et l'application même du plan Qualité France, qui rendra nécessaire un dialogue avec les responsables de ces équipements, contribuera à en trouver.

J'ai, d'ailleurs, entrepris une démarche du même ordre avec les chambres d'hôtes, qui méritent elles aussi un classement plus précis. Plus les classements seront rigoureux, plus la qualité sera assurée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en arrivons aux questions.

Nous commençons par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

La parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. Monsieur le ministre, je vous aurais volontiers interrogé sur le comptage des touristes en France. Comment peut-on établir que la France est la première destination touristique au monde ? Mais ce n'est pas cette question que je vous poserai - peut-être, d'ailleurs, y répondrez-vous quand même. (Sourires.)

Je souhaite plutôt, en effet, vous interroger sur l'accueil et, dans cette perspective, sur la maîtrise des langues étrangères. Il est notoire, en effet, que si l'on trouve en France, dans le domaine du tourisme, le sourire et la qualité, l'apprentissage des langues étrangères est très faible - il suffit d'évoquer, à cet égard, l'insuffisance des traductions des menus de restaurant dans les langues étrangères majeures, la faible maîtrise des langues dans les offices du tourisme et syndicats d'initiative, qui représentent pourtant le premier réseau national d'accueil, ou le petit nombre d'émissions de radio et de télévision ou de journaux en langues étrangères à l'échelle nationale, régionale, départementale ou locale.

Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, ce que vous envisagez faire, dans le domaine de la formation aux métiers du tourisme, pour assurer une réelle qualification et faire en sorte que les étrangers ne se sentent pas étrangers chez nous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué au tourisme. Monsieur le député, bien que vous n'ayez pas vraiment posé la question du comptage des touristes, je tiens à y répondre. Ce comptage, en effet, n'est pas sans présenter des ambiguïtés, qui invitent à définir une approche uniforme, avec un instrument de mesure unique et des critères identiques, à l'aide des « comptes satellites ». Telle est, d'ailleurs, la perspective de l'Organisation mondiale du tourisme. J'ai besoin de pouvoir présenter des chiffres fiables, ne serait-ce que pour me faire entendre de mon collègue chargé de l'économie !

La formation, notamment aux langues, est un vrai problème. À l'heure de la mondialisation, et alors que nous nous efforçons d'attirer les clientèles les plus diverses - je pense en particulier aux Russes et, surtout, aux Chinois - il est indispensable que les professionnels de l'accueil puissent parler plusieurs langues. Le rapport que j'ai demandé à Arlette Franco indique des solutions, et propose notamment qu'au niveau du BTS, des modules soient consacrés à l'apprentissage des langues. Il faut travailler à ce que ces recommandations débouchent sur des solutions concrètes - et je m'y engage.

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Monsieur le ministre, avec un budget en augmentation par rapport à 2004, vous avez dégagé des priorités : promouvoir l'image touristique de la France et favoriser l'économie du tourisme, dont chacun connaît le poids tant pour les grands sites que pour les communes petites ou moyennes et pour le milieu rural. L'emploi, l'aménagement du territoire et la survie même de certaines régions sont au cœur de nos préoccupations. Au-delà des professionnels, que vous avez mentionnés, il nous faut savoir rendre hommage à tous les bénévoles qui, dans les associations, les offices du tourisme, les lieux culturels et les lieux de patrimoine, font eux aussi vivre le tourisme dans notre pays.

Mais le tourisme a aussi une dimension sociale. Il doit être ouvert au plus grand nombre sur notre territoire et, au moment même où nous allons engager la discussion sur une loi de cohésion sociale et débattons d'une loi sur les personnes handicapées, des préoccupations demeurent. Elles portent, tout d'abord, sur l'accès aux vacances des personnes handicapées, qui sont pour le Président de la République comme pour le Parlement un chantier prioritaire. Comment entendez-vous sensibiliser mieux les prestataires du tourisme à l'accueil des personnes handicapées ? Le label « Tourisme et Handicap » a-t-il entraîné une véritable mobilisation, et celle-ci est-elle suffisante ? L'accessibilité des sites, plages ou monuments a-t-elle progressé au cours des dernières années ? Au même titre que les enfants handicapés doivent être accueillis à l'école - c'est une des priorités qu'exprime la loi que nous examinons -, quels sont vos objectifs pour que les enfants handicapés, qu'ils soient accueillis dans des écoles ou des établissements spécialisés, puissent aussi avoir accès à des vacances ?

Pour ce qui concerne le tourisme social, devant les inquiétudes exprimées à propos des centres et villages de vacances, maisons familiales, centres sportifs ou auberges de jeunesse dont le rôle est très important, quels éléments nouveaux pouvez-vous apporter quant aux autorisations de programme et crédits de paiement ?

Enfin, que pouvons-nous faire de plus pour permettre aux 36 % de Français - soit 22 millions de personnes - qui ne partent pas en vacances de profiter aussi du tourisme, c'est-à-dire du cadre admirable de notre territoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué au tourisme. Monsieur le député, je crois comme vous que les bénévoles méritent d'être félicités pour leur action importante. Premières personnes que l'on rencontre dans les offices du tourisme, ils sont, en effet, comme une porte d'entrée pour les visiteurs qui prennent ensuite plaisir à découvrir notre beau pays.

Pour ce qui est de l'accueil des personnes handicapées dans les établissements hôteliers, nous avons conforté le label « Tourisme et Handicap », mis en place en 2001, qui était une très bonne idée et dont nous avons fait une norme nationale lors du comité interministériel du 9 septembre 2003. Il faut aller beaucoup plus loin, dans deux directions : permettre à l'association actuellement responsable de ce label d'assurer la sensibilisation des collectivités territoriales - notamment des régions, avec lesquelles des discussions sont en cours - et mettre en place un groupe de travail destiné à rendre beaucoup plus opérationnels ces critères et à rechercher les financements permettant de faciliter l'instruction de ce dossier.

J'espère, je le répète, avoir le plaisir de délivrer avant la fin de l'année le millième label « Tourisme et Handicap ». Le mouvement est enclenché et s'amplifie : il faut l'encourager. Il va de soi, par ailleurs, que la notion de « Tourisme et Handicap » concerne toutes les personnes handicapées : adultes et enfants.

Enfin, vous rappelez à juste raison qu'il faut amplifier l'action en direction des familles. Tel est bien l'objectif que nous poursuivons en réformant BSV et l'ANCV afin de rendre ces deux outils encore plus efficaces pour amplifier l'action sociale en direction, principalement, des familles. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Binetruy.

M. Jean-Marie Binetruy. Monsieur le ministre, mes chers collègues, avec un montant de 74,6 millions d'euros, soit une augmentation de 6,38 % par rapport au budget initial de 2004, le budget 2005 pour le tourisme est ambitieux. Il s'organise autour de trois axes : la promotion de l'image touristique de la France, le renforcement de l'économie du tourisme, qui représente 100 000 emplois potentiels annuels et l'engagement en faveur de l'accès aux vacances pour tous.

Comme plusieurs des orateurs qui m'ont précédé, dont Michel Lejeune - il n'y a pas que les élus de gauche qui se préoccupent du tourisme social ! - je déplore toutefois un point sur lequel vous avez déjà répondu, mais que je reprendrai avec une nuance différente : la quasi-absence d'abondement, avec 1 million d'euros seulement, de la ligne budgétaire consacrée au programme de consolidation des hébergements de tourisme social, jusqu'à présent abondée chaque année depuis 1989 et dotée, en 2004, de 3,415 millions d'euros. Serait-ce l'abandon des structures remplissant une mission de tourisme social ?

Ainsi, certaines maisons familiales rurales, structures éducatives pour jeunes qui se destinent aux métiers agricoles et lieux d'insertion, voire de réinsertion, dont le travail très positif est unanimement reconnu, ont souhaité diversifier leur offre de services en développant un pôle touristique évidemment orienté vers le tourisme social.

Pour cela, elles se sont mises aux normes, ont adapté leurs équipements, permettant ainsi à des personnes disposant de faibles moyens d'accéder aux joies du loisir. De plus, elles ont favorisé la création d'emplois, le maintien d'une présence en zone rurale, tout en assurant leur promotion.

Aujourd'hui, le projet qui nous est présenté suscite des inquiétudes pour certaines de ces maisons, mais aussi pour l'économie des territoires ruraux. Aussi, monsieur le ministre, je souhaite connaître vos intentions en la matière - même si vous nous les avez déjà esquissées - pour que ces structures participant au tourisme social soient pérennisées et rassurées. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué au tourisme. Monsieur Jean-Marie Binetruy, je répète que des discussions sont en cours aujourd'hui avec M. Nicolas Sarkozy comme avec M. Dominique Bussereau, pour que la piste de l'utilisation des excédents dégagés par l'ANCV soit utilisée pour abonder la ligne hébergement du tourisme social, à la fois en autorisations de programme et en crédits de paiement. Nous espérons obtenir 2 millions d'euros supplémentaires.

Nous sommes bien conscients qu'au-delà du tourisme social, qui permet d'apporter une réponse très claire à la demande de personnes qui, comme tout le monde, ont le droit d'aller en vacances, il y a aussi l'aménagement du territoire. Certaines zones n'auraient pas pu, sans ce type d'hébergement, trouver un moyen de développement local. Et nous savons aussi que c'est une façon de lutter contre la hausse des prix, parce que si un équipement bénéficie d'une aide publique, on peut toujours, au final, proposer des prix intéressants.

Ce sont toutes ces raisons qui font que nous sommes très attentifs à ce problème et que lors de la loi de finances rectificative, nous pourrons certainement vous présenter la solution que vous souhaitez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Pour le groupe des député-e-s communistes et républicains, la parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Monsieur le ministre, vous avez répondu scrupuleusement à nos interrogations et je voulais vous en remercier. Mais mes questions vous permettront, sans aucun doute, d'apporter quelques précisions.

Ma première question concerne les dotations touristiques, c'est-à-dire le soutien de l'État aux communes touristiques. Les municipalités et les stations classées comme communes touristiques se voyaient garantir, jusqu'en 1993, des dotations supplémentaires au titre de charges inhérentes à la fréquentation touristique. Ces ressources supplémentaires ont été intégrées, en 1993, au sein de la nouvelle dotation forfaitaire de la DGF. Les communes bénéficiaires de ces dotations touristiques ont donc continué à en bénéficier. Mais les communes qui se sont depuis lors fortement engagées dans le développement touristique ont été exclues du dispositif. Les dotations de l'État n'ont, de fait, pas suivi la forte augmentation des charges inhérentes à l'augmentation des capacités d'accueil et de fréquentation des touristes qu'ont dû supporter ces nouvelles communes à vocation touristique. Je précise qu'il s'agit souvent de communes rurales, au sein de territoires dont le développement, voire la survie, dépend en grande partie de l'économie touristique.

Le projet de loi de finances pour 2005 intègre une nouvelle réforme de la DGF : le régime de la dotation forfaitaire est encore simplifié puisqu'il ne devrait reposer, à terme, que sur des critères de population et de superficie. Aussi avons-nous toutes les raisons de craindre que les communes à vocation touristique, qu'elles bénéficient ou pas de dotations supplémentaires d'ailleurs, fassent les frais de cette simplification.

En effet, un décret en Conseil d'État devra fixer les modalités de prise en compte de la population pour la DGF. Mais s'il est prévu de prendre en compte l'intégralité des variations de population dans le calcul de la dotation forfaitaire, rien n'est dit spécifiquement pour les communes à vocation touristique.

Monsieur le ministre, ma question est donc simple : le Gouvernement a-t-il prévu un dispositif, au sein de la nouvelle DGF, permettant de couvrir une partie des charges inhérentes à l'activité touristique pour toutes les communes concernées, notamment celles qui ne sont pas éligibles à la DGF touristique du fait de la réforme de 1993 ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué au tourisme. Monsieur André Chassaigne, je crois avoir plus ou moins répondu à cette question lorsque je me suis adressé à Michel Bouvard. J'ai dit à M. Léonce Deprez que c'était une question complexe. Je sais bien qu'il y a une différence entre les communes qui bénéficiaient déjà d'une dotation touristique, aujourd'hui intégrée dans la DGF, et les nouvelles communes qui arrivent dans ce dispositif. L'écart se creuse. Je suis aussi conscient qu'il y a également d'autres instruments financiers, comme la taxe de séjour, mais qui pour l'instant est mal assise compte tenu du fait que beaucoup de communes bénéficient de cette recette touristique générée par quelques-unes. Il y a donc toute une réflexion à mener en ce domaine.

C'est la raison pour laquelle nous sommes en train de travailler, avec le ministre de l'intérieur, sur les problèmes de la dotation touristique telle qu'elle existe aujourd'hui. Mais je ne peux pas du tout les dissocier de ceux de la taxe de séjour.

En tout cas, c'est un sujet qui me préoccupe et que je suis de très près.

M. le président. Pour une seconde question, la parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Ma seconde question concerne l'Agence nationale des chèques-vacances. Je vous rappelle que cet établissement public permet chaque année à plus de deux millions et demi de salariés de partir à moindres frais en vacances. La diffusion de chèques-vacances est d'abord une aide sociale. Elle contribue aussi fortement au développement de l'économie nationale : en 2004, les 900 millions d'euros de chèques-vacances émis généreront plus de 4 milliards d'euros de recettes touristiques. Leur utilité économique et sociale pourrait être encore renforcée si l'accès à ces chèques-vacances était étendu aux salariés des PME. Mais je l'ai déjà dit, votre gouvernement s'est clairement opposé à cette idée.

M. Jean-Michel Couve, rapporteur pour avis. C'était votre gouvernement, pas le nôtre !

M. André Chassaigne. Si, je parle de l'amendement de notre collègue Bouvard, qui a été renvoyé aux calendes grecques alors qu'il aurait permis pour partie, monsieur le ministre, de régler ce problème.

Récemment, l'ANCV a externalisé le service chargé de la lecture des chèques. Celui-ci avait été internalisé en 1998, à la suite des préconisations répétées de la Cour des comptes. Il semble aussi - je tiens bien entendu ces informations de personnes travaillant au sein de cette agence - qu'il y ait des procédures de licenciement en cours. On m'a parlé d'une dizaine de licenciements pour motif personnel en un an, officiellement pour faute. Il y a même un syndicaliste qui serait aujourd'hui menacé.

M. Léonce Deprez. C'est un fantasme !

M. André Chassaigne. Et nous avons la crainte qu'il s'agisse là d'une stratégie de déstabilisation de l'Agence dans son ensemble. Tout cela se passe au moment - nous avons été plusieurs à le souligner - où la presse nationale se fait l'écho de projets de changement de statut de l'ANCV pouvant conduire à sa privatisation en faveur de certains groupes dominants dans l'hôtellerie et la restauration.

Vous avez vous-même annoncé, monsieur le ministre, lors du dernier comité interministériel du tourisme, le dépôt d'un projet de loi pour le tourisme qui pourrait, selon moi, intégrer le changement de statut des chèques-vacances.

Aussi, monsieur le ministre, ma question est en trois points. Soutenez-vous cette stratégie qui orienterait l'ANCV vers une privatisation rampante, par démembrements successifs de cette institution ? Allez-vous porter le coup de grâce au tourisme social, en imposant le changement de statut de cet établissement public ? Quelles garanties pouvez-vous nous donner quant au maintien du caractère public et social de la mission de l'ANCV ?

Ces trois points qui tiennent en une seule question ne donneront peut-être lieu qu'à une seule réponse.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué au tourisme. Je serai très clair, une fois de plus : aucune privatisation n'est prévue. C'est vrai que nous avons externalisé le traitement des chèques. Il s'agit, tout simplement, d'une pure opération de gestion qui permet, justement, à l'ANCV de mieux assurer sa vocation sociale en étant beaucoup plus efficace dans le traitement des chèques.

Vous avez évoqué, au début de votre intervention, la question de l'élargissement de l'accès aux chèques de l'ANCV aux salariés des petites et moyennes entreprises, de moins de cinquante salariés. Vous avez fait référence à un amendement qui n'a pas été retenu. Ce n'est pas une catastrophe car c'est un problème de méthode et non de fond qui se pose. M. Dominique Bussereau a pris l'engagement, et nous sommes en train d'y travailler actuellement, de reprendre la discussion de façon beaucoup plus sereine avec Michel Bouvard pour trouver une solution répondant aux intérêts des uns et des autres. Car il s'agissait, malgré tout, d'une dépense brutale de 430 millions d'euros. Il y a d'autres façons beaucoup plus progressives d'arriver à étendre le bénéfice des chèques-vacances, et nous allons y parvenir. Notre objectif étant, effectivement, de permettre aux salariés des entreprises de moins de cinquante personnes de pouvoir eux aussi en bénéficier. Je répète qu'il n'y a pas du tout de privatisation dans l'air.

S'agissant des cas de licenciement que vous avez évoqués, ils n'ont rien à voir avec un plan social. Il y a des règles dans une administration, et lorsqu'elles ne sont pas suivies, il est tout à fait normal que toutes les procédures prévues soient engagées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en venons à la question du groupe Union pour la démocratie française.

La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. Monsieur le ministre, excusez-moi d'appuyer là où ça fait mal, mais je vais revenir sur cette ligne non abondée du programme de consolidation des hébergements du tourisme social. Voyez-y la volonté de vous aider dans vos négociations avec Bercy.

En effet, 3, 415 millions d'euros qui disparaissent, c'est tout de même plus qu'un symbole. D'autant que, depuis 1989, tous les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, avaient doté ce programme qui participe aux actions de cofinancement des collectivités territoriales. En n'abondant plus cette ligne budgétaire, vous amputez donc le plan d'aide aux rénovations du patrimoine d'une partie de ses ressources. Or, sur le terrain, on sait l'importance de ces aides : elles constituent une sorte de coup de pouce qui rend les choses possibles. Nous ne pourrons pas résoudre ce problème avec le simple recours à l'emploi.

Cette mesure est vraiment en contradiction avec l'attention portée par le Gouvernement et les pouvoirs publics à l'industrie du tourisme et à la possibilité pour tout le monde, notamment les personnes plus fragilisées, les personnes isolées, d'y avoir accès.

Monsieur le ministre, très sincèrement, quelles sont les chances que la négociation avec Bercy que vous annoncez aboutisse ? Dans le cas contraire, quelles mesures envisageriez-vous de prendre ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué au tourisme. Monsieur Leteurtre, je vous réponds sincèrement que la discussion en cours a toutes les chances d'aboutir. Car il est impensable, dans la situation budgétaire actuelle, de laisser dormir dans les tiroirs des sommes importantes, qui tournent autour de 23 millions d'euros. Pour l'instant, nous n'avons besoin que de 2 ou 3 millions. Tout cela me fait penser et m'autorise à dire que nous allons certainement trouver très rapidement une solution. Le fait même que vous soyez aussi nombreux ce soir à me poser la question me conforte dans cette démarche et je vous en remercie.(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.

Les crédits du tourisme seront mis aux voix à la suite des crédits de l'aménagement du territoire.

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

    3

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. À vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005, n° 1800 :

Rapport, n° 1863, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Formation professionnelle ; article 75 :

Rapport spécial, n° 1863 annexe 5, de M. Jean-Michel Fourgous au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Avis, n° 1864 tome 3, de M. Christian Paul, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quarante-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot