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Première séance du mercredi 10 novembre 2004

51e séance de la session ordinaire 2004-2005



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

RÉINTÉGRATION DES SALARIÉS DE WOLBER

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le Premier ministre, vendredi, le conseil de prud'hommes de Soissons a qualifié d'illicite la procédure de licenciement économique collectif qui avait jeté à la rue, en juillet 1999, 451 salariés de l'usine Wolber, filiale à 99,9 % du groupe Michelin, en raison d'irrégularités dans la consultation du comité d'entreprise. En 2002, déjà, le juge avait condamné le plan de restructuration au motif qu'il « n'avait en réalité pour but que d'améliorer la compétitivité de ce secteur ». La condamnation du licenciement économique, jugé alors sans cause réelle et sérieuse, est confortée aujourd'hui par celle du caractère illicite de la procédure de licenciement.

Ces jugements, dont l'un a déjà été confirmé par la cour d'appel, doivent vous faire réfléchir et surtout vous amener à revenir sur les articles relevant de M. Larcher dans le projet de loi dit de cohésion sociale, qui effaceraient quinze ans d'élaboration de droits protecteurs pour les salariés. Ainsi, les employeurs auraient la possibilité de contourner les obligations liées au plan de sauvegarde de l'emploi pour échapper aux recours en annulation de l'ensemble de la procédure de licenciement. Les dispositions de la loi de modernisation sociale suspendues par la loi Fillon - droit d'opposition, recours à un médiateur, à un expert, étude d'impact social et territorial, négociations sur la RTT - seraient définitivement abrogées. Bref, toutes les mesures que M. Larcher propose n'ont qu'un but : éviter tout recours en justice contre la procédure et le plan de sauvegarde de l'emploi.

Si vous persévérez, il n'y aura plus de plan social illicite ni de licenciement économique abusif condamné. Au nom de notre groupe, j'ai déposé une proposition de loi interdisant les licenciements boursiers, et Maxime Gremetz une proposition de loi pour lutter contre les délocalisations. Mais vous n'entendez que la voix du MEDEF ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Il y a longtemps que vous n'en aviez pas parlé !

M. Jacques Desallangre. Entendrez-vous celles des hommes et des femmes qui n'ont plus de travail depuis 1999, et plus d'usine, car M. Michelin l'a fait raser en hâte après avoir transféré la production en Inde ? M. Michelin qui a vu, en 2003, ses profits augmenter de 20 % et son salaire de 144 % !

Allez-vous user de votre influence pour que la recommandation du tribunal de Soissons soit effective et que des renégociations interviennent immédiatement, comme il le demande, sur la réintégration du personnel injustement licencié ?

Si vous nous répondez oui, alors nous pourrons espérer que M. Larcher ne défendra pas devant l'Assemblée nationale des articles menant à une régression sociale d'une iniquité sans précédent. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux relations du travail.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail. Monsieur le député, le conseil des prud'hommes de Soissons vient d'ordonner la réintégration de 115 salariés licenciés en 2000 lors de la fermeture de l'usine Wolber à Soissons.

M. Maxime Gremetz. Bravo !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Il n'appartient pas au Gouvernement de commenter une décision de justice prud'homale, a fortiori lorsqu'elle n'est pas définitive et qu'on n'en connaît pas encore la totalité des motifs.

Je me bornerai à observer que ces décisions contredisent partiellement les arrêts rendus le 7 octobre 2003 par la cour d'appel d'Amiens dans la même affaire.

M. Maxime Gremetz. Pas du tout !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Dans les deux cas, mais apparemment pas pour les mêmes raisons, les juges ont considéré que la procédure de licenciement était entachée d'irrégularité et devait, pour ce motif, être annulée. Mais ils en ont tiré des conséquences différentes : le conseil des prud'hommes a ordonné la réintégration des salariés au niveau du groupe ; la cour d'appel avait constaté, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, que la fermeture de l'entreprise rendait matériellement impossible la réintégration des salariés. Elle avait donc ordonné le versement d'indemnités.

Ce feuilleton judiciaire n'est sans doute pas encore achevé. L'affaire Wolber montre, à mon sens, les effets pervers de la judiciarisation excessive de la gestion des restructurations dans notre pays. (Vives protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et de nombreux bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Desallangre. C'est scandaleux !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Voici des salariés qui ont été confrontés, il y a de cela cinq ans, avec l'angoisse que l'on peut imaginer, à la fermeture de leur entreprise. Après des années de contentieux, ils se voient maintenant reconnaître a posteriori le droit de réintégrer un établissement aujourd'hui disparu.

M. Maxime Gremetz. Non : l'usine, pas l'établissement !

M. le ministre délégué aux relations du travail. C'est là une perspective pour le moins évanescente.

Heureusement, la très grande majorité d'entre eux ont depuis longtemps retrouvé un emploi.

M. Jacques Desallangre. Ce n'est pas vrai !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Sur les 450 personnes concernées en 1999, dix-huit à ce jour, malheureusement, n'ont pas trouvé de solution de reclassement. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Je suis convaincu que la décision de réintégration, des années plus tard, dans une usine fantôme, ne peut être une réponse appropriée aux mutations économiques. (Protestations sur les mêmes bancs.)

M. Jacques Desallangre. C'est le MEDEF qui parle !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Aux procédures et aux conflits, ne faut-il pas préférer l'action en amont, c'est-à-dire l'anticipation par la négociation ? Ne faut-il pas préférer l'accord au procès ? C'est l'article 37 du plan de cohésion sociale dont nous aurons l'occasion de discuter. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

ACTION DU GOUVERNEMENT POUR LA CORSE

M. le président. La parole est à M. Camille de Rocca Serra, pour le groupe UMP.

M. Camille de Rocca Serra. Monsieur le Premier ministre, depuis 2002, le Gouvernement a lancé de nombreux chantiers en faveur de la Corse dans les domaines économique, social et culturel. Vendredi dernier, vous êtes venu de nouveau sur notre île de beauté. Ce déplacement vous a donné l'occasion de confirmer l'attachement du Gouvernement à mobiliser les énergies et les moyens pour aider la Corse à traverser les difficultés qu'elle rencontre et lui assurer un avenir prometteur. En effet, pour compenser les handicaps liés à l'insularité et à ses spécificités, en matière culturelle, agricole ou artisanale, la Corse et ses collectivités locales ont besoin d'un véritable partenariat avec l'État. Ainsi, compte tenu des particularités de l'université de Corse, l'action déjà engagée en faveur de sa promotion doit être poursuivie.

Lors de votre visite, vous avez confirmé les engagements du Gouvernement en faveur de notre île et insisté plus particulièrement sur les dossiers du développement économique et de l'emploi. Dans cet esprit, vous avez annoncé que l'État tiendrait ses promesses pour l'exécution du plan exceptionnel d'investissement et sur le financement de sa part contributive au contrat de plan, afin de combler les retards que connaît la Corse en matière d'infrastructures.

Pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, éclairer la représentation nationale sur les principes qui guident la politique économique et sociale de votre gouvernement en Corse et sur les actions concrètes qui seront engagées pour développer notre île ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Michel Delebarre. Belle question !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, je réponds volontiers à votre question. (« Allô ! Allô ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Brard. Bien sûr, vous l'avez écrite !

M. le Premier ministre. Trois principes clairs et simples guident l'action de la République pour la région Corse.

Premièrement, le respect de l'État de droit. J'approuve sans réserve l'action menée avec fermeté et responsabilité par Dominique de Villepin en Corse,...

Plusieurs députés du groupe socialiste. Et Sarkozy ?

M. le Premier ministre. ...pour que les Corses aient le droit, comme tous les Français, à la sécurité dans notre République. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous ferons respecter l'État de droit en Corse. C'est un élément essentiel de notre politique.

Deuxièmement, nous avions proposé une évolution institutionnelle. Les électeurs de Corse ont répondu...

M. Michel Delebarre et M. Alain Néri. Non !

M. le Premier ministre. ...à cette question. J'ai décidé, puisqu'il en était ainsi, que le respect de la démocratie imposait aux autorités de la République la stabilité des institutions en Corse. Il n'est donc pas prévu de réforme institutionnelle pour cette région.

M. Christian Bataille. C'est un scoop !

M. le Premier ministre. Troisième principe : il faut assurer le développement économique et social. C'est pour cela que l'État tiendra sa parole. Nous avons augmenté les dotations de façon que la signature de l'État, notamment en ce qui concerne les contrats de plan, pour la région de Corse comme pour toutes les autres régions de France, soit respectée. Elle le sera pour les dossiers d'infrastructures, auxquels je vous sais très attaché, pour le dossier agricole et pour celui de l'université de Corte.

Je voudrais saluer le sens des responsabilités de la collectivité territoriale corse. Et j'associe à cet hommage M. Zuccarelli (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste), qui a su faire preuve de courage et de dignité, alors qu'il a été victime d'attentats, montrant ainsi que l'avenir de la Corse mérite l'attention de la République, mais mérite aussi que l'État veille à ce qu'en Corse on respecte les principes républicains. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

AFFECTATION DU PRODUIT DE LA JOURNÉE NATIONALE DE SOLIDARITÉ

M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal, pour le groupe socialiste.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, vous avez instauré pour les seuls salariés une journée de travail supplémentaire non payée. Vous rencontrez maintenant de grandes difficultés pour en fixer la date. Par ailleurs, l'ensemble des acteurs concernés se trouve dans une très grande incertitude quant au fonctionnement de la future Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, créée pour répartir ces nouveaux prélèvements.

Pour les personnes âgées en perte d'autonomie, je veux comparer à vos annonces les chiffres inscrits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, que l'Assemblée vient d'adopter en première lecture. La comparaison est éloquente : vous augmentez de 200 millions d'euros seulement les aides destinées à nos aînés alors que vous vous étiez engagé sur trois fois plus. Le prélèvement basé sur la journée de travail supplémentaire pour les personnes âgées et les personnes handicapées sera perçu dans son intégralité, mais l'engagement de solidarité en leur faveur sera d'un montant bien inférieur. Vous faites ainsi des économies pour vous constituer une cagnotte ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

En fait, chaque lundi de Pentecôte, les salariés ne travailleront pour la solidarité qu'une partie de la journée. Pour l'essentiel, leur travail servira à combler les déficits de l'assurance maladie, que vous n'avez cessé de creuser depuis 2002 !

Depuis plusieurs semaines, nous vous posons en vain la question suivante : allez-vous affecter à l'amélioration de la vie des personnes âgées et des personnes handicapées l'ensemble de l'argent des Français prélevé à cette fin ou bien allez-vous les en priver pour financer vos déficits ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. la secrétaire d'État aux personnes âgées.

Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'État aux personnes âgées. Madame la députée, la loi du 30 juin dernier a créé la CNSA. Comme vous le savez, nous avons prévu une contribution de 0,3 % des entreprises et des administrations, ainsi qu'une contribution du même taux sur les revenus du patrimoine. C'est l'ensemble de ces contributions, soit un effort de 2,1 milliards d'euros, qui sera affecté aux personnes handicapées et aux personnes âgées.

Ce budget sera réparti à raison de 850 millions d'euros pour les personnes handicapées et autant pour les personnes âgées, tandis que 400 millions d'euros serviront à financer l'APA - dispositif que vous avez créé mais qui n'avait pas été financé, permettez-moi de vous le rappeler ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Cette caisse, le Premier ministre et le ministre de la santé l'ont rappelé, sera opérationnelle dès la fin de cette année. La volonté du Gouvernement est claire : pas un euro ne devra manquer au financement de la dépendance, tant pour les personnes handicapées que pour les personnes âgées. Marie-Anne Montchamp et moi-même aurons à cœur, avec Philippe Douste-Blazy, de faire respecter ce principe.

Assurer, en le finançant, l'accompagnement de la dépendance, c'est montrer que notre pays est conscient des enjeux de sa démographie. Le Président de la République et le Premier ministre l'ont voulu, nous le faisons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

FISCALITÉ ET RESSOURCES
DES COLLECTIVITÉS LOCALES

M. le président. La parole est à M. Michel Hunault, pour le groupe UDF.

M. Michel Hunault. Monsieur le Premier ministre, une semaine avant le congrès de l'Association des maires de France, ma question portera sur la fiscalité locale, qui suscite l'inquiétude des élus. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Le Gouvernement a annoncé la suppression de la taxe professionnelle et, plus récemment, le chef de l'État celle de la taxe sur le foncier non bâti, qui sont pour les collectivités locales des ressources importantes. Vous-même avez pris, à l'occasion de la récente loi de décentralisation, des engagements clairs pour assurer à la fois l'autonomie des collectivités locales et leurs ressources financières.

Pouvez-vous préciser devant la représentation nationale quelles sont les ressources auxquelles pourront prétendre les collectivités locales après la suppression de la taxe professionnelle et de la taxe sur le foncier non bâti ? Au moment où les élus doivent préparer le budget pour 2005 et où la loi prévoit l'organisation de débats d'orientation budgétaire, cette incertitude doit être levée. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Sauvadet et M. Michel Delebarre. Excellente question !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement. Vous avez raison, monsieur Hunault, d'évoquer l'inquiétude légitime des élus locaux qui, il faut le reconnaître, ont été échaudés, notamment dans les années 90, par certaines mauvaises surprises. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Certaines compétences qui leur tombaient du ciel sans être financées rendaient difficile la préparation de leurs budgets. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Roman. Ces arguments ne passent plus !

M. le ministre délégué à l'intérieur. La réflexion à laquelle nous a invités le Président de la République pour moderniser la fiscalité locale est indispensable. On sait, en effet, que la taxe professionnelle pénalise l'emploi et l'investissement tandis que la taxe sur le foncier non bâti est plutôt un handicap pour la défense de la ruralité.

Dominique Bussereau et moi-même travaillons activement sur ces questions, et je puis vous garantir que certains principes seront intégralement respectés. D'abord, dans le cadre de la décentralisation, le transfert des moyens se fera à l'euro près.

M. Bernard Roman. Ce n'est pas vrai ! Et le RMI ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Ensuite, l'autonomie financière sera respectée - c'est le sens de la loi organique qui aurait été si utile lorsque la gauche décentralisait, un peu vite, sans se soucier du financement. Enfin, ce dispositif sera mis en œuvre dans la plus grande concertation, qu'il s'agisse de la taxe professionnelle, dans le cadre de la commission présidée par M. Olivier Fouquet, ou de la taxe sur le foncier non bâti, avec celle que préside M.  Jean Arthuis. Dominique Bussereau et moi-même nous attacherons à travailler étroitement avec les élus de toutes les sensibilités politiques (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.), car nous tenons à ce que se rétablissent avec les collectivités locales des relations de confiance, témoignant de notre considération.

Le premier témoignage en sera l'augmentation importante des dotations versées aux collectivités locales, qui sera de 3,3 % cette année. Voilà ce qui s'appelle tenir parole ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

POLITIQUE EUROPÉENNE
EN MATIÈRE DE DROIT D'ASILE ET D'IMMIGRATION

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Guibal, pour le groupe UMP.

M. Jean-Claude Guibal. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, les flux migratoires sont une des tendances lourdes de notre époque et se situent à la croisée des dérives qui préoccupent les pays européens.

Déjà, en 1999, à Tampere, en Finlande, les dirigeants de l'Union européenne avaient lancé la construction d'un espace européen de liberté, de sécurité et de justice. Vendredi dernier, à Bruxelles, ils ont adopté un nouveau plan de cinq ans destiné à renforcer, d'une part, les politiques communes d'asile et de lutte contre l'immigration clandestine et, d'autre part, la collaboration policière et judiciaire entre les États membres.

En matière de droit d'asile, l'objectif est de doter les vingt-cinq pays membres de l'Union européenne d'une procédure commune d'ici à 2010. Il s'agit d'éviter que des pays plus accueillants que d'autres ne servent d'accès à l'ensemble des pays de l'Union.

Pour ce qui est de la lutte contre l'immigration illégale, l'accent est mis sur une coopération accrue avec les pays d'origine et de transit. Il s'agit en particulier d'empêcher les clandestins de traverser la Méditerranée et, pour cela, d'aider les pays du Maghreb à contrôler leurs frontières. Il s'agit aussi d'aider ces pays à se développer et à créer des emplois pour fixer leurs populations et tarir leur flux migratoire.

Pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, comment cette politique européenne va se mettre en place et s'articuler avec la politique française en la matière ? Pouvez-vous, à titre subsidiaire, nous dire si, dans le domaine de l'immigration, vous estimez que des coopérations devraient être rendues plus faciles ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, le droit d'asile est un grand enjeu et la France veut être à la hauteur de sa mission. Cela implique, bien sûr, un devoir d'humanité. Cela implique aussi, compte tenu du nombre de demandeurs économiques qui veulent contourner ce droit d'asile, une exigence de fermeté. C'est pour cela que nous avons voulu réduire les délais d'instruction des dossiers. S'ils ont été ramenés à trois mois pour l'OFPRA, ils sont encore de dix-huit mois pour la commission de recours des réfugiés. Mais le Premier ministre a débloqué les moyens nécessaires - 150 emplois supplémentaires - pour que nous puissions réduire rapidement le temps d'instruction à six mois pour l'ensemble de la procédure.

Il faut cependant aller plus loin au niveau européen, en définissant des critères communs : c'est tout l'intérêt d'une liste de pays sûrs qui permettra une instruction plus rapide ; c'est aussi celui de moyens de contrôle communs, en particulier la prise des empreintes digitales de tous les demandeurs d'asile en Europe, qui permettra d'éviter les doubles demandes ou les demandes simultanées.

Il faut aller plus loin encore - et vous avez évoqué le grand projet d'une politique d'immigration européenne. Dans ce domaine, la France a pris des positions de principe fortes et avancé des propositions. Nous refusons une politique d'immigration qui se réduirait à des centres de transit dans les pays d'accueil du Maghreb, car ils constitueraient des abcès de fixation inacceptables. Il faut une grande politique d'immigration, liée à une grande politique de coopération, avec des efforts de co-développement, un appui personnalisé aux projets et la possibilité de fixer dans ces pays d'origine et dans les pays sources ceux qui veulent venir chez nous.

Nous avançons dans cette voie : dans le cadre du G5, nous faisons des propositions et expérimentons entre nous un certain nombre d'idées qu'il faudra ensuite généraliser. Déjà, le dernier Conseil européen a marqué une étape. Après Tampere, La Haye II marquera, pour cinq ans, notre volonté de relever le grand défi d'une immigration maîtrisée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

PLAN PÉRINATALITÉ

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, pour le groupe UMP.

M. Jean-Michel Dubernard. Monsieur le ministre de la santé, voici enfin ce plan périnatalité qui était tant attendu et qui améliorera la qualité des soins entourant la naissance, pour l'enfant comme pour sa mère, dix ans après le plan gouvernemental que vous aviez mis en œuvre, six ans après les décrets de 1998 et, s'il m'est permis de le citer, six mois après le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé.

Enfin car, chaque année, en France, soixante-dix femmes meurent encore en couches, cinq mille enfants meurent dans la période qui entoure la naissance et quinze mille naissent avec un handicap qui marquera leur vie et celle de leur famille. La France se situe au huitième rang européen pour la mortalité périnatale et au onzième rang pour la mortalité maternelle. Voici enfin un plan précis, concret et financé, celui que vous avez présenté ce matin, avec Mme Montchamp, à l'hôpital Tenon.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous en indiquer les grands axes, pour que nous sentions que le Gouvernement s'attaque résolument à ce véritable problème de santé publique ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur le président Dubernard,...

M. Christian Bataille. Merci de votre question ! ...

M. Jean-Pierre Brard. On n'est jamais aussi bien servi que par soi-même !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...vous l'avez rappelé, la France est au huitième rang des pays de l'Union européenne pour la mortalité périnatale et au onzième rang pour la mortalité maternelle. Ce sont de mauvais chiffres, devant lesquels une seule réaction s'impose : améliorer la sécurisation médicale des maternités, en particulier pour les accouchements à risques liés à des grossesses difficiles. Il faut pour cela obliger toutes les maternités à se mettre aux normes fixées par le ministère de la santé, pour le nombre de médecins, d'anesthésistes et de chirurgiens, mais aussi de sages-femmes et d'infirmières. Il faut également orienter vers des centres spécialisés toutes les grossesses à risques. Cela implique un plan qui vise à la fois les futures mamans et les enfants.

Pour les futures mères, il importe - et je sais, monsieur Dubernard, que vous y tenez - de faire en sorte que tous les obstétriciens soient des chirurgiens, pour qu'ils soient prêts à opérer immédiatement en cas d'hémorragie. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pour les nouveau-nés, il importe d'envoyer ceux qui connaissent des souffrances fœtales aiguës vers des centres de réanimation car, selon qu'une souffrance fœtale aiguë dure trois ou vingt minutes, la différence se traduit par un handicap à vie. Et vous qui êtes si bruyants aujourd'hui, du côté gauche de l'hémicycle, je suis désolé que vous ne l'ayez pas fait ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Enfin, monsieur Dubernard, ce plan périnatalité comble un retard important : il nous fallait être au rendez-vous de la sécurité pour les enfants et pour les mères. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

INÉGALITÉ DES HOMMES ET DES FEMMES
EN MATIÈRE DE RETRAITES

M. le président. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le groupe socialiste.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, votre récente réforme des retraites apporte chaque jour son lot de déceptions, particulièrement pour les femmes, dont les nombreux témoignages confirment les réserves et l'opposition que nous avions exprimées lors des débats qui se sont tenus ici même. Loin de réduire, comme vous le prétendiez, les inégalités qui existaient auparavant entre les hommes et les femmes, ces mesures contribuent au contraire à les accentuer. Le montant des retraites des femmes, inférieur de 40 % à ce qu'il est pour les hommes du fait des emplois à temps partiel non choisi et des inégalités de salaire, montre bien que la mise en œuvre de votre réforme marque un recul sans précédent pour les femmes. J'en veux pour preuve l'allongement de la durée de cotisation, qui précarise très fortement leur situation, ainsi que la perte par les femmes fonctionnaires du bénéfice de la bonification d'un an par enfant qui leur était accordée quel qu'ait été leur statut au moment de la naissance.

Ces situations injustes sont encore aggravées par la réduction scandaleuse du montant de la pension de réversion, qui concerne essentiellement les veuves, puisque 80 % des conjoints survivants sont des femmes.

Nous ne partageons pas cette conception d'une société qui accroît les disparités entre les hommes et les femmes. Il est inacceptable que, demain, en fin de carrière, après avoir travaillé durement tout en élevant leurs enfants, des femmes puissent se retrouver tout près du seuil de pauvreté.

Monsieur le ministre, face aux conséquences de la loi sur les retraites, vous aviez annoncé que de nouvelles propositions seraient formulées avant la fin octobre. Aujourd'hui, toujours sans réponse de votre part et devant la gravité de la situation, nous vous demandons ce que vous comptez faire pour procéder à une réelle modification de votre loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Madame la députée, s'agissant des pensions de réversion, je tiens d'abord à rappeler les deux améliorations dues à la loi de juillet 2003 portant réforme des retraites : la suppression des conditions relatives au remariage et l'abaissement des conditions d'âge. Cela permet à 200 000, voire 300 000 veufs de bénéficier d'une telle pension. Ce n'est pas vous qui l'avez fait (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), c'est nous, avec le Premier ministre ici présent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quant au décret, le Gouvernement l'a suspendu et a saisi le Conseil d'orientation des retraites, qui donnera son avis la semaine prochaine. Vous conviendrez avec moi que ce conseil est diversifié dans sa composition et qu'il donne toujours des avis consensuels. De plus, je tiens à souligner la compétence de ses membres.

Mme Martine David. Ça n'a rien à voir !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Dès lors que nous aurons son avis, nous entamerons une négociation avec les partenaires sociaux, avec les associations de veufs, de veuves et de retraités. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Albert Facon. Il fallait le faire avant !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ensuite, nous aviserons. Mais, d'ici là, j'affirme devant la représentation nationale qu'aucune des personnes qui touchent aujourd'hui une pension de réversion ne verra modifier sa situation financière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Leur pouvoir d'achat sera maintenu, contrairement à ce que vous essayez de faire croire, et leur sécurité financière ne sera pas touchée ; c'est la moindre des choses vis-à-vis de gens qui ont travaillé toute leur vie, en particulier vis-à-vis des femmes.

Enfin, je tiens à vous dire que ceux qui sont les plus dangereux pour les retraites, ce sont ceux qui n'ont rien fait pendant cinq ans, alors qu'ils auraient pu le faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

PRÉVENTION DES INONDATIONS
DANS LE BASSIN DU RHÔNE

M. le président. La parole est à M. Étienne Mourrut, pour le groupe UMP.

M. Étienne Mourrut. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'écologie et du développement durable.

Monsieur le ministre, il y a près d'un an, en décembre 2003, le Languedoc et la Provence ont subi à nouveau d'importantes intempéries, qui ont touché de plein fouet les départements du Gard et des Bouches-du-Rhône, et plus particulièrement seize communes de ma circonscription. Dans les jours qui suivirent, votre gouvernement, prenant à bras-le-corps les difficultés, a su décider les actions nécessaires à la gestion de la situation. Dès décembre 2003, M. le préfet de la région Rhône-Alpes a été désigné pour diriger une mission interrégionale afin de coordonner la réparation des digues du Rhône et de ses affluents, en débloquant 24 millions d'euros pour financer les travaux de première urgence, afin aussi de mettre en place les moyens nécessaires à l'élaboration d'une stratégie globale de prévention et de gestion des inondations dues à ce fleuve et à ses affluents.

Je salue la rapidité et l'efficacité du Gouvernement, des services de l'État, y compris de l'armée, que tous ont reconnues, au-delà des clivages politiques. En effet, grâce à l'intervention de l'État et des collectivités territoriales, c'est près de 95 % des dégâts occasionnés par ces inondations qui ont pu être réparés à ce jour, pour la plus grande satisfaction de tous les sinistrés et de tous les élus locaux.

Je vous serais reconnaissant, au nom des populations sinistrées et des élus locaux, de bien vouloir dresser le bilan des actions d'ores et déjà réalisées sur le terrain et, afin de rassurer les riverains qui ont, pour certains, le sentiment d'être sacrifiés, de nous informer des stratégies qui seront menées à moyen et long terme pour nous protéger des caprices du Rhône à l'avenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, la prévention des inondations et la protection des populations sont une priorité du Gouvernement. Il faut savoir, en effet, que deux millions de personnes, dans notre pays, sont concernées par des risques naturels majeurs.

Après les évènements de décembre 2003 à Arles, le Gouvernement avait décidé immédiatement deux types d'actions : les unes pour réparer les dégâts, les autres pour prévenir de nouvelles inondations.

En vue de réparer les dégâts, 24 millions d'euros ont immédiatement été débloqués pour des travaux de première urgence. Sur cette somme, 20 millions d'euros environ ont d'ores et déjà été engagés ou vont l'être dans les jours qui viennent. Il s'agit d'abord de réparer des digues pour protéger les populations. Je tiens à saluer le partenariat qui s'est instauré avec l'ensemble des collectivités territoriales pour réaliser ces travaux très rapidement.

En matière de prévention des inondations, il est évident que, pour être efficace, il faut élaborer une stratégie globale pour le Rhône. Le préfet de la région Rhône-Alpes en a été chargé. Cette stratégie se met en place et les acteurs concernés, les élus, sont directement consultés sur ce point. De nouveaux travaux de protection seront effectués. J'apporterai en particulier un appui financier à la construction d'une nouvelle digue pour protéger les quartiers nord d'Arles.

Au niveau national, la prévention des inondations est un axe très fort de notre politique. Nous réformons actuellement les services de prévision des inondations : il y aura vingt-deux services professionnels au lieu de cinquante-deux. De 2003 à 2007, 170 millions d'euros sont prévus pour financer les projets de prévention des inondations à l'échelle des bassins versants. Sachez que le Gouvernement suivra avec une extrême vigilance la mise en œuvre de cette politique qui, je le répète, concerne deux millions de personnes en France. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

OUVERTURE DU CAPITAL D'AREVA

M. le président. La parole est à M. Claude Birraux, pour le groupe UMP.

M. Claude Birraux. Après avoir réussi à faire voter en première lecture, à l'Assemblée et au Sénat, la première loi d'orientation sur l'énergie, après avoir réussi à faire voter la loi sur le changement de statut d'EDF...

M. Jacques Desallangre. Triste réussite !

M. Jean-Pierre Brard. Il n'y a pas de quoi se vanter !

M. Claude Birraux. ...rendu nécessaire par l'ouverture du marché de l'électricité et après avoir autorisé EDF à lancer le premier réacteur EPR, lui donnant ainsi un projet industriel pour le futur, le Gouvernement s'apprête, si l'on en croit la presse, à lancer l'ouverture du capital d'Areva. (« Hélas ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Areva est une entreprise performante, soumise à la concurrence dans un marché mondial étroit. Elle a prouvé un savoir-faire et une réactivité remarquables, en particulier aux États-unis où ses parts de marché dans la maintenance vont croissant.

Monsieur le ministre délégué à l'industrie, quelle part d'Areva sera mise en Bourse et selon quelles modalités ? Quelles garanties l'État entend-il prendre pour préserver un outil industriel aux technologies de pointe sensibles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur Claude Birraux, vous êtes un bon connaisseur de ces questions, et vous savez donc que l'ouverture du capital d'Areva n'est pas une nouveauté, puisque 4,5 % de son capital sont déjà en dehors du secteur public. Ce n'est pas non plus une surprise car, en 2001, lorsque le groupe Areva a été constitué à l'initiative de M. Jospin et de M. Fabius, un communiqué officiel prévoyait qu'une part du capital serait introduite, à terme, en Bourse. Nous tenons donc les promesses de nos prédécesseurs ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Christian Bataille et M. Gérard Bapt. C'est bien la première fois !

M. le ministre délégué à l'industrie. Il s'agit de porter de 4,5 % à environ 40 % la part du capital détenue par le marché. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) L'Etat restera donc majoritaire dans le capital d'Areva...

M. Jacques Desallangre. Pour combien de temps ?

M. le ministre délégué à l'industrie. ...et il est souhaitable qu'il le reste, d'abord en raison du caractère stratégique de l'énergie nucléaire, ensuite parce que la sûreté nucléaire relève du domaine de l'État.

M. Daniel Paul. On vend les bijoux de famille !

M. le ministre délégué à l'industrie. L'intérêt de cet élargissement de l'ouverture du capital, c'est qu'il permettra de donner davantage de cohérence à la filière nucléaire et de financer, comme prévu dès la constitution du groupe, les démantèlements de centrales, lesquels sont évidemment dans la vocation d'Areva.

Enfin, cette ouverture permettra d'asseoir la situation de leader mondial incontesté d'Areva en élargissant l'assise de son capital, sans pour autant l'endetter - ce qui serait très dangereux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

BUDGET DE LA SANTÉ ET LOI DE SANTÉ PUBLIQUE

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, pour le groupe socialiste.

M. Gérard Bapt. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et de la protection sociale (« Aïe ! Il est parti ! sur les bancs du groupe socialiste), mais il n'est plus là...

M. le président. Posez votre question. M. le secrétaire d'Etat à l'assurance maladie est présent.

M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, vous présenterez tout à l'heure, dans cet hémicycle, le budget de la santé et de la protection sociale, dans la foulée de la loi de santé publique adoptée en juillet, texte où est réaffirmée la primauté de l'État dans la définition et dans la mise en œuvre des politiques de santé publique.

Présentée en premier lieu comme une loi de programmation par votre prédécesseur, M. Mattei, puis seulement comme une loi d'orientation, elle apparaît aujourd'hui - mis à part ce qui concerne la lutte contre le cancer, priorité présidentielle oblige - comme une simple loi d'affichage. En effet, votre budget pour la santé publique est un budget de défausse vers l'assurance maladie, dont le déficit sera lui-même renvoyé sur les générations futures, qu'il s'agisse des actions de prévention, de l'investissement hospitalier, des établissements sanitaires et médico-sociaux pour les personnes âgées et les personnes handicapées, ou encore de la politique de solidarité pour l'accès aux soins des plus modestes.

Ainsi, un simple relèvement d'un euro, pour une personne seule, du forfait logement pour le calcul du plafond de ressources d'accès à la couverture maladie universelle complémentaire, va expulser de ce dispositif plusieurs dizaines de milliers de familles, parmi les plus démunies. Nous connaissions l'euro Raffarin sur les actes médicaux, nous aurons l'euro Raffarin bis sur la couverture maladie universelle. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quant au crédit d'impôt destiné à l'acquisition d'une assurance complémentaire par des familles modestes, il sera financé par les fonds sociaux de l'assurance maladie.

Alors, monsieur le ministre - je ne sais pas lequel ! -, estimez-vous que votre budget permet encore d'assurer la primauté de l'État en matière de santé publique, comme l'affirme la loi que vous avez fait voter, ou estimez-vous que la réforme de l'assurance maladie, notamment après la nomination de votre ancien directeur de cabinet au poste de directeur général de l'ensemble des caisses de sécurité sociale - le nouveau proconsul - assure une étatisation suffisante pour que la loi de santé publique ne soit pas déjà violée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Monsieur Bapt, je vous prie tout d'abord d'excuser M. Douste-Blazy, qui a dû gagner le Sénat pour y participer à un débat sur les prélèvements obligatoires qui a lieu en même temps que le nôtre.

Vous suivez depuis trop longtemps les questions de santé pour ne pas être averti de la réalité. Si tel est bien le cas, vous ne vous êtes livré qu'à un exercice de démagogie, vous n'avez récité qu'une litanie de contrevérités ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Vous n'avez pas le droit de dire ce que vous venez de dire à l'instant (« Si ! » sur les bancs du groupe socialiste) car, concernant les Français les plus modestes, je tiens à rappeler que le plafond d'éligibilité à la CMU va passer de 569 euros à 574 euros par mois. Qui plus est, vous savez très bien que ce que la majorité et le Gouvernement ont mis en place, c'est justement une aide pour les Françaises et les Français qui n'ont pas aujourd'hui de complémentaire santé. Ainsi, les deux millions de Français qui ont un revenu inférieur à 665 euros par mois mais supérieur au plafond de la CMU, vont pouvoir accéder à une complémentaire santé. Vous ne l'aviez même pas imaginé. Nous, nous l'avons fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je vois, monsieur Bapt, que vous avez souhaité préempter le débat de cet après-midi sur le budget de la santé. Vous avez certainement raison, parce que si ce sont là vos seuls arguments, la contribution de votre parti à ce débat risque d'être particulièrement pauvre. Je rappelle en effet que le budget de cette année est supérieur de 5 % à ce qu'il était en 2002 quand votre majorité était aux affaires. Il va nous permettre de développer des actions de santé publique dans le prolongement de la loi de santé publique...

M. Augustin Bonrepaux. Pour le moment, ce n'est pas glorieux !

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. ...votée cet été, la première depuis un siècle. Elle contient des mesures concernant la prévention et la mise en place du plan national de lutte contre le cancer. Le plan santé environnement, c'est aussi une réalité, monsieur Bapt, de même que la lutte contre les maladies rares et les maladies chroniques. Ne cherchez pas à dissimuler votre absence de propositions derrière des faux-semblants. Nous, nous agissons pour la santé des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

HÉBERGEMENTS D'URGENCE

M. le président. La parole est à Mme Françoise Branget, pour le groupe UMP.

Mme Françoise Branget. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion.

Madame la ministre, les dispositifs d'accueil d'urgence et d'insertion en faveur des plus démunis offrent près de 90 000 places sur l'ensemble du territoire français. La demande croissante à l'entrée de ces structures n'est malheureusement pas un phénomène nouveau. Mais chacun s'accordera ici à constater la saturation grandissante de ces dispositifs.

M. Christian Paul. Eh oui ! La précarité augmente !

Mme Françoise Branget. Une étude nationale datant de 2003 a d'ailleurs signalé un taux d'occupation proche de 100 %. Or les températures fraîchissent, et l'hiver semble devoir s'installer de façon précoce. Avec lui ressurgiront inexorablement les plus vives inquiétudes pour celles et ceux de nos compatriotes qui malheureusement sont dans la rue.

M. Christian Paul. La situation s'aggrave !

Mme Françoise Branget. L'année dernière, un dispositif hivernal spécifique avait été mis en place afin de permettre d'accueillir ces personnes dès les premières baisses de température. Cela sera-t-il le cas cette année ? Pouvez-vous, madame la ministre, faire le point sur le déroulement du plan hiver 2004-2005, et notamment sur les évolutions par rapport au dispositif de l'hiver dernier ? Pouvez-vous nous préciser, dans ce cadre, les moyens d'ores et déjà déployés ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Madame la députée, comme vous l'avez dit, la capacité d'accueil permanente est de 90 000 places. Il faut toutefois noter que, dès 2002, 8 000 places ont été créées. S'y ajoutent aujourd'hui 3 000 places supplémentaires dans les CADA, les centres d'accueil pour demandeurs d'asile.

S'agissant du dispositif prévu pour cet hiver, nous maintenons les trois niveaux de mobilisation : le niveau 1 correspond à une température de zéro degré ; le niveau 2 à une température comprise entre moins cinq et moins dix degrés ; le niveau 3 à une température inférieure à moins dix degrés.

Pour le niveau 1, près de 5 380 places supplémentaires ont été créées, avec un renforcement du service 115 ainsi que des unités mobiles.

Pour le niveau 2, 2 680 places sont mobilisées, avec là encore un renforcement des équipes mobiles, mais aussi des véhicules en maraude. Exceptionnellement, et c'est une innovation, des locaux seront ouverts, à hauteur de 1 500 places, pour permettre aux personnes qui n'accepteraient pas un hébergement permanent de se reposer quelques heures pendant la nuit, à plusieurs reprises si elles le souhaitent.

Pour le niveau 3, 2 700 places d'accueil sont prévues. C'est un niveau d'extrême d'urgence, qui nous conduirait à déclencher et le plan d'urgence, et le plan de sécurité civile. De plus, le plan de cohésion sociale, lancé par Jean-Louis Borloo à l'initiative du Premier ministre, prévoit de porter la capacité d'accueil à 100 000 places d'ici à 2007, ce qui représente une mobilisation financière de 525 millions d'euros.

En outre, nous reconduirons les spots télévisés et la vigilance météo dans les bulletins, dans le cadre de notre convention avec France Météo.

Voilà, madame la députée, les éléments de réponse que je souhaitais vous apporter. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

QUALITÉ DES VIANDES DE VOLAILLE IMPORTÉES

M. le président. La parole est à M. Gérard Lorgeoux, pour le groupe UMP.

M. Gérard Lorgeoux. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

Monsieur le ministre, l'agriculture française traverse une crise structurelle grave, qui se traduit concrètement par une réduction des poulaillers et une baisse de l'activité industrielle, elle-même liée à une baisse de la consommation des viandes. Par ailleurs, la filière avicole observe une augmentation massive des importations, consécutive aux accords de Marrakech et Doha.

Devant cette situation, il faut rassurer, sensibiliser et mieux informer les consommateurs, qui détiennent la clé de l'avenir des productions existantes.

Face aux prix extrêmement bas des produits importés, dus entre autres à des coûts sociaux inférieurs et des contraintes réglementaires moindres, l'Union européenne, et tout particulièrement la France, doit renforcer le contrôle aux frontières pour valider la qualité et la conformité des produits importés.

En conséquence, il convient que tous les produits importés dans l'Union européenne répondent à toutes les exigences demandées aux producteurs français.

Le contrôle doit être significatif en quantité, et non se limiter à quelques échantillons. C'est une garantie pour la santé publique, il faut une procédure libératoire, au minimum au conteneur, c'est-à-dire 24 tonnes environ, sur l'ensemble des mesures sanitaires et légales européennes.

D'autre part, des produits importés sont aujourd'hui incorporés dans nombre de préparations et produits élaborés. Ces produits finis sont commercialisés, conformément à la législation en vigueur, avec une estampille Union européenne. Il faut informer le consommateur sur l'origine des viandes de volaille contenues dans ces préparations, et donc faire indiquer en même temps que la composition du produit le pays d'origine de la volaille. Ces mesures conforteraient la traçabilité, la sécurité alimentaire et donneraient une réelle information aux consommateurs.

Monsieur le ministre, ma question est la suivante : au regard des contacts que vous avez eus avec vos collègues européens et avec la profession, pouvez-vous nous dire si ces mesures peuvent être mises en œuvre tant par l'administration, française et européenne, que par les producteurs ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales.

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur le député, le Gouvernement est très conscient des difficultés auxquelles est confrontée la filière avicole. Il travaille en partenariat avec les professionnels pour faire en sorte qu'elle puisse se restructurer, conquérir des parts de marché à l'extérieur et innover. C'est d'ailleurs l'un des aspects du plan de développement des industries agroalimentaires auquel je travaille.

Vous évoquez la question particulière de la mention de l'origine des viandes importées, qu'il s'agisse des viandes destinées à un atelier de découpe ou de transformation, ou de celles qui vont entrer dans la composition de certains produits. Il y a là, en effet, des risques de distorsion de concurrence, mais il faut rappeler que cette mention de l'origine est aussi à l'avantage des consommateurs et donc des producteurs

Deux textes régissent l'information des consommateurs sur ce point.

Le premier est un règlement du Conseil de juin 1990, qui prévoit, pour les viandes de volailles, l'indication du pays d'origine. Mais cette mention reste facultative lorsque la viande est destinée à un atelier de découpe ou de transformation, et n'est même pas prévue pour les produits élaborés.

Le second est une directive de 2000 sur l'étiquetage, qui ne prévoit pas non plus l'indication du lieu d'origine.

Que fait le Gouvernement ?

M. Michel Delebarre. Oui, que fait-il ?

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Hervé Gaymard et moi-même avons engagé depuis déjà plusieurs mois des actions très précises, en relation avec les professionnels.

Au niveau national, nous avons demandé aux directions départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de clarifier, sur le terrain, les questions liées à la mention de l'origine. Très concrètement, la mention « volaille élaborée ou transformée en France », doit être complétée par le lieu d'origine de la viande incorporée dans le produit fini.

Au niveau européen, nous avons saisi la Commission pour qu'elle étende l'obligation de la mention du pays d'origine aux produits à base de viande de volaille importés et destinés au consommateur européen, ainsi qu'aux produits fabriqués dans l'Union européenne à partir de viandes de volaille importées de pays tiers.

Enfin, j'ai demandé que soit effectué un travail visant à comparer les situations dans l'ensemble des pays de l'Europe élargie, afin que nous sachions exactement quels sont les risques de distorsion de concurrence.

Vous le voyez, nous sommes très actifs et nous agissons concrètement.

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Mes chers collègues, je vais suspendre la séance. Afin que nous puissions nous associer au deuil des familles de nos soldats, elle ne reprendra qu'à dix-sept heures, la cérémonie aux Invalides devant débuter dans quelques instants.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures, sous la présidence de M. Jean Le Garrec.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

    2

LOI DE FINANCES POUR 2005

DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (nos 1800, 1863).

SANTÉ, FAMILLE, PERSONNES ÂGÉES
ET PERSONNES HANDICAPÉES

M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du ministère du travail, de la santé et de la cohésion sociale, concernant la santé, la famille, les personnes âgées et les personnes handicapées.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, madame la ministre de la famille et de l'enfance, madame la secrétaire d'État aux personnes handicapées, madame la secrétaire d'État aux personnes âgées, mes chers collègues, si nombreux à cette heure avancée (Sourires)...

M. Jean-Luc Préel. Heureusement que je suis là !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. Cela dit, monsieur le président, les circonstances - nous sommes à la veille du 11 novembre - se prêtent mal à l'examen de ce budget.

Les crédits consacrés à la santé, aux personnes âgées ou handicapées s'élèvent à 8,63 milliards d'euros pour 2005. Compte tenu des transferts opérés vers d'autres ministères, à périmètre constant, ce budget baisse de 0, 39 %. Ainsi, les crédits des bourses des professions médicales et des sages-femmes, des écoles de formation des sages-femmes et des professionnels paramédicaux, et des comités régionaux et départementaux des retraités et personnes âgées et des centres locaux d'information et de prévention sont transférés vers le budget du ministère de l'intérieur, à hauteur de 91,3 millions d'euros.

Ce budget est dans la ligne du désengagement de l'État du champ social et médico-social qui avait déjà marqué les budgets 2003 et 2004 : les crédits d'intervention du titre IV diminuent de 10 %, l'État a pratiquement abandonné toute politique d'investissement, le désengagement du financement de la couverture médicale universelle complémentaire se poursuit.

L'exécution du budget, en 2003 et cette année, a été rendue difficile en raison du poids de la régulation budgétaire qui s'est très tôt traduite par des gels, puis par des annulations. En 2003, il s'est agi de quelque 55 millions d'euros, soit 3,65 % des crédits, hors dépenses d'allocations. Ainsi ont été annulés 30 % des crédits de subvention d'équipement sanitaire et 32 % des crédits d'équipement social à destination des personnes âgées ou handicapées. En 2004, 20 millions d'euros ont été annulés, dont 3 millions concernent la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Ces incertitudes compliquent la tâche des gestionnaires et peut-être la vôtre, monsieur le ministre, en rendant aléatoire le bon déroulement des actions au cours de l'année. Il est donc souhaitable qu'elles ne se renouvellent pas en 2005 !

S'agissant de la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, il est prévu de créer deux missions : une mission « santé » et une mission interministérielle « sécurité sanitaire » qui regrouperait les crédits affectés à la sécurité sanitaire dans les budgets de la santé et de l'agriculture. Elles sont les bienvenues, mais le projet d'un programme « conception et gestion des politiques de santé » commun aux deux missions nous paraît contraire à l'article 7 de la loi organique. Enfin, une mission « solidarité et intégration » regroupera certains crédits de santé concernant la famille et les personnes âgées ou handicapées. Elle fera l'objet d'une expérimentation en Haute-Normandie.

On remarque, dans le découpage en programmes, actions et sous-actions, le contraste existant entre les ambitions affichées et les indicateurs qui se limitent souvent à mesurer la rapidité d'action des services centraux. Cela nous semble insuffisant. Par ailleurs, certaines sous-actions semblent être des actions « fourre-tout ». C'est le cas de l'action « actions transverses » qui comprend notamment les programmes régionaux d'accès aux soins. J'avais critiqué, dans mon précédent rapport spécial, l'existence d'une action « autres programmes de santé publique » qui, sous un intitulé vague, cachait la réduction drastique des crédits destinés aux publics fragiles - c'est-à-dire destinés aux programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins - qui baissaient de 43 %. Il semble que l'on retrouve les mêmes travers dans ce projet de budget, puisqu'il est particulièrement difficile de définir ce que retrace l'action «actions transverses» et que ces mêmes programmes régionaux subissent une nouvelle ponction de leurs moyens, en baisse de 17,9 %, qui passe inaperçue dans cette nouvelle présentation des crédits.

En ma qualité de rapporteur spécial, et compte tenu des préoccupations de transparence de la commission des finances et notamment de son président, je m'insurge contre la tentation de tirer profit d'un redécoupage et d'un changement d'intitulé des actions menées pour masquer un désengagement coupable envers les plus démunis, lequel s'est notamment traduit à Toulouse, en septembre, par le renoncement à certaines actions médicales des centres d'hébergement et de réinsertion sociale en direction des publics les plus fragiles.

Le budget pour 2005 fait apparaître une progression de 16 % des crédits concernant l'action « santé publique et sécurité sanitaire », dont 10 %, de 190 millions d'euros en 2004 à 209 millions d'euros en 2005, pour la seule santé. Priorité présidentielle oblige, ce dont je ne peux que me féliciter, un effort est encore fait pour la lutte contre le cancer. Pour la poursuite du plan en 2005, une mesure nouvelle de 21,5 millions d'euros est présentée en projet de loi de finances, portant à 80,5 millions d'euros les crédits de l'État consacrés à la lutte contre le cancer pour atteindre les objectifs suivants : augmentation du taux de participation des femmes au programme de dépistage ; poursuite de la lutte contre les principaux facteurs de risque des cancers, en particulier le tabac et l'alcool pour 9,4 millions d'euros ; création de l'Institut national du cancer, qui sera financé à hauteur de 32 millions d'euros par le ministère de la santé et de la protection sociale, avec une mesure nouvelle de 21 millions d'euros.

Mais à côté de cette traduction budgétaire de la priorité présidentielle de lutte contre le cancer, les moyens destinés aux autres actions de santé publique sont en baisse, en contradiction avec l'affirmation du rôle de l'État contenue dans la toute récente loi du 9 août 2004. Votre prédécesseur, M. Mattei, avait annoncé une loi de programmation, qui s'était transformée en simple loi d'orientation et qui n'est plus aujourd'hui que loi d'affichage, puisque n'en apparaît aucune traduction budgétaire en 2005.

Enfin, l'État se désengage totalement du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, alors que le nombre des dossiers est en constante augmentation.

Concernant la lutte contre les toxicomanies, le plan quinquennal proposé au Gouvernement par la MILDT et signé en juillet dernier, avec près de dix mois de retard, a privilégié une approche pragmatique qui devrait donner une réponse adaptée, en fonction du produit, à la progression et à l'évolution de la consommation de drogues, notamment chez les jeunes. Encore faudrait-il que la MILDT se voie doter des crédits nécessaires à son action, que ces crédits votés soient effectivement disponibles et que le devenir même de la structure soit ainsi mieux assuré. Il est regrettable que les recommandations de la MILDT sur la loi de 1970 n'aient pas été entendues par le Gouvernement, qui a reculé devant cette réforme pourtant nécessaire.

En 2003 comme en 2004, le budget de la MILDT a souffert des gels et annulations, alors même qu'il stagne en loi de finances initiale. Comment mettre en œuvre une politique efficace si, chaque année, 10 % des crédits sont gelés, annulés ou partiellement disponibles en fin d'année ?

Quant à la politique de veille et de sécurité sanitaires est-elle toujours une priorité du Gouvernement ? La loi du 9 août 2004 relative à la santé publique a conforté le rôle de l'État en la matière. L'exercice 2003 aura été marqué par une ponction sans précédent sur les budgets des différentes agences de sécurité sanitaire. Le niveau des fonds de roulement de ces établissements pouvait, certes, paraître trop important, mais il était lié à leur montée en charge et devait permettre de faire face à des projets d'ampleur, immobiliers notamment.

Par ailleurs, les crises sanitaires récentes - canicule, légionellose, SRAS... - ont montré la nécessité de renforcer notre dispositif de veille sanitaire. Le rebasage des dotations financées sur les crédits de l'État dans la loi de finances pour 2004 était bien le moins que pût faire le Gouvernement. Pourtant, le budget global des dotations aux agences devrait s'élever à 58,64 millions d'euros en 2005, soit une baisse de 9,85 % par rapport à 2004. Il est regrettable que le renforcement des missions des agences de sécurité sanitaire ne s'accompagne pas d'un renforcement de leurs moyens. Alors que les missions de l'ensemble de ces agences sont renforcées, les dotations de l'État sont au mieux stables, au pire réduites.

Le dispositif d'alerte sanitaire bénéficie, pour sa part, de mesures nouvelles concernant la lutte contre le bioterrorisme et les situations de crise. Mais les crédits affectés à la sécurité sanitaire en 2004 ont été malmenés par les gels budgétaires. Ainsi, 23 % des crédits de gestion des risques sanitaires liés à l'environnement ont été gelés. Les leçons de la canicule ont-elles bien été tirées ? Ainsi, les missions de l'INVS ont été considérablement élargies par la loi de santé publique à la suite de la canicule mais, après un gel persistant de 7 % de ses crédits en 2004, la subvention de l'État est en recul de 15 % en 2005. Si, moyennant l'autorisation de prélèvement sur le fonds de roulement, les moyens financiers de l'agence sont préservés en 2005, on ne peut que s'étonner que, dans le cadre de ses nouvelles missions, ses moyens ne soient pas renforcés. Il n'est pas certain que les moyens de l'Institut - et notamment la faible progression du nombre d'emplois budgétaires depuis 2004 - lui permette de relever tous les défis qui lui sont lancés ; à titre d'exemple, la seule mise en œuvre du plan cancer demanderait dix-sept emplois supplémentaires, tandis qu'est mis en œuvre le nouveau plan national santé environnement .

Le ministère insiste sur le rôle primordial des centres nationaux de référence pour la surveillance des épidémies. La gestion de ces centres sera assurée par l'INVS. Mais l'augmentation de leur dotation, qui double, n'a de sens que si ces crédits restent disponibles. Or 32 % des crédits ont été gelés cette année. N'est-il pas contradictoire de faire de l'action des centres nationaux de référence une priorité et de les amputer, dans le même temps, d'un tiers de leurs moyens budgétaires ?

La montée en charge de l'Agence française de sécurité environnementale se poursuit et ses missions ont été renforcées par la directive concernant les produits biocides.

L'AFSSAPS - Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - voit ses missions élargies sans financement supplémentaire de l'État : son budget sera majoré par des taxes et redevances faisant l'objet d'articles non rattachés.

L'agence de biomédecine se met en place.

J'en viens à l'organisation des soins, marquée par un nouveau désengagement majeur de l'État. L'investissement hospitalier bascule entièrement vers l'assurance maladie. Le FIMHO - Fonds d'investissement et de modernisation des hôpitaux - a disparu, les subventions d'équipement sanitaire ne devraient plus représenter que 10 millions d'euros de crédits de paiement en 2005, en baisse de 13,79 % par rapport à 2004, année où la subvention n'était déjà que 11,6 millions d'euros. Aucune autorisation de programme n'est demandée en 2005. Les moyens alloués aux ARH sont reconduits à l'identique. Aucun crédit n'est affecté aux expérimentations d'ARS, prévues par la loi du 9 août relative à la santé publique. Le pilotage de l'offre de soins est en mutation, avec l'installation de la Haute autorité de santé, qui se substitue à l'ANAES, au Fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique - FOPIM - et aux commissions de transparence ainsi que d'évaluation des produits et prestations. Le projet de budget comporte une mesure nouvelle de 1,6 million d'euros, avec création de cinq emplois. Ces moyens ne sont pas à la mesure des missions nouvelles. Pour prendre un seul exemple, 4 000 médecins libéraux ont été accrédités, mais il en reste 110 000 ! À ce rythme, il faudrait près d'un siècle...

Un crédit de 100 000 euros est affecté à la création du GIP « Institut de données en santé ». L'ATIH - Agence technique de l'information sur l'hospitalisation -, qui accompagne la mise en œuvre de la tarification à l'activité, subit une baisse de 22 % de la subvention de l'État et deux tiers de son budget proviennent de l'assurance maladie. L'informatisation du système de soins ne bénéficie que d'une reconduction des moyens, alors que la télémédecine doit encore se développer. Ainsi l'État se désengage-t-il progressivement du financement de l'offre de soins.

Il se désengage aussi de l'accès aux soins, avec le transfert accéléré de la couverture maladie universelle complémentaire vers l'assurance maladie. En 2004, la modification du remboursement aux caisses primaires au titre de la CMU complémentaire avait déjà entraîné un transfert vers l'assurance maladie de 128 millions d'euros. Le budget pour 2005 voit la dotation de l'État au fonds CMU-C en baisse de 30 %, de 945 millions d'euros à 660 millions d'euros. L'article 77 du projet de loi de finances prévoit d'affecter au fonds CMU les 370 millions d'euros de cotisations sur les boissons alcooliques de plus de 25 degrés qui était affectée à la CNAMTS.

Mais l'opération, présentée comme équilibrée compte tenu du transfert aux régions des écoles d'infirmiers et sages-femmes, représente en réalité une perte de 100 millions d'euros pour 1'assurance maladie.

Par ailleurs, si 300 000 enfants supplémentaires devaient bénéficier de la couverture maladie universelle complémentaire, pour une charge de 35 millions d'euros, l'alignement du forfait logement sur celui du RMI permet d'économiser 21 millions d'euros, au détriment de dizaines de milliers de familles modestes. Un euro pour une personne seule, deux euros pour un couple : comme je viens de le dire dans les questions d'actualité, monsieur le ministre, voilà « l'euro Raffarin bis » !

Enfin, l'article 56 de la loi de réforme de l'assurance maladie prévoit, sous condition de ressources, l'allocation d'une aide pour souscrire à une mutuelle : le coût, là aussi, sera supporté par l'assurance maladie, à hauteur de 100 millions d'euros. Ainsi, l'assurance maladie sera impliquée plus avant dans le financement de la CMU complémentaire, ce qui revient à transférer une partie du déficit de l'État vers l'assurance maladie et, au-delà, vers la CADES, la Caisse d'amortissement de la dette sociale.

Les crédits en faveur des personnes âgées baissent de 61 % en raison des transferts de décentralisation ; à périmètre constant, ils chutent de 8,6 %. Aucune mesure nouvelle n'accompagne le plan Alzheimer que vous avez annoncé, monsieur le ministre : celui-ci ne fait que rassembler des actions existantes.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. C'est faux ! Je vous répondrai en énumérant les mesures nouvelles !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. J'en serai heureux car nous n'en avons pas été informés. Je vous fais d'ailleurs remarquer, monsieur le ministre et madame la secrétaire d'État aux personnes âgées, que les réponses à notre questionnaire budgétaire ont une de fois de plus tardé à arriver : le taux de retour à la date souhaitée par la commission des finances n'était que d'un tiers et nous avons encore reçu des réponses durant la semaine où s'est réunie la commission.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je comprends mieux votre erreur.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. À deux ans de l'échéance des contrats de Plan État-région, la transformation des établissements d'hébergement n'est couverte qu'à 35 %.

Les crédits concernant les personnes handicapées augmentent de 3,7 % ; la priorité annoncée par le Président de la République n'est donc pas visible dans le budget de l'État. Si le plan pluriannuel de création de places dans les établissements et les CAT se poursuit, en 2005, il sera financé par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Les contrats de plan État-région sont sous-exécutés, leur programmation, à deux ans de l'échéance, étant couverte à 41 % seulement.

En conclusion, hormis le plan cancer, le budget est décevant en termes de santé publique.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Le plan cancer, c'est mieux que rien !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. C'est même bien, mais c'est l'exception.

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Bapt.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. M. le ministre semble vouloir dialoguer, monsieur le président.

M. le président. N'en abusez pas !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. Le respect que j'éprouve envers la fonction gouvernementale m'oblige à répondre. (Sourires.)

M. Bertrand, tout à l'heure, dans sa réponse à ma question d'actualité, a estimé la progression du budget de la santé à 5 % par rapport à 2002. À force d'entendre l'orgue de barbarie gouvernemental nous jouer la rengaine que nous n'aurions rien fait et vous auriez tout engagé, on se dit que 5 % supplémentaires après cette grande loi de santé publique, cela se résume à peu de chose et c'est décevant.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. Après les reculs constatés en ce qui concerne l'obésité avec le maintien de la publicité pour l'alimentation infantile - nous allons voir la suite - et en ce qui concerne l'alcoolisme avec la modification de la loi Evin, de nombreuses décisions sont suspendues aux négociations conventionnelles, comme l'entretien de santé passé par les adolescents entrant en classe de cinquième ou la consultation périodique de prévention. D'autres sont au point mort : ainsi en est-il de la visite médicale d'aptitude à la conduite.

Je souhaite aussi vous interroger, monsieur le ministre, sur la signature des deux décrets d'application en attente relatifs à l'aide médicale d'État, bien que cela ne relève pas directement de votre budget.

Malgré le désengagement et les transferts vers l'assurance maladie, la commission des finances, dans sa majorité, a adopté ce projet de budget pour 2005.

M. Édouard Landrain. Et elle a eu raison !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. L'avenir le dira !

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la santé.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la santé. Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, « l'année 2004 doit être une année de résultats dans le domaine de la santé » : tel est le cadre d'action que le Président de la République a dessiné lors de ses vœux aux forces vives de la nation en janvier dernier. Moins d'un an après, il ne s'agit déjà plus d'un engagement mais d'une réalité.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Tout à fait !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis, pour la santé. En effet, quel gouvernement aura fait plus pour la santé que celui de M. Jean-Pierre Raffarin ? Qui peut se prévaloir, en deux ans, d'avoir rénové la politique de santé publique, et en particulier mis en œuvre un plan volontariste de lutte contre le cancer, actualisé la loi relative à la bioéthique, lancé le plan Hôpital 2007, réformé le régime des recherches biomédicales et modernisé notre système d'assurance maladie ?

Mme Martine Aurillac. Très bien !

Mme Muguette Jacquaint. Quelle distribution de bons points !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis, pour la santé. Sans entrer dans une analyse détaillée des crédits de la santé pour 2005, trois points du budget méritent tout particulièrement d'être soulignés.

La santé publique n'est plus le parent pauvre du système sanitaire français.

Parce que la santé ne saurait se résumer à une approche curative individuelle, la loi relative à la politique de santé publique a consacré le rôle de l'État et fixé des objectifs à cinq ans pour l'ensemble de notre système. Des plans d'actions stratégiques pour 2004-2008 s'inscrivent également dans cette perspective nouvelle de programmation et de transparence, qui traduit la volonté gouvernementale d'offrir à nos concitoyens la meilleure protection sanitaire possible.

Il faut également souligner l'effort important réalisé en faveur du chantier présidentiel de lutte contre le cancer : celui-ci bénéficiera, en 2005, de plus de 80 millions d'euros de crédits, afin notamment d'accompagner la montée en puissance de l'Institut national du cancer et de poursuivre les programmes de dépistage du cancer du sein, ainsi que du côlon et du col de l'utérus.

Face aux dysfonctionnements révélés par la canicule de l'été 2003 et par l'émergence de crises sanitaires - notamment les légionelloses, le SRAS ou les infections nosocomiales -, le Gouvernement s'est attaché à réformer en profondeur le dispositif de veille, d'alerte et de sécurité sanitaires, qui est rationalisé et consolidé.

Ce budget accompagne les réformes visant à améliorer l'égal accès aux soins.

Il prévoit les moyens nécessaires pour accompagner la mise en œuvre de nombreuses réformes, qu'il s'agisse de la Haute autorité de santé, de l'Institut des données de santé, de l'aide à l'acquisition d'une assurance complémentaire de santé ou encore du transfert aux régions de la gestion des écoles de formation des professions paramédicales et des sages-femmes.

J'en viens à présent à un problème qui nous concerne tous : la désertification médicale de certains territoires, en particulier ruraux, mais pas uniquement. Afin de lutter contre ce problème de plus en plus préoccupant, il incombe à l'État d'accompagner les actions engagées par l'assurance maladie. Le Gouvernement, monsieur le ministre, a pris toute la mesure de l'enjeu : il a notamment annoncé, en avril dernier, le relèvement du numerus clausus et proposé la mise en place d'un dispositif d'aide à l'installation.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est vrai !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis, pour la santé. Il faut tout d'abord saluer la création, en juin 2003, de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé. C'est un acte fondateur, dans la mesure où nous disposerons, par son intermédiaire, d'informations plus précises, fondées notamment sur des diagnostics locaux, afin de proposer des voies d'amélioration pertinentes en la matière.

Il est par ailleurs très positif que la fixation du numerus clausus puisse désormais s'appuyer sur l'avis rendu par le comité de la démographie médicale, créé par la loi du 13 août dernier relative à l'assurance maladie.

De plus, parce qu'elle semble aujourd'hui plus efficace et plus consensuelle, il est nécessaire, au moins dans un premier temps, de privilégier la voie de l'incitation. Il faut s'attacher à corriger les hétérogénéités en matière d'offre de soins, à travers des solutions locales, ponctuelles et adaptées. C'est précisément dans cette perspective que le Gouvernement a proposé des mesures incitatives d'aide à l'installation et au maintien des professionnels de santé tendant à renforcer l'efficacité des actions engagées par l'assurance maladie.

L'attribution des aides nécessite cependant l'identification des aires géographiques déficitaires, qui n'a pu à ce jour être réalisée, compte tenu notamment de la complexité des procédures de zonage et des nécessaires délais de consultation de l'ensemble des partenaires au niveau régional. Alors que le cadre juridique de l'aide à l'installation se trouve stabilisé par le nouveau dispositif conventionnel prévu par la loi du 13 août dernier, il importe à présent de préciser ses modalités d'application et de procéder au zonage des territoires afin que les professionnels puissent rapidement en bénéficier.

Parallèlement à la politique d'incitation engagée par le Gouvernement, il est urgent de promouvoir des actions susceptibles de produire leurs effets rapidement et répondant à l'ensemble des attentes des professionnels, en ce qui concerne notamment leurs conditions de travail. Loin d'être un gadget, la télémédecine pourrait à cet égard constituer un levier d'action supplémentaire innovant et efficace, dans la mesure où elle est incontestablement génératrice d'une plus grande équité dans l'accès aux soins. Comme l'a souligné l'excellent rapport du sénateur Jean-Claude Étienne et du député Jean Dionis du Séjour rendu public au juin dernier au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, « la télémédecine est un outil indispensable de l'aménagement du territoire car sa mise en place est la condition de survie des hôpitaux ruraux et le gage de la qualité de la médecine libérale ».

Quelques exemples suffisent à illustrer son intérêt. Ainsi, en Midi-Pyrénées, un outil de visioconférence, avec ordinateur et webcam, permet à des médecins généralistes, en maison de retraite, en cabinet ou en maison médicale, de télétransmettre des données au CHU de Toulouse - concernant une lésion dermatologique, par exemple - afin de bénéficier d'une expertise.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est vrai !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis, pour la santé. De même, en Vendée, les quelque 80 grossesses enregistrées à l'hôpital local de l'île d'Yeu sont suivies au centre hospitalier de Challans grâce à la télésurveillance du rythme cardiaque fœtal et des contractions utérines.

M. Jean-Luc Préel. C'est vrai aussi !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis, pour la santé. Ces échanges à distance entre professionnels apportent incontestablement une réelle plus-value en termes de formation et participent à la rupture de l'isolement des professionnels de santé en milieu rural.

Riche de promesses, la télémédecine demeure toutefois une pratique encore émergente, en raison de l'existence de freins psychologiques, du cumul des handicaps frappant des territoires privés d'accès au haut débit, mais également d'un certain déficit d'organisation, lié au cloisonnement entre ville et hôpital, au nombre par nature élevé des acteurs concernés, et surtout au caractère hétérogène et non pérenne des modes de financement des actes de télémédecine.

Ces dernières années, des actions ont été mises en œuvre afin d'encourager le développement de la télémédecine. Le ministère de la santé assure ainsi une fonction d'appui méthodologique et de recueil d'informations, notamment à travers l'Observatoire des réseaux de télésanté.

Au niveau régional, un grand nombre d'ARH ont prévu des budgets pour développer la télésanté. Le bilan des contrats de plan État-région, grâce auxquels neufs régions bénéficient de crédits d'appui à l'investissement en télémédecine, s'avère également encourageant, même si des progrès restent encore à faire dans les domaines du montage des projets et de la consommation des crédits.

Il importe cependant de promouvoir davantage le développement de la télémédecine, en commençant par tirer les conséquences de la loi du 13 août dernier, qui a constitué une avancée historique en la matière.

La télémédecine dispose désormais d'une définition légale, mais la réflexion doit être poursuivie quant à ses enjeux déontologiques et éthiques. À titre d'exemple, pour la collecte de sang, il pourrait être envisagé d'autoriser la réalisation à distance de l'interrogatoire du donneur potentiel par un médecin « thésé », afin de remédier aux difficultés rencontrées sur certains territoires, comme c'est le cas dans mon département.

La création de missions régionales de santé constitue également une avancée majeure, dans la mesure où l'absence de coordination entre les secteurs hospitalier et ambulatoire a souvent été identifiée comme un frein important au développement de la télémédecine. À cet égard, il serait utile que les ARH et les missions régionales de santé disposent d'une cellule de télémédecine et incitent les hôpitaux à désigner au minimum un correspondant télémédecine en leur sein et à intégrer cette problématique dans leurs projets d'établissement.

Il faut également créer un cadre propice au développement de la télémédecine en améliorant la formation initiale et continue, en approfondissant la question des transferts de compétences entre les professionnels de santé et en envisageant des modalités spécifiques de reconnaissance et de rémunération des actes de télémédecine.

En conclusion, mes chers collègues, je vous invite, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à adopter cet excellent budget de réformes pour la santé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les personnes handicapées.

Mme Geneviève Levy, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, une partie importante de mon avis a été consacrée au processus de décentralisation des interventions en faveur des personnes handicapées. Mais je voudrais, au préalable, attirer votre attention sur trois points qui concernent les crédits budgétaires destinés aux personnes handicapées.

Je commencerai par l'allocation adulte handicapé. Quelque 40 % de la dépense budgétaire de l'État sont destinés à financer cette prestation sociale constituant un revenu minimal garanti, qui focalise de nombreuses revendications. En effet, elle est d'autant plus capitale que ses allocataires disposent de faibles revenus. La quasi-totalité des associations représentatives des personnes handicapées dénoncent l'écart croissant entre l'évolution de l'AAH et celle du SMIC.

Il n'est pas apparu opportun, cependant, d'aligner l'AAH sur le SMIC, afin de rester dans une logique de compensation plutôt que d'assistance. En effet, le projet de loi crée la prestation de compensation qui offrira une aide pour la prise en charge des dépenses supplémentaires entraînées par le handicap, selon des tarifs fixés en fonction de leur nature, et permettra ainsi de réserver l'AAH à la couverture des frais nécessités par la vie courante. En outre, un abattement sur le revenu d'activité est prévu pour le calcul de l'AAH.

Néanmoins, j'estime que des progrès devraient être faits en faveur de deux catégories d'allocataires de l'AAH : d'abord, les adultes qui, en raison de leur handicap, n'ont aucune perspective d'embauche professionnelle et dont l'horizon financier se résume, jusqu'à l'âge de soixante ans, à la perception de l'AAH à taux plein ; ensuite, les adultes accueillis ou placés dans un établissement social, médico-social ou de santé, qui ne touchent qu'un reliquat de l'AAH, souvent qualifié de « reste à vivre », égal à 12 % de cette allocation.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. C'est vrai !

Mme Geneviève Levy, rapporteure pour avis, pour les personnes handicapées. J'en viens au deuxième point sur lequel je veux appeler l'attention.

Plusieurs associations se sont inquiétées de l'évolution des concours de l'État au financement des établissements, alors que leurs charges s'accroissent fortement, et des conséquences néfastes que cela peut avoir pour les personnes accueillies. Faute de financements qui soient à la hauteur des besoins exigés par l'application des dispositifs législatifs et réglementaires, des conventions collectives et des accords salariaux, les associations gestionnaires d'établissements sont contraintes de réaliser des économies de gestion. Une tarification à la personne selon son handicap pourrait éviter cette dérive. Resterait à déterminer un tarif pour chaque type de handicap.

Enfin, je voudrais rappeler que le Gouvernement a élaboré un plan de création, entre 2003 et 2007, de 40 000 places dans les établissements accueillant des personnes handicapées. Le rythme de création de places sera ainsi doublé par rapport à la période 1998-2002. Concernant les centres d'aide par le travail, la loi de finances pour 2004 a ouvert les crédits pour la création de 3 000 places supplémentaires. Le même effort sera reconduit en 2005. Pour ce qui est des ateliers protégés, le Gouvernement annonce 2 500 places nouvelles.

Venons-en à la décentralisation. Depuis la loi fondatrice du 30 juin 1975, l'État a été considéré comme l'initiateur, le coordinateur, l'ordonnateur et le banquier du soutien aux personnes handicapées. Indéniablement, son action a porté ses fruits, aboutissant à l'instauration de normes d'accessibilité, à la création d'aides financières et humaines et à la mise en place de structures de soutien aux enfants et adultes handicapés, dans leur vie courante, à l'école, au travail ou dans des établissements spécialisés. Il a également apporté une assistance aux associations.

Cependant, les lois de décentralisation ont, à partir du 1er janvier 1984, confié aux collectivités locales, et tout particulièrement aux départements, des missions primordiales en matière de soutien aux personnes handicapées par le transfert de compétences étatiques en matière d'action sociale et médico-sociale. Depuis vingt ans, les conseils généraux et leurs présidents ont ainsi su développer, dans la limite de leurs moyens, des politiques actives, novatrices et proches des besoins des personnes handicapées. Le département apparaît, en effet, comme l'échelon le mieux adapté pour la gestion de la perte d'autonomie, qui exige une connaissance des besoins courants des demandeurs, laquelle ne s'acquiert que grâce à la proximité, entraînant une réponse adaptée à l'environnement de l'allocataire.

Vous trouverez dans mon rapport les principales mesures de décentralisation intervenues depuis 2001.

Les principes de gestion décentralisée des personnes âgées doivent inspirer la politique en faveur des personnes handicapées car, pour ces dernières, l'action du département reste encore en retrait par rapport à la place que conservent l'État et surtout la sécurité sociale.

Les travaux législatifs sur le projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances, à la participation et à la citoyenneté ont permis l'adoption d'articles additionnels mettant en place une nouvelle organisation des structures de soutien aux personnes handicapées. Ce dispositif confie une mission de gestion de proximité au département qui disposera, à cette fin, de deux instances nouvelles : la maison départementale du handicap et la commission des droits et de l'autonomie, les COTOREP étant dissoutes. Le département recevra les dotations de la CNSA, Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Par ailleurs, le préfet de région aura la responsabilité de la programmation financière des créations de places dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux destinés aux personnes handicapées, au moyen d'un « programme interdépartemental de prise en charge des handicaps et de la perte d'autonomie ».

Enfin, la CNSA assurera la coordination nationale des moyens mobilisés sur le territoire en faveur des personnes handicapées. La caisse traduira en dotations régionales limitatives l'objectif annuel de dépenses d'assurance maladie des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Cet objectif sera fixé par le Gouvernement en fonction du vote par le Parlement de la loi de financement de la sécurité sociale.

Les missions de la CNSA seront notamment de fournir les moyens financiers aux départements pour verser l'AAH et la prestation de complément et de répartir entre les régions et les départements l'enveloppe des crédits de l'assurance maladie, résultant de l'ONDAM médico-social, destinés aux personnes âgées et aux personnes handicapées, ainsi que le produit de la contribution de la journée de solidarité, les préfets de région étant chargés de répartir les crédits entre les conseils généraux et les DDASS. La caisse aura aussi à expertiser les grilles et barèmes des handicaps et dépendances et à évaluer les besoins individuels.

Le Gouvernement n'a donc pas, pour l'heure, retenu la proposition de M. Briet et de M. Jamet de confier au département la maîtrise de la tarification des établissements et des services médico-sociaux accueillant des personnes handicapées. Le processus de décentralisation me paraît, en ce sens, inachevé. Le département devrait pouvoir maîtriser complètement les prestations fournies par les établissements et services pour personnes âgées dépendantes, pour enfants handicapés et pour adultes handicapés, car il s'agit d'un ensemble cohérent.

Les pouvoirs de planification du préfet de région, proposés par le Gouvernement afin de garantir l'égalité des territoires, peuvent se révéler inutiles à l'expérience. L'équilibre entre les départements pourra se faire mécaniquement par le relèvement des investissements des conseils généraux des départements les plus en retard et par une péréquation budgétaire opérée par la CNSA. Celle-ci sera donc la garante de l'unité de la politique en faveur des personnes handicapées et de l'égalité de traitement financier des territoires.

En conclusion, vous pouvez compter, monsieur le ministre et madame la secrétaire d'Etat, sur notre appui sans faille. La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à votre projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, premier orateur inscrit.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, au premier abord, le budget « santé, famille, personnes âgées et personnes handicapées » pour 2005 est stable par rapport à celui voté dans la loi de finances initiale pour 2004 où les crédits s'élevaient à 11,177 milliards d'euros, puisqu'i1s s'élèveraient, pour l'année prochaine, à 11,184 milliards d'euros.

Comme beaucoup, nous aurions pu arrêter là notre examen, mais une simple lecture rapide du contenu de ce budget nous indique que cette stabilité n'est que de façade. En fait, ces chiffres masquent des mouvements internes particulièrement préoccupants concernant le rôle de l'État en matière de santé publique et d'offre de soins.

Votre projet de budget, monsieur le ministre, illustre en effet un redéploiement des crédits initialement affectés à la santé vers les lignes budgétaires des dispositifs « handicap et dépendance » et vers celles des dispositifs « exclusion et intégration ». S'il est louable d'accroître les moyens financiers consacrés à ces dispositifs publics, il est particulièrement condamnable de le faire avec les crédits publics destinés à la prise en charge, par la solidarité nationale, de la santé de nos concitoyens.

Le budget consacré globalement à la santé passe de 2,5 milliards d'euros en 2004 à 2,2 milliards d'euros en 2005, soit une baisse globale de 13,6 %.

Si l'on considère maintenant les grands ensembles budgétaires de la santé, les intentions du Gouvernement en matière de santé publique et d'offre de soins apparaissent mieux encore. Certes, les dépenses prévues au budget de 2005 en faveur de la santé publique et de la sécurité sanitaire augmentent de 15,7 % par rapport à 2004, mais cette hausse résulte d'un double mouvement : un accroissement de 26,5 % des dépenses ordinaires en moyens des services, combiné à une réduction de 34,2 % des dépenses ordinaires d'intervention publique.

Sur le fond, la seule audace financière du Gouvernement dans le domaine de la santé publique et de la sécurité sanitaire - nous la saluons ! - consiste à doter de 21 millions d'euros supplémentaires le plan cancer. Sur un budget de plus de 11 milliards d'euros, votre ambition de santé publique reste donc très faible, alors même que nous avons examiné, ici, une grande loi sur ce sujet !

Elle l'est d'autant plus que le niveau des crédits d'État dégagés pour favoriser l'accès aux soins de tous, et notamment des demandeurs les plus démunis, est en forte chute pour 2005. S'il était de 1,154 milliard d'euros dans la loi de finances initiale pour 2004, il n'est plus que de 789 millions d'euros dans le PLF pour 2005, soit une baisse, énorme, de plus de 31 % des dépenses de l'État.

Ce constat est encore plus alarmant lorsqu'on regarde la répartition de ces crédits et leur évolution par rapport à 2004. Si les crédits ordinaires destinés aux moyens des services perdent 300 millions d'euros en une seule année, la part des crédits ordinaires d'intervention publique est réduite de 362,4 millions d'euros, soit presque le tiers de la dotation de 2004. Si l'on ajoute à cela les pertes de crédits en capital pour 2005 : moins 2,4 millions d'euros, ce ne sont pas moins de 665 millions d'euros qui sont détournés de l'effort public en matière d'offre de soins à des fins d'économie budgétaire !

L'ensemble de ces économies est énorme. En effet, elles représentent près de six fois le montant des mesures nouvelles en moyens et en crédits d'intervention publique du ministère et, plus symboliquement encore, plus de deux fois le montant alloué par l'État à la couverture maladie universelle dans ce budget, 78 fois les moyens nouveaux alloués à la sécurité sanitaire, 300 fois les moyens nouveaux alloués à la formation des professions médicales et paramédicales, 120 fois les moyens nouveaux destinés aux établissements nationaux à caractère sanitaire et social, 30 fois les moyens nouveaux destinés au programme « santé publique-prévention » qui regroupe les plans cancer, maladies chroniques, périnatalité et « violence et santé ».

À l'aune des besoins sanitaires toujours insatisfaits - qu'il s'agisse de la santé au travail, de la santé environnementale, de la fermeture de lits d'hôpitaux ou de la faillite de nombreux hôpitaux publics -, on s'explique mal le sens de ces économies sur la santé des citoyens.

Ou, au contraire, on se l'explique trop bien. Car le drame est bien là : non seulement la santé publique demeure le parent pauvre de notre système de santé mais, en outre, vous faites de ce budget pour 2005 l'illustration des régressions législatives en matière de santé et de couverture sanitaire que nous connaissons depuis maintenant trois ans. Il confirme le désengagement financier de l'Etat, progressif mais certain, des enjeux de santé en France. Il accompagne concrètement la mise en oeuvre des dispositions relatives à l'hôpital, avec le plan Hôpital 2007, la liquidation de l'assurance maladie solidaire et la décentralisation des compétences sanitaires de l'État vers les collectivités locales.

Sur les objectifs sanitaires concernant le sida, l'alcool et le tabac, ce budget est encore vide de propositions fortes. Les crédits envisagés pour lutter à l'échelle européenne contre le sida sont en baisse de 17 000 euros dans le budget pour 2005.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Ce n'est pas vrai !

Mme Muguette Jacquaint. Quant aux crédits destinés à la lutte contre la toxicomanie, dont font partie l'alcool et le tabac, si vous les avez déjà atrophiés en 2004, vous trouvez encore le moyen de les réduire de 38 000 euros pour 2005. On conviendra que, devant l'illustration d'une telle détermination publique à lutter contre ces fléaux, on peut se poser des questions !

De même, comment considérer le choix budgétaire du Gouvernement pour 2005 quant aux actions concernant les maladies chroniques ? Alors que tous les rapports officiels soulignent que ces pathologies seront le fléau sanitaire du siècle à venir, vous décidez d'investir dans cette lutte moins de 1,3 million d'euros. Que faut-il en conclure sur vos intentions dans ce domaine ?

Concernant la lutte contre les risques sanitaires environnementaux, le budget pour 2005 prévoit de la doter de 116 millions d'euros. Si cette prévision est certes supérieure de 52 millions aux dotations anciennes affectées à ces missions, elle réduit d'ores et déjà de 6,5 millions la dotation générale allouée au fonctionnement des diverses agences sanitaires. C'est une étrange façon de s'engager pour la sécurité sanitaire environnementale que de restreindre ses capacités de veille, d'alerte et d'expertise.

S'agissant de l'hôpital et de l'offre de soins, ce projet de budget confirme le désengagement de l'État. Dans la continuité du plan Hôpital 2007, vous réduisez la part du budget de la nation consacrée à l'investissement hospitalier et reportez cette charge sur les collectivités locales. Mais ce n'est pas tout car, dans le cadre de la refonte des financements de la formation médicale et paramédicale, ce projet de budget pour 2005 prévoit aussi de réduire la contribution de l'État à la formation ainsi qu'au recyclage. Il supprime 9,7 millions d'euros destinés à financer la formation de ces professions ainsi que les bourses d'études les concernant. C'est une stratégie d'économie lourde de dangers pour les malades et les personnels de santé, en totale contradiction avec les annonces sur la nécessité de réformer l'offre de soins pour en améliorer la qualité.

Enfin, les dispositions relatives à la CMU complémentaire et à l'aide médicale d'État sont la meilleure illustration de votre stratégie. Alors que la contribution de l'État à la complémentaire santé des plus démunis s'élevait à 970 millions d'euros en 2003, vous l'avez réduite à 946,5 millions d'euros en 2004, et vous la réduisez encore d'un tiers dans ce PLF pour 2005. Elle sera de 660,5 millions d'euros, soit une réduction de 286 millions d'euros.

Avec la réduction de la contribution à l'AME - moins 20 millions pour 2005 -, vous voudriez faire d'une pierre deux coups : d'un côté, diminuer la prise en charge sanitaire des personnes en situation irrégulière, ce qui est profondément inhumain ; de l'autre, donner l'illusion de répondre aux besoins des urgentistes en réaffectant ces 20 millions d'euros à la prise en charge des soins urgents sous prétexte que les bénéficiaires de l'AME sont utilisateurs de l'hôpital pour leurs soins. Il faudrait réfléchir davantage à ce qu'on dit aux urgentistes...

Il est donc clair que ce PLF 2005 pour la santé poursuit la casse de l'organisation sanitaire du pays articulée sur une prise en charge solidaire de la santé et un investissement public majeur dans l'offre de soins. Petit à petit, vous réduisez à la portion congrue la place de l'État dans cet édifice sanitaire. Et cela, dans l'année qui suit le vote d'une loi de santé publique vantant l'engagement nécessaire de l'État dans la conduite des choix en matière de santé publique. Si cela n'était pas si grave, il y aurait de quoi sourire...

C'est pourquoi, monsieur le ministre, malgré l'accroissement des crédits de la lutte contre l'exclusion et en direction des personnes handicapées, mesure que je salue, vous ne nous laissez pas d'autre choix que de voter contre le budget que vous nous présentez.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Chossy.

M. Jean-François Chossy. Monsieur le ministre, vous savez l'intérêt que je porte aux actions que vous menez dans ce grand ministère, mais mes propos, puisque je vais parler du volet handicap, seront réservés à Mme Montchamp. Je vous demande de ne pas m'en vouloir !

C'était déjà le cas les années précédentes et ce le sera encore cette année, notre discussion budgétaire va inévitablement se télescoper avec le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, et bien que je doive concentrer mon propos sur le budget 2005 et son évolution, je n'échapperai pas à cette règle d'habitude.

Le budget des personnes handicapées est en augmentation cette année encore, et passe de 6 172 millions d'euros à 6 396 millions d'euros, ce qui traduit la volonté du Gouvernement et votre détermination, madame la secrétaire d'État, d'offrir un meilleur accompagnement aux personnes handicapées pour une vie digne et plus autonome dans notre société.

La politique en direction des personnes handicapées doit être à la hauteur des attentes : généreuse, mais pragmatique, lucide et humaine, proche et solidaire, à l'exemple de ce que le Président Jacques Chirac a voulu en 1975, alors qu'il était Premier ministre, ou en 1987, au moment du vote sur les obligations d'emploi des personnes handicapées.

Le projet de loi qui, maintenant, porte votre marque, madame la secrétaire d'État, veut aussi répondre à ces exigences. Ses orientations s'articulent autour de plusieurs axes forts : la simplification, avec la mise en place attendue dans chaque département d'une maison du handicap, véritable guichet unique ; la compensation, avec la création d'une prestation totalement innovante répondant aux besoins recensés par la personne handicapée pour réaliser son projet individuel de vie ; la formation, qu'elle soit initiale ou continue, qui devra s'adresser à toutes celles et ceux qui accompagnent la personne handicapée tout au long de sa vie ; la scolarisation des élèves handicapés qui est réaffirmée par l'inscription dans l'école la plus proche de leur domicile ; mais aussi, l'accessibilité, que ce soit au cadre bâti, aux espaces publics ou privés, aux transports ou encore à la culture, aux sports, aux loisirs et, plus largement encore, l'accès à l'information, au travail et à l'école.

Dans tous les cas, les réponses que devront apporter l'État, la région, et plus particulièrement les départements ou les collectivités dans le cadre de la solidarité, doivent trouver leur expression dans votre projet de loi, mais aussi pour partie dans le budget que nous examinons aujourd'hui.

S'il augmente en effet de 3,7 %, ce budget permet de répondre à une demande sans cesse croissante de l'allocation adulte handicapé, servie aujourd'hui à 780 000 personnes pour une dotation globale de 4 846,68 millions d'euros, soit une progression de 3,9 %.

Notre excellente collègue, Geneviève Levy, souligne dans son rapport pour avis que si l'AAH représentait 78 % du montant du SMIC en 1982, ce taux est aujourd'hui tombé à 58 %, et elle estime, avec raison et sagesse, que des progrès doivent être faits en faveur de deux catégories d'allocataires : d'abord, ceux qui, en raison de leur handicap, n'ont aucune perspective d'embauche professionnelle ; ensuite, les adultes accueillis ou placés dans un établissement social, médico-social ou de santé, qui ne perçoivent qu'un reste à vivre à peine égal à 12 % de l'AAH, soit 70 euros par mois.

Mais je sais votre engagement, madame la secrétaire d'État, pour une progression de l'AAH, ainsi que pour une évolution des ressources des personnes handicapées qui ne peuvent pas travailler. Vous l'avez démontré ici même et affirmé au Sénat.

La prestation de compensation améliore directement les ressources des personnes handicapées, et si ce n'est pas, effectivement, un élément de ce budget, cette disposition est suffisamment importante pour être soulignée. Les personnes handicapées pourront à l'avenir financer avec l'AAH les frais de la vie courante et réserver la nouvelle prestation aux interventions nécessaires à la compensation.

Cette réflexion devra être poursuivie lors de la deuxième lecture devant notre assemblée, et nous évoquerons encore cette demande récurrente, mais inaccessible, formulée par les associations, qui veut que l'allocation adulte handicapé soit égale au salaire minimum interprofessionnel de croissance.

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Quelle unanimité !

M. Jean-François Chossy. Je suis heureux que Mme Jacquaint approuve mes propos et qu'elle reconnaisse que l'AAH ne saurait être égale au SMIC...

Je relève, madame la secrétaire d'État, dans le budget que vous nous présentez, les efforts conséquents entrepris en matière de création de places en établissement, puisque vous maintenez le plan de création, sur la période 2003-2007, de 40 000 places dans les foyers d'accueil médicalisés, les maisons d'accueil spécialisées, les centres d'aide par le travail, les foyers de vie, ou encore les instituts médico-éducatifs. Ainsi le rythme de création sera-t-il doublé par rapport à la période 1998-2002 : merci, madame Boisseau, bravo, madame Montchamp !

Pour ce qui concerne les CAT, 3 000 places seront financées par un concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et 2 500 nouvelles places sont annoncées dans les ateliers protégés.

Ces efforts permettront-ils d'apporter une solution à l'anomalie que je dénonce avec constance depuis 2002 : l'accueil de personnes handicapées françaises dans des structures qui leur sont réservées en Belgique - essentiellement en Wallonie - et sont exclusivement financées par la France ?

Il ne s'agit nullement pour moi de mettre ici en doute les qualités de cet accueil. Mais je ne pense pas me tromper en affirmant que la cause de cette situation ubuesque est le manque de places sur notre territoire. Or, si une telle pratique a permis à plus de 3 000 Français de trouver une solution à leur problème, elle aboutit toutefois à une situation paradoxale. Pour la Belgique, d'abord, qui offre à ces personnes handicapées un service auquel ses propres ressortissants n'ont pas accès, puisqu'elle a bloqué, pour des raisons budgétaires, toute création de places nouvelles dans ses établissements médico-sociaux. Pour la France, ensuite : le manque de places et les coûts de revient inférieurs constatés dans les établissements wallons conduisent nos organismes payeurs à subventionner ces derniers, bien qu'ils ne soient pas soumis aux mêmes normes que les établissements français. Et tout cela parce que notre pays n'est pas en mesure de fournir lui-même ce service !

Il faut donc - et ce budget 2005 est un début de réponse - mettre en place rapidement les conditions d'un accueil temporaire capable d'apporter une solution intermédiaire à de nombreuses familles désemparées.

Par ailleurs, je prends acte de la volonté du Gouvernement de financer des postes d'assistants d'éducation pour remplir l'obligation d'accueil des enfants par l'Éducation nationale.

M. Serge Blisko. Il y a encore des marges de manœuvre !

M. Jean-François Chossy. En effet, trop d'enfants handicapés ne sont pas encore scolarisés faute d'auxiliaires de vie scolaire, et ils doivent, de fait, rester chez eux.

Poursuivant la politique de développement des assistants d'éducation mise en œuvre à la rentrée 2003 pour remplacer les emplois jeunes, le Gouvernement crée plus de 9 000 postes. Chacun peut mesurer l'importance et l'intérêt d'une telle disposition.

Il n'est pas possible d'apporter des réponses catégorielles dans le cadre d'une discussion budgétaire. Mais je sais, madame la secrétaire d'État aux personnes handicapées, que vous avez présenté des dispositions qui permettront aux personnes autistes, aux polyhandicapés, aux traumatisés crâniens, à toutes les personnes fragilisées par le handicap, mais aussi à leurs familles, d'envisager avec plus de sérénité leur projet de vie.

Ce budget pour 2005 n'est qu'une étape avant le vote de la loi. Sensible aux efforts qui sont les vôtres, le groupe UMP votera les crédits destinés aux personnes handicapées, comme il adoptera, bien évidemment, le budget de la santé dans son ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.

M. Serge Blisko. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames les ministres, mes chers collègues, tout en sachant qu'une bonne partie du financement de la santé relève du PLFSS, je voudrais faire remarquer que le désengagement de l'État dans l'organisation des soins a pris cette année une ampleur inégalée.

Le budget 2005 de la santé se traduit par une baisse sensible des crédits par rapport à 2004. Si vous examinez dans le détail l'excellent rapport de M. Bapt, et en particulier le tableau synthétique de la page 61, vous vous apercevrez que l'organisation des soins est la grande perdante de ce projet de loi de finances.

Sans doute me rétorquerez-vous, monsieur le ministre, qu'il est plus logique que l'assurance maladie ou les collectivités territoriales prennent en charge ces dépenses. Mais, et je persiste à le penser, il est dommageable que l'investissement hospitalier soit désormais quasiment laissé à leur charge : pas plus de 10 millions de crédits de paiement ne proviendront, en 2005, de votre département ministériel.

Nous en restons, au groupe socialiste, persuadés : la rationalisation de l'offre de soins hospitaliers entreprise avec difficulté par les ARH depuis sept ans impose de renforcer les moyens humains et matériels dont disposent ces agences afin qu'elles puissent mener à bien leurs missions : celle, traditionnelle, de mettre au point le schéma régional d'organisation sanitaire et social, mais aussi une mission d'expertise, de conseil et d'appui en faveur de l'investissement hospitalier, sans parler de la nouvelle mission qui leur a été attribuée par ordonnance : veiller à la généralisation de la tarification à l'activité.

Une organisation hospitalière nouvelle dans la région doit être portée par les élus locaux, les communautés médicales et - pourquoi pas ? - les patients et les citoyens. On sait les sacrifices que consent parfois une commune quand elle ferme ou transforme un hôpital. Le projet ne peut réussir que si les usagers et les professionnels de la santé ont l'impression qu'en échange de ce sacrifice, parfois douloureux, une amélioration nette des soins et des conditions de travail est procurée. En d'autres termes, il ne peut y avoir de restructurations réussies, de rapprochements de plateaux techniques, de fusions d'équipes sans une sorte d'accord « gagnant-gagnant » où l'investissement en matériel et en locaux vient compenser les sacrifices demandés.

Quant à l'application généralisée de la TAA à l'horizon 2007-2008, elle nécessite, monsieur le ministre, un peu de doigté. Cela signifie - si vous me permettez ce conseil, en tant que président du conseil d'administration d'un hôpital qui emploie 2 300 personnes - savoir gérer la durée et prendre en compte les spécificités de chaque hôpital. Est-ce le cas aujourd'hui ? J'en doute. D'après les projections réalisées au printemps de cette année par l'Union régionale des hôpitaux d'Île-de-France, avec l'application de la TAA, les deux tiers des établissements publics franciliens auront des budgets déficitaires, le déficit pouvant parfois atteindre 5 %.

M. Claude Leteurtre. C'est vrai.

M. Serge Blisko. Il y a là un vrai problème : on ne peut lancer une réforme quand on sait qu'elle aboutira à de telles difficultés. Pour la partie médico-chirurgicale de l'hôpital que je préside, où nous étions volontaires pour appliquer la TAA, la première année de tarification a déjà entraîné 4 % de déficit, alors qu'elle ne portait que sur 10 % du budget. Si on suivait le rythme préconisé par l'ARH, on serait à 40 % !

Ces chiffres sont incontestables. On ne peut, sans les prendre en compte, prétendre restructurer des hôpitaux en trois ans et avancer vers une carte hospitalière rationalisée.

Je plaide pour qu'on examine ce rythme et ce calendrier de près, faute de quoi nous nous exposerons à des difficultés insurmontables. Nous ne sommes pas pour la politique du pire ! N'avez-vous pas, monsieur le ministre, déjà fait verser des fonds exceptionnels au CHU de Toulouse ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je l'ai beaucoup aidé.

M. Serge Blisko. Vous y étiez d'ailleurs contraint, et personne ne pourra vous le reprocher. La TAA ne doit pas être vécue comme une contrainte budgétaire supplémentaire mais comme une reconnaissance des efforts de rationalisation et d'efficacité que consentent presque tous les hôpitaux aujourd'hui.

Comment imaginer qu'une telle réforme réussisse avec des hôpitaux en report de charges ou dont l'équilibre budgétaire est artificiel, parce qu'il repose sur des postes budgétaires créés mais non pourvus ou sur des baisses d'activité liées à des fermetures de lits ? Je le répète : la TAA ne pourra fonctionner que si l'offre de soins bénéficie d'investissements complémentaires visibles.

Monsieur le ministre, les élus qui président les hôpitaux, les directeurs qui les gèrent, les syndicats de personnels médicaux et hospitaliers ont le sentiment qu'on leur demande beaucoup d'efforts et parfois de lourds sacrifices.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est vrai.

M. Serge Blisko. Ils y sont prêts, le plus souvent, parce qu'ils savent que la santé a un coût élevé et que notre système qui consiste à admettre tout le monde à l'hôpital et à dispenser des soins sans considération pour la fortune, l'âge ou la pathologie mérite d'être défendu et respecté.

Mais ils sont aujourd'hui inquiets car ils n'ont pas l'impression que leur administration de tutelle ait compris la gravité de la situation ; aucun signal d'espoir ne leur est d'ailleurs envoyé.

Ce budget est l'occasion de dissiper leurs doutes et leurs angoisses en annonçant des mesures budgétaires appropriées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Modeste, le budget de la santé pour 2005 que vous nous présentez, monsieur le ministre, est bien loin de refléter la politique de la nation en matière de santé.

Nous venons en effet de débattre pendant une semaine de la loi de financement de la sécurité sociale. Les dépenses remboursées par l'assurance maladie sont estimées à 134,9 milliards d'euros, les dépenses courantes de santé à 160 milliards.

Avec 11,18 milliards d'euros, le budget du ministère de la santé est donc, en comparaison, extrêmement réduit, d'autant plus qu'il comprend également les agrégats développement social, intégration et lutte contre les exclusions. Les crédits concernant directement la santé sont d'ailleurs en diminution, passant de 8,6 à 7,5 milliards.

Avant tout, permettez-moi d'exprimer deux regrets.

Premièrement, les modifications de chapitres ou de lignes rendent ce budget en partie illisible ou, du moins, empêchent les comparaisons d'une année sur l'autre, pourtant nécessaires.

Deuxièmement, les quelques mesures nouvelles présentées chaque année font l'objet, quelques semaines plus tard, de gels ou d'annulations effectués sans le moindre débat, ce qui pose une nouvelle fois la question du rôle du Parlement. J'émets donc le vœu que votre budget soit épargné, cette année, par ces gels hivernaux.

La santé est l'une des préoccupations majeures de nos citoyens, qui s'inquiètent à juste titre des problèmes financiers qu'elle connaît. À cet égard, je regrette à nouveau, au nom de l'UDF, votre choix de reporter le poids du déficit cumulé sur les futures générations.

Les Français sont inquiets car tous les secteurs sont en crise. Non seulement nous sommes toujours fort médiocres dans le domaine de la prévention et de l'éducation à la santé mais, en matière de soins, beaucoup de problèmes se posent également : permanence des soins, urgences, possibilités de consulter un médecin sur l'ensemble du territoire, situation des hôpitaux, découragement des professionnels - pour ne pas dire plus. Les Français ont conscience de cette situation et ils attendent beaucoup de vous, monsieur le ministre. Nous espérons qu'ils ne seront pas déçus. Il n'y a d'ailleurs aucune raison qu'ils le soient.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Merci !

M. Jean-Luc Préel. Diverses lois ont été votées, des décrets sont en cours de publication. Vont-ils résoudre les problèmes ? Je ne le pense pas.

Vous avez renforcé l'étatisation avec ce que certains de nos collègues ont appelé un « proconsul », ou plutôt un « superpréfet » de la santé, nommé en conseil des ministres et responsable des choix et des négociations. Pour ce faire, vous vous êtes abrité derrière un pseudo-paritarisme rénové qui a valeur d'alibi. Nous sommes bien loin d'une vraie responsabilisation des acteurs.

Au contraire, à l'UDF, nous pensons qu'il est nécessaire de prendre en compte les besoins, et surtout d'impliquer tous les acteurs - professionnels et associations de malades - dans les décisions en amont et dans la gestion en aval. C'est pourquoi nous prônons une réelle régionalisation de la santé, avec des conseils régionaux de santé délibératifs et un exécutif régional regroupant tous les secteurs de la santé.

Non seulement vous n'avez pas choisi cette voie, mais vous avez accru la confusion au niveau régional en créant les GRSP présidés par le préfet. Vous avez ainsi creusé le fossé entre le soin et la prévention, ce qui est à mes yeux absurde. Vous avez confié au préfet - et donc, dans les faits, à la DRASS - la présidence de ce groupement, alors que le directeur de l'ARH est nommé en conseil des ministres. Comment un tel groupement peut-il fonctionner ? Les connaisseurs de l'administration ne peuvent qu'éprouver des doutes.

Vous n'en avez pas profité pour clarifier les rôles respectifs des préfets, des DRASS, des DASS et des ARH.

Vous pourriez déjà fusionner les DRASS et les DASS du département siège de la région, confier aux ARH toute la politique de la santé et aux DASS la politique de la ville et de la solidarité. Les rôles seraient ainsi clarifiés et les moyens humains et financiers optimisés.

Il faudrait pour cela une volonté forte. Prenez donc ces décisions, monsieur le ministre, car il faut optimiser les moyens.

Or vos moyens ne sont pas considérables. Je n'évoquerai pas, car vous la connaissez, la grande détresse des médecins inspecteurs de la santé, dont les tâches demandent de plus en plus de responsabilités sans que leur action soit reconnue.

Je n'ai pas le temps dans cette brève intervention de vous interroger sur des problèmes majeurs sur lesquels nous attendons des réponses : permanence des soins, avec les problèmes de la rémunération des astreintes, des permanenciers, de la coordination entre SAMU, pompiers et ambulanciers ; démographie médicale, avec la nécessité d'anticiper le manque programmé de certaines spécialités et le problème de la couverture du territoire ; mise en œuvre effective de la formation médicale continue, indispensable à la qualité des soins ; hôpital, avec la nécessité de responsabiliser le conseil d'administration, de prendre en compte la pénibilité et la responsabilité des tâches en allant vers des contrats, ainsi que l'urgence d'un rebasement budgétaire pour pouvoir s'engager dans la tarification à l'activité. Qu'en sera-t-il des investissements alors que l'État semble se désengager ?

Je voudrais faire quelques remarques directement liées à votre budget.

La Haute autorité doit être l'un des organes essentiels de la réforme, chargée d'évaluer, de hiérarchiser les actes et les prestations. J'ai déjà, au nom de l'UDF, dit notre étonnement devant la discordance entre une nomination très solennelle comme celle du Conseil constitutionnel ou du CSA et un rôle seulement consultatif. Nous aurions souhaité qu'il s'agisse réellement d'une autorité scientifique indépendante. Le sera-t-elle ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Oui.

M. Jean-Luc Préel. Aura-t-elle les moyens, alors que vous lui octroyez 1,6 million et cinq emplois complémentaires ?

L'UDF plaidait pour la création d'un INSEE de la santé plutôt que pour un institut des données de santé. En effet, les professionnels de santé ne font pas confiance aux caisses, lesquelles ne souhaitent pas que les URML disposent des données. Il nous paraissait donc nécessaire de disposer d'un organisme scientifique chargé de recueillir les données, de les traiter et de les mettre à la disposition de tous, permettant ainsi un pilotage en temps réel. Cet organisme aurait pu regrouper les services informatiques existants, notamment ceux de la CNAM. Vous avez choisi un institut des données de santé anonymisées, sans remettre en cause l'existant, vous avez donc créé un organisme supplémentaire. Vous semblez d'ailleurs si peu y croire que vous lui accordez seulement 100 000 euros pour fonctionner. J'attends avec intérêt le résultat.

La création d'un institut pour le cancer doit être saluée. La lutte contre le cancer se voit doter de 21 millions supplémentaires. Il est nécessaire d'obtenir une meilleure participation des femmes au dépistage du cancer du sein, de mettre enfin en œuvre le dépistage du cancer du colon et du rectum. Il est indispensable de renforcer la lutte contre les facteurs de risque, notamment l'alcool et le tabac, en commençant tout simplement par ne pas remettre en cause la loi Evin, qui réalisait un équilibre souhaitable.

M. Jean-Marie Le Guen. Très, très bien !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il n'est pas question de la remettre en cause !

M. Jean-Luc Préel. La réforme de l'assurance maladie autorise une bien timide régionalisation. Comment seront mises en œuvre les missions régionales ? Surtout, comment seront expérimentées les ARS ? Quel sera leur périmètre ? La prévention, l'éducation, la formation, par exemple, seront-elles intégrées dans ce périmètre ?

Comment expérimenter les ARS qui doivent conduire à une fongibilité des enveloppes hospitalières et ambulatoires ? Cette expérimentation s'accompagnera-t-elle de conseils régionaux de santé délibératifs contrôlant l'exécutif ? Quels moyens avez-vous prévus pour cette expérimentation ?

La toxicomanie est un problème majeur de notre société. La lutte contre la toxicomanie est donc présentée à juste titre comme l'un des axes majeurs de la politique gouvernementale. La mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT, doit être le fer de lance de l'action gouvernementale dans ce domaine. Or sa dotation budgétaire pour 2005, d'un montant de 38 millions d'euros, est en baisse par rapport à 2004. Aussi, il serait bon que le Gouvernement clarifie ses intentions réelles sur ce sujet et que ces crédits soient épargnés lors des régulations budgétaires.

Depuis le début de l'épidémie, le sida a tué 20 millions de personnes dans le monde et près de 35 000 en France. Aujourd'hui, on estime à 120 000 le nombre de porteurs du virus dans notre pays, et un tiers d'entre eux ne sauraient pas qu'ils sont atteints. En dépit des plans de lutte contre l'infection et les progrès médicaux, la maladie ne recule pas assez et la vigilance tend même à se relâcher. Il est donc plus que jamais nécessaire que le Gouvernement mette en œuvre une politique ambitieuse axée sur la prévention et l'information afin d'enrayer le développement de l'épidémie.

En remplaçant une partie des crédits alloués à la CMU par un crédit d'impôt au titre des contrats d'assurance complémentaire de santé individuels, le Gouvernement a pratiqué un tour de passe-passe budgétaire visant à abaisser ses recettes tout en diminuant ses dépenses pour donner l'impression que ces dernières se stabilisent. Or cette opération se réalise au détriment des considérations sociales qui doivent présider à la couverture maladie universelle, alors que les plus démunis, les SDF notamment, n'y ont toujours pas accès.

La mise en œuvre d'une aide personnalisée à la santé, une APS, pour laquelle vous aviez un temps milité, que nous avions souhaitée tous ensemble, et qui supprime l'effet de seuil, ne serait-elle pas préférable ?

L'aide médicale d'État, l'AME, permet chaque année à des personnes étrangères en situation irrégulière et ne pouvant prétendre à la CMU de bénéficier de soins urgents. Il apparaît néanmoins que la dotation votée en loi de finances initiale se révèle tous les ans insuffisante et que des crédits supplémentaires doivent être attribués en loi de finances rectificative. Ainsi, en 2004, 233 millions d'euros avaient été votés en loi de finances initiale, puis 410 en loi de finances rectificative. Il convient donc de corriger au plus vite cette mauvaise pratique budgétaire.

Pour conclure, vous êtes en charge, monsieur le ministre, d'un secteur majeur, tout le monde en convient. Chacun tient à sa santé et souhaite pouvoir bénéficier de soins de qualité. Le secteur de la santé connaît aujourd'hui une crise profonde, morale, organisationnelle et financière. Vous ne pouvez bien entendu pas tout résoudre en quelques mois avec un budget limité. Je vous ai posé quelques questions, j'attends vos réponses avec grand intérêt. Merci d'avance pour votre écoute. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Jean-Marie Le Guen. Bravo ! Il y avait beaucoup de choses intéressantes !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Oui, et il y a une évolution de semaine en semaine !

M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial.

M. Édouard Courtial. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, je focaliserai quant à moi mon propos sur le volet famille de ce fascicule.

Certes, les crédits consacrés à la famille tiennent en deux lignes dans le bleu budgétaire : celle du chapitre 46-34, intitulé « interventions en faveur de la famille et de l'enfance » et celle du chapitre 37-03, relative à l'activité du défenseur des enfants.

Certes, le budget du ministère de la famille et de l'enfance ne représente que la partie émergée de l'iceberg de la politique familiale, dont les grandes lignes, tout du moins sur le plan économique et social, sont tracées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mais ne boudons pas notre plaisir, madame la ministre de la famille, de voir que les crédits d'État destinés à la famille devraient augmenter de plus de 12 % l'année prochaine. Saluons l'importance de cette hausse dans le contexte actuel de stabilisation des dépenses de l'État. Voyons-y un signal fort envoyé aux familles : le gouvernement actuel poursuit sa politique familiale ambitieuse.

Penchons-nous de manière plus approfondie sur ces crédits. Hors budget du défenseur des enfants, les dépenses en faveur de la famille s'élèveront au montant non négligeable de 1,6 milliard d'euros en 2005. Les dépenses de transfert en faveur des familles fragilisées constituent encore l'essentiel du budget. Les dotations de l'État à la branche famille de la sécurité sociale pour le paiement de l'allocation de parent isolé et les dépenses versées aux gestionnaires des tutelles et curatelles représenteront en effet plus de 97 % des dépenses.

L'augmentation des montants inscrits pour ces deux postes est assez remarquable : 12,1 % pour l'API et 14,2 % pour les tutelles et curatelles. Elle s'explique par une hausse sensible du nombre des bénéficiaires.

Nous nous réjouissons du fait que l'effort de l'État en faveur des familles les plus fragiles devrait être encore renforcé l'an prochain. En effet, en 2005, la Conférence de la famille abordera le thème du soutien aux familles fragiles, au premier rang desquelles on trouve les familles monoparentales. Une réflexion sur une réforme du système des tutelles et curatelles devrait également être engagée.

Par ailleurs, nous ne pouvons que nous féliciter de la hausse des dépenses d'intervention proprement dites, qui constituent le cœur de l'action de ce ministère. En deux ans, ces dépenses d'intervention, divisées en crédits déconcentrés et crédits non déconcentrés, ont augmenté de près de 20 %, 19,4 % exactement, passant de 22,7 à 27,1 millions d'euros.

Pour l'année 2005, elles comprennent 3 millions d'euros de mesures nouvelles, qui traduisent deux engagements forts que le Gouvernement a pris cette année.

Le premier d'entre eux est le lancement d'une véritable politique de l'adolescence, objet de la Conférence de la famille du 29 juin dernier. Plusieurs mesures avaient été annoncées à cette occasion. La plus attendue était probablement la mise en place d'un réseau de maisons de l'adolescence, ayant pour but l'accueil, l'écoute, l'information et la prise en charge médico-sociale des adolescents. Or le projet de loi de finances prévoit des aides de l'État au démarrage des premières structures. Ces financements subventionneront des dépenses d'équipement - matériel informatique, mobilier - ou d'investissement - frais de construction, acquisitions immobilières -, réalisées par des collectivités locales ou des associations. D'autres mesures en faveur de l'adolescence ont déjà été transcrites, comme la mise en place d'une consultation médicale gratuite en classe de cinquième, votée dans le PLFSS, branche maladie.

Enfin, il convient de souligner l'introduction, par l'article 64 du PLF, d'un dispositif d'exonération fiscale en faveur des seize - dix-sept ans qui effectuent des stages en entreprises pendant leurs congés scolaires ou universitaires.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État aux personnes handicapées. C'était une mesure très attendue !

M. Édouard Courtial. Le second engagement pris par le Gouvernement était la relance de la politique de l'adoption, relance d'autant plus pertinente dans le contexte actuel de multiplication des couples ne parvenant pas à avoir d'enfants. À cette fin, le projet de loi de finances introduit deux mesures principales : la création d'une agence française de l'adoption, d'une part, et le soutien financier des organismes autorisés pour l'adoption, d'autre part. Pour donner une vision globale de la nouvelle politique de l'adoption, mentionnons également, bien qu'il figure dans le PLFSS, le doublement de la prime d'adoption.

Il n'est pas inutile, par ailleurs, d'évoquer une autre disposition, particulièrement intéressante, de ce projet de loi de finances en faveur des familles : le relèvement du plafond, de 10 000 à 15 000 euros, des dépenses éligibles à la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile.

Toutes ces mesures prises, tant au niveau des crédits d'État que dans les articles rattachés, montrent que, après une année 2004 particulièrement ambitieuse, le Gouvernement poursuit ses efforts en faveur des familles.

Rappelons en effet que l'année 2004 a vu la naissance de la prestation d'accueil du jeune enfant, la création du crédit d'impôt familles pour les entreprises, le lancement du « plan crèches » prévoyant 20 000 nouvelles places, la mise en place des points infos familles dans tous les départements et le renforcement du dispositif de protection de l'enfance.

En égrenant toutes ces réalisations, on constate que le Gouvernement a bien compris qu'une vraie politique familiale devait viser deux objectifs, complémentaires et surtout pas contradictoires, la compensation des charges de famille et la redistribution en faveur des familles les plus fragiles, car privilégier exagérément le second objectif revient à faire de la politique familiale une politique essentiellement sociale et, dans une certaine mesure, idéologique.

N'oublions surtout pas, pour dresser un tableau complet de cette politique, la réforme, attendue depuis longtemps, de la législation du divorce et le développement de la médiation familiale qu'elle a engendrée.

Pour que les engagements soient totalement tenus, il ne reste plus qu'à concrétiser les espoirs de milliers d'hommes et de femmes qui s'occupent quotidiennement de nos enfants et dont le statut n'est pas assez valorisé : je parle évidemment des assistantes et assistants maternels. C'est pourquoi le groupe UMP se réjouit tout particulièrement du fait que le projet de loi relatif à cette profession sera normalement examiné d'ici à la fin de l'année.

En tout état de cause, le bilan à mi-législature de ce gouvernement sur le plan de la politique familiale paraît bien meilleur que celui à pareille époque de son prédécesseur. Citons pêle-mêle, et sans prétendre à l'exhaustivité, quelques mesures, funestes pour les familles, adoptées pendant la période 1997-2000 : la mise sous conditions de ressources des allocations familiales,...

M. Jean-Marie Le Guen. ...que vous avez supprimée !

M. Édouard Courtial. ...sa substitution par une baisse du plafond du quotient familial, la suppression de la disposition de la loi famille de 1994 ouvrant droit aux allocations familiales jusqu'à l'âge de vingt-deux ans.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais vous avez corrigé tout cela, n'est-ce pas ?

M. Édouard Courtial. Permettez-moi, avant de conclure, de vous faire part d'une réflexion personnelle. Pour le jeune élu que je suis, ou plutôt, devrais-je dire, pour le jeune élu et père que je suis (Sourires), la famille représente la pierre angulaire sur laquelle devrait reposer notre société. Or, aujourd'hui, cette dernière souffre de nombreux maux, qui trouvent leur origine dans la fragilisation de la cellule familiale : la montée de la violence, l'exacerbation de l'individualisme, la perte de repères...

Une politique familiale doit donc être plus qu'une politique d'aide à la famille qui, en général, vise à atténuer des dysfonctionnements déjà maintes fois constatés. Une politique familiale doit également être préventive. C'est le cas quand elle œuvre pour la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle. Cette piste doit précisément être approfondie. Inspirons-nous d'expériences menées par certains de nos voisins européens : la conduite d'une véritable politique de promotion du temps partiel aux Pays-Bas, la mise en place d'un système très généreux de congés de maternité et de paternité au Danemark, l'ouverture des structures de garde collective pendant des plages horaires beaucoup plus larges dans certaines provinces de Belgique.

Dans le même esprit, il paraît indispensable de responsabiliser les familles, notamment les parents vis-à-vis de leurs enfants, et de développer la solidarité intergénérationnelle. La politique familiale ne possède pas uniquement un caractère économique et social. Elle répond également à des questions de société et philosophiques. C'est pourquoi la tenue d'une future conférence de la famille sur ces thèmes pourrait être une bonne idée.

J'ai bien conscience de m'être éloigné de ma mission première qui était de me prononcer sur la part du budget de l'État consacrée à la famille. Pour le groupe UMP que je représente, vous l'aurez compris, c'est un bon budget. C'est pourquoi les parlementaires de ce groupe voteront en sa faveur. Et cela vaut évidemment, monsieur le ministre, pour l'ensemble du budget que vous présentez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Merci !

M. le président. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. L'examen du projet de loi de finances intervient au moment où le projet de loi relatif à l'égalité des chances, à la participation et à la citoyenneté des personnes handicapées est sur le point d'être discuté en deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Je m'adresserai donc plus particulièrement à vous, madame la secrétaire d'État aux personnes handicapées.

Si l'on peut relever des avancées, pour illustrer le caractère prioritaire qu'a donné le Président de la République au dossier des personnes handicapées, on peut aussi avoir des craintes sur l'application réelle des mesures annoncées dans ce projet de budget pour 2005.

En effet, il se confirme, année après année, que le plan triennal 2001-2003 n'a pas été conduit à son terme tel qu'il était prévu en matière d'évaluation et d'orientation, les 2,3 millions d'euros prévus en 2003 ayant été supprimés et l'enveloppe accompagnant la fusion des sections de COTOREP dans dix départements pilotes n'ayant été reconduite ni en 2003 ni en 2004. Il eût été pourtant intéressant de s'appuyer sur ces expériences pour mettre en place la future commission des droits et de l'autonomie.

Sans vouloir intervenir sur les mesures diverses en faveur des travailleurs handicapés, je souhaite juste rappeler qu'en 2004 on notait une augmentation bienvenue de 1,248 million d'euros après un gel de crédits intervenu en 2003 de l'ordre de 3 millions d'euros. Or, en 2005, vous nous proposez de voter une diminution des crédits de 976 200 euros par rapport à 2004.

Concernant les COTOREP, en 2000, le ministère de l'emploi et de la solidarité avait mobilisé des moyens complémentaires pour leur fonctionnement.

En 2003, contrairement au déroulement du plan trisannuel, aucun crédit nouveau n'était inscrit au budget. Il en a été de même en 2004 et je crains qu'il en soit également ainsi en 2005.

Sachez que nous suivrons avec attention la réalité de ce budget pour l'année 2005. Aujourd'hui, je voudrais tout particulièrement attirer votre attention sur deux sujets qui suscitent beaucoup d'espoirs et d'impatience : la scolarisation des enfants en situation de handicap et l'accueil des enfants plus lourdement handicapés.

L'article L. 112-1 du code de l'éducation institue l'obligation éducative pour les enfants et adolescents handicapés et fixe comme objectif prioritaire leur intégration en milieu scolaire ordinaire, sans pour autant instituer une obligation scolaire.

Le ministère de l'éducation nationale a néanmoins voulu présenter en 2003 un plan pluriannuel visant à accroître l'accueil des élèves handicapés en garantissant la continuité des parcours scolaires entre les différents niveaux d'enseignement, en développant l'accueil des élèves, en renforçant la formation spécialisée des enseignants, et, enfin, en accompagnant ces évolutions par des moyens humains et techniques : auxiliaires de vie scolaire, matériels pédagogiques.

Aujourd'hui, pour la scolarisation des enfants comme pour l'accueil des jeunes plus lourdement handicapés, il nous est encore difficile de savoir si les moyens afférents sont réellement mobilisés à cet effet, ou s'il ne s'agit, une fois encore, que d'un effet d'annonce. Rien dans ce budget ne nous permet réellement de nous éclairer.

À titre d'exemple, après la suppression des emplois-jeunes dans l'éducation nationale, qui était pourtant fortement mobilisée pour l'accueil des enfants handicapés, nous ne savons pas si les 6 000 postes d'auxiliaires de vie scolaire avancés par le ministre de l'éducation nationale en décembre 2002 sont des postes nouveaux, ou s'ils recouvrent la totalité des postes existants que vous avez supprimés.

Pourtant, pour reprendre la philosophie de la convention internationale des droits de l'enfant, que nous allons célébrer dans quelques jours, « l'enfant handicapé est d'abord un enfant », et parce qu'il est porteur d'un handicap, il doit se voir garantir des prestations spécifiques.

Quelles sont les prestations spécifiques que vous réservez à ces enfants ? À la lecture de vos budgets, elles semblent encore être trop modestes.

L'année 2005 verra la mise en application de la loi égalité des droits et des chances, participation et citoyenneté des personnes handicapées, et nous espérons un effort tout particulier pour traduire concrètement la priorité présidentielle.

Comme les familles, les associations et les professionnels l'expriment, nous demandons qu'un réel effort financier soit garanti pour apporter les réponses que nous attendons tous en ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. Madame la secrétaire d'État aux handicapés, je souhaite que nous nous arrêtions quelques instants sur les crédits consacrés au handicap. L'an passé, j'avais demandé que nous puissions disposer d'un document budgétaire regroupant l'ensemble des crédits consacrés aux actions en faveur des personnes en situation de handicap. II s'agissait, au travers des différents ministères concernés, d'une part, et des crédits du projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'autre part, d'avoir enfin à notre disposition l'exact montant des dépenses consacrées aux politiques du handicap dans notre pays.

Votre prédécesseur en avait pris l'engagement. Manifestement, sa promesse n'engageait qu'elle. C'est très regrettable pour plusieurs raisons.

La première, c'est que l'heure est à la décentralisation des politiques des handicaps, et je vois mal comment les conseils généraux vont s'y préparer alors qu'ils ignorent encore ce qui au juste, en termes d'obligations financières, va leur être transféré.

Vous avez indiqué devant le Sénat que, si les crédits se révélaient insuffisants, il appartiendrait aux conseils généraux de les abonder. Permettez-moi de vous dire que je trouve cela un peu trop facile, voire un petit peu choquant. L'État, en effet, n'est pas en mesure de nous donner une image de la réalité financière des crédits du handicap. En revanche, il en transfère la compétence.

La deuxième raison c'est que nous n'en savons pas plus sur la répartition qui sera faite des 800 millions d'euros en provenance de la journée de solidarité. Quelle sera la part consacrée à la nouvelle prestation de compensation que crée le texte de réforme de la loi de 1975 ? Ces crédits seront-ils également consacrés à l'ambitieux programme de création de places que vous avez annoncé ? En un mot, l'État n'est-il pas en train de faire des promesses qu'il fera payer par les autres ?

Enfin, le Sénat a achevé, en deuxième lecture, l'examen du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Pourriez-vous nous dire à quelle date ce texte viendra devant notre assemblée ? Au train où vont les choses, rien ne pourra être mis en place avant 2006. C'est d'autant plus grave que nous sommes toujours en attente du projet de loi qui doit venir mettre en conformité, avec le rapport Briet-Jamet, le statut de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Vous le voyez, nous sommes dans le flou sur trop d'aspects pour que les personnes en situation de handicap et leurs représentants soient rassurés.

Le Sénat, notre assemblée et le Gouvernement ont donné de grands espoirs en ouvrant ce grand chantier dont le Président de la République a fait une de ses priorités. Mais le temps passe et le chantier n'avance pas vraiment. Il est donc indispensable que vous puissiez nous rassurer quant au calendrier et au fond de la réforme que nous avons commencé à entreprendre avec vous et que nous souhaitons voir aboutir.

M. Jean-Luc Préel. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Mansour Kamardine.

M. Mansour Kamardine. Mesdames, messieurs, j'ai la responsabilité de rapporter devant vous l'avis du groupe UMP sur le budget de la santé. À titre personnel, et s'agissant de la collectivité de Mayotte, j'aurai en outre deux questions à poser à M. le ministre de la santé et à Mme la ministre chargée de la famille.

Le présent projet de budget traduit clairement l'ambition du Gouvernement. Les crédits s'élèvent à 8,63 milliards d' euros, ce qui représente une hausse de 5 % par rapport à 2002 et une stabilité par rapport au budget précédent.

Les chiffres que je viens d'indiquer sont source de satisfaction s'agissant du budget de la santé. En effet, dans un contexte budgétaire contraint, votre ministère bénéficie à nouveau cette année de moyens importants, traduisant s'il en était encore besoin la priorité accordée par ce gouvernement à la santé publique.

Il s'agit aujourd'hui non plus d'organiser notre système de santé à court terme avec pour seule approche des plans conjoncturels, mais plutôt de mettre en œuvre une politique de santé novatrice inscrite dans la durée.

Votre budget se donne les moyens d'une telle ambition. Il instaure ce que notre collègue Bérangère Poletti qualifie dans son excellent rapport de « nouvelle gouvernance du système de santé ».

Votre projet parle aux malades et plus généralement à tous ceux qui souffrent. Il apporte de vraies réponses aux difficultés rencontrées par nos compatriotes. Je pense notamment aux handicapés, qui attendent avec impatience la grande loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, texte qui doit revenir dans cet hémicycle dans le cadre du débat parlementaire.

Dans le même esprit, le Gouvernement a su prendre ses responsabilités sur un sujet aussi ardu que celui de la réforme de l'assurance maladie, adoptée le 13 août dernier sous votre houlette, monsieur le ministre. Cette réforme d'envergure est à l'honneur du Gouvernement, qui a su mettre un terme à la dérive que nous connaissions.

Vous avez inauguré une nouvelle approche de la politique de santé publique dans notre pays à travers la loi de programmation du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Après la justice et la sécurité, la santé publique a bénéficié à son tour de sa loi de programmation.

Cette loi nous incite à appréhender différemment la santé publique et témoigne du rôle que doit jouer l'État, en particulier après les crises sanitaires de ces dernières années.

Notre politique nationale de santé est encore trop axée sur le curatif et pas assez sur le préventif, ce qui fait de la France un pays paradoxal où le système de santé est l'un des plus performants du monde mais où la mortalité des moins de 65 ans est l'une des plus fortes - je pense aux suicides, aux cancers, aux accidents qui touchent toutes les générations.

La loi de programmation fixe un cap et des objectifs clairs pour les cinq années à venir : elle liste les cent priorités de l'État en matière de santé publique et clarifie son rôle ; elle associe les acteurs publics et privés et les incite à travailler ensemble, ce qui est une excellente chose ; enfin elle crée une nouvelle formation à travers l'école des hautes études en santé publique.

Pour preuve de la réalité de ces mesures, votre budget traduit cette nouvelle approche en consacrant plus de 26 millions d'euros à ces politiques, les crédits de santé publique, de veille et de sécurité sanitaires enregistrant même une hausse de près de 9 %.

Ainsi, les moyens consacrés au « plan cancer » correspondent à la feuille de route que le Président de la République nous a proposée en lançant le plan de mobilisation nationale de lutte contre le cancer : 32 millions d'euros seront alloués à l'institut national du cancer et les moyens affectés permettront de poursuivre les actions de dépistage précoce, en particulier du cancer du sein.

Je souhaite, mes chers collègues, que nous mettions tout en œuvre pour diffuser la culture du dépistage préventif, afin que celui-ci devienne la règle et non l'exception, comme c'est encore trop souvent le cas.

Sur un total d'environ 81 millions d'euros, ce sont 29 millions d'euros qui seront consacrés à la mise en place des programmes de dépistage dans les prévisions de crédits du plan cancer pour 2005.

Les programmes de dépistage du cancer de l'utérus et du cancer colorectal, qui sont légitimement très attendus, sont désormais financés. Néanmoins, je le déplore, trop de cancers sont diagnostiqués tardivement, avec les terribles conséquences que l'on sait. C'est pourquoi ces efforts devront à l'avenir être soutenus et amplifiés. Avec 700 000 personnes atteintes d'une maladie cancéreuse et 250 000 nouveaux cas diagnostiqués chaque année, nous avons le devoir de déclarer la guerre à ce fléau.

Un autre fléau doit mobiliser la nation tout entière : le sida. En consacrant près de 57 millions d'euros à la lutte contre le sida, vous avez défini une priorité que nous partageons.

Votre budget poursuit son effort en direction des jeunes, notamment en finançant le plan quinquennal contre les drogues et la toxicomanie. Nous devons poursuivre notre effort en matière de lutte contre la toxicomanie. Si nous ne le faisions pas, nous serions coupables de  non-assistance à jeunesse en danger.

Autre innovation de ce budget, la réforme en profondeur des dispositifs d'alerte et de sécurité sanitaire pour une meilleure évaluation des risques. Le plan national « santé environnement », dont notre pays s'est doté au mois de juin dernier, en est la parfaite illustration. Son objectif est de mener d'ici à 2008 les actions nécessaires à la prévention des pathologies d'origine environnementale, et notamment des pollutions ayant un impact sanitaire. 3,5 millions d'euros seront alloués à la mise en œuvre de ce plan, qui symbolise l'avènement de nouvelles méthodes en matière de santé publique, en faisant de la prévention et de l'information des priorités.

Toujours dans le domaine de la prévention, la création de l'agence de biomédecine et de la Haute autorité de santé révèle une nouvelle organisation des moyens mis au service de la prévention, plus rationnelle et par conséquent plus efficace. Il est vrai, comme le souligne le rapport, que la multiplication des agences de veille et de sécurité sanitaires pourrait entraîner un émiettement de leurs interventions et des moyens qui leur sont consacrés.

Dorénavant, la prévention et la sécurité, aussi bien dans le domaine alimentaire qu'environnemental, qu'il s'agisse des produits de santé, du sang ou bien encore des greffes, seront mieux assurées.

Après avoir évoqué l'approche nouvelle, j'en viens au deuxième axe de votre budget, qui porte sur l'amélioration de l'accès aux soins et de leur qualité.

La qualité de notre système de santé publique passe prioritairement par des structures adaptées aux besoins des territoires. En vertu du principe selon lequel on n'administre bien que de près, ont été créés des groupements régionaux de santé publique et des agences régionales de santé qui se trouveront dorénavant plus près des besoins de nos concitoyens.

Ces initiatives étaient urgentes car notre pays souffre d'inégalités criantes au niveau de la répartition territoriale, de la médecine de ville comme de la médecine hospitalière.

Du fait de l'inertie du gouvernement précédent, un sentiment d'insécurité sanitaire a envahi au fil du temps les territoires ruraux. Il fallait agir.

Quant à l'égal accès aux soins pour tous les Français, votre gouvernement a su, là aussi, prendre ses responsabilités et je souhaiterais, en ma qualité d'élu de Mayotte, saluer le travail qu'il a accompli en faveur des Mahorais. L'année 2004 aura été une année historique pour les Mahoraises et les Mahorais, avec l'extension du bénéfice de la sécurité sociale.

La réforme engagée localement soixante ans après l'instauration de la sécurité sociale constitue, à n'en pas douter, une avancée considérable. Mais des améliorations urgentes sont nécessaires pour la rendre plus efficace en mettant un terme au tri infirmier, à la gratuité des soins dans les hôpitaux, tout en réorganisant la délivrance des médicaments dans ces établissements.

L'efficacité de la réforme dépend également de la signature par les professions libérales de la convention locale qui leur permettra de s'installer dans toutes nos communes et rassurera ceux qui souhaitent ouvrir un cabinet d'analyses médicales ou de radiologie. Connaissant l'avis des administrations, je serais heureux de connaître la position personnelle de M. le ministre de la santé sur ces questions.

Pour clore ce chapitre mahorais, madame la ministre de la famille et de l'enfance, je vous dirai que, pour moi, santé rime avec famille. Si la famille n'est pas bien portante, la santé en pâtit.

C'est dans ce souci que j'ai proposé le déplafonnement des allocations familiales à Mayotte. Ce dossier ne date pas d'hier. Déjà, en 2002, à l'occasion d'un déplacement dans l'île, Mme Fontaine, alors présidente du Parlement européen, s'était émue du traitement injuste et discriminatoire dont étaient victimes les enfants français de Mayotte.

Comme vous le savez, le Président de la République a donné des instructions pour mettre un terme à ces discriminations inacceptables. La décision présidentielle, malheureusement, se heurte - pour des raisons inavouables - à un refus de certaines administrations centrales confortées par un avis de l'IGAS.

Très solennellement, je me permets de vous demander, madame la ministre, d'indiquer à la représentation nationale quelle est pour vous la décision la plus légitime : est-ce celle du Président de la République ou celle des administrations centrales ? La réponse est importante dans une démocratie comme la nôtre.

Enfin, la loi du 13 août dernier a institué un crédit d'impôt qui bénéficiera aux personnes jusqu'ici non couvertes par un organisme complémentaire et dont les ressources étaient comprises entre le plafond CMU et ce même plafond majoré de 15 %. C'est l'une des dispositions les plus heureuses de cette loi, car 2 millions de nos compatriotes vont pouvoir bénéficier d'une couverture sociale.

Cette mesure répond elle aussi à l'un des engagements du chef de l'État en apportant une réponse aux personnes exclues du système de protection sociale du fait de leurs revenus trop modestes. Ces personnes n'étaient pas assez riches pour s'offrir des soins dignes de ce nom et pas assez pauvres pour bénéficier des dispositifs de prise en charge.

Je voudrais saluer le pragmatisme et l'humanité de cette mesure, qui permettra de résoudre des situations d'injustice et de souffrance qui sont insupportables dans une société comme la nôtre.

Plus de justice, plus d'humanité, des moyens mieux employés au plus près des besoins, dans un mouvement de réforme audacieux. En un mot, je voudrais dire au docteur Douste-Blazy que son diagnostic sur l'état de notre santé est juste et que l'ordonnance qu'il a prescrite pour son remède est efficace.

M. Jean-Marie Le Guen. Il n'est pas là ! Il a dû prendre un hélicoptère pour répondre à une urgence médicale !

M. Mansour Kamardine. Mon cher collègue, un ministre n'est jamais absent. Il est représenté par d'autres ministres, qui sont là et qui nous écoutent !

M. le président. Je vous demande de conclure, monsieur Kamardine.

M. Mansour Kamardine. Je conclus, monsieur le président, si nos amis de l'opposition me laissent poursuivre !

M. le président. Ils vous ont laissé parler !

M. Mansour Kamardine. Toutes les raisons que je viens d'évoquer incitent le groupe UMP à adopter avec enthousiasme ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État aux personnes handicapées. Très bonne intervention !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, comment juger un budget qui nous est présenté et comment le contrôler, en tant que parlementaires, alors que vous multipliez les annonces, évoquez de nouvelles priorités, puisant tour à tour dans le budget de l'État - assez peu, il faut le dire - et dans celui de l'assurance maladie, généralement sans limite ?

Comment interpréter une annonce comme celle, faite aujourd'hui même, d'un « plan périnatalité » qui représenterait un effort supplémentaire de 160 millions, alors que rien de tel ne figure dans le projet de loi de finances ? Pas une ligne dans le budget de l'État n'indique la direction dans laquelle vous prétendez aller !

Où avons-nous la possibilité de juger votre politique ? Comptez-vous dépenser une telle somme sans la soumettre au contrôle du Parlement ou bien s'agit-il d'une annonce sans contenu réel ? Peut-être comptez-vous procéder à des redéploiements, mais au bénéfice de qui et comment ? Où est le contrôle du Parlement et comment pouvons-nous aujourd'hui débattre sérieusement du budget de la santé ?

On pourrait trouver logique qu'après la réforme de l'assurance maladie du 13 août dernier, le ministre de la santé soit tenté en permanence de demander au proconsul d'appliquer sa politique de la santé. Mais n'est-ce pas lui qui prétend que l'assurance maladie est responsable de sa gestion et l'État de la sienne, et que l'État n'est pas le gérant mais le garant de la santé publique ?

Le ministre veut nous faire croire à la séparation des pouvoirs, qui n'est qu'une fiction. Je pose donc à nouveau la question : où va-t-il chercher les financements des politiques qu'il ne cesse d'annoncer ?

Parfois nous connaissons la réponse, comme pour le financement du plan Biotox, qui est pourtant une prérogative évidente de l'État. Il ne faut pas le chercher dans le budget que nous allons voter aujourd'hui, mais dans celui de l'assurance maladie, que nous avons voté il y a une quinzaine de jours !

Prenons le dossier de l'amiante, dans lequel l'État est directement impliqué - je parle de sa responsabilité en tant qu'employeur et de sa responsabilité morale, qui n'est plus seulement validée sur un plan politique mais qui l'est également sur un plan juridique, depuis les arrêts du Conseil d'État. On ne trouve pas trace, dans le budget de l'État, de son implication ni de ses responsabilités dans ce dossier. Ces chassés-croisés permanents rendent notre discussion budgétaire totalement impossible, sinon surréaliste !

Le Gouvernement se flatte d'une augmentation budgétaire qui n'est d'ailleurs qu'une déflation par rapport à 2002. La réponse du ministre, cet après-midi, au rapporteur spécial Gérard Bapt pour expliquer la progression de ce budget n'est pas de nature à nous satisfaire, comme vous pouvez l'imaginer.

Nous avons cherché, ici ou là, quelques éléments qui pourraient traduire la politique du Gouvernement. Certes, on peut imaginer que, demain, notre politique de santé mobilisera les crédits de l'assurance maladie, mais on ne peut accepter le désengagement de l'État lorsqu'il s'agit de la CMU complémentaire. Or l'État se désengage, à hauteur de plus de 100 millions d'euros, du financement de la solidarité. Je me pose donc un certain nombre de questions.

Comment l'État peut-il être crédible lorsqu'il se désengage de l'un des domaines stratégiques du ministère de la santé, à savoir la sécurité sanitaire ?

Comment l'État peut-il être crédible lorsque, après avoir voté une loi de santé publique et affirmé des priorités, non seulement il ne les finance pas mais il revient sur sa parole ? Ainsi, l'un des points positifs de la loi de santé publique portait sur l'épidémiologie et la santé au travail. L'un des articles de cette loi prévoyait que des études d'épidémiologie et de santé au travail seraient confiées à l'INVS. C'était une disposition tout à fait intéressante. Or qu'avons-nous appris il y a quelques jours ? Que les crédits de fonctionnement en faveur de l'épidémiologie ont été supprimés dans le budget de l'INVS ! Cette disposition était pourtant nécessaire !

Il est vrai que certains postes sont en augmentation, mais par une nécessité en quelque sorte juridique : je pense notamment aux fonds consacrés à l'Institut national du cancer, qui s'élèveront désormais, nous dit-on, à plus de 32 millions d'euros. À l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je vous avais fait part de nos interrogations touchant au fonctionnement de cet institut. Nous craignions notamment qu'il ne suscite une nouvelle bureaucratie dispendieuse. À ce jour, nous n'avons toujours pas d'informations plus précises quant à la nature des dépenses de cet institut. J'imagine que ces 32 millions ne sont pas destinés à financer l'ensemble du plan cancer, pour lequel on nous a annoncé des montants bien supérieurs. Nous aimerions donc savoir ce que recouvre le budget de cet institut ainsi que son mode de fonctionnement. À défaut de disposer de ces informations, le Parlement ne peut pas, là non plus, exercer un contrôle véritable.

Et puisqu'on nous parle d'exemplarité en matière de solidarité, je terminerai mon propos en abordant la question de l'aide médicale d'État : nous attendons toujours, en cette matière également, le début d'une concrétisation d'une politique complémentaire de l'assurance maladie. Il est inacceptable que la représentation nationale ne soit toujours pas informée des conditions d'application de la réforme de l'AME, puisque le décret se fait toujours attendre. Non que nous espérions quoi que ce soit d'un décret dont la santé publique a au contraire tout à redouter : mais ce serait la moindre des choses de pouvoir en juger en toute connaissance de cause. Une des rapporteures nous a simplement indiqué en commission des finances que chaque patient hospitalisé devrait désormais s'acquitter d'un forfait hospitalier de dix euros. Or les populations concernées, dont l'état sanitaire nécessite des soins d'extrême urgence, ne sont justement pas dans une situation sociale et économique qui leur permette d'assumer cette charge.

Un certain nombre de nos collègues de la majorité ont évoqué les abus entraînés par le dispositif de l'AME. Selon eux, des étrangers extrêmement riches détourneraient le dispositif pour se faire opérer sans bourse délier. L'IGAS aurait pu enquêter sur de tels abus, afin qu'ils soient déférés devant la justice pénale. En tout état de cause, ce forfait de dix euros ne suffira pas à couvrir les centaines de milliers de francs auxquels se chiffrent de tels détournements. On s'apprête pourtant à taxer des patients qui souffrent d'une véritable détresse sanitaire et sociale. Et si cette contribution peut apparaître médiocre aux yeux du Gouvernement et aux nôtres, il constituera pour eux un obstacle insurmontable à l'accès aux soins. Voilà la réalité mesquine que dissimule la politique prétendument sociale de ce gouvernement, sans que, je le répète, le Parlement ne puisse véritablement exercer de contrôle.

Pour toutes ces raisons - absence de transparence, d'explications et de justification des orientations politiques et budgétaires qu'on nous présente, absence de générosité et d'efficacité de cette politique sociale -, nous voterons résolument contre ce budget. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. Monsieur le ministre, votre budget est un bon budget ; je considère même que c'est un des meilleurs de ceux que j'ai eu à examiner depuis dix-sept ans.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis. C'est vrai !

M. Édouard Landrain. À ce titre, avec mes amis, nous le voterons.

M. Mansour Kamardine. Bravo !

M. Édouard Landrain. Mais je parlerai surtout des hôpitaux de proximité, ceux qu'on appelle les petits hôpitaux. Ils sont riches pourtant, riches d'humanité, de proximité, et nos concitoyens y sont attachés.

Monsieur le ministre, un hôpital qui dessert une population d'environ 80 000 habitants, qui assure 18 000 urgences par an, effectue 700 accouchements par an ; qui joue le jeu du réseau de soins avec les établissements des grandes cités voisines, qu'il s'agisse de regroupements de cliniques ou de centres hospitaliers régionaux ; qui fonctionne bien pour un coût moindre ; qui permet aux patients d'être soignés près de chez eux, dans un environnement familier, à l'abri des maladies nosocomiales, car il est notoire que ces problèmes sont plus rapidement circonscrits dans les petits hôpitaux ; en un mot un hôpital qui rend service à la population ; quand, au mépris des principes que vous défendez, un tel hôpital est montré du doigt par une ARH, pour qui un tel établissement n'a pas de raison d'être dans le système grandiose qu'elle compte mettre en place, j'ai bien l'impression alors, monsieur le ministre, moi qui vous ai écouté, qui vous ai entendu, soutenu, qui voterai votre budget, que vous n'êtes pas toujours entendu quand vous affirmez qu'il s'agit d'être plus proche des gens.

Un hôpital comme celui que je viens de vous décrire, qui est aussi le point de rencontre des médecins de l'espace rural, leur point d'appui s'agissant des urgences, des interventions ou des gardes, n'est-ce pas céder à la facilité que de ne pas le conserver, jusqu'à l'effacer des prévisions budgétaires ?

Voilà ce que je voulais vous dire à ce propos. Raison doit être gardée en matière médicale, et on ne doit pas répéter les outrances que nous avons connues à la fin des années quatre-vingt : le ministre de l'époque, aujourd'hui président de la fédération hospitalière de France, prétendait supprimer brutalement tous ces établissements de proximité. On a fait des progrès depuis, et je sais que vous comprenez le problème que je viens de décrire.

Mme Muguette Jacquaint. À part ça, tout va très bien !

M. Édouard Landrain. Je n'ajouterai qu'une chose, monsieur le ministre : si vous ne deviez voir qu'un seul exemple de ce que je viens de vous dire, venez visiter le centre hospitalier Francis-Robert d'Ancenis. C'est à lui que je pensais...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je m'en doutais !

M. Édouard Landrain. ...mais il y en a bien d'autres en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Vous avez là un rendez-vous, monsieur le ministre !

La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il fallait décrire ce budget d'un mot, c'est celui de désengagement qui conviendrait. Le budget que vous nous présentez marque en effet nettement un recul de l'action de l'État, que peinent à masquer les dernières mesures de décentralisation. Ce constat est particulièrement manifeste lorsqu'on regarde dans ce budget les chiffres qui concernent l'action en faveur des personnes âgées.

La lecture de votre budget, monsieur le ministre, éclairée par celle du rapport de notre collègue Gérard Bapt, est à cet égard édifiante. Certes, il s'agit de montants financiers limités au regard des sommes inscrites au projet de loi de financement de la sécurité sociale ou aux fonds attribués à la nouvelle caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA. Il ne représente en effet qu'une part marginale de la politique publique en faveur des personnes âgées en perte d'autonomie. Mais tout de même, est-il besoin de couper de manière aussi brutale dans des crédits déjà relativement peu élevés ?

Permettez-moi de citer quelques chiffres à ce sujet. Les crédits relatifs aux personnes âgées inscrits dans ce budget passent de 41,7 millions d'euros en 2004 à moins de 17 millions d'euros. Vous évoquerez bien sûr le transfert aux collectivités locales de la responsabilité des centres locaux d'information et de coordination, les CLIC, des comités départementaux ou régionaux des retraités et personnes âgées, les CODERPA et les CORERPA, même si les départements ignorent toujours les modalités du transfert global de ces dépenses. Je note au passage que le nombre actuel des CLIC est largement insuffisant pour mener la véritable politique de proximité dont les collectivités ont besoin.

Mais si l'on compare ce qui est comparable, on constate que les crédits pour la modernisation des établissements d'accueil des personnes âgées en perte d'autonomie baissent de 9 %. Comme nous l'avions déjà relevé lors de l'examen du PLFSS, vous profitez de la création de la CNSA et de la mise en place d'une nouvelle architecture pour opérer des transferts de charges, plutôt que d'accroître l'effort consenti. Et, madame la ministre, j'ignore toujours, malgré votre réponse de cet après-midi, la raison précise pour laquelle seule la moitié des crédits initialement prévus est affectée à la CNSA par le PLFSS. Ajouté à la baisse des crédits inscrits en lois de finances, cela finit par faire beaucoup ! Au total, vous ne respectez pas les engagements pris dans le cadre du plan Vieillissement et solidarité.

Au sujet des travaux d'amélioration des établissements, permettez-moi de vous poser une question que j'avais déjà posée à Monsieur Falco, et à laquelle vous avez, monsieur Douste-Blazy, apporté un début de réponse la semaine dernière. Comment faire en sorte que le coût de ces investissements ne se répercute pas automatiquement sur le prix de journée ? Comme vous le savez déjà, car je vous ai souvent interpellé sur ce problème, le prix de journée dans ces établissements constitue une source d'angoisse supplémentaire pour les personnes qui ont la charge de parents très âgés atteints de pathologies complexes. Il semble que le rapport que vous aviez commandé à l'IGAS sur sujet vous ait été remis. J'aimerais que nous puissions être informés rapidement de ses conclusions, car je n'ai jamais eu de véritable réponse en dépit des nombreux courriers que j'ai envoyés à votre prédécesseur, madame la secrétaire d'État. Nous attendons au moins un début d'ébauche de réponse à cette question essentielle. Et quand une collectivité locale participe au financement de tels travaux, le contribuable paie deux fois, par le biais de cette subvention et par le prix acquitté directement par lui, ou par le biais de l'aide sociale. Nous devons donc nous efforcer ensemble de faire avancer la solution de ce grave problème, qui est un souci de plus pour les personnes concernées.

Permettez-moi enfin de parler un instant de votre action touchant la maladie d'Alzheimer, puisqu'on a beaucoup parlé du plan cancer aujourd'hui : il me semble, au-delà de toute considération partisane, que nous sommes autant concernés par cette pathologie due à l'allongement de l'espérance de vie : ce qui constitue incontestablement une chance entraîne aussi des problèmes complexes pour chacun de nous.

Vous avez annoncé récemment la mise en place d'un plan Alzheimer, avec 88 millions d'euros prévus pour améliorer l'encadrement des personnels médicaux des établissements accueillant les personnes atteintes de cette pathologie. On ne retrouve pas vraiment ces crédits dans votre budget. En tout état de cause, et au regard de ce que je vis en tant qu'élue parisienne, ces crédits me paraissent insuffisants face aux 850 000 cas recensés dans ce pays et aux 165 000 cas déclarés chaque année. Vous vous engagez sur la création de 155 000 places d'accueil fin 2007, alors qu'on n'en compte aujourd'hui que 1822 : fort bien. Il faut certes créer des centres d'accueil de jour et des centres d'accueil temporaire. Mais, s'agissant d'un enjeu de solidarité nationale, il faudra soutenir financièrement les collectivités locales, qui ne pourront pas assumer seules ces créations dans le cadre d'une décentralisation qui leur transfère des charges trop élevées. Au-delà de cet effort nécessaire, il faudra aussi trouver le moyen d'augmenter la solvabilisation de ces personnes. Si j'insiste sur ce point, c'est que j'ai vu à Paris des centres d'accueil vides, parce que le public visé n'avait pas les moyens de payer 50 ou 60 euros par jour.

Voilà pourquoi je vous demande si vous comptez en rester là. Je suis convaincue que nous avons besoin d'une prise de conscience en la matière qui débouche sur une politique d'une tout autre envergure. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Que font les gouvernements successifs pour les familles ? à cette question importante, vitale même pour l'avenir de notre pays, la réponse est malheureusement aussi peu encourageante cette année que les années précédentes. Dans ce budget, en effet, les familles sont plutôt perdantes, malgré quelques arbitrages gouvernementaux favorables. On peut relever ainsi le relèvement du plafond des dépenses éligibles à la réduction d'impôt en cas d'emploi d'un salarié à domicile, ou encore l'allégement des droits de succession, censé favoriser les familles aux revenus moyens. Mais il y a aussi la hausse des prélèvements sociaux engendrée par la réforme de l'assurance-maladie et le plan dépendance, qui pèsera sur les revenus des familles.

En outre, on cherche en vain, du côté des dépenses, des efforts plus significatifs en faveur des familles. Ainsi, avec les mesures d'accompagnement des familles les plus fragiles - les 190 000 bénéficiaires de l'allocation de parent isolé - et des 180 000 personnes sous tutelle ou curatelle, on reste dans des ordres de grandeur similaires à ceux des précédents budgets : il n'y a pas de véritable nouveauté. Les autres dispositions sont de toute évidence assez modestes, qu'il s'agisse, de la prime d'adoption ou de la montée en puissance de la PAJE.

Il est vrai que les volumes sont énormes et je n'oublie aucune des mesures positives relevées par notre collègue Édouard Courtial.

Le retard était considérable et ce qui est gagné aujourd'hui n'est que le rattrapage de décisions - fort malheureuses - passées. En fait, on ne ressent pas plus aujourd'hui qu'hier l'ambition d'une véritable politique familiale. Pour preuve, plusieurs projets de loi ou mesures ont, cette année, touché de biais - j'allais dire télescopé - la famille : la PAJE, la loi du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance, le décret de février sur l'absentéisme scolaire, la loi sur le divorce, les objectifs ambitieux, mais assez peu suivis d'effets, de la conférence de la famille sur l'adolescence, le plan de cohésion sociale, le chantier engagé par Dominique de Villepin sur la protection des mineurs, le projet de loi reporté sur les assistants maternels...

Toutes ces mesures touchent pourtant la petite enfance, l'adolescence, la jeunesse, les mineurs victimes et délinquants, et elles émanent à la fois des ministères de la famille, de l'intérieur, de la justice et du travail. Une mère de famille n'y retrouverait pas ses petits !

Il manque une ou des mesures phares, une ou des annonces porteuses d'une grande ambition nationale.

Pourtant, notre pays connaît une situation démographique alarmante : le taux de natalité a baissé l'an dernier à 12,7 pour mille - au lieu de 13,3 pour mille en 2002 -, et le taux de fécondité - 1,9 enfant par femme - est en dessous du seuil de remplacement des générations, de 2,1.

Pour s'en convaincre, il suffit d'entendre le cri d'alarme lancé par Jean-Louis Borloo lors de la présentation de sa loi de cohésion sociale, hier, devant notre commission des affaires culturelles, familiales et sociales : il a parlé, je le cite, de « choc démographique terrible entre 2007 et 2012 ».

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il a raison !

Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance. En Europe !

M. Pierre-Christophe Baguet. C'est ce qu'a dit le ministre hier !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il est excellent, Borloo !

M. Pierre-Christophe Baguet. Notre natalité est beaucoup trop faible, quand le vieillissement de la population française se poursuit. Les conséquences ne sont pas minces : la progression démographique de l'Union européenne - 0,3 % en 2003 - est trois fois inférieure à celle des Etats-Unis : 0,9 %. Un rapport du Conseil de l'Europe, publié en février 2003, a d'ailleurs tiré la sonnette d'alarme. Il y a là un risque majeur, notamment au niveau géopolitique : avec une population de plus en plus réduite, la « vieille Europe » - comme aiment l'appeler certains Américains, d'une façon un peu péjorative - risque de peser de moins en moins dans le monde.

C'est une menace dont notre pays ne semble pas avoir conscience.

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Si.

M. Pierre-Christophe Baguet. Certes, la politique familiale ne se réduit pas à la seule politique de la natalité, mais elle doit viser à rassurer les familles, à aider les parents à assumer leur rôle éducatif, en s'adaptant aux conditions de vie actuelles des familles. Aujourd'hui, l'environnement économique, financier et social est défavorable aux familles. À salaire égal, un couple sans enfant vit mieux qu'une famille ; est-ce normal ? Le rôle du Gouvernement devrait être de permettre aux familles, craintives face à une société bloquée et à des perspectives moroses, d'avoir confiance en l'avenir.

Un pays sans natalité risque son existence même. Faire le choix d'une politique familiale ambitieuse, c'est faire le choix responsable d'assurer l'avenir à long terme de notre pays. C'est ce que nous devons à nos enfants. Cela relève de notre responsabilité collective.

Madame la ministre, je vous fais confiance.

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Merci.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je nous fais confiance. Travaillons ensemble à cette grande ambition nationale que doit être la famille.

Je vais maintenant vous faire part, si vous me le permettez, de l'intervention de mon collègue Yvan Lachaud, qui a dû partir précipitamment.

L'année 2005 doit être capitale pour les personnes handicapées avec l'adoption de la nouvelle loi d'orientation sur le handicap, dont nous espérons tous qu'elle sera réellement volontariste et courageuse, à la hauteur des attentes des personnes handicapées et de leurs familles.

C'est un chantier immense, qu'il s'agisse de l'accueil des jeunes enfants handicapés en milieu ordinaire, du droit au travail, de l'accès à la culture et au sport, de la mobilité en ville, des soins à domicile ou en établissement.

Ce budget pour 2005 comporte assurément des dispositions positives, en particulier les 3 000 nouvelles places de CAT. C'est la promesse de nouvelles perspectives pour les jeunes, puisque nous savons que de nombreux adultes restent dans les instituts médico-éducatifs, faute de place dans les établissements spécialisés. Des jeunes de vingt-cinq ans bloquent ainsi, bien involontairement, ces structures d'accueil pour enfants. Les centres d'aide par le travail ont un rôle social exemplaire dans l'accompagnement des personnes handicapées dans la mesure où ils leur permettent de s'intégrer, par le travail, dans la société.

L'objectif atteint l'année dernière de 5 000 postes d'auxiliaires de vie est un effort, poursuivi dans ce budget. C'est un espoir, en particulier pour les personnes les plus lourdement handicapées.

Au-delà de ces dispositions, le budget pour 2005 doit concrétiser de manière significative la volonté du Gouvernement et des parlementaires d'améliorer les conditions de vie des personnes handicapées. Nous attendons beaucoup de la refonte de la loi de 1975 : une grande réforme du système d'allocation, la prise en compte de nouvelles formes de dépendance, la reconnaissance effective et le traitement du handicap physique, un accompagnement réel de la personne handicapée dans son projet de vie, un meilleur dépistage de l'autisme, sans oublier l'accessibilité, indispensable à l'intégration sociale. J'insisterai en particulier sur la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire. Les effectifs d'auxiliaires de vie scolaires doivent permettre de répondre à toutes les demandes des enfants et des familles, y compris par des auxiliaires de vie universitaires. C'est essentiel, car c'est en permettant la cohabitation entre enfants handicapés et enfants ordinaires que nous ferons naître chez ces derniers une autre perception du handicap.

Si l'intégration passe d'abord par le respect du droit à l'éducation et à la scolarisation, elle passe aussi par l'accès au monde du travail. C'est pourquoi il est primordial de mieux articuler les dispositifs de scolarisation, relevant essentiellement de l'éducation nationale, et les mesures visant à favoriser l'intégration professionnelle des personnes handicapées. Les ministères de l'emploi, de la santé et de l'éducation nationale doivent se rapprocher pour améliorer la transition entre les unités pédagogiques d'intégration et le monde du travail. Le jeune handicapé doit pouvoir multiplier les stages en entreprise, en milieu ordinaire ou adapté. Il convient de mieux satisfaire les besoins de formation qui s'expriment, car il n'est pas envisageable qu'un adolescent quitte le système scolaire sans projet professionnel valablement défini. Parce que l'entrée dans la vie professionnelle est un moment clef, faisons en sorte de prévenir toute rupture dans le parcours d'intégration. Outre les assistants de vie scolaires, la création d'un tutorat pour faciliter l'accès à l'entreprise des jeunes arrivés au terme de leur parcours scolaire peut être envisagée.

Nous avons donc face à nous une mission considérable. Il s'agit, en fait, non seulement de créer des droits nouveaux, mais surtout de leur donner un contenu cohérent, sans décevoir les attentes fortes des personnes handicapées. C'est le dernier budget que nous votons avant la loi refondatrice ; je veux croire qu'un nouveau temps commence, où la compassion et la générosité feront la part belle à l'espoir et à l'acceptation de la différence, à l'école, au travail, au cinéma, dans le bus, dans la rue... Parce que le monde est sans pitié pour les plus faibles, c'est notre rôle de mettre davantage de fraternité et de solidarité dans la société, chaque jour.

M. Jean-Luc Préel. Très bien !

Mme Muguette Jacquaint. Quel tandem !

M. le président. En effet.

La parole est à M. Jean-Marc Nesme.

M. Jean-Marc Nesme. Mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes propos concerneront essentiellement la famille.

Si les orientations de la politique familiale et le budget que vous nous proposez sont bons - et je le voterai -, j'aborderai aussi des problèmes de fond qui ne sont pas, à mon sens, suffisamment évoqués.

Vous apportez dans ce budget un plus grand soutien aux familles fragilisées et vous développez l'accueil des jeunes enfants en améliorant l'offre de garde et le recours à l'emploi à domicile pour les familles.

L'augmentation de 37 % des plafonds de ressources de la prime à la naissance et de l'allocation de base permet d'élargir le bénéfice de la PAJE à la grande majorité des familles. Toutefois, cette nouvelle aide pénalise les jeunes mères qui n'ont pas encore eu la possibilité d'intégrer un emploi, ou celles ayant moins de deux ans d'activité professionnelle. De même, les mères de famille nombreuse qui ont cessé leur activité pendant quelques années pour se consacrer à l'éducation de leurs enfants se voient pénalisées par ce nouveau dispositif. Le dispositif de l'APE leur était plus favorable. Je souhaiterais pour ma part, madame la ministre, que les conditions d'attribution du complément de libre choix d'activité puissent être revues afin de ne pas pénaliser ces mères de famille.

J'espère qu'après la rénovation très attendue du statut des assistants maternels et familiaux, que vous allez nous proposer, suivra également l'élaboration d'un véritable statut parental afin d'offrir une reconnaissance sociale et des droits sociaux aux mères de famille qui élèvent leurs enfants.

Les orientations de la politique familiale que vous nous proposez sont bonnes lorsque vous envisagez également de détecter la maltraitance chez l'adolescent, en proposant des lieux de soins et d'écoute spécialisés. Mais je pense qu'il serait nécessaire de prendre également les problèmes beaucoup plus en amont. Constater est une chose, prévenir en est une autre.

C'est dans cet esprit que j'ai déposé deux propositions de loi. L'une vise à favoriser le développement en milieu hospitalier de services de maternologie prenant en compte les difficultés de la relation mère-enfant. La seconde vise à lutter contre l'inceste, en donnant du crédit à la parole de l'enfant.

J'aborderai en premier lieu un grave problème de santé publique - et je m'adresse là également à M. le ministre - qui suscite des difficultés parentales et demeure encore trop peu pris en compte : il s'agit de la fréquence des difficultés maternelles qui se développent après l'accouchement et qui peuvent avoir des répercussions graves sur le développement de l'enfant. Selon de nombreuses études médicales, 10 % des enfants qui viennent au monde, même s'ils sont bien accouchés, naissent mal, parce que le lien mère-enfant ne se fait pas toujours naturellement,...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est vrai !

M. Jean-Marc Nesme. ...comme on aimerait le croire. Ces enfants peuvent présenter par la suite des maladies psychiques ou somatiques qui se traduiront, ensuite, par des troubles durables du comportement. De son côté, la femme, qui n'éprouve pour son bébé ni l'émotion ni la tendresse qu'une maman devrait vivre tout naturellement, souffre beaucoup, intérieurement, sans oser en parler. Ce désespoir maternel et cette souffrance psychique non détectés ou mal soignés peuvent avoir des répercussions graves sur le développement du bébé, puis de l'enfant.

Aujourd'hui, trop souvent, ces difficultés maternelles graves sont mal soignées car prises pour des dépressions. La dimension psychique de la maternité et de la naissance nécessite une approche médicale spécifique qui est la maternologie, telle qu'elle est expérimentée depuis près de vingt ans maintenant dans une unité hospitalière à Saint-Cyr-1'École avec des résultats très positifs. C'est pourquoi j'ai proposé le développement des consultations maternologiques dès le séjour en maternité et la création d'unités de maternologie dans chaque département.

Deuxième point important : la maltraitance de l'enfant au sein de sa famille reste un problème grave, principalement lorsqu'il s'agit de violences sexuelles. C'est aussi pourquoi j'ai souhaité déposer la proposition de loi visant à lutter contre l'inceste que j'ai mentionnée il y a quelques instants.

Les violences sexuelles commises sur des enfants par les membres de leur famille restent encore une violence invisible et encore taboue car elle concerne la sphère familiale privée. Actuellement, la parole de l'enfant n'est pas suffisamment prise en compte et le bénéfice du manque d'expertises profite bien souvent à l'adulte. Certaines fausses allégations d'abus sexuels ont créé un climat de suspicion autour de la parole de l'enfant. Ces quelques cas d'enfants manipulés et le comportement de certains experts incompétents représentent cependant une infime minorité. L'affaire d'Outreau ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt.

Aujourd'hui, la mise en place des unités médicales judiciaires en milieu hospitalier, principalement dans certains services pédiatriques, qui permettent de recueillir la parole de l'enfant dans les meilleures conditions, est une grande avancée. Malheureusement, ces unités pluridisciplinaires sont encore trop peu nombreuses sur le territoire national.

Il est urgent de poser clairement l'interdit de l'inceste et de le considérer comme un crime. C'est pourquoi j'ai proposé l'imprescriptibilité de tout crime de nature sexuelle commis contre les enfants.

Aujourd'hui, 73 % des signalements de mauvais traitements à caractère sexuel transmis aux autorités administratives par le SNATEM concernent des violences sexuelles commises sur des enfants par des membres de leur famille ou de leur entourage. Ces chiffres sont alarmants. On ne peut continuer à fermer les yeux sur cette réalité sans rien faire.

En matière de violence dont les enfants peuvent être directement ou indirectement les victimes, je sais que le Gouvernement souhaite prendre le problème à bras-le-corps. Mais il est des domaines où les pouvoirs publics restent silencieux et tout particulièrement quant au problème de l'accès libre, pour les mineurs, à la vente ou à la location de certains jeux vidéo, DVD ou cassettes vidéo très violents. Alors que les films sont soumis à l'avis de la Commission de classification et que, sous l'impulsion du CSA, les films télévisés sont soumis à un classement selon l'âge, les produits précités ne sont soumis à aucune procédure de classification. Comme il est largement établi que ces images violentes ont un impact négatif indiscutable sur le comportement de certains mineurs, je demande que soient soumis aux mêmes contrôles, avant leur mise en circulation sur le marché, les cassettes vidéo, jeux vidéo et DVD accessibles aux mineurs.

Mme la ministre de la famille et de l'enfance. Très bien !

M. Jean-Marc Nesme. Enfin, madame la ministre, les pouvoirs publics ont dernièrement participé au lancement d'une nouvelle chaîne de télévision à sensibilité homosexuelle, Pink TV, dont ils ont salué la création. Cette chaîne prévoit de passer un très grand nombre de films pornographiques, ce qui fera d'elle le plus important diffuseur de films classés X parmi les services de télévision conventionnés en France, après la chaîne pornographique XXL.

Vous le savez, j'ai déposé en mai 2004 une proposition de loi visant à permettre aux associations familiales d'accéder aux télévisions et aux radios du secteur public, au même titre que les syndicats, les associations de consommateurs et les partis politiques. À ce jour, je n'ai aucune assurance que ma proposition sera inscrite à l'ordre du jour de notre assemblée et je compte sur vous, madame la ministre, pour qu'elle le soit. Je n'ose croire que notre pays en soit arrivé à autoriser la création de Pink TV et, dans le même temps, à refuser aux associations familiales quelques minutes d'antenne sur les médias audiovisuels publics. Ces associations étant regroupées au sein d'une union nationale, leur nombre ne peut être invoqué comme prétexte à un refus.

Je vous remercie par avance de vos réponses aux différentes questions que je viens de poser et qui sont autant de préoccupations du mouvement familial français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre-Christophe Baguet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Louis-Joseph Manscour.

M. Louis-Joseph Manscour. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d'État, mes chers collègues, sans doute n'est-il pas inintéressant d'écouter un peu la voix de l'outre-mer. Vous connaissez les problèmes auxquels nous sommes confrontés et les difficultés qu'ils engendrent. Aussi, je suis très heureux de pouvoir vous faire part de mon appréciation sur le projet de budget de la santé, de la famille, des personnes âgées et des personnes handicapées pour 2005.

Il est vrai qu'il progresse de 0, 84 % par rapport à 2004, mais cette hausse minimale témoigne du faible intérêt que le Gouvernement porte aux questions touchant à la santé et à la protection sociale des Français, en métropole comme outre-mer. Lors de sa présentation à la presse, le 22 septembre dernier, vous avez déclaré, monsieur le ministre, qu'il était « satisfaisant eu égard aux contraintes globales qui pèsent sur le redressement des finances publiques ». On aura donc compris les priorités qui vous ont guidé dans sa préparation. Les logiques d'équilibre budgétaire l'ont visiblement emporté sur les impératifs de protection sociale.

En cela, votre projet de budget ne me semble pas répondre aux attentes légitimes des personnes fragiles et fragilisées par la maladie, le handicap ou l'âge.

Hélas, à sa lecture, les craintes suscitées par la décentralisation de nombreux outils des politiques sanitaires et sociales, comme celles exprimées par de nombreux parlementaires lors des débats sur différentes lois − loi relative à la politique de santé publique, loi relative à l'assurance maladie et loi créant une Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie − ne peuvent que se confirmer. À la vérité, ces dispositifs sont autant de signes que l'État se désengage du champ social et médico-social.

À cet égard, comment ne pas s'inquiéter de la baisse sensible des subventions d'équipement sanitaire, de la diminution des fonds affectés à l'Institut de veille sanitaire, de la nouvelle baisse des crédits en faveur de la lutte contre les toxicomanies ou des coupes franches pratiquées dans l'Aide médicale d'État ? De nombreux signes prouvent que l'État se désengage de sa mission fondamentale − pour ne pas dire première − de solidarité.

Regrettons, à ce titre, la baisse de 30 % de la dotation de l'État au fonds CMU complémentaire au moment même où la paupérisation s'accentue en France, et plus particulièrement outre-mer. Sur les 4 millions de bénéficiaires de la CMU complémentaire, plus de 600 000 résident dans les départements d'outre-mer, dont plus de 100 000 en Martinique. Imaginez les conséquences de cette baisse de la couverture maladie dans nos départements ultramarins.

À cela s'ajoute, après le vote du budget de l'outre-mer, la nuit dernière, la diminution de 3 % des crédits finançant la majoration du plafond CMU dans les DOM.

Le désengagement de l'État en matière de protection sociale, qui a déjà de graves conséquences en France métropolitaine, cause donc des dégâts bien plus considérables outre-mer, et singulièrement à la Martinique, où la situation sociale et économique ne cesse de se dégrader. Les données sociales actuelles de l'INSEE sont parlantes : en Martinique, une personne sur six vit en dessous du seuil de pauvreté, le taux de chômage se monte à 23 %, un salarié sur six ne touche que le SMIC, on compte 30 000 bénéficiaires du RMI, 38 000 familles monoparentales, des milliers de personnes âgées isolées, et on constate de graves problèmes de toxicomanie. Ces données devraient vous suffire, monsieur le ministre, pour comprendre la véritable crise sociale que peuvent provoquer, en Martinique, les restrictions budgétaires en matière de santé.

Les socioprofessionnels de la santé de la Martinique ne s'y trompent d'ailleurs pas, qui vous interpellent sur de nombreux dossiers. Les centres hospitaliers d'outre-mer accusent un retard de quinze ans sur les établissements de France métropolitaine − votre ministère le reconnaît −, alors qu'ils assurent les mêmes missions et doivent apporter aux populations insulaires les mêmes prestations en matière de santé.

Lors des négociations avec les parlementaires et l'Agence régionale de l'hospitalisation, votre ministère s'était engagé à accorder, dans le cadre de mesures de rattrapage, une augmentation de 6 % des charges d'exploitation des hôpitaux. Qu'en est-il aujourd'hui ?

En ce qui concerne les infrastructures, les établissements hospitaliers des Antilles ne répondent pas aux normes parasismiques, alors que nos îles sont situées dans une zone à haut risque. Dès lors, il convient que vous intégriez dans les dotations accordées aux hôpitaux les moyens de garantir la sécurité des personnels hospitaliers et des malades.

En conclusion, les moyens accordés à l'outre-mer par votre ministère sont insuffisants. Je relève en effet dans le jaune budgétaire que les crédits provenant du ministère de la santé et destinés aux DOM sont passés de 28,3 millions d'euros en 2004 à 22 millions pour 2005, soit une baisse de 22 %.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Mais non !

M. Louis-Joseph Manscour. L'outre-mer et plus particulièrement les Antilles françaises méritent bien mieux de la République, et attendent davantage de solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré.

M. Bernard Debré. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d'État, mes chers collègues, nous devons redonner toute sa place à la politique familiale : c'est un impératif national. Or la famille, élément fondateur de notre vie en société, est souvent oubliée aujourd'hui. Il faut donc redéfinir une grande politique familiale qui tienne compte des évolutions modernes.

Vous avez à gérer, madame la ministre de la famille et de l'enfance, un budget dépassant à peine 1 milliard d'euros. C'est insuffisant, mais est-ce véritablement de votre fait ? Je ne le crois pas, car je connais votre pugnacité, et je voterai bien entendu votre budget. N'avez-vous pas pris des mesures en faveur des familles fragilisées ? N'avez-vous pas retenu deux mesures de la Conférence de la famille 2004 ?

En tant que président de la Fondation Santé des étudiants de France, je suis très sensible à la situation de la jeunesse. À cet égard, la mise en place des premières maisons pour adolescents est une bonne mesure, et je souhaite, avec ma Fondation, en créer une à Paris.

Je suis favorable à un véritable pacte familial, car le dynamisme de notre pays passe par une politique familiale renouvelée et ambitieuse, disposant de moyens considérablement accrus, fondée sur l'accueil de l'enfant et sur les solidarités intergénérationnelles. À ce propos, j'ai quelques propositions à vous faire. Toutes procèdent de cette politique familiale tournée vers l'enfant et son parcours de vie, et seules de rares mesures fiscales ont une incidence financière.

Il faut commencer par établir une véritable égalité juridique entre les enfants nés hors mariage et dans le cadre du mariage. Il faut ensuite réaffirmer le droit de chaque enfant à connaître son origine, car, si nous n'y prenons garde, ce problème sera résolu malgré nous, par la généralisation des études génétiques.

Il faut aussi − et je sais que c'est votre combat − faciliter l'adoption en France. Pourquoi est-il si difficile d'adopter un Français ? Les parents doivent aller chercher des enfants à l'étranger, avec les risques que cela comporte.

Il est également impératif d'augmenter les capacités d'accueil des crèches, notamment à Paris. Je sais que vous menez aussi ce combat et que vous avez débloqué des crédits, mais est-ce suffisant ? À Paris, on compte 12 000 familles en attente d'une place en crèche. Comment accueillir des enfants pourtant désirés quand il est si difficile de trouver une place en crèche ? Je sais que vous avez agi, mais il faut faire davantage encore.

Après la réforme du divorce, il faut redéfinir l'autorité parentale et réaffirmer que nul ne peut faire obstacle à l'exercice par les mères et par les pères de leurs devoirs de parents. Il faut surtout rappeler que, pour son équilibre, un enfant a droit à avoir un père et une mère. Dans cet esprit, je suis contre, absolument contre, l'adoption d'enfants par les couples homosexuels. Les enfants risquent en effet de se déconstruire gravement au moment de l'adolescence. Avoir un enfant, ce n'est pas uniquement l'élever, le nourrir et l'éduquer. C'est beaucoup plus, transmettre le mystère de la vie, l'histoire de l'homme, l'espoir pour les générations futures dont il est le commencement ou le recommencement. Ainsi, un enfant, ce n'est pas simplement l'épanouissement de deux êtres qui s'aiment ou qui se sont aimés, c'est s'insérer soi-même dans l'éternité. Toutes les nations, toutes les religions honorent les ancêtres et fêtent les naissances. Je suis contre l'adoption des enfants par des couples homosexuels, pour des raisons fondamentales, éthiques et sociales. Pour assouvir une passion immédiate, aussi honorable soit-elle, une telle adoption briserait la longue chaîne fondamentale des générations et handicaperait socialement l'enfant.

Une grande politique fiscale s'impose également. Il faudrait, j'ose le dire, supprimer l'ISF, qui empêche les familles de constituer un patrimoine transmissible. Dans le même esprit, il faut encore diminuer les droits de succession, qui empêchent également cette transmission.

Enfin, est-il concevable que toutes les aides soient distribuées aussi facilement aux familles polygames ?

Vous conviendrez que ces pistes de réflexion ne coûteraient pas grand-chose à l'État. C'est pourquoi il faut les promouvoir. Madame la ministre, je compte sur vous pour le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez.

Mme Henriette Martinez. Madame la ministre de la famille, le budget que vous nous présentez est en augmentation comme le volet famille du PLFSS et les mesures fiscales en faveur des familles. On ne peut que s'en réjouir et vous en féliciter.

J'évoquerai deux aspects de votre politique qui me paraissent particulièrement importants.

Le premier est la mise en œuvre de mesures en faveur de l'adolescence, notamment grâce aux maisons de l'adolescent, mais aussi à l'entretien de santé personnalisé prévu à titre expérimental en classe de cinquième à partir de la rentrée 2005. Le suivi médical, mais surtout psychologique, des adolescents est primordial pour dépister la maltraitance et ce dispositif viendra compléter la politique de prévention de la maltraitance engagée par votre prédécesseur Christian Jacob. Il permettra ainsi de détecter les maltraitances et les adolescents en danger.

Vous connaissez mon intérêt pour ces questions. Aussi, soyez assurée que je suivrai avec attention les nouvelles mesures de protection de l'enfance que vous soumettrez prochainement, je l'espère, au Parlement.

Mais ne pensez-vous pas qu'une loi est nécessaire pour remettre à plat notre système de protection de l'enfance et définir clairement l'intérêt supérieur de l'enfant, tel qu'affirmé dans la loi Jacob mais toujours sacrifié à celui des adultes ? N'est-il est pas temps de revoir notre système de placement, qui crée chez l'enfant une instabilité matérielle et psychologique et peut conduire à des déficiences intellectuelles, tant la souffrance de certains est grande ? Ne faut-il pas reconnaître que l'enfant n'est pas la propriété de parents maltraitants et que, dans certains cas de maltraitance, l'éloignement, voire la coupure définitive avec la famille biologique, est indispensable à son équilibre ?

La France s'honorerait en votant une grande loi de protection de l'enfance car elle se doit de respecter en tout point la convention internationale des droits de l'enfant qu'elle a ratifiée.

Le second aspect de votre politique que je souhaite évoquer est celui de l'adoption. C'est une question qui vous est chère.

Vous avez doublé la prime à l'adoption, et c'est très bien. Mais ne pensez-vous pas que la question de l'adoption dépasse l'aspect matériel ? Le vrai problème n'est-il pas celui du manque d'enfants adoptables et des difficultés rencontrées en la matière par les familles, en France ou à l'étranger ?

Dans notre pays, 5 000 enfants ont été adoptés en 2003, dont 70 % étaient étrangers. Pourquoi y a-t-il si peu d'enfants adoptables en France ? Pourquoi le désintérêt parental prolongé ne conduit-il pas plus souvent au retrait de l'autorité parentale et à l'adoption ?

Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'État aux personnes âgées. C'est une vraie question.

Mme Henriette Martinez. Ce blocage n'est-il pas lié au précédent ?

Pourquoi est-il si difficile d'adopter à l'étranger ? La mission d'adoption internationale, qui devrait faciliter l'adoption, donne le sentiment de bloquer les procédures.

Qu'en est-il de l'adoption dans certains pays comme le Cambodge, où la France a interrompu les processus d'adoption en cours au motif de protéger les enfants dans l'attente de nouvelles procédures et conventions, alors que d'autres pays continuent à autoriser l'adoption dans ce pays ?

Vous le savez certainement, onze dossiers complets attendent au Cambodge que la France donne son autorisation. Cela signifie onze enfants encore à l'orphelinat, onze familles qui connaissent leur enfant et attendent de pouvoir le retrouver.

Savez-vous que les orphelinats du Cambodge ferment leurs portes, faute de moyens, et jettent à la rue des enfants qui deviennent la proie des pédophiles et trafiquants en tout genre ? Est-ce cela protéger les enfants ?

À l'approche de Noël, je pense à ces onze enfants parmi lesquels Sokun, trois ans et demi, qui attend de pouvoir rejoindre ses parents adoptifs dans les Hautes-Alpes où elle vivrait heureuse. Passera-t-elle encore ce Noël dans son orphelinat de misère, ou faudrait-il que ses parents portent un nom illustre pour aller la chercher ? C'est ce qu'ils se demandent aujourd'hui.

La position de la France, qui veut protéger les enfants, est noble mais elle aboutit à une situation inverse, et l'attitude de la mission d'adoption internationale va à l'encontre de la politique que vous conduisez sous l'autorité du Premier ministre de doubler le nombre des adoptions dans les prochaines années. Il y va là aussi, madame la ministre, de l'intérêt supérieur de l'enfant et je vous demande donc de débloquer ces situations insoutenables pour que le dénouement heureux du film de Bertrand Tavernier,...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Sans oublier celui de Patrice Lecomte !

Mme Henriette Martinez. ...à la projection duquel vous nous avez donné dernièrement le plaisir d'assister, ne reste pas une fiction mais devienne, pour ces enfants et leurs familles, une réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Dans un souci de cohérence, toutes les interventions des membres du Gouvernement n'auront lieu qu'à la reprise de nos travaux, ce soir à vingt et une heures trente.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler, dernière intervenante.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Madame, monsieur les ministres, mesdames les secrétaires d'État, mon intervention portera sur trois thèmes principaux, la santé, la formation des personnels et le handicap, avant de se conclure par une remarque politique, encore que le tout soit politique.

S'agissant de la santé, sujet sur lequel certains de mes collègues sont déjà intervenus, je vous poserai à nouveau, monsieur le ministre, un certain nombre de questions faute d'avoir obtenu des réponses.

Nous sommes tous d'accord pour reconnaître combien le plan cancer est essentiel. D'autres souffrances méritent cependant que l'on s'y intéresse aussi. À cet égard, nous avions lancé, Elisabeth Guigou, Bernard Kouchner et moi-même, le plan Alzheimer. Il avait été mis en sourdine. Vous l'avez repris et c'est heureux, encore que je n'aie pas trouvé trace des crédits nécessaires à sa mise en œuvre.

Il aurait cependant fallu établir un bilan de ce que nous avions fait, pour assurer solidement les bases de ce plan. Ce dernier est en effet, à l'instar du plan cancer ou d'autres plans sur lesquels je reviendrai, d'une grande complexité puisqu'il implique à la fois politiques sanitaires et politiques sociales, établissements médico-sociaux, établissements de santé et médecine de ville. Faut-il chercher ces crédits dans ceux des établissements médico-sociaux, des hôpitaux ou des réseaux de soin ? Nous ne disposons d'aucun élément alors que l'on sait combien il est difficile de mobiliser les compétences.

J'ai par ailleurs été très frappée par la démission de ce professeur d'université, chef du service de gériatrie du CHU de Dijon. Je l'avoue d'autant plus qu'en 1997, ma première prise de parole en qualité de députée avait été pour souligner que, s'il y avait une spécialité qui était abandonnée dans nos hôpitaux, ce n'était pas la neurologie, dont relève la maladie d'Alzheimer, mais bien la gériatrie. Je garde un souvenir poignant de mes visites dans certains CHU.

Si, à mon arrivée au gouvernement, j'ai voulu travailler avec Bernard Kouchner à la mise en place d'un plan en faveur de la gériatrie, c'est pour que soit enfin reconnue la dignité des médecins responsables de ces services.

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Bien sûr !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Or nous n'avons aucun bilan du plan gériatrie. Nous ne savons rien sur la façon dont les ARH, les directeurs d'hôpitaux et les présidents de CME l'appliquent.

Soyez en tout cas assurés que je continuerai à apporter fermement mon soutien au monde de la gériatrie.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Très bien !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. S'il ne faut pas médicaliser à l'excès la vie des personnes âgées, celles qui sont malades doivent être prises en charge correctement.

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Absolument !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. La formation de l'ensemble des acteurs de la santé doit être également prise en compte. Peut-être ai-je eu tort ces deux dernières années de ne pas le dire publiquement. En tout cas, monsieur le ministre, l'abandon du plan gériatrie par le gouvernement auquel vous appartenez, est grave.

Toujours dans le cadre de la politique de la santé, je relève la diminution des crédits en matière de lutte contre la toxicomanie, constat qui me conduit d'ailleurs à m'interroger plus généralement sur l'organisation sanitaire en France. Ces crédits avaient déjà été fortement réduits l'année dernière ; finalement, les économies sont systématiquement réalisées non sur la médecine « technique » mais sur cette médecine complexe dite « humaine ». Il faut absolument reprendre ce que nous avions lancé avec Bernard Kouchner.

Je déplore également l'abandon de toute politique en faveur des travailleurs sociaux et du travail social.

La loi de décentralisation confie le financement des travailleurs sociaux aux régions mais l'État conserve la responsabilité du schéma national des travailleurs sociaux. Or rien n'a été fait ! Le Conseil économique et social a pourtant rendu un travail d'une grande qualité qui insiste sur les deux enjeux du travail social : la préparation des départs à la retraite et le manque de personnels formés, faute de crédits. Ce secteur est celui où l'on trouve le plus de « faisant fonction », c'est-à-dire de personnels qui assument des responsabilités sans en avoir la qualification.

Le Gouvernement nous proposera un plan de cohésion sociale...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Un plan remarquable !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ...qui a déjà été voté au Sénat. Or rien dans ce plan n'est consacré au travail social et à la formation des travailleurs sociaux.

Dans le champ sanitaire et social, ce sont moins les dispositifs qui posent problème que leur animation. L'enjeu de la réussite du travail social tient à la qualité de la formation, qu'il s'agisse de s'occuper des personnes handicapées, des personnes âgées, des exclus ou des personnes souffrant de maladies chroniques très lourdes comme le diabète. Vous ne répondez pas à cet enjeu et c'est très grave.

Je m'étais intéressée aussi, quand j'étais au gouvernement, à un sujet qui, manifestement, a fait l'objet de mesures sans que j'en perçoive cependant l'application concrète, je veux parler de la maltraitance des personnes âgées dans nos structures. La presse s'en est fait l'écho à propos de problèmes rencontrés dans certaines régions.

Il faudrait parfois s'appuyer sur les rapports des parlementaires UMP, que ce soit celui de M. Leonetti sur les soins palliatifs et leur diminution, ou celui de M. Morange, qui tirent la sonnette d'alarme quant à la formation des travailleurs sociaux. Ils font référence au rapport que j'avais commandé au professeur Debout sur la maltraitance, et qui avait conclu que la lutte contre la maltraitance des personnes âgées, à domicile comme en hébergement, passait par la formation des personnels. Aucun crédit n'est prévu, madame la ministre, mesdames les secrétaires d'État, dans ce secteur que vous suivez plus directement. Comment, dans ces conditions, voulez-vous accompagner de façon digne les travailleurs sociaux ?

Vous voyez combien la décentralisation, qui rend les conseils généraux en partie responsables du champ social, et la négligence de ce champ d'action au niveau national sont potentiellement très dangereuses.

Ma troisième remarque porte sur l'AAH, l'allocation pour adultes handicapés. Je serai brève car nous aurons l'occasion d'en reparler quand le projet de loi sur les personnes handicapées nous reviendra en deuxième lecture.

La comparaison entre le montant de l'AAH et les autres minima a été faite par quelqu'un de ma circonscription - un courrier vous a été adressé, je crois, madame Montchamp, mais je ne sais pas si vous lui avez répondu. Cette étude montre clairement que si un dispositif de rattrapage n'est pas rapidement mis en place, le pouvoir d'achat des handicapés n'est pas garanti. Il faudrait revaloriser l'allocation de 8 % maintenant et prévoir pour la suite une indexation sur le coût de la vie. C'est à cette condition seulement que le niveau de vie des handicapés peut être maintenu.

Par ailleurs, j'en parle parce que j'ai été suffisamment attaquée lors de la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie, vous êtes en train de mettre en place une prestation de droit à compensation sans avoir effectué une quelconque étude d'impact, sans avoir élaboré un quelconque dispositif d'évaluation du handicap et de la réponse au handicap et sans avoir prévu le moindre financement. Pour les conseils généraux, ce dispositif sera une lourde charge et, pour l'ensemble de la population, un véritable leurre.

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Mais non !

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Ce n'est pas sérieux ! Vous faites mieux d'habitude, madame Guinchard-Kunstler !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je terminerai par une observation un peu plus politique.

En matière de santé, la continuité de l'action est essentielle pour les Françaises et les Français. J'ai été très marquée, monsieur le ministre, par ce que vous avez fait avec le plan Alzheimer. Au moins avez-vous reconnu plusieurs fois, ici même, que nous avions lancé le travail. Mais je voudrais vous donner un exemple de votre habileté à communiquer.

J'avais engagé, avec Bernard Kouchner, un travail sur la reconnaissance des hôpitaux locaux. La circulaire était prête mais ni Bernard Kouchner ni moi n'avons eu le temps de la signer. C'est Jean-François Mattei qui l'a signée. Eh bien, c'est vous qui en avez assuré la publicité.

M. Édouard Landrain. Et alors ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est une bonne répartition des tâches ! (Sourires.)

M. Édouard Landrain. C'est normal !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. L'enjeu ne relève pas de la communication, monsieur le ministre.

M. le président. Madame Guinchard-Kunstler, ne répondez pas !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Ce n'est pas un problème de communication, c'est un problème de mobilisation de fonds, et si cette mobilisation est tirée à hue et à dia par des logiques politiques divergentes, nous ne nous en sortirons pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

    3

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005, n° 1800 :

Rapport, n° 1863, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Santé, famille, personnes âgées et personnes handicapées : articles 77 à 79 (suite) :

Rapport spécial, n° 1863 annexe 37, de M. Gérard Bapt, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Santé :

Avis, n° 1864 tome XI, de Mme Bérengère Poletti, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Personnes handicapées :

Avis, n° 1864 tome XII, de Mme Geneviève Lévy, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot